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---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
b54bd54d-dfc2-4e4a-8cb0-9b3c4aeef483 | En fait :
A.
Par jugement du 23 juillet 2015, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a constaté que P._ s’est rendu coupable de complicité d’escroquerie et d’empêchement d’accomplir un acte officiel (I), l'a condamné à 15 mois de peine privative de liberté, dont 8 mois avec sursis pendant 4 ans, ainsi qu’à une peine pécuniaire de 10 jours-amende à 30 fr. le jour, sous déduction de 263 jours de détention avant jugement (II), a constaté que P._ a subi 23 jours de détention dans des conditions de détention provisoire illicites et a ordonné que 12 jours de détention soient déduits de la partie ferme de la peine fixée au chiffre II ci-dessus à titre de réparation du tort moral (III), a ordonné la relaxe immédiate de P._, pour autant qu’il ne soit pas détenu pour d’autres motifs (IV), a constaté que F._ s’est rendu coupable de complicité d’escroquerie, d’empêchement d’accomplir un acte officiel et de violation simple des règles de la circulation routière (V), l’a condamné à 15 mois de peine privative de liberté, dont 8 mois avec sursis pendant 4 ans, ainsi qu’à une peine pécuniaire de 10 jours-amende à 30 fr. le jour et à une amende de 600 fr., convertible en 6 jours de peine privative de liberté en cas de non-paiement fautif, sous déduction de 263 jours de détention avant jugement (VI), a constaté que F._ a subi 22 jours de détention dans des conditions de détention provisoires illicites et ordonné que 11 jours de détention soient déduits de la partie ferme de la peine fixée au chiffre VI ci-dessus à titre de réparation du tort moral (VII), a ordonné la relaxe immédiate de F._, pour autant qu’il ne soit pas détenu pour d’autres motifs (VIII), a statué sur les séquestres (IX à XII) et sur les frais (XIII à XV).
B.
Le 23 juillet 2015, le Ministère public a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d’appel du 3 septembre 2015, il a conclu à la modification des chiffres I, II, V, VI et X du jugement attaqué en ce sens que P._ et F._ soient condamnés pour escroquerie à une peine privative de liberté de 24 mois, dont 12 mois avec sursis pendant 4 ans, et à ce que la confiscation et la dévolution à l’Etat du véhicule BMW soient ordonnées.
Le 29 juillet 2015, F._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d’appel du 10 septembre 2015, il a conclu, avec suite de frais et dépens, à sa libération du chef d’accusation de complicité d’escroquerie, à sa condamnation à une peine maximale de 60 jours-amende à 30 fr. le jour avec sursis pendant 2 ans et à ce que la part des frais de procédure mis à sa charge n’excède pas 10%.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1
Ressortissant de République de Bosnie, P._ est né le 24 juin 1992 à Zagreb. Ses parents sont tous deux décédés en 1995 et il a un frère qu’il n’a pas connu. Il n’est pas allé à l’école et a commencé à travailler à l’âge de 8 ans dans la vente de textiles sur des marchés avec sa tante paternelle, qui s’est occupée de lui au décès de ses parents. Il a continué à travailler avec sa famille jusqu’à son interpellation. Il a une amie, avec laquelle il se serait marié de manière coutumière et a eu trois enfants. Lorsqu'il a pu obtenir une pièce d'identité en 2012, il a quitté Zagreb avec sa famille pour s'installer en Hongrie où il aurait hérité une maison de son père. Dans ce pays, il n'aurait pas travaillé et ce serait sa femme qui aurait subvenu aux besoins du ménage en travaillant dans le domaine du textile.
Les casiers judiciaires suisse et autrichien du prévenu ne comportent aucune inscription.
Dans le cadre de la présente affaire, P._ a été détenu provisoirement du 3 novembre 2014 au 7 août 2015, puis extradé vers l’Autriche.
1.2
F._ est né le 13 janvier 1992 à Gyor, en Hongrie, pays dont il est ressortissant. Il a deux sœurs et ses parents travaillent en qualité de restaurateur en Hongrie. Il a suivi l'école obligatoire jusqu'en 2011-2012, puis a débuté une école de football professionnel. Il a arrêté ce sport à ses 21 ans. Il a travaillé par la suite en qualité de serveur dans le restaurant familial jusqu’à son incarcération, établissement qui serait aujourd'hui fermé. Il avait une petite amie qui était, selon lui, enceinte au moment de son arrestation.
Les casiers judiciaires suisse, italien et autrichien du prévenu ne comportent aucune inscription.
Dans le cadre de la présente affaire, F._ a été détenu provisoirement du 3 novembre 2014 au 24 juillet 2015.
2.
Le 3 novembre 2014, W._, né le 2 décembre 1930, a reçu plusieurs appels téléphoniques d'un inconnu se faisant passer pour son neveu. Le véritable neveu du plaignant vit en Angleterre et traversait une période difficile à la suite d’un divorce. Le faux neveu a prétexté se trouver en Allemagne et avoir besoin d'une aide financière de 74'000 fr. pour l'achat d'un bien immobilier. Après plusieurs appels du faux neveu, le plaignant s'est rendu dans une banque [...] à Lausanne, où il a retiré 75'000 fr. en liquide, persuadé qu'il avait affaire à son véritable neveu. Dans l'après-midi, le faux neveu a donné plusieurs rendez-vous à W._, d'abord au cabinet d'un présumé notaire, puis dans un café. Déclarant finalement qu'il ne pouvait pas venir à Lausanne, le faux neveu a demandé au plaignant de remettre l'argent à un homme se trouvant à Lausanne, à l'intersection des rues de [...] et de [...]. Le contact désigné par le faux neveu était P._, lequel recevait, avec son comparse F._, des instructions par téléphone d’un ou plusieurs autres comparses qui n’ont pas pu être identifiés. A l’endroit précité, le plaignant a été approché par P._ et lui a remis la somme de 74'000 fr. dans une enveloppe. Après avoir pris l’enveloppe, le prévenu est parti en courant.
Une assistante de police qui se trouvait à cet endroit a remarqué des allées et venues d’un véhicule BMW noir immatriculé [...] circulant à faible allure, conduit par F._ qui attendait son comparse. L’assistante de police a alerté ses collègues et une patrouille de Police-secours est intervenue pour intercepter le véhicule. Le conducteur, F._, et son passager, P._, ont pris la fuite. Ils ont pu être interpellés à la rue [...] après avoir franchi une ligne de sécurité. La fouille du véhicule a permis la découverte d'une liasse de 52 billets de 1'000 fr. dissimulée sous le tapis et de 22'000 fr. dans le caleçon de P._.
W._ a déposé plainte le 3 novembre 2014. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels de F._ et du Ministère public sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L’appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d’appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L’appel tend à la répétition de l’examen des faits et au prononcé d’un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L’immédiateté des preuves ne s’impose toutefois pas en instance d’appel. Selon l’art. 389 al. 1 CPP, la procédure d’appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d’appel administre, d’office ou à la demande d’une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 consid. 3.1).
3.
Il convient en premier lieu d’examiner la participation de F._ et P._ à l’escroquerie au neveu perpétrée sur W._.
3.1
F._ conteste s'est rendu coupable de complicité d'escroquerie. Il fait valoir que ce ne serait pas lui qui recevait les instructions par téléphone, mais P._, qui les lui transmettait ensuite, que son rôle aurait seulement consisté à faire le chauffeur pour le compte de P._ et que ce serait ce dernier qui lui aurait proposé un certain montant pour qu'il le conduise en Suisse. Selon l'appelant, tous ces éléments seraient insuffisants pour en faire un complice.
3.1.1
Aux termes de l’art. 146 CP, se rend coupable d’escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l’aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers.
Le complice est un participant secondaire qui prête assistance pour commettre un crime ou un délit (art. 25 CP). La complicité suppose que le participant apporte à l'auteur principal une contribution causale à la réalisation de l'infraction, de telle sorte que les événements ne se seraient pas déroulés de la même manière sans cette assistance. Il n'est pas nécessaire que celle-ci soit une condition
sine qua non
de la réalisation de l'infraction; il suffit qu'elle accroisse les chances de succès de l'acte principal
(TF 6B_591/2013 du 22 octobre 2014 consid. 5.1.2 et la référence citée à l’ATF 132 IV 49 consid. 1.1).
L'assistance prêtée par le complice peut être matérielle, intellectuelle ou consister en une simple abstention. La complicité par omission suppose toutefois une obligation juridique d'agir, autrement dit une position de garant (TF 6B_591/2013 précité consid. 5.1.2). N'importe quelle obligation juridique ne suffit pas. Il faut que l'auteur se soit trouvé dans une situation qui l'obligeait à ce point à protéger un bien déterminé contre des dangers indéterminés (devoir de protection) ou à empêcher la réalisation de risques connus auxquels des biens indéterminés étaient exposés (devoir de surveillance) que son omission peut être assimilée au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (TF 6B_696/2012 et 6B_700/2012 du 8 mars 2013 consid. 7.1 et les références citées).
Subjectivement, il faut que le complice sache ou se rende compte qu'il apporte son concours à un acte délictueux déterminé et qu'il le veuille ou l'accepte. A cet égard, il suffit qu'il connaisse les principaux traits de l'activité délictueuse de l'auteur, lequel doit donc avoir pris la décision de l'acte. Le dol éventuel suffit (TF 6B_591/2013 précité consid. 5.1.2).
3.1.2
En l'espèce, l'appelant a fourni tout au long de l'enquête des explications à géométrie variable sur les circonstances de sa présence en Suisse. Il a d'abord soutenu qu'il avait quitté la Hongrie avec des amis environ une semaine avant les faits pour aller voir un match de football à Milan et qu'il avait rencontré son comparse avec sa famille à Côme où il lui avait demandé de le prendre en charge pour aller voir un véhicule en Suisse (PV aud. 3, pp. 2s. ; PV aud. 4, p. 2), avant d'expliquer aux débats qu'il était bien parti de Hongrie en compagnie de P._ (jgt., p. 7). Il ne fait aucun doute que l'appelant savait que le parcours qu'il entreprenait avec son comparse n'avait pas pour but d'aller visiter des garages pour l’achat d’un nouveau véhicule. P._ n'avait, d'une part, pas de permis de conduire, de sorte qu'on se demande comment un deuxième véhicule aurait pu être ramené en Hongrie. D'autre part, on discerne mal l'intérêt économique d'acheter une voiture en Suisse, pays où le prix des véhicules est notoirement élevé. Enfin, un tel but ne justifiait pas d'être continuellement guidé par téléphone, ni d'être en premier lieu acheminé à Bâle pour se rendre finalement à Lausanne.
Même s'il est vrai que seul P._ a reçu des instructions sur le parcours tout au long du voyage en direction de la Suisse, F._ était présent. Il ne pouvait ainsi que comprendre que lui et son acolyte étaient dirigés par téléphone.
Enfin, F._ a pris la fuite lorsque la police a voulu l'interpeller, ce qui signifie bien qu'il avait dans son esprit une raison de se soustraire aux forces de l'ordre.
Partant, en conduisant P._, l'appelant savait qu'il prêtait main à un mauvais coup, même s'il est possible qu'il n'en connaissait pas tous les tenants et aboutissants. L'aide apportée à la réalisation de l'infraction a consisté à véhiculer le récipiendaire des fonds. L'assistance a donc été effective et prêtée en connaissance de cause, de sorte que c’est à juste titre que la complicité a été retenue. Le grief de l’appelant s’avère ainsi mal fondé.
3.2
Le Ministère public fait grief aux premiers juges d'avoir condamné P._ et F._ pour complicité d'escroquerie et non en qualité de coauteurs. Selon lui, leur contribution a été essentielle à l'exécution de l'escroquerie dont a été victime le plaignant, les prévenus n'ayant pas seulement prêté assistance, mais s'étant bien associés dès le départ à l'entreprise criminelle.
3.2.1
Est un coauteur celui qui collabore intentionnellement et de manière déterminante avec d’autres personnes dans la décision de commettre une infraction, dans son organisation ou son exécution, au point d’apparaître comme l’un des participants principaux. La coactivité suppose donc une décision commune soit expresse, soit résultant d’actes concluants. Le coauteur doit réellement s’associer soit à la décision, soit à la réalisation, dans des conditions et dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal. Il faut que le coauteur ait une certaine maîtrise des opérations et que son rôle soit plus ou moins indispensable (ATF 120 IV 17 consid. 2d). Ainsi, la contribution du participant principal est essentielle au point que l’exécution ou la non-exécution de l’infraction considérée en dépende (ATF 120 IV 265 consid. 2c).
La coactivité suppose une décision commune, qui ne doit cependant pas obligatoirement être expresse, mais peut aussi résulter d'actes concluants, le dol éventuel quant au résultat étant suffisant. Il n'est pas nécessaire que le coauteur participe à la conception du projet ; il peut y adhérer ultérieurement. Il n'est pas non plus nécessaire que l'acte soit prémédité ; le coauteur peut s'y associer en cours d'exécution. Ce qui est déterminant c'est que le coauteur se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.1; ATF 130 IV 58 consid. 9.2.1; ATF 125 IV 134 consid. 3a).
3.2.2
En l'espèce, le fait que les prévenus ne se soient posés aucune question et se soient associés afin de prendre une part active au processus ne donne aucune indication sur le critère déterminant qu’est l'emprise sur le cours des événements. Néanmoins, le reproche fait aux prévenus d'obéir aux instructions sans se poser de questions laisse plutôt entrevoir une faible maîtrise du déroulement des opérations. Même s'il est vrai que les prévenus pouvaient de leur propre chef mettre un terme à l'activité délictueuse, la définition du complice n'implique pas que l'auteur agisse sous l'emprise ou la contrainte de l'auteur principal, de sorte que l'argument du Ministère public ne convainc pas. Certes les prévenus ont accompli, en allant chercher l'argent, un acte causal à la réalisation de l'escroquerie. Cependant, on ne peut affirmer, sur la base du dossier, qu'ils ont disposé de la maîtrise fonctionnelle des opérations d'un plan commun, comme cela serait le cas de coauteurs. Ils n’avaient au contraire aucun contrôle sur le déroulement des événements. A l'instar des premiers juges, on retiendra que les prévenus se sont fait continuellement guider tout le long du chemin les conduisant en Suisse jusqu'au retrait de l'enveloppe contenant l'argent. Ils n'ont pas choisi la victime, ne l'ont pas appelée, n'ont pas fixé le montant à remettre ni le lieu de rendez-vous.
Au final, les prévenus n’ont rien organisé du tout dans cette affaire, si bien qu’ils ont agi comme complices et non comme coauteurs.
3.3
En définitive, les appels de F._ et du Ministère public doivent être rejetés sur ce point. C'est donc à juste titre que le Tribunal correctionnel a reconnu P._ et F._ coupables de complicité d'escroquerie.
4.
F._ critique sa peine qu'il estime trop sévère, P._ et lui ne pouvant pas être traités sur le même pied d'égalité.
Le Ministère public a quant à lui conclu, pour les deux prévenus, à une peine privative de liberté de 24 mois, dont 12 mois avec sursis pendant 4 ans.
4.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 ; ATF 129 IV 6 consid. 6.1).
S’il est appelé à juger les coauteurs d’une même infraction ou deux coaccusés ayant participé ensemble au même complexe de faits délictueux, le juge est tenu de veiller à ce que la différence des peines infligées aux deux intéressés soit justifiée par une différence dans les circonstances personnelles en fonction desquelles, conformément à l’art. 47 CP, la peine doit être individualisée (ATF 135 IV 191 consid. 3.2 ; ATF 121 IV 202 consid. 2d).
4.2
En l'espèce, à l'instar des premiers juges, il y a lieu de retenir que la culpabilité de F._ et P._ est identique. Ils connaissaient tous deux le but délictueux du périple qu'ils ont entrepris ensemble. Le premier conduisait et le second a guidé ainsi qu’approché le plaignant pour récupérer l'argent. Ils ont agi ensemble dans un but commun. Peu importe finalement qui recevait les téléphones et la différence des montants que chacun devait recevoir pour leur participation. Ce qui est déterminant dans le cas d’espèce, c'est la décision prise ensemble par les prévenus d'obéir aux instructions données par téléphone pour permettre la réalisation de l'objectif criminel. Dans ces circonstances, on ne voit pas en quoi l'appelant F._ serait moins impliqué que son comparse et mériterait une peine plus clémente. Le grief de ce dernier doit par conséquent être rejeté.
Quant à la quotité de la peine, seule la complicité d'escroquerie étant retenue, la peine privative de liberté de 15 mois prononcée par le Tribunal correctionnel sanctionne adéquatement la culpabilité des prévenus et doit être confirmée. Il en va de même du sursis partiel et du délai d'épreuve octroyés.
Le moyen soulevé par le Ministère public doit ainsi être également rejeté.
5.
Le Ministère public conclut à la confiscation et la dévolution à l'Etat du véhicule séquestré.
5.1
Selon l'art. 69 al. 1 CP, alors même qu'aucune personne déterminée n'est punissable, le juge prononce la confiscation des objets qui ont servi ou devaient servir à commettre une infraction ou qui sont le produit d'une infraction, si ces objets compromettent la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public.
Il ne suffit ainsi pas qu'un objet ait servi ou devait servir à commettre un crime ou un délit pour en justifier la confiscation; encore faut-il qu'il compromette la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public (ATF 116 IV 117 consid. 2a). Le danger créé ou révélé par l'infraction doit ainsi subsister; il peut être inhérent à l'objet lui-même ou ressortir de l'usage que son détenteur est susceptible d'en faire. On ne saurait émettre des exigences élevées en ce qui concerne ce danger; il suffit qu’il soit vraisemblable qu’il y ait un danger si l’objet n’est pas confisqué en mains de l’ayant droit (ATF 127 IV 203 consid. 7b; ATF 124 IV 121 consid. 2a et c; ATF 117 IV 345 consid. 2a; ATF 116 IV 117 consid. 2a et les arrêts cités).
5.2
En l'espèce, la vraisemblance qu’il y ait un danger si le véhicule n'était pas confisqué n'est pas démontrée. Elle est même contredite par l'appréciation selon laquelle un pronostic totalement défavorable ne pouvait être posé et qui a conduit à l'octroi d'un sursis partiel que le Ministère public ne remet du reste pas en cause. En outre, sous l'angle du principe de la proportionnalité, la confiscation n'est pas justifiée. En effet, l'intervention dans le droit de propriété de F._ et de sa mère, au nom de qui le véhicule est immatriculé, est considérable. A l'inverse, l’aptitude de la confiscation à préserver la sécurité publique est faible.
Par conséquent, c'est à bon droit que les premiers juges ont ordonné la restitution du véhicule BMW. Le grief du Ministère public doit ainsi être rejeté.
6.
F._ conclut à l’allocation d’une indemnité pour tort moral.
6.1
En vertu de l'art. 399 al. 4 CPP, quiconque attaque seulement certaines parties du jugement est tenu d'indiquer dans la déclaration d'appel, de manière définitive, sur quelles parties porte l'appel, à savoir notamment (d) les prétentions civiles ou certaines d'entre elles; (f) les frais, les indemnités et la réparation du tort moral.
La déclaration d'appel fixe de manière définitive l'objet de l'appel, en ce sens que l'appelant ne peut plus élargir sa déclaration d'appel à d'autres points au-delà du délai de vingt jours pour déposer la déclaration d'appel (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 21 ad art. 399 CPP).
6.2
En l’espèce, à l’audience d’appel, F._ a requis une indemnité à titre de réparation du tort moral pour les 270 jours de détention subis dans des conditions illicites. Tardive, cette conclusion doit être déclarée irrecevable. Vu le sort de l’appel, celle-ci aurait de toute manière été rejetée.
7.
Au vu du sort de l'appel, la conclusion de F._ portant sur la répartition des frais de première instance deviennent sans objet.
8.
En définitive, les appels de F._ et du Ministère public doivent être rejetés et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel, constitués de l’émolument d’arrêt, par 1’940 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), ainsi que de l'indemnité allouée au défenseur d'office de F._, par 1'933 fr. 20, sont mis par moitié à la charge de ce dernier, le solde, y compris l’indemnité allouée au défenseur d’office de P._, par 669 fr. 60, étant laissé à la charge de l’Etat.
F._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat la moitié de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b56f7c0e-c4e2-4d7f-8213-a529e9391a98 | En fait :
A.
Par jugement du 25 avril 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Côte a constaté que X._ s'est rendue coupable d'homicide par négligence (I), a condamné X._ à 120 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr. (II), a suspendu l'exécution de la peine et fixé à la condamnée un délai d'épreuve de deux ans (III), a condamné X._ à une amende de 720 fr., et dit qu'à défaut de paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution sera de 24 jours (IV), a dit que X._ est la débitrice de A.T._, B.T._, C.T._ et E.T._, de la somme de 29'000 fr., et de A.L._, B.L._ et C.L._ de la somme de 21'000 fr., valeurs échues, à titre de dommages-intérêts (V), a alloué à A.T._ et B.T._, A.L._ et B.L._ un montant de 50'000 fr. chacun et à C.T._, E.T._ et à C.L._ un montant de 20'000 fr. chacun, à titre d'indemnités pour tort moral (VI), a alloué à A.T._, B.T._, C.T._ et E.T._, des dépens pénaux à hauteur de 5'200 fr. et à A.L._, B.L._ et C.L._ à hauteur de 9'000 fr. (VII), a donné acte de ses réserves civiles à E.L_ (VIII) et a mis à la charge de X._, les frais de la cause, arrêtés à 10'064 fr. 80 (IX).
B.
Le 3 mai 2013, X._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel du 27 mai 2013, complétée par un mémoire motivé du 10 juillet 2013, elle a conclu à la modification des chiffres V et VI du jugement en ce sens qu’elle est la débitrice de A.T._, B.T._, C.T._ et E.T._ de la somme de 17'700 fr. 15, et de A.L._, B.L._ et C.L._ de la somme de 12'979 fr. 20, valeurs échues, à titre de dommages-intérêts et qu’il est alloué à A.T._ et B.T._, A.L._ et B.L._ un montant de 25'000 fr. chacun, à C.T._ et E.T._ un montant de 8'000 fr. chacun, et à C.L._ un montant de 5'000 fr., à titre d’indemnités pour tort moral.
Par avis du 25 juin 2013, la Présidente de céans a informé les parties que l’appel serait traité en procédure écrite.
Par courrier du 22 juillet 2013, le Ministère public a indiqué qu’il n’entendait pas déposer de déterminations.
Par mémoire du 29 août 2013, A.T._, B.T._, C.T._ et E.T._ (ci-après également : la famille T._) ont conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.
Par déterminations du 2 septembre 2013, A.L._, B.L._ et C.L._ (ci-après également : la famille L_) ont conclu, avec dépens, au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.
Par mémoire complémentaire du 23 septembre 2013, X._ a, sous suite de frais et dépens, confirmé les conclusions prises dans son mémoire d’appel du 10 juillet 2013.
Par déterminations complémentaires du 11 novembre 2013, A.T._. B.T._, C.T._ et E.T._ ont confirmé les conclusions prises le 29 août 2013.
Par déterminations complémentaires du 11 novembre 2013, A.L._, B.L._ et C.L._ ont confirmé les conclusions prises le 2 septembre 2013. Me Longchamp, conseil de la famille L_, a en outre chiffré ses frais de défense pour la procédure d’appel à 5'450 fr. 75.
Par courrier du 13 novembre 2013 précisé le 17 décembre 2013, Me Pelot, conseil de la famille T._, a requis, sur la base d'une liste d'opérations, un montant de 5'256 fr. 36, débours et TVA compris au titre d'indemnité de
l'art. 433 CPP pour la procédure d'appel.
Le 16 décembre 2013, X._ a conclu au rejet des indemnités demandées par les parties plaignantes au titre de l'art. 433 CPP et a sollicité l’allocation de dépens sur la base d’une liste détaillée des opérations de son conseil.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
X._, célibataire, est née le 9 septembre 1988 à Rome. Titulaire d'un diplôme IATA obtenu en 2006, la prévenue a travaillé pendant six ans au restaurant [...]. Au moment du premier jugement, elle venait d'être engagée chez [...] – où elle était encore en période d'essai – pour un salaire mensuel de 4'200 fr. brut. Elle participe à hauteur de 800 fr. par mois au loyer et ses primes d'assurance-maladie s’élève à 513 fr. 50. Elle est titulaire d'un abonnement général CFF 2
ème
classe.
Son casier judiciaire est vierge.
2.
2.1
A [...], sur la route secondaire [...], peu avant le carrefour de [...], le 15 mars 2012, vers 14h50, X._, qui circulait au volant de son véhicule en direction de [...] à une vitesse de 60 à 70 km/h, a un court instant détourné son regard de la route pour augmenter le volume de son autoradio. Pour ce faire, elle s'est penchée sur la droite et a porté son regard sur cet appareil. Son véhicule a dès lors dévié vers le centre de la chaussée et a empiété en grande partie sur la voie de circulation opposée. Lorsque la prévenue a relevé la tête et a regardé à nouveau la route, elle a vu le motocycle de D.T._, né le 27 décembre 1991, en face d'elle, à courte distance, qui circulait normalement et qui transportait une passagère, soit D.L_, née le 12 novembre 1991. D.T._ a freiné énergiquement afin d'éviter la collision. Malgré ce freinage d'urgence, X._ a heurté, avec l'avant de son véhicule, l'avant du motocycle de D.T._. Suite au choc, D.L_ a été désarçonnée et, après avoir percuté l'avant du véhicule de la prévenue, a été projetée sur la gauche et est retombée en partie sur un regard en béton où elle est restée inanimée. Quant à D.T._, il est demeuré sur son motocycle, qui s'est renversé sur le côté gauche et s'est immobilisé devant le véhicule de X._, et s'est retrouvé sur la chaussée, le pied gauche partiellement coincé sous son motocycle. D.L_ est décédée sur les lieux de l'accident. D.T._, grièvement blessé, a été héliporté au CHUV, où il est décédé des suites de ses blessures, à 17h15.
2.2
A.L._ et B.L._ sont les parents de D.L_. Ils sont divorcés depuis 2001. Au moment des faits qui ont entraîné son décès, D.L_ vivait à [...] auprès de son père et de son demi-frère C.L._.
2.3
A.T._ et B.T._ sont les parents de D.T._. Ce dernier avait deux frères, C.T._ et E.T._. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délai légaux par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de X._ est recevable.
2.
La procédure écrite est applicable, l’appel portant sur l’allocation de dommages-intérêts
et la réparation du tort moral (art. 406 al. 1 let. d CPP).
3.
Dommages-intérêts
3.1 Famille T._
Selon l’appelante, la famille T._ a pris des conclusions civiles à hauteur de 22'691 fr. 15 au titre de frais découlant du décès de D.T._, 6'011 fr. pour le remboursement des effets personnels et 4'850 fr. au titre de remboursement des effets collatéraux sur la famille, soit au total 33'552 fr. 15. Or au vu des pièces produites, il sied de retenir que A.T._, B.T._, C.T._ et E.T._ ont réclamé 35'098 fr. 81 à ce titre, somme à laquelle s'ajoutent 3'938 fr. 75 pour les honoraires de leur avocat (P. 47/1, P. 51 et P. 52). Les premiers juges ont alloué 29'000 fr. à titre de dommages-intérêts, sans toutefois exposer les sommes dont il n'avait pas été tenu compte.
Aux termes de l'art. 45 al. 1 CO, en cas de mort d'homme, les dommages-intérêts comprennent les frais, notamment ceux d'inhumation. D'après la jurisprudence, il faut entendre par là les frais qui sont en relation directe avec le décès. Ont ainsi été admis les frais suivants: cercueil, faire-part, enterrement, repas, monument funéraire, alors que les frais d'entretien de la tombe ont été exclus (ATF 34 II 447 c. 10; ATF 113 II 323 c. 5 et les références citées). La doctrine admet également les frais de réception comme faisant partie, selon les us et coutumes, des frais d'inhumation (Werro, in : Thévenoz/Werro [éd.], Commentaire romand, Code des obligations I, 2
ème
éd., Bâle 2012, n. 4 ad art. 45 CO).
a)
Se référant aux frais découlant du décès de D.T._, l'appelante conteste que les frais de souper en famille ensuite de l’ensevelissement à hauteur de 990 fr. soient pris en compte (cf. P. 9 du bordereau produit le 25 mars 2013 [P. 47/1]), dès lors que ce repas ferait double emploi avec la collation qui a suivi le service funèbre.
Il ressort des pièces produites que la collation concerne essentiellement des boissons (principalement des thés, des limonades, de l’eau minérale et de la bière) pour plus de cent-vingt personnes pour un montant de 1'313 fr. 70 (P. 8 du bordereau produit le 25 mars 2013 [P. 47/1]) et que le repas de famille a réuni vingt-trois personnes pour 40 fr. par convive (cf. P. 9 supra). Ces deux moments de convivialité ne concernent à l’évidence pas le même cercle de personnes et il paraît évident que les proches d’un jeune homme tué accidentellement éprouvent le besoin de se réunir en cercle plus restreint. L’argument selon lequel la collation et le repas de famille font double emploi est dès lors mal fondé. Au demeurant, les deux montants concernés sont modestes et, additionnés, ils correspondent à l’évidence aux dépenses usuelles lors du décès d’un jeune homme.
b)
L’appelante conteste devoir payer 11'548 fr. pour le monument funéraire. Elle estime que seule une somme de 5'000 fr. pourrait être mise à sa charge à ce titre.
Les frais de pierre tombale font partie des frais funéraires, mais ils doivent être raisonnables et correspondre à ce qui est usuel, l’obligation du responsable n’étant pas de prendre en charge ce poste de manière illimitée (Brehm, Berner Kommentar, Obligationenrecht, 4
ème
éd., Berne 2013, n. 15 ad art. 45 CO; Brehm, La réparation du dommage corporel en responsabilité civile, Berne 2002, n. 133 p. 75).
Le montant de 11'548 fr. susmentionné s'entend TVA non comprise. Il comprend le coût du monument (3'000 fr.), soit d'une pierre tombale de 180 cm sur 75 cm garnie d’un rocher massif brut de 105 cm sur lequel est posée une colombe en bronze (560 fr.). Sur le monument sont gravés des montagnes, des sapins, un croissant de lune ainsi que le nom du défunt (1'500 fr.). Le prix total comprend également l'entourage de la pierre tombale (1'660 fr.), le bétonnage et la jardinière (260 fr.), ainsi que le dallage (1'400 fr.). Enfin, un pupitre a été posé sur le haut de la pierre tombale, sur lequel figurent des inscriptions (soit 158 lettres de bronze) facturées 3'168 fr. (cf. P. 11 du bordereau produit le 25 mars 2013 [P. 47/1]).
Sans être somptuaire, ce monument dépasse ce qui est usuel.
Ex aequo et bon
o un montant de 7'500 fr. paraît adéquat.
c)
S'agissant des effets personnels du défunt, l’appelante conteste la prise en charge des frais liés à la moto estimés à 2'000 francs (poste 12 de la P. 41/2).
Les premiers juges n’ont semble-t-il pas tenu compte à juste titre de ce poste du dommage. La contre-valeur de la moto accidentée a en effet été versée en mains de A.T._.
d)
L’appelante conteste encore les postes 14 à 29 de la P. 41/2, soit l’estimation des effets personnels que D.T._ avait sur lui le jour de l’accident.
Hormis pour les lunettes de soleil médicales (poste 16) pour lesquelles une facture a été produite, tous les autres frais ont été estimés. Le 14 septembre 2012, la famille T._ avait établi la liste des effets personnels de D.T._ et chiffré leur valeur. Les prix allégués alors et ceux de la liste de mars 2013 sont les mêmes, à l’exception du poste 24 (une chemise) et du poste 28 (sac à dos [...]). Il y a lieu de s’en tenir à la première évaluation, étant précisé que l’augmentation de ces deux postes dans la seconde liste semble relever d’une erreur de copie. Toutes ces estimations correspondent aux prix usuels du marché (un t-shirt de marque coûte en effet 50 fr., un [...] 400 fr., des chaussures [...] 200 fr, un sac à dos [...] 100 fr., etc). Rien ne permet de penser que ces frais ont été surévalués.
Il convient en conséquence d’allouer ces frais par 3'631 francs.
e)
L’appelante conteste les conclusions civiles de 4'850 fr. prises à titre de remboursement des effets collatéraux sur la famille T._.
Le montant réclamé à ce titre correspond à trente-six séances à 90 fr., soit 3'240 fr., pour les consultations suivies par A.T._ auprès d’une psycho-somatothérapeute (P. 47 et P. 51) et à quinze séances chez le psychiatre V._ par 3'156 fr. 66 suivies par A.T._, soit un total de 6'396 fr. 66 (P. 47 et P. 52) et non de 4'850 fr. comme chiffré par l’appelante.
Selon une jurisprudence ancienne à laquelle se réfère l’appelante, les frais de traitement consécutifs au choc nerveux que subit une personne suite au décès ne sont en principe pas réparables, demeure réservé le cas où le choc entraîne une atteinte à l’intégrité corporelle de cette personne (ATF 112 II 118; Werro, Commentaire Romand, op. cit., n. 6 ad art. 45 CO; Werro, La responsabilité civile, 2
ème
éd., Berne 2011, n. 1125 p. 317). Or, dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a reconnu le principe de la responsabilité s’agissant notamment de la perte de gain de parents dont le fils de dix-sept ans a été tué dans un accident de la circulation (ATF 138 III 276, JT 2012 I 270; Brehm, Berner Kommentar, op. cit., nn. 39 ss ad art. 45 CO). Il y a ainsi lieu de considérer que les proches qui subissent un dommage matériel lié à un choc nerveux en lien de causalité adéquate avec le décès de leur proche peuvent, en principe, se voir indemniser sur la base de
l’art. 41 CO.
En l’espèce, il y a lieu de retenir que les frais de psychothérapie supportés par A.T._, qui n’a pas eu la force de se présenter aux débats de première instance, sont en lien de causalité adéquate avec le décès de son fils. On ignore toutefois quelle part de ceux-ci est à sa charge et notamment si les frais de psycho-somatothérapie de H._ sont en tout ou partie pris en charge par l’assurance-maladie. On peut en revanche considérer que les notes d’honoraires du Dr V._ sont prises en charge par l’assurance-maladie, hormis la participation de 10 % à la charge de l’assurée. Dans ces circonstances, il n’y a lieu d’allouer que le 10 % des factures du psychiatre V._ à hauteur de 3'156 fr. 66, soit 315 francs.
f)
Sur le vu de ce qui précède, c’est un montant de 22'592 fr. 15, comprenant les frais découlant du décès de D.T._ (18'646 fr. 15), les frais de remboursement des effets personnels (3’631 fr.) et les frais de remboursement des effets collatéraux (315 fr.), qui doit être alloué à A.T._, B.T._, C.T._ et E.T._ à titre de dommages-intérêts.
3.2 Famille L_
L’appelante conteste le montant des dommages-intérêts alloués à hauteur de 21'000 fr. à la famille L_ et accepte de verser 12'979 fr. 20 à ce titre.
Au vu des pièces produites, A.L._, B.L._ et C.L._ ont fait valoir une somme de 27'706 fr. 65 (P. 49 et P. 54), et non de 28'294 fr. 25 comme chiffrés par l’appelante dans son appel, selon la liste suivante :
1.
Facture atelier floral du 28 mars 2012
1’330.00
2.
Facture journal La Côte du 17 avril 2012
458.15
3.
Facture journal La Côte du 17 avril 2012
87.25
4.
Facture pompes funèbres [...] du 4 juin 2012
5'219.10
5.
Facture creuse tombe [...] 28 mars 2012
426.05
6.
Facture Edipresse 28 mars 2012
385.00
7.
Facture [...] du 9 juillet 2012
500.00
8.
Facture [...] du 9 juillet 2012 (ambulance)
458.00
9.
Facture de [...] du 20 mars 2012
582.90
10.
Facture de l'Ordre judiciaire / justice de paix du District de Nyon
341.00
11.
Décompte Concordia Assurance du 17 mai 2012
202.15
12.
Décompte Concordia Assurance du 21 juin 2012
532.30
13.
Décompte Concordia Assurance du 12 juillet 2012
37.45
14.
Décompte Concordia Assurance du 23 août 2012
18.70
15.
Facture Art Funéraire [...] du 13 mars 2013
7'400.00
16.
Facture journal La Côte du 9 avril 2013
283.60
17.
-
-
18.
Liste des opérations arrêtées au 18 avril 2013
7'345.00
19.
Liste des effets personnels de D.L_ (soit un casque laser à 400 fr., un pull [...] à 50 fr., une veste en cuir à 300 fr., un jeans à 80 fr., des baskets [...] à 120 fr., des sous-vêtements à 100 fr., un sac à main à 200 fr., une trousse de maquillage et produits de maquillage à 150 fr., un porte-monnaie [...] à 100 fr. ainsi qu'une montre et divers bijoux pour 600 fr.) (P. 44/2)
2'100.00
a)
L’appelante conteste le poste 10 relatif à une facture de la Justice de paix du district de Nyon de 341 fr. couvrant les frais de succession.
Selon la jurisprudence, reprise par la doctrine, ces frais ne donnent pas droit à des dommages-intérêts (Brehm, La réparation du dommage corporel en responsabilité civile, op. cit., n. 169 p. 90). Il ne saurait dès lors y avoir remboursement.
b)
L’appelante considère que les frais de fleurs par 1'330 fr. (poste 1) et les frais funéraires de 7'400 fr. (poste 15) sont excessifs. Elle accepte de s’acquitter de respectivement 500 fr. et 5'000 fr. pour ces postes.
Comme rappelé ci-dessus ces frais doivent être pris en charge, dans la mesure où ils correspondent à ce qui est usuel (cf. consid. 3.1.b supra).
A cet égard, les frais de 1'330 fr. et de 7'400 fr., même s’ils peuvent paraître à première vue élevés, sont admissibles. Les frais pour les décorations florales doivent être replacées dans le contexte général de la très vive émotion provoquée par le décès accidentel d’une jeune fille et de son ami, et mis en relation avec les autres frais de la cérémonie mortuaire, notamment les frais du restaurant [...] par 582 fr. 90 qui sont modestes. Le monument mortuaire de 180 x 75 cm, avec une stèle de 62 x 55 x 10 cm en marbre blanc et une inscription de 18 lettres ne présente aucune caractéristique somptuaire ; il est au contraire simple. Ces montants doivent par conséquent être alloués.
c)
L’appelante entend déduire des factures de 500 fr. et 458 fr. (postes 7 et 8), représentant les frais de médecin urgentiste et d’ambulance, le droit de recours de [...] par 250 fr. et accepte de payer 708 fr. et non 958 fr. à ce titre.
Cette déduction étant documentée par la pièce 6 du bordereau produite par l’appelante à l’audience du 25 avril 2013, il y a lieu de l’admettre.
d)
L’appelante conteste le montant de 2'100 fr. réclamé pour les objets personnels de D.L_ et accepte de payer 1'500 fr. à ce titre.
En l’espèce, la liste établie par la famille de la victime et les montants réclamés (cf. P. 9 de la P. 54) sont usuels ; ils ne sont à l’évidence ni exagérés ni surévalués. Rien ne justifie de procéder à une réduction. La somme de 2'100 fr. doit ainsi être allouée.
e)
En définitive, un montant de 19'770 fr. 65 doit être alloué à titre de dommages-intérêts, étant précisé que la somme de 7'345 fr. d’honoraires d’avocat est comprise dans les dépens pénaux de première instance par 9'000 francs.
4. Tort moral
L’appelante conteste les montants alloués à titre de tort moral. Elle conclut à ce que le montant dû aux parents A.T._ et B.T._ ainsi que A.L._ et B.L._ soit fixé à 25'000 fr. chacun, celui dû aux deux frères C.T._ et E.T._ à 8'000 fr. et celui dû au demi-frère C.L._ à 5’000 fr., dans la mesure où il ne faisait pas ménage commun avec sa demi-sœur.
Au moment des faits qui ont entraîné son décès, D.L_ vivait à [...] auprès de son père B.L._ et de son demi-frère C.L._. Il ressort en effet du rapport de police, en particulier des déclarations du père de la victime juste après le décès et de celles de son ami P._, que D.L_ vivait avec son père, soit également avec son demi-frère (P. 23 du dossier pénal; P 26/1 et P. 26/2). Le jugement de divorce prononcé en 2001 accordant le droit de garde à la mère n’est pas pertinent au vu de l’écoulement du temps.
4.1
Selon l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d'homme, à la famille une indemnité équitable à titre de réparation morale.
Cette indemnité a pour but exclusif de compenser le préjudice que représente une atteinte au bien-être moral. Le principe d'une indemnisation du tort moral et l'ampleur de la réparation dépendent d'une manière décisive de la nature et de la gravité de l'atteinte, de l'intensité et de la durée des effets sur la personnalité de la victime concernée, du degré de la faute de l'auteur de l'atteinte et de la possibilité d'adoucir de façon sensible, par le versement d'une somme d'argent, la douleur physique ou morale. Les "circonstances particulières" dont le juge doit tenir compte consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé (TF 4A_489/2007 du 22 février 2008 c. 8.2; ATF 132 II 117 c. 2.2.2; ATF 125 III 412 c. 2a, JT 2006 IV 118). En cas de décès, il faut tenir compte de l'intensité des relations qui existaient entre le défunt et ses proches; la proximité des liens de parenté et l'existence d'un ménage commun constituent des présomptions de fait en faveur d'une indemnité plus élevée. La perte d'un conjoint est considérée comme la souffrance la plus grave; vient ensuite celle causée par la mort d'un enfant, puis celle due au décès du père ou de la mère (Werro, Commentaire Romand, op. cit., nn. 15 ss ad art. 47 CO; Werro, La responsabilité civile, op. cit., nn. 1369 ss; Brehm, Berner Kommentar, op. cit., nn. 136, 141 et 148 ad art. 47 CO). Le critère du ménage commun joue un rôle particulièrement important lorsqu’il s’agit d’allouer ou non une indemnité aux frères et sœurs du défunt. A défaut de ménage commun, on exigera d’eux qu’ils établissent avoir entretenu avec le défunt des relations extraordinairement étroites (Guyaz, Le tort moral en cas d’accident : une mise à jour, SJ 2013 I 215, spéc. p. 235).
La détermination de l'indemnité pour tort moral relève du pouvoir d'appréciation du juge. Conformément à la jurisprudence, l'indemnité due à titre de réparation du tort moral est fixée selon une méthode s'articulant en deux phases. La première consiste à déterminer une indemnité de base, de nature abstraite, la seconde implique une adaptation de cette somme aux circonstances du cas d'espèce (ATF 132 II 117 c. 2.2.3). Destinée à réparer un dommage difficilement réductible à une simple somme d'argent, cette indemnité échappe à toute fixation selon des critères mathématiques; son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites L'indemnité allouée doit être équitable. Le juge en proportionnera le montant à la gravité de l'atteinte subie et évitera que la somme accordée n'apparaisse dérisoire à la victime (TF 6B_12/2011 du 20 décembre 2011; ATF 130 III 699 c. 5.1; ATF 129 IV 22 c. 7.2, JT 2006 IV 182).
La comparaison avec d'autres affaires doit se faire avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment au malheur qui le frappe. Cela étant, une comparaison n'est pas dépourvue d'intérêt et peut être, suivant les circonstances, un élément utile d'orientation (TF 6B_199/2007 du 13 mai 2008 c. 6.2). S'il s'inspire de certains précédents, le juge veillera à les adapter aux circonstances actuelles pour tenir compte de la dépréciation de la monnaie (ATF 129 IV 22 c. 7.2, rés. in JT 2006 IV 182).
Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a rappelé que pour la perte d'un enfant mineur, les tribunaux allouent généralement à chacun des deux parents une indemnité de 30'000 francs. Des montants supérieurs ont parfois été accordés à des mères de jeunes enfants qui avaient assisté à l'accident, notamment 40'000 fr. à celle d'un enfant de deux ans et demi, qui s'était, en plus, intensivement occupée de celui-ci durant les neuf mois qui s'étaient écoulés entre l'accident et le décès. Les frères et soeurs comptent parmi les membres de la famille qui peuvent prétendre à une indemnité pour tort moral. Ce droit dépend cependant des circonstances. À cet égard, le fait que la victime vivait sous le même toit que le frère ou la soeur revêt une grande importance. En principe, un frère ou une soeur a droit à une indemnité si la victime vivait sous le même toit. En revanche, un frère ou une soeur qui ne faisait plus ménage commun avec la victime n'a droit à une indemnité pour tort moral que si il ou elle entretenait des rapports étroits avec cette dernière et si, en outre, la disparition de celle-ci lui a causé une douleur qui sort de l'ordinaire. Sauf circonstances spécifiques très exceptionnelles, le montant de l'indemnité allouée à un frère ou à une soeur n'excède pas 10'000 francs (TF 6B_369/2012 du 28 septembre 2012 et les références citées).
Se référant à la doctrine, Guyaz a exposé que les montants proposés pour la perte d’un enfant se montent entre 27'000 et 40'000 francs (SJ 2013 II 215, spéc. p. 250). Toutefois, ce dernier montant implique des circonstances exceptionnelles tel un crime crapuleux. Le montant de 27'000 fr. correspond à un montant de base. S’agissant des frères et sœurs, Guyaz mentionne des montants compris entre 5'000 et 20'000 francs.
4.2
En l’espèce, les montants alloués par les premiers juges ne sont pas excessifs en tant que tels, eu égard à l’immense souffrance des familles des victimes, mais ils sont trop élevés au regard de la jurisprudence du Tribunal fédéral et de la doctrine précitées.
D.T._ était âgé d’un peu plus de 21 ans lors de l’accident. Il faisait ménage commun avec ses parents et ses deux petits frères. Ils étaient encore tous très marqués par ce décès lors de l'audience de première instance; les premiers juges ont en effet précisé que la famille était encore particulièrement affligée et déboussolée par le décès. Elle a d’ailleurs dû entreprendre une thérapie familiale pour tenter de supporter le deuil. A.T._ n’a de surcroît pas été en mesure d’assister à l’audience.
Compte tenu de l’âge de D.T._ lors de son décès, proche de la minorité, de la souffrance de toute la famille et des liens très étroits les unissant, il y a lieu d’allouer des montants supérieurs à ceux énoncés ci-dessus et d’arrêter les indemnités dues aux parents A.T._ et B.T._ à 35’000 fr. chacun et celles dues à C.T._ et E.T._ à 12'000 fr. chacun.
S’agissant de la famille de D.L_, les circonstances sont semblables. La disparition de leur fille a été un énorme choc. Leur deuil étant extrêmement difficile à faire, ils ont même imaginé quitter la Suisse pour « tourner la page » (cf. jgt., p. 8). Compte tenu de l’âge de D.L_, on ne saurait allouer un montant différent à son père et à sa mère au motif qu’ils sont séparés ou qu’elle vivait chez son père. L’appelante ne le requière d’ailleurs pas.
Enfin, C.L._ a été très marqué par le décès de sa demi-sœur avec laquelle il vivait. Il a de la peine à dire sa souffrance, cela s’exprimant par une alternance de périodes de colères explosives notamment à l’école et de profond mutisme où il pleure (jgt., p. 12). Aucun motif n’impose dès lors de réduire l’indemnité pour tort moral de C.L._ au motif qu’il est le demi-frère de D.L_.
Il y a donc lieu d’accorder les mêmes montants aux parents de D.L_, soit 35'000 fr. chacun, et 12’000 fr. à son demi-frère.
5.
En définitive, l'appel de X._ doit être partiellement admis et le jugement
entrepris réformé dans le sens des considérants qui précèdent.
5.1
Vu le sort de la cause, les frais de la procédure d’appel seront mis par moitié à la charge de X._, par un quart à la charge de A.L._, B.L._ et C.L._, et par un quart à la charge de A.T._, B.T._, C.T._ et E.T._.
5.2
S’agissant des dépens, Me Longchamp qui a conclu au rejet de l’appel a chiffré ses frais de défense pour la procédure d’appel à 5'450 fr. 75. Me Pelot qui a également conclu au rejet de l’appel, a chiffré sa prétention en remboursement des frais de défense à 4'936 fr. 68.
X._ a conclu au rejet des indemnités sollicitées. Elle a fait valoir que Me Longchamp n’avait pas produit de liste dans le délai qui lui était imparti et que sa prétention était ainsi périmée. Elle a également signalé que Me Pelot avait réclamé deux montants différents.
Le 17 décembre 2013, Me Pelot a en effet expliqué qu’il s’était trompé et que c’était bien 5'256 fr. 36 et non 4'936 fr. 68 qu’il réclamait.
Conformément à l’art. 433 al. 2 CPP, la partie plaignante doit chiffrer et justifier l’indemnité pour les dépenses obligatoires. Cela ne signifie pas pour autant que l’avocat doit obligatoirement produire une liste détaillée de ses opérations. Me Longchamp a exposé dans sa lettre du 11 novembre 2013 que l’indemnité de 5'450 fr. 75 correspondait à 14 h 43 au tarif de 350 fr., plus TVA, soit 5'047 fr. plus 403 fr. 76, précisant au demeurant qu’il tenait à disposition une liste des opérations. Il s’agit à l’évidence d’une prétention suffisamment motivée.
Les dépens de la procédure d'appel seront cependant compensés, chacune des parties, assistée d'un mandataire de choix, obtenant gain de cause dans la même mesure limitée (art. 429 al.1 let. a et 433 al.1 let a CPP; CAPE 14 février 2014/32). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b58e6988-4c4d-4470-a091-36dfc0fff542 | En fait :
A.
Par jugement du 4 novembre 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré D._ du chef d'accusation de voies de fait et a mis fin à l'action pénale dirigée contre lui (I), a constaté que Y.A._ s'est rendu coupable de lésions corporelles simples (II), l'a condamné à une peine pécuniaire de 20 (vingt) jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 20 fr. (vingt francs) (III), a suspendu l'exécution de la peine et a fixé à Y.A._ un délai d'épreuve de deux ans (IV), a renoncé à révoquer le sursis octroyé par le Juge d'instruction du Bas-Valais le 6 septembre 2007 (V), a dit que Y.A._ est le débiteur de D._ de 2'000 fr. (deux mille francs), avec intérêts à 5% l'an dès le 12 mai 2009, à titre d'indemnité pour tort moral et de 3'839 fr. 30 (trois mille huit cent trente-neuf francs et trente centimes), à titre de participation aux honoraires de son conseil (VI), a donné acte à D._ de ses réserves civiles pour le surplus (VII) et a mis une partie des frais de la cause, par 892 fr. 50 (huit cent nonante-deux francs et cinquante centimes) à la charge de Y.A._, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (VIII).
B.
Le 10 novembre 2011, Y.A._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d'appel du 19 décembre 2011, il a conclu, principalement, à la réforme du jugement précité en ce sens qu'il est libéré du chef d'accusation de lésions corporelles simples et qu'il est mis fin à l'action pénale dirigée contre lui avec les conséquences qui s'en suivent sur les conclusions civiles et les frais (I). Subsidiairement, il a conclu à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause au premier juge pour nouvelle instruction et nouveau jugement (II et III). Plus subsidiairement, il a conclu à la réforme partielle du jugement querellé en ce sens qu'il est le débiteur de D._ de 1'333 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 12 mai 2009 à titre d'indemnité pour tort moral et de 2'564 fr. à titre de participation aux honoraires de son conseil (IV).
A titre de mesures d'instruction, l'appelant a requis l'assignation et l'audition de trois témoins, soit A._, B.A._ et de l'agent de police [...].
Le 23 décembre 2011, le Ministère public a déclaré renoncer à déposer un appel joint et s'en remettre à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel déposé par Y.A._.
Le 11 janvier 2012, D._ a déclaré renoncer à déposer une demande de non-entrée en matière et un appel joint, concluant au rejet des mesures d'instruction requises.
Par courrier du 18 janvier 2012, le Président de la Cour d'appel pénale a informé les parties qu'il refusait d'assigner les trois témoins requis pour le motif que les conditions de l'art. 389 CPP n'étaient pas remplies.
Le 26 janvier 2012, le Ministère public a annoncé qu'il ne comparaîtrait pas à l'audience du 7 mars 2012 et a renoncé à présenter des déterminations ou des conclusions.
Par courrier du 2 février 2012, Y.A._ a requis du Président de la Cour d'appel pénale qu'il reconsidère sa décision de refus d'assignation des trois témoins requis, à tout le moins pour le témoin A._.
Par courrier du 8 février 2012, le Président de la Cour d'appel pénale a confirmé sa décision du 18 janvier 2012.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Y.A._ est né le 29 juin 1967 à Partinico en Italie, pays dont il est ressortissant. Il a effectué la majeure partie de sa scolarité obligatoire en Suisse et y a suivi un apprentissage de mécanicien sur voiture. Il a ensuite exercé le métier de serrurier, de couvreur, d'électricien et a été employé dès 1990 comme poseur de sols. Il a poursuivi cette activité comme indépendant dès 2000. Sa faillite personnelle a été prononcée en 2009. Son activité lui procure des revenus variables, à hauteur de quelque mille francs mensuels ces derniers mois. Il rencontre des problèmes de santé, notamment de dos, lesquels ne lui permettent pas toujours de travailler. L'appelant a déposé une demande auprès de l'assurance-invalidité et devrait recevoir très prochainement une réponse.
Y.A._ a épousé B.A._ il y a une quinzaine d'années et le couple a un enfant aujourd'hui âgé de 13 ans. Il a deux autres enfants d'un premier mariage, âgés de 20 et 23 ans. Son épouse travaille et subvient principalement aux besoins du ménage. L'appelant a des dettes à hauteur de
80'000 fr. et ne déclare aucune fortune.
Le casier judiciaire de l'appelant comporte l'inscription suivante:
- 6.9.2007, Office régional du Juge d'instruction du Bas-Valais St. Maurice, violation grave des règles de la circulation routière, travail d'intérêt général 176 heures, sursis avec délai d'épreuve de deux ans, amende 900 francs.
2.
Début de l'année 2009, l'épouse de Y.A._ a fait passer une annonce sur un site internet pour vendre un écran plat d'ordinateur dont le couple n'avait plus l'usage. D._ a manifesté son intérêt pour l'objet et le prix de vente a été arrêté à 50 francs. L'acheteur s'est rendu au domicile de Y.A._ et de son épouse pour prendre en charge l'objet, mais a refusé la proposition de tester celui-ci préalablement car il était pressé. Quelques semaines plus tard, D._ a repris contact avec B.A._, laquelle avait omis de lui remettre le câble d'alimentation correspondant. L'acheteur s'est à nouveau rendu devant le domicile des vendeurs pour aller chercher le câble. Quelques semaines plus tard encore, D._ a rappelé B.A._ pour se plaindre des dysfonctionnements de l'écran. Par la suite, D._ a appelé à de nombreuses reprises l'épouse de Y.A._, pour un problème bénin et sans que la discussion n'ait été possible entre eux. B.A._ s'est sentie mise sous pression.
3.
Le 12 mai 2009, à Lausanne, au chemin d'Entre-Bois 40, dans le prolongement du litige civil précité, D._ est allé au domicile de Y.A._ et de son épouse pour convaincre son cocontractant du bien-fondé de ses plaintes. D._ manifestant son intention de pénétrer dans l'immeuble dans lequel se trouvait le domicile de Y.A._, ce dernier l'a repoussé des deux mains pour l'en empêcher. Il s'en est suivi une altercation physique, au cours de laquelle les deux protagonistes se sont mutuellement empoignés. Y.A._ a mis D._ à terre, dans l'herbe. Dans un deuxième temps, alors que D._ était toujours au sol, Y.A._ s'est violemment plaqué sur lui. Toute la masse corporelle de l'appelant, qui a déclaré peser environ 110 kg au moment des faits, s'est écrasée sur D._, comprimant notamment son pied gauche qui était posé en porte à faux sur une bordure en béton, entraînant ainsi une fracture de sa cheville gauche.
Selon le rapport du Centre hospitalier universitaire vaudois du 22 juin 2009, D._ a subi une fracture bi-malléolaire Weber B de la cheville gauche ayant nécessité une intervention chirurgicale intervenue le 18 mai 2009. Il a à nouveau été opéré dans le courant de l'année 2011 pour retirer les vis. Il s'est trouvé en incapacité de travail du 12 mai au 30 septembre 2009. Durant cette période, il a été indemnisé par la SUVA à concurrence du 50% du montant de l'indemnité journalière, soit environ 1'800 fr. par mois. Son employeur a complété son revenu à bien plaire, en lui versant durant cette même période 6'881 fr. 15 en sus des indemnités SUVA.
D._ a déposé plainte le 27 mai 2009.
D.
Lors des débats d'appel, D._ a conclu au rejet de l'appel et à ce que des dépens de deuxième instance lui soient octroyés. | En droit :
1.
Selon l'art. 399 al. 1 CPP, l'appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la notification du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit.
La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour le faire (art. 382 al. 1 CPP) et contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel interjeté par Y.A._ est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Le premier juge, convaincu ni par la version de l'appelant ni par celle du plaignant, a considéré que les deux protagonistes s'étaient mutuellement empoignés et étaient tombés ensemble à terre, cette chute étant la cause la plus probable de la fracture dont a été victime D._ (cf. jgt., p. 21).
Toutefois, au vu des déclarations convaincantes de D._, aux débats d'appel, non contestées par Y.A._, et au vu du fait que ces propos correspondent aux déclarations de l'appelant lors des débats de première instance lorsqu'il a expliqué que le plaignant se trouvait sur le dos et qu'il s'était placé sur lui pour le maîtriser (jgt., p. 9), la Cour de céans considère que l'altercation s'est déroulée en deux phases; la première durant laquelle l'appelant a mis le plaignant à terre et la deuxième au cours de laquelle l'appelant s'est écrasé de toute sa masse sur son adversaire. La fracture a été causée dans la deuxième phase, soit lors de l'écrasement du pied de la victime posé sur une bordure en béton.
4.
Y.A._ reproche au premier juge une constatation incomplète ou erronée des faits en ayant omis de prendre en compte un certain nombre de circonstances qui lui aurait permis d'opter raisonnablement pour la thèse de la légitime défense.
4.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
4.2
L'appelant soutient que les six groupes de faits suivants auraient pu et dû être retenus :
a) La persistante appuyée de D._ à vouloir faire constater les défauts de l'écran d'ordinateur qu'il avait acheté à B.A._. Pour illustrer cette persistante, l'appelant invoque des faits tirés des déclarations du plaignant et de sa plainte.
En l'occurrence, le premier juge n'a pas ignoré cet aspect des faits. Sous considérant 3a du jugement entrepris, il retient que l'achat de l'écran a eu lieu quelques mois avant les faits; à ce moment-là l'acheteur s'est rendu au domicile de Y.A._ et de son épouse pour prendre en charge l'objet, sans le tester parce qu'il était pressé. Le jugement retient ensuite que c'est quelques semaines plus tard que D._ a repris contact avec B.A._ constatant que cette dernière avait omis de lui remettre le câble d'alimentation. Il s'est à nouveau rendu chez l'appelant pour prendre le câble. Quelques semaines plus tard encore, il a rappelé B.A._ pour se plaindre des dysfonctionnements. Dès lors, le premier juge a bel et bien retenu et pris en considération que D._ avait "relancé" à plusieurs reprises l'appelant et son épouse. Sur ce point, l'état de fait du jugement n'est ni incomplet ni erroné.
b) L'agressivité patente de D._ que l'appelant illustre en invoquant des faits retenus, soit que le plaignant a téléphoné à de nombreuses reprises à B.A._ avec un ton de plus en plus menaçant, la traitant d'escroc et de malhonnête (jgt., p. 19) et de faits tirés des déclarations du plaignant et de celles d'un témoin selon lesquelles le plaignant ne cessait de dire, alors qu'il se trouvait à terre, qu'il aurait dû venir avec un pistolet.
Le premier juge a évoqué les versions respectives des protagonistes en expliquant pourquoi il n'était à la réflexion convaincu par aucune des deux versions, du moins s'agissant du pugilat entre eux. Il a également retenu, sur la base du témoignage de J._, que l'état d'esprit de D._ avant de se rendre le jour des faits au domicile de Y.A._, n'était pas belliqueux. Ces éléments sont établis et les constatations du premier juge ne sont ni erronées ni incomplètes. Il relève de son pouvoir d'appréciation de se déclarer convaincu ou non d'un fait. En l'occurrence, il n'a manifestement pas abusé de ce pouvoir en retenant les faits sur lesquels sa conviction est fondée.
c) Les imprécisions flagrantes de D._, par lesquelles ce dernier aurait tenté de minimiser l'intensité de son implication tout en maximisant celle de l'appelant. Y.A._ illustre ces imprécisions par les faits suivants:
- D._ a déclaré avoir appelé B.A._ à "deux ou trois reprises" (jgt., p. 14), alors qu'en cours d'enquête, il avait admis s'être heurté "à plusieurs refus téléphoniques" (PV audition 1, p. 1);
- D._ a affirmé que Y.A._ aurait pris le combiné des mains de sa femme pour lui dire de laisser celle-ci tranquille "sous peine d'avoir affaire à lui" (jgt., p. 7) alors que tant l'appelant que B.A._ ont dit qu'il n'y a jamais eu le moindre contact téléphonique préalable entre les parties (jgt., pp. 9 et 13);
- D._ a prétendu que Y.A._ lui avait dit "dégage, fils de pute!" (jgt., p. 7) alors qu'en cours d'enquête, cette circonstance n'a été ni mentionnée ni retenue par l'ordonnance de renvoi du 24 novembre 2011;
- D._ a déclaré que Y.A._ serait rentré chez lui sans avertir personne alors qu'en cours d'enquête, le témoin A._ a confirmé que l'appelant lui avait demandé d'appeler une ambulance (PV audition 2, p. 2);
- D._ a affirmé n'avoir pas eu pour but de récupérer l'argent (PV audition 1, p. 1) alors que le témoin J._ a affirmé qu'il voulait se faire rembourser l'écran (jgt. p. 11).
En l'espèce, Y.A._ ne fait qu'opposer sa version des faits à celle du premier juge et n'indique pas en quoi sa version devrait l'emporter. Le premier juge a expliqué pourquoi il ne retenait aucune des deux versions (cf. jgt., p. 21). De plus, les éléments relevés par l'appelant et mentionnés ci-dessus sont tirés des déclarations de D._, mais ne sont pas retenues dans l'état de fait du jugement dès lors qu'il ne s'agit pas de points décisifs pour le jugement de la cause, de sorte que ce moyen est également mal fondé.
d) La maîtrise personnelle de Y.A._. L'appelant soutient qu'il était calme et qu'il se maîtrisait parfaitement en se référant au rapport de police du 24 mai 2009 (P. 6) dans lequel il est mentionné "le second attendait tranquillement devant l'entrée de domicile" et au témoignage d'A._ qui a déclaré " (...) j'ai tout simplement demandé à Y.A._ d'arrêter sans devoir intervenir physiquement. Il a tout de suite arrêté et s'est relevé (...)" (PV audition 2, p. 1). Il relève également que son épouse le décrit comme quelqu'un de calme et qu'il n'a pas d'antécédents en matière d'infractions contre l'intégrité corporelle.
Une fois encore, l'appelant cherche à imposer sa propre version des faits sans indiquer en quoi sa version devrait l'emporter face à celle qui a été retenue. En l'occurrence, le premier juge a retenu, sur la base du témoignage d'A._, que l'appelant avait assené un coup sur la tête de son adversaire lorsque ce dernier était à terre. Le jugement entrepris retient aussi que c'est Y.A._ qui a demandé d'appeler l'ambulance. Le jugement est donc exact sur ces points et peut être confirmé.
e) Y.A._ fait état de ses problèmes de santé, notamment de dos. Il relève avoir déposé une demande auprès de l'assurance-invalidité et qu'il se trouvait en arrêt de travail à son domicile au moment des faits.
Les éléments soulevés par l'appelant ne sont pas relevants. En effet, son état de santé ne l'a pas empêché de se battre et de blesser son adversaire, comme en atteste le témoin A._. Mal fondé, ce moyen doit être écarté.
f) La proportionnalité de la réponse. Y.A._ interprète les faits en sa faveur et tente de construire la légitime défense, soutenant qu'en se limitant notamment à la différence d'âge et de constitution des parties sans tenir compte des six groupes de faits exposés, le premier juge a méconnu la notion d'attaque ou/et de menace d'attaque imminente de l'art. 15 CP.
4.3
La légitime défense au sens de l'art. 15 CP suppose une attaque, c'est-à-dire un comportement visant à porter atteinte à un comportement juridiquement protégé, ou la menace d'une attaque, soit le risque que l'atteinte se réalise. Il doit s'agir d'une attaque actuelle, ou à tout le moins imminente, ce qui implique que l'atteinte soit effective ou qu'elle menace de se produire incessamment. Cette condition n'est pas réalisée lorsque l'attaque a cessé ou qu'il n'y a pas encore lieu de s'y attendre. Une attaque n'est cependant pas achevée aussi longtemps que le risque d'une nouvelle atteinte ou d'une aggravation de celle-ci par l'assaillant reste imminent. S'agissant en particulier de la menace d'une attaque imminente contre la vie ou l'intégrité corporelle, celui qui est visé n'a évidemment pas à attendre jusqu'à ce qu'il soit trop tard pour se défendre; il faut toutefois que des signes concrets annonçant un danger incitent à la défense. Tel est notamment le cas lorsque l'agresseur adopte un comportement menaçant, se prépare au combat ou effectue des gestes qui donnent à le penser. Par ailleurs, l'acte de celui qui est attaqué ou menacé de l'être doit tendre à la défense; un comportement visant à se venger ou à punir ne relève pas de la légitime défense; il en va de même du comportement qui tend à prévenir une attaque certes possible mais encore incertaine, c'est-à-dire à neutraliser l'adversaire selon le principe que la meilleure défense est l'attaque
(TF 6B_926/2009 du 15 décembre 2009 consid. 3.2 et la jurisprudence citée).
La défense doit apparaître proportionnée au regard de l'ensemble des circonstances. A cet égard, on doit notamment examiner la gravité de l'attaque, les biens juridiques menacés par celle-ci et par les moyens de défense, la nature de ces derniers ainsi que l'usage concret qui en a été fait. La proportionnalité des moyens de défense se détermine d'après la situation de celui qui voulait repousser l'attaque au moment où il a agi. Les autorités judiciaires ne doivent pas se livrer à des raisonnements a posteriori trop subtils pour déterminer si l'auteur des mesures de défense n'aurait pas pu ou dû se contenter d'avoir recours à des moyens différents, moins dommageables. Il est aussi indispensable de mettre en balance les biens juridiquement protégés qui sont menacés de part et d'autre. Encore faut-il que le résultat de cette pesée des dangers en présence soit reconnaissable sans peine par celui qui veut repousser l'attaque, l'expérience enseignant qu'il doit réagir rapidement (TF 6B_926/2009 du 15 décembre 2009 consid. 3.2 et la jurisprudence citée).
4.4
Sur la base des faits retenus par le premier juge, dont on a déjà dit qu'ils étaient fondés sur les éléments du dossier et n'étaient ni incomplets ni erronés, ainsi que sur la base des faits tels que modifiés dans la partie en fait du présent jugement, la légitime défense ne peut pas être retenue. En effet, Y.A._ a blessé D._ une fois que ce dernier était à terre et maîtrisé. Dans ces conditions, on ne saurait retenir que l'appelant a été attaqué ou menacé d'une menace imminente puisque la victime se trouvait maîtrisée et dépourvue de toute capacité offensive.
Au surplus, Y.A._ s'est bel et bien rendu coupable de lésions corporelles simples par dol éventuel. En effet, le comportement de l'appelant, 17 ans plus jeune que D._ et pesant environ 20 kg de plus que ce dernier, a consisté à se plaquer violemment sur sa victime qui était au sol. Sur le plan subjectif, ce geste implique forcément la possibilité de meurtrir et blesser celui soumis à ce heurt et à cette pression, risque dont l'appelant avait conscience et dont il a accepté la réalisation. La lésion était dès lors prévisible et non pas accidentelle.
4.5
Fondé sur ce qui précède, le premier juge n'a pas abusé de son pouvoir en matière d'appréciation des preuves. Il a correctement écarté les deux versions des protagonistes et a expliqué sur quels éléments il fondait sa conviction. Il n'y a aucune constatation incomplète ou erronée des faits et il n'y a pas de violation de droit à écarter la légitime défense.
Le moyen, mal fondé, doit être rejeté et le jugement entrepris confirmé s'agissant de la qualification juridique et la peine retenues.
4.
Y.A._ soutient que, même si la thèse de la légitime défense n'est pas retenue dans le cas d'espèce, le premier juge a abusé de son pouvoir d'appréciation en limitant à 25% la réduction de l'indemnisation de D._ ensuite de faute concomitante. Selon lui, au vu des circonstances de la bagarre mutuelle, il aurait fallu réduire de 50% et non pas seulement de 25% l'indemnisation, soit pour tenir compte de fautes qu'il considère équivalentes.
En l'occurrence, le premier juge a retenu à raison une faute concomitante du lésé en ce sens qu'il s'est rendu au domicile de Y.A._ sans y avoir été invité et après avoir contacté à de multiples reprises l'épouse de ce dernier par téléphone (jgt., p. 23). L'ampleur de la réduction relève de son libre pouvoir d'appréciation et il n'y a rien de choquant ni d'abusif de retenir une réduction de 25% eu égard aux circonstances et notamment compte tenu du fait que la fracture s'est produite alors que D._ était maîtrisé au sol. Par ailleurs, le premier juge ne s'est pas fondé sur le montant de 5'000 fr. réclamé par le plaignant, mais n'a alloué qu'un montant de 2'000 fr. pour tenir compte du fait que toutes les séquelles alléguées n'étaient pas établies.
Mal fondé, le grief de l'appelant doit être rejeté.
5.
En conclusion, l'appel de Y.A._ doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être mis à la charge de Y.A._ (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b5d57ccc-6c8b-4fb6-8884-74775ea1ab80 | En fait :
A.
a)
Par jugement du 22 octobre 2010, le Tribunal criminel de l’arrondissement de Lausanne a notamment constaté que C._ s’est rendu coupable d’infraction grave et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants (V), l’a condamné à une peine privative de liberté de 12 ans, sous déduction de 676 jours de détention avant jugement et à une amende de 500 fr. (XIV), a dit qu’à défaut du paiement de l’amende, la peine privative de liberté de substitution serait de 5 jours (XV), l’a condamné au paiement en faveur de l’Etat d’une créance compensatrice de 12'000 fr. (XVI) et a statué sur les séquestres (XXIV et XXV).
b)
Par arrêt rendu le 14 décembre 2010, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal a rejeté le recours formé par C._ et confirmé le jugement entrepris.
Cet arrêt retient notamment que C._ et sa compagne ont été arrêtés à Neuchâtel le 16 décembre 2008 dans le cadre d'une enquête portant sur un réseau international de trafiquants de drogue, que des écoutes téléphoniques avaient établi que l'intéressé était en relation avec des trafiquants, dont son frère établi à [...] et un individu surnommé « [...]» résidant au Kosovo et que des traces d'héroïne et de cocaïne ont été découvertes sur divers objets saisis au domicile occupé par l'accusé et sa compagne, ainsi que dans le studio personnel de l'intéressé, en particulier une balance électronique, des sachets minigrip, des gants de chirurgien et du papier aluminium.
Par arrêt du 20 juin 2011, le Tribunal fédéral a rejeté le recours interjeté par C._.
c)
Le 4 février 2015, C._ a déposé une demande de révision à l’encontre de l’arrêt rendu le 14 décembre 2014 par la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal, concluant notamment à l’annulation de cet arrêt et au renvoi de la cause pour nouvelle instruction et nouveau jugement à l’autorité désignée par la cour.
Par jugement du 12 février 2015, la Cour d’appel pénale a déclaré cette demande irrecevable, considérant en substance que la déclaration écrite du 24 novembre 2014 signée par V._, nouveau moyen de preuve proposé, était dépourvue de toute valeur probante et que l’absence d’adresse démontrait le peu de sérieux de cette déclaration.
B.
Par acte du 29 juin 2015, C._ a déposé une nouvelle demande de révision de l’arrêt rendu le 14 décembre 2010 par la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal, concluant principalement à son annulation et au renvoi de la cause pour nouvelle instruction et nouveau jugement à l’autorité désignée par la cour et, subsidiairement, à sa réforme en ce sens que la peine prononcée à son encontre est réduite. Il a requis l’audition, comme témoin, de V._ et la désignation d’un défenseur d’office en la personne de Me Antoine Eigenmann pour la procédure de révision. Il a produit un bordereau de pièces.
Dans ses déterminations du 13 juillet 2015, le Ministère public a conclu au rejet de la demande de révision. | En droit :
1.
Aux termes de l'art. 453 al. 1 CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0), les recours formés contre les décisions rendues avant l'entrée en vigueur du présent code sont traités selon l'ancien droit par les autorités compétentes sous l'empire de ce droit.
Lorsque, comme en l'occurrence, une personne lésée par un jugement rendu sous l'ancien droit en demande la révision après l'entrée en vigueur du nouveau droit, la demande de révision peut être traitée par la nouvelle juridiction d'appel (art. 21 al. 1 let. b CPP) selon les règles de procédure prévues aux art. 411 ss CPP (TF 6B_41/2012 du 28 juin 2012 c. 1.1). Les motifs de révision restent, en revanche, ceux qui sont prévus par le droit applicable au moment où la décision soumise à révision a été rendue (TF 6B_41/2012 du 28 juin 2012 c. 1.1). Cette réserve est toutefois sans portée en l’espèce, dès lors que, s’agissant d’une révision en faveur du condamné, le motif de révision prévu à l’art. 410 al. 1 let. a CPP correspond à celui de l’art. 385 CP (Code pénal suisse du 21 décembre 1937, RS 311.0), qui n’a d’ailleurs formellement pas été abrogé (cf. Fingerhuth, in : Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2
e
éd., Zurich/Bâle/Genève 2014, n. 1 ad art. 410 CPP; Heer, in : Niggli/Heer/ Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jungenstrafprozessordnung, 2
e
éd., Bâle 2014, n. 7 ad art. 410 CPP).
La Cour de céans est donc compétente pour connaître de la présente requête.
2.
2.1
L'art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par un jugement entré en force d'en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné.
Cette disposition reprend la double exigence posée à l'art. 385 CP selon laquelle les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être nouveaux et sérieux (Message du Conseil fédéral relatif à l'unification de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 II 1057 ss, spéc. 1303; TF 6B_310/2011 c. 1.2 et les références citées). Les faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsque le juge n’en a pas eu connaissance au moment où il s’est prononcé, c’est-à-dire lorsqu’ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit. Ils sont sérieux lorsqu’ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l’état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 137 IV 59 c. 5.1.2; ATF 130 IV 72 c. 1; TF 6B_310/2011 c. 1.2).
2.2
Pour être valides en la forme, les demandes de révision doivent être motivées et adressées par écrit à la juridiction d’appel, les motifs de révision devant être exposés et justifiés dans la demande (art. 411 al. 1 CPP; Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, 3
e
éd., Genève/Zurich/Bâle 2011, n. 2092, p. 679; Heer, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, op. cit., n. 6 ad art. 411 CPP.
2.3
En l’espèce, lors de sa première demande de révision, le requérant avait produit une déclaration écrite et signée le 24 novembre 2014 par V._, lequel attestait ne pas connaître C._, ne l’avoir jamais vu et n’avoir jamais eu de contact avec ce dernier (P. 254/2/4). Il avait joint à cette déclaration sa traduction en français. A l’appui de la présente requête, le requérant produit notamment une nouvelle déclaration faite le 14 mai 2015 par V._ dans laquelle celui-ci déclare en présence d’un notaire qu’il n’a jamais vu C._, qu’il ne le connaît pas et qu’il n’a pas eu de contacts avec lui (P.254/2/5), la traduction en français certifiée conforme de cette déclaration (254/2/6), la traduction de la légalisation de la signature de V._ du 14 mai 2015 établie le 19 mai 2015 (P. 254/2/7), ainsi que l’acte d’accusation rendu le 5 septembre 2011 par le « Special Prosecution of the Republic of Kosovo » à l’encontre de V._ (P. 254/2/8). Le requérant fait valoir que le fait qu’il aurait été en contact avec V._ faisait de lui un personnage-clé du réseau sans qui le trafic n’aurait pas pu se poursuivre et que, dans la mesure où il n’a jamais été en contact avec le prénommé, son rôle dans le trafic de drogue pour lequel il a été condamné serait moins important que ce qui a été retenu par l’arrêt contesté.
Les éléments invoqués par le requérant ne peuvent toutefois être considérés comme sérieux, dès lors qu’ils ne sont pas susceptibles d’ébranler les constatations de faits sur lesquelles se fonde la condamnation du requérant. Le seul fait que la nouvelle déclaration signée par V._ le 14 mai 2015 soit assortie du sceau d’un notaire du Kosovo et d’un « traducteur juré » du canton de Neuchâtel ne suffit pas à la rendre crédible et sérieuse, ni à remettre en cause les faits retenus dans l’arrêt dont la révision est demandée. En effet, V._ a été mis en accusation pour un trafic de drogue au Kosovo en septembre 2011 ; il ressort de l’acte d’accusation kosovar produit par C._ que l’intéressé nie toute implication dans ce trafic de drogue et déclare ne connaître aucun protagoniste de l’affaire pour laquelle il est mis en cause si ce n’est son neveu. La déclaration de V._ et son témoignage ne sauraient dans ces circonstances avoir un quelconque caractère probant, de sorte que l’état de fait retenu dans l’arrêt dont la révision est demandée n’est pas susceptible d’être modifié par la nouvelle déclaration faite le 14 mai 2015 par le prénommé et produite par le requérant.
Au vu de ce qui précède, la demande de révision de C._ est infondée et la réquisition tendant à l’audition, comme témoin, de V._ doit être rejetée.
3.
En définitive, la demande de révision présentée par C._ doit être rejetée.
Vu l’issue de la cause, la requête d’assistance judiciaire formée par le requérant doit être rejetée et les frais de révision, par 550 fr. (art. 21 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1], par renvoi de l'art. 22 de cette loi), mis à la charge de C._. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b5e56ae1-d94d-4c46-849b-2912bf9d3095 | En fait :
A.
Par jugement du 20 novembre 2012, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a constaté que A._ s’est rendu coupable de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (I), l'a condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à 90 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, et à une amende de 900 fr. convertible en dix jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif dans le délai imparti (II) et a mis les frais de procédure, par 1'390 fr., à la charge de A._ (III).
B.
Le 20 novembre 2012, A._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d’appel du 7 janvier 2013, il a conclu, avec suite de frais et dépens, principalement à l’admission de l’appel (I) à la modification du jugement en ce sens qu’il est libéré de l’infraction de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, qu'une indemnité, à la charge de l’Etat, qui sera fixée en cours d’instance, lui est allouée (II) et que les frais de procédure de première instance sont laissés à la charge de l’Etat (III). Subsidiairement, il a conclu à l’admission partielle de l’appel (I) et à la modification du jugement en ce sens qu’il est condamné à une peine pécuniaire réduite, dont la quotité et le montant du jour-amende seront réduits à dire de justice (II).
A l'audience d'appel de ce jour, l’appelant a modifié la conclusion principale II de son appel en ce sens que l’indemnité à la charge de l’Etat de Vaud est fixée à 2'495 fr. 80, d’une part, et a modifié la conclusion subsidiaire II de son appel en ce sens qu’il est condamné, pour voies de fait, à une amende fixée à dire de justice, mais inférieure à 1'000 fr., et à l’octroi d’une indemnité partielle au sens de l’art. 429 CPP d’un montant de 1'247 fr. 90, d’autre part.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1 Le prévenu A._, né au Cameroun en 1970, est ressortissant allemand. Marié, il est père de quatre enfants. Il verse 1'000 fr. de pension alimentaire pour ses deux enfants aînés qui ne vivent pas avec lui; ses deux autres enfants sont âgés d’environ trois ans et demi et d’un an et demi respectivement. Titulaire d'un permis C, le prévenu exerce la profession d'informaticien. Il bénéficie du statut de personne de condition indépendante au sens de l'AVS depuis le 1
er
janvier 2012. Il a déclaré au tribunal de police que son revenu annuel net d’indépendant était de l’ordre de 45'000 francs. Précédemment, lorsqu’il était salarié, son revenu annuel net était de 75'000 francs. En 2013, il n’a toutefois encore obtenu aucun revenu en qualité d’indépendant, à telle enseigne même qu’il envisage de redevenir salarié. Son casier judiciaire est vierge. Son épouse travaille pour un salaire mensuel net de 6'800 fr. et perçoit des allocations familiales.
1.2 A Lausanne, le 15 décembre 2011, le prévenu s'est rendu auprès de l'administration communale afin d'accomplir des démarches relatives à son statut au regard du droit de l'AVS. Il n'avait jamais été en relation avec ce service auparavant. Il a été reçu par U._, qui agissait en sa qualité d'employée communale. Lors de l'entretien, l'employée a signifié à l'administré qu'il n'avait pas produit toutes les pièces nécessaires pour traiter sa demande, à laquelle il ne pouvait dès lors être donné suite en l'état. Le prévenu s'est emporté verbalement, traitant l’employée de noms d’oiseau. Elle a alors coupé court à l’entretien. Fâché et énervé, le prévenu s'est levé et a saisi fermement, à une main, le bras droit de son interlocutrice, entre le coude et l'épaule. L’employée, apeurée notamment par la carrure physique du prévenu, a essayé de se dégager de son emprise. Alertés par les cris de la victime, deux de ses collègues, [...] et [...], sont accourus. U._ a pu se dégager et quitter les lieux.
Appelés sur place, les policiers ont constaté une plaque rouge de la grandeur d’une main sur le bras de la victime. Du reste, l’intéressée a retroussé sa manche de chemise pour montrer la marque. Le prévenu est resté sur les lieux jusqu’à l’arrivée de la patrouille. Par la suite, son dossier a été traité par un autre employé de l’administration. Les documents alors produits par le prévenu ne permettaient pas de lui accorder le statut d’indépendant qu’il sollicitait. Il est établi que la victime travaille depuis de nombreuses années au sein du service, à la satisfaction de son employeur. Il n’y a jamais eu de réclamation contre elle.
U._ a déposé plainte. Un rapport d’arrestation provisoire a été établi par la police le 18 décembre 2011 (P. 4). Le prévenu a formé opposition à l'ordonnance pénale rendue à son encontre le 9 octobre 2012 par le Procureur de l'arrondissement de Lausanne à raison des faits en question.
Contestant être l'auteur des actes incriminés, le prévenu a tenté de mettre en cause le travail de la plaignante et lui a fait grief de tenter de lui nuire, se disant victime d'un complot raciste et haineux de la part de l'intéressée et de certains de ses collègues. Pour sa part, la plaignante a nié avoir tenu des propos discriminatoires et elle affirme que le prévenu ne l’avait pas traitée de «raciste» durant les événements.
2. Appréciant les faits de la cause, le premier juge a écarté les moyens du prévenu, en se fondant notamment sur les témoignages des trois collègues de la plaignante, à savoir
[...], [...] et [...]
. Il a retenu que U._ avait fait correctement son travail et ne s'était livrée à aucune provocation particulière justifiant peu ou prou la réaction disproportionnée de l'usager; le tribunal de police a en particulier refusé de suivre la thèse du complot, motif pris de ce que le prévenu était inconnu du service concerné jusqu'au jour des faits incriminés et que le refus de son affiliation, dicté par les exigences légales auxquelles la plaignante devait se soumettre, se fondait sur le fait que les pièces produites n’étaient pas suffisantes.
Quant au genre et à la quotité de la peine, le tribunal de police a, sans autre motivation, retenu la sanction requise par le Procureur. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
L’appelant reproche d'abord au tribunal de police de ne pas lui avoir accordé la faculté d'interroger les trois témoins entendus à l’audience de première instance à la requête de la plaignante. Indépendamment de la question du bien-fondé du grief, il ne peut qu'être relevé que le vice éventuel a été corrigé en procédure d'appel, le prévenu ayant pu interroger ces trois témoins, ainsi que la plaignante, au cours, respectivement, de l’une et de l’autre des audiences tenues par la cour de céans.
4.
L’appelant fait ensuite valoir que son droit d’être entendu a été violé par la police qui a refusé de faire constater par un médecin la rougeur au bras que la plaignante avait prétendu avoir lors de l’intervention de la patrouille de police.
L’art. 182 CPP dispose que le Ministère public et les tribunaux ont recours à un ou plusieurs experts lorsqu’ils ne disposent pas des connaissances et des capacités nécessaires pour constater ou juger un état de fait.
Seul le refus de l’administration d’une preuve pertinente constitue une violation du droit d’être entendu. La constatation d’une marque rouge sur un membre ne requiert pas des connaissances médicales particulières ou spécifiques qui justifieraient l’avis d’un médecin légiste, s’agissant, comme en l’espèce, d’une simple plaque rouge sur le bras.
5.
L’appelant fait encore valoir que le rapport d’arrestation provisoire de la police communale, du 18 décembre 2011 (P. 4), est dénué de force probante et que l’art. 193 al. 4 CPP a été violé. Il soutient que le rapport n’est pas précis et ne comporte pas même de photographie de la rougeur au bras de la plaignante.
Le principe de l'appréciation libre des preuves interdit d'attribuer d'entrée de cause une force probante accrue à certains moyens de preuve, comme par exemple des rapports de police (TF 1P.283/2006 du 4 août 2006 c. 2.3). Contrairement à ce que paraît penser l’appelant, on ne saurait dénier d'emblée toute force probante à un tel document. Celui-ci est en effet, par sa nature, destiné et propre à servir de moyen de preuve dans la mesure où le policier y reproduit des faits qu'il a constatés et il est fréquent que l'on se fonde, dans les procédures judiciaires sur les constatations ainsi transcrites (TF 6S.703/1993 du 18 mars 1994 c. 3b; TF 6B_685/2010 du 4 avril 2011; TF 6B_26/2010 du 3 mai 2010 c. 1.2, s’agissant des antécédents pénaux).
En l’espèce, les policiers appelés sur les lieux ont, selon le rapport d’arrestation provisoire, constaté
de visu
l’existence d’une marque rouge sur l’un des bras de la plaignante, ce qu’ils ont dûment relevé (P. 4, p. 3). Il n’y a aucune raison de ne pas retenir ce fait, qui n’a pas besoin d’être documenté plus avant. Il suffit, bien plutôt, de constater à cet égard que la marque cutanée est avérée, qui plus est à l’endroit allégué par la plaignante comme étant celui où le prévenu avait exercé sa pression, le rapport précisant que la plaignante avait indiqué avoir été agrippée au bras droit.
6.
L’appelant fait également valoir qu’on ne saurait, sur la base du dossier, retenir qu’il avait saisi le bras de la plaignante et que ce geste avait laissé une trace rouge. Il conteste à cet égard la force probante des témoignages des collègues de la plaignante. Il soutient que la description, par les témoins, de la marque rouge au bras de la plaignante a varié au fil du temps. En effet, la victime, entendue le jour des faits, a indiqué que la marque se trouvait au-dessous de son coude, alors que le témoin [...] a relevé lors de son témoignage recueilli par le tribunal de police qu’il y avait «des traces sur le haut du bras droit de Mme U._ (...)». Au surplus, il soutient que la victime a, dans sa plainte, fait état de la marque d’une seule main, pour ensuite déclarer, lors de son audition du 30 avril 2012, qu’elle avait la marque cutanée de deux mains, et non d’une seule (PV aud. 3, p. 2, ligne 43).
Aucun témoin n’a assisté à l’altercation. Le témoin [...] n’a pas constaté de trace sur le bras de la victime, faute d’avoir vu le membre supérieur en question. Le témoin [...] a déclaré que sa collègue avait une trace rouge sur son bras droit (jugement, p. 6), avant de rectifier sa déposition à la première audience d’appel en relevant que la marque se trouvait au bras gauche. Pour sa part, le témoin [...] a indiqué à l’audience de première instance avoir vu des «traces sur le haut du bras droit» de sa collègue (jugement, p. 7). Il a modifié sa description des faits lorsqu’il a été entendu par la cour de céans, en ce sens qu’il a dit se souvenir qu’il s’agissait du bras gauche; il a toutefois assorti cette indication de quelques réserves, en précisant qu’il n’en était pas totalement sûr. Le rapport d’arrestation retient que la plaignante avait montré aux policiers des rougeurs cutanées sur l’un de ses bras, soit une plaque rouge de la grandeur d’une main. Dans sa plainte déposée le jour de l’altercation, U._ a déclaré que le prévenu lui avait agrippé le bras droit au-dessous du coude, cette mention figurant également sur le rapport de police. Elle a ajouté, le 30 avril 2012, qu’il l’avait empoignée, qu’il avait serrée très fort et qu’elle avait voulu se dégager, ce qui avait fait que son bras était rouge et portait la marque des mains (PV aud. 3, lignes 42-43). A l’audience de première instance, elle a dit qu’il lui «a[vait] pris le bras» (jugement, p. 4), confirmant, lors de la seconde audience d’appel, qu’il s’agissait du bras droit, entre le coude et l’épaule.
Ces déclarations ne sont certes pas toutes très précises, s’agissant en particulier de savoir si le bras portant la marque était le droit ou le gauche; de même, elles comportent quelques variations. Toutefois, celles-ci sont inévitables vu la pluralité d’intervenants d’une part, et l’écoulement du temps entre les auditions de l’enquête, respectivement l’audience de première instance, et la première audience d’appel, d’autre part. Cela étant, il doit être précisé que la plaignante n’a jamais varié dans ses dires; si elle n’a pas toujours expressément précisé qu’il s’agissait du bras droit, elle n’a jamais pour autant mentionné le bras gauche. Les réserves formules par le témoin [...] à la première audience d’appel sont assurément de bon aloi vu l’écoulement du temps, même si c’est à tort que ce témoin croit se souvenir qu’il s’agissait du bras gauche. Qui plus est, les témoins [...] et [...], entendus par la cours de céans, ont tous deux relevé expressément que la marque se trouvait entre le coude et l’épaule, et non sur la partie inférieure du bras de la plaignante; à cet égard, le témoin [...] n’a pas varié par rapport à sa déposition recueillie en première instance (jugement, p. 7), étant précisé que le témoin [...] n’avait rien indiqué à ce sujet lors durant l’audience du tribunal de police (jugement, p. 6).
Surtout, les quelques imprécisions, dont l’appelant fait grand cas, ne portent pas sur les faits essentiels de la cause. Elles ne permettent pas d’infirmer la crédibilité générale ne serait-ce que d’un seul des témoins, dont aucun n’est apparu à la cour comme prévenu en défaveur de l’appelant. Il est bien plutôt établi que le prévenu a saisi le bras droit de la plaignante et que ce geste a laissé une trace rouge, laquelle a été dûment constatée par les policiers et deux témoins peu après le geste incriminé, la victime ayant retroussé sa manche de chemise. Face à deux versions des faits divergentes, celle de la plaignante corroborée par deux témoins oculaires et le rapport de police paraît à l’évidence plus crédible que celle du prévenu. En outre, il est établi que la plaignante a eu peur, vu notamment la carrure du prévenu, à telle enseigne qu’elle a crié et appelé à l’aide. Il n’y a aucune raison de croire à une mise en scène tenant du complot raciste, vu les états de services de la plaignante et le fait que les documents alors produits par le prévenu ne permettaient pas de lui accorder le statut d’indépendant qu’il sollicitait.
7.
L’appelant soutient également que le déroulement des faits tel que décrit par la plaignante n’est pas cohérent. Il tente de tirer argument du fait que la plaignante avait déclaré, tant dans sa plainte que lors de son audition du 30 avril 2012, que ses collègues étaient venus la chercher lorsqu’ils l’avaient entendue crier (PV aud. 1 et 3), alors que le rapport de police retient qu’elle était sortie du bureau pour alerter ses collègues. Or, l’appelant soutient que la plaignante s’était limitée à sortir du bureau (PV aud. 2).
L’appelant voit des contradictions là où il n’y en a pas. Les différentes dépositions de la victime et des témoins, recueillies durant l’enquête, devant le tribunal de police ou aux audiences d’appel, établissent en effet la nature et la chronologie des événements au-delà de tout doute. Il est ainsi établi que le prévenu a saisi le bras (droit) de la plaignante avec une main, à la suite de quoi elle a essayé de se dégager et a crié. Immédiatement après, ses collègues, ainsi alertés, sont venus la chercher en entrant dans la pièce et elle est sortie du bureau. A noter que les faits ainsi établis sont confortés par l’agencement des lieux décrit par les témoins.
8.
8.1
Enfin, le prévenu conteste la qualification juridique des faits incriminés. Il fait valoir que ceux-ci sont constitutifs de voies de fait.
L'art. 285 al. 1 CP, dont la note marginale est
Violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires
, réprime le comportement de celui qui se sera livré à des voies de fait sur un membre d'une autorité ou un fonctionnaire pendant qu'il procédait à un acte entrant dans ses fonctions.
La disposition topique n'exige pas que l'auteur essaie d'empêcher l'acte officiel par les voies de fait. Il peut s'agir d'une pure réaction de colère, sans aucun espoir de modifier le cours des événements. Il suffit que le membre de l'autorité ou le fonctionnaire agisse ès qualité dans le cadre de sa mission officielle et que c'est en raison de cette activité que l'auteur se livre à des voies de fait sur lui. Réprimant une infraction contre l'autorité publique (cf. Titre XV du Code pénal), la disposition en cause protège non pas l'intégrité physique du fonctionnaire personnellement, mais le bon fonctionnement des organes de l'Etat (Wiprächtiger, Gewalt und Drohung gegenüber Beamten oder Angestellten im öffentlichen Verkehr unter besonderer Berücksichtigung des Bahnpersonals, RSJ 93 [1997] 209, spéc. p. 210).
8.2
En l’espèce, lors des faits, la plaignante était fonctionnaire au sens de l’art.
110 a
l. 3 CP. L’altercation se rapporte exclusivement à l’exercice des fonctions de la plaignante, dès lors qu’elle découle du seul refus opposé au prévenu de l’affilier comme indépendant et que les formalités d’affiliation au sens du droit de l’AVS relevaient de la compétence de l’employée communale, étant précisé que le prévenu et la plaignante n’avaient jamais eu affaire l’un à l’autre avant le 15 décembre 2011. En outre, la plaignante a été empêchée d’accomplir sa fonction officielle envers le prévenu, à laquelle l’un de ses collègues a dû pourvoir à sa place. L’infraction de violence ou menace contre les autorités les fonctionnaires est à l’évidence réalisée, s’agissant tant de ses éléments objectifs que de ses éléments subjectifs.
9.
9.1
L’appelant conteste à titre subsidiaire le genre et, partant, la quotité de la peine, ainsi que le montant du jour-amende. Cependant, la qualification de l’infraction (cf. ci-dessus) exclut la peine limitée à une amende que l’appelant appelle de ses vœux.
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (
objektive Tatkomponente
). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (
subjektive Tatkomponente
). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (
Täterkomponente
), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1 p. 19 s.; ATF 129 IV 6 c. 6.1 p. 20; TF 6B_759/2011 du 19 avril 2012 c. 1.1; TF 6B_335/2012 du 13 août 2012 c. 1.1).
L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 136 IV 55 c. 5.6 p. 61; ATF 134 IV 17 c. 2.1 p. 19 s.; ATF 129 IV 6 c. 6.1, p. 21 et les références citées).
9.2
Dans le cas particulier, l’appelant s’est énervé et a saisi le bras de la plaignante. Il ne l’a pas frappée et s’est limité à lui serrer un bras, à l’intimider physiquement et à lui adresser des invectives. Le prévenu n’était pas sous l’influence de l’alcool et s’en est pris à une victime incapable de se défendre; il a en outre été particulièrement intimidant envers elle.
Dans de telles conditions, la peine prononcée par le tribunal de police apparaît excessive au regard des critères de l’art. 47 CP, ce d’autant que le prévenu n’a pas d’antécédents et est socialement inséré. Cela étant, à charge, il reste que le prévenu peine à prendre conscience de la gravité de ses actes. A ceci s’ajoutent l’état de peur de la plaignante, qui a dû appeler à l’aide, et la futilité des mobiles de l’acte incriminé. Enfin, le fait que le prévenu affirme qu’il avait répondu à un comportement xénophobe et qu’il a été discriminé n’y change rien. Les faits ne sont pas établis. En outre, même s’ils l’étaient, ils ne justifieraient pas la réaction disproportionnée du prévenu. Tout bien pesé, c’est une peine pécuniaire de 45 jours-amende qui doit être prononcée. Le prévenu remplit les conditions objectives et subjectives du sursis. Le délai d’épreuve doit être fixé à deux ans. La peine pécuniaire sera assortie d’une amende à titre de sanction immédiate. Vu la quotité de la peine pécuniaire, l’amende doit être arrêtée à 250 francs. Elle sera convertible en huit jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif.
10.
10.1
Le montant du jour-amende fait également l’objet d’une conclusion subsidiaire de l’appel.
L'art. 34 al. 2 CP prévoit que le jour-amende est de 3'000 fr. au plus; le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l’auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d’assistance, en particulier familiales, et du minimum vital.
Pour déterminer le revenu, le juge doit prendre en considération l'ensemble des revenus en tout genre (revenus de l'activité lucrative, de rentes ou de pensions, de placements de capitaux, de la fortune immobilière, prestations en nature, etc.). Il doit ensuite déduire les contributions sociales, les impôts, les primes d'assurance-maladie et accidents, les frais professionnels et les frais indispensables à l'exercice de la profession. Il est également prescrit de tenir compte des obligations d'assistance – en particulier familiales – du condamné (Maire, Les peines pécuniaires, dans : Kuhn, Moreillon, Viredaz et Bichovsky, La nouvelle partie générale du Code pénal suisse, Berne 2006, p. 165).
Il ressort également du Message du Conseil fédéral d'une part que le montant du jour-amende ne doit pas correspondre à la part du revenu qui reste à l'auteur une fois déduit le minimum vital du droit des poursuites et, d'autre part, que la nouvelle réglementation doit en principe permettre d'infliger à tout auteur une peine pécuniaire correspondant à ce que l'auteur a les moyens de payer et à ce qui peut raisonnablement être exigé de lui, compte tenu des longs délais de paiement et de la possibilité de paiement par acomptes (FF 1999, p. 1787, spéc. p. 1826).
Même pour les personnes à faibles revenus, le revenu journalier moyen net constitue donc le critère en principe déterminant pour la fixation du montant du jour-amende. Le minimum vital, mentionné dans le texte légal, est un critère correctif, tout comme le train de vie de l'auteur, permettant au juge de réduire sensiblement le montant du jour-amende en certaines circonstances. Dans ce contexte, le législateur, préférant s'en remettre à l'appréciation du juge dans chaque cas particulier, a exclu la fixation d'un montant minimum en matière de fixation du jour-amende. Il s'agit-là d'une décision délibérée du législateur, qui exclut l'adoption d'un montant plancher par la voie jurisprudentielle. Le montant du jour–amende ne saurait toutefois être réduit au point de ne plus avoir qu'une valeur symbolique (cf. ATF 135 IV 180; ATF 134 IV 60; TF 6B_217/2007 du 14 avril 2008 c. 2.1.5 et les références citées).
10.2
En l'espèce, le tribunal de police a retenu un montant de 90 fr. par jour en considérant que le prévenu gagnait alors, selon ses dires, 45'000 fr. par an, soit 3'750 fr. par mois, étant précisé que l’intéressé déclarait gagner, de manière sporadique, 75'000’ fr. par an en mars 2012, soit 6'250 fr. par mois lorsqu’il était salarié. A l’audience d’appel, le prévenu a indiqué qu’il n’avait encore obtenu aucun revenu en qualité d’indépendant en 2013 et qu’il allait envisager de reprendre une activité salariée. Dans ces circonstances, il y a lieu de tenir compte du revenu mensuel de 3'750 fr. retenu par le jugement, qui paraît conforme aux capacités professionnelles du prévenu.
Au titre des charges, il doit d'abord être tenu compte des aliments que le prévenu verse pour ses deux enfants aînés ne vivant pas sous son toit, par 1'000 francs. A ce montant doit être ajouté 150 fr. par mois pour l’accueil de ces deux enfants durant les périodes d'exercice du droit de garde. On tiendra compte également d'un montant de 400 fr. pour l'entretien de ses troisième et quatrième enfants jusqu’à l’âge de 10 ans, soit la moitié du forfait selon les lignes directrices de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites du 1
er
juillet 2009 (BlSchk 2009/5, ch. I, pages 196 s., spéc. p. 197 in initio), car sa femme travaille et gagne 6'800 fr. par mois, ce qui est largement supérieur au minimum vital.
Pour le reste, les charges d’impôts et d’assurance-maladie doivent être évaluées à 400 fr. par mois au total. Enfin, 850 fr. doivent être pris en compte au titre du minimum vital, toujours selon les lignes directrices déjà mentionnées, le minimum vital de 1'700 fr. pour un couple marié devant être divisé par deux (ibid.).
Le revenu moyen net est donc de 950 fr. par mois (3'750 – 850 – 1'000 – 150 – 400 – 400), soit 30 fr. par jour en chiffre rond (950 fr./30).
Le revenu déterminant de 90 fr. par jour retenu par le premier juge procède dès lors d'une fausse application de l'art. 34 al. 2 CP. Le montant du jour-amende doit ainsi être fixé à 30 fr. et les conclusions subsidiaires de l’appel admises dans cette mesure.
11.
L’appel doit ainsi être partiellement admis dans la mesure ci-dessus. L’appelant succombant cependant sur le principe de la déclaration de culpabilité et du prononcé d’une peine pécuniaire, les frais de première instance doivent être mis à sa charge.
12.
Vu la mesure dans laquelle l’appelant obtient gain de cause, les frais de la procédure d'appel seront mis à hauteur de la moitié à sa charge, le solde étant laissé à celle de l’Etat (art. 428 al. 1 CPP). L’appelant étant condamné, il n’y a pas lieu de lui octroyer une indemnité, même partielle, au sens de l’art. 429 CPP pour ses dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure, soit pour les opérations nécessaires de son défenseur de choix. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b6300b8c-2a8b-4651-b3aa-2bb29b5dc005 | En fait :
A.
Par jugement du 10 juillet 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de la Côte a constaté qu’I._ s’est rendu coupable d’actes d’ordre sexuel avec des personnes dépendantes, d’actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance et d’infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants (I), a condamné I._ à une peine privative de liberté de 10 mois, peine entièrement complémentaire à celle infligée par jugement du 2 juillet 2010 de la Cour de Cassation pénale à Lausanne (II), a renoncé à révoquer le sursis qui lui avait été accordé le 14 mars 2007 et prolongé le 2 juillet 2010 (III), a alloué à A._ un montant de 3'000 fr. à titre de tort moral et une somme de 4'200 fr. à titre de dépens pénaux, sous déduction de ce qui a été fixé pour son conseil d’office (IV), a ordonné le maintien au dossier des objets séquestrés sous fiche n° 44 au titre de pièce à conviction (V), a arrêté les indemnités d’office dues à Me Antonella Cereghetti Zwahlen à 2'208 fr. et à Me Gilles Monnier à 4'625 fr. 95 (VI), a dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité allouée au chiffre VI sera exigible pour autant que la situation d’I._ se soit améliorée (VII) et a mis à la charge du condamné les frais de la cause arrêtés à 16’043 fr. 95, étant précisé que ce montant comprend les indemnités arrêtées sous chiffre VI (VIII).
B.
Par annonce du 22 juillet 2013, puis déclaration motivée du 4 septembre 2013, I._ a formé appel contre ce jugement. Il a conclu, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens qu’il est libéré de tous les chefs d’accusation, que l’allocation à la partie plaignante d’une indemnité et de dépens est supprimée, qu’aucun frais n’est mis à sa charge et qu’une indemnité de l’art. 429 CPP d’un montant de 20'842 fr. 80 pour la procédure de première instance et d’un montant à dire de justice pour la procédure d’appel lui est allouée.
Dans les mêmes délais, le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois a formé appel contre ce jugement, en concluant à sa réforme en ce sens qu’I._ est condamné à une peine privative de liberté de 18 mois, peine entièrement complémentaire à celle infligée par jugement du 2 juillet 2010 par la Cour de cassation pénale à Lausanne, que le sursis accordé le 14 mars 2007 et prolongé le 2 juillet 2010 est révoqué et que l’exécution de la peine privative de liberté de 15 mois prononcée par le Tribunal correctionnel de La Côte est ordonnée.
Par courriers des 10 et 26 septembre 2013, A._ et I._ ont déclaré qu’ils n’entendaient pas déposer de demande de non-entrée en matière.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
I._ est né le [...] 1973 à [...]. Au terme de sa scolarité à [...], il a effectué un apprentissage de sérigraphe et a obtenu son CFC en [...]. Depuis le mois de décembre 2002, il est sans activité rémunérée. Actuellement, il perçoit une rente Al d’un montant de 1'778 fr. par mois ainsi qu’une rente de deuxième pilier. Le montant de son loyer s’élève à 1'183 fr. par mois. I._ occupe ses journées par la lecture, le bricolage et des cours d’anglais gratuits sur internet. Il a déposé une demande de reclassement auprès de l’office Al et est en attente d’une décision. Il suit également un traitement ambulatoire auprès du SMPP à raison de deux entretiens par mois. Célibataire, il n’a personne à sa charge.
Le casier judiciaire d’I._ fait état des condamnations suivantes :
- 14 mars 2007, Tribunal correctionnel de La Côte, peine privative de liberté de 15 mois avec sursis pendant 5 ans, avec obligation de suivre un traitement ambulatoire pour pornographie;
- 2 juillet 2010, Cour de Cassation pénale à Lausanne, peine privative de liberté de 18 mois, peine partiellement complémentaire au jugement du 14 mars 2007, pour actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance et pornographie, prolongation du délai d’épreuve accordé le 14 mars 2007 de 2 ans et 6 mois.
Le 5 juillet 2012, I._ a obtenu la libération conditionnelle avec un délai d’épreuve d’un an.
1.2
Dans le cadre de l’affaire qui a conduit à sa condamnation du 14 mars 2007, le prévenu a été soumis à une expertise psychiatrique. Dans leur rapport du 9 août 2006 (P. 46), les experts ont posé le diagnostic de troubles mixtes de la personnalité avec traits antisociaux et narcissiques prédominants et de structure de personnalité état limite organisée autour de l’axe pervers. Ils ont retenu que l’expertisé ne présentait aucune diminution de responsabilité et qu’un risque de récidive existait. Ils ont également observé chez le prévenu un important déni, qui participe à l’organisation des défenses perverses, ainsi qu’un recours fréquent à l’agir, qui témoigne de traits caractériels. Par ailleurs, ils ont relevé que l’expertisé manipulait fréquemment la réalité pour la modifier à son avantage et présentait un besoin manifeste de maîtrise et de contrôle de l’autre, se positionnant dans un rôle d’agresseur potentiel. Selon les experts, il était nécessaire de soumettre le prévenu à un traitement ambulatoire sur le long terme.
Dans un rapport du 4 juin 2008 relatif à l’évolution d’I._, les thérapeutes ont expliqué que ce dernier présentait toujours des traits de personnalité pervers, narcissiques, immatures et passifs. Par ailleurs, ils ont indiqué que leur patient niait toute récidive ou velléité de récidive de téléchargement sur son ordinateur de matériel à caractère pornographique, tout en affirmant son attirance pour les photographies dites de nu artistique.
Dans leur rapport du 12 janvier 2009, les thérapeutes ont expliqué qu’ils étaient confrontés à un patient présentant des traits de personnalité narcissiques, antisociaux et sado-masochistes, s’inscrivant sur un fonctionnement pervers peu susceptible d’évolution favorable en l’état. Selon eux, les éléments contradictoires illustraient les mécanismes de clivage, de déni et de manipulation de la réalité à l’oeuvre chez ce type de structure de personnalité.
Enfin, il ressort du rapport thérapeutique du 4 décembre 2009 que le prévenu se décrit comme quelqu’un de naïf, de sociable, de bon et de généreux, ainsi que comme un homme de parole ayant une conscience aiguisée du bien-être d’autrui mais qui avait été abusé.
2.
2.1
Fin avril 2008, suite à une annonce parue sur Internet selon laquelle un groupe de créateurs cherchait des modèles pour des séances photos, A._, née le 9 mars 1992, a pris contact avec l’adresse email indiquée. Quelques jours plus tard, I._ l’a rappelée. Les deux intéressés, qui ont tout de suite sympathisé, ont conversé par téléphone pendant une quinzaine de jours avant de se rencontrer en mai 2008 au domicile du prévenu afin de discuter du genre de photos que la jeune fille souhaitait faire. A l’issue de la soirée, ils ont dormi dans le même lit. Cette situation s’est répétée à deux autres reprises. A ces occasions, le prévenu n’a jamais évoqué le fait qu’il souhaitait faire poser la jeune fille nue ou en petite tenue. Il lui a toutefois expliqué que dans le cadre de sa profession il lui était arrivé de faire ce genre de photos.
Au fil des rencontres, A._, qui se trouvait dans une situation personnelle et familiale difficile, a noué une relation d’amitié avec le prévenu, en qui elle voyait un meilleur ami à qui elle pouvait entièrement se confier. Pour sa part, I._ a faussement déclaré à la jeune fille qu’il était en fin de vie en raison d’un cancer des poumons. Il lui disait également qu’elle devait passer plus de temps avec lui. Il lui a en outre fait croire que son beau-père avait mal parlé d’elle, alors qu’il connaissait les problèmes que l’adolescence rencontrait avec ses parents. Enfin, il lui a offert de nombreux cadeaux et promis de lui donner une Porsche. C’est dans ce contexte que les faits suivants ont eu lieu :
- En juin 2008, lors de sa première séance photos au domicile du prévenu, A._ a accepté de dénuder ses seins sur l’instance de ce dernier et après qu’il l’ait mise en confiance. Par la suite, la jeune fille a fait encore trois à cinq séances photos lors desquelles l’appelant insistait pour qu’elle se dénude. Elle a ainsi d’abord accepté de montrer ses fesses, puis son sexe. Elle a également accepté de prendre des poses sexuellement suggestives et d’utiliser des menottes. Elle a toutefois refusé de faire usage de godemichés et autres objets sexuels.
- Entre mai et octobre 2008, A._ et son amie, C._, ont fait une séance photo chez le prévenu au cours de laquelle elles ont pris des poses sexuellement suggestives suite à l’insistance et aux flatteries de ce dernier. Elles se sont finalement retrouvées nues dans la baignoire de l’appelant.
- Un soir d’octobre 2008, à son domicile, I._ a offert un cocktail alcoolisé à A._ qui l’a rendue un peu saoule. A un moment, et alors que le prévenu avait longuement prétendu être un expert en amour, notamment pour apprendre aux filles à prodiguer des fellations, il a déclaré à la plaignante avoir refusé une fellation de la part d’une autre fille car il souhaitait qu’elle soit la première. A._ a ainsi d’abord accepté de lécher un godemiché en suivant les conseils du prévenu. Ce dernier lui a ensuite proposé qu’elle lui fasse une fellation, pour qu’il puisse mieux juger. Les intéressés se sont alors dirigés dans la chambre à coucher où la plaignante s’est totalement dévêtue, puis couchée sur le lit. Le prévenu lui a alors dit qu’il allait lui montrer comment utiliser les objets sexuels qu’il lui avait offerts, puis l’a caressée avec un plumeau et l’a pénétrée avec un godemiché et des boules geisha. L’intimée a ensuite prodigué une fellation au prévenu en suivant ses conseils. Cette dernière s’est également laissée lécher le sexe.
A._ a déposé plainte contre I._ le 6 septembre 2010
2.2
Entre juin et octobre 2008, à deux reprises, A._, qui dormait au domicile du prévenu, s’est réveillée alors que ce dernier lui caressait le sexe par-dessous son pyjama.
Elle a déposé plainte le 6 septembre 2010.
2.3
Entre mai et octobre 2008, notamment avant les séances photos, le prévenu a remis de la marijuana à la plaignante qu’elle a consommée, soit une vingtaine de joints au total. Il lui a également proposé du LSD,ce qu’elle a refusé. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délai légaux par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP [Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0]), les appels d’I._ et du Ministère public sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in : Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon
l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
I.
Appel d’I._
3.
L’appelant invoque une violation de la présomption d’innocence.
3.1
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a). Dans cette mesure, la présomption d'innocence se confond avec l'interdiction générale de l'arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (TF 6B_216/2010 du 11 mai 2010 c. 1.1.1 et 1.1.2 et la jurisprudence citée).
3.2
3.2.1
L’appelant soutient en premier lieu que le tribunal correctionnel n’aurait pas exposé d’éléments suffisants pour fonder sa condamnation pénale et que les faits retenus, soit une situation psychologique troublée de la victime, des antécédents d’actes d’ordre sexuel dans le cadre familial et un besoin de transgresser les règle, ne constitueraient pas des indices probants pertinents pour le désigner comme l’auteur des actes commis au préjudice de la plaignante.
3.2.2
En l’occurrence, l’appelant omet, dans son analyse, de prendre en considération des éléments que les premiers juges ont pourtant relevés. On peut d’abord observer que l’attirance sexuelle éprouvée et admise par l’appelant pour la jeune fille constitue un point d’appréciation important. Lorsque l’on considère avec quelle obsession perverse il s’est mis en tête de la photographier de plus en plus dénudée, on discerne aisément les pulsions qui l’animaient. Devant le tribunal correctionnel, il a d’ailleurs reconnu que ces séances de photos lui plaisaient (jgt., p. 12).
Les premiers juges ont également relevé que l’appelant connaissait parfaitement la situation de détresse de la victime, qui s’était confiée à lui à plusieurs reprises. Pourtant, connaissant cette fragilité, le prévenu l’a encore accentuée, en faisant croire à sa victime qu’il était atteint d’un cancer. Il a également admis devant les premiers juges avoir menti à cette dernière à ce sujet (jgt., p. 12). Les explications selon lesquelles il aurait menti pour dissimuler sa dépression sont risibles. Le mensonge avait au contraire pour but d’accroître son emprise sur l’adolescente.
Par ailleurs, les observations des experts psychiatres dans leur rapport du 9 août 2006, sur lesquelles les premiers juges se sont également fondés, apportent effectivement des éléments d’appréciation pertinents, s’agissant notamment du besoin chez le prévenu de maîtrise et de contrôle de l’autre, dans un contexte de déni et d’organisation de défenses perverses (jgt., p. 20).
Enfin, l’analogie des faits entre ceux décrits dans l’acte d’accusation et ceux concernant la condamnation prononcée le 2 juillet 2010 pour des infractions identiques commises au préjudice de Z._ est frappante, s’agissant tant du type de victime, de sa situation et de son âge, que du mode opératoire.
Ainsi, et contrairement à ce que soutient l’appelant, on distingue dans le jugement de nombreux éléments probatoires fondant l’état de fait retenu par les premiers juges, avant même d’examiner la crédibilité des accusations de la victime. On ne discerne donc pas à ce stade de violation de la présomption d’innocence.
3.3
3.3.1
L’appelant soutient ensuite que c’est à tort que les premiers juges ont estimé qu’il n’y avait aucune raison de mettre en doute les accusations de la victime. Il fait valoir que ces déclarations ont varié, selon deux versions totalement contradictoires, la plaignante affirmant dans un premier temps n’avoir jamais eu d’actes d’ordre sexuel avec le prévenu. Il se réfère également aux déclarations de deux témoins qui ont déposés différemment sur les faits que la plaignante.
3.3.2
En l’occurrence, les premiers juges n’ont pas ignoré les versions successives présentées par la plaignante sur les faits de la cause. Ils ont fait état qu’elle avait menti dans un premier temps aux inspecteurs pour protéger I._ qu’elle considérait à l’époque comme son meilleur ami (jgt., p. 19). A cet égard, il est rappelé que ces déclarations sont intervenues en décembre 2008, soit quelques semaines après que la mère de la plaignante ait pris contact avec le Service de l’enfance et de la jeunesse notamment pour dénoncer la relation que sa fille entretenait avec le prévenu. L’intimée se trouvait donc, à cette période, encore sous l’emprise du prévenu qu’elle considérait toujours comme son ami. D’ailleurs, en 2009, cette dernière a pris contact avec lui alors qu’elle en avait l’interdiction (cf. P. 29, p. 17). Ce contexte explique donc les premières dénégations de l’adolescente au sujet de la réalité des actes d’ordre sexuel. Les variations de ses déclarations ne constituent ainsi pas un motif suffisant pour remettre en cause l’appréciation des preuves telle qu’effectuée par les premiers juges, ces déclarations étant de surcroît corroborées par les autres éléments rappelés ci-dessus (cf. c. 3.2.2 supra).
Quant aux témoignages invoqués, ils ne portent en réalité pour l’essentiel que sur des aspects très subjectifs (la plaignante ne paraissait pas gênée durant les séances photos, l’appelant était son meilleur ami, elle avait même un ascendant sur lui, etc.) et ne sont donc pas décisifs. En outre, ils rejoignent en bonne partie ce que la plaignante a déclaré lorsqu’elle cherchait à protéger l’appelant.
Ces éléments ne sont donc pas de nature à remettre en cause l’appréciation des preuves opérée en première instance. La conviction de la cour de céans rejoint ainsi celle des premiers juges.
3.4
3.4.1
L’appelant se prévaut ensuite du contenu du dossier du Service de l’enfance et de la jeunesse de I’Etat de Fribourg, montrant que la plaignante est « aguicheuse » et qu’elle rencontre des problèmes avec l’autorité. En outre, iI conteste avoir fourni du cannabis à cette dernière, qui pouvait se fournir et en consommer sans lui. Il fait également état de contradictions dans les affirmations de l’adolescente, qui aurait en réalité pris conscience de l’attirance sexuelle qu’il éprouvait pour elle bien avant son audition par le Ministère public. Il souligne enfin que la plaignante a entretenu d’autres relations intimes avec des hommes.
3.4.2
En réalité, rien dans l’argumentation de l’appelant ne permet d’entamer la conviction mentionnée ci-dessus. II est en effet usuel qu’une jeune femme ayant déjà été victime antérieurement d’abus sexuels, comme c’est le cas de la plaignante, adopte des comportements provocateurs ou même entretienne d’autres rapports sexuels qui seraient prohibés. Il est également possible que la plaignante ait consommé des produits stupéfiants qui n’ont pas été fournis par l’appelant. Toutefois, cela importe peu, comme il est en définitive indifférent de déterminer le moment où la jeune femme a réellement pris conscience de l’attirance du prévenu pour elle. Pris dans leur ensemble, les griefs de l’appelant relèvent plus d’une tentative de dénigrement de la victime que de moyens pertinents sous l’angle probatoire.
3.5
3.5.1
L’appelant conteste également avoir mis à profit sexuellement l’endormissement de la plaignante et avoir passé outre les refus exprimés par cette dernière.
3.5.2
En l’occurrence, il s’agit de contestations fondées sur des versions antérieures de la victime et sur lesquelles elle est revenue. Le fait que l’appelant ait parfois dormi avec la jeune fille sans en profiter ne change rien aux accusations précises de cette dernière, qui indique s’être réveillée alors que le prévenu lui caressait le sexe par-dessous son pyjama. Quant aux refus exprimés par la victime et qui auraient été pris en considération par l’appelant, ils sont sans pertinence, ce dernier n’ayant pas été condamné pour contrainte sexuelle.
3.6
3.6.1
Enfin, l’appelant fait valoir que la plaignante a subi d’autres actes plus graves et qu’il a formulé des réquisitions pour que toute la lumière soit faite sur ces faits. Or, ces réquisitions ont été rejetées, ce qui signifierait que les autorités n’ont pas cru A._. En définitive, il aurait été accusé à tort, en raison des photos compromettantes
3.6.2
S’il n’a pas été donné suite aux réquisitions de preuve de l’appelant, c’est que les faits qu’il invoque ne concernent pas la présente procédure et qu’à supposer avérés, ils sont sans incidence sur la cause à juger ici. Quant à l’hypothèse qu’il aurait été accusé à la place d’un tiers, elle ne résiste pas à l’examen, la plaignante ayant mentionné le prénom de [...] pour les autres faits.
3.7
En définitive, mal fondés, tous les moyens de l’appelant doivent être rejetés.
II. Appel du Ministère public
4.
Le Ministère public soutient d’abord que la peine infligée est trop clémente et estime qu’elle doit être arrêtée à 18 mois.
4.1
4.1.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
4.1.2
Aux termes de l'art. 49 al. 2 CP, si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l’auteur a commise avant d’avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l’auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l’objet d’un seul jugement.
Le cas (normal) du concours réel rétrospectif se présente lorsque l'accusé, qui a déjà été condamné pour une infraction, doit être jugé pour une autre infraction commise avant le premier jugement, mais que le tribunal ignorait. L'art. 49 al. 2 CP enjoint au juge de prononcer une peine complémentaire ou additionnelle (Zusatzstrafe), de telle sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement. Concrètement, le juge doit se demander comment il aurait fixé la peine en cas de concours simultané, puis déduire de cette peine d'ensemble hypothétique la peine de base, soit celle qui a déjà été prononcée (TF 6B_455/2013 du 29 juillet 2013 c. 2.4.1; TF 6B_28/2008 du 10 avril 2008 c. 3.3.1).
4.2
En l’espèce, la culpabilité d’I._ est lourde. Les faits dont il doit répondre, qui sont en concours, sont graves. Comme retenu par les premiers juges, l’appelant a agi à la façon d’un prédateur bien rôdé et s’est enferré dans une attitude de déni, en s’érigeant en victime et en reportant la faute sur la plaignante. Il n’a en outre présenté aucune excuse ni regret à l’endroit de cette dernière, ce qui dénote une absence totale de prise de conscience. A décharge, il est tenu compte de l’écoulement du temps. Par ailleurs, la peine à prononcer est entièrement complémentaire à celle de 18 mois infligée le 2 juillet 2010 par la Cour de cassation. Selon le jugement de première instance, pour l’ensemble des faits commis notamment au préjudice de Z._ et d’A._, c’est une peine privative de liberté de 28 mois qui est adéquate.
Compte tenu de la gravité objective des faits et des fautes commises, la peine complémentaire retenue par les premiers juges apparaît correctement mesurée et doit être confirmée.
Mal fondé, le premier grief du Ministère public doit être rejeté.
5.
Le procureur soutient ensuite que le sursis accordé le 14 mars 2007 et prolongé le 2 juillet 2010 doit être révoqué.
5.1
Aux termes de l’art. 46 al. 3 CP, le juge appelé à connaître du nouveau crime ou du nouveau délit est également compétent pour statuer sur la révocation d’un sursis précédemment octroyé.
Le juge doit ainsi examiner si les conditions d'une révocation sont réunies, laquelle postule que le crime ou le délit dont il est appelé à connaître ait été commis pendant le délai d'épreuve du sursis antérieur et qu'il y ait dès lors lieu de prévoir que l'auteur commettra de nouvelles infractions (art. 46 al. 1 CP). Cette dernière condition implique l'existence d'un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné (ATF 134 IV 140 c. 4.3). Elle correspond donc à l'une des conditions de l'octroi du sursis, de sorte que, comme dans ce dernier cas, le pronostic à émettre doit reposer sur une appréciation d'ensemble de tous les éléments pertinents (ATF 134 IV 140 c. 4.4 et les arrêts cités).
Dans l'appréciation des perspectives d'amendement à laquelle il doit procéder pour décider de la révocation d'un sursis antérieur, le juge doit tenir compte des effets prévisibles de l'octroi ou non du sursis à la nouvelle peine. Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L'inverse est également admissible : si le sursis précédent est révoqué, l'exécution de la peine qui en était assortie peut conduire à nier l'existence d'un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (ATF 134 IV 140 c. 4.5).
5.2
En l’espèce, il est indéniable que l’intimé a commis de nombreuses infractions durant le délai d’épreuve imparti par jugement du 14 mars 2007. Les récidives ont été commises de fin avril à octobre 2008 pour les faits de la présente cause et entre le 14 mars et le 6 juin 2007 pour les infractions jugées le 2 juillet 2010.
L’exécution de la seule peine complémentaire ne suffit pas. L’expertise psychiatrique, certes de 2006, mais toujours d’actualité (jgt., p. 24), met en évidence un risque de récidive patent. Plus inquiétant, tous les rapports thérapeutiques ultérieurs montrent un déni de responsabilité, une manipulation de la réalité et, surtout, un fonctionnement pervers peu susceptible d’évoluer (jgt., p. 20). La version soutenue tout au long de la procédure et encore en appel le confirme. L’intimé a déjà exécuté une peine privative de liberté qui n’a eu que peu d’effets, dès lors qu’il continue à inverser les responsabilités (jgt., p 24). Le pronostic est donc très sombre et la révocation du sursis s’impose. C’est d’ailleurs à tort que le tribunal correctionnel a considéré que les juges qui ont renoncé à révoquer le sursis (selon un jugement de première instance du 12 avril 2010) n’auraient pas procédé différemment s’ils avaient eu connaissance des faits commis entre fin avril et octobre 2008. En effet, la pluralité des victimes et les réitérations en cours d’enquête auraient dicté au contraire, comme aujourd’hui, la révocation du sursis.
Au surplus, le délai d’épreuve prolongé le 2 juillet 2010 arrive à échéance le 14 septembre 2014, de sorte que le délai de l’art. 46 al. 5 CP n’a pas encore commencé à courir.
6.
En définitive, l’appel d’I._ doit être rejeté et celui du Ministère public partiellement admis, en ce sens que le chiffre III du dispositif du jugement entrepris est modifié, le sursis accordé le 14 mars 2007 et prolongé le 2 juillet 2010 étant révoqué, et l’exécution de la peine privative de liberté de 15 mois ordonnée.
7.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel par 2’460 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1]), ainsi que l'indemnité d’office allouée à Me Gilles Monnier, par 2'280 fr., TVA et débours compris, et à Me Antonella Cereghetti Zwahlen, par 1'684 fr. 80, TVA et débours compris, sont mis par trois quarts à la charge d’I._, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b6d7fec1-68e1-4d5a-aab3-af1238ce5c92 | En fait :
A.
Par jugement du 14 août 2012, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l'Est vaudois a libéré Q._ des griefs de contrainte sexuelle et actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (I), l'a condamné pour viol à la peine privative de liberté de 30 mois sous déduction de 35 jours de détention avant jugement (II), a dit que la peine est complémentaire aux sanctions infligées les 17 février 2011 par le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois et 24 novembre 2011 par le Ministère public de l'Est vaudois (III), a ordonné la mise en détention de Q._ pour motifs de sûreté (IV), a dit que Q._ est le débiteur d'A.I._ de 14'766 fr. en réparation du dommage matériel et 15'000 fr. en réparation du tort moral (V), a levé le séquestre et ordonné le maintien des pièces et objets au dossier à titre de pièces à conviction (VI), a mis les frais de la cause par 33'106 fr. 90 à la charge de Q._ (VII) et a dit que le remboursement à l'Etat des indemnités aux défenseurs d'office ne sera exigé que si la situation financière du condamné s'améliore (VIII).
B.
Le 17 août 2012, Q._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d'appel du 10 septembre 2012, il a conclu à son acquittement.
Le 19 septembre 2012, la Procureure de l'arrondissement de l'Est vaudois a annoncé s'en remettre à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et ne pas déposer d'appel joint.
Par courrier du 25 septembre 2012, A.I._ a déclaré s'en remettre à justice et renoncer à déposer un appel joint.
Le 6 novembre 2012, Q._ a déposé un mémoire d'appel motivé.
Par courrier du 8 novembre 2012, A.I._ a demandé sa dispense de comparution personnelle à l'audience d'appel.
Le 9 novembre 2012, le Président de la Cour d'appel pénale a dispensé A.I._ de comparaître à l'audience du 12 novembre 2012.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
Né en 1989, Q._ est originaire du Kosovo. Il est arrivé en Suisse en 2003 et est titulaire d'un permis C. Il est le cadet d'une fratrie de quatre enfants. Sa scolarité a été difficile. Il a ensuite entrepris des stages dans différents domaines avant d'abandonner tout projet de formation. Il a expliqué avoir commencé à consommer de l'alcool et du cannabis vers l'âge de 15-16 ans et être tombé dans la délinquance à ce moment-là. Toute tentative de formation et d'insertion sociale a échoué. Le prévenu, entretenu par la Fondation de probation, vivait auprès de ses parents avant son incarcération le 14 août 2012.
Le casier judiciaire de Q._ comporte les inscriptions suivantes:
- le 6 décembre 2007, le Tribunal des mineurs vaudois l'a placé en maison d'éducation pour vol qualifié, tentative de vol, dommages à la propriété, violation de domicile, vol d'usage, délit et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. Le 16 décembre 2008, on a substitué à cette mesure l'assistance éducative.
- le 17 février 2011, le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois l'a condamné à une peine privative de liberté de 15 mois pour lésions corporelles simples, vol, tentative de vol, vol qualifié, dommages à la propriété, menaces, violation de domicile, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. L'exécution de la peine a été suspendue au profit d'un traitement ambulatoire.
- le 24 novembre 2011, le Ministère public de l'Est vaudois lui a infligé une peine privative de liberté de trois jours pour dommages à la propriété.
L'appelant a été détenu préventivement du 5 octobre au 4 novembre 2009, soit durant 31 jours. Depuis le 14 août 2012, il est détenu pour des motifs de sûreté.
1.2
Q._ a été soumis à une expertise psychiatrique menée par la Fondation de Nant durant l'année 2010. Il en ressort notamment que l'appelant a un quotient intellectuel global de 57 et qu'il présente un trouble de la personnalité avec retard mental léger ainsi qu'une consommation problématique d'alcool et de cannabis qui peuvent être considérés comme graves dans la mesure où ils affectent globalement son comportement et le rendent très influençable et susceptible de commettre des actes impulsifs. Le tableau clinique n'affecte pas la conscience mais altère moyennement la volonté. Le risque de récidive est présent (P. 55).
2.
Durant la nuit du vendredi 25 au samedi 26 septembre 2009, A.I._ alors âgée de 17 ans s'est rendue en compagnie de plusieurs amis à la discothèque [...] à Montreux. A cet endroit, elle a bu deux verres de cocktails à base de vodka et de jus de fruit ou de Redbull. Q._ ou un comparse non identifié a versé subrepticement dans l'un de ces verres une substance incapacitante aux effets analogues à l'acide gamma-hydroxybutyrique (GHB). Vers 3h30 le samedi 26 septembre 2009, alors qu'A.I._ se trouvait dans un état semi-comateux sous l'influence de ce produit, l'appelant a entraîné la jeune femme titubante hors de la discothèque et l'a emmené dans un appartement dont il disposait à Montreux. A cet endroit, l'appelant a abusé d'A.I._ en la pénétrant. La jeune femme a retrouvé ses esprits vers 8h00 le samedi 26 septembre 2009. En se réveillant, elle a constaté qu'elle était allongée sur un divan, à demi nue, que son soutien-gorge était dégrafé et qu'elle ne portait ni culotte, ni collants. L'appelant reposait à ses côtés. Elle s'est aussitôt levée et a cherché à réunir ses affaires, sans réussir à trouver son sac et son manteau. Elle a pris la fuite, suivie par son agresseur.
L'examen médical pratiqué sur A.I._ le 27 septembre 2009 a mis en évidence des ecchymoses situées au tiers proximal de la face antéro-interne du bras gauche et sur la face antérieure du genou droit. Lors de cet examen, la jeune femme s'est plainte de douleurs sur tout le corps (P. 22).
E.I._ et F.I._ ont déposé plainte pour leur fille mineure par courrier du 29 septembre 2009 (P. 6).
D.
Aux débats d'appel, la Procureure a produit un rapport de dénonciation de la gendarmerie de Vevey dans lequel il est mentionné qu'il avait été retrouvé sur l'appelant lors de son arrestation à l'issue des débats de première instance un sachet plastic contenant du cannabis (15 gr. emballage compris; P. 149). | En droit :
1.
Selon l'art. 399 al. 1 CPP, l'appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d'appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l'occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour le faire (art. 382 al. 1 CPP) et contre un jugement d'un tribunal ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011,
n. 19 ad art. 398 CPP).
3.
Q._ invoque une constatation incomplète ou erronée des faits au sens de l'art. 398 al. 2 CPP. Il reproche d'abord aux premiers juges de ne pas avoir fait état du second profil ADN retrouvé dans les prélèvements effectués sur la plaignante.
Les analyses ont mis en évidence trois profils Y. Deux d'entre eux provenant de prélèvements réalisés au niveau des petites lèvres et d'un morceau de bande hygiénique correspondaient au profil du prévenu. Quant au troisième profil, provenant d'un prélèvement réalisé au niveau de l'introïtus vulvaire, il s'agissait d'un profil de mélange. Le profil Y majoritaire de ce mélange correspondait au profil Y du prévenu. Le profil Y minoritaire a été comparé sans succès au profil de B._, compagnon de soirée de l'appelant (P. 25 et P. 86). Ce profil Y minoritaire n'a pas fait l'objet d'autres investigations faute d'éléments permettant de soupçonner ou d'identifier un tiers comme pouvant être à l'origine de ce matériel masculin.
En l'occurrence, on ne discerne pas en quoi ce fait pourrait avoir une influence sur la culpabilité de l'appelant, ce dernier n'apportant d'ailleurs aucun élément permettant de penser le contraire.
Mal fondé, le premier moyen de l'appelant doit être rejeté.
4.
L'appelant soutient ensuite que son comportement le soir des faits et la journée suivante n'est pas celui d'un violeur et que son profil psychologique n'est pas compatible avec le scénario retenu par les premiers juges.
En l'espèce, les déclarations du prévenu, c'est-à-dire sa version des faits, ont été relatées de manière détaillée par les premiers juges (pp. 22-23) qui les ont écartées de manière circonstanciée (pp. 26-28). Ils ont ainsi expliqué que la thèse de l'attirance réciproque ne tenait pas au vu notamment des témoignages univoques des camarades de la plaignante, de la réserve naturelle de celle-ci et de la fausseté du motif invoqué par le prévenu pour expliquer son expulsion du [...]. Ils ont en outre exposé que l'enregistrement vidéo montrait que la plaignante ne se déplaçait pas aisément à la sortie de l'établissement, qu'elle n'était pas ivre au vu de l'analyse de sang pratiquée ensuite, que la version du prévenu ne rendait pas compte des lésions fraîches observées sur le bras et le genou de la plaignante, ni de l'oubli par la plaignante de son sac dans la discothèque et de la présence de son liquide séminal dans le vagin de la jeune fille.
Ainsi, si les déclarations du prévenu ne correspondent pas au scénario du viol, c'est parce qu'elles ne sont pas conformes à la réalité comme les premiers juges l'ont montré de façon convaincante et détaillée.
S'agissant du profil psychologique du prévenu, les experts psychiatres ont posé le diagnostic de trouble de la personnalité et retard mental léger (P. 55,
p. 8). Certes, à dires d'experts, ce diagnostic est compatible avec le rôle de suiveur dans un contexte de bande de copains et on peine à l'imaginer prendre des initiatives dans ce contexte. En l'espèce toutefois, on ne se trouve pas dans un contexte de bande et le trouble du comportement dont le prévenu souffre se caractérise par une perturbation durable du fonctionnement psychique et des tendances comportementales qui affectent le contrôle des impulsions et le mode de relation à autrui (P. 55, p. 9). On ne voit donc pas en quoi ce profil psychologique ne serait pas compatible avec les faits reprochés.
Mal fondé, ce moyen doit être rejeté.
5.
L'appelant soutient encore que les déclarations faites par la plaignante seraient contredites par les différents témoignages et par la description qu'elle a faite de la chronologie des événements.
5.1
La thèse du "trou noir" serait contredite selon l'appelant par les déclarations du témoin F._ à qui la plaignante aurait raconté qu'elle avait fait l'amour avec un garçon, que c'était sa première fois, qu'il n'avait pas de préservatif, qu'elle ne se rappelait de rien, qu'en fait elle avait repris ses esprits à un moment se rendant compte qu'elle était en train de se "faire sauter" (PV audition 3,
p. 3). Aux débats de première instance, la plaignante n'a pas pu expliquer pourquoi elle aurait fait ces déclarations. Elle a souligné que le témoin ne s'exprimait pas en français et qu'elle-même n'aurait pas employé l'expression faire l'amour (jgt, p. 11).
En l'occurrence, il convient d'abord de relever que l'essentiel des faits rapportés par le témoin ont été retenus par les premiers juges puisqu'ils ont été corroborés par d'autres preuves, soit les relations sexuelles, la première fois et l'absence de souvenirs. Quant aux éléments dont l'appelant fait grand cas, soit la reprise de conscience et l'absence de préservatif, ils peuvent très bien s'expliquer par des flashs au milieu d'un état comateux dû au produit ingéré ou la crainte rétrospective de ce qui a pu se produire pendant la perte de conscience. Il faut enfin rappeler l'état confusionnel dans lequel était alors la plaignante. Ainsi, l'appelant se garde bien de rappeler que le témoin F._ a rapporté que la plaignante avait sonné à sa porte à 9h30 le lendemain des faits et qu'elle était en larmes.
La thèse du "trou noir" serait encore contredite par les déclarations de la pharmacienne K._ qui a rapporté que la jeune fille lui avait précisé qu'elle était vierge le jour d'avant et qu'elle ne l'était plus (P. 15, p. 2). A cet égard, il faut rappeler que la plaignante a expliqué avoir ressenti une douleur dans le bas-ventre. Ensuite, en se réveillant à demi nue avec cette douleur à côté d'un inconnu, la relation d'une perte de virginité était logique.
On ne voit dès lors là non plus rien de contradictoire avec les déclarations générales de la plaignante.
5.2
L'appelant ne comprend pas comment la plaignante pourrait ne se souvenir de rien et avoir ressenti une douleur au bas-ventre. Il estime que le Tribunal aurait dû s'interroger sur le caractère circonstanciel de cette assertion.
D'abord, il faut préciser que la plaignante ne se souvenait pas de rien du tout, mais a expliqué avoir un "trou noir" entre le temps de la discothèque et le temps du réveil. Cela étant, le ressenti d'une douleur est une chose et l'absence de souvenirs une autre, l'un n'empêchant pas l'autre. On ne perçoit pas là non plus de contradiction dans les déclarations de la plaignante.
5.3
L'appelant voit une contradiction entre le fait de ne pas se souvenir de son visage (PV audition 1) et se souvenir des lieux dans lesquels elle s'est réveillée (PV audition 5).
En l'espèce, à son réveil, la plaignante a cherché à fuir son agresseur. Dans ces circonstances, il n'est pas étonnant qu'elle ne se souvienne pas de son visage lors de sa première audition.
5.4
L'appelant estime que les premiers juges devaient s'interroger sur les circonstances du dépôt de plainte. Il relève que les deux premiers réflexes de la plaignante n'ont pas été de consulter un médecin, d'aller à l'hôpital ou à la police, mais de récupérer ses affaires à la discothèque, ainsi que de se rendre à la pharmacie pour prendre la pilule du lendemain. Il s'interroge également sur le fait qu'il ait été question de viol et de plainte à l'initiative de la pharmacienne.
D'emblée, il faut relever que le comportement d'une jeune femme qui se réveille confuse, dans un lieu inconnu, à demi nue et à côté d'un homme qu'elle ne connaît pas ne sera pas nécessairement cohérent. Il n'est également pas incompréhensible que la plaignante ait eu envie avant toute chose de récupérer son sac dans lequel se trouvait certainement son téléphone portable et ses papiers d'identité. Ensuite, selon l'expérience de la vie, le premier réflexe d'une jeune fille qui a eu un rapport sexuel non désiré est d'éviter de tomber enceinte. Il n'y a donc rien d'anormal à ce qu'elle se soit d'abord rendue à la pharmacie. Pour le surplus, le fait que la pharmacienne, une professionnelle, se soit doutée d'un viol et d'utilisation de drogues, vient au contraire donner du crédit aux déclarations de la victime.
5.5
L'appelant évoque enfin différentes hypothèses qui permettraient selon lui d'expliquer l'origine des contradictions de la plaignante qu'il a tenté en vain de démontrer.
En l'occurrence, les éléments avancés par l'appelant, soit la peur du règlement de l'école et la réprobation familiale, ne sont pas pertinents dans la mesure où comme on vient de le voir ces contradictions n'existent pas.
5.6
Au vu de ce qui précède, le moyen de l'appelant tendant à soutenir que les déclarations de la plaignantes sont contradictoires est mal fondé et doit être rejeté.
6.
Q._ soutient que faute de pénétration vaginale, il n'y a pas viol mais contrainte sexuelle.
Aux termes de l'art. 189 al. 1 CPP celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d’ordre psychique ou en la mettant hors d’état de résister l’aura contrainte à subir un acte analogue à l’acte sexuel ou un autre acte d’ordre sexuel, sera puni d’une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
D'après l'art. 190 CP, celui qui, notamment, en usant de menace ou de violence, en exerçant sur la victime des pressions d'ordre psychologique ou en la mettant hors d'état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel, sera puni d'une peine privative de liberté de un à dix ans.
L'art. 189 CP vise à réprimer de manière générale la contrainte en matière sexuelle. Le viol (art. 190 CP) constitue une lex specialis pour le cas où la victime est une femme et qu'il lui est imposé l'acte sexuel proprement dit. L'acte sexuel au sens de l'art. 190 CP est l'union naturelle des parties génitales de l'homme (pénis) et de la femme (vagin). L'introduction même partielle et momentanée du pénis dans le vagin de la femme est constitutive de l'acte sexuel. L'écoulement du sperme dans le vagin n'est donc pas nécessaire (Dupuis et al., Petit Commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 14 ad art. 190 CP).
En l'espèce, le liquide séminal du prévenu a été trouvé sur l'introïtus vulvaire qui se situe, selon les médecins, à la jonction de la vulve (organes génitaux féminins) et du vagin. Il s'agit de la zone d'insertion des différents types d'hymen s'ils existent (P. 80, p. 1). Certes, une pénétration vaginale n'a pas pu être objectivée mais cela ne signifie pas pour autant qu'elle n'ait pas eu lieu à dire de médecin
(P. 80, p. 1). De plus, la présence de liquide séminal à la jonction de la vulve et du vagin et les douleurs au bas ventre ressenties par A.I._ parlent en faveur d'une pénétration, au moins partielle.
Au vu de ce qui précède, l'élément constitutif d'acte sexuel est réalisé.
Mal fondé, ce moyen doit être rejeté.
7.
L'appelant soutient qu'il n'a pas fait usage de violence pour arriver à ses fins.
La contrainte de l'art. 190 CP consiste notamment en l'usage de la menace ou de la violence, en l'exercice de pressions d'ordre psychique ou en la mise hors d'état de résister.
En l'espèce, contrairement à ce qui est soutenu par l'appelant, les premiers juges ont retenu que la contrainte décisive exercée par l'appelant l'avait été sous la forme de la mise hors d'état de résister par l'administration d'une substance annihilante et non pas la violence (jgt, p. 29).
Partant, mal fondé, ce moyen doit être rejeté.
8.
L'appelant soutient qu'il n'est pas possible de retenir une incapacité totale de discernement ou de résistance de la plaignante au moment du rapport sexuel. Il invoque différents arguments.
8.1
D'abord, l'appelant reproche aux premiers juges d'avoir, en retenant la version de la plaignante, procédé à une interprétation arbitraire des preuves en écartant un abus d'alcool au profit de l'absorption d'un produit de type GHB.
Outre l'enregistrement vidéo montrant que la victime titubait et l'oubli de ses effets personnels dans la discothèque, les premiers juges se sont fondés notamment sur les rapports médicaux pour écarter l'abus d'alcool (P. 23, p. 2; jgt,
p. 14). Ainsi, son taux d'alcoolémie ne pouvait pas être supérieur à 0,8 g 0/00 à 3h00 du matin lorsqu'elle a quitté la discothèque. L'appréciation motivée des premiers juges ne prête donc pas le flanc à la critique (jgt, p. 25). Quant au fait que personne n'aurait vu le prévenu verser quelque chose dans le verre de la plaignante, c'est justement le propre de ce moyen que de l'utiliser en cachette.
8.2
L'appelant reproche aux premiers juges d'avoir rejeté sa version des faits. Les arguments qu'il évoque sous chiffre 7.2 de son mémoire d'appel sont similaires à ceux évoqués précédemment dans son écriture sous chiffre 3. Dès lors, il convient de se référer au chiffre 4 ci-dessus, dans lequel il est exposé pourquoi les premiers juges ont à juste titre rejeté la version de l'appelant. Au surplus, il est faux de soutenir que la plaignante était complètement ivre puisque les analyses médicales ont expressément démontré le contraire.
8.3
L'appelant cite ensuite des passages de l'expertise du Centre Universitaire Romand de Médecine légale (CURML) pour en déduire que la victime n'était pas hors d'état de résister au moment de l'acte sexuel. Le fait qu'elle ait été capable de marcher en étant soutenue au sortir de la discothèque signifierait qu'elle était capable de résistance au moment de l'acte sexuel. Il y aurait là, selon l'appelant, place à un doute.
Ce raisonnement fait fi de l'état dans lequel la plaignante s'est retrouvée à son réveil dans l'appartement du prévenu et son absence de souvenirs, conséquences classiques de l'absorption de substances du genre GHB.
8.4
L'appelant conteste la thèse de l'absorption de GHB ou d'une autre substance analogue.
Les prélèvements de sang et d'urine de la plaignante ont été effectués le 26 septembre 2009 à 10h56. Aucune trace n'a été détectée. Le médecin a expliqué que les substances entrant en ligne de compte ne laissaient plus de trace dans l'urine 10 à 12 heures après absorption. Toutefois, il a précisé que ces valeurs étaient indicatives et dépendaient de différents paramètres (P. 107, p. 7). Aux débats de première instance, l'expert a également déclaré que, dans le cas d'espèce, il était impossible d'affirmer qu'il y avait eu consommation d'une substance de soumission chimique, ni impossible d'infirmer le contraire (jgt, p. 15).
En l'espèce, il revient au tribunal d'apprécier si A.I._ s'est bel et bien vue administrer une substance annihilante ou non, en fonction des déclarations de l'expert mais également des autres éléments au dossier. D'un point de vue chronologique d'abord, l'absorption d'une substance ne peut pas être totalement exclue comme le soutient l'appelant dans la mesure où la vitesse d'élimination de la substance dépend d'un certain nombre de critères, notamment de la dose ingérée, laquelle est en l'occurrence inconnue, mais peut aussi varier d'une personne à l'autre. Par ailleurs, la plaignante est arrivée au [...] vers minuit (PV audition 3, p. 2) et a donc pu se faire administrer la substance entre minuit et une 1h00 du matin. De plus, ce qui a été décrit précisément par la plaignante dont le témoignage est crédible correspond parfaitement aux symptômes de la prise d'une substance, soit l'amnésie, l'état comateux, la confusion, la désorientation et les douleurs musculaires. L'amnésie ne peut par exemple que s'expliquer par la prise d'une substance, non pas par la prise d'une faible dose d'alcool, étant précisé qu'une quantité importante d'alcool aurait été décelée à la prise de sang. Enfin, au vu du déroulement de la soirée, seul l'appelant ou un comparse a pu administrer la substance à la plaignante.
Au vu de ce qui précède, il n'existe aucun doute sur le fait que la plaignante s'est vue administrer une substance qui l'a rendue hors d'état de résister. Cette thèse n'est pas en contradiction avec l'avis de l'expert.
8.5
L'appelant soutient enfin qu'il n'est pas possible de considérer que la plaignante ait été hors d'état de résister à cause d'un abus d'alcool comme a semblé le soutenir la police dans son rapport.
Les premiers juges ont écarté à juste titre la thèse de l'abus d'alcool se fondant sur l'analyse sanguine qui ne présentait aucune trace d'alcool huit heures après que la plaignante ait quitté la discothèque (jgt, p. 25). Il n'y a en l'occurrence pas lieu de revenir sur ce point que l'appelant ne discute pas. Par ailleurs, si le rapport de police retenait cette hypothèse, c'est parce que les analyses n'étaient pas encore connues (jgt, p. 14).
8.6
Compte tenu de ce qui précède, A.I._ était hors d'état de résister au moment où elle a quitté la discothèque avec l'appelant et qu'elle s'est rendue à son appartement.
Mal fondé, le dernier moyen de l'appelant doit également être rejeté.
9.
La condamnation de l'appelant pour viol étant confirmée, il appartient encore à la Cour de céans d'examiner la peine infligée en première instance (art. 404 al. 2 CPP).
9.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
9.2
Partant de la gravité objective de l'acte (objektive Tatschwere), le juge doit apprécier la faute (subjective; subjektives Tatverschulden). Il doit mentionner, dans le jugement, les éléments qui augmentent ou diminuent la faute dans le cas concret et qui permettent d'apprécier la faute en relation avec l'acte. Le législateur mentionne plusieurs critères, qui jouent un rôle important pour apprécier la faute et peuvent même conduire à diminuer celle-ci de telle manière qu'il convient de prononcer une peine inférieure au cadre légal ordinaire de la peine. Parmi ceux-ci, figure notamment la diminution de la responsabilité au sens de l'art. 19 CP. Dans ce cas, contrairement à la lettre de la disposition et en modification de la jurisprudence en vigueur (ATF 134 IV 132 c. 6.1), il s'agit de diminuer la faute et non la peine; la réduction de la peine n'est que la conséquence de la faute plus légère. D'autres circonstances peuvent aussi augmenter la faute et compenser la diminution de capacité cognitive ou volitive. On peut citer par exemple des motifs blâmables. Le juge jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour apprécier ces éléments (TF 6B_238/2009 du 8 mars 2010 c. 5.5 et 5.6, rés. in ATF 136 IV 55, JT 2010 IV 127).
9.3
D'après l'art. 49 al. 2 CP, si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement.
9.4
En l'espèce, l'appelant a mis hors d'état de résister, puis a abusé d'une jeune femme encore vierge au moment des faits. Comme l'ont relevé les premiers juges, il a fait vivre sa victime dans l'incertitude et la honte et a fait naître en elle des troubles persistants. A charge, il faut encore tenir compte de son absence de prise de conscience et de ses antécédents. A décharge, seule une diminution moyenne de la responsabilité pénale de l'appelant peut être retenue, étant précisé que les troubles dont il souffre n'affectent pas sa conscience, mais uniquement sa volonté.
Compte tenu de la gravité des actes reprochés et du mépris d'autrui qu'implique le comportement reproché à l'appelant ainsi que les éléments à charge et à décharge, la culpabilité de l'appelant est lourde. La peine complémentaire aux condamnations des 24 février et 24 novembre 2011 fixée par les premiers juges, qui ne sont pas sortis du cadre de l'art. 47 CP, à 30 mois de peine privative de liberté, est adéquate et doit être confirmée.
Au vu des antécédents de l'appelant, du risque de récidive relevé par les experts et de son absence de prise de conscience de sa faute, un sursis partiel n'entre pas en ligne de compte.
Enfin, la quotité de l'indemnité pour tort moral allouée, qui n'a pas été attaquée en elle-même en appel, ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmée.
10.
En conclusion, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être mis à la charge de Q._ qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b6e6a7a0-fb28-4eb8-aa95-17d493f8c4c9 | En fait :
A.
Par jugement du 24 juin 2015, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l’Est vaudois a libéré E._ des infractions de violation simple et grave des règles de la circulation routière (I), l’a condamné pour homicide par négligence, lésions corporelles graves et simples par négligence, mise en danger de la vie d’autrui et violation des obligations en cas d’accident à une peine privative de liberté de 24 mois, avec sursis durant 4 ans, et à une amende à titre de sanction immédiate de 4'000 fr., la peine privative de liberté de substitution étant de 40 jours (II), a condamné M._ pour homicide par négligence, lésions corporelles graves et simples par négligence, mise en danger de la vie d’autrui et infraction grave des règles de la circulation routière à une peine privative de liberté de 30 mois, dont 6 mois fermes, le solde étant assorti d’un sursis durant 5 ans (III), a dit qu’E._ et M._ sont les débiteurs, solidairement entre eux, d’Y.I._ d’un montant de 30'000 fr., avec intérêt à 5% l’an dès le 15 septembre 2011, à titre d’indemnité pour tort moral (IV), a donné acte de ses réserves civiles à l’encontre d’E._ et M._ pour le surplus à Y.I._ (V), a dit qu’E._ et M._ sont les débiteurs, solidairement entre eux, de H._ d’un montant de 75'000 fr. à titre d’indemnité pour tort moral, valeur échue (VI), a donné acte de ses réserves civiles à l’encontre d’E._ et M._ pour le surplus à H._ (VII), a dit qu’E._ et M._ sont les débiteurs, solidairement entre eux, de L._ d’un montant de 50'000 fr., avec intérêt à 5% l’an dès le 30 août 2011 à titre d’indemnité pour tort moral (VIII), a donné acte de ses réserves civiles à l’encontre d’E._ et M._ pour le surplus à L._ (IX), a dit qu’E._ et M._ sont les débiteurs, solidairement entre eux, de V._ d’un montant de 10'000 fr. à titre d’indemnité pour tort moral, avec intérêt à 5% l’an dès le 30 août 2011 (X), a donné acte de ses réserves civiles à l’encontre d’E._ et M._ pour le surplus à V._ (XI), a donné acte de ses réserves civiles à l’encontre d’E._ et M._ à la Fondation [...] (XII), et a fixé les frais et les dépens (XIII à XVII).
B.
a) Par annonce du 30 juin 2015, puis par déclaration motivée du 22 juillet 2015, E._ a formé appel contre le jugement précité, concluant, sous suite de frais et dépens de première et de seconde instances, à sa réforme en ce sens qu’il est libéré des infractions d’homicide par négligence, lésions corporelles graves et simples, mise en danger de la vie d’autrui et violation des obligations en cas d’accident, qu’il est condamné pour violation grave des règles de la circulation routière à une peine nettement inférieure à celle qui lui a été infligée, fixée à dire de justice, que M._ est reconnu seul débiteur des parties plaignantes pour les montants concernés et que les frais mis à sa charge sont considérablement réduits dans une mesure fixée à dire de justice.
Par déclaration du 17 août 2015, le Ministère public a formé un appel joint, concluant à la réforme du jugement susmentionné en ce sens qu’E._ est condamné, en raison des infractions retenues par le tribunal correctionnel, à une peine privative de liberté de 30 mois, dont 6 mois fermes et 24 mois avec sursis durant 3 ans, et que les frais sont mis à sa charge.
b) Par annonce du 2 juillet 2015, puis par déclaration motivée du 23 juillet 2015, M._ a également formé appel contre le jugement rendu le 24 juin 2015, concluant, sous suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens qu’il n’est en substance pas condamné à verser d’indemnités pour tort moral aux parties plaignantes, subsidiairement qu’il est condamné à verser une indemnité pour tort moral à H._, L._ et V._ d’un montant inférieur à celui qui a été retenu dans le jugement précité, soit aux montants
de respectivement 20'000 fr., 10'000 fr. et 3'000 fr., que l’indemnité due à son défenseur d’office est fixée à 11'463 fr. 40 et que les frais mis à sa charge s’élèvent à 26'443 francs.
Par déclaration du 17 août 2015, le Ministère public a formé un appel joint, concluant à la réforme du jugement susmentionné en ce sens que M._ est condamné, en raison des infractions retenues par le tribunal correctionnel, à une peine privative de liberté ferme de 36 mois et que les frais sont mis à sa charge.
Par courrier du 14 septembre 2015, M._ a retiré partiellement son appel, en tant qu’il porte sur les conclusions tendant à la modification des chiffres XIV et XVI du jugement attaqué, à savoir sur l’indemnité de défenseur d’office et les frais.
Par courrier du 8 octobre 2015, le Ministère public a retiré l’appel joint dirigé contre M._. Le 28 octobre 2015, le Président de la Cour de céans a pris acte de ce retrait d’appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
E._ est né le [...] 1974 à [...]. Originaire de [...]/VD, il est divorcé et a un enfant, né en 2007, pour lequel il paie une contribution d’entretien de 900 fr. par mois. Ses parents s’étant séparés durant son enfance, il a grandi auprès de sa mère. Il a un frère cadet ainsi que trois demi-frères et sœurs. Après avoir achevé sa scolarité, il a effectué un apprentissage d’employé de commerce, au terme duquel il a obtenu son CFC. Il a ensuite obtenu un diplôme de technicien qualité et en logistique, puis entrepris une formation dans l’horlogerie. Il travaille actuellement au sein de l’entreprise de manufacture horlogère [...], à [...], activité pour laquelle il perçoit un salaire mensuel brut de 9'000 fr., versé douze fois l’an, ainsi qu’un bonus.
Son casier judiciaire suisse et son fichier ADMAS sont vierges.
1.2
M._, titulaire d’un permis B, est né le [...] 1982 à [...], au Kosovo, pays dont il est ressortissant. Il est marié et a un enfant à charge, né en 2012. Il serait le deuxième d’une fratrie de six enfants. Il n’aurait pas terminé sa scolarité obligatoire, qu’il l’aurait interrompue à l’âge de 14 ans, et n’aurait pas suivi de formation professionnelle. Il indique être arrivé en Suisse à la fin de l’année 2011. Il travaille actuellement comme vendeur, pour un salaire mensuel brut d’environ 4'200 francs.
Son casier judiciaire suisse est vierge.
Son fichier ADAMS fait état de trois inscriptions pour vitesse, soit une interdiction de faire usage du permis étranger pendant un mois prononcée le 3 août 2010, un avertissement prononcé le 10 février 2011 et un retrait de permis de six mois (+ cours d’éducation routière) prononcé le 31 octobre 2013.
Son casier judiciaire français fait mention de deux condamnations :
- 26 octobre 2009, Tribunal correctionnel d’Albertville, violence sans incapacité par conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, 2 mois d’emprisonnement avec sursis ;
- 6 septembre 2010, Tribunal correctionnel d’Albertville, violence sans incapacité par conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, 3 mois d’emprisonnement avec sursis.
2.
Faits de la cause
Les faits retenus ci-après se fondent essentiellement, outre sur les déclarations des parties, sur le rapport de police du 29 septembre 2011 (P. 24) et le cahier photographique annexé (P. 25), ainsi que sur le rapport d’expertise technique de circulation établi par [...] le 17 octobre 2012 (P. 69) et ses compléments des 20 février et 18 octobre 2013 (P. 81 et P. 97/2) et du 18 juin 2015 (P. 162). La détermination des différentes vitesses et mesures a en particulier été effectuée au moyen de l’analyse de la vidéo de surveillance du trafic autoroutier.
2.1
L’accident du 23 juillet 2011
Le 23 juillet 2011, vers 14h45, E._ circulait depuis le Valais en direction de Lausanne sur l’autoroute A9, au volant d’un véhicule Porsche 911, à des vitesses supérieures à celles autorisées entre les jonctions de [...] et de [...], soit à une vitesse d’environ 130 km/h au lieu de 120 km/h, ainsi qu’à une vitesse d’environ 120 km/h dans le tunnel du [...], alors qu’elle est limitée à 100 km/h à cet endroit.
Peu après ce tunnel, E._ a dépassé le véhicule Audi S4 Quattro piloté par M._, dans lequel se trouvait également le cousin de ce dernier, [...], assis à l’avant, et l’épouse de celui-ci, [...], située à l’arrière. Suite à cette manœuvre, M._ a immédiatement déboîté sur la voie de gauche et a suivi la Porsche 911 à très courte distance. E._ s’est rabattu sur la voie de droite et a été dépassé par l’Audi S4 Quattro. E._ est alors directement revenu sur la piste de gauche, derrière M._. En file et séparés par une distance de 41 m (±2 m ; P. 162/2), les prénommés ont ensuite accéléré jusqu'à atteindre une vitesse mesurée à 194 km/h à tout le moins (P. 69, pt. 5.2, p. 13), vitesse à laquelle ils ont circulé sur plusieurs centaines de mètres, alors qu’ils se trouvaient peu après l’aire de ravitaillement de [...].
Moins d’un kilomètre plus loin, à la hauteur de la bretelle de la sortie [...], au km [...] [...] - [...],M._, inattentif, a percuté, dans une longue courbe à gauche, l’arrière du bus de marque Fiat Ducato de la Fondation [...], conduit à une allure de 100 à 110 km/h par V._, avec à son bord B.I._, passager avant, et H._ et L._, toutes deux à l’arrière. Le bus Fiat Ducato s’était auparavant déplacé sur la voie de gauche afin de dépasser le véhicule VW Polo conduit par A._. Au moment du choc, et malgré un freinage d’urgence, la vitesse du véhicule piloté par M._ était encore de 150 km/heure. Suite à l’impact, le bus conduit par V._ a dévié sur la droite et heurté le véhicule VW Polo d’A._ qu’il était en train de doubler, provoquant également l’embardée de ce dernier.
Le bus Fiat Ducato a dévié sur la droite et a terminé sa course à environ 110 m du point de choc initial après avoir franchi le nez physique séparant les voies de circulation direction Lausanne de celles de la bretelle de sortie [...] et effectué un tonneau, avant de s’immobiliser sur les roues, à droite de la chaussée. La VW Polo, après avoir été percutée par le véhicule précité, a également franchi le nez physique précité et s’est ensuite immobilisée contre un mur en béton, bordant la droite de la chaussée sur la bretelle de sortie. M._ a quant à lui pu stopper son véhicule sur la bande d’arrêt d’urgence à environ 180 m du point du choc.
E._, se trouvant derrière M._, a pu éviter l’accident en roulant sur certains débris. Il a continué sa route durant une dizaine de kilomètres, avant de s’arrêter et de s’annoncer comme témoin à la police.
2.2
Description du lieu de l’accident
A l’endroit de l’accident, la chaussée de l’autoroute A9 forme une ramification composée de deux voies de circulation direction Lausanne et de deux autres voies pour la bretelle de sortie [...]. Elles sont séparées par un terre-plein herbeux, formant un nez physique au bout duquel est implanté un séparateur de trafic de type A, aménagement précédé d’une surface interdite au trafic et d’une ligne de sécurité. Dans le sens Vevey - Lausanne, la chaussée décrit tout d’abord une longue courbe à droite depuis l’aire de ravitaillement de [...], puis une longue courbe à gauche au niveau de la bretelle de sortie [...]. La déclivité de la chaussée est d’environ 2% et son profil transversal est plat. Le revêtement, bitumineux et en bon état d’entretien, était propre et sec le jour de l’accident. A cet endroit, la visibilité est étendue.
La vitesse est limitée à 120 km/h sur les voies de circulation direction Lausanne et à 100 km/h puis 80 km/h au moyen de signaux ad hoc pour les usagers circulant en direction de la sortie [...]. Le tronçon autoroutier entre la jonction de [...] et le lieu de l’accident, qui comprend plusieurs tunnels, est limité à la vitesse de 120 km/h, hormis le franchissement des différents ouvrages d’art, où la vitesse est limitée à 100 km/heure.
2.3 Positions des véhicules et points de choc
2.3.1
A la suite du choc, les véhicules impliqués dans l’accident se sont positionnés de la manière suivante :
Le bus Fiat Ducato se situait, dans son sens de marche, légèrement en travers et à cheval sur la voie de droite et la bande d’arrêt d’urgence de la bretelle de raccordement direction [...]. Il a laissé des traces creuses sur la chaussée, ainsi que des traces de dérapage et de passage, puis divers débris et écoulements de liquides à l’endroit où le véhicule s’est immobilisé.
Le véhicule WV Polo d’A._ se trouvait en travers de la bande d’arrêt d’urgence de la bretelle de raccordement direction [...], l’avant appuyé sur une bordure bétonnée située à droite. Il a laissé des traces de dérapage.
L’auto Audi S4 Quattro conduit par M._ était arrêtée sur la bande d’arrêt d’urgence, direction Lausanne, environ 180 m après le point de choc. Elle a laissé des traces creuses sur la chaussée et des traces provenant de l’écoulement de liquides à l’endroit où le véhicule s’est immobilisé.
Le véhicule Porsche 911 conduit par E._ présentait des traces sur le pare-brise et le capot, provenant de la projection de déchets.
2.3.2
Les points de choc suivants ont en outre été constatés :
Un point de choc entre le véhicule Audi S4 Quattro et le bus Fiat Ducato sur la partie gauche de la voie de gauche direction Lausanne, quasiment à l’endroit où est implanté le dernier portique supportant la signalisation.
Un point de choc entre le bus Fiat Ducato et la VW Polo, lequel n’a pas pu être situé avec précision, mais qui doit se trouver sur la partie gauche de la voie droite direction Lausanne, dans une zone située entre le point de choc entre l’Audi S4 Quattro et le bus Fiat Ducato et le début des traces de dérapage laissées par la VW Polo.
Le bus Fiat Ducato a heurté le talus herbeux du nez physique, puis celui en contre-haut, à droite de la bretelle de raccordement.
Le véhicule VW Polo a heurté le séparateur physique de trafic de type A, implanté sur le nez physique.
2.4
L’analyse toxicologique de M._ n’a rien révélé de particulier.
2.5
Selon le rapport d’inspection technique établi le 29 août 2011 par le Service des automobiles et de la navigation, le véhicule Audi S4 Quattro conduit par M._ au moment de l’accident fait état de quelques irrégularités, mais qui n’ont pas présenté d’éléments susceptibles d’avoir provoqué l’accident ou d’en avoir aggravé les conséquences.
2.6
Conséquences de l’accident
2.6.1
B.I._ est décédé le 14 septembre 2011. Selon le rapport d’expertise établi le 7 novembre 2012 par le Centre Universitaire Romand de médecine légale (P. 75) et les déclarations de la Dresse [...] (Jgt, pp. 4 à 6), le sévère traumatisme subi par B.I._ lors de l’accident du 23 juillet 2011 est, de manière hautement vraisemblable, à l’origine d’une dissection de la carotide, qui a provoqué un sévère accident vasculaire cérébral, dont les conséquences ont causé la mort de la victime. Selon la prénommée, l’état préexistant de la victime – elle a souffert d’un traumatisme cranio-cérébral grave en 1974 lors d’un accident de ski, ce qui lui a valu son placement à la Fondation [...] dès 2006 – n’a eu aucune conséquence sur la dissection de la carotide susmentionnée.
2.6.2
H._ a souffert d’une luxation cervicale C0-Ci, d’un pneumothorax et contusion bilatérale pulmonaire, de diverses fractures et de multiples dermabrasions. Il ressort du rapport médical établi le 24 octobre 2011 par le Service de neurologie du CHUV que sa vie a été gravement mise en danger lors de l’accident (P. 35). En outre, selon le rapport établi le 7 avril 2015 par le Dr [...],H._ souffre désormais, suite au traumatisme crânio-cérébral sévère consécutif à l’accident, d’une impotence assez sévère, avec des troubles cognitifs, visuels et une hémiplégie gauche, altérant ses possibilités d’interaction (P. 169/2). Par ailleurs, le Dr [...], dans son rapport établi le 6 mai 2015 (P. 169/3), atteste également du fait que la patiente reste à ce jour lourdement atteinte par les séquelles de l’accident, précisant qu’il en résulte une atteinte neuropsychologique massive et que l’hémiplégie dont elle souffre suite à cet événement entraîne un état grabataire. Le médecin indique en dernier lieu qu’il n’existe pas de réelles perspectives de réhabilitation et qu’elle a par conséquent été placée dans un EMS à mission gériatrique. Un troisième rapport médical établi le 17 juin 2015 par le Dr [...] (P. 170), lequel reprend globalement les éléments développés par les précédents médecins, constate en substance également que H._ présente des séquelles importantes, en particulier en lien avec l’accident du 23 juillet 2011.
2.6.3
L._ a souffert de plusieurs fractures et de contusions multiples. Sa vie a également été mise en danger au moment de l’accident (P. 32). Selon le rapport de la directrice de la Fondation [...] (P. 132/2), elle a été hospitalisée plus de deux semaines et a subi trois opérations pour réduire les fractures à ses deux fémurs et au tibia, à cause desquelles elle a par la suite gravement été altérée dans ses mouvements durant trois mois. Elle a ensuite été dépendante d’un accompagnant durant de nombreux mois, avant de pouvoir retrouver un fauteuil roulant motorisé en juin 2012. La plaignante a perdu en autonomie et aucune évolution notable n’a été constatée malgré les thérapies mises en place. S’agissant de sa santé psychique, l’accident a eu des conséquences néfastes, dès lors qu’il en résulte une augmentation des variations de l’humeur et des pics d’anxiété, l’empêchant notamment de se rendre au procès (P.132/3).
2.6.4
V._ a souffert, selon ses déclarations (PVaud. 5), d’une fracture tassée de la vertèbre L2 ainsi que d’une clavicule cassée.
2.7
Au cours de l’instruction, l’épouse du défunt B.I._, Y.I._, D._, curatrice de H._, V._, L._ et la Fondation [...] ont déposé plainte et se sont constitués parties civiles.
3.
Le 4 juin 2012, à 15h02, sur l’autoroute A12, à Châtel St-Denis, M._ a, au volant du véhicule immatriculé BE [...], circulé à une vitesse de 157 km/h (marge de sécurité déduite), alors que la vitesse était limitée à 120 km/h à cet endroit (P. 68). | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délais légaux par des parties ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP [Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 ; RS 312.0]), les appels d’E._ et de M._ et l’appel joint du Ministère public sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in : Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, JugendStrafprozessordnung, 2e éd., Bâle 2014, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP).
I. Appel E._
3.
L’appelant invoque une violation du principe de la présomption d’innocence et conteste les constatations et l’appréciation des faits opérées par les premiers juges, en soutenant en substance qu’il aurait fortement réduit la vitesse de son véhicule en levant le pied de l’accélérateur juste après être sorti du champ de la caméra de surveillance du trafic, augmentant ainsi la distance le séparant du véhicule de M._.
3.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
A teneur de l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d’innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU Il (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ; RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 consid. 2a ; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 consid. 2.2.1). Comme règle d’appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes ; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 la 31 consid. 2c ; TF 6B_831/2009 précité consid. 2.2.2).
L’appréciation des preuves est l’acte par lequel le juge du fond évalue la valeur de persuasion des moyens de preuve à disposition et pondère ces différents moyens de preuve afin de parvenir à une conclusion sur la réalisation ou non des éléments de fait pertinents pour l’application du droit pénal matériel. L’appréciation des preuves est dite libre, car le juge peut par exemple attribuer plus de crédit à un témoin, même prévenu dans la même affaire, dont la déclaration va dans un sens, qu’à plusieurs témoins soutenant la thèse inverse ; il peut fonder une condamnation sur un faisceau d’indices ; en cas de versions contradictoires, il doit déterminer laquelle est la plus crédible. En d’autres termes, ce n’est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (Jean-Marc Verniory, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 34 ad art. 10 et les références citées).
3.2
L’appelant soutient qu’il aurait lâché l’accélérateur juste après la zone filmée par la caméra de surveillance du trafic, qu’il aurait ralenti de manière conséquente son véhicule depuis cet endroit et qu’il se serait ainsi retrouvé à une distance d’au moins 100 m, au lieu de celle de 40 à 50 m retenue par le tribunal, du véhicule de M._ au moment de l’accident. Il ajoute que s’il avait été aussi proche du véhicule de ce dernier et roulait à la vitesse moyenne de 180 km/h, soit de 50 m/s, retenue par les premiers juges, au moment du freinage d’urgence de M._, il n’aurait pas eu le temps, compte tenu du temps de réaction d’une seconde, d’éviter la collision avec le véhicule de ce dernier. L’appelant expose encore qu’il n’aurait pas été entravé dans sa trajectoire par l’accident et que les débris ayant légèrement endommagé la carrosserie de son véhicule ne seraient pas un indice de proximité de ce dernier par rapport à M._.
Dans son jugement, se basant sur les déclarations concordantes d’E._ et celles de M._, mais également sur l’expertise technique, le tribunal correctionnel a estimé que la version de l’appelant selon laquelle il aurait décéléré lorsqu’il est sorti du champ de la caméra était insoutenable et qu’il n’avait pu éviter l’accident que parce que, sous l’effet du choc, le bus Fiat Ducato et l’Audi S4 Quattro se sont immédiatement déportés sur la droite, lui laissant la voie de gauche libre.
L’argumentation des premiers juges est pleinement convaincante et doit être suivie. En effet, à l’instar du tribunal correctionnel, il y a lieu de se référer aux déclarations concordantes des deux prévenus, qui ont tous deux, lors de leur première audition devant la police, indiqué être très proches au moment du choc, soit à 40 ou 50 m selon E._ (PVaud. 2, p. 2) et à environ 30 m selon M._ (PVaud. 3, p 2), mais aussi aux déclarations du témoin [...], laquelle, lorsqu’elle s’est fait doubler par les deux véhicules, a estimé qu’ils n’étaient séparés que par une distance de 50 m (PVaud. 8). De surcroît, ces distances coïncident avec celle de 41 m, calculée par l’expert dans le champ de la caméra, distance qui n’a pas varié ou presque sur le tronçon observé. A cela s’ajoute encore que le témoin [...] a également affirmé que, peu avant l’accident, la Porsche 911 d’E._ roulait à très vive allure à une quinzaine de mètres derrière M._ (PVaud. 1). En dernier lieu, avec l’expert et les premiers juges, la Cour de céans considère également qu’il a été possible pour l’appelant d’éviter l’accident en raison du fait que le bus Fiat Ducato et l’Audi S4 Quattro se sont immédiatement déportés sur la droite après le choc. En effet, quand bien même il aurait levé le pied et ainsi légèrement réduit sa vitesse, ce qu’on ne peut exclure, il suivait encore à l’évidence M._ de très près à une vitesse très élevée, vitesse qui ne peut être déterminée précisément au moment de l’accident.
Au vu des éléments qui précèdent, force est ainsi de constater que les premiers juges se sont fondés sur des éléments complets et pertinents afin de déterminer les faits imputables à E._. Il n’y a pas matière à doute. Le tribunal correctionnel n’a pas violé le principe de la présomption d’innocence.
Le moyen est mal fondé et doit être rejeté.
4.
L’appelant conteste avoir pris part à une course-poursuite et ainsi s’être rendu coupable d’homicide par négligence. L’appelant soutient que l’on pourrait tout au plus lui reprocher d’avoir amorcé une ébauche de course-poursuite plusieurs centaines de mètres avant le point d’impact, mais que celle-ci se serait interrompue très rapidement, le lien de causalité entre son comportement et la survenance de l’accident faisant alors défaut. Au surplus, l’appelant admet uniquement devoir être condamné pour violation grave des règles de la circulation routière, sur la base du très lourd excès de vitesse dont il se serait rendu coupable et du talonnage du véhicule de M._ qu’il aurait momentanément effectué bien avant l’accident.
4.1
Le Tribunal fédéral a considéré que la coactivité par négligence n’était pas concevable (ATF 126 IV 84 consid. 2c). Dans un arrêt plus récent, le Tribunal fédéral, se référant à la doctrine, a ajouté que celui qui ne peut être qualifié de coauteur d’une infraction par négligence peut en revanche en être l’auteur s’il réalise, par ses agissements, les éléments de l’état de fait visé par la loi en provoquant la réalisation du risque qui pouvait se produire, mais aurait pu être évitée (TF 6B_477/2011 consid. 1.1 et l’auteur cité). Partant, il convient de déterminer indépendamment si E._ s’est rendu coupable des infractions en lien avec l’accident du 23 juillet 2011.
4.2
L’art. 117 CP réprime le comportement de celui qui, par négligence, aura causé la mort d’une personne. La réalisation de cette infraction suppose ainsi la réunion de trois conditions : le décès d’une personne, une négligence et un lien de causalité entre la négligence et la mort (ATF 122 IV 145).
4.2.1
Conformément à l’art. 12 al. 3 CP, agit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se rendre compte des conséquences de son acte ou sans en tenir compte. L’imprévoyance est coupable quand l’auteur n’a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle. Pour qu’il y ait négligence, il faut que l’auteur ait, d’une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d’autre part, il n’ait pas déployé l’attention et les efforts que l’on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 135 IV 56 ; ATF 133 IV 158 ; ATF 129 IV 119 ; ATF 122 IV 17).
Pour déterminer plus précisément quels étaient les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l’ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents. A défaut de dispositions légales ou réglementaires, on peut se référer à des règles analogues qui émanent d’associations privées ou semi-publiques lorsqu’elles sont généralement reconnues. La violation des devoirs de la prudence peut aussi être déduite des principes généraux, si aucune règle spéciale de sécurité n’a été violée (ATF 122 IV 17 précité ; ATF 122 IV 145 ; ATF 121 IV 207). Un comportement viole le devoir de prudence lorsque l’auteur, au moment des faits, aurait pu, compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de la mise en danger d’autrui et qu’il a simultanément dépassé les limites du risque admissible. C’est donc en fonction de la situation personnelle de l’auteur que l’on doit apprécier son devoir de diligence. Peu importe toutefois que l’auteur ait pu ou dû prévoir que les choses se passeraient exactement comme elles ont eu lieu. S’il y a eu violation des règles de la prudence, encore faut-il que celle-ci puisse être imputée à une faute, c’est-à-dire que l’on puisse reprocher à l’auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, d’avoir fait preuve d’un manque d’effort blâmable (TF 6B_646/2009 du 6 janvier 2010 et les références citées).
4.2.2
Une condamnation pour homicide par négligence suppose l’établissement d’un lien de causalité naturelle et adéquate entre le comportement imputable à l’auteur et le décès de la victime. Il s’agit de déterminer, dans chaque cas d’espèce, quelles sont les conditions qui ont effectivement joué un rôle dans la survenance du résultat. L’élément déterminant pour envisager l’imputation objective d’un résultat à un auteur est que ce dernier ait, par son comportement, réalisé l’une des conditions dont le résultat, dans sa manifestation concrète, est la conséquence (ATF 135 IV 56 consid. 3.1.2, JdT 2010 IV 43 ; Dupuis et al., Petit commentaire CP, Bâle 2012, n. 8 ad art. 117 CPP).
Un acte représente la cause naturelle d’un résultat dommageable lorsque, dans l’enchaînement des événements, l’acte en question représente l’une des conditions
sine qua non
de la survenance du résultat dont il retourne. En d’autres termes, la causalité naturelle est établie lorsque l’on peut retenir que le résultat ne se serait très vraisemblablement pas produit en l’absence de l’acte considéré (Dupuis et al., op. cit., n. 9 ad art. 117 CP et les références citées). Il n’est toutefois pas nécessaire que ce dernier apparaisse comme la cause unique ou immédiate du résultat. Seul compte le fait que l’acte considéré représente l’une des conditions sans laquelle le résultat ne serait pas survenu (ibid.).
Un acte se trouve en relation de causalité adéquate avec un résultat donné lorsque l’acte considéré est propre, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience générale de la vie, à engendrer un résultat du genre de celui qui s’est produit (Dupuis et al., op. cit., n. 10 ad art. 117 CP et les références citées). L’établissement d’un rapport de causalité adéquate dépend de la prévisibilité objective d’un résultat. Un tiers observateur neutre devrait être à même de prédire la survenance dudit résultat au vu du comportement adopté par l’auteur, sur la base d’un pronostic objectif rétrospectif. Il n’est toutefois pas nécessaire que la chaîne des événements puisse être envisagée dans les moindres détails. Il faut, et il suffit, que l’acte soit objectivement propre à engendrer un résultat du genre de celui qui s’est produit ou à en favoriser la survenance, de sorte qu’il paraisse naturel d’imputer le résultat tel qu’il est survenu à l’adoption du comportement en cause (ATF 131 IV 145 consid. 5.1). L’admission d’un rapport de causalité adéquate n’est enfin pas subordonnée à la condition que le comportement de l’auteur constitue la cause directe ou immédiate du résultat (ATF 131 IV 145 consid. 5.2).
4.3.1
En l’espèce, la première condition posée par l’art. 117 CP, soit le décès d’une personne, est réalisée dès lors que B.I._ est décédé des suites de l’accident, ce qui n’est pas contesté.
4.3.2
Au bénéfice du doute, et en dépit du fait que la vitesse à laquelle les appelants circulaient était légèrement supérieure à celle autorisée et qu’ils se suivaient à une courte distance, on peut considérer que l’existence d’une course-poursuite antérieure au second dépassement opéré par M._ n’est pas établie, et partant, qu’à ce stade, il n’avait pas encore fautivement violé son devoir de diligence. Les voies de circulation étaient à ce moment en effet fréquentées et E._ roulait à l’origine sur la piste de gauche. Cependant, dès cet instant, M._ a très fortement accéléré jusqu’à atteindre une vitesse comprise entre 194 et 208 km/h et E._ l’a suivi en circulant à une vitesse équivalente, ce qu’il
a d’ailleurs admis, alors que sa vitesse était précédemment de l’ordre de 120 km/heure. Cette accélération simultanée des deux véhicules, lesquels n’étaient séparés que d’un très faible écart, sur une distance d’environ 800 m est décisive et démontre qu’une course-poursuite a bien eu lieu sur ce tronçon-ci, et ceci même en l’absence de dépassements répétés. L’existence d’une course-poursuite était toujours d’actualité sur le tronçon qui suit la fin de la zone filmée par la caméra et jusqu’au lieu de l’accident, E._ circulant toujours à une distance très proche de M._ à une très haute vitesse, comme cela a été développé ci-dessus et confirmé par la Cour de céans (cf. 3.2).
Ainsi, par ce comportement, E._ a violé de manière fautive les règles de prudence les plus élémentaires de la circulation routière, en particulier la règle fondamentale prévue à l’art. 26 al. 1 LCR (Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 ; RS 741.01) et les articles 27 al. 1 LCR (signaux, marques et ordres à observer), 32 al. 1 LCR (vitesse) et 34 al. 4 LCR (distance). L’appelant n’a au demeurant pas contesté la réalisation de cette condition, admettant même avoir roulé à une vitesse excessive et talonné M._ de très près à un moment donné.
4.3.3
Comme on vient de le voir, la Cour de céans a confirmé l’état de fait selon lequel E._ n’avait pas, ou pas suffisamment, décéléré à la sortie de la zone filmée, de sorte qu’il était à une distance très proche du véhicule de M._, et roulait donc toujours à une vitesse très élevée, retenant ainsi le fait qu’il ait pris part à une course-poursuite s’étant terminée au moment du choc. A cet égard, il est vrai que la cause immédiate de l’accident est le comportement de M._, soit qu’il se trouvait à l’avant en circulant beaucoup trop vite et qu’il a été inattentif au point de percuter le véhicule conduit par V._, ce qui n’est du reste pas contesté. Cependant, cela n’est finalement que la résultante d’un comportement dont E._ a psychiquement contribué à la réalisation, en prenant part à la course-poursuite et en poursuivant donc M._ à très haute vitesse comme il l’a fait. En d’autres termes, sans le comportement d’E._, M._ n’aurait pas roulé à une vitesse aussi élevée et n’aurait pas été inattentif, lui permettant selon toute vraisemblance d’éviter l’accident en cause.
Il résulte de ce qui précède qu’E._ a bien pris une part déterminante dans la réalisation de l’accident survenu le 23 juillet 2011, de sorte que, les conditions étant réalisées, la condamnation d’E._ pour homicide par négligence doit être confirmée.
5.
Pour les mêmes motifs, l’appelant conteste sa condamnation pour lésions corporelles graves et simples par négligence. Il ne remet cependant pas en cause la nature des lésions subies par H._, L._ et V._.
5.1
Selon l'art. 125 CP, celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (al. 1). Si la lésion est grave, le délinquant sera poursuivi d'office (al. 2). L'infraction de l'art. 125 al. 2 CP est réalisée lorsque trois éléments sont réunis : une négligence commise par l'auteur, une lésion corporelle grave ou simple subie par la victime et un lien de causalité naturelle et adéquate entre la négligence et la lésion.
5.2
En l’espèce, la nature des lésions subies par les victimes de l’accident ne sont pas contestées, de sorte que le jugement de première instance peut être intégralement confirmé sur ce point. Ainsi, au vu des lésions corporelles subies par H._ (cf. 2.6.2) et L._ (cf. 2.6.3), celles-ci doivent être qualifiées de graves. Quant aux lésions subies par V._ (cf. 2.6.4), elles seront qualifiées de simples. Pour le surplus, s’agissant des deux autres conditions de réalisation de l’infraction, soit la négligence et le lien de causalité, il y a lieu de se référer intégralement au développement qui précède sur l’infraction d’homicide par négligence, auquel il peut être renvoyé. Partant, E._ s’est bien rendu coupable de lésions corporelles graves et simples par négligence.
6.
L’appelant conteste sa condamnation pour mise en danger de la vie d’autrui.
6.1
Aux termes de l’art. 129 CP, celui qui, sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort imminent sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Cette disposition incrimine tout comportement de nature à créer un danger de mort imminent pour autrui. D'après la jurisprudence, la notion de danger de mort imminent suppose en premier lieu un danger concret, soit un état de fait dans lequel existe, d'après le cours ordinaire des choses, la probabilité ou un certain degré de possibilité que le bien juridique protégé, en l'occurrence la vie d'autrui, soit lésé, sans toutefois qu'un degré de probabilité supérieur à 50% ne soit exigé. Le danger de mort imminent représente cependant plus que cela. Il est réalisé lorsque le danger de mort apparaît si probable qu'il faut être dénué de scrupules pour négliger sciemment d'en tenir compte. Quant à la notion d'imminence, elle n'est pas aisée à définir. Elle implique en tout cas, outre la probabilité sérieuse de la réalisation du danger concret, un élément d'immédiateté qui est défini moins par l'enchaînement chronologique des circonstances que par le lien de connexité directe unissant le danger et le comportement de l'auteur (Dupuis et al., op. cit., nn. 5, 7 et 8 ad art. 129 CP ; ATF 121 IV 67 consid. 2b/aa).
Sur le plan subjectif, l'art. 129 CP exige un dol de mise en danger, qui ne peut néanmoins prendre la forme que d'un dol direct, à l'exclusion d'un dol éventuel. L'auteur doit avoir pleine et entière conscience de créer un danger de mort imminent tout en étant en mesure d'exclure l'hypothèse d'une issue fatale (Dupuis et al., op. cit., n. 11 ad art. 129 CP et les références citées).
S'agissant de l'absence de scrupules, cet élément subjectif spécifique à cette infraction tend à préciser que n'importe quelle mise en danger intentionnelle de la vie d'autrui ne suffit pas. Il limite le champ d'application de la disposition en cause aux hypothèses où la mise en danger de la vie d'autrui lèse gravement le sentiment moral. D'après la jurisprudence, il y a absence de scrupules lorsque, compte tenu des moyens utilisés, des mobiles de l'auteur, de l'état de ce dernier et de l'ensemble des circonstances concrètes, l'acte apparaît comme contraire aux principes généralement admis des bonnes mœurs et de la morale. La notion d'absence de scrupules renvoie à un comportement dont le caractère répréhensible doit apparaître comme marqué. L'acte doit donc revêtir une gravité qualifiée, dénoter une absence particulière d'inhibition face au fait de mettre en danger la vie d'autrui et un manque criant d'égards face à l'existence des tiers. Toutefois, dans la mesure où il est question d'un comportement créant un danger de mort imminent, donc d'une gravité intrinsèque certaine, il paraît adéquat de retenir que l'absence de scrupules devrait être admise dès lors que le comportement de l'auteur demeure dépourvu de justification particulière ou ne répond pas à un but au moins partiellement légitime (Dupuis et al., op. cit., nn. 12-14 ad art. 129 CP et les références citées).
Dans une ancienne jurisprudence, le Tribunal fédéral avait précisé le terme sciemment en ce sens que celui qui, avec conscience et volonté, crée un état de chose d’où découle, ainsi qu’il le sait, un danger veut nécessairement ce danger. Il n’est en revanche pas nécessaire que l’auteur ait voulu la réalisation de ce danger, voire seulement à titre éventuel, car il serait alors punissable pour commission intentionnelle du délit de lésion correspondant (ATF 94 IV 60 consid. 3, JdT 1968 IV 75 consid. 3).
6.2
En l’espèce, l'appelant a circulé, sur un tronçon conséquent, à une vitesse de 194 km/h un après-midi de juillet alors que l’autoroute était fréquentée, en talonnant à environ une seconde, soit le temps (jurisprudentiel) de réaction, le véhicule Audi S4 Quattro qui se trouvait devant lui. Par ce comportement, il a sciemment, et avec pleine et entière conscience de ses actes, créé un risque concret et un danger de mort imminent pour la vie des autres automobilistes, à commencer par les passagers du véhicule précité. Au demeurant, le risque s'est réalisé puisque ce comportement a coûté la vie d'une personne. Roulant à une telle vitesse, il a manifestement agi sans scrupules, sans prêter un quelconque égard aux autres usagers de la route. Même s'il ne s'est pas fixé pour but de commettre une infraction, il s'est clairement accommodé de la réalisation de celle-ci afin de parvenir à son but, soit assouvir sa soif de vitesse. C'est donc par dol direct qu'il s'est rendu coupable de mise en danger de la vie d'autrui, et non par dol éventuel comme l'ont retenu les premiers juges.
7.
Contestant son implication dans la réalisation de l’accident de la présente affaire, l’appelant soutient qu’il ne se serait pas rendu coupable de violation des devoirs en cas d’accident.
7.1
En vertu de l’art. 51 aLCR, le droit en vigueur n’étant pas plus favorable, en cas d'accident où sont en cause des véhicules automobiles ou des cycles, toutes les personnes impliquées devront s'arrêter immédiatement. Elles sont tenues d'assurer, dans la mesure du possible, la sécurité de la circulation (al. 1). S’il y a des blessés, toutes les personnes impliquées dans l’accident devront leur porter secours ; quant aux autres personnes, elles le feront dans la mesure qu’on peut exiger d’elles. Ceux qui sont impliqués dans l’accident, mais en premier lieu les conducteurs de véhicules, avertiront la police. Toutes les personnes impliquées, y compris les passagers, doivent prêter leur concours à la reconstitution des faits. Ces personnes ne pourront quitter les lieux sans l’autorisation de la police, sauf si elles ont besoin de secours, si elles doivent en chercher ou quérir la police (al. 2).
Conformément à l’art. 92 al. 2 aLCR, le conducteur qui aura pris la fuite après avoir tué ou blessé une personne lors d’un accident de la circulation sera puni d’une peine privative de liberté de trois au plus ou d’une peine pécuniaire.
7.2
La Cour de céans ayant en l’espèce retenu que le comportement d’E._ était l’une des causes de l’accident, l’argumentation des premiers juges peut être intégralement confirmée sur ce point. L’appelant ne s’est en effet pas immédiatement arrêté après ledit accident, lequel a causé des blessés, de sorte qu’il a bel et bien pris la fuite au sens de la disposition légale concernée, même s’il s’est annoncé plus tard comme témoin. En outre, l’argument selon lequel il n’a guère eu la possibilité de s’arrêter avant une longue distance après l’accident ne saurait être suivi, dès lors qu’il aurait pu s’arrêter sur la voie d’arrêt d’urgence.
La condamnation pour violation des devoirs en cas d’accident est donc également justifiée.
8.
L'appelant E._ conteste la peine qui a été prononcée à son encontre. Le Ministère public conteste également la peine, en soutenant que celle-ci devrait être plus sévère, et fait valoir que l'appelant ne devrait être mis qu'au bénéfice du sursis partiel, l'exécution d'une peine minimale de six mois devant être ordonnée.
8.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
Les règles générales régissant la fixation de la peine ont été rappelées dans les arrêts publiés aux ATF 136 IV 55 et 134 IV 17 (consid. 2.1 et les références citées), auxquels il peut être renvoyé.
Aux termes de l'art. 49 CP, si, en raison d’un ou de plusieurs actes, l’auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l’infraction la plus grave et l’augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (al. 1).
Aux termes de l’art. 43 al. 1 CP, le juge peut suspendre partiellement l’exécution d’une peine pécuniaire, d’un travail d’intérêt général ou d’une peine privative de liberté d’un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l’auteur. De jurisprudence constante, les conditions subjectives auxquelles l'art. 42 CP soumet l'octroi du sursis intégral s'appliquent également à l'octroi du sursis partiel prévu à l’art. 43 CP (ATF 134 IV 1 consid. 5.3.1 ; cf. aussi TF 6B_664/2007 du 18 janvier 2008 consid. 3.2.1 ; 6B_353/2008 du 30 mai 2008 consid. 2.3). Ainsi, lorsque le pronostic quant au comportement futur de l'auteur n'est pas défavorable, la loi exige que l'exécution de la peine soit au moins partiellement suspendue. En revanche, un pronostic défavorable exclut également le sursis partiel. Lorsque le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (art. 44 al. 1 CP).
8.2
En l'espèce, la lourde culpabilité du prévenu et les éléments retenus à sa charge par le tribun al doivent être confirmés. L'appelant a en effet pris, à l'instar de son co-prévenu, des risques insensés sur une autoroute fréquentée en violant crassement les règles élémentaires de la sécurité routière, au détriment d'usagers de la route qui circulaient correctement. En outre, les biens juridiques atteints tels que la vie et l'intégrité corporelle sont les plus importants de l'ordre juridique suisse. E._ n'a exprimé aucun regret ni excuse face au drame qui est survenu lors des débats de première instance, et guère plus devant la juridiction d'appel, autorité devant laquelle il a plutôt continué à nier toute implication personnelle, ce qui démontre son incapacité à prendre conscience de la gravité de ses actes. Il sera tenu compte du concours d'infractions, étant précisé que la violation grave des règles de la circulation routière est absorbée par l’homicide et les lésions corporelles par négligence et que l’homicide par négligence et en concours parfait avec l’infraction de mise en danger de la vie d’autrui.
A décharge, les aveux de l'appelant seront également pris en compte dans une mesure légère, de même que sa situation personnelle. Par ailleurs, l'absence d'antécédent aura un effet neutre.
Au vu de ce qui précède, la peine privative de liberté de vingt-quatre mois prononcée par les premiers juges est adéquate et doit être confirmée. Elle sera assortie du sursis dont les conditions sont réalisées. Vu l’absence d’antécédent, le pronostic quant au comportement futur de l’appelant n'est pas défavorable, ce d'autant qu’il n'a pas occupé la justice depuis le jour des faits, soit depuis plus de quatre ans. L’absence de prise de conscience d’E._ aura pour effet d’ordonner un délai d’épreuve d’une durée de quatre ans. Partant, la conclusion du Ministère public tendant à l’octroi d’un sursis partiel sera rejetée.
En dernier lieu, l'amende de 4000 fr., prononcée à titre de sanction immédiate en application de l'art. 42 al. 4 CP, sera confirmée, de même que la peine privative de liberté de substitution de quarante jours.
II. Conclusions civiles
9.
L'appelant M._, invoquant une violation du droit d’être entendu et de la garantie de la double instance, reproche aux premiers juges de ne pas avoir suffisamment motivé les raisons qui les ont amenés à le condamner au versement des montants alloués au titre d’indemnité pour tort moral à Y.I._ et aux victimes de l’accident.
9.1
9.1.1
Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. et l'art. 3 al. 2 let. c CPP, implique notamment pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 137 IV 81 consid. 2.2 ; ATF 134 I 83 consid. 4.1 ; 133 III 439 consid. 3.3).
Le droit d’être entendu étant de nature formelle, toute violation de ce dernier conduit, en principe, à l’annulation de la décision rendue. Demeurent cependant réservés les cas dans lesquels la violation est de peu de gravité et peut être réparée, par exemple lorsque la partie dont le droit d'être entendu a été violé peut l'exercer par la suite devant une instance disposant du même pouvoir d'examen (Moreillon/Parein-Reymond, Code de procédure pénale, Petit commentaire, Bâle 2013, n. 24 ad art. 3 CPP ; TF 6B_562/2011 du 5 décembre 2011).
9.1.2
L’art. 409 CPP dispose que si la procédure de première instance présente des vices importants auxquels il est impossible de remédier en procédure d’appel, la juridiction d’appel annule le jugement attaqué et renvoie la cause au tribunal de première instance pour qu’il soit procédé à de nouveaux débats. Cependant, il appartient en règle générale à la juridiction d’appel de corriger les erreurs commises par le tribunal de première instance dans l’établissement des faits et l’application du droit (art. 408 CPP), l’annulation et le renvoi devant rester l’exception (TF 6B_528/2012 consid. 3.1.1 et les références citées). L’art. 409 CPP s’applique lorsque les erreurs affectant la procédure ou le jugement de première instance sont si graves que le renvoi au juge de première instance est la seule solution pour respecter les droits des parties, et notamment pour garantir la double instance (ibid.).
9.2
Avec l’appelant, il convient de constater que la motivation du jugement est brève sur la question de la justification de l’allocation de l’indemnité à Y.I._ et sur les montants alloués aux victimes de l’accident. La motivation est toutefois suffisante pour permettre à l’appelant de comprendre sur quelles bases la décision attaquée a été prise et former appel en toute connaissance de cause. Cela ressort en effet de l’argumentation figurant dans la déclaration d’appel de M._, qui démontre que ce dernier paraît avoir parfaitement compris les considérants de la décision attaquée. On ne saurait ainsi soutenir que la brièveté de la motivation emporterait une violation du droit d’être entendu ou de la garantie de double instance, ce d’autant que, comme l’appelant le relève lui-même, la Cour d’appel dispose d’un plein pouvoir d’examen en fait et en droit. En outre, une annulation et un renvoi de l’affaire en première instance doivent rester l’exception et n’être envisageable que s’il est impossible de remédier en procédure d’appel aux vices constatés, ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce.
10.
L'appelant M._ fait valoir qu'il n'aurait pas pu valablement préparer sa défense s'agissant des conclusions civiles requises par Y.I._ et H._, la production des déterminations écrites et les pièces y relatives n'étant intervenues qu'au stade des débats.
10.1
En vertu de l’art. 123 al. 2 CPP, le calcul et la motivation des conclusions civiles doivent être présentés au plus tard durant les plaidoiries.
10.2
Y.I._ s'est constituée partie civile au tout début de la procédure, soit le 7 février 2012 (P. 46). L'appelant savait dès lors dès le début qu'elle prendrait des conclusions civiles. S'il est vrai que celles-ci n'ont été déposées qu'aux débats de première instance (P. 166 ; jgt p. 16) – ce qui est au demeurant conforme au CPP –, la plaignante a été entendue à cette occasion en présence de l’appelant et de son défenseur, lequel n’a pas soutenu avoir été empêché de lui poser des questions (jgt, p. 21), ce qui n’est du reste pas non plus établi. De surcroît, il s’en était remis à justice s’agissant des conclusions civiles (jgt, p. 22). Ayant eu l’occasion de présenter sa défense de manière adéquate aux débats, son argumentation n’est pas convaincante.
Il en va de même s’agissant de H._. Son conseil avait annoncé le 6 mai 2015 que les conclusions civiles seraient précisées lors de l’audience de jugement (P. 131). En outre, la curatrice de la plaignante avait déjà produit un certificat médical le 17 juin 2015 (P. 157) et le défenseur de l’appelant a eu l’occasion de s’exprimer aux débats de première instance (jgt, pp. 23-24 et 26), où elle a du reste conclu au renvoi des prétentions civiles devant le juge civil. Les conclusions civiles prises par la prénommée sont donc parfaitement valables.
11.
Pour le surplus, il n’est pas envisageable de renvoyer Y.I._, H._ et L._ à agir devant le juge civil s’agissant de la question du tort moral. Le dossier contient en effet tous les éléments permettant de statuer valablement. Au demeurant, un tel renvoi violerait la règle de principe figurant à l’art. 126 al. 1 CPP.
12.
L’appelant M._ plaide l’irrecevabilité des prétentions civiles allouées aux victimes H._ et L._, en soutenant que les décisions de nomination de curateur, les autorisations de plaider délivrées par l’autorité de protection de l’adulte en application de l’art. 416 al. 1 ch. 9 CC (Code civil suisse du 10 décembre 1907 ; RS 210), et les procurations en faveur de leur conseil n’ont pas été produites au dossier, éléments soulevés une nouvelle fois à titre préjudiciel en audience d’appel.
12.1
En ce qui concerne l’absence de procuration signée en faveur de Me Jean de Gautard, il convient de se référer à l’art. 129 al. 2 CPP, lequel définit l’exigence d’une procuration pour l’exercice d’une défense privée comme une simple prescription d’ordre et, partant, ne veut pas dire que les preuves administrées sont inexploitables (cf. en ce sens Moreillon/Parein-Reymond, op. cit., n. 6 ad art. 129 CPP). En l’espèce, l’avocat ayant participé aux débats aux côtés de la curatrice de H._, on peut partir de l’idée qu’un mandat de représentation oral lui a été donné. Les actes effectués par l’avocat ne sont donc pas nuls. Ayant également agi pour le compte de L._ dans une même mesure, il n’y pas non plus lieu de remettre en doute la validité des prétentions civiles de cette dernière.
12.2
L’absence au dossier du consentement de l’autorité de protection de l’adulte prévue par l’art. 416 al. 1 ch. 9 CC pourrait à première vue apparaître plus problématique. Cependant, les actes juridiques accomplis sans le consentement de cette autorité n’a, à l’égard de la personne concernée, que les effets prévus par le droit des personnes en cas de défaut du consentement du représentant légal (cf. art. 418 CC), soit des actes que cette dernière accomplirait elle-même sans le consentement de son représentant. La prétention civile en réparation du tort moral est un droit strictement personnel au sens de l’art. 19c CC (TF 6S.316/2001 consid. 5b/ee ; ATF112 IV 10 ; ATF 41 II 553, JdT 1916 I 203). Par conséquent, H._ aurait pu faire valoir seule ses prétentions civiles. Le fait qu’elle ait agi par l’intermédiaire de sa curatrice sans que ne figure au dossier d’autorisation de plaider ne porte pas à conséquence. Ainsi, les prétentions civiles déposées par la plaignante ne sont pas nulles. L’argumentation qui précède vaut
mutatis mutandis
pour ce qui concerne L._.
12.3
Au surplus, l’absence au dossier des décisions de nomination des curateurs de H._ et L._ est sans incidence, dès lors qu’aucun élément au dossier ne permet de remettre en cause leur nomination.
13.
L’appelant M._ a contesté les montants alloués à Y.I._ et aux victimes de l’accident, qu’il juge excessifs.
13.1
13.1.1
Selon l'art. 122 CPP, le lésé agissant en qualité de partie plaignante peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l’infraction par adhésion à la procédure pénale (al. 1). Le même droit appartient aux proches de la victime, dans la mesure où ils font valoir contre le prévenu des conclusions civiles propres (al. 2).
13.1.2
En vertu de l'art. 47 CO (Code des obligations suisse du 30 mars 1911 ; RS 220), le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. L'indemnité a pour but exclusif de compenser le préjudice que représente une atteinte au bien-être moral. Le principe d'une indemnisation du tort moral et l'ampleur de la réparation dépendent d'une manière décisive de la gravité de l'atteinte et de la possibilité d'adoucir de façon sensible, par le versement d'une somme d'argent, la douleur physique ou morale (ATF 132 III 117 consid. 2.2.2 ; ATF 123 III 306 consid. 9b). En raison de sa nature, l’indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage ne pouvant que difficilement être réduit à une simple somme d’argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites ; l’indemnité allouée doit toutefois être équitable (ATF 141 III 97 consid. 11 ; ATF 130 III 699 consid. 5.1). S’agissant du montant de l’indemnité, toute comparaison avec d’autres affaires doit intervenir avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d’une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe. Une comparaison avec d’autres cas similaires peut cependant, suivant les circonstances, constituer un élément d’orientation utile (TF 6B_909/2014 du 21 mai 2015 ; ATF 138 III 337 consid. 6.3.3 et l’arrêt cité).
La loi exige ainsi en sus de la lésion elle-même des circonstances particulières. Ces circonstances ne sont réalisées en principe que si la lésion implique une importante douleur physique ou morale ou si elle a causé une atteinte durable à la santé. Il n’y a dès lors en général pas d’indemnisation pour une lésion simple, n’impliquant pas d’invalidité, et qui se guérit sans complication particulière. Des séquelles mineures ou une guérison complète ne permettent ainsi pas encore d’exclure de façon absolue toute indemnité pour tort moral, et d’autres circonstances peuvent, selon les cas, justifier l’application de l’art. 47 CO. Parmi elles figurent en premier lieu selon la jurisprudence une hospitalisation de plusieurs mois avec de nombreuses opérations ou une longue période de souffrance et d’incapacité de travail ; entrent en considération également les préjudices psychiques importants tels qu’un état de stress post-traumatique conduisant à un changement durable de la personnalité (Guyaz, Le tort moral en cas d'accident : une mise à jour, in : SJ 2013 II 215, pp. 229 à 230 et les références citées).
13.1.3
En cas de décès, il faut tenir compte de l'intensité des relations qui existaient entre le défunt et ses proches ; la proximité des liens de parenté et l'existence d'un ménage commun constituent des présomptions de fait en faveur d'une indemnité plus élevée. La perte d'un conjoint est considérée comme la souffrance la plus grave ; vient ensuite celle causée par la mort d'un enfant, puis celle due au décès du père ou de la mère (Werro, in : Thévenoz/Werro [éd.], Commentaire romand, Code des obligations I, 2
e
éd., Bâle 2012, nn. 15 ss ad art. 47 CO ; Werro, La responsabilité civile, 2
e
éd., Berne 2011, nn. 1369 ss ; Brehm, Berner Kommentar, Obligationenrecht, 4
e
éd., Berne 2013, nn. 136, 141 et 148 ad art. 47 CO). S’agissant de la perte d’un conjoint, la seule existence d’un lien conjugal ne devrait pas suffire pour faire admettre de façon absolue le principe d’une indemnisation, dès lors que, selon les règles habituelles sur le fardeau de la preuve, il appartient au lésé d’établir, à tout le moins de rendre vraisemblable, qu’il entretenait des relations harmonieuses avec son époux, et qu’il lui était particulièrement attaché (Guyaz, op. cit., in : SJ 2013 II 215, p. 234 et les références citées).
13.2
13.2.1
L'appelant considère qu'Y.I._ n'aurait pas justifié les liens qu'elle aurait entretenus avec son époux, pas plus que la nature et la gravité de l'atteinte qu'elle aurait subie, ainsi que l'intensité et la durée des effets que le décès aurait eu sur sa personnalité.
La particularité du cas d’espèce réside dans le fait que B.I._ a souffert d’un grave traumatisme crânio-cérébral en 1974 à la suite d’un accident de ski et que, depuis lors, sa santé s’est peu à peu dégradée, au point qu’il a dû être placé à la Fondation [...] depuis 2006. La victime ne faisait pour cette raison plus ménage commun avec sa femme, qu’il avait épousée en 1994, soit douze ans avant. Dès cet instant, et selon les déclarations d’Y.I._, qu’il n’y a au demeurant pas lieu de remettre en doute, celle-ci téléphonait à son époux tous les jours et faisait des activités avec lui les week-ends. Cependant, à compter de la date de l’accident, la prénommée a dû subir la pénible épreuve de la dégradation de l’état de santé de B.I._, qui a conduit à son décès moins de deux mois plus tard, dégradation qu’elle avait par ailleurs déjà subie dans une plus faible mesure auparavant. Contrairement à ce qu’allègue M._, les éléments au dossier sont suffisants pour retenir qu’il existait un lien affectif profond et durable entre les époux. De plus, le placement du défunt en institution pour des raisons de santé n’est pas de nature à réduire l’importance de ce lien. Les relations étaient manifestement harmonieuses. Les arguments de la défense, qui se borne à interpréter à son avantage des pièces au dossier mais qui n’apporte pas d’éléments fiables, ne convainquent pas. En dernier lieu, la plaignante n’a produit qu’un certificat médical concis, ce dont on conviendra, attestant qu’elle a souffert psychiquement du décès de son époux. On ne saurait purement et simplement l’occulter sous prétexte de sa seule brièveté. Ainsi, il n’y a pas lieu de remettre en doute le bien-fondé de l’allocation d’une indemnité pour tort moral.
Partant, compte tenu de la faute gravissime des auteurs de l’accident, de l’extrême violence du choc lors de l’accident et du lien qui subsistait entre les époux, mais aussi en se basant sur la jurisprudence du Tribunal fédéral et une partie de la doctrine (cf. notamment TF 4A_423/2008 du 12 novembre 2008 consid. 2.6 ; Guyaz, op. cit., in : SJ 2013 II 215, pp. 243-251 et les références citées), l’allocation d’une indemnité pour tort moral en faveur d’Y.I._ d’un montant de 30'000 fr. paraît adéquate et doit être confirmée.
13.2.2
M._ estime que le montant de l’indemnité de 75'000 fr. alloué par les premiers juges à H._ serait excessif, considérant que celui-ci ne devrait pas être supérieur à 20'000 francs.
En l’espèce, la vie de H._ a été sérieusement mise en danger lors de l’accident, lequel a, rappelons-le, été d’une rare violence, dû au comportement insensé des deux prévenus. A cause de l’accident, elle a premièrement dû être hospitalisée plus de deux semaines au CHUV pour traiter les lésions directes causées par l’accident, avant d’être transférée à l’Hôpital de la [...] pour une prise en charge à but de rééducation. La victime a souffert de graves traumatismes qui ont eu des répercussions tragiques et désastreuses sur sa santé. Celle-ci souffre notamment d’une hémiplégie, la plaçant dans un
état grabataire et l’empêche de communiquer efficacement, d’une atteinte neuropsychologique massive sans réelles perspectives d’amélioration et de séquelles chroniques. De surcroît, la souffrance psychique de la plaignante est également importante. Elle fait état d’agressivité et est encore à ce jour, soit plus de quatre ans après l’accident, triste et angoissée. Elle est en proie à des idées noires et des cauchemars, en lien avec des accidents de la route, accompagnés de troubles du sommeil (P. 170). Au surplus, l’argument selon lequel les médecins traitants seraient des proches de la plaignante et, par conséquent, feraient des déclarations qui lui seraient favorables n’est pas recevable. En outre, les pièces produites au dossier par le conseil de la plaignante et sa curatrice sont des éléments de preuves suffisants pour apprécier le montant de l’indemnité, étant précisé que, vu son état, on imagine mal comment H._ aurait pu se rendre à l’audience afin de s’exprimer valablement.
S’agissant de la quotité de l’indemnité, on peut rappeler que le Tribunal fédéral a jugé équitable une indemnité pour tort moral de 140'000 fr., dans le cas d’une motocycliste grièvement blessée dans un accident de la circulation qui a entraîné un traumatisme cérébral laissant des séquelles irréversibles (cf. ATF 134 III 97 consid. 4). Il a en outre admis comme conforme au droit le versement du même montant à un enfant resté gravement handicapé à la suite d’un accident de ski (cf. TF 4A_206/2014 du 18 septembre 2014 consid. 5). Dans ce contexte et au vu de ce qui précède, le montant de 75'000 fr. accordé à H._ est adéquat et doit être confirmé.
13.2.3
L’appelant conteste le montant de l’indemnité de 50'000 fr., alloué à L._ qu’il tient pour excessif.
Au regard du comportement des appelants, la vie de L._ a été sérieusement bouleversée. Sa vie a de plus été sérieusement mise en danger lors de l’accident, à la suite duquel elle a été hospitalisée plus de deux semaines, période durant laquelle elle a subi plusieurs opérations. Après cela, elle a dû supporter une perte de mobilité presque totale de près d’une année, durant laquelle elle a été incapable de se mettre debout, devant être accompagnée et perdant ainsi toute autonomie. Elle a également été en proie à des douleurs, notamment en période de rééducation. Il résulte en outre de l’accident des séquelles psychologiques dont des variations d’humeurs et des pics d’anxiété, qui l’ont en particulier empêchée de se rendre au procès.
Au regard de ce qui précède, et en se référant à un cas comparable où le lésé aurait reçu, en l’absence de toute réduction qui lui serait imputable, une indemnité de 50'000 fr. pour avoir notamment subi une rupture du rein droit, une fracture du fémur et du poignet avec atteinte du nerf impliquant plusieurs interventions chirurgicales (cf. 6B_909/2014 consid. 3.3.3 et les références citées), le montant de l’indemnité pour tort moral de 50'000 fr. alloué à L._ apparaît équitable et doit également être confirmé.
13.2.4
L’appelant M._ conteste le montant de l’indemnité pour tort moral de 10'000 fr. allouée à V._. Il considère que le montant de l’indemnité ne devrait pas dépasser 3'000 francs.
S’il est vrai que V._ n’a pas de séquelles physiques ni psychologiques suite à l’accident, cela ne veut pas pour autant dire, selon la jurisprudence, qu’il n’a pas droit à l’allocation d’une indemnité pour tort moral. V._ a tout de même été hospitalisé durant une semaine et a souffert d’une fracture tassée d’une vertèbre et d’une fracture de la clavicule. L’incident a aussi eu pour effet un arrêt de travail de trois mois. Les conséquences ne sont dès lors pas négligeables. Afin de calculer équitablement l’indemnité, il y a encore lieu de tenir compte de la gravité du choc pour un conducteur professionnel et de la très lourde faute des prévenus. Partant, l’indemnité allouée d’un montant de 10'000 fr. en sa faveur sera confirmée, celui-ci n’étant pas disproportionné au regard de l’ensemble des éléments de l’affaire.
13.3
Compte tenu du fait que M._ et E._ ont tous deux été condamnés en raison des faits en lien avec l’accident du 23 juillet 2011, les indemnités pour tort moral dont il est question ci-dessus seront mises à leur charge, solidairement entre eux, et ce dans les mêmes conditions que celles figurant dans le jugement entrepris, celui-ci étant intégralement confirmé.
Cela étant, les conclusions d’E._ tendant à ce que M._ soit reconnu seul débiteur des parties plaignantes deviennent sans objet. En outre, vu le sort de la cause, la conclusion de l’appelant E._ tendant à la réduction des frais de première instance est rejetée.
14.
En définitive, les appels des prévenus et l’appel joint du Ministère public sont rejetés et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l’issue de la cause, l’émolument d’arrêt, par 4’440 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), sera mis à la charge d’E._ et de M._ chacun pour quatre dixièmes, soit 1’776 fr., le solde étant laissé à la charge de l’Etat.
Le défenseur d’office de M._ a déposé une liste d’opérations faisant état de 22 heures et 15 minutes (hors audience) pour la procédure d’appel, ainsi que des débours à hauteur de 5%, TVA non comprise. Le temps de travail allégué est excessif dès lors que l’appel qu’il a déposé ne porte que sur les conclusions civiles et des aspects formels sans questions techniques particulières. En outre, il s’agit d’un conseil expérimenté qui connait au demeurant parfaitement l’affaire puisqu’il s’en est chargé en première instance. Partant, il sera tenu compte de 12 heures de travail d’avocat (12 x 180 fr. = 2'160 fr.), d’une vacation à 120 fr. et des débours pour 50 francs. L’indemnité allouée au défenseur d’office de M._ pour la procédure d’appel sera par conséquent fixée à 2'330 fr., plus la TVA, par 186 fr. 40, soit un montant total de 2'516 fr. 40, lequel sera entièrement mis à la charge du prénommé.
Sur la base de la liste d’opération produite, une indemnité pour la procédure d’appel d’un montant de 1'496 fr. 90, TVA et débours inclus, sera allouée au conseil d’office d’Y.I._. Au vu du sort de l’appel, elle sera mise à la charge d’E._ et de M._ chacun pour une demie, soit par 748 fr. 45.
M._ ne sera tenu de
rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office ainsi que la part mise à sa charge du montant de l’indemnité en faveur de Me Youri Widmer que lorsque sa situation financière le permettra
. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b6e86142-947a-40ea-a9db-4e56aad97c06 | En fait :
A.
Par jugement du 7 avril 2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a, notamment, libéré B.V._ de l’accusation d’actes d’ordre sexuel avec des enfants (VI), rejeté la requête en indemnisation présentée par B.V._ (VIII) et mis une part des frais, par 12'368 fr. 80, incluant l’indemnité au conseil d’office par 5'918 fr. 40, à la charge de B.L._, et une part des frais, par 7’170 fr. 10, incluant l’indemnité au conseil d’office par
5'686 fr. 20, à la charge de B.V._, le solde des frais demeurant à la charge de l’Etat, étant précisé que le remboursement à l’Etat du montant des indemnités aux conseils d’office n’est exigible que si la situation financière du débiteur le permet (XI).
B.
Par annonce du 17 avril 2014, puis par déclaration motivée du 19 mai 2014, B.V._ a fait appel de ce jugement dont une copie complète lui avait été notifiée le 28 avril précédent. A titre principal, elle a conclu à la modification des ch. VIII et XI du dispositif en ce sens que les frais de justice sont laissés à la charge de l'Etat et que lui soit versée une indemnité de 1'000 fr. pour tort moral au sens de l'art. 429 al. 1 let. c CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0). A titre subsidiaire, elle a requis l'annulation du jugement entrepris et le renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision.
Par courrier du 10 juin 2014, le Ministère public a renoncé à déclarer un appel joint et s'en est remis à justice quant à la recevabilité de l'appel.
Pour le compte des enfants A.V._ et A.L._, Me Nicole Diserens, curatrice et conseil d'office, a conclu au rejet de l'appel en soutenant que même s'ils échappaient à la sanction pénale, les gestes incriminés demeuraient inacceptables et fautifs sur le plan civil.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
B.V._, née en 1979, géorgienne, est venue en Suisse en 2004 pour demander l’asile, de son propre aveu sous la fausse identité de [...], et son mari, venu à l’époque avec elle, est décédé en 2009 dans un contexte de toxicomanie et de délinquance. Ce couple a eu deux enfants, A.L._, né le 16 juillet 2005 et B.L._, né le 30 janvier 2007. Les deux garçons, comme leur mère, portent désormais le patronyme B.V._ Titulaire d'un permis F, la prévenue, qui souffre de troubles psychiques, consulte une psychiatre depuis le mois de mars 2008 (P. 84/1). Un épisode dépressif sévère l'a conduite à Cery en 2013.
2.
Le casier judiciaire suisse de B.V._ fait état d'une condamnation, le 6 juin 2008, par le Juge d’instruction du Nord vaudois -Yverdon, à une peine pécuniaire 20 jours-amende à 10 fr. avec sursis pendant deux ans, pour faux dans les certificats et circulation sans permis de conduire.
3.
B.V._ et son ami A.V._ ont été dénoncés par le chef du Service de protection de la jeunesse (ci-après : SPJ) le 24 mai 2013 pour avoir, au domicile de la prévenue, fait subir des attouchements aux fils prénommés de cette dernière. Les deux victimes ont été placées, dès la rentrée scolaire du 23 août 2010, au Home [...] Par le jugement attaqué, le Tribunal a libéré les prévenus de l'accusation d'actes d'ordre sexuel avec des enfants, au motif que si déplacés et inhabituels sous nos latitudes (toucher le sexe par-dessus et par-dessous le pantalon), les gestes incriminés avaient été commis sans penser à mal et sans être nombreux. Il a, ce nonobstant, condamné les prévenus à supporter une partie des frais de justice et refusé à B.V._ l'indemnité pour tort moral réclamée à forme de l'art. 429 CPP, en considérant que leurs actes – avérés et manquant singulièrement
"[...] de clairvoyance et de retenue [...]"
– avaient largement justifié l'ouverture de l'enquête pénale (jugement p. 31). | En droit :
1.
1.1
Selon l’art. 399 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (al. 1). La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (al. 3).
1.2
Interjeté dans les forme et délai légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de B.V._ est recevable. Il y a donc lieu d’entrer en matière sur le fond.
1.3
Dès lors qu'il ne porte que sur les frais et sur l'indemnité pour tort moral requise en application de l'art. 429 CP, l'appel sera traité en procédure écrite, conformément à l'art. 406 al. 1 let. d CPP.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Invoquant une violation de l’art. 426 CPP, l’appelante conteste devoir payer des frais judiciaires, au motif que les actes à retenir à sa charge censés justifier une condamnation aux frais de justice
ne pourraient pas être définis (mémoire p. 3).
3.1
L'art. 423 CPP prévoit que les frais de procédure sont mis à la charge de la Confédération ou du canton qui a conduit la procédure, sauf
disposition contraire. Selon l'art. 426 al. 2 CPP, lorsque la procédure
fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.
La jurisprudence précise que pour déterminer si le comportement en cause est propre à justifier l'imputation des frais ou le refus d'une indemnité, le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l'ordre juridique suisse pris dans son ensemble, dans le sens d'une application par analogie des principes découlant de l'art. 41 CO. Le fait reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement. L'acte répréhensible n'a pas à être commis intentionnellement. La négligence suffit, sans qu'il soit besoin qu'elle soit grossière. L'acte répréhensible doit en outre se trouver dans une relation de causalité adéquate avec l'ouverture de l'enquête ou les obstacles mis à celle-ci. Enfin, une condamnation aux frais ne peut se justifier que si, en raison du comportement illicite du prévenu, l'autorité était légitimement en droit d'ouvrir une enquête. Elle est en tout cas exclue lorsque l'autorité est intervenue par excès de zèle, ensuite d'une mauvaise analyse de la situation ou par précipitation (TF 6B_ 6B_656/2013 du 22 septembre 2013 c. 3 et les références citées).
3.2
En l'espèce, le raisonnement du Tribunal en référence au manque de clairvoyance ne justifie pas encore d'une illicéité et ne suffit pas à fonder la décision entreprise. Toutefois, le dossier contient deux témoignages d'assistantes sociales rapportant séparément les dires des deux enfants, attestant chacun de l'existence d'un attouchement au moins, sous le pantalon, commis par l'ami de la mère alors qu'ils étaient en visite au domicile maternel (procès-verbal pp. 12 et 13). Par ailleurs, interpellée, B.V._ a admis avoir elle-même commis de tels attouchements, sans y voir une quelque connotation sexuelle et sans voir non plus que de telles pratiques – qui feraient partie de la tradition géorgienne (PV aud. 5 du 19 juillet 2013 p. 4) – sont répréhensibles dans le contexte helvétique.
Ces actes commis par la prévenue, peut-être objectivement peu graves dans le contexte décrit par celle-ci, et ceux commis en sa présence par A.V._, plus inquiétants au regard du contexte de contrainte et de violence régissant la relation, n'en constituent pas moins une violation du devoir de protéger le développement corporel et moral de l'enfant (art. 302 CC) et la personnalité de celui-ci (art. 28 CC).
Quoiqu'elle en dise sur le fossé culturel existant entre la Suisse et la Georgie, et nonobstant sa situation sociale précaire dans un pays qui n'est pas le sien, la prévenue ne pouvait pas ignorer que le respect de l'intimité sexuelle d'un enfant fait partie des bases de l'éducation et que l'observation de la règle consistant à ne pas toucher ses parties intimes s'impose à tous et d'abord à la mère. Elle pouvait d'autant moins ne pas en avoir conscience que son droit de garde lui avait été retiré, que ses enfants ne venaient qu'en visite, et qu'elle savait que ces visites n'étaient pas censées se passer en présence de l'ami (procès-verbal, p. 12).
Il résulte en outre du témoignage fait en première instance par P._, assistante sociale au SPJ, que la recourante a évolué dans ses explications. Lors de la première prise de contact au sujet des faits litigieux, elle s'est montrée
"[...] étonnée et disait qu'elle était toujours présente lors des visites"
(procès-verbal p. 10). Interpellée une deuxième fois, elle a admis les attouchements. On comprend, dans ces conditions, la dénonciation du SPJ, qui avait toutes les raisons de craindre, au vu des déclarations des enfants, que quelque chose se soit passé au sein de la famille et que la situation ne s'aggrave; vu le recoupement des éléments dont le SPJ disposait, on ne saurait lui faire grief d'avoir pêché par excès de zèle en dénonçant les faits.
3.3
Ainsi, même si les actes n'ont pas de connotation sexuelle, ce qui a conduit à l'acquittement des deux prévenus, ils n'en constituent pas moins une faute civile justifiant qu'une partie des frais de justice soient à la charge de la recourante. Le grief de violation de l'art. 426 al. 2 CPP est dès lors mal fondé.
4.
La recourante conclut à l'allocation d'une indemnité pour tort moral.
4.1
L'art. 429 al. 1 let. c CPP prévoit que le prévenu acquitté partiellement ou totalement a le droit à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté. Demeurent toutefois réservées les exceptions à ce principe prévues à l'art. 430 al. 1 CPP. D'après cette dernière disposition, l'autorité pénale peut réduire ou refuser l'indemnité ou la réparation du tort moral lorsque le prévenu a provoqué illicitement et fautivement l'ouverture de la procédure ou a rendu plus difficile la conduite de celle-ci.
La réparation du dommage au sens de l'art. 429 CPP, avec les réserves de l'art. 430 CPP, est subordonnée à l'existence de quatre conditions cumulatives : l'existence d'un préjudice, une détention ou un autre acte de procédure injustifiés, un rapport de causalité entre le préjudice et l'acte ou la détention injustifiés et l'absence d'un comportement fautif du prévenu qui aurait provoqué ou compliqué l'instruction pénale (CAPE 6 mars 2013/59 c. 3.3.1 et les références citées).
Les principes qui régissent la condamnation aux frais d'un prévenu libéré (art. 426 al. 2 CPP) valent également
, mutatis mutandis,
pour le refus d'une indemnité au sens de l'art. 430 al. 1 let. a CPP. Ainsi, le sort réservé aux frais est en règle générale le même que pour les indemnités (CAPE 21 mars 2014/94 c. 4.1 et réf.).
4.2
Dans le cas présent, le comportement fautif de la recourante relevé au considérant 4.1 ci-dessus justifie le refus d'une indemnité pour tort moral en application de l'art. 429 al. 1 let. c CPP, et pour cette raison déjà, le grief de violation de cette disposition tombe à faux.
On ajoutera que si l'ouverture de l'action pénale a peut-être été un choc pour la recourante, qui pensait n'avoir rien fait de répréhensible, sa situation sociale et familiale, de même que son état de santé, impliquent que l'épisode dépressif qui a suivi la dénonciation des faits et la séparation d'avec le coprévenu ne peut être imputé à la dénonciation pénale du SPJ (cf. notamment P. 84/1). Une indemnité de l'art. 429 let. c CPP doit donc également être refusée pour ce motif.
5
. En définitive, l'appel de B.V._ doit être rejeté et les frais de seconde instance, constitués en l'espèce de l'émolument d'arrêt, par 880 fr. plus l'indemnité due à Me Charlotte Iselin, défenseur d'office de la recourante,
par 583 fr. 20 TVA incluse, sont mis à la charge de cette dernière (art. 428 al. 1 CPP), qui ne devra toutefois l'indemnité que si sa situation financière s'améliore (art. 135 al. 4 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b6ecc2a7-afda-48e3-b89e-c8e376908a8c | En fait :
A.
Par jugement du 18 septembre 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a constaté que A._ s’est rendu coupable de vol, tentative de vol, dommages à la propriété, infraction à la Loi fédérale sur les étrangers, infraction grave et contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants (I), l’a condamné à une peine privative de liberté de trente mois, sous déduction de quatre cent trente-trois jours de détention avant jugement, peine partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 mai 2012 par le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne, ainsi qu’à une amende de 300 fr. (II), a dit qu’à défaut de paiement de l’amende, la peine privative de liberté de substitution sera de trois jours (III), a ordonné le traitement ambulatoire de A._ pendant l’exécution de sa peine et aussi longtemps que les experts le jugeront nécessaire (IV), a révoqué le sursis partiel octroyé à A._ le 10 mai 2012 par le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne et a ordonné l’exécution du solde de la peine privative de liberté de six mois (V), a fixé à 5'319 fr. TTC l’indemnité de Me Lionel Zeiter, défenseur d’office de A._ (VI), a mis à la charge de A._ les frais de la cause par 18'900 fr. 85, comprenant l’indemnité prévue au chiffre VI ci-dessus, indemnité dont le remboursement à l’Etat ne sera exigé que si la situation économique de A._ le permet (VII) et a ordonné le maintien en détention de A._ pour des motifs de sûreté et pour garantir l’exécution de la peine (VIII).
B.
Le 24 septembre 2013, A._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel du 29 octobre 2013, il a conclu, sous suite de frais et dépens, à la modification du chiffre II du dispositif en ce sens qu’il est condamné à une peine privative de liberté de quinze mois, sous déduction de la détention avant jugement subie, peine partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 mai 2012 par le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne, ainsi qu’à une amende de 300 francs.
Par courrier du 14 novembre 2013, le Ministère public a annoncé qu’il s’en remettait à justice s’agissant de la recevabilité de l’appel et qu’il n’entendait pas déposer d’appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Ressortissant algérien, A._ est né le 16 avril 1963 à Alger. Aîné d’une fratrie de trois, le prévenu serait marié et père d’un fils âgé d’une vingtaine d’années. Ses parents sont décédés et il n’a de contacts occasionnels qu’avec son frère resté au pays. Il est séparé de son épouse depuis une vingtaine d’années, époque à laquelle il a quitté définitivement son pays. Sa scolarité a été interrompue pour des questions économiques alors que le prévenu avait treize ans. Dès lors, il a vécu de petits boulots sinon d’expédients. Après avoir quitté l’Algérie, il a séjourné en France, en Belgique, en Espagne et en Italie où il aurait été condamné pour vol en 1998. Il est venu en Suisse courant 2009. Le prévenu n’a personne à sa charge et n’a aucune relation sentimentale. Lors de son séjour à I’EVAM, il touchait 25 fr. par semaine comme viatique. Le prévenu indique vouloir retourner en Algérie à sa sortie de prison.
Depuis l’âge de vingt ans environ, A._ s’adonne à une consommation régulière d’alcool et de cannabis. Depuis son arrivée en Suisse, cette consommation d’alcool est régulière, importante et quotidienne. C’est en Italie, il y a une quinzaine d’années, que A._ a commencé à s’adonner à l’héroïne par inhalation. Sa consommation a augmenté progressivement pour atteindre 5 grammes par jour. Il a également consommé de la cocaïne inhalée de façon occasionnelle et depuis son arrivée en Suisse. Outre sa consommation d’héroïne, il s’adonne à la méthadone et à certains médicaments. Il y a une douzaine d’années, A._ aurait été renversé par une voiture en Italie, ce qui a, selon lui, altéré la motricité et la force de son bras gauche. Le 27 mars 2012, le prévenu a été renversé sur la voie publique par une automobile, à [...], ce qui a entraîné une hospitalisation au CHUV, puis à l’Hôpital de [...] jusqu’à la mi-mai 2012. Outre ses problèmes au bras gauche, le prévenu évoque des séquelles notamment sous forme de difficultés de marche, de mobilité de la main droite et des troubles de la mémoire qui n’ont pas été cliniquement mis en évidence.
Dans le cadre de la présente cause, A._ est détenu avant jugement depuis le 13 juillet 2012. Il est en exécution anticipée de peine depuis le 1
er
juillet 2013.
Son casier judiciaire suisse comporte les inscriptions suivantes :
- 15 janvier 2010, Préfecture de Lausanne, entrée illégale, séjour illégal, peine pécuniaire 10 jours-amende à 10 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans, amende 100 fr.; 10 mai 2012, Tribunal de police Lausanne, révoqué ;
- 2 février 2010, Juge d’instruction de Lausanne, séjour illégal, infractions d’importance mineure (vol), peine pécuniaire 20 jours-amende à 20 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans, amende 100 fr.; 10 mai 2012, Tribunal de police Lausanne, révoqué ;
- 10 mai 2012, Tribunal de police Lausanne, vol, infractions d’importance mineure (vol), dommages à la propriété, délit selon art. 19 al. 1 LStup, contravention selon art. 19a LStup, séjour illégal, activité lucrative sans autorisation, peine privative de liberté 12 mois, dont sursis à l’exécution de la peine 6 mois, délai d’épreuve 4 ans, amende 1’000 fr., détention préventive 6 jours; peine d’ensemble avec le jugement du 15 janvier 2010, Préfecture de Lausanne, peine d’ensemble avec le jugement du 2 février 2010, Juge d’instruction de Lausanne.
2.
2.1
Entre le 6 décembre 2011 et le 13 juillet 2012, date de son interpellation, A._ a séjourné en Suisse alors qu’il n’était au bénéfice d’aucune autorisation de séjour.
2.2
Entre le 6 décembre 2011 et le 13 juillet 2012, A._ a consommé de l’héroïne à raison de 5 grammes par jour. Il a également consommé de la marijuana à raison d’un joint par soir.
2.3
A [...], entre décembre 2011 et fin mars 2012, puis entre le 7 mai 2012 et le 13 juillet 2012, A._ a remis quotidiennement 60 pacsons de 0.2 gramme d’héroïne, soit 12 grammes, à des consommateurs, pour le compte de ses fournisseurs, à raison de quatre jours par semaine. Il a ainsi fait l’intermédiaire pour une quantité totale de 1’152 grammes. En contrepartie, le prévenu recevait gratuitement un pacson d’héroïne pour trois sachets vendus.
2.4
a)
A [...], Rue [...], le 30 mai 2012, vers 14h00, A._ a ouvert la portière avant droite du véhicule de K._, qui n’était pas verrouillé, et y a dérobé une sacoche de marque [...], qui contenait notamment un porte-monnaie et divers documents d’identité.
Le prévenu a été interpellé le 31 mai 2012 en possession du sac, qui a été restitué à son propriétaire le 21 juin 2012.
b)
K._ a déposé plainte et s’est constitué partie civile le
1
er
juin 2012. Il n’a toutefois pas chiffré ses prétentions civiles.
2.5
a)
A [...], Rue [...], le 30 mai 2012, vers 17h00, A._ a brisé la vitre avant droite du véhicule de J._, qui était stationné le long de la chaussée, pour y dérober le sac qui s’y trouvait. A._ a été mis en fuite par la plaignante avant d’avoir pu dérober son bien.
L’ADN du prévenu a été retrouvé sur la vitre de la voiture.
b)
J._ a déposé plainte et s’est constituée partie civile le 31 mai 2012. Elle n’a toutefois pas chiffré ses prétentions civiles.
2.6
a)
A [...], Rue [...], le 13 juillet 2012, à 19h40, A._ a brisé la vitre avant gauche du véhicule de X._, qui était stationné, et y a dérobé le sac à main de cette dernière. Il a été interpellé peu après par la police. Le sac à main a été restitué à sa propriétaire.
b)
X._ a déposé plainte et s’est constituée partie civile le 13 juillet 2012. Elle a renoncé à sa constitution de partie civile le 2 août 2013.
3.
A._ a fait l’objet d’une expertise psychiatrique. Dans leur rapport du 30 avril 2013 (P. 47), les experts ont posé le diagnostic de syndrome de dépendance à des substances psychoactives multiples. Ils ont notamment relevé que le prévenu semblait avoir débuté une consommation d’alcool et de cannabis importante au début de l’âge adulte et que, par la suite et depuis environ une vingtaine d’années, il avait également développé des dépendances diverses aux opiacés, à la cocaïne, aux sédatifs et aux hypnotiques. Ils ont ajouté que son histoire migratoire était également marquée par de nombreux déplacements dans les pays européens, avec la persistance d’une situation psychosociale précaire et la présence continue de substances psychoactives.
Relevant que le prévenu ne présentait pas de troubles psychiques tels qu’un trouble de l’humeur ou du spectre psychotique, les experts n’ont également pas décelé de trouble cognitif ou un trouble de la personnalité constitué.
L’expertise mentionnait également plusieurs facteurs parlant en faveur d’un pronostic réservé. Il y avait d’abord une consommation soutenue de diverses substances psychoactives sans interruption notable depuis une trentaine d’années, le fait que le prévenu n’avait jamais cherché d’aide professionnelle régulière, ni bénéficié d’un traitement approprié et qu’il minimisait l’importance de ses consommations et leur impact sur sa vie quotidienne. En détention préventive, le prévenu a d’abord été traité à la méthadone avant d’être complètement abstinent à cette substance de substitution. Il a déclaré souhaiter maintenir cette abstinence lorsqu’il aura recouvré la liberté, sans toutefois expliquer pourquoi et comment il la maintiendra. Les experts sont parvenus à la conclusion que l’expertisé paraissait susceptible de commettre de nouvelles infractions de même nature dans le cadre de son syndrome de dépendance. En tenant compte des facteurs influant sur le pronostic du trouble présent, des antécédents judiciaires connus et du contexte psychosocial de l’expertisé, ils ont estimé que ce risque était élevé.
S’agissant de la responsabilité du prévenu, les experts ont estimé qu’une diminution légère de celle-ci pouvait être retenue pour la consommation de substances illicites et pour les vols et dommages à la propriété en lien avec le financement de cette consommation. Cette diminution était au plus légère s’agissant du trafic de stupéfiants finançant sa propre consommation. Cette responsabilité était entière en ce qui concerne les infractions à la Loi fédérale sur les étrangers. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de A._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
lnvoquant une constatation erronée des faits, l’appelant conteste les quantités d’héroïne trafiquées retenues par les premiers juges.
3.1
Selon l’art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu’elle n’est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l’intime conviction qu’il retire de l’ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l’état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
Comme règle d’appréciation des preuves, le principe de la présomption d’innocence est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 la 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n’ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d’administrer la preuve d’un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l’administration d’un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple.
3.2
L’appelant se prévaut des quantités mentionnées par le Ministère public dans les différentes requêtes de prolongation de la détention provisoire, soit un trafic d’héroïne total compris entre 576 et 1’080 grammes. Toutefois, ces quantités ne sont pas déterminantes, puisque seule la quantité retenue dans l’acte d’accusation du 26 juin 2013, à savoir 1'152 grammes, fait foi.
3.3
L’appelant conteste la durée du trafic de six mois retenue par les premiers juges. Il soutient qu'une durée maximum de quatre mois peut être pris en compte, dans la mesure où il faut déduire six semaines d'hospitalisation de la durée de quatre à six mois de trafic d'héroïne avouée.
En l’occurrence, il ressort effectivement du procès-verbal d’audition d’arrestation du 14 juillet 2012 que l’appelant a déclaré avoir agi durant quatre à six mois (PV aud. 4, p. 2). Par la suite, l'appelant a toutefois indiqué avoir été hospitalisé de mars à mai 2012 à l’Hôpital de [...] en raison d’un accident (PV aud. 5, p. 2). Plus précisément, on retiendra une période d’hospitalisation entre le 27 mars et le 7 mai 2012 (cf. P. 47). En outre, il sied de relever que l'argumentation développée dans la procédure d’appel est en contradiction avec celle exposée durant l’audience de première instance. En effet, au cours de débats, l’appelant a d’abord déclaré que son trafic avait commencé en 2011 et s’était poursuivi jusqu’à son arrestation, sous réserve de sa période d’hospitalisation, avant de revenir sur ses aveux et d’affirmer qu’il ne s’était plus adonné au trafic d’héroïne dès sa sortie de l’hôpital (cf. jgt., p. 5). Ainsi, la Cour de céans ne peut suivre les dires de l’appelant qui sont à géométrie variable. Ce dernier minimise la réalité, change de version d’une audition à l’autre, se réfère à sa guise à une mémoire défaillante et n’admet que ce qu’il ne peut contester. Par exemple, lors de sa seconde audition devant le Procureur, il a été jusqu’à nier son implication dans un trafic d’héroïne et contester connaître P._ (PV aud. 7, p. 2). On ne saurait au surplus considérer que A._ ne savait pas ce qu’il disait lorsqu’il a été entendu par la police, parce qu’il était sous l’emprise de la drogue ou en état de manque, puisqu’il a été traité et placé sous méthadone dès son arrestation.
En définitive, sur la base des déclarations de l’appelant, il y a lieu de retenir qu’il s’est adonné au trafic d’héroïne entre décembre 2011 et fin mars 2012, puis entre le 7 mai 2012 et le 13 juillet 2012, date de son arrestation. La durée de six mois retenue par les premiers juges ne peut dès lors qu'être confirmée.
3.4
L’appelant soutient encore qu’il travaillait seulement quatre jours par semaine et que les premiers juges auraient dû comptabiliser des mois à dix-sept jours et non à trente jours. Or, le tribunal de première instance a bien tenu compte de quatre jours de travail par semaine (jgt., p. 11).
3.5
L’appelant conteste le nombre de pacsons vendus par jour de travail.
En l’occurrence, bien que l’appelant ait expliqué vendre entre 16 et 20 pacsons par jour, à raison de 0.2 et 0.3 gramme d’héroïne, lors de sa première audition par la police du 14 juillet 2012 (PV aud. 2, p. 2), il a également déclaré le même jour qu’il consommait quotidiennement 5 grammes d’héroïne et qu’il obtenait une dose pour trois doses vendues. L’appelant a confirmé consommer 4 à 5 grammes d’héroïne par jour (PV aud. 5, p. 2, et jgt., p. 5) et a même indiqué devant les premiers juges que pour quatre paquets vendus, il en touchait un (jgt., p. 5).
Pour pouvoir atteindre sa consommation d’au minimum 4 grammes d’héroïne par jour, l’appelant devait ainsi vendre 60 pacsons d’héroïne, soit 12 grammes, si l’on considère qu’une dose contenait 0.2 gramme et que c'était trois doses vendues, et non quatre, qui lui en rapportait une.
Ainsi, en retenant que l’appelant vendait 12 grammes d’héroïne par jour, le Tribunal de première instance a pris en compte la quantité qui lui était la plus favorable.
3.6
Sur le vu de ce qui précède, la quantité de 1'152 grammes d’héroïne vendue retenue par les premiers juges échappent à la critique. A un taux de pureté non contesté de 8%, cela représente bien 92 grammes d'héroïne pure.
Mal fondés, les griefs de l’appelant doivent être rejetés.
4.
L’appelant conteste la quotité de la peine qu’il estime trop sévère. Il se prévaut de son rôle d’importance minime dans le trafic et de sa bonne collaboration à l’enquête en raison de ses aveux spontanés.
4.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
4.2
En matière de trafic de stupéfiants, il y a lieu de tenir compte de la quantité de drogue; même si elle ne joue pas un rôle prépondérant, la quantité constitue un élément essentiel, qui perd cependant de l'importance au fur et à mesure que s'éloigne la limite à partir de laquelle le cas est grave au sens de l'art. 19 ch. 2 let. a LStup. Le type et la nature du trafic en cause sont déterminants. Aussi l'appréciation sera différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, la nature de sa participation et sa position au sein de l'organisation doivent être prises en compte. L'étendue géographique du trafic entre également en considération : l'importation en Suisse de drogue a des répercussions plus graves que le seul transport à l'intérieur des frontières. S'agissant d'apprécier les mobiles qui ont poussé l'auteur à agir, le juge doit distinguer le cas de celui qui est lui-même toxicomane et agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; TF 6B_265/2010 du 13 août 2010 c. 2.3; TF 6B_380/2008 du 4 août 2008 c. 6.1.2). Le comportement du délinquant lors de la procédure peut aussi jouer un rôle. Le juge pourra atténuer la peine en raison de l'aveu ou de la bonne coopération de l'auteur de l'infraction avec les autorités policières ou judiciaires notamment si cette coopération a permis d'élucider des faits qui, à ce défaut, seraient restés obscurs (TF 6B_85/2013 ibid.; ATF 121 IV 202 c. 2d/aa; ATF 118 IV 342 c. 2d).
4.3
Selon l’art. 19 al. 2 CP, le juge atténue la peine si, au moment d’agir, l’auteur ne possédait que partiellement la faculté d’apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d’après cette appréciation. Les principes qui président à la fixation de la peine en cas de diminution de la responsabilité sont exposés à I’ATF 136 IV 55 (JdT 2010 IV 127 c. 5.6 et 5.7). Selon cette jurisprudence, une diminution de la responsabilité au sens de l’art. 19 CP ne constitue qu’un critère parmi d’autres pour déterminer la faute liée à l’acte, et non plus un facteur qui interfère directement sur la peine. La réduction de la peine n’est que la conséquence de la faute plus légère. En bref, le juge doit procéder comme suit en cas de diminution de la responsabilité pénale : dans un premier temps, il doit décider, sur la base des constatations de fait de l’expertise, dans quelle mesure la responsabilité pénale de l’auteur doit être restreinte sur Ie plan juridique et comment cette diminution de la responsabilité se répercute sur l’appréciation de la faute. La faute globale doit être qualifiée et désignée expressément dans le jugement (art. 50 CP). Dans un second temps, il convient de déterminer la peine hypothétique, qui correspond à cette faute. La peine ainsi fixée peut enfin être modifiée en raison de facteurs liés à l’auteur (Täterkomponente) ainsi qu’en raison d’une éventuelle tentative selon l’art. 22 aI. 1 CP (TF 6B_356/2012 du 1
er
octobre 2012 c. 3.2; TF 6B_1092/2009 du 22 juin 2010 c. 2.2.2
4.4
Aux termes de l'art. 49 CP, si, en raison d’un ou de plusieurs actes, l’auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l’infraction la plus grave et l’augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (al. 1). Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l’auteur a commise avant d’avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l’auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l’objet d’un seul jugement (al. 2).
L’art 49 al. 2 CP est applicable lorsque le tribunal doit juger des infractions que l’auteur a commises avant d’être condamné pour d’autres infractions (ATF 138 IV 313 c. 3.4.1, JdT 2013 IV 63; ATF 129 IV 113 c. 1.1, JdT 2005 IV 52). Cette disposition a essentiellement pour but de garantir le respect du principe d’absorption, également en cas de concours rétrospectif. L’auteur qui encourt plusieurs peines privatives de liberté doit être jugé en application d’un principe uniforme d’augmentation de la peine qui lui est relativement favorable, indépendamment du fait que les procédures sont conduites séparément ou non. Nonobstant la séparation des poursuites pénales en plusieurs procédures, l’auteur ne doit ainsi pas être désavantagé par rapport à l’auteur dont les actes sont jugés simultanément (ATF 138 IV 313 ibid. ; ATF 132 IV 102 c. 8.2).
En cas de concours rétrospectif partiel, il faut déterminer d'abord celle pour laquelle la loi prévoit la peine la plus grave. Lorsque l'infraction la plus grave est celle à juger qui a été commise avant le premier jugement, une peine complémentaire (hypothétique) au premier jugement doit être fixée et sa durée augmentée pour tenir compte des actes commis après ce premier jugement. L'élément de la peine d'ensemble relatif à l'acte en concours rétrospectif sera déterminé comme une peine additionnelle à celle déjà prononcée. Cette méthode permet d'appliquer l'art. 49 al. 1 CP sans négliger l'art. 49 al. 2 CP. Sur le plan formel, la sanction est toujours une peine d'ensemble mais, sur celui de sa quotité, il est tenu compte du concours rétrospectif (ATF 116 IV 14 c. 2b p. 17 et les références citées; TF 6B_28/2008 du 10 avril 2008 c. 3.3.2).
4.5
En l’espèce, la culpabilité de A._ est importante. Il répond de nombreuses infractions en concours. A l’instar des premiers juges, il convient de retenir que l’appelant a agi sans scrupule, uniquement préoccupé d’assurer une consommation effrénée d’héroïne. Il n’a pas hésité à commettre plusieurs vols, en public et en plein jour, afin de trouver l’argent nécessaire à son addiction. Bien qu’il ait été un simple vendeur de rue et non un importateur ou un organisateur, le prévenu n’en était pas moins le rouage essentiel d’un trafic conséquent et le nombre de pacsons vendus démontre à lui seul que son rôle n’était pas insignifiant. Par son activité délictuelle, qui a durée plusieurs mois, l'appelant a sciemment mis en danger un grand nombre de personnes. De plus, depuis son arrivée en Suisse en 2009, le prévenu a toujours eu affaire à la justice, son casier judiciaire présentant pas moins de trois condamnations. Enfin, on ne saurait tenir compte d’une bonne collaboration à l’enquête. Interpellé pour des vols, le prévenu a été placé dans une position où il ne pouvait faire autrement que faire état de sa consommation d’héroïne et du financement de celle-ci. Comme on l'a vu (cf. consid. 3.3 supra), les aveux de l’appelant ont été fluctuants, admettant que ce qu’il ne pouvait pas contester et remettant en cause ses précédentes déclarations et les calculs opérés sur cette base, et cela encore au stade de l'appel.
A décharge, il sera tenu compte d'une légère diminution de la responsabilité pénale du prévenu sur la base de l’expertise psychiatrique du 30 avril 2013, qui n’est pas contestée.
En application de l'art. 49 al. 2 CP et de la jurisprudence qui s'y réfère (consid. 4.4 ci-dessus), il convient de prononcer une peine partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 mai 2012 par le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne (peine privative de liberté de douze mois). En effet, il s’agit en l’espèce de juger des infractions perpétrées de décembre 2011 à fin mars 2012 et du 7 mai au 13 juillet 2012 alors qu’un jugement a déjà été rendu en mai 2012 condamnant A._ pour le même type d’infractions pour des faits commis d’octobre 2009 au 5 décembre 2011 comme cela ressort de l’acte d’accusation du 16 mars 2012 (cf. P. 45 et P. 73/1).
La principale infraction est celle qui se rapporte au trafic dont l’ampleur a été confirmée ci-dessus. Le prévenu a poursuivi son trafic nonobstant le jugement du 12 mai 2012 et l’enquête l’ayant précédé. Au trafic de stupéfiants s’ajoutent les autres infractions (vol, tentative de vol, dommages à la propriété; cf. jgt., pp. 12 s.), elles aussi postérieures au jugement du 12 mai 2012. Il faut également tenir compte de l’infraction LStup réprimée par le jugement du 12 mai 2012. S’ajoutent encore un séjour illégal et la consommation de stupéfiants pour toute la période concernée par les deux jugements. Pour l’ensemble, le prévenu mérite une peine globale arrêtée à quarante-deux mois en tenant compte de la diminution de responsabilité. La peine prononcée précédemment étant de douze mois, c’est en conséquence à juste titre que la peine complémentaire a été arrêtée à trente mois.
Au vu de ce qui précède, la peine privative de liberté de trente mois prononcée par l’autorité précédente ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmée. Il en va de même de l’amende infligée pour la contravention à la LStup.
5.
En définitive, l’appel de A._ est rejeté et le jugement rendu le 18 septembre 2013 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne est confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être mis à la charge de A._ (art. 428 al. 1 CPP). Outre l'émolument, qui se monte à 2’350 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), ces frais comprennent l’indemnité allouée à son défenseur d’office.
Au vu de la complexité de la cause, des opérations mentionnées dans la note d'honoraires et de la procédure d'appel, il convient d'allouer au défenseur d’office de l’appelant une indemnité arrêtée à 1'814 fr. 40, TVA et débours inclus.
A._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant des indemnités en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b7a435b3-324b-46fd-a13c-9813a5f39a90 | En fait :
A.
Par jugement du 20 février 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de l’arrondissement de Lausanne a constaté que D._ s’était rendu coupable de tentative de contrainte et de diffamation (I), l’a condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, le montant de jour-amende étant fixé à 40 fr., ainsi qu’à une amende de 1'000 fr. (II), a suspendu l’exécution de la peine pécuniaire mentionnée sous chiffre II ci-dessus et a fixé un délai d’épreuve de deux ans (III), a dit qu’en cas de non-paiement de l’amende, la peine privative de liberté de substitution serait de 25 jours (IV), a renvoyé F._ à agir devant le juge civil (V) et a mis les frais de la cause, par 900 fr., à la charge de D._ (VI).
B.
Par annonce du 26 février 2015, puis déclaration motivée du 1
er
mai 2015, D._ a formé appel contre le jugement précité. Il a conclu implicitement à sa réforme en ce sens qu’il est libéré de toute accusation.
Dans ses déterminations du 30 juin 2015, le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne a déclaré se référer intégralement au jugement entrepris et a conclu à ce que la peine prononcée à l’encontre du prévenu soit confirmée dans son entier.
Une première audience d’appel s’est tenue le 25 août 2015. Elle a été suspendue à la suite d’une convention intervenue entre les parties. Celle-ci prévoyait que D._ s’engageait à régler à l’Office des poursuites du district de la Riviera et du Pays d’Enhaut la poursuite ouverte à son encontre par F._ d’ici au 30 septembre 2015 et, dans le même délai, à verser à l’intimée le montant de 500 fr. sur son CCP. Une fois ces versements effectués, F._ s’engageait à retirer la plainte pénale déposée le 17 juillet 2014 contre D._ et à radier la poursuite susmentionnée. Toujours dans un délai au 30 septembre 2015, le prévenu devait retirer le commandement de payer notifié le 11 juillet 2014 à F._ ainsi que la plainte pénale déposée à l’encontre de cette dernière en juillet 2015.
Le 24 septembre 2015, D._ sollicitait de la Présidente de la Cour de céans l’octroi d’un délai supplémentaire pour le paiement de ses créances, tant envers l’office des poursuites qu’envers F._.
Invitée à se déterminer sur ce courrier, F._ a confirmé n’avoir reçu aucun montant de la part de D._ et s’est opposée à l’octroi de toute nouvelle prolongation.
Le 30 septembre 2015, D._ a produit à la Cour de céans copie du courrier qu’il avait adressé le 29 septembre 2015 à la Procureure de l’arrondissement de Lausanne pour retirer la plainte déposée contre F._ ( [...]) ainsi qu’un avis de l’Office des poursuites du district de Lausanne du même jour indiquant que sa poursuite dirigée contre l’intimée était annulée.
Le 19 novembre 2015, l’audience devant la Cour de céans a été reprise. Entendu, D._ a confirmé ne pas avoir réglé la poursuite ni versé les 500 fr. à F._, conformément à l’accord signé le 25 août 2015. Il a derechef sollicité l’octroi d’un délai supplémentaire pour opérer ces versements.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né en 1964 à Athènes, D._ est arrivé en Suisse en 1983. Il a passé l’équivalent de la maturité à Fribourg et suivi une formation d’ingénieur en France. Après deux stages effectués au CERN à Genève et des cours suivis à HEC Lausanne, le prévenu est retourné en Grèce pour effectuer son service militaire. A son retour en Suisse, il a immédiatement travaillé dans l’immobilier, domaine dans lequel il poursuit toujours son activité en qualité de courtier indépendant. Le prévenu est célibataire et n’a personne à charge. Son revenu varie en fonction des affaires entre 30'000 et 40'000 fr. par année. Le prévenu a déclaré avoir gagné environ 35'000 fr. en 2012, 30'000 fr. en 2013 et 20'000 fr. en 2014. Il dit aussi recevoir du soutien de la part de sa famille. Son loyer mensuel brut s’élève à 1'550 fr. et sa prime d’assurance maladie lui coûte 282 fr. 60 par mois. A part la présente affaire, le prévenu a déclaré ne pas avoir de dettes. Il dit avoir des comptes bancaires, des biens successoraux et vouloir acheter un immeuble. Ses acomptes d’impôt se situent entre 240 à 280 fr. par trimestre.
Le casier judiciaire suisse de D._ est vierge.
2.
a)
Le 16 juillet 2014, D._ a fait notifier à F._, agente d’affaires brevetée, un commandement de payer portant sur un montant de 100'000 fr., avec intérêt à 5% dès le 20 mars 2013. Le titre de la créance indiqué par le prévenu était le suivant : « dommages pour déposition mensongère et diffamatoire lors de la convention signée à la Justice de Paix à Lausanne ainsi que tentative d’induire la Justice en erreur dans le but d’extorsion abusive de fonds lors de la convention de conciliation au Ministère de l’Intérieur. Solidairement avec Me B._ ». Cette notification faisait suite à un commandement de payer pour un montant de 2'853 fr. 25 notifié le 12 novembre 2013 à D._ par F._, sur mandat de l’avocate B._, concernant le paiement de notes d’honoraires dues en application de la convention ratifiée par les parties devant la Justice de Paix en date du 20 mars 2013, valant jugement définitif et exécutoire.
b)
Le 25 juin 2014, toujours dans le cadre du litige précité, D._ a adressé à la Juge de paix de Lausanne un courrier contenant notamment les assertions suivantes : « J’insiste que le but de Madame B._ et Madame F._ est de diffamer et d’induire la justice en erreur [...] ». De même, le 10 juillet 2014, D._ écrivait à la Justice de paix du district de Lausanne en ces termes : « Je considère l’attitude de ces deux personnages (Madame F._ et Madame B._) totalement irresponsable, non professionnelle. ».
c)
Le 17 juillet 2014, F._ a déposé plainte en lien avec les deux complexes de fait précités. | En droit :
1.
1.1
Interjeté dans les formes et délai légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de D._ est recevable.
1.2
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, JugendStrafprozessordnung, 2
e
éd. Bâle 2014, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
2.
L’appelant conteste tout d’abord sa condamnation pour tentative de contrainte.
2.1
Se rend coupable de contrainte au sens de l'art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte. La tentative est réprimée par l’art. 22 CP.
Alors que la violence consiste dans l'emploi d'une force physique d'une certaine intensité à l'encontre de la victime (ATF 101 IV 42 consid. 3a), la menace est un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l'auteur, sans toutefois qu'il soit nécessaire que cette dépendance soit effective (ATF 117 IV 445 consid. 2b, 106 IV 125 consid. 2a) ni que l'auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (ATF 105 IV 120 consid. 2a). La loi exige un dommage sérieux, c'est-à-dire que la perspective de l'inconvénient présenté comme dépendant de la volonté de l'auteur soit propre à entraver le destinataire dans sa liberté de décision ou d'action (ATF 120 IV 17 consid. 2a/aa). La question doit être tranchée en fonction de critères objectifs, en se plaçant du point de vue d'une personne de sensibilité moyenne (ATF 122 IV 322 consid. la; 120 IV 17 consid. 2a/aa).
Il peut également y avoir contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime « de quelque autre manière » dans sa liberté d'action. Cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive. N'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas. Il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action. Il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 137 IV 326 consid. 3.3.1; 134 IV 216 consid. 4.2; 119 IV 301 consid. 2a).
La contrainte n'est contraire au droit que si elle est illicite (ATF 120 IV 17 consid. 2a et les arrêts cités), soit parce que le moyen utilisé ou le but poursuivi est illicite, soit parce que le moyen est disproportionné pour atteindre le but visé, soit encore parce qu'un moyen conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue, au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux moeurs (ATF 137 IV 326 consid. 3.3.1; 134 IV 216 consid. 4.1; 120 IV 17 consid. 2a/bb). Ainsi, menacer d'une plainte pénale pour une infraction que rien ne permet sérieusement de soupçonner est un moyen en soi inadmissible (ATF 120 IV 17 consid. consid. 2a/bb). En revanche, réclamer le paiement d'une créance ou menacer de déposer une plainte pénale (lorsque l'on est victime d'une infraction) constituent en principe des actes licites; ils ne le sont plus lorsque le moyen utilisé n'est pas dans un rapport raisonnable avec le but visé et constitue un moyen de pression abusif, notamment lorsque l'objet de la plainte pénale est sans rapport avec la prestation demandée ou si la menace doit permettre d'obtenir un avantage indu (ATF 120 IV 17 consid. 2a/bb et les arrêts cités; au sujet de la contrainte susceptible d'être réalisée par un commandement de payer, cf. arrêt 6S.853/2000 du 9 mai 2001 et 6S.87411996 du 26 février 1997).
Pour une personne de sensibilité moyenne, faire l'objet d'un commandement de payer d'une importante somme d'argent est, à l'instar d'une plainte pénale, une source de tourments et de poids psychologique, en raison des inconvénients découlant de la procédure de poursuite elle-même et de la perspective de devoir peut-être payer le montant en question. Un tel commandement de payer est ainsi propre à inciter une personne de sensibilité moyenne à céder à la pression subie, cas échéant, donc à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d’action (cf. ATF 120 IV 17 c. 2 aa ; ATF 96 IV 58 c. 3). Certes, faire notifier un commandement de payer lorsqu’on est fondé à réclamer une telle somme est licite. En revanche, utiliser un tel procédé comme moyen de pression pour dissuader la personne visée d’agir correctement par exemple dans sa profession est clairement abusif, donc illicite (cf. ATF 115 III 18 c. 3, 81 c. 3b et SJ 1987 p. 156 ss). Il est donc concevable qu’une tentative de contrainte soit réalisée lorsqu’un commandement de payer d’un montant important est notifié, que le poursuivi allègue que la créance est manifestement inexistante et que le procédé a pour but de pousser le poursuivi à adopter un certain comportement (CAPE 3 juin 2011/35 c. 3.2)
Sur le plan subjectif, il faut que l'auteur ait agi intentionnellement, c'est-à-dire qu'il ait voulu contraindre la victime à adopter le comportement visé en étant conscient de l'illicéité de son comportement; le dol éventuel suffit (ATF 120 IV 17 consid. 2c p. 22).
Lorsque la victime ne se laisse pas intimider et n'adopte pas le comportement voulu par l'auteur, ce dernier est punissable de tentative de contrainte (ATF 129 IV 262; 106 IV 125 consid. 2b p. 12).
2.2
En l’occurrence, l’appelant a fait notifier à F._ un commandement de payer portant sur le montant de 100'000 fr., au titre de « Dommages pour déposition mensongère et diffamatoire lors de la convention signée à la justice de paix à Lausanne ainsi que tentative d'induire la justice en erreur dans le but d'extorsion abusive de fonds lors de la convention de conciliation au Ministère de l'intérieur. Solidairement responsable avec Me B._ ».
Il a fait notifier ce document dans le but d'obtenir de l’intimée qu'elle retire la poursuite intentée à son encontre et qu'elle renonce à lui réclamer le montant dû. Ce faisant, l'intéressé n'a certes pas usé de violence ou de menace, mais il a toutefois entravé son destinataire dans sa liberté d'action. Le commandement de payer notifié était dépourvu de tout fondement. Il y a lieu en effet de constater, à la lecture des pièces du dossier, que F._ était fondée à faire notifier un commandement de payer à D._, au contraire de ce dernier, qui, à l'évidence, n’a aucune prétention à faire valoir à l'encontre de la plaignante. En outre, le montant de 100'000 fr. est important et ne se justifie nullement par les allégations de l'appelant, le dommage invoqué correspondant à environ trois ans de salaire du prévenu et, partant, étant complètement fantaisiste. Or, faire notifier un commandement de payer à une personne lorsqu'on n'est pas fondé à lui réclamer une somme d'argent est illicite. L'entrave à la liberté que constitue le procédé utilisé n'est pas négligeable. En outre, elle est de nature à porter atteinte au crédit professionnel de l'intimée.
En définitive, l’appelant a fait notifier un commandement de payer sans fondement, avec conscience et volonté, dans le but de dissuader l'intimée de recouvrer les honoraires de Me B._. Cela relève de la contrainte. Dans la mesure toutefois où l'intimée ne s'est pas laissée intimider, seule la tentative doit être retenue à sa charge.
On relèvera en dernier lieu qu’il n’appartient pas à la Cour de céans de faire bénéficier l’appelant d’un délai supplémentaire pour s’acquitter de la dette résultant du commandement de payer que F._ lui a fait notifier en novembre 2013 sur mandant de Me B._, étant souligné que la partie plaignante s’y est fermement opposée dans le cadre de ses déterminations du 9 octobre 2015.
3.
L’appelant conteste également sa condamnation pour diffamation.
3.1
L'art. 173 ch. 1 CP réprime le comportement de celui qui, en s'adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, ou qui aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon.
Cette disposition protège la réputation d'être une personne honorable, c'est-à-dire de se comporter comme une personne digne a coutume de le faire selon les conceptions généralement reçues. L'honneur protégé par le droit pénal est conçu de façon générale comme un droit au respect qui est lésé par toute assertion propre à exposer la personne visée au mépris en sa qualité d'homme. Pour apprécier si une déclaration est attentatoire à l'honneur, il faut se fonder non pas sur le sens que lui donne la personne visée, mais sur une interprétation objective selon le sens qu'un destinataire non prévenu doit, dans les circonstances d'espèce, lui attribuer. S'agissant d'un texte, il doit être analysé non seulement en fonction des expressions utilisées, prises séparément, mais aussi selon le sens général qui se dégage du texte dans son ensemble (ATF 128 IV 53 p. 58).
Le fait d'accuser une personne d'avoir commis un crime ou un délit intentionnel entre dans les prévisions de l'art. 173 ch. 1 CP (cf. ATF 132 IV 112; 118 IV 248 consid. 2b).
3.2
Les termes usités dans le commandement de payer que D._ a fait notifier à F._ le 16 juillet 2014 portent atteinte à la considération de la plaignante et sont donc attentatoires à l'honneur, ce que ne peut ignorer l'appelant, qui a persisté, encore aux débats, dans ce genre d'allégations. Il en va de même lorsque, dans des courriers adressés à la Justice de paix, l’appelant a indiqué que le but poursuivi par l’intimée était de diffamer et d’induire la justice en erreur. Aucun élément ne permet au demeurant d'admettre que l'appelant aurait été légitimé à considérer ses écrits comme vrais.
La condamnation pour diffamation doit donc être confirmée.
4.
L’appelant, qui conclut à son acquittement, ne conteste pas comme telle la quotité de la peine prononcée à son encontre. Examinant cette question d'office, la Cour de céans considère que la peine pécuniaire de 60 jours-amende à 40 fr. le jour, prononcée avec sursis, est adéquate dans son genre et dans sa quotité et qu’elle doit être confirmée. Au vu de l’ensemble des circonstances, et en particulier du fait que D._ est déjà passablement affecté par le jugement rendu à son encontre, il n’y a néanmoins pas lieu de lui infliger en sus une amende à titre de sanction immédiate. Le jugement sera dès lors réformé dans cette mesure.
5.
En définitive, l’appel doit être partiellement admis et le jugement réformé dans le sens des considérants.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel, constitués du seul émolument d'arrêt (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), par 2’200 fr., seront mis pour deux tiers, soit par 1’466 fr. 70, à la charge de l’appelant (art. 428 al. 1 CPP), le solde étant laissé à la charge de l'Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b7a537b9-27d9-4255-a7dd-fc4759a6e93e | En fait :
A.
Par jugement du 18 janvier 2013, le Tribunal criminel de l’arrondissement de la Côte a constaté que P._ s’est rendu coupable de vol en bande et par métier, de dommages à la propriété considérables, de violation de domicile et d’infraction à la loi fédérale sur les étrangers (I), a condamné P._ à une peine privative de liberté de sept ans, sous déduction de sept cent soixante-huit jours de détention avant jugement (II), a ordonné le maintien de la détention de P._ pour des motifs de sûreté (III), a libéré W._ des chefs d’accusation de recel et de faux dans les certificats étrangers (IV), a constaté que W._ s’est rendu coupable de vol en bande et par métier, de dommages à la propriété, de violation de domicile, de séjour illégal, d’infraction à la loi fédérale sur les armes, de conduite sans permis de conduire et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants (V), a condamné W._ à une peine privative de liberté de cinq ans et demi, sous déduction de sept cent vingt-cinq jours de détention avant jugement (VI), a ordonné le maintien de la détention de W._ pour des motifs de sûreté (VII), a condamné W._ à une amende de 500 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif de l’amende étant de cinq jours (VIII), a dit que P._ et W._ sont débiteurs, solidairement entre eux, des plaignants suivants des montants suivants, valeur échue : M._, 200 fr., G._, 20'907 fr., K._, 5'351 fr. 20, R._, 500 fr., N._, 200 fr., V._, 200 fr. (IX), a dit que P._ est débiteur des plaignants suivants des montants suivants, valeur échue : B._, 2'606 fr. 18, Q._, 200 fr., S._, 200 fr., X._, 500 fr., U._, 945 fr., O._, 605 fr. 75, F._, 2'200 fr., H._, 300 fr. (X), a dit que W._ est débiteur des plaignants suivants des montants suivants, valeur échue : E._, 243 fr. 45, [...] (concernant l'assuré Y._), 4'471 fr. 10, [...] (concernant l'assuré Z._), 2'060 fr. 10, C._, 1'293 fr. 25 (XI), a donné acte aux plaignants suivants de leurs réserves civiles à l’encontre de P._ et W._, solidairement entre eux : J._, T._, D._, AA._, L._, BB._, CC._, DD._, EE._, FF._, GG._, HH._, JJ._, KK._, LL._, MM._, NN._, OO._, PP._, QQ._, RR._, SS._, TT._, UU._, VV._, WW._ (XII), a donné acte aux plaignants suivants de leurs réserves civiles à l’encontre de P._ : XX._, YY._, ZZ._, AX._, BX._, CX._, DX._, EX._ et FX._, GX._, HX._, IX._, JX._, KX._, LX._, MX._, NX._, OX._, PX._, QX._, RX._, SX._, TX._, UX._, VX._, WX._, YX._, ZX._, AZ._, BZ._, CZ._ (XIII), a donné acte aux plaignants suivants de leurs réserves civiles à l’encontre de W._ : DZ._, EZ._, FZ._, [...] (concernant l'assuré GZ._), HZ._, IZ._, JZ._, KZ._, LZ._, MZ._, NZ._, OZ._ (XIV), a arrêté les frais de procédure à 79'068 fr. 80, comprenant les indemnités allouées d’une part à Mes Jean-Marc Reymond, Rachid Hussein et Mathieu Guillemin, défenseurs d’office de P._, par 14'890 fr., débours et TVA inclus, dont 2'000 fr. ont d’ores et déjà été payés, d’autre part à Mes Jean-Luc Maradan et Carmine Gionata, défenseurs d’office de W._, par 18'900 fr., débours et TVA inclus, et les a mis à concurrence de 37’144 fr. 55 à la charge de P._ et de 41'924 fr. 25 à celle de W._ (XV), a dit que P._ et W._ ne seront tenus de rembourser à l'Etat les indemnités allouées à leurs défenseurs d'office respectifs, conformément au chiffre XV ci-dessus, que pour autant que leur situation financière le permette (XVI).
B.
Le 30 janvier 2013, P._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d'appel motivée du 21 février 2013, il a conclu principalement à sa libération du chef d’accusation de dommages à la propriété considérables, le chiffre I du dispositif du jugement étant réformé en ce sens qu’il s’est rendu coupable de vol en bande et par métier, de dommages à la propriété, de violation de domicile et d’infraction à la loi fédérale sur les étrangers, ainsi qu’à la réforme du chiffre II du dispositif du jugement en ce sens qu’il est condamné à une peine privative de liberté inférieure à celle prononcée par le Tribunal criminel de l’arrondissement de la Côte, sous déduction de la détention effectuée avant jugement. Subsidiairement, il a conclu à l’annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause au Tribunal criminel d’arrondissement de la Côte pour nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.
Le 30 janvier 2013, W._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel non motivée du 21 février 2013, il a conclu au prononcé d'une peine privative de liberté de quarante-huit mois, sous déduction de la détention avant jugement effectuée.
Par courrier du 6 mars 2013, le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois s'en est remis à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel de W._ et a renoncé à déposer un appel joint.
Par courrier du 14 mars 2013, le Ministère public de l'arrondissement de La Côte s'en est remis à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel de P._ et a renoncé à déposer un appel joint.
Le 19 mars 2013, P._ s’en est remis à justice s’agissant de la recevabilité de l’appel de W._ et a renoncé à déposer un appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1
P._ est né le 3 mai 1974 à Santiago du Chili, pays dont il est ressortissant. Cinquième de huit enfants issus de deux mariages, il a été élevé par sa mère à Santiago, où il a suivi ses écoles primaires jusqu’à leur terme. Il a également effectué quelques années d’école secondaire, partiellement lors d’une incarcération, sans toutefois obtenir un certificat de fin d’études. Dans son pays d’origine, il a occupé divers emplois dans la construction notamment ainsi que, à sa sortie de prison en 2003, dans l’hôtellerie, chez la tante de l’un de ses demi-frères. Il est aussi allé en Argentine où il a travaillé. A fin 2006, il a quitté le Chili pour aller vivre en Espagne où il a en dernier lieu œuvré comme peintre en bâtiment. Célibataire, il n’a pas d’enfant. Actuellement détenu, il travaille en prison du lundi au jeudi et gagne 500 fr. par mois, dont 100 fr. sont bloqués par l’administration pénitentiaire, notamment en vue d’indemniser les lésés. Le vendredi, il suit des cours de français. A sa sortie de prison, il envisage de reprendre une activité dans l’hôtellerie au Chili.
Son casier judiciaire suisse ne comporte aucune inscription. En revanche, il a indiqué avoir été condamné pour des vols, au Chili, à deux peines privatives de liberté de cinq ans, purgées jusqu’au 27 décembre 2003, et, en Espagne, à deux ans d’emprisonnement, dont il est sorti en septembre ou octobre 2008.
Pour les besoins de la présente cause, P._ a été détenu provisoirement du 13 décembre 2010 au 5 avril 2012. Il est en exécution anticipée de peine depuis cette date.
1.2
W._ est né le 28 septembre 1979 à Santiago du Chili, pays dont il est ressortissant. Il a été élevé par sa mère et son père adoptif, dont il a expliqué qu’il ne l’avait jamais accepté. Il a suivi toute l’école obligatoire mais n’a pas terminé l’école secondaire. Il a ensuite successivement travaillé sur des bateaux de pêche, appris à faire des meubles, œuvré comme surveillant de parking et occupé divers emplois, sans jamais avoir de poste fixe. En 2006, il a quitté le Chili pour aller en Argentine, où il a fait différents petits boulots. Fin 2008, il a quitté l’Argentine pour aller en Espagne où il a travaillé comme ouvrier du bâtiment. Célibataire, il a trois enfants, nés en 1998, 2006 et 2008, de deux femmes différentes. Son aîné habite avec sa mère au Chili, où réside par ailleurs sa propre mère. Les deux cadets vivent avec leur mère en Argentine. Actuellement détenu, il travaille en prison et perçoit un salaire de 500 fr. par mois, dont 200 fr. sont bloqués par l’administration pénitentiaire. Il envoie une partie de ses gains à sa famille. L’immeuble dont il était propriétaire en Argentine, partiellement financé avec son butin, a été réalisé au profit d’un créancier hypothécaire.
Son casier judiciaire suisse ne comporte aucune inscription. En revanche, il a mentionné avoir été condamné pour vol, au Chili, à cinq ans d’emprisonnement, peine exécutée de 1998 à 2003, et avoir été inquiété en Espagne pour les mêmes motifs, mais finalement blanchi, non sans avoir fait trois semaines de détention dans le cadre de cette enquête.
Pour les besoins de la présente cause, W._ a été détenu provisoirement du 25 janvier 2011 au 11 mars 2012. Il est en exécution anticipée de peine depuis cette date.
2.
2.1
P._ a séjourné en Suisse illégalement entre le 25 novembre 2008 et le 13 décembre 2010.
2.2
P._ est l’auteur de 207 cambriolages commis à trois périodes différentes, soit entre le 25 novembre 2008 et le 12 mars 2009, entre le 19 novembre 2009 et le 17 avril 2010 et entre le 9 octobre 2010 et le 13 décembre 2010, date de sa mise en détention provisoire. Les vols concernent des villas situées dans les cantons de Vaud, Valais, Neuchâtel et Fribourg. L’appelant agissait en duo, trio ou en quatuor, à composition variable, de préférence à la tombée de la nuit, choisissant des maisons non éclairées, supposées sans occupant. Il y pénétrait en forçant, fracturant ou brisant les fenêtres ou portes-fenêtres au moyen d’un outil indéterminé. Lorsque la villa disposait d’une alarme, il arrachait le boîtier de celle-ci ou endommageait le système. Le montant des dommages matériels s’est élevé à plusieurs dizaines de milliers de francs comprenant notamment les frais de réparation ou de remplacement des vitrages, des portes, des systèmes d’alarme, ainsi que des meubles. Le butin se composait principalement de sommes d’argent, de bijoux et d’appareils électroniques. Cette activité délictueuse a rapporté au total près d’une centaine de milliers de francs à l’appelant et à ses comparses. L’argent dérobé faisait l’objet d’un partage à parts égales entre les coauteurs, le solde du butin (soit les bijoux et les appareils électroniques) était revendu par le biais d’une filière en Espagne. L’appelant a été identifié grâce à ses traces de chaussures, à son ADN, à sa localisation téléphonique ou aux liens opérationnels effectués.
En ce qui concerne le délit de violation de domicile, il convient de déduire des 207 cambriolages les 37 cas de plainte retirée ou non déposée (jgt., p. 40 et 42).
P._ a admis l’intégralité des faits qui lui étaient reprochés lors de l’audience du Tribunal criminel de l’arrondissement de la Côte.
2.3
W._ est l’auteur de 149 cambriolages également commis à trois périodes distinctes, soit entre le 25 novembre 2008 et le 12 mars 2009, entre le 10 novembre 2009 et le 2 avril 2010 et entre le 11 octobre 2010 et le 25 janvier 2011, date de sa mise en détention provisoire. Les vols concernent des villas situées dans les cantons de Vaud, Valais, Berne, Genève et Fribourg. L’appelant agissait en duo, trio ou en quatuor, à composition variable, de préférence à la tombée de la nuit, choisissant des maisons non éclairées, supposées sans occupant. Il y pénétrait en forçant, fracturant ou brisant les fenêtres ou portes-fenêtres au moyen d’un outil indéterminé. Lorsque la villa disposait d’une alarme, il arrachait le boîtier de celle-ci ou endommageait le système. Le montant des dommages matériels s’est élevé à plusieurs dizaines de milliers de francs comprenant notamment les frais de réparation ou de remplacement des vitrages, des portes, des systèmes d’alarme, ainsi que des meubles. Le butin se composait principalement de sommes d’argent, de bijoux et d’appareils électroniques. Cette activité délictueuse a rapporté au total près d’une centaine de milliers de francs à l’appelant et à ses comparses. L’argent dérobé faisait l’objet d’un partage à parts égales entre les coauteurs, le solde du butin (soit les bijoux et les appareils électroniques) était revendu par le biais d’une filière en Espagne. L’appelant a pu faire parvenir à sa famille, restée au Chili, une somme totale comprise entre 5'000 et 8'000 francs. L’appelant a été identifié grâce à ses traces de chaussures, à son ADN, à sa localisation téléphonique ou aux liens opérationnels effectués.
2.4
A Fribourg, les 25 et 26 janvier 2011, W._ a été porteur d’un couteau papillon, d’origine délictueuse, dont le port est prohibé.
2.5
W._ a séjourné en Suisse illégalement au cours de trois périodes, soit entre le 25 novembre 2008 et le 12 mars 2009, entre le 10 novembre 2009 et le 2 avril 2010 et entre le 11 octobre 2010 et le 25 janvier 2011.
2.6
W._ a consommé de la marijuana, en quantité indéterminée, notamment le 25 janvier 2011, à proximité d’ [...].
2.7
Entre les mois de juillet 2009 et le 25 janvier 2011, W._ a conduit à plusieurs reprises alors qu’il n’était pas titulaire d’un permis de conduire.
W._ a admis l’intégralité des faits qui lui sont reprochés lors de l’audience du Tribunal criminel de l’arrondissement de la Côte, à l’exception de ceux faisant l’objet des cas 116 à 152 de l’acte d’accusation du 14 août 2012. L’appelant se trouvant en Argentine au moment où ces vols ont été commis, ceux-ci n’ont en définitive pas été retenus à son encontre. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (al. 1). La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (al. 3).
Interjetés dans les forme et délais légaux par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels de P._ et de W._ sont recevables. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
I.
Appel de P._
3.
P._ conclut à sa libération du chef d’accusation de dommages à la propriété considérables. Il conteste toute unité d’action dans l’accomplissement des 207 cambriolages par effraction et soutient que les montants des dommages qu’il a causés lors de chaque vol ne peuvent s’additionner pour atteindre et dépasser le seuil de 10'000 francs.
3.1
Selon l’art. 144 al. 3 CP, si l’auteur a causé un dommage considérable, la poursuite a lieu d’office et le juge pourra prononcer une peine privative de liberté de un à cinq ans. Le Tribunal fédéral a estimé qu’un dommage de 10'000 fr. au moins était considérable (ATF 136 IV 117 c. 4.3.1). En présence de dommages causés à plusieurs choses, appartenant à un ou plusieurs ayant droits, si la vision naturelle des choses et l’intention de l’auteur permettent de retenir une unité d’action, il faudra additionner les préjudices causés afin, le cas échéant, de fonder le dommage considérable (Dupuis et alii, Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 25 ad art. 144 CP).
Selon la jurisprudence, il y a unité naturelle d'action (natürliche Handlungseinheit) lorsque des actes séparés procèdent d'une décision unique et apparaissent objectivement comme des événements formant un ensemble en raison de leur relation étroite dans le temps et dans l'espace; ainsi, l'unité naturelle d'action vise la commission répétée d'infractions (par exemple une volée de coups) ou la commission d'une infraction par étapes successives (par exemple le sprayage d'un mur avec des graffitis pendant plusieurs nuits successives), une unité naturelle étant cependant exclue si un laps de temps assez long s'est écoulé entre les différents actes, quand bien même ceux-ci seraient liés entre eux (ATF 131 IV 83 c. 2.4.5 et les références citées; TF 6S.397/2005 du 13 novembre 2005, reproduit in SJ 2006 I 85 c. 2.2).
Toutefois, plusieurs infractions forment également une entité lorsqu’elles forment entre elles une unité juridique d’action, soit lorsque plusieurs actes délictueux forment juridiquement un tout (SJ 2006 I 85 c. 2.3 et 2.3.1). cette unité est en effet donnée si le comportement – qui est défini par la loi – présuppose l’accomplissement d’actes séparés ou un comportement durable, cette répétition ou cette durabilité devant expressément ou implicitement ressortir de la définition légale de l’infraction.
Dans le vol par métier (art. 139 ch. 2 CP), l’ensemble des infractions commises est de par la loi envisagé comme une unité sur le plan juridique, si bien que l’aggravante du concours n’opère pas (Dupuis et alii, op. cit., n. 22 ad art. 137 CP). Certes, il s’agit ici de dommages à la propriété, infraction pour laquelle la loi pénale ne prévoit pas de commission professionnelle, mais ces dommages, comme destructions consécutives aux effractions, autres bris et destructions nécessités par l’accomplissement de l’entreprise de vol, sont l’accessoire de l’activité criminelle professionnelle qu’est le vol par métier. De l’intention d’exercer la profession de commettre des cambriolages découle donc l’intention de forcer les ouvertures permettant d’accumuler du butin par métier, si bien que ces dommages relèvent également d’une unité d’action justifiant d’en additionner la contre valeur.
3.2
Le Tribunal criminel a retenu la réalisation de l’infraction qualifiée de dommages à la propriété en faisant état de dommages pour plusieurs dizaines de milliers de francs (jgt., p. 42).
P._ a agi en trois périodes distinctes: 44 vols entre le 25 novembre 2008 et le 12 mars 2009, 115 vols entre le 19 novembre 2009 et le 17 avril 2010 et 48 vols entre le 9 octobre 2010 et le 13 décembre 2010, date de son interpellation. Chacune de ces expéditions de vol comporte une unité d’action, l’auteur étant venu en Suisse exclusivement pour y amasser du butin au plus vite pour en vivre ailleurs. Au vu de la densité, du nombre de vols, ainsi que du mode opératoire similaire, la totalité des montants des dommages occasionnés pour chaque période de cambriolages doit être prise en compte. Les dommages commis pour chaque période dépassant manifestement la limite de 10'000 fr. (vitrages, portes, systèmes d’alarme, meubles, etc., abîmés ou détruits), la condamnation pour dommages à la propriété considérables doit être confirmée.
Pour le reste, les qualifications juridiques retenues ne sont pas contestées et ne sont d'ailleurs pas critiquables.
4.
P._ demande une réduction de sa peine. Il fait grief aux premiers juges de n’avoir pas pris en compte sa collaboration, de n’avoir pas tenu compte de la révélation spontanée de ses antécédents pénaux à l’étranger, ainsi que d’avoir décidé, sans motifs suffisants, une différence de peine aussi importante (un an et demi) entre la sienne et celle de son comparse.
4.1
a)
L'art. 47 CP prévoit que le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
b)
L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 136 IV 55 c. 5.6 p. 61; ATF 134 IV 17 c. 2.1 p. 19 s.; ATF 129 IV 6 c. 6.1, p. 21 et les références citées).
c)
Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, le juge doit respecter, en particulier, le principe de l'égalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst, Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101; cf. ATF 120 IV 136, c. 3a et les arrêts cités). S'il est appelé à juger les coauteurs d'une même infraction ou deux coprévenus ayant participé ensemble au complexe de faits délictueux, il est tenu de veiller à ce que la différence des peines infligées aux deux intéressés soit justifiée par une différence dans les circonstances personnelles en fonction desquelles, conformément à l'art. 47 CP, la peine doit être individualisée (cf. ATF 121 IV 202 c. 2b; TF 6S.199/2006 du 11 juillet 2006 c. 4; TF 6B_207/2007 du 6 septembre 2007 c. 4.2.2). A défaut de motifs pertinents, il ne faut pas créer un écart trop important entre deux coprévenus qui ont participé ensemble au même complexe de faits délictueux (cf. TF 6B_233/2011 du 7 juillet 2011 c. 2.2.1).
4.2
S’agissant de la quotité de la peine, les premiers juges ont retenu l’importance de la culpabilité de P._ au regard du nombre impressionnant de 207 vols interrompus uniquement par son arrestation, sa détermination que ni l’arrestation de comparses, ni sa propre interpellation par des gardes-frontières en décembre 2010 n’ont freinée, son acharnement l’ayant amené par appât du gain à effectuer trois expéditions distinctes et successives de vol en Suisse, l’importance du butin de plusieurs centaines de milliers de francs, l’importance des dommages commis, le poids de ses antécédents pour vol, soit deux condamnations de cinq ans d’emprisonnement au Chili et de deux ans en Espagne (cf. jgt., p. 38), son enracinement dans la délinquance, ainsi que sa promptitude à récidiver, moins de deux mois après être sorti de prison en Espagne (jgt., p. 42).
A décharge et contrairement à ce qu’affirme l’appelant, le Tribunal criminel a pris en considération les aveux complets intervenus à l’audience, sa collaboration globalement bonne durant l’enquête malgré quelques ergotages, la reconnaissance de ses erreurs, ses regrets exprimés à l’audience bien que non concrétisés par l’envoi de mots d’excuses ou une ébauche de dédommagement, ainsi que son bon comportement en détention (jgt., p. 42 s.).
4.3
Le fait que la collaboration ait été qualifiée de globalement bonne était justifié, l’appelant ayant d’abord déclaré aux débats de première instance qu’il admettait que les cas où apparaissaient des éléments de preuve incontestables, mais qu’il ne se souvenait pas des autres cas (jgt., p. 10 et 14), avant d’admettre son implication générale dans tous les faits qui lui étaient reprochés (jgt., p. 18).
Quant à la révélation des antécédents judiciaires que le jugement a retenus, le fait de répondre avec sincérité à une question du juge et de révéler ainsi des faits défavorables, comme de lourds antécédents spéciaux, dans l’appréciation de la culpabilité ne constitue pas en soi un élément favorable. La sincérité, et par conséquent la bonne foi, est présumée et les autorités de poursuite ont de toute manière la possibilité de procéder à des vérifications dans les registres de condamnation des pays étrangers. Par ailleurs, l’appelant a exposé avoir passé seize des vingt dernières années en prison pour tenter d’exprimer sa lassitude d’un semblable mode de vie et pour tenter de convaincre de l’authenticité de son projet de changer d’existence (jgt., p. 26 in fine). On voit ainsi que sa "révélation" était aussi pourvue d’une portée argumentaire ou utilitaire.
Enfin, la différence des peines entre les deux condamnés s’explique par des cambriolages plus nombreux dans une proportion approximative de 30%, soit 207 vols pour l’appelant et 149 vols pour son comparse. De plus, au contraire de P._, W._ a collaboré dès le début de l’enquête, a manifesté une forme de prise de conscience en adressant des lettres d’excuses aux plaignants, a expliqué qu’il volait pour aider les siens à vivre (jgt., p. 44) et a présenté des antécédents moins chargés, soit une peine purgée de cinq ans pour vol au Chili.
Compte tenu de ces éléments, de l'importante culpabilité de P._ et de sa situation personnelle, une peine sévère s’impose. La peine privative de liberté de sept ans fixée par les premiers juges s’avère adéquate et doit être confirmée.
5.
Il convient encore de relever que la détention subie depuis le jugement de première instance sera déduite. Le maintien en détention de P._ à titre de sûreté sera ordonné au regard du risque de fuite avéré compte tenu de la situation personnelle de l'appelant et de la longueur de la peine prononcée.
6.
En définitive, l'appel de P._ est rejeté.
II. Appel de W._
7.
W._ conteste la peine prononcée et conclut à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu’il est condamné à une peine privative de liberté de quarante-huit mois, sous déduction de la détention provisoire effectuée.
7.1
Les éléments à prendre en compte pour fixer la peine au vu de la culpabilité du prévenu ont déjà été rappelés ci-dessus (cf. consid. 4.1).
7.2
A charge, comme les premiers juges, il faut retenir l’importance de la culpabilité de W._, soit 149 cambriolages, série stoppée uniquement par son arrestation, sa détermination – l’arrestation de comparses et particulièrement celle de P._ ne l’ayant pas intimidé –, son acharnement ayant consisté à effectuer trois expéditions distinctes de vol en Suisse étalées sur trois ans, l’importance du butin de plusieurs centaines de milliers de francs ainsi obtenu, le mobile d’aider par le produit de ses vols ses enfants ou sa famille n’étant qu’une voie facile ayant abouti en définitive à donner un exemple déplorable aux siens et à supprimer tout entretien (pécule excepté) du fait de la privation de liberté subie et enfin l’absence d’enseignement tiré de l’exécution de la précédente peine de cinq ans dénotant une incompréhension ou une insensibilité à la sanction, même lourde (jgt., p. 43 s.).
A décharge, il a été pris en compte l’immédiate et pleine collaboration de W._, ainsi que sa prise de conscience résultant des lettres d’excuses adressées aux lésés (jgt., p. 44).
Compte tenu de ce qui précède, la quotité de la peine est ici encore adéquate au vu de l’importance de la délinquance professionnelle dont seule une sanction lourde peut assurer l’abandon et décourager la reconduction.
8.
Il convient encore de relever que la détention subie depuis le jugement de première instance sera déduite. Le maintien en détention de W._ à titre de sûreté sera ordonné au regard du risque de fuite avéré compte tenu de la situation personnelle de l'appelant et de la longueur de la peine prononcée.
9.
En définitive, l’appel de W._ est rejeté.
10.
Une indemnité de défenseur d'office pour la procédure d'appel d'un montant de 3’078 fr. est allouée à Me Jean-Marc Reymond et de 1'420 fr. 20 à Me Jean-Luc Maradan.
La moitié des frais de la procédure d'appel, par 4'473 fr., comprenant l'indemnité allouée à Me Jean-Marc Reymond, est mise à la charge de P._, l'autre moitié des frais de la procédure d'appel, par 2'815 fr. 20, comprenant l'indemnité allouée à Me Jean-Luc Maradan étant mise à la charge de W._.
P._ et W._ ne seront tenus de
rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité allouée à leurs défenseurs d’office que lorsque leur situation financière le permettra
. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b7a91293-9dcc-48bd-a83c-8563b716f769 | En fait :
A.
Par jugement du 13 juillet 2012, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a notamment constaté qu’A.Y._ s’est rendu coupable d’injure et de contrainte (I), l’a condamné à une peine pécuniaire de nonante jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 20 fr. (II), suspendu l’exécution de la peine et fixé à A.Y._ un délai d’épreuve de deux ans (III), dit qu’A.Y._ et C.Y._ sont les débiteurs de B.Y._, solidairement entre eux, d’un montant de 1'000 fr., avec intérêt à 5% l’an dès le
25 septembre 2009, à titre d’indemnité pour tort moral (VII), mis une partie des frais de la cause par 6'892 fr. 05, y compris l’indemnité allouée à son défenseur d’office Me Gisel arrêtée à 2'771 fr. 30, TVA comprise, à la charge d’A.Y._ (VIII), dit que le remboursement à l’Etat des indemnités allouées aux chiffres VIII et IX ainsi que celles allouées aux précédents défenseurs d’office d’A.Y._ et de C.Y._ ne sera exigible que pour autant que leur situation économique le permette (X), fixé à 5'621 fr. 40, TVA comprise, le montant de l’indemnité allouée à Me Monnier, conseil d’office de la partie plaignante B.Y._ (XI) et dit que lorsque leur situation financière le permettra, A.Y._ et C.Y._ seront tenus, solidairement entre eux, de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité allouée au chiffre XI ci-dessus et de verser à Me Monnier le montant de 2'378 fr. 60, correspondant à la différence entre son indemnité en tant que conseil d’office et les honoraires qu’il aurait perçu comme conseil privé (XII).
B.
Par annonce d'appel du 14 juillet 2012, puis déclaration d'appel motivée du 3 septembre suivant, A.Y._ s'est opposé à ce jugement. Il a conclu à sa libération des infractions d’injure et de contrainte, aucune peine n’étant prononcée à son encontre, les conclusions civiles de la partie plaignante étant rejetées, les frais de première et de deuxième instances n’étant pas mis à sa charge.
Dans ses déterminations écrites du 3 avril 2013, le Ministère public a conclu au rejet de l’appel.
B.Y._ a indiqué renoncer à présenter une demande de non entrée en matière ou à déposer un appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
A.Y._, né le 26 septembre 1958 en Macédoine, pays dont il a la nationalité, est au bénéfice d’un permis C. Après avoir travaillé avec son père agriculteur, il est arrivé en Suisse en 1979. Il a exercé divers petits emplois sans autorisation pendant trois ans, puis de 1982 à 1989, en étant déclaré. Il travaille depuis novembre 1989 pour la [...]. En raison de douleurs ostéo articulaires (atteintes dégénératives au niveau de la colonne vertébrale, des genoux et des épaules), A.Y._ a réduit son taux d’activité à 50% pour un salaire mensuel net de 2'150 fr., revenu qui est complété depuis le mois de septembre 2010 par le revenu d’insertion. Il est marié à C.Y._ et le couple a cinq enfants, dont seul le cadet, né en 1996, est encore à leur charge. La famille vit dans un appartement dont le loyer s’élève à 1'520 fr., par mois. Les primes d’assurance maladie d’A.Y._, de son épouse et de leur fils mineur, presque entièrement subsidiées, s’élèvent à un total de 50 fr., par mois. A.Y._ n’a ni fortune, ni économie.
Dans un rapport médical daté du 14 septembre 2011, le Dr. [...], médecin traitant d’A.Y._ entre novembre 1997 et juin 1999, a indiqué que ce dernier souffre d’un trouble dépressif chronique, de troubles douloureux chroniques et d’un probable trouble de la personnalité non spécifique, se traduisant par la présence de traits de la personnalité rigide et inadaptée, telle qu’une méfiance soupçonneuse envers les autres, une impulsivité, des crises de colère intenses et inappropriées, ces traits conduisant à des conflits relationnels à répétition avec comme conséquence un isolement psychosocial de plus en plus important (P. 70). Ces constats ont été confirmés le 29 avril 2011 par les Drs [...] et [...], tous deux médecins au Service de psychiatrie générale du CHUV (P. 72).
Le casier judiciaire d’A.Y._ ne comporte aucune inscription.
2.
Il ressort des pièces du dossier que les relations au sein de la famille de l’appelant sont tendues et difficiles depuis de nombreuses années. En décembre 1996, le Juge d’instruction de l’arrondissement de Lausanne a ouvert une enquête contre le prévenu – qui avait admis être dépassé par le comportement de son fils [...], né le 8 novembre 1982 - pour lésions corporelles qualifiées sur ce dernier. Mandaté par la Justice de paix du cercle de Lausanne pour procéder à une enquête sur les conditions d’existence des enfants, le Service de protection de la jeunesse (ci-après : le SPJ), a préconisé, en date du 15 juillet 1997, le placement d’ [...] pour lui permettre d’avoir un cadre éducatif plus strict tout en le mettant à distance des tensions familiales. Le SPJ estimait en outre qu’un suivi psychologique paraissait indiqué. Ces propositions ont cependant toutes été refusées par les parents. En octobre 1997, [...] a à nouveau fait appel à la police pour des mauvais traitements, avant de se rétracter (P. 97).
En mai 2002, B.Y._ a déclaré au SPJ ne plus vouloir rentrer chez ses parents qui l’auraient frappée violemment. Par mesures préprovisionnelles du 17 mai 2002, la Juge de paix du cercle de Lausanne a dès lors retiré provisoirement à A.Y._ et son épouse le droit de garde sur leur fille B.Y._ et l’a confié au SPJ. Ensuite de cette décision, la jeune fille a été placée quelques jours au Foyer de Cour avant de rentrer au domicile de ses parents le 22 mai 2002 (P. 79). La Juge de paix du cercle de Lausanne n’a dès lors pas donné d’autre suite à son intervention, son ordonnance n’étant pas reconduite.
3.
a)
À Lausanne, dans le courant de l’année 2005, A.Y._ a conservé par devers lui le passeport de sa fille B.Y._. Il en a fait de même avec le permis C de cette dernière au début de l’année 2006. Le permis C de B.Y._ a été récupéré par la police au domicile d’A.Y._ en été 2006. Lors d’une visite domiciliaire effectuée le 11 janvier 2011, la police a récupéré un acte de naissance au nom de B.Y._, document dont cette dernière avait vainement demandé la restitution à ses parents. A.Y._ a contesté avoir gardé le passeport de sa fille et affirmé qu’il ne sait pas où se trouve ce document.
B.Y._ a déposé plainte pour contrainte le 25 septembre 2009, expliquant notamment que la conservation par ses parents des documents précités la privait de la possibilité de divorcer de son époux macédonien.
b)
À Lausanne, entre le 15 septembre 2005 et le 25 septembre 2009, A.Y._ a plusieurs fois insulté sa fille B.Y._ lorsqu’il la croisait dans la rue.
B.Y._ a déposé plainte pour injures le 25 septembre 2009.
D.
Lors d’une audience tenue le 16 novembre 2012, la conciliation a abouti entre les parties en ce sens qu’A.Y._ reconnaît la souffrance de sa fille B.Y._ et la regrette (I), A.Y._ s’engage à contacter son frère en Macédoine pour que ce dernier trouve un avocat sur place, pour assurer la procédure de divorce de B.Y._ et l’aider dans toute la mesure du possible à obtenir un divorce en Macédoine (II). A la demande conjointe des parties, l’audience a été suspendue pour être reprise le 1
er
mai 2013. A cette occasion, A.Y._ a produit un acte de naissance de la plaignante, dont l’original a été remis à cette dernière, et dont il résulte que l’état civil de la plaignante est : divorcée. B.Y._ a dès lors déclaré retirer sa plainte pénale et ses conclusions civiles, en précisant maintenir ses déclarations. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in Kuhn/Jeanneret (éd.), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP). L'appel joint doit être interjeté dans un délai de vingt jours dès la réception de la déclaration d'appel (art. 400 al. 3 CPP).
Interjeté dans les forme et délai légaux par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel d’A.Y._, suffisamment motivé au sens de l’art. 399 al. 3 et 4 CPP, est recevable.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP).
3.
En premier lieu, l’appelant conteste s’être rendu coupable de l’infraction de contrainte. Il reproche au premier juge d’avoir apprécié les faits en violation du principe de la présomption d’innocence.
3.1
a)
La présomption d'innocence, dont le principe in dubio pro reo est le corollaire, est garantie expressément par les art. 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du
4 novembre 1950 ; RS 0.101), art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101) et 10 CPP. Elle concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter à l'accusé. Le juge ne peut retenir un fait défavorable à l'accusé que s'il est convaincu de la matérialité de ce fait, de sorte que le doute profite à l'accusé (ATF 127 I 38 c. 2a ; ATF 120 Ia 31 c. 2c). En revanche, la présomption d'innocence n'est pas violée si le juge retient des faits sur la matérialité desquels il n'éprouve aucun doute.
b)
Se rend coupable de contrainte au sens de l'art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte.
La menace est un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l'auteur, sans toutefois qu'il soit nécessaire que cette dépendance soit effective (ATF 117 IV 445 c. 2b; ATF 106 IV 125 c. 2a) ni que l'auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (ATF 105 IV 120 c. 2a).
Il peut également y avoir contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime "de quelque autre manière" dans sa liberté d'action; cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive; n'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas; il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action; il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 119 IV 301 c. 2a et les références).
3.2
En l’espèce, le premier juge a acquis la conviction que l’appelant avait bel et bien conservé le passeport et le permis C de sa fille, sur la base des déclarations constantes de cette dernière et compte tenu du fait que la police est intervenue en 2006 pour permettre à B.Y._ de récupérer son permis C (jgt., p. 17). La Cour de céans reprend à son compte cette argumentation circonstanciée, qui n’est ni erronée ni incomplète et qui ne relève pas d’une violation de la présomption d’innocence.
En revanche, le raisonnement du premier juge pour se convaincre du fait que l’appelant aurait gardé les documents d’identité de sa fille pour éviter que cette dernière ne procède à l’annulation de son mariage en Macédoine ne peut être suivi. Certes, la plaignante a affirmé qu’elle ne parvenait pas à faire établir un duplicata de passeport. Ses explications relatives à un mariage arrangé en Macédoine sont crédibles, contrairement à celles de ses parents dont il est par ailleurs établi qu’ils ont conservé son acte de naissance et qu’ils ont « jeté » les papiers reçus de Macédoine concernant une procédure de divorce, jugeant qu’ils étaient sans importance (P. 14, p. 5 ; PV aud 4, R. 5 ). Toutefois, dans sa plainte B.Y._ ne fait pas mention de son passeport, puisqu’elle explique que «
mes parents n’ont jamais voulu me donner les papiers de ce mariage
» (P. 4), élément pour lequel l’appelant n’a jamais été renvoyé. La plaignante indique ensuite que «
par le biais de ces documents, je pourrai ainsi annuler mon mariage
» (PV aud. 1). Il n’est dès lors pas possible, en l’état du dossier, d’établir un lien entre la conservation du passeport par l’appelant et sa volonté d’empêcher la plaignante de divorcer en Macédoine.
Au surplus, ce lien de causalité serait-il avéré qu’en l’absence de toutes informations sur la procédure de divorce macédonienne, il n’est pas possible de fonder une condamnation pour contrainte au sens de l’art. 181 CP. S’il est certes plausible que l’appelant a imposé à sa fille un mariage en Macédoine, ce qui rend vraisemblable son absence de consentement à une procédure de divorce, la non-remise du passeport à sa fille ne constitue toutefois pas une contrainte. Il n’y a, en effet, eu ni usage de la violence ni menace d’un dommage sérieux et aucun élément du dossier ne permet de retenir que la plaignante aurait été entravée dans sa liberté d’action au sens de cette disposition.
Compte tenu de ce qui précède, et au bénéfice du doute, il convient de libérer A.Y._ du chef d’accusation de contrainte.
4.
L’appelant conteste sa condamnation pour injure et le versement d’un montant de 1'000 fr. au bénéfice de B.Y._, au titre d’indemnité pour tort moral.
L’art. 177 al. 1 CP prévoit que l’injure ne se poursuit que sur plainte. La plaignante B.Y._ ayant retiré sa plainte et ses conclusions civiles durant l’audience d’appel, il convient, au bénéfice du retrait de plainte, de libérer A.Y._ de l’infraction d’injure.
5.
L’appelant conteste la mise d’une partie des frais de justice de première instance à sa charge.
5.1
Aux termes de l'art. 426 al. 2 CPP, lorsque la procédure fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.
Un retrait de plainte, comme en l'espèce s’agissant de l’infraction d’injure, s'apparente d'un point de vue procédural à un classement ; l'art.
426 al. 2 CPP est dès lors susceptible de s'appliquer dans ce cas également (TF 6B_87/2012 du 27 avril 2012, c. 1.1 et les références citées).
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la condamnation aux frais d'un prévenu acquitté ou mis au bénéfice d'une ordonnance de classement ne résulte pas d'une responsabilité pour une faute pénale, mais d'une responsabilité proche du droit civil, née d'un comportement fautif. Il est compatible avec les
art. 32 al. 1 Cst. et 6 ch. 2 CEDH de mettre les frais à la charge d'un prévenu libéré qui, d'une manière engageant sa responsabilité civile, a manifestement violé une règle de comportement pouvant découler de l'ordre juridique suisse dans son ensemble – dans le sens d'une application par analogie des principes découlant de l’art. 41 CO (TF 6B_99/2011 du 13 septembre 2011 consid. 5.1.2 ; Chapuis, in : Kuhn/Jeanneret (éd.), op. cit., n. 2 ad art. 426 CPP) – et a provoqué ainsi l'ouverture d'une enquête pénale ou compliqué celle-ci (TF 6B_87/2012 du 27 avril 2012 c. 1.2 ; ATF 116 Ia 162 c. 2d et 2e).
Seul un comportement fautif et contraire à une règle juridique, qui soit en relation de causalité avec les frais imputés, entre en ligne de compte
(TF 6B_387/2009 du 20 octobre 2009 c. 1.1 ; TF 6B_215/2009 du 23 juin 2009
c. 2.2 ; ATF 119 Ia 332 c. 1b ; ATF 116 Ia 162 c. 2c). La relation de causalité est réalisée lorsque, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le comportement de la personne concernée était de nature à provoquer l'ouverture de la procédure pénale et le dommage ou les frais que celle-ci a entraînés
(TF 6B_99/2011 du 13 septembre 2011 c. 5.1.2 et les références citées). En outre, le juge doit fonder sa décision sur des faits incontestés ou déjà clairement établis
(ATF 112 Ia 371 c. 2a ; TF 6B_87/2012 du 27 avril 2012).
5.2
En l’occurrence, A.Y._ a, par son comportement de dominateur, violé les droits de la personnalité de sa fille en la terrorisant. Comme la Cour de céans a pu le constater aux débats d’appel, cette dernière est à l’évidence encore en grande souffrance. Ce comportement, manifestement fautif sur le plan civil, se trouve à l’origine de l’ouverture de la plainte et de l’enquête pénale. Partant, il y a lieu d’appliquer l’art. 426 al. 2 CPP et de maintenir la part des frais de procédure de première instance par 6'892 fr. 05, à la charge d’A.Y._.
6.
Au vu de ce qui précède, l'appel doit être admis et A.Y._ doit être libéré des chefs d'accusation d'injure, au bénéfice d’un retrait de plainte, et de contrainte.
Une indemnité de conseil d'office pour la procédure d’appel d'un montant de 2'520 fr., TVA et débours inclus,
est allouée à Me Gilles Monnier.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être laissés à la charge de l’Etat (art. 428 al. 1 CPP). Outre l'émolument, qui se monte à 2'200 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), les frais comprennent l’indemnité allouée au défenseur d’office de l’appelant. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b80c14be-2f27-43b0-a98e-0e181685a57c | En fait :
A.
1.
Par jugement du 16 novembre 2010, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l'Est vaudois a libéré par défaut B._ des fins de la poursuite pénale (I), donné à F._ acte de ses réserves civiles à l’encontre de B._ (II), mis une part des frais, par 7'164 fr. 85, à la charge de ce dernier et laissé le solde à la charge de l’Etat (III).
Par arrêt du 7 mars 2011, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal a admis le recours de F._, annulé le jugement précité et renvoyé la cause au Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne pour nouvelle instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants.
En bref, la Cour de cassation a constaté qu’il y avait une lacune dans le jugement entrepris, dans la mesure où celui-ci ne précisait pas clairement si la plaignante était éveillée ou plongée dans le sommeil lorsque l’intimé a débuté le rapport sexuel. Elle a également critiqué l’appréciation des preuves opérée par le tribunal quant au taux d’alcoolémie de la plaignante.
2.
2.1
Par jugement du 21 novembre 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a libéré par défaut B._ des fins de la poursuite pénale (I), dit qu'il est débiteur de F._ de 500 fr. à titre d’indemnité pour tort moral et 3'500 fr. à titre de dommages et intérêts (II) et mis les frais de la cause, par 7'164 fr. 85, à la charge de B._, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (III).
En substance, il a retenu que le taux exact d’alcoolémie de F._ était difficile à établir, qu’il n’était pas possible de refaire une expertise à ce sujet, qu’on ne pouvait donner crédit à des témoignages émanant de personnes au moins partiellement alcoolisées et que la plaignante était relativement rompue à l’ingestion de boissons alcoolisées. Au regard de ces éléments, le tribunal a considéré qu’il n’était pas possible de construire un état de fait digne de ce nom, ce qui empêchait toute conviction suffisante étayant un verdict de culpabilité.
B.
Le 28 novembre 2011, F._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 22 décembre 2011, elle a conclu à sa réforme en ce sens que B._ est reconnu coupable d’actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, qu’il est son débiteur et lui doit prompte paiement d’un montant de 3'866 fr. 40, avec intérêts à 5% l'an dès le 15 septembre 2011, à titre de dommages et intérêts, d’un montant de 5'000 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 9 novembre 2008 à titre d’indemnité pour tort moral et d’une équitable indemnité pour les dépens.
Par courrier du 16 janvier 2012, le Ministère public a annoncé qu’il s'en remettait à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et qu'il renonçait à déclarer un appel joint.
Par appel joint du 23 janvier 2012, B._ a conclu à sa libération de toutes les conclusions civiles prises à son encontre par la plaignante.
Ni le Ministère public ni l'appelante n'ont présenté de demande de non-entrée en matière sur l'appel joint dans le délai qui leur avait été imparti.
Interpellé par courrier de la Présidente de la cour de céans du 8 mars 2012, Me Chanson l'a informée, par lettre du 9 mars 2012, qu'il entendait représenter B._, dont le domicile était inconnu, lors des débats d'appel.
A l'audience de ce jour, l'appelante a confirmé ses conclusions. Le Ministère public s'en est remis à justice. B._ a, quant à lui, conclu au rejet de l'appel principal et confirmé les conclusions de son appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Il ressort de ses déclarations à la police le 9 novembre 2008 que B._, célibataire, titulaire d'un permis étudiant type B, est né en 1989 en Ukraine. Fils unique, il a été élevé par ses parents jusqu'à leur divorce. Il a ensuite vécu avec son père à Odessa, où il a effectué sa scolarité obligatoire jusqu'en 2003, avant de partir au Canada durant une année pour apprendre l'anglais. Il a ensuite entrepris des études universitaires dans son pays, jusqu'à l'obtention d'un bachelor en économie. Il est arrivé en Suisse le 6 septembre 2008 afin de suivre une formation hôtelière à l'école [...] à [...] d'une durée totale de 5 ans. Financièrement, il est à la charge de son père, qui possède, selon ses dires, une entreprise immobilière en Ukraine.
Au moment des faits en cause, la plaignante F._, ressortissante bulgaro-ukrainienne, née en 1989, était étudiante dans l'école hôtelière [...] à [...], où elle résidait depuis deux mois et demi.
2.
Le samedi 8 novembre 2008, en début de soirée, F._ a bu trois whiskies en compagnie d'amies dans un établissement public de Leysin. Vers 23 h, elles ont gagné un autre établissement leysenoud, à savoir la discothèque "[...]", qui fait partie de l'école hôtelière [...] et dont l'entrée est réservée aux étudiants de l'école. F._ a alors encore consommé des boissons alcoolisées, à savoir de la bière et des "Sambuca". A la discothèque, elle a échangé quelques mots avec B._. Celui-ci avait été invité à la soirée par un ami, A._.
Le 9 novembre 2008, vers 1 h, se sentant peu bien à la suite de l'alcool ingurgité, F._ a regagné sa chambre. A un certain moment, B._ a demandé à son ami déjà mentionné de bien vouloir le conduire dans la chambre de F._, laquelle lui avait, selon lui, fait des avances au cours de la soirée. A 3 h, il s'est glissé dans le lit de la jeune fille et a remarqué qu'elle était un peu fatiguée. Malgré cela, après lui avoir enlevé son soutien-gorge et sa culotte, il a entretenu une relation sexuelle complète avec elle.
F._ s'est présentée aux urgences de l'Hôpital du Chablais, à Aigle, le 9 novembre 2008 à 8 h 30. Une prise de sang effectuée sur sa personne a révélé un taux d'alcoolémie de 1,12 g ‰. Deux autres analyses, effectuées par le Centre universitaire romand de médecine légale sur la base du même échantillon de sang de la victime, ont mis en évidence un taux moyen d'éthanol de 0,24 g ‰. L'analyse de sang prélevée sur le prévenu a révélé un taux d'alcool d'au moins 1,04 g ‰ au moment des faits. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP). L'appel joint doit, quant à lui, être interjeté dans un délai de vingt jours dès la réception de la déclaration d'appel (art. 400 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjetés dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel interjeté par F._ et l'appel joint déposé par B._ sont recevables. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Invoquant une constatation incomplète ou erronée des faits et une violation du droit, l’appelante reproche au tribunal de ne pas avoir retenu qu’elle était endormie et alcoolisée au moment de faits, de sorte que l’infraction visée par l’art. 191 CP est réalisée.
3.1
3.1.1
La constatation est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
3.1.2
L’art. 191 CP prévoit que celui qui, sachant qu'une personne est incapable de discernement ou de résistance, en aura profité pour commettre sur elle l'acte sexuel, un acte analogue ou un autre acte d'ordre sexuel, sera puni de la réclusion pour dix ans au plus ou de l'emprisonnement.
Cette disposition protège, indépendamment de leur âge et de leur sexe, les personnes incapables de discernement ou de résistance dont l'auteur, en connaissance de cause, entend profiter pour commettre avec elles un acte d'ordre sexuel (
ATF 120 IV 194
c. 2a p. 196). Son but est de protéger les personnes qui ne sont pas en état d'exprimer ou de manifester physiquement leur opposition à l'acte sexuel. A la différence de la contrainte sexuelle (art. 189 CP) et du viol (art. 190 CP), la victime est incapable de discernement ou de résistance, non en raison d'une contrainte exercée par l'auteur, mais pour d'autres causes.
Il n'est pas exigé que la victime soit inconsciente (TF 6P.90/2003 du 2 septembre 2003 c. 2.1.1). Selon la jurisprudence, une personne est incapable de résistance si elle se trouve dans un état qui, concrètement, l’empêche de s’opposer aux visées de l’auteur. L'incapacité de résistance peut être durable ou momentanée, chronique ou due aux circonstances. Elle peut être la conséquence d'un état mental gravement anormal, d'une sévère intoxication due à l'alcool ou à la drogue, ou encore d'entraves matérielles. Il faut cependant que la victime soit totalement incapable de se défendre. Une simple limitation de la capacité de résistance ne suffit pas. Si l'auteur doit vaincre la résistance de la victime, même amoindrie, l'acte tombe sous le coup des art. 189 ss CP (
ATF 119 IV 230
c. 3a p. 232).
Une femme peut être considérée comme incapable de résistance lorsque, s'étant couchée après une fête sous l'emprise de l'alcool, elle est sortie tout doucement et tendrement du sommeil par l'auteur, qu'elle prend par erreur pour son conjoint, et pénétrée par surprise, contre son gré (
ATF 119 IV 230
, précité, c. 3a pp. 232 s.). La victime profondément endormie reste incapable de résistance si elle se réveille après le commencement de l'agression sexuelle, mais qu'elle ne peut plus se défendre pour des causes physiques, en raison du poids de son agresseur qui s'est couché sur elle (TF 6S.217/2002 du 3 avril 2003; ég. TF 6P.90/2003, précité, c. 2.1.1, où le Tribunal fédéral a admis l'application de l'art. 191 CP en cas de demi-sommeil de la victime).
Sur le plan subjectif, l'art. 191 CP définit une infraction intentionnelle. Selon la doctrine dominante, la formule « en sachant » n'exclut pas le dol éventuel (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2010, n. 16 ad art. 191 CP; Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar, 2e éd., Zurich 1997, n. 7 ad art. 191 CP; Stratenwerth/Jenny, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil I: Straftaten gegen Individualinteressen, 6e éd., Berne 2003, § 8, n. 42).
3.2
Dans son jugement du 7 mars 2011, la Cour de cassation avait retenu que l’état de fait du jugement de première instance du 16 novembre 2010 ne précisait pas clairement si la recourant était éveillée ou plongée dans le sommeil lorsque l’intimé avait débuté un rapport sexuel avec elle, qu’il s’agissait d’une lacune et que ce point était de nature à influer sur le jugement. Or, dans son jugement du 21 novembre 2011, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne n’a pas examiné cette question, ce qui constitue une constatation incomplète des faits à laquelle l’autorité de céans peut toutefois remédier au regard de son pouvoir de cognition.
Lors de son audition par la police le 9 novembre 2008, soit quelques heures après les faits litigieux, F._ a déclaré ce qui suit : "La première chose dont je me souviens, c’est de sentir B._ face à moi dans le lit. Comme je regardais son visage, je ne sais pas s’il était nu ou habillé. J’étais à moitié endormie, j’ai pensé que je rêvais. Je suis restée sans voix un bon moment. B._ ne parlait pas. En regardant autour de moi, j’ai vu que R._ était présent dans la pièce, assis près d’un bureau. J’étais paralysée de peur, je ne lui ai rien dit. Lorsque j’ai essayé d’appeler [...] pour qu’elle m’aide, B._ a mis sa main sur mon cou pour m’empêcher de parler. Je me souviens que j’étais nue, j’ai donc compris qu’il m’avait enlevé mes sous-vêtements. Dans le même laps de temps, j’ai senti qu’il me pénétrait vaginalement. J’ai eu mal. Je pense que l’acte a duré entre 5 et 10 minutes, je n’en garde pas beaucoup de souvenirs (...). Je ne sais pas ce qui s’est passé ensuite, j’ai un trou de mémoire. Lorsque j’ai repris 'conscience', j’ai vu qu’il y avait pas mal de monde qui s’agitait dans ma chambre" (pièce 4). Lors de son audition par le Juge d'instruction le 17 mars 2009, la plaignante a déclaré ceci : "Je me souviens m’être réveillée alors que B._ était sur moi nu. En fait, il était en moi. Il m’avait pénétré vaginalement. Je n’avais pas la force pour me débarrasser de lui. Je voulais crier, mais j’ai tourné la tête et j’ai vu que ma copine dormait et que R._ était dans la chambre à côté de la table du bureau. R._ a assisté à tout, mais n’a rien dit car je pense qu’il a peur d’avoir des problèmes" (PV aud. 5, p. 2
in fine
).
La cour de céans est d'avis qu'il n’y a pas de motifs de douter des affirmations de la victime. De menues divergences entre ses premières déclarations à la police et celles qu'elle a faites au Juge d'instruction n'y changent rien, contrairement à ce qu'a fait valoir l'intimé à l'audience de ce jour. Il ne s'agit en effet que d'imprécisions normales pour des dépositions recueillies en l'espace de plus de 4 mois et alors que la plaignante était, comme on le verra ci-après, sous l'effet de l'alcool au moment des faits.
Par ailleurs, plusieurs éléments tendent à confirmer que lorsque l’intimé a débuté le rapport sexuel avec la plaignante, celle-ci était plongée dans le sommeil ou à tout le moins encore dans un demi-sommeil, contrairement à ce qu'a soutenu le prévenu, qui est allé jusqu'à affirmer que lors du rapport sexuel, la jeune femme était non seulement consciente mais également participative (PV aud. 1). En effet, le témoin A._ (alias R._) a déclaré ce qui suit lors de son audition du 9 novembre 2008 : "En rentrant, j’ai constaté qu’une lampe de chevet était allumée et éclairait bien cette pièce. B._ est toute de suite allé vers le lit de F._. Il a commencé à lui parler, notamment en lui demandant si elle se rappelait de lui, si elle allait bien, etc .... Ensuite, il a parlé plus doucement et je ne comprenais plus ce qu’il disait. F._ ne lui répondait pas vraiment, elle était à moitié endormie. Pendant ce temps, j’étais assis sur une chaise et jouais au tétris avec mon téléphone portable. En fait, j’étais un peu mal à l’aise, car je ne savais pas quoi faire, d’autant plus que B._ était venu avec son amie, à cette soirée (...). Au bout d’un moment, B._ a enlevé le soutien-gorge de F._. Elle s’est laissée faire, elle était toujours à moitié endormie mais elle n’a pas montré qu’elle avait envie de lui. Pour vous répondre, je ne me souviens pas si elle avait les yeux ouverts ou pas. Une chose est sûre, elle n’était pas participative. B._ s’est ensuite déshabillé et s’est retrouvé en slip. Je vous précise que dès le début, il était couché à côté de F._. Lorsque j’ai vu qu’il se retrouvait nu, j’ai quitté la chambre sans leur dire au revoir" (PV aud. 3, p. 2). Or, le fait qu'A._, qui n'a pas d'intérêt particulier à l'issue de la cause, ait des liens d'amitié avec l'une et l'autre des parties permet justement de tenir compte de son témoignage, d'autant plus qu'il était, selon le rapport de police, "le seul à n'avoir pratiquement pas d'alcool dans le sang au moment de l'intervention de la police" (pièce 15, p. 9).
De surcroît, le prévenu a lui-même admis, lors de son audition par la police le jour des faits, que lorsqu'il s'est couché sur le lit, à côté de la plaignante, "elle dormait (...)" (PV aud. 1, p. 3), avant de préciser, lorsqu'il a été entendu par le Juge d'instruction quelques heures plus tard, que la jeune fille était "un peu fatiguée" (PV aud. 4).
On doit admettre qu’en plus de son état d’endormissement ou de semi-endormissement, F._ était également sous l’effet de l’alcool au moment des faits. En effet, le rapport établi le 8 juin 2009 par le Service de gynécologie de l’Hôpital du Chablais mentionne que la plaignante s’est présentée aux urgences le 9 novembre 2008 à 8 h 30 et qu’elle présentait une alcoolémie de 1,12 g ‰ (pièce 20/1). La fiche « serologie » annexée au rapport (pièce 20/3) mentionne un prélèvement effectué le 9 novembre 2008 à 10 h 00. Certes, le Centre universitaire romand de médecine légale a indiqué, le 29 mai 2009, puis le 26 octobre 2009, avoir mesuré un taux moyen d'éthanol de 0,24 g ‰ (pièces 19 et 22) sur la base d'un échantillon de sang prélevé sur l'appelante le 9 novembre 2008, à savoir le même que celui examiné par le Service de gynécologie de l’Hôpital du Chablais (PV des opérations, p. 4). Reste que, même en prenant les expertises les plus favorables au prévenu, celles-ci attestent que la plaignante avait un taux d’alcoolémie avoisinant les 1 g ‰ (0.24 g + 7 x 0.1 g [taux de résorption horaire non contesté; arrêt de la CCASS du 7 mars 2011, p. 8]) au moment des faits, qui se sont déroulés vers 3 h du matin. A cela s'ajoute que le témoin A._ a déclaré avoir constaté que durant la soirée, "F._ avait bu beaucoup d'alcool" (PV aud. 3, p. 2); du reste, le prévenu lui-même a admis s'être rendu compte que la prénommée "était un peu saoule", "au vu de son comportement" (PV aud. 4, p. 2). En outre, à cette époque, la plaignante était âgée de 18/19 ans; par ailleurs, elle est de faible corpulence, comme l'a constaté la cour de céans lors des débats. Enfin, contrairement aux premiers juges, on ne saurait affirmer que la jeune femme était passablement rompue à l’absorption d’alcool au regard de ses affirmations selon lesquelles elle sort en moyenne deux week-ends par mois, sans être saoule à chaque fois. Partant, on doit admettre que le taux précité a également joué un rôle quant à la capacité de résistance de la plaignante.
En plus de son état d’endormissement et des effets de l’alcool, F._ a été paralysée par la peur et la surprise, conformément à ses déclarations (pièce 4, p. 2
in initio
). En effet, l’appelante est allée se coucher seule et alors qu’elle se trouvait mal en raison des boissons ingurgitées. Elle était en outre censée partager sa chambre avec son amie qui l’accompagnait lors de la soirée en question. Or, alors qu’elle était nue et ce en plein milieu de la nuit, elle a été à moitié réveillée par un inconnu qui était en train de l’entreprendre sexuellement. On peut d’ailleurs encore relever à ce sujet que les protagonistes de cette affaire n’ont absolument pas flirté ensemble lors de cette soirée et que leur contact s’est limité à une brève conversation devant la porte des toilettes de la discothèque (pièce 15, p. 9
in initio
), conversation qui a du reste donné lieu à une dispute entre F._ et la petite amie de B._ (PV aud. 1, p. 2
in fine
). Il y a de quoi, dans ces circonstances, être surprise et paralysée par la peur. Vu l'état dans lequel elle se trouvait, il n'est pas vraisemblable que la jeune femme, qui avait bu trois whiskies, de la bière et des "Sambuca", et qui, de manière générale, supporte mal l'alcool (pièce 4, p. 1; PV aud. 5; PV aud. 2, p. 4), ait accepté pour l'espace d'un moment d'entreprendre une relation sexuelle avec un partenaire qu'elle ne connaissait pas, d'autant plus qu'elle était accompagnée ce soir-là par son petit ami.
Enfin, le long suivi psychologique que l’état de santé de la victime a nécessité à la suite des faits incriminés (annexe à la pièce 59) et les sentiments d'insécurité qu’elle a développés après les événements en cause (PV aud. 6, p. 3, lignes 74 à 76) achèvent de convaincre la cour de céans que la version fournie par B._, qui était lui-même sous l'effet de l'alcool au moment des fais (pièce 14; PV aud. 4; pièce 15, p. 6), n'est pas crédible.
En conclusion, au vu des éléments précités, à savoir la conjonction de l’état d’endormissement, l’influence de l’alcool et la surprise de la situation, on doit admettre que la plaignante était bel et bien dans l’incapacité totale de résister au moment de l’acte sexuel commis par l'intimé. A l’évidence, elle ne se trouvait pas dans un état qui lui permettait de s’opposer aux visées du prévenu.
3.3
Les autres conditions de l’infraction de l’art. 191 CP sont également réalisées. En effet, B._ a admis avoir eu un rapport sexuel avec la plaignante. En entrant dans la chambre, puis dans le lit d’une fille qu’il ne connaissait pas et qui ne lui avait pas fait d’avances, le prévenu a à l’évidence profité de l’état éthylique et d’endormissement de la victime – état qui ne lui a du reste pas échappé (PV aud. 1, p. 3; PV aud. 4, p. 2) – pour obtenir de sa part des faveurs qu’elle n’avait pas l’intention de lui accorder. Il a accompli l’acte sexuel sur sa victime en exploitant – ou tout au moins en acceptant l’éventualité d’exploiter – l’incapacité de résistance de la jeune femme.
Au vu de ce qui précède, B._ doit être condamné pour acte d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance au sens de l’art. 191 CP.
4.
Il reste à examiner la peine à infliger au prévenu.
4.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
Les critères énumérés de manière non exhaustive par l'art. 47 CP correspondent à ceux fixés par l'art. 63 aCP et la jurisprudence élaborée en application de cette disposition, qui conserve toute sa valeur. Ainsi, la culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (TF 6B_327/2011 du 7 juillet 2011 c. 2.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1).
4.2
En l'espèce, la culpabilité de B._ est lourde. Il a agi pour satisfaire ses pulsions sexuelles au mépris de la liberté sexuelle de F._, qu'il a prise par surprise en plein milieu de la nuit. Fort de la description que son ami A._ lui avait faite de la prénommée, considérée comme "une fille facile", le prévenu a admis que sa seule idée était de coucher avec elle. Or, il pouvait imaginer qu'au vu de l'état d'endormissement et d'alcoolisation dans lequel se trouvait la victime, qui était nue sur son lit, celle-ci se soumettrait à l'acte sexuel, n'aurait que des souvenirs diffus ou encore renoncerait à porter plainte. S'il a admis avoir eu une relation sexuelle avec la plaignante, l'intimé, qui n'a pas daigné se présenter aux deux audiences fixées par les premiers juges ni aux débats d'appel, a en revanche persisté à affirmer que celle-ci était consentante. Lors de son audition par la police, il n'a pas hésité à déclarer que c'est la jeune femme qui l'avait abordé et lui avait jeté des regards dans le courant de la soirée, laissant ainsi entendre qu'elle lui avait fait des avances, ce qui n'est au demeurant pas établi, comme on l'a vu ci-dessus. A cela s'ajoute que si B._ a affirmé, dans un premier temps, avoir agi stupidement (PV aud. 1, p. 4), aucun regret sincère pour ce qu'il a fait n'est toutefois perceptible à la lecture de ses déclarations, l'intéressé n'ayant jamais présenté la moindre excuse à sa victime. Au contraire, il est allé jusqu'à objecter que si celle-ci "avait refusé ou [lui] avait fait comprendre qu'elle n'avait pas envie, [il] n'aurait pas insisté" (PV aud. 4, p. 2), qu'il avait "toujours respecté les femmes" et qu'il avait "reçu une bonne éducation" (PV aud. 1, p. 4); c'est dire si l'absence de prise de conscience de l'intimé, qui semble plus préoccupé par l'accusation portée contre lui et par sa réputation que par les conséquences de ses actes sur la plaignante, est évidente.
D'autre part, il convient de prendre en considération l'état d'alcoolisation de B._ au moment des faits, tout en précisant que sa responsabilité est pleine et entière. On tiendra également compte du fait que le prénommé était âgé de 19 ans à l'époque. Au bénéfice d'une formation universitaire, il n'a
pas d'antécédents, de sorte qu'on peut espérer que cette infraction restera isolée. En ce sens, une peine assortie du sursis est possible.
Au vu des circonstances et des éléments ci-dessus, une peine privative de liberté de 14 mois est adéquate pour réprimer le comportement du prévenu.
5.
L’appelante réclame des indemnités de 3'866 fr. 40 à titre de dommages et intérêts et de 5'000 fr. à titre de tort moral. Dans son appel joint, le prévenu demande à être libéré de toutes les conclusions prises à son encontre par F._.
5.1
Selon l’art. 122 al. 1 CPP, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l’infraction par adhésion à la procédure pénale. D’après l’art. 123 al. 1 CPP, dans la mesure du possible, la partie plaignante chiffre ses conclusions civiles dans sa déclaration et les motive par écrit ; elle cite les moyens de preuves qu’elle entend invoquer. Le tribunal statue également sur les conclusions civiles présentées lorsqu’il rend un verdict de culpabilité à l’encontre du prévenu (art. 126 al. 1 let. a CPP).
Aux termes de l’art. 41 al. 1 CO (Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse, RS 220), celui qui cause, d’une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
A teneur de l'art. 49 CO, celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement. Il est aujourd'hui admis que la réparation du tort moral n'a pas de fonction pénale et qu'elle n'est pas une peine privée; il est possible et courant dans la réalité qu'elle soit payée non par l'auteur de l'atteinte mais par un tiers, notamment une assurance (Roland Brehm, Commentaire bernois, vol. VI/1, 3
ème
éd. 2006, n. 18 ad art. 49 CO, n. 40 ad art. 47 CO; Pierre Tercier, La réparation du tort moral: crise ou évolution?, in: Mélanges Henri Deschenaux, Fribourg 1977, p. 314 ss). Le lésé ne peut donc pas exiger que l'indemnité soit payée par l'auteur en personne (art. 68 CO;
ATF 123 III 161
c. 4c p. 164).
5.2
En l’espèce, F._ réclame 3'866 fr. 40 à titre de dommages et intérêts. Au dossier, figure une facture du Dr [...] pour les consultations de l’appelante auprès de [...], psychologue, allant du 26 novembre 2008 au 1
er
juin 2009 pour un montant de 3'250 fr. 80 (annexe à la pièce 59). L'appelante a également allégué des frais de transports pour un montant de 615 fr. 60 pour se rendre à ses rendez-vous. Il apparaît ainsi, au vu des éléments clairement établis par pièce, que les conditions requises pour statuer sur les conclusions civiles de F._, soit la déclaration de culpabilité de l'auteur et la preuve du préjudice subi, sont réunies. Par conséquent, il convient de lui allouer un montant total de 3'866 fr. 40 à titre de dommages et intérêts.
Au regard de l’infraction subie par l'appelante et du traitement psychothérapeutique suivi, il ne fait aucun doute que les événements du 9 novembre 2008 ont provoqué chez elle une atteinte psychique entraînant réparation. On peut ainsi allouer à la plaignante le montant requis de 5'000 fr., celui-ci n’étant aucunement exagéré.
6.
En conclusion, l'appel de F._ est admis et le jugement attaqué modifié dans le sens des considérants qui précèdent. L'appel joint est rejeté.
6.1
Vu l'issue de la cause, l'entier des frais de première instance, y compris les indemnités allouées par les premiers juges à son défenseur d'office et au conseil d'office de la plaignante, par 302 fr. 40 chacun, doivent être mis à la charge de B._ (art. 426 al. 1, 1
ère
phrase, CPP).
6.2
Il en ira de même des frais d'appel (art. 428 al. 1 CPP). Ces frais comprennent l’indemnité allouée au défenseur d’office de B._, par 1'026 fr., TVA et débours compris, ainsi que l'indemnité allouée au conseil d'office de F._, par 1'501 fr. 20, TVA et débours compris, cette dernière indemnité correspondant à 12 heures (au tarif horaire de 110 fr. en usage pour les avocats-stagiaires).
6.3
Le prévenu ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant des indemnités en faveur de son défenseur d'office et du conseil d’office de la partie plaignante prévues ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a et 426 al. 4 CPP).
6.4
L'appelante requiert une indemnité à titre de dépens (art. 433 CPP). Cette requête est sans objet dans la mesure où une indemnité de conseil d'office pour la procédure d'appel à la charge de l'intimé est allouée à Me Laure Chappaz. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b8989f37-046f-474b-b2b6-af31c0aea197 | En fait :
A.
Par jugement du 16 février 2012, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que C._ s'est rendu coupable de tentative de viol et violation de domicile (I), condamné C._ à une peine pécuniaire de 300 (trois cents) jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 200 fr. (deux cents francs), dont 90 (nonante) jours-amende à titre ferme et 210 (deux cent dix) jours-amende avec sursis pendant trois ans (II), alloué ses conclusions à M._ en ce sens que C._ est reconnu débiteur de Malley-Prairie à Lausanne CCP [...] de la somme de 1'000 fr. (mille francs), valeur échue (III) et mis les frais de la cause par 10'342 fr. à la charge de C._, ces frais incluant l'indemnité au conseil LAVI de M._ par 5'994 fr. (IV).
B.
Par jugement du 21 août 2012, la Cour d'appel pénale a rejeté l'appel formé par C._ tendant principalement à son acquittement, à la mise des frais à la charge de l'Etat ou de la plaignante ainsi qu'à l'allocation d'une équitable indemnité au sens de l'art. 429 CPP et, subsidiairement, à l'annulation du jugement et au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouveau jugement dans le sens des considérants.
Par arrêt du 15 février 2013, la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a partiellement admis le recours formé par C._ à l'encontre du jugement rendu par la Cour d'appel pénale précité et a annulé celui-ci en tant qu'il arrête à 90 jours-amende la sanction prononcée sans sursis. Pour le surplus, elle a rejeté le recours dans la mesure où il était recevable.
C.
Les parties ont déposé leurs déterminations dans le délai imparti au 15 mars 2013, le défenseur de l'appelant indiquant ne pas s'opposer à une procédure écrite (art. 406 al. 1 let. a CPP) et demandant un délai pour déposer un mémoire motivé sur la question du sursis, cas échéant accompagné de pièces attestant du pronostic clairement favorable qui doit être posé en faveur de C._.
M._ a renoncé à se prononcer, s'en remettant à justice.
Dans le délai échéant au 8 avril 2013, C._ a déposé ses observations et conclu à l'octroi d'un sursis portant sur la totalité de la peine. Il a en outre produit différentes pièces.
D.
Les faits établis sont ceux retenus dans le jugement rendu le 21 août 2012 par la Cour d'appel pénale. | En droit :
1.
Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision. Il peut également renvoyer l'affaire à l'autorité qui a statué en première instance (art. 107 al. 2 LTF [loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral, RS 173.110]). L'autorité à laquelle l'affaire est renvoyée doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit contenus dans l'arrêt de renvoi. Elle ne peut en aucun cas s'écarter de l'argumentation juridique du Tribunal fédéral, aussi bien en ce qui concerne les points sur lesquels il a approuvé la motivation précédente que ceux sur lesquels il l'a désapprouvée. Il n'est pas possible de remettre en cause ce qui a été admis – même implicitement – par le Tribunal fédéral (B. Corboz, in: Commentaire de la LTF, Berne 2009, ch. 27 ad art. 107 LTF).
2.
2.1
Dans son arrêt du 15 février 2013 le Tribunal fédéral a relevé que la quotité de la sanction ferme (90 jours-amende) par rapport à la sanction globale (300 jours-amende), respectivement à la peine avec sursis (210 jours-amende), excédait très largement la limite permettant, selon la jurisprudence, de reconnaître encore dans la première l'accessoire de la deuxième.
2.2
Selon l'art. 42 al. 4 CP, le juge peut prononcer, en plus du sursis, une peine pécuniaire sans sursis ou une amende selon l’art. 106 CP.
2.3
La combinaison des peines doit, d'un point de vue quantitatif, revêtir une importance secondaire, le principe du sursis comme règle ne devant pas être vidé de sa substance par l'art. 42 al. 4 CP (ATF 134 IV 60 c. 7.3.2). Plus précisément, pour tenir compte du caractère accessoire des peines cumulées, il se justifie en principe d'en fixer la limite supérieure à un cinquième de la sanction globale, respectivement un quart de la peine conditionnée au sursis, soit 20% de la peine principale (ATF 135 IV 188 c. 3.4.4).
2.4
En l'espèce, pour respecter cette proportion, la peine pécuniaire ferme doit ainsi être arrêtée à 60 jours-amende, correspondant à un cinquième de la sanction globale de 300 jours-amende. En effet, la nécessité d'une sanction immédiate substantielle repose sur des impératifs de prévention spéciale, l'appelant ayant persisté à dénigrer la plaignante en se posant en victime. En outre, contrairement à ce que soutient l'appelant dans ses dernières déterminations, il n'est pas question de revenir sur la nécessité d'une sanction immédiate, le Tribunal fédéral ayant définitivement statué sur cette question en l'approuvant au chiffre 6.3 de son arrêt. Le montant du jour-amende n'est pas non plus remis en question.
Vu ce qui précède, l'appel de C._ est partiellement admis.
3.
Les frais de la procédure d'appel seront, quant à eux, mis par trois quarts à la charge de l'appelant, le solde étant laissé à la charge de l'Etat. Ils comprennent l'indemnité de conseil d'office de la plaignante pour la procédure d'appel allouée à Me De Courten par 2’214 fr. (433 al. 1 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b8ee2c7b-cf4d-451e-9feb-81953e0df806 | En fait :
A.
Par jugement du 2 octobre 2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a libéré J._ des chefs d’accusation de menaces qualifiées, violation de domicile, contrainte sexuelle, tentative de dérobade aux mesures visant à déterminer l’incapacité de conduire et violation des devoirs en cas d’accident (I), a libéré V._ des chefs d’accusation de tentative de meurtre et lésions corporelles simples qualifiées (II), a constaté que J._ s’est rendu coupable de lésions corporelles simples qualifiées, voies de fait qualifiées, dommages à la propriété, injures, contrainte, violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, empêchement d’accomplir un acte officiel, infraction à la Loi fédérale sur la protection des animaux, violation grave des règles de la circulation, conduite en état d’ébriété, conduite en état d’incapacité, circulation sans autorisation (III), a condamné J._ à une peine privative de liberté de 18 (dix-huit) mois, sous déduction de 5 (cinq) jours de détention avant jugement, et à une amende de CHF 200.- (deux cents) francs (IV), a suspendu l’exécution d’une partie de la peine privative de liberté portant sur 10 (dix) mois et fixé à J._ un délai d’épreuve de 3 (trois) ans (V), a dit que la peine privative de liberté en cas de non-paiement de l’amende sera de 2 (deux) jours
(VI), a dit que J._ est le débiteur et doit immédiat paiement à V._ de 3'500 fr. (trois mille cinq cents francs) à titre de réparation du tort moral (VII), a ordonné la confiscation et la destruction d’une paire de ciseaux de cuisine, marque [...], séquestrée sous fiche n° [...] (VIII), a dit que l’Etat versera à V._ un montant de 7'902 fr. 95 à titre d’indemnité pour ses frais de défense nécessaires (IX), a mis une partie des frais de justice, par 16'834 fr. 95, à la charge de J._ et laissé le solde à la charge de l’Etat (X), a dit que les frais de justice mis à la charge de J._ comprennent l’indemnité versée à son conseil d’office, l’avocate Kathrin Gruber, par 8'434 fr. 10, montant qui lui sera versé sous déduction de l’acompte de 900 fr. d’ores et déjà perçu (XI) et a dit que le remboursement à l’Etat du montant correspondant à l’indemnité servie au conseil d’office de J._ ne sera exigible que pour autant que la situation financière de J._ le permette (XII).
B.
Par annonce du 7 octobre 2014, puis déclaration motivée du 1
er
décembre suivant, J._ a formé appel contre ce jugement en concluant à sa réforme en ce sens qu’il est également libéré des accusations d’infraction à la loi fédérale sur la protection des animaux, violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, empêchement d’accomplir un acte officiel, lésions corporelles simples qualifiées, voies de fait qualifiées, dommages à la propriété, injures et contrainte, qu’il est condamné à une peine pécuniaire subsidiairement à un travail d’intérêt général, que l’exécution de la peine est suspendue avec un délai d’épreuve de trois ans, qu’V._ est déclarée coupable de lésions corporelles simples, que ses conclusion civiles sont rejetées et que les frais de justice de première instance sont mis à la charge de l’Etat, subsidiairement que la part incombant à l’appelant est revue.
Dans ses déterminations du 22 décembre 2014, le Ministère public de l’arrondissement de La Côte a notamment conclu au rejet de l’appel formé par J._ et à la confirmation du jugement.
A l’audience d’appel, V._, a également conclu au rejet de l’appel du prévenu et à la confirmation du jugement.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né le 21 avril 1978 au Cameroun, J._ a été élevé par ses parents. Il a suivi sa scolarité obligatoire tout d’abord dans son pays d’origine, puis en France à partir de l’âge de 17 ans. Il y a poursuivi ses études en entamant un cursus universitaire. Il a cependant dû interrompre ses études en raison de la maladie de son père qui l’a contraint à devoir subvenir à l’entretien de sa famille demeurée au pays. Il a alors commencé à travailler comme manutentionnaire, puis comme informaticien. Il a exercé cette activité pendant trois ou quatre ans. Vers 2002, il a été victime d’un accident de moto qui a entraîné six mois de rééducation. Pendant cette période, il est parfois venu voir des amis à Genève. C’est ainsi qu’il a rencontré V._, avec qui il s’est marié en 2006. De cette union, est né un enfant le 29 mai 2011.
J._ travaille chez [...] à plein temps ensuite d’un placement par la caisse de chômage. Il perçoit 1'700 fr. d’allocations mensuelles de chômage. V._ et lui vivent désormais séparément et sont en instance de divorce. La convention de divorce prévoit une garde alternée et une prise en charge en nature de l’entretien de l’enfant.
Le casier judiciaire suisse du prévenu comporte les inscriptions suivantes :
- 21 janvier 2011 : Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, violation des règles de la circulation routière, conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait (véhicule automobile), peine pécuniaire de 15 jours-amende à 30 fr., sursis à l’exécution de la peine et délai d’épreuve de 3 ans, amende de 300 fr.;
- 21 mars 2011 : Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, violation des règles de la circulation routière, violation des obligations en cas d’accident, conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait (véhicule automobile), concours, peine pécuniaire de 10 jours-amende à 30 fr., peine complémentaire au jugement du 21 janvier 2011 rendu par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne ;
- 24 novembre 2011 : Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, violation de règles de la circulation routière, conducteurs se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule automobile, taux alcoolémie qualifié), conducteurs se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule automobile, autres raisons), opposition ou dérobade aux mesures visant à déterminer l’incapacité de conduire (véhicule automobile), circuler sans permis de conduire, contravention selon l’art. 19a de la loi sur les stupéfiants, concours, peine pécuniaire 60 jours-amende à 20 fr., amende de 200 francs.
2.
Bien qu’officiellement au bénéfice d’une décision de mesures protectrices de l’union conjugale depuis février 2009 leur permettant de vivre séparément, J._ se rendait fréquemment chez son épouse V._ et y dormait environ 4 à 5 soirs par semaine avec l’accord de cette dernière.
2.1
A Lausanne, le 14 janvier 2011, J._ s’est rendu dans le courant de l’après-midi chez son épouse V._. Suite à une brève dispute, cette dernière a quitté son logement afin de se rendre chez sa soeur avec qui elle devait passer la soirée, décision qui avait été prise bien avant l’arrivée du prévenu. Vers 21h00, alors qu’elle avait répondu à un appel du prévenu qui lui demandait où elle se trouvait, V._ n’a pas donné suite à un second appel de ce dernier vers 23h00. V._ est retournée dans son appartement le 15 janvier 2011 vers 14h00. Elle y a découvert son mari dormant sur le divan. Vers 15h00, le prévenu s’est réveillé. Immédiatement, il a reproché à son épouse d’être entrée dans son logement pour ensuite l’agripper, tout en l’injuriant, la traitant notamment de « pute », l’a saisissant violemment par les cheveux, tout en la faisant chuter au sol et la traînant, avant de lui donner des coups de poing et de pied sur l’ensemble du corps, dont un sur le ventre, alors qu’il savait qu’elle était enceinte. De rage, le prévenu a alors pris un verre et l’a jeté à terre. A ce moment-là, V._ a décidé de quitter son appartement. Elle a alors mis son manteau et ses souliers. Alors qu’elle s’apprêtait à quitter les lieux, le prévenu l’en a empêchée en lui barrant la route et lui intimant l’ordre de rester. Il lui a enlevé son manteau et ses souliers. Peu après, le prévenu a ordonné à son épouse de ramasser les débris de verre, ce qu’elle a fait avec une balayette avant que le prévenu ne lui passe l’aspirateur. Alors qu’V._ passait l’aspirateur, J._ s’est saisi de cet ustensile. Voyant le lapin hors de la cage, le prévenu lui assena au moyen de l’embout de l’aspirateur plusieurs coups au point de le tuer, avant de s’en prendre violemment à la caisse de l’animal et de la briser.
A la suite de ces faits, V._ a présenté des marques de coups et griffures sur le bras droit et l’épaule, ainsi des douleurs abdominales. Elle a déposé plainte pénale le 15 janvier 2011 et l’a retirée le 3 février suivant.
2.2
A Lausanne, le 3 février 2011, sur demandes pressantes et répétées, voire d’un harcèlement quotidien de J._, lequel l’a persuadée que si elle ne retirait pas sa plainte, elle priverait de père son enfant à naître, V._ a retiré sa plainte pénale déposée le 15 janvier 2011, le prévenu lui ayant dicté les termes de ce courrier.
2.3
Le 26 août 2011, alors qu’elle rentrait à son domicile, V._ a été interpellée par son mari qui se trouvait sur le trottoir d’en face. Ce dernier lui a demandé des explications concernant les démarches judiciaires qu’elle avait initiées. Alors qu’elle voulait partir, le prévenu l’a saisie fortement par le bras afin qu’elle reste avec lui. Voyant qu’elle entendait se dégager, J._ l’a laissée partir.
Par l’intermédiaire de son conseil, V._ a déposé plainte.
2.4
A Lausanne, peu avant Noël 2011, alors qu’V._ venait de retirer son courrier de la boîte aux lettres, le prévenu a surgi de chez la concierge, l’a apostrophée avant de lui donner une gifle, ce qui a provoqué un saignement de nez.
2.5
Le 10 mars 2012, vers 21h30 à Lausanne, J._ a pénétré d’autorité dans l’appartement d’V._ alors que cette dernière regardait la télévision. Immédiatement, le prévenu a reproché à son épouse de laisser leur fils voir ses grands-parents maternels. Il s’est alors assis sur le canapé et quand bien même il avait été avisé par V._, que ses lunettes s’y trouvaient, s’est assis volontairement sur celles-ci, les endommageant. V._ a demandé au prévenu de quitter son appartement. Ce dernier lui a alors crié dessus. Décidée à lui tenir tête, V._ en a fait de même. Le prévenu s’est alors approché de son épouse, lui a saisi les jambes avant de les relever brusquement, ce qui fit perdre l’équilibre à cette dernière qui se retrouva en arrière. Le prévenu s’est ensuite rendu à la cuisine où il s’est appuyé contre un meuble de la cuisine, lui lançant un regard menaçant, soit celui qu’il avait l’habitude d’avoir avant de la frapper. Voulant anticiper toute attaque et pour se défendre, V._ s’est saisie d’une cisaille à volaille fermée et en a frappé son mari au niveau de la gorge. Le manche de cet outil a cédé, blessant l’intéressée à la main.
A la suite de ces faits, J._ a présenté deux plaies qui ont saigné mais qui n’ont pas nécessité de soins particuliers, que celui-ci a d’ailleurs refusés. Chacun des époux a déposé plainte pénale le 6 juin 2012.
2.6
A Lausanne, le 31 mars 2013, vers 05h20, alors qu’il s’était trompé de bus et que les agents de sécurité mandatés par les TL pour maintenir l’ordre dans leurs bus lui avaient demandé de ne pas importuner une passagère, puis de descendre du véhicule arrivé à destination, le prévenu - qui avait été extrait du bus par lesdits agents - est remonté dans le véhicule. Les agents s’y opposant, le prévenu s’est immédiatement énervé et a tenté d’agresser physiquement l’un d’eux, lequel a pu le repousser tout en essayant de le calmer. Comme le prévenu devenait de plus en plus agressif et incontrôlable, et qu’il voulait s’en prendre physiquement aux agents de sécurité, ces derniers ont décidé de le menotter en attendant l’arrivée des forces de l’ordre. Le prévenu s’est alors débattu à tel point qu’il n’a pu être menotté complètement.
Les TL ont dénoncé le cas le 28 mai 2013.
2.7
Sur l’autoroute entre Yverdon et Neuchâtel, chaussée Jura, au kilomètre 5.00, dans le district du Jura vaudois, le 19 mai 2013 vers 12h10, J._, qui circulait au volant du véhicule de marque CITROEN C3, immatriculé [...], sans être au bénéfice d’un permis de conduire, en étant sous l’influence de l’alcool et en n’ayant pas dormi depuis plus de vingt-quatre heures, s’est assoupi un bref instant peu avant la jonction d’Yverdon-Ouest. II a dès lors perdu la maîtrise de son véhicule, a dévié sur la gauche et a heurté avec le même côté de sa machine, le parapet central de l’autoroute. Le prévenu s’est arrêté sur la bande d’arrêt d’urgence en usant les précautions requises dès que cela a été possible. L’analyse de sang prélevé à 13h50 a révélé un taux d’alcoolémie de 0,71 g ‰, taux le plus favorable au moment critique.
2.8
Au chemin d’[...] à Lausanne, le 22 juin 2014, J._ a asséné deux gifles à son épouse V._ et lui a tiré les cheveux.
Cette dernière a déposé plainte le 29 juin 2014 et l’a retirée par courrier du 11 septembre 2014. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de J._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
L’appelant conteste s’être rendu coupable de contrainte pour avoir forcé V._ à retirer sa plainte du 15 janvier 2011 (cas. 2.2 retenu ci-dessus) par lettre du 3 février 2011 adressée au procureur (P. 13). Sur le plan factuel, l’appelant nie toute contrainte en se référant à la teneur de la lettre en question, en soulignant que c’est son épouse qui le harcelait pour qu’il reprenne la vie commune selon les nombreux appels et messages qui ressortent des relevés de ses communications téléphoniques. Sur le plan juridique, l’appelant nie que ses propos ou son attitude puissent être qualifiés de menace d’un dommage sérieux ou d’entrave d’une autre manière dans la liberté d’action de la victime.
3.1
3.1.1
A teneur de l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d’innocence, également garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU Il (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a ; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1). Comme règle d’appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes ; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 la 31 c. 2c ; TF 6B_831/2009 précité, c. 2.2.2).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
3.1.2
Aux termes de l’art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d’un dommage sérieux, ou en l’entravant de quelque autre manière dans sa liberté d’action, l’aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
Ainsi, l’art. 181 CP
prévoit alternativement trois moyens de contrainte : l’usage de la violence, la menace d’un dommage sérieux ou tout acte entravant la personne dans sa liberté d’action. La menace est un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l’auteur, sans toutefois qu’il soit nécessaire que cette dépendance soit effective (ATF 117 IV 445 c.2b; ATF
106 IV 125 c. 2a) ni que l’auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (ATF 105 IV 120 c. 2a).
Il peut également y avoir contrainte lorsque l’auteur entrave sa victime « de quelque autre manière » dans sa liberté d’action; cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive; n’importe quelle pression de peu d’importance ne suffit pas; il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d’un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l’entraver d’une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d’action; il s’agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF
119 IV 301 c. 2a et les références citées).
Selon la jurisprudence, la contrainte n’est contraire au droit que si elle est illicite. Une contrainte est illicite lorsque le moyen ou le but est contraire au droit ou lorsque le moyen est disproportionné pour atteindre le but visé ou encore lorsqu’un moyen de contrainte conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue, au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux moeurs; cette dernière hypothèse est en particulier réalisée lorsqu’il n’y a pas de rapport entre l’objet de la menace et l’exigence formulée (ATF 106 IV 125 c. 3a, ATF 105 IV 120 c. 2b, ATF 101 lV47 c. 2b et les arrêts cités). Réclamer le paiement d’une créance ou menacer de déposer une plainte pénale (lorsque l’on est victime d’une infraction) constituent en principe des actes licites; celui qui, étant victime d’une infraction, menace de déposer une plainte pénale afin d’obtenir la réparation du préjudice subi ne commet pas une contrainte au sens de l’art. 181 CP; l’illicéité n’apparaît que si le moyen utilisé n’est pas dans un rapport raisonnable avec le but visé et constitue un moyen de pression abusif; tel est le cas en particulier si l’objet de la plainte pénale est sans rapport avec la prestation demandée ou si la menace doit permettre d’obtenir un avantage indu (ATF 115 IV 207 c. 2b/cc, ATF 101 IV 47 c. 2b, ATF 96 IV 58 c.1; ATF 87 IV 13 c. 1).
3.2
En l’espèce, les premiers juges ont retenu une contrainte sur la base des déclarations de l’épouse et de témoignages.
Par lettre de son conseil du 26 août 2011 (P. 27), V._ a exposé au procureur qu’elle avait été contrainte par son mari de retirer sa plainte et que celui-ci lui avait dicté la lettre en question. La contrainte ayant consisté à la harceler, à l’empêcher de dormir, à faire valoir que leur enfant serait privé d’une famille unie et que le père lui prendrait cet enfant en cas de séparation. Le 17 novembre 2011, elle a confirmé avoir fait l’objet de cette contrainte (PV aud. 3, p. 2) en parlant de quinze appels par jour, de jour et de nuit, et de la menace du mari de la priver de son enfant. Le prévenu a nié avoir dicté la lettre, mais a admis avoir aidé son épouse à en trouver les mots (PV aud. 4, p. 3). La plaignante a confié à sa soeur avoir été contrainte (PV aud. 5, p. 4). Aux débats de première instance, elle a expliqué que son mari l’avait empêchée de dormir et qu’au matin elle était tellement fatiguée qu’il lui avait dicté le retrait de plainte, précisant qu’elle était épuisée et qu’il lui faisait peur (jgt p. 5).
Quoi qu’en dise l’appelant c’est bien lui qui a dicté la lettre de retrait de plainte. Non seulement l’épouse l’a confirmé à plusieurs reprises, notamment les mots «
je n’aime pas la violence, mais lui je l’aime
» (PV aud. 3, p. 3), mais le contenu de cet écrit ne permet pas de l’attribuer objectivement à la seule plaignante comme l’appelant le soutient. Quant aux rapports entre les parties, le comportement du mari relève d’une classique tyrannie domestique avec alternance de violence et de repentir, plaçant l’épouse dans une relation de dépendance et d’ambivalence. Au lieu de ne plus subir et d’adopter une fois pour toute une attitude claire de rejet, elle s’est souvent laissée convaincre, le cas échéant par peur, de tolérer ou d’endurer, sans y réagir efficacement, le comportement de son conjoint. Ainsi, elle a retiré sa plainte consécutive aux graves violences conjugales subies en 2008 (P. 27 et ses annexes). Elle est demeurée en communication avec lui en lui téléphonant, notamment en juillet et août 2011 (P. 71), ne lui a pas interdit la porte de son domicile, n’a pas voulu bénéficier de mesures de sécurité, etc.. Toutefois, cette vulnérabilité n’exclut nullement une contrainte lors du retrait de plainte litigieux, mais au contraire la rend plus vraisemblable, l’appelant ayant déjà expérimenté par le passé qu’il pouvait échapper aux conséquences de ses actes en faisant pression sur sa victime. L’absence chez la plaignante de ligne constante résolument hostile à l’appelant ne ruine donc pas la version de celle-là qui est parfaitement crédible.
Quant aux moyens de contrainte, la jurisprudence du TF (ATF 126 IV 124 c. 3b et 3c) a qualifié de pression d’ordre psychique réalisant une contrainte psychique le fait d’imposer à son conjoint des scènes de colère noire assorties de bris d’objet en alternance avec d’interminables périodes de silence obstiné. Dans le cas d’espèce, la contrainte a consisté à harceler l’épouse par téléphone, puis à l’épuiser en l’empêchant de dormir tout en la menaçant de péjorer gravement sa relation avec son enfant, dans un climat de peur et de domination. Il s’agit là d’efficaces moyens de pression conjugués.
La réalisation de l’infraction de contrainte doit ainsi être confirmée.
4.
L’appelant conteste que les faits retenus dans le cas 2.1 ci-dessus soient constitutifs de lésions corporelles. Selon lui, il s’agirait de voies de fait prescrites.
4.1
Le 14 janvier 2011, l’appelant a violemment saisi son épouse, enceinte, par les cheveux, l’a faite chuter au sol et l’a traînée au sol, puis lui a donné des coups de poing et de pied sur l’ensemble du corps, notamment dans le ventre. Se fondant sur les constatations des policiers qui avaient remarqué que la victime présentaient diverses rougeurs sur le corps, se plaignait de douleurs au ventre et perdait passablement de cheveux là où elle avait été empoignée au crâne (P. 4, p. 3), les premiers juges ont qualifié ces faits de lésions corporelles simples qualifiées. L’appelant soutient qu’en l’absence de constat médical ces coups et mauvais traitements ne seraient pas constitutifs de lésions du corps humain, mais uniquement de voies de fait prescrites.
En réalité, la victime s’est rendue au CHUV le 15 janvier 2011 pour une consultation gynécologique en raison de contractions (PV aud. 5, p. 2) consécutives aux coups reçus et, selon le rapport médical établi à cette occasion, elle présentait des douleurs abominables, mais également des marques de coups et de griffures sur les bras (P. 28). Il s’agit-là à l’évidence de lésions corporelles au vu des douleurs endurées (cf. ATF 124 IV 189 c. 1.3), des marques médicalement constatées et des circonstances : femme enceinte mise à terre, traînée par les cheveux et battue à coups de pied et de poing.
Dans un moyen peu clair, l’appelant soutient que la poursuite pénale pour lésions corporelles simples qualifiées serait éteinte dès lors qu’une suspension de la procédure au sens de l’art. 55a CP serait intervenue et que la révocation du retrait de plainte par acte du 27 août 2011 serait inopérante, car intervenue après l’écoulement du délai de révocation de la suspension. En réalité, la procédure n’a jamais été suspendue par décision du Ministère public comme celui-ci l’avait expressément précisé en son temps (P. 15) et le retrait de plainte obtenu par contrainte est inopérant en tant que déclaration de volonté et, de plus, sans portée en ce qui concerne les infractions se poursuivant d’office.
Le moyen étant mal fondé, il doit être rejeté et la réalisation de lésions corporelles simples qualifiées doit être confirmée.
5.
L’appelant conteste avoir commis une infraction à la Loi fédérale sur la protection des animaux (LPA, RS 455 ; cas 2.1 retenu ci-dessus). Il soutient que, selon son sens littéral, la réalisation de l’infraction de l’art. 26 al. 1 let. b LPA impliquerait la mise à mort de plusieurs animaux et non d’un seul.
5.1
5.1.1
Aux termes de l’art. 1 LPA, cette loi vise à protéger la dignité et le bien-être de l'animal.
Selon l’art. 26 al. 1 LPA, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque, intentionnellement maltraite un animal, le néglige ou le surmène inutilement ou porte atteinte à sa dignité d'une autre manière (let. a), met à mort des animaux de façon cruelle ou par malice (let. b), organise des combats entre animaux ou impliquant des animaux au cours desquels ceux-ci sont maltraités ou mis à mort (let. c), cause à un animal, lors d'expériences, des douleurs, des maux ou des dommages ou le met dans un état d'anxiété alors que le but visé aurait pu être atteint d'une autre manière (let. d), abandonne ou relâche un animal domestique ou un animal détenu dans une exploitation, dans l'intention de s'en défaire (let. e).
5.1.2
L’art. 80 Cst (Constitution fédérale de la Confédération suisse ; RS 101) dispose que la Confédération légifère sur la protection des animaux.
5.2
En l’espèce, les premiers juges ont évoqué à l’égard de l’art. 26 al. 1 let. b LPA une maladresse rédactionnelle du législateur dès lors qu’il serait incompréhensible de punir uniquement la mise à mort cruelle ou par malice de deux animaux et non d’un seul (jgt., p. 25).
L’art. 80 précité donne à la Confédération la compétence de légiférer sur la protection des animaux. Ainsi que la désignation du but du législateur l’indique à l’art. 1 LPA, cette loi vise à protéger la dignité et le bien-être de l’animal. Le terme animal est un terme générique qui couvre aussi bien l’animal comme individualité que comme pluralité d’animaux. Ainsi à l’art. 26 al. 1 LPA les comportements punissables sont décrits en recourant indifféremment au singulier ou au pluriel du mot animal. Au demeurant, il serait totalement incohérent de punir la maltraitance d’un animal (let. a), mais non sa mise à mort cruelle qui constitue un pic de maltraitance (let. b). Doctrine et jurisprudence considèrent également que la mort cruelle d’un seul animal réalise l’infraction et n’envisagent jamais que la réalisation de l’infraction nécessiterait la mise à mort de deux animaux au moins (Antoine F. Goetschel, Droit de la protection des animaux, FJS n° 304 du 1
er
avril 1993 p. 20 et note 83 relative au jugement de la mise à mort, sans motif raisonnable, d’un lapin appartenant à l’amie de l’accusé avec laquelle il venait de se disputer ; Gieri Bolliger/Michelle Richner/Andreas Rüttimann, Schweizer Tierschutzstrafrecht in Theorie und Praxis, Zurich 2011, p. 139 et suivantes). L’interprétation qui conduit à retenir que la mise à mort cruelle d’un animal unique est punissable s’avère conforme au sens véritable et au but de la loi dès lors que la punissabilité de tels comportements s’impose de manière pressante. Il en résulte que cette interprétation ne heurte pas le principe pas de sanction sans loi (Favre, Pellet, Stoudmann, Code pénal annoté, Lausanne 2007, n° 1.11. ad art. 1 CP).
L’infraction est donc réalisée et le moyen doit être rejeté.
6.
L’appelant conteste que l’empoignade au bras retenu au cas 2.3 ci-dessus puisse être qualifié de voies de fait s’agissant d’un geste banal dépourvu de violence accompli dans une discussion conjugale. Si cette infraction devait être retenue, l’appelant invoque la prescription de cette contravention en contestant l’application par les premiers juges de l’art. 98 let. b CP
6.1
6.1.1
Selon l'art. 126 CP, celui qui se sera livré sur une personne à des voies de fait qui n'auront causé ni lésion corporelle ni atteinte à la santé sera, sur plainte, puni d'une amende (al. 1). La poursuite aura lieu d'office notamment si l'auteur a agi à réitérées reprises contre son conjoint durant le mariage ou durant l'année qui a suivi le divorce (al. 2 let. b).
Les voies de fait, réprimées par l’art. 126 CP, se définissent comme des atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles, ni dommages à la santé. Une telle atteinte peut exister même si elle n'a causé aucune douleur physique (ATF 134 IV 189 c. 1.2 ; ATF 119 IV 25 c. 2a).
6.1.2
Aux termes de l’art. 98 let. b CP, la prescription court dès le jour du dernier acte si cette activité s’est exercé à plusieurs reprises.
Il y a unité juridique d’action (tatbestandliche Handlungseinheit), lorsque le comportement défini par la norme juridique présuppose, par définition, la commission d’actes séparés, à l’exemple du brigandage (art. 140) ou que la norme pénale définit un comportement durable se composant de plusieurs actes, à l’exemple de la gestion fautive (Favre, Pellet, Stoudmann, op. cit., Lausanne 2011, n. 1.9 ad art. 98 CP). La commission d’actes séparés ou le comportement durable doivent, expressément ou implicitement, ressortir de la définition légale de l’infraction, celle-ci devant être exercée en des moments différents (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 6 ad art. 98 CP).
6.2
En l’espèce, la violence de la forte prise en serre sur le haut du bras, est illustrée par la photo produite qui montre un hématome (P. 30 et 31 ; PV aud. 3 p. 3). A l’évidence il s’agit d’une atteinte physique qui excède l’usage courant donc d’une voie de fait qualifiée.
Quant à la prescription invoquée par l’appelant, il y a eu d’autres épisodes de violence conjugale du même type, soit des violences tant verbales que physiques régulières (jgt., p. 27), qui présentent entre eux une unité juridique d’action puisque la notion juridique de voies de fait qualifiées définie à l’art. 126 al. 2 CP présuppose que l’auteur ait agi à réitérées reprises.
Les griefs sont donc infondés et l’application de l’art. 126 al. 1 et 2 let. b CP doit être confirmée.
7.
L’appelant, qui admet avoir giflé la plaignante ensuite d’une dispute (cas 2.4 retenu ci-dessus), semble soutenir qu’il s’agirait de voies de fait.
7.1
En l’espèce, la soeur et la mère de la victime ont évoqué un nez cassé (PV aud. 5 p. 4 ; PV aud. 6, p. 3 in fine) et que cet épisode de violence était lié à une démarche judiciaire de leur parente. Manifestement l’infraction de lésions corporelles simples qualifiées est réalisée et le grief est ainsi mal fondé.
8.
L’appelant soutient que son épouse s’est rendue coupable de lésions corporelles simples qualifiées en lui portant deux coups sur le côté gauche du cou et sous la clavicule droite au moyen d’une cisaille à volaille fermée (cas 2.5 retenu ci-dessus ; P. 58 photos 5 et 6). Il s’insurge de ce que les premiers juges aient mis cette dernière au bénéfice de la légitime défense faute de menace d’attaque imminente.
8.1
Aux termes de l’art. 15 CP, quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d’une attaque imminente a le droit de repousser l’attaque par des moyens proportionnés aux circonstances.
La légitime défense suppose une attaque, c’est-à-dire un comportement visant à porter atteinte à un bien juridiquement protégé, ou la menace d’une attaque, soit le risque que l’atteinte se réalise. Il doit s’agir d’une attaque actuelle ou à tout le moins imminente, ce qui implique que l’atteinte soit effective ou qu’elle menace de se produire incessamment ( ATF 106 IV 12 c. 2a p. 14 ; ATF 104 IV 232 c. c p. 236 s.). Une attaque n’est cependant pas achevée aussi longtemps que le risque d’une nouvelle atteinte ou d’une aggravation de celle-ci par l’assaillant reste imminent (ATF 102 1V 1 c. 2b p. 4 s.). S’agissant en particulier de la menace d’une attaque imminente contre la vie ou l’intégrité corporelle, celui qui est visé n’a évidemment pas à attendre jusqu’à ce qu’il soit trop tard pour se défendre. Il faut toutefois que des signes concrets annonçant un danger incitent à la défense. La seule perspective qu’une querelle pourrait aboutir à des voies de fait ne suffit pas. Par ailleurs, l’acte de celui qui est attaqué ou menacé de l’être doit tendre à la défense. Un comportement visant à se venger ou à punir ne relève pas de la légitime défense. Il en va de même du comportement qui tend à prévenir une attaque certes possible mais encore incertaine, c’est-à-dire à neutraliser l’adversaire selon le principe que la meilleure défense est l’attaque (ATF 93 IV 81 p. 83).
La défense doit apparaître proportionnée au regard de l’ensemble des circonstances. A cet égard, on doit notamment examiner la gravité de l’attaque, les biens juridiques menacés par celle-ci et par les moyens de défense, la nature de ces derniers ainsi que l’usage concret qui en a été fait. La proportionnalité des moyens de défense se détermine d’après la situation de celui qui voulait repousser l’attaque au moment où il a agi. Les autorités judiciaires ne doivent pas se livrer à des raisonnements a posteriori trop subtils pour déterminer si l’auteur des mesures de défense n’aurait pas pu ou dû se contenter d’avoir recours à des moyens différents, moins dommageables. Il est aussi indispensable de mettre en balance les biens juridiquement protégés qui sont menacés de part et d’autre. Encore faut-il que le résultat de cette pesée des dangers en présence soit reconnaissable sans peine par celui qui veut repousser l’attaque, l’expérience enseignant qu’il doit réagir rapidement (ATF 136 IV 49 c. 3.2 p. 51 s. ; ATF 107 IV 12 c. 3 p. 15 ; ATF 102 IV 65 c. 2a p. 68).
Celui qui utilise pour se défendre un objet dangereux, tel qu’un couteau ou une arme à feu, doit faire preuve d’une retenue particulière car sa mise en oeuvre implique toujours le danger de lésions corporelles graves ou même mortelles. On ne peut alors considérer la défense comme proportionnée que s’il n’était pas possible de repousser l’attaque avec des moyens moins dangereux, si l’auteur de l’attaque a, le cas échéant, reçu une sommation et si la personne attaquée n’a utilisé l’instrument dangereux qu’après avoir pris les mesures nécessaires pour éviter un préjudice excessif (ATF 136 IV 49 c. 3.3 p. 52 et les références citées).
L’art. 15 CP n’accorde pas le droit de se défendre simplement à titre subsidiaire, c’est-à-dire pour le cas où la personne attaquée ou menacée ne peut se mettre sous la protection de la police ou échapper à l’attaque en fuyant (ATF 79 IV 148 c. 2 p. 152 ; ATF 101 IV 119 p. 121 ; arrêt du TF 6B_889/2013 du 17 février 2014).
8.2
En l’espèce, V._ était sans cesse en butte à des brimades et était régulièrement frappée, parfois sauvagement, et rudoyée par son mari. D’ordinaire, elle ne se défendait pas. Le soir du 10 mars 2012, l’appelant, furieux, s’est à nouveau montré agressif en paroles et en geste, faisant des reproches, criant, endommageant volontairement les lunettes de sa femme, la faisant basculer en arrière par une prise aux jambes, puis lui adressant un regard menaçant, prélude habituel à des coups. De par son expérience de femme battue redoutant et sachant interpréter les signes annonciateurs d’un passage à tabac, elle s’est sentie sur le point d’être attaquée et y a réagi en se défendant de manière dissuasive en assenant deux coups légers à son agresseur au moyen d’un outil ménager fermé au bout arrondi peu susceptible de pénétrer en profondeur dans le corps et d’atteindre des organes vitaux. La légitime défense doit ainsi être confirmée tant en ce qui concerne l’imminence de l’attaque que la proportionnalité de la riposte.
Au demeurant, le Tribunal fédéral a admis l’état de nécessité dans le cas d’une femme frappée et menacée de mort par son conjoint qui avait tué celui-ci durant son sommeil (ATF 122 IV 1).
9.
Dans le cas 2.6 retenu ci-dessus, l’appelant soutient ne pas avoir empêché les agents de sécurité de faire un acte de fonction et que l’ordre de quitter le bus était illégal, de même que la tentative de le menotter.
9.1
9.1.1
L'art. 285 CP punit celui qui, en usant de violence ou de menace, empêche une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions, les contraint à faire un tel acte ou se livre à des voies de fait sur eux pendant qu'ils y procèdent. Les employés des entreprises définies par la loi du 20 décembre 1957 sur les chemins de fer, la loi du 20 mars 2009 sur le transport de voyageurs et la loi du 19 décembre 2008 sur le transport ferroviaire de marchandises ainsi que les employés des organisations mandatées conformément à la loi fédérale du 18 juin 2010 sur les organes de sécurité des entreprises de transports publics et pourvues d'une autorisation de l'Office fédéral des transports sont également considérés comme des fonctionnaires.
Il faut en outre que la violence ou les menaces aient empêché une autorité ou un fonctionnaire d'effectuer un acte entrant dans ses fonctions. L'acte peut être une décision ou un comportement matériel. Il suffit par exemple d'empêcher un contrôle d'identité. Il importe peu que la résistance soit couronnée de succès et que l'empêchement soit absolu. Entraver, retarder ou compliquer l'accomplissement d'une tâche que les autorités doivent accomplir suffit déjà à réaliser l'élément objectif de l'empêchement (Corboz, op. cit., nn. 7 ss ad art. 285 CP; Favre/Pellet/Stoudmann, Code pénal annoté, 3e éd., Lausanne 2007, n. 1.1 ad art. 285 CP et les références citées). Pour que l'art. 285 CP soit applicable, il suffit, en fonction de la ratio legis de cette disposition, que la violence ou la menace soit motivée par l'acte officiel et qu'elle se produise immédiatement; il faut un rapport temporel étroit entre l'acte officiel et l'acte incriminé (Corboz, op. cit., nn. 16 et 17 ad art. 285 CP).
9.1.2
Selon l’art. 286 CP, celui qui aura empêché une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire d'accomplir un acte entrant dans ses fonctions sera puni d'une peine pécuniaire de 30 jours-amende au plus.
Cette disposition ne présuppose ni menaces, ni violence contrairement à l’art. 285 ch. 1 CP. Il suffit ainsi que l'auteur, sans recourir à la violence ou à la menace, entrave ou diffère l'acte de l'autorité, sans l'empêcher pour autant, ni le rendre impossible (ATF 127 IV 115).
9.1.3
L’art. 59 LTV (Loi sur le transport des voyageurs ; RS 745.1) dispose que les infractions prévues par le code pénal sont poursuivies d'office lorsqu'elles sont commises contre les employés des entreprises qui disposent d'une concession ou d'une autorisation selon les art. 6 à 8 (let. a) ou les personnes qui exécutent une tâche à la place d'un employé visé à la let. a (let. b).
9.1.4
Aux termes de l’art. 59 al. 1 OTV (Ordonnance sur le transport de voyageurs ; RS 745.11), une entreprise peut refuser de transporter une personne qui est en état d'ivresse ou sous l'effet de stupéfiants (let. a), se comporte de manière inconvenante (let. b), n'observe pas les prescriptions sur l'utilisation des moyens de transport ou sur le comportement du voyageur ou ne se conforme pas aux injonctions du personnel fondées sur celles-ci (let. c).
9.1.5
Selon l’art. 1
LUsC (Loi sur l’usage de la contrainte ; RS 364), cette loi règle les principes applicables à l'usage de la contrainte et des mesures policières dans les domaines relevant de la compétence de la Confédération.
9.1.6
L’art. 4 al. 1 LOST (Loi fédérale sur les organes de sécurité des entreprises de transport publics ; RS 745.2) prévoit que le service de sécurité et la police des transports ont les compétences suivantes : interroger des personnes et contrôler leurs documents d'identité (let. a), interpeller, contrôler et exclure du transport les personnes dont le comportement n'est pas conforme aux prescriptions (let. b), requérir des sûretés des personnes dont le comportement n'est pas conforme aux prescriptions (let. c).
L’al. 5 de ce même article dispose que la contrainte policière ne peut être appliquée que dans la mesure nécessaire pour exercer l'interpellation, le contrôle, l'exclusion du transport ou l'arrestation provisoire. L'usage de menottes ou de liens est autorisé lorsqu'une personne qui a commis un crime ou un délit est arrêtée provisoirement en vue d'être remise à la police.
9.2
En l’espèce, les deux employés de la société C._ SA, entreprise chargée par les TL d’assurer la sécurité dans le « bus pyjama » avaient la qualité de fonctionnaires ou de collaborateurs officiels d’entreprises de transports publiques au sens de la loi pénale, ce que l’appelant ne conteste pas.
L’appelant était en état d’ivresse, soit une alcoolémie de 1,56 ‰ mesurée à 5h44, avait importuné par ses propos une jeune voyageuse, avait tenté de s’en prendre physiquement à un agent de sécurité et refusait de quitter le bus ou tentait d’y remonter en dépit du refus des représentants des TL. L’inconvenance, l’état d’ivresse et le refus de se soumettre aux injonctions justifiaient le refus de transport. La Loi sur l’usage de la contrainte à laquelle l’appelant se réfère pour tenter d’en déduire un usage illicite des menottes par les agents de sécurité ne s’applique pas dans la présente cause selon son champ d’application délimité à son art. 1. Pour le surplus, le fait pour l’organe de sécurité d’exclure du transport une personne dont le comportement n’était pas conforme, aux prescriptions ne sortait pas du cadre de l’art. 4 al 1 let. b LOST. Conformément à l’art. 4 al. 5 in fine LOST précité, les agents de sécurité se sont servis d’une paire de menottes pour tenter d’entraver l’appelant qui avait enfreint l’art. 285 CP et se montrait oppositionnel, ce dans l’attente de l’arrivée de la police.
La tentative d’agression par des gestes menaçants sur un agent relève donc de l’art. 285 CP et le fait d’être remonté dans le bus pour empêcher son exclusion du transport de l’art. 286 CP. Partant le grief est infondé.
10.
L’appelant s’oppose à la réparation du tort moral de 3'500 fr. allouée à V._. Il soutient que la complaisance retenue par les premiers juges comme faute concurrente de la victime devrait entraîner le refus de toute réparation.
10.1
10.1.1
Selon l’art. 44 al. 1 CO (Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse, RS 220), le juge peut réduire les dommages-intérêts, ou même n'en point allouer, lorsque la partie lésée a consenti à la lésion ou lorsque des faits dont elle est responsable ont contribué à créer le dommage, à l'augmenter, ou qu'ils ont aggravé la situation du débiteur.
10.1.2
L’art. 49 al. 1 CO dispose que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d’argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l’atteinte le justifie et que l’auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement.
Cette indemnité a pour but exclusif de compenser le préjudice que représente une atteinte au bien-être moral. Le principe d’une indemnisation du tort moral et l’ampleur de la réparation dépendent d’une manière décisive de la nature et de la gravité de l’atteinte, de l’intensité et de la durée des effets sur la personnalité de la victime concernée, du degré de la faute de l’auteur de l’atteinte et de la possibilité d’adoucir de façon sensible, par le versement d’une somme d’argent, la douleur physique ou morale (TF 4A_489/2007 du 22 février 2008 c. 8.2; ATF
132 II 117 c. 2.2.2; ATF 125 III 412 c. 2a, JT 2006 IV 118).
En raison de sa nature, l’indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage qui ne peut que difficilement être réduit à une simple somme d’argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites. L’indemnité allouée doit toutefois être équitable (ATF 130 III 699 c. 5.1 et les arrêts cités). Le juge en proportionnera le montant à la gravité de l’atteinte subie et évitera que la somme accordée n’apparaisse dérisoire à la victime (ATF 130 III 699 c. 5.1; ATF 129 IV 22 c. 7.2, rés. in JT 20061V 182).
Statuant selon les règles du droit et de l’équité (art. 4 CC [Code civil suisse du 10 décembre 1907, RS 210]), le juge dispose d’un large pouvoir d’appréciation.
10.2
En l’espèce, la plaignante a passablement souffert du comportement violent et tyrannique de son mari. La victime n’a pas à proprement parler consenti aux coups que son mari lui prodiguait, ni à la peur dans laquelle il la tenait, ni à l’exécution de son lapin. S’il n’y pas eu consentement aux lésions subies, la victime n’a en revanche pas su mettre à profit l’aide, le soutien et la protection que sa famille, la justice et diverses structures sociales lui ont proposés, ce faisant elle a contribué dans une certaine mesure à augmenter sa souffrance en s’exposant à de nouveaux mauvais traitements. En définitive, au vu de la cruauté du comportement de l’appelant (jgt., p. 29 in fine-30), le tort moral réduit de 3'500 fr. qui a été alloué à V._ constitue un minimum en deçà duquel on ne saurait aller.
11.
L’appelant conteste les faits retenus dans le cas 2.8 ci-dessus. La plainte ayant été retirée, il n’y aurait aucune raison de ne pas tenir compte du retrait de la plainte et il n’y aurait aucun intérêt public à poursuivre une infraction mineure.
11.1
En l’espèce, comme l’ont retenu les premiers juges, les déclarations d’V._ sont sincères et crédibles. Il n’y a ainsi aucun motif pour ne pas retenir la version de cette dernière. Les voies de fait qualifiées doivent ainsi être confirmées.
12.
S'agissant enfin de la quotité de la peine, l'appelant soutient que la peine privative de liberté de 18 mois dont 8 mois fermes prononcée par le Tribunal correctionnel serait disproportionnée et conclut au prononcé d'une peine pécuniaire, subsidiairement à un travail d’intérêt général, ainsi qu’à la suspension de la peine et à la fixation d’un délai d’épreuve de trois ans, l’amende de 200 fr. étant admise dans la mesure où les voies de fait seraient confirmées.
12.1
12.1.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale
(ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
12.1.2
Selon l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l’exécution d’une peine pécuniaire, d’un travail d’intérêt général ou d’une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu’une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l’auteur d’autres crimes ou délits.
Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement (ATF
134 IV 1 c. 4.2.1). Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (TF 6B_492/2008 du 19 mai 2009 c. 3.1.2; ATF 134 IV 1 c. 4.2.2).
12.2
En l’espèce, au vu de la lâcheté, la perfidie, la cruauté, la bassesse et l’absence de prise de conscience du prévenu, sa culpabilité est lourde. Comme l’ont constaté les premiers juges, il n’y a aucun élément à décharge. Partant, la quotité et le genre de peine doivent être confirmés. Le pronostic à poser quant au comportement futur de J._ est mitigé. En effet, ni une précédente enquête, ni les auditions devant le Procureur, ni les cinq jours de détention subis n’ont dissuadé l’appelant de battre et terroriser sa femme. En outre, l’ancienne expertise psychiatrique figurant au dossier a conclu à la présence d’un risque de récidive, l’appelant ayant tendance à attribuer l’origine des violences aux éléments extérieurs et paraissant également banaliser la gravité de celles-ci (P. 20, p. 14). Par ailleurs, son casier judiciaire comporte déjà trois inscriptions relatives à des infractions LCR. Il est donc exact de dire que le pronostic est mitigé et que seul un sursis partiel peut être accordé.
13.
En définitive, l’appel de J._ doit être rejeté et le jugement entrepris intégralement confirmé.
13.1
L'indemnité de défenseur d'office allouée pour la procédure d'appel à Me Kathrin Gruber sera fixée à 1'842 fr. 50, débours et TVA compris, en tenant compte de huit heures et quarante cinq minutes de travail effectif, d’une vacation et de 11 fr. de débours.
13.2
L'indemnité de conseil d'office allouée pour la procédure d'appel à Me Marc-Henri Fragnière sera fixée à 2'073 fr. 60, débours et TVA compris, en tenant compte de dix heures de travail effectif et d’une vacation.
13.3
Vu l’issue de la cause, les frais de la présente procédure, constitués de l’émolument de jugement, par 3’450 fr., doivent être mis à la charge de J._ (art. 428 al. 1 CPP), qui supportera également l’indemnité allouée à son défenseur d'office, par 1'842 fr. 50, ainsi que l’indemnité allouée au conseil d’office d’V._, par 2'073 fr. 60.
J._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant des indemnités en faveur de son défenseur d’office et du conseil d’office d’V._ que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b921bb11-e3ab-49b3-aeb6-96a10e7f6723 | En fait :
A.
Par jugement du 13 janvier 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a constaté que R._ s’était rendu coupable de faux dans les certificats, infraction grave et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et infraction à la loi fédérale sur les étrangers (I); l'a condamné à une peine privative de liberté de dix ans, sous déduction de 467 jours de détention avant jugement (II); a dit que cette peine était entièrement complémentaire à celle prononcée le 3 décembre 2010 par le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne (III); l'a condamné à une amende de 300 fr. et a dit
qu’en cas de non paiement fautif de l’amende la peine privative de liberté de substitution sera de trois jours (IV); a dit que cette peine était partiellement complémentaire à celle prononcée le 27 mars 2008 par le Juge d’instruction de Lausanne et entièrement complémentaire à celle prononcée le 3 décembre 2010 par le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne (V); a révoqué le sursis accordé à R._ le 27 mars 2008 par le Juge d’instruction de Lausanne et a ordonné l’exécution de la peine pécuniaire de soixante jours-amende à 20 fr. (VI); a ordonné la confiscation et la destruction des téléphones portables, des cartes SIM, des supports de carte SIM et de la clé séquestrés sous fiche n° 1760 (VII); a ordonné le maintien au dossier à titre de pièces à conviction d’un passeport nigérien au nom d’[...] n°A00900302, d’un passeport nigérien au nom de [...] n°A00216616, d’un livret de famille espagnol au nom de [...] n°0333789, d’une carte d’identité nigérienne au nom d’[...] n°0314259880, d’un carnet d’adresses avec inscriptions, d’un agenda contenant des photos passeport, d’un lot de documents Unic Health Travel Assist, d’un document d’enregistrement Sunrise, de deux documents Sunrise au nom d’[...] n° 076 542 22 46 et n° 076 481 22 46, d’un lot de papiers avec inscriptions manuscrites, de trois cahiers rouges avec inscriptions manuscrites séquestrés sous fiche n° 1760 ainsi que d’un classeur A4 bleu contenant divers CD de contrôle de conversations téléphoniques versé au dossier sous fiche de séquestre et de pièce à conviction "Trib 148 [...]" (VIII); a ordonné la confiscation et la dévolution à l’Etat du montant de 75 fr. 40 séquestré sous fiche n° 1769 (IX); a mis les frais de la cause, par 120’638 fr. 75, y compris l’indemnité servie à son défenseur d’office par 5'248 fr. 80, TVA comprise, à la charge de R._ (X) et a dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité allouée au chiffre X ci-dessus ne sera exigible que pour autant que la situation financière de R._ se soit améliorée (XI).
B.
Le 13 janvier 2011, R._ a formé appel contre le jugement précité.
Par déclaration d'appel motivée du 21 janvier 2010, R._ a développé plusieurs moyens, pris des conclusions et n'a pas requis l’administration de preuves. Il a conclu principalement à la réforme du chiffre II du dispositif du jugement querellé en ce sens qu'il est condamné à une peine privative de liberté inférieure à six ans, sous déduction de la détention avant jugement, subsidiairement à une peine privative de liberté de six ans, sous déduction de la détention avant jugement. Subsidiairement, il a conclu à son annulation et au renvoi de la cause à un tribunal criminel pour nouvelle instruction et nouveau jugement.
Le 14 février 2011, le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne a indiqué qu’il renonçait à déposer un appel joint dans la présente cause.
La direction de la procédure a fait d'office verser au dossier un nouvel extrait du casier judiciaire suisse de R._.
Aux débats du 14 avril 2011, l'appelant a confirmé ses déclarations faites devant le tribunal de première instance.
C.
Les faits, tels qu’ils ressortent de la procédure d’instruction, ainsi que des débats de première et de deuxième instance, sont les suivants :
1.
R._ est né le 5 mai 1986 à Umunze au Nigeria, pays dont il a la nationalité. Il a déclaré avoir quitté son pays en 2006 pour le Ghana, avant de rejoindre l’Europe en 2007. Il est arrivé sur le territoire helvétique dans le courant de l’année 2007 et a déposé une demande d’asile le 26 août 2007 qui a été rejetée le 28 mai 2008. Par la suite, il a été dépendant de l’aide d’urgence. Dans un premier temps, il a séjourné dans différents centres pour requérants d’asile, puis il a partagé un appartement à Lausanne avec un certain [...], d’abord dans le quartier de La Sallaz, puis, dès début juin 2009, à la rue des Avelines. Il n’a jamais eu d’activité lucrative déclarée en Suisse. Il dit s’être livré à la prostitution, ce qui lui rapportait quelque 500 fr. à 700 fr. par semaine en moyenne. Depuis le mois de février 2010, R._ est le père d’une fille, issue de sa liaison avec [...]. Il voit sa fille et son amie une fois toutes les deux semaines au parloir de la prison.
Le casier judiciaire suisse du prévenu fait état d’une condamnation :
- 27 mars 2008, Juge d’instruction de Lausanne, 60 jours-amende à 20 fr. avec sursis durant deux ans, pour violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires et délit contre la loi fédérale sur les stupéfiants.
Par jugement rendu le 3 décembre 2010, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a libéré R._ du chef d’accusation d’agression et l’a condamné pour contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants à une amende de 100 francs.
Pour les besoins de la présente cause, le prévenu a été détenu avant jugement depuis le 4 octobre 2009. Il ressort d’un rapport de comportement établi le 7 janvier 2011 par le directeur de la prison du Bois-Mermet qu'il a fait preuve d’un bon comportement depuis le début de son incarcération tant envers le personnel qu’envers ses codétenus.
2.
Entre les mois de mai et de décembre 2009, la police de sûreté vaudoise a mené une importante enquête qui a permis de mettre à jour une organisation criminelle travaillant de manière structurée et professionnelle en vue de l’importation de cocaïne de l’Afrique de l’Ouest vers divers pays d’Europe et la Suisse, via la Hollande.
Au sein de l’organisation, les grossistes avaient recours à des mules pour acheminer la cocaïne préalablement conditionnée sous forme de fingers, soit par le procédé dit de "
body packing
", soit dans des briques d’eau minérale.
L’opération, intitulée "
BLD
" a été initiée le 26 mai 2009 ensuite de la découverte de plus de trois kilos de cocaïne dissimulés dans trois briques d’eau minérale dans un compartiment à bagages du TGV Paris-Lausanne. Des contrôles téléphoniques ont alors été mis en oeuvre. Ceux-ci ont porté notamment sur des raccordements utilisés par [...], qui se trouvait dans le TGV le 26 mai 2009.
Une seconde livraison de cocaïne a été interceptée le 7 juin 2009, qui portait également sur une quantité de plus de trois kilos. Le dispositif de surveillance mis en place le jour même a permis l’interpellation de [...], qui s’est révélée par la suite être la soeur de [...].
L’enquête qui a suivi a permis de démontrer que [...] et sa soeur étaient impliquées dans une quinzaine de transports de cocaïne à destination de la Suisse. Un numéro de téléphone suisse et un numéro français de [...] ont été mis sous contrôle téléphonique dès le 26 mai 2009. Par ailleurs, en consultant le téléphone portable de [...], la police a découvert des messages provenant d’un numéro hollandais enregistré en regard du nom [...]. Ce raccordement a été placé sous contrôle téléphonique dès le 17 juin 2009.
Le 19 juin 2009, la police a intercepté une longue conversation téléphonique entre le raccordement français de [...] et le n° 076/5188481 utilisé par un Nigérian surnommé [...] dans laquelle les deux protagonistes parlaient d’[...]. Après divers recoupements de conversations et analyses de contrôles téléphoniques rétroactifs, il s’est avéré que le numéro susmentionné avait été ou était à plusieurs reprises en contact avec le téléphone hollandais d’[...], notamment le 24 mai 2009, peu avant la première saisie opérée dans le TGV. Ce numéro a dès lors fait l’objet d’une mesure de contrôle dès le 22 juin 2009.
La police a par la suite identifié formellement le surnommé [...] comme étant R._. Ce dernier ayant changé plusieurs fois de numéro, six autres numéros de téléphone lui étant attribués ont encore été placés sous contrôle. Des recherches subséquentes ont en outre permis d’identifier vingt-quatre raccordements téléphoniques utilisés par l'intéressé.
Le 27 juillet 2009, une surveillance a été mise en place sur R._ à Lausanne. Le jour en question, après avoir tenté de changer 5'000 fr. auprès de Western Union, le prénommé s’est rendu à l’hôtel [...] de Lausanne où il a rencontré des Africains qui avaient séjourné dans cet hôtel. L’un d’eux a été identifié par le bulletin de l’hôtel comme étant X._.
Dès le 13 septembre 2009, le numéro utilisé par S._ a également fait l’objet d’un contrôle.
Au final, après de multiples opérations, la police a mis en lumière un réseau international dont les principaux responsables étaient X._ dit [...] et un inconnu surnommé [...]. Ces derniers ont bénéficié d’infrastructures mises en place par [...] en Hollande et par R._ en Suisse.
2.1
L’enquête portant sur R._ s’est notamment basée sur l’exploitation des données techniques, des conversations téléphoniques et des auditions des différents protagonistes. Ces éléments ont permis à la police d’établir que R._ travaillait en Suisse pour le compte du dénommé [...] et chapeautait la réception de la drogue et la rétribution des mules.
Grâce au recoupement de plusieurs conversations entre R._ et S._, la police a notamment pu déterminer qu’une mule devait arriver le 4 octobre 2009 à l’Hôtel [...] de Crissier. Un dispositif de surveillance a dès lors été mis en place et a permis l’interpellation de R._, de la mule [...] et de S._, ainsi que la saisie de 823 g de cocaïne et de 13’500 francs.
L’ensemble des mesures d’enquête a par la suite permis à la police de mettre à jour plusieurs autres livraisons de cocaïne destinées au prévenu.
2.2
S’agissant du trafic de stupéfiants au sens des art. 19 ch. 1 et 2 LStup, les faits retenus à la charge de R._ par les premiers juges sont les suivants :
2.2.1
Le 26 mai 2009, des gardes-frontière ont repéré un colis suspect se trouvant entre deux wagons du TGV Paris-Lausanne. Un dispositif de surveillance visant à interpeller le propriétaire de ce paquet a été mis en place. A l’arrivée à Lausanne, personne ne l’ayant pris en charge, un contrôle des passagers, peu nombreux, a été effectué. Parmi ceux-ci se trouvait [...]. Aucune charge n’a été retenue à son encontre et elle a été laissée aller. La saisie du colis a permis la découverte de 3,166 kilos nets de cocaïne conditionnée en 330 fingers destinés à R._. Au moment de l’arrivée à Lausanne de [...] un des raccordements de R._ a été localisé à la place de la Gare à Lausanne.
2.2.2
Le 7 juin 2009, les gardes-frontière ont, une nouvelle fois, repéré un sac contenant trois briques d’eau identiques. Une surveillance a été mise en place. A Lausanne, elle a permis l’interpellation de [...], qui est venue prendre en charge le colis contenant 3,108 kilos nets de cocaïne destinés à R._. Entre le 2 et le 7 juin 2009, [...] a été en contact une vingtaine de fois avec les raccordements hollandais de [...]. Le 7 juin 2009, s’inquiétant du silence de [...] à son arrivée à Lausanne, [...] a immédiatement contacté R._. Entre le 9 et le 11 juin 2009, l’accusé a contacté au moins dix fois [...]. Le 10 juin 2009, cette dernière s’est rendue à Lausanne dans le but de discuter avec R._ et [...] du sort de sa soeur [...].
2.2.3
Le 31 juillet 2009, R._ a contacté [...] pour confirmer sa commande de 2,240 kilos de cocaïne. Entre le 1
er
et le 2 août 2009, l’accusé a eu des entretiens téléphoniques avec différents protagonistes dont de nombreux avec S._ pour l’informer des modalités de la livraison de cette marchandise à savoir que celle-ci aurait lieu le 2 août 2009 par l’intermédiaire de deux mules polonaises et qu’elle serait réceptionnée pour son compte par [...]. [...] et [...] (déférés séparément) ont été interpellés le 2 août 2009 à l’Hôtel [...] à Lausanne en possession de 2,240 kilos de cocaïne. [...] a réussi à s’enfuir abandonnant son sac à main dans lequel 5'000 fr. et 3'000 euros ont été retrouvés. Peu après, R._ a contacté un inconnu localisé au Nigeria l’informant de l’interpellation des deux mules. Le 3 août 2009, il s’est entretenu avec S._ juste après avoir contacté [...]. Le 4 août 2009, il a téléphoné à un inconnu au Nigeria pour l’informer des événements survenus à l’hôtel Ibis le 2 août précisant que, heureusement pour lui, la femme n’avait pas été interpellée.
2.2.4
Entre le 6 et le 8 août 2009, R._ a eu dix-huit contacts téléphoniques avec S._, vingt-neuf avec [...] et vingt et un avec [...] pour organiser le déroulement de la livraison de cocaïne du 9 août. Durant ces trois jours, S._ a eu septante contacts de différents clients sur son raccordement n° 076/4067377. Le 9 août 2009, à l’aéroport de Genève, les dénommés [...], [...] et [...], soit trois mules en provenance du Nigeria (déférées séparément) ont été interpellées en possession des 4 kilos de cocaïne destinés à R._. Le même jour, R._ et S._ se sont contactés à plusieurs reprises. Entre mai et juin 2009, R._ avait déjà eu de nombreux contacts avec [...] concernant cette livraison.
2.2.5
Le 16 septembre 2009, R._ a eu de nombreux contacts téléphoniques avec S._ concernant la livraison d’un kilo de cocaïne au minimum par le dénommé [...] en provenance du Nigeria. Le 17 septembre 2009, en fin de matinée, R._ s’est rendu à l’Hôtel [...] à Lausanne afin d’aller chercher la drogue. Il est ensuite allé directement au domicile de S._ sis au Chemin des Aubépines 16 afin d’y déposer cette marchandise. Durant cette même journée, les deux protagonistes se sont contactés plusieurs fois. Le 18 septembre 2009, R._ et S._ se sont téléphonés à de nombreuses reprises dont une fois juste après le départ de la mule [...].
2.2.6
A la fin septembre 2009, R._ a commandé à un inconnu non identifié à ce jour au moins 0,8 kilo de cocaïne.
2.2.7
Le 4 octobre 2009, dans la soirée, à la Place du Tunnel à Lausanne, R._ et la mule [...] ont été interpellés à la suite d’une nouvelle livraison, le même jour, de 1,156 kilo de cocaïne commandé par R._. Quelques instants plus tard, S._ a été interpellé à son domicile. Dans la cave de ce dernier, une partie de la livraison soit 47 fingers et 2 boulettes de cocaïne pour un total brut d’au moins 823 grammes ont été retrouvés. 36 fingers avaient un taux de pureté moyen de 57,2 %; 11 fingers atteignaient un taux de pureté moyen de 30,7 % et les 2 boulettes un taux de pureté moyen de 31,8 %. Par ailleurs, 13'000 fr., 1'230 euros, 200 $ et 4'250 Naira ont été découverts.
2.3
En définitive, c’est ainsi un total de 15,47 kilos de cocaïne qui était destinés à R._. L’analyse des fingers de cocaïne retrouvés chez S._ (57,2 % et 30,7 %) a démontré un taux de pureté moyen de 43,96 %. Quant à la drogue expulsée par la mule, elle atteignait un taux de pureté moyen de 58,2 %. Au total, la drogue retrouvée avait ainsi un taux de pureté moyen de 51,075 %.
Pour le solde de la drogue, il convient de se baser sur les statistiques établies par le Centre Universitaire Romand de Médecine Légale qui relèvent un taux de pureté moyen de 35 %. Le taux de pureté moyen se monte à 43,04 % (51,075 + 35 : 2). Au final, c’est un total de 6,66 kilos de cocaïne pure qui était destiné à R._.
2.4
Entre le 28 mai 2008, date de la décision de non entrée en matière sur sa demande d’asile, et le jour de son interpellation le 4 octobre 2009, R._ a séjourné en Suisse illégalement et s'est rendu coupable d’infraction à la loi fédérale sur les étrangers.
2.5
Depuis le 26 août 2007, date de son arrivée en Suisse et jusqu’à son interpellation le 4 octobre 2009, R._ a consommé régulièrement de la marijuana. Depuis 2008, jusqu’au 4 octobre 2009, l’accusé a consommé occasionnellement de la cocaïne. Il s’est ainsi rendu coupable de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants.
2.6
En mai 2009, en Espagne, R._ a obtenu frauduleusement deux faux passeports. Il a notamment usurpé une de ces identités pour se marier en Espagne dans le but d’obtenir un permis de séjour espagnol. Ces documents ont été retrouvés à son domicile. Ce faisant, l'intéressé s'est rendu coupable de faux dans les certificats. | En droit :
1.
L’appel doit être annoncé dans les 10 jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, Bâle 2011, n° 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel de R._ est recevable. Il convient donc d'entrer en matière sur le fond.
2.
L'appel étant limité à la question du choix du tribunal compétent, à la violation de la maxime d'accusation et à la quotité de la peine, un éventuel effet réformatoire ne pourra porter que sur ces éléments (Kistler Vianin, op. cit., n. 2 ad art. 408 CPP).
Les faits retenus à la charge de R._ ne sont pas contestés et ils doivent être considérés comme établis au regard du dossier, la motivation détaillée et complète des premiers juges emportant au demeurant la conviction (art. 82 al. 4 CPP). A juste titre, l'appelant ne remet d'ailleurs pas en cause le verdict de culpabilité prononcé par les premiers juges, constatant qu'il s'est rendu coupable de faux dans les certificats, infraction grave et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et infraction à la loi fédérale sur les étrangers.
3.
L'appelant fait valoir qu'il a été jugé par un tribunal correctionnel alors qu’il aurait dû être jugé par un tribunal criminel en application de l’art. 449 CPP qui prescrit que les procédures pendantes au moment de l’entrée en vigueur du nouveau code de procédure pénale, soit le 1
er
janvier 2011, se poursuivent devant les autorités compétentes selon le nouveau droit. Or, un tribunal correctionnel ne pouvait pas le condamner à une peine supérieure à six ans de peine privative de liberté conformément à l’art. 9 de la loi vaudoise d’introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009 (ci-après : LVCPP, RSV 312.01).
3.1
Dans le cas présent, R._ a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne par ordonnance du 23 juillet 2010. Par lettre du 18 août 2010, le Parquet, au vu de la gravité des faits reprochés, a requis que la cause soit jugée par un tribunal correctionnel élargi, soit une cour composée d'un président et de quatre juges (dossier, pièce 104). Le 1
er
septembre 2010, l’audience de jugement a été fixée aux 10 et 11 janvier 2011, avec lecture du jugement prévue le 13 janvier 2011. En date du 6 octobre 2010, il a été confirmé au conseil de l’accusé que le tribunal correctionnel statuerait aux dates prévues dans sa composition à un président et quatre juges (dossier, pièce 109 et courrier annexé). Le même jour, R._ a été cité à comparaître devant le Tribunal correctionnel de Lausanne. Cette citation portait mention de la composition du tribunal élargi. Enfin, comme annoncé, l’accusé a été jugé aux dates prévues par un tribunal composé d'un président et de quatre juges. Aux débats, il n’a pas contesté la compétence ou la composition du tribunal saisi.
3.2
Le problème soulevé par l'appelant relève du droit transitoire.
Sous l’ancien droit de procédure vaudois, le tribunal correctionnel, dans sa composition à quatre, était compétent pour infliger jusqu’à douze ans de peine privative de liberté (art. 10 al. 1
er
et 11 al. 2 CPP-VD). Lorsque la peine paraissait devoir être supérieure à douze ans de peine privative de liberté, le tribunal criminel, formé de deux juges et de six jurés, était compétent (art. 12 et 13 al. 1 ch. 1 CPP‐VD).
Le Code de procédure pénale suisse donne compétence aux cantons pour désigner leurs autorités pénales et en arrêter la dénomination (art 14 al. 1
er
CPP). Ceux-ci fixent les modalités d’élection des membres des autorités pénales, ainsi que la composition, l’organisation et les attributions de ces autorités, à moins que ces questions soient exhaustivement réglées par le code ou d’autres lois fédérales (art. 14 al. 2 CPP). S’agissant des tribunaux de première instance, le nouveau code a seulement prévu que la compétence d’un juge unique ne pouvait pas dépasser deux ans de peine privative de liberté (art. 19 al. 2 let. b CPP).
En application de l’art. 445 CPP, le Canton de Vaud a adopté le 19 mai 2009 la LVCPP. Selon l'art. 9 de cette loi, le tribunal correctionnel, formé du président et de deux juges, connaît des infractions pour lesquelles la peine encourue est supérieure à douze mois et inférieure ou égale à six ans. L’art. 10 LVCPP dispose que le tribunal criminel, formé du président et de quatre juges, connaît des infractions pour lesquelles la peine encourue est supérieure à six ans.
La situation transitoire est réglée par l’art. 449 CPP. Aux termes de cette disposition, les procédures pendantes au moment de l’entrée en vigueur du nouveau code se poursuivent devant les autorités compétentes selon le nouveau droit, sous réserve de dispositions contraires. Seul un cas, non réalisé en l’espèce, fait exception : lorsque les débats ont été ouverts avant l’entrée en vigueur du nouveau code, ils se poursuivent devant le tribunal compétent jusqu’alors (art. 450 CPP). En outre, les actes de procédure ordonnés ou accomplis avant l'entrée en vigueur du présent code conservent leur validité (art. 448 al. 2 CPP).
3.3
Il résulte de ce qui précède que l’appelant aurait dû être jugé par un tribunal portant le nom de "
tribunal criminel
" et non de "
tribunal correctionnel
". Cette nuance est toutefois sans portée en l’espèce. En effet, la composition du tribunal qui a jugé l’accusé est exactement la même que celle du tribunal criminel prévu par le nouveau droit, à savoir, un président et quatre juges. La LVCPP a simplement désigné "
tribunal criminel
" ce qui était auparavant désigné "
tribunal correctionnel élargi
". Il ne s’agit que d’une simple question de terminologie, ainsi que le démontrent les débats du Grand Conseil. En effet, un amendement de la Commission des affaires judiciaires a proposé au plenum d’appeler "
tribunal criminel
" ce qui était précédemment dénommé dans le projet "
tribunal correctionnel élargi
" (Bulletin du Grand Conseil [BGC], séance du 5 mai 2009, p. 21).
Le moyen de l’appelant est ainsi dénué de toute portée matérielle et pratique. Au demeurant, il sied de souligner que son conseil, particulièrement chevronné et rompu aux affaires pénales, ne l'a jamais invoqué devant le tribunal de première instance, alors même qu’il était parfaitement renseigné par le greffe, dès la fin de l’été 2010, sur la composition du tribunal. Ce n'est en définitive que devant l'autorité d'appel que l'intéressé a soulevé ce grief. Le principe de la bonne foi - qui constitue un principe général du droit également applicable dans le domaine de la procédure pénale - oblige celui qui constate un prétendu vice de procédure à le signaler immédiatement, à un moment où il pourrait encore être corrigé, et lui interdit d'attendre en restant passif afin de pouvoir s'en prévaloir ultérieurement devant l'autorité de recours (ATF 132 II 485 c. 4.3). Il est en effet contraire au principe de la bonne foi d'invoquer après coup des moyens que l'on avait renoncé à faire valoir en temps utile en cours de procédure, parce que la décision intervenue a finalement été défavorable.
Si le moyen soulevé doit être écarté, dès lors qu'il s'agit d'une inadvertance (Macaluso in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, Bâle 2011, n° 6 ad art. 80 CPP), il y a néanmoins lieu de rectifier d'office le chiffre I du dispositif du jugement de première instance en ce sens qu'il a été rendu par le tribunal criminel et non correctionnel.
4.
R._ soutient que pour fixer la peine, les premiers juges auraient considéré à tort qu'il était "
le chef de l’antenne lausannoise d'une bande ayant mis en place un trafic international de stupéfiants et oeuvré à une grande échelle
". Ce faisant, ils auraient violé l’art. 350 CPP d’une part en s’écartant de l’état de fait décrit dans l’acte d’accusation et d’autre part en retenant des faits non établis par l’instruction.
4.1
Aux termes de l’art. 350 al. 1 CPP (applicable par renvoi de l’art. 454 al. 1 CPP), le tribunal est lié par l’état de fait décrit dans l’acte d’accusation mais non par l’appréciation juridique qu’en fait le ministère public. Cette disposition est le reflet de la maxime d’accusation (art. 9 CPP) et son corollaire pour la portée de l’acte d’accusation. Celui-ci délimite l’étendue de la saisine de la juridiction répressive. Pour cette raison, le tribunal est lié par l’état de fait retenu dans l’acte d’accusation et dans un éventuel complément au sens de l’art. 339 CPP (Schubarth, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, Bâle 2011, n. 1 ad art. 350 CPP).
L’acte d’accusation vise d'une part à délimiter l'étendue de la saisine de la juridiction répressive. Il vise d'autre part à informer la défense pour lui permettre d’intervenir efficacement dans la procédure. C’est la désignation des faits reprochés à l’accusé qui constitue la partie essentielle de l’acte d’accusation. Tous les éléments constitutifs de l’infraction ou, plus précisément, tous les faits qui, selon l’avis du ministère public, forment le fondement réel des éléments constitutifs de l’infraction, doivent y être indiqués. L’accusé doit avoir la possibilité de connaître exactement tous les faits concrets qui lui sont reprochés. Il faut toutefois accepter que, sur appel, de petits vices dans l’application de la maxime d’accusation puissent être corrigés par la juridiction de deuxième instance, une annulation du jugement du tribunal de première instance n’étant envisagé que pour des vices importants au sens de l’art. 409 CPP (Schubarth, op. cit., n
os
7 à 15 ad art. 325 CPP).
4.2
En l’espèce, l’acte d’accusation, soit l’ordonnance de renvoi du 23 juillet 2010, expose notamment que l’appelant est "
impliqué dans un trafic international de stupéfiants entre l’Afrique et la Suisse via différents pays d’Europe avec plusieurs autres personnes
" (page 3), que les "
principaux responsables du réseau ont bénéficié des infrastructures mises en place par [...] et [...] en Hollande et par R._ en Suisse
" (page 3), que l’accusé "
a commandé au moins 15 kilos de cocaïne
" (page 3, chiffre 2), qu’il "
s’occupait de la rétribution des mules et la réception de la drogue
" (page 3, chiffre 2), qu’il "
chargeait notamment son complice S._ de garder à son domicile la drogue et l’argent pour son compte et de redistribuer une partie de cette drogue à des revendeurs
" (page 3, chiffre 2), que le 26 mai 2009 la saisie d’un colis dans le TGV Paris-Lausanne "
a permis la découverte de 3,166 kilos nets de cocaïne conditionnée en 330 fingers destinés à R._
" (page 4, chiffre 2.1), que le 7 juin 2009 une complice est venue prendre en charge à Lausanne un "
colis contenant 3,108 kilos nets de cocaïne destinés à R._
" (page 4, chiffre 2.2), que "
le 31 juillet 2009, R._ a contacté [...] pour confirmer sa commande de 2,240 kilos de cocaïne
" (page 4, chiffre 2.3), que "
R._ a contacté un inconnu au Nigeria l’informant de l’interpellation de deux mules
" (page 4, chiffre 2.3), que "
le 9 août 2009 trois mules en provenance du Nigeria ont été interpellées en possession de 4 kilos de cocaïne destinés à R._
" (page 5, chiffre 2.4), que "
le 16 septembre 2009, l’accusé R._ a eu de nombreux contacts téléphoniques avec S._ concernant la livraison d’un kilo de cocaïne au minimum
" (page 5, chiffre 2.5), que le 4 octobre 2009 à Lausanne, "
R._ et la mule [...] ont été interpellés à la suite d’une nouvelle livraison, le même jour, de 1,156 kilo de cocaïne commandé par R._
" (page 6, chiffre 2.7).
Au regard des éléments ainsi exposés dans l’acte d’accusation, l'appelant, qui était représenté par un défenseur, savait qu'il lui était reproché d’avoir commandé à l’étranger des quantités importantes de stupéfiants, ainsi que d'avoir chapeauté la réception de la drogue et la rétribution des mules. R._ a, du reste, pu largement s'expliquer sur les faits précités. On ne voit dès lors pas en quoi il n'aurait pas été en mesure de préparer efficacement sa défense et l'art. 350 CPP n'a pas été violé.
Au demeurant, les termes contestés relèvent d'un simple qualificatif du rôle de l'accusé au sein du trafic de stupéfiants qui s'inscrit parfaitement dans le contexte de l'exposé des faits contenus dans l'acte d'accusation. Le tribunal de 1
ère
instance ne s’en est donc manifestement pas écarté en retenant que l’appelant était "
le chef de l’antenne lausannoise d’une bande ayant mis en place un trafic international de stupéfiants à grande échelle
".
Ce moyen doit donc être écarté.
4.3
Aux termes de l’art. 350 al. 2 CPP, le tribunal prend en compte les preuves administrées durant la procédure préliminaire et lors des débats. Cette disposition rappelle que le juge doit établir les faits énoncés dans l’acte d’accusation en appréciant librement à la fois les preuves recueillies durant la procédure préliminaire et les preuves administrées lors des débats devant le tribunal de première instance, dans le cadre décrit à l’art. 343 CPP. Aucune hiérarchie entre ces deux différentes catégories de preuves n'existe, de sorte qu’elles sont de valeur identique, qu’elles aient été administrées lors de la procédure préliminaire ou lors de débats (Schubarth, op. cit., n° 3 ad art. 350 CPP).
Afin de contester qu'il avait un rôle dirigeant, l'appelant relève que les témoins entendus aux débats de première instance n’ont rien rapporté de tel. En premier lieu, S._ a seulement admis que l’appelant lui avait remis 4'500 fr. et confié un sac contenant de la drogue. Quant à X._, il a uniquement mis en cause R._ pour un achat de deux kilos de cocaïne, coupés pour en faire quatre, livrés par des mules, pour un montant de 31’000 fr., dont 7'000 euros remis par l’appelant à un tiers pour les ramener au Nigeria.
L'argumentation de l'appelant est dépourvue de pertinence, ce dernier perdant de vue que de nombreux éléments du dossier, qu'il ne conteste au demeurant pas dans le cadre de son appel, démontrent qu'il a joué un rôle de premier plan dans un trafic d'envergure internationale, dont notamment :
- l’interception et la confiscation de plusieurs kilos de cocaïne, parfois en possession de mules arrivant de l’étranger (respectivement 3,166 kilos le 26 mai 2009 / 3,108 kilos le 7 juin 2009 / 2,240 kilos le 31 juillet 2009 / 4 kilos le 9 août 2009 / 1,156 kilos le 4 octobre 2009);
- la livraison non interceptée d’un kilo de cocaïne les 16 et 17 septembre 2009;
- la commande de 0,8 kilo de cocaïne à fin septembre 2009;
- soit au total 15,47 kilos de cocaïne tous destinés à l’appelant, ainsi que cela résulte des nombreux contacts téléphoniques entre ce dernier et ses comparses, notamment aux dates et heures des livraisons, des contacts téléphoniques de l’appelant au Nigeria expliquant l’interpellation de mules, la présence de l’appelant sur des lieux de livraisons;
- la réservation de chambres d’hôtel pour les mules, le dépôt d’importantes sommes d’argent chez des comparses, le fait d’avoir été observé en compagnie de mules;
- le taux de pureté moyen de 43%, soit un taux élevé, représentant 6,66 kilos de cocaïne pure.
Dans la mesure où R._ a commandé 15,47 kilos de cocaïne, qu'il s’occupait de la réception de la drogue et de la rétribution des mules, qu'il chargeait en outre son complice S._ de garder à son domicile la drogue et l’argent pour son compte et de redistribuer une partie de cette drogue à des revendeurs, son rôle dans un trafic de stupéfiants international doit bien être qualifié d'important, décisif ou encore dirigeant. L'influence de tels qualificatifs sur la quotité de la peine sera examinée ci-dessous.
Le moyen doit donc être écarté.
5.
L’appelant soutient ensuite que la peine infligée est excessive et doit être réduite à moins de six ans de peine privative de liberté dès lors que l’on ne saurait cumuler les quantités importantes de cocaïne commandées, qu'il n'aurait pas vendu un seul gramme de cocaïne et qu'il n'aurait rien gagné. Il considère que s'il a fait plusieurs commandes c’est parce plusieurs d'entre elles ne sont pas arrivées à destination en raison de leur saisie.
5.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
Selon la jurisprudence développée sous l'empire de l'art. 63 aCP, les éléments fondant la culpabilité que le juge doit examiner en premier lieu sont ceux qui se rapportent à l'acte lui-même, à savoir : du point de vue objectif, le résultat de l'activité illicite, le mode et l'exécution de l'acte ainsi que, du point de vue subjectif, l'intensité de la volonté délictueuse de l'auteur ou la gravité de la négligence et ses mobiles. En second lieu, le juge prendra en considération les éléments concernant la personne de l'auteur : ses antécédents, sa situation personnelle, tant familiale que professionnelle – qui comprend l'éducation reçue et la formation suivie – son intégration sociale, voire sa réputation ainsi que son attitude et son comportement après les faits et dans le cadre de la procédure pénale (Nicolas Queloz/Valérie Humbert, in : Roth/Moreillon [éd.], Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 7 ad art. 47 CP; ATF 129 IV 6 c. 6.1, JT 2005 IV 229 c. 6.1; ATF 127 IV 101 c. 2a; ATF 118 IV 21 c. 2b).
L'art. 47 al. 1 CP fixe le principe et reprend le critère des antécédents et de la situation personnelle. La portée de l'absence d'antécédents doit être relativisée. En effet, sauf circonstances exceptionnelles, elle a un effet neutre sur la fixation de la peine et n'a donc plus à être prise en considération dans un sens atténuant (ATF 136 IV 1 c. 2.6.4). L'art. 47 al. 1 CP enjoint encore au juge de prendre en considération l'effet de la peine sur l'avenir du condamné. Cet aspect de prévention spéciale ne permet toutefois que des corrections marginales, la peine devant toujours rester proportionnée à la faute (TF 6B_14/2007 du 17 avril 2007 c. 5.2).
Codifiant la jurisprudence rendue sous l'empire de l'ancien droit (art. 63a CP), l'art. 47 al. 2 CP énumère de manière non limitative les critères permettant de déterminer le degré de gravité de la culpabilité de l'auteur. Ainsi, le juge devra prendre en considération la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné ainsi que le caractère répréhensible de l'acte, qui correspondent respectivement au "
résultat de l'activité illicite
" et au "
mode et exécution de l'acte
" de la jurisprudence (TF 6B_710/2007 du 6 février 2008, c. 3.2 et les références citées). Sur le plan subjectif, le texte légal cite la motivation et les buts de l’auteur, qui correspondent aux mobiles de l’ancien droit (art. 63 aCP), et la mesure dans laquelle l’auteur aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, qui se réfère au libre choix de l’auteur entre la licéité et l’illicéité (ATF 127 IV 101, précité, c. 2a). Concernant ce dernier élément, le législateur enjoint le juge de tenir compte de la situation personnelle de l’intéressé et des circonstances extérieures (TF 6B_143/2007 du 25 juin 2007 c. 8.1).
En vertu de l'art. 50 CP, le choix de la sanction, comme la quotité et la durée de celle qui est prononcée, doivent être motivés de manière suffisante. Le juge doit exposer dans sa décision les éléments essentiels relatifs à l'acte et à l'auteur qu'il prend en compte, de manière à ce que l'on puisse vérifier que tous les aspects pertinents ont été pris en considération et comment ils ont été appréciés, que ce soit dans un sens atténuant ou aggravant. La motivation doit justifier la peine prononcée, en permettant de suivre le raisonnement adopté, mais le juge n'est nullement tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentage l'importance qu'il accorde à chacun des éléments qu'il cite (ATF 127 IV 101 c. 2c et les arrêts cités). Plus la peine est élevée, plus la motivation doit être complète (ATF 134 IV 17 c. 4.2.1 et les arrêts cités).
5.2
Dans le domaine spécifique des infractions à la LStup, le Tribunal fédéral a, en outre, dégagé les principes qui suivent :
Même si la quantité de drogue ne joue pas un rôle prépondérant, elle constitue sans conteste un élément important. Elle perd cependant de l'importance au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la limite à partir de laquelle le cas doit être considéré comme grave au sens de l'art. 19 ch. 2 let. a LStup. Il en va de même lorsque plusieurs des circonstances aggravantes prévues à l'art. 19 ch. 2 LStup sont réalisées. Le type de drogue et sa pureté doivent aussi être pris en considération. Si l'auteur sait que la drogue est particulièrement pure, sa culpabilité sera plus grande; par contre, elle sera moindre s'il sait que la drogue est diluée plus que normalement (TF 6S.21/2002 c. 2c et les références citées; ATF 122 IV 299 c. 2c; ATF 121 IV 193 c. 2b/aa).
Le type et la nature du trafic en cause sont aussi déterminants. L'appréciation est différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, il importera de déterminer la nature de sa participation et sa position au sein de l'organisation : un simple passeur sera ainsi moins coupable que celui qui joue un rôle décisif dans la mise sur pied des opérations et qui participe de manière importante au bénéfice illicite (ATF 121 IV 202 c. 2d/cc). L'étendue du trafic entrera également en considération. Un trafic purement local sera en règle générale considéré comme moins grave qu'un trafic avec des ramifications internationales. Le délinquant qui traverse les frontières doit en effet déployer une énergie criminelle plus grande que celui qui transporte des drogues à l'intérieur du pays et qui limite son risque à une arrestation fortuite lors d'un contrôle; à cela s'ajoute que l'importation en Suisse de drogues a des répercussions plus graves que le seul transport à l'intérieur des frontières. Enfin, le nombre d'opérations constitue un indice pour mesurer l'intensité du comportement délictueux : celui qui écoule une fois un kilogramme d'héroïne sera en principe moins sévèrement puni que celui qui vend cent grammes à dix reprises (TF 6S.21/2002, précité, c. 2c).
Outre les éléments qui portent sur l'acte lui-même, le juge doit prendre en considération la situation personnelle du délinquant, à savoir sa vulnérabilité face à la peine, ses obligations familiales, sa situation professionnelle, le risque de récidive, etc. Les mobiles, c'est-à-dire les raisons qui ont poussé l'auteur à agir, ont aussi une influence sur la détermination de la peine. Il convient ainsi de distinguer le cas de l'auteur qui est lui-même toxicomane et qui agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain (ATF 122 IV 299, précité, c. 2b). Il faudra enfin tenir compte des antécédents, qui comprennent aussi bien les condamnations antérieures que les circonstances de la vie passée. Enfin, le comportement du délinquant lors de la procédure peut aussi jouer un rôle. Le juge pourra atténuer la peine en raison de l'aveu ou de la bonne coopération de l'auteur de l'infraction avec les autorités policières ou judiciaires notamment si cette coopération a permis d'élucider des faits qui, à ce défaut, seraient restés obscurs (TF 6B_380/2008 du 4 août 2008 c. 6.1.2; ATF 121 IV 202, précité, c. 2d/aa; ATF 118 IV 342 c. 2d).
5.3
L'argumentation de l'appelant relative au cumul de la quantité de drogue est dénuée de pertinence. Il sied tout d'abord de préciser que si les commandes ne sont pas arrivées à destination, elles ont cependant donné lieu à des transports de drogue jusqu’en Suisse, qui ont fait l’objet de saisies à Lausanne ou Genève.
Il est vrai que la marchandise séquestrée n’a pas pu être mise sur le marché par l’appelant. Toutefois, l'intégralité des 15,47 kilos de cocaïne commandés étaient destinés à R._. Le fait que la plupart des stupéfiants séquestrés aient été saisis ne constitue pas un élément à décharge. En effet, l'efficacité de la police ne saurait être une circonstance atténuante dans le cas d'espèce. Au contraire, le fait qu'en dépit de ces saisies, le prénommé ait continué ses commandes démontre l'intensité de sa volonté criminelle. Pour le surplus, s'il est exact que l’appelant n’a pas été renvoyé devant le tribunal pour avoir vendu lui‐même de la drogue, cela ne fait que corroborer l’importance de son rôle dans le trafic mis en place.
Le moyen soulevé doit être écarté.
5.4
R._ a encore relevé que le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne avait retenu dans son jugement (p. 21) qu’il avait été condamné à trois reprises en Autriche mais n’a pas fait état de ces condamnations lorsqu’il a fixé la peine.
En l'espèce, le tribunal de première instance n’a, à juste titre, pas retenu ces faits au moment de fixer la peine (jugement, pp. 43-45) puisque l’extrait du casier judiciaire autrichien ne mentionne pas ces condamnations (pièce 122). La cour de céans ne prendra pas non plus en considération ces antécédents dans le cadre de la fixation de la peine.
5.5
Enfin, l'appelant ne saurait tirer aucune conséquence du refus du tribunal de première instance de mettre à sa charge une créance compensatrice. Il est notamment établi que ce dernier a tenté de changer 5'000 fr. auprès de la Western Union en date du 27 juillet 2009 et que les explications invoquées au sujet de cette somme étaient fantaisistes. Il est en outre permis de douter qu'une personne ne réalisant aucun revenu puisse économiser un montant aussi important. Si le bénéfice qu'il a tiré de son activité délictueuse n'a finalement pas pu être établi de manière précise, il n'en demeure pas moins que la cocaïne réceptionnée représentait une valeur marchande de plusieurs dizaines de milliers de francs.
Enfin, si aucune créance compensatrice n'a été mise à sa charge, c'est parce qu'elle apparaissait d'emblée irrécouvrable, notamment au vu des importants frais mis à la charge du condamné.
5.6
R._ s'est rendu coupable d'infraction grave au sens de l'art. 19 ch. ch. 2 LStup, de contravention à la LStup, d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers et de faux dans les certificats, qui entrent en concours (art. 49 al. 1 CP), ce dont il conviendra de tenir compte.
La circonstance aggravante de la lettre a de l'art. 19 ch. 2 LStup est réalisée dans la mesure où son activité délictueuse a porté sur d'importantes quantités de stupéfiants, à savoir, 15,47 kilos de cocaïne représentant 6,66 kilos de cocaïne pure. La violation de la disposition précitée est sanctionnée, sans tenir compte du concours d'infractions, d'une peine maximale de vingt ans de privation de liberté.
En commandant la drogue, en la réceptionnant à Lausanne de la part de mules provenant de l‘étranger, en rémunérant ces dernières et en donnant des instructions à des complices, il a occupé un rôle décisif dans la mise sur pied des opérations d'un trafic de cocaïne très organisé qui possédait des ramifications internationales. En l'espace de quelques mois, il a fait preuve d'une intensité criminelle particulièrement élevée, seule l'intervention de l'autorité de poursuite pénale ayant mis fin à ses agissements.
De plus, ses antécédents suisses sont défavorables et il n’a tenu aucun compte de l’avertissement que constituait sa condamnation du 27 mars 2008 et du sursis au bénéfice duquel il avait été mis.
Par son attitude dans la présente procédure, il n’a pas démontré une collaboration exceptionnelle dans la mesure où il a reconnu les faits, alors qu’il ne pouvait faire autrement pour avoir été arrêté en flagrant délit, tout en tentant de se disculper en niant l'évidence pour les autres livraisons. Quant à l'absence de prise de conscience de ses fautes, elle ressort de sa persistance dans le déni et dans la fuite de ses responsabilités.
N'étant lui-même qu'un consommateur très occasionnel de stupéfiants, R._ a agi par pur appât du gain et sa liberté de décision étant entière.
Aucune circonstance atténuante au sens de l'art. 48 CP n'est réalisée. L'accusé n'a pas montré le moindre repentir, ni le moindre regret par rapport aux actes qui lui sont reprochés. A décharge, la cour de céans retient son faible niveau d’instruction et son bon comportement en détention.
La Cour d'appel pénale considère que la faute de l’appelant est particulièrement grave, notamment par les quantités de cocaïne en cause et par l’intensité et la persistance de la volonté délictueuse que son comportement répréhensible dénote. Au vu de l'ensemble des éléments susmentionnés, une peine privative de liberté de dix ans, entièrement complémentaire à celle prononcée le 3 décembre 2010 par le Tribunal correctionnel de Lausanne qui lui avait infligé une amende de 100 fr. pour contravention à la Lstup, apparaît adéquate.
6.
En définitive, l'appel doit être rejeté. Le ch. I du dispositif du jugement entrepris doit toutefois être modifié, soit rectifié d'office dans le sens des considérants (c. 3.3).
Vu l'issue de la cause, les frais d'arrêt selon l'art. 424 CPP doivent être laissés à la charge de l’appelant (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). Outre l'émolument, ces frais comprennent l’indemnité d’office allouée à son conseil (cf. les art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP). Vu l'ampleur et la complexité de la cause, l'indemnité doit être arrêtée à 1'360 fr., TVA comprise (cf. l'art. 135 al. 1 CPP).
Le prévenu ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son conseil d’office prévue ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP).
La Cour d’appel pénale
en application des articles 40, 46, 47, 49, 50, 51, 69, 70, 106, 252 CP; 19 ch. 1 et 2, 19a ch. 1 LStup; 115 al. 1 let. a et b LEtr; 398 ss CPP :
I.
Rectifie d'office le jugement rendu le 13 janvier 2011 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne en ce sens qu'il a été rendu par le Tribunal criminel de l'arrondissement de Lausanne.
II.
Rejette l'appel formé le 13 janvier 2011 par Ifeanyi Nkannebe contre le jugement rendu le 13 janvier 2011 par le Tribunal criminel de l'arrondissement de Lausanne.
Confirme intégralement ce jugement dont le dispositif est le suivant :
"
I. Constate qu'Ifeanyi Nkannebe s’est rendu coupable de faux dans les certificats, infraction grave et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et infraction à la loi fédérale sur les étrangers.
II. Condamne Ifeanyi Nkannebe à une peine privative de liberté de 10 (dix) ans, sous déduction de 467 jours de détention avant jugement.
III. Dit que cette peine est entièrement complémentaire à celle prononcée le 3 décembre 2010 par le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne.
IV. Condamne Ifeanyi Nkannebe à une amende de 300 fr. et dit qu’en cas de non paiement fautif de l’amende la peine privative de liberté de substitution sera de (3) trois jours.
V. Dit que cette peine est partiellement complémentaire à celle prononcée le 27 mars 2008 par le Juge d’instruction de Lausanne et entièrement complémentaire à celle prononcée le 3 décembre 2010 par le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne.
VI. Révoque le sursis accordé à Ifeanyi Nkannebe le 27 mars 2008 par le Juge d’instruction de Lausanne et ordonne l’exécution de la peine pécuniaire de 60 (soixante) jours-amende à 20 fr.
VII. Ordonne la confiscation et la destruction des téléphones portables, des cartes SIM, des supports de carte SIM et de la clé séquestrés sous fiche n° 1760.
VIII. Ordonne le maintien au dossier à titre de pièces à conviction d’un passeport nigérien au nom d’lkemefuna Jude Umeh n°A00900302, d’un passeport nigérien au nom de Kenechukwu Obinna Okafo n°A00216616, d’un livret de famille espagnol au nom de Jude Ikemefuna Umeh n°0333789, d’une carte d’identité nigérienne au nom d’Emmanuel Ezeanye n°0314259880, d’un carnet d’adresses avec inscriptions, d’un agenda contenant des photos passeport, d’un lot de documents Unic Health Travel Assist, d’un document d’enregistrement Sunrise, de deux documents Sunrise au nom d’Okafor n° 076 542 22 46 et n° 076 481 22 46, d’un lot de papiers avec inscriptions manuscrites, de trois cahiers rouges avec inscriptions manuscrites séquestrés sous fiche n° 1760 ainsi que d’un classeur A4 bleu contenant divers CD de contrôle de conversations téléphoniques versé au dossier sous fiche de séquestre et de pièce à conviction « Trib 148 Nkannebe Ifeany »
.
IX. Ordonne la confiscation et la dévolution à l’Etat du montant de CHF 75.40 séquestré sous fiche n° 1769.
X. Met les frais de la cause, par CHF 120’638.75, y compris l’indemnité servie à son défenseur d’office par CHF 5'248.80, TVA comprise, à la charge de Ifeanyi Nkannebe.
XI. Dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité allouée au chiffre X ci-dessus ne sera exigible que pour autant que la situation financière de Ifeanyi Nkannebe se soit améliorée.
".
III.
Dit que la détention subie depuis le jugement de première instance est déduite.
IV.
Ordonne le maintien en détention de Ifeanyi Nkannebe à titre de sûreté.
V.
Alloue à Me Jean Lob une indemnité de défenseur d'office pour la procédure d'appel d'un montant de 1'360 fr. (mille trois cent soixante francs).
VI.
Met les frais d'appel, par 4'000 fr. (quatre mille francs), y compris l'indemnité allouée à son défenseur d'office par 1'360 fr. (mille trois cent soixante francs), à la charge de Ifeanyi Nkannebe.
VII.
Dit que Ifeanyi Nkannebe ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son conseil d’office prévue au ch. V ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra
.
VIII.
Déclare le présent jugement exécutoire. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
b9b5c7fa-8093-474b-8c81-6835146c9550 | En fait :
A.
Par jugement du 23 mai 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a libéré A.F._ des accusations d'escroquerie, d'infractions à la LEtr (Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers, RS 142.20), d'infraction à la LSEE (Loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers) et de contravention à la LSEE (I), constaté que ce dernier s'était rendu coupable de violation d'une obligation d'entretien (II), l'a condamné à une peine privative de liberté de sept mois (III), dit que cette peine était partiellement complémentaire à celles prononcées le 17 août 2007 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne et le 21 décembre 2007 par le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne (IV), renoncé à révoquer la libération conditionnelle prononcée le 7 décembre 2009 par le Juge d'application des peines du canton de Vaud (V), donné acte au J._ de ses réserves civiles contre A.F._ (VI), mis les frais de justice, par 8'753 fr. 35, y compris l'indemnité allouée à son défenseur d'office, par 3'753 fr. 35, TVA comprise, à la charge de l'intéressé (VII) et dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité allouée au chiffre VII ci-dessus ne sera exigible que pour autant que la situation financière de A.F._ le permette (VIII).
B.
Le 1
er
juin 2011, A.F._ a formé appel contre le jugement précité.
Par déclaration d'appel motivée du 19 juillet 2011, l'appelant a conclu à la modification du chiffre III du dispositif du jugement principalement en ce sens qu'il est condamné à un travail d'intérêt général ou à une peine pécuniaire fixés à dire de justice, subsidiairement à une peine privative de liberté qui n'excédera pas six mois. Il a indiqué que son appel portait sur le type et la quotité de la peine qui lui avait été infligée. Il s'est en outre réservé le droit de faire entendre un témoin.
Le Ministère public n'a pas présenté une demande de non-entrée en matière, ni n’a déposé d'appel joint.
Le J._ a, quant à lui, présenté une demande de non- entrée en matière. La Cour a toutefois décidé d'entrer en matière en fixant l'audience d'appel, conformément à l'art. 403 al. 4 CPP.
Par courrier du 8 août 2011, le Ministère public a informé la Cour de céans qu'il n'entendait pas comparaître à l'audience du 6 septembre 2011 et a indiqué qu'il concluait au rejet de l'appel, en se référant aux considérants du jugement attaqué.
Lors de l’audience de la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal qui s’est tenue le 6 septembre 2011, le conseil de l’appelant a confirmé les conclusions de sa déclaration d’appel du 19 juillet 2011.
Le J._ a indiqué qu'il s'en remettait à la justice.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
A.F._ est né le [...] en République démocratique du Congo, pays dont il a la nationalité. Après sa scolarité obligatoire, il a suivi une école d'ingénieur dans son pays et obtenu un diplôme d'ingénieur en électronique. Il a ensuite travaillé durant une année en tant qu'électronicien avant de quitter son pays pour la Suisse en raison de troubles politiques. Il est arrivé dans notre pays le 29 janvier 1986 et y a déposé une demande d'asile. Le prévenu a d'abord exercé divers petits emplois en Suisse, puis a entrepris une formation d'ingénieur en informatique, couronnée par l'obtention d'un diplôme en 1993. A.F._ a alors exercé sa profession à Genève pendant quatre ans. Par la suite, il a bénéficié successivement d'indemnités de l'assurance chômage et du revenu d'insertion. Il a également exercé diverses missions temporaires au service de "Rent a person Beratungs AG" notamment en 2005, 2006, 2007 et 2008. Entre les mois d'août et décembre 2007, le prévenu a perçu des salaires mensuels nets respectivement de 2'229 fr. 40, 2'447 fr. 55, 7'314 fr. 55, 3'890 fr. 85 et de 2'738 francs. Pendant l'année 2008, ses revenus se sont élevés à 16'704 fr. 50 net en janvier, 5'025 fr. 35 net en février, à 6'501 fr. 15 net en mars et à 6'529 fr. 95 net au mois de mai. Entre le mois d'août 2008 et le 7 mars 2009, le prévenu a été employé auprès d'Unilabs pour un revenu mensuel brut de 5'700 francs. Du 1
er
septembre au 30 novembre 2010, il a été engagé par la société Oniko AG pour un salaire mensuel brut de 6'700 francs. Au moment de l'audience des débats devant le tribunal de première instance le 23 mai 2011, il continuait à chercher un emploi et était au bénéfice du revenu d'insertion à hauteur de 2'310 fr., soit 1'110 fr. de forfait mensuel et 1'200 fr. pour son loyer. Lors de l'audience du 6 septembre 2011 devant la Cour de céans, l'intéressé a indiqué qu'il avait débuté, au mois de juillet 2011, une activité lucrative à titre indépendant dans le domaine de l'informatique, qu'il avait un mandat de trois mois et espérait être engagé en tant qu'employé. Il a également expliqué, lors de cette audience, qu'il continuait en outre à faire des recherches d'emplois. A.F._ vit seul dans un appartement dont le loyer est pris en charge par les services sociaux. Ses primes d'assurance maladie sont entièrement subsidiées. Par ailleurs, il estime avoir des dettes s'élevant à 40'000 francs. Ayant un permis B qui a été renouvelé, le prévenu vient de déposer une demande de permis C.
2.
Sur le casier judiciaire suisse de A.F._ figure quatre condamnations, soit :
- le 13 juin 2005, par le Tribunal de police de La Chaux-de-Fonds, pour abus de confiance, à une peine d'emprisonnement de 15 jours avec sursis pendant deux ans. Ce sursis a été révoqué le 12 janvier 2009 par le Tribunal correctionnel de Lausanne;
- le 22 novembre 2005, par le Juge d’instruction de l'arrondissement de La Côte, pour violation des règles de la circulation routière, conducteur se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule automobile, taux d’alcoolémie qualifié), à une peine d'emprisonnement d'un mois avec sursis pendant 2 ans et à une amende de 500 francs. Ce sursis a été révoqué le 17 août 2007 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne;
- le 17 août 2007, par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne, pour faux dans les certificats et violation d’une obligation d’entretien à une peine privative de liberté de six mois, peine partiellement complémentaire au jugement du 22 novembre 2005. Par décision du 7 décembre 2009, l'Office des juges d’application des peines a ordonné la libération conditionnelle de l'intéressé le 11 décembre 2009, avec un délai d’épreuve d'un an et une peine restante de deux mois et quatorze jours;
- le 21 décembre 2007, par le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne, pour lésions corporelles simples, voies de fait, menaces, conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait (véhicule automobile), à une peine pécuniaire de 165 jours-amende à 30 fr., avec sursis pendant cinq ans, ainsi qu'à une amende de 500 fr., peine partiellement complémentaire aux jugements des 13 juin 2005 et 22 novembre 2005.
3.
A.F._ s'est marié une première fois avec G._ en 1992. De cette union est issue une fille, B.F._, née le 10 septembre 1993. Le divorce des époux a été prononcé par jugement rendu le 2 septembre 1999 par le Tribunal civil de la Sarine, définitif et exécutoire dès le 19 octobre 1999. Selon ledit jugement, le prévenu est astreint à contribuer à l'entretien de sa fille B.F._ par le versement d'une pension mensuelle, allocations familiale non comprises, de 500 fr. jusqu'à l'âge de sept ans révolus, de 600 fr. dès sept ans jusqu'à l'âge de douze ans révolus et de 700 fr. dès douze ans jusqu'à sa majorité, respectivement jusqu'à ce qu'elle ait terminé sa formation, sous réserve de l'art. 277 al. 2 CC. En date du 26 août 2002, G._, détentrice de l'autorité parentale, a cédé ses droits au J._. Entre le 1
er
mars 2007 et le mois d'août 2011, A.F._ n'a pas payé la pension due. Il a uniquement versé 25 fr. le 1
er
décembre 2009 et 350 fr. le 11 février 2010. Son arriéré se monte ainsi à 37'425 fr. le 6 septembre 2011.
Le prévenu s'est marié une seconde fois en 2002 avec C.F._. De cette deuxième union sont issus deux enfants, D.F._, né le 24 octobre 1998, et E.F._, née le 1
er
octobre 1999. Depuis 2008, A.F._ vit séparé de sa seconde épouse. Selon le jugement de mesures provisoires rendu le 25 juin 2008 par le Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne, le prévenu est astreint à contribuer à l'entretien de son épouse C.F._ et de ses enfants D.F._ et E.F._ par le versement d'une pension mensuelle payable d'avance le 5 de chaque mois en mains de son épouse de 1'000 fr. pour la période du 1
er
juillet au 30 septembre 2008 et de 1'500 fr. dès le 1
er
octobre 2008. Le 7 août 2008, C.F._ a cédé ses droits au J._. Entre le 1
er
juillet 2008 et le mois d'août 2011, le prévenu n'a pas payé la pension due, à l'exception d'une somme de 400 fr. versée le 9 septembre 2008, d'un montant de 25 fr. versé le 1
er
décembre 2009 et d'une somme de 350 fr. versée le 11 février 2010. Son arriéré se monte ainsi à 54'725 fr. le 6 septembre 2011.
Dans les deux cas, le J._ a déposé plainte le 26 septembre 2008. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
En l'espèce, l'appelant a indiqué qu'il contestait uniquement le type et la quotité de la peine (cf. art. 399 al. 4 let. b CPP).
3.
A titre principal, A.F._ soutient que les premiers juges se sont contentés de prendre en considération des éléments relatifs à ses antécédents pour fixer la sanction, sans avoir tenu compte de l'effet que la peine infligée pourrait avoir sur son évolution professionnelle. Il fait valoir qu'il a débuté une activité lucrative à titre indépendant dans le domaine informatique depuis le mois de juillet 2011. Il allègue qu'il sera dès lors prochainement en mesure de contribuer, à tout le moins, partiellement à l'entretien de ses enfants et que la peine infligée par les premiers juges représente un frein pour sa réinsertion professionnelle et sa capacité à assumer ses obligations alimentaires. Il affirme qu'il se justifie de modifier le type et la quotité de la peine en ordonnant un travail d'intérêt général ou une peine pécuniaire en lieu et place de la peine privative de liberté de sept mois fixée.
3.1.
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
Les critères énumérés de manière non exhaustive par l'art. 47 CP correspondent à ceux fixés par l'art. 63 aCP et la jurisprudence élaborée en application de cette disposition, qui conserve toute sa valeur. Ainsi, la culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_722/2010 du 17 février 2011 c. 1.2.1 et 1.2.2; ATF 134 IV 17 c. 2.1 ; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
En mentionnant l'effet de la peine sur l'avenir du condamné, l'art. 47 CP reprend la jurisprudence selon laquelle le juge doit éviter les sanctions qui pourraient détourner l'intéressé de l'évolution souhaitable, en en généralisant l'application à la fixation de toute peine (TF 6B_889/2010 du 24 mai 2011 c. 3.3.1; ATF 128 IV 73 c. 4). La perspective que l'exécution d'une peine privative de liberté puisse détacher le condamné d'un environnement favorable peut ainsi, selon les circonstances concrètes du cas, déployer un effet atténuant et conduire au prononcé d'une peine inférieure à celle qui serait proportionnée à sa culpabilité (TF 6B_889/2010 du 24 mai 2011 c. 3.3.1; ATF 134 IV 17 c. 3.4).
L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (TF 6B_327/2011 du 7 juillet 2011 c. 2.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1).
3.2.
A titre de sanctions, le nouveau droit fait de la peine pécuniaire (art. 34 CP) et du travail d'intérêt général (art. 37 CP) la règle dans le domaine de la petite criminalité, respectivement de la peine pécuniaire et de la peine privative de liberté la règle pour la criminalité moyenne. Dans la conception de la nouvelle partie générale du Code pénal, la peine pécuniaire constitue la sanction principale. Les peines privatives de liberté ne doivent être prononcées que lorsque l'Etat ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Quant au travail d'intérêt général, il suppose l'accord de l'auteur. Conformément au principe de la proportionnalité, lorsque plusieurs peines entrent en considération et apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu de choisir celle qui restreint le moins sévèrement la liberté personnelle de l'intéressé, respectivement qui le touche le moins durement (TF 6B_128/2011 du 14 juin 2011 c. 3.1; ATF 134 IV 97 c. 4.2.2). La peine pécuniaire et le travail d'intérêt général représentent des atteintes moins importantes et constituent ainsi des peines plus clémentes. Cela résulte également de l'intention essentielle, qui était au coeur de la révision de la partie générale du Code pénal en matière de sanction, d'éviter les courtes peines de prison ou d'arrêt, qui font obstacle à la socialisation de l'auteur, et de leur substituer d'autres sanctions. Le principe de la proportionnalité n'oblige toutefois à donner la préférence à la peine pécuniaire ou au travail d'intérêt général que si cette dernière permet de sanctionner la culpabilité de l'auteur de manière équivalente. Dans le cas contraire, le juge peut prononcer une peine privative de liberté (TF 6B_210/2010 du 8 juin 2010; ATF 134 IV 82 c. 4.1). Par ailleurs, conformément à la jurisprudence rendue sur l'art. 41 CP, lorsque le pronostic est défavorable, une courte peine privative de liberté ferme doit être prononcée, car la loi réserve expressément la peine privative de liberté pour cette hypothèse, afin de garantir à l'Etat l'exercice de son droit de répression (ATF 134 IV 60 c. 8.2).
Le choix du type de peine doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation d'une sanction déterminée, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (TF 6B_128/2011 du 14 juin 2011 c. 3.1; ATF 134 IV 97 c. 4.2). Il faut également tenir compte des antécédents de l'appelant, de la gravité des infractions en cause et du risque de récidive. La situation économique de l'auteur ou le fait que son insolvabilité apparaît prévisible ne constituent en revanche pas des critères déterminants pour choisir la nature de la sanction.
En vertu de l'art. 50 CP, le choix de la sanction, comme la quotité et la durée de celle qui est prononcée, doit être motivé de manière suffisante. La motivation adoptée doit permettre de vérifier si les éléments pertinents ont été pris en compte et comment ils ont été appréciés (ATF 134 IV 1 c. 4.2.1).
3.3.
3.3.1.
Dans le cas d'espèce, la culpabilité de A.F._ est lourde. Malgré une précédente condamnation pour des faits similaires, il n'a pas versé depuis le 1
er
mars 2007 la pension due à sa fille B.F._, respectivement depuis le 1
er
juillet 2008 la contribution d'entretien due en faveur de son épouse et de ses deux enfants, D.F._ et E.F._, alors qu'il avait les moyens financiers de faire face à ses obligations, à tout le moins partiellement. En outre, lors de la première audience de jugement du 29 septembre 2010, l'appelant s'était engagé à verser mensuellement dès le 25 octobre 2010 au J._ la somme de 2'300 fr. à faire valoir sur la pension courante due pour ses trois enfants. Il s'était également engagé à verser mensuellement dès le 25 janvier 2011 à la partie plaignante un montant de 500 fr. à faire valoir sur l'arriéré dû. Cette audience de jugement avait dès lors été suspendue pour permettre à l'appelant de faire la preuve de sa capacité de rembourser les contributions d'entretien courantes et impayées. A la reprise de l'audience le 23 mai 2011, le Tribunal a constaté que, malgré certains revenus réalisés durant la période de ses engagements, il n'avait rien versé au J._ ni n'avait pris contact avec ce service pour expliquer sa situation. Ce constat est totalement justifié. En effet, alors que l'appelant a réalisé un revenu mensuel brut de 6'700 fr. d'octobre à novembre 2010 (jgt, p. 13), il n'a rien versé à la partie plaignante en dépit d'un engagement précis pris devant le Tribunal correctionnel. Partant, la volonté exprimée par l'intéressé dans sa déclaration d'appel de faire face à ses obligations à l'avenir est mise à néant par son comportement durant la procédure. Comme l'a justement retenu l'autorité de première instance, ce comportement doit être pris en considération dans la fixation de la peine.
Par ailleurs, les pièces produites en appel pour démontrer sa capacité contributive n'ont pas la valeur probante que A.F._ voudrait leur attribuer. Les gains prévus par la caisse AVS pour l'année 2011 résultent de ses seules déclarations (P. 58/3). Les trois factures produites pour ses prestations totalisent 610 francs. Ces éléments sont manifestement insuffisants en procédure d'appel pour contrebalancer le constat fait par les premiers juges que l'appelant n'est nullement impressionné par les procédures pénales et les sanctions antérieures, le pronostic étant par ailleurs défavorable, ce que l'appelant ne conteste du reste pas.
Pour le surplus, l'autorité de première instance a tenu compte du fait que la peine infligée était partiellement complémentaire à celles prononcées par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne le 17 août 2007 et par le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne le 21 décembre 2007.
Il ressort du jugement de première instance que les premiers juges n'ont pas uniquement pris en compte les antécédents de l'appelant, contrairement à ce qu'il soutient, cet élément n'étant qu'un facteur de fixation parmi les autres. L'autorité de première instance n'a également pas ignoré la situation professionnelle de A.F._. On ne saurait donc reprocher aux premiers juges de n'avoir pas attaché une importance particulière à cette circonstance en arrêtant à sept mois la durée de la privation de liberté. Par ailleurs, il convient de souligner que l'effet de la peine sur l'avenir du condamné, en tant qu'élément de prévention spéciale, ne permet que des corrections marginales, la peine devant toujours rester proportionnée à la faute (TF 6B_889/2010 du 24 mai 2011 c. 3.3.1; TF 6B_445/2010 du 4 octobre 2010 c. 3.2), que les premiers juges ont qualifiée en l'espèce de lourde, à raison comme cela est exposé ci-dessus. L'élément d'appréciation invoqué, soit sa situation professionnelle, ne pouvait donc jouer qu'un rôle limité et le grief selon lequel l'autorité de première instance aurait omis de le prendre en considération, ou même n'en aurait pas suffisamment tenu compte, est dès lors infondé.
Les premiers juges ne se sont pas fondés sur des critères étrangers à l'art. 47 CP et ne sont pas sortis du cadre légal en fixant une peine privative de liberté de sept mois. Au vu des circonstances, la quotité de la peine infligée est adéquate au regard de l'infraction commise, de la culpabilité de l'appelant et de sa situation personnelle. Elle ne relève ni d'un abus, ni d'un excès du pouvoir d'appréciation dont jouit l'autorité de première instance, laquelle n'a ignoré aucun des critères déterminants consacrés à l'art. 47 CP. Elle sera donc confirmée.
3.3.2.
S'agissant du type de sanction, il convient de relever que la quotité de la peine, fixée à sept mois, exclut la prise en considération d'un travail d'intérêt général dont le seuil maximum est de six mois (art. 37 CP). Pour ce qui est d'une peine pécuniaire, ce type de sanction n'est pas envisageable dans le cas présent. En effet, l'appelant a déjà été condamné à des peines privatives de liberté fermes, en particulier à une reprise pour violation d'une obligation d'entretien, qui ne l'ont pas empêché de réitérer en commettant à nouveau une infraction. Une peine pécuniaire serait dès lors inefficace, vu l'absence de tout effet dissuasif des peines privatives de liberté déjà prononcées, notamment pour des faits similaires. Au regard des antécédents de l'appelant, de la gravité de l'infraction en cause et du risque de récidive, une peine pécuniaire ne serait pas adaptée à l'importance de sa culpabilité. Le pronostic étant défavorable, une peine privative de liberté s'impose et se justifie pour garantir à l'Etat l'exercice de son droit de répression. Dans ces conditions, le prononcé d'une peine privative de liberté au lieu d'une peine pécuniaire ou d'un travail d'intérêt général ne viole pas le droit fédéral. C'est donc à juste titre que le tribunal de première instance a prononcé, pour des impératifs de prévention spéciale, une peine privative de liberté.
Au vu de ce qui précède, le grief principal, mal fondé, doit être rejeté.
4.
A titre subsidiaire, l'appelant soutient qu'une peine privative de liberté de sept mois est trop sévère compte tenu de sa situation personnelle et qu'il conviendrait de diminuer la quotité de la peine en le condamnant à une peine privative de liberté qui n'excéderait pas six mois afin de lui garantir une exécution sous la forme de la semi-détention.
4.1.
En vertu de l'art. 79 al. 1 CP, les peines privatives de liberté de moins de six mois et les soldes de peine de moins de six mois après imputation de la détention subie avant le jugement sont en règle générale exécutés sous la forme de la semi-détention.
L'art. 79 al. 1 CP prévoit dès lors, aux conditions prévues à l'art. 77b CP, que les peines privatives de liberté de moins de six mois soient en règle générale exécutés sous la forme de la semi-détention (Viredaz / Vallotton, in Roth / Moreillon, Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, nn. 2 et 5 ad art. 79 CP).
4.2.
En l'espèce, ainsi que mentionné au considérant 3.3 du présent jugement, il n'est pas soutenable de prononcer une peine privative de liberté inférieure à sept mois, cette quotité étant adéquate au regard de l'infraction commise, de la culpabilité de l'appelant et de sa situation personnelle, conformément à l'art. 47 CP. Il faut, en outre, souligner que la peine infligée par le Tribunal correctionnel est déjà clémente, dans la mesure où il a été renoncé à la révocation de la libération conditionnelle (cf. jgt, p. 21) qui aurait dû entraîner la fixation d'une nouvelle peine d'ensemble supérieure à celle prononcée. L'appelant ne peut prétendre obtenir, en soutenant qu'il souhaiterait une semi-détention, une réduction de sa peine. Il n'existe dès lors strictement aucun motif de réduire la peine infligée.
De toute manière, si l'activité professionnelle de l'appelant le commande le moment venu, l'autorité d'exécution pourra toujours faire application de l'art. 77b CP et ordonner la semi-détention.
Le grief subsidiaire, mal fondé, doit être rejeté.
5.
En définitive, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué confirmé dans son entier.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel doivent être mis à la charge de A.F._ (art. 428 al. 1 CPP). Outre l'émolument, qui se monte à 1'830 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1]), ces frais comprennent l'indemnité d'office allouée au conseil d'office de l'appelant (cf. art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP, art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP). Ce dernier a indiqué qu'il avait consacré 9 heures 40 au dossier, temps en audience compris, et que ses débours se montaient à 103 fr. 30. Au vu de la complexité de la cause, des opérations mentionnées dans la note d'honoraires et de la procédure d'appel, il convient d'admettre que le conseil d'office de l'appelant a dû consacrer 7 heures à l'exécution de son mandat. En effet, le nombre d'heures consacrées à l'étude du dossier, soit 3,4 heures, est exagéré dès lors que le conseil de l'appelant était déjà conseil en première instance. L'indemnité sera dès lors arrêtée à 1'464 fr., TVA et débours inclus (cf. art. 135 al. 1 CPP).
L'appelant ne sera tenu de rembourser à l'Etat le montant de l'indemnité en faveur de son conseil d'office prévue ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
ba311423-a3de-497f-9f89-d7fa975f0245 | En fait :
A.
Par jugement du 4 avril 2012, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a, notamment, pris acte du retrait de plainte de D._ contre M._ (I), libéré M._ des accusations de voies de fait, injure, menaces, contravention à la loi vaudoise sur l'aménagement du territoire et les constructions, contravention à la loi vaudoise sur la gestion des déchets et contravention à la loi vaudoise sur l'exercice des activités économiques (II), constaté que M._ s'est rendu coupable de contrainte et infraction à la loi fédérale sur la protection des eaux (III), condamné M._ à cent jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr., et à 600 fr. d'amende, peine partiellement complémentaire à celle prononcée le 11 septembre 2003 par la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, partiellement complémentaire à celle prononcée le 6 novembre 2006 par le Juge d'instruction I du Jura bernois-Seeland, entièrement complémentaire à celle prononcée le 24 juillet 2008 par le Juge d'instruction III de Berne-Mittelland et entièrement complémentaire à celle prononcée le 8 août 2011 par le Ministère public central du canton de Vaud (IV), suspendu l'exécution de la peine de jours-amende et fixé à M._ un délai d'épreuve de quatre ans (V), dit qu'à défaut de paiement de l'amende de 600 fr., la peine privative de liberté de substitution sera de vingt jours (VI), dit que M._ est le débiteur d'B._ de la somme de 5'400 fr., débours et TVA, par 364 fr., compris, à titre de dépens pénaux (VII), donné acte à B._ de ses réserves civiles contre M._ pour le surplus (VIII), fixé l'indemnité de défenseur d'office de M._, l'avocat Sébastien Pedroli, à 5'560 fr., débours et TVA
par 411 fr. compris, une part de 3'336 fr. étant mise à la charge de M._, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (XIV), mis une partie des frais, par 6'771 fr., à la charge de M._, par 1'145 fr. à la charge de D._ et laissé le solde à la charge de l'Etat (XV), et dit que le remboursement à l'Etat de la part d'indemnité de 3'336 fr. allouée au défenseur d'office de M._, l'avocat Sébastien Pedroli, et mise à la charge de M._, sera exigible pour autant que la situation économique de M._ se soit améliorée.
B.
Le 10 avril 2012, M._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d'appel du 30 avril suivant, il a conclu à son acquittement, les frais d'appel étant laissés à la charge de l'Etat, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité
équitable pour ses frais d'avocat.
Par détermination du 20 juin 2012, le Ministère public s'est référé au jugement attaqué et a conclu au rejet de l'appel avec suite de frais.
Une audience a été tenue le 4 septembre 2012, au cours de laquelle le prévenu a été entendu et a confirmé ses déclarations antérieures.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
M._ est né le 11 mars 1964 à Neuchâtel. Après ses écoles à Peseux, il a fait un apprentissage de dessinateur en béton armé, mais il n’a pas obtenu de certificat. II a ensuite travaillé dans le transport et la démolition. Il a vécu B._ de 1986 jusqu'en 2003 ou 2004, par intermittence. Le couple a eu deux enfants nés en 1988 et 1990. M._ est sans nouvelles de ces derniers. Indépendant, le prévenu gagne selon ses dires entre 1'000 fr. et 1'200 fr. par mois. Il vit à ce jour dans un studio dont le loyer mensuel se monte à 491 fr. Ses primes d’assurance maladie sont de l'ordre de 320 fr. par mois. Le prévenu ne paie pas d’impôts. Il n’a pas d’économies, mais des dettes dont il ne connaît pas le montant.
2.
Le casier judiciaire suisse de M._ mentionne quatre condamnations :
- 11 septembre 2003, Cour de cassation pénale du canton de Vaud, trois jours d’emprisonnement et 1500 fr. d’amende pour infraction à la loi fédérale sur la protection des eaux et infraction à la loi fédérale sur la protection de l’environnement;
- 6 novembre 2006, Juge d’instruction I du Jura bernois-Seeland, trente jours d’emprisonnement pour violation grave des règles de la circulation;
- 24 juillet 2008, Juge d’instruction III de Berne-Mittelland, dix jours- amende à 80 fr. et 1500 fr. d’amende pour atteinte intentionnelle et par négligence à l’état de sécurité d’un véhicule, violation grave des règles de la circulation et contravention à l’ordonnance sur la construction et l’équipement des véhicules routiers;
- 8 août 2011, Ministère public central du canton de Vaud, septante-cinq jours-amende à 30 fr. pour tentative de contrainte, injure et diffamation.
3.
3.1
Depuis le début des années 1990 et jusqu’au 3 novembre 2007 à tout le moins, M._ a exploité, à [...], une entreprise de transports, de démolition, de ferraillage et de recyclage des déchets sous l’enseigne " [...] sur une parcelle louée à C._, propriétaire.
Bien que son casier judiciaire n'en fasse plus état, M._ a également été condamné le 1
er
juin 2001 pour infraction à la loi fédérale sur la protection des eaux (P. 74).
Malgré ses diverses condamnations, M._ a poursuivi sur le site de son entreprise, avec une intensité variable, son activité d'entreposage, de démolition, de récupération de véhicules et de déchets, cela entre le 12 janvier 2002 et le 3 novembre 2007. Ces matériaux étaient susceptibles de laisser s'écouler des hydrocarbures dans un lieu ne présentant pas les protections nécessaires pour éviter tout risque d'écoulement vers les eaux souterraines. Cela ressort de plusieurs pièces du dossier et du procès-verbal relatif à une inspection locale effectuée le 14 mars 2007 (P. 36). Le Service des eaux sols et assainissement (ci-après également : le SESA) l'a dénoncé le 5 janvier 2004.
Il résulte des courriers adressés au tribunal par la Municipalité de [...] les 9 mars 2011 et 30 mars 2012 (P. 76 et P. 96), et le SESA les 10 mars 2011 et 28 mars 2012 (P. 77 et P. 95), que l'exploitation litigieuse a perduré.
Entendu comme dénonciateur aux débats du 4 avril 2012, le représentant du SESA, [...], a déclaré avoir vu sur le site [...] une remorque, une caravane, ainsi que des machines de chantier, et avoir constaté l'écoulement d'hydrocarbures (jugement p. 6).
Interpellé, l'intéressé a fait valoir qu'il ne traitait plus des déchets et des véhicules mais qu'il se limitait à les transporter, qu'il y avait, sous son site, une sorte de "Pampers" empêchant toute pollution, et que l'Etat Vaud agissait comme un concurrent et non pas comme une administration neutre (jugement p. 9).
Cette thèse n'a pas convaincu le tribunal qui a considéré qu'en laissant s’épandre des substances de nature à polluer les eaux et en omettant d’aménager les installations qu’il exploitait de façon à éviter tout risque de pollution, M._ s’était rendu coupable d’infraction à la loi fédérale sur la protection des eaux.
3.2
A Yverdon-les-Bains, le jeudi 22 novembre 2006, vers 17 h 15, M._ a attendu son ex-amie, B._, dans l’escalier de l’immeuble où elle habite. A son arrivée, il l’a aussitôt empoignée par le cou et l’a maintenue contre le mur tout en lui montrant un document qu’il voulait qu'elle signe. Comme B._ refusait d'obtempérer, le prévenu lui a asséné un coup de poing au visage. Effrayée, B._ a cédé et signé le document. Elle a déposé plainte le 23 novembre 2006 contre l'intéressé. Elle a confirmé cette plainte le 15 mai 2007 et l'a maintenue aux débats de première instance en demandant acte de ses réserves civiles contre son ex-ami.
L'intéressé a nié ces faits. Il a soutenu que la plaignante avait trébuché en reculant et qu'il n'avait fait que de la retenir.
Ecartant la version du prévenu qu'il a tenue pour peu crédible, le tribunal a retenu qu'en violentant B._ pour lui faire signer un document, M._ s'était rendu coupable de contrainte (jugement p. 24). | En droit :
1.
Déposé en temps utile et contenant des conclusions suffisantes,
l'appel de M._ est recevable (art. 399 al. 1 et 3 CPP; Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0).
2.
Aux termes de l'art. 398 CPP, la juridiction d'appel jouit d'un plein pouvoir d'examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L'appel peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
L'intéressé conteste s'être rendu coupable de violation de la LEaux.
3.1
D'après l'art. 6 LEaux (Loi fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux; RS 814. 20), il est interdit d’introduire directement ou indirectement dans une eau des substances de nature à la polluer; l’infiltration de telles substances est également interdite (al. 1). De même, il est interdit de déposer et d’épandre de telles substances hors d’une eau s’il existe un risque concret de pollution de l’eau (al. 2).
L'art. 22 LEaux pose les exigences générales. L'alinéa 6 de cette disposition précise que les détenteurs des installations contenant des liquides de nature à polluer les eaux ainsi que les personnes chargées d’en assurer l’exploitation ou l’entretien signalent immédiatement à la police de la protection des eaux toute fuite constatée. Ils prennent de leur propre chef toutes les mesures qui peuvent raisonnablement être exigées d’eux pour éviter de polluer les eaux.
L'art. 70 al. 1 LEaux prévoit que sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire celui qui, intentionnellement :
a. aura de manière illicite introduit dans les eaux, directement ou indirectement, des substances de nature à les polluer, aura laissé s’infiltrer de telles substances ou en aura déposées ou épandues hors des eaux, créant ainsi un risque de pollution pour les eaux (art. 6);
b. en sa qualité de détenteur d’une installation contenant des liquides de nature à polluer les eaux, n’aura pas, conformément à la présente loi, installé les appareils et aménagé les constructions nécessaires à la protection des eaux ou ne les aura pas maintenus en état de fonctionner, polluant ainsi l’eau ou créant un risque de pollution (art. 22).
3.2
A titre liminaire, on précisera les faits à juger. A ce sujet, si l'on se réfère à ce qui a été constaté le 9 mars 2011 par la Municipalité de [...] dans sa lettre au tribunal (P. 76) et le 28 mars 2012 par le SESA (P. 95), l'activité délictueuse de M._ pourrait avoir perduré au-delà du 3 novembre 2007. Ces faits ne sont toutefois pas établis (jugement p. 23). En tout état cause, à défaut d'aggravation de l'accusation, les faits examinés sont ceux retenus dans l'ordonnance de renvoi du 31 mai 2010 par laquelle l'intéressé a été renvoyé devant le premier juge.
En l'espèce, dès juin 2004 et jusqu'au 3 novembre 2007 (date du dernier contrôle selon l'ordonnance de renvoi) – les faits antérieurs étant prescrits dans la mesure où il seraient constitutifs de contravention (jugement p. 23) –M._ a poursuivi son activité d'entreposage, de démolition et de récupération de véhicules et de déchets sur le site de son entreprise, alors que les installations n'étaient pas conformes à la législation cantonale sur l'aménagement du territoire, alors qu'il ne disposait plus d'autorisation d'exercer l'activité de commerce d'occasion, sa patente lui ayant été retirée par décision définitive du 11 mai 1995, et qu'il avait été sommé par la Municipalité de [...] d'évacuer les véhicules et les déchets au plus tard le 30 juin 2007 (P. 32/1 et P. 46/4); jugement ch. 4 pp. 18 et 19).
Aux débats d'appel, le prévenu est revenu sur plusieurs points.
a) D'abord le prévenu soutient que le site était déjà pollué à son arrivée. C'est exact. Un rapport d'AB Conseils SA du 22 mai 2000 le relève à son
chiffre 4 (P. 7/1, no 2). Cela ne signifie évidemment pas que le prévenu peut s'affranchir des mesures de protection. De plus, comme on va le constater sous lettre b) ci-dessous, le prévenu a bel et bien eu des activités de nature à entraîner des pollutions. Ce moyen doit donc être écarté.
b) Le prévenu prétend ensuite ne plus traiter des déchets et des véhicules sur son site, mais se limiter à les transporter. Ses allégations sont toutefois démenties par les pièces concordantes au dossier. On se réfèrera en particulier à une lettre du 18 février 2004 adressée par le SESA à l'autorité judiciaire administrative saisie à l'époque d'un recours interjeté par l'intéressé, dont il ressort que
"[...]Les activités de M._ ont bien engendré une pollution du site, dûment constatée à plusieurs reprises et à plusieurs endroits. Elles constituent une menace concrète pour l'environnement. La poursuite de ces activités ne peut que conduire à une aggravation de la situation [...]"
(P. 7 du Bordereau du 12 mars 2004). On retiendra aussi que deux gendarmes se sont rendus sur place le 23 février 2004 et ont vu des écoulements d'hydrocarbures et de divers produits pouvant altérer l'eau, ainsi que, sur tout le site, des véhicules hors d'usage et des moteurs stockés sans précaution particulière (P. 46). On relèvera, enfin, qu'une inspection locale effectuée le 14 mars 2007 a montré que le site était laissé à l'abandon que des véhicules et des détritus étaient toujours stockés à même le sol, et que des traces d'hydrocarbures étaient visibles sur tout le terrain loué par M._ (P. 46 p. 4). Ces faits sont encore corroborés par les indications fournies aux débats de première instance par [...] (jugement p. 6).
c) Le prévenu prétend encore qu'une sorte de "Pampers" situé sous le terrain occupé empêche toute pollution. Certes, le rapport mentionné sous lettre a) ci-dessus relève que la présence d'un niveau imperméable à la base des matériaux pollués rend le risque d'atteinte aux eaux souterraines faible à nul. Toutefois, les constatations concrètes et ultérieures du Service des eaux, sols et assainissement ont montré que les activités du prévenu ont aggravé la pollution du site et constituent une menace concrète pour l'environnement, notamment les eaux (P. 7/1, no 6 et 7).
Or à l'aune de l'art. 70 al. 1 LEaux (let. b), un risque de pollution suffit pour réaliser une infraction à la LEaux qui est dès lors réalisée.
L'appel de M._ est donc mal fondé sur ce point.
4.
L'appelant demande à être libéré de l'infraction de contrainte sur la personne d' B._.
4.1
D'après l'art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d’un dommage sérieux, ou en l’entravant de quelque autre manière dans sa liberté d’action, l’aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
S'agissant d'une infraction de résultat, la contrainte est consommée dès lors que la victime adopte, au moins en partie, le comportement voulu par l'auteur (ATF 129 IV 262 = JT 2005 IV 207).
Lorsque l'auteur menace la victime d'un dommage sérieux, il porte atteinte à sa liberté d'action en l'amenant, par la perspective d'un dommage à supporter, à adopter un comportement auquel elle ne se serait pas décidée sans la menace (ATF 96 IV 58 = JT 1971 IV 54).
Il peut également y avoir contrainte lorsque l’auteur entrave sa victime "de quelque autre manière” dans sa liberté d’action. Cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive; n’importe quelle pression de peu d’importance ne suffit pas. Il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d’un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l’entraver d’une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d’action. Il s’agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la Ioi (ATF 119 IV 301 c. 2a et les références citées).
Selon la jurisprudence, la contrainte n’est contraire au droit que si elle est illicite. Une contrainte est illicite lorsque le moyen ou le but est contraire au droit ou lorsque le moyen est disproportionné pour atteindre le but visé ou encore lorsqu’un moyen de contrainte conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue, au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux mœurs. Cette dernière hypothèse est en particulier réalisée lorsqu’il n’y a pas de rapport entre l’objet de la menace et l’exigence formulée (ATF 106 IV 125 c. 3a, ATF 105 IV 120 c. 2b, ATF 101 lV47 c. 2b et les arrêts cités).
4.2
Aux débats d'appel, le prévenu a repris les arguments présentés en première instance. Il a admis avoir attendu B._ dans l’escalier de son immeuble, désireux selon ses dires de lui faire signer un document, celle-ci refusant tous les entretiens qu’il lui proposait. Il n'avait pas empoigné la plaignante. Celle-ci avait trébuché en reculant et il n'avait fait que de la retenir. La plaignante était hystérique; elle avait signé le document après en avoir déchiré un ou deux.
La thèse de l'appelant n'est pas crédible. On ne voit, en effet, pas pourquoi la plaignante – qui était hystérique d'après le prévenu – aurait accepté d'elle-même de signer un document alors qu'elle venait d'en déchirer un ou deux autres. Il sied de retenir, avec le premier juge, que le prévenu a violenté la plaignante pour lui faire signer un document et que celle-ci a reculé parce qu'elle avait peur de lui. Cette version des faits paraît du reste plausible tant au vu de la différence de constitution physique des protagonistes (l'intéressé est grand et fort alors que la plaignante est petite et frêle), que compte tenu de la personnalité des parties en présence (le prévenu est sûr de lui alors que la plaignante est timide et réservée).
4.3
En usant de violence pour amener la plaignante à faire un acte qu'elle n'aurait pas fait autrement, l'intéressé s'est rendu coupable de contrainte au sens de l'art. 181 CP, comme le retient à bon droit le jugement attaqué. Sur cet aspect également, l'appel de M._ paraît mal fondé.
5
.
L'appelant ne remet pas en cause la peine infligée. La cour de céans peut donc s'abstenir d'examiner en détail cette question (art. 404 al. 1 CPP) et se référer au jugement attaqué qui est très bien motivé (jugement p. 27 ch. 19). Fixant à 100 jours-amende à 30 fr. la peine à infliger à l'intéressé, l'autorité n'a pas abusé de son large pouvoir d'appréciation, et n'a ignoré aucun des critères déterminants consacrés à l'art. 47 CP. Ladite peine est également conforme à l'art. 34 CP.
Le pronostic sur le comportement futur de M._ n'apparaît pas défavorable dès lors les faits sont relativement anciens, que les relations entre le prévenu et B._ ne semblent plus émaillées de fait relevant de la justice pénale, et que le site “ [...]” ne paraît plus vraiment en activité. C'est donc aussi à bon droit qu'un sursis a été accordé au prévenu (art. 42 CP). La durée du délai d'épreuve (4 ans) n'est en outre pas critiquable (art. 44 CP).
Enfin, l'amende de 600 fr. a été prononcée à titre de sanction immédiatement sensible, l'a été conformément à l’article 42 al. 4 CP et 106 CP. Convertible en cas de défaut fautif de paiement, en vingt jours de peine privative de liberté de substitution, elle est inférieure au 20 % de la somme des peines comptée en jours (ici, 120 jours). Le taux de conversion ne prête pas non plus le flanc à la critique (ATF 135 IV 188 c. 3.4).
En définitive, la peine infligée doit être confirmée; elle est d'ailleurs plutôt clémente au regard des antécédents de l'intéressé.
6.
L'appelant conteste les dépens pénaux alloués à la plaignante, par 5'400 fr. Il prétend que cette indemnité n'a pas été chiffrée durant la procédure, cela en violation de l'art. 433 al. 2 CPP, et que la demande y relative est irrecevable.
6.1
L'art. 433 al. 2 CPP prévoit que la partie plaignante qui demande au prévenu une indemnité de dépens est tenue de chiffrer ses prétentions et de les justifier, à défaut de quoi l'autorité pénale n'entre pas en matière sur la demande.
Dans un arrêt 1B_475/2011 du 11 janvier 2012, la I
ère
Cour de droit public du Tribunal fédéral a précisé que :
L'art. 433 CPP, qui impose au plaignant de chiffrer ses prétentions, s'explique par le fait que la maxime d'instruction ne s'applique pas à l'égard de la partie plaignante : celle-ci doit demeurer active et demander elle-même une indemnisation
(c. 2.2 et réf. cit.).
6.2
Au terme de sa plaidoirie de première instance, le conseil de la plaignante a uniquement demandé acte de ses réserves civiles. Après la clôture des débats, il a envoyé spontanément au tribunal, par fax, la copie d’une note d’honoraires datée du même jour, soit du 4 avril 2012, ascendant à un peu plus de 5'400 fr. (P. 100). Il n'en a pas adressé copie à sa partie adverse.
Prenant connaissance de cette liste, le tribunal en a déduit qu’M._ avait entendu demander des dépens pénaux et acte de ses réserves civiles pour le surplus (jugement p. 29, ch. 21), sans toutefois interpeller le prévenu.
Le fax litigieux ayant été adressé au tribunal après la clôture des débats, le premier juge n'aurait pas dû le prendre en considération et se borner à donner acte à la plaignante de ses réserves civiles contre le prévenu, comme demandé en plaidoirie. En accordant des dépens nonobstant la tardiveté de la requête chiffrée, le tribunal a non seulement a violé l'art. 433 al. 2 CPP, mais également le droit d'être entendu de l'appelant, celui-ci n'ayant pas eu l'occasion de se déterminer sur le montant réclamé avant qu'il soit statué.
6.3
L’appel de M._ est donc bien fondé sur ce point. Il doit être partiellement admis en ce sens que l’appelant n’est pas reconnu débiteur de la plaignante de la somme de 5’400 fr. à titre de dépens.
7.
L’appelant a pris des conclusions tendant à l'octroi d'une indemnité pour ses frais de défense.
L'art. 429 al. 1 let. a CPP prévoit que si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. Cette disposition s'applique aux voies de recours (y inclus l'appel) en vertu de l'art. 436 al. 1 CPP. L'art. 436 al. 2 CPP spécifie en outre pour la procédure de recours que si ni un acquittement total ou partiel, ni un classement de la procédure ne sont prononcés mais que le prévenu obtient gain de cause sur d'autres points, il a droit à une juste indemnité pour ses dépenses.
Dans un arrêt récent (TF du 14 avril 2012 6B_753/2011), le Tribunal fédéral précise que l'indemnité selon les art. 429 al. 1 let. a CPP et 436 al. 2 CPP concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix. Dans le cas d'un prévenu qui a bénéficié de l'assistance judiciaire par le biais d'un défenseur d'office, les frais imputables à la défense d'office font partie des frais de procédure (art. 422 al. 1 let. a CPP), le prévenu n'ayant en principe pas à supporter les frais de afférents à la défense d'office. Il ne saurait donc prétendre à une indemnité pour ses frais de défense, les conditions de l'art. 429 al.1 let a et 436 al. 2 CPP n'étant pas réalisées. Quoi qu'il en soit, une indemnité selon l'art. 429 al.1 let a et 436 al. 2 CPP ne saurait être accordée conditionnellement, pour le cas où la situation visée à l'art. 135 al. 4 CPP se réaliserait (c.1 et réf. cit.).
En l'espèce, compte tenu du sort de l'appel, l'indemnité ne pourrait concerner que les frais d'avocat. Or d'après la jurisprudence citée, une indemnité de l'art. 429 CPP concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix. Ce droit n'est donc pas ouvert en faveur de l'appelant, qui était assisté par un conseil d'office.
8.
En définitive, l'appel de M._ doit être partiellement admis. Le jugement attaqué doit être réformé au chiffre VIII de son dispositif dans le sens des considérants, et confirmé pour le surplus.
Vu l’admission partielle de l’appel sur les conclusions civiles, un cinquième des frais d’appel pourra être laissé à la charge de l’Etat (art. 428 al. 1 CPP).
9.
Le défenseur de la plaignante a conclu au versement de dépens en produisant à temps une liste des opérations (art. 433 al. 2 CPP). Il convient de lui accorder des dépens réduits pour tenir compte du fait que l'intimée n'obtient pas entièrement gain de cause en appel (TF du 22 juin 2012 6B_159/2012, c.2.2.). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
ba48d539-5cf6-4682-8b90-442e1276b3af | En fait :
A.
Par jugement du 8 mars 2012, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a notamment condamné par défaut T._ pour infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants, contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants, et infraction à la loi fédérale sur les étrangers à une peine privative de liberté de 30 mois, sous déduction de 38 jours de détention avant jugement et à une amende de 200 fr., peine partiellement complémentaire à celle infligée le 1
er
avril 2008.
Par jugement sur relief du 11 décembre 2012, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a préalablement admis la demande de nouveau jugement présentée par A.I._, alias T._ (I), mis à néant le jugement du 8 mars 2012 et a repris l'instruction de la cause (II), et dit que les frais suivaient le sort de la cause au fond. Le Tribunal correctionnel a principalement constaté que A.I._, alias T._, s'était rendu coupable d'infraction à la Loi fédérale sur les stupéfiants, contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants, infraction à la Loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et infraction à la loi fédérale sur les étrangers (I), l'a condamné à une peine privative de liberté de 30 mois, sous déduction de 107 jours de détention avant jugement et à une amende de 200 fr., peine partiellement complémentaire à celle infligée le 1
er
avril 2008 (II), a dit qu'à défaut de non-paiement fautif de l'amende, la peine privative de liberté de substitution sera de 2 jours (III), a révoqué le sursis partiel portant sur une année de peine privative de liberté qui lui a été accordé le 1
er
avril 2008 et a ordonné l'exécution de cette peine (IV), a ordonné à toutes fins utiles son maintien en détention pour motifs de sûreté (V), a ordonné la confiscation et la dévolution à l'Etat de 200 fr. 45, la confiscation et la destruction de deux téléphones portables séquestrés sous fiche 1748 (VI), a mis une partie des frais de la cause par 15'353 fr. 90 à sa charge, y compris les indemnités allouées à ses défenseurs d'office, à savoir 588 fr. 60 pour Me Ludivine Livet, 558 fr. 60 pour Me Christian Bettex et 5'131 fr. 10 pour Me Vincent Demierre (VII) et a dit que le remboursement à l'Etat des indemnités allouées sous chiffre VI (recte: VII) ne pourra être exigée de A.I._, alias T._, que dans la mesure où sa situation économique le permettra.
B.
Le 13 décembre 2010, A.I._, alias T._, a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d'appel du 7 janvier 2013, il a conclu à ce que le jugement du 11 décembre 2012 soit modifié en ce sens qu'il est condamné à une peine privative de liberté sensiblement inférieure à 30 mois, une partie de cette peine étant suspendue, avec un délai d'épreuve de 3 ans et que le sursis accordé par jugement du 1
er
avril 2008 ne soit pas révoqué.
Par courrier du 14 janvier 2013, le Ministère public s'en est remis à justice quant à la recevabilité de l'appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
A.I._, alias T._, est né le 5 août 1979 au Nigéria, pays dont il est originaire. Il a effectué sa scolarité et son école secondaire dans ce pays puis y a pratiqué le football à un niveau semi-professionnel. Arrivé en Suisse, il a déposé le 1
er
mars 2006 une demande d'asile définitivement rejetée le 31 mars de la même année. Après avoir purgé une partie de la peine ferme à laquelle il a été condamné le 1
er
avril 2008, A.I._ a quitté à une date indéterminée la Suisse à destination de la France. Après avoir été expulsé de ce pays, il est revenu en Suisse. Il a été détenu préventivement du 23 février 2010 au 1
er
avril 2010 à la suite des faits objets de la présente procédure. Il a ensuite quitté la Suisse pour se rendre en Espagne où il a travaillé dans la restauration puis dans le milieu agricole. Le 30 avril 2011, il s'est marié avec Z._, ressortissante helvétique. De cette union est issue une fille née le 6 août 2012. L'épouse du prévenu réside et travaille en Suisse. Elle a effectué de fréquents déplacements en Espagne pour l'y rejoindre. A.I._ a été appréhendé le 4 octobre 2012 alors qu'il venait en Suisse voir son épouse et sa fille. Il a déposé, le 9 octobre 2012, une demande de nouveau jugement. Depuis cette date, il a été placé en détention pour motifs de sûreté, puis à compter du 30 octobre 2012, il est passé au régime de l'exécution anticipée de peine. Dans un courrier du 19 mars 2013 adressé à la Cour de céans, l'épouse de l'appelant n'a pas contesté la culpabilité de son mari mais a expliqué que celui-ci travaillait désormais honnêtement et qu'il était un père de famille attentionné et aimant. A l'audience, A.I._ a précisé que sa femme et sa fille venaient lui rendre visite en prison une fois par semaine à raison d'une heure.
D'après l'extrait de son casier judiciaire, A.I._, alias T._, a été condamné le 23 juillet 2007 par la Préfecture de Lausanne pour délit contre la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers à une amende de 600 fr. avec sursis durant un an. Le 1
er
avril 2008, le Tribunal correctionnel de Lausanne l'a condamné pour délit contre la loi fédérale sur les stupéfiants (ci-après : LStup), contravention à la LStup et délit contre la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers à une peine privative de liberté de deux ans dont un an avec sursis et un délai d'épreuve de cinq ans, le sursis accordé le 23 juillet 2009 étant révoqué.
Pour les besoins de la présente cause, A.I._ a été détenu avant jugement du 23 février au 1
er
avril 2010, puis du 4 octobre au 29 octobre 2012. Enfin, il est en exécution anticipée de peine depuis le 30 octobre 2012.
2.
a)
Alors qu'il était sans permis de séjour, A.I._ est revenu clandestinement en Suisse en 2009. Il a séjourné illégalement dans ce pays jusqu'à son interpellation survenue le 23 février 2010.
b)
Depuis son retour en Suisse et jusqu'à son interpellation le 23 février 2010, A.I._ a fumé une à deux fois de l'herbe cannabis.
c)
En 2007, et pour une période de 5 mois au moins, A.I._ a vendu à raison d'une boulette de 0.8 gramme par semaine à O._. Entre 2009 et 2010, l'appelant lui a vendu une boulette de 0.5 gramme. Le prévenu lui a donc vendu 16.5 grammes au total. Entre février 2009 et février 2010, l'appelant a vendu dix boulettes de 0.8 gramme à K._, soit 8 grammes. Entre mars et mai 2009, puis entre août 2009 et janvier 2010, il a vendu dix-huit boulettes entre 0.5 et 0.6 gramme à J._, soit au moins 9 grammes. De décembre 2009 à février 2010, c'est six boulettes d'environ 0.7 gramme pièce qui ont été vendues à W._, soit 4.2 grammes. Ces faits sont admis par A.I._.
Ce dernier a également reconnu avoir livré, entre le 31 décembre 2009 et le 23 février 2010, 2 fingers de cocaïne à S._. Ainsi, A.I._ a livré à S._ 15 grammes, le 23 février 2010, et 5 grammes antérieurement, ce qui a été confirmé par les déclarations de ce dernier et la perquisition dans son appartement. Les analyses effectuées par l'Institut de police scientifique ont déterminé que les 15.1 grammes retrouvés chez S._ présentaient un taux de pureté de 62.8 %.
L'appelant a vendu au total et au minimum 57.7 grammes de cocaïne brute. Compte tenu du taux de pureté de 62.8 % pour le dernier finger de 15 grammes et du taux de pureté moyen pour les autres transactions, c'est une quantité totale de 22.54 grammes de cocaïne pure que A.I._ a vendue. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (cf. art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Eugster, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Bâle 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
L'appel est limité à l'examen de la culpabilité de A.I._ et de la quotité de la peine (art. 399 al. 3 let. a et al. 4 let. a et b CPP).
4.
A.I._ soutient n'avoir pas minimisé les quantités de stupéfiants vendues contrairement à ce que les premiers juges ont retenu.
4.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011,
n. 19 ad art. 398 CPP).
La présomption d'innocence, qui est garantie par l'art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38, c. 2a).
4.2
En l'espèce, bien que l'appelant ait minimisé pendant l'instruction ses ventes de boulettes, il a reconnu à l'audience de jugement tant dans leur principe que dans leur quotité les mises en causes de O._, J._, W._ et K._, en qualifiant pour l'essentiel les quantités de "possible". En cours d'enquête, il a également rapidement reconnu son implication dans la fourniture de deux fingers de cocaïne à S._ (PV aud. 3, R 2; PV aud. 5, R 4). Ainsi, l'appréciation des premiers juges selon laquelle l'appelant a minimisé son implication surtout en ce qui concerne le remise de stupéfiants à O._ et S._ doit être nuancée.
5.
L'appelant soutient que la quantité de drogue pure vendue doit être estimée à 22.54 grammes et non à 36.23 grammes comme retenu par les premiers juges.
5.1
La jurisprudence et la doctrine considèrent que la question du taux de pureté est une question d'appréciation des preuves. En l'absence d'autres éléments de preuves et dès lors que la drogue n'est plus disponible pour une analyse, le taux de pureté peut, sans arbitraire, être déterminé sur une base statistique en référence au degré de pureté habituel à l'époque du trafic (TF 6B_600/2011 du 18 octobre 2011 c. 1.3; Corboz, Les infractions en droit suisse, vol II, 3
e
éd., Berne 2010, n. 86 ad art. 19 LStup et les références citées).
5.2
En l'occurrence, l'appelant a vendu, en 2007, pour une période de 5 mois, à raison d'une boulette de 0.8 gramme par semaine à O._, 16 grammes au total. Selon les tabelles établies par le Centre universitaire romand, le taux moyen de pureté en Suisse en 2007 pour une quantité vendue inférieure à 1 gramme était de 35 %, soit 5.6 grammes net. S'agissant des 0.5 gramme vendu entre 2009 et 2010, le taux moyen était de 27 %, soit 0.13 grammes net.
L'appelant a vendu dix boulettes de 0.8 gramme à K._, pour l'essentiel sur l'année 2009, soit 8 grammes brut et 2.24 grammes net selon un taux moyen de pureté de 28 %.
Entre mars et mai 2009, puis entre août 2009 et janvier 2010, il a vendu dix-huit boulettes entre 0.5 et 0.6 gramme à J._, soit au moins 9 grammes brut, correspondant à 2.52 grammes net selon un taux moyen de pureté de 28 %.
De décembre 2009 à février 2010, il a vendu six boulettes d'environ 0.7 gramme pièce à W._, soit 4.2 grammes brut, correspondant à 1.13 grammes net selon un taux moyen de 27 %; l'activité délictuelle s'étant déroulée à cheval entre 2009 et 2010, le taux le plus favorable à l'appelant est retenu.
Enfin, s'agissant des deux fingers vendus à S._, le finger de 5 grammes a été livré antérieurement. Il n'a dès lors pas été retrouvé lors de la perquisition de sorte que le taux de pureté moyen doit également s'appliquer pour ce finger. La livraison ayant eu lieu en 2009, c'est un taux de pureté moyen de 30 % qui sera retenu ce qui correspond à 1.5 grammes net pour 5 grammes vendus. Le taux de 62.8 % est ainsi applicable uniquement au dernier finger de 15 grammes, ce qui correspond à 9.42 grammes net.
Par conséquent, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la quantité totale de drogue pure vendue par l'appelant s'élève à 22.54 grammes.
6.
L'appelant conteste la quotité de la peine, le genre de peine n'étant pas remis en question.
6.1
Dans la teneur en vigueur jusqu'au 30 juin 2011, l'art. 19 ch. 1 aLStup (Loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes; RS 812.121) stipulait qu'était punissable d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire celui qui notamment, sans droit, cultive, fabrique ou produit de toute autre manière des stupéfiants (let. a), entrepose, expédie, transporte, importe exporte des stupéfiants ou les passe en transit (let. b), aliène ou prescrit des stupéfiants, en procure de toute autre manière à un tiers ou en met dans le commerce (let. c), possède, déteint ou acquiert des stupéfiants ou s'en procure de toute autre manière (let. d). Au terme de l'art. 19 al. 2 let. a aLStup, l'auteur de l'infraction est puni d'une peine privative de liberté d'un an au moins, cette sanction pouvant être cumulée avec une peine pécuniaire s'il sait ou ne peut ignorer que l'infraction peut directement ou indirectement mettre en danger la vie de nombreuses personnes. L'art. 19 LStup dans sa teneur au 1
er
juillet 2011 n'est pas plus favorable au prévenu de sorte qu'il y a lieu d'appliquer la disposition en vigueur au moment des faits conformément au principe de la lex mitior consacré à l'art. 2 al. 2 CP.
6.2
6.2.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_335/2012 du 13 août 2012 c. 1.1 et les références citées).
6.2.2
En matière d'infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants, le Tribunal fédéral a, en outre, dégagé des principes spécifiques.
Même si la quantité de la drogue ne joue pas un rôle prépondérant, elle constitue sans conteste un élément important. Elle perd cependant de l'importance au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la limite à partir de laquelle le cas doit être considéré comme grave au sens de l'art. 19 ch. 2 LStup. Il en va de même lorsque plusieurs des circonstances aggravantes prévues à l'art. 19 ch. 2 LStup sont réalisées. Le type de drogue et sa pureté doivent aussi être pris en considération. Si l'auteur sait que la drogue est particulièrement pure, sa culpabilité sera plus grande; en revanche, sa culpabilité sera moindre s'il sait que la drogue est diluée plus que normalement (ATF 122 IV 299 c. 2 c). Le type et la nature du trafic en cause sont aussi déterminants. L'appréciation est différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, il importera de déterminer la nature de sa participation et sa position au sein de l'organisation : un simple passeur sera ainsi moins coupable que celui qui joue un rôle décisif dans la mise sur pied des opérations et qui participe de manière importante au bénéfice illicite (ATF 121 IV 202 c. 2d/cc). L'étendue géographique du trafic entrera également en considération. Un trafic purement local sera en règle générale considéré comme moins grave qu'un trafic avec des ramifications internationales. Le délinquant qui traverse les frontières, qui sont surveillées, doit en effet déployer une énergie criminelle plus grande que celui qui transporte des drogues à l'intérieur du pays et qui limite son risque à une arrestation fortuite lors d'un contrôle; à cela s'ajoute que l'importation en Suisse de drogues a des répercussions plus graves que le seul transport à l'intérieur des frontières. Enfin, le nombre d'opérations constitue un indice pour mesurer l'intensité du comportement délictueux; celui qui écoule une fois un kilo d'héroïne sera en principe moins sévèrement puni que celui qui vend cent grammes à dix reprises. Outre les éléments qui portent sur l'acte lui-même, le juge doit prendre en considération la situation personnelle du délinquant, à savoir sa vulnérabilité face à la peine, ses obligations familiales, sa situation professionnelle, les risques de récidive, etc. Les mobiles, c'est-à-dire les raisons qui ont poussé l'auteur à agir, ont ainsi une influence sur la détermination de la peine. Il conviendra ainsi de distinguer le cas de l'auteur qui est lui-même toxicomane et qui agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain. Il faudra enfin tenir compte des antécédents, qui comprennent aussi bien les condamnations antérieures que les circonstances de la vie passée. Enfin, le comportement du délinquant lors de la procédure peut aussi jouer un rôle. Le juge pourra atténuer la peine en raison de l'aveu ou de la bonne coopération de l'auteur de l'infraction avec les autorités policières ou judiciaires notamment si cette coopération a permis d'élucider des faits, qui, à ce défaut, seraient restés obscurs (TF 6B_567/2012 du 18 décembre 2012 c. 3.2; ATF 122 IV 299 c. 2; ATF 121 IV 202 c. 2d/aa; ATF 118 IV 342 c. 2d).
6.2.3
Lorsque le juge est en présence de plusieurs infractions, dont l'une au moins a été commise avant une précédente condamnation et une autre au moins après celle-ci, il y a, d'une part, un concours rétrospectif et, d'autre part, une infraction nouvelle, qui font l'objet du même jugement. La doctrine et la jurisprudence parlent de concours rétrospectif partiel. Lorsque le juge est en présence de deux infractions dont l'une a été commise avant une précédente condamnation et l'autre après celle-ci, il faut donc procéder comme suit pour fixer la peine : d'abord, il faut déterminer l'infraction pour laquelle la loi prévoit la peine la plus grave, puis évaluer la sanction qu'elle mérite dans le cas concret. Il faut ensuite l'augmenter en fonction de la peine évaluée pour l'autre infraction à juger. L'élément de la peine d'ensemble relatif à l'acte en concours rétrospectif sera déterminé comme une peine additionnelle. Cette méthode permet d'appliquer l'art. 49 al. 1 CP sans négliger l'art. 49 al. 2 CP. Sur le plan formel, la sanction est toujours une peine d'ensemble mais, sur celui de sa quotité, il est tenu compte du concours rétrospectif (ATF 127 IV 196 c. 2 p. 107; 116 IV 14 c. 2b p. 17 et les références citées).
6.3
En l'espèce, il s'agit de fixer une nouvelle peine compte tenu de la quantité de 22.54 grammes de drogue pure retenue. La culpabilité de l'appelant est lourde. La quantité de cocaïne vendue, supérieure à 18 grammes, relève en effet du cas grave. A charge, il convient de relever que sans source de revenu en Suisse, il s'est livré au trafic de stupéfiant. Son activité délictueuse a débuté comme celle d'un dealer de rue. Par la suite, son activité délictueuse s'est aggravée dès lors qu'il a fourni deux fingers de 5 et 15 grammes à un autre trafiquant. Condamné une première fois le 1
er
avril 2008 pour infraction à la LStup, il s'est livré au trafic de stupéfiant dès sa sortie de prison, prenant l'initiative de contacter ses anciens clients. Il n'a donc absolument pas tenu compte de la condamnation pourtant relativement lourde qui avait été prononcée, à savoir une peine privative de liberté de deux ans, dont un an ferme. Ce n'est que son interpellation en février 2010 qui a permis de mettre un terme à son activité délictueuse. Il est en outre récidiviste en matière d'infraction à la législation sur le séjour des étrangers. Le concours d'infractions sera retenu à charge.
A décharge, la Cour retiendra les regrets présentés par l'appelant devant les premiers juges et réitérés devant elle, regrets qui sont apparus sincères. En outre, la collaboration de l'appelant s'est améliorée lors de l'audience de jugement. A cet égard, il faut préciser qu'il a rapidement reconnu son implication dans la fourniture de fingers de cocaïne. Même s'il a durant l'enquête minimisé ses ventes de boulettes, il les a reconnues en audience dans leur principe.
Compte tenu de tous ces éléments, une peine privative de liberté de 24 mois est adéquate pour sanctionner son comportement délictueux. Cette peine doit être partiellement complémentaire à celle prononcée le 1
er
avril 2008 puisque l'appelant a notamment vendu des stupéfiants à O._, durant 5 mois en 2007.
7.
Il convient d'examiner si l'appelant peut être mis au bénéfice du sursis.
7.1
D'après l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits. Il découle de l’art. 42 al. 2 CP que le sursis total est exclu sauf circonstances particulièrement favorables si, durant les cinq ans qui ont précédé l’infraction, l’auteur a été condamné, à une peine privative de liberté ferme, ou avec sursis de six mois au moins ou à une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins. Aux termes de l'art. 43 al. 1 CP, le juge peut suspendre partiellement l’exécution d’une peine pécuniaire, d’un travail d’intérêt général ou d’une peine privative de liberté d’un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute.
Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, respectivement du sursis partiel, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit accorder le sursis. Celui-ci est ainsi la règle, dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable et hautement incertain (TF 6B_88/2011 du 18 avril 2011 c. 2.1 et les références citées). En d'autres termes, la loi présume l'existence d'un pronostic favorable et cette présomption doit être renversée par le juge pour exclure le sursis. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste (ATF 135 IV 180 c. 2.1; 135 IV 152 c. 3.2.1 non publié; Kuhn, Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 17 ad art. 42). Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents. En effet, s'il n'existe aucune perspective que l'auteur puisse être influencé de quelque manière par un sursis complet ou partiel, la peine doit être entièrement exécutée (ATF 134 IV 1 précité, c. 5.3.1, p. 10).
7.2
En l'espèce, le sursis total est exclu : l'appelant a récidivé juste après avoir purgé un an de détention et aucune circonstance particulièrement favorable n'est réalisée. Le sursis partiel ne saurait être envisagé. Cette récidive et l'intensité plus forte de l'activité délictuelle notamment conduisent à poser un pronostic défavorable. Le fait que l'appelant a changé, après la commission de ces infractions, de mode de vie et qu'il a exprimé des regrets n'est pas suffisant pour inverser ce pronostic qui reste défavorable.
8.
L'appelant conteste la révocation du sursis partiel accordé le 1
er
avril 2008.
8.1
Lorsque le juge est appelé à connaître d'un crime ou d'un délit que l'auteur a commis après une précédente condamnation à une peine assortie du sursis, il est également compétent pour statuer sur la révocation de ce dernier (art. 46 al. 3 CP). Il doit donc examiner si les conditions d'une révocation sont réunies, laquelle postule que le crime ou le délit dont il est appelé à connaître ait été commis pendant le délai d'épreuve du sursis antérieur et qu'il y ait dès lors lieu de prévoir que l'auteur commettra de nouvelles infractions (art. 46 al. 1 CP). Cette dernière condition implique l'existence d'un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné (ATF 134 IV 140 c. 4.3). Elle correspond donc à l'une des conditions de l'octroi du sursis, de sorte que, comme dans ce dernier cas, le pronostic à émettre doit reposer sur une appréciation d'ensemble de tous les éléments pertinents (ATF 134 IV 140 c. 4.4 et les arrêts cités).
Dans l'appréciation des perspectives d'amendement à laquelle il doit procéder pour décider de la révocation d'un sursis antérieur, le juge doit tenir compte des effets prévisibles de l'octroi ou non du sursis à la nouvelle peine. Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L'inverse est également admissible : si le sursis précédent est révoqué, l'exécution de la peine qui en était assortie peut conduire à nier l'existence d'un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (ATF 134 IV 140 c. 4.5 ). Ainsi, un critère déterminant pour juger du risque de réitération et, partant, pour poser le pronostic prévu par la loi est celui de l'effet de choc et d'avertissement (
Warnungswirkung
) issu de la condamnation précédente, y compris en ce qui concerne l'aménagement ultérieur de la vie de l'intéressé; s'il est avéré, un tel effet constitue un facteur favorable – même s'il n'est pas déterminant à lui seul – dans l'examen du pronostic (cf. ATF 134 IV 140 c. 5.3).
8.2
En l'espèce, l'appelant a récidivé juste après sa sortie de détention. Il a, toutefois, par la suite, visiblement changé de vie et d'attitude. Il s'est marié, et est père d'un enfant, ce qui semble avoir été suffisant pour le détourner de la délinquance depuis 2010. Il est au bénéfice d'un permis de séjour en Espagne où il travaillait jusqu'à son interpellation. Il a exprimé des regrets qui ont paru sincères. Rapidement après son arrestation, il a demandé de passer en exécution de peine. Compte tenu de l'effet choc de cette deuxième condamnation, l'effet dissuasif paraît suffisant et la révocation du sursis n'apparaît pas nécessaire. Cependant en application de l'art. 46 al. 2 CP, le délai d'épreuve sera prolongé de la moitié de sa durée, soit jusqu'à 7.5 ans.
9.
Une erreur de plume s'est glissée au chiffre VIII du dispositif du Tribunal correctionnel de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, en ce sens qu'il ne s'agit pas des indemnités allouées sous chiffre VI mais bien celles allouées sous chiffre VII dont le remboursement ne pourra être exigé de A.I._ que dans la mesure où sa situation économique le permettra. Le dispositif sera par conséquent modifié d'office.
10.
En conséquence, l'appel est partiellement admis.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel, par 2'160 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1]), ainsi que l'indemnité allouée au défenseur d'office de A.I._ seront mis par un tiers à la charge de ce dernier, le solde étant laissé à la charge de l'Etat.
Vu la complexité de la cause et la liste des opérations produite, il convient d'admettre 14 heures pour l'exercice des droits de la défense. S'agissant des deux déplacements à la prison de la Croisée, ceux-ci sont dédommagés forfaitairement par 120 fr. pour les avocats. D'après la jurisprudence, ce forfait vaut pour tout le canton et couvre les kilomètres et le temps du déplacement aller et retour (CREP du 26 décembre 2012/844; Note 6.6 du Procureur général sur la fixation et le calcul des indemnités des conseils d'office du 17 janvier 2012). Ainsi, l'indemnité de défense d'office s'élèvera à 2'520 fr., plus 240 fr. pour les déplacements, plus 50 fr. de débours, plus la TVA par 224 fr. 80, soit à 3'034 fr. 80 au total.
A.I._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat l'indemnité allouée à Me Vincent Demierre que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
baa1213a-95ec-4fb4-80da-4d9db2d2a3df | En fait :
A.
a)
Par ordonnance pénale du 1
er
novembre 2012, le Ministère public de l’arrondissement de La Côte a reconnu L._ coupable d’injure, de voies de fait et de tentative de contrainte et l’a condamné à trente jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à cinquante francs, avec sursis pendant deux ans, et à une amende de cinq cents francs, peine convertible en dix jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif de l’amende, les frais de procédure par six cents francs étant mis à la charge de L._.
Les faits retenus par cette ordonnance sont les suivants :
A [...], le mardi 24 juillet 2012 vers 14h15, fâché par le bruit provoqué par les rénovations entreprises dans le garage sis au-dessous de son appartement, L._ s’en est pris au plaignant D._, qui travaillait dans ledit local. L._ s’est très vite énervé et a injurié D._ en le traitant de « trou du cul », d’« enculé » et de « bâtard ». Il a également menacé de mort ce dernier dans le cas où il le dénoncerait auprès de la police. Enfin, il l’a saisi par le col et lui a asséné un coup de poing au menton.
D._ a déposé plainte contre L._ le 24 juillet 2012.
b)
Par prononcé du 2 novembre 2012, le Président du Tribunal d’arrondissement de La Côte a déclaré irrecevable, l’opposition formée le
13 novembre 2012 par L._ contre cette ordonnance, pour cause de tardiveté.
Par arrêt du 17 décembre 2012 (CREP, 17 décembre 2012/797), la Chambre des recours pénale du canton de Vaud a rejeté le recours déposé par L._ le 3 décembre 2012 (I), confirmé le prononcé (II) et mis les frais de la procédure à la charge de L._ (III).
B.
a)
Le 28 mars 2013, L._ a demandé la révision de l’ordonnance pénale du 1
er
novembre 2012 en ce sens qu’il est libéré des chefs d’accusation de voies de fait et de tentative de contrainte, la peine prononcée à son encontre étant réduite en conséquence. L._ a fait valoir un moyen de preuve inconnu de l’autorité inférieure. Il a produit une lettre du 14 novembre 2012 dans laquelle une voisine, F._ - qui était à sa fenêtre le jour de l’altercation survenue le 24 juillet 2012 entre L._ et D._ - atteste du fait qu’elle n’a pas vu les protagonistes mais qu’elle les a entendus. Elle précise en particulier n’avoir entendu ni menaces de mort, ni bruit de coup et ne pas avoir vu d’hématome sur le visage de D._ le lendemain.
b)
Par courrier du 10 avril 2013, le Ministère public a renoncé à déposer des déterminations.
Invité à se déterminer sur la demande de révision, le plaignant, D._ n’a pas répondu dans le délai imparti à cet effet. | En droit :
1.
Pour être valides en la forme, les demandes de révision doivent être motivées et adressées par écrit à la juridiction d’appel, les motifs de révision devant être exposés et justifiés dans la demande (art. 411 al. 1 CPP; Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, 3
ème
édition, Schulthess § 2011, n. 2092, p. 679 et Niggli et Wiprächtiger, Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung Jungenstrafprozessordnung, Bâle 2011, n. 6 ad art. 411 CPP, p. 2731).
La requête déposée le 28 mars 2013 par L._ remplit les exigences de forme de l'art. 411 CPP.
2.
L'art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par un jugement entré en force, une ordonnance pénale, une décision judiciaire ultérieure ou une décision rendue dans une procédure indépendante en matière de mesures d'en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné. Dans cette hypothèse, la demande de révision n'est soumise à aucun délai (art. 411 al. 2 CPP).
Cette disposition reprend la double exigence posée à l'art. 385 CP selon laquelle les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être nouveaux et sérieux (FF 2006 1303 ad. art. 417 [actuel art. 410 CPP]). Les faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire lorsqu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit. Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l'état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 130 IV 72
c. 1).
Une demande de révision contre une ordonnance de condamnation doit être qualifiée d’abusive si elle repose sur des faits que le condamné connaissait initialement, qu’il n’avait aucune raison légitime de taire et qu’il aurait pu révéler dans une procédure ordinaire mise en œuvre par une simple opposition. En revanche, une révision peut entrer en considération à l’égard d’une ordonnance de condamnation pour des faits et des moyens de preuve importants que le condamné ne connaissait pas au moment du prononcé de l’ordonnance ou dont il ne pouvait pas se prévaloir ou n’avait pas de raison de se prévaloir à cette époque (ATF 130 IV 72 c. 2.2). Cette jurisprudence s’applique aussi à une procédure de révision régie par le CPP
(TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011).
3.
En l’espèce, l’ordonnance pénale du 1
er
novembre 2012 a été retirée le lendemain 2 novembre 2012. Le 12 novembre 2012, le conseil d’alors du requérant a consulté le dossier. Dans son opposition du 13 novembre 2012, il a indiqué qu’un voisin aimerait ajouter une lettre de témoignage qu’il enverra prochainement. Interpellé sur la tardiveté de l’opposition, il a produit le 20 novembre 2012 la lettre du 14 novembre 2012 de F._, sur laquelle se fonde sa demande de révision.
Compte tenu de cette chronologie, la Cour de céans retient que le témoignage de F._, annoncé le 13 novembre 2012, était connu du requérant à tout le moins durant le délai d’opposition, de sorte que la demande de révision apparaît irrecevable.
En tout état de cause, le moyen de preuve invoqué par le requérant n’est pas déterminant : en effet, le témoin, qui semble soutenir le requérant dans un conflit de voisinage, n’a rien vu le jour de l’altercation. Il explique avoir simplement entendu ce que les protagonistes se sont dit. Son témoignage ne saurait ainsi établir que L._ n’a pas saisi D._ par le col et qu’il ne lui a pas donné un coup de poing. Par ailleurs, l’absence d’hématome sur le visage du plaignant D._ le lendemain n’est pas déterminant, ce dernier n’en ayant pas allégué un. Enfin, il ressort des pièces du dossier que le requérant hésitait à faire opposition avant de savoir si le plaignant avait produit un certificat médial (P. 13 p. 2). Cette attitude ne peut se comprendre que si un coup a été donné.
4.
Compte tenu de ce qui précède, la demande de révision de L._, manifestement infondée, doit être rejetée dans la mesure où elle est recevable.
5.
Au vu de l'issue de la cause, les frais de révision, par 550 fr. (art. 21 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux, RSV 312.03.1], par renvoi de l'art. 22 de cette loi), doivent être mis à la charge de L._. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
baafa003-232b-4f63-b876-e859093e762e | En fait :
A.
Par jugement du 22 février 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l'Est vaudois a libéré G._ du grief de gestion déloyale (I), a libéré par défaut H._ du grief de gestion déloyale (II), a condamné G._ pour escroquerie par métier et faux dans les titres à trois ans et demi de réclusion, sous déduction de 271 jours de détention préventive (III), a révoqué le sursis accordé le 17 mai 2001 à G._ par le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois et ordonné l'exécution de la peine de cinq mois d'emprisonnement (IV), a dit que la peine énoncée au ch. III est complémentaire à la sanction infligée le 23 janvier 2008 à G._ par le Juge d'instruction du Valais central (V), a condamné par défaut H._ pour escroquerie par métier et faux dans les titres à trois ans et demi de réclusion sous déduction de 180 jours de détention préventive (VI), a révoqué par défaut le sursis accordé le 17 mai 2001 à H._ par le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois et ordonné l'exécution de la peine de trois mois d'emprisonnement (VII), a alloué ses conclusions civiles à l'encontre de H._ à E._, par $ 100'000 (VIII), a donné à T._ acte de ses réserves civiles à l'encontre de G._ (IX), a alloué leurs conclusions civiles à l'encontre de G._ et H._, solidairement entre eux à L._, par 70'000 fr., S._, par 34'300 fr., K._, par 132'000 fr., R._, par 29'000 fr. (X), a donné acte de leurs réserves civiles à l'encontre de G._ et H._ solidairement entre eux à F._, J._, W._, V._, M._, C._, B._, P._, N._, X._, D._ (XI), a dit que les pièces et documents séquestrés sont conservés au dossier à titre de pièces à conviction (XII) et a mis les frais de la cause par 24'199 fr. 65, incluant l'indemnité de ses défenseurs d'office par 10'984 fr. 15, dont 1'166 fr. 40 restent dus, à la charge de G._ et par 25'580 fr. 35, incluant l'indemnité de son défenseur d'office, par 12'430 fr. 35, à la charge de H._ (XIII).
B.
Le 24 février 2011, G._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 13 avril 2011, l'appelant a attaqué le jugement dans son ensemble, soit tant sur les faits retenus que sur leur qualification juridique. Il a conclu à ce qu'il soit libéré du chef d'accusation d'escroquerie par métier et faux dans les titres et à ce qu'il soit libéré de la peine de réclusion de trois ans et demi, subsidiairement à ce que la peine soit revue en ce sens qu'il est condamné à 271 jours de détention préventive ou à une peine compatible avec le sursis. Il a également sollicité la modification du jugement en ce sens que le sursis accordé le 17 mai 2001 ne soit pas révoqué et qu'une peine complémentaire à la sanction infligée le 23 janvier 2008 soit prononcée. Il a requis l'audition de témoins ainsi que celle de H._ pour être confronté à ce dernier.
Le 9 mai 2011, dans le délai imparti, le Ministère public a indiqué s'en remettre à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et a renoncé à déposer un appel joint.
Par courrier du 1
er
juillet 2011, le juge délégué de la Cour d'appel a indiqué à l'appelant qu'il n'administrerait pas de nouvelles preuves et qu'il se fonderait sur celles produites en première instance (art. 389 CPP). Il a toutefois ordonné à l'huissier ou à l'agent de la police judiciaire d'amener H._, au besoin par contrainte, à l'audience du 12 septembre 2011 (art. 389 al. 3 CPP). Cette mesure n'a pas permis d'appréhender H._. Aux débats, la Cour d'appel a rejeté les réquisitions incidentes présentées par l'appelant (cf. supra pp. 3 et 4).
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
G._, divorcé et père de deux enfants majeurs, est né en 1954 à Liège (B). Il a grandi au sein de sa famille adoptive en Valais. Après sa scolarité obligatoire, il a entrepris un apprentissage de mécanicien sur automobiles sanctionné par un CFC. Après avoir travaillé dans sa profession, il a repris une société de déménagement qu'il a revendue pour exploiter un commerce d'agencement de cuisines à Vevey. En 1982, il a fondé la société [...] SA dont l'activité s'est achevée par une faillite quelques dix ans plus tard.
2.
Du 1
er
janvier 1991 au 30 décembre 2003, l'appelant a dérivé dans la délinquance et a fait de ses escroqueries la source de ses revenus. Les cas d'escroquerie et de faux dans les titres seront développés ci-dessous (cf. c. 5).
Le 17 mai 2001, le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois lui a infligé une peine de cinq mois d'emprisonnement avec sursis pendant quatre ans pour une escroquerie commise avec H._, ébriété au volant et contravention aux règles de la circulation.
Les escroqueries postérieures à cette condamnation, détaillées ci-dessous, ont dicté la révocation du sursis et le prévenu a été détenu du 25 novembre 2004 au 22 août 2005, soit durant 271 jours.
Le 23 janvier 2008, le Juge d'instruction du Valais central l'a condamné pour ébriété au volant à 30 jours-amende, la valeur du jour-amende étant arrêtée à 35 fr. avec sursis pendant quatre ans | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, l'appelant a annoncé faire appel par pli posté le 24 février 2011, soit en temps utile. Le jugement écrit lui a été notifié une première fois le 14 mars 2011, un délai de dix jours lui étant imparti, le cas échéant, pour déposer un mémoire motivé à la forme des articles de l'ancien CPP-VD. Constatant cette erreur, l'appelant a, le 22 mars 2011, sollicité l'octroi d'un délai lui permettant d'adresser une déclaration d'appel écrite à la juridiction d'appel, en application de l'art. 399 CPP-CH. Le jugement lui a été notifié une nouvelle fois en date du 24 mars 2011 et un nouveau délai à la forme du nouveau CPP-CH lui a été imparti. Ainsi, déposée le 13 avril suivant, dans les vingt jours à compter de la nouvelle notification du jugement, la déclaration d'appel doit, en vertu du principe de la bonne foi (art. 3 al. 2 CPP), être considérée comme recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Attaquant le jugement dans son ensemble, G._ conteste en premier lieu toute association avec H._ dans la commission d'escroqueries. A cet égard, il invoque le fait que les parties plaignantes ont été en contact uniquement avec le dernier nommé.
Les premiers juges ont retenu l'existence d'une association entre les deux protagonistes en se fondant sur l'une des confessions de H._, dont il convient ici de rappeler les termes :
"Cette somme (...) avait été soutirée dans le cadre d'un investissement qui, je dois bien l'admettre, était totalement fallacieux. Un contrat avait même été signé (...) c'est G._ qui l'avait rédigé et il est certain qu'une personne normale pouvait avoir un sérieux mal de tête à la fin de sa lecture. Tout ce qui était proposé dans ce contrat était totalement irréalisable mais nous réussissions à faire passer cet investissement comme possible par un travail fait en commun. (...) Je me rends compte maintenant que G._ limitait les risques de son côté car c'est chaque fois moi qui signais ces contrats avec "l'investisseur" que nous avions, en toute connaissance de cause, décidé d'escroquer. L'argent ainsi indûment récolté était partagé 50/50 entre mon associé G._ et moi"
(cf. déposition du 17 novembre 2004 ; jgt., p. 10).
Les premiers juges ont expliqué notamment que les déclarations de ce dernier corroboraient, comme on le verra de manière détaillée ci-dessous celles des dupes, établissant ainsi clairement la coaction. Il ont encore précisé que celle-ci n'était pas une circonstance atténuante, mais qu'au contraire, elle était assimilable à une circonstance aggravante puisqu'elle fondait la bande (jgt., p. 10). Fondés sur ces éléments, on peut, comme les premiers juges, écarter la thèse du complot soulevée par le prévenu.(jgt., p. 11), ce dernier ne démontrant du reste pas en quoi leur appréciation serait critiquable. Le fait que les témoins ont pour certains confirmé n'avoir jamais vu G._ ne suffit pas à écarter cette thèse. Le moyen doit d'emblée être rejeté.
4.
L'appelant s'en prend à sa condamnation pour faux dans les titres, niant toute implication dans l'établissement de faux documents.
4.1.
Selon la jurisprudence (ATF 123 IV 17 c. 2 ; 122 IV 25 c. 2a ; 120 IV 122 c. 4c ; ), il y a création d'un titre faux lorsqu'une personne fabrique un titre dont l'auteur réel ne coïncide pas avec l'auteur apparent.
Selon l'art. 251 CP, celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre, sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
La notion de titre est définie par l'art. 110 al. 4 CP, qui prévoit que sont notamment réputés titres tous écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, Berne 2010, n. 5 ad art. 251 CP). La caractéristique essentielle du titre est qu'il doit être objectivement en mesure de prouver ; autrement dit, sa lecture doit fonder la conviction. L'aptitude à servir de preuve résulte de la loi ou des usages commerciaux (ATF 120 IV 361 c. 2a). Le fait que le titre doit être en mesure de prouver doit en outre avoir une portée juridique ; le titre doit ainsi convaincre d'un fait dont dépend notamment la naissance, l'existence, la modification, l'extinction ou la modification d'un droit (Corboz, op. cit., vol. II, n. 20 et 27 ad art. 251 CP).
L'art. 251 CP vise non seulement un titre faux ou la falsification d'un titre (faux matériel), mais aussi un titre mensonger (faux intellectuel). Comme on l'a vu, il y a faux matériel lorsqu'une personne fabrique un titre dont l'auteur réel ne coïncide pas avec l'auteur apparent. Le faussaire crée un titre qui trompe sur l'identité de celui dont il émane en réalité (ATF 128 IV 265 c. 1.1.1 et les références citées). Lorsqu'il y a création d'un titre faux, il est alors sans importance de savoir si le contenu d'un tel titre est mensonger ou non et il n'y a dès lors plus lieu d'examiner si les documents en question offrent des garanties accrues de véracité quant à leur contenu (ATF 123 IV 17 c. 2e ; TF 6S.401/2005).
Sur le plan subjectif, l’infraction de faux dans les titres exige un comportement intentionnel, le dol éventuel étant toutefois suffisant, ainsi qu'un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes alternatives, soit le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui ou le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite. L'avantage est une notion très large ; il suffit que l'auteur veuille améliorer sa situation. Son illicéité peut résulter de la loi, du but poursuivi ou du moyen utilisé ; elle peut donc être déduite du seul fait que l'auteur recourt à un faux (ATF 133 IV 303 c. 4.4, non publié, et les références citées ; TF 6B_1001/2009 du 23 avril 2010, c. 2.2.1).
4.2.
En l'espèce, les contrats d'investissement, comme du reste les reconnaissances de dettes, ont pour la plupart été effectués sur du papier à en-tête de la société [...], qui est une société fictive, dont l'adresse est à Montreux comme celle de G._. Ainsi, même si le nom de ce dernier ne paraît pas formellement sur tous les documents, il est incontestable qu'il est le coauteur des infractions. Le fait que les documents relatifs à la cause ont été saisis en ses mains, démontre d'autant plus sa totale implication.
Par ailleurs, ces contrats d'investissements comme ces reconnaissances de dettes, puisqu'ils engagent une société fictive qui ne correspond pas avec l'auteur apparent, sont incontestablement des faux. En effet, l'appelant savait que ces documents ne pouvaient engager valablement ladite société par sa signature, bien qu'ils aient été destinés à le faire croire aux dupes ; comme il espérait ainsi conclure des affaires, il avait donc le dessein de se procurer un avantage qui doit être qualifié d'illicite en raison du moyen employé. Sa condamnation pour faux dans les titres n'est donc pas critiquable.
5.
L'appelant conteste que les affaires financières proposées aux diverses parties civiles aient constitué des infractions pénales, qualifiées par l'autorité de première instance d'escroquerie.
5.1.
Selon l'art. 146 CP, commet une escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.
Sur le plan objectif, l'escroquerie suppose en particulier que l'auteur ait usé de tromperie et que celle-ci ait été astucieuse (Corboz, Les infractions en droit suisse, Vol. I, Berne 2010, n. 16 ad art. 146 CP). L'astuce est réalisée lorsque l'auteur recourt à des manœuvres frauduleuses, à une mise en scène comportant des documents ou des actes ou à un édifice de mensonges qui se recoupent de façon si raffinée que même une victime critique se laisserait tromper (ATF 126 IV 165 c. 2a, JT 2001 IV 77; ATF 122 IV 197 c. 3d, JT 1997 IV 145; Corboz, op. cit., n. 18 ad art. 146 CP). Sont considérées comme des machinations particulières les inventions et les mesures telles que l'utilisation d'événements qui, à eux seuls ou appuyés par des mensonges et des manœuvres frauduleuses, sont propres à tromper la victime ou à la conforter dans son erreur (ATF 122 IV 197, précité). On ajoutera que l'affirmation fallacieuse peut résulter de n'importe quel acte concluant. Il n'est ainsi pas nécessaire que l'auteur fasse une déclaration. Il suffit qu'il adopte un comportement dont on déduit l'affirmation d'un fait (ATF 127 IV 163; Corboz, op. cit., n. 5 ad art. 146 CP).
L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 17 ad art. 146 CP et les références citées). Il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait escroquerie, que la dupe ait fait preuve de la plus grande diligence et qu'elle ait recouru à toutes les mesures de prudence possibles : la question n'est donc pas de savoir si elle a fait tout ce qu'elle pouvait pour éviter d'être trompée (ATF 128 IV 18 c. 3a; ATF 126 IV 165, précité). Pour qu'il y ait astuce, il n'est ainsi pas exigé que la dupe soit exempte de la moindre faute ; l'astuce est exclue uniquement si la dupe n'a pas observé les mesures de précaution élémentaires (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 17 ad art. 146 CP). Cet aspect de la responsabilité de la dupe doit, selon la jurisprudence récente, aussi être pris en compte en cas de manœuvres frauduleuses de la part de l'auteur (ATF 122 IV 197, précité). Il n'y a en effet pas de motif pour admettre l'astuce lorsque, par exemple, l'auteur utilise un faux grossier, aisément reconnaissable comme tel par la dupe (Cassani, Der Begriff der arglistigen Täuschung als kriminalpolitische Herausforderung, RPS 117/1999, p. 152 ss, spéc. p. 162).
On ajoutera que pour apprécier si l'auteur a usé d'astuce et si la dupe a omis de prendre les mesures de prudence élémentaires, il ne suffit pas de se demander comment une personne raisonnable et expérimentée aurait réagi à la tromperie; il faut, au contraire, prendre en considération la situation particulière de la dupe, telle que l'auteur la connaît et l'exploite. Ce principe dit de coresponsabilité ne saurait être utilisé pour nier trop aisément le caractère astucieux de la tromperie (ATF 128 IV 18, précité). Ainsi, le Tribunal fédéral a précisé qu'il y avait astuce si, en fonction des circonstances, une vérification ne pouvait pas être exigée de la dupe et que l'auteur exploitait cette situation (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 19 et 20 ad art. 146 CP). Il a considéré qu'il y avait tromperie astucieuse dans le cas où l'auteur avait conclu un contrat en ayant d'emblée l'intention de ne pas fournir sa prestation, alors que son intention n'était pas décelable (ATF 118 IV 359 c. 2, JT 1994 IV 172). Il y a également astuce si l'auteur exploite un rapport de confiance préexistant qui dissuade la dupe de vérifier (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 21 ad art. 146 CP).
Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle, l'intention devant porter sur tous les éléments constitutifs. L'auteur doit en outre avoir agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (ATF 119 IV 210 c. 4b, JT 1995 IV 139; Corboz, op. cit., n. 39 ss ad art. 146 CP).
Il convient dès lors de recenser les affaires litigieuses.
5.2.
Recension des affaires
L'appelant soutient que les faits concernant M._, C._, B._, S._ et P._ ne sont ni prouvés par des pièces, ni par des témoignages. A tort.
5.2.1.
M._
En 1996,
M._
cherchait des investisseurs pour créer un centre de loisirs et de bien-être à St-Gingolph. G._ et H._ avaient offert de lui obtenir les fonds nécessaires, sous couvert de frais de recherches. Ils n'ont toutefois jamais effectué de recherches et l'ont extorqué de 80'000 fr., garantis par des "promissory notes".
M._ a clairement mis en cause G._, lors de son audition par la police de sûreté (cf. procès-verbal n° 21 du 11 janvier 2005). Celui-ci a qualifié l'appelant dans les termes suivants :
"G._ était un réel beau parleur et il savait toujours trouver des arguments pour me convaincre. (...) G._ avait toujours une astuce pour me faire croire que l'affaire était honnête".
Cette version des faits corrobore en tous points celle de H._ (cf. procès-verbaux d'audition n° 6 du 17 novembre 2004 et n° 7 du 19 novembre 2004).
Contrairement à ses promesses, G._ n'a effectué aucune recherche pour M._, alors qu'il lui avait pourtant donné l'assurance de le faire. Il a, avec l'aide de son comparse, réussi à lui soutirer 80'000 francs. Au regard du procédé utilisé, tel qu'explicité ci-dessus (consid. 3), on doit admettre que l'appelant a agi astucieusement et s'est rendu coupable d'escroquerie.
5.2.2.
C._
et
B._
Dans la mesure où ces deux protagonistes étaient en relation d'affaires, leur situation peut être traitée ensemble (cf., jgt. p. 22). Associés dans une opération immobilière et en quête d'un financement complémentaire, ils ont rencontré H._ qui leur a soumis un concept d'investissement consistant en un apport initial de leur part de 70'000 fr. leur ouvrant l'accès à un groupe d'investisseurs et finançant l'acquisition de garanties bancaires leur permettant d'emprunter de l'argent en suffisance et, de la sorte, placer de grosses sommes d'argent sur des marchés financiers aux rendements nettement supérieurs à la norme. Le projet était à la fois suffisamment précis et suffisamment vague pour interdire toute vérification.
S'il s'avère que ces deux victimes ne mettent pas formellement en cause l'appelant, puisqu'elles ne l'ont pas rencontré, il faut pourtant relever que le nom de ce dernier ne leur est pas étranger, H._ le leur présentant comme sa relation d'affaires (cf. procès-verbaux d'audition n° 25 de C._ du 11 février 2005 et n° 32 de B._ du 18 février 2005). Le témoignage d'V._, autre victime, permet également de lier l'appelant à C._ (cf. procès-verbal n° 46 du 20 juin 2005). En outre, dans son audition du 17 novembre 2004 (cf. procès-verbal d'audition n° 6), H._ admet que le contrat signé par les deux victimes, rédigé par l'appelant, était
"totalement fallacieux"
et
qu'"une
personne normale pouvait avoir un sérieux mal de tête à la fin de sa lecture,
et que
"tout ce qui était proposé dans ce contrat était totalement irréalisable".
H._ explique que tout ce qui était proposé dans le contrat était totalement irréalisable mais qu'ils avaient réussi à faire passer cet investissement comme possible par un travail de persuasion fait en équipe.
La coaction est établie. Par ailleurs, les éléments au dossier démontrent qu'il est incontestable que l'appelant s'est rendu coupable d'escroquerie en usant d'arguments fallacieux pour obtenir l'indu. L'appréciation des premiers juges est donc adéquate.
5.2.3.
S._
En 1998, les époux S._ exploitaient le Café [...], à Bex, qui périclitait. Le couple avait un besoin urgent d'argent et un client du café, V._, leur a recommandé de s'adresser à H._ et G._, deux de ses connaissances ayant la possibilité d'effectuer des placements avec des rendements extraordinaires (cf. procès-verbal d'audition n° 23 du 9 février 2005).
La lésée S._ met clairement en cause l'appelant et son comparse. Elle précise en outre qu'elle était en possession des numéros de téléphone des deux comparses et qu'il lui était arrivé d'appeler G._ à son domicile. Elle admet encore que les papiers présentés rendaient crédibles les promesses de fonds, que cela semblait réalisable. Cette version des faits corrobore entièrement celle de H._ qui soutient avoir agi selon le même mode opératoire que pour les autres dupes et qui reconnaît avoir escroqué le couple S._ (cf. procès-verbal d'audition n° 6 du 17 novembre 2004) et celle d'V._ qui admet avoir présenté le couple S._ aux deux comparses dans la mesure où il se trouvait en manque de liquidités (cf. procès-verbal d'audition n° 46 du 20 juin 2005).
L'appréciation des juges n'est pas non plus critiquable dans le cas d'espèce. La coaction pour la commission de cette escroquerie est incontestable.
5.2.4.
P._
En 1998, P._ a déposé un brevet de transformation de déchets organiques en engrais et cherchait des fonds pour exploiter celui-ci.
Dans son rapport d'audition du 10 mai 2005 (cf. procès-verbal n° 42), ce dernier souligne avoir tout d'abord fait uniquement la connaissance de l'appelant, lequel lui a présenté par la suite H._ comme étant son associé. Il admet qu'en 2000, les deux comparses lui ont présenté une garantie bancaire de USD 10 millions qui lui aurait permis de démarrer ses affaires commerciales. A ce titre, une convention a été signée, ce uniquement par l'appelant. P._ précise que le 24 mai 2000, lors d'une nouvelle rencontre, H._ lui a remis un document manuscrit rédigé devant lui par l'appelant et signé par les deux comparses. Il relève qu'à cette occasion, ces derniers lui ont même montré un chèque de USD 1'000'000 émis par une banque américaine et dont ils étaient tous deux bénéficiaires. Il ajoute encore qu'en juillet 2000, il a reçu un courrier signé par les deux comparses sur un papier à en-tête de la société [...], dont il est établi qu'elle est totalement fictive.
Cette version des faits corrobore celle de H._, qui admet avoir, avec l'appelant, escroqué P._ de la même manière et dans le même but que les autres dupes (cf. procès-verbal d'audition n° 7 du 19 novembre 2004).
L'appréciation des premiers juges doit être confirmée. G._ s'est bien rendu coupable d'escroquerie en laissant croire à P._, qu'il allait pouvoir démarrer ses affaires commerciales et de faux dans les titres, en rédigeant de faux manuscrits au nom de sa société fictive.
5.2.5.
R._
Lors de son audition du 10 février 2005 (cf. procès-verbal n° 24), R._ explique que H._ lui a proposé, en juin 2000, un investissement à haut rendement. Il explique que ce dernier lui avait indiqué qu'il réalisait ses affaires avec un associé qu'il n'a toutefois jamais rencontré et dont il ignorait le nom. Il connaissait en revanche son adresse, celle-ci figurant sur les documents qu'il avait reçus à l'époque.
Ainsi, s'il s'avère que R._ ne connaissait pas physiquement l'appelant, il ressort des documents de la cause que l'adresse que R._ connaissait était bien celle de G._ et qu'il avait signé un mandat de gestion de la société fictive [...].
Il convient d'admettre une fois encore que les deux comparses, agissant ensemble, H._ l'admettant du reste lors de son audition du 17 novembre 2004 (cf. procès-verbal d'audition n° 6), se sont rendus coupables d'escroquerie et de faux dans les titres, les éléments constitutifs de ces deux infractions étant également réunis.
5.2.6.
I._
S'agissant de I._, il ne découle pas de son audition du 7 avril 2004 (cf. procès-verbal d'audition n° 3) qu'il ait été en relation d'affaire avec l'appelant. Toutefois, il ressort de celle de U._ (cf. procès-verbal d'audition n° 38 du 6 avril 2005) que ce dernier, convaincu de l'honnêteté des projets de H._ et de l'appelant, avait mis ceux-ci en contact avec N._ lequel avait lui-même un client qu'il connaissait depuis longtemps, soit le dénommé I._. U._ précise aussi que les deux comparses avaient proposé à I._ de lui trouver un financement de USD 13 millions garanti par un certificat de dépôt, qu'ils avaient su se montrer très convaincants, qu'au début des opérations les deux comparses étaient présents, mais que par la suite, l'appelant ne participait plus aux rencontres.
Les versions des faits du témoin D._ (cf. procès-verbal d'audition n° 49 du 3 août 2005), et de H._ (cf. procès-verbal d'audition n° 6 du 17 novembre 2004) corroborent également celles de I._ et de U._.
Partant, il convient de retenir à nouveau que les éléments constitutifs des infractions d'escroquerie et de faux dans les titres sont réalisés. En effet, la convention irrévocable de répartition de profits financiers (pièce n° 77), a été signée au nom de la société fictive [...]. Elle constitue incontestablement un faux. S'agissant de l'escroquerie, les affirmations des auteurs sont fallacieuses et astucieuses. Le financement proposé paraît crédible : le versement de la dupe permet d'obtenir une garantie qui à son tour permet le financement. La dupe est donc privée de moyen de vérification.
5.2.7.
E._
Dans la mesure où l'appelant a été libéré du grief par les premiers juges (jgt., p. 30), l'appel ne peut pas porter sur ce cas.
5.2.8.
N._
En octobre 2001, N._ cherchait des fonds pour sauver une opération immobilière. Les deux comparses lui ont proposé une garantie bancaire à escompter sur la banque [...]. Pour que la garantie soit exécutée, N._ a versé le montant requis par les comparses. Ce dernier a dès lors signé, le 30 octobre 2001, un contrat de répartition des profits générés par l'escompte d'une garantie bancaire de premier ordre émise par la banque [...]. Le contrat est fictif.
L'appelant a pour ce cas admis avoir agi en coaction avec H._ (cf. procès-verbaux d'audition n° 10 du 2 décembre 2004 et n° 20 du 21 décembre 2004) et avoir escroqué N._. S'agissant de ce dernier, on peut au surplus renvoyer à l'analyse effectuée pour I._ (c. 4.3.6.), et à son procès-verbal d'audition du 17 décembre 2004 (cf. procès-verbal d'audition n° 14).
Au vu des éléments ressortant de la cause, il faut reconnaître que N._ a été victime d'une escroquerie, consistant à lui faire débourser de l'argent sous la promesse fallacieuse d'en obtenir et que l'appelant répond ainsi bien d'escroquerie et de faux dans les titres, le contrat signé émis au nom d'un tiers étant totalement fictif. Il ne l’a d'ailleurs pas contesté.
5.2.9.
X._
Bien qu'X._ ne mette pas en cause l'appelant, puisqu'il dit même ne pas le connaître (cf. procès-verbal d'audition n° 37 du 31 mars 2005), il y a lieu de se référer au contrat de répartition des profits générés par l'escompte d'une garantie bancaire de premier ordre émise par la [...] Bank (pièce 71bis qui a été saisie alors qu'elle était en possession de l'appelant), entre ce dernier et la société fictive [...] dont le siège, comme déjà dit, se trouve précisément à l'adresse de l'appelant.
L'appréciation du tribunal est donc adéquate, G._ s'est bien rendu coupable d'escroquerie et de faux dans les titres.
5.2.10.
T._
Ce cas est admis par l'appelant (cf. procès-verbal d'audition n° 11 du 8 décembre 2004). Au reste, l'appel est obscur, l'appelant semblant dire qu''D._ ne serait en rien concerné par ce cas. Ce n'est pas le problème en l'espèce.
L'appréciation des premiers juges doit donc également être confirmée ici.
5.2.11.
Q._
Dans son audition du 19 novembre 2004 (cf. procès-verbal d'audition n° 7), H._ indique avoir, avec l'appelant, escroqué Q._ selon les mêmes modus et buts que pour les autres victimes.
Les premiers juges ont retenu à juste titre que les aveux de H._ étaient d'autant plus crédibles qu'ils ont été faits alors que Q._ était introuvable. Leur appréciation n'est donc pas critiquable.
6.
L'appelant conteste avoir commis des infractions par métier.
Pour qu'il y ait métier, il faut tout d'abord que l'auteur ait agi à réitérées reprises. Il faut également que l'auteur ait agi dans l'intention de se procurer des ressources dont il faut déterminer à partir de quel moment elles constituent des revenus professionnels.
En l'espèce, la recension des cas laisse clairement apparaître que l'appelant a agi à réitérées reprises. Il est établi en outre que pendant une dizaine d'années, l'appelant a obtenu par ses escroqueries, un montant dépassant largement le million de francs. Une telle somme, même divisée par deux, ce dernier agissant avec un comparse, lui garantissait ainsi un revenu annuel lui permettant d'assurer sa subsistance.
C'est donc à juste titre que les premiers juges ont considéré que l'appelant vivait de ses escroqueries, qu'il avait fait de celles-ci un métier.
7.
L'appelant reproche ensuite au tribunal de ne pas avoir tenu compte lors de la fixation de la peine, de ce que les faits sont pour la plupart prescrits, qu'il a aujourd'hui un emploi stable et qu'il est pleinement intégré dans la société, relevant en outre qu'une peine privative de liberté ne se justifie pas du point de vue de la sauvegarde de l'intérêt public.
7.1.
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1 ; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (TF 6B_1029/2010 du 18 avril 2011 c. 2.1 et les arrêts cités).
7.2.
Pour fixer la peine, les premiers juges ont pris en considération le fait que l'appelant travaille depuis sa libération (jgt. p. 36). Contrairement à ce que soutient l'appelant, le tribunal a, lors de la recension des cas, tenu compte de ceux qui étaient prescrits. A charge de l'appelant, les premiers juges ont mis en évidence sa très lourde responsabilité, ce dernier ayant extorqué pendant plus de dix ans des montants considérables (1'344'000 fr.) aux victimes sans jamais se préoccuper de les rembourser, et s'étant enferré dans une défense de déni révélant l'absence de tout remords et l'indifférence face aux victimes de la cause. A décharge, ils ont pris en compte l'éloignement dans le temps des infractions commises et le fait que l'appelant n'a plus connu d'ennuis pénaux depuis 2004 (jgt. p. 37) et ont, pour ces derniers motifs, réduit le quantum de la peine à trois ans et demi.
On ne peut donc reprocher au tribunal, qui a tenu compte de tous les éléments pertinents, d'avoir outrepassé son large pouvoir d'appréciation. La peine doit être confirmée.
8.
L'appelant demande finalement que le jugement de première instance soit modifié en ce sens que le sursis lui soit accordé et qu'une peine complémentaire à la sanction prononcée le 23 janvier 2008 lui soit infligée.
La peine prononcée est partiellement complémentaire à celle infligée en 2001 et complémentaire à celle infligée en 2008 (cf. jgt sur appel, p. 13 consid. 2). La peine prononcée – trois ans et demi – ne viole pas l'art. 42 al. 2 CP. Certes, une part de l'activité délictueuse de l'appelant s'est déroulée avant l'année 2001. Il n'en reste pas moins que ce dernier a commis, après sa première condamnation, plusieurs escroqueries (cas E._, N._, X._, T._ et Q._) pour plusieurs centaines de milliers de francs. Si l'on met en perspective l'activité délictueuse déployée après le 17 mai 2001 – date de sa première condamntation – et la peine prononcée en 2001 – 5 mois d'emprisonnement –, la sanction infligée tient compte du fait qu'il s'agit d'une peine partiellement complémentaire. Quant à la condamnation du 23 janvier 2008 (30 jours-amende), elle ne peut, vu sa modicité, modifier le constat de culpabilité effectué par les premiers juges. La peine étant supérieure à trois ans, la question du sursis ne se pose pas.
L'art. 46 al. 5 CP prévoit que la révocation ne peut plus être ordonnée lorsque trois ans se sont écoulés depuis l'expiration du délai d'épreuve. Dès lors, le dispositif doit être rectifié d'office (art. 83 al. 1 CPP) en ce sens que le sursis accordé le 17 mai 2001 à G._ n'est pas révoqué.
9.
L'appelant conteste en dernier lieu les prétentions civiles allouées dans le jugement entrepris. Dans la mesure où la condamnation est confirmée et que les prétentions allouées sont justifiées dans leur principe et leur quotité, le moyen soulevé, qui suppose l'admission de l'appel sur l'action pénale, doit être rejeté.
10.
En définitive, l'appel est très partiellement admis en ce sens que le sursis accordé le 17 mai 2001 à G._ n'est pas révoqué. L'appel est rejeté pour le surplus. Vu la mesure dans laquelle l'appelant n'obtient que très partiellement gain de cause, les frais de procédure, par 4'155 fr. 15 (quatre mille cent cinquante-cinq francs et quinze centimes), doivent être mis à la charge de ce dernier (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). Outre l'émolument, ces frais comprennent l’indemnité allouée à son défenseur d’office (cf. art. 138 et 422 al. 2 let. a CPP ; art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP), arrêtée à 1'365 fr. 15 (mille trois cent soixante-cinq francs et quinze centimes), TVA et débours compris.
Le prévenu ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son conseil d’office prévue ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bad6807b-1906-4fdc-a591-f834267573a0 | En fait
:
A.
Par jugement du 3 juin 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté qu’A._ s’est rendu coupable d’actes d’ordre sexuel avec des enfants, d’actes d’ordre sexuel avec des personnes dépendantes et d’abus de détresse (I), condamné A._ à une peine pécuniaire de 240 jours-amende à 100 fr. le jour (II), suspendu l’exécution de la peine pécuniaire et fixé un délai d’épreuve à trois ans (III), dit qu’A._ devait verser à I._ la somme de 3'000 fr. au titre de réparation du tort moral (IV) ordonné à A._, au titre de règle de conduite, de verser à I._, durant le délai d’épreuve, le montant fixé sous chiffre IV (V) et fixé les frais et dépens (VI à IX).
B.
Par annonce du 8 juin 2015, puis déclaration d’appel du 23 juillet 2015, A._ a formé appel contre ce jugement, concluant à sa réforme en ce sens qu'il est libéré des accusations d'actes d'ordre sexuel avec des enfants, d'actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes et d'abus de détresse. Subsidiairement, il a conclu à une réduction de la quotité de la peine et de la valeur du jour-amende, à la réduction du délai d'épreuve à deux ans et à la suppression de l'indemnité pour tort moral allouée à I._. A titre de mesure d'instruction, il a requis l'audition d'un témoin.
Par avis du 28 août 2015, la Présidente de la Cour de céans a rejeté la mesure d’instruction précitée.
Dans ses déterminations du 1
er
septembre 2015, le Ministère public a conclu au rejet de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
A._ est né le [...] à [...] en [...]. Il est divorcé et père de deux enfants majeurs, lesquels sont encore à sa charge et à celle de son ex-épouse. Il a une formation de boucher et a travaillé dans les abattoirs jusqu’à l’âge de 22 ans. En parallèle, il a été reçu à 18 ans au Conservatoire de [...], puis à celui de [...]. Dès l’âge de 26 ou 27 ans, il s’est entièrement consacré à l’enseignement de la musique. Ensuite d’une formation de directeur, il a notamment travaillé en [...] dans des grands opéras, puis a enseigné [...] et finalement travaillé à l’ [...]. Il a été mandaté par la suite par le [...] pour diriger un groupe de vocalistes. Le prévenu perçoit une retraite mensuelle de 2'200 euros, ainsi que des revenus locatifs de 1'000 euros par mois environ qu’il verserait à ses enfants. Il est propriétaire de quatre biens immobiliers en France, dont une maison de campagne dans laquelle il accueille de jeunes musiciens dans le besoin. Il dit ne pas avoir de fortune pour le surplus, mais une dette en lien avec la maison de campagne.
Ses casiers judiciaires suisse et français ne mentionnent aucune condamnation.
1.2
Entre début 2009 et début 2010, au Conservatoire de Lausanne, A._ a, à cinq ou six reprises, caressé son élève I._, née le [...], sur les seins, le haut du corps et les fesses par-dessus les vêtements alors qu’il la serrait dans ses bras sous prétexte notamment de la féliciter pour son chant. Il a en outre essayé à plusieurs reprises de l’embrasser sur la bouche.
1.3
Entre le 22 janvier 2009 et le 21 janvier 2010, à [...], au domicile de T.D._ et B.D._, née le [...],A._ a embrassé cette dernière dans le cou. Il lui a en outre mis la main sur le haut de la poitrine. | En droit
:
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel d' A._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement. L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
L’appelant conteste l’intégralité des faits qui lui sont reprochés.
3.1
L'art. 10 CPP dispose que toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le Tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation (al. 3).
3.2
S'agissant plus précisément de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits, il s'agit de l'acte par lequel le juge du fond évalue librement la valeur de persuasion des moyens de preuve à disposition et pondère ses différents moyens de preuve afin de parvenir à une conclusion sur la réalisation ou non des éléments de fait pertinents pour l'application du droit pénal matériel. Le juge peut fonder une condamnation sur un faisceau d'indices; en cas de versions contradictoires, il doit déterminer laquelle est la plus crédible. En d'autres termes, ce n'est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (Verniory, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 34 ad. art. 10 CPP; Kistler Vianin in: op. cit. nn.19 ss. ad art. 398 CPP, et les références jurisprudentielles citées).
Lorsque l'autorité a forgé sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Le principe in dubio pro reo est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables au prévenu sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes ; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 consid. 2c; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 consid. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 consid. 2a).
3.3
En l’espèce,
les faits tels que décrits ci-dessus doivent être tenus pour établis. En effet, les déclarations d'I._ sont claires, cohérentes et ont été constantes tout au long de la procédure. Il ressort d’ailleurs des écrits de son journal intime qu’A._ lui avait dit « tu veux des bisous sur la bouche tout chaud » et qu’il avait essayé de lui toucher la poitrine. Le seul fait que le journal intime de la jeune fille ne comporte pas de date importe peu. En outre, les déclarations de la plaignante ont été confirmées par X._ à qui la victime s’est confiée et qui a expliqué que la jeune fille lui avait, entre autre, raconté le comportement qu'avait eu A._ envers elle quand elle était mineure et lui avait également parlé de ce qui était arrivé à d'autres jeunes filles. Elle a encore déclaré qu’elle avait senti I._ extrêmement dérangée et troublée par les événements. Il n’y a aucun motif de mettre en doute la crédibilité de X._ dès lors qu’elle a expliqué ne pas connaître le prévenu ni ressentir d’inimitié particulière à son égard. De plus, B.D._ a également fait état d’un comportement déplacé d’A._ à son égard. Elle a notamment raconté à sa mère – qui l’a confirmé – qu’il l’avait embrassée dans le cou et avait mis sa main sur le haut de la poitrine. D’autres jeunes filles comme, S._ et H._ ont décrit A._ comme étant une personne très tactile. S._ a expliqué, qu’à une occasion, son professeur l’avait prise dans ses bras, avait commencé à la caresser dans le dos et que ses mains avaient touché sa poitrine et ses hanches, et qu’il l’avait également embrassée dans le cou tout en se rapprochant de sa bouche. Elle a encore déclaré, que suite à cet événement, le prévenu lui avait envoyé un courriel en ces termes «
ma chérie, je veux te toucher partout, te faire des bisous dans le cou, sur les joues et puis sur les lèvres, puis je descendrai sur tout ton corps
» (PV aud. 2, p. 3). H._ a quant à elle déclaré qu’à une occasion, A._ lui avait posé la main sur la cuisse et elle s’était sentie mal à l’aise. Elle a également précisé qu’il lui regardait souvent la poitrine de manière furtive, mais qu’il adoptait surtout ce comportement avec I._ et B.D._, et qu’il était très tactile avec elles (PV aud. 11, pp. 2-3). Le témoin R._ a fait état d’une ambiance malsaine et de l’attitude ambigüe du prévenu avec les jeunes filles. Il a expliqué que S._, B.D._ et I._ lui avaient rapporté les agissements d’A._. Il a souligné que le prévenu était assez prompt à la manipulation, qu’il était très autoritaire, toujours très tactile et que son attitude générale avec les filles n’était pas adéquate (PV aud. 7). P._ a également fait un témoignage similaire (PV aud. 8). Il figure encore au dossier des témoignages écrits de jeunes filles faisant état de remarques et de gestes déplacés ainsi que de comportements ambigus et inadéquats de la part d’A._ à leur égard. A ce propos, on peut notamment relever que N._, ancienne élève du prévenu lorsqu’il enseignait en France, a expliqué qu’au décès de son père, alors qu’elle n’avait que 14 ans, A._ s’était subtilement substitué à ce dernier et avait créé un état de dépendance tel qu’elle était tombée amoureuse de lui et avait entretenu avec lui une relation sentimentale de 1981 à 1982 (P. 29).
Au vu de ce qui précède, il n’existe aucun doute raisonnable quant à la réalité des faits reprochés au prévenu. L’appel doit être rejeté sur ce point.
4.
L’appelant conclut à son acquittement de tout chef d’accusation.
4.1
4.1.1
L'art. 187 CP punit celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel sur un enfant de moins de seize ans. Cette disposition a pour but de permettre aux enfants un développement sexuel non perturbé. Elle protège le jeune en raison de son âge, de sorte qu’il est sans importance qu'il ait ou non consenti à l'acte. Définissant une infraction de mise en danger abstraite, elle n'exige pas que la victime ait été effectivement mise en danger ou perturbée dans son développement.
Par acte d'ordre sexuel, il faut entendre une activité corporelle sur soi-même ou sur autrui qui tend à l’excitation ou à la jouissance sexuelle de I'un des participants au moins. Selon Ia jurisprudence, il faut d'abord distinguer les actes n'ayant aucune apparence sexuelle, qui ne tombent pas sous le coup de la loi, des actes clairement connotés sexuellement du point de vue de l’observateur neutre, qui remplissent toujours Ia condition objective de l’infraction, indépendamment des mobiles de l'auteur. Dans les cas équivoques, qui n’apparaissent extérieurement ni neutres, ni clairement connotés sexuellement, il convient de tenir compte de l’ensemble des éléments d'espèce, notamment de l'âge de Ia victime ou de sa différence d'âge avec l'auteur, de la durée de l’acte et de son intensité, ainsi que du lieu choisi par l'auteur (ATF 125 IV 58 consid. 3b). ll résulte de cette jurisprudence que Ia notion d'acte d'ordre sexuel doit être interprétée plus largement Iorsque la victime est un enfant. Dans ce cas, il faut se demander si l'acte, qui doit revêtir un caractère sexuel indiscutable, est de nature à perturber l’enfant (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3
e
éd., 2010, n. 7 ad art. 187 CP).
Selon la doctrine, un baiser sur la bouche ou une tape sur les fesses sont des actes insignifiants (Corboz, op. cit., n. 10 ad art. 187 CP; Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar, 2e éd., n. 6 ad art. 187 CP). En revanche, un baiser lingual (Corboz, op. cit., n. 11 ad art. 187 CP; Trechsel,
ibidem
) ou des baisers insistants sur la bouche (TF 6S.3/2005 du 11 février 2015 consid 7.2.1) revêtent indiscutablement un caractère sexuel. Il en va de même d'une
caresse
insistante du sexe, des fesses ou des seins, même par-dessus les habits (Trechsel,
ibidem
). Lorsque la victime est un enfant, la pratique tend à admettre l'existence d'un
acte d'ordre sexuel
, même pour des attouchements furtifs par-dessus les habits, qui entraîneraient plutôt, entre adultes, l'application de l'art. 198 al. 2 CP (Corboz, op. cit., n. 7 ad art. 187 CP).
4.1.2
L’art. 188 CPP sanctionne le comportement de celui qui, profitant de rapports d’éducation, de confiance ou de travail, ou de liens de dépendance d’une autre nature, aura commis un acte d’ordre sexuel sur un mineur âgé de plus de seize ans (al. 1) ou qui, profitant des liens de dépendance, aura entraîné une telle personne à commettre un acte d’ordre sexuel (al. 2).
Cette disposition a pour but d’assurer aux mineurs de plus de seize ans une protection pénale contre les abus d’ordre sexuel lorsqu’ils se trouvent dans un rapport de dépendance diminuant leur liberté de décision au point qu’ils ne sont plus à même de se défendre contre des sollicitations d’ordre sexuel (ATF 125 IV 129 consid. 2a, p. 130 ss). L’infraction réprimée par l’art. 188 CP se caractérise par la mise à profit de l’auteur de la relation de dépendance existant entre lui et le mineur de plus de seize ans pour commettre sur ce dernier un acte d’ordre sexuel. Cette mise à profit ne résulte pas a priori du rapport de dépendance. Elle doit être prouvée dans le cas concret. Il faut, par conséquent, que le mineur, bien qu’opposé aux exigences de l’auteur, n’ose pas refuser en raison de la position dominante de ce dernier. Cela n’implique toutefois pas que l’auteur ait mis le mineur sous pression par des menaces ou d’une autre manière. Il suffit qu’en raison des circonstances concrètes, le mineur n’ait vu d’autre possibilité que de se résoudre aux sollicitations de l’auteur, qu’il ait été amené à se résigner aux actes, quand bien même il n’en voulait pas (ATF 125 IV 129 consid. 2a ; cf. TF 6S.219/2004 du 1
er
septembre 2004).
Sur le plan subjectif, l’infraction réprimée par l’art. 188 CP est intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant. Il faut donc que l’auteur ait à tout le moins envisagé et accepté l’éventualité que le mineur ne cède qu’en raison du rapport de dépendance (TF 6S.219/2004 précité).
4.1.3
Aux termes de l'art. 193 al. 1 CP, celui qui, profitant de la détresse où se trouve la victime ou d'un lien de dépendance fondé sur des rapports de travail ou d'un lien de dépendance de toute autre nature, aura déterminé celle-ci à commettre ou à subir un acte d'ordre sexuel sera puni de l'emprisonnement. Cette disposition protège la libre détermination en matière sexuelle. L’infraction suppose que la victime se trouve dans une situation de détresse ou de dépendance par rapport à l’auteur. S’agissant de la détresse, elle n’implique pas, au contraire de la dépendance, de relation spécifique entre l’auteur et la victime, comme un rapport de force ou un lien de confiance. La détresse est un état de la victime que l’auteur constate et dont il se sert. La dépendance à l’égard de l’auteur peut résulter d’un rapport de travail, mais aussi de n’importe quel autre lien propre à créer la dépendance (Corboz, op. cit., n. 4 ad art. 193 CP).
La question de savoir s'il existe un état de détresse ou un lien de dépendance au sens de l'art. 193 CP et si la capacité de la victime de se déterminer était gravement limitée doit être examinée à la lumière des circonstances du cas d'espèce (ATF 131 IV 114 consid. 1). Un tel lien peut également découler de la détresse économique ou morale, du besoin de stupéfiants ou encore de toute autre situation où une personne assume une position de mentor, notamment pour des occupations de temps libre (Corboz, op. cit., n. 13 ad art. 188 CP). La situation de détresse ou de dépendance doit être appréciée selon la représentation que s'en font les intéressés (ATF 99 IV 161 consid. 1).
L'art. 193 CP est réservé aux cas où on discerne un consentement. Il faut que ce consentement apparaisse motivé par la situation de détresse ou de dépendance dans laquelle se trouve sa victime. Il doit exister une certaine entrave au libre arbitre (Corboz, op. cit., n. 10 ad art. 193 CP). L'art. 193 CP envisage donc une situation qui se situe entre l'absence de consentement (art. 189 et 190 CP) et le libre consentement qui exclut toute infraction. Contrairement aux art. 189 et 190 CP, l’auteur ne doit pas faire usage de contrainte, auquel cas seuls ces dispositions sont applicables. La distinction entre la mise à profit du lien de dépendance au sens de l’art. 193 CP et la contrainte exercée au moyen de pressions psychiques au sens des art. 189 ou 190 CP est délicate (Dupuis et alii, Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 18 ad 193 CP). L’art. 193 CP vise un consentement altéré par une situation de détresse ou de dépendance dont l'auteur profite. Les limites ne sont pas toujours faciles à tracer. L'infraction doit permettre de réprimer celui qui profite de façon éhontée d'une situation de détresse ou de dépendance, dans un cas où la victime n'aurait manifestement pas consenti sans cette situation particulière (Dupuis et alii, op. cit., n. 16 ad art. 193 CP et les références citées).
En raison des biens juridiques différents, il y a lieu d’admettre le concours idéal entre les art. 187 CP et 193 CP, lorsque l’état de détresse ou de dépendance ne provient pas uniquement du jeune âge (Dupuis et alii, op. cit., n. 24 ad art. 193 CP et les références citées).
4.2
4.2.1
A l’époque d’une partie des faits retenus à la charge d’A._, I._ et B.D._ étaient âgées de 15 ans, ce que l’intéressé savait. La différence d’âge entre le professeur et ses élèves était extrêmement importante, soit de cinquante ans. L’appelant a profité des occasions durant lesquelles il était seul avec I._ pour lui caresser les seins, le haut du corps et les fesses par-dessus ses vêtements alors qu’il la serrait dans ses bras sous prétexte notamment de la féliciter pour son chant. En outre, il a essayé à plusieurs reprises de l’embrasser sur la bouche. Alors qu’il logeait chez la mère de B.D._, A._ a profité qu’il était seul avec la jeune fille pour la serrer dans ses bras, lui caresser le haut de la poitrine et l’embrasser dans le cou. Ces attouchements, qui ne sont pas insignifiants, revêtent un caractère sexuel indiscutable, ce que l'appelant ne pouvait évidemment pas ignorer, et sont de nature à perturber un enfant. Les victimes du prévenu ont d’ailleurs exprimé leur malaise et ont clairement perçu le caractère sexuel de ces agissements.
Force est donc de constater que la condamnation d’A._ pour actes d’ordre sexuel au sens de l’art. 187 CP doit être confirmée.
4.2.2
Il en va de même pour la condamnation pour actes d’ordre sexuel avec des personnes dépendantes au sens de l’art. 188 CP. En effet, I._ était âgée de plus de seize ans au moment de certains faits. L’appelant a profité de la relation de dépendance existant entre lui et la jeune fille pour commettre, sur cette dernière, des actes d’ordre sexuel. A._ était professeur de chant auprès du Conservatoire de Lausanne où il s’occupait du groupe de vocalistes avec lesquels les relations étaient régulières et intenses. Il a exploité le lien de confiance le liant à sa jeune chanteuse. Certains témoins ont évoqué un rôle de grand-père, l’intéressé ayant lui-même précisé qu’il était surnommé [...]. Selon le témoignage de X._, I._ pensait que son professeur lui apportait beaucoup musicalement et était prête à tout entendre ainsi qu’à tout accepter de lui car elle lui faisait entièrement confiance. La plaignante a également souligné qu’elle avait beaucoup d’admiration pour A._, que celui-ci était encensé par tous, qu’ils étaient comme une sorte de famille, qu’il s’agissait d’une relation assez particulière et qu’on lui avait fait comprendre qu’elle n’était rien sans l’appelant. Le témoin R._ a relevé que le prévenu était une personne intelligente, qui savait créer un lien de dépendance et que le chœur était quelque chose de très important pour les élèves et qu’ils faisaient et vivaient des choses merveilleuses ensemble.
Sur le vu de ce qui précède, on doit admettre qu’A._ a exploité un rapport de dépendance et de confiance pour obtenir ce qu’il voulait et qu’I._ se trouvait dans une situation qui l’empêchait de former et exprimer librement sa volonté. Les conditions de l’art. 188 CP sont donc réalisées.
4.2.3
Au vu des éléments retenus, la condamnation d’A._ en application de l’art. 193 CP doit également être confirmée. On relèvera qu’il y a un concours idéal entre cette infraction et l’art. 187 CP en ce qui concerne les actes commis envers I._ lorsqu’elle était âgée de moins de seize ans, l’état de dépendance de la victime ne provenant pas uniquement du jeune âge de celle-ci.
Par conséquent, l’appel sera également rejeté sur ce point.
5.
L’appelant conteste la quotité de la peine et la quotité du jour-amende.
5.1
5.1.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait avec l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 ; ATF 129 IV 6 consid. 6.1).
Le montant du jour-amende doit être fixé en partant du revenu que l'auteur réalise en moyenne quotidiennement, quelle que soit la source, car c'est la capacité économique réelle de fournir une prestation qui est déterminante. Constituent des revenus, outre ceux d'une activité lucrative dépendante ou indépendante, notamment les revenus d'une exploitation industrielle, agricole ou forestière, ainsi que les revenus de la fortune (loyers et fermages, intérêt du capital, dividendes, etc.), les contributions d'entretien de droit public ou privé, les prestations d'aide sociale ainsi que les revenus en nature. Ce qui est dû en vertu de la loi ou ce dont l'auteur ne jouit pas économiquement doit en être soustrait. Il en va ainsi des impôts courants, des cotisations à l'assurance-maladie et accidents obligatoire, ou encore des frais nécessaires d'acquisition du revenu, respectivement pour les indépendants, des frais justifiés par l'usage de la branche. Le principe du revenu net exige que seul le disponible excédant les frais d'acquisition du revenu soit pris en considération, dans les limites de l'abus de droit (ATF 134 IV 60 consid. 6 ; TF 6B_845/2009 du 11 janvier 2010 consid. 1 publié in : SJ 2010 I 205). La loi mentionne également la fortune comme critère d’évaluation. Il s’agit de la substance même du patrimoine, les fruits de ce dernier constituant déjà des revenus. La peine pécuniaire ne peut toutefois tendre à la confiscation totale ou partielle de la fortune. Cette dernière ne doit donc pas être prise en compte qu’à titre subsidiaire pour fixer la quotité du jour-amende, lorsque la situation patrimoniale, particulière, contraste avec un revenu comparativement faible. En d’autres termes, elle demeure significative lorsque l’auteur vit de toute façon de la substance même de sa fortune. Cette dernière constitue un élément pertinent dans la mesure où l’auteur en tire sa substance quotidienne (ATF 134 IV 60 consid. 6.2). Le critère du niveau de vie fournit un argument supplémentaire lorsque la situation sur le plan des revenus doit être évaluée parce qu’elle ne peut pas être établie avec exactitude ou que l’auteur n’a fourni que des informations insuffisantes ou imprécises. Une augmentation de la quotité du jour-amende est alors justifiée lorsqu’un train de vie ostensiblement élevé contraste avec des revenus significativement bas (ATF 134 IV 60 consid. 6.3).
5.2
En l’espèce, la culpabilité de l’appelant est importante. Il a profité de son emprise sur ses jeunes élèves pour satisfaire ses pulsions sexuelles. Il a agi à plusieurs reprises. Les infractions sont en concours. Il persiste à nier les faits, dénigrant ainsi ses victimes et s’apitoyant sur son sort malgré l’ensemble des éléments à charge. Il refuse de prendre conscience du caractère illicite de ses actes. Au regard de l’ensemble de ces éléments, la peine pécuniaire de 240 jours-amende infligée par le premier juge est adéquate et doit être confirmée
S’agissant de la fixation du montant du jour-amende par le premier juge, elle ne prête pas flanc à la critique. Le prévenu perçoit une rente mensuelle de 2'000 euros ainsi que des revenus locatifs de 1'000 euros. De plus, il est propriétaire de quatre biens immobiliers. On relèvera qu'il a renoncé à la défense d’office qui lui avait été octroyée pour une défense de choix. Au regard de l’ensemble de ces éléments et de la situation financière de l’appelant, un montant de 100 fr. par jour-amende paraît adéquat dans le cas d’espèce.
L’appel sera aussi rejeté sur ce point.
6.
L’appelant conteste également la durée du délai du sursis et la règle de conduite qui lui a été imposée.
6.1
L’art. 44 CP dispose que, si le juge suspend totalement ou partiellement l’exécution de la peine, il impartit au condamné un délai d’épreuve de deux à cinq ans (al. 1). Le juge peut ordonner une assistance de probation et imposer des règles de conduite pour la durée du délai d’épreuve (al. 2).
Dans le cadre légal ainsi délimité, la durée du délai d’épreuve doit être fixée en tenant compte des circonstances du cas concret, notamment de la personnalité et du caractère du condamné ainsi que du risque de récidive. Plus ce risque est important, plus long doit être le délai d’épreuve et, partant, la pression qu’il exerce sur le condamné pour qu’il renonce à commettre de nouvelles infractions. La durée du délai d’épreuve doit être déterminée de manière à offrir la plus grande probabilité que le condamné ne récidivera pas.
6.2
Le délai du sursis et la règle de conduite ne peuvent être que confirmés, en particulier au regard du déni total dans lequel se trouve l’appelant. En effet, en première instance, ce dernier a expliqué en détail sa carrière et sa vie ; il a insisté sur le tort que lui causait cette procédure, affirmant qu’il avait tout perdu, qu’il ne faisait plus de musique et qu’il était dans l’incompréhension car il avait tout donné à ces jeunes. Malgré ces déclarations, il a pourtant relevé qu’il n’avait pas cessé toutes ses activités dès lors qu’il accueillait gracieusement des jeunes artistes dans le besoin dans sa maison de campagne et qu’il avait créé un ensemble vocal dans le domaine du handicap. Le délai d’épreuve tel que fixé par le premier juge paraît ainsi à même de garantir un éventuel risque de récidive. Par ailleurs, la règle de conduite imposée à A._ se justifie notamment par le fait qu’il est domicilié à l’étranger.
L’appel sera donc également rejeté sur ces points.
7.
Au regard de la souffrance éprouvée par I._ de par le comportement répréhensible d'A._, il se justifie que ce dernier lui verse une indemnité pour tort moral. Le montant de 3'000 fr. arrêté par le premier juge paraît adéquat au vu de l'ensemble des circonstances.
8.
En définitive, l’appel d’A._ doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d’appel, constitués de l'émolument de jugement, par 2'900 fr. (art. 21 al. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), ainsi que de l’indemnité allouée à Me Virginie Rodigari, par 1'396 fr. 45, TVA et débours inclus, et de l’indemnité allouée à Me Rolf Ditesheim, par 1'026 fr., TVA et débours inclus par décision du 28 août 2015 (CAPE 330), sont mis à la charge de l’appelant qui succombe.
A._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat l’indemnité de défenseur d’office en faveur de Me Rolf Ditesheim que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
badb4f7d-b193-4b83-83e7-7065a9c221f6 | En fait :
A.
Par jugement du 18 septembre 2014, rectifié par prononcé du 19 septembre 2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a constaté
que V._ s’est rendu coupable d’incendie intentionnel, de tentative d’incendie intentionnel et de contravention à la LStup (I), l’a condamné à une peine privative de liberté de 4 ans, sous déduction de 281 jours de détention avant jugement (II), a ordonné qu’il soit soumis à un traitement institutionnel des addictions au sens de l’art. 60 CP (III), a ordonné conjointement la poursuite du traitement psychiatrique ambulatoire des troubles de la personnalité ordonné par jugement du 17 mars 2011 (IV) et le maintien en détention pour des motifs de sûreté du prévenu jusqu’à la mise en place effective du traitement institutionnel visé sous chiffre III ci-dessus (V), a suspendu l’exécution de la peine privative de liberté au profit du traitement institutionnel visé sous chiffre III ci-dessus (VI), a condamné l’intéressé à une amende de 500 fr., convertible en 5 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l’amende (VII), a renvoyé les S._ à agir par la voie civile (VIII), a ordonné le maintien au dossier à titre de pièces à conviction des CD figurant sous fiches n° 14612/14 et 14682/14 (IX), a fixé l’indemnité de défense d’office due à Me Alexa Landert à 11'550 fr., TVA et débours compris, dont un montant de 583 fr. 20 qui a d’ores et déjà été versé (X), a mis une partie des frais, par 33'156 fr. 70, y compris l’indemnité de défense d’office fixée sous chiffre X ci-dessus, à la charge de V._, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (XI), et a dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité du défenseur d’office prévue ci-dessus ne sera exigible que lorsque la situation financière de V._ le permettra (XII).
B.
Le 23 septembre 2014, le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois a formé appel contre ce jugement. Dans sa déclaration d’appel du 10 octobre 2014, il a conclu à la réforme des chiffres V et V du dispositif du jugement entrepris en ce sens qu’un traitement institutionnel conjoint des troubles mentaux au sens de l’art. 59 CP est ordonné en faveur du condamné et que le maintien en détention de ce dernier est ordonné jusqu’à la mise en place effective des traitements visés sous chiffres III et IV.
Le 24 septembre 2014, V._ a déposé une annonce d'appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel motivée du 16 octobre 2014, il a conclu à la réforme des chiffres I à VI du dispositif du jugement entrepris principalement en ce sens qu’il est libéré des chefs d’accusation d’incendie intentionnel et de tentative d’incendie intentionnel, qu’il est condamné pour dommages à la propriété et contravention à la LStup à une peine privative de liberté inférieure à un an, sous déduction de la durée de la détention avant jugement, et que les chiffres III et VI sont supprimés, subsidiairement en ce sens qu’il est libéré des chefs d’accusation d’incendie intentionnel et de tentative d’incendie intentionnel pour les cas 1 à 10 de l’acte d’accusation, qu’il est condamné pour incendie intentionnel pour le cas 11 et pour contravention à la LStup à une peine privative de liberté modérée, d’une durée inférieure à 2 ans, sous déduction de la durée de la détention avant jugement. Il a conclu plus subsidiairement encore à l’annulation du jugement et au renvoi de la cause à l'autorité de première instance pour nouveaux débats et nouvelle décision.
Par courrier du 21 octobre 2014, le Ministère public a annoncé qu'il s'en remettait à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel déposé par V._.
Par courrier du 10 novembre 2014, ce dernier a annoncé qu’il renonçait à présenter une demande de non-entrée en matière.
Aux débats d'appel, V._, par son défenseur d’office, a conclu au rejet de l’appel du Ministère public.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
V._ est né le 2 février 1966. Célibataire et sans charge de famille, il est le cadet d’une fratrie de deux enfants. Malgré un certain retard psychomoteur, il a effectué sa scolarité obligatoire, marquée d’un redoublement et de la fréquentation de classes à effectif réduit. Il a été scolarisé dans une classe privée à l’école [...], de la 5
e
à la 9
e
année, puis il a débuté un apprentissage de monteur en chauffage qu’il a interrompu en 2
e
année en raison de ses difficultés à suivre les cours théoriques. Il a travaillé quelques années dans différents emplois non qualifiés. Sa dernière tentative de réinsertion professionnelle date de 2001, où il a été employé une saison comme jardinier auprès d’un paysagiste yverdonnois et employé comme manœuvre pour l’édification de scènes de spectacle. Il a ensuite connu une longue période de chômage, avant de percevoir l’aide des services sociaux. En 2008, une rente AI lui a été refusée. Le prévenu a été mis au bénéfice d’une curatelle volontaire et touche le revenu d’insertion des services sociaux, soit 1'720 fr. par mois. Son loyer, de 601 fr. 70, est payé grâce à cet argent par sa curatrice, [...]. Ses primes d’assurance maladie sont payées par les services sociaux. Sa curatrice lui verse 180 fr. par semaine, le reste étant utilisé pour son entretien et le paiement de ses factures. Le prévenu indique avoir des dettes, essentiellement composées de frais de justice, pour un montant de 87'000 fr. environ.
Il a débuté une consommation importante d’alcool à la fin de l’adolescence, période pendant laquelle il a connu de graves difficultés. Il a aussi rapidement consommé du haschisch et, dès les années 90, des drogues dures, ainsi que des benzodiazépines (Dormicum). Un traitement de substitution à la Méthadone a été instauré en 1993 ; depuis lors, le prévenu a été victime de rechutes dans sa consommation de stupéfiants, qui ont fini par s’espacer. Sur le plan alcoologique, il a bénéficié d’une tentative de sevrage effectuée en 1991 ainsi qu’une médication aversive d’Antabus interrompue après quatre mois. En 2008, en lien avec l’affaire pénale qui a donné lieu au jugement du 9 décembre 2009, il s’est rendu à quelques reprises à une consultation de la Fondation vaudoise contre l’alcoolisme mais a rapidement interrompu ce suivi lorsque la menace judiciaire s’est estompée. Ensuite du jugement rendu le 17 mars 2011 par le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, un traitement institutionnel des addictions, en application de l’art. 60 CP, a été ordonné conjointement avec un traitement psychiatrique ambulatoire des troubles de la personnalité en faveur du prévenu, l’exécution de la peine privative de liberté ayant été suspendue au profit du traitement institutionnel précité. En juillet 2011, la Fondation l’[...] a toutefois mis fin au séjour résidentiel de V._, le cadre communautaire étant devenu difficilement supportable pour l’intéressé et un contrôle d’urine ayant révélé une consommation de cocaïne, notamment. Une prise en charge par la Fondation de [...] a ensuite été envisagée, mais le prénommé ne s’est pas présenté au premier rendez-vous et cette fondation est restée sans nouvelles de lui. Par jugement du 24 octobre 2011, le Juge d’application des peines a levé le traitement institutionnel des addictions, a constaté que la peine suspendue était totalement absorbée par le séjour institutionnel de 4 mois et 1 jour subi à la Fondation de l’[...], a confirmé la mesure du traitement psychiatrique ambulatoire des troubles de la personnalité et a signalé V._ aux autorités de tutelle, au sens de l’art. 62c al. 5 CP, estimant qu’en l’absence désormais d’une prise en charge institutionnelle, l’intéressé devait impérativement faire l’objet d’une mesure de contrôle stricte. Cette décision a conduit à la désignation de [...], son actuelle curatrice. Par décision du 17 mai 2011, l’Office d’exécution des peines a confié le mandat médico-légal lié au traitement psychiatrique ambulatoire ressortant du jugement du 17 mars 2011 à l’[...] (ci-après : [...]) puis, par décision du 8 décembre 2011, à la Dresse [...], qui a suivi l’intéressé jusqu’à son interpellation, le 12 décembre 2013.
1.2
Le casier judiciaire de V._ comporte les inscriptions suivantes :
- 10.07.1995, Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, incendie intentionnel, délit manqué et tentative d’incendie intentionnel, explosion, vol, tentative de vol, dommages à la propriété, violation de domicile, infraction grave et contravention à la LStup, réclusion 6 ans ;
- 17.03.2011, Tribunal correctionnel de La Broye et du Nord vaudois, incendie intentionnel, délit manqué d’incendie intentionnel, contravention à la LStup, peine privative de liberté 12 mois, amende 200 fr., exécution de la peine suspendue au profit d’un traitement institutionnel des addictions 60 CP, abrogé le 24.10.2011 par l’Office des juges d’application des peines, Lausanne ;
- 23.04.2012, Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois, faux dans les certificats, contravention à la LStup, peine pécuniaire 30 jours-amende à 20 fr., amende 200 francs.
Il ressort en outre du dossier que V._ a été régulièrement condamné dès 1987 pour des contraventions LStup, des vols ou dommages à la propriété, des contraventions à la LCR ou encore des violences ou menaces contre des fonctionnaires, le plus souvent en état d’ébriété. Le point saillant de son parcours est toutefois sa pyromanie, à savoir sa tendance pathologique à allumer des feux. Il a commis ses premiers incendies en 1984, à l’âge de 18 ans, sous l’emprise de l’alcool et en s’arrangeant pour pouvoir observer les flammes et l’arrivée des pompiers. Depuis lors et jusqu’à son arrestation en septembre 1993, il a provoqué huitante-quatre incendies, début d’incendies ou explosions en vue de se procurer, selon les termes de l’expert-psychiatre de l’époque, « la joie archaïque engendrée par le feu au mépris des conséquences de ses actes pour autrui », ce qui lui a valu la condamnation de 1995 à six ans de réclusion, peine qu’il a purgée intégralement, préférant même le régime d’incarcération semi-ouvert de fin de peine à une mesure de traitement institutionnel au foyer de l’[...] qui lui était alors proposée par le Service de médecine et de psychiatrie pénitentiaires. En 2008 à tout le moins, il a à nouveau cédé à son attirance pour les flammes, en boutant le feu à un container métallique entreposé devant un immeuble au moyen d’un allume-feu dont il s’était préalablement muni. Le début d’incendie a été rapidement éteint par les pompiers d’Yverdon-les-Bains. Le container n’étant que noirci à l’intérieur, le prévenu a été libéré de l’accusation d’incendie intentionnel au motif de l’absence de préjudice. Moins d’un mois plus tard, il s’est rendu coupable des infractions qui ont fait l’objet du jugement du 17 mars 2011, pour avoir, en janvier 2008, tout en poursuivant sa consommation d’héroïne, marijuana, cocaïne et Dormicum, allumé et jeté une feuille de papier journal dans un container métallique propriété de la commune d’Yverdon-les-Bains, y déclenchant ainsi un feu, puis, le 1
er
avril 2010, dans cette même commune, à la rue des Philosophes 18a, déversé sur le siège conducteur d’une voiture parquée dans un garage le contenu d'une bouteille d'essence de térébenthine trouvée sur les lieux et bouté le feu au moyen de son briquet ; à cette occasion, n’étant pas parvenu à s’enfuir, il a été intoxiqué au monoxyde de carbone avec brûlures des voies aériennes supérieures et inférieures, lésions ayant nécessité des soins intensifs ainsi qu’une hospitalisation de relativement longue durée.
1.3
Il est en détention avant jugement depuis le 12 décembre 2013, date de son arrestation.
2.
Son parcours judiciaire a donné lieu à plusieurs expertises psychiatriques.
Dans la première, datée du 7 avril 1994, les experts – du [...] – ont posé le diagnostic de pyromanie chez une personnalité à structure psychotique. Le risque de récidive a été reconnu et un traitement ambulatoire estimé souhaitable. Les experts ont également indiqué que la sanction pénale serait bénéfique, car perçue comme authentification et punition des délits, mais n’aurait pas de prise sur le processus primaire qui amène aux actes délictueux.
Dans la deuxième expertise, du 17 juillet 2008, l’expert – de l’[...] – a posé le diagnostic de pyromanie assortie de troubles mentaux et du comportement liés à la dépendance d’alcool en utilisation continue, à l’utilisation de sédatifs ou d’hypnotiques en utilisation continue et à l’utilisation d’opiacés avec syndrome de dépendance, objet d’un traitement médical de substitution, ainsi que de trouble mixte de la personnalité avec des traits immatures, caractériels et pervers (fonctionnement psychotique) ; ces troubles mentaux ont été qualifiés de graves, entraînant une responsabilité diminuée dans une mesure moyenne, le risque de récidive étant décrit comme important. L’expert a préconisé un sevrage hospitalier, suivi d’une phase de réhabilitation institutionnelle, puis de soutien et de contrôles ambulatoires de l’abstinence, s’agissant de la consommation abusive d’alcool et de benzodiazépines, ainsi qu’un suivi psychothérapeutique, centré notamment sur l’affirmation de soi, pour la pyromanie et le trouble mixte de la personnalité.
Dans la troisième expertise, du 28 octobre 2010, le Dr J._ – du [...] – a posé le diagnostic de pyromanie, de personnalité dyssociale, de syndrome de dépendance à des substances multiples (opiacés, actuellement abstinent sous traitement substitutif ; alcool et benzodiazépines en utilisation continue) et d’utilisation de substances multiples nocives pour la santé (cocaïne et cannabis). Il a indiqué que V._ présentait une capacité conservée d’apprécier le caractère illicite de ses actes, mais qu’en étant sous l’emprise de l’alcool et de médicaments et compte tenu de ses très faibles ressources et de sa difficulté à réfréner ses pulsions, il jouissait d’une responsabilité modérément restreinte au moment des faits, ce qui devait être interprété dans le sens d’une diminution de responsabilité moyenne. Il a expliqué que le risque de récidive était important mais qu’il constatait néanmoins une sorte d’autolimitation dans la transgression en ce sens que l’intéressé paraissait à première vue, pour ce qui était des derniers incendies, en mesure de s’interdire de mettre en danger la vie d’autrui. Il a relevé l’absence de toute adhésion de V._ aux différents traitements qui lui avaient été proposés par le passé, précisant que son adhésion temporaire à tel ou tel traitement proposé pouvait se comprendre comme répondant au souhait de s’attirer les bonnes grâces de l’autorité judiciaire plutôt qu’au réel souci de se faire soigner. Toutefois, il a confirmé que le seul moyen de prévenir un important risque de récidive était de mettre sur pied conjointement deux types de mesures, à savoir d’une part un traitement institutionnel des addictions au sens de l’art. 60 CP, dans un établissement approprié tel que la Fondation de l’[...] à [...], et d’autre part un traitement psychiatrique ambulatoire pour traiter les troubles mentaux sous forme de thérapie de soutien du moi ou d’affirmation de soi en application de l’art. 63 CP.
Dans le cadre de la présente affaire, le Procureur a requis une réactualisation de l’expertise psychiatrique du 28 octobre 2010. Dans son rapport du 13 juin 2014, le Dr J._ a confirmé le diagnostic retenu en 2010 et a dit que le risque de récidive demeurait important. Dans la partie « discussion », il a toutefois évoqué un contexte particulier dans la deuxième moitié de l’année 2013 et a retenu à cette période une plus grande vulnérabilité psychique chez le prévenu, cette vulnérabilité accrue pouvant se comprendre comme la conséquence de trois facteurs, à savoir une diminution de la posologie de Méthadone durant le deuxième semestre 2013 par la volonté de l’expertisé et avec l’accord de son psychiatre, une augmentation concomitante de la consommation de benzodiazépines que le prévenu se procurait au marché noir et qui compensait sans doute la diminution de Méthadone, ainsi qu’une diminution progressive de la fréquence des rencontres avec son psychiatre traitant. Il a considéré que, compte tenu de cette vulnérabilité, la responsabilité pénale de V._ était restreinte légèrement, car s’il était de tout temps apte à apprécier le caractère illicite de ses actes, il était en revanche légèrement entravé dans sa capacité à se déterminer d’après cette appréciation. Malgré les faits reprochés au prévenu, l’expert a indiqué qu’il convenait de ne pas conclure trop hâtivement à un échec des mesures de traitement ambulatoire (psychothérapie de soutien du moi) et institutionnel (art. 60 CP, prise en charge des addictions dans une institution spécialisée) préconisées dans la précédente expertise, compte tenu du contexte de plus grande vulnérabilité psychique chez l’intéressé. Il a expliqué que la mise en place d’une mesure institutionnelle (art. 60 CP) dans un établissement approprié restait d’actualité et pouvait diminuer le risque de commission d’actes de même nature ; il a préconisé l’admission du prévenu dans un établissement comme la Fondation [...]. S’agissant de la prise en charge ambulatoire de son trouble de personnalité (personnalité dyssociale), il a estimé que même s’il s’agissait d’une pathologie grave, avec un pronostic assez sombre et pour laquelle les chances de succès étaient assez minimes, on pouvait essayer de maintenir le prévenu dans un tel traitement avec un cadre peut-être un peu plus strict que celui qui avait cours dans le dernier semestre 2013, autrement dit un cadre maintenu sur la durée, avec des rendez-vous hebdomadaires indépendamment des progrès putatifs de l’expertisé.
Aux débats de première instance, le Dr J._ a maintenu la position exprimée dans le cadre de ses deux expertises de 2010 et 2014 et a confirmé que les mesures préconisées, soit la mise en place d’un traitement institutionnel des addictions et une prise en charge ambulatoire des troubles mentaux, restaient d’actualité. Interpellé au sujet des précédents échecs thérapeutiques, il a estimé que la prise en charge mise en place après le jugement de 2011 avait certainement été levée prématurément et n’avait dès lors pas permis une stabilisation et un soutien par rapport aux consommations. Pour lui, le traitement ambulatoire aurait dû être confié non pas à un psychiatre indépendant en cabinet, mais à une unité de traitement ambulatoire avec une prise en charge globale et pluridisciplinaire. Il a aussi confirmé l’existence d’un contexte de vulnérabilité lors du passage à l’acte favorisé par les facteurs évoqués dans son expertise. Il a relevé que la mise en place d’un traitement institutionnel (art. 60 CP) dans un cadre plus strict, comme la fondation [...], pouvait constituer une solution, tout en précisant que le succès de ces deux mesures se basait sur la volonté de l’expertisé et que « s’il met[tait] les pieds au mur », il y aurait un risque de nouveau passage à l’acte et que s’il décidait de ne pas se traiter, une mesure sous forme de l’art. 59 CP serait la seule solution, inévitable. Il a indiqué que la perspective de prononcer une mesure fondée sur l’art. 59 CP, sous-entendu dans un cadre fermé au sens de l’al. 3 de cette disposition, avec la mise en place de mesures similaires à celles instaurées en 2011, mais avec un suivi plus strict, pouvait contenir le risque de récidive. Il a relevé qu’un accent devait être porté aussi sur la prescription de méthadone, la gestion de ce produit par le prévenu n’ayant pas été optimale, et que cette substance ne devait pas être non plus diminuée à court terme dans la mesure où elle permettait de stabiliser l’humeur et d’avoir un meilleur contrôle des impulsions. Pour l’expert, la mesure institutionnelle devrait durer au minimum une année et le traitement ambulatoire bien plus longtemps. A l’évocation des avertissements formels qui avaient été énoncés par le tribunal correctionnel en mars 2011 à l’occasion de son jugement, l’expert a expliqué qu’il n’avait pas fondamentalement changé sa position par rapport à ses recommandations, tout en soulignant que son approche était optimiste et comptait sur les effets bénéfiques que l’expérience pouvait avoir. Enfin, pour l’expert, si le tribunal devait estimer que l’avertissement émis en 2011 devait être sanctionné, il n’y aurait pas d’autre choix, dès lors, que d’ordonner un traitement institutionnel selon l’art. 59 CP.
3.
3.1
Le 20 septembre 2013 vers 16h30, à la rue des Philosophe 18A à Yverdon-les-Bains, V._ a mis le feu à des objets se trouvant dans la cave n°43 de cet immeuble. Trois caves ont ainsi été détruites tandis que d'autres caves et des locaux annexes ont été souillés par la suie. L'intervention des pompiers a permis de circonscrire le sinistre.
3.2
Le 15 novembre 2013 vers 11h40, au débouché de la rue des Jordils sur celle des Philosophes à Yverdon-les-Bains, le prénommé a mis le feu au combustible se trouvant dans une benne de chantier métallique propriété de la société [...]. L'intervention des pompiers a permis de circonscrire rapidement le sinistre.
3.3
Le même jour vers 16h15, à la rue des Jordils 16 à Yverdon-les-Bains, le prévenu a mis le feu au cabanon de jardin de [...] qui a ainsi été détruit, tout comme les objets qu'il contenait, soit notamment un composteur en plastique, une tondeuse à gazon et de l'outillage.
3.4
Le 5 décembre 2013 vers 10h45, sur la place des Droits-de-l'Homme à Yverdon-les-Bains, il a mis le feu au combustible se trouvant dans un container en plastique propriété de la commune. Ce container a été détruit, tout comme la paroi en bois qui l’entourait.
La commune d'Yverdon-les-Bains s'est constituée partie plaignante.
3.5
Le 12 décembre 2013 vers 11h15, à la rue du Casino 9 à Yverdon-les-Bains, V._ a mis le feu au combustible se trouvant dans un container en plastique propriété de la commune, qui était adossé au [...]. Ce container a été détruit et la façade du bâtiment noircie. L'intervention des pompiers a permis de circonscrire le sinistre.
La commune d'Yverdon-les-Bains s'est constituée partie plaignante.
3.6
Du 1
er
septembre 2013 au 12 décembre 2013, date de son arrestation, le prévenu a régulièrement consommé des comprimés de Dormicum. Il en a notamment acquis entre 35 et 38 pièces ainsi qu'une plaquette de 10 comprimés auprès de [...] dit [...], entre 5 et 6 pièces auprès d’[...] dit [...], et une plaquette de dix comprimés auprès de [...] dit [...].
Depuis le 15 janvier 2012, date retenue dans sa dernière condamnation pour ce motif, il a également consommé des joints de marijuana. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
Le Ministère public a, de droit, la qualité pour faire appel, en application de l'art. 381 al. 1 CPP.
En l’occurrence, interjetés dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels interjetés par le Ministère public et par V._ sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
On examinera tout d’abord l'appel de V._ (ch. 4), puis celui du Ministère public (ch. 5).
4.
4.1
V._ conteste être l’auteur des incendies des 20 septembre, 15 novembre et 5 décembre 2013, correspondants aux cas 7 à 10 de l’acte d’accusation (cf. jugt, c. 3 ; c. 3.1 à 3.4
supra
, p. 17). Il invoque une violation de la présomption d’innocence et considère que les éléments de conviction retenus par les premiers juges sont insuffisants pour écarter un doute raisonnable.
4.1.1
La présomption d'innocence, qui est garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1; ATF 127 I 38 c. 2a).
Comme règle d'appréciation des preuves, elle est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 précité c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
4.1.2
En l’espèce, les premiers juges, qui, suivant le Parquet, ont écarté au bénéfice du doute l’implication de V._ dans les six premiers cas d’incendie décrits dans l’acte d’accusation, estimant insuffisants les indices à charge constitués par les liens spatio-temporels, ont en revanche retenu l’implication du prénommé dans les cas 7 à 10, dès lors que ceux-ci s’étaient déroulés après sa mise sous surveillance et à des moments où il se trouvait à l’extérieur de son domicile, l’heure de sortie, celle approximative de la mise à feu et celle de la rentrée à domicile étant concordantes (jugt, p. 32). De plus, selon le tribunal, ces éléments se conjuguent aux cibles privilégiées par l’auteur, qui a agi selon le même mode opératoire, aux indices statistiques identifiés par la police, qui a constaté une nette diminution des incendies pendant la détention du prévenu, à la pathologie psychiatrique de ce dernier (pyromanie), à ses antécédents d’incendiaire, au flagrant délit constituant le cas 11 de l’acte d’accusation (c. 3.5 p. 18
supra
), à sa personnalité dyssociale et à son comportement de dissimulation.
S’agissant tout d’abord de l’incendie survenu le 20 septembre 2013, (cas 7 de l’acte d’accusation ; c. 3.1 p. 17
supra
), V._ se borne à critiquer l’indice relatif à son absence de son domicile ce jour-là de 14h59 à 16h18 (jugt, p. 27), faisant valoir que le but de cette sortie n’était pas criminel. Cette critique serait fondée dans un cas isolé, s’il n’y avait pas, dans chacun des autres cas composant une série, comme dans celui-ci, concordance répétée entre les heures de sortie et les moments où les feux ont été allumés. Ce synchronisme vérifié ne peut être le fait du hasard ou d’une coïncidence malheureuse en raison de passages à l’acte d’un ou de plusieurs autres auteurs au moment précis de la journée où V._ avait l’occasion d’agir. De plus, comme le relève à juste titre le tribunal (jugt, p. 33), le prévenu connaissait cet immeuble de la rue des Philosophes, à Yverdon-les-Bains, pour y avoir déjà bouté le feu dans un garage le 1
er
avril 2010 et avoir failli périr dans l’incendie qui s’en était suivi. Ces éléments, ajoutés aux autres éléments de conviction du tribunal résumés ci-dessus, que l’appelant ne remet d’ailleurs pas en cause, permettent d’arrêter ici la démonstration de l’implication de l’intéressé dans ce cas.
Concernant le cas 8 de l’acte d’accusation (c. 3.2 p. 17
supra
) l’appelant se réfère au rapport d’incendie établi le 15 novembre 2013 par la Gendarmerie du Nord qui, alertée par la Police du Nord vaudois, s’était rendue sur place et avait indiqué : « L’enquête effectuée sur place ne nous a pas permis d’établir les faits. Il s’agit probablement d’un inconnu qui aurait jeté un mégot de cigarette dans la benne, lequel a bouté le feu aux déchets de chantier qui s’y trouvaient » (pièce 28). En réalité, la pure hypothèse d’un incendie accidentel a été présentée au terme d’une enquête plus que sommaire, au vu de sa brièveté et en méconnaissance des mesures de surveillance mises en place par les enquêteurs de la sûreté. L’explication avancée par les gendarmes ne reposant donc sur aucun élément précis, elle ne saurait alimenter un doute raisonnable en faveur de l’appelant. Il ressort en revanche des résultats des images de vidéosurveillance que, le jour des faits, V._ est sorti de chez lui à 11h07 et qu’il est rentré à 11h40, heure à laquelle l’incendie, survenu à proximité de son domicile, a été enregistré (pièce 105, p. 24
in fine
). En sus de cette concordance spatio-temporelle, qui, comme on l’a relevé ci-avant, ne constitue pas le seul élément mettant en cause l’appelant, contrairement à ce que prétend ce dernier, force est de constater que ce cas est de toute évidence en relation avec le cas 9, qui s’est produit l’après-midi du même jour, dans la même rue, à l’occasion d’une autre sortie de l’intéressé.
Pour ce cas (c. 3.3 p. 17
supra
), il résulte en effet des images de vidéosurveillance que V._ a quitté son domicile à 15h39 pour le regagner à 16h50 (pièce 105, p. 24
in fine
). L’appelant se limite à relever que cet incendie n’a pas suscité de plainte, ce qui est sans portée s’agissant d’une infraction se poursuivant d’office, et à affirmer que son horaire de sortie constitue une preuve insuffisante. Cette critique est inconsistante, dans la mesure où, comme on l’a indiqué ci-dessus, le recoupement entre l’heure des mises à feu et les sorties et rentrées du prévenu s’est systématiquement vérifié à plusieurs reprises.
Concernant l’incendie du 5 décembre 2013 (cas 10 de l’acte d’accusation ; c. 3.4 p. 17
supra
), l’horaire du feu, soit 10h45, concorde, pour ce cas également, avec la sortie de V._ de son domicile de 10h38 à 11h01 (pièce 105, p. 25). L’appelant conteste toutefois son implication en faisant valoir que ce feu est peu documenté dans le dossier. En réalité, il en est fait suffisamment état dans le rapport des enquêteurs (pièce 105, pp. 25 et 30, annexes 32 et 33). Par ailleurs, le prévenu critique comme insuffisante la concordance temporelle. Pour les motifs déjà exposés, ce moyen est vain. On ajoutera encore que les containers constituaient une cible favorite de l’appelant comme le démontre notamment le flagrant délit du cas 11.
En définitive, le moyen tiré d’une violation de la présomption d’innocence est mal fondé. Ainsi, en tant qu’il porte sur l’établissement des faits, l’appel de V._ doit être rejeté.
4.2
L’appelant s’en prend ensuite à la qualification d’incendie intentionnel en ce qui concerne le cas 11 (c. 3.5 p. 18
supra
), soit la mise à feu filmée (pièce 31) du contenu combustible (papier, carton et autres déchets) d’un container communal en plastique à proximité de la façade du Casino (jugt, pp. 25 et 28). Il soutient, d’une part, que le feu était maîtrisable par son auteur si bien qu’il n’y avait pas d’incendie et, d’autre part, que son intention était limitée à la commission de dommages à la propriété dans la mesure où il visait la destruction d’un bien déterminé.
4.2.1
A teneur de l’art. 221 al. 1 CP, celui qui, intentionnellement, aura causé un incendie et aura ainsi porté préjudice à autrui ou fait naître un danger collectif sera puni d’une peine privative de liberté de un an au moins.
La notion d’incendie, contenue dans cette disposition, vise un feu d’une telle ampleur qu’il ne peut plus être éteint par celui qui l’a allumé. Pour que l'infraction prévue par l'art. 221 al. 1 CP soit réalisée, il ne suffit toutefois pas que l'auteur ait intentionnellement causé un incendie. Cette disposition prévoit en effet un élément supplémentaire sous une forme alternative : soit l’auteur a causé ainsi un préjudice à autrui, soit il a fait naître un danger collectif. Par préjudice à autrui, il faut entendre le dommage patrimonial causé à un tiers et résultant directement des dégâts commis à la chose incendiée. Cette limitation découle de ce que l’incendie intentionnel est considéré comme un cas qualifié de dommages à la propriété (cf. art. 144 CP). La notion de danger collectif vise de manière générale une mise en péril, même relativement indéterminée au moment de l’acte, de n’importe quel bien juridiquement protégé, et non pas spécifiquement de la personne humaine. Elle est remplie lorsque existe le danger que le feu se propage (TF 6B_834/2008 du 20 janvier 2009 c. 2.1 et les références citées, not. ATF 117 IV 285 c. 2a).
4.2.2
En l’espèce, il ressort des images figurant au dossier (pièces 31 et 105, annexes 34 à 37) que le container était en plastique, entouré sur trois côtés par une haie de thuyas, la façade du Casino et un autre container, et qu’il était rempli de papiers et cartons au point que ceux-ci soulevaient son couvercle maintenu entrouvert par une chaîne. Le film montre que dès la mise à feu, le développement des flammes a été très rapide, puisqu’il a suffi d’une minute pour que le couvercle brûle et que les flammes s’élèvent à plus d’un mètre de haut. A l’évidence, ce feu n’était pas maîtrisable par son auteur qui s’était promptement esquivé ; fermer le couvercle en plastique ne l’aurait pas éteint, contrairement à ce que prétend l’appelant. On ne saurait retenir, dans ces circonstances, que l’auteur voulait seulement détruire, par un feu limité et maîtrisé, un objet déterminé. Par conséquent, l’ampleur de l’incendie est manifestement avérée. Les deux conditions alternatives posées par l’art. 221 al. 1 CP sont également réalisées. D’une part, le prévenu a causé un préjudice à la commune d’Yverdon-les-Bains, propriétaire du container ; d’autre part, dès lors que celui-ci n’était pas en métal mais en plastique, qu’il était rempli de papiers et de cartons et qu’il se trouvait près d’une façade, qui a d’ailleurs été noircie par le feu, il existait un danger réel que le feu se propage.
Toutes les conditions de l’incendie intentionnel étant réalisées, la condamnation de V._ pour ce chef d’accusation doit donc être confirmée. Cette infraction est également réalisée dans les autres cas (7 à 10) – ce qui n’est en soi pas contesté –, étant précisé que dans le cas 8 elle ne l’est que sous forme de tentative.
Partant, mal fondé, le grief de fausse application de l’art. 221 al. 1 CP doit être rejeté.
4.3
V._ ne discute pas de la peine en soi ; il se limite à conclure au prononcé d’une peine inférieure à celle qui lui a été infligée par le Tribunal correctionnel, en partant de la prémisse qu’il est libéré du chef d’accusation d’incendie intentionnel et de tentative de ce crime, subsidiairement qu’il est retenu coupable d’incendie intentionnel dans le seul cas 11, alors que tel n’est pas le cas.
Pour le surplus, la Cour d'appel pénale est d'avis qu'une peine privative de liberté de quatre ans se justifie en l'occurrence, malgré la diminution légère de la responsabilité, au vu du minimum légal d’un an prévu par l’art. 221 al. 1 CP, de la gravité des faits, de la répétition des actes sur une courte période, soit quatre incendies et une tentative d’incendie en trois mois et demi, du concours d’infractions, des mauvais antécédents, de la récidive malgré les précédents traitements, de l’absence de collaboration et du défaut de prise de conscience des risques que l’appelant a fait encourir aux autres, en particulier s’agissant du cas 7, où il a bouté le feu à des objets se trouvant dans la cave d’un bâtiment, créant un danger potentiel de propagation de l’incendie dans les appartements de l’immeuble.
La peine privative de liberté de quatre ans a ainsi été fixée conformément à l'art. 47 CP. Elle peut donc être confirmée.
4.4
Pour le reste, tant l
'amende de 500 fr. que la peine privative de liberté de substitution de 5 jours réprimant la contravention à la LStup, qui ne sont pas contestées, sont adéquates et peuvent être confirmées.
4.5
En définitive, l’appel de V._ doit être rejeté.
5.
Le Ministère public soutient qu’un traitement institutionnel des troubles mentaux au sens de l’art. 59 CP aurait dû être préféré à un traitement ambulatoire selon l’art. 63 CP et qu’il devrait être ordonné conjointement au traitement institutionnel des addictions au sens de l’art. 60 CP. Il invoque l’échec des précédentes mesures ordonnées en 2011, faisant valoir que la volonté et la collaboration du prévenu, sur lesquelles ces mesures reposeraient, feraient en l’occurrence défaut. Ce dernier, en revanche, s’oppose à tout traitement institutionnel au sens de l’art. 59 CP, concluant au maintien, en cas de condamnation pour incendie intentionnel, du traitement ambulatoire des troubles mentaux selon l’art. 63 CP.
5.1
Conformément à l’art. 56 al. 1 CP, une mesure doit être ordonnée si une peine seule ne peut écarter le danger que l’auteur commette d’autres infractions, si l’auteur a besoin d’un traitement ou que la sécurité publique l’exige, et si les conditions prévues aux art. 59 à 61, 63 ou 64 CP sont remplies. Le prononcé d’une mesure suppose que l’atteinte aux droits de la personnalité qui en résulte pour l’auteur ne soit pas disproportionnée au regard de la vraisemblance qu’il commette de nouvelles infractions et de leur gravité (art. 56 al. 2 CP).
Le prononcé d’une mesure thérapeutique institutionnelle selon l’art. 59 CP suppose un grave trouble mental au moment de l’infraction, lequel doit encore exister lors du jugement. Outre l’exigence d’un grave trouble mental, l’art. 59 aI. 1 CP suppose que l’auteur ait commis un crime ou un délit en relation avec ce trouble (let. a) et qu’il soit à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce dernier (let. b). Il doit être suffisamment vraisemblable que le traitement entraînera, dans les cinq ans de sa durée normale, une réduction nette du risque que l’intéressé commette de nouvelles infractions. La seule possibilité vague d’une diminution du danger ne suffit pas (ATF 134 IV 315 op. cit. c. 3.4.1; TF 6B_77/2012 du 18 juin 2012; TF 6B_784/2010 du 2 décembre 2010 c. 2.1).
La loi ne précise pas ce qu’elle entend par trouble « grave » ; c’est la jurisprudence qui a défini cette notion. Selon la jurisprudence, toute anomalie mentale du point de vue médical ne suffit pas. Seuls certains états psychopathologiques d’une certaine importance et seules certaines formes relativement lourdes de maladies mentales au sens médical peuvent être qualifiés d’anomalies mentales au sens juridique (TF 6B_784/2010 précité c. 2.1). En d’autres termes, il faut que la structure mentale de l’intéressé s’écarte manifestement de la moyenne par rapport aux autres sujets de droit, mais plus encore par rapport aux autres criminels (Message du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse [dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal], FF 1999 p. 1812). La référence à la gravité du trouble mental ne correspond pas à une description quantitative du dérangement psychique, mais signifie uniquement que le trouble mental doit être significatif sur le plan psychiatrique comme sur le plan juridique (TF 6B_77/2012 précité).
En règle générale, le traitement institutionnel s’effectue dans un établissement psychiatrique approprié ou dans un établissement d’exécution des mesures (art. 59 al. 2 CP). L’art. 59 al. 3 CP prévoit que, tant qu’il existe un risque de fuite ou de récidive, le traitement doit être exécuté dans un établissement fermé; il peut aussi être effectué dans un établissement pénitentiaire au sens de l'art. 76 al. 2 CP, dans la mesure où le traitement thérapeutique nécessaire est assuré par du personnel qualifié (art. 59 al. 3, 2
e
phr., CP).
Le risque de récidive doit être concret et hautement probable, c’est-à-dire résulter de l’appréciation d’une série de circonstances. Il vise cette fois la dangerosité interne du prévenu. Présente ce caractère le délinquant dont l'état mental est si gravement atteint qu'il est fortement à craindre qu'il commette de nouvelles infractions. Il convient à cet égard de tenir compte de l'imminence et de la gravité du danger, ainsi que de la nature et de l'importance du bien juridique menacé. Lorsque des biens juridiques importants, tels que la vie ou l'intégrité corporelle, sont mis en péril, il faut se montrer moins exigeant quant à l'imminence et à la gravité du danger que lorsque des biens de moindre valeur, tels que la propriété ou le patrimoine, sont menacés (ATF 127 IV 1 c. 2a). Au regard du principe de la proportionnalité, le placement dans un établissement fermé ne peut être ordonné que lorsque le comportement ou l’état du condamné représente une grave mise en danger pour la sécurité et l’ordre dans l’établissement (TF 6B_1045/2013 du 14 avril 2014; TF 6B_205/2012 du 27 juillet 2012 c. 3.2.2; TF 6B_384/2010 du 15 septembre 2010 c. 2.1.2; TF 6B_629/2009 du 21 décembre 2009 c. 1.2.2.2).
Au lieu d'un traitement institutionnel, le juge ordonne un traitement ambulatoire à la double condition que l'auteur a commis un acte punissable en relation avec cet état et qu'il est à prévoir que ce traitement le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce même état (art. 63 al. 1 CP).
Pour ordonner une des mesures prévues aux art. 59 à 61, 63 et 64 CP, le juge doit se fonder sur une expertise. Celle-ci doit se déterminer sur la nécessité et les chances de succès d'un traitement, la vraisemblance que l'auteur commette d'autres infractions et la nature de celles-ci, et sur les possibilités de faire exécuter la mesure (art. 56 al. 3 CP). Selon la jurisprudence, le juge apprécie en principe librement une expertise. Il ne peut toutefois s'en écarter sans motifs valables et sérieux. Il est notamment admis qu'il le fasse, lorsque, dans son rapport, l'expert s'est contredit, lorsqu'il s'est écarté dans un rapport complémentaire de l'avis exprimé dans un premier rapport, lorsqu'une nouvelle expertise ordonnée aboutit à des conclusions différentes ou encore lorsqu'une expertise est fondée sur des pièces ou sur des témoignages dont la valeur probante ou le contenu sont appréciés différemment par le juge. Il faut donc que des circonstances bien établies viennent ébranler sérieusement la crédibilité de l'expertise pour que le juge puisse s'en écarter et il doit alors motiver sa décision sur ce point (ATF 133 II 384 c. 4.2.3; ATF 129 I 49 c. 4; ATF 128 I 81 c. 2;
ATF 118 Ia 144
c. 1c ; ATF
107 IV 7
consid. 5 p. 8 et les arrêts cités).
5.2
5.2.1
En l'espèce, il convient en premier lieu de constater que le prononcé d'une mesure pour traiter les troubles mentaux dont souffre V._ est justifié, ce que celui-ci ne conteste d'ailleurs pas, puisqu'il conclut à la poursuite du traitement ambulatoire des troubles mentaux au sens de l'art. 63 CP ordonné en 2011 si sa condamnation pour incendie intentionnel devait être confirmée, ce qui est le cas (c. 4.2.2
supra
). En effet, dans son expertise psychiatrique actualisée du 13 juin 2014 – qui satisfait aux exigences de l’art. 56 al. 3 CP –, le Dr J._ a confirmé, en sus d'une problématique addictive complexe – soit un syndrome de dépendance à des substances multiples (opiacés, actuellement abstinent sous traitement substitutif ; alcool et benzodiazépines en utilisation continue) et une utilisation de substances multiples nocives pour la santé (cocaïne et cannabis) (pièce 42, p. 12 ; pièce 95, p. 3) –, les diagnostics retenus en 2010 de pyromanie et de personnalité dyssociale (pièce 95, p. 4), qualifiés de graves (pièce 42, pp. 8 et 10). Il a en outre confirmé le lien entre cette pathologie et les actes illicites commis, le risque de récidive important et la nécessité d'un traitement des troubles mentaux en vue de diminuer ce risque (pièce 42, p. 11 ; jugt, p. 4), éléments qui ne sont pas discutés par les parties.
Le Parquet conteste le choix de la mesure visant à traiter les troubles mentaux opéré par les premiers juges, considérant qu'un traitement institutionnel au sens de l’art. 59 CP aurait dû être préféré à un traitement ambulatoire au sens de l’art. 63 CP.
5.2.2
Dans son précédent jugement du 17 mars 2011 (pièce 32), suivant les conclusions de l’expert J._ (P. 42), le Tribunal correctionnel de la Broye et du Nord vaudois avait condamné V._ pour notamment incendie intentionnel et tentative de ce crime et ordonné qu’il soit soumis conjointement à un traitement institutionnel des addictions (art. 60 CP) et à un traitement psychiatrique ambulatoire des troubles de sa personnalité (63 CP). Ce jugement comportait l’avertissement (c. 4.1
in fine
, p. 17) qu’en cas d’échec de ces mesures et de reprise des agissements pyromanes, la seule alternative pourrait, un jour, tenir à une nouvelle incarcération, voire à un internement de sécurité. Ensuite de ce jugement, le traitement institutionnel des addictions à la fondation l’[...] avait rapidement été levé par le Juge d’application des peines, en raison du manque de collaboration de l’intéressé à intégrer une autre institution que l’[...] qui estimait ne pas lui offrir un cadre assez contenant (pièce 51/3). L’Office d’exécution des peines avait confié le mandat médico-légal lié au traitement psychiatrique ambulatoire ressortant du jugement du 17 mars 2011 à l’[...], puis à la Dresse [...], qui a suivi l’intéressé jusqu’à son interpellation, le 12 décembre 2013.
Dans la présente cause, les premiers juges, tout en qualifiant le précédent placement auprès de l'[...] et le traitement psychiatrique ambulatoire ordonné en 2011 d'échecs (p. 37), ont derechef ordonné un traitement des addictions en application de l'art. 60 CP et, conjointement, la poursuite du traitement ambulatoire des troubles mentaux au sens de l’art. 63 CP. Dans leur discussion sur ce point, ils ont repris l’analyse de l’expert, le même Dr J._, et ses propositions – telles qu'elles ressortent de son expertise psychiatrique actualisée (pièce 95) et de son audition (jugt, pp. 4 ss) –, faute de pouvoir s’en distancer (jugt, pp. 39 et 40). Celui-ci a en effet indiqué qu'il ne fallait pas conclure trop rapidement à l’inefficacité des mesures ordonnées en 2011 (pièce 95, p. 3); selon lui, d'une part, la prise en charge aurait été levée trop rapidement et n’aurait pas permis une stabilisation et un soutien par rapport aux consommations et, d'autre part, le traitement ambulatoire aurait dû être assuré non par un médecin indépendant exerçant en cabinet, mais par une unité de traitement avec prise en charge globale et pluridisciplinaire (jugt, p. 4). Les mesures n’auraient ainsi pas été mal ciblées, mais mal exécutées. L'expert a relevé que les passages à l’acte étaient intervenus dans un contexte de vulnérabilité favorisé par trois facteurs, soit une diminution de la posologie de méthadone, une augmentation de la consommation de benzodiazépines acquises au marché noir et une diminution progressive des rencontres avec le psychiatre traitant (pièce 95, pp. 4 et 5).
Le Ministère public insiste sur l’échec des mêmes précédentes mesures en invoquant le fait qu’elles reposent en définitive, à dires d’expert, sur la volonté ou la collaboration du prévenu, qui ferait en l'occurrence défaut.
L'appelant a raison. Dans sa précédente expertise du 28 octobre 2010, l'expert avait indiquait que la consommation d'alcool et de stupéfiants "revêt[ait] [chez V._] une fonction facilitatrice ou désinhibitrice lorsqu'il s'agi[ssait] de perpétrer des incendies volontaires" (pièce 42, p. 9). Tout en préconisant, à l'époque, le placement du prénommé à l'[...], il avait précisé que la collaboration du patient était "un ingrédient indispensable pour assurer un certain succès à ce traitement" (ibidem). A l'audience du 16 septembre 2014, il a préconisé, pour lutter contre le risque de récidive, d’agir sur les facteurs favorisants qu’étaient les addictions par un traitement dans un cadre institutionnel strict, comme la fondation [...], tout en assurant un soutien psychiatrique serré et continu, la personnalité dyssociale comme trouble de la personnalité dont la pyromanie constituait un aspect étant, quant à elle, peu susceptible d’être traitée favorablement (jugt, pp. 4 et 6). Il a toutefois précisé que ce placement, à l'instar du précédent, reposait sur la collaboration (jugt, p. 6). Or, V._ a, en cours de procédure, exprimé sa réticence à séjourner à [...], aux [...] ou au [...] (jugt, p. 9). Certes, il a ensuite dit être disposé à séjourner à la fondation [...], auprès de laquelle il aurait d'ailleurs fait une demande dans ce sens (p. 3 supra), mais cette démarche paraissait, au vu des circonstances, plutôt dictée par l'approche du jugement que par l'intention de se faire soigner. D'ailleurs, en 2011 déjà, ensuite de l'échec du séjour à l'[...], une prise en charge par la fondation [...] avait été envisagée, mais le prévenu ne s’était pas présenté au premier rendez-vous et cette fondation était restée sans nouvelles de lui (jugt, p. 14). Un tel traitement ne paraît pas plus envisageable aujourd'hui, compte tenu du manque de collaboration du prévenu, qui, à dires d'expert, "a eu [jusqu'à maintenant] peu de conscience morbide et n'a pas fait preuve vraiment de l'investissement qu'il aurait fallu" (jugt, p. 5
in fine
) ; il l'est d'autant moins si l'on tient compte du fait que l'intéressé a, au terme de l'exécution de la peine de six ans prononcée en 1995, préféré le régime d’incarcération semi-ouvert plutôt que d'intégrer le foyer de l'[...] (proposé par le Service de médecine et de psychiatrie pénitentiaires), qui offre, selon l'expert, un cadre moins strict que [...]. On s'étonne de ce que, dans ces conditions, l'expert, qui connaissait ces faits (pièce 42, p. 9), ait néanmoins préconisé, dans son expertise de 2010, un placement à l'[...], d'autant plus que cette institution se consacre, selon ses propres explications, avant tout à la prise en charge de l'alcool plutôt qu'aux autres dépendances (jugt, p. 6), alors que le prévenu présentait, déjà à l'époque et depuis plusieurs années, une addiction à des substances multiples et consommait également – certes sporadiquement – de la cocaïne et du cannabis (pièce 42, p. 8) ; dans son rapport d’expertise de juin 2014, il a d’ailleurs lui-même relevé que le prévenu contrôlait « mal sa consommation de benzodiazépines, de cannabis et de cocaïne » (pièce 95, p. 3
in fine
). Il n'est pas surprenant, dans ces circonstances, que V._ ait fait échec à son placement à l'[...] et que cette fondation ait mis fin au séjour, après seulement quatre mois, aux motifs que le cadre communautaire était devenu difficilement supportable pour l’intéressé et qu'un contrôle d’urine avait révélé une consommation de cocaïne, notamment (jugt, p. 14). Quant à la levée de la mesure par le Juge d’application des peines, qualifiée par l’expert de « prématurée » (jugt, p. 4), elle était justifiée par l’absence de collaboration de l’intéressé. Quoiqu’en dise l’expert, cette appréciation juridique est confortée
a posteriori
par le manque de compliance du prévenu à intégrer, aujourd'hui encore, une institution en vue de soigner ses addictions (jugt, p. 9), malgré sa récidive et la reprise de ses consommations.
S’agissant du traitement ambulatoire des troubles mentaux, l'expert a expliqué qu'il aurait dû être assuré non par un médecin indépendant exerçant en cabinet, mais par une unité de traitement avec prise en charge globale et pluridisciplinaire, comme l’[...] (jugt, pp. 4 et 7). Or, en 2011, V._ avait déjà été suivi par une telle structure (pièce 51/4), ainsi que l’expert l’avait préconisé dans sa précédente expertise de 2010 (pièce 42, p. 11). On ignore toutefois les raisons pour lesquelles l’Office d’exécution des peines a ensuite confié le mandat à la Dresse [...] (pièce 51/5). Quoiqu’il en soit, l’expert a, à l’audience de première instance, expliqué que le succès de la prise en charge ambulatoire, à l’instar du traitement institutionnel des addictions, se basait sur la volonté de l’expertisé, que, si celui-ci « met[tait] les pieds au mur », il y aurait un risque de nouveau passage à l’acte et que, s’il décidait de ne pas se traiter, une mesure sous forme de l’art. 59 CP serait la seule solution, inévitable (jugt, pp. 4 et 6). En 2010, il avait déjà souligné que le traitement ambulatoire des troubles mentaux n’était efficace que si l’expertisé « y voyait un intérêt et une pertinence », que tel n’avait pas été le cas jusqu’alors, mais que le prévenu avait noué un rapport de confiance avec une collègue psychiatre du SMPP durant sa détention et que l’on pouvait espérer qu’une relation de même nature se tisse avec un thérapeute de l’[...] d’Yverdon, lui permettant de « jouir d’une expérience correctrice » (pièce 42, p. 12). Outre le fait qu’on ne voit pas comment l’expertisé aurait pu nouer un tel rapport dans le cadre de la prise en charge globale et pluridisciplinaire offerte par l’[...], au vu des explications offertes sur ce point par l’expert (jugt, p. 4), l’intéressé, qui, après sa condamnation de 2011, a été suivi par la Dresse [...] pendant deux ans et demi, jusqu’au jour de son arrestation, en décembre 2013, a admis ne lui avoir pas « tout dit », en particulier lui avoir caché sa consommation de Dormicum, et n’avoir ainsi « pas forcément été honnête », alors qu’il prétend avoir eu un excellent rapport avec elle (jugt, p. 8 ; pièce 95, p. 3
in initio
). A cela s’ajoute qu’il persiste à nier son implication dans la plupart des incendies retenus par les premiers juges et à minimiser le seul cas qu’il a reconnu en expliquant qu’il s’agissait d’un « hasard comme en cas d’accident de la circulation routière » (jugt, p. 8). On ne saurait dire, dans ces conditions, que le prévenu, qui n’a qu’une faible conscience de sa maladie (pièce 42, p. 12), fait preuve d’une volonté sincère de se faire soigner ou qu’il est collaborant, pas plus qu’il ne l’a été auparavant. L’expert a toutefois relevé que la seule façon de « mobiliser V._ pour qu’il participe de façon active à la prise en charge » était « une menace de l’art. 59 CP » (jugt, p. 5
in initio
). Outre le fait qu’un éventuel traitement dans un cadre « plus strict », mesure nécessaire afin de contenir le risque de récidive (jugt, p. 5), repose sur la collaboration du prénommé et que celle-ci fait défaut, comme on l’a vu ci-dessus, force est de constater que l’intéressé avait déjà été averti par le Tribunal correctionnel dans son jugement de mars 2011 qu’en cas de récidive, « la seule autre alternative pourrait un jour tenir à une nouvelle incarcération, voire un internement de sécurité » (pièce 32, c. 4.1
in fine
, p. 17). L’expert a indiqué à ce propos que cela ne changeait pas fondamentalement sa position et que celle-ci relevait d’une « approche optimiste et d’un pari », ainsi que de « la croyance en la vertu de l’expérience » (jugt, p. 6). Or, dans son expertise de 2010, il avait déjà fait preuve d’un certain optimisme en retenant que malgré ses chances « modestes » de succès, un traitement ambulatoire des troubles mentaux méritait « d’être tenté » (pièce 42, p. 12, où l’expert utilise également le terme de « pari ») ; ce traitement s’est toutefois révélé être un échec. Enfin, dans cette même expertise, il était mentionné qu’il n’y avait pas eu d’incendies récents dans des lieux qui auraient pu mettre en danger la vie d’autrui, tels q’une cave ou les couloirs dans l’immeuble, ce dont l’expert avait tenu compte dans son analyse (p. 14) ; contrairement à la situation de l’époque, le prévenu est aujourd’hui mis en cause pour avoir notamment bouté le feu à la cave d’un immeuble, ce qui a provoqué la propagation des flammes dans d’autres caves, seule l’intervention des pompiers ayant permis de circonscrire le sinistre (c. 3.1 p. 17
supra
). Ce comportement est d’autant plus préoccupant que l’intéressé connaissait cet immeuble car il y avait déjà commis un incendie en 2010, qui avait du reste failli lui coûter la vie (pièce 32, c. 3.3 pp. 14 et 15) ; l’expert avait d’ailleurs pronostiqué une « croissance » dans l’activité délictuelle du prévenu en cas d’échec des traitements préconisés (pièce 32, p. 4
in fine
), ce qui a effectivement été le cas.
Au regard de ces éléments, un traitement ambulatoire des troubles mentaux au sens de l’art. 63 CP, préconisé par l’expert, n’a pas de sens, au vu de l’échec du précédent traitement mis en place en 2011, du manque de collaboration de V._, de sa grave pathologie et du lien entre cette pathologie et les actes illicites commis, le prénommé ayant récidivé dans des infractions du même genre en cours de traitement. Le prononcé d’un traitement institutionnel est la seule mesure apte à réduire le risque de commission de nouvelles infractions. Le traitement de la pyromanie dont souffre le prénommé, en tant qu « épiphénomène de sa personnalité dissociable » est certes difficile (jugt, p. 4
in fine
), mais pas impossible, l’expert préconisant un traitement de longue durée (jugt, p. 6
in initio
). Le prévenu représente un danger pour autrui ; il a besoin de soin et d'une prise en charge dans un cadre strict, étant relevé qu’un traitement ambulatoire impliquerait aussi un risque qu’il se mette lui-même en danger, comme cela a été le cas en 2010. Le choix d'un traitement institutionnel s'avère ainsi le seul approprié. L’expert a d’ailleurs lui-même indiqué que le prévenu avait « épuisé les mesures thérapeutiques et institutionnelles ambulatoires qui lui [avaient] été proposées » et qu’il avait « grillé ses dernières cartouches » (jugt, p. 5).
Quant au choix du milieu ouvert ou fermé, il dépend de la question de savoir s’il y a lieu de craindre que l’auteur ne s’enfuie ou ne commette de nouvelles infractions (art. 59 al. 3, 1
ère
phr., CP). Sur ce point, l’expert ne doit pas spécifiquement se prononcer, dans la mesure où cela relève du domaine de la sécurité publique, plus que de la médecine. En l’occurrence, le prévenu nie sa maladie et n’est pas compliant au traitement prescrit, ce qui l’expose à un risque de récidive élevé. En outre, il a commis, en seulement trois mois, quatre incendies intentionnels et une tentative. Dans ces circonstances, la sécurité publique commande que le traitement débute en milieu fermé.
L’appel du Ministère public doit donc être admis. Le chiffre III
du dispositif du jugement attaqué sera dès lors modifié en ce sens qu’il est ordonné
que V._ soit soumis à un traitement institutionnel de ses troubles mentaux dans un établissement fermé au sens de l’art. 59 al. 3 CP.
5.2.3
Enfin, se pose le problème de la compatibilité entre cette mesure et celle de l’art. 60 CP (cf. art. 56a CP), le traitement psychique institutionnel et le traitement institutionnel des addictions ne pouvant en principe pas être exécutés simultanément, le juge devant alors choisir la mesure la plus appropriée (Favre et al., Code pénal annoté, 3
e
éd, n. 1.2 ad art. 56a CP). En revanche, selon un arrêt de la Cour de cassation vaudoise du 8 septembre 2008 (n° 334, publié in JT 2008 IV 85), les mesures thérapeutiques institutionnelles de l’art. 59 CP permettent d’inclure un traitement institutionnel des addictions au sens de l’art. 60 CP. Une partie de la doctrine ne partage toutefois pas cet avis en énonçant que la combinaison des art. 59 et 60 CP est difficilement imaginable en pratique, les atteintes moins graves pour l’auteur de la mesure de l’art. 60 CP devant en principe l’emporter conformément au principe de l’art. 56a al. 1 CP (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 3 ad art. 56a CP). L'art. 56a CP rappelle que si plusieurs mesures s'avèrent appropriées, mais qu'une seule est nécessaire, le juge ordonne celle qui porte à l'auteur les atteintes les moins graves. En effet, eu égard à la gravité de l'atteinte à la liberté personnelle que constitue le traitement institutionnel, cas échéant dans un milieu fermé, cette mesure ne doit être ordonnée qu'à titre d'
ultima ratio
lorsque la dangerosité ne peut être écartée autrement (
ATF 118 IV 108
c. 2a p. 113), ce qui est le cas en l’occurrence. Il s’ensuit qu’un traitement ambulatoire des addictions au sens de l’art. 63 CP doit être ordonné conjointement au traitement institutionnel des troubles mentaux en milieu fermé au sens de l’art. 59 al. 3 CP.
Le chiffre IV du dispositif du jugement attaqué sera donc modifié dans ce sens.
6.
6.1
En conclusion, l’appel de V._ est rejeté. Celui du Ministère public est admis et le jugement attaqué modifié dans le sens des considérants qui précèdent ; il est confirmé pour le surplus.
6.2
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel,
comprenant l’indemnité allouée au défenseur d’office de V._, arrêtée à 2’872 fr. 80, TVA et débours compris, selon liste des opérations (pièce 144), seront mis
à la charge du prévenu, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP).
6.3
V._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l'indemnité en faveur de son défenseur d'office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bb151db7-1ffd-4beb-bd93-d47fbda4b119 | En fait :
A.
Par jugement du 26 juin 2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a libéré A.S._ de l’accusation d’infraction à l’art. 87 de la Loi fédérale sur l’assurance vieillesse et survivants (I), a constaté qu’il s’est rendu coupable d’abus de confiance, escroquerie, faux dans les titres, faux dans les certificats et infraction à la Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité (ci-après : LPP) (II), l’a condamné à 15 mois de peine privative de liberté, avec sursis pendant 2 ans (III), a dit qu’il est le débiteur de la Caisse T._ et lui doit immédiat paiement des montants de 20'032 fr. et 37'096 fr. 95 au titre du dommage matériel subi et a renvoyé pour le surplus la Caisse T._ à agir devant le juge civil (IV), a dit que A.S._ est le débiteur de G._ et lui doit immédiat paiement de la somme de 88'169 fr. 80, au titre du dommage matériel subi (V), a renvoyé H._ à agir devant le juge civil (VI), a rejeté la conclusion en dépens pénaux de H._ (VII), a dit que les objets séquestrés sous fiche numéro 2453 seront confisqués et maintenus au dossier au titre de pièces à conviction (VIII), a mis à la charge de A.S._ une partie des frais de procédure arrêtés à 37'097 fr., y compris l’indemnité allouée à son conseil d’office, l’avocat Jérôme Campart, par 19'374 fr. 10 TTC, sous déduction de 7'292 fr. 50, d’ores et déjà perçus, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (IX), et a dit que l’indemnité allouée sous chiffre IX ci-dessus sera exigible pour autant que la situation financière de A.S._ le permette (X).
B.
Le 4 juillet 2014, A.S._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d’appel du 25 août 2014, il a conclu à la modification des chiffres II, III, IV et V en ce sens qu’il ne s’est pas rendu coupable des infractions d’escroquerie et de faux dans les titres dans les cas G._ et R._ et de faux dans les certificats dans le cas M._, qu’il bénéficie d’une réduction de peine et qu’il n’est pas reconnu débiteur de la Caisse T._ de la somme de 37'096 fr. 95 et de G._ de la somme de 88'169 fr. 80.
Par déterminations du 12 septembre 2014, respectivement du 15 septembre 2014, la Caisse T._ et G._ ont conclu au rejet de l’appel interjeté par A.S._.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
A.S._ est né le 1
er
juillet 1945 à [...] au Congo, pays dont il est ressortissant. Il est le troisième d’une famille de cinq enfants. Il a suivi sa scolarité obligatoire à Kinshasa, au Congo. Après l’obtention de son baccalauréat en 1972, il est venu en Suisse, à [...], faire un stage au sein de l’entreprise [...]. Il est ensuite retourné dans son pays, où il a travaillé en qualité de gérant d’un centre commercial. A la suite des problèmes politiques qui ont secoué son pays, le prévenu est venu s’établir en Suisse à [...] puis à [...]. Il a exercé divers métiers. Jusqu’à sa retraite en 2010, il a œuvré pour l’association I._ (ci-après : I._). Il réalisait en moyenne un revenu de 2'000 fr. par mois. Il touche actuellement une rente AVS de 1'600 fr. par mois, ainsi qu’un montant mensuel de 440 fr. au titre de sa LPP.
A.S._ a épousé B.S._ en 1967. Quatre filles et un garçon, tous majeurs, sont nés de cette union. Le prévenu a également eu deux enfants hors mariage dans son pays d’origine, dont un enfant majeur mais handicapé. Des démarches pour avoir leur garde sont en cours. L'épouse du prévenu est à l’AI. Elle perçoit une rente mensuelle de 1'200 fr., ainsi que 200 fr. par mois de sa LPP. Le prévenu n’a pas d’autres revenus. Il a des dettes pour environ 80'000 francs. Il possède deux voitures qu'il n'utiliserait pas. Il est au bénéfice d’un permis C.
Son casier judiciaire suisse ne comporte pas d’inscription.
En cours d’enquête, A.S._ a fait l’objet d’une expertise psychiatrique (P. 121). Il ressort du rapport du Centre d’expertises de l’Institut de psychiatrie légale de Céry du 5 juillet 2012 que le prévenu souffre de troubles mentaux, de troubles du comportement liés à l’utilisation d’alcool ainsi que d’un syndrome de dépendance à l’alcool, actuellement abstinent. Les experts psychiatres estiment qu’ils ne peuvent que difficilement attribuer à des troubles cognitifs les délits qui sont reprochés à l’intéressé, car ceux-ci sont en lien avec des activités comptables complexes incompatibles avec de tels troubles. Pour les experts, il est possible que le prévenu ne se souvienne pas de certains éléments en raison de ses troubles cognitifs documentés, état de fait non vérifiable. La faculté de A.S._ d’apprécier le caractère illicite de ses actes et de se déterminer d’après cette appréciation n’est pas restreinte bien que sa mémoire soit altérée. Le risque de récidive est très faible à dire d’experts.
2.
2.1
En 1982, A.S._ a créé l’association B._, ci-après l’association B._, qui avait pour but de promouvoir l’entraide entre ressortissants de pays africains établis en Suisse. Parmi les activités pratiquées figurait la récupération d’avoirs AVS ou LPP pour des personnes ayant quitté la Suisse ou pouvant disposer de leurs avoirs de prévoyance pour d’autres motifs. En 2008, pour les mêmes raisons et dans les mêmes buts, A.S._ a fondé l’association I._.
Outre leurs activités légales, ces deux associations, dirigées par A.S._, ont procédé à des retraits illicites d’avoirs AVS et LPP, tantôt avec le consentement des bénéficiaires, tantôt à leur insu ou en leur dissimulant l’importance des sommes récupérées pour leur compte.
Pour mener à bien son entreprise, A.S._ a successivement disposé de deux boîtes postales auprès de la poste centrale de Kinshasa, à savoir la BP [...], puis la BP [...], au moyen de complicités locales. Ces adresses, qu’il contrôlait, étaient systématiquement données aux caisses et autres fondations dépositaires des avoirs à recouvrer comme étant celles des bénéficiaires des remboursements à venir. A.S._ et ses complices recevaient ainsi tous les courriers destinés aux intéressés.
A.S._, dont la famille dispose de plusieurs appartements ou maisons à Kinshasa, a en outre utilisé à de nombreuses reprises les adresses de ceux-ci pour y domicilier fictivement des candidats au recouvrement d’avoirs.
2.2
A fin 2005, G._ a pris contact avec A.S._ pour récupérer ses avoirs LPP et lui a remis à cette fin sa carte AVS et une procuration. Par l’intermédiaire de l’association B._, A.S._ a ensuite présenté une demande de remboursement auprès de la Fondation de libre passage d’O._, sur laquelle il a signalé que G._ était désormais installé à Kinshasa et mentionné qu’une copie de son envoi était transmise à l’intéressé, avec pour adresse la BP [...]. Il a encore indiqué le numéro du compte postal de l’association B._ pour réceptionner les fonds. En annexe à son courrier, A.S._ a joint une attestation de résidence certifiant que G._ était domicilié Rue [...] à Kinshasa, alors que l’intéressé n’a en réalité jamais cessé de résider en Suisse depuis son arrivée en 1983. L'adresse communiquée était en fait celle d’une propriété de la famille de A.S._ à Kinshasa.
Sur cette base, le 21 février 2006, l’institution concernée a viré 165'669 fr. 80 sur le compte postal ouvert au nom de l’association B._. Elle a envoyé copie de la confirmation de paiement à l’adresse BP [...].
Lorsque A.S._ a rencontré G._, au printemps 2006, pour lui restituer les fonds, il lui a remis un relevé falsifié à l’en-tête de la Fondation de libre passage d’O._ faisant état d’un remboursement de 83'451 fr. 05. Le prévenu, qui s’octroyait de surcroît une commission pour ses services, a remis en espèces 75'000 fr. environ à G._. Par la suite, courant 2006, il lui a encore fait virer 2'500 francs. Il a conservé le solde des 165'669 fr. 80 pour son usage et celui de l’association.
2.3
Le 21 novembre 2007, A.S._ a fait parvenir à
la Caisse T._, par l’intermédiaire d’un avocat, une demande de remboursement des cotisations AVS de M._. A l’appui de la demande, une attestation de résidence à Kinshasa et une copie de passeport ont été fournies. Sur cette base, la Caisse T._ a versé, en février 2008, la somme de 32'441 fr. 50 sur le compte bancaire de cet avocat. En date du 22 février 2008, ce montant a été transféré sur le compte no [...] détenu par l'épouse du prévenu, B.S._, auprès de la banque [...].
Ensuite notamment des constatations insolites faites dans le cadre d’autres dossiers, la Caisse T._ a fait vérifier par l’Office fédéral des migrations (ci-après : ODM) les données transmises lors de la demande de remboursement. Il en est ressorti que cette demande n’émanait pas de M._.
En réalité, A.S._ a établi, respectivement fait établir, de faux documents en vue de percevoir et de conserver les cotisations AVS de M._.
La Caisse T._ a déposé plainte contre inconnu par courrier du 21 septembre 2011, prenant des conclusions civiles à hauteur de 32'441 fr. 50.
2.4
En mai 2010, A.S._, par le biais de l’association B._, a adressé à la Caisse T._ une demande de remboursement des cotisations AVS au nom de R._ et prétendument signée par celui-ci. A l’appui de sa demande, il a notamment joint une attestation de résidence établissant le domicile de l’intéressé Rue [...] à Kinshasa, une attestation de célibat et une procuration à lui conférée par le demandeur. Sur requête de la Caisse T._, A.S._ a encore adressé une nouvelle procuration de R._ légalisée par un notaire de Kinshasa.
Sur cette base, le 6 août 2010, la Caisse T._ a remboursé par 37'096 fr. 95 les avoirs AVS de R._ sur le compte no [...] détenu par le B._ auprès de la banque [...]. L’équivalent de ce montant a été prélevé en espèces peu après par le prévenu.
Après vérification auprès de l’ODM, la Caisse T._ a constaté que la demande de remboursement n’émanait pas de R._, lequel avait de surcroît quitté la Suisse pour l’Angola et non pour s’établir en République démocratique du Congo.
En réalité, après avoir établi ou fait établir de faux documents (attestations de résidence et de célibat), A.S._ s’est s’approprié sans droit les avoirs AVS de R._. Dans ce cadre, l’adresse fournie par le prévenu, à savoir Rue [...] à Kinshasa, était, comme déjà dit, une des propriétés de la famille de A.S._.
La Caisse T._ a déposé plainte contre inconnu par courrier du 25 novembre 2011, prenant des conclusions civiles à hauteur de 37'096 fr. 95. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délai légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de A.S._ est recevable
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L’appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d’appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L’appel tend à la répétition de l’examen des faits et au prononcé d’un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L’immédiateté des preuves ne s’impose toutefois pas en instance d’appel. Selon l’art. 389 al. 1 CPP, la procédure d’appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d’appel administre, d’office ou à la demande d’une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
Invoquant une appréciation erronée des preuves, l'appelant soutient qu'il a intégralement remboursé le plaignant G._ et qu’il ne se serait ainsi pas rendu coupable d’escroquerie.
3.1
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966; RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950; RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a). Dans cette mesure, la présomption d'innocence se confond avec l'interdiction générale de l'arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (TF 6B_216/2010 du 11 mai 2010 c. 1.1.1 et 1.1.2 et la jurisprudence citée).
3.2
L’art. 146 al. 1 CP dispose que celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l’aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
L'escroquerie suppose en particulier que l'auteur ait usé de tromperie et que celle-ci ait été astucieuse (ATF 128 IV 18 c. 3a; ATF 122 II 422 c. 3a; ATF 122 IV 246 c. 3a et les arrêts cités). L'astuce est réalisée lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (
ibidem
). L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle (ATF 128 IV 18 c. 3a; ATF 126 IV 165 c. 2a). Il n’est cependant pas nécessaire qu’elle ait fait preuve de la plus grande diligence ou qu’elle ait recouru à toutes les mesures possibles pour éviter d’être trompée. L’astuce n’est exclue que si elle n’a pas procédé aux vérifications élémentaires que l’on pouvait attendre d’elle au vu des circonstances. Une co-responsabilité de la dupe n’exclut toutefois l’astuce que dans des cas exceptionnels (TF 6B_314/2011 du 27 octobre 2011 c. 3.2.1 et les références citées).
Du point de vue subjectif, l’auteur doit avoir agi intentionnellement et dans un dessein d’enrichissement illégitime, ce qui suppose
de la part de la victime un acte de disposition préjudiciable à ses intérêts, situé dans un rapport de causalité avec les agissements de l'auteur.
3.3
3.3.1
En l'espèce, contrairement à ce que prétend l'appelant, sa version des faits se heurte à une objection majeure révélée par l'examen du compte postal [...] ouvert au nom de l’association B._. Le 21 février 2006, ledit compte était crédité de la somme de 165'669 fr. 80 qui correspondait, au centime près, à l'avoir LPP de G._ (cf. P. 53 et classeurs de pièces bancaires hors onglet). Le jour suivant, l'appelant a retiré le montant de 80'050 fr. et a remis la somme de 75'000 fr. en espèces à G._, déduction faite d'une commission. Il est donc resté sur ce compte, après retrait, le montant de 85'619 fr. 80 (165'669 fr. 80 – 80'050 fr.). L'appelant explique qu'il a remis par la suite une somme de 64'400 fr. au plaignant. Il a produit une reconnaissance de dette dont le plaignant conteste l'authenticité. Si l'appelant avait dit vrai, on aurait dû trouver au débit du compte postal un retrait équivalent à cette dernière somme. Tel n’a pas été le cas. Il est par ailleurs totalement invraisemblable que A.S._ ait retiré petit à petit des sommes de quelques milliers de francs pour les conserver chez lui jusqu'à ce que le total des sommes retirées atteignent 64'400 francs comme il l’a prétendu.
Les faits retenus par les premiers juges doivent par conséquent être confirmés.
3.3.2
Il convient d’examiner si les éléments constitutifs de l’infraction d’escroquerie sont réalisés.
En l’espèce, l’appelant a remis à G._ un relevé falsifié à l'en-tête de la Fondation de libre passage d’O._ faisant état d'un remboursement de 83'451 fr. 05, impôts à la source déduits. L'appelant n'entreprend en particulier pas de démontrer les raisons pour lesquelles il a remis un décompte falsifié au plaignant. Il ressort du dossier que le seul document que possédait G._ était une attestation LPP de la Fondation L._ mentionnant un avoir de 89'193 fr. 95. Ce document a été remis à A.S._ au printemps 2006 lorsque le plaignant l’a mandaté pour récupérer sa LPP (PV aud. 11, p. 2 ; jgt, p. 13). Preuve en est que l’appelant a produit ce document au cours de la procédure (P. 196/1). Certes, la deuxième page du document de la Fondation Helvetia Patria fait mention de plusieurs montants, dont l’un de 174'339 francs. L’appelant en déduit qu’il était impossible pour la victime de croire, sur la base de ce dernier chiffre, que le montant de sa prestation de libre passage n’était que de 89'193 fr. 95, impôts à la source non déduits. C’est oublier que la première page de la police de la Fondation L._ fait état d’une prestation de libre passage de 88'979 fr. 25, soit d’un montant proche du faux relevé de la Fondation de libre passage d’O._. De plus, l’appelant savait que G._ ne recevrait jamais aucun décompte de la part de la banque UBS puisque dans la demande de remboursement qu’il a fait parvenir à cette banque, il avait indiqué que ce courrier avait été transmis en copie au plaignant, à son adresse au Congo, à Kinshasa, à la BP [...], dont il a été dit qu’elle était relevée par ses proches. D’ailleurs, le 21 février 2006, l’institution concernée a viré le montant de 165'669 fr. 80 sur le compte ouvert au nom de l’association B._ et a envoyé une copie de la confirmation de paiement à la boîte postale sise au Congo. G._ a dès lors été victime d’une tromperie.
Ensuite, il convient de constater que cette tromperie était astucieuse. En remettant à G._ un décompte falsifié, l’appelant lui a fait croire que sa prestation de libre passage s’élevait à 83'451 fr. 05. Le plaignant avait été informé par des amis de l’existence du recourant et du fait qu’il aidait les ressortissants de pays africains établis en Suisse à récupérer leurs avoirs de prévoyance (jgt., p. 13). Il n’avait ainsi aucune raison de se méfier d’un concitoyen qui lui était recommandé. Il a en outre été conforté par le fait que le décompte falsifié indiquait un montant proche de celui qui ressortait du document de la Fondation L._. Le stratagème mis en place par l’appelant et exposé au paragraphe précédent ne permettait pas de déceler la tromperie.
Par conséquent, A.S._ doit être reconnu coupable d’escroquerie.
4.
L’appelant conteste s’être rendu coupable de faux dans les titres dans le cas G._.
4.1
Se rend coupable de faux dans les titres celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre (art. 251 CP).
Sont notamment des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique (cf. art. 110 ch. 4 CP). L'art. 251 CP vise aussi bien le faux matériel, qui consiste dans la fabrication d'un titre faux ou la falsification d'un titre, que le faux intellectuel, soit la constatation d'un fait inexact, en ce sens que la déclaration contenue dans le titre ne correspond pas à la réalité. Constitue un faux matériel un titre dont l'auteur réel ne coïncide pas avec l'auteur apparent. Crée notamment un titre faux celui qui signe un titre au nom d'autrui, alors que ce dernier n'a pas donné de pouvoir de représentation à l'auteur, ceci pour faire croire que le titre émane de cette personne (ATF 128 IV 265; Dupuis et alii, Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 20 ad art. 251 CP).
4.2
En l’espèce, A.S._ a établi une fausse attestation bancaire (P. 59/8) ainsi qu’une fausse attestation de résidence. Ces documents étaient propres à prouver un fait ayant une portée juridique. En outre, il est manifeste que l’appelant a retiré de l’usage de ces faux un avantage illicite qui a lésé les intérêts pécuniaires de G._.
Au vu de ce qui précède, la condamnation de l'appelant pour faux dans les titres doit être confirmée.
5.
L’appelant conteste s’être rendu coupable de faux dans les certificats dans le cas M._. Il ne conteste pas avoir transmis à la Caisse T._ les documents utiles afin que M._ perçoive le remboursement de ses cotisations AVS. Il soutient en revanche que c’est ce dernier qui lui a remis les faux documents d’identité.
5.1
Selon l'art. 252 CP, sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire celui qui, dans le dessein d'améliorer sa situation ou celle d'autrui, aura contrefait, ou falsifié des pièces de légitimation, des certificats ou des attestations, aura fait usage, pour tromper autrui, d'un écrit de cette nature, ou aura abusé, pour tromper autrui, d'un écrit de cette nature, véritable mais non à lui destiné.
La notion de pièce de légitimation vise les papiers destinés à établir l'identité, l'état civil et les relations familiales d'une personne, ou d'autres faits qui la concernent, tels que sa date de naissance, sa nationalité ou ses lieu et date de naissance. Font notamment partie de cette catégorie le passeport (ATF 117 IV 170 c. 2c), la carte d'identité, ainsi que l'autorisation de séjour ou le permis d'établissement (Dupuis et alii., op. cit., n. 8 ad art. 252 CP; Boog, in : Basler Kommentar, Strafrecht II, 2
e
éd., 2013, n. 5 ad art. 252 CP; Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3
e
éd., 2010, n. 2 ad art. 252 CP). Le comportement punissable peut consister en la contrefaçon, la falsification, l'usage (d'un certificat faux ou falsifié) ou l'abus du certificat d'autrui. L'usage de faux s'applique de façon subsidiaire, à savoir lorsque l'auteur a fait usage d'un faux document créé ou falsifié par un tiers. L'infraction est intentionnelle.
5.2
En l’espèce, l’appelant a expliqué avoir été contacté par M._, lequel voulait récupérer son avoir AVS. Il connaissait personnellement son mandant (cf. PV aud. 21, p. 13). Or, la photo du passeport présenté à l’appui de la demande de remboursement faite par l’appelant s’est avérée être fausse. Cela ne pouvait lui échapper. De plus, il est établi que le montant dû à M._ a été crédité sur le compte bancaire de l’épouse de l’appelant. Lorsque l’appelant a dû expliquer comment il avait fait pour remettre cet argent à son destinataire, il a varié dans ses explications (PV aud. 21, p. 14 ; jgt., p. 30). Enfin, on sait que par la suite M._ a entrepris des démarches, via une tierce personne, pour récupérer ses cotisations AVS. La dernière version soutenue par l’appelant n’a dès lors aucun sens et il faut admettre, avec les premiers juges, que c’est bien lui qui a produit le faux passeport auprès de la Caisse T._.
Partant, A.S._ doit être reconnu coupable de faux dans les certificats.
6.
L’appelant soutient qu’il n’y aurait aucune preuve qu’il aurait frustré R._ du montant de ses cotisations AVS et qu’il aurait établi une fausse attestation de résidence. Il soutient au contraire qu’il aurait versé le montant de 37'096 fr. 95 à R._ après avoir reçu l’argent sur le compte bancaire de l’association B._.
6.1
En l’espèce, c’est l’appelant qui s’est occupé de toutes les démarches auprès de la Caisse T._. Après vérification de cette dernière, il s’est avéré que la signature apposée au bas de la procuration du 9 juin 2010 et la demande de paiement des prestations AVS n’était pas celle de R._ (PV aud. 6, p. 2). En outre, l’ODM a confirmé que celui-ci avait quitté la Suisse en février 2009 pour l’Angola, son pays d’origine. Enfin, l’attestation de résidence produite par l’appelant était fantaisiste. R._ n’a en effet jamais habité au Congo et encore moins à l’adresse indiquée par l’appelant qui correspond en réalité à l’un des domiciles de sa famille. Les déclarations faites par l’appelant aux débats au sujet de cette attestation de résidence sont par ailleurs invraisemblables en plus d’être confuses (cf. jgt., p. 13). Dans ces conditions, il faut admettre que l’appelant a trompé astucieusement la Caisse T._.
Par ailleurs, comme l’ont relevé à juste titre les premiers juges, la Caisse T._ est susceptible de payer à double les cotisations AVS dès lors qu’elle devra honorer une éventuelle demande de remboursement émise par R._. La mise en danger des intérêts de la Caisse T._ est suffisamment concrète dans le cas d’espèce. On en veut pour preuve les cas recensés dans la présente affaire où cette Caisse a été amenée à plusieurs reprises à payer les cotisations AVS à double. Cela suffit pour admettre le dommage (ATF 122 IV 279 c. 2a).
Par conséquent, A.S._ doit être reconnu coupable d’escroquerie.
6.2
En produisant une fausse attestation de résidence qui a permis l’obtention d’un avantage illicite, l’appelant s’est en outre rendu coupable de faux dans les titres.
7.
L’appelant, qui concluait à l’acquittement, ne conteste pas la peine en tant que telle. Examinée d’office par la Cour d’appel selon son propre pouvoir d’appréciation, la peine privative de liberté de 15 mois a été fixée en application des critères légaux à charge et à décharge et conformément à la culpabilité de A.S._. Elle doit dès lors être confirmée.
8.
En définitive, l’appel de A.S._ est rejeté et le jugement entrepris intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel, constitués de l’émolument d’arrêt, par 2’460 fr., et de l’indemnité allouée au défenseur d’office, par 2'366 fr. 60, TVA et débours compris, doivent être mis à la charge de l’appelant.
Ce dernier ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l'indemnité en faveur de son défenseur d'office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 CPP).
L’intimé G._ demande l’allocation de dépens pour la procédure d’appel. Il n’a toutefois ni chiffré ni motivé ses prétentions (art. 433 al. 2 CPP). Or, l’art. 433 CPP exclut qu’une telle indemnité soit allouée d'office, de sorte que des dépens pénaux de seconde instance ne sauraient lui être alloués. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bb9dd0fb-a963-4447-8233-b830645b2ba7 | En fait :
A.
Par jugement du 17 novembre 2011, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a, notamment, libéré G._ des chefs d'accusation de lésions corporelles simples qualifiées et de lésions corporelles graves (I), a constaté qu'il s’était rendu coupable d'agression, de vol, de violation de domicile et de contravention à la LStup (II), a révoqué le sursis accordé à G._ par le Juge d'instruction de Lausanne le 9 décembre 2008 (III), l'a condamné à une peine d’ensemble de travail d'intérêt général de 720 heures et à une amende de deux cents francs, avec peine privative de liberté de substitution de huit jours, sous déduction de quatre jours de détention préventive subie (IV), a dit que cette peine était partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 août 2010 par le Juge d'instruction du Nord vaudois (V), a libéré P._ des chefs d'accusation de lésions corporelles simples qualifiées et de lésions corporelles graves (VI), a constaté qu'il s’était rendu coupable d'agression, de violation de domicile et de contravention à la LStup (VII), a révoqué les sursis accordés à P._ le 9 septembre 2008 par le Tribunal correctionnel de Lausanne et le 18 février 2009 par le Juge d'instruction de Lausanne (VIII), l'a condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de quinze mois et à une amende de trois cents francs, avec peine privative de liberté de substitution de douze jours (IX), a dit que cette peine était partiellement complémentaire à celle prononcée le 18 février 2009 par le Juge d'instruction de Lausanne (X), a libéré A.Q._ des chefs d'accusation de lésions corporelles simples qualifiées, de lésions corporelles graves, de brigandage et d'injure (XIV), a constaté qu'il s’était rendu coupable d'agression, de violation de domicile et de contravention à la LStup (XV), a révoqué la libération conditionnelle accordée à A.Q._ le 10 juin 2009 par l'Office d'exécution des peines d'Argovie (XVI), l'a condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de douze mois et à une amende de trois cents francs, avec peine privative de liberté de substitution de douze jours (XVII), a dit que cette peine était partiellement complémentaire à celles prononcées le 27 mars 2009 et le 28 juillet 2009 par le Juge d'instruction du Nord vaudois (XVIII), a donné acte de ses réserves civiles à W._ contre G._, P._ et A.Q._ et l'a renvoyée à agir devant le juge civil (XIX), a alloué à Me Alexia Landert une indemnité de conseil d'office de 7'460 fr. 30, débours et TVA compris (XXIII), a alloué à Me Yan Schumacher, défenseur d'office de G._, une indemnité de 6'226 fr. 40, débours et TVA compris (XXIV), a alloué à Me David Abikzer, défenseur d'office de P._, une indemnité de 9'813 fr. 60, débours et TVA compris (XXV), a alloué à Me Eric Kaltenrieder, défenseur d'office de A.Q._, une indemnité de 4'621 fr. 20, débours et TVA compris (XXVII), a arrêté les frais, indemnités des défenseurs et du conseil d'office comprises, à charge de : G._ à 13'036 fr. 60; P._ à 15'374 fr. 60; B.Q._ à 8'262 fr. 60; A.Q._ à 10'182 fr. 20, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (XXVIII) et a dit que chacun des prévenus G._, P._ et A.Q._ remboursera l'indemnité allouée à son défenseur d'office et un tiers de l'indemnité allouée à Me Alexa Landert dès que sa situation financière le permettra (XXIX, XXX et XXXII respectivement).
Par arrêt du 8 mai 2012, la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal a rejeté les appels formés par G._, P._ et A.Q._ et partiellement admis les appels du Ministère public et W._ (I), a modifié le dispositif de première instance en ce sens qu’elle a révoqué le sursis accordé à G._ par le Juge d'instruction de Lausanne le 9 décembre 2008 et ordonné l’exécution de la peine de 20 jours-amende à 30 fr. le jour (iii), l'a condamné à une peine privative de liberté de douze mois, sous déduction de quatre jours de détention préventive subie, ainsi qu’à une amende de deux cents francs avec peine privative de liberté de substitution de huit jours (iv), a dit que cette peine était partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 août 2010 par le Juge d'instruction du Nord vaudois (v), a révoqué les sursis accordés à P._ le 13 mars 2007 par le Juge d’instruction de la Côte, le 9 septembre 2008 par le Tribunal correctionnel de Lausanne et le 18 février 2009 par le Juge d’instruction de Lausanne et a ordonné l’exécution des peines de 30 jours-amende à 30 fr. le jour, de huit mois de privation de liberté et de 15 jours-amende à 30 fr. le jour (viii), l'a condamné à une peine privative de liberté de douze mois et à une amende de trois cents francs avec peine privative de liberté de substitution de douze jours (ix), a dit que cette peine était partiellement complémentaire à celle prononcée le 18 février 2009 par le Juge d'instruction de Lausanne (x), a libéré A.Q._ des chefs d'accusation de lésions corporelles simples qualifiées, de brigandage et d'injure (xiv), a constaté qu'il s’était rendu coupable d'agression, de lésions corporelles graves, de violation de domicile et de contravention à la LStup (xv), a révoqué la libération conditionnelle accordée à A.Q._ le 10 juin 2009 par l'Office d'exécution des peines d'Argovie (xvi), l'a condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de dix-huit mois et à une amende de trois cents francs, avec peine privative de liberté de substitution de douze jours (xvii), a dit que cette peine était partiellement complémentaire à celles prononcées le 27 mars 2009 et le 28 juillet 2009 par le Juge d'instruction du Nord vaudois (xviii), a dit que A.Q._ devait payer à W._ les sommes de 10'000 fr. à titre de réparation du tort moral, valeur échue, d’une part, et de 279 fr. 80 à titre d’indemnisation du dommage matériel, valeur échue, d’autre part, acte étant donné à W._ de ses réserves civiles pour le surplus à l’encontre de A.Q._, G._, P._ et B.Q._ (xix) (II). La Cour d’appel pénale a alloué une indemnité de conseil d’office pour la procédure d’appel d’un montant de 3'942 fr., débours et TVA compris, à Me Alexa Landert (III), une indemnité de défenseur d’office pour la procédure d’appel d’un montant de 3'553 fr. 20, débours et TVA compris à Me Yan Schumacher (IV), une indemnité de défenseur d’office pour la procédure d’appel d’un montant de 3'553 fr. 20, débours et TVA compris, à Me David Abikzer (V), une indemnité de défenseur d’office pour la procédure d’appel d’un montant de 1'578 fr. 50, débours et TVA compris, à Me Patrick Mangold (VI), a mis les frais d’appel à la charge des prévenus comme il suit : G._, un tiers des frais communs, par 5'760 fr., soit 1'920 fr., plus un tiers de l'indemnité de Me Alexa Landert, par 1'314 fr., plus l'indemnité au défenseur d'office prévue au ch. IV ci-dessus, soit au total 6'787 fr. 20; P._, un tiers des frais communs, par 5'760 fr., soit 1'920 fr., plus un tiers de l'indemnité de Me Alexa Landert, par 1'314 fr., plus l'indemnité au défenseur d'office prévue au ch. V ci-dessus, soit au total 6'787 fr. 20; A.Q._, un tiers des frais communs, par 5'760 fr., soit 1'920 fr., plus un tiers de l'indemnité de Me Alexa Landert, par 1'314 fr., plus l'indemnité au défenseur d'office prévue au ch. VI ci-dessus, plus l'indemnité versée à Me Kaltenrieder, soit 9’433 fr. 70 (recte : 5'590 fr. 10) (VII), et a dit que G._, P._ et A.Q._ ne seraient tenus de rembourser le montant de l'indemnité en faveur de leur défenseur d'office que lorsque leur situation financière le permettra (VIII).
Par arrêt du 7 janvier 2013 (TF 6B_405/2012), la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a partiellement admis le recours de A.Q._, a annulé l’arrêt de la Cour d’appel pénale du 8 mai 2012 et a renvoyé la cause à l’autorité cantonale pour qu’elle statue à nouveau dans le sens des considérants (1), a mis une part des frais judiciaires, arrêtée à 800 fr., à la charge du recourant, le solde demeurant à la charge de l’Etat (2), a mis à la charge du canton de Vaud une indemnité de 1'500 fr., à payer au conseil du recourant à titre de dépens (3), a rejeté la demande d’assistance judiciaire du recourant dans la mesure où elle n’est pas sans objet (4), a admis la demande d’assistance judiciaire de W._ et a dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera à Me Alexa Landert une indemnité de 1'000 fr. à titre d’honoraires d’avocat d’office (5) et a communiqué l’arrêt aux parties et à la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (6).
Par arrêt du 7 janvier 2013 (TF 6B_410/2012), la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis le recours de G._, annulé l’arrêt attaqué et renvoyé la cause à l’autorité cantonale pour qu’elle statue dans le sens des considérants (1), n’a pas perçu de frais judiciaires (2), a mis à la charge du canton de Vaud une indemnité de 3'000 fr., à payer au conseil du recourant à tire de dépens (3), a dit que la demande d’assistance judiciaire était sans objet (4), a admis la demande d’assistance judiciaire de W._ et dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera à Me Alexa Landert une indemnité de 1'000 fr. à titre d’honoraires d’avocat d’office (5), a communiqué l’arrêt aux parties et à la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (6).
B.
Par courrier du 5 février 2013, la direction de la procédure a informé les parties que lors des débats serait abordée la question de l’application de l’art. 392 CPP au prévenu P._ et que la Cour d’appel pénale se réservait, en application de l’art. 344 CPP, d’examiner la condamnation possible des prévenus pour rixe (art.133 CP).
Par courrier du 19 février 2013, A.Q._ a contesté l’application de l’art. 133 CP.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
Le prévenu G._, né en 1987, ressortissant congolais, séjourne en Suisse depuis 1994, époque où il a rejoint son père qui résidait déjà sans sa femme dans notre pays. Rejeté par sa belle mère, il a été confié par son père à une tante. En 2002, son père a tué la belle-mère du prévenu, ce qui a impliqué pour G._ la responsabilité à tout le moins morale de ses trois demi-frères et demi-soeurs. Marié, il est père de deux enfants, l'un âgé de plus de quatre ans, l'autre de plus d'un an. Les époux sont séparés depuis juillet 2010. Il exerce un droit de visite sur ses enfants. Il est endetté, notamment en raison d'amendes impayées, qu'il rembourse mensuellement. Il a travaillé pendant une année au sein de l’association La Licorne, spécialisée dans le montage de scènes. Ayant échoué pour la seconde fois aux examens de la formation de polymécanicien en été 2011, il n’a pu se présenter une troisième fois. Il a déclaré à l’audience de ce jour qu’il ne travaillait provisoirement plus pour la Licorne depuis janvier 2013, qu’il s’occupait des enfants pendant que sa femme était aux études et qu’il reprendrait son travail de polymécanicien lorsqu’une place serait disponible. Il est au bénéfice du revenu d'insertion. Il n’aurait plus consommé de cannabis depuis le 13 juin 2011.
Son casier judiciaire comporte trois condamnations, prononcées du 23 mai 2008 au 10 août 2010, pour infractions à la LCR, dommages à la propriété et contravention à la LStup. En particulier, la dernière peine ci-dessus, d'une quotité de 120 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant cinq ans, en sus d'une amende de 750 fr. a été prononcée le 10 août 2010 par le Juge d'instruction du Nord vaudois pour circulation sans assurance RC, sans permis de circulation ou plaques de contrôle, conduite d'un véhicule en état d'incapacité de conduire, contravention à l'OCR et à la LStup. Il a été détenu du 11 au 14 janvier 2010 pour les besoins de la présente enquête.
1.2
Le prévenu P._, né en 1985, ressortissant du Congo, réside en Suisse depuis 2001. Après avoir abandonné un apprentissage, il a occupé divers emplois temporaires, dont il a pu vivre jusqu'à la fin 2009. Il a ensuite traversé une période d'inactivité professionnelle, recevant alors une aide de l'EVAM. Depuis le 12 avril 2010, il a travaillé comme aide-monteur sanitaire pour un salaire horaire brut de 23 francs. Il a toutefois subi un accident au travail, qui a entraîné des opérations et occasionné son licenciement. Il est actuellement à la recherche d’un emploi et doit se présenter prochainement pour un entretien. Il a des poursuites pendantes pour environ 13'000 fr., actuellement en cours de remboursement. Il n’aurait pas eu de problème avec la justice depuis l’audience du 8 mai 2012.
Son casier judiciaire comporte quatre condamnations, prononcées du 23 janvier 2007 au 18 février 2009, pour délit contre la loi fédérale sur les armes, injure, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, opposition aux actes de l'autorité, brigandage, abus de confiance, voies de fait, dommages à la propriété et contravention à la LStup. En particulier, le 13 mars 2007, le Juge d'instruction de La Côte l'a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, pour injure, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et opposition aux actes de l'autorité; ce sursis a été prolongé d'un an par jugement rendu le 9 septembre 2008 par le Tribunal correctionnel de Lausanne. Ce même jugement a condamné ce prévenu à une peine privative de liberté de huit mois, avec sursis pendant cinq ans, et à une amende de 300 fr., pour brigandage et abus de confiance, ainsi que contravention à la LStup.
1.3
Le prévenu A.Q._, né en 1985, ressortissant du Congo, réside en Suisse depuis 2000. Après avoir abandonné un apprentissage, il a occupé divers emplois, entrecoupés de séjours en prison. Depuis mars 2012, il est occupé dans le domaine du montage de scènes pour une société active de la branche et pour laquelle il avait déjà travaillé quelques années auparavant; il n’a pas encore de contrat fixe, mais entend que cet emploi se poursuive. Le montant de ses poursuites lui est inconnu. Il a déclaré à l’audience être papa d’une petite fille depuis le début de l’année et s’occuper d’elle financièrement. D’après ses souvenirs, il n’aurait plus fait l’objet de nouvelles enquêtes ou condamnations pénales depuis janvier 2010.
Son casier judiciaire comporte sept condamnations, prononcées du 2 octobre 2002 (Tribunal des mineurs) au 28 juillet 2009, pour lésions corporelles simples, voies de fait, brigandage, dommages à la propriété, tentative d'extorsion et de chantage, injure, menaces, violation de domicile, incendie par négligence, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, appropriation illégitime, circulation sans permis de conduire ou plaque de contrôle et sans assurance responsabilité civile, contrainte, vol, et contravention à la LStup. En particulier, par jugement du 28 novembre 2007, le Tribunal d'Aarau l'a condamné à une peine privative de liberté de dix mois et à une amende de 300 fr., pour lésions corporelles simples, voies de fait, brigandage, dommages à la propriété, injure, menaces, violation de domicile, et contravention à la LStup; la libération conditionnelle a été accordée au condamné le 10 juin 2009 avec effet au 3 juillet suivant et délai d'épreuve d'une année, la part de peine restante étant de 104 jours.
Il a fait l'objet d'une expertise psychiatrique dans le cadre de la procédure pénale argovienne déjà mentionnée. Dans leur rapport déposé le 10 octobre 2007 (P. 31), les experts ont posé le diagnostic de trouble des conduites de type socialisé, caractérisé par un comportement dyssocial ou agressif, d'une part, et d'intoxication à l'alcool et d'utilisation nocive d'alcool et de cannabis, d'autre part. Ils ont tenu pour vraisemblable le risque de récidive notamment dans le domaine d'infraction relatif à l'usage du cannabis. Ils ne se sont pas prononcés quant à la responsabilité pénale de l'expertisé.
2.
2.1
Le jeudi 7 janvier 2010, vers 20h30, le prévenu G._ s'est rendu au domicile de L._, à [...], en compagnie d'un tiers, pour s'y procurer de la marijuana, respectivement du cannabis. La transaction n'a pas abouti. Pour faire partir les importuns, le maître des lieux a exhibé un couteau. L'appartement de L._, situé au rez-de-chaussée, comporte une porte d'entrée qui donne directement sur le trottoir depuis la pièce à vivre/salon; il s'agit en effet d'un ancien magasin. La pièce principale est séparée de la cuisine par un rideau.
Le 11 janvier 2010, en début de soirée, les trois prévenus, accompagnés d'un tiers, se sont à nouveau rendus auprès de L._ pour acquérir du cannabis. G._ était alors sous l'emprise de l'alcool et du cannabis. Dans ce dessein, les comparses se sont déplacés depuis Yverdon-les-Bains en direction de [...] dans une voiture conduite par l’amie de P._. Celle-ci devait en effet se rendre brièvement à K._ pour des motifs étrangers à la présente cause. Elle n'a observé aucune tension dans l'habitacle de la voiture sur le trajet aller, pas plus qu'elle n'a vu l'un ou l'autre de ses passagers avec une matraque. Les prévenus parlaient et plaisantaient dans leur langue.
Une fois arrivés sur les lieux, les quatre individus se sont présentés à la porte d'entrée du logement de L._, à laquelle G._ a frappé. Le maître des lieux a ouvert la porte, avant de la refermer aussitôt en voyant l'importun sur le pas de la porte. Il ressort des aveux de l'intéressé et des déclarations concordantes des deux autres prévenus et du tiers impliqué que G._ a voulu forcer le passage en glissant son pied dans l'entrebâillement. L._ lui a alors donné un coup au visage, le faisant tomber à terre à l'extérieur, dans la neige; L._ conteste toutefois avoir asséné ce coup. Ensuite de cet acte, les prévenus se sont précipités dans le logement pour s'en prendre physiquement, à trois, au maître des lieux. Par l’effet de la poussée de la porte, L._ est tombé au sol. Pour se défendre, il a distribué des coups de pied à ses assaillants. Une fois relevé, il a sorti une arme blanche munie d'une lame de quelque 20 cm qu'il portait à sa ceinture, ce dans le seul but de faire fuir ses agresseurs. Il est précisé à cet égard qu'il pratique les arts martiaux et détient dans son logement une collection d'environ 200 couteaux. Il a encore reçu des coups notamment au moyen d'une matraque télescopique ou d'une barre de fer, d'une pelle à neige et du tuyau de l'aspirateur équipant le logement. Les agresseurs ont également projeté dans sa direction un vélo entreposé dans le logement et l'aspirateur du ménage. L._ a précisé que, les événements s'étant déroulés très vite, il ne pouvait indiquer lequel de ses agresseurs avait fait quoi, hormis que A.Q._ l'avait frappé avec une barre téléscopique et G._ avec l'aspirateur.
Durant ces faits, la colocataire de L._, W._, se trouvait dans la cuisine. Alertée par un fracas métallique, elle est sortie de cette pièce munie d'un spray au poivre, qu'elle a vidé pour faire fuir les intrus. Elle a alors également été personnellement agressée. Elle a été incapable de distinguer ses agresseurs, hormis par une mention, figurant dans sa plainte, selon laquelle c'était le plus grand d'entre eux qui l'avait frappée plusieurs fois avec une barre métallique sur ses avant-bras relevés dans un geste de défense (PV aud. 12). C'était le même individu qui avait encore lancé son vélo contre elle après avoir pris de l'élan et qui l'avait traitée de "salope" (ibid.). Elle a confirmé ses propos devant le juge d'instruction le 18 août 2010, si ce n'est qu'elle s'est partiellement récriée en précisant que ses lésions à l'avant-bras et à la main gauches ainsi qu'au poignet droit étaient dues à la projection d'un vélo par l'un des assaillants, et non aux coups qui lui auraient été assénés au moyen de la barre métallique (PV aud. 14, spéc. lignes 25 et 26). Aux débats de première instance, elle est revenue sur sa plainte à un autre égard encore, en ce sens qu'elle n'aurait jamais déclaré dans sa plainte avoir été frappée avec une barre ou une matraque, mais qu'elle avait en revanche entendu le bruit provoqué par la chute d'une barre métallique et vu cet objet au sol; elle a dit tout ignorer de son détenteur et de son usage. Elle a précisé que les lésions dont elle avait souffert avaient pour seule origine la projection de son vélo, qui était un "mountain-bike" d'une quinzaine de kilogrammes. Les atteintes affectaient les membres supérieurs, que la victime avait levés pour se protéger le visage. Elle a confirmé que c'était le plus grand des agresseurs qui était l'auteur des faits. Elle a enfin mentionné l'intrusion de trois assaillants dans le logement et la présence d'une quatrième personne à l'extérieur, qu'elle a également assimilée à un agresseur, mais dont la tâche était limitée à faire le guet. Ce quatrième individu, accompagnant les prévenus, a bénéficié d'un non-lieu.
Les trois prévenus sont ensuite retournés à Yverdon-les-Bains, avec le tiers déjà mentionné et toujours acheminés par la même conductrice. Cette dernière a constaté que ses passagers étaient énervés, sans pour autant connaître la cause de cet état. Elle a senti une forte odeur de spray au poivre. Comme lors du trajet aller, elle n'a pas décelé que l'un ou l'autre de ses passagers détenait une matraque.
2.2
W._ a souffert d'un hématome traumatique de la main et du poignet droits, d'un hématome de l'avant-bras gauche avec dermabrasion, d'un traumatisme du poignet droit avec fracture de la styloïde cubitale, nécessitant la pose d'un plâtre. Elle a en outre présenté de multiples dermabrasions superficielles des doigts de la main gauche. En outre, selon un rapport établi le 2 novembre 2011 par le Dr [...], une neuropathie cubitale s'est développée, les premiers symptômes étant apparus environ six à huit semaines après la fracture de l'avant-bras gauche. Cette neuropathie s'aggrave progressivement et empêche la victime de manipuler et en particulier de porter un objet de la main gauche. Elle a été opérée le 5 décembre 2011. Psychiquement, la victime souffre d'un trouble anxieux majeur généralisé avec phobie sociale ainsi que, depuis le mois de janvier 2010, d'un stress post-traumatique surajouté, aggravant plus encore sa phobie sociale.
A dires de médecin, L._ a présenté une plaie du cuir chevelu importante au niveau fronto-temporal droit, suturée sous anesthésie locale, une plaie au niveau du tiers moyen de l'avant-bras punctiforme par éclatement consécutive à un coup donné au moyen d'un objet, ainsi qu'un hématome cutané au niveau du tiers supérieur du bras droit, sans plaie.
2.3
G._ a dit ignorer qui avait pu frapper L._ et W._ et comment les victimes avaient pu être frappées. Il s'est limité à avouer avoir lancé un vélo en direction du premier nommé pour le tenir à distance, car lui et ses comparses étaient menacés par l'intéressé qui détenait un couteau. Il a cependant ajouté avoir vu A.Q._ en possession d'une matraque à la sortie du logement de la victime et l'avoir observé remettre cet engin à P._ dans la voiture sur le trajet du retour.
A.Q._ a contesté avoir volontairement frappé l'une ou l'autre des victimes, tout comme il a nié la possession d'une matraque télescopique. Il a cependant concédé avoir pu frapper l'une ou l'autre des victimes alors qu'il gesticulait après avoir été frappé lui-même, d'où la présence d'une écorchure à sa main droite. Selon lui, G._ a donné un coup à L._.
Enfin, P._ a dit n'avoir eu pour seul geste que celui de se baisser pour éviter un coup de couteau de L._, avant de prendre le premier objet à sa portée, soit une chaussure, et de le lancer en direction du maître des lieux pour se défendre, puis de prendre la fuite. Auparavant, ce prévenu avait encore eu le temps de voir A.Q._ donner un coup à L._. P._ a encore imputé à G._ l'usage de la pelle à l'encontre de cette même victime, ainsi que la projection d'un aspirateur et d'un vélo contre L._ et W._. Il a enfin contesté avoir détenu une matraque.
Interpellé à l'audience d'appel par le conseil de P._, L._ a soutenu ne jamais avoir été frappé et ne jamais avoir déclaré avoir été frappé. Il a ajouté que, lorsqu’il était par terre, personne ne l’avait touché et que les coups de pied qu’il avait donnés l’avaient été dans le vide. Il a nié avoir asséné un coup lors de l'altercation. Il a ajouté que, d’une façon générale, il contestait la version des faits donnée par les prévenus, qui le ferait passer pour "le méchant" et eux pour "les gentils" (sic). | En droit :
1.
Statuant sur le recours interjeté par A.Q._, le Tribunal fédéral a considéré, dans son arrêt du 7 janvier 2013 (TF 6B_405/2012), que la Cour de céans avait violé le droit fédéral en tant qu’elle a considéré que l’attaque du recourant était unilatérale et reconnaissait celui-ci coupable d’agression selon l’art. 134 CP (c. 2). Il a aussi constaté que la Cour de céans n’avait pas fait preuve d’appréciation arbitraire des faits en retenant que A.Q._, le plus grand de ceux qui avait pénétré dans l’appartement, avait lancé le vélo sur W._ et n’avait pas violé le droit fédéral en reconnaissant le recourant coupable d’infraction de lésions corporelles graves à l’égard de la plaignante (c. 3). Le Tribunal fédéral a également admis le montant de l’indemnité pour tort moral, fixé à 10'000 fr., alloué à W._ (c. 4). Seul le premier grief étant admis, le Tribunal fédéral a annulé l’arrêt du 8 mai 2012 en tant qu’il reconnaissait A.Q._ coupable d’agression et a renvoyé la cause à la Cour de céans pour qu’elle statue à nouveau.
Statuant sur le recours interjeté par G._, le Tribunal fédéral a admis, dans son arrêt du 7 janvier 2013 (TF 6B_410/2012), le grief invoqué en ce sens que la décision attaquée violait le droit fédéral en tant qu’elle a considéré que l’attaque du recourant était unilatérale et reconnaissait celui-ci coupable d’agression selon l’art. 134 CP (c. 2). Le Tribunal fédéral a ainsi annulé l’arrêt cantonal sur ce point.
En définitive, la procédure sur appel après Tribunal fédéral se limite à l’examen de la qualification juridique des faits portant sur l’altercation, à la fixation des peines et aux frais, le jugement du 8 mai 2012 étant définitif pour le surplus.
2.
En application du principe de célérité de la procédure et pour éviter des jugements contradictoires, l’art. 392 al. 1 CPP prévoit que, lorsque, dans une même procédure, un recours a été interjeté par certains des prévenus ou des condamnés seulement et qu’il a été admis, la décision attaquée est annulée ou modifiée également en faveur de ceux qui n’ont pas interjeté recours aux conditions cumulatives que l’autorité de recours juge différemment les faits (let. a) et que les considérants valent aussi pour les autres personnes impliquées (let. b) (Calame, in Kuhn/Jeanneret, Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 2 ad art. 392 CPP). Selon l’alinéa 2 de ce même article, afin de respecter le droit d’être entendu des parties concernées, l’autorité de recours entend s’il y a lieu les prévenus ou les condamnés qui n’ont pas interjeté recours, le ministère public et la partie plaignante.
En l’espèce, P._ qui a également été condamné pour agression par jugement du 8 mai 2012 de la Cour d’appel pénale n’a pas recouru contre celui-ci. Toutefois, le Tribunal fédéral a jugé différemment les faits en considérant que les conditions de l’agression n’étaient pas réalisées. En conséquence, en application de l’art. 392 CPP, il convient d’étendre l’annulation du jugement concernant l’agression à P._. Celui-ci a été informé des arrêts du Tribunal fédéral, puis entendu à l’audience d’appel qui s’est tenue à la suite de ces arrêts.
3.
Les appelants contestent l’application de l’art. 344 CPP que la Cour de céans se propose de faire, invoquant une violation du principe d’accusation.
3.1
L'art. 9 CPP consacre la maxime d'accusation. Selon ce principe, le prévenu doit connaître exactement les faits qui lui sont imputés et les peines et mesures auxquelles il est exposé, afin qu'il puisse s'expliquer et préparer efficacement sa défense (ATF 126 I 19 c. 2a; ATF 120 IV 348 c. 2b). Le tribunal est lié par l'état de fait décrit dans l'acte d'accusation, mais peut s'écarter de l'appréciation juridique qu'en fait le ministère public (art. 350 al. 1 CPP), à condition d'en informer les parties présentes et de les inviter à se prononcer (art. 344 CPP). Le principe de l'accusation découle également de l'art. 29 al. 2 Cst. ([Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101] droit d'être entendu), de l'art. 32 al. 2 Cst. (droit d'être informé, dans les plus brefs délais et de manière détaillée, des accusations portées contre soi) et de l'art. 6 par. 3 let. a CEDH ([Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101] droit d'être informé de la nature et de la cause de l'accusation; TF 6B_547/2012 du 26 mars 2013 c. 1.2; TF 6B_528/2012 et 6B_572/2012 du 28 février 2013 c. 3.1.2 et les références citées).
En l’espèce, les prévenus n’ont pas été renvoyés en jugement pour rixe d’après l’acte d’accusation. Toutefois, les faits retenus dans cet acte sont ceux qui fondent l’agression ou la rixe. Lors des débats de première instance, les prévenus ont d’ailleurs plaidé la rixe en se fondant sur l’état de fait décrit par l’acte d’accusation. Ils ont maintenu cette même ligne de défense devant la Cour d’appel pénale puis le Tribunal fédéral, tout en précisant qu’ils ne pouvaient pas être condamnés pour rixe, dès lors qu’ils n’avaient pas été renvoyés en jugement pour cette infraction. Les prévenus ont été informés par la direction de la procédure quelques mois avant la tenue de l’audience d’appel que la cour de céans ferait application de l’art. 344 CPP pour examiner si les éléments constitutifs de la rixe étaient réalisés. Ainsi, les droits de la défense et le droit d’être entendu des prévenus ont été respectés, ceux-ci ayant eu tout le temps nécessaire pour préparer leur ligne de défense et demander des actes d’instruction complémentaires, s’ils le jugeaient nécessaire. En outre, la rixe et l’agression sont toutes deux des infractions de mise en danger abstraite de l’intégrité corporelle et de la vie, pouvant être réprimées par une peine privative de liberté ou une peine pécuniaire; dogmatiquement, la rixe est subsidiaire à l’agression. La différence des sanctions réside dans le fait que la rixe est une infraction moins grave que l’agression, celle-là étant réprimée par une peine privative de liberté de trois ans au plus contrairement à l’agression qui prévoit cinq ans au plus. Par conséquent, la mise en accusation des prévenus à ce stade de la procédure ne constitue pas non plus une
reformatio in pejus
, mais un allègement des charges qui pèsent contre les prévenus.
Au vu de ces éléments, l’application de l’art. 344 CPP pour examiner les conditions de réalisation de la rixe ne viole donc pas le principe d’accusation.
3.2
Les prévenus invoquent également une violation du principe du double degré de juridiction.
3.2.1
En vertu de l’art. 32 al. 3 Cst., toute personne déclarée coupable d’une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation (voie de l’appel ou de la cassation). Le droit à un double degré de juridiction crée, pour l’autorité de première instance, l’obligation de motiver sa décision de manière suffisante pour que son destinataire puisse l’attaquer à bon escient devant l’instance de recours (Auer/Malinverni/Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II, Les droits fondamentaux, 2
e
éd., Berne 2006, nn. 1412 s.; Piquerez/Macaluso, Procédure pénale suisse, 3
e
éd., 2011, nn. 1879 ss).
Le Tribunal fédéral a admis qu’une cour cantonale n’avait pas privé le prévenu de la double instance en le condamnant alors qu’il avait été acquitté en première instance. Le Tribunal fédéral a considéré que la cour cantonale ne s’était pas écartée de l’état de fait retenu par le tribunal de première instance. C’était avant tout sur la question des motifs que la cour cantonale s’était écartée du jugement de première instance. Pour le surplus, la cour cantonale ne s’étant pas non plus écartée de l’acte d’accusation, aucune violation du principe d’accusation n’entrait en considération (TF 6B_528/2012 et 6B_572/2012 du 28 février 2013 c. 3.2).
3.2.2
En l’espèce, comme déjà mentionné, les prévenus ont traité, devant l’autorité de première instance, la question de la participation à une rixe. Dans son jugement (jugement entrepris, p. 94), le Tribunal correctionnel a motivé les raisons qui l’ont conduit à considérer que les éléments constitutifs de la rixe n’étaient pas réalisés. Devant l’autorité d’appel, les trois prévenus ont soutenu qu’au vu du déroulement des faits, on se trouvait dans le cas d’une rixe et non d’une agression. Cette question a ainsi une nouvelle fois été examinée en appel. C’est ainsi à tort qu’ils invoquent une violation du double degré de juridiction. Il est même contraire à la bonne foi pour G._ de s’opposer désormais à la qualification de rixe, sachant qu’il a plaidé jusqu’au Tribunal fédéral la participation à une rixe plutôt qu’à une agression (Recours G._).
3.3
Au surplus, l’annulation du jugement de première instance et le renvoi de la cause à cette autorité (art. 409 CPP) ne répondrait pas au principe de célérité de procédure contenu à l’art. 5 CPP. La procédure de première instance ne présente d’ailleurs pas des vices importants auxquels il est impossible de remédier en procédure d’appel puisque, comme déjà mentionné, les conditions d’application de la rixe ont été abordées, discutées et motivées lors de la procédure de première instance.
Enfin, l’argument soulevé par les prévenus, selon lequel la poursuite des appelants pour rixe ne serait pas possible dès lors que les plaignants devraient également être poursuivis pour cette même infraction, est infondé. En effet, si l’infraction de rixe est retenue à l’encontre des appelants, il appartiendra au ministère public d’ouvrir une instruction pénale contre les plaignants s’il le juge nécessaire. Aucun élément ne justifie impérativement que toutes les parties soient jugées en même temps.
En conséquence, l’application de l’art. 344 CPP à ce stade de la procédure afin d’examiner une nouvelle fois les éléments constitutifs de la rixe (art. 133 CP) ne viole ni le principe d’accusation, ni le double degré de juridiction et remplit les conditions du principe de célérité de la procédure.
4.
4.1
Selon l'art. 133 CP, celui qui aura pris part à une rixe ayant entraîné la mort d'une personne ou une lésion corporelle sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (al. 1). N'est pas punissable celui qui se sera borné à repousser une attaque, à défendre autrui ou à séparer les combattants (al. 2). A la différence de l'agression, la rixe est une altercation physique réciproque entre au moins trois personnes qui y participent activement (ATF 131 IV 150 c. 2.1; ATF 104 IV 53 c. 2b). Le comportement punissable consiste à participer à la bagarre. La notion de participation doit être comprise dans un sens large. Il faut ainsi considérer comme un participant celui qui frappe un autre protagoniste, soit toute personne qui prend une part active à la bagarre en se livrant elle-même à un acte de violence (ATF 131 IV 150 c. 2; ATF 106 IV 246 c. 3e; Corboz, op. cit., n. 5 ad art. 133 CP).
Lorsqu'une personne a une attitude purement passive, ne cherche qu'à se protéger et ne donne aucun coup, on ne peut soutenir qu'elle participe à la rixe (ATF 137 IV 1 c. 4.2.2). En effet, celle-ci exige une certaine forme de participation, soit un combat actif, effectif et réciproque entre au moins trois personnes. Si l'une des trois ne se bat pas et n'use pas de violence pour repousser l'attaque, il n'y a pas de rixe. Dans un tel cas, on retiendra l'agression, les voies de fait, les lésions corporelles ou l'homicide (cf. ATF 106 IV 246 c. 3e; ATF 94 IV 105; ATF 70 IV 126). En revanche, quand une personne a une attitude active, mais purement défensive ou de séparation, c'est-à-dire distribue des coups, mais exclusivement pour se protéger, défendre autrui ou séparer les combattants, on a alors affaire à une rixe (ATF 131 IV 150 c. 2.1.2; ATF 94 IV 105). Dans ce sens, la jurisprudence a précisé que du moment où la loi accorde l'impunité à celui qui s'est borné à se défendre (art. 133 al. 2 CP), elle admet qu'il est aussi un participant au sens de l'art. 133 CP (TF 6B_405/2012 du 7 janvier 2013 c. 2.1.2; ATF 106 IV 246 c. 3e).
4.2
Dans ses deux arrêts du 7 janvier 2013, le Tribunal fédéral a considéré que l’on ne pouvait pas scinder l’action en deux phases distinctes, comme l’avait fait la Cour de céans dans son arrêt du 8 mai 2012, soit, d’une part, le différent intervenu à l’ouverture de la porte par L._, et d’autre part, l’attaque dont L._ a été victime dans son appartement. Selon le Tribunal fédéral, ces faits formant une unité matérielle, il ne peut pas être fait abstraction du comportement de L._ après qu’il a ouvert la porte pour qualifier les faits reprochés aux prévenus. Le Tribunal fédéral a estimé que le coup de poing donné par L._ à G._ n’était pas purement défensif, mais qu’il constitue au contraire une marque d’agressivité. Dès lors, les violences commises par les prévenus font directement suite au coup de poing et ne peuvent être qualifiées d’unilatérales au regard de l’art. 134 CP (c. 2.3).
Au vu des considérations du Tribunal fédéral, il convient de retenir ce qui suit :
En l’espèce, les appelants se sont rendus chez L._ pour lui acheter du cannabis. Lorsque celui-ci a ouvert la porte et a vu G._ sur le pas de la porte, il l’a immédiatement refermée. Toutefois, le prévenu a voulu forcer le passage en glissant son pied dans l’entrebâillement. Le plaignant lui a alors asséné un coup au visage le faisant tomber. C’est après cet acte que les trois prévenus se sont précipités dans l'appartement pour s’en prendre au maître des lieux. Ils ont investi les lieux comme un seul homme, animés d'une volonté commune de s'en prendre physiquement, conjointement, à L._ et, ultérieurement, à sa colocataire. Les trois assaillants ont encore projeté vers les plaignants tous les objets garnissant le logement qui leur tombaient sous la main, y compris les vélos, ce sans faire de distinction entre les deux occupants des lieux.
L._, pour se défendre contre les attaques, a distribué des coups de pieds à ses agresseurs puis a sorti une arme blanche munie d’une lame de quelques 20 cm pour les faire fuir. L’intervention de L._ à ce stade n’a été que défensive, même en ce qui concerne l'exhibition du couteau, dont il n'a du reste pas fait usage. Il est déterminant à cet égard qu'aucun des intrus n'a relevé avoir été blessé à l'arme blanche (l'écorchure à la main droite de A.Q._ ayant une autre origine), ni même avoir dû esquiver un coup de couteau. Par son comportement, notamment le coup de poing au visage, puis les coups de pied et l’exhibition du couteau, L._ a adopté une attitude active dans la bagarre.
S’agissant de l’implication de la plaignante, W._, cette dernière se trouvait dans la cuisine lorsqu’elle a été alertée par un fracas métallique dans le salon. Elle est alors sortie de la pièce munie d’un spray au poivre qu’elle a vidé pour faire fuir les intrus. Cette dernière a également reçu des coups et un vélo par la suite qui lui a causé des lésions corporelles graves. Son comportement n’a été que défensif.
En conséquence, les prévenus ont personnellement et volontairement participé à une opération d’intrusion brutale au cours de laquelle des coups ont été échangés et des lésions subies, ce indépendamment de savoir lequel des assaillants est l'auteur des blessures infligées à l'une respectivement à l'autre des plaignants.
4.3
L’appelant P._ a plaidé sa passivité dans la bagarre.
C’est faire fi des définitions rappelées plus haut (cf. consid. 4.1). La rixe, comme l’agression, sont en effet des infractions de mise en danger et l’argumentation libératoire de l’appelant concerne la question des lésions corporelles, pour lesquelles il n’a pas été condamné. Elle est donc vaine dans cette mesure. Peu importe que des coups déterminés ne puissent lui être imputés et même qu’il ne soit pas retenu qu’il ait eu l’intention d'en porter. Il est avéré, et au surplus admis, que P._ est entré dans l’appartement de L._. L’argument selon lequel il n'a agi que dans le dessein d'"obtenir des explications" est d’autant moins crédible que ce n’est pas lui, mais G._, qui avait été repoussé, au seuil de la porte. A ceci s’ajoute que ce n’est pas d’explications dont il s’agissait, mais, d’emblée, de violence, vu la volonté conjointe de vengeance à imputer aux trois intrus, à la suite du coup reçu par G._. A cet égard, l’explication tenue par le tribunal comme la plus vraisemblable d’une volonté des trois prévenus de venger le coup qui a été reçu par G._ (jugement, p. 93) ne relève pas d’une appréciation erronée ou incomplète des faits. W._ a confirmé en effet que trois
personnes étaient entrées et que "tout s’(était) déroulé très vite" (jugement, p. 8), respectivement que "la scène s'(était) passée très vite" (jugement, p. 10). Il suffit ainsi, pour retenir l’infraction de rixe, de constater que P._ a personnellement et volontairement participé à une opération d’intrusion brutale au cours de laquelle des coups ont été donnés et des lésions subies, ce indépendamment de savoir lequel des assaillants est l'auteur des blessures infligées à l'une respectivement à l'autre des victimes.
Les éléments constitutifs de la rixe sont donc bien réalisés.
Les appels des prévenus tendant à leur libération du chef d'accusation d'agression doivent donc être admis, les prévenus devant toutefois être reconnus coupables de rixe.
5.
Les prévenus étant reconnus coupables de rixe et non plus d’agression, il convient de statuer sur les différentes peines à prononcer, en tenant compte par ailleurs des autres infractions retenues à leur encontre.
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_335/2012 du 13 août 2012 c. 1.1 et les références citées).
Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, le juge doit respecter, en particulier, le principe d'égalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst.; cf., au regard de l'art. 63 aCP, ATF 120 IV 136, c. 3a p. 144 et les arrêts cités). S'il est appelé à juger les co-auteurs d'une même infraction ou deux co-prévenus ayant participé ensemble au même complexe de faits délictueux, il est tenu de veiller à ce que la différence des peines infligées aux deux intéressés soit justifiée par une différence dans les circonstances personnelles en fonction desquelles, conformément à l'art. 47 CP, la peine doit être individualisée (cf. ATF 121 IV 202, c. 2b; TF 6S.199/2006 du 11 juillet 2006 c. 4 in fine; TF 6B_207/2007 du 6 septembre 2007 c. 4.2.2). A défaut de motifs pertinents, il ne faut pas créer un écart trop important entre deux co-prévenus qui ont participé ensemble au même complexe de faits délictueux (cf. sur ce point TF 6B_233/2011 du 7 juillet 2011 c. 2.2.1).
i. A.Q._
6.
S'agissant tout d'abord de A.Q._, fixer la peine implique de statuer également sur la révocation de la libération conditionnelle accordée le 10 juin 2009 par l'Office d'exécution des peines du canton d'Argovie.
6.1
La commission d'un crime ou d'un délit n'entraîne pas obligatoirement la révocation de la libération conditionnelle. Selon l'art. 89 al. 2 CP, le juge renoncera à la réintégration s'il n'y a pas lieu de craindre que le condamné ne commette de nouvelles infractions. Par sa nature même, le pronostic à émettre ne saurait être tout à fait sûr; il doit suffire de pouvoir raisonnablement pronostiquer que le détenu ne commettra pas de nouvelles infractions (TF 6B_663/2009 du 19 octobre 2009 c. 1.2 et les arrêts cités).
Pour émettre son pronostic, le juge doit se livrer à une appréciation d'ensemble de tous les éléments pertinents. Outre les faits relatifs à la nouvelle infraction, il doit tenir compte du passé et de la réputation du prévenu ainsi que de tous les éléments qui donnent des indices sur le caractère de l'auteur et sur ses perspectives de resocialisation. Pour apprécier le risque de récidive, il est indispensable de se fonder sur une image globale de la personnalité de l'auteur. Les facteurs déterminants sont ainsi les antécédents pénaux, la biographie sociale, les rapports de travail, l'existence de liens sociaux, les risques d'addiction, etc. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents. De même qu'en matière de fixation de la peine, la motivation du jugement (art. 50 CP) doit permettre la vérification de la correcte application du droit fédéral. Dans l'émission du pronostic, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation, de sorte que le Tribunal fédéral n'intervient qu'en cas d'excès ou d'abus, notamment lorsque le juge a omis de tenir compte de critères pertinents (TF 6B_663/2009 précité, ibid., et l’arrêt cité).
Quant à la manière d’appliquer l’art. 89 al. 6 CP, le Tribunal fédéral a énoncé notamment que le juge doit fixer la peine conformément au principe de l'absorption (Asperationsprinzip), à opposer au principe du cumul (Kumulationsprinzip); ce faisant, il doit partir de la quotité de la peine réprimant l'infraction commise durant le délai d'épreuve, prononcée selon l'art. 47 CP, pour l'accroître à la mesure du solde de peine restant à purger pour aboutir à une peine d'ensemble fixée rétrospectivement en application de l'art. 49 CP.
Conformément à la jurisprudence, il convient d'examiner le point de savoir si la nouvelle peine doit être ferme, pour ensuite, dans l'affirmative, statuer sur la question de la réintégration et enfin, toujours dans l'affirmative, fixer une peine d’ensemble qui tiendra compte, entre autres critères, de la réintégration ordonnée (ATF 135 IV 146 c. 2.4.1).
Sur la question de savoir si la peine doit être ferme, la peine (d'ensemble) prononcée entre dans le champ d’application de l'art. 42 al. 1 CP vu sa quotité, ce qui commande en principe le sursis, ordinaire ou partiel. Cela étant, si le prévenu, durant les cinq ans qui ont précédé l’infraction, a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de six mois au moins ou à une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins, il ne peut y avoir de sursis à l’exécution de la peine qu’en cas de circonstances particulièrement favorables (art. 42 al. 2 CP).
Le Tribunal fédéral a, dans un arrêt de principe du 19 mai 2009 (6B_492/2008, c. 3.1.3, considérant non publié aux ATF 135 IV 152, confirmé notamment par arrêt du 4 juin 2010, TF 6B_244/2010 du 4 juin 2010), considéré qu'en cas de récidive au sens de l'art. 42 al. 2 CP, seules deux hypothèses sont envisageables : soit les circonstances sont particulièrement favorables et le sursis total doit être accordé à l'auteur; soit les circonstances sont mitigées ou défavorables et le sursis, respectivement partiel ou total, est alors exclu. Par circonstances particulièrement favorables au sens de l'art. 42 al. 2 CP, il faut entendre les circonstances propres à renverser la présomption de pronostic négatif attachée à un tel antécédent (TF 6B_244/2010, précité, c. 1). Elles doivent démontrer que le prévenu présente, malgré ses antécédents, de solides garanties de non réitération au cas où le sursis lui serait accordé (cf. arrêt précité c. 1 in fine).
6.2
6.2.1
En l’espèce, A.Q._ a été condamné le 28 novembre 2007, soit moins de cinq ans avant la commission de l’infraction faisant objet de la présente procédure, par le Tribunal d’Aarau à une peine privative de liberté de dix mois ainsi qu’à une amende de trois cents francs. La peine privative de liberté a été suspendue au profit d’un traitement ambulatoire à forme de l’art. 63 CP qu’il n’a jamais suivi. La mesure a dès lors été abrogée le 13 août 2008 et l’exécution du solde de la peine a été ordonnée. Ainsi, pour pouvoir bénéficier du sursis, les circonstances doivent être particulièrement favorable. Le prévenu ne peut se prévaloir d'aucune circonstance semblable, vu en particulier les six condamnations prononcées. Ces peines, en nombre significatif pour une personne de son âge et dont certaines ont été subies, ne l'ont pas détourné de la délinquance. En outre, la gravité des actes illicites va même croissante. De surcroît, la nouvelle infraction, ici en cause, a été commise six mois seulement après la libération conditionnelle accordée par l'autorité argovienne. Enfin, la socialisation du prévenu laisse à désirer malgré l'exercice d'une activité lucrative, sachant qu'il doit bénéficier de l'assistance d'un éducateur de rue et qu'il présente une tendance à la violence domestique.
Par ailleurs, même A.Q._ ne prétend pas, dans ses conclusions prises au pied de la déclaration d’appel du 14 décembre 2011 et tendant à la réduction de la peine prononcée, à l’octroi d’un sursis.
6.2.2
Quant à la question de la réintégration, la situation est aussi claire. L’image globale de la personnalité de l’auteur, telle qu’elle résulte du dossier, n’est pas bonne : comme déjà relevé, le casier judiciaire du prévenu est impressionnant pour un homme de 27 ans; qui plus est, il comporte des condamnations pour des infractions commises avec violence; l'intéressé ne présente pas de stabilisation sociale ni d'intégration professionnelle durable, même si le prévenu continue à faire du montage de scènes depuis mars 2012; la relation amoureuse qu'il entretient est difficile au point que le prévenu a suivi un traitement pour tenter de combattre sa propension à la violence conjugale; le risque de récidive est attestée par expertise déposée dans la procédure argovienne et le pronostic s'est révélé exact. A ce tableau, s’ajoutent la violence, la dangerosité et la gratuité des faits ici réprimés. Il n’est pas envisageable, au vu de l’ensemble de ces éléments, de renoncer à la réintégration du condamné. Le seul fait que le prévenu se fait aider d’un éducateur de rue et qu'il poursuit une activité lucrative – que l'on peut qualifier de précaire – dans un domaine où il avait occasionnellement travaillé ne suffit pas à inverser le pronostic.
Le prévenu conteste la révocation de la libération conditionnelle en arguant du fait que sa condamnation pour rixe n’est pas justifiée; sachant que, le prévenu doit être reconnu coupable de rixe, cet argument doit être écarté.
6.2.3
Pour ce qui est du troisième point, il faut apprécier la quotité de la peine, en tenant compte, outre des critères déjà mentionnés (consid. 5 ci-dessus), du fait que la peine à prononcer est partiellement complémentaire à deux peines de 120 heures de travail d'intérêt général (soit 60 jours au total) en raison de la consommation de cannabis depuis mars 2009. Lors de la fixation de la peine dans un tel cas de concours réel rétrospectif, l'art. 49 al. 2 CP enjoint au juge de prononcer une peine complémentaire ou additionnelle (Zusatzstrafe), de telle sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement; concrètement, le juge doit se demander comment il aurait fixé la peine en cas de concours simultané, puis déduire de cette peine d'ensemble hypothétique la peine de base, soit celle qui a déjà été prononcée (TF 6B_28/2008 du 10 avril 2008 c. 3.3.1; cf. aussi TF 6B_685/2010 du 4 avril 2011). En outre, la fixation de la peine doit tenir compte du fait qu'elle intègre un solde de peine dont l’exécution est ordonnée ensuite d’une révocation de libération conditionnelle.
6.2.4
En l’espèce, les faits sont graves. Comme dit plus haut, ils font apparaître violence, dangerosité et gratuité. Renvoi soit aux éléments déterminants figurant au consid. 6.2.2 ci-dessus. La part de peine restant à exécuter au titre de la réintégration s’élève à 104 jours.
Il résulte certes de l’expertise déposée dans le cadre de l’affaire argovienne de 2009 que le prévenu présente un trouble du comportement dyssocial ou agressif. A défaut de toute amélioration avérée, il doit en être tenu compte à décharge comme pouvant dans une certaine mesure expliquer l’impulsivité de l'intéressé. De même, sont à retenir en sa faveur le fait que l'intéressé a décidé de suivre un traitement pour l’aider à prévenir la réitération d’actes de violence dans le domaine conjugal, ainsi que de l'appui dont il bénéficie de la part d'un éducateur de rue.
La restriction de la responsabilité ne constitue, lorsqu’il y a lieu, qu'un critère parmi d'autres pour déterminer la faute liée à l'acte. Ces éléments de l'état de fait diminuent la faute, ce qui entraîne une peine plus clémente. D'autres circonstances peuvent aussi augmenter la faute et compenser la diminution de capacité cognitive ou volitive. On peut citer par exemple des motifs blâmables. Le juge jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour apprécier ces éléments (TF 6B_238/2009 du 8 mars 2010 c. 5.6, résumé in ATF 136 IV 55, JT 2010 IV 127). Dans le cas particulier, les quelques éléments à décharge ne sont pas de nature à impliquer une réduction sensible de la peine, loin s'en faut, vu notamment l'importance de la réitération devant être réprimée, rapprochée des autres éléments défavorables déjà mentionnés.
6.3
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il se justifie de prononcer une peine privative de liberté d’ensemble de 14 mois, correspondant à 11 mois plus 104 jours, soit un peu moins que ce qu’a réclamé le Parquet du fait que l’appelant a été reconnu coupable de rixe et non d’agression, ainsi que de confirmer l’amende de 300 fr. avec peine de substitution de douze jours prononcée par les premiers juges pour réprimer séparément la contravention à la LStup. Cette peine sera partiellement complémentaire aux deux peines de 120 heures de travail d'intérêt général prononcées par le Juge d’instruction du Nord vaudois le 27 mars 2009 et le 28 juillet 2009.
ii. G._
7.
Pour ce qui est de la peine à l'encontre de G._, les premiers juges ont révoqué le sursis accordé précédemment à une peine pécuniaire et refusé d’octroyer le sursis à la nouvelle peine prononcée. L’appel joint du prévenu n’attaque pas le jugement sur ces deux points, lesquels ne seront donc pas examinés (art. 404 al. 1 CPP). Seule la quotité de la peine est contestée.
7.1
Il est exclu de transformer a posteriori une peine pécuniaire en une peine de travail d'intérêt général, comme l’ont fait les premiers juges (ATF 137 IV 249). En d'autres termes, à défaut de peine d'ensemble, la quotité de la nouvelle peine ne tiendra ainsi pas compte de la révocation du sursis. Il convient donc de modifier le chiffre III du jugement en ce sens que le sursis accordé par le Juge d'instruction de Lausanne le 9 décembre 2008 est révoqué et que l'exécution de la peine de 20 jours-amende à 30 fr. le jour est ordonnée. Pour le reste (ch. IV), la quotité de la nouvelle peine ne tiendra évidemment pas compte de la révocation du sursis, le chiffre en question devant donc aussi être modifié.
La peine à fixer doit en revanche tenir compte du fait qu’elle est entièrement complémentaire à la peine de 120 jours-amende avec sursis pour diverses infractions à la LCR prononcée le 10 août 2010 par le Juge d'instruction du Nord vaudois. Quant aux principes applicables en matière de concours réel rétrospectif, il est renvoyé au considérant 6.2.3 in initio ci-dessus.
S’agissant de la quotité de la peine, le tribunal a estimé qu’il aurait prononcé une peine de dix mois s’il avait été saisi en une seule fois pour toutes les infractions, d’où les 720 heures de peine de travail d'intérêt général prononcées après déduction des 120 jours-amende de la peine précédente.
A charge, il convient de retenir que G._ est néanmoins à l’origine de la rixe, en bloquant la porte avec son pied pour forcer le passage dans l’appartement. Il savait, pour s’être déjà présenté au domicile de L._, le 7 janvier 2010, que celui-ci vivait avec une femme et qu’ainsi avec ses comparses, il était manifestement en situation de force. Ce comportement est critiquable par sa lâcheté, par sa brutalité et par sa gratuité. En outre, le motif de la bagarre est absolument futile lorsque l’on considère qu’il s’agissait d’un simple coup constitutif de voies de fait et consécutif au comportement critiquable de G._, lors de la visite précédente. Il n’a par ailleurs fait preuve d’aucun amendement ni de la moindre sollicitude à l’égard des plaignants. A charge, il convient de retenir encore ses antécédents judiciaires, avec la réserve qu’ils se rapportent partiellement à des infractions d’un tout autre domaine, soit la LCR.
A décharge, il est tenu compte de l’effet légèrement désinhibiteur de l’alcool et du cannabis consommé par G._ avant les faits. Il faut également relevé les efforts entrepris pour une insertion sociale et familiale.
7.2
Sur la base des éléments à disposition, et même en faisant preuve de retenue dans la comparaison avec les autres prévenus (cf. consid. 5 ci-dessus), la culpabilité de ce prévenu n’apparaît pas la plus importante. Néanmoins, l’on doit constater, avec le Ministère public, que les premiers juges ont abusé de leur pouvoir d’appréciation en ne fixant qu’à six mois la quotité de la peine. D'abord, même si cela n’est pas en soi déterminant, il n’est pas réaliste ni raisonnable, à tout le moins pour un prévenu dont on envisage, comme les premiers juges, de favoriser l’insertion professionnelle, d’ordonner l’exécution de 720 heures de peine de travail d'intérêt général à effectuer dans le délai de deux ans de l’art. 38 CP, ce qui représente une moyenne de deux jours par semaine (cf. BJP 2010 38). Ensuite, l’écart d’avec la peine prononcée à l’encontre du principal intéressé est trop important, s'agissant de prévenus ayant participé aux mêmes faits ensemble et d'un commun accord. La seule circonstance que l’insertion professionnelle et familiale de ce prévenu paraisse meilleure que celle des deux autres et le fait qu'il ne se voit pas imputer personnellement un lancer de vélo (seul A.Q._ étant, comme vu plus haut, condamné pour lésions corporelles graves de ce fait) ne peuvent justifier un pareil écart dans les peines prononcées. G._ est d’ailleurs en outre condamné pour un vol avec effraction commis environ un mois avant les principaux faits litigieux.
Ainsi, c'est une peine privative de liberté de 9 mois qui doit être prononcée, cette peine étant partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 août 2010 par le Juge d'instruction du Nord vaudois. Pour le surplus, l’amende de 200 fr. avec peine privative de liberté de substitution de huit jours prononcée par les premiers juges pour réprimer séparément la contravention à la LStup est confirmée.
iii. P._
8.
En ce qui concerne P._, le tribunal a révoqué deux sursis à une peine privative de liberté de huit mois et une peine pécuniaire de 15 jours et prononcé une peine d’ensemble ferme de 15 mois, partiellement complémentaire à celle faisant l’objet de l’un des deux sursis révoqués. En outre, une amende réprime les contraventions à la LStup, comme pour les autres prévenus.
P._ a conclu, dans son appel, au prononcé d’une peine de 50 heures de travail d'intérêt général seulement, avec sursis de trois ans. Cette quotité part de la prémisse – non réalisée – qu’il ne serait condamné que pour violation de domicile et contravention à la LStup et libéré de tout autre chef d’accusation.
Dans son appel, le Ministère public a conclu à ce qu’une peine privative de liberté de 15 mois qui viendrait s’ajouter aux trois révocations de sursis (y compris celui accordé le 13 mars 2007 par le Juge d’instruction de la Côte en sus des deux sursis mentionnés par le ch. VIII du dispositif) soit prononcée.
8.1
Seul un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné peut justifier la révocation d'un sursis. Cette condition correspond à l'une des conditions d'octroi du sursis, de sorte que, comme dans ce dernier cas, le pronostic à émettre doit reposer sur une appréciation d'ensemble de tous les éléments pertinents. Au nombre de ces facteurs figurent les circonstances de l'acte, les antécédents et la réputation de l'auteur ainsi que les autres éléments permettant de tirer des conclusions quant au caractère, à l'état d'esprit et aux perspectives d'amendement du condamné, de même que la situation personnelle de ce dernier jusqu'au moment du jugement (TF 6B_855/2010 du 7 avril 2011 c. 2.1; ATF 134 IV 140 c. 4.3; ATF 134 IV 60 c. 7.2). A défaut d'un pronostic défavorable, le juge doit renoncer à la révocation du sursis. Autrement dit, la révocation ne peut être prononcée que si la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve (TF 6B_1098/2009 du 7 juin 2010 c. 3.3.1; ATF 134 IV 140 c. 4.2 et 4.3). Dans l'appréciation des perspectives d'amendement à laquelle il doit procéder pour décider de la révocation d'un sursis antérieur, le juge doit tenir compte des effets prévisibles de l'octroi ou non du sursis à la nouvelle peine. Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L'inverse est également admissible : si le sursis précédent est révoqué, l'exécution de la peine qui en était assortie peut conduire à nier l'existence d'un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (TF 6B_458/2011 du 13 décembre 2011 c. 4.1; ATF 134 IV 140 c. 4.5).
8.2
En l’espèce, la nouvelle peine ne saurait être assortie d’un sursis. D'abord, le prévenu a, durant les cinq ans qui précèdent les infractions ici en cause, été condamné à une peine privative de liberté de six mois au moins, soit de huit mois, prononcée le 9 septembre 2008 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne (cf. l’art. 42 al. 2 CP, précité); en outre, il ne peut à l'évidence se prévaloir de circonstances particulièrement favorables au sens de cette disposition, vu la gravité croissante et la récurrence des infractions dont il a à répondre.
Ensuite, il faut considérer que la révocation des sursis s’imposait à l'égard d’un délinquant multipliant à l’envie les infractions contre les personnes et les biens, sans tirer aucune conclusion de ses condamnations, ce même malgré l’octroi de plusieurs sursis successifs. Il n’est pas possible de considérer que l’exécution d’une nouvelle peine permette de poser un effet dissuasif suffisant et qu’il soit de ce fait possible de renoncer à la révocation desdits sursis. C’est donc à juste titre que les premiers juges ont révoqués les sursis accordés les 9 septembre 2008 et 18 février 2009.
Il convient encore de constater, avec le Ministère public, que les premiers juges ont omis de statuer sur la révocation du troisième sursis, soit celui octroyé le 13 mars 2007 par le Juge d'instruction de la Côte, le sursis initial de deux ans ayant été prolongé d'un an le 9 septembre 2008 par le Tribunal correctionnel de Lausanne. La décision à prendre à cet égard ne peut qu’être identique à celle rendue au sujet des deux autres sursis, à savoir la révocation, ce par identité de motifs.
Cela étant, comme déjà relevé (cf. consid. 7.1 ci-dessus), une peine d’ensemble est exclue, pour le motif qu'il n’y a pas de peine d’ensemble possible lorsque les peines sont du même genre (cf. art. 46 al. 1 CP). Or, tel est bien le cas de la peine privative de liberté de huit mois prononcée le 9 septembre 2008 notamment pour brigandage et abus de confiance et de celle qui doit être prononcée ici. En outre, une peine d’ensemble ne saurait être prononcée lorsque cela reviendrait à aggraver après coup la peine concernée par le sursis (cf. ATF 137 IV 249, précité). Il découle de ces principes que ni les premiers juges, ni les conclusions de l’appel du Ministère public ne peuvent être suivis sur ce point.
8.3
Cela étant, il reste à fixer la peine. Une fois soustraites les deux peines dont on a vu qu’elles ne pouvaient être intégrées dans la peine principale, la quotité requise par le Ministère public s’élève à 13 mois et demi. La peine proposée par le prévenu dans son appel est de 50 heures de travail d'intérêt général.
La peine est très partiellement complémentaire à celle prononcée le 18 février 2009, en raison uniquement de la consommation de cannabis. Néanmoins, comme l’ont constaté les premiers juges, cela n’influe que sur la quotité de l’amende qui réprime séparément les contraventions à la LStup.
S’agissant de la quotité de la peine, les éléments à charge de ce prévenu sont les mêmes que ceux à imputer à ses comparses : il s'agit d'actes violents, lâches et gratuits. En outre, il convient de veiller à ce que la différence des peines infligées aux prévenus soit justifiée par une différence dans les circonstances personnelles et donc, à défaut de motifs pertinents, à ce que ne soit pas créé un écart trop important entre des co-prévenus qui ont participé ensemble au même complexe de faits délictueux (cf. consid. 5 ci-dessus). Ainsi, pour préserver l'égalité de traitement entre les deux prévenus qui ne sont pas rendus coupables de lésions corporelles graves, il y a lieu d'opposer la situation de P._ à celle de G._, dont la peine a déjà été fixée (cf. consid. 7.2 ci-dessus). Ce prévenu-ci est en plus condamné pour vol. Cette infraction supplémentaire par rapport aux autres ne justifie cependant pas une peine différente en faveur de P._, vu les antécédents de l’un et de l’autre. En effet, P._ a été condamné notamment pour délit contre la loi fédérale sur les armes, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, brigandage et voies de fait, en sus d'une infraction contre le patrimoine (abus de confiance). Il a ainsi des antécédents plus violents et portant atteinte à des biens juridiquement protégés plus étendus que ceux de G._ dans la mesure où les infractions contre l'intégrité corporelle y occupent une place notable.
Les éléments plus personnels, à charge, tiennent au fait que P._ a agi par frustration de ne pouvoir acheter du cannabis pour sa consommation personnelle, soit pour un motif totalement disproportionné par rapport à son comportement. Toujours à charge, doivent être pris en compte les motifs futiles ayant déclenché la bagarre, le concours d'infraction, ainsi que les réitérations d’actes de violence. A décharge, il doit être tenu compte des quelques regrets exprimés par ce prévenu, ainsi que de son insertion professionnelle.
Au vu de ces éléments, c'est une peine privative de liberté de sept mois qui devra réprimer les faits incriminés; cette peine sera partiellement complémentaire à celle prononcée le 18 février 2009 par le Juge d'instruction de Lausanne. En outre, l’amende de trois cent francs avec une peine privative de liberté de substitution de douze jours sanctionnera les contraventions à la LStup.
9.
En conclusion, les appels de chacun des prévenus, du Ministère public et de W._ doivent être partiellement admis. Le jugement de première instance est modifié dans le sens des considérants.
Vu la mesure dans laquelle chacun des prévenus succombe sur le principe de leurs conclusions, les frais communs de la procédure d'appel avant les recours au Tribunal fédéral doivent être mis à leur charge à hauteur d'un tiers chacun (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). Outre l'émolument (art. 21 al. 1 et 2 TFJP), par 5'760 fr., ces frais comprennent l'indemnité allouée aux défenseurs d’office de chacun des prévenus pour la procédure d’appel (cf. art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP), soit 3'553 fr. 20 pour Me Yan Schumacher, 3'553 fr. 20 pour Me David Abikzer, 777 fr. 60 pour Me Eric Kaltenrieder et 1'578 fr. 50 pour Me Patrick Mangold et une part de l'indemnité au conseil d'office de W._, par 1'314 fr. chacun. Ces indemnités ayant déjà été versées aux défenseurs d’office et conseil d’office, il n’y a pas lieu de les refixer.
Les frais de la procédure d’appel qui s’est tenue après les arrêts du Tribunal fédéral, ainsi que les indemnités allouées aux défenseurs des prévenus et au conseil d’office de la plaignante pour cette deuxième procédure en appel, seront laissés à la charge de l’Etat. Il reste toutefois à fixer les indemnités d’office dues pour la procédure d’appel après Tribunal fédéral.
Me Alexa Landert s’en étant remise à justice concernant le montant de son indemnité, elle sera fixée à 1'101 fr. 60, TVA comprise, correspondant à 5 heures à 180 fr. l’heure, et 120 fr., correspondant au forfait pour les trajets, plus la TVA.
Me Yan Schumacher a indiqué avoir consacré plus de 13 h à la défense des intérêts de son client pour la procédure d’appel après Tribunal fédéral. Au vu de la connaissance du dossier déjà acquise par la procédure de première instance, puis par la procédure d’appel et enfin par la procédure devant le Tribunal fédéral, et vu l’absence de dépôt d’écriture complémentaire en suite de l’arrêt du Tribunal fédéral, l'indemnité allouée au défenseur d’office de G._ doit être arrêtée à 1'296 fr., TVA comprise, représentant 6 heures d'activité à 180 fr. l’heure, plus 120 fr. correspondant au forfait pour les trajets.
L'indemnité allouée au défenseur d’office de P._ doit être arrêtée à 1’322 fr., TVA comprise, représentant 6 heures d'activité à 180 fr. l'heure, y compris 24 fr. de débours et 120 fr., correspondant au forfait pour les trajets. La durée d'activité figurant dans la liste des opérations de ce conseil (10 heures 50) est excessive. En effet, s’il faut prendre en compte la lecture des arrêts du Tribunal fédéral, quelques recherches juridiques, la participation aux débats et la plaidoirie (pour une audience de près de deux heures), il n'en reste pas moins qu'on ne peut faire abstraction du fait que le dossier était déjà connu du conseil qui avait plaidé en première instance, ainsi qu’en appel.
L'indemnité allouée au défenseur d’office de A.Q._ doit être arrêtée à 1'101 fr. 60, TVA comprise, représentant 5 heures d'activité à 180 fr. l'heure, plus 120 fr. correspondant au forfait pour les trajets.
Les appelants G._, P._ et A.Q._ ne seront tenus de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de leurs conseils d’office respectifs prévue ci-dessus pour la procédure avant Tribunal fédéral ainsi que celle allouée au conseil d’office de W._, également avant Tribunal fédéral, que lorsque leur situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP ; TF 6B_405/2012 du 7 janvier 2013 c. 5). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bc3584ed-f5a3-4c00-b8c2-38253019aa61 | En fait :
A.
Par jugement du 3 septembre 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a constaté que G._ s’est rendu coupable de vol d’importance mineure, vol, recel, circulation sans permis de circulation, usage abusif de plaques, violation simple des règles de la circulation et conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis (I), l’a condamné à une peine privative de liberté de six mois et à une amende de 450 fr. (II), a dit que cette peine est partiellement complémentaire à celle prononcée le 6 octobre 2010 par le Ministère public de Neuchâtel et complémentaire à celles prononcées les 5 juillet 2011 par le Ministère public de l’Est vaudois et 23 septembre 2011 par le Ministère public de Lausanne (III), a dit qu’à défaut de paiement de l’amende, la peine privative de liberté de substitution sera de quinze jours (IV), a renvoyé [...] et [...] à agir civilement contre G._ s’agissant de leurs conclusions en dommages et intérêts (V), a ordonné la confiscation et la dévolution à l’Etat du montant de 3'450 euros séquestrés sous fiche n° 13104/10 (VI), a ordonné la confiscation et la dévolution à l’Etat d’un pantalon John Galliano AUP216T AP113B, couleur 790, taille 50, et d’un pantalon jeans Dolce&Gabbana G3113D-9062, taille 48, séquestrés sous fiche n° 13104/10 en couverture d’une partie des frais de justice mis à la charge du prévenu (VII), a ordonné la confiscation et la destruction de la pince coupante métallique et des deux sacs comprenant un dispositif d’isolation contre les anti-vol des commerces séquestrés sous fiche n° 13104/10 (VIII), a alloué à Me Jean Lob, défenseur d’office de G._, une indemnité de 4'104 fr., débours et TVA compris (IX), a mis les frais de la cause par 12'447 fr. 50, y compris l’indemnité allouée à son défenseur d’office sous chiffre IX ci-dessus, à la charge de G._ (X) et a dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité allouée au défenseur d’office du prévenu sous chiffre IX ci-dessus sera exigible pour autant que la situation économique de ce dernier se soit améliorée et le permette (XI).
Par jugement du 1
er
novembre 2013, la Cour d’appel pénale a rejeté l’appel formé par G._ tendant à sa libération du chef d'accusation de conduite d’un véhicule automobile sans permis, à la réduction de la peine qui lui a été infligée à quatre mois de privation de liberté et à la restitution des pantalons John Galliano et Dolce&Gabbana séquestrés sous fiche n° 13104/10
.
Par arrêt du 18 mars 2014 (TF 6B_81/2014), la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis le recours de G._, a annulé le jugement attaqué dans la mesure où il reconnaît le prévenu coupable de conduite d’un véhicule automobile malgré le retrait du permis de conduire et a renvoyé la cause à l’autorité cantonale afin qu’elle fixe une nouvelle peine.
B.
Dans le délai au 10 avril 2014 imparti à cet effet, le prénommé s’est déterminé sur les suites de cet arrêt. Il a conclu à sa libération, au bénéfice de la prescription, des accusations d’avoir dérobé, le 17 juillet 2010, deux bouteilles de parfum, d’un montant total de 278 fr., et d’avoir, le 10 décembre 2010 (recte : le 7 décembre 2010), conduit un véhicule sans permis de circulation, à sa libération de l’accusation d’avoir conduit un véhicule automobile malgré le retrait du permis de conduire, à sa condamnation à une peine pécuniaire de nonante jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr., à la réduction des frais de première instance dans telle mesure que justice dira, les frais de la procédure d’appel étant laissés à la charge de l’Etat, et à l’allocation d’une indemnité d’office d’un montant que justice dira. Il a renoncé à l’appointement d’une audience publique.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né en 1978 à Kinshasa, en République démocratique du Congo, pays dont il est ressortissant, G._ est l’aîné d’une fratrie de deux enfants. Jusqu’à l’âge de 8-9 ans, il a été élevé par ses parents et, après le décès de ceux-ci, par son oncle paternel. Il n’a pas suivi de scolarité, ni effectué une formation. Au mois d’avril 1996, il est arrivé en Suisse et y a déposé une demande d’asile, qui a été rejetée en juillet 1996. Son renvoi ayant été prononcé en février 1997, le prévenu est retourné dans son pays. Au début de l’année 1998, il est revenu en Suisse, où il a tout d’abord séjourné de manière illicite avant de déposer une nouvelle requête d’asile, qui a également été rejetée. Il a pu bénéficier du regroupement familial en raison de son mariage avec une ressortissante suisse en août 2003 et un enfant est né de cette union le 4 décembre 2008. Actuellement, un recours contre la décision cantonale de renvoi de Suisse prononcée à son encontre est pendant devant la Cour de droit administratif et public du canton de Vaud (pièce 49/1).
Le prévenu travaille comme aide de salle d’opération à l’Hôpital [...], site de [...]. Il gagne un salaire net d’environ 3'000 fr. par mois, impôts à la source déduits, versé treize fois l’an. Le loyer de l’appartement qu’il occupe avec sa famille s’élève à 1'250 fr., charges comprises, et ses primes d’assurance maladie se montent à 230 fr. par mois. Il a des dettes pour 70'000 fr. et n’a, selon ses dires, pas d’économies.
Son casier judiciaire comporte les inscriptions suivantes :
- 25.08.2003, Juge d’instruction de Lausanne, faux dans les certificats, contravention à l’Ordonnance sur les règles de la circulation routière, amende 800 fr.;
-22.09.2004, Bezirksgericht Bülach, vol, emprisonnement 10 mois, libération conditionnelle le 30.11.2004, délai d’épreuve 3 ans, libération conditionnelle révoquée le 10.07.2008 par le Bezirksgericht Uster;
- 13.01.2005, Cour de cassation pénale Lausanne, vol, rupture de ban, emprisonnement 2 mois, expulsion (répercussion abolie) 3 ans, sursis à l’exécution de la peine, peine complémentaire au jugement du 22.09.2004 du Bezirksgericht Bülach;
- 10.07.2008, Bezirksgericht Uster, vol, vol par métier et en bande, peine privative de liberté 9 mois, libération conditionnelle le 18.03.2009, délai d’épreuve 1 an, assistance de probation;
- 06.01.2009, Bezirksamt Brugg, violation de domicile, peine pécuniaire 20 jours-amende à 50 fr.;
- 06.10.2010, Ministère public du canton de Neuchâtel, vol, peine pécuniaire 25 jours-amende à 15 fr.;
- 05.07.2011, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois, circulation sans permis de circulation ou plaques de contrôle, circulation sans assurance-responsabilité civile, usage abusif de permis et/ou de plaques de contrôle, peine pécuniaire 30 jours-amende à 30 fr.;
- 23.09.2011, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait (véhicule automobile), peine pécuniaire 30 jours-amende à 30 francs.
Le fichier des mesures administratives en matière de circulation routière (ADMAS) du prévenu (pièce 8) fait état de trois retraits de permis, d’un mois en 2011 pour excès de vitesse, de six mois également en 2011 pour conduite malgré retrait/interdiction et de quatre mois en 2012 – ce dernier étant valable du 8 septembre 2012 au 7 janvier 2013 –, prononcés respectivement les 7 janvier 2011, 25 août 2011 et 12 mars 2012.
2.
2.1
Le 17 juillet 2010, au magasin V._ à l’avenue de [...] à Moudon, G._ a dérobé, en deux temps, deux bouteilles de parfum « One Million » de Paco Rabane, d’un montant total de 278 francs.
2.2
Le 17 septembre 2010, à la parfumerie V._ à Bulle, il a rassemblé huit bouteilles de divers parfums dans un rayon. Il a ensuite quitté le magasin pour y revenir peu après avec un sac dans lequel il a placé la marchandise, avant de quitter la parfumerie. Les bouteilles de parfum, d’une valeur totale de 960 fr., ont été revendues par le prévenu pour le prix de 25 fr. la pièce.
2.3
Le même jour, G._ s’est rendu à [...], à la pharmacie V._, et a caché six parfums dans sa veste, avant de quitter le magasin. Les bouteilles de parfum, d’une valeur totale de 696 fr., ont été revendues par le prévenu pour le prix de 25 fr. la pièce.
2.4
Le 7 décembre 2010 vers 16h30, G._ a été interpellé à la route des Colondailles à Montreux, alors qu’il avait stationné un véhicule Hummer H2 sur une place de parc privée. Les plaques [...], apposées sur cette voiture, étaient attribuées à un véhicule Toyota, dont le permis de circulation avait été annulé le 12 novembre 2010. Le prévenu a présenté une attestation d’assurance RC valable, mais n’a pas été en mesure de fournir le permis de circulation du Hummer.
2.5
Le 10 décembre 2010, vers 11h15, il s’est rendu dans le magasin [...] à Thoune et a dérobé six pantalons pour homme d’une valeur totale de 1'199 fr. 30, qu’il a dissimulés dans un sac doublé de papier d’aluminium. Il a été interpellé peu après par une patrouille de police. La marchandise dérobée a été restituée au lésé.
2.6
Le 31 décembre 2010, en fin de matinée, G._ a accompagné [...] à la parfumerie V._ à Bulle. Tandis que le prévenu attendait dans la voiture, son amie a dérobé trente-trois parfums, pour un montant total de 1'904 fr. 18. Le prévenu est ensuite rentré à son domicile de Montreux, où [...] a déposé son butin dans le but de le revendre. G._ a accepté de garder cette marchandise pour son amie alors qu’il en connaissait la provenance délictueuse. Seuls trois parfums ont été retrouvés et restitués au lésé.
2.7
A la mi-septembre 2012, G._ s’est spontanément rendu au SAN (Service des automobiles et de la navigation) pour annoncer qu’il avait perdu son permis. A cette occasion, la personne qui l’a reçu au guichet lui a expliqué qu’il était sous retrait de son permis de conduire et qu’une lettre lui avait été transmise à son ancienne adresse. Le 21 septembre 2012, à 21h06, à Mézières, route de Servion, G._, a circulé au volant d’un véhicule automobile qui lui avait été prêté à une vitesse de 66 km/h (marge de sécurité déduite) au lieu des 50 km/h autorisés.
2.8
G._ était encore mis en cause pour avoir volé, entre le 1
er
octobre 2009 et le 15 janvier 2010, deux pantalons, l’un de marque John Galliano et l’autre de marque Dolce&Gabbana, d’une valeur totale de 1'060 fr., dans le magasin [...] AG à Zürich. Le tribunal a toutefois libéré le prévenu du chef de prévention de vol pour ces faits, mais a ordonné la confiscation et la dévolution à l’Etat des deux pantalons, séquestrés sous fiche n° 13104/10 (pièce 10), en couverture d’une partie des frais de justice mis à la charge du prénommé.
3.
En relation avec les faits exposés sous ch. 2.7 ci-avant, le Tribunal fédéral a précisé qu’en considérant que le défaut de décision valablement notifiée pouvait être pallié par la conscience du recourant qu’il faisait l’objet d’un retrait de son permis de conduire, la cour de céans avait, dans son jugement du 1
er
novembre 2013, méconnu la distinction des éléments constitutifs objectifs et subjectifs de l’infraction. Il a retenu que quand bien même le prévenu savait, à ce moment-là, qu’il faisait l’objet d’un retrait de son permis de conduire, il n’avait toutefois pas pu prendre connaissance de la décision de retrait, de ses motifs, de sa durée, ainsi que de sa portée, et rien n’indiquait que le contenu précis de la décision lui avait été communiqué au guichet du SAN. Selon la Haute Cour, les informations obtenues à cette occasion imposaient certes au prévenu d’agir dans un délai raisonnable s’il entendait contester la décision, mais compte tenu des quelques jours séparant les communications du SAN des faits reprochés, l’on ne saurait lui faire grief de ne pas avoir agi à ce moment-là.
4
En cours d'instruction, G._ a été soumis à une expertise psychiatrique. Dans leur rapport du 4 mars 2013 (pièce 43), les experts ont posé le diagnostic de trouble mixte de la personnalité, caractérisé par un mépris des normes, des règles et des contraintes sociales, une tendance à fournir des justifications plausibles pour expliquer un comportement à l’origine d’un conflit entre lui-même et la société, ainsi qu’une difficulté à maintenir durablement des relations alors qu’il n’existe pas de difficulté à les établir. Ils ont par ailleurs mis en évidence des traits de personnalité narcissique, caractérisés par une tendance à se considérer comme unique et à attendre un traitement de faveur. Ils ont expliqué que ce trouble de la personnalité, qui, sur le plan clinique, n’était pas considéré comme grave, était déjà présent au moment des faits reprochés. Ils n’ont préconisé aucun traitement des troubles mentaux, précisant qu’il n’y avait pas d’éléments cliniques en faveur d’une cleptomanie.
S’agissant de sa responsabilité pénale, les experts ont retenu que G._ conservait la faculté d’apprécier le caractère illicite de son acte et de se déterminer d’après cette appréciation. Ils ont conclu à une responsabilité conservée.
Quant au risque de récidive, ils ont souligné que l’influence de ce trouble de la personnalité sur le comportement de l’expertisé se traduit par une incapacité à tirer un enseignement des expériences, notamment des sanctions, et lui permet de commettre de nouveaux délits malgré le risque (sous-entendu d’une sanction pénale et d’une expulsion du territoire suisse) qu’il encourt. Ils ont relevé sur ce point que le prévenu avait récidivé à plusieurs reprises et que si, au moment du jugement en mars 2009 (du Juge d’application des peines [pièce 9]), il avait mis en avant ses responsabilités familiales et son souhait de les assumer, il avait toutefois commis de nouveaux délits qu’il tente de banaliser, essayant par ailleurs de se déresponsabiliser.
Un rapport complémentaire a été rendu le 13 mai 2013 (pièce 51), au terme duquel l’expert a confirmé son appréciation au sujet du risque de récidive et son diagnostic. Il a par ailleurs mis en évidence le fait qu’à la suite du prononcé de mise en œuvre du complément d’expertise, le prévenu avait tenté de prendre contact avec lui en l’appelant à six reprises en l’espace de quinze minutes sur son téléphone portable, ce qui démontrait que l’intéressé avait une tolérance très faible à la frustration et qu’il n’y avait chez lui aucune acquisition d’une maturité supplémentaire. | En droit :
1.
Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision. Il peut également renvoyer l'affaire à l'autorité qui a statué en première instance (art. 107 al. 2 LTF [loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral, RS 173.110]). L'autorité à laquelle l'affaire est renvoyée doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit contenus dans l'arrêt de renvoi. Elle ne peut en aucun cas s'écarter de l'argumentation juridique du Tribunal fédéral, aussi bien en ce qui concerne les points sur lesquels il a approuvé la motivation précédente que ceux sur lesquels il l'a désapprouvée. Il n'est pas possible de remettre en cause ce qui a été admis – même implicitement – par le Tribunal fédéral (B. Corboz, in: Commentaire de la LTF, Berne 2009, ch. 27 ad art. 107 LTF).
2.
Le recourant soutient tout d’abord que l’annulation du jugement du 1
er
novembre 2013 de la cour de céans par le Tribunal fédéral et l’écoulement du temps entraîneraient la prescription des infractions de vol d’importance mineure et de circulation sans permis de circulation en relation avec les faits exposés sous chiffres 2.1 et 2.4 ci-dessus.
2.1
Chacune de ces deux infractions est punie d’une amende; il s’agit donc de contraventions (art. 103 CP), pour lesquelles l’action pénale se prescrit par trois ans (art. 109 CP). Or, selon l’art. 97 al. 3 CP, qui s’applique également aux contraventions (ATF 135 IV 196, JT 2010 IV 170), la prescription ne court plus si, avant son échéance, un jugement de première instance a été rendu. Selon la jurisprudence, cette interruption est définitive même en cas d’annulation de la décision de l’autorité inférieure et de renvoi du dossier à cette dernière pour nouveau jugement, qu’il s’agisse d’un jugement de condamnation ou d’acquittement (ATF 139 IV 62; TF 6B_370/2012 du 22 octobre 2012 c. 4; TF 6B_983/2010 du 19 avril 2011 c. 4.3.2).
2.2.
En l’espèce, le jugement du tribunal de police du 3 septembre 2013 ayant interrompu la prescription des contraventions selon les principes exposés ci-avant, la condamnation de G._ pour vol d’importance mineure et circulation sans permis de circulation est justifiée.
3.
Dans la mesure où le chef d’accusation de conduite d’un véhicule automobile malgré le retrait du permis de conduire ne peut plus être retenu, seule la question de la fixation de la peine et le sort des frais demeurent litigieux.
Le recourant conclut à une peine de 90 jours-amende. Il ne prétend pas à l’octroi d’un sursis au sens de l’art. 42 al. 2 CP.
3.1
3.1.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1).
3.1.2
Aux termes de l'art. 41 al. 1 CP, le juge peut prononcer une peine privative de liberté ferme de moins de six mois uniquement si les conditions du sursis à l'exécution de la peine (art. 42) ne sont pas réunies et s'il y a lieu d'admettre que ni une peine pécuniaire, ni un travail d'intérêt général ne peuvent être exécutés.
La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l’Etat ne peut garantir d’une autre manière la sécurité publique (ATF 134 IV 97 c. 4.2.1 et 4.2.2). Lorsque tant une peine pécuniaire qu’une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes les deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d’accorder la priorité à la première, qui porte atteinte au patrimoine de l’intéressé et constitue donc une sanction plus clémente qu’une peine privative de liberté, qui l’atteint dans sa liberté personnelle (ATF 134 IV 97 c. 4.2.2; ATF 134 IV 82 c. 4.1). Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l’adéquation de la peine, de ses effets sur l’auteur et sur sa situation sociale, ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 134 IV 97 c. 4.2; ATF 134 IV 82 c. 4.1).
3.1.3
Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (art. 49 al. 2 CP). Le cas (normal) de concours réel rétrospectif se présente lorsque l'accusé, qui a déjà été condamné pour une infraction, doit être jugé pour une autre infraction commise avant le premier jugement, mais que le tribunal ignorait. L'art. 49 al. 2 CP enjoint au juge de prononcer une peine complémentaire ou additionnelle (Zusatzstrafe), de telle sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement. Concrètement, le juge doit se demander comment il aurait fixé la peine en cas de concours simultané, puis déduire de cette peine d'ensemble hypothétique la peine de base, soit celle qui a déjà été prononcée (TF 6B_455/2013 du 29 juillet 2013 c. 2.4.1 et les références citées). Le prononcé d'une peine complémentaire suppose que les conditions d'une peine d'ensemble au sens de l'art. 49 al. 1 CP sont réunies. Une peine additionnelle ne peut ainsi être infligée que lorsque la nouvelle peine et celle qui a déjà été prononcée sont du même genre. Des peines d'un genre différent doivent en revanche être infligées cumulativement car le principe d'absorption n'est alors pas applicable (TF 6B_1082 du 18 juillet 2011 c. 2.2 et les références citées).
3.2
En l’espèce, G._ est reconnu coupable de vol d’importance mineure, vol, recel, circulation sans permis de circulation, usage abusif de plaques et violation simple des règles de la circulation routière. Les faits remontent tous au deuxième semestre de l’année 2010, mis à part ceux du 21 septembre 2012 concernant une contravention à la LCR, de sorte que la peine à fixer est entièrement complémentaire aux deux peines de 30 jours-amende chacune prononcées en 2011 et partiellement – même si largement complémentaire – à celle de 25 jours-amende prononcée en 2010.
Dans le calcul de la peine globale, toutes ces infractions précédentes – exceptée la violation simple des règles de la circulation routière qui concerne des faits de 2012 – viennent donc s’ajouter à celles réprimées par l’ordonnance de condamnation d’octobre 2010, pour vol, et aux deux ordonnances pénales rendues en juillet 2011, pour circulation sans permis de circulation ou plaques de contrôle, circulation sans assurance responsabilité civile et usage abusif de permis et/ou de plaques de contrôle, et en septembre 2011, pour conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait. La culpabilité du prévenu est importante, compte tenu de la multiplicité des infractions relevant des domaines de la circulation routière et de la protection du patrimoine, ainsi que de la durée de l’activité délictueuse. On retiendra à charge le concours d’infractions et les lourds antécédents; le casier judiciaire du prénommé – qui a pu bénéficier du regroupement familial uniquement en raison de son mariage avec une ressortissante suisse en août 2003 – fait état de huit condamnations entre ce même mois et septembre 2011. A cela s’ajoute la récidive spéciale en cours d’enquête. Sur ce dernier point, force est de constater, avec le premier juge, qu’après avoir été interrogé, le 14 septembre 2010, par la gendarmerie à la suite d’une plainte pénale pour vol déposée par la gérante du magasin V._ à Moudon (PV aud. 3), l’intéressé, qui n’a admis être l’auteur du vol que devant le Procureur (PV aud. 4), a commis la même infraction, trois jours plus tard, dans deux autres magasins V._. De même, alors qu’il venait d’être condamné, le 6 octobre 2010, à une peine pécuniaire de 25 jours-amende pour vol (pièce 91, annexe), il a récidivé, deux mois plus tard, soit le 10 décembre 2010. Ce comportement est lié au mode de fonctionnement du prévenu, décrit dans le rapport d’expertise comme une personne manifestant un mépris des normes, des règles et des contraintes sociales, avec une tendance à se déresponsabiliser (pièce 43), constatations qui ont été confirmées par l’expert dans son rapport complémentaire (pièce 51) – d’ailleurs requis par l’intéressé (pièce 45) – et dont il n’y a pas de motif de s’écarter, contrairement à ce qu’a fait valoir ce dernier en première instance (jugt, p. 4). A décharge, il sera tenu compte de l’écoulement du temps, le prévenu n’ayant commis aucune autre infraction depuis fin 2010, mis à part une contravention pour excès de vitesse en 2012, et des bons renseignements obtenus de l’employeur, qui a fait l’éloge de la fidélité et de l’engagement de l’appelant (pièce 89/3). Ce dernier élément doit toutefois être relativisé, dans la mesure où, à l’époque où les délits qu’il y a lieu de réprimer dans la présente procédure ont été commis, l’intéressé travaillait déjà auprès du même employeur, ce qui ne l’a pas dissuadé de récidiver, alors qu’il avait lui-même expliqué, lors de son audition du 14 septembre 2010, qu’il risquait de perdre son poste de travail s’il recommençait à voler (PV aud. 3, R. 7). On remarquera d’ailleurs à cet égard que le prévenu a replongé dans la délinquance en juillet 2010, tandis qu’il était en formation (
ibidem
) et père d’un enfant de quelques mois, au risque de voir le renouvellement de son permis de séjour lui être refusé, comme cela lui avait été expliqué (PV aud. 6, lignes 74 ss). A cela s’ajoute que s’il a fini par admettre la plupart des faits qui lui étaient reprochés, il a nié devant le premier juge, en relation avec les faits survenus le 7 décembre 2010 (ch. 2.4 p. 6
supra
), avoir apposé lui-même les plaques de la Toyota sur le Hummer (jugt, p. 3), contredisant ainsi ses déclarations en cours d’enquête (Dossier B, pièce 4 p. 2; PV aud. 6, lignes 33 et 34). Enfin, il n’a présenté aucune excuse ni regret à l’endroit des lésés, ce qui dénote une absence totale de prise de conscience.
Au vu de ce qui précède, une peine globale de 8 mois est adéquate pour sanctionner les agissements de G._. Les peines prononcées précédemment, soit en 2010 et 2011, étant d’une durée totale de 85 jours (25 + 30 + 30), la peine complémentaire à prononcer s’élève en conséquence à 5 mois et 5 jours. Pour des motifs de prévention spéciale (c. 3.1.2
supra
), seule une peine privative de liberté entre en considération. Une peine pécuniaire ne saurait en effet être suffisamment dissuasive si l'on sait que le prévenu a récidivé malgré des peines privatives de liberté d’un total de 21 mois, dont la plupart ont été exécutées. Vu la quotité de la peine globale, l’art. 41 CP n’entre pas en ligne de compte. Au demeurant, même sous l’empire de cette disposition, une courte peine privative de liberté se justifierait. En effet, au regard des condamnations antérieures de l'appelant, qui a été condamné à 9 mois de privation de liberté dans les cinq ans qui précèdent les infractions qui lui sont reprochées (art. 42 al. 2 CP), de la réitération en cours d’enquête et du risque de récidive non négligeable mis en évidence par les experts, le pronostic est défavorable et le sursis est par conséquent exclu, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par l'intéressé.
3.3.
Enfin, tant l'amende de 450 fr. que la peine privative de liberté de substitution de 15 jours – en soi non contestées – réprimant les contraventions sont adéquates et peuvent être confirmées.
4.
En définitive, l’appel doit être partiellement admis en ce sens que G._ est libéré du chef d’accusation de conduite d’un véhicule automobile malgré le retrait du permis de conduire et que la peine complémentaire prononcée est réduite de 6 mois à 5 mois et 5 jours. Le jugement de première instance est confirmé pour le surplus.
4.1
Les frais de première instance doivent être mis entièrement à la charge du prénommé. Vu le nombre de délits en cause, l’abandon d’un chef d’accusation, au surplus pour des motifs purement formels, ne saurait justifier une réduction des frais d’enquête et de jugement, contrairement à ce que l’intéressé fait valoir (appel, p. 4).
4.2
Les frais de la procédure d’appel avant le recours au Tribunal fédéral, par 3'052 fr. 40, y compris l’indemnité allouée à son défenseur d’office, par 1'112 fr. 40, doivent être laissés à la charge de l’Etat.
4.3
G._ ayant obtenu en partie gain de cause, les frais de la procédure d’appel qui s’est tenue après l’arrêt du Tribunal fédéral, y compris l’indemnité allouée à son défenseur d’office par 972 fr., TVA incluse, correspondant à cinq heures, doivent être mis par moitié à sa charge, le solde étant laissé à la charge de l’Etat.
4.4
Le prévenu ne sera tenu de rembourser à l’Etat la moitié de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office mise à sa charge que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bc474542-aafe-4f68-9dca-a0febe2ee572 | En fait :
A.
a)
Par ordonnance du 7 décembre 2010, le Juge d'instruction de l’arrondissement du Nord vaudois a notamment condamné par défaut X._ pour dénonciation calomnieuse, faux témoignage et violation grave des règles de la circulation à une peine privative de liberté de quatre mois.
Il était notamment reproché à X._ d'avoir, le mardi 1
er
juin 2010 vers 14 h 50, circulé au volant d'une voiture sur la route principale Lausanne-Berne, au lieu-dit "[...]", sur le territoire de la commune de [...], à la vitesse de 162 km/h, marge de sécurité déduite, au lieu des 80 km/h admis à cet endroit.
b)
Par prononcé du 6 décembre 2011, le Président du Tribunal d'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a déclaré irrecevable l'opposition à l'ordonnance de condamnation du 7 décembre 2010 formée par X._ (I), a dit que l'ordonnance de condamnation était exécutoire (II), a ordonné le retour du dossier au Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois (III) et a laissé les frais de la décision à la charge de l'Etat (IV).
B.
Par arrêt du 6 décembre 2012, la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal a déclaré irrecevable la demande de révision déposée le 15 novembre 2012 par X._.
C.
Par acte du 10 juin 2014, X._ a présenté une nouvelle demande de révision. Il a conclu principalement à la réforme de l’ordonnance du 7 décembre 2010 en ce sens qu'il est libéré de toute accusation et indemnisé en raison de son incarcération d'une durée de quatre mois. Subsidiairement, il a conclu au renvoi de la cause au Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois pour nouvelle décision dans le sens des considérants, respectivement pour nouvelle décision après instruction. Il a en outre requis le bénéfice de l'assistance judiciaire. | En droit :
1.
Les demandes de révision doivent être motivées et adressées par écrit à la juridiction d’appel, les motifs de révision devant être exposés et justifiés dans la demande (art. 411 al. 1 CPP).
La requête déposée par X._ remplit les exigences de forme de l’art. 411 CPP.
2.
Le requérant explique qu'il ne pouvait se trouver le 1
er
juin 2010 à 14 h 50 à [...] puisque le témoin T._ atteste l’avoir vu dans la salle des pas perdus du tribunal de l'arrondissement de la Glâne, à Romont, vers 15 h 00 le même jour. Il se fonde sur un témoignage écrit du 18 janvier 2013 adressé directement à son défenseur.
2.1
L’art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par un jugement entré en force, une ordonnance pénale, une décision judiciaire ultérieure ou une décision rendue dans une procédure indépendante en matière de mesures d’en demander la révision s’il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l’autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l’acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné. Dans cette hypothèse, la demande de révision n’est soumise à aucun délai (art. 411 al. 2 CPP).
Cette disposition reprend la double exigence posée à l’art. 385 CP selon laquelle les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être nouveaux et sérieux (Message du Conseil fédéral relatif à l'unification de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1303 ad. art. 417 [actuel art. 410 CPP]; Fingerhuth, in : Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2010, n. 1 ad art. 410 CPP; Heer, in : Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Bâle 2011, n. 7 ad art. 410 CPP).
Par « faits » au sens de l’art. 410 CPP, il faut entendre toute circonstance susceptible d’être prise en considération dans l’état de fait qui fonde le jugement, ce qui comprend tout événement matériel ou produit par l’activité humaine, même celui auquel la loi attache un effet juridique, à la condition qu’elle joue un rôle dans la qualification juridique, dans la fixation de la peine ou l’octroi du sursis (Favre, Pellet et Stoudmann, Code pénal annoté, 3
e
éd. révisée, Lausanne 2007/2011, n. 1.3 ad art. 385 CP; Dupuis et alii, Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 17 ad art. 410 CPP; Bovay, Dupuis, Monnier, Moreillon, Piguet, Procédure pénale vaudoise, 3 éd., Bâle 2008, n. 2.2 ad art. 455 CPP-VD, pp. 549 - 550).
Les faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsque le juge n’en a pas eu connaissance au moment où il s’est prononcé, c’est-à-dire lorsqu’ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit. Le Message à l’appui du CPP fédéral précise que la révision ne doit pas servir à rattraper un moyen de droit oublié et énumère comme faits nouveaux des indices, l’authenticité d’un document, un faux témoignage, des révélations, etc (FF 2005 1303). Un fait survenu après le jugement dont la révision est demandée n’est pas considéré comme inconnu de l’autorité inférieure (FF 2005 1304; Rémy, in : Commentaire romand, op. cit., n. 10 ad art. 410 CPP; Message, FF 2006 1303; dans le même sens ad ancien droit, De Montmollin, La révision pénale selon l’art. 397 CPC et les lois vaudoises, thèse 1981, p. 124).
Les faits nouveaux sont sérieux lorsqu’ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l’état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 130 IV 72 c. 1).
Une demande de révision contre une ordonnance de condamnation doit être qualifiée d’abusive si elle repose sur des faits que le condamné connaissait initialement, qu’il n’avait aucune raison légitime de taire et qu’il aurait pu révéler dans une procédure ordinaire mise en oeuvre par une simple opposition. En revanche, une révision peut entrer en considération à l’égard d’une ordonnance de condamnation pour des faits et des moyens de preuve importants que le condamné ne connaissait pas au moment du prononcé de l’ordonnance ou dont il ne pouvait pas se prévaloir ou n’avait pas de raison de se prévaloir à cette époque (ATF 130 IV 72 c. 2.2). Cette jurisprudence s’applique aussi à une procédure de révision régie par le CPP (TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011).
2.2
En l'espèce, le témoignage de T._ ne peut être considéré comme sérieux, dès lors qu’il n’est pas susceptible d’ébranler les constatations de faits sur lesquelles se fonde la condamnation du requérant. En effet, ce témoignage, effectué plus de deux ans après les faits et alors même que T._ était en retard à sa convocation devant le Juge de police de la Glâne, est dépourvu de toute valeur probante sur le plan temporel. En outre, la formulation « aux alentours de 15 h 00 », utilisée dans le témoignage écrit, ne permet aucune constatation pertinente. La Cour de céans a par ailleurs constaté dans son arrêt du 6 décembre 2012 que le requérant avait eu le temps de rejoindre Romont depuis [...] et de passer quelques instants dans la salle des pas perdus avant d’être entendu par le Juge de police.
Au surplus, la présente requête apparaît abusive, dans la mesure où le condamné savait déjà lors de sa première demande de révision du 15 novembre 2012 qu'il avait croisé le témoin T._ le 1
er
juin 2010 dans la salle des pas perdus du tribunal de l'arrondissement de la Glâne et ne l'a pas révélé.
3.
Sur le vu de ce qui précède, il ne sera pas entré en matière sur la demande de révision présentée par X._ en vertu de l’art. 412 al. 2 CPP et la requête d’assistance judiciaire du prénommé doit être rejetée, la désignation d’un défenseur d’office n’étant pas justifiée pour la sauvegarde des intérêts du condamné (art. 132 al. 1 let. b CPP).
Vu l’issue de la cause, les frais de révision, par 550 fr. (art. 21 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), par renvoi de l'art. 22 de cette loi), doivent être mis à la charge de X._. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bc4860de-b6ae-4af7-89ab-d580cd0dbc84 | En fait :
A.
Par jugement du 19 novembre 2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a notamment libéré Q._ des chefs de prévention de menaces et de menaces qualifiées (I), constaté que ce dernier s’est rendu coupable de voies de fait, d’injure et de violation grave des règles de la circulation routière (Il), condamné Q._ à une peine pécuniaire de
60 jours-amende à 50 fr. le jour, avec sursis pendant 4 ans, ainsi qu’à une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant de 6 jours (III), libéré R._ des chefs de prévention de menaces et de menaces qualifiées (IV), ordonné la confiscation et la destruction des divers objets (V), pris acte de la convention signée par les parties lors de l’audience du
5 novembre 2014 pour valoir jugement définitif et exécutoire sur les conclusions civiles de R._ du chef des faits relatés dans l’acte d’accusation du 12 mars 2014 (VI), rejeté les conclusions de R._ tendant à l’allocation d’une indemnité selon l’art. 429 al. 1 let. a CPP (VII) et mis les frais de procédure, arrêtés à 5’575 fr., à raison de 2’000 fr. à la charge de Q._ et de 500 fr. à la charge de R._, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (VIII).
B.
Par annonce du 20 novembre 2014, puis déclaration motivée du
15 décembre 2014, R._ a formé appel contre ce jugement, en concluant à la réforme des chiffres VII et VIII du dispositif en ce sens que l’Etat doit lui verser un montant de 2’600 fr., TVA et débours compris, au titre d’indemnité selon l’art. 429
aI. 1 let. a CPP et qu’elle ne doit supporter aucun frais de procédure, un montant de 1’323 fr., TVA et débours compris, lui étant au surplus alloué au titre d’indemnité pour la procédure d’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Originaire de Bâle, R._ est née le [...] 1990 à Genève. Mère au foyer, elle s’occupe de ses deux enfants qu’elle a eus avec son actuel mari [...] et avec son ex-compagnon Q._, dont elle est séparée depuis 2010. Celui-ci lui verse une contribution d’entretien mensuelle de
500 fr. pour leur fils [...], né le [...] 2008.
Le casier judiciaire de R._ est vierge.
2.
2.1
Ensuite de son opposition à l’ordonnance pénale rendue le 12 mars 2014 par le Ministère public de l’arrondissement de La Côte, R._ a été renvoyée devant le Tribunal de police pour les faits suivants :
- A Morges, vraisemblablement en mars 2011, lors d’une dispute, R._ a menacé son ex-compagnon de ne plus lui permettre de voir leur fils [...].
Q._ a déposé plainte le 17 juin 2011.
- A Morges, le 15 août 2012 vers 23h00, R._ a menacé de mort Q._ en lui disant que si elle avait l’occasion de le « buter », elle n’hésiterait pas.
Le 15 août 2012, Q._ a déposé plainte et s’est constitué partie civile, sans toutefois chiffrer ses prétentions civiles.
2.2
Estimant que l’infraction de l’art. 180 CP n’était pas réalisée, le premier juge a libéré R._ des chefs d’accusation de menaces et de menaces qualifiées. Toutefois, au motif que l’intéressée avait eu un comportement civilement répréhensible – celle-ci n’ayant « rien fait pour apaiser le conflit, initiant parfois l’échange d’insultes et proférant également des menaces » –, il a mis une partie des frais de la procédure à la charge de cette dernière et a refusé de lui allouer une indemnité au sens de l’art. 429 CPP. | En droit :
1.
1.1
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de R._ est recevable.
1.2
L’appel relève de la procédure écrite, dès lors qu’il porte uniquement sur la question des frais et d’une indemnité (art. 406 al. 1 let. d CPP).
2.
Invoquant une violation de l’art. 426 al. 2 CPP, l’appelante conteste la mise à sa charge d’une partie des frais de justice. Elle soutient que le fait de n’avoir rien entrepris pour apaiser le conflit ne constitue pas un comportement fautif et illicite, qui serait contraire à une règle juridique. Pour le reste, le fait de retenir qu’elle aurait initié parfois l’échange d’insultes et proféré des menaces viole le principe de la présomption d’innocence, dès lors qu’elle a bénéficié d’une ordonnance de classement s’agissant des injures et a été libérée de l’infraction de menaces.
2.1
Selon l’art. 426 al. 2 CPP, lorsque la procédure fait l’objet d’une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s’il a, de manière illicite et fautive, provoqué l’ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.
La condamnation d’un prévenu acquitté à supporter tout ou partie des frais doit respecter la présomption d’innocence. Celle-ci interdit de rendre une décision défavorable au prévenu libéré en laissant entendre que ce dernier serait néanmoins coupable des infractions qui lui étaient reprochées. Une condamnation aux frais n’est ainsi admissible que si le prévenu a provoqué l’ouverture de la procédure pénale dirigée contre lui ou s’il en a entravé le cours. A cet égard, seul un comportement fautif et contraire à une règle juridique, qui soit en relation de causalité avec les frais imputés, entre en ligne de compte (ATF 119 la 332 c. 1b; 116 la 162
c. 2c).
Pour déterminer si le comportement en cause est propre à justifier l’imputation des frais, le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l’ordre juridique suisse pris dans son ensemble, dans le sens d’une application par analogie des principes découlant de l’art. 41 CO. Le fait reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement (ATF 119 la 332 c. 1 b; 116 la 162 c. 2d). En cas d’acquittement partiel, la jurisprudence a reconnu qu’une certaine marge d’appréciation devait être laissée à l’autorité parce qu’il est difficile de déterminer avec exactitude les frais qui relèvent de chaque fait imputable ou non au condamné (arrêts 6B_218/2013 du
13 juin 2013 c. 5.2; 68_45/2011 du 12 septembre 2011 c. 3.1). Ce principe doit également valoir dans le cas où seule une partie des faits pour lesquels le poursuivi a bénéficié d’un acquittement constitue un comportement fautif contraire à une règle juridique.
2.2
Pour le premier juge (jgt., p. 19-20), si les propos tenus en mars 2011, soit le faire de dire que si le comportement de Q._ ne changeait pas, il ne verrait plus son fils, étaient, selon les cas, susceptibles de tomber sous le coup de l’art. 180 CP, la menace semblait sur le moment fondée et n’apparaissait donc pas punissable. S’agissant de l’épisode du mois d’août 2012, soit le fait de dire que si elle avait l’occasion de le buter, elle n’hésiterait pas, le premier juge a retenu que, ce faisant, l’appelante avait bel et bien proféré des menaces contre son ex-compagnon, mais qu’elle devait être acquittée au motif que Q._ n’avait pas été réellement alarmé ou effrayé par les propos de R._.
La question de savoir si le premier juge n’aurait pas dû retenir que l’infraction de menace était réalisée à tout le moins sous l’angle de la tentative pour le second cas peut rester ouverte compte tenu de l’interdiction de la
reformatio in pejus
. Reste que le prononcé des propos inquiétants tels que relevés ci-dessus n’est pas contesté par l’appelante. Sans qu’il soit nécessaire d’examiner si ces dires constituent des menaces au sens de l’art. 180 CP, il va sans dire qu’ils tombent sous le coup des art. 28 ss CC étant rappelé que la protection de l’honneur est plus étendue en droit civil qu’en droit pénal (cf. ATF 122 IV 311; 121 IV 76; 111 lI 209). lIs constituent des atteintes illicites à la personnalité et par conséquent un comportement civilement répréhensible. Partant, le premier juge n’a pas violé le droit fédéral en mettant à la charge de l’appelante une partie des frais judiciaires.
3.
L’appelante requiert l’octroi d’une indemnité, à tout le moins réduite, en application de l’art. 429 CPP.
3.1
Selon l’art. 429 al. 1 let. a CPP, le prévenu a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure s’il est acquitté totalement ou en partie. L’autorité pénale peut réduire ou refuser l’indemnité lorsque le prévenu a provoqué illicitement et fautivement l’ouverture de la procédure ou a rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 430 al. 1 let. a CPP).
Il n’y a pas lieu d’envisager une indemnisation du prévenu en cas de condamnation aux frais, l’obligation de supporter les frais et l’allocation d’une indemnité s’excluant réciproquement (ATF 137 IV 352 c. 2.4.2). En cas de classement partiel ou d’acquittement partiel, le principe doit être relativisé. Si le prévenu est libéré d’un chef d’accusation et condamné pour un autre, il sera condamné aux frais relatifs à sa condamnation et aura respectivement droit à une indemnité correspondant à son acquittement partiel (cf. Message relatif à l’unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1313 ad art. 438 CPP [actuel art. 430 CPP]; Yvona Griesser, in : Kommmentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2010, nn. 3-4 ad art. 430 CPP). Il est donc concevable d’indemniser, dans une mesure réduite, le prévenu qui doit supporter l’ensemble des frais de justice (Mizel/Rétornaz, in : Commentaire romand, 2011, n. 5 ad art. 430 CPP). De la même manière que la condamnation aux frais n’exclut pas automatiquement l’indemnisation du prévenu partiellement acquitté, l’acquittement partiel n’induit pas d’office l’octroi d’une indemnisation. Celle-ci présuppose qu’aucun comportement illicite et fautif ne puisse être reproché au prévenu relativement aux agissements ayant donné lieu au classement ou à l’acquittement partiel (cf. art. 430 CPP a contrario).
3.2
Au regard de la jurisprudence précitée et du comportement civilement répréhensible de l’appelante tel que décrit ci-dessus, aucune indemnité au sens de l’art. 429 CPP ne saurait lui être allouée.
4.
En définitive, l’appel de R._ doit être rejeté et le jugement entrepris entièrement confirmé.
5.
Vu l’issue de la cause, les frais de la présente procédure, constitués de l’émolument de jugement, par 770 fr., doivent être mis à la charge de R._ (art. 428 al. 1 CPP).
Par ailleurs, il n’y a pas lieu à l’allocation de dépens pour la procédure d’appel. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bc511d4f-6bad-4069-b4f0-56b85d86ff74 | En fait :
A.
Par jugement du 9 août 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de l'Est vaudois a libéré B.I._ des infractions de diffamation, calomnie, violation du devoir d'assistance et d'éducation et dénonciation calomnieuse (I), libéré A.I._ de l'infraction de violation du devoir d'assistance et d'éducation (II), constaté que ce dernier s'est rendu coupable de dommages à la propriété mais renoncé à lui infliger une peine (III), maintenu au dossier, à titre de pièce à conviction, les enregistrements figurant sous fiche 1681 et 1743 (IV) et laissé les frais à la charge de l'Etat, comprenant l'indemnité allouée à Me Treyvaud par 8'000 fr. et l'indemnité allouée à Me Gruber par 2'000 francs (V).
B.
Le 10 août 2011, A.I._ a formé appel contre le jugement précité.
Par courrier du 15 août 2011, B.I._ a indiqué qu'elle renonçait à interjeter un appel à l'encontre dudit jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 12 septembre 2011, l'appelant a conclu, avec suite de frais et dépens, à la modification du jugement entrepris au chiffre I de son dispositif en ce sens qu'B.I._ est reconnue coupable de dénonciation calomnieuse, subsidiairement de calomnie et de diffamation et a également demandé qu'il lui soit donné acte de ses réserves civiles.
Par courrier du 15 septembre 2011, le Procureur de l'arrondissement de l'Est vaudois a indiqué qu'il s'en remettait à la justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et qu'il n'entendait pas déposer d'appel joint.
Par mémoire du 30 septembre 2011, B.I._ a déposé un appel joint à l'encontre du jugement susmentionné. Elle a conclu, avec suite de frais et dépens, à la réforme du jugement entrepris au chiffre III de son dispositif en ce sens que A.I._ est reconnu coupable de dommages à la propriété et condamné pour cela à une peine que justice dira.
Par courrier du 6 octobre 2011, A.I._ a présenté une demande de non-entrée en matière et a conclu à l'irrecevabilité de l'appel joint.
Par courrier du 10 octobre 2011, le Procureur de l'arrondissement de l'Est vaudois a indiqué qu'il s'en remettait à la justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et qu'il n'entendait pas déposer d'appel joint.
Par courrier du 27 octobre 2011, adressé au conseil de B.I._ et au Ministère public, la Cour d'appel pénale a informé ces derniers que l'appel joint paraissait irrecevable, que le conseil de A.I._ avait présenté une demande de non-entrée en matière et qu'ils avaient la possibilité de se prononcer sur la recevabilité de l'appel joint d'ici au 11 novembre 2011.
Par courrier du 11 novembre 2011, B.I._, par son conseil, a indiqué qu'elle maintenait son appel joint.
Par prononcé du 16 novembre 2011, la Cour d'appel pénale a refusé d'entrer en matière sur l'appel joint d'B.I._.
Lors de l’audience de la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal qui s’est tenue le 31 janvier 2012, le conseil d'office de l'appelant a confirmé les conclusions de sa déclaration d'appel. L'intimée a conclu au rejet de l'appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
B.I._ est née le [...] en Erythrée. Elle est la deuxième d'une fratrie de deux enfants. Ses parents ont divorcé, alors que sa mère était enceinte d'elle. Sa mère, remariée, a encore eu deux jumelles. La prévenue a également trois demi-frères et soeur du côté de son père. Elle a été élevée principalement par ses grands-parents maternels, sa mère étant partie travailler en ville. En raison du conflit en Erythrée et pour éviter d'être enrôlée dans l'armée, l'accusée s'est exilée en Suisse à l'âge de 16 ans. Dans notre pays, elle a été placée dans une famille d'accueil avec laquelle elle conserve des contacts. Elle a suivi sa scolarité obligatoire en Erythrée et fait une formation de coiffeuse en Suisse, sanctionnée d'un diplôme de coiffeuse. Elle s'est mariée en 2001 à A.I._. Elle a cessé de travailler à la naissance de son fils C.I._, le [...].
Son casier judiciaire est vierge, mais il est établi qu'elle a été reconnue coupable de dénonciation calomnieuse par ordonnance de condamnation du 27 juillet 2007 et exemptée de toute peine.
2.
Les parties ont deux enfants, C.I._, né le [...] et D.I._, née le [...]. Séparées depuis 2006, elles sont en instance de divorce. La procédure de divorce, qui a été précédée de mesures protectrices de l'union conjugale, est extrêmement conflictuelle. Les enfants ont été placés en foyer par une décision du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois du 22 novembre 2007. Le placement est effectif depuis le 26 décembre 2007. Les enfants sont à l'heure actuelle encore placés et le droit de visite de la mère a été supprimé.
Dans le cadre d'une expertise pédopsychiatrique du 11 mai 2011 ordonnée par le juge civil (P. 109), B.I._ a été vue par les Dr X._ et Y._. Dans une "impression diagnostique", les experts font état d'un catalogue de défenses archaïques, notamment une grande difficulté à gérer ses émotions avec une certaine impulsivité, des éléments interprétatifs, voire franchement paranoïdes, ainsi qu'un recours systématique à l'agir et à la projection. Les experts ont indiqué que la prévenue se situait dans un registre aux mieux "état limite", avec une angoisse fondamentale de séparations, angoisse probablement activée de manière absolue par les événements ayant amené à la séparation de celle-ci et de ses deux enfants.
Ils ont estimé que l'aspect plus "morcelé" de la clinique de la prévenue en périodes de crises faisait plutôt penser à une structure prépsychotique. Au vu de ces différents éléments, les experts ont considéré que la prévenue souffrait d'un probable trouble de la personnalité, posant l'indication, à minima à un suivi de soutien, dont le pronostic restait réservé. Ils ont encore indiqué que l'anamnèse de suspicion de la prévenue d'abus sexuel de son mari sur leurs enfants laissait également suspecter des projections massives de cette dernière (P. 109, p. 4).
Les deux enfants ont également été évalués dans le cadre de l'expertise pédopsychiatrique susmentionnée (P. 109). Ainsi, les Dr X._ et Y._ soulignent que C.I._ est décrit comme étant en souffrance, présentant des aspects dépressifs, le plus vraisemblablement de façon réactionnelle à la complexité de la situation familiale (P. 109, p. 7). C.I._ semble évoluer favorablement sur un mode d'allure névrotique, avec des affects dépressifs qui semblent plutôt d'allure réactionnels aux événements familiaux ainsi qu'au conflit de loyauté, conflit probablement grandement renforcé par l'historique d'exposition répétée des parents à leur conflit en présence des enfants (P. 109, p. 9). Quant à D.I._, les médecins relèvent qu'elle est suivie depuis février 2010, car elle était présentée comme "désorganisée" dans un contexte de trouble grave de l'attachement. Elle semble évoluer favorablement, sur un mode probablement plus fragile que son frère, s'adaptant ainsi à son environnement. Elle reste, à la différence de C.I._, dans un registre d'évolution vers un trouble grave de la personnalité (P. 109, p. 9).
3.
a)
Le 14 juillet 2007, B.I._ a fait part au Dr Z._, pédiatre des enfants, du fait qu'elle soupçonnait A.I._ d'avoir commis des actes d'ordre sexuel sur D.I._. Le Dr Z._ a établi un certificat médical (P. 5, dossier PE08.017017).
b)
Le 18 septembre 2007, la prévenue a fait part à la pédopsychiatre de sa fille du fait que A.I._ avait forcé ses enfants à s'embrasser avec la langue. La pédopsychiatre, alertée par ces accusations, a avisé le Service de protection de la jeunesse (ci-après: SPJ) (P. 30/3, dossier PE08.017017).
c)
Le 20 octobre 2007, la prévenue a déclaré à une intervenante du "Point Rencontre" que C.I._ avait essayé de mettre le doigt dans ses fesses en disant que c'était son papa qui lui avait dit de "mettre le doigt dans le caca de maman", lorsqu'il lui avait rendu visite au "Point Rencontre" le 6 octobre 2007 (P. 11 et 13, dossier PE08.017017).
d)
Le 20 octobre 2007, B.I._ s'est rendue à l'Hôpital de l'Enfance avec son fils C.I._ et a expliqué aux médecins que celui-ci lui a avait déclaré " Il [A.I._] m'a donné la saucisse dure, j'ai mangé. Et puis, la saucisse dure, il l'a rentrée dans mes fesses. J'ai eu mal, j'ai pleuré, pleuré" (P. 13, 14 et 30/4, dossier PE08.017017).
e)
Entre février et novembre 2008, entendue à plusieurs reprises par la Police et le Juge dans le cadre de l'enquête ouverte contre A.I._ pour actes d'ordre sexuel avec des enfants, la prévenue a confirmé ses accusations. Elle a également produit un enregistrement de son fils C.I._ où il évoque les événements cités sous chiffre 4 b) et d).
f)
Aucun élément objectif n’ayant pu être constaté sur C.I._ et D.I._, A.I._, lequel a toujours contesté avoir commis des attouchements d’ordre sexuel sur ses enfants, a bénéficié d’un non-lieu. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
Interjeté dans les formes et délai légaux par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de A.I._, suffisamment motivé au sens de l’art. 399 al. 3 et 4 CPP, est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
En l'espèce, l'appelant ne conteste que le chiffre I du jugement entrepris en ce sens qu'il conclut à ce qu'B.I._ est reconnue coupable de dénonciation calomnieuse, subsidiairement de calomnie et de diffamation. Il conclut également à ce qu'acte lui soit donné de ses réserves civiles contre l'intimée.
3.
En vertu de l'art. 450 CPP, lorsque les débats ont été ouverts avant l’entrée en vigueur du présent code, ils se poursuivent selon l’ancien droit devant le tribunal de première instance compétent jusqu’alors.
L'art. 454 al. 1 CPP prévoit que le nouveau droit est applicable aux recours formés contre les décisions rendues en première instance après l’entrée en vigueur du présent code.
En l'espèce, les débats de première instance, suspendus à deux reprises, avaient commencé le 26 octobre 2009, soit avant l'entrée en vigueur du Code de procédure pénale le 1
er
janvier 2011. Conformément à l'art. 450 CPP, ils ont été poursuivis selon l'ancien droit de procédure. Les déclarations des parties et de témoins à l'audience n'ont par conséquent pas été protocolées. Cela reste sans incidence dans la mesure où l'appelant n'en tire par argument et ne requiert aucune mesure d'instruction. La procédure de recours est soumise, elle, au nouveau droit selon l'art. 454 al. 1 CPP.
4.
L'appelant soutient que l'intimée est une manipulatrice, qu'elle était parfaitement consciente de la fausseté de ses allégations et qu'elle a agi avec conscience et volonté dans le but de faire supprimer ou restreindre son droit de visite sur leurs enfants. Il allègue que les premiers juges n'auraient pas dû admettre le contraire sans expertise psychiatrique de la prévenue. Il affirme que le comportement de son ex-épouse est constitutif d'une calomnie ou d'une diffamation ainsi que d'une dénonciation calomnieuse. Il fait valoir à cet égard que même si B.I._ ne l'a pas dénoncé directement aux autorités, il suffisait qu'elle soit consciente que ses allégations provoqueraient l'ouverture d'une enquête pénale pour que l'infraction de l'art. 303 CP soit réalisée, ce qui serait le cas en l'espèce.
4.1.
4.1.1.
En vertu de l'art. 303 ch. 1 CP, est punissable de dénonciation calomnieuse, celui qui aura dénoncé à l’autorité, comme auteur d’un crime ou d’un délit, une personne qu’il savait innocente, en vue de faire ouvrir contre elle une poursuite pénale (al. 1) ou celui qui, de toute autre manière, aura ourdi des machinations astucieuses en vue de provoquer l’ouverture d’une poursuite pénale contre une personne qu’il savait innocente (al. 2).
L'alinéa 1 de la disposition précitée prévoit le cas où l'auteur dénonce une personne qu'il sait innocente. Pour qu'il y ait dénonciation, il faut que l'auteur s'adresse à l'autorité compétente pour ouvrir une poursuite pénale ou à tout le moins à une autorité dont on peut attendre qu'elle transmette la dénonciation à l'autorité compétente (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, Berne 2010, p. 588). Si l'auteur s'adresse à une particulier, en espérant que celui-ci dénoncera les faits à l'autorité, il y a auteur médiat (Corboz, op. cit., p. 589 et les références citées). La dénonciation suffit à consommer l'infraction; il n'est pas nécessaire qu'une poursuite pénale soit ensuite effectivement ouverte. L'alinéa 2 de l'art. 303 ch. 1 CP prévoit le cas où l'auteur, de toute autre manière, tente astucieusement de provoquer l'ouverture d'une poursuite pénale contre une personne qu'il sait innocente. Pour que la machination puisse être qualifiée d'astucieuse, il faut – en se référant aux principes dégagés au sujet de l'escroquerie (art. 146 CP) – que la supercherie soit plus ou moins difficile à discerner et puisse aboutir à l'ouverture d'une poursuite pénale (ATF 132 IV 20 c. 5.4). L'infraction est consommée lorsque les manœuvres sont terminées et il n'est pas nécessaire qu'une poursuite pénale soit effectivement ouverte.
Qu'il y ait dénonciation proprement dite (art. 303 ch. 1 al. 1 CP) ou machination astucieuse (art. 303 ch. 1 al. 2 CP), la dénonciation calomnieuse suppose que la personne visée n'ait pas commis l'infraction dénoncée (Corboz, op. cit., n. 13).
L'art. 303 CP exige finalement que l'auteur sache qu'il dénonce un innocent. Il s'agit d'une connaissance au sens strict. Le dol éventuel ne suffit pas, de sorte que l'auteur peut objecter n'avoir pas su le dénoncé innocent en invoquant sa bonne foi (TF 6B_677/2009 du 23 novembre 2009 c. 1.3.1; ATF 72 IV 74 c. 1). En revanche, dès qu'il est établi que l'auteur sait la personne dénoncée innocente, les preuves libératoires de la vérité ou de la bonne foi n'ont aucun sens et sont, partant, exclues. Le dol éventuel suffit en revanche quant à l'intention de faire ouvrir une poursuite pénale (TF 6B_677/2009 du 23 novembre 2009 c. 1.3.1).
4.1.2.
En vertu de l'art. 173 CP, celui qui, en s’adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l’honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, celui qui aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon, sera, sur plainte, puni d’une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus (ch. 1). L’inculpé n’encourra aucune peine s’il prouve que les allégations qu’il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu’il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies (ch. 2). L’inculpé ne sera pas admis à faire ces preuves et il sera punissable si ses allégations ont été articulées ou propagées sans égard à l’intérêt public ou sans autre motif suffisant, principalement dans le dessein de dire du mal d’autrui, notamment lorsqu’elles ont trait à la vie privée ou à la vie de famille (ch. 3).
Selon l'art. 174 ch. 1 CP, celui qui, connaissant la fausseté de ses allégations, aura, en s’adressant à un tiers, accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l’honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, celui qui aura propagé de telles accusations ou de tels soupçons, alors qu’il en connaissait l’inanité, sera, sur plainte, puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
La calomnie est une forme qualifiée de diffamation dont elle se distingue en cela que les allégations attentatoires à l'honneur sont fausses, que l'auteur doit avoir eu connaissance de la fausseté de ses allégations et qu'il n'y a dès lors pas place pour les preuves libératoires prévues dans le cas de la diffamation (Corboz, op. cit., p. 611; Favre / Pellet / Stoudmann, Code pénal annoté, Lausanne 2007, n. 1.1 ad art. 174 CP, p. 475; TF 6B_201/2009 du 10 juin 2009 c. 2.1.1).
Ces deux dispositions protègent la réputation d'être une personne honorable, c'est-à-dire de se comporter comme une personne digne a coutume de le faire selon les conceptions généralement reçues (ATF 132 IV 112 c. 2.1; ATF 128 IV 53 c. 1a). L'honneur protégé par le droit pénal est conçu de façon générale comme un droit au respect qui est lésé par toute assertion propre à exposer la personne visée au mépris en sa qualité d'homme (ibidem). Pour apprécier si une déclaration est attentatoire à l'honneur, il faut se fonder non pas sur le sens que lui donne la personne visée, mais sur une interprétation objective selon la signification qu'un destinataire non prévenu doit, dans les circonstances d'espèce, lui attribuer (TF 6B_143/2011 du 16 septembre 2011 c. 2.1.3; ATF 133 IV 308 c. 8.5.1).
Ces deux infractions sont intentionnelles (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2010, pp. 591 et 613). Dans le cas de la diffamation, le dol éventuel suffit. Quant à l'infraction de calomnie, l'auteur sait que le fait qu'il allègue est faux; il s'agit d'une connaissance au sens strict, le dol éventuel n'étant pas suffisant (Corboz, op. cit., p. 613).
Dans le cas de la diffamation, si le prévenu est admis à apporter la preuves libératoires (art. 173 ch. 3 CP, a contrario), il a le choix de fournir la preuve de la vérité ou la preuve de la bonne foi ou encore offrir les deux. S'agissant de la preuve de la bonne foi, selon l'art. 173 ch. 2 CP, cette preuve suppose que l'accusé établisse qu'il avait des raisons sérieuses de tenir de bonne foi ses allégations pour vraies. L'accusé est de bonne foi s'il a cru à la véracité de ce qu'il disait (ATF 124 IV 49 c. 3b). Il résulte de la disposition précitée que la bonne foi ne suffit pas, il faut encore que l'accusé établisse qu'il avait des raisons sérieuses de croire à ce qu'il disait. Un devoir de prudence incombe à celui qui porte atteinte à l'honneur d'autrui. Pour échapper à la sanction pénale, l'accusé de bonne foi doit démontrer qu'il a accompli les actes que l'on pouvait exiger de lui, selon les circonstances et sa situation personnelle, pour contrôler la véracité de ses allégations et la considérer comme établie (ATF 124 IV 148 c. 3b; Corboz, op. cit., pp. 596-597). Pour dire si le prévenu avait des raisons sérieuses de tenir de bonne foi pour vrai ce qu'il a dit, il faut se fonder exclusivement sur les éléments dont il avait connaissance à l'époque de sa déclaration; il n'est pas question de prendre en compte des moyens de preuve découverts ou des faits survenus postérieurement (ibidem). Il faut que le prévenu établisse les éléments dont il disposait à l'époque, ce qui relève du fait. Sur cette base le juge doit apprécier si ces éléments étaient suffisants pour que l'auteur ait cru de bonne foi à la véracité de ce qu'il disait, ce qui relève du droit (Corboz, op. cit., p. 597). On ne doit pas mettre de conditions trop strictes à la preuve de la bonne foi, notamment quand la dénonciation fait état avant tout de soupçons (Favre / Pellet / Stoudmann, op. cit., n. 2.6 ad art. 173 CP, ATF 116 IV 205 c. 3). Si le prévenu a apporté la preuve qu'il s'est exprimé de bonne foi et qu'il avait des raisons sérieuses de tenir pour vrai ce qu'il disait, il doit être acquitté (Corboz, op. cit., p. 599; ATF 119 IV 44 c. 3).
4.1.3.
S'agissant du concours d'infraction, s'il est prouvé que l'auteur, au moment de sa communication à un tiers, savait que le fait évoqué était faux, il faut appliquer l'art. 174 CP et non pas l'art. 173 CP. Si les éléments constitutifs d'une dénonciation calomnieuse au sens de l'art. 303 CP sont réalisés, il s'agit d'une lex specialis qui exclut l'application des dispositions réprimant les délits contre l'honneur (Corboz, op. cit., pp. 607-608).
4.2.
En l'espèce, s'agissant de la dénonciation calomnieuse, on peut admettre qu'en propageant ses accusations auprès de médecins et d'une intervenante du "Point Rencontre", la prévenue devait se douter qu'une autorité serait interpellée et une enquête ouverte; son attention avait été attirée sur ce point. Il semblerait que les éléments objectifs de l'infraction de diffamation soient également remplis dans le cas présent. En effet, le fait d'accuser son ex-époux d'abus sexuels sur leurs enfants est manifestement attentatoire à son honneur. Toutefois, Il convient avant toute chose de déterminer si les éléments subjectifs de ces infractions sont réunis et, dans le cas de la diffamation si la prévenue avait des raisons sérieuses de tenir les accusations à l'encontre de l'appelant de bonne foi pour vraies. Il faut donc tout d'abord examiner si la prévenue savait ou non que l'appelant était innocent ou si elle était de bonne foi, ce qui pourrait rendre l'analyse de la réalisation des conditions objectives de ces infractions sans objet.
4.2.1.
Il n'y a effectivement pas eu d'expertise psychiatrique de la prévenue, effectuée dans le cadre de la procédure pénale dans le but d'apprécier sa responsabilité pénale, soit sa capacité d'apprécier le caractère illicite de ses actes et de se déterminer d'après cette appréciation. Toutefois, cette question n'est pas celle à trancher dans le cas d'espèce, il s'agit en réalité de déterminer si la prévenue croyait de bonne foi ou non à la véracité des accusations qu'elle a proférées à l'encontre de l'appelant. Cela peut être estimé d'une part sur la base d'une appréciation de l'état et du fonctionnement psychiques de l'intéressée, d'autre part sur la base de preuves éventuelles d'une manipulation de sa part, pouvant prendre n'importe quelle forme (témoignages de tiers, contradictions dans les déclarations de la prévenue, antécédents de mensonges, certificats concernant les enfants, etc.).
4.2.1.1.
S'agissant de l'appréciation de l'état et du fonctionnement psychiques de la prévenue, le dossier contient une expertise psychiatrique proprement dite de cette dernière, réalisée en 2009 (P. 94), et deux expertises familiales réalisées en 2008 et 2011 (P. 41 et 109), dans le cadre de la procédure civile de mesures protectrices de l'union conjugale/divorce. Dans celles-ci, les experts ont procédé à une évaluation détaillée de la prévenue, aboutissant à une "impression diagnostique", qui peut s'apparenter à une mini-expertise.
L'expertise de l'intimée, effectuée le 23 novembre 2009 par le Dr F._ (P. 94), exclut toute éventualité de manipulation, utilisation des enfants ou syndrome d'aliénation parentale. On y lit que l'intimée est attentive aux besoins des enfants et se préoccupe de leurs expressions non pour accuser le père, mais parce qu'elle est véritablement en souci et les interprète ainsi avec son cœur de mère.
Il ressort de la première expertise familiale du 21 avril 2008, effectuée par le Dr R._ (P. 41), que les deux conjoints s'accusaient mutuellement d'être des manipulateurs. B.I._ est décrite comme une mère excessivement anxieuse et peinant à faire confiance à toute personne (y compris le père) susceptible de s'occuper des enfants, avec lesquels elle se montre très intrusive (P. 41, p. 18). Souffrant du placement, elle interprète chaque petite information donnée par l'équipe éducative comme une preuve de la souffrance de ses enfants. L'expert relève que la prévenue, compte tenu de son fonctionnement psychique est incapable d'admettre que les propos qu'ont pu lui tenir ses enfants puissent être interprétés d'une manière différente de la sienne ou être l'émanation du conflit de loyauté dans lequel ces derniers sont pris entre les parents (P. 41, pp. 13-14). Ce praticien souligne que la prévenue ne paraît pas en mesure de différencier entre ce qui appartient à sa propre relation avec son époux et ce qui est de l'ordre de la relation entre ce père et ses enfants (ibidem). L'expert relève qu'il est troublant qu'elle n'ait pas déposé plainte pénale contre le père alors qu'elle le soupçonne fortement, voire est convaincue, qu'il a commis des actes d'ordre sexuels sur les enfants (P. 41, p. 14). Il a indiqué avoir à une reprise au moins, lors d'une consultation, avoir constaté le caractère persécuté, voire paranoïaque de l'intimée (ibidem). L'expert a analysé l'enregistrement des propos de C.I._ fait par la mère, dont il explique le contenu par les angoisses débordantes de celle-ci et le conflit de loyauté vécu par l'enfant (P. 41, pp. 16 ss).
De la deuxième expertise familiale du 11 mai 2011 des Dr X._ et Y._ (P. 109), il ressort que le SPJ a souhaité une expertise des deux parents et que seule la mère a accepté de s'y soumettre. Les experts estiment que l'intimée présente notamment une grande difficulté à gérer ses émotions, avec une certaine impulsivité, des éléments interprétatifs, voire franchement paranoïdes, ainsi qu'un recours systématique à l'agir et à la projection (p. 109, p. 4). Ils ont clairement mis en évidence l'angoisse fondamentale d'B.I._, ainsi que sa personnalité de type prépsychotique (P. 109, p. 4). Ils terminent en expliquant que l'anamnèse de suspicion de B.I._ d'abus sexuel de son mari sur leurs enfants laisse également suspecter des projections massives de cette dernière.
4.2.1.2.
Concernant les indices prouvant une éventuelle manipulation de l'intimée ou au contraire la disculpant, le dossier contient les éléments suivants:
- Il y a tout d'abord les rapports du SPJ qui ont été établis dans le cadre de la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale/divorce de l'appelant et de l'intimée:
Dans un courrier du 16 juillet 2007, l'assistant social de ce service demandait à la Présidente du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois d'ordonner rapidement, par mesures préprovisionnelles, une suspension du droit de visite de l'appelant ainsi qu'une interdiction de périmètre, afin que les enfants soient à l'abri de toute rencontre entre leurs parents qui se déroulaient mal, dans l'attente de l'instauration d'un "Point Rencontre" (P. 89).
Dans un courrier du 18 septembre 2007, ce service a indiqué que "nous nous questionnons sur la fiabilité des allégations de Mme B.I._. Depuis le début de notre intervention, elle tente en effet de limiter l'exercice du droit de visite de M. A.I._ en mettant en avant, lors de nos entretiens, sa violence potentielle, des troubles psychiques ou une consommation d'alcool possible. Au fil du temps, nous n'avons cependant recueilli aucune information inquiétante des divers témoins de ce droit de visite" (P. 19/2).
A l'égard du courrier susmentionné, il convient de relever toutefois qu'il ressort des expertises citées plus haut (cf. P. 41, p. 12 et P. 109, p. 6), que A.I._ admet avoir consommé de l'alcool en rejetant la faute de son comportement sur sa femme, qu'il a aussi menacé celle-ci de mort devant l'expert, et que ce dernier estime qu'il présente les mêmes faiblesses psychologiques que son épouse, mais à un degré moindre.
Selon un courrier du 22 mai 2008, le Chef d'office et l'assistant social de ce service ont estimé à cette époque que l'intimée n'était à nouveau plus en mesure de distinguer ses affects de ceux de ses enfants pour leur permettre d'avoir une vie relationnelle et affective propre, et projetait sa souffrance et ses émotions sur eux (P. 67, p. 2).
Dans un courrier du 3 mars 2010, ledit service a notamment fait part à la Présidente du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois que la reprise immédiate d'un droit de visite de l'intimée sur ses enfants n'était pas adéquate au vu de l'attitude adoptée par celle-ci (P. 121).
- On trouve également plusieurs rapports de médecins:
Le Dr R._, dans son rapport du 7 novembre 2007, a constaté que l'intimée était vraisemblablement extrêmement inquiète pour ses enfants, mais qu'il n'était cependant pas exclu, comme l'affirmait péremptoirement A.I._, "qu'elle use de manipulations" (P. 18, p. 2).
Il ressort du rapport de l'hôpital de l'enfance de Lausanne du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (ci-après: CHUV), que "la maman montre une inquiétude
majeure
[...]. Subjectivement, nous pouvons craindre un certain degré de suggestion de sa part, les allégations de C.I._ [...] paraissant peu spontanées" (P. 43).
Selon le constat médical du 5 septembre 2007 du Département de pédiatrie de l'hôpital Riviera, les organes génitaux externes de D.I._ ne présentaient pas de tuméfaction, d'hématome ou d'érythème. Les médecins ont toutefois constaté la présence de légères sécrétions glaireuses, de couleur jaune, au niveau de la vulve et une culture bactériologique des sécrétions avait montré la présence de E. coli (P. 48).
Il ressort du certificat médical de l'hôpital de l'enfance de Lausanne du CHUV du 26 octobre 2007 que les médecins ont examiné C.I._ le 20 et 21 octobre 2007 en compagnie de sa mère qui craignait des attouchements de la part du père lors des visites médiatisées. Ils ont indiqué que l'examen de l'enfant était normal, en particulier sur le plan ano-génital et buccal (P. 50).
Dans son rapport du 21 octobre 2009, le Dr Z._, pédiatre des enfants, a indiqué que "[les] vives inquiétudes de [B.I._] lorsqu'est survenue la suspicion d'abus sexuels me semble pouvoir avoir été à l'origine de réactions importantes" (P. 88, p. 3).
Il ressort du rapport intermédiaire du Service vaudois d'Action éducative en Milieu Ouvert (ci-après: AEMO) du 26 novembre 2007 que l'intimée a, dès ses premiers doutes, fait part de son inquiétude vis-à-vis d'éventuelles conduites sexuellement inappropriées du père envers ses enfants. L'expert a indiqué que "pour avoir passé beaucoup de temps à évoquer cette question avec elle, tout semble montrer qu'elle est réellement convaincue que ces actes ont eu lieu. Ce qui ne prouve en aucun cas que ce soit vrai, mais qui exclut l'hypothèse d'une stratégie de manipulation de sa part" (P. 89, p. 2).
- Deux auditions de l'enfant C.I._ figurent au dossier, dont une faite par sa mère les 17 septembre et 20 octobre 2007, dans laquelle il explique notamment que son père lui aurait dit d'embrasser sa sœur avec la langue (P. 52). L'autre audition a été effectuée par la police le 8 février 2008 (PV aud. 2). L'enfant y affirme que son père ne lui a jamais touché les parties intimes, mais que ce dernier frappe sa mère.
- Il y a également plusieurs auditions de l'intimée faites par la police ou le juge d'instruction. Lors de sa première audition par la police le 5 février 2008, l'intimée a expliqué que ses enfants s'étaient plaint du fait que leur père leur avait touché les parties intimes et qu'elle avait elle-même constaté que les fesses de sa fille étaient rouges et qu'elle présentait des pertes vaginales anormales pour une enfant de son âge (PV aud. 1). Lors de sa première audition devant le magistrat instructeur le 11 août 2008, l'intimée a confirmé les déclarations qu'elle avait faites à la police et a expliqué qu'elle n'avait fait qu'écouter ses enfants demander de l'aide (PV aud. 5). Elle a affirmé qu'elle n'avait pas influencé ses enfants afin qu'ils mettent en cause leur père pour des attouchements à caractère sexuel. Elle a également déclaré qu'elle n'avait pas déposé plainte car elle attendait les résultats des différentes enquêtes et les conclusions des intervenants, notamment du pédopsychiatre. Elle a affirmé avoir dit toute la vérité et n'avoir fait que protéger ses enfants. Lors de sa deuxième audition devant le juge d'instruction le 14 novembre 2008, l'intimée a confirmé ses précédentes déclarations (PV aud. 6). Etant questionnée sur l'enregistrement audio de C.I._ qu'elle avait effectué, elle a déclaré qu'elle n'avait aucunement induit les déclarations de son fils et qu'elle ne lui avait pas chuchoté les réponses à donner.
- Finalement, il ressort de l'ordonnance pénale rendue par le Juge d'instruction de l'arrondissement de l'Est vaudois le 27 juillet 2007 (P. 7) que l'intimée a appelé la gendarmerie le 26 novembre 2006 et a faussement déclaré que l'appelant l'avait frappée. Interrogée par les gendarmes, elle s'est spontanément rétractée en déclarant qu'elle n'avait pas subi de violences ce jour-là. Il ressort également de cette décision que l'appelant accusait également sa femme de violence à son égard. Il ne s'est pas rétracté, de sorte que, faute de preuve, la prévenue a bénéficié d'un non-lieu sur ce point.
4.2.2.
Les éléments qui précèdent plaident en faveur de la sincérité d’B.I._ plutôt qu'en faveur d'une manipulation de sa part. Il résulte des expertises médicales que, en raison de ses troubles psychiatriques, l'intimée était vraisemblablement intimement persuadée de la véracité de ses soupçons à l'encontre de son époux. En raison de l'inquiétude irrépressible de la prévenue pour ses enfants et de sa tendance à interpréter les propos de ceux-ci, elle a sincèrement cru que ces derniers avaient été victimes d'abus sexuel de l'appelant. Il n'existe aucune preuve décisive du contraire.
Par conséquent, une dénonciation calomnieuse ne saurait être retenue à l'encontre de l'intimée, puisqu'elle a de bonne foi cru que l'appelant avait commis des actes d'ordre sexuel sur leurs enfants et ne pensait donc pas qu'il était innocent. L'élément subjectif de l'art. 303 CP fait donc manifestement défaut dans le cas présent. Une diffamation, encore moins une calomnie, ne peuvent également être retenues, B.I._ croyant de bonne foi à la véracité de ses accusations à l'encontre de l'appelant.
4.3.
Les arguments que l'appelant développe dans son mémoire d'appel prouvant, selon lui, que l’intimée était consciente de la fausseté de ses allégations et qu'elle a agi dans le but de faire supprimer ou restreindre son droit de visite sur leurs enfants, apparaissent dépourvus de pertinence.
4.3.1.
L’appelant est d’avis que l’enregistrement des propos de C.I._ effectué par la mère, qu’on entend chuchoter, démontre clairement que celle-ci aurait manipulé l’enfant.
Cette pièce a été analysée à la fois par un expert médecin et par le Tribunal de police. La suggestion des réponses par l’attitude de la mère est avérée. Cela ne signifie encore pas qu’elle soit délibérée : c’est un problème connu, qui justifie que les professionnels soient formés à l’interrogatoire des enfants. L’inquiétude de la mère aggrave le problème général. La prévenue a été entendue par le juge d’instruction sur la question du chuchotement qui a lieu vers la fin de l’enregistrement, mais cette dernière a nié avoir suggéré des réponses (cf. PV aud. 6). Etant donné qu’il n’est pas possible de distinguer ce qui a été chuchoté et que même son fils n’a pas compris puisqu’il lui répond "qu’est-ce que tu as dit?", on ne saurait en déduire qu’il y a eu manipulation de la part de l’intimée.
4.3.2.
L’appelant se prévaut de la précédente condamnation de l’intimée pour dénonciation calomnieuse.
On peut toutefois constater que celle-ci s’est rétractée spontanément le jour même. En outre, C.I._, lors de son audition à la police du 8 février 2008 (PV aud. 2), a lui-même déclaré que son père ne lui avait jamais touché les parties intimes, mais que ce dernier avait frappé sa mère. Il faut donc relativiser la signification de cet antécédent.
4.3.3.
L’argument de l’appelant consistant à dire qu’on ne peut pas affirmer que l’intimée n’avait pas de volonté de nuire, faute d’expertise psychiatrique, n’est aucunement pertinent. En effet, ainsi qu’il a été exposé plus haut, le fonctionnement de l’intéressée a été passé à la loupe par pléthore d’intervenants sociaux et médicaux.
4.3.4.
L’appelant soutient que l’intimée est une manipulatrice qui a agi de manière subtile. La "dernière expertise" aurait "confirmé qu’elle était manipulatrice".
Aucune expertise ne retient de manipulation. Dans l’hypothèse d’un acte délibéré, on doit constater que la mère se serait montrée très maladroite car son comportement globalement inadapté a amené le SPJ successivement à lui retirer la garde des enfants puis à lui supprimer tout droit de visite.
4.3.5.
L’appelant observe que les accusations ont été proférées au moment où son droit de visite allait être élargi. Il relève que ces accusations sont allées en s’aggravant jusqu’à obtention de l’effet désiré. Il souligne que le Tribunal de police a aussi mentionné que cette circonstance ne lui avait pas échappé.
La deuxième expertise répond à cet argument en retenant que "l’anamnèse de suspicion [...] d’abus sexuels [...] laisse [...] suspecter des projections massives" (P. 109). Ainsi, cela a été pris en compte par l‘autorité de première instance et ne suffit pas pour dire qu’il y aurait eu manipulation de la part de l’intimée, mais démontre seulement que cette dernière était sous l'emprise d’une angoisse pathologique.
4.3.6.
L’appelant déclare avoir "su par un ami que son épouse s’était renseignée et appris d’une amie que la propagation de telles accusations avait pour effet de supprimer le droit de visite".
Cet argument est inconsistant. L’appelant ne donne pas les coordonnées de cette amie et ne se réfère à aucun élément du dossier. Ce fait n’est donc pas prouvé.
4.3.7.
L’appelant soutient que si l’intimée n’a plus parlé spontanément de ses soupçons aux experts, c’est parce que cela était devenu sans intérêt pour elle depuis le placement des enfants.
L’appelant fait là un procès d’intention à l’intimée que rien ne corrobore. Certes, des intervenants se sont étonnés qu’elle n’ait pas déposé plainte pénale. On ne peut toutefois tirer de conclusions de cette circonstance. Une mère uniquement préoccupée par ses enfants peut parfaitement considérer la procédure pénale comme secondaire. L'intéressée a déclaré qu'elle n'avait pas déposé plainte car elle attendait les résultats des différentes enquêtes et les conclusions des intervenants, notamment du pédopsychiatre (PV aud. 6). L’appelant lui-même fait valoir qu’elle savait, en dénonçant les faits à des médecins, qu’une procédure pénale serait ouverte. Partant, il ne s’agit que de suppositions qui ne prouvent rien.
4.3.8.
L’appelant soutient que l’intimée, même si elle s’est convaincue dans un deuxième temps, a menti au début et savait donc que ses accusations étaient fausses.
Ainsi qu’exposé plus haut, la preuve d’un mensonge délibéré ne ressort pas du dossier. L’intimée n’a jamais affirmé avoir assisté à quoi que ce soit. Elle a seulement fait état de soupçons ou d'une conviction sur la base de divers éléments qu’elle a estimées, comme certains médecins ensuite, troublants.
4.3.9.
L’appelant fait finalement valoir qu’il a beaucoup souffert de cette situation.
Cela n’est pas difficile à croire. Toutefois, cela ne signifie pas pour autant que l’intimée soit pénalement coupable.
4.4.
En définitive, aucune preuve d'une éventuelle manipulation de la part de l'intimée n'a été apportée. Les divers avis médicaux concluant à la sincérité de la mère ne permettent pas, ainsi qu'exposé plus haut, de retenir à son encontre les infractions de diffamation, calomnie ou de dénonciation calomnieuse, sa bonne foi devant être retenue à tout le moins au bénéfice du doute. L’appel tendant à la condamnation de l’intimée doit dès lors être rejeté.
5.
L’appelant demande finalement qu’acte lui soit donné de ses réserves civiles contre l’intimée.
5.1.
En vertu de l’art. 122 CPP, le lésé peut, en qualité de partie plaignante, faire valoir des conclusions civiles déduites de l’infraction par adhésion à la procédure pénale (al. 1). L’action civile devient pendante dès que le lésé a fait valoir des conclusions civiles en vertu de l’art. 119 al. 2 let. b CPP (al. 3).
Selon l'art. 123 CPP, dans la mesure du possible, la partie plaignante chiffre ses conclusions civiles dans sa déclaration en vertu de l'art. 119 CPP et les motive par écrit; elle cite les moyens de preuves qu’elle entend invoquer (al. 1). Le calcul et la motivation des conclusions civiles doivent être présentés au plus tard durant les plaidoiries (al. 2).
Finalement, l'art. 124 CPP prévoit que le tribunal saisi de la cause pénale juge les conclusions civiles indépendamment de leur valeur litigieuse (al. 1). Le prévenu doit pouvoir s’exprimer sur les conclusions civiles, au plus tard lors des débats de première instance (al. 2). Si le prévenu acquiesce aux conclusions civiles, sa déclaration doit être consignée au procès-verbal et constatée dans la décision finale (al. 3).
5.2.
En l'espèce, l'appelant n’a pas pris une telle conclusion — ni aucune autre conclusion civile — durant les débats de première instance. Par lettre du 6 juillet 2011 (P. 123) il a certes écrit "je demande réparation pour le tort moral que m’a infligé B.I._". Il n’a toutefois pas chiffré cette prétention qui n’a pas été renouvelée ou précisée aux débats, où il était pourtant assisté d’un avocat. Etant donné que le calcul et la motivation des conclusions civiles n'ont pas été présentés durant les plaidoiries (cf. art. 123 al. 2 CPP) et que la prévenue n'a dès lors pas pu s’exprimer à leur sujet lors des débats de première instance (cf. art. 124 al. 2 CPP), il ne justifie pas de donner acte à l'appelant de ses réserves civiles. L'appel doit également être rejeté sur ce point.
6.
En définitive, l’appel doit être rejeté et le jugement attaqué confirmé dans son entier.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel doivent être mis à la charge de A.I._ (art. 428 al. 1 CPP). Outre l'émolument, qui se monte à 3'010 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1]), ces frais comprennent l'indemnité allouée au conseil d'office de l'appelant et au défenseur d'office de l'intimée (cf. art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP, art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP). Le conseil d'office de l'appelant a indiqué qu'il avait consacré 3 heures au dossier, hors audience, de sorte qu'il convient de lui allouer une indemnité de 1’086 fr. 50, TVA et débours inclus. Quant au défenseur d'office de l'intimée, il a indiqué avoir consacré 10 heures 20 au dossier, hors audience, de sorte qu'il convient de lui allouer une indemnité de 2’317 francs.
L'appelant ne sera tenu de rembourser à l'Etat le montant des indemnités en faveur de son conseil d'office et du défenseur d'office de l'intimée prévues ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bc65cab3-8de2-499e-9fdd-05719627d7e7 | En fait :
A.
Par jugement du 6 mars 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l’Est vaudois a libéré B._ des chefs d’accusation de lésions corporelles simples, de tentative de menaces, de menaces, de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et de contravention au règlement de police de la commune de Lausanne (I), l’a reconnu coupable de lésions corporelles simples par négligence, vol, brigandage, empêchement d’accomplir un acte officiel, infraction à la loi fédérale sur les étrangers et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et l’a condamné aux peines de 3 ans de privation de liberté, sous déduction de 220 jours de détention avant jugement, et de 200 fr. d’amende, convertible en 20 jours de privation de liberté en cas de non paiement fautif (II), l’a condamné à payer à T._ 2'600 fr., avec intérêts à 5% l’an dès le 18 janvier 2013, à titre de dommages et intérêts et d’indemnité pour tort moral, et 2'500 fr., valeur échue, à titre d’indemnité au sens de l’art. 433 CPP (III), a alloué à Me Alain Brogli, défenseur d’office de B._, une indemnité de 7'500 fr., TVA et débours inclus (IV), a mis les frais de la cause, arrêtés à 14’738 fr. 85, à la charge de B._ et dit que sur cette somme, le montant de 7'238 fr. 85 peut être recouvré immédiatement, tandis que les 7'500 fr. correspondant à l’indemnité du défenseur d’office ne pourront être réclamés à B._ que si sa situation financière le permet (V), a dit ne pas y avoir lieu d’indemniser B._ au titre de l’art. 429 CPP (VI) et a ordonné le maintien en détention pour des motifs de sûreté de B._ pour une durée maximale de six mois, échéant le 6 septembre 2013 (VII).
B.
Par annonce d’appel du 8 mars 2013, suivie d’une déclaration d’appel motivée le 26 mars suivant, B._ a conclu à sa libération du chef d’inculpation de brigandage et à sa condamnation à une peine privative de liberté assortie d’un sursis partiel compatible avec sa libération immédiate.
Par acte du 3 avril 2013, le Ministère public s’en est remis à justice s’agissant de la recevabilité de l’appel et n’a pas déposé d’appel joint.
Par acte du 28 juin 2013, la direction de la procédure a donné une suite favorable à la requête de l’appelant tendant à la production d’un rapport de détention.
Par courrier du 23 juillet 2013, l’appelant a produit de nouvelles pièces.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
L’appelant, qui ne détient aucun document d’identité, a déclaré s’appeler B._ et être né le 24 février 1990 au Maroc, pays dont il serait originaire; il parle toutefois le dialecte tunisien. Après la fin de sa scolarité en 2005, il aurait exercé la profession de coiffeur. Il aurait vécu avec sa famille à Casablanca jusqu’en 2007, puis aurait émigré illégalement en Italie où il aurait séjourné plusieurs années. Il serait arrivé le 2 juin 2012 en Suisse, sans autorisation ni document d’identité. Il n’a pas travaillé dans notre pays. Il se dit célibataire.
2.
Il est détenu pour les besoins de la présente cause depuis le 30 juillet 2012. Il ressort du rapport du service pénitentiaire de la Prison de la Croisée du 4 juillet 2013 que le comportement de B._ ne remplit que partiellement les attentes de l’établissement. D’après la Direction de la prison, le prévenu a eu de la peine à s’adapter aux règles imposées; il s’est notamment montré révolté et constamment remonté contre le système carcéral. Il ne supportait pas la moindre contrariété et peinait à entendre les remarques faites par le personnel de la prison. Par son attitude malhonnête et insultante tant envers les agents de détention que ses co-détenus, il a provoqué parfois des altercations et des tensions au sein de l’établissement. Il a fait l’objet de trois sanctions disciplinaires, la dernière datant du 8 mars 2013, en raison de comportements agressifs et d’injures. La direction de la prison a toutefois constaté une réelle amélioration dans le comportement du prévenu depuis le mois d’avril 2013, celui-ci étant agréable et poli avec l’ensemble du personnel et gérant ses frustrations en acceptant les directives imposées et en faisant preuve de patience. B._ a commencé à travailler le 6 décembre 2012 en qualité de nettoyeur de l’étage, toutefois son contrat de travail a été interrompu, celui-ci ne remplissant pas les conditions imposées pour conserver son poste de travail. En raison de sa progression, une proposition lui a été faite le 6 mai 2013. Depuis le 17 juin 2013, il œuvre en qualité de coiffeur. La Direction de la prison souligne encore que le prévenu n’a pas adhéré aux activités proposées par le secteur socio-éducatif (P. 31, 41, 53 et 69).
Le casier judicaire suisse du prévenu est vierge.
2. a)
B._ est entré en Suisse, le 2 juin 2012, sans disposer des documents d’identité requis et dans l’intention d’y séjourner sans autorisation.
b)
Durant son séjour dans notre pays, le prévenu a consommé de la marijuana occasionnellement, et de la cocaïne le week-end. Le 25 juin 2012, au cours d’un contrôle de police, il détenait une boulette de 0.1 g de marijuana.
c)
Le 5 juin 2012 vers 16h, le prévenu et un comparse ont volé, à Lausanne, le porte-monnaie de X._ qui contenait environ 300 fr. ainsi que des cartes et des papiers d’identité. Le comparse a bousculé la victime pour distraire son attention et B._ en a profité pour soustraire le porte-monnaie.
d)
Le même jour vers 23h54, le prévenu refusant de quitter un bar à Lausanne à la fermeture, a fait l’objet d’un contrôle d’identité de la police, appelée par le gérant. Il s’est montré oppositionnel. Emmené au poste, il s’est débattu énergiquement lorsqu’il a été placé en cellule de dégrisement.
e)
Le 7 juin 2012, le prévenu et un comparse ont volé, à Lausanne, le porte-monnaie de C._ en procédant de la même manière que deux jours auparavant (cf. let. c supra), mais en inversant les rôles. La victime s’est toutefois rendue compte de ce qui se passait et a réussi à reprendre son porte-monnaie. En prenant la fuite, le prévenu a regardé la lésée et a passé son pouce sous sa gorge en disant « police ». La lésée, effrayée par ce geste, a déposé plainte.
f)
Le même jour, toujours à Lausanne, le prévenu et son comparse ont volé le téléphone mobile et le porte-monnaie d’une jeune fille de 15 ans. Au moment de son interpellation, le comparse du prévenu a jeté le téléphone qui a pu être retrouvé et restitué à sa propriétaire. Le prévenu a aussi été interpellé.
g)
Le 30 juillet 2012, N._, âgée de 87 ans, a pris le bus à la Poste de Vevey afin de rentrer chez elle. A bord du véhicule, elle a été abordée par un homme inconnu, qui s’est entretenu avec elle un court instant. Après être descendue à l’arrêt Major Davel, comme elle marchait en direction du Boulevard Paderewski, elle a été brutalement saisie par trois hommes, dont B._, aux épaules et au dos. Après l’avoir molestée et mise à terre, les trois agresseurs ont réussi à lui arracher son collier, sa montre ainsi qu’un bracelet. Lors de son agression, qui se situe entre 12h45 et 13h, la victime a tenté d’appeler au secours mais un des individus lui a mis la main sur la bouche. Les agresseurs ont ri de la posture de leur victime, dont la jupe était remontée lorsqu’elle était à terre, avant de l’abandonner au sol. Dans leur fuite, ils ont croisé, sur le trottoir opposé, G._ qui s’est dirigée vers la victime pour lui porter secours. G._ a invité N._ à son domicile. Une fois celle-ci installée et après avoir couché ses petits-enfants, G._ a appelé la police à 13h18. Lle prévenu, muni d’un billet acheté à 13h23, a pris le train de 13h26 en gare de Vevey pour se rendre à Lausanne. A son arrivée à Lausanne, il a été intercepté par la police, en possession des bijoux de la victime.
N._ a déposé plainte pénale.
h)
Le même jour, à Lausanne vers 13h40, le prévenu a été interpellé par des gendarmes en civil qui se sont identifiés. Il a pris la fuite. Lorsqu’il a été rattrapé, il s’est débattu, faisant tomber au sol le policier T._ qui a été blessé au doigt et au genou et dont les habits et la montre ont été endommagés. T._ a dû être opéré et a subi une incapacité de travail d’un mois à 100% puis de deux mois à 50%. Jusqu’à ce jour, il souffre des séquelles de cette altercation son auriculaire restant un peu courbé. Il a porté plainte. | En droit :
1.
1.1
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP). L'appel joint doit être interjeté dans un délai de vingt jours dès la réception de la déclaration d'appel (art. 400 al. 3 CPP).
1.2
Interjetés dans les formes et délai légaux par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de B._ est recevable.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, op. cit., n. 19 ad art. 398 CPP).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
3.1
L'appel est limité à l’examen de la culpabilité de B._ pour brigandage et à celui de la quotité de la peine (art. 399 al. 3 let. a et al. 4 let. a et b CPP).
3.2
Le prévenu a été reconnu coupable de tentative de contrainte à l’encontre de C._ pour le geste commis lorsqu’il a passé son pouce sous sa gorge en disant « police ». Toutefois, le dispositif du jugement ne fait pas mention de la tentative de contrainte à son ch. II alors que les art. 22 et 181 CP figurent en tête du dispositif comme étant applicables. Cette omission consistant en une erreur manifeste, il convient, en application de l’art. 83 CPP, de rectifier d’office le ch. II du dispositif, en reconnaissant B._ également coupable de tentative de contrainte. Au demeurant, la commission de cet acte n’a pas été contestée dans la déclaration d’appel et, à l’audience de ce jour, le prévenu a admis avoir commis ce geste.
4.
L’appelant conteste sa participation au brigandage du 30 juillet 2012. Il soutient avoir acheté les bijoux pour un montant de 700 fr., correspondant à l’argent que sa fiancée lui envoie régulièrement, à un dealer de type « du Bengladesh », auprès duquel il se fournirait en drogue. Ils se seraient rencontrés dans un jardin jouxtant le magasin [...], à Vevey, pour l’achat des bijoux et de drogue. Ils auraient bu un jus d’orange par la même occasion. Selon lui, un doute sérieux subsiste quant à sa culpabilité, qui aurait dû conduire à sa libération de ce chef d’inculpation.
4.1
Aux termes de l’art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, qui est garantie par l'art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 du 23 mars 2010, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38, c. 2a ; TF 6B_18/2011 du 6 septembre 2011 c. 2.1).
4.2
Les premiers juges n’ont pas retenu la version des faits du prévenu, certes temporellement possible mais invraisemblable selon eux. En particulier, il n’était pas plausible que le vendeur négocie son butin à proximité des lieux du crime, alors que la police était en alerte, puis s’attarde encore à boire un jus d’orange avec son client. De plus, son comparse A. B. avait admis sa propre implication à ce crime et avait confirmé la participation du prévenu.
4.3
Cette analyse, convaincante, ne prête pas le flanc à la critique. L’agression de N._ s’est déroulée entre 12h45 et 13h d’après les déclarations de G._ qui a indiqué à la police avoir entendu les appels au secours à « à peu près 13h00 » (PV aud. 4). Aux débats de première instance, G._ a estimé le temps écoulé entre les appels au secours de la victime et son appel à la police, intervenu à 13h18, à 25 minutes, 30 minutes au maximum, le temps de rentrer chez elle, à quelques mètres de l’agression, d’installer la victime dans le jardin et de coucher ses deux petits-enfants. L’appelant a acheté son billet de train à 13h23. Ainsi, sur la base de ce témoignage convaincant, moins de 38 minutes se sont écoulées entre l’agression et le départ du prévenu pour prendre son train. Dans ce petit laps de temps, les bijoux auraient changé de mains plus d’une fois ce qui est hautement invraisemblable. En effet, le prévenu a expliqué que le dealer auprès duquel il aurait acheté les bijoux était du type « du Bengladesh » (PV aud. 2). Or, cela ne correspond pas aux agresseurs décrits par les témoins qui étaient de type « arabe » ou « méditerranéen ».
4.4
A l’appui de son appel, B._ relève encore que ni G._, ni N._ ne l’ont reconnu, alors qu’elles ont pu observer les criminels et identifier R._. Il indique que le chauffeur de bus qui a également été confronté aux coupables ne l’a pas davantage identifié. Il soutient que les descriptions des auteurs ne lui correspondraient pas. Il relève qu’il était porteur, à son arrivée à Lausanne, d’un sac qu’aucun témoin n’avait signalé. R._, rencontré en détention, l’aurait mis en cause afin de minimiser son propre rôle dans l’agression. Il aurait profité de la coïncidence, après avoir appris de l’appelant qu’il avait été arrêté en possession des bijoux de la victime. Il ajoute qu’il est invraisemblable qu’il achète un billet de train s’il était coupable de cette agression. Il estime que le mode opératoire est différent de ses autres vols, commis selon lui sans violence. Enfin, il soutient que l’envoi d’argent par sa fiancée est établi par une pièce produite au dossier.
4.5
4.5.1
Il ressort du dossier que N._ a expliqué que ses agresseurs avaient les cheveux foncés et la peau claire et qu’un des trois individus étaient un peu plus corpulent sans être gros. Elle a estimé leur âge entre 25 et 30 ans. Elle les a décrit comme étant les trois « très bien sur eux ». D’après ses souvenirs, ils portaient chacun un pantalon foncé (PV aud. 1). Pour le surplus, elle a déclaré qu’elle n’était pas en mesure de décrire en détail ses agresseurs mais seulement un homme, faisant partie d’un groupe de trois, à qui elle avait parlé peu avant l’agression dans un bus (PV aud. 1). Si l’on se fie aux explications données par R._, qui raconte aussi l’épisode du bus, cet homme n’était pas le prévenu (PV aud. 12). Le fait que la victime n’a pas reconnu le prévenu lors de la parade ou sur photo n’est donc pas déterminant.
Décrivant les agresseurs, G._ a expliqué qu’un des hommes était plus âgé et un peu plus grand, de corpulence massive. Il avait la peau claire, les cheveux très courts mais pas noirs et un nez assez marquant. D’après ses souvenirs, il portait un haut bleu azur avec du blanc et un bas foncé. Le deuxième et le troisième homme se ressemblaient. Elle a estimé leur âge entre 25 et 28 ans et leur taille à 175-178 cm. Ils étaient de corpulence mince avec la peau bronzée de type méditerranéen. Leurs cheveux étaient très foncés, un peu plus longs que le premier et brillants. Ils avaient l’air « très propre[s] sur [eux] ». Le deuxième homme portait des lunettes noires de style Ray Ban et une chemise blanche. Ayant assisté à une parade d’identification dans les locaux de la police. G._ a désigné R._ comme pouvant être un des agresseurs, ainsi que B._ sa coiffure ressemblant plus à celle d’un des agresseurs, notamment celui portant les lunettes de type Ray Ban (PV aud. 8). La photographie de cette parade, jointe au procès-verbal d’audition, permet de constater que B._ et son comparse se ressemblent dans l’allure générale et peuvent être confondus dans le contexte d’une fuite qui ne permet pas une bonne observation des traits.
Le chauffeur du bus, dans lequel la victime et les prévenus sont montés, a également été entendu. Sa description des trois individus concorde à quelques détails près à la description faite par G._. Il a signalé qu’un des hommes était plus costaud et plus âgé que les deux autres. S’agissant des deux autres individus, ils étaient minces et avaient les cheveux noirs, gominés, avec une crête. Ils devaient avoir environ 30 ans et leur taille devait avoisiner les 175 cm. Un des deux individus avait un polo blanc avec des rayes horizontales foncées tandis que l’autre semblait avoir un polo clair. Les trois hommes étaient de type arabe. Il est vrai que le chauffeur de bus n’a reconnu personne mais il n’a vu qu’un des hommes de près et la police lui a seulement montré des photographies d’identité judiciaires qui ne montrent que le visage.
Là encore, l’absence d’identification par les témoins ne signifie pas que le prévenu est innocent.
4.5.2
Contrairement à ce que soutient l’appelant, R._ et lui correspondaient bien à la description faite, par les témoins et la victime, de deux des trois agresseurs, le troisième étant effectivement d’un genre différent, apparemment corpulent ou massif et un peu plus âgé (PV aud. 1, 4 et 10). Ainsi, deux des agresseurs ont été décrits comme étant âgés de 25 à 30 ans (PV aud. 1, 4 et 10), aux cheveux courts et noirs (PV aud. 1 et 4), brillants et gominés (PV aud. 4 et 10) avec une crête (PV aud. 10) dont l’un un peu plus long que l’autre (PV aud. 4 et 8). Ils devaient mesurer entre 175 cm et 178 cm, de corpulence mince (PV aud. 4 et 10), l’un légèrement plus costaud que l’autre (PV aud. 10), de type méditerranéen ou arabe (PV aud. 4 et 10), dont l’un avec la peau un peu plus claire que l’autre (PV aud. 4). La photographie de la parade permet de constater tous ces éléments. Par ailleurs, c’est sa correspondance avec le signalement qui a permis aux gendarmes de Lausanne d’interpeller le prévenu (P. 6 et 18).
En ce qui concerne l’habillement, les témoignages de G._ et de N._ ne sont pas suffisamment précis, s’agissant de l’agresseur dont la description correspond le mieux au prévenu. De toute façon, on ne sait pas exactement comment le prévenu était vêtu le jour en question. Il ressort uniquement du dossier que son T-shirt a été déchiré lors de son arrestation (P. 14; Dossier D, P. 6). Selon les souvenirs du gendarme, il était blanc (Jugement entrepris, p. 12), ce qui est compatible avec le « polo clair » porté par l’agresseur n°2 décrit par le chauffeur de bus (PV aud. 10).
Du point de vue des accessoires vestimentaires, contrairement à ce que soutient l’appelant, il ressort de l’inventaire établi à son arrestation qu’il possédait bien des lunettes de soleil (P. 8). Quant à la sacoche figurant à l’inventaire (P. 8), on en ignore la taille. Tout comme l’a relevé le Procureur à l’audience, elle a pu passer inaperçue, si elle était portée en bandoulière dans le dos; elle a aussi pu avoir été cachée ou confiée.
4.5.3
La thèse d’une invention de R._, imaginée après une brève rencontre en prison où le prévenu aurait expliqué les motifs de son incarcération, ne repose que sur les affirmations du prévenu et n’est étayée par aucun élément. R._ décrit l’épisode du bus, ce qu’il ne pouvait connaître que s’il y a effectivement participé (PV aud. 12). Au demeurant, sa description du troisième homme un peu plus âgé et costaud correspond à celle faite par les autres témoins.
4.5.4
Contrairement à ce qu’il s’efforce de faire croire, le prévenu n’est pas crédible. Il ressort du dossier qu’il a aussi longtemps, y compris en première instance, contesté avoir commis d’autres infractions et ce n’est que confronté à des preuves concrètes qu’il a parfois avoué, en minimisant d’ailleurs. Des contradictions résident dans le récit de ses faits et gestes après l’agression. Ainsi, il déclare tantôt avoir acheté à son dealer pour 20 fr. d’héroïne (PV aud. 2; Jugement entrepris, p. 6), tantôt avoir reçu cette drogue gratuitement (PV aud. 9).
De plus, il paraît peu vraisemblable qu’un étranger en situation illégale, sans revenu licite possible autre qu’une aide provenant de proches, qui dit dormir dans des squats et qui vole péniblement quelques porte-monnaie à l’astuce, utilise une somme de 700 fr. qui pourrait lui permettre de vivre un certain temps, pour acheter à un dealer des bijoux dont il n’a aucune utilité, dans l’espoir très théorique de les revendre avec bénéfice malgré leur origine plus que douteuse.
Enfin s’agissant du billet de train, de l’avis de la Cour de céans, il paraît au contraire vraisemblable que l’auteur de l’infraction, dès lors qu’il se trouve à la gare et entend prendre le train, achète un billet pour ne pas prendre le risque d’attirer l’attention en voyageant sans titre de transport.
Quant aux 700 fr. que sa fiancée lui aurait envoyés, ce fait n’est pas décisif. En effet, si sa fiancée lui a envoyé de l’argent, cela ne l’a pas empêché de commettre d’autres vols qu’il reconnaît. Dès lors, on ne voit pas pourquoi il n’aurait pas pu aussi commettre le brigandage du 30 juillet 2012.
4.5.5
Contrairement à ce qu’affirme l’appelant, il n’apparaît pas que les modes opératoires des précédents vols soient très différents du brigandage contesté. Dans tous les cas, le prévenu a agi avec au minimum un complice et les victimes ont été bousculées. Il s’agit davantage d’une question de degré de violence. Le prévenu est parfaitement capable d’une certaine violence, comme le démontrent les menaces proférées à une des victimes en passant son pouce sous sa gorge et les sanctions disciplinaires qui ont émaillé son séjour carcéral (P. 31, 41, 53 et 69).
4.5.6
En définitive, au vu des éléments qui précèdent, la culpabilité du prévenu pour le brigandage dont N._ a été victime ne fait aucun doute.
5.
L’appelant considère la peine trop sévère et demande à bénéficier du sursis partiel.
L’appelant estime qu’à décharge, il aurait dû être tenu compte du fait qu’il n’a aucun antécédent, qu’il a fait deux tentatives de suicide en prison car il supportait mal sa détention, que la prison lui a permis de renoncer à toute consommation de stupéfiants, et de prendre conscience de sa culpabilité, ce que démontraient les excuses exprimées aux débats et l’engagement de dédommagement souscrit en faveur d’un plaignant. Enfin, il estime que la détention préventive subie permet, vu son « effet de choc » sur lui, de poser un pronostic favorable pour l’avenir.
5.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 136 IV 55 c. 2.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
5.2
D'après l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits. Il découle de l’art. 42 al. 2 CP que le sursis total est exclu sauf circonstances particulièrement favorables si, durant les cinq ans qui ont précédé l’infraction, l’auteur a été condamné, notamment, à une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins. Aux termes de l'art. 43 al. 1 CP, le juge peut suspendre partiellement l’exécution d’une peine pécuniaire, d’un travail d’intérêt général ou d’une peine privative de liberté d’un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute.
Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, respectivement du sursis partiel, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit accorder le sursis. Celui-ci est ainsi la règle, dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable et hautement incertain (TF 6B_88/2011 du 18 avril 2011 c. 2.1 et les références citées; ATF 134 IV 1 c. 4.2.2). En d'autres termes, la loi présume l'existence d'un pronostic favorable et cette présomption doit être renversée par le juge pour exclure le sursis. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste (ATF 135 IV 180 c. 2.1; ATF 135 IV 152 c. 3.2.1 non publié; Kuhn, Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 17 ad art. 42 CP). Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents.
5.3
Les premiers juges ont considéré que le prévenu faisait preuve d’un parfait mépris pour l’intégrité corporelle et la propriété d’autrui, d’une complète absence de scrupules et d’une importante énergie criminelle, en s’en prenant avec des comparses à des victimes physiquement plus faibles, voire totalement incapables de se défendre. A charge, ils ont tenu compte du concours d’infractions. A décharge, ils n’ont trouvé aucune circonstance, précisant que la consommation de cocaïne du prévenu était trop occasionnelle pour entamer sa responsabilité pénale et que les excuses présentées n’étaient pas sincères mais dictées par des considérations tactiques.
Examinant la question du sursis, le tribunal correctionnel a considéré que le prévenu avait entamé son parcours criminel à peine arrivé en Suisse, qu’il vivait de ses vols – il n’a pas ajouté foi aux affirmations du prévenu qui se disait financièrement soutenu par son amie –, que ni son placement en cellule de dégrisement le 5 juin 2012, ni son interpellation du 7 juin 2012 ne l’avaient freiné, et que le pronostic était dès lors très défavorable.
5.4
La Cour de céans reprend à son compte la motivation des premiers juges qui ne prête pas le flanc à la critique. La culpabilité de B._ est très lourde. Le prévenu, qui avait un travail dans son pays d’origine, selon ses propres dires, est venu en Suisse sans aucun document d’identité (alors qu’il prétend les avoir laissés en Italie, dossier B, P. 4), pour commencer quasiment immédiatement à y commettre à plusieurs reprises, contre des victimes faciles et beaucoup plus faibles physiquement que lui et avec l’aide de comparses, des vols comportant une certaine violence. En outre, la gravité des infractions est allée crescendo, commençant par des vols de porte-monnaie dans les sacs à main et finissant par une agression, par trois personnes, d’une personne âgée de 87 ans pour lui voler ses bijoux. Le comportement vis-à-vis de N._ a été lâche et méprisable. De plus, le comportement de l’appelant en procédure s’apparente plus à celui d’un délinquant endurci qu’à celui d’un agneau égaré désormais revenu dans le droit chemin.
Contrairement à ce que soutient l’appelant, l’absence d’antécédents a en principe un effet neutre sur la fixation de la peine et ne constitue donc pas un élément à décharge, selon la jurisprudence (ATF 136 IV 1), et ce d’autant moins pour une personne jeune, qui ne peut se targuer d’un long parcours de vie exemplaire. Par ailleurs, l’absence de casier judiciaire suisse d’un étranger arrivé moins de deux mois avant son arrestation dans ce pays n’est pas propre à démontrer l’absence de comportement délictueux commis précédemment par l’appelant. Faute de document d’identité, il est impossible d’obtenir des informations sur le prévenu dont on ne connaît même pas le pays d’origine, celui-ci se disant originaire du Maroc mais parlant le dialecte tunisien.
De l’avis de la Cour de céans, une authentique prise de conscience n’est pas établie. L’« engagement souscrit » en audience de première instance, selon lequel B._ se reconnaissait débiteur de T._ d’un montant de 600 fr. de dommage matériel et de 500 fr. pour tort moral, n’en est pas un, celui-ci
n’étant pas signé. En réalité, il s’agit plutôt d’une offre, le prévenu concluant pour le surplus au rejet des prétentions civiles du plaignant. De même les peudo-excuses (P. 45) adressées aux lésés par le prévenu une semaine avant les débats sont édifiantes sur sa prise de conscience, les faits y relatifs étant par ailleurs toujours contestés ou minimisés (Jugement entrepris, p. 5) : « je vous demande de ma pardonner cette erreur » ; « je vous demande de m’excuser j’étais présent au moment des faits » ; « je vous présente mes excuses pour cet accident que vous avez eu ». On lui donnera acte que la détention lui est fort pénible, même s’il va mieux apparemment (P. 49). La renonciation à tout stupéfiant n’a rien de méritoire, le prévenu ayant expliqué qu’il ne présentait aucune addiction (Jugement entrepris, p. 6).
Ainsi, aucun élément sérieux ne peut être retenu à décharge de l’appelant.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il se justifie de prononcer une peine privative de liberté de 3 ans. La peine de 200 fr. d’amende pour la contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants n’est pas contestée et doit également être confirmée.
5.5
S’agissant de l’octroi du sursis, seul un sursis partiel pourrait éventuellement entrer en considération vu la quotité de la peine infligée.
Il s’agit, à la connaissance de la Cour, de la première condamnation de l’appelant. Toutefois, le pronostic est défavorable. Le prévenu n’a cessé de commettre des infractions durant sa brève présence en Suisse, où il a pris soin de venir sans papiers d’identité. En procédure, il n’a cessé de contester ou minimiser ses fautes. Il n’a toujours montré aucun document d’identité alors qu’il a des contacts avec une « fiancée » en Italie. Il n’a pas montré de regrets sincères; il déplore seulement que ses actes l’aient conduit en prison. En détention, il s’est mal comporté et seule une amorce d’amélioration peut être observée. S’il a souffert de cette détention, il va mieux, sans que son attitude soit désormais irréprochable. On ne peut pas dire que la prison ait eu un effet de choc qui aurait suffisamment amendé l’intéressé pour que le pronostic soit moins sombre.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, la Cour de céans rejoint l’avis des premiers juges selon lequel tout indique que le prévenu recommencera à commettre des crimes et des délits dès qu’il sera remis en liberté. Le pronostic est dès lors défavorable et le sursis, même partiel, ne saurait lui être accordé.
6.
En définitive, l'appel de B._ est rejeté, le jugement rendu le 6 mars 2013 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l’Est vaudois étant confirmé.
7.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être mis à la charge de B._ (art. 428 al. 1 CPP). Outre l'émolument, qui se monte à 2'680 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), et 82 fr. pour les frais d’interprète du témoin amené à l’audition duquel l’appelant a ensuite renoncé, ces frais comprennent l’indemnité allouée au défenseur d’office.
Au vu de la complexité de la cause, des opérations nécessaires de la procédure d'appel, il convient d'allouer au défenseur d’office de B._ une indemnité de 1'285 fr. 20, TVA et débours inclus.
Le dossier ayant été traité par une avocate-stagiaire, dix heures au tarif horaire de 110 fr. paraissent suffisantes pour l’accomplissement du mandat en procédure d’appel. Nonante francs de débours doivent également être alloués.
B._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP).
8.
Enfin, il s'avère que le dispositif communiqué après l'audience d'appel contient une erreur manifeste dans l’énumération des articles applicables en ce sens qu’il mentionne l’art. 105 LEtr au lieu de l’art. 115 LEtr. En application de l'art. 83 CPP, le dispositif sera rectifié d'office. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bc796061-a678-49b9-99c6-5e3dfae0179f | En fait :
A.
Par jugement du Tribunal correctionnel de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois rendu le 31 août 2015 au terme d’une procédure simplifiée, A._ a été condamné à 15 mois de peine privative de liberté, sous déduction de 122 jours de détention provisoire subie, avec sursis pendant 5 ans, le sursis étant subordonné à une règle de conduite. Les premiers juges ont également considéré que l’intégralité des frais de justice, soit 23'215 fr. 20 devait être mise à la charge de A._.
Le 24 septembre 2015, le Tribunal d’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a rendu un prononcé rectificatif faisant porter les frais de justice de 23'215 fr. 20 à 27'235 fr. 20 pour les deux motifs suivants :
- les indemnités allouées par la Chambre des recours pénale au défenseur d’office de l’appelant ont été comptées à double ;
- une facture du CHUV de 5'600 fr. concernant le rapport d’expertise établi pour le condamné est parvenue au greffe en date du 18 septembre 2015 et n’avait ainsi pas été prise en compte dans le précédent total des frais.
B.
Par déclaration motivée du 5 octobre 2015, A._ a interjeté appel contre le prononcé du 24 septembre 2015, en concluant principalement à ce que les frais de justice, par 21'635 fr. 20, y compris l’indemnité visée sous chiffre II ci-dessus, soit mis à sa charge, le solde étant laissé à la charge de l’Etat. Subsidiairement, il a conclu à l’annulation du prononcé rectificatif.
Le Ministère public a renoncé à présenter une demande de non-entrée en matière ou à déposer une déclaration d’appel joint.
Par avis du 30 octobre 2015, les parties ont été informées que l’appel serait traité d’office en procédure écrite en application de l’art. 406 al. 1 CPP. | En droit :
1.
1.1
Selon l’art. 399 al. 1 CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0), l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’espèce, interjeté en temps utile, l’appel motivé de A._ est recevable. Seule la question des frais étant litigieuse, l’appel est traité en procédure écrite (art. 406 al. 1 let. d CPP).
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves (TF 6B_78/2012 du 27 août 2012). L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Eugster, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Jugendstrafprozessordnung, 2
e
éd., Bâle 2014, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP).
3.
3.1
Selon l’art. 83 al. 3, l’autorité pénale donne aux parties l’occasion de se déterminer lorsqu’elle entend rendre un prononcé rectificatif. Cette disposition est le reflet du droit d’être entendu, consacré à l’art. 29 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101).
3.2
En l’espèce, A._ n’a pas été interpellé par les premiers juges avant la notification du prononcé attaqué, ce qui constitue une violation de son droit d’être entendu. C’est toutefois à juste titre que l’appelant n’a pas soulevé ce grief, le plein pouvoir de cognition de la Cour de céans permettant de rectifier le vice.
4.
4.1
Le recourant fait valoir que la facture du CHUV, reçue par l’autorité après que le jugement de première instance a été rendu, serait un élément nouveau qui, par définition, exclurait que l’on puisse parler d’une erreur manifeste au sens de l’art. 83 CPP, de sorte que la voie du prononcé rectificatif serait erronée.
4.2
4.2.1
Aux termes de l’art. 83 al. 1 CPP, l'autorité pénale qui a rendu un prononcé dont le dispositif est peu clair, contradictoire ou incomplet ou qui est en contradiction avec l'exposé des motifs, l'explique ou le rectifie à la demande d'une partie ou d'office.
On distingue l’inadvertance manifeste, du dispositif peu clair, incomplet ou contradictoire (Macaluso,
in
: Kuhn/Jeanneret [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, nn. 3 et 4 ad art. 83 CPP). Lorsque le dispositif est peu clair ou incomplet ou contradictoire, l’autorité pénale qui a rendu le prononcé peut interpréter sa décision et procéder aux rectifications qu’impose cette interprétation (Macaluso, op. cit., nn. 4 et 5 ad art. 83 CPP).
4.2.2
A la teneur de l’art. 2 ch. 3 du Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale (TFIP; RSV 312.03.1), font notamment partie des frais de procédure, les frais d’expertise.
4.3
En l’occurrence, on se trouve manifestement dans la seconde hypothèse visée par la loi (cf. supra 4.2.1), une erreur ou une inattention manifeste sur un point ignoré par les premiers juges devant être écartée, ces derniers n’ayant pas connaissance de la facture du CHUV au moment où ils ont rendu leur décision.
Il ressort des considérants du jugement attaqué que
« l’intégralité des frais de justice doit être mise à la charge du prévenu [...]
». Dès lors, en ne mettant pas à la charge de l’appelant les frais d’expertise, qui font partie des frais de procédure (cf. supra 4.2.2), tout en retenant que l’intégralité des frais de justice doit être mise à sa charge, le jugement souffre d’une contradiction ouvrant ainsi la porte à la rectification.
De toute manière, la Cour de céans n’est pas liée par les termes utilisés pour qualifier le prononcé attaqué et pourrait cas échéant considérer qu’il s’agit d’une décision postérieure au jugement au sens des art. 363 ss CPP. Cette seconde hypothèse ne change toutefois absolument rien au sort de la facture du CHUV qui, dans les deux cas, sera mise à la charge de l’appelant. On rappellera encore, à toutes fins utiles, que A._ n’a soulevé aucun argument de fond pour que ces frais ne soient en définitive pas mis à sa charge.
5.
L’appel doit être rejeté et le prononcé confirmé.
Une indemnité pour la procédure d'appel d'un montant de 1'353 fr., TVA et débours inclus, est allouée au défenseur d'office de l’appelant. Il est tenu compte de 3h27 de travail au tarif horaire de 180 fr. et de 5h33 de travail au tarif horaire de 110 fr., et de débours, par 21 fr. 30, plus la TVA, par 100 fr.20.
Les frais d'appel, par 1'903 fr., constitués de l'émolument de jugement (art. 422 al. 1 CPP), par 550 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), et de l'indemnité de défenseur d'office allouée (art. 422 al. 2 let. a CPP), par
1'353 fr., seront mis à la charge de l’appelant.
Celui-ci ne sera ne tenu de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bc9c78f5-5c6d-4ff2-a5e1-b9fa2a5c56ec | En fait :
A.
Par jugement du 25 août 2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a condamné I._ pour vol à une peine pécuniaire de 20 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr., et à une amende de 200 fr., sous déduction d’un jour de détention avant jugement, étant précisé que la peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif de l’amende est de 2 jours (I et II), suspendu l’exécution de la peine pécuniaire infligée à I._ et fixé un délai d’épreuve de 4 ans (III), renoncé à révoquer le sursis accordé le 15 janvier 2013 à I._ par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne mais prolongé le délai d’épreuve d’une année (IV), condamné Q._ pour vol à une peine pécuniaire de 20 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr., et à une amende de 200 fr., sous déduction d’un jour de détention avant jugement, étant précisé que la peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif de l’amende est de 2 jours (V et VI), suspendu l’exécution de la peine pécuniaire infligée à Q._ et fixé un délai d’épreuve de deux ans (VII), pris acte du fait qu’I._ et Q._ se sont reconnues solidairement débitrices de la X._, représentée par R._, de la somme de 2’100 fr. et se sont engagées à rembourser cette somme par un versement immédiat correspondant à 220 fr., suivi d’un versement de 1000 fr. en mains de leur conseil le 26 août 2014, puis d’un versement de 880 fr. d’ici à fin septembre 2014 (VIII), ordonné le maintien au dossier de la pièce enregistrée sous fiche n° 56931 (IX), dit qu’I._ et Q._ sont solidairement débitrice de X._ de la somme de 2’000 fr. à titre de dépens (X), mis une partie des frais de la procédure à la charge des deux prévenues par moitié chacune (XI) et laissé le solde des frais à la charge de l’Etat (XII).
B.
Le 29 août 2014, le Ministère public a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d'appel du 30 octobre 2014, il a conclu à la réforme des chiffres II, III, IV, VI et VII en ce sens qu’I._ est condamnée à une peine privative de liberté de 30 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, que le chiffre III est supprimé, que le sursis prononcé le 15 janvier 2013 par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne est révoqué, que Q._ est condamnée à une peine privative de liberté de 30 jours, sous déduction d’un jour de détention avant jugement, et que le chiffre VII est supprimé.
Aux débats, I._ et Q._ ont conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
I._ est née le 9 juillet 1989 à [...] en Roumanie, pays dont elle est ressortissante. Elle est la troisième d’une fratrie de quatre enfants. Elle a quitté la Roumanie pour la France avec ses parents alors qu’elle était âgée de 12 ans. Elle a entrepris une formation dans la coiffure sans la terminer. Actuellement, elle vit à Paris avec son compagnon et leurs trois enfants nés en 2006, 2007 et 2009. Son compagnon travaille en qualité de mécanicien indépendant. Le couple perçoit un montant total d’environ 1'300 euros par mois. La prévenue ne paie pas de loyer, dans la mesure où elle est domiciliée chez sa mère qui paie toutes les charges relatives à l’appartement.
Son casier judiciaire suisse comporte une inscription :
-
15.01.2013, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, vol, peine pécuniaire 40 jours-amende à 20 fr., sursis de 2 ans, amende de 200 francs.
Elle a également fait l’objet d’une condamnation à une amende de 200 fr. pour vol d’importance mineure par voie d’ordonnance pénale rendue le 23 janvier 2014 par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne.
I._ a été détenue avant jugement pendant un jour.
1.2
Q._ est née le 14 décembre 1959 à [...] en Roumanie, pays dont elle est ressortissante. Elle vit en France depuis 35 ans. Elle est couturière de formation. Elle touche une rente mensuelle de 558 euros et travaille parfois en qualité de couturière. En tout, elle perçoit en moyenne 1'200 à 1'300 euros par mois. Elle participe au loyer à hauteur de 300 euros par mois. Elle vit avec sa fille aînée qui gagne sa vie et assume ainsi les autres charges.
Son casier judiciaire suisse est vierge de toute inscription.
Q._ a été détenue avant jugement pendant un jour.
2.
A [...], dans le magasin X._ sise à l’avenue [...], le 11 novembre 2013, entre 17h00 et 18h00, Q._ et I._, accompagnées d’une troisième personne qui n’a pas été identifiée, ont dérobé des baskets, des chaussures, une veste en cuir, une ceinture et un sac pour une valeur totale de 2'100 francs. Pendant qu’I._ distrayait la vendeuse, les comparses en ont profité pour dérober la marchandise en la dissimulant sous leurs vêtements, avant de prendre la fuite.
Le magasin X._ a déposé plainte et s’est constituée partie civile le 13 novembre 2013. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel du Ministère public est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
Le Ministère public considère qu’une peine privative de liberté de trente jours doit être prononcée à l’encontre d'I._ et que le sursis octroyé le 15 janvier 2013 par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne doit être révoqué, le pronostic étant défavorable.
3.1
Aux termes de l’art. 41 al. 1 CP, le juge peut prononcer une peine privative de liberté ferme de moins de six mois uniquement si les conditions du sursis à l'exécution de la peine (art. 42 CP) ne sont pas réunies et s’il y a lieu d’admettre que ni une peine pécuniaire, ni un travail d’intérêt général ne peuvent être exécutés.
L'art. 41 al. 1 CP prévoit deux conditions cumulatives.
Il faut d'abord que les conditions du sursis à l'exécution de la peine ne soient pas réunies. Il en va ainsi, conformément à l'art. 42 CP, lorsqu'une peine ferme paraît nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits. Lorsque l'auteur a fait l'objet de condamnations durant les cinq ans qui précèdent l'infraction, il faut en outre qu'il n'existe aucune circonstance particulièrement favorable au sursis (art. 42 al. 2 CP).
La seconde condition reflète la subsidiarité de la peine privative de liberté. A titre de sanctions, le nouveau droit fait de la peine pécuniaire (art. 34 CP) et du travail d’intérêt général (art. 37 CP) la règle dans le domaine de la petite criminalité, respectivement de la peine pécuniaire et de la peine privative de liberté la règle pour la criminalité moyenne. La peine pécuniaire constitue désormais la sanction principale. Les peines privatives de liberté ne doivent être prononcées que lorsque l’Etat ne peut garantir d’une autre manière la sécurité publique. Quant au travail d’intérêt général, il suppose l’accord de l’auteur. En vertu du principe de la proportionnalité, il y a en règle générale lieu, lorsque plusieurs peines entrent en considération et apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute, de choisir celle qui restreint le moins sévèrement la liberté personnelle de l’intéressé, respectivement qui le touche le moins durement. La peine pécuniaire et le travail d’intérêt général représentent des atteintes moins importantes et constituent ainsi des peines plus clémentes. Cela résulte également de l’intention essentielle, qui était au coeur de la révision de la partie générale du Code pénal en matière de sanction, d’éviter les courtes peines de prison ou d’arrêt, qui font obstacle à la socialisation de l’auteur, et de leur substituer d’autres sanctions. Pour choisir la nature de la peine, le juge doit prendre en considération l’opportunité de la sanction déterminée, ses effets sur l’auteur et son milieu social, ainsi que son efficacité préventive (ATF 134 IV 97 c. 4; TF 6B_102/2012 du 22 juin 2012 c. 2.1).
3.2
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1 ; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
3.3
Dans la présente procédure, I._ est condamnée pour avoir volé, le 11 novembre 2013, de la marchandise pour 2'100 fr. en compagnie de deux comparses. Elle a déjà été condamnée, le 15 janvier 2013, par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne à une peine pécuniaire de 40 jours-amende à 20 fr. le jour et à une amende de 200 fr. pour avoir dérobé de la marchandise pour un montant de 528 francs. Elle a encore fait l’objet d’une condamnation à une amende de 200 fr. pour avoir volé un vêtement le 20 décembre 2013, ce par ordonnance pénale du 23 janvier 2014. Au moment de ce dernier vol, elle n’avait toutefois pas encore été appréhendée pour l’infraction commise en novembre 2013. L’intimée est née en 1989. Elle n’a aucun statut en Suisse et vit en réalité à Paris avec son concubin et ses trois enfants. Le fait qu’elle ait déjà trois condamnations à son actif, alors qu’elle n’effectue que des passages en Suisse, démontre qu’elle y vient uniquement pour commettre des vols. Au cours de la procédure, elle a passablement ergoté, expliquant notamment qu’elle n’avait pas touché à la marchandise et que c’était sa coaccusée qui avait juste pris un sweater. Même si I._ a remboursé une partie du montant de 2'100 fr., vraisemblablement à hauteur de 700 fr., il faut tout de même admettre, avec le Ministère public, que le pronostic est défavorable.
Sur le vu des éléments qui précédent, le prononcé d’une peine pécuniaire est exclu dans le cas d’espèce, puisqu'une telle peine ne saurait être suffisamment dissuasive. C'est donc bien une peine privative de liberté, comme requise par le Ministère public, qu'il y a lieu de prononcer. Au regard de la culpabilité de l’intéressée, de sa situation personnelle et de ses antécédents, la peine privative de liberté est arrêtée à 20 jours.
Malgré un pronostic défavorable, le précédent sursis ne sera pas révoqué. La Cour de céans considère en effet que la peine privative de liberté ferme prononcée suffira à détourner l'intimée de la commission de nouveaux actes délictueux.
4.
Le Ministère public soutient qu’une peine privative de liberté de trente jours doit être prononcée à l’encontre de Q._, cette dernière n’en étant pas à son coup d’essai, sa venue en Suisse ne s’expliquant que par sa volonté d’y commettre des vols et sa situation personnelle étant extrêmement modeste.
On ne saurait prononcer une courte peine privative de liberté à l’encontre de cette intimée. En effet, les éléments du dossier sont totalement insuffisants pour poser un pronostic défavorable. D’une part, son casier judiciaire est vierge. D’autre part, malgré ses faibles moyens financiers, elle a remboursé la totalité du montant de 2’100 fr. à la partie plaignante, sa coaccusée lui ayant donné la somme de 700 fr. par la suite. Par ailleurs, rien ne permet d’affirmer que l’intéressée ne serait venue en Suisse que dans le but de commettre des vols ou qu’elle ne serait pas à son coup d’essai, ces affirmations n’étant étayées par aucun élément pertinent, telles que des inscriptions au casier judiciaire, étant relevé que le dossier ne comporte aucun extrait du casier judiciaire français de Q._. Partant, on doit admettre, comme le premier juge, que le pronostic est favorable.
Pour le reste, on ne saurait exclure le prononcé d’une peine pécuniaire au regard de la situation modeste de l’intéressée. Par conséquent, au regard des éléments qui précèdent, de la culpabilité de l’intimée, de son rôle dans le cadre de la commission de l’infraction et de sa situation personnelle, la peine pécuniaire prononcée par le Tribunal de police est adéquate et peut être confirmée.
5.
Sur le vu de ce qui précède, l'appel du Ministère public doit être partiellement admis et le jugement attaqué réformé dans le sens des considérants qui précèdent.
Vu l’issue de la cause, les frais de la présente procédure, constitués du seul émolument d’arrêt, par 1’390 fr., doivent être mis par moitié à la charge d’I._, le solde étant laissé à la charge de l’Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bcd2939c-50d4-494f-9ff5-9230ff854afd | En fait :
A.
Par jugement du 6 août 2012, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l'Est vaudois a notamment libéré M._ des infractions d'instigation à faux dans les certificats, instigation à dénonciation calomnieuse et infraction à la LArm (II), a constaté qu'il s'était rendu coupable de mise en danger de la vie d'autrui, recel d'importance mineure, opposition aux actes de l'autorité, violation simple et grave des règles de la circulation routière, circulation sans permis de conduire, mise à disposition d'un véhicule à un conducteur non titulaire du permis de conduire, circulation sans permis de circulation ou sans plaques de contrôle, conduite d'un véhicule non couvert par une assurance RC, usage abusif de permis ou de plaques et soustraction de plaques (V), a révoqué la libération conditionnelle accordée par le Juge d'application des peines en date du 31 mars 2010 et a ordonné l'exécution du solde de la peine qui formera avec le peine prononcée sous chiffre VII une peine d'ensemble (VI), l'a condamné à une peine privative de liberté de 15 mois, peine d'ensemble et partiellement complémentaire à la peine prononcée par le Amtsgericht Lörrach (D), sous déduction de 193 jours de détention provisoire, ainsi qu'à une amende de 500 fr. (VII), a donné acte de leurs réserves civiles à J._, K._ et W._ (VIII), a dit que les objets séquestrés sous fiche 302 étaient maintenus au dossier à titre de pièces à conviction (IX), a arrêté les frais de la cause à la charge de M._ à 12'370 fr. 20 y compris l'indemnité due à son défenseur d'office par 6'920 fr. 10 (XI) et a dit que l'indemnité servie aux défenseurs d'office ne sera due que si la situation financière des condamnés le permet (XII).
Par prononcé rectificatif du 16 août 2012, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a condamné M._ à une peine privative de liberté de 15 mois, peine d'ensemble et partiellement complémentaire à la peine prononcée par le Amtsgericht Lörrach (D), sous déduction de 193 jours de détention provisoire, ainsi qu'à une amende de 500 fr., la peine privative de liberté de substitution étant fixée à cinq jours (VII).
B.
Les 20 août et 6 septembre 2012, M._ a déposé respectivement une annonce et une déclaration d'appel motivée contre le jugement du Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois du 6 août 2012 et son prononcé rectificatif du 16 août 2012. Il a contesté la révocation de la libération conditionnelle et a estimé qu'il devait être mis au bénéfice du sursis. Il a conclu à l'annulation du chiffre VI du jugement et à la réforme du chiffre VII en ce sens que la peine est assortie du sursis pendant cinq ans, concluant également à ce que les frais de justice de première instance soient répartis à dire de justice.
Par courrier du 10 septembre 2012, le Ministère public s'en est remis à justice concernant la recevabilité de l'appel et a renoncé à déposer un appel joint.
Par courrier du 6 novembre 2012, M._ a déposé une copie de son contrat de travail conclu le 1
er
novembre 2012 pour une durée indéterminée.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
M._, né le [...] 1987, est originaire de Vevey. D'après une expertise psychiatrique de mai 2007 (P. 83), il a sept demi-frères et demi-sœurs en Tunisie du côté de son père et sept demi-frères du côté de sa mère. Ses parents ont divorcé quand il avait deux ans. Le prévenu a été laissé à la garde et à l'autorité parentale de son père. Il est père d'un garçon, [...], né en 2008 de sa relation avec R._. Selon ses déclarations, il ne voit pas son fils mais a entrepris des démarches pour bénéficier d'un droit de visite. Il a expliqué à l'audience d'appel qu'il s'est marié au début de l'année 2012 et que le couple souhaite avoir un enfant.
L'appelant travaille depuis novembre 2012 comme gérant d'une boucherie à Clarens pour un salaire mensuel net de 3'500 francs. Il est toujours suivi par la Fondation de probation avec laquelle il a un entretien tous les mois. Actuellement, il ne paie pas de pension alimentaire pour son fils. Son épouse ne travaille pas et va commencer des cours de perfectionnement de français.
D'après l'extrait de son casier judiciaire, M._ a été condamné le 17 novembre 2004 par le Tribunal des mineurs de Lausanne à 3 mois de détention avec sursis durant un an notamment pour vol et infractions à la LCR, le 17 août 2006 par le Juge d'instruction de l'Est vaudois à Vevey à 2 mois d'emprisonnement avec sursis durant 4 ans, révoqué le 16 octobre 2007, notamment pour vol et infractions à la LCR, le 16 octobre 2007 par le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois à une peine privative de liberté de 14 mois, notamment pour vol, dénonciation calomnieuse et infractions à la LCR et le 23 février 2010 par le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois à une peine privative de liberté de 10 mois notamment pour vol et infractions à la LCR.
Son casier judiciaire mentionne également une condamnation prononcée par le Amtsgericht Lörrach (Allemagne) en date du 13 décembre 2010 à une peine de 15 jours-amende, à 50 Euros le jour, pour conduite sans permis de conduire.
Cinq inscriptions concernant le prévenu figurent au fichier fédéral des mesures administratives en matière de circulation routière, à savoir, une décision du 28 août 2006 prononçant une interdiction de conduire plus un nouvel examen pour vitesse alors qu'il était titulaire d'un permis étranger, une décision du 27 novembre 2008 prononçant un refus de délivrer un permis pour une durée d'un mois pour conduite sans permis et malgré un retrait ou une interdiction, une décision du 11 mars 2009 prononçant un refus de délivrer un permis pour une durée d'un mois pour conduite sans permis et malgré un retrait ou une interdiction, une décision du 23 novembre 2010 prononçant un refus de délivrer un permis pour conduite sans permis et vol d'usage et une décision du 4 juillet 2011 prononçant un refus de délivrer un permis et un suivi avec un psychologue du trafic pour conduite sans permis.
2.
Le 16 mai 2010, dans une discothèque à Lausanne, la co-accusée et ex-compagne du prévenu, R._, a dérobé le sac à main de J._. M._ a pris le téléphone portable qui se trouvait dans le sac.
Le 19 mai 2010, dans un parking souterrain à Renens, le prévenu a dérobé des plaques d'immatriculation du véhicule de Q._ et les a apposées sur sa propre voiture Ford Escort, qu'il venait d'acheter.
Du 19 au 26 mai 2010, M._ a circulé au volant de cette voiture, puis d'une Ford Mondeo sur laquelle il avait mis les mêmes plaques, sans être titulaire du permis de conduire et sans que ses véhicules soient immatriculés ni assurés en responsabilité civile.
Le 27 mai 2010, entre Vevey et Montreux, il a confié le volant de la Ford Mondeo à R._ alors que celle-ci n'était pas non plus titulaire du permis de conduire.
Le 5 juin 2010, au festival de jazz à Cully, R._ a volé le portefeuille de K._. Elle a utilisé l'argent qu'il contenait pour acheter à manger et à boire. Le prévenu a profité de ces victuailles en connaissance de cause.
Le 24 juin 2010, à Allaman, le 6 juillet 2010, à Villars-Sainte-Croix, et le 9 juillet 2010, à Gland, M._, toujours sans permis de conduire, a de nouveau pris le volant de la Ford Mondeo, désormais immatriculée au nom de R._. Il avait toutefois retiré la plaque auparavant.
Le 20 juillet 2010, à La Tour-de-Peilz, M._ a conduit une nouvelle fois sans permis. Confronté à un véhicule de police au giratoire de Genévrier, il a pris la fuite par la route d'Hauteville en ignorant ses signaux avertisseurs. Il s'est engagé dans le giratoire de la jonction autoroutière sans accorder la priorité aux usagers venant de la gauche, à une vitesse comprise entre 80 et 100 km/h alors qu'elle était limitée à 60 km/h. Après avoir fait le tour du giratoire, il a repris la route d'Hauteville, circulant à vive allure, dépassant les autres véhicules par la gauche ou par la droite, sans indiquer ses changements de direction, ce qui a contraint certains usagers à freiner ou faire des manœuvres d'urgence pour éviter l'accident. Le prévenu a traversé le giratoire de Genévrier sans respecter les priorités. Sur la route de Saint-Légier, il a tourné à gauche malgré la ligne de sécurité qu'il a franchie, en direction du chemin de la Paisible, dont l'accès était interdit par un panneau. Là encore, il roulait à une allure largement supérieure aux 50 km/h autorisés. Parvenu au chemin de Crêt-Richard, il s'est arrêté devant un parking souterrain, non sans avoir heurté le mur droit de la voie d'accès à ce parking.
Entre les 2 et 6 mars 2011, il a dérobé, à Oron-le-Châtel, les plaques d'immatriculation de la voiture de W._, stationnée au bord de la route.
Le 29 mars 2011, le prévenu, toujours sans permis, a circulé, à Vevey, au volant d'une Opel Astra, non couverte par une assurance RC. Les plaques volées à W._ ont été retrouvées dans ce véhicule. | En droit :
1.
1.1
Interjeté dans les formes et délais légaux (cf. art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable.
1.2
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.
Selon l'art. 404 al. 2 CPP, la juridiction d'appel peut examiner en faveur du prévenu des points du jugement qui ne sont pas attaqués afin de prévenir des décisions illégales ou inéquitables.
Cette disposition doit être interprétées de manière restrictive. La juridiction d'appel n'abordera d'autres points que ceux soulevés dans l'appel qu'en cas d'erreur manifeste. Elle interviendra notamment en cas de constatation manifestement inexacte des faits ou de violation grossière du droit matériel ou de procédure. Cette disposition se recoupe partiellement avec la règle selon laquelle la juridiction d'appel examine d'office les conditions de l'action pénale (Kistler Vianin, in Kuhn/Jeanneret, Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 4 ad art. 404 CPP). L'auteur précité admet que dans cette situation la juridiction d'appel peut aussi bien modifier qu'annuler le jugement.
En l'occurrence, avant d'examiner l'appel qui ne porte que sur la révocation de la libération conditionnelle et le refus du sursis, on constate que le jugement contient une erreur manifeste sur un autre point.
2.1
L'appelant a été condamné pour une mise en danger de la vie d'autrui en relation avec les faits survenus le 20 juillet 2010.
Selon l'art. 129 CP, celui qui, sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort imminent sera puni de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement. La réalisation de cette infraction implique la réunion de conditions objectives, à savoir la création d'un danger de mort imminent, et, au-delà de l'intention, d'une condition subjective particulière, soit l'absence de scrupules.
Le danger de mort imminent, élément constitutif de l'art. 129 CP, suppose d'abord un danger apparaissant comme très possible ou vraisemblable (ATF 134 IV 8). Le danger doit être concret, c'est-à-dire qu'il faut un état de fait dans lequel existe, d'après le cours ordinaire des choses, la probabilité ou un certain degré de possibilité que le bien juridique protégé soit lésé, sans toutefois qu'un degré de probabilité supérieur à 50 % soit exigé (Corboz, Les infractions en droit suisse, 3
e
éd., Berne 2010, n. 11 ad art. 129 CP; ATF 121 IV 67, TF 6S.322/2005 du
30 septembre 2005). Enfin, il doit s'agir d'un danger de mort et ce danger doit être imminent, c'est-à-dire représenter plus qu'une probabilité sérieuse, le danger de mort apparaissant si probable qu'il faut être dénué de scrupules pour négliger sciemment d'en tenir compte. Un danger de mort imminent, au sens de l'art. 129 CP, n'existe donc pas seulement lorsque la probabilité de tuer autrui est plus grande que celle de pouvoir éviter cette mort, mais aussi déjà lorsque naît un degré de possibilité de mort tel que celui qui sciemment n'en tient pas compte se révèle dénué de scrupules (Hurtado Pozo, Droit pénal, Partie spéciale, Bâle 2009, n. 612 ad art. 129 CP). Par ailleurs, l'imminence comporte un élément d'immédiateté. Il faut donc en définitive un risque concret et sérieux qu'une personne soit tuée et pas seulement blessée et que ce risque soit dans un rapport de connexité étroit avec le comportement de l'auteur (Corboz, op. cit., n. 14 ad art. 129 CP).
La mise en danger de la vie d'autrui n'est punissable que si elle est intentionnelle. L'auteur doit avoir conscience du danger de mort imminent pour autrui et adopter volontairement un comportement qui le crée. L'auteur doit vouloir mettre autrui en danger de mort imminent, sans vouloir, toutefois, la réalisation du risque, sous peine de se voir condamner pour meurtre. La volonté de créer un danger de mort imminent se situe donc entre le dol éventuel de l'homicide intentionnel et la simple négligence consciente. Il y a homicide ou tentative d’homicide intentionnel si l’auteur veut la mort de la victime ou accepte cette éventualité; il y a homicide par négligence s’il adopte un comportement dangereux, qu’il ait ou non perçu le risque, mais en comptant bien, par légèreté, que le risque ne se réalisera pas. Dans le cas de la mise en danger de la vie d’autrui, l’auteur, sans accepter l’éventualité du décès, veut créer un risque de mort (Corboz, op. cit., n. 26 ad art. 129 CP; ATF 133 IV 8).
L’auteur doit en outre créer le danger sans scrupules. On désigne par là un comportement dont le caractère répréhensible doit apparaître comme marqué. L’acte doit revêtir une gravité qualifiée, dénoter une absence particulière d’inhibition face au fait de mettre en danger la vie d’autrui et un manque criant d’égards face à l’existence de tiers (Dupuis/Geller/Monnier/Moreillon/Piguet/Bettex/Stoll, Petit commentaire, Code pénal, Bâle 2012, n. 14 ad art. 129 CP). Plus le danger connu de l'auteur est grand et moins ses mobiles méritent attention, plus l'absence de scrupules apparaît comme évidente (Corboz, op. cit., n. 28 ad art. 129 CP;
TF 6S.128/2003 du 13 août 2003 c. 4.1.2; ATF 114 IV 103 c. 2a). L’absence de scrupules doit être admise dans tous les cas où la mise en danger de mort d’autrui intervient pour un motif futile ou apparaît clairement disproportionnée, de
sorte qu’elle dénote un profond mépris de la vie d’autrui (Corboz, op. cit., n. 32 ad art. 129 CP).
2.2
En l'occurrence, ni le dossier, en particulier le rapport de police du 10 septembre 2010 (P. 16), ni l'acte d'accusation qui retient cette infraction, ni le jugement ne décrivent des faits concrets qui pourraient tomber sous le coup de l'art. 129 CP. Le rapport de police confirmé par le témoignage du gendarme [...] à l'audience du Tribunal correctionnel du 4 avril 2011 a exposé que le compteur du véhicule de police indiquait une vitesse de 80 à 100 km/h. Il a également relevé que l'appelant a effectué plusieurs manœuvres de dépassement sans égard pour les véhicules dépassés ou venant en sens inverse, obligeant ceux-ci à effectuer des manœuvres d'urgence d'évitement et de freinage. Les faits tels que décrits ne sont pas suffisants pour être considérés comme une mise en danger concrète et imminente de la vie d'autrui. Le dossier ne fait état d'aucun élément qui permet d'affirmer qu'à un moment ou à un autre quelqu'un a effectivement été mis en danger de mort imminent. En outre, le jugement, non seulement ne reproche rien de plus à l'appelant, mais contient, en page 52, un considérant "en l'espèce" qui concerne manifestement une autre affaire, la motivation du jugement étant ainsi erronée, car fondée sur des faits différents.
2.3
En conséquence, les éléments constitutifs de l'infraction de mise en danger concrète de la vie d'autrui ne sont pas réalisés en l'état du dossier.
3.
Les griefs de l'appelant concernent la peine privative de liberté ferme, la révocation de la libération conditionnelle accordée le 31 mars 2010 et la peine pécuniaire prononcée par le Amtsgericht Lörrach qui forment ensemble une peine privative de liberté d'ensemble et partiellement complémentaire de 15 mois. Il convient d'examiner d'office la validité de cette peine privative de liberté d'ensemble.
3.1
Selon l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine. Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (al. 2).
3.2
En cas de révocation de la libération conditionnelle, la fixation de la sanction doit tenir compte du fait qu'elle intègre un solde de peine dont l’exécution est ordonnée ensuite d’une telle révocation. On rappellera à cet égard que le Tribunal fédéral a, quant à la manière d’appliquer l'art. 49 CP auquel renvoie l’art. 89 al. 6 CP, énoncé notamment que le juge doit fixer la peine conformément au principe de l'absorption, à opposer au principe du cumul; ce faisant, il doit partir de la quotité de la peine réprimant l'infraction commise durant le délai d'épreuve, prononcée selon l'art. 47 CP, pour l'accroître à la mesure du solde de peine restant à purger pour aboutir à une peine d'ensemble fixée rétrospectivement en application de l'art. 49 CP (TF 6B_28/2008 du 10 avril 2008 c. 3.3.1 et 6B_685/2010 du 4 avril 2011). En l'espèce, les premiers juges se sont contentés de mentionner que la libération conditionnelle serait révoquée sans fixer la quotité de la peine réprimant les infractions commises durant le délai d'épreuve. En outre, bien que le solde de la libération conditionnelle à exécuter figure dans le casier judiciaire, les premiers juges n'en ont pas fait mention dans le jugement, de sorte qu'on ignore s'ils avaient cet élément à l'esprit en fixant la peine.
3.3
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le principe de l'aggravation de l'art. 49 CP ne s'applique que lorsque plusieurs peines du même genre sont prononcées. Des peines d'un genre différent doivent être infligées de manière cumulative. Le tribunal ne peut ainsi prononcer une peine privative de liberté d'ensemble que s'il avait prononcé dans le cas concret une peine privative de liberté pour chaque acte pris séparément (ATF 137 IV 249 c. 3, JT 2012 IV 205). En l'espèce, le Amtsgericht de Lörrach a prononcé le 13 décembre 2010 une peine pécuniaire de 15 jours-amende à l'encontre de M._, tandis que les premiers juges ont condamné l'appelant à une peine privative de liberté d'ensemble de 15 mois. Ainsi, il n'était pas possible de fixer une peine d'ensemble dans la mesure où il s'agissait de deux condamnations d'un genre différent, la première condamnation consistant en des jours-amende, la deuxième en une peine privative de liberté.
3.4
Par ailleurs, l'infraction d'opposition aux actes d'une autorité ne peut pas être punie d'une peine privative de liberté ou d'une amende, mais seulement d'une peine pécuniaire. La peine infligée viole donc l'art. 286 CP.
3.5
Enfin, se pose la question de l'octroi du sursis et de la révocation de la libération conditionnelle.
Dans le cadre de la fixation de la peine, les premiers juges mentionnent "la situation personnelle" du prévenu. Le jugement, s'il évoque l'enfance du prévenu et l'expertise à laquelle il a été soumis, n'expose cependant pas la situation de l'intéressé après cette expertise qui date de mai 2007. Entre 2007 et 2012, cinq ans se sont écoulés et la situation du prévenu a évolué. Le dossier contient beaucoup d'éléments, pourtant. Ainsi, on ignore quels éléments ont été retenus et considérés comme déterminants par le Tribunal correctionnel dans la fixation de la peine. Cette motivation est insuffisante et viole le droit d'être entendu du prévenu.
L'absence de tout renseignement récent sur l'évolution du prévenu ne permet pas d'examiner sérieusement les questions soulevées en appel du sursis (art. 42 al. 2 CP) et de la révocation de la libération conditionnelle (art. 89 CP), bien que les antécédents, la multiplication de nouveaux actes punissables de même nature, y compris en cours d'enquête, et le rapport de la Fondation vaudoise de probation (P. 97) fondent a priori un pronostic défavorable. Enfin, l'avis du Juge d'application des peines du 4 août 2011 sur la libération conditionnelle de M._ ne se trouve pas dans le dossier (P. 86 manquante).
4.
Conformément à l’art. 409 al. 1 CPP, si la procédure de première instance présente des vices importants auxquels il est impossible de remédier en procédure d’appel, la juridiction d’appel annule le jugement attaqué et renvoie la cause au tribunal de première instance pour qu’il soit procédé à de nouveaux débats et pour qu’un nouveau jugement soit rendu. Au vu des nombreux vices du jugement de première instance, la Cour d’appel ne saurait se prononcer elle-même sur la fixation de la peine, la révocation de la libération conditionnelle et le sursis, dès lors que cette manière de procéder priverait le prévenu de la garantie de la double instance (cf. Kistler Vianin, op. cit., nn. 1 et 5 ad art. 409 CPP).
En conséquence, la cause doit être renvoyée au Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l'Est vaudois. Il appartiendra aux premiers juges d'exposer la situation personnelle de M._, de le libérer de l'accusation de mise en danger de la vie d'autrui, de fixer une nouvelle peine en genre et en quotité en tenant compte de la culpabilité de l'appelant, de sa situation personnelle, mise à jour depuis 2007, ainsi que des considérants qui précèdent sur la peine d'ensemble, et de se prononcer sur la révocation de la libération conditionnelle et du refus d'octroi du sursis.
5.
En définitive, l'appel doit être admis en ce sens que le jugement rendu le 6 août 2012 et rectifié par prononcé du 16 août 2012 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois est annulé en tant qu'il concerne M._ et confirmé pour le surplus. La cause est renvoyée au Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois pour nouveau jugement dans le sens des considérants.
Les frais de la procédure d'appel sont laissés à la charge de l'Etat (art. 428 al. 1 CPP). Outre l'émolument (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1]), ces frais comprennent l'indemnité allouée au défenseur d’office du prévenu pour la procédure d’appel (cf. art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP). Au vu de la complexité de la cause et de l'ampleur des opérations effectuées, cette indemnité doit être arrêtée à 720 fr. et 50 fr. de débours, plus la TVA par 61 fr. 60, soit un total de 831 fr. 60, débours et TVA compris. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bcf349ee-bb0b-4ca0-9166-735694908689 | En fait :
A.
Par jugement du 4 décembre 2006, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a condamné C._, pour lésions corporelles simples qualifiées et voies de fait, à la peine d’un mois d’emprisonnement, avec sursis pendant deux ans (I), a ordonné la confiscation et la destruction du bâton en métal recouvert de plastique vert et du tuteur en bambou séquestrés (II), a ordonné le maintien au dossier, à titre de pièces à conviction, des deux cassettes VHS et des deux DVD des audition d’ [...] et d’ [...] inventoriés (III) et a mis l’entier des frais de la cause, par 2'780 fr., à la charge du condamné.
Les faits retenus à l’appui de ce jugement sont les suivants. Le 1
er
juillet 2005, à son domicile à Renens, C._ a mis les mains sur le cou de son fils [...] sans serrer parce que son frère, [...], était arrivé au même moment. Le 13 janvier 2006, le prévenu a frappé son fils [...] sur le corps au moyen d’un bâton et à coups de poing. Le constat médical effectué le soir même par le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) rapporte qu’ [...] a souffert de dermabrasions et contusions à la jambe gauche, à la main gauche et sur le côté gauche de la nuque. C._ a admis avoir frappé son fils sur les fesses, mais à deux reprises uniquement.
B.
Par courrier du 20 novembre 2013, C._ a demandé à la Cour d’appel pénale du Tribunal cantonal « d’annuler le jugement » du 4 décembre 2006. A l’appui de sa requête, l’intéressé a produit différentes pièces. Il fait valoir que son ex-femme, qui avait porté plainte contre lui au nom de leurs fils communs, s’était présentée aux autorités sous deux fausses identités. Il soutient que le jugement précité se base sur un rapport médical fait par le CHUV qui ne figure pas au dossier. Il rapporte encore avoir découvert dans le courant de l’année 2013 que son ex-épouse avait été victime d’un viol en 2002 et précise que le Service de protection de la jeunesse (SPJ) lui avait retiré ses enfants « parce qu’ils savaient le crime commis contre leur mère ». | En droit :
1.
1.1
La demande de révision présentée par C._ est postérieure à l'entrée en vigueur du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP ; RS 312.0). Partant, les règles de compétence et de procédure des art. 410 ss CPP sont applicables (Pfister-Liechti, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, n. 9 ad art. 451 CPP ; TF 6B_41/2012 du 28 juin 2012 c. 1.1). Les motifs de révision pertinents sont en revanche ceux prévus par le droit applicable au moment où la décision, dont la révision est demandée, a été rendue ; cette réserve est toutefois sans portée s'agissant d'une révision en faveur du condamné, le motif de révision prévu à l'art. 410 al. 1 let. a CPP correspondant à celui de l'art. 385 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 ([CP ; RS 311.0] ; TF 6B_41/2012 du 12 septembre 2012 c. 1.1 et les références citées ; TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011 c. 1.1).
1.2
Aux termes l'art. 410 al. 1 let. a CPP, toute personne lésée par un jugement entré en force, une ordonnance pénale, une décision judiciaire ultérieure ou une décision rendue dans une procédure indépendante en matière de mesures, peut en demander la révision, s’il existe des faits ou des moyens de preuves qui étaient inconnus de l’autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l’acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère ou plus sévère du condamné ou encore la condamnation de la personne acquittée. La qualité de partie (art. 382 al. 1 CPP) pour une demande de révision est reconnue au prévenu, ainsi qu’à toute personne qui a un intérêt juridiquement protégé à l’annulation ou la modification de la décision (Rémy in : Kuhn/Jeanneret [éd.], op. cit., n. 7 ad art. 410 CPP ; Fingerhuth in : Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2010, n. 47 ad. art. 410 CPP).
Des faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsqu'ils n'ont pas été soumis, sous quelque forme que ce soit, à l'appréciation du tribunal, soit parce qu'ils ne ressortaient pas du dossier ou des débats, soit parce qu'ils avaient été négligés par le premier juge. Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles la condamnation est fondée, de manière que l'état de fait ainsi modifié rende vraisemblable une condamnation sensiblement moins sévère ou permette de conclure à l'inexistence de l'une des infractions retenues, que cette libération entraîne ou non une réduction de la peine (TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011 c. 1.2 ; ATF 130 IV 72 c. 1; 116 IV 353).
Pour être valides en la forme, les demandes de révision doivent être motivées et adressées par écrit à la juridiction d’appel, les motifs de révision devant être exposés et justifiés dans la demande (art. 411 al. 1 CPP ; Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, 3
e
édition, Schulthess § 2011, n. 2092, p. 679 et Niggli et Wiprächtiger, Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung Jungenstrafprozessordnung, Bâle 2011, n. 6 ad art. 411 CPP, p. 2731). L’art. 412 al. 2 CPP prescrit que la juridiction d'appel n'entre pas en matière sur la demande de révision si celle-ci est manifestement irrecevable ou non motivée ou si une demande de révision invoquant les mêmes motifs a déjà été rejetée par le passé. La procédure de non-entrée en matière selon cette disposition est en principe réservée à des vices de nature formelle ; il est toutefois également possible de prononcer une décision de non-entrée en matière lorsque les motifs de révision invoqués apparaissent d'emblée non vraisemblables ou mal fondés (TF 6B_293/2013 du 19 juillet 2013 c. 3.3; TF 6B_415/2012 du 14 décembre 2012 c. 1.1 et les références citées).
1.3
En l’espèce, les faits invoqués par le requérant pour fonder sa demande de révision n’ont aucun rapport avec sa condamnation pénale, de sorte qu’on ne saurait les considérer propres à rendre vraisemblable une telle requête. A cet égard, les faits incriminés dans le jugement du 4 décembre 2006 concernent des violences commises par C._ à l’encontre de ses deux fils. On ne voit donc pas en quoi le viol allégué de son ex-femme, laquelle se serait, selon les dires de l’intéressé, présenté aux autorités sous deux fausses identités, est pertinent dans ce cadre. En outre, c’est à tort qu’il prétend que le rapport médical du CHUV ne serait pas au dossier (cf. P. 7/6). Force est ainsi de constater que le requérant n’invoque aucun fait sérieux susceptible d’aboutir à un autre constat que celui des premiers juges, ses allégations étant dans l’ensemble informes.
2.
Il y a dès lors lieu de refuser d’entrer en matière au sens de l’art. 412 al. 2 CPP, la demande de révision de C._ étant irrecevable. La présente décision doit être rendue sans frais. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bcf4e9f5-b5ae-4da9-a7f8-7b5364364169 | En fait :
A.
Dans un arrêt du 12 février 2008, le Tribunal d'accusation du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal d'accusation) a rejeté le recours déposé par Z._ contre l'ordonnance de non-lieu prononcée par le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne le 23 janvier 2008 (I); a confirmé l'ordonnance (II); a dit que les frais d'arrêt, par 330 fr. (trois cent trente francs), sont mis à la charge de Z._ (III) et a déclaré l'arrêt exécutoire (IV).
B.
Le 17 octobre 2006, Z._ a déposé plainte contre trois agents de la police ferroviaire, leur reprochant les conditions dans lesquelles ils auraient mené un contrôle d'identité et une fouille, entre fin septembre et début octobre 2006. Sa plainte était également dirigée contre l'agent de police n° 0767, qui avait refusé d'enregistrer sa plainte lorsqu'il s'était rendu à l'Hôtel de police à Lausanne. Par ordonnance du 23 janvier 2008, le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne a prononcé un non-lieu, l'enquête menée n'ayant pas permis d'établir l'existence du contrôle dont s'était plaint Z._. Le Juge d'instruction a en outre conclu que les faits reprochés à l'agent de police n'avaient "pas de caractère pénal". Saisi d'un recours contre cette ordonnance de non-lieu, le Tribunal d'accusation a constaté qu'il n'était pas possible d'identifier les agents de la police ferroviaire concernés par la plainte ni de déterminer la réalité des faits invoqués et qu'enfin aucune mesure d'instruction n'apparaissait susceptible d'amener des éléments nouveaux.
Le 5 octobre 2010, Z._ a déposé une nouvelle plainte contre les mêmes agents de la police ferroviaire et pour les mêmes faits déjà reprochés dans sa plainte du 17 octobre 2006. Par courrier du 19 novembre 2010, le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne a informé Z._ que tant l'ordonnance de non-lieu du 23 janvier 2008, que l'arrêt prononcé le
12 février 2008 par le Tribunal d'accusation avaient acquis autorité de chose jugée et qu'il ne pouvait déposer de nouvelle plainte pour les mêmes faits. Le juge a ainsi refusé de rouvrir l'enquête et a classé sans suite la nouvelle plainte.
C.
Le 21 février 2010, Z._ a demandé à la Cour d'appel pénale de procéder à la révision de l'arrêt du Tribunal d'accusation. Il a conclu à son annulation en ce sens que sa plainte soit réexaminée et fasse l'objet d'une nouvelle instruction par le Ministère public. A l'appui de sa requête, il soutient que des caméras de surveillance étaient en fonction tant dans le train régional dans lequel il se trouvait au moment du contrôle qu'à l'hôtel de police. Il ajoute également qu'un courrier du 4 octobre 2010 de la police de Lausanne mettrait directement en cause le Juge d'instruction qui avait mené l'enquête et prononcé l'ordonnance de non-lieu en janvier 2008 et il conclut implicitement à sa récusation. | En droit :
1.
Selon l’art. 410 al. 1 let. a CPP (Code de procédure pénale suisse du
5 octobre 2007; RS 312.0), toute personne lésée par un jugement entré en force, une ordonnance pénale, une décision judiciaire ultérieure ou une décision rendue dans une procédure indépendante en matière de mesures, peut en demander la révision s’il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l’autorité inférieure et qui sont de nature à motiver la condamnation d'une personne acquittée.
En l'occurrence, le requérant peut être considéré comme un lésé
au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP (cf. Rémy, Commentaire romand n. 7 ad art.
410 CPP et n. 6 ad. art. 452 CPP; Fingerhuth in Donatsch et consorts, n. 47 ad.
art. 410 CPP). En revanche, sa demande de révision vise un arrêt du
Tribunal d'accusation confirmant un non-lieu fondé sur des considérations de faits. Cet arrêt n'est dès lors pas susceptible d'être revu, n'étant pas un jugement entré en force au sens de l'art. 410 al. 1 CPP, les faits nouveaux pouvant être présentés dans une reprise de la procédure préliminaire (art. 323 CPP).
Partant, la demande de révision déposée par Z._ est irrecevable.
2.
Au surplus, il convient de rappeler que la révision d'un jugement ne peut être demandée que lorsque des faits ou des moyens de preuve sérieux et dont le juge n'avait pas eu connaissance lors du premier procès viennent à être invoqués. Par "faits", il faut entendre toute circonstance susceptible d'être prise en considération dans l'état de fait qui fonde le jugement, ce qui comprend tout événement matériel ou produit par l'activité humaine, même celui auquel la loi attache un effet juridique, à la condition qu'elle joue un rôle dans la qualification juridique, dans la fixation de la peine ou l'octroi du sursis (Favre/Pellet/Stoudmann, Code pénal annoté, 3
ème
éd. 2007, n. 1.3 ad art. 385 CP).
Des faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsqu'ils n'ont pas été soumis, sous quelque forme que ce soit, à l'appréciation du tribunal, soit parce qu'ils ne ressortaient pas du dossier ou des débats, soit parce qu'ils avaient été négligés par le premier juge. Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles la condamnation est fondée, de manière que l'état de fait ainsi modifié rende vraisemblable une condamnation sensiblement moins sévère ou permette de conclure à l'inexistence de l'une des infractions retenues, que cette libération entraîne ou non une réduction de la peine (ATF 130 IV 72 c. 1;
116 IV 353).
3.
En l'espèce, le requérant mélange recours, appel, révision et récusation. Il n'existe manifestement ni faits ni moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et le refus d'entrer en matière du commandant de la police municipale, qui ne concerne au surplus que l'agent lausannois et non pas les agents de la police ferroviaire principalement concernés par la plainte, ne constitue pas un fait nouveau pertinent (cf. courrier du 4 octobre 2010). Les autres éléments mentionnés (caméras de surveillance) ont déjà été évoqués dans le cadre de l'enquête ayant conduit au non-lieu (cf. recours Z _ au TACC du 4 février 2008). Enfin, une demande de récusation ne constitue pas un motif de révision.
4.
En définitive, la demande de révision présentée par Z._ est irrecevable. Vu l'issue de la cause, les frais de révision (art. 21, par renvoi de l'art. 22 du TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux, RSV
312.03.1
]) sont mis à sa charge (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bcfa3a41-aeaa-46dc-b20b-20c1145d8edb | En fait :
A.
Par jugement du 11 décembre 2012, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que J._ s’est rendu coupable de violation d’une obligation d’entretien, d’appropriation illégitime et de menaces qualifiées (I), l’a condamné à une peine privative de liberté de quatre mois (II), a donné acte de ses réserves civiles au Service de prévoyance et d'aide sociale (III), a pris acte de la reconnaissance de dette passée au procès-verbal de l’audience (IV), a mis les frais, par 3'194 fr. 40, à la charge de J._ (V) et a dit que l’indemnité au conseil d’office de la plaignante, par 1'800 fr., est supportée par l’Etat (VI).
B.
Le 13 décembre 2012, J._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel motivée du 5 mars 2013, il a conclu principalement à sa libération de tout chef d’infraction et par conséquent de toute peine et de tout frais, subsidiairement à l’annulation du jugement, plus subsidiairement à sa libération des chefs d’accusation de menaces, d’appropriation illégitime, de violation d’une obligation d’entretien et à sa condamnation à une peine clémente avec sursis et, encore plus subsidiairement, à sa condamnation à une peine clémente avec sursis.
Par courrier du 21 mars 2013, le Service de prévoyance et d'aide sociale a déclaré s’en remettre à justice quant à la décision à intervenir.
Par déterminations du 27 mars 2013, P._ a conclu au rejet de l’appel.
Le même jour, le Ministère public a déclaré renoncer à déposer un appel joint et s’en est remettre à justice s’agissant de la recevabilité de l’appel.
Par courrier du 22 mai 2013, le Ministère public a conclu au rejet de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
J._ est né le 25 juin 1966 à Ngaoudéré au Cameroun, pays dont il est ressortissant. Domicilié à Collombey en Valais, chez sa sœur, il est au bénéfice d’un permis C. L’appelant est séparé de P._, avec qui il a eu deux enfants qu’il voit un week-end sur deux. Le couple est instance de divorce. Titulaire d’une licence en sciences économiques de l’Université de Yaoundé, le prévenu est arrivé en Suisse en 1994. Il a d’abord fréquenté la Faculté des Hautes Ecoles Commerciales (HEC) de l’Université de Lausanne pendant deux ans, puis la Faculté de Droit de l’Université de Genève pendant un an, sans toutefois obtenir de diplôme. Il a ensuite suivi une école d’informatique en 2006 et a obtenu un certificat de technicien en informatique. Parallèlement à ses études, l’appelant a effectué divers jobs d’étudiant. Il a travaillé en qualité de magasinier entre 1999 et 2004, puis comme courtier en assurance pour le W._. Il est actuellement sans activité et a déclaré ne pas avoir droit au chômage, ne pas toucher l’aide sociale et vivre de l’aide de sa famille. Selon ses dires, l’appelant effectuerait des recherches d’emploi auprès d’assurances et également comme magasinier ou comme chauffeur. Durant le mois de mai 2013, il aurait envoyé une vingtaine d’offres d’emploi et reçu six réponses négatives.
Le casier judiciaire suisse de l’appelant contient la condamnation suivante :
- 7 juin 2004, Juge d’instruction de la Côte Morges, violation des règles de la circulation routière, conducteur pris de boisson, infraction à la loi fédérale sur la circulation routière, concours d’infraction, emprisonnement 3 jours, sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans, amende 800 francs.
2.
Selon la convention de mesures protectrices de l’union conjugale ratifiée le 5 mai 2009 par la Présidente du Tribunal d’arrondissement de Lausanne, J._ est astreint à verser en mains de son épouse, P._, à titre de contribution d’entretien pour sa famille, une pension mensuelle de 25% au moins de son revenu net, mais d’au moins 200 fr. entre le 1
er
mai et le 31 décembre 2009, puis d’au moins 1'000 fr. dès le 1
er
janvier 2010.
Entre août 2009 et juin 2013, l’appelant n’a versé aucune pension alimentaire, alors qu’il en aurait eu les moyens, au moins partiellement, accumulant un arriéré de 43'000 fr. dû au Service de prévoyance et d'aide sociale à qui P._ a cédé ses droits le 18 novembre 2009.
Le Service de prévoyance et d'aide sociale a déposé plainte le 10 septembre 2010.
3.
A Lausanne, au chemin [...], le 20 novembre 2010, J._ a déclaré à son épouse : « Je te le dis pour la dernière fois, c’est un ultimatum que je te donne. Si la prochaine fois que je viens chercher les enfants, alors que c’est mon week-end, et qu’ils ne sont pas là et, si j’arrive à savoir où tu es, je viens et, si je dois recourir à la force physique, je le ferai ».
4.
A Lausanne, à l’office de Poste de la Sallaz, le 8 novembre 2010, J._ a encaissé un chèque de ristourne de chauffage, pour un montant de 639 fr. 50, adressé par erreur à son nom en sus de celui de son épouse et distribué dans sa case postale, alors qu’il ne vivait plus dans l’appartement en question depuis avril 2009 et que c’était son épouse qui s’était acquittée des acomptes de frais de chauffage pour la période y relative.
P._ a déposé plainte et s’est constituée partie plaignante demanderesse au civil, sans toutefois chiffrer ses prétentions.
D.
Aux débats d’appel, J._ a reconnu devoir la somme de 43'000 fr. de pensions alimentaires arriérées au 30 juin 2013 et a signé une reconnaissance de dette en faveur du Service de prévoyance et d'aide sociale. | En droit :
1.
Selon l'art. 399 al. 1 CPP, l'appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d'appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l'occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour le faire (art. 382 al. 1 CPP) et contre un jugement d'un tribunal ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel formé par J._ est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l'art. 398 CPP, la juridiction d'appel jouit d'un plein pouvoir d'examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L'appel peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
J._ soutient que le jugement de première instance n’est pas motivé et invoque une violation de son droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101).
Cette question peut en l’occurrence rester ouverte dès lors que la Cour d’appel pénale dispose d’un plein pouvoir de cognition en fait et en droit (art. 398 CPP).
4.
L’appelant conteste s’être rendu coupable de menaces.
4.1
Aux termes de l’art. 180 CP, celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera, sur plainte, puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire (al. 1). La poursuite aura lieu d’office si l’auteur est le conjoint de la victime et que la menace a été commise durant le mariage ou dans l’année qui a suivi le divorce (al. 2 let. a).
La punissabilité de l’auteur dépend de la réalisation de deux conditions : il faut, d’une part, que l’auteur ait émis une menace grave et, d’autre part, que la victime ait été alarmée ou effrayée. Une menace est qualifiée de grave si elle est objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime. Il faut donc se demander si une personne raisonnable, dotée d’une résistance psychologique plus ou moins normale, aurait ressenti la menace comme grave (TF 6B_234/2010 du 4 janvier 2011 c. 3.1; ATF 99 IV 212 c. 1a).
Enfin, la menace est une infraction intentionnelle. L’auteur doit avoir eu l’intention non seulement de proférer des menaces graves, mais aussi d’alarmer ou d’effrayer le destinataire. Le dol éventuel suffit (B. Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3
è
édition, Berne 2010, n. 16 ad art. 180 CP).
4.2
En l’espèce, le prévenu conteste avoir prononcé la phrase litigieuse, soit « Je te le dis pour la dernière fois, c’est un ultimatum que je te donne. Si la prochaine fois que je viens chercher les enfants, alors que c’est mon week-end, et qu’ils ne sont pas là et, si j’arrive à savoir où tu es, je viens et, si je dois recourir à la force physique, je le ferai ». Il n’importe en l’occurrence pas de trancher cette question, dès lors que cette menace conditionnelle ne constitue pas une infraction pour les motifs exposés ci-après.
Cette phrase a été prononcée dans le cadre d’un conflit conjugal exacerbé, alors que l’appelant était, selon la plainte, dehors avec sa fille et la plaignante à une fenêtre. La plaignante a indiqué avoir répondu en répétant à trois reprises « Vas-y menace-moi » « si tu veux je descends même maintenant », ce qui ne constitue pas la réaction de quelqu’un d’immédiatement effrayé. Le prévenu a indiqué qu’il entendait faire respecter son droit de visite et que, le cas échéant, soit s’il le doit, il entendait recourir à la force. Il faisait ainsi dépendre un recours à la force, dont on ignore contre qui elle pouvait s’exercer, à la violation de ses droits de père par la plaignante. Ces mots ne sont ainsi pas suffisamment effrayants pour constituer une menace et il doit être libéré de cette infraction.
4.3
Au vu de ce qui précède, le moyen de l’appelant, bien fondé, doit être admis.
5.
L’appelant soutient que l’infraction d’appropriation illégitime n’est pas réalisée au motif qu’il était encore solidairement débiteur du loyer et qu’il était de ce fait légitimé à encaisser le chèque litigieux.
5.1
Aux termes de l’art. 137 CP, se rend coupable d’appropriation illégitime celui qui, pour se procurer ou pour procurer à un tiers un enrichissement illégitime, se sera approprié une chose mobilière appartenant à autrui, en tant que les conditions prévues aux art. 138 à 140 ne seront pas réalisées (ch. 1). Si l’auteur a trouvé la chose ou si celle-ci est tombée en son pouvoir indépendamment de sa volonté, s’il a agi sans dessein d’enrichissement ou si l’acte a été commis au préjudice des proches ou des familiers, l’infraction ne sera poursuivie que sur plainte (ch. 2).
Il y a appropriation, au sens de cette disposition, lorsque l’auteur incorpore économiquement la chose appartenant à autrui à son propre patrimoine, pour la conserver, la consommer ou l’aliéner; il dispose alors de la chose comme un propriétaire, sans en avoir la qualité. L’appropriation suppose l’exclusion durable du pouvoir de disposer du lésé et l’accaparement de la chose par l’auteur, même à titre temporaire. L’appropriation comporte un aspect subjectif et un aspect objectif : l’auteur doit avoir la volonté, au moins à titre éventuel, d’incorporer la chose à son patrimoine et cette volonté doit se manifester par un comportement extérieurement constatable, qui en est la concrétisation (Corboz, op. cit., nn. 9 et 10 ad art. 137 CP et les références citées).
5.2
En l’espèce, l’appelant a encaissé un chèque de ristourne de chauffage le 8 novembre 2010 pour un montant de 639 fr. 50 alors qu’il ne vivait plus dans l’appartement familial depuis avril 2009. A l’audience du 11 décembre 2012, il s’est reconnu débiteur de cette somme. Entre le 1
er
juillet 2009 et le 30 juin 2010, son épouse payait les loyers et les charges. Le prévenu était peut-être encore débiteur du loyer envers la propriétaire, mais dans les rapports internes du couple il n’était plus débiteur des loyers, son épouse le prenant en charge, ni créancier d’un quelconque montant à ce titre. Par ailleurs, l’appelant avait parfaitement conscience de ce qui précède, dès lors qu’il a justifié s’être approprié cette somme en contrepartie de montants que son épouse aurait perçu à tort.
En conséquence, tant les éléments objectifs que subjectifs de l’infraction d’appropriation illégitime sont réalisés.
5.3
Au vu de ce qui précède, le moyen de l’appelant, mal fondé, doit être rejeté.
6.
L’appelant soutient ne pas s’être rendu coupable de violation d’une obligation d’entretien, faisant valoir qu’il n’a pas les moyens de s’acquitter de ses obligations alimentaires et qu’on ne saurait lui reprocher de n’avoir pas recherché du travail.
6.1
L’art. 217 CP punit d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire, sur plainte, celui qui n’aura pas fourni les aliments ou les subsides qu’il doit en vertu du droit de la famille, quoi qu’il en eût les moyens ou pût les avoir (al. 1). Le droit de porter plainte appartient aussi aux autorités et aux services désignés par les cantons. Il sera exercé compte tenu des intérêts de la famille (al. 2).
D’un point de vue objectif, l’obligation d’entretien est violée lorsque le débiteur ne fournit pas intégralement, à temps et à disposition de la personne habilitée à la recevoir, la prestation d’entretien qu’il doit en vertu du droit de la famille (Corboz, op. cit., n. 14 ad art. 217 CP). En revanche, on ne peut reprocher à l’auteur d’avoir violé son obligation d’entretien que s’il avait les moyens de la remplir ou aurait pu les avoir (Corboz, op. cit., n. 20 ad art. 217 CP). Par là, on entend celui qui, d’une part, ne dispose certes pas de moyens suffisants pour s’acquitter de son obligation, mais qui, d’autre part, ne saisit pas les occasions de gain qui lui sont offertes et qu’il pourrait accepter (ATF 126 IV 131 c. 3a; Message du 26 juin 1985 concernant la modification du code pénal et du code pénal militaire, FF 1985 II 1070).
La capacité économique du débiteur de verser la contribution d’entretien se détermine par analogie avec le droit des poursuites relatif au minimum vital (art. 93 LP [loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et faillite, RS 281.1]; ATF 121 IV 272 c. 3c). Le juge pénal est lié par la contribution d’entretien fixée par le juge civil (ATF 106 IV 36; TF 6B_264/2011 du 19 juillet 2011 c. 2.1.3). En revanche, la question de savoir quelles sont les ressources qu’aurait pu avoir le débiteur d’entretien doit être tranchée par le juge pénal s’agissant d’une condition objective de punissabilité au regard de l’art. 217 CP. Il peut certes se référer à des éléments pris en compte par le juge civil. Il doit cependant concrètement établir la situation financière du débiteur, respectivement celle qui aurait pu être la sienne en faisant les efforts pouvant raisonnablement être exigés de lui.
Déterminer quelles sont les ressources qu’aurait pu avoir le débiteur d’entretien relève de l’appréciation des preuves et de l’établissement des faits (TF 6B_264/2011 du 19 juillet 2011 c. 2.1.3).
6.2
En l’espèce, hormis le montant de 600 fr. versé le 30 juillet 2009 à P._, correspondant à la pension alimentaire due pour les mois de mai à juillet 2009 (P. 7/19 et 7/20), J._ ne s’est jamais acquitté de la pension alimentaire en faveur de ses deux enfants. Il a reconnu devoir au Service de prévoyance et d'aide sociale le montant de 43'000 fr. de pensions alimentaires arriérées au 30 juin 2013 (P. 47). L’obligation d’entretien est violée non seulement lorsque le débiteur n’a pas fourni la prestation, mais également lorsqu’il l’a fournie qu’en partie ou avec retard, sous réserve du retard occasionnel, ce qui n’est pas le cas d’espèce (Dupuis et alii., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 14 ad art. 217 CP).
Il faut ensuite déterminer si J._ avait les moyens de fournir des prestations ou aurait pu les avoir. Compte tenu des montants allégués par l’intéressé, il semble qu’il n’avait pas les moyens de s’acquitter de son obligation d’entretien, à tout le moins depuis que la pension alimentaire s’élève à 1'000 fr. par mois, soit depuis janvier 2010. Il ressort en effet des décomptes de rémunération du W._ qu’il a réalisé un revenu total d’environ 10'000 fr. d’août 2009 à mars 2010 (P. 6/4 à 6/11), soit environ 1'250 fr. par mois. Depuis le mois de mai 2010, les décomptes font état d’un solde négatif (P. 6/13 à 6/18). Depuis lors, l’appelant n’a plus exercé d’activité lucrative et n’a plus perçu de revenu. Il a expliqué vivre grâce à l’aide de sa famille. Partant, il est vrai que l’appelant ne disposait pas de moyens suffisants pour s’acquitter de la pension alimentaire depuis 2010, étant toutefois relevé que même lorsqu’il recevait une somme du W._, il n’en faisait aucunement profiter sa famille.
Il reste donc à examiner si l’appelant a fait des efforts raisonnables pour trouver du travail. Il a fait valoir que son autorisation de séjour avait été suspendue du fait que son épouse avait annoncé son départ de Lausanne pour une adresse non déterminée le 30 avril 2009 et que le 6 janvier 2011 il a été convoqué par le Contrôle des habitants. Toutefois, de nationalité italienne et père de deux enfants suisses, l’intéressé a résidé à Lausanne entre le 20 décembre 1995 et le 30 avril 2009, soit pendant près de 20 ans (P. 5/5). On peine dès lors à comprendre pour quels motifs sa situation n’aurait pas pu être réglée à bref délai, sauf évidemment s’il n’a pas entrepris les démarches nécessaires. Il est actuellement titulaire d’un permis C, de sorte qu’il n’est même pas certain qu’il ait à un moment donné perdu son titre de séjour. Cela étant, il lui appartenait d’entreprendre les démarches nécessaires pour régulariser sa situation de séjour. Au surplus, l’appelant, qui est en bonne santé, n’a entrepris aucune démarche auprès du chômage et n’a effectué que trop peu de recherches d’emploi. Pour l’année 2010, sur la base des pièces au dossier, il n’aurait en effet postulé qu’à huit reprises (P. 7/1 à 7/6, P. 7/9) et en limitant volontairement son choix à des postes de conseiller en assurance (P. 12/1) alors que, compte tenu de son âge, de sa formation et des emplois qu’il a exercés précédemment, le spectre d’emploi qu’il peut occuper est important. Le dossier ne contient au surplus aucune pièce relative à des recherches d’emploi en 2011 et seulement quatre en 2012 (P. 29). Il a déclaré aux débats d’appel avoir envoyé au mois de mai 2013 une vingtaine d’offres d’emploi et avoir reçu six réponses négatives, mais il n’a produit aucun document à l’appui de ses déclarations.
Ainsi, même si l'appelant ne disposait pas de moyens suffisants pour s’acquitter de l'entier des aliments dus, il n'en demeure pas moins qu’il n’a pas entrepris tous les efforts raisonnables que l’on pouvait attendre de lui pour trouver du travail. Dans ces circonstances, il s’est rendu coupable de violation d’une obligation d’entretien au sens de l’art. 217 CP.
6.3
Au vu de ce qui précède, mal fondé, le moyen de l’appelant doit être rejeté.
7.
L’appelant a conclu, à titre plus subsidiaire, à sa condamnation à une peine clémente avec sursis. Compte tenu de la libération de l’infraction de menaces, la peine infligée par le premier juge doit être revue.
7.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente); du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 129 IV 6 c. 6.1 p. 20, TF 6B_271/2011 du 31 mai 2011 c. 2.2.2, TF 6B_722/2010 du 17 février 2011 c. 1.2.2).
7.2
Selon l'art. 41 CP, le juge peut prononcer une peine privative de liberté ferme de moins de six mois uniquement si les conditions du sursis à l'exécution de la peine (art. 42 CP) ne sont pas réunies et s'il y a lieu d'admettre que ni une peine pécuniaire ni un travail d'intérêt général ne peuvent être exécutés.
L'art. 41 al. 1 CP prévoit deux conditions cumulatives. Il faut d'abord que les conditions du sursis à l'exécution de la peine ne soient pas réunies. Le droit au sursis s'examine selon les critères posés à l'art. 42 CP qui ont été rappelés dans l'arrêt publié aux ATF 135 IV 180 c. 2.1. Il y est renvoyé. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 5 c. 4.2.2). La seconde condition reflète la subsidiarité de la peine privative de liberté. Le juge ne peut prononcer une peine privative de liberté de moins de six mois que s'il y a lieu d'admettre que ni une peine pécuniaire ni un travail d'intérêt général ne peuvent être exécutés (art. 41 al. 1 CP). Dans un arrêt 6B_599/2011 du 16 mars 2012, le Tribunal fédéral dit que le juge doit motiver le choix de la courte peine privative de liberté ferme de manière circonstanciée. Il ne lui suffit pas d'expliquer pourquoi une peine privative de liberté ferme semble adéquate, mais il devra également mentionner clairement en quoi les conditions du sursis ne sont pas réunies, en quoi il y a lieu d'admettre que la peine pécuniaire ne paraît pas exécutable et en quoi un travail d'intérêt général ne semble pas non plus exécutable (c. 3.1
in fine
et les références citées). Une peine pécuniaire peut être exclue pour des motifs de prévention spéciale (TF 6B_128/2011 du 14 juin 2011, c. 3.4) ou parce qu'elle prive le prévenu du nécessaire, voire de l'indispensable (ATF 134 IV 97 c. 5.2.3).
Le juge doit apprécier si l'intéressé est disposé à effectuer un travail d'intérêt général, mais aussi s'il y est apte et en est capable. L'impossibilité doit être liée à la personne du condamné, et non pas à des facteurs extérieurs tels que l'absence de place de travail d'intérêt général. Par exemple, le condamné peut être incapable d'accomplir un travail d'intérêt général compte tenu notamment de son emploi du temps, ou lorsqu'il le refuse (Dupuis et alii., op. cit., n. 4 ad art. 41). En outre, le prononcé d'un travail d'intérêt général n'est justifié qu'autant que l'on puisse au moins prévoir que l'intéressé pourra, le cas échéant, après l'exécution, poursuivre son évolution en Suisse (arrêt 6B_541/2007 du 13 mai 2008, c. 4.2.4). Le juge doit motiver le choix de la courte peine privative de liberté ferme de manière circonstanciée (art. 41 al. 2 CP). Il ne lui suffit pas d'expliquer pourquoi une peine privative de liberté ferme semble adéquate, mais il devra également mentionner clairement en quoi les conditions du sursis ne sont pas réunies, en quoi il y a lieu d'admettre que la peine pécuniaire ne paraît pas exécutable et en quoi un travail d'intérêt général ne semble pas non plus exécutable (
ATF 134 IV 60
c. 8.4 p. 80).
7.3
En l’espèce, J._ s’est rendu coupable de violation d’une obligation d’entretien et d’appropriation illégitime.
A charge de l’appelant, il convient de tenir compte du concours d’infractions, mais également de l’absence totale de prise de conscience et du fait qu'il s'est obstiné dans la négation des faits. Il n'existe guère d'élément à sa décharge; il sera néanmoins tenu compte de la modicité des infractions à sanctionner. La culpabilité de l'appelant doit être qualifiée de moyenne. En conséquence, une peine de trois mois et demi est adéquate pour sanctionner les agissements de J._.
Compte tenu de l’absence totale de prise de conscience, de ses dénégations et du fait que rien n’indique qu’il va enfin se prendre en charge et chercher activement du travail, le pronostic quant au comportement futur de l’appelant ne peut être que défavorable. Le sursis est donc exclu.
Enfin, s’agissant du type de peine à infliger, on peut d’emblée exclure la peine pécuniaire, dès lors que l’appelant ne travaille pas et qu’il vit aux crochets de ses proches. L’intéressé est certes en bonne santé et donc apte à travailler, il persiste à ne rien faire depuis de nombreuses années de sa vie et il n’a rien entrepris même depuis le jugement de première instance, qui n’a eu aucun effet sur lui. Les plaintes pénales et la procédure en cours n’ont ainsi aucune influence sur lui. Il est réfractaire à toute forme de perspective de sanctions, mais également à toute forme d’activités. Dans ces circonstances et pour des motifs de prévention, seule une peine privative de liberté entre en considération.
8.
En définitive, l’appel formé par J._ doit être partiellement admis.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel doivent être mis pour deux tiers à la charge de l’appelant, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (art. 428 al. 1 CPP).
Au vu des opérations effectuées en appel, il se justifie d'arrêter à
2’386 fr. 80, TVA et débours compris, l'indemnité allouée au défenseur d'office de l'appelant et à 1'956 fr. 95, TVA et débours compris, l'indemnité allouée au conseil d'office de l'intimée. L'appelant ne sera tenu de rembourser à l’Etat les deux tiers des montants des indemnités en faveur de son défenseur d'office et du conseil d'office de l'intimée que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bd38957b-94d6-418b-8488-831dab48d8c5 | En fait :
A.
Par jugement du 10 mars 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de l’Est vaudois a, notamment, constaté que M._ s’est rendu coupable de tentative d’induction de la justice en erreur, de mise d’un véhicule automobile à la disposition d’un conducteur sans permis requis, de conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis et de violation des règles de la circulation routière (IV), l’a condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à 10 fr, peine partiellement complémentaire à celle du 4 juin 2013 prononcée par le Tribunal de police de l’arrondissement de l’Est vaudois, ainsi qu’à une amende de 200 fr., la peine privative de liberté de substitution étant de 2 jours (V), a renoncé à révoquer les sursis octroyés à M._ le 16 avril 2012 par le Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois et le 4 juin 2013 par le Tribunal de police de l’arrondissement de l’Est vaudois, mais a donné un avertissement au prévenu et a prolongé d’un an le délai d’épreuve (VII) et a mis une partie des frais de justice, par 5’000 fr., y compris l’indemnité allouée à son défenseur d’office, par 2'150 fr., à la charge de M._ (XVI).
B.
M._
et le Ministère public ont formé appel contre ce jugement par courriers respectifs du 13 mars 2015. X._ en a fait de même par courrier du 16 mars 2015.
Le Ministère public et X._ ont, par courriers respectifs des 10 et 27 avril 2015, retiré leur appel, ce dont le Président a pris acte par lettres des 23 et 28 avril 2015.
Par déclaration d’appel motivée du 1
er
avril 2015, M._ a conclu à la réforme du jugement en ce sens qu’il est exempté de toute peine en relation avec le chef d’accusation de tentative d’induction de la justice en erreur et qu’il est condamné à une peine pécuniaire inférieure à 60 jours-amende.
A l’audience d’appel, M._ a confirmé ses conclusions, se référant entièrement à sa déclaration d’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Ressortissant suisse, M._ est né le 19 octobre 1986 à Bagdad, en Irak. Célibataire et sans enfant, il émarge à l’aide social et est au bénéfice à ce titre d’une prestation financière de 2'360 francs. Il ne perçoit cependant que 882 fr. 50 par mois, certaines charges étant payées par le RI. Il a travaillé par le passé dans l’hôtellerie, mais est actuellement à la recherche d’un emploi.
Son casier judiciaire comporte les condamnations suivantes :
- 16.04.2012, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois, Vevey, vol, peine pécuniaire 40 jours-amende à 30 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans ;
- 04.06.2013, Tribunal de police de l’Est vaudois, Vevey, lésions corporelles simples, peine pécuniaire 70 jours-amende à 30 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans, peine complémentaire au jugement du 16 avril 2012 du Ministère public de l’arrondissement e l’Est vaudois.
L’extrait du fichier ADMAS mentionne trois retraits de permis, d’un mois en 2012 pour inattention et violation des devoirs en cas d’accident, d’un mois en 2014 pour ébriété et de quatre mois également en 2014 pour conduite malgré un retrait, cette dernière mesure étant consécutive aux faits de la présente cause.
2.
2.1
A la Tour-de-Peilz, le 14 avril 2013, vers 19h15, M._ a confié son véhicule à X._, alors qu’il savait qu’elle n’était pas titulaire du permis de conduire requis. Faisant preuve d’inattention, X._ a percuté la moto de C._ qui circulait normalement. Celui-ci a été désarçonné et a chuté sur la chaussée. Il a été victime de multiples fractures au niveau des membres inférieurs, lesquelles ont rendu nécessaire l’implantation d’une prothèse totale de la hanche droite. Il a été en incapacité de travail partielle du 23 septembre 2013 au 7 avril 2014. Immédiatement après l’accident, X._ a tenté de convaincre M._ de déclarer mensongèrement aux autorités qu’il était le conducteur de la voiture au moment de l’accident. Entendu le soir même par la police, M._ s’est annoncé comme conducteur du véhicule en question, avant de se rétracter au cours de cette même audition.
2.2
A Clarens, le 14 mars 2014, M._ a conduit son véhicule automobile alors que le permis de conduire lui avait été retiré et a franchi la ligne de sécurité avant d’emprunter une route interdite à la circulation. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2
e
éd., Bâle 2014, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
M._ ne remet en cause ni les faits qui lui sont reprochés, ni leur qualification. Il soutient qu’il aurait dû être exempté de toute peine en relation avec le chef d’accusation de tentative d’induction de la justice en erreur, en application de l’art. 308 al. 1
in fine
CP, au lieu de bénéficier seulement d’une atténuation.
3.1
Selon l’art. 304 ch. 1 CP, se rend coupable d’induction de la justice en erreur celui qui aura dénoncé à l’autorité une infraction qu’il savait n’avoir pas été commise (al. 1) ou qui se sera faussement accusé auprès de l’autorité d’avoir commis une infraction (al. 2). Dans les cas de très peu de gravité, le juge pourra exempter le délinquant de toute peine (ch. 2).
Aux termes de l’art. 308 al. 1 CP, si l’auteur d’un crime ou d’un délit prévu aux art. 303, 304, 306 et 307 a rectifié sa fausse dénonciation ou sa fausse déclaration de son propre mouvement et avant qu’il en soit résulté un préjudice pour les droits d’autrui, le juge pourra atténuer la peine (art. 48a CP); il pourra aussi exempter le délinquant de toute peine.
3.2
En l’occurrence, l’accident de la circulation a eu lieu le 14 avril 2013 vers 19h15. En page 5 de leur rapport, les enquêteurs indiquent que M._ a été entendu le soir même dès 21h45 (PV aud. 1). Il n’est pas mentionné qu’il y aurait eu une autre déposition, même si le rapport relève, en page 3 sous la rubrique « constat », que « dans un premier temps, M. M._ s’est annoncé comme conducteur de sa voiture ». Il ressort du procès-verbal d’audition 1 que le prénommé a été entendu comme « prévenu » en raison d’un « accident de la circulation » pour « infractions à la LCR ». Interrogé sur les circonstances de l’accident, il a commencé par décrire son début de journée, puis a expliqué, sur une dizaine de lignes, qu’il avait pris le volant et qu’il avait conduit jusqu’au moment de l’accident (R. 4). Immédiatement après, sans interpellation et dans la même réponse, il a déclaré : « A ce moment de l’audition, je veux vous dire la vérité. En fait, c’est mon amie qui conduisait ».
L’appelant fait valoir à juste titre que la rétractation spontanée est intervenue immédiatement après l’autoaccusation mensongère, soit au cours de la même audition, sans qu’il en soit résulté un préjudice pour les droits d’autrui et que ces circonstances justifient une exemption de peine tant au regard de l’art. 304 ch. 2 CP (cas de très peu de gravité) que de l’art. 308 CP.
En réalité, il est même douteux que l’infraction de tentative d’induction de la justice en erreur soit réalisée. Tout d’abord, l’art. 304 ch. 1 al. 2 CP ne s’applique pas à celui qui, comme dans le cas d’espèce, est déjà poursuivi par les autorités et qui, de guerre lasse, finit par avouer un crime qu’il n’a pas commis (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 14 ad art. 304 CPP et la référence à l’ATF 111 IV 159 c. 1a, JT 1985 I 437). Par ailleurs, celui qui se rétracte lors de son audition avant la signature du procès-verbal, n’a pas encore procédé à une dénonciation, de sorte qu’il ne tombe pas sous le coup de l’art. 304 CP (Delnon/Rüdy, Basler Kommentar, Strafrecht II, 2
e
éd., Bâle 2007, n. 8 ad art. 304 CP). Or, il ne se justifie pas de traiter différemment celui qui, au cours de la même audition, se rétracte après une autoaccusation mensongère. Dans une affaire identique, la Cour de cassation pénale du Canton de Neuchâtel a également admis que celui qui se rétracte au cours du même interrogatoire de police ne tombe pas sous le coup de l’art. 304 ch. 1 al. 2 CP, en appliquant par analogie les principes de la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de faux témoignage (RJN 1995 p. 94). Il s’ensuit, en l’occurrence, que ce n’est pas l’exemption de peine qui aurait dû être prononcée en faveur de M._, comme le voudrait celui-ci, mais bien la libération du chef d’accusation d’instigation de la justice en erreur.
Or, l’art. 404 al. 2 CPP permet d’examiner d’office en faveur du prévenu des points qui ne sont pas attaqués et d’aller au-delà des conclusions des parties dans le sens d’une amélioration de la situation du prévenu (Moreillon/Parein-Reymond, Petit commentaire, Code de procédure pénale, Bâle 2013, n. 5 ad art. 404 CPP). Partant, même si l’appelant a conclu à l’exemption de peine, il y a lieu de prononcer sa libération du chef d’accusation de tentative d’induction de la justice en erreur. Le jugement de première instance sera donc réformé en ce sens.
4.
M._ conclut à la réduction de la peine qui lui a été infligée. Celle-ci doit en effet être revue en raison de l’abandon du chef d’accusation de tentative d’induction de la justice en erreur.
4.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_335/2012 du 13 août 2012 c. 1.1 et les références citées).
4.2
En l’espèce, M._ doit être condamné, en définitive, pour mise d’un véhicule automobile à la disposition d’un conducteur sans permis requis, de conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis et de violation des règles de la circulation routière. Le prénommé en est à sa troisième condamnation en trois ans. Ses précédentes condamnations à deux peines pécuniaires de 40 et 70 jours-amende à 30 fr., avec sursis pendant 2 ans, n’ont eu aucun effet dissuasif sur lui, pas plus que les retraits de permis dont il a fait l’objet. Il a par ailleurs récidivé en cours d’enquête et dans le même domaine d’infractions, alors qu’il savait qu’une procédure pénale était ouverte contre lui pour infraction à la LCR notamment et qu’il était sous le coup d’un retrait de permis. Outre ses mauvais antécédents et la récidive, on tiendra compte, à charge, du concours d’infractions. A décharge, on retiendra, à l’instar du premier juge, les aveux complets et les excuses auprès de la victime. Enfin, il y a lieu de tenir compte du fait que la peine est partiellement complémentaire à celle prononcée le 4 juin 2013.
En conséquence, a
u vu de ce qui précède, et compte tenu en particulier de l'abandon de l’infraction de tentative d’induction de la justice en erreur (c. 3.2
supra
)
, il convient d'infliger à M._ une peine de 50 jours-amende, le poids de l’abandon de cette infraction sur la peine infligée en première instance ayant déjà fait l’objet d’une atténuation par le premier juge en application de l’art. 308 CP. Le montant du jour-amende, fixé à 10 fr., est justifié, au vu de la situation financière précaire du prévenu (let. C/1 p. 8
supra
), de sorte qu’il peut être confirmé.
Le caractère ferme de la peine – non contesté – n’est pas critiquable, dans la mesure où les précédentes peines pécuniaires avec sursis n’ont eu aucun effet dissuasif sur le prévenu, qui a, comme on l’a relevé ci-dessus, récidivé en cours d’enquête, alors qu’il savait qu’une procédure pénale était ouverte contre lui.
4.3
Tant l'amende de 200 fr. que la peine privative de liberté de substitution de deux jours réprimant la contravention à la LCR, qui ne sont pas remises en cause, sont adéquates et peuvent être confirmées.
5.
En conclusion, l'appel est admis et
le jugement attaqué modifié dans le sens des considérants qui précèdent.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel
seront laissés à la charge de l’Etat
. Outre l'émolument, ces frais comprennent l’indemnité allouée au défenseur d’office de l’appelant, qui sera fixée à 1'014 fr. 75, TVA et débours compris, selon liste d’opérations produite (pièce 66). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bd854821-e6fe-492b-9c23-9acf3fe2dd1e | En fait :
A.
Par jugement du 2 décembre 2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Côte a libéré U._ des chefs d’accusation de lésions corporelles simples qualifiées, injure, menaces qualifiées, contrainte sexuelle et viol (I), a constaté que U._ s’est rendu coupable de lésions corporelles simples (II), l’a condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 50 fr. (III), a suspendu l’exécution de la peine et fixé au condamné un délai d'épreuve de 3 ans (IV), a condamné en outre U._ à une amende de 300 fr. à titre de sanction immédiate, convertible en 6 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif dans le délai imparti (V), a renoncé à révoquer le sursis octroyé à U._ le 13 octobre 2011 par le Ministère public de l’arrondissement de La Côte pour violation grave des règles de la circulation routière (VI), a dit que U._ doit immédiat paiement à I._ de la somme de 1'000 fr. à titre d’indemnité pour tort moral (VII), a arrêté l'indemnité due au conseil d’office de la partie plaignante à 9'016 fr. 30, sous déduction d’un montant intermédiaire de 2'800 fr. d’ores et déjà versé (VIII), a mis une partie des frais de la cause, arrêtés à 3'747 fr. 80, à la charge de U._ et laissé le solde à la charge de l’Etat (IX), et a dit que l’Etat de Vaud doit verser à U._ une indemnité de 15'400 fr. pour l’exercice de ses droits de procédure (X).
B.
Par annonce du 3 décembre 2014, puis déclaration motivée du 23 décembre suivant, I._ a formé appel contre ce jugement, en concluant à sa réforme en ce sens que U._ est reconnu coupable de lésions corporelles simples qualifiées, injure, menaces qualifiées, contrainte sexuelle ainsi que viol, et qu’il est reconnu son débiteur de la somme de 8'000 fr. avec intérêts à 5% l’an dès le 10 mai 2012 à titre d’indemnité pour tort moral.
Par annonce du 5 décembre 2014, puis déclaration du 11 décembre suivant, le Ministère public a également formé appel contre ce jugement, en concluant à sa réforme en ce sens que U._ est reconnu coupable de lésions corporelles simples qualifiées, injure, menaces qualifiées, contrainte sexuelle et viol, qu’il est condamné à une peine privative de liberté de 20 mois à titre ferme, qu’il est en outre condamné à une peine pécuniaire de 45 jours-amende à 50 fr. le jour, que le sursis qui lui a été accordé le 13 octobre 2011 est révoqué, les frais de la cause étant mis à sa charge et sa demande d’indemnité rejetée.
Par actes des 5 et 24 décembre 2014, U._ a également contesté le jugement précité. Il a conclu, principalement, à ce qu’il soit libéré du chef d’accusation de lésions corporelles simples, qu’il ne soit pas condamné à payer une indemnité de tort moral à la partie plaignante, qu’aucun frais judiciaire ne soit mis à sa charge et que l’Etat doive lui verser une indemnité de l’art. 429 CPP d’un montant de 20'536 fr. 45 pour la procédure de première instance et d’un montant qui sera précisé ultérieurement pour la procédure d’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Originaire d’Arménie, U._ est né le [...] 1977 à [...], en Azerbaïdjan. Il est l’aîné d’une fratrie de deux enfants. Après avoir suivi sa scolarité obligatoire jusqu’à l’âge de douze ans dans son pays natal, il est parti vivre avec sa famille en Arménie jusqu’à l’âge de seize ans, puis à Moscou. A l’âge de dix-huit ans, il est allé étudier aux Etats-Unis, où il a obtenu un Bachelor et un MBA en business. Il a ensuite travaillé dans une compagnie américaine active dans le domaine des produits dentaires. Souhaitant s’installer en Europe, il a obtenu de son entreprise d’être transféré en Suisse en 2005. En janvier 2010, il a trouvé un nouvel emploi à Nyon en tant que directeur des ventes au sein de l’entreprise [...], société pour laquelle il a travaillé jusqu’en avril 2011. C’est sur ce lieu de travail qu’il a fait la connaissance de la plaignante, I._. Après une période de chômage de deux ans, il a retrouvé un travail chez [...] SA en avril 2013 comme directeur des ventes. En raison d’une restructuration, il a toutefois dû quitter cet emploi en juin 2014. Il a alors connu une nouvelle période de chômage; ses indemnités journalières s’élevaient à 323 fr., représentant environ 6'000 fr. par mois. Depuis le 1
er
janvier 2015, le prévenu travaille au sein de l’entreprise [...] AG. Son salaire annuel brut s’élève à 136’000 fr., bonus non compris. S’agissant de sa situation personnelle, U._ a rencontré par le biais d’un site internet [...], qu’il a épousée en septembre 2014 et avec qui il a eu un enfant, né le 6 mars 2015. Cette dernière ne travaille pas. Le loyer du prévenu s’élève à 2'450 fr. par mois et sa prime d’assurance maladie à 220 francs. Il a des arriérés d’impôts qu’il rembourse à hauteur de 500 fr. par mois. Il n’a pas d’autres dettes et n’a pas de fortune.
Le casier judiciaire suisse de U._ comporte l’inscription suivante : 13 octobre 2011, Ministère public de l’arrondissement de La Côte, Morges, violation grave des règles de la circulation routière, peine pécuniaire 25 jours-amende à 40 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans, amende 400 francs.
2.
A [...], Chemin [...], au domicile commun des parties, le 8 mai 2012 vers 23h00, au retour d’une soirée avec des amis au cours de laquelle de l’alcool avait été consommé, une dispute a éclaté entre U._ et I._, après que cette dernière a découvert que le numéro de portable de l’ancienne compagne du prévenu avait été réactivé sur le compte Skype de ce dernier. Excédé par la réaction de son amie qui était très en colère, U._ l’a saisie par les cheveux tout en la secouant, l’a projetée sur le canapé du salon et lui a asséné plusieurs coups de poing sur les bras, les jambes ainsi que dans le dos. Des coups ont ensuite été échangés dans le couple.
I._ a finalement quitté l’appartement et s’est rendue à la police municipale de Morges pour demander conseil sur les suites à donner à son agression. Toutefois, aucune plainte n’a été déposée à ce moment.
Vers 01h30, la jeune femme a décidé de regagner son domicile, le prévenu le lui ayant notamment demandé. En arrivant, elle lui a indiqué qu’elle souhaitait reprendre ses affaires. Une nouvelle dispute a alors éclaté, ensuite de laquelle U._ a injurié sa compagne en la traitant de « pute » et de « salope », puis lui a asséné un coup de poing sur la tête et au nez, avant de s’enfermer dans sa chambre pour dormir.
Plus tard dans la nuit, le couple a eu des rapports intimes.
Le matin vers 08h00, I._ a finalement quitté l’appartement pour se rendre à la police et y déposer plainte. Elle s’est ensuite rendue à l’Hôpital de Morges pour l’établissement d’un constat de coups et blessures. Selon le certificat médical établi le 9 mai 2012, la plaignante présentait une tuméfaction et un hématome au visage, ainsi qu’un hématome en regard de l’arrête du nez, différents hématomes aux bras et aux poignets, ainsi que de multiples hématomes aux jambes et aux fesses. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels d’I._, de U._ et du Ministère public sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
Tant la partie plaignante que le Ministère public contestent la libération du prévenu des chefs d’accusation de lésions corporelles simples qualifiées, injure, menaces qualifiées, contrainte sexuelle et viol. Ils font grief aux premiers juges d’avoir apprécié de manière erronée les faits et considèrent qu’il existe suffisamment d’éléments au dossier pour établir la culpabilité du prévenu.
Pour sa part, U._ soutient qu’il aurait dû être également libéré de l’infraction de lésions corporelles simples, en application du principe
in dubio pro reo
.
3.1
3.1.1
A teneur de l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d’innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU Il (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1). Comme règle d’appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 la 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 précité, c. 2.2.2).
3.1.2
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011,
n. 19 ad art. 398 CPP).
3.2
3.2.1
Confrontés à des déclarations divergentes, les premiers juges ont suivi la version de la partie plaignante s’agissant des violences physiques qu’elle avait subies après la dispute qui a éclaté lorsque le couple est rentré du restaurant. Ils ont ainsi retenu que le prévenu, qui avait perdu son sang-froid, s’en était pris physiquement à sa compagne, l’avait empoignée fortement, avant de la repousser violemment (jgt., p. 20).
3.2.2
Le prévenu conteste avoir frappé sa compagne. En substance, il soutient que la plaignante, qui aurait une tendance à la manipulation et à la fabulation, se serait elle-même infligée des coups ou aurait demandé à un tiers de les lui infliger pour se venger de lui.
En l’espèce, il est admis qu’une dispute a éclaté au domicile du couple lorsque la plaignante a trouvé, sur l’ordinateur portable de son ami, le numéro de téléphone de l’ex-campagne de celui-ci et avec laquelle le couple avait fait ménage à trois pendant quelques mois. Les blessures de la plaignante sont attestées non seulement par le certificat médical établi le lendemain des faits par le Dr [...] (P. 6), mais également par des photographies (P. 13); ces documents attestent objectivement d’un tableau lésionnel révélateur de violences domestiques, à savoir d’une tuméfaction et d’un hématome au visage ainsi que de divers hématomes en regard de l’arrête du nez, aux bras ainsi qu’aux poignets, et de multiples hématomes aux jambes et aux fesses. La voisine du couple a fait état de fréquentes bagarres et du fait qu’elle entendait la plaignante crier fort « au secours »; elle a également pu constater des bleus au niveau du visage de cette dernière après la dernière bagarre (PV aud. 3). Quant au mari de la plaignante, il a expliqué qu’il avait vu celle-ci le lendemain des faits et qu’elle présentait des bleus sur les bras ainsi qu’à d’autres endroits (PV aud. 4, p. 3).
La version soutenue par le prévenu selon laquelle la plaignante se serait infligée elle-même des coups doit être écartée, les multiples hématomes constatés n’étant pas compatibles avec des actes d’automutilation. De plus, compte tenu de la différence de corpulence entre les parties – la plaignante étant très menue et fragile, le prévenu de taille imposante –, les explications de U._ selon lesquelles I._ aurait commencé par le frapper et il se serait contenté de se défendre, ne peuvent à l’évidence être suivies. Lors des débats de première instance, le prévenu a certes affirmé avoir montré à la police ses blessures, à savoir des traces sur sa joue droite ainsi qu’à l’intérieur de son genou droit (jgt., p. 4); toutefois, lors de son audition par la police le 9 mai 2012, il a uniquement déclaré avoir été frappé à la hauteur du genou gauche (P. 4, p. 6). De plus, les agents n’ont relevé aucune trace et aucun certificat médical n’a été établi.
Sur le vu de ce qui précède, les déclarations de la plaignante, qui sont crédibles et corroborées par plusieurs éléments du dossier, doivent être suivies. Avec le tribunal correctionnel, il faut ainsi retenir qu’ensuite des reproches exprimés par I._, le prévenu a perdu son sang froid, s’en est pris physiquement à elle, l’a empoignée fortement, puis comme elle se débattait, l’a violemment repoussée. En outre, au vu du certificat médical et des photographies au dossier, il faut admettre, ce que les premiers juges ont omis de discuter, que le prévenu a également asséné un coup de poing sur la tête et au nez de sa compagne, lorsque cette dernière est rentrée du poste de police et lui a indiqué qu’elle souhaitait reprendre ses affaires.
Par conséquent, U._ doit être reconnu coupable de lésions corporelles simples, les éléments constitutifs de cette infraction étant réunis. De plus, dans la mesure où le couple faisait ménage commun, il s’agit de lésions corporelles simples qualifiées au sens de l’art. 123 ch. 2 al. 5 CP. En effet, pour que cette circonstance soit réalisée, il n’est pas nécessaire que les violences aient eu lieu à réitérées reprises, comme l’ont retenu à tort les premiers juges.
Sur ce point, l’appel du prévenu doit être rejeté, et celui de la plaignante et du Ministère public admis.
3.3
3.3.1
S’agissant des injures, les premiers juges ne les ont pas retenues pour le motif qu’ils ignoraient leur contenu et si elles avaient été proférées de manière réciproque (jgt., p. 21).
3.3.2
La partie plaignante et le Ministère public contestent cette appréciation.
En l’occurrence, le vocabulaire grossier et vulgaire employé par le prévenu au sujet de sa compagne ressort de ses messages adressés à [...], le mari de celle-ci (P. 32 et 49). Certes, le prévenu a affirmé, lors de son audition par la police juste après les faits, que sa compagne était devenue hystérique et incontrôlable; il n’a toutefois pas déclaré que cette dernière l’avait insulté (P. 4, p. 6). Aux débats de première instance, il a confirmé qu’il y avait eu d’autres disputes où I._ et lui s’étaient injuriés réciproquement; il n’a cependant pas fait état d’insultes lors de la nuit du 8-9 mai 2012 (jgt., p. 6). Ce n’est que sur question du Ministère public qu’il a indiqué que la plaignante l’avait insulté, sans toutefois indiquer les termes employés par cette dernière (jgt., p. 6).
Dans ces circonstances, il y a lieu de s’en tenir aux déclarations de la plaignante et retenir que le prévenu l’a traitée de « pute » et de « salope » lorsqu’elle est rentrée du poste de police, les termes employés étant suffisamment précis. Au surplus, aucun élément au dossier n’indique que le prévenu se serait contenté de riposter aux paroles de sa compagne.
En conséquence, U._ doit être reconnu coupable d’injure également, les éléments constitutifs de cette infraction étant réalisés.
Les appels d’I._ et du Ministère public doivent donc être admis sur ce point.
3.4
3.4.1
S’agissant des violences sexuelles, les premiers juges ont écarté la version de la partie plaignante. Au vu de l’absence d’éléments probants au dossier, notamment d’un constat gynécologique, et des explications peu convaincantes de l’intéressée, ils ont retenu que U._, après un retour au calme, était sorti de sa chambre et avait persuadé I._ d’entretenir des relations sexuelles. De plus, ils ont relevé qu’aucun élément tangible au dossier ne permettait de considérer que le prévenu avait usé de contrainte à l’égard de sa compagne pour parvenir à ses fins (jgt., p. 23-25). Enfin, s’agissant des menaces de mort, les premiers juges ont considéré qu’aucun élément au dossier ne corroborait la version de la victime (jgt., p. 25).
3.4.2
En l’occurrence, les faits décrits par la plaignante, en particulier devant les premiers juges (jgt., p. 10), sont d’une violence extrême. La cour de céans peine dès lors à comprendre qu’après un tel épisode, I._, malgré son état d’épuisement, ait pu rester dans l’appartement et n’ait pas fui. Il paraît également surprenant qu’elle soit parvenue, dans de telles circonstances, à s’endormir non loin de son agresseur.
Ses déclarations ne sont en outre corroborées par aucun élément du dossier. Ainsi, alors même qu’avant de se rendre à l’Hôpital de Morges, elle avait décrit à la police une fellation imposée ainsi qu’un viol, elle n’a pas parlé de ces faits aux médecins, qui n’ont dès lors procédé à aucun examen gynécologique. Par ailleurs, le constat de coups et blessures ne fait pas état de lésions compatibles avec un viol, telles que des hématomes à l’intérieur des cuisses ou des marques démontrant que le prévenu aurait retenu sa campagne ou qu’il l’aurait saisie au niveau du cou, comme celle-ci l’a affirmé. Quant au certificat médical établi par le psychiatre de la plaignante (P. 49), bien qu’il atteste d’un état de stress post-traumatique, il relève que la symptomatologie est «
clairement en rapport avec les violences subies en 2011 et 2012
»; l’épisode de la nuit du 8-9 mai 2012 n’explique donc pas à lui seul ce traumatisme.
En outre, les explications de la plaignante selon lesquelles elle n’avait pas parlé du viol aux médecins en raison de son état de fatigue et des douleurs qu’elle ressentait, ne sont pas convaincantes. Il est également surprenant que son corps n’ait pas présenté plus de traces de coups compte tenu de la violence physique dénoncée. Au surplus, le prévenu a admis avoir saisi sa compagne au poignet lors de la première dispute, ce qui justifie les marques à cet endroit.
U._ est certes décrit par la plaignante et par son ancienne amie comme un pervers narcissique (cf. PV aud. 8). Sa manière de se présenter comme une victime est en outre détestable. Il n’en reste pas moins que, comme l’ont relevé les premiers juges, les déclarations de la plaignante ont varié s’agissant des violences sexuelles subies. En outre, un témoin a déclaré qu’elle avait voulu influencer son témoignage (PV aud. 9). Enfin, les accusations doivent être replacées dans le cadre d’une relation amoureuse houleuse.
Sur le vu de ce qui précède, notamment du déroulement de la soirée, de l’absence de dénonciation auprès du corps médical et des déclarations fluctuantes de la plaignante, il subsiste un doute sérieux quant à la réalité des violences sexuelles subies par cette dernière, qui doit dès lors conduire à la libération du prévenu des chefs d’accusation de contrainte sexuelle et viol. Il en va de même pour les menaces de mort, dès lors qu’elles auraient été proférées dans le cadre des violences sexuelles.
Les appels de la partie plaignante et du Ministère public doivent en conséquence être rejetés sur ce point.
4.
Il convient d’examiner la peine à infliger au prévenu.
4.1
4.1.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1; 129 IV 6 c. 6.1).
4.1.2
Selon l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l’exécution d’une peine pécuniaire, d’un travail d’intérêt général ou d’une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu’une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l’auteur d’autres crimes ou délits.
Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement (ATF
134 IV 1 c. 4.2.1). Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (TF 6B_492/2008 du 19 mai 2009 c. 3.1.2; ATF 134 IV 1 c. 4.2.2).
4.1.3
En vertu de l'art. 46 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel (al. 1
re
phr.). S'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation (al. 2, 1
re
phr.).
La commission d'un crime ou d'un délit durant le délai d'épreuve n'entraîne pas nécessairement une révocation du sursis. Seul un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné peut justifier la révocation. A défaut d'un pronostic défavorable, le juge doit renoncer à celle-ci. Autrement dit, la révocation ne peut être prononcée que si la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve (ATF
134 IV 140 c. 4.2 et 4.3; TF 6B_163/2011 du 24 novembre 2011 c. 3.2).
4.2
4.2.1
En l’espèce, la culpabilité de U._ n’est pas négligeable. Il s’est rendu coupable de lésions corporelles simples qualifiées, d’injure et de menaces qualifiées. Se laissant emporter par ses émotions, il n’a pas hésité à s’en prendre violemment à sa compagne, corporellement très menue et déjà fragilisée par une relation sentimentale tumultueuse. Sa manière de se positionner en victime est détestable et ses dénégations démontrent une absence de prise de conscience. Les infractions sont en concours. A décharge, il sera tenu compte, à l’instar des premiers juges, de l’attitude de la plaignante qui est à l’origine de la dispute du couple ainsi que de la situation professionnelle et personnelle stable du prévenu, lequel est désormais père d’un petit garçon.
Sur le vu de ce qui précède, une peine pécuniaire de 70 jours-amende réprime adéquatement les agissements de U._. Compte tenu de sa situation financière actuelle (cf. lettre C chiffre 1), le montant du jour-amende doit être arrêté à 70 francs.
4.2.2
Malgré un antécédent en octobre 2011 pour violation des règles de la circulation routière et l’absence de prise de conscience, le pronostic à poser quant au comportement futur du prévenu n’est pas totalement défavorable, la situation de celui-ci s’étant notamment stabilisée au niveau personnel et professionnel. L’exécution de la peine pécuniaire doit en conséquence être suspendue et le délai d’épreuve fixé à trois ans. Il se justifie néanmoins d’infliger au condamné une amende de 300 fr. à titre de sanction immédiate (art. 42 al. 4 CP).
4.2.3
Enfin, malgré la récidive commise durant le délai d’épreuve, la cour de céans est d’avis, contrairement à ce que soutient le Ministère public, que le pronostic à poser quant au comportement futur du condamné n’est pas défavorable, les biens juridiquement protégés étant totalement différents. Il n’y a donc pas lieu de révoquer le sursis précédemment accordé à U._.
5.
Il reste à examiner l’indemnité pour tort moral à allouer à la partie plaignante.
5.1
L’art. 49 al. 1 CO (Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse, RS 220) dispose que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d’argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l’atteinte le justifie et que l’auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement.
Cette indemnité a pour but exclusif de compenser le préjudice que représente une atteinte au bien-être moral. Le principe d’une indemnisation du tort moral et l’ampleur de la réparation dépendent d’une manière décisive de la nature et de la gravité de l’atteinte, de l’intensité et de la durée des effets sur la personnalité de la victime concernée, du degré de la faute de l’auteur de l’atteinte et de la possibilité d’adoucir de façon sensible, par le versement d’une somme d’argent, la douleur physique ou morale (TF 4A_489/2007 du 22 février 2008 c. 8.2; ATF
132 II 117 c. 2.2.2; ATF 125 III 412 c. 2a, JT 2006 IV 118).
En raison de sa nature, l’indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage qui ne peut que difficilement être réduit à une simple somme d’argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites. L’indemnité allouée doit toutefois être équitable (ATF 130 III 699 c. 5.1 et les arrêts cités). Le juge en proportionnera le montant à la gravité de l’atteinte subie et évitera que la somme accordée n’apparaisse dérisoire à la victime (ATF 130 III 699 c. 5.1; ATF 129 IV 22 c. 7.2, rés. in JT 20061V 182). Statuant selon les règles du droit et de l’équité (art. 4 CC [Code civil suisse du 10 décembre 1907, RS 210]), le juge dispose d’un large pouvoir d’appréciation.
5.2
En l’espèce, les actes et les injures dont a été victime la plaignante de la part de son compagnon ne sont pas anodins et sont manifestement de nature à engendrer une atteinte morale. I._ a fait état des souffrances psychiques et physiques qu’elle a endurées suite à sa relation avec U._. Elle a d’ailleurs dû suivre une psychothérapie pendant près d’un an et demi. Sa psychologue a posé le diagnostic d’état de stress post-traumatique et a mis cette symptomatologie en rapport avec les violences subies entre 2011 et 2012.
Dans ces circonstances, il se justifie d’allouer à la plaignante une réparation morale d’un montant de 1'500 francs.
6.
6.1
Les premiers juges ont réduit d’un quart l’indemnité allouée au prévenu pour ses frais de défense dans le cadre de la procédure de première, au motif que celui-ci a été libéré des chefs d’accusation les plus graves (jgt., p. 28). Dans la mesure où l’essentiel de la défense portait sur les violences sexuelles, la réduction arrêtée par les premiers peut être confirmée, même si le prévenu doit en définitive être reconnu coupable d’une infraction supplémentaire, à savoir d’injure.
6.2
La répartition des frais de première instance telle qu’opérée par les premiers juges doit également être confirmée. En effet, dans la mesure où le prévenu a provoqué la procédure pénale et que peu d’opérations d’enquête ont été inutiles, une réduction des frais d’un quart est adéquate.
7.
En définitive, l’appel de U._ doit être rejeté et ceux d’I._ et du Ministère public partiellement admis, le jugement entrepris étant réformé dans le sens des considérants qui précèdent.
8.
8.1
Vu l’issue de la cause, les frais de la présente procédure, constitués de l’émolument d’arrêt, par 2’460 fr., et de l’indemnité allouée au conseil d'office de la partie plaignante, par 1’927 fr. 80
,
TVA et débours inclus,
doivent être mis par moitié à la charge du prévenu, par un quart à la charge de la partie plaignante, le solde étant laissé à la charge de l’Etat.
I._ ne sera tenue de rembourser à l’Etat le quart de l’indemnité en faveur de son conseil d’office que lorsque sa situation financière le permettra.
8.2
Le prévenu a conclu à l’allocation d’une indemnité de l’art. 429 CPP pour la procédure d’appel d’un montant de 4'152 fr. 95 (P. 68). Au vu de l’issue de la cause et des opérations nécessaires à son avocat pour assurer la défense de ses intérêts, c’est une indemnité globale de 2'000 fr. pour toutes choses qui doit lui être allouée pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure. Cette indemnité sera laissée à la charge de l’Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bdd1fc34-e87a-4250-b060-3f20a707cae3 | En fait :
A.
Par jugement du 13 mars 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de l’Est vaudois a libéré M._ des chefs d’accusation de voies de fait et d’exposition (I), a constaté que M._ s'était rendu coupable de lésions corporelles qualifiées, d’injure, de menaces qualifiées et de contrainte (II) et l’a condamné à une peine privative de liberté de 9 mois (III), a suspendu l’exécution de la peine privative de liberté prononcée ci-dessus et a fixé au condamné un délai d’épreuve de 3 ans (IV), a dit que M._ était le débiteur de A.X._ de la somme de 2'500 fr. à titre de tort moral (V), a rejeté pour le surplus les conclusions civiles de A.X._ (VI), a arrêté les indemnités d’office et a statué sur les frais (VII à IX).
B.
Par annonce du 20 mars 2015, puis par déclaration motivée du 13 avril 2015, M._ a formé appel contre le jugement précité. Il a conclu à sa réforme en ce sens qu’il est libéré des accusations de voies de fait, exposition, lésions corporelles simples qualifiées, menaces qualifiées et contrainte en relation avec les faits évoqués dans son appel, la peine privative de liberté prononcée à son encontre étant fixée à six mois, les conclusions civiles prises par A.X._ rejetées et une indemnité de 1'500 fr. lui étant allouée.
Dans ses déterminations déposées le 5 mai 2015, A.X._ a conclu, avec suite de frais et dépens, au rejet de l’appel et à la confirmation du jugement entrepris.
Par courrier du 7 juillet 2015, le procureur a conclu à la confirmation de la peine infligée au prévenu.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né en 1969, M._ est arrivé en Suisse à fin 2000 et y a déposé une demande d'asile, qui a été rejetée le 26 août 2002. Son recours contre cette décision a été rejeté par le Tribunal administratif fédéral. Le renvoi de Suisse ordonné par l’Office fédéral des migrations a en revanche été annulé au vu de la demande de regroupement familial déposée par le prévenu. De septembre 2005 au printemps 2011, ce dernier a en effet vécu en concubinage avec la plaignante A.X._, compagne avec laquelle il a eu deux enfants nés respectivement le 27 février 2007 (I._) et le 8 septembre 2008 (J._). De par sa relation avec la plaignante, le prévenu a obtenu un permis B. Ce permis a toutefois été révoqué par décision du 26 février 2014, décision aujourd'hui définitive et exécutoire. Un délai au 10 janvier 2015 a été imparti au prévenu pour quitter définitivement la Suisse. M._ n’a pas respecté cette décision et demeure toujours dans notre pays.
Financièrement, le prévenu a été soutenu par l’EVAM depuis son arrivée en Suisse en 2000, percevant en moyenne 1'300 fr. par mois. Selon ses déclarations, il aurait une formation de carreleur et d’électricien.
Une procédure civile divise les parties devant la Justice de paix du district de la Riviera-Pays d’Enhaut concernant les relations personnelles de M._ avec ses enfants I._ et J._. Depuis le mois d’octobre 2011, ces relations doivent s’exercer par l’intermédiaire du Point Rencontre.
Le casier judiciaire suisse du prévenu est vierge.
2.
Dès 2005, M._ a vécu maritalement avec A.X._.
a)
Lors d'une dispute, le 29 janvier 2011, M._ a donné des coups de pieds à A.X._. Ceux-ci ont occasionné les blessures constatées par le Dr K._ lors d'une consultation du 8 février 2011, soit un hématome de 15x8 cm sur la face interne de la cuisse gauche et un hématome de 10x7 cm sur la face postérieure de l'avant-bras gauche, lésions pouvant remonter, selon ce praticien, à 10 jours et être compatibles avec les coups décrits par la plaignante (cf. P. 10/13).
b)
Le 30 janvier 2011, au domicile du couple à [...],M._ a menacé sa compagne d'un couteau au cours d'une dispute.
c)
Le 10 juin 2011, alors que le couple était séparé, M._ a appelé A.X._ au sujet des enfants et lui a notamment dit "si je ne peux pas avoir les enfants, je les tuerai, mais je te tuerai d'abord". A cette occasion, il a également traité sa compagne de "salope, pute" etc.
d)
Lors d'un téléphone, le 14 juillet 2011, M._ a déclaré à A.X._ qu'il allait venir avec des copains casser la porte en se fichant de la police et emporter les enfants. La jeune femme a paniqué et a appelé ses parents.
Lors d'un téléphone ultérieur, le 18 juillet 2011, M._ a annoncé sa visite et a déclaré à A.X._ que si elle continuait ce qu'elle avait commencé, il lui cracherait dessus et la taperait même au tribunal. Lorsque le prévenu s’est présenté au domicile de la plaignante peu après, cette dernière l’a laissé entrer car, quand elle a ouvert la porte, il pleurait, il avait bu et elle a eu pitié. Elle a expressément déclaré ne pas avoir eu peur ce jour-là (cf. jgt, p.9).
e)
Le 8 juillet 2009, au cours d'une dispute survenue au domicile du couple à [...],M._ a frappé sa compagne avec une couronne de l'Avent, lui occasionnant une plaie qui a dû être suturée.
f)
En mars 2009, une dispute a éclaté entre M._ et A.X._ à leur domicile de [...].M._ demandait avec insistance de l’argent à sa compagne. Devant le refus de celle-ci, il l’a poursuivie dans l’appartement avec à la main un couteau de taille moyenne. A.X._ a tenté de s’enfermer dans la salle de bain et, le prévenu voulant l’en faire sortir de force, la blessée au passage, à la main droite, avec son couteau. La plaie en résultant a dû être suturée (P. 10/15). Une cicatrice de 3 à 4 cm subsiste toujours.
g)
Au domicile conjugal de [...], à une date non exactement déterminée en juillet 2009, au cours d’une dispute avec sa compagne, M._ a empoigné son fils J._, l'a tenu dans ses bras en dehors de la fenêtre et a menacé de le lâcher si sa compagne ne s’agenouillait pas à ses pieds pour lui demander pardon. Cette dernière ayant obtempéré, le prévenu lui a rendu l’enfant. | En droit :
1.
1.1.
Interjeté dans les formes et délai légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel formé par M._ est recevable.
1.2
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, JugendStrafprozessordnung, 2
e
éd. Bâle 2014, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 consid. 3.1).
2.
Invoquant la présomption d'innocence, l'appelant conteste certains faits retenus à sa charge, reprochant au premier juge d'avoir, en présence de deux versions des faits irrémédiablement contradictoires, retenu la version de la plaignante, sans motiver en détail les faits retenus à sa charge ni justifier les attitudes contradictoires de la plaignante.
2.1
Selon l’art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu’elle n’est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l’intime conviction qu’il retire de l’ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l’état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d’innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU Il (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 consid. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 consid. 2.2.1).
Comme règle d’appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 la 31 consid. 2c; TF 6B_831/2009 précité, consid. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 consid. 2a). Dans cette mesure, la présomption d’innocence se confond avec l’interdiction générale de l’arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (TF 6B_216/2010 du 11 mai 2010 consid. 1.1.1 et 1.1.2 et la jurisprudence citée).
2.2
Il convient de souligner de manière générale que les déclarations de la plaignante sur la réalité des violences qu'elle a subies de la part de son compagnon sont corroborées par les rapports d'intervention de la police, les rapports médicaux, les témoignages de voisins et les déclarations de ses parents. Alors même que la plaignante, avant la séparation, niait être victime de violences conjugales, aucun intervenant n'a douté de la réalité de celles-ci. Il n'y a à cet égard pas de réelle contradiction dans les déclarations de la plaignante, dès lors que c'est à l'évidence la séparation qui lui a permis de faire état de la violence qu’elle avait subie. Quant aux déclarations du prévenu, elles sont dénuées de toute crédibilité. Sa manière de se poser en victime tout au long de la procédure est détestable. Devant le premier juge, il a notamment déclaré n'avoir jamais porté la main sur sa compagne, ni l'avoir menacée avec un couteau. Il a expliqué les traces de coups par le fait que la plaignante serait instable psychologiquement, ce qui la pousserait à faire régulièrement des crises de violence durant lesquelles elle se blesserait elle-même. Aucun élément du dossier ne vient étayer cette manière de voir. Rien ne permet non plus de retenir, comme le prétend le prévenu, la mise en place d'un quelconque complot à son encontre.
2.3
Dans le cadre de son appel, M._ ne conteste que certains épisodes de violence, sans reconnaître les autres, et reproche au premier juge de n’avoir pas expliqué en détail les raisons pour lesquelles la version de la plaignante l’emportait à ses yeux. L'appelant perd de vue que, face à deux versions divergentes des faits, dont l'une est logique et corroborée par de nombreux éléments du dossier et l'autre non, il y a à l'évidence lieu de retenir la première.
En ce qui concerne les événements du 30 janvier 2011, M._ fait valoir que personne ne l'a jamais vu avec un couteau, de sorte que ces faits ne sauraient être retenus à sa charge. C'est à l'évidence faux, comme cela clairement des déclarations de la plaignante (cf. PV. aud. 1, pp. 1 et 2) ainsi que de celles de son père qui a précisé que, lors de cet incident, M._ était ressorti de la maison avec une main dans le dos, se dirigeant vers eux, la plaignante leur disant "partez vite, il a un couteau" (cf. jgt, p. 15). Plusieurs témoins ont d’ailleurs dit qu'ils avaient l'habitude de scènes de violence au sein du couple, W._ précisant avoir, à une occasion, vu quelque chose de brillant dans la poche de M._ et avoir eu peur, car cela lui faisait penser à un objet dangereux, à une lame (cf. jgt, p. 10).
L'appelant conteste également avoir tenu des propos menaçants lors de ses téléphones des 14 et 18 juillet 2011 à la plaignante. Il va de soi que, s'agissant d'entretiens téléphoniques, il n'y a pas de témoins. Il n'en demeure pas moins que les déclarations de la plaignante au sujet de ces conversations sont crédibles compte tenu des nombreux autres éléments qui établissent que M._ l'a menacée à d'autres occasions.
En ce qui concerne les violences de mars 2009, M._ fait valoir que les déclarations de la plaignante ne sont pas précises. Les quelques imprécisions relevées par l'appelant dans son mémoire ne modifient pas le fait que les explications fournies par l'intimée à ce propos sont cohérentes, que les blessures dont elle a été victime sont attestées par certificat médical (cf. P. 10/15) et qu'elles sont compatibles avec son récit, et non avec des blessures provoquées par un couteau mal rangé dans un lave-vaisselle. Rien ne permet non plus de mettre en doute la crédibilité de la plaignante s’agissant de l’incident de juillet 2009 avec son fils J._.
L'appelant prétend aussi que sa condamnation se fonde sur l'appréciation d'un climat général. Il n'en est rien : les témoignages et les pièces faisant état de traces de coups, de violence psychologique et de menaces sont accablants. Certaines personnes ont été directement témoins de scènes de violence et ont pu constater la peur que la plaignante ressentait à l'égard de son compagnon. Ils ont en outre été eux-mêmes été confrontés à l'agressivité du prévenu et ont clairement dit ne pas s'être sentis en sécurité.
Rien n'indique au demeurant que l'intimée a fait état de violences conjugales pour éloigner le prévenu de ses enfants. A.X._ a au contraire caché sa situation pendant de nombreuses années. Le fait enfin qu’elle s'est rendue chez son ex-compagnon le 28 octobre 2014 et qu’à cette occasion, elle avait l'air détendue – comme le démontre le film que le prévenu a tourné ce jour-là à son insu, n'établit nullement que les violences qui sont reprochées à ce dernier entre janvier 2009 et juillet 2011 n’ont pas eu lieu, sans qu'il y ait besoin de se demander si cette preuve est licite.
2.4
En conclusion, c’est en vain que le prévenu a cherché à mettre en doute les faits tels qu'ils ont finalement été retenus par le premier juge. On ne saurait douter de la version de la plaignante et l'on doit considérer que celle-ci a bien été victime de violence domestique pendant de nombreuses années.
Mal fondé, l'appel de M._ doit donc être rejeté lorsqu'il remet en cause l'appréciation des preuves faite par le Tribunal de police.
3.
Sur le plan des qualifications juridiques, l'appelant conteste s'être rendu coupable de menaces envers sa compagne s’agissant des événements des 14 et 18 juillet 2011, dès lors que la plaignante n’aurait pas été véritablement effrayée ces jours-là.
3.1
Aux termes de l’art. 180 al. 1 CP, celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera, sur plainte, puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
La punissabilité de l’auteur dépend de la réalisation de deux conditions: il faut, d’une part, que l’auteur ait émis une menace grave et, d’autre part, que la victime ait été alarmée ou effrayée par cet épisode. Une menace est qualifiée de grave si elle est objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime. Il faut donc se demander si une personne raisonnable, dotée d’une résistance psychologique plus ou moins normale, aurait ressenti la menace comme grave (TF 6B_234/2010 du 4 janvier 2011 consid. 3.1; ATF 99 IV 212 consid. 1a).
3.2
En l'occurrence, il ressort sans ambiguïté des déclarations de la plaignante qu’à la suite des propos tenus par le prévenu le 14 juillet 2011, A.X._ a paniqué et a appelé ses parents (cf. PV. aud. 2, p. 2). La plaignante a donc été alarmée et, partant, il y a lieu de retenir l’infraction de menaces à la charge du prévenu. Interpellée sur le point de savoir pour quelles raisons elle avait laissé entrer M._ à son domicile le 18 juillet 2011, elle a déclaré que, quand elle avait ouvert la porte, ce dernier pleurait, qu’il avait bu et qu’elle avait eu pitié. Elle a également précisé que, ce jour-là, elle n’avait pas eu peur (cf. jgt, p. 9). Il faut donc admettre avec l’appelant que, sur ce point, c’est à tort que le premier juge a retenu l’infraction de menaces à sa charge, faute pour la plaignante d’avoir été effrayée lors de cette visite.
L’appel doit donc être admis sur ce point.
4.
Vu l'abandon de l'accusation de menaces dans un cas, il appartient à la Cour de céans de déterminer la peine qui doit être infligée au prévenu.
4.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 consid. 3.1; ATF 134 IV 17 consid. 2.1).
4.2
En l'occurrence, M._ s'est rendu coupable de lésions corporelles simples qualifiées dans trois cas, de menaces dans trois cas, d’injure et de contrainte à une occasion. Sa culpabilité est lourde, le prévenu s’en étant pris violemment à l’intégrité physique et psychique de la mère de ses enfants, imposant pendant des années à sa compagne un climat de terreur par ses menaces et ses coups. Les infractions sont en concours et le prévenu demeure dans le déni, n’hésitant pas à se positionner en victime et à accuser la plaignante d’être psychologiquement instable ou à prétexter d’un complot visant à l’éloigner de ses enfants. Il n’y a pas d’élément à décharge. Le prononcé d’une peine privative de liberté se justifie en l’espèce, car seule une peine de cette nature est susceptible d’avoir un effet dissuasif sur le prévenu. La quotité envisagée par le premier juge était en soi justifiée. Au vu de l’ensemble des circonstances, et pour tenir compte de l’abandon de l’accusation de menaces en ce qui concerne l’épisode du 18 juillet 2011, une peine privative de liberté de huit mois et vingt jours est adéquate à réprimer le comportement de M._. Cette peine doit être assortie du sursis dès lors que le pronostic n’est pas entièrement défavorable en l’espèce.
5.
L’appelant conteste devoir un quelconque montant à la plaignante au titre du tort moral.
5.1
Aux termes de l’art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d’homme, à la famille une indemnité équitable à titre de réparation morale.
L’ampleur de la réparation morale prévue par cette disposition légale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l’atteinte subie par l’ayant droit et de la possibilité d’adoucir sensiblement, par le versement d’une somme d’argent, la douleur morale qui en résulte. Sa détermination relève du pouvoir d’appréciation du juge. En raison de sa nature, l’indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage ne pouvant que difficilement être réduit à une simple somme d’argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites. L’indemnité allouée doit toutefois être équitable. Le juge en proportionnera donc le montant à la gravité de l’atteinte subie et évitera que la somme accordée n’apparaisse dérisoire à la victime; s’il s’inspire de certains précédents, il veillera à les adapter aux circonstances actuelles pour tenir compte de la dépréciation de la monnaie.
Pour fixer le montant de l’indemnité prévue à l’art. 47 CO, la comparaison avec d’autres affaires doit se faire avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d’une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment au malheur qui le frappe. Cela étant, une comparaison n’est pas dépourvue d’intérêt et peut être, suivant les circonstances, un élément utile d’orientation (cf. ATF 125 III 269 consid. 2a).
5.2
En l’espèce, il ne fait pas de doute que A.X._ a souffert physiquement et psychiquement pendant de nombreuses années de la violence du prévenu. Le climat de terreur dans lequel elle a vécu est au demeurant attesté par divers témoins. Le principe de l’allocation d’une indemnité pour tort moral se justifie et le montant de 2'500 fr. fixé par le premier juge échappe à toute critique. Il doit être confirmé. Le fait que la plaignante se soit rendue sans crainte chez le prévenu à une occasion quelque trois ans et demi après la séparation ne modifie en rien cette appréciation.
Mal fondé, le moyen doit être rejeté.
6.
En définitive, l'appel doit être très partiellement admis et le jugement réformé dans le sens des considérants.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel, par 5'862 fr. 90, constitués de l'émolument de jugement (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), ainsi que des indemnités allouées au défenseur d'office du prévenu et au conseil d'office de la plaignante (art. 135 al. 2 CPP; art. 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFIP), seront supportés à raison de quatre cinquièmes, soit par 4'690 fr. 30, par M._ (art. 428 al. 1 CPP), le solde étant laissé à la charge de l'Etat.
Sur la base de la liste des opérations produite par Me Parein, l'indemnité allouée au défenseur d'office de M._ sera fixée à 1'939 fr., TVA comprise.
L'avocate Genier Müller indique avoir consacré, hors audience de ce jour, 6 h 40 à la défense des intérêts de A.X._, 13 h 50 de travail étant au demeurant effectué par son stagiaire. Ce temps est quelque peu surévalué, de sorte c'est un total de 15 h 30 heures qui sera retenu, soit 2 h de travail pour l'avocate et 13 h 30 pour son stagiaire. C'est ainsi des honoraires à hauteur de 1'845 fr. qu'il convient d'allouer à Me Genier Müller, montant auquel s'ajouteront une vacation, par 80 fr., les débours, par 13 fr. 80, et la TVA, par 155 fr. 10, ce qui représente un total de 2'093 fr. 90. Il convient de préciser que Me Genier Müller a contesté le montant de l'indemnité d'office qui lui avait été allouée en première instance. Son recours ayant été rejeté par la Chambre des recours pénale (CREP 29 mai 2015/372) et le montant de son indemnité confirmée, l'avocate a recouru au Tribunal fédéral, qui n'a pas encore statué. Le dossier doit donc être retourné à cette autorité pour qu'elle puisse se prononcer sur cette question.
M._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat les quatre cinquièmes du montant de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office et du conseil d’office de la plaignante que lorsque sa situation financière le permettra.
La condamnation de M._ étant confirmée, il n’y a pas lieu de statuer sur l’allocation d’une indemnité au sens de l’art. 429 CPP. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
be9bb5b4-37a5-4b9d-9f58-9ed645a919b2 | En fait :
A.
Par jugement du 23 novembre 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de l'Est vaudois a admis l'opposition de D._ et dit qu'il est mis fin aux poursuites pénales dirigées contre lui pour infraction à la LATC (I), a annulé en conséquence l'ordonnance pénale rendue le 28 juillet 2011 par le Préfet de Riviera-Pays d'Enhaut sous n° RPE/01/11/0001919/vg (II) et a laissé les frais de la cause à la charge de l'Etat (III).
B.
Le 9 décembre 2011, le Ministère public a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 29 décembre 2011, il a conclu principalement à la réforme du jugement précité en ce sens que D._ est déclaré coupable de contravention à la LATC, qu'il est condamné à une amende de 2'000 fr. et que les frais sont mis à la charge du prévenu et subsidiairement à son annulation et au renvoi de la cause à un autre tribunal d'arrondissement pour nouveau jugement, les frais de la procédure d'appel étant laissés à la charge de l'Etat.
Le 12 décembre 2011, le Président a informé les parties que l'appel allait être traité d'office en procédure écrite (art. 406 al. 1 let. c CPP).
D._ n'a présenté aucune demande de non-entrée en matière, ni aucun appel joint.
L'intimé s'est déterminé par mémoire du 23 mars 2012, soit dans le délai prolongé qui lui a été fixé à cet effet (art. 390 al. 2 CPP), concluant principalement au rejet de l'appel et subsidiairement à la suspension de la procédure devant l'autorité de céans jusqu'à droit connu sur les procédures de recours pendantes en matière administrative devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois sous les références AC.2011.0198 et AC.2012.0021.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Ressortissant suisse né le 17 janvier 1959 à Santa Colomba, en Espagne, D._, domicilié [...] à [...], travaille en qualité de conseiller en personnel, activité qui lui procure un revenu de 3'300 fr. par mois, versé douze fois l'an. Il perçoit en outre 650 fr. par mois de la location du deuxième appartement de sa maison dont il est propriétaire. Ses charges mensuelles totalisent 2'918 fr. 90. Il n'a pas d'économies, mais une dette hypothécaire de 550'000 francs. Il fait l'objet d'actes de défaut de biens après faillite pour environ 400'000 francs. Divorcé, il n'a plus d'enfant à charge et ne verse aucune pension à son ex-épouse.
Son casier judiciaire comporte les inscriptions suivantes :
- 23.08.2002 : Cour de cassation pénale du canton de Vaud, violation d'une obligation d'entretien, trois mois d'emprisonnement;
- 08.09.2009 : Juges d'instruction de Fribourg, emploi d'étrangers sans autorisation, quinze jours-amende à 60 fr., sursis à l'exécution de la peine, délai d'épreuve 2 ans, amende 1'500 francs;
- 16.11.2009 : Cour de cassation pénale du canton de Vaud, détournement de valeurs patrimoniales mises sous main de justice, occupation intentionnelle d'étrangers sans autorisation, emploi d'étrangers sans autorisation, contravention à la Loi fédérale sur le service de l'emploi et la location des services, insoumission à une décision de l'autorité, cent vingt heures de travail d'intérêt général, sursis à l'exécution de la peine, délai d'épreuve 4 ans, amende 1'500 francs.
2.
2.1
Le 29 mars 2006, la Municipalité de [...] à refusé à D._ l'autorisation de construire un couvert pour quatre véhicules sur la parcelle n° [...] de ladite commune et l'a invité à revoir son projet et à déposer une nouvelle demande de permis de construire, en lui donnant toutes les indications utiles à l'élaboration d'un couvert qui soit conforme à la réglementation. Ainsi, il lui a été suggéré de réduire le projet à deux places de stationnement, d'en modifier l'implantation dans le respect des règles relatives aux distances aux limites et d'opter pour une forme et des matériaux qui satisfassent à certaines exigences en matière d'esthétique. Informée du fait que le prénommé avait entrepris la construction d'un couvert pour quatre véhicules malgré le refus qui lui avait été signifié, la Municipalité l'a sommé, par lettre du 14 novembre 2006, d'interrompre immédiatement ses travaux. Par décision du 8 janvier 2007, elle a exigé la démolition immédiate du couvert au motif que celui-ci avait été érigé sans autorisation préalable, au mépris des directives contenues dans la décision rendue le 29 mars 2006. Le Tribunal administratif a rejeté le recours interjeté par D._ contre la décision du 8 janvier 2007 par arrêt du 10 juillet 2007, complété par un arrêt rectificatif du 18 juillet 2007 impartissant à l'intéressé un délai au 31 octobre 2007 pour supprimer le couvert à véhicules litigieux; il a considéré en substance que la construction du couvert en question était soumis à autorisation au sens de l'art. 103 LATC.
D._ a démoli le couvert litigieux à une date indéterminée entre le 13 mars et le 11 avril 2008.
Le 23 octobre 2008, il a demandé une autorisation pour construire un nouveau couvert, que la Municipalité lui a refusée.
A une période indéterminée, mais vraisemblablement avant le début de l'hiver 2010, D._ a reconstruit un couvert pour quatre véhicules sur sa parcelle. Le 16 février 2011, la Municipalité, constatant la reconstruction dudit couvert, a exigé sa démolition dans le délai au 18 mars 2011, sous peine de dénonciation au Préfet. Le prénommé n'a pas contesté cette décision; il s'est limité à solliciter une prolongation du délai au 22 avril 2011 pour démolir son abri, prolongation que la Municipalité a d'abord refusée puis partiellement accordée jusqu'au 31 mars 2011.
Par courriel du 14 avril 2011, la Municipalité, constatant que seule la moitié du couvert avait été démolie, a demandé des explications à l'intimé, lui impartissant un ultime délai au 18 avril 2011 pour s'exécuter, faute de quoi la dénonciation annoncée serait immédiatement adressée au Préfet. Agissant par son conseil, le prévenu a, par courrier du 18 avril 2011, admis n'avoir démonté que la moitié du couvert, soutenant que le couvert réduit ainsi à deux places était conforme aux exigences posées par la Municipalité dans son courrier du 19 mars 2006, l'ordre de démolition étant dès lors contraire à l'art. 105 LATC.
Par lettre du 12 mai 2011, la Municipalité a informé l'avocat de D._ que ce dernier allait être dénoncé au Préfet, ce qu'elle a fait par courrier du 13 juillet 2011. Ce même 13 juillet 2011, elle a rendu une nouvelle décision exigeant la démolition immédiate du couvert en question, décision contre laquelle le prévenu a interjeté recours le 12 août 2011 devant la Cour de droit public et administratif, procédure actuellement en cours.
2.2
Par ordonnance pénale du 28 juillet 2011, qui fait suite à la dénonciation de la Municipalité de [...] du 13 juillet 2011, le Préfet du district de Riviera-Pays d'Enhaut a condamné D._ à 2'000 fr. d'amende pour avoir construit sans autorisation un couvert pour véhicules sur sa propriété entre le 19 août 2010 et le 8 février 2011.
Le prénommé a fait opposition contre cette ordonnance. Après avoir procédé à l'audition du prévenu, le Préfet a, par courrier du 14 octobre 2011, décidé de maintenir son ordonnance pénale et transmis le dossier au Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois.
Le jugement libératoire du 23 novembre 2011 dudit tribunal est fondé sur le fait que l'ordonnance pénale attaquée se base sur la décision administrative précitée du 13 juillet 2011 qui n'est pas définitive et exécutoire au vu du recours déposé auprès de la Cour de droit public et administratif et que, dès lors, toute condamnation pénale est prématurée. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, le Ministère public central affirme que le dispositif du jugement ne lui a pas été notifié conformément à l'art. 84 al. 2 CPP et qu'il n'a appris par hasard l'existence du jugement attaqué qu'en date du 9 décembre 2011. Selon la disposition précitée, le tribunal remet le dispositif du jugement aux parties à l'issue des débats ou le leur notifie dans les cinq jours. Selon l’art. 356 CPP, transposé au cas de contraventions en vertu des art. 10 LContr (Loi sur les contraventions du 19 mai 2009, RSV 312.11) et 357 CPP, la procédure de l'opposition se déroule sous la forme de débats oraux devant le tribunal de première instance, au terme desquels celui-ci rend son jugement et le notifie conformément à l'art. 84 CPP (cf. art. 351 al. 3 CPP). Aux termes de l'art. 381 al. 3 CPP, le Confédération ou les cantons déterminent quelles autorités peuvent interjeter recours dans la procédure pénale en matière de contraventions. Conformément aux art. 10 al. 3 LContr et 29 al. 3 LVCPP (Loi d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009, RSV 312.01), le procureur général exerce le droit de recours prévu à l'art. 381 al. 3 CPP. Conformément aux art. 23 al. 5 et 25 al. 1 LMPu (Loi sur le Ministère public du 19 mai 2009, RSV 173.21), il délègue aux procureurs du Ministère public central ses compétences d'approbation et de contrôle des ordonnances pénales préfectorales rendues notamment dans le domaine de la LATC, un tel suivi ayant pour but d'assurer la participation du Ministère public central à la procédure judiciaire consécutive à une décision du préfet (ch. 1.1 et 3 de la Directive n° 3 du Procureur général sur le contrôle et le suivi par le Ministère public central des décisions rendues par les Préfets).
En l'espèce, il ne ressort nullement du dossier que le dispositif du jugement, qui a été remis séance tenante aux seules parties présentes à l'audience de première instance, soit D._ et son défenseur (jugt, p. 6), aurait ensuite été notifié au Ministère public central – à qui l'ordonnance pénale avait d'ailleurs été à juste titre transmise par le Préfet (art. 353 al. 3 CPP) – conformément à l'art. 84 al. 2 CPP. Partant, faute d'éléments contraires à l'argument du Ministère public central selon lequel il n'aurait eu connaissance dudit jugement que le 23 novembre 2011 – ce qui n'est du reste pas contesté –, il faut considérer que l'annonce d'appel déposée le même jour, l'a été à temps.
Ainsi, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.2
En l’espèce, dès lors que seule une contravention a été retenue à l'encontre de D._ et fait l'objet de la procédure de première instance, un membre de la Cour d'appel pénale statue comme juge unique, conformément à l'art. 14 al. 3 LVCPP.
3.
L'appelant fait valoir que le sort de la procédure de recours administrative n'est pas relevante au plan pénal, la dénonciation du 13 juillet 2011 étant fondée non pas sur la décision du même jour – objet dudit recours – ordonnant la démolition immédiate du couvert litigieux, mais sur la reconstruction d'un couvert pour quatre véhicules sans autorisation au sens de l'art. 103 LATC (Loi sur l'aménagement du territoire et les constructions du 4 décembre 1985, RSV 700.11).
3.1
L'appelant a raison. Il suffit de lire la dénonciation du 13 juillet 2011, d'où il ressort que D._ est dénoncé "pour avoir reconstruit sans autorisation un couvert pour véhicules sur sa propriété, parcelle n° [...], du cadastre de [...], ceci à une date située entre le 19 août 2010 et le 8 février 2011". La dénonciation ne porte donc pas, comme l'a retenu à tort le tribunal (jugt, p. 9
in initio
), sur l'ordre de démolition du couvert réduit à deux places et dont le prévenu demande la régularisation au sens de l'art. 105 LATC. D'ailleurs, les courriers que la Municipalité a adressés au prévenu les 16 février et 22 mars 2011, soit antérieurement au démontage partiel du couvert intervenu au début du mois d'avril 2011 (cf. échange d'e-mails entre l'intimé et la Municipalité des 5 et 14 avril 2011 et lettre de Me Gloria Capt du 18 avril 2011; cf. ég. photo figurant au dossier et portant la date manuscrite "08.02.2011"), réservaient déjà la possibilité de dénoncer ultérieurement l'intéressé.
Au demeurant, que le juge pénal acquitte ou
condamne ne préjuge pas de la décision de l'administration et inversement (Moor, Droit administratif, vol. III, Berne 1992, n. 5.3.5.2, p. 242), les objets des procédures pénales et administratives n'étant pas les mêmes (cf. à ce sujet l'art. 130 al. 2 LATC selon lequel
la poursuite [pénale] a lieu
sans préjudice du droit de l'autorité d'exiger, selon les circonstances, la suppression ou la modification des travaux non conformes aux prescriptions légales et réglementaires et, en cas d'inexécution, de faire exécuter les travaux aux frais des propriétaires). C'est donc à tort que l'intimé demande, à titre subsidiaire, la suspension de la procédure pénale jusqu'à droit connu sur les procédures de recours pendantes devant le Tribunal administratif.
3.2
Aux termes de l'art. 130 al. 1, 1
ère
phr., LATC, celui qui contrevient à la présente loi (...) est passible d'une amende de deux cents francs à deux cent mille francs. Or, en l'occurrence, la construction du nouveau couvert pour véhicules, en tout cas avant que celui-ci soit démoli par moitié, devait faire l'objet d'une demande d'autorisation au sens de l'art. 103 LATC, ce que D._ savait parfaitement, puisque le Tribunal administratif le lui avait dit dans son arrêt du 10 juillet 2007; le prénommé admet d'ailleurs lui-même dans ses déterminations (pièce 16/1, p. 3
in fine
) avoir adressé à la Municipalité une demande de permis de construire le 23 octobre 2008 pour le même projet, que cette demande lui a été refusée et qu'il a néanmoins reconstruit son couvert "désespérant de pouvoir obtenir une autorisation de la Municipalité".
Ce faisant, l'intimé a bel et bien violé l'art. 103 LATC et doit être condamné pour contravention au sens de l'art. 130 de cette loi.
3.3
Sous réserve des dispositions contraires de la LContr, les règles générales du Code pénal relatives à la fixation de l'amende sont applicables en matière de contraventions réprimées par le droit cantonal (art. 20 LContr.). Selon l'art. 106 al. 3 CP, le juge fixe l'amende ainsi que
la peine privative de liberté de substitution en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise.
En l'espèce, on prendra en considération tout d'abord la situation économique de D._, telle qu'exposée ci-avant (p. 3). S'agissant ensuite de la faute, force est de constater que le prénommé s'est rendu coupable d'une violation crasse des normes de la police des constructions, faisant fi des différents courriers de la Municipalité. On relèvera sur ce point que si l'on ignore la date précise à laquelle l'intéressé a reconstruit le couvert litigieux, il semble que ladite construction soit intervenue non pas entre "le 19 août 2010 et le 8 février 2011", comme l'a retenu le Préfet dans son ordonnance pénale, mais avant l'hiver 2010/2011; en effet, dans son courrier du 2 mars 2011 adressé à la Municipalité, l'intimé admet avoir remonté ledit couvert "en vue de cet hiver", ce qui situerait les faits entre novembre et décembre 2010 et laisserait supposer que D._ a, malgré le refus de sa demande de permis de construire, bénéficié de cet abri pendant quatre ou cinq mois, jusqu'à sa démolition partielle au début avril 2011. Le prévenu, qui a tout fait pour que la construction litigieuse, qu'il qualifie de "couvert provisoire", soit maintenue jusqu'à la fin de l'hiver pour le seul motif qu'"il n'est pas rare que la neige tombe jusqu'à la fin avril" (cf. lettre du 2 mars 2011 précitée), donne l'impression de ne pas avoir réalisé le caractère répréhensible de ses actes. On remarquera d'ailleurs à cet égard que le prévenu n'a démoli le premier couvert – construit vraisemblablement en automne 2006 – qu'au printemps 2008, malgré le délai au 31 octobre 2007 qui lui avait été imparti à cet effet par le Tribunal administratif.
Compte tenu de ces éléments et des antécédents du prévenu, force est de constater que l'amende de 2'000 fr. requise par l'appelant – et prononcée par le Préfet – est adéquate. La peine privative de liberté de substitution est fixée à vingt jours.
4.
En conclusion, l'appel du Ministère public est admis et le jugement attaqué modifié dans le sens des considérants qui précèdent.
4.1
Vu l'issue de la cause, l'entier des frais de première instance doivent être mis à la charge de D._ (art. 426 al. 1, 1
ère
phr., CPP).
4.2
Il en ira de même des frais d'appel (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
beda3d01-bb60-4e30-ac0c-d3c0b806fbd5 | En fait :
A.
Par jugement du 21 septembre 2011, le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a constaté que T._ s'est rendu coupable d'infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers (I), l'a condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 10 fr., peine partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 novembre 2006 par le Juge d'instruction de Lausanne (II), a mis les frais de la cause, arrêtés à 4'055 fr. 80, à la charge de T._, y compris l'indemnité due à Me Charlotte Iselin, défenseur d'office, dont le montant est arrêté à 2'980 fr. 80, TVA incluse (III) et a dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité allouée au défenseur d'office, Me Charlotte Iselin, interviendra pour autant que la situation économique de T._ se soit améliorée (IV).
B.
1.
Le 26 septembre 2011, le Ministère public a formé appel de ce jugement. Le 30 septembre 2011, T._ a également formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel du 19 octobre 2011, le Ministère public a conclu à la modification du chiffre II du dispositif du jugement entrepris en ce sens que T._ est condamné à une peine privative de liberté de 90 (nonante) jours et a déclaré ne pas s'opposer à ce que l'appel soit traité en procédure écrite.
Par courrier du 24 octobre 2011, T._ a déclaré retirer son annonce d'appel déposée le 30 septembre 2011. Par mémoire d'intimé du 16 janvier 2012, il a conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet de l'appel formé par le Ministère public.
2. Par arrêt du 28 janvier 2012 (n° 36), la Cour d'appel pénale a admis l'appel du Ministère public et a, notamment, prononcé que T._ s'est rendu coupable d'infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers (I) et l'a condamné à une peine privative de liberté de trois mois, peine partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 novembre 2006 par le Juge d'instruction de Lausanne (II).
Par arrêt du 24 janvier 2013 (6B_196/2012), le Tribunal fédéral a, notamment, admis partiellement le recours du prévenu, annulé le jugement attaqué et renvoyé la cause à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision, le recours étant au surplus rejeté dans la mesure où il est recevable (ch. 1 du dispositif).
En reprise de cause, le prévenu a produit diverses pièces (bordereau sous P. 49). A l'audience d'appel, le Ministère public a confirmé les conclusions de son appel. L'intimé a conclu au prononcé d'une peine pécuniaire inférieure à celle précédemment prononcée.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1
Le prévenu T._
,
né en 1972, ressortissant kosovar, vit en Suisse depuis 1993. A son arrivée, il a déposé une demande d'asile, laquelle a été rejetée en 2000 par les autorités valaisannes. Invité à quitter le territoire suisse, l'intimé s'est caché en Valais durant une année. En décembre 2001, suite à un contrôle de police, il a été refoulé par avion au Kosovo. Il y est resté une année, puis est revenu en Suisse en 2003, d'abord à Bâle, puis dans le canton de Vaud. Mis à part un séjour de quatre ou cinq mois au Kosovo, dans la période de fin 2005 à avril 2006, le prévenu n'a plus quitté la Suisse. Le prévenu est marié et père de deux enfants mineurs. Comme on le verra plus en détail ci-dessous, il a fait venir en Suisse son épouse. Il vit, avec sa famille, dans un appartement dont le loyer s'élève à 800 fr. par mois.
Il a travaillé sur territoire suisse d'abord dans la branche du bâtiment, puis dans les domaines agricoles et viticoles et, enfin, depuis le 1
er
janvier 2013, dans le domaine des échafaudages. Cette dernière activité est un emploi fixe, à plein-temps. Le prévenu perçoit en rémunération de ce travail un revenu mensuel moyen brut de 4'300 francs.
S'agissant de ses activités lucratives antérieures à celle qu'il exerce à présent, il a déclaré aux débats de première instance être occupé comme employé agricole et percevoir pour ce travail un revenu mensuel moyen variant entre 2'000 fr. et 3'000 fr., ce salaire lui étant alors versé en mains propres. Ces aveux ont été confirmés sur le principe par le témoin [...], syndicaliste et membre du groupe "collectif sans-papiers", qui a indiqué que la famille de l'intéressé était autonome et que le prévenu avait "toujours travaillé dans le domaine du bâtiment ou de l'agriculture (jugement, p. 3). Interrogé par la police le 20 août 2010, le prévenu a révélé aux gendarmes qu'il travaillait de temps à autre et qu'il était occupé depuis une semaine par un vigneron de Perroy à raison de 50 heures par semaine, prétendant cependant qu'il ignorait le nom de son employeur (P. 5, p. 2). Quant à son épouse, l'enquête a établi qu'elle n'est plus repartie de Suisse depuis son arrivée en 2007 (P. 6, p. 2, 2
e
par. in fine). Le rapport de police de synthèse établi le 20 août 2010 sur la base des interrogatoires des conjoints menés séparément le même jour ajoutait que le prévenu et son épouse avaient refusé de dire aux enquêteurs où ils habitaient (P. 4, p. 5, 2
e
par.), mais que chacun des intéressés avait expressément pris note qu'au vu de son comportement dans notre pays, l'Office des migrations pourrait prononcer à son endroit une interdiction d'entrée en Suisse et au Liechtenstein (P. 4, p. 5, 9
e
par.; cf. aussi P. 5, p. 2 in fine, et P. 6, p. 2 in fine).
Le prévenu a fait savoir lors de son interpellation qu'il n'avait pas l'intention de quitter notre pays, ce en s'adressant aux policiers dans les termes suivants : "Ca ne sert à rien de me donner une carte de sortie de Suisse, je ne quitterai pas le pays" (P. 5, p. 2 in fine). Ultérieurement, représenté par son syndicat, il a, par écriture adressée au juge d'instruction le 17 septembre 2010, fait savoir que son épouse et lui-même, sous avis de devoir quitter la Suisse, "quitteront le territoire suisse définitivement ces prochains jours (...)" (P. 9). Il n'en a, de son propre aveu, rien fait. A l'audience de première instance, il a en effet expressément confirmé les faits tels qu'ils ressortaient du chiffre 1 de l'ordonnance pénale, d'une part, et les renseignements énoncés dans les rapports de police, d'autre part, précisant que son revenu mensuel était de 2'000 fr. à 3'000 fr. (jugement, p. 2, dernier par., et p. 3 in initio); il a confirmé ces déclarations à l'audience d'appel de ce jour.
Le prévenu a déposé le 19 février 2013 une demande de régularisation; le préavis de la commune est favorable.
1.2 Le casier judiciaire de T._ fait état des inscriptions suivantes :
- 13 novembre 2005, Juge d'instruction de Lausanne, dix jours d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans (révoqué le 10 novembre 2006) et 500 fr. d'amende, pour délit contre la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers;
- 10 novembre 2006, Juge d'instruction de Lausanne, 15 jours d'emprisonnement et 500 fr. d'amende, pour séjour illégal et contravention à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers.
2.
Pour ce qui est de l'
ensemble
des faits incriminés dans la présente procédure pénale lors de la saisine du juge, il est d'abord reproché au prévenu d'avoir, entre le 1
er
novembre 2006 et le 25 mai 2011, date de sa dernière interpellation, séjourné illégalement, sans discontinuer en Suisse, en particulier à Lausanne. Il lui est ensuite fait grief d'avoir, pendant cette période, exercé sans autorisation une activité lucrative auprès de vignerons ou de maraîchers. Enfin, à une date indéterminée en 2007, probablement au mois d'août, l'intimé a fait venir en Suisse son épouse, [...], ressortissante kosovare, alors même que cette dernière ne disposait d'aucune autorisation (P. 4, 5 et 6 précitées).
3.
Par ordonnance pénale du 15 juin 2011, le Procureur de l'arrondissement de la Côte a déclaré T._ coupable d'infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers (I), l'a condamné à une peine privative de liberté de trois mois (II), a dit que cette peine est partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 novembre 2006 par le Juge d'instruction de Lausanne (III) et a mis les frais de procédure, par 375 fr., à la charge de T._ (IV). Comme déjà relevé, l'ordonnance réprime notamment le séjour et le travail illégaux limités à la période du 1
er
novembre 2006 au 25 mai 2011.
Le prévenu a formé opposition contre l'ordonnance pénale précitée, cette contestation étant à l'origine de la présente procédure par l'effet de la dévolution de la cause au juge qui en a découlé. | En droit :
1.
Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision. Il peut également renvoyer l'affaire à l'autorité qui a statué en première instance (art. 107 al. 2 LTF [loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral, RS 173.110]). L'autorité à laquelle l'affaire est renvoyée doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt de cassation et doit s'en tenir aux instructions du Tribunal fédéral (Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, 2
e
éd., Zurich 2006, n. 1488 p. 891). A cet égard, la jurisprudence rendue sous l'empire de l'ancienne procédure fédérale reste tout à fait pertinente (cf. art. 277ter al. 2 aPPF) : le recours ayant circonscrit le débat, il n'appartient pas à l'autorité cantonale de revenir sur des questions qui sortent du cadre des considérants du Tribunal fédéral et elle n'a ainsi plus qu'à examiner, conformément à l'arrêt, les points qui ont donné lieu à cassation (Message du 28 février 2011 concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 4000, spéc. p. 4143; Corboz, Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation,
in
: SJ 1991 pp. 57ss, spéc. pp. 99-100; TF 6B_161/2009 du 7 mai 2009 c. 2.2; ATF 117 IV 97, JT 1993 IV 130).
2.
L'arrêt de la Cour de céans du 28 janvier 2012 n'a été annulé que sur un point, à savoir la qualification de délit continu appliquée à l'infraction d'exercice d'une activité lucrative illicite. Le renvoi de la cause pour qu'une nouvelle peine soit prononcée en découle. L'arrêt cantonal est dès lors entré en force pour le reste. Tel est en particulier le cas en ce qui concerne la qualification de délit continu appliquée au séjour illicite du prévenu. Il en va de même du genre de la peine prononcée, soit une peine privative de liberté.
Cela étant, l'arrêt cantonal retient implicitement que l'activité lucrative illicite du prévenu constituait un délit continu à l'instar du séjour illégal. La juridiction fédérale a considéré à cet égard que les interruptions de travail et la pluralité d'employeurs empêchaient cette qualification (TF 6B_196/2012 du 24 janvier 2013, précité, c. 1.5). Elle a ajouté qu'en fixant la peine, le juge cantonal aura égard à la question de la prescription s'agissant des contraventions à l'art. 23 al. 6 LSEE (ibid.).
3.
3.1
L'état de fait déterminant est délimité par l'ordonnance pénale du 15 juin 2011 qui fait office d'acte d'accusation (art. 356 al. 1, seconde phrase, CPP).
Les activités illicites successives du prévenu dont il a à répondre dans la présente procédure se sont échelonnées
du 1
er
novembre 2006 au 25 mai 2011. Durant ce laps de temps, les dispositions réprimant pénalement le travail illégal ont successivement réglé le genre et la quotité de la peine de deux manières différentes. L'art. 23 al. 6 LSEE dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2007 punit une telle activité d'une amende jusqu'à 2'000 francs; l'art. 115 al. 1 let. c LEtr, entré en vigueur le 1
er
janvier 2008, la réprime d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire. Il s'ensuit que la répression pénale a été accrue dès cette dernière date. Le nouveau droit n'est applicable qu'aux activités illégales exercées dès le 1
er
janvier 2008. A noter que le prévenu ne peut se prévaloir de la
lex mitior
selon l'art. 2 al. 1 CP, s'agissant d'une succession d'actes distincts (TF 6B_196/2012, précité, c. 1.5). Or, les délais de prescription de l'action pénale diffèrent notamment selon le type de la peine.
3.2
L'action pénale se prescrit par sept ans si l'infraction est passible d’une peine privative de liberté de trois ans au plus (art. 97 al. 1 let. c CP); en ce qui concerne spécifiquement les contraventions au sens des art. 103 ss CP, l’action pénale et la peine se prescrivent par trois ans (art. 109 CP). L'art. 23 al. 6 LSEE ne prévoyant qu'une peine d'amende, il définit une contravention au sens de l'art. 103 CP. Le délai de prescription applicable à l'action pénale est donc de trois ans pour les faits antérieurs au 1
er
janvier 2008.
La nouvelle partie générale du code pénal prévoit désormais des délais de prescription absolus (ATF 134 IV 328 c. 2.1; cf. aussi TF 6B_374/2008 du 27 novembre 2008 c. 5.2 ss; TF 6B_314/2011 du 27 octobre 2011 c. 6.1). Il découle de l'art. 97 al. 3 CP qu'un prononcé de condamnation interrompt la prescription (ATF 134 IV 328, précité, ibid.; cf. aussi TF 6B_242/2011 du 15 mars 2012, SJ 2012 I 314).
3.3
Dans le cas particulier, les activités illicites exercées par le prévenu n'ont été réprimées, la première fois, que par le jugement du 21 septembre 2011 faisant suite à l'ordonnance pénale du 15 juin 2011. L'une et l'autre de ces décisions sont postérieures de plus de trois ans aux faits incriminés, s'agissant des infractions de travail illégal perpétrées sous l'empire de l'ancien droit. La poursuite des faits antérieurs au 1
er
janvier 2008 est donc prescrite. A ceci s'ajoute du reste qu'il n'est plus guère possible d'établir l'ampleur exacte des multiples activités lucratives illicites exercées durant cette période.
4.
Il n'en va en revanche pas de même quant à la période postérieure. Pour ce qui est des activités lucratives illégales exercées dès le 1
er
janvier 2008, donc réprimes par le seul art. 115 al. 1 let. c LEtr, la cour retient en fait que les aveux du prévenu établissent l'ampleur et la durée de ses actes. Il a en effet admis gagner sa vie par les activités incriminées, ce en se référant expressément au chiffre 1 de l'ordonnance pénale, ainsi qu'aux rapports de police établis notamment à la suite de son interrogatoire du mois d'août 2010. Il doit en être déduit qu'il ne disposait d'aucune source de revenu licite. Ces déclarations sont du reste confirmées par le syndicaliste [...], qui a précisé que la famille de l'intéressé était autonome et que le prévenu avait "toujours travaillé dans le domaine du bâtiment ou de l'agriculture (...)" (jugement, p. 3). Au regard du salaire indiqué par le prévenu, opposé à son loyer mensuel et aux autres charges irréductibles d'un ménage comportant deux adultes et deux enfants, il doit être tenu pour établi que l'intéressé a, du 1
er
janvier 2008 au 25 mai 2011, travaillé de manière récurrente, qui plus est pour un horaire significatif, pouvant atteindre 50 heures par semaine depuis la mi-août 2010 en tout cas. Même si des variations du taux d'occupation, voire certaines interruptions, ont pu découler du caractère saisonnier du travail agricole et viticole, on ne peut ainsi pour autant parler d'activités qui n'auraient été qu'intermittentes.
5.
5.1
Bien que l'arrêt cantonal n'ait été annulé que sur un point, déjà mentionné, la peine à prononcer par suite du renvoi doit réprimer l'
ensemble
des infractions non prescrites faisant l'objet de la procédure.
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
5.2
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (
objektive Tatkomponente
). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (
subjektive Tatkomponente
). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (
Täterkomponente
), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1 p. 19 s.; ATF 129 IV 6 c. 6.1 p. 20; TF 6B_759/2011 du 19 avril 2012 c. 1.1; TF 6B_335/2012 du 13 août 2012 c. 1.1).
6.
Appréciant la culpabilité de l'auteur, la cour retient en droit qu'il a agi de manière récurrente sur une période prolongée. Les revenus obtenus des activités incriminées sont significatifs. Il ne dispose pas de revenus licites par ailleurs. Plus encore, il a expressément fait part aux enquêteurs de son dessein de poursuivre son séjour illicite en Suisse pour une durée indéterminée, avant de confirmer ces propos à l'audience de première instance et à l'audience d'appel de ce jour en insistant sur la continuité de son comportement. Il ne peut qu'être déduit de ces propos que, loin de se limiter à vouloir demeurer en Suisse, il entend en outre poursuivre ses activités lucratives illicites tant qu'il séjournera dans notre pays. La situation lors de l'interrogatoire du 20 août 2010 doit ainsi être tenue pour invariable jusqu'au 25 mai 2011 à tout le moins. L'auteur a donc, sans discontinuer, agi dans le dessein de maintenir l'état de fait délictueux. A ceci s'ajoute qu'il a pris des dispositions délibérées pour se soustraire aux poursuites pénales et, partant, pour faire perdurer à son profit cet état de fait contraire au droit, dans la mesure où il a refusé de donner son adresse aux enquêteurs. Persistant dans la délinquance, l'auteur a donc pris la pleine mesure des faits qui lui sont reprochés. Il revendique même l'illicéité de son comportement, qu'il n'envisage pas d'interrompre, exprimant ainsi son mépris de l'ordre légal. A ceci s'ajoutent ses antécédents, tous constitués par des infractions à la législation sur les étrangers, qui ne l'ont pas dissuadé de perpétrer de nouveaux délits similaires sur une longue durée. Il y a ainsi récidive spéciale, outre le délit continu de séjour illicite perpétré sur une longue période. Ces éléments, de poids, doivent être retenus à charge.
A décharge doit être pris en compte l'effet atténuant du changement législatif intervenu avec effet au 1
er
janvier 2008. En effet, une partie du délit continu s'est déroulée sous l'empire de l'art. 23 al. 1 LSEE dans sa teneur du 1
er
janvier au 31 décembre 2007, soit pendant une période où la sanction réprimant le séjour illégal était moins grave que sous le nouveau droit (TF 6B_196/2012, précité, c. 1 et 1.3 in fine). Doivent en outre être mentionnés la stabilisation de la situation sociale de l'intéressé, qui est soutenu par sa commune de résidence dans les démarches de régularisation, et l'écoulement du temps depuis 2011.
L'ensemble de ces éléments témoigne d'une culpabilité considérable. C'est donc une peine privative de liberté de 60 jours, très partiellement complémentaire à celle prononcée le 10 novembre 2006 par le Juge d'instruction de Lausanne, qui doit réprimer les infractions ici en cause.
7.
Vu l'issue de l'appel, l'appelant n'obtenant gain de cause que partiellement, les frais de la procédure d'appel doivent être mis à la charge de l'intimé à raison de la moitié, le solde étant laissé à celle de l’Etat (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). Outre l'émolument (art. 21 al. 1 et 2 TFJP), ces frais comprennent l'indemnité allouée au défenseur d’office du prévenu pour la procédure d’appel (cf. art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP).
Les frais de première instance doivent rester à la charge du prévenu.
Les opérations utiles à prendre en compte sont celles qui ont été effectuées dans la procédure d'appel clôturée par le présent arrêt. Il s'agit ainsi tant de celles antérieures au premier arrêt que de celles afférentes à la reprise de cause, y compris l'audience d'appel (le premier arrêt ayant été rendu en procédure écrite), à l'exclusion donc de la procédure engagée devant la juridiction fédérale. Elles représentent dix heures d'activité à 180 fr. l'heure en sus de 100 fr. de débours. L'indemnité allouée au défenseur d’office du prévenu doit dès lors être arrêtée à 2'052 fr., débours et TVA compris.
L'intimé ne sera tenu de rembourser à l’Etat la moitié du montant de l’indemnité en faveur de son conseil d’office prévue ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bedec650-f384-4f5b-a5be-b3b03c53968a | En fait :
A.
Par jugement du 11 mai 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a notamment libéré T._ des chefs de prévention de voies de fait ainsi que de lésions corporelles simples (V), a rappelé la convention sur intérêts civils dont il a été pris acte pour valoir jugement lors des débats du 7 mai 2015, aux termes de laquelle C._ et N._ ont versé séance tenante la somme de 2'000 fr. à T._, lequel leur en a donné immédiatement quittance, à titre de dommages et intérêts et de participation aux dépens de la procédure pénale, sans reconnaissance de responsabilité, en contrepartie de quoi N._ et T._ ont déclaré retirer réciproquement les plaintes formées à la suite des faits du 26 novembre 2011, instruits sous référence PE[...], affaire jointe à la cause PE12.006361, la plainte déposée par C._ ayant déjà été considérée comme tardive par ordonnance de classement du 19 mars 2014, les parties s’en remettant à justice s’agissant du sort des frais de la cause (VI), a rejeté la prétention de T._ tendant à l’allocation d’une indemnité fondée sur l’art. 429 CPP (VII), et a mis une partie des frais de la cause, par 1'817 fr. 95, à la charge de T._ (VIII).
B.
Par annonce du 12 mai 2015, puis déclaration motivée du 15 juin 2015, T._ a formé appel contre ce jugement, en concluant à la réforme des chiffres VII et VIII du dispositif en ce sens que l’Etat doit lui verser un montant de 4'000 fr., TVA et débours compris, à titre d’indemnité selon l’art. 429 al. 1 let. a CPP pour la procédure de première instance et qu’il ne doit supporter aucun frais de procédure, un montant de 1’449 fr., TVA et débours compris, lui étant au surplus alloué au titre d’indemnité de l’art. 429 al. 1 let. a CPP pour la procédure d’appel.
Le 6 juillet 2015, le Président de la Cour de céans a informé les parties que l'appel serait soumis à la procédure écrite (art. 406 al. 1 let. d CPP).
Par courrier du 7 juillet 2015, T._ a renoncé à déposer un mémoire motivé, se référant intégralement à sa déclaration d’appel motivée du
15 juin précédent.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
T._ est né le [...] 1977 en Algérie, pays dont il est ressortissant. Au bénéfice d’un permis d’établissement C, il est séparé de son épouse qui vit à [...] avec les deux enfants du couple, âgés de dix et cinq ans. Il exerce le métier d’aide-menuisier pour une rémunération mensuelle net de l’ordre de 4'400 fr., allocations familiales comprises à hauteur de 600 francs. T._ verse à son épouse et ses enfants une contribution d’entretien mensuelle de 1'900 fr. et paie un loyer de 1'585 fr., charges comprises. Il bénéfice de subsides pour son assurance maladie et a des dettes liées à un crédit à la consommation, dont le solde s’élève à 6'000 francs.
Le casier judiciaire suisse de T._ fait état des condamnations suivantes.
- 12 janvier 2009, Ministero pubblico del cantone Ticino Lugano, conducteurs se trouvant dans l’incapacité de conduire (ébriété qualifiée), violation grave des règles de la circulation routière, imitation de billets de banque, pièces monnaies ou timbres officiels de valeur sans dessein de faux, peine pécuniaire de 30 jours-amende à
80 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 3 ans, amende de
1'500 francs ;
- 21 novembre 2010, Juge d’instruction de Lausanne, conducteurs se trouvant dans l’incapacité de conduire (ébriété qualifiée), peine pécuniaire de 40 jours-amende à
60 francs.
2.
À Lausanne, le 26 novembre 2011, entre 5 heures et 5 heures 20, alors qu’il se trouvait dans la discothèque « [...]» à [...], T._ a adopté un comportement inadéquat vis-à-vis de certaines clientes de l’établissement. L’agent de sécurité N._, qui était de service dans la discothèque, a alors accompagné T._ à l’extérieur pour lui faire quitter l’établissement. Une fois sortis, l’agent a expliqué à C._, responsable des agents de sécurité de l’établissement qui se trouvait sur place, qu’au vu de son comportement T._ n’avait plus le droit de retourner dans l’établissement. Ce dernier souhaitant récupérer sa veste laissée à l’intérieur de la discothèque, C._ a demandé à un collègue, S._, d’accompagner T._ pour qu’il récupère sa veste.
Les protagonistes soutiennent des versions divergentes s’agissant du déroulement des faits qui se sont produits ensuite, chacun mettant l’autre en cause pour avoir voulu porter atteinte à son intégrité physique.
Selon N._, lorsqu’il est parvenu aux vestiaires de la discothèque, accompagné de S._, T._ lui aurait asséné un coup de poing au niveau de la pommette gauche. N._ aurait alors repoussé T._ au niveau du visage avec sa main ouverte. Avec l’aide de son collègue S._, ils auraient alors fait ressortir T._ de l’établissement.
Selon T._, S._ et N._ auraient voulu le faire sortir de l’établissement sans qu’il n’ait eu le temps de reprendre sa veste. N._ aurait poussé T._ à plusieurs reprises, qui aurait alors agi en le repoussant à son tour au niveau du thorax. N._ aurait alors donné à T._ un coup de poing au niveau du nez, le faisant tomber à terre. Il aurait perdu connaissance. Lorsqu’il aurait repris ses esprits, T._ serait ressorti seul de l’établissement sans avoir pu récupérer sa veste dans laquelle se trouvaient les clefs de son appartement. Il aurait alors dit à C._ que sa veste était toujours à l’intérieur et ce dernier l’aurait alors sprayé au visage avec une bombe au poivre.
Entendu par la police le 5 juillet 2012, C._ a déclaré que lorsque N._ et S._ étaient ressortis de la discothèque avec T._, celui-ci saignait du nez et était passablement énervé. Il aurait essayé de le calmer mais ce dernier l’aurait insulté et lui aurait craché du sang au visage de sorte qu’il n’aurait pas eu d’autre choix que de le sprayer avec sa bombe au poivre.
Le 16 juillet 2012, S._ a quant à lui expliqué aux policiers qu’une fois sorti de l’établissement, T._ aurait craché du sang sur C._. Ce dernier lui aurait demandé d’arrêter sinon il allait le sprayer. T._ aurait alors répondu qu’il n’en avait rien à faire, continuant à insulter et à cracher du sang sur l’agent de sécurité. C._ lui aurait alors fait une dernière injonction et il aurait été obligé de le sprayer.
Appelée par des personnes présentes aux abords de la discothèque, la police est intervenue sur les lieux et T._ a été amené au CHUV afin de faire soigner ses blessures. Il a souffert de plusieurs hématomes et tuméfactions au niveau de la tête et des bras droit et gauche, ainsi que d’une fracture de l’os propre du nez.
N._ a, quant à lui, eu le nez et la pommette gauche tuméfiés.
Après les faits décrits ci-dessus, T._ est allé dormir durant quelques jours chez K._, un ami habitant à [...], avant d’aller récupérer un double des clefs de son appartement auprès de son épouse à [...] et de retourner chez lui à [...].
Le 15 décembre 2011, T._ a déposé plainte.
N._ a déposé plainte le 19 décembre 2011 et C._ a déposé plainte le 5 juillet 2012.
3.
Une instruction pénale a été ouverte à la suite des plaintes susmentionnées.
Par ordonnance du 7 mars 2013, le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne a notamment refusé d’entrer en matière sur les plaintes déposées par T._ et N._, considérant que les conditions à l’ouverture d’une action pénale n’étaient pas réunies.
Par arrêt du 8 juillet 2013 (CREP 8 juillet 2013/422), la Chambre des recours pénale a admis le recours déposé par T._, annulé l’ordonnance de non-entrée en matière du 7 mars 2013 et renvoyé le dossier de la cause au Ministère public pour qu’il procède aux mesures d’instructions utiles à établir l’éventuelle commission d’une infraction à la charge de l’un ou l’autre des protagonistes. Cette Cour a en outre invité T._ à requérir une éventuelle indemnité au sens de l’art. 429 CPP à la fin de la procédure, les frais de la procédure de recours étant au surplus laissés à la charge de l’Etat.
Par acte d’accusation complémentaire du 19 mars 2014, le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne a requis la condamnation de N._, pour lésions corporelles simples, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à 40 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, la condamnation de C._, pour lésions corporelles simples, subsidiairement voies de fait, à une peine pécuniaire ferme de 300 jours-amende à 50 fr. le jour, subsidiairement à une peine pécuniaire de 270 jours-amende, à 50 fr. le jour, et à une amende de 500 fr., convertible en 5 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement dans le délai imparti, et enfin la condamnation de T._, pour lésions corporelles simples, subsidiairement voies de fait, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à 50 fr. le jour, subsidiairement à une amende de 500 fr, convertible en 5 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement dans le délai imparti.
Lors des débats que se sont tenus le 7 mai 2015 devant le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne, les parties ont convenu de ce qui suit :
« I. M. C._ et M. N._ versent séance tenante la somme de 2’000 fr. à T._, lequel leur en donne immédiatement quittance, à titre de dommages et intérêts et de participation aux dépens de la procédure pénale, sans reconnaissance de responsabilité ;
II. Au bénéfice de ce qui précède, N._ et T._ retirent réciproquement les plaintes formées à la suite des faits du 26 novembre 2011, instruits sous référence PE[...], affaire en l’occurrence jointe à la cause PE12.006361 ; il est au surplus précisé que la plainte déposée par C._ a d’ores et déjà été considérée comme tardive selon l’ordonnance de classement du 19 mars 2014 ;
III. Parties s’en remettent à Justice s’agissant du sort des frais de la cause. »
T._ a au surplus requis l’allocation en sa faveur d’un montant de 4'000 fr. pour la procédure de première instance, et d’un montant de 1'400 fr. pour la procédure de recours, au titre d’indemnités de l’art. 429 CPP à la charge de l’Etat.
Prenant acte de la convention passée entre les parties pour valoir jugement, le Tribunal de police a notamment libéré T._ des chefs de prévention de voies de fait ainsi que de lésions corporelles simples. Il a toutefois rejeté sa demande d’indemnisation au sens de l’art. 429 CPP, pour le motif qu’il était suffisamment établi que T._ avait eu un comportement globalement inadéquat qui permettait de dire qu’il était à l’origine de la poursuite pénale et que si, finalement, il n’encourrait aucune condamnation, ce n’était qu’en raison du retrait de la plainte de N._ (jgt., pp. 29-30). Le premier juge a en outre réparti les frais de la procédure entre les trois prévenus, relevant que ces derniers avaient été libérés au bénéfice de leurs retraits de plaintes réciproques et que leur comportement et les plaintes qu’ils avaient tous déposées avaient rendu l’instruction nécessaire (jgt., p. 37). | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de T._ est recevable.
L’appel relève de la procédure écrite, dès lors qu’il porte uniquement sur la question des frais et l’allocation d’une indemnité (art. 406 al. 1 let. d CPP).
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Dans un moyen qu’il convient d’examiner en premier, l’appelant conteste devoir payer une part des frais de la procédure de première instance, aucun comportement fautif de sa part ne pouvant être établi selon lui. Par ce grief, il reproche au premier juge d’avoir violé l’art. 426 al. 2 CPP.
3.1
Aux termes de l’art. 426 al. 2 CPP, lorsque la procédure fait l’objet d’une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s’il a, de manière illicite et fautive, provoqué l’ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.
La condamnation d’un prévenu acquitté à supporter tout ou partie des frais doit respecter la présomption d’innocence. Celle-ci interdit de rendre une décision défavorable au prévenu libéré en laissant entendre que ce dernier serait néanmoins coupable des infractions qui lui étaient reprochées. Une condamnation aux frais n’est ainsi admissible que si le prévenu a provoqué l’ouverture de la procédure pénale dirigée contre lui ou s’il en a entravé le cours. A cet égard, seul un comportement fautif et contraire à une règle juridique, qui soit en relation de
causalité avec les frais imputés, entre en ligne de compte (ATF 119 la 332 c. 1b;
ATF 116 la 162 c. 2c).
Pour déterminer si le comportement en cause est propre à justifier l’imputation des frais, le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l’ordre juridique suisse pris dans son ensemble, dans le sens d’une application par analogie des principes découlant de l’art. 41 CO. Le fait reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement (ATF 119 la 332 c. 1 b; 116 la 162 c. 2d). En cas d’acquittement partiel, la jurisprudence a reconnu qu’une certaine marge d’appréciation devait être laissée à l’autorité parce qu’il est difficile de déterminer avec exactitude les frais qui relèvent de chaque fait imputable ou non au condamné (TF 6B_218/2013 du
13 juin 2013 c. 5.2; TF 6B_45/2011 du 12 septembre 2011 c. 3.1). Ce principe doit également valoir dans le cas où seule une partie des faits pour lesquels le poursuivi a bénéficié d’un acquittement constitue un comportement fautif contraire à une règle juridique.
3.2
En l’espèce, il ressort des procès-verbaux d’auditions que l’appelant a bel et bien adopté un comportement inadéquat vis-à-vis de certaines clientes de l’établissement « [...]» dans la nuit du 26 novembre 2011 et qu’il a dès lors été prié de quitter les lieux par les agents de sécurité (PV aud. 1, p. 1 ; PV aud. 2, p. 1 ; PV aud. 3, R. 5 ; PV aud. 4, R. 6 ; PV aud. 5, R. 6). L’ami de l’appelant, K._, dont les déclarations n’ont pas à être mises en doute, a d’ailleurs confirmé ce point lorsqu’il a été entendu par les policiers le 3 novembre 2012 (PV aud. 7, R. 5). Il ressort également des déclarations de plusieurs témoins que T._ a craché du sang sur C._ et que lorsque ce dernier lui a dit d’arrêter à défaut de quoi, il ferait usage de son spray au poivre, T._ a dit « rien à foutre » avant de cracher à nouveau sur l’agent de sécurité (PV aud. 5, R. 6 ; PV aud. 6, R. 5 ; jgt., p. 13). La thèse soutenue par l’appelant selon laquelle C._ lui aurait sprayé le visage sans raison est ainsi totalement contredite.
Compte tenu de ces circonstances, le premier juge a apprécié les preuves mises à sa disposition de manière correcte et complète. Il en découle que le comportement civilement illicite de l’appelant est bien à l’origine de l’intervention des agents de sécurité et de la poursuite pénale, étant précisé qu’en droit pénal, les fautes ne se compensent pas. Cette analyse de la situation ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmée. En répartissant les frais de la procédure de première instance entre les trois protagonistes, le premier juge a correctement appliqué l’art. 426 al. 2 CPP. Ce grief, mal fondé, doit dès lors être rejeté.
4.
L’appelant reproche au premier juge de ne pas lui avoir alloué les montants de 4'000 fr., en relation avec la procédure de première instance et de
1'400 fr., pour la procédure de recours, au titre d’indemnités de l’art. 429 al. 1 let. a CPP.
4.1
Selon l'art. 429 al. 1 CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (let. a), à une indemnité pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale (let. b), à une réparation du tort moral subi en raison d’une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté (let. c).
L’art. 430 al. 1 let. a CPP dispose toutefois que l'autorité pénale peut réduire ou refuser l'indemnité si le prévenu a provoqué illicitement et fautivement l'ouverture de la procédure.
Les principes qui régissent la condamnation aux frais d'un prévenu libéré (art. 426 al. 2 CPP) valent également
, mutatis mutandis,
pour le refus d'une indemnité au sens de l'art. 430 al. 1 let. a CPP. Ainsi, le sort réservé aux frais est en règle générale le même que pour les indemnités (CAPE 21 mars 2014/94 c. 4.1 et réf.). Il n’y a pas lieu d’envisager une indemnisation du prévenu en cas de condamnation aux frais, l’obligation de supporter les frais et l’allocation d’une indemnité s’excluant réciproquement (ATF 137 IV 352 c. 2.4.2).
4.2
En l’espèce, c’est le comportement inadéquat de l’appelant qui est à l’origine de la procédure pénale de sorte que les conditions d’une réduction ou d’un refus d’indemnité au sens de l’art. 430 al. 1 let. a CPP sont réunies. Il convient encore de trancher entre une réduction ou un refus d’indemnité en faveur de l’appelant.
À l’issue de la procédure, on constate que l’appelant est chargé d’une part des frais de la cause puisqu’il est à l’origine de l’action pénale. Par ailleurs, et comme l’a relevé à raison le premier juge, c’est le retrait de plainte de N._ – voir la prescription s’agissant des voies de fait à l’encontre de C._ – qui a permis d’acquitter l’appelant. Le refus de lui allouer une indemnité au sens de l’art. 429 CPP était dès lors fondé. Ce refus se justifie d’autant plus qu’en application du chiffre I de la convention signée par les parties le 7 mai 2015, T._ a déjà obtenu une compensation financière de la part de N._ et de C._ à hauteur de 2'000 fr. à titre de dommages et intérêts et de participation aux dépens de la procédure pénale.
5.
En définitive, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l'issue de l’appel, les frais de la procédure d'appel, par 1’210 fr.
(art. 21 al. 1 TFIP [des frais de procédure et indemnités en matière pénale du
28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), doivent être mis à la charge de l’appelant, qui succombe entièrement (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP).
L’appel étant rejeté, il n’y a pas lieu d’allouer à T._ une indemnité au sens de l’art. 429 CPP pour la procédure d’appel. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
bf5724c9-d449-43e7-a216-ed2a85880f63 | En fait :
A.
Par jugement du 3 février 2012, le Tribunal criminel de l’arrondissement de Lausanne a notamment libéré G._ des chefs d'accusation de dommages à la propriété, menaces et violation de domicile (I), a constaté qu'il s’était rendu coupable d’agression, contrainte, séquestration et enlèvement et infraction grave à la LStup (II), a révoqué la libération conditionnelle qui lui avait été accordée le 28 mai 2010 par le Tribunal d'application des peines et mesures de Genève, portant sur un solde de peine d’un an, quatre mois et quatre jours (III), l’a condamné à six ans de privation de liberté sous déduction de 350 jours de détention avant jugement, peine d’ensemble comprenant le solde susmentionné (IV), a ordonné son maintien en détention pour des motifs de sûreté (V), a constaté que P._ s’était rendu coupable d’infraction grave à la LStup, entrée illégale, séjour illégal et exercice d'une activité lucrative sans autorisation (VI), l’a condamné à trois ans de privation de liberté sous déduction de 350 jours de détention avant jugement (VII), a ordonné son maintien en détention pour des motifs de sûreté (VIII), a soumis le montant de 400 fr., séquestré sous fiche n° 13481/11, au droit de compensation de l’Etat de Vaud pour le paiement des frais de procédure mis à la charge de G._ au chiffre XX ci-dessous (XVII), a ordonné la confiscation et la destruction de tous les documents et objets séquestrés sous fiches n° 13482/11, 13481/11 et 13480/11 et a dit que les objets séquestrés sous fiche n° 13294/11 seront transmis au Procureur en charge de l’enquête PE11.018611-PGT (XIX), a mis les frais de justice par 8'024.20 fr. à la charge de G._ et par 13'672 fr. 70 à la charge de P._ et a dit que ces frais comprennent l’indemnité allouée à leur défenseur d’office, soit respectivement Me A. Gutowsky, par 2'349 fr., et Me J. Rouvinez, par 8'000 fr., dites indemnités devant être remboursées à l’Etat de Vaud dès que la situation financière des prévenus le permettra (XX et XXI).
B.
Le 9 février 2012, G._ a annoncé faire appel. Par déclaration d’appel du 19 mars 2012, il a conclu principalement à la réforme du jugement entrepris en ce sens qu’il est condamné à une peine privative de liberté "très sensiblement inférieure" à celle prononcée par les premiers juges, subsidiairement à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité de première instance pour nouvelle instruction et nouvelle décision.
Le 10 février 2012, le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois a formé appel contre ce jugement. Dans sa déclaration d’appel du 19 mars 2012, il a conclu à la réforme des chiffres IV et VII dudit jugement en ce sens que G._ est condamné à une peine privative de liberté de huit ans et P._ à une peine privative de liberté de cinq ans.
Par courrier du 23 mars 2012, le Ministère public a annoncé qu'il s'en remettait à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel déposé par G._.
Par courrier du 5 avril 2012, ce dernier a annoncé qu’il renonçait à présenter une demande de non-entrée en matière.
Le 12 avril 2012, P._ a formé un appel joint, concluant principalement à la réforme du jugement en ce sens qu’il est condamné à une peine privative de liberté "inférieure" à celle prononcée, subsidiairement à son annulation et au renvoi de la cause au Tribunal d'arrondissement de Lausanne pour nouvelle instruction et nouvelle décision.
Par lettre du 18 avril 2012, le Ministère public a annoncé qu'il s'en remettait à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel joint.
Aux débats d'appel, les parties ont chacune confirmé leurs conclusions.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
Né en 1966 à Kinshasa en République Démocratique du Congo, pays dont il est ressortissant, G._, troisième d'une famille de six enfants, a été élevé par sa mère. Après avoir effectué sa scolarité obligatoire et poursuivi ses études universitaires jusqu'à l'obtention d'un diplôme dans le domaine de la comptabilité, il a travaillé comme ouvrier, avant de s'établir en France en 1999, où il s'est marié l'année suivante avec [...]. Aucun enfant n'est issu de cette union. Le prévenu s'est établi en Suisse en 2001 et s'est installé à Lausanne en 2004 avec sa nouvelle compagne dont il a eu une fille, [...], née le 4 avril 2010. Il aurait, selon ses dires, encore deux enfants majeurs au Congo; il participerait à leur entretien en envoyant de l'argent trois à quatre fois par an à leur mère. Il est titulaire d’un permis d’établissement. Au moment de son arrestation, il était employé d’une société genevoise de tri des déchets et gagnait 4'000 fr. brut par mois. Il a déclaré avoir des dettes principalement pour des impôts et des primes d'assurance impayées dont il ignore toutefois l'ampleur.
Son casier judiciaire comporte les inscriptions suivantes :
- 27 novembre 2002, Tribunal de police de Genève, opposition aux actes de l’autorité, amende 500 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 1 an;
- 25 avril 2005, Ministère public du canton de Genève, circuler malgré un retrait ou refus du permis de conduire, arrêts 10 jours, sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 1 an, amende 500 fr.;
- 2 juillet 2008, Cour correctionnelle de Genève, crime contre la LStup, peine privative de liberté 4 ans, détention préventive 262 jours;
- 28 mai 2010, Tribunal d’application des peines et mesures de Genève, libération conditionnelle le 18 juin 2010, délai d’épreuve jusqu’au 22 octobre 2011, peine restante 1 an 4 mois et 4 jours, assistance de probation.
1.2.
Né en 1978 à Kankan en Guinée-Bissau, pays dont il est ressortissant, P._ a été élevé par sa tante. Il a été scolarisé durant dix ans et a ensuite travaillé comme vendeur ambulant. Il est venu en Suisse en 1999 et a déposé une demande d’asile qui a été rejetée, ce qui ne l’a pas empêché de demeurer dans notre pays jusqu’en 2007. De 2000 à 2007, il a vécu en concubinage avec une personne dont il a eu une fille, [...], née en 2004. En 2007, il s'est installé en Belgique, où il a vécu jusqu’au 27 novembre 2010, date à laquelle il est revenu en Suisse où il a séjourné sans permis jusqu’à son arrestation dans le cadre de la présente affaire. Il a déclaré avoir participé à l'entretien de sa fille alors qu'il était en Belgique. Après son retour en Suisse, il a travaillé occasionnellement comme déménageur.
Son casier judiciaire comporte les inscriptions suivantes :
- 9 juillet 2001, Cour de cassation pénale Lausanne, infraction grave et contravention à la LStup, emprisonnement 16 mois, détention préventive 176 jours, expulsion (répercussion abolie) 6 ans;
- 14 avril 2004, Tribunal correctionnel Lausanne, infraction grave et contravention à la LStup, rupture de ban, réclusion 2 ans et 6 mois, détention préventive 230 jours, expulsion (répercussion abolie) 10 ans;
- 29 décembre 2006, Juge d’instruction de Lausanne, rupture de ban, violation des règles de la circulation routière, conducteur se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule automobile, taux alcoolémie qualifié), conducteur se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule automobile, autres raisons), vol d’usage, conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait (véhicule automobile), contravention à la LStup, emprisonnement 100 jours, détention préventive 100 jours;
- 5 juin 2008, Juge d’instruction de Lausanne, recel, circuler sans permis de conduire, séjour illégal, infraction et contravention à la LStup, peine privative de liberté 180 jours, détention préventive 22 jours.
1.3.
Les deux prévenus sont en détention avant jugement depuis le 19 février 2011, date de leur arrestation.
2.
2.1
P._, bien qu’il fasse l’objet d’une décision de non-entrée en matière sur sa demande d’asile, valable depuis avril 2000, et d’une interdiction d’entrer en Suisse depuis le 5 décembre 2010, est revenu dans notre pays le 27 novembre 2010 et y est demeuré jusqu’au 19 février 2011, travaillant occasionnellement au noir comme déménageur.
2.2
En hiver 2010/2011, G._ a demandé à un certain J._, surnommé "[...]", de l’aider à trouver quelqu’un pour "faire son business", c’est-à-dire vendre sa drogue. Celui-ci a contacté P._ qui s’est dit intéressé à faire l’intermédiaire. Les trois hommes se sont rencontrés dans un café de Lausanne, vers le 14 février 2011. P._ a demandé à G._ combien il avait à vendre et il s’est vu répondre "beaucoup". Sa commission a été fixée à 20 fr. les 10 grammes écoulés.
Le 16 février 2011, à l’avenue de Genève à Lausanne, G._ a remis 500 grammes de cocaïne, préparés en fingers de 10 grammes, à P._. Celui-ci était censé récupérer la contre-valeur de cette marchandise en espèces sonnantes et trébuchantes auprès du client pour lequel il faisait l’intermédiaire mais n’est jamais revenu remettre le prix convenu au vendeur, soit selon ses dires 26'500 fr., parce que, toujours selon P._, l’acheteur l’avait dépossédé de la cocaïne sous la menace d’une arme, sans le payer. G._, frustré et furieux contre P._, a obtenu son numéro de téléphone par J._. Le 17 février 2011, il lui a envoyé un sms, le traitant d’escroc et de voleur et le menaçant de mort. Il a aussi appris d’un cousin de P._ que ce dernier passait la soirée du 18 février 2011 chez Q._, dans un appartement sis au quatrième étage de l’avenue [...] à Lausanne. Il a organisé une expédition pour récupérer son argent ou la drogue par la force. Il a demandé leur aide à W._ et V._, dont les casiers judiciaires étaient fort bien pourvus.
Ainsi, dans la nuit du 18 au 19 février 2011, G._, W._, V._ et le cousin de P._ se sont rendus à cette adresse dans l’Audi TT conduite par le premier nommé. J._ est aussi venu, avec un comparse, dans une autre voiture. Le cousin de P._ leur a communiqué le code d’entrée de l’immeuble puis est parti en taxi.
Le 19 février 2011, vers 1 h 40, G._, W._, V._ et J._ sont montés à l’appartement. Après avoir sonné, les deux premiers ont enfoncé la porte à coups de pied, blessant au front Q._, qui regardait par le judas. W._ et lui ont alors échangé des coups de poing et G._ a aspergé Q._ avec un spray au poivre en lui demandant où était l’argent. W._ et V._ ont saisi ce dernier chacun par un bras et l'ont tiré jusqu’à l’entrée de l’immeuble, accompagnés de G._ qui est ensuite remonté à l’appartement. Ils lui ont demandé où était "[...]", c’est-à-dire P._. A ce moment, le passage d’une patrouille de police dans la rue a créé une certaine confusion dont Q._ a profité pour s’enfuir. Au même moment, J._ leur a annoncé que G._ et lui avaient trouvé la bonne personne. W._ et V._ sont alors remontés à l’appartement.
A cet endroit, J._ a donné un coup de poing à P._ et l’a maintenu en lui passant un bras autour du cou. Les quatre assaillants l’ont obligé à les suivre, J._ en le ceinturant, jusqu’à l’Audi TT parquée en face de l’immeuble, puis à monter à l’arrière de ce véhicule. V._ est aussi monté à l’arrière. G._ et W._ sont montés à l’avant. J._ a rejoint son comparse qui l’attendait dans l’autre voiture et tous deux s’en sont allés.
La police a été appelée par des voisins, alertés par le bruit. Elle a trouvé Q._, qui a raconté sa mésaventure.
L’Audi TT a pris la direction de Genève où W._ devait retrouver son amie. Durant le trajet, les trois assaillants ont frappé P._ à de nombreuses reprises pour qu’il explique ce qu’il avait fait de la drogue. V._ lui a aussi dit que s’il ne parlait pas, il finirait dans le coffre, et lui a pris l’argent qu’il avait dans les poches de son pantalon, soit quelque 380 fr. et 100 euros. G._, W._ et V._ ont passé la nuit dans une discothèque, tandis que P._ était maintenu contre son gré dans la voiture, surveillé à tour de rôle par l’un ou l’autre de ses ravisseurs. P._ a finalement dit avoir les coordonnées des personnes susceptibles de résoudre le problème sur son téléphone mobile resté à Lausanne. Le groupe est donc revenu à Lausanne au petit matin. A 6 h 35, W._ et V._ sont montés à l’appartement avec P._ pour y prendre le téléphone mobile de ce dernier. Ils ont été interpellés par la police. Quelques minutes plus tard, G._, qui s’impatientait, est monté à son tour et a également été arrêté.
P._ et Q._ ont été examinés par le CURML. Les médecins ont noté diverses plaies. Tous deux ont déposé plainte puis l’ont retirée, quelques temps plus tard. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP). L'appel joint doit, quant à lui, être interjeté dans un délai de vingt jours dès la réception de la déclaration d'appel (art. 400 al. 3 CPP)
Le Ministère public a, de droit, la qualité pour faire appel, en application de l'art. 381 al. 1 CPP.
En l’occurrence, interjetés dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels interjetés par le Ministère public et par le prévenu G._ ainsi que l'appel joint déposé par le prévenu P._ sont recevables. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
On examinera tout d’abord l'appel de G._ (ch. 4), puis celui du Ministère public (ch. 5) et enfin l'appel joint de P._ (ch. 6).
4.
4.1
G._ conteste sa condamnation pour infraction à la LStup (Loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951, RS 812.121). Il soutient que le différend qui l’opposait à P._ n’était pas lié à un trafic de cocaïne et que les prévenus ont fait cet aveu pour sortir de prison. Il y aurait un doute sur ce fait. Il relève qu’aux débats, seul V._ a maintenu cette explication, tous les autres prévenus impliqués la contestant désormais, de sorte que les déclarations de cette personne ne seraient pas crédibles.
4.1.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3). La présomption d'innocence, également garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU, 6 par. 2 CEDH et 32 al. 1 Cst., ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1; ATF 127 I 38 c. 2a).
Comme principe présidant à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes (TF 6B_91/2011 du 26 avril 2011 c. 3.2). Des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent pas à exclure une condamnation. Il doit s'agir au contraire de doutes sérieux et irrépressibles (ATF 127 I 38 c. 2a).
4.1.2
En l'espèce, il ressort de ses propres déclarations que G._ a d’abord tout nié. Selon ses premières affirmations (PV aud. 5, p. 3), il n'aurait rien fait de mal; à la sortie d'une discothèque à Lausanne, lui et ses acolytes auraient rencontré P._ dans la rue, pleurant et saignant, qui venait de se faire agresser par d'autres compatriotes, et l'auraient ramené à son domicile pour lui rendre service. Dans son audition du 17 mars 2011 (PV aud. 16, pp. 2 s.), il a finalement admis que P._ lui devait de l’argent et qu’il avait organisé une expédition pour venir le récupérer; il a toutefois expliqué que cette action n'était nullement en rapport avec un trafic de drogue, mais consécutive à une escroquerie dont il aurait été victime, et que personne n’aurait été frappé délibérément au cours des événements du 19 février 2011.
Lors de sa toute première audition (PV aud. 2), P._ a, quant à lui, confirmé l’agression, l’enlèvement, le vol de son argent, mais n’a donné aucune explication ni quant au motif de son enlèvement, ni quant à ses agresseurs qu'il a prétendu ne pas connaître (cf. ég. PV aud. 10); il a également déclaré ne pas vouloir déposer plainte par peur. Q._ a aussi évoqué une agression, contre lui-même et P._, mais a précisé ne pas en connaître la raison (PV aud. 1).
W._ a tout nié lors de sa première audition, donnant une version des faits identique à celle de G._ dans sa première déposition (PV aud. 3, p. 3). En revanche, V._, après avoir quelque peu tergiversé, a tout avoué (en minimisant parfois un peu), évoquant un trafic de drogue (PV aud. 4). W._, dès sa troisième audition du 19 février 2011, et P._, dès le 15 mars 2011, ont eu la même explication au sujet du motif de l’expédition, soit une transaction de cocaïne qui avait mal tourné. J._ a aussi, dès sa première audition le 10 mars 2011, avoué cet élément et son rôle (PV aud. 14). Les faits dans leurs détails concordent.
Par la suite, le 10 mai 2011, P._ est revenu sur ses précédentes déclarations, soutenant que le différend était lié à une histoire d'escroquerie de type "wash-wash" et qu’il n’avait pas vraiment été forcé de suivre ses assaillants (PV aud. 19). Lors d’une audition de confrontation, W._ et J._ sont aussi revenus sur leurs propos, prétendant qu’ils ignoraient le motif du litige (PV aud. 20).
Aux débats de première instance (jugt, p. 10), W._ a déclaré que G._ avait seulement prêté de l’argent à P._. J._ a confirmé que G._ et P._ avaient des relations liées à un trafic de drogue tout en niant son propre rôle et en déclarant qu’il pensait désormais que le problème entre les deux prévenus concernait "une affaire de multiplication d’argent", ce dont il aurait entendu parler "lors de la dernière audition devant le Procureur" (jugt, p. 14).
V._, entendu à quatre reprises en cours d'enquête et devant le tribunal, a, quant à lui, toujours maintenu la même version des faits.
Avec les premiers juges, qui ont observé que tant G._ que P._ avaient des antécédents en matière de trafic de stupéfiants, de sorte que leur association pour une affaire de ce type était vraisemblable, on préférera les explications concordantes faites par toutes les personnes impliquées quant au motif du différend entre G._ et P._, soit une transaction de cocaïne qui a mal tourné, aux dénégations de G._ et aux revirements de W._ et P._ que ceux-ci n’ont pas pu justifier. P._ était incarcéré dans la même prison que G._ et W._ était son ami. La peur, respectivement l’amitié, et non le souci soudain de la vérité, expliquent ces nouvelles versions. Le 15 mars 2011, P._ s’est personnellement mis en cause, et, comme l’ont relevé les premiers juges, il l’a fait en présence de son avocat. Il n’avait aucune raison de mentir en ce sens en s'auto-incriminant. L’appelant soutient que les prévenus ont faussement avoué un trafic dans l’espoir d’être libérés plus tôt, comme l’avait été V._. Même si on le suivait sur ce point, cela ne signifierait pas que les faits sont faux; d'ailleurs, ni J._, ni V._ n’étaient encore arrêtés au moment où ils ont avoué les faits.
Il sied en outre de constater que dans son appel joint (p. 4), P._ ne conteste plus le trafic de drogue, mais exprime au contraire "des regrets pour avoir compliqué l’instruction en revenant sur ses déclarations du 15 mars 2011", déclarations qu'il a confirmées à l'audience d'appel (p. 3
supra
, la "seconde audition" par la police à laquelle il se réfère étant celle du 15 mars 2011).
Mal fondé, le moyen tiré d'une constatation erronée des faits invoqué par G._, qui se limite à substituer sa propre version des faits à celle retenue par les premiers juges sans démontrer en quoi les faits admis par le tribunal seraient faux, doit donc être rejetée, de sorte que c'est à juste titre que celui-ci a reconnu G._ coupable de trafic de stupéfiants.
4.2
L’appelant conteste ensuite sa condamnation pour infraction grave à la LStup. Il soutient qu’on ignore le type et la quantité de drogue concernée par la transaction litigieuse. Celle-ci n’ayant pu être saisie, on ne pourrait pas affirmer qu’il s’agit d’un cas grave (18 grammes pour la cocaïne). Selon lui, la jurisprudence exigerait qu’on détermine concrètement le taux de pureté du produit trafiqué, et non abstraitement sur la base de statistiques.
Cet argument peut être rejeté pour le même motif que le précédent. Il ressort des déclarations concordantes de W._ (PV aud. 8 et 13), V._ (PV aud. 4 et 7) et P._ (PV aud. 15) qu’il s’agissait bel et bien de 500 grammes de cocaïne. Il n’a jamais été question d’un autre produit ou d’une autre quantité. Par ailleurs, dès lors que la drogue n'était plus disponible pour une analyse, il était parfaitement admissible de tenir compte des statistiques en matière de pureté (cf. TF 6B_600/2011 du 18 octobre 2011 c. 1.3 et la référence citée), comme l'ont fait les premiers juges en référence au degré de pureté habituel à l'époque du trafic (pièce 148). Par conséquent, l'appréciation du tribunal, qui a retenu une quantité de drogue pure trafiquée de 240 grammes, ne prête pas le flanc à la critique et peut donc être confirmée.
Partant, le moyen tiré d'une violation de l'art. 19 ch. 2 aLStup est mal fondé et doit être rejeté.
4.3
G._ estime que si un trafic de drogue était avéré, J._ aurait aussi dû être poursuivi pour infraction à la LStup, étant impliqué dans l’affaire.
L’appelant a raison (et cela vaut aussi pour d’autres infractions, comme l’a relevé le tribunal en p. 55 de son jugement), mais ce n’est pas un motif pour l’acquitter si les faits sont avérés. En effet, il n'y a pas d'égalité dans l'illégalité, selon un principe admis en jurisprudence. Au demeurant, le Procureur a relevé à l'audience d'appel que J._ faisait bel et bien l'objet d'une procédure distincte.
Le grief de G._ est mal fondé et doit donc être rejeté.
4.4
L’appelant conteste sa condamnation pour agression à l’égard de Q._. Il soutient que celui-ci a été blessé par accident, lors de l’ouverture "inopinée" de la porte, et non à la suite de coups portés volontairement. Il conteste en outre avoir fait usage d’un spray, geste qui, au demeurant, n’aurait causé aucune lésion à Q._.
4.4.1
Aux termes de l'art. 134 CP, celui qui aura participé à une agression dirigée contre une ou plusieurs personnes au cours de laquelle l'une d'entre elles ou un tiers a trouvé la mort ou subi une lésion corporelle sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
Pour que les éléments constitutifs de l'agression, qui est une infraction de mise en danger, soient réunis, il faut qu'une ou plusieurs des personnes agressées soient blessées ou tuées. Il s'agit là d'une condition objective de punissabilité. Cela signifie que l'auteur se rend passible d'une peine du seul fait de sa participation à l'agression. Par conséquent, il suffit de prouver l'intention de l'auteur de participer à l'agression, sans qu'il ne soit nécessaire d'établir qu'il a voulu donner la mort ou provoquer des lésions corporelles (ATF 137 IV 152 c. 2.1.1).
A la différence de la rixe (cf. art. 133 CP), qui suppose un assaut réciproque ou une bagarre plus ou moins confuse à laquelle plusieurs personnes prennent part activement (ATF 131 IV 150 c. 2), l'agression se caractérise comme une attaque unilatérale de deux personnes au moins, dirigée contre une ou plusieurs victimes, qui restent passives ou se contentent de se défendre. Pour que l'on puisse parler d'une attaque unilatérale, il faut que la ou les personnes agressées n'aient pas eu elles-mêmes, au moment de l'attaque, une attitude agressive, impliquant que le déclenchement de la bagarre, en définitive, dépendait surtout du hasard, et qu'elles aient par la suite conservé une attitude passive ou alors uniquement cherché à se défendre. En revanche, si leur réaction défensive dépasse par son intensité et sa durée ce qui était nécessaire pour se défendre, l'agression peut se transformer en rixe (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2010, n. 6 ad art. 134 CP).
4.4.2
En l'espèce, il est établi que la porte n'a pas été ouverte de manière "inopinée" comme le prétend l'appelant, mais défoncée alors que les assaillants savaient – ou a tout le moins pouvaient se douter – qu'il y avait quelqu'un derrière (PV aud. 4, p. 4
in initio
; PV aud. 13, p. 2
in fine
). Ensuite, il est démontré que G._ a utilisé son spray contre Q._, que W._ a échangé des coups avec celui-ci et qu’enfin V._ et W._ lui ont fait descendre les escaliers de force, accompagnés de G._ qui était ensuite remonté à l'appartement. La cour de céans fait siens par adoption de motifs les considérants, complets et convaincants, développés à cet égard par le tribunal (jugt, pp. 44 et 54 à 55) selon lequel l’usage du spray résulte des déclarations de divers protagonistes et des constatations des agents de police, qui ont vu des traces sur la porte donnant accès au salon.
Selon le rapport médical (pièce 33), la victime présentait toute une série de lésions démontrant notamment qu’elle avait été frappée à plusieurs reprises au niveau du visage. On en déduit que Q._ a bien été agressé physiquement et qu’il a été blessé à cette occasion. On pourrait éventuellement admettre que la contrainte exercée par W._ et V._ est postérieure à l’agression proprement dite; il n’en demeure pas moins que W._ et G._ s’en sont pris simultanément à leur antagoniste, l’un avec ses poings, l’autre avec un spray.
Selon la jurisprudence précitée, il n’est pas nécessaire, pour qu’un prévenu soit condamné pour agression, que ses coups soient ceux qui sont à l’origine des lésions observées; il n’est pas non plus nécessaire qu’il ait donné des coups proprement dits, toute forme de violence étant possible. Il suffit que l’une des violences exercées par l’ensemble des agresseurs ait causé une lésion à l’agressé. Ce qui est punissable, c’est la participation à une attaque collective qui a porté atteinte à l’intégrité corporelle d'une ou de plusieurs autres personnes. Or, tel est bien le cas en l'occurrence, étant précisé que le rôle de Q._ a été purement défensif, ce qui exclut l'application de l'art. 133 CP (rixe), de sorte que c'est à juste titre que G._ a été reconnu coupable d'agression au sens de l'art. 134 CP.
Le moyen tiré d'une violation de cette disposition est mal fondé et doit donc être rejeté.
4.5
L’appelant remet également en question sa condamnation pour séquestration et enlèvement. Comme pour l’infraction à la LStup, il conteste les faits. Selon lui, P._ aurait toujours été libre de ses mouvements. Il se fonde sur les dernières déclarations faites par tous les protagonistes, à l’exception de V._.
Aux termes de l'art. 183 ch. 1 CP, se rend coupable de séquestration et enlèvement, d'une part, celui qui, sans droit, arrête une personne, la retient prisonnière ou la prive de sa liberté de toute manière, et d'autre part, celui qui, en usant de violence, de ruse ou de menace, enlève une personne.
Contrairement à ce que prétend l'appelant (appel, p. 15
in fine
), les propos de V._ ne sont nullement suspects; au contraire, dans la mesure où celui-ci se met lui-même en cause, il est tout à fait crédible. Le revirement en cours d'enquête de P._, auquel se réfère essentiellement l'appelant (appel, pp. 16 à 19), s’explique, quant à lui, par la crainte, dans la mesure où il était détenu dans la même prison que G._, crainte qu'il a exprimée à l'audience de ce jour (p. 3
supra
); l'intéressé a du reste renoncé à porter plainte également par peur de représailles (PV aud. 2, p. 6). En outre, P._ n'a pas pu justifier son revirement, expliquant aux premiers juges, de manière confuse et contradictoire, qu'il n'avait pas été emmené de force par ses agresseurs, tout en admettant que face à trois adversaires, qui l'ont frappé à plusieurs reprises, il n'avait pas eu le choix (jugt, p. 18). Enfin, aux débats d'appel, il est revenu sur ce revirement et a confirmé les propos tenus lors de son audition par la police le 15 mars 2011 (p. 3
supra
). Q._, lui, n’est jamais revenu sur sa dénonciation, même s’il ne s’est pas présenté aux débats (jugt, p. 17).
Partant, comme les premiers juges, on préférera aux revirements des prévenus et de la victime, les déclarations initiales concordantes des divers protagonistes qui ont admis que P._ avait été enlevé de force et maintenu contre son gré dans la voiture pendant plus de quatre heures, de sorte que c'est à bon droit que le tribunal a, sur la base des faits retenus, reconnu G._ coupable de séquestration et enlèvement au sens de l'art. 183 CP. Mal fondé, le moyen tiré d'une violation de cette disposition doit donc également être rejeté.
4.6
L’appelant estime qu’il ne peut pas être condamné simultanément pour séquestration et enlèvement (183 CP) et pour contrainte (181 CP).
4.6.1
Selon l'art. 181 CP, se rend coupable de contrainte celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte.
Un concours réel entre cette disposition et l'art. 183 CP est envisageable, comme l'admet d'ailleurs l'appelant, lorsque la contrainte va au-delà de ce qui est nécessaire pour réaliser les conditions de l'enlèvement ou la séquestration. Par exemple, l'auteur utilise la violence dans le but non seulement de séquestrer sa victime, mais également de la contraindre à adopter un comportement déterminé (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 41 ad art. 183 CP et la référence citée).
4.6.2
En l'espèce, on se trouve précisément dans cette situation. En effet, il ressort des faits que G._ et ses comparses ont frappé P._ pour lui faire dire où était la drogue ou l’argent. Il y a donc un concours réel, pas idéal, les faits justifiant l’une et l’autre des condamnations n’étant pas les mêmes. L'appelant se fonde une nouvelle fois à tort sur le revirement de P._ et sur certaines des déclarations faites par les autres prévenus, qui, pour les motifs déjà exposés ci-avant, doivent être écartés au profit des versions concordantes des divers protagonistes.
Ce moyen, mal fondé, doit donc également être rejeté.
4.7
G._, qui ne remet pas en cause la décision de réintégration, conteste enfin la quotité de la peine.
Le prénommé fait dépendre son grief uniquement de l'admission de ses précédents moyens (appel, p. 22). Or, dans la mesure où ceux-ci ont été rejetés, comme on vient de le voir, il n'y a pas lieu de revenir, à ce stade, sur l'appréciation de la fixation de la peine par les premiers juges. Pour le surplus, on ne peut que constater, au vu des divers éléments fondant la culpabilité de l'appelant – qui seront examinés ci-après dans le cadre de l'appel du Ministère public (considérant 5.1.2) –, que la peine n'est pas excessivement sévère.
5.
5.1
Le Ministère public invoque une violation de l’art. 47 CP et estime que la peine infligée à G._ est trop clémente, compte tenu de ses antécédents, de la récidive durant la libération conditionnelle, de son attitude durant l’instruction et de la gravité des faits.
5.1.1
Aux termes de l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
Selon la jurisprudence développée sous l'empire de l'art. 63 aCP, les éléments fondant la culpabilité que le juge doit examiner en premier lieu sont ceux qui se rapportent à l'acte lui-même, à savoir : du point de vue objectif, le résultat de l'activité illicite, le mode et l'exécution de l'acte ainsi que, du point de vue subjectif, l'intensité de la volonté délictueuse de l'auteur ou la gravité de la négligence et ses mobiles.
L'importance de la faute dépend de la liberté de décision dont disposait l'auteur; plus il lui aurait été facile de respecter la norme qu'il a enfreinte, plus lourdement pèse sa décision de l'avoir transgressée et, partant, sa faute.
En second lieu, le juge prendra en considération les éléments concernant la personne de l'auteur : ses antécédents, sa situation personnelle, tant familiale que professionnelle – qui comprend l'éducation reçue et la formation suivie – son intégration sociale, voire sa réputation ainsi que son attitude et son comportement après les faits et dans le cadre de la procédure pénale (Nicolas Queloz/Valérie Humbert, in : Roth/Moreillon [éd.], Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 7 ad art. 47 CP; ATF 129 IV 6 c. 6.1, JT 2005 IV 229 c. 6.1; ATF 127 IV 101 c. 2a; ATF 118 IV 21 c. 2b).
L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 134 IV 17 c. 2.1; 129 IV 6 c. 6.1 et les références citées).
En matière de trafic de stupéfiants, il y a lieu de tenir compte, plus spécialement, des circonstances suivantes. Même si la quantité de drogue ne joue pas un rôle prépondérant, elle constitue sans conteste un élément important. Elle perd cependant de l'importance au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la limite à partir de laquelle le cas doit être considéré comme grave au sens de l'art. 19 ch. 2 let. a a
LStup
. Le type et la nature du trafic en cause sont aussi déterminants. L'appréciation est différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, il importera de déterminer la nature de sa participation et sa position au sein de l'organisation: un simple passeur sera ainsi moins coupable que celui qui joue un rôle décisif dans la mise sur pied des opérations et qui participe de manière importante au bénéfice illicite (ATF 131 IV 202 c. 2d/cc). L'étendue du trafic entrera également en considération. Un trafic purement local sera en règle générale considéré comme moins grave qu'un trafic avec des ramifications internationales. Le nombre d'opérations constitue également un indice pour mesurer l'intensité du comportement délictueux; celui qui écoule une fois un kilo d'héroïne sera en principe moins sévèrement puni que celui qui vend cent grammes à dix reprises (TF 6S.21/2002 du 17 avril 2002 c. 2c; TF 969/2010 du 31 mars 2011 c. 3.1 et les références citées). Enfin, les mobiles, c'est-à-dire les raisons qui ont poussé l'auteur à agir, ont une influence sur la détermination de la peine. Il conviendra ainsi de distinguer le cas de l'auteur qui est lui-même toxicomane et qui agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain (
ATF 122 IV 299
c. 2b p. 301).
5.1.2
En l'espèce, le tribunal a tenu compte, à charge, de la quantité de cocaïne vendue par G._ attestant de sa position élevée dans ce trafic, du fait que c'est lui qui a organisé l'expédition de la nuit du 18 au 19 février 2011, choisissant avec soin des hommes de main afin de commettre un acte de justice privée, de sa récidive spéciale dans le délai d'épreuve assortissant sa libération conditionnelle, du fait qu'il n'a tiré aucune leçon de ses précédentes condamnations et du concours d'infractions. Il a encore fait référence aux mensonges répétés du prévenu, à la mauvaise impression qu'il a donnée en audience et au fait que son activité criminelle a été interrompue uniquement par son interpellation. A décharge, il a pris en considération les regrets exprimés.
Si les premiers juges n'ont omis aucun des éléments relevés par le Ministère public, ils ne se sont en revanche pas prononcés sur le mobile et la situation personne du prévenu. Or, force est de constater que G._, qui dit avoir poursuivi des études universitaires, est titulaire d'un permis C et avait un travail au moment des faits; il n'avait dès lors aucune excuse à son comportement et a donc agi dans un pur dessein de lucre. Le fait qu’une personne intelligente, intégrée socialement et professionnellement, se lance dans une activité criminelle de cette ampleur, à laquelle aucune détresse ne le poussait est plus que préoccupant, dans la mesure où, dans ces circonstances, il aurait été aisé pour ce prévenu de renoncer à son trafic de drogue (ATF 127 IV 101 c. 2a précité). Par ailleurs, il paraît évident que les regrets formulés en toute fin d'audience (jugt, p. 26) sont de pure forme. En effet, ni en première instance, ni aux débats d'appel, l'intimé n'a donné l'impression de réaliser la gravité de ses actes. Ses constantes dénégations contre l'évidence démontrent un défaut de prise de conscience de sa culpabilité ainsi que d'une réelle volonté d'amendement.
On insistera tout particulièrement sur la gravité du comportement de G._, qui a démontré qu'il était prêt à s'en prendre à quiconque, innocent ou coupable, se trouve sur son chemin.
La fixation de la sanction doit tenir compte du fait qu'elle intègre un solde de peine dont l’exécution est ordonnée ensuite d’une révocation de libération conditionnelle. On rappellera à cet égard que le Tribunal fédéral a, quant à la manière d’appliquer l'art. 49 CP auquel renvoie l’art. 89 al. 6 CP, énoncé notamment que le juge doit fixer la peine conformément au principe de l'absorption, à opposer au principe du cumul; ce faisant, il doit partir de la quotité de la peine réprimant l'infraction commise durant le délai d'épreuve, prononcée selon l'art. 47 CP, pour l'accroître à la mesure du solde de peine restant à purger pour aboutir à une peine d'ensemble fixée rétrospectivement en application de l'art. 49 CP (TF 6B_28/2008 du 10 avril 2008 c. 3.3.1 et 6B_685/2010 du 4 avril 2011). En l'espèce, le solde de peine à exécuter étant de quelque un an et quatre mois, cela signifie que le tribunal a condamné le prévenu à quelque quatre ans et huit mois (et non cinq ans comme il résulte de la p. 59 du jugement) pour les faits qui se sont passés durant le délai d'épreuve assortissant la libération conditionnelle. Or, au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent et de la jurisprudence relative à l'art. 47 CP, il faut reconnaître que la condamnation à une peine privative de liberté de quatre ans et huit mois pour les faits jugés est trop clémente. Il se justifie, en définitive, de prononcer une peine privative de liberté d'ensemble de sept ans.
L'appel du Ministère public, qui réclame une peine de huit ans, doit donc être partiellement admis en ce qui concerne G._.
5.2
Pour ce qui est de la peine à l'encontre de P._, le Ministère public conclut à ce que soit prononcé une peine de cinq ans de privation de liberté. Selon lui, la peine de trois ans qui a été infligée au prénommée est trop clémente. Il fait valoir que la quantité de drogue sur laquelle porte l’infraction à la LStup représente plus de treize fois le seuil du cas grave. Il relève que le prévenu s’est aussi rendu coupable d’infraction à la LEtr (Loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005, RS 142.20), qu’il a compliqué l’instruction en changeant de version et qu’il a de lourds antécédents.
5.2.1
Les premiers juges ont tenu compte, à charge, de l’importance du trafic, des antécédents de ce prévenu, de son installation dans la délinquance, du fait qu’il ne tient aucun compte des décisions judiciaires ou administratives prononcées à son égard, du concours d’infractions, du fait qu’il a compliqué l’instruction en changeant de version, du fait que seule son arrestation a permis de démasquer ses agissements illicites, et à décharge, des regrets exprimés et de ses souffrances de victime. Ils n’ont ainsi omis aucun des éléments rapportés par l'appelant.
On peut ajouter, à décharge, que P._ est toxicomane, comme en attestent ses antécédents, et que si le trafic portait sur 240 grammes de cocaïne pure, le rôle de l’intéressé s’est limité à celui d’intermédiaire dans une seule transaction qui d’ailleurs s’est mal passée, sans qu’on sache vraiment pourquoi.
Au vu de ces éléments, la peine privative de liberté de trois ans ne paraît pas excessivement clémente, compte tenu de la tournure des événements et des conséquences subies par le prévenu. Enfin, si celui-ci a changé de version, ce n’est pas tant pour se tirer d’affaire que par crainte de G._ et de sa bande; d’ailleurs, comme relevé plus haut, l’intéressé a confirmé sa première version en appel (p. 3
supra
), présentant en outre des excuses pour avoir compliqué l'instruction (appel joint, p. 4).
Partant, au regard des éléments susmentionnés, la peine de trois ans infligée à P._ n'apparaît pas excessivement clémente.
Il découle des considérants qui précèdent que l’appel du Ministère public tendant à une aggravation de la peine prononcée en première instance à l'encontre de P._ est mal fondé et doit donc être rejeté.
6.
Ce dernier fait valoir, dans son appel joint, que la peine qui lui a été infligée est trop sévère. Il rappelle son rôle limité d’intermédiaire et soutient que le bénéfice attendu de l’opération, soit un maximum de 1'000 fr., était faible comparé au chiffre d'affaires qu'aurait dû réaliser G._. Au demeurant, sa rémunération aurait pris la forme de cocaïne et non d’argent, drogue qu’il aurait personnellement consommée. Il se dit influençable et parfaitement conscient de sa faute. En ce qui concerne l’infraction à la LEtr, il soutient être revenu en Suisse pour reconnaître sa fille et affirme qu’avant cela, il menait une existence discrète en Belgique et subvenait à ses besoins "par la réalisation d’un revenu modeste".
Contrairement à l’appelant, la Cour d'appel pénale est d'avis qu’un bénéfice attendu de 1'000 fr. pour une seule transaction, quelle que soit la forme qu’il prend, est important. Par ailleurs, P._, déjà condamné pour infraction à la LStup, était au fait de la gravité de son comportement. L'appelant a agi avec pour mobile unique l'enrichissement. Quant aux démarches de reconnaissance qu'il invoque pour justifier son retour en Suisse, elles peuvent parfaitement se faire à distance. Ses affirmations à ce sujet ne sont donc pas vraisemblables. L'appelant n'établit rien non plus au sujet de sa vie exemplaire en Belgique qui lui permettait, selon ses dires, de réaliser "un revenu modeste" et de participer à l'entretien de son enfant. On ne comprend pas pourquoi il y aurait renoncé pour venir commettre des infractions en Suisse.
En définitive, la quotité de la peine infligée à P._ est adéquate et doit donc être confirmée.
Mal fondé, l'appel joint ne peut dès lors qu'être rejeté.
7.
En conclusion, l'appel de G._ et l'appel joint de P._ doivent être rejetés. L'appel du Ministère public est, quant à lui, partiellement admis en ce sens que G._ est condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de sept ans.
7.1
Vu la mesure dans laquelle chacun des prévenus succombe sur ses conclusions et sur celles du Ministère public, P._ obtenant gain de cause comme intimé, les frais communs de la procédure d'appel selon l'art. 424 CPP doivent être mis à hauteur d'une demie à la charge de G._ et d'un quart à la charge de P._, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (art. 428 al. 1 1
ère
phr. CPP). G._ supportera en outre l'indemnité allouée à son défenseur pour la procédure d'appel et P._ la moitié de l'indemnité versée à son défenseur d'office, le solde étant laissé à la charge de l'Etat. G._ et P._ ne seront tenus de rembourser à l’Etat la part de l'indemnité allouée à leur défenseur d'office mise à leur charge que lorsque leur situation financière le permettra.(art. 135 al. 4 let. a CPP).
7.2
Vu l'ampleur et la complexité de la cause, l'indemnité allouée au défenseur d’office de G._ pour la procédure d'appel doit être arrêtée à 4'384 fr. 80, TVA et débours inclus (cf. art. 135 al. 1 et 2 et 422 al. 2 let. a CPP et 2 al. 2 ch. 1 TFJP).
L'indemnité allouée au défenseur d’office de P._ doit être fixée à 2'721 fr. 60, TVA et débours compris, au vu de l'ampleur des opérations effectuées. La durée d'activité figurant dans la liste des opérations de ce conseil (29 heures 05 depuis le 2 mars 2012) est excessive. En effet, s'il faut prendre en compte la lecture du jugement de première instance, la rédaction de l'appel joint, l'étude des autres appels, la préparation de l’audience, la participation aux débats et la plaidoirie (pour une audience de deux heures), il n'en reste pas moins qu'on ne peut faire abstraction du fait que le dossier était déjà connu de Me Guillemin, qui avait plaidé en première instance. A ceci s'ajoute qu'il faut appliquer aux opérations menées par ce conseil le tarif horaire de 110 fr. (tarif en usage pour les avocats-stagiaires) et qu'un seul des trois déplacements à la prison de la Croisée est justifié. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c015a2ba-f064-4913-829b-937f53a01129 | En fait :
A.
Par jugement du 4 mars 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de l’Est vaudois a déclaré R._ non coupable de diffamation et de tentative de contrainte et l’a acquitté (I), a rejeté les conclusions civiles de L._ et G._ SA, ainsi que leurs conclusions en paiement d’une indemnité à forme de l’art. 433 CPP (II), a laissé les frais de la cause, arrêtés à 1'450 fr., à la charge de l’Etat (III) et a alloué à R._ une indemnité de 13'500 fr. pour ses frais de défense et a dit qu’il n’y avait pas lieu d’indemniser plus amplement R._ au titre de l’art. 429 CPP (IV).
B.
Par annonce du 9 mars 2015, puis déclaration motivée commune du 30 mars 2015, L._ et G._ SA ont interjeté appel contre ce jugement en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à la condamnation d’R._ pour tentative de contrainte et à l’allocation des conclusions civiles des appelantes à hauteur de 15'600 fr., en sus de l’indemnité allouée à titre de dépens occasionnés par l’exercice raisonnable de leurs droits de procédure en seconde instance, subsidiairement à l’annulation du jugement et au renvoi de la cause à l’autorité précédente pour nouveau jugement.
Par courrier du 9 avril 2015, le Ministère public a renoncé à se déterminer.
Par courrier du 24 avril 2015, R._ a conclu au rejet de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
R._ est né en 1956 au Danemark, pays dont il est ressortissant. Il est divorcé et père de deux enfants majeurs et indépendants, ainsi que d’un enfant de cinq ans pour lequel il verse une pension alimentaire de l’ordre de 410 fr. par mois.
Il exerce une activité indépendante d’investisseur dans le domaine de l’immobilier. Il dit réaliser un revenu annuel net de 68'000 francs.
Son casier judiciaire suisse comporte l’inscription d’une condamnation prononcée le 30 avril 2008 par les Juges d’instruction du canton de Fribourg, pour violation grave des règles de la circulation routière, à 20 heures de travail d’intérêt général, avec sursis pendant deux ans, et 700 fr. d’amende.
2.
Le prévenu R._ est propriétaire d’un immeuble sis Rue [...], à Vevey ; il est également administrateur de B._ SA, dont le siège est sis dans l’immeuble précité. Le 10 décembre 2008, il a signé un contrat qui confie la direction des travaux sur cet immeuble à G._ SA, dont l’administratrice avec signature individuelle est L._. D’importants défauts ont été évoqués, qui ont conduit le prévenu personnellement à saisir le juge de paix d’une requête d’expertise hors procès, contre divers maîtres d’état et G._ SA, mais non contre L._ personnellement.
Le 25 août 2011, l’avocat du prévenu, Me Florian Chaudet, a adressé à L._ quatre projets de déclarations de renonciation à la prescription, (l’une de L._ en faveur du prévenu, une autre de L._ en faveur de B._ SA, une troisième de G._ SA en faveur du prévenu et une dernière de G._ SA en faveur de B._ SA) d’une teneur parfaitement usuelle, sans reconnaissance de responsabilité, et lui a indiqué qu’à défaut de signature, il ferait requérir des poursuites pour interrompre la prescription. Ces projets ont ensuite été adressés le 7 septembre 2011 à Me Bernard Katz, conseil des appelantes, qui a indiqué que celles-ci ne les signeraient pas (P. 23/24).
Le 23 décembre 2011, Me Chaudet a requis la notification de quatre commandements de payer (mentionnant les mêmes parties que les déclarations de renonciation à la prescription), d’un montant de 10 millions de francs chacun (P. 23/29).
Le 28 mars 2012, l’intimé a ouvert en son nom propre une action non chiffrée en dommages intérêts au Danemark, contre G._ SA uniquement, se prévalant d’une clause de prorogation de for du contrat, mais les tribunaux danois ont déclaré sa demande irrecevable (P. 29/2).
Entre décembre 2012 et janvier 2013, Me Chaudet a de nouveau adressé quatre projets de renonciation à la prescription, qui n’ont pas été signés, puis a fait notifier quatre poursuites pour un montant de 10 millions chacun (P. 8/11 à 8/14 ; et non 5 millions comme le retient le jgt., p. 12).
Le 20 mars 2013, les appelantes ont déposé plainte pour contrainte et atteinte à l’honneur (P. 7).
Le 29 avril 2013, l’expert désigné dans la procédure d’expertise hors procès a déposé son rapport. Une demande de complément d’expertise a été rejetée par la Chambre des recours le 22 janvier 2014.
Entre décembre 2013 et janvier 2014, quatre nouveaux commandements ont été notifiés, pour un montant de 5 millions chacun (P. 21/2).
Le 20 janvier 2014, les plaignantes ont étendu leur plainte à ces nouveaux faits (P. 21/1). | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délai légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon
l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
Les appelantes se plaignent d’une violation du droit : elles considèrent que c’est à tort que le prévenu a été libéré du chef d’accusation de tentative de contrainte et soutiennent que les éléments constitutifs de l’infraction de l’art. 181 CP sont en l’espèce réalisés, au stade de la tentative, à tout le moins par dol éventuel.
3.1
Le premier juge a d’abord considéré que la solvabilité et la volonté de payer ses dettes n’entraient pas dans la définition de l’honneur et qu’il ne pouvait dès lors pas y avoir d’atteinte à l’honneur par la notification de commandements de payer.
En ce qui concerne la contrainte, le premier juge a estimé qu’il n’était pas exclu que le prévenu, respectivement sa société B._ SA, aient des prétentions contre G._ SA en raison de manquements commis par la direction des travaux, voire contre L._ personnellement, sur la base de l’art. 55 al. 3 CC. En ce qui concerne le montant, le risque a été évoqué qu’il faille démolir l’immeuble, trop haut, de sorte que des poursuites pour 10 millions de francs avant que l’expert ne rende son rapport, puis de 5 millions, étaient raisonnables.
Par surabondance, l’art. 21 CP (erreur sur l’illicéité) pouvait être applicable au prévenu qui a uniquement laissé faire son défenseur.
3.2
Se rend coupable de contrainte au sens de l'art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte. La tentative est réprimée par
l’art. 22 CP.
Ainsi, l’art. 181 CP prévoit alternativement trois moyens de contrainte : l’usage de la violence, la menace d’un dommage sérieux ou tout acte entravant la personne dans sa liberté d’action.
La menace est un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l'auteur, sans toutefois qu'il soit nécessaire que cette dépendance soit effective (ATF 117 IV 445 c. 2b; 106 IV 125 c. 2a) ni que l'auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (ATF 105 IV 120 c. 2a).
Il peut également y avoir contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime « de quelque autre manière » dans sa liberté d'action; cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive; n'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas; il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action; il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 119 IV 301 c. 2a et les références).
Selon la jurisprudence, la contrainte n'est contraire au droit que si elle est illicite (ATF 120 IV 17 c. 2a p. 19 et les arrêts cités), soit parce que le moyen utilisé ou le but poursuivi est illicite, soit parce que le moyen est disproportionné pour atteindre le but visé, soit encore parce qu'un moyen conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue, au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux moeurs (ATF 137 IV 326 c. 3.3.1 p. 328; 134 IV 216 c. 4.1 p. 218; 120 IV 17 c. 2a/bb p. 20). Ainsi, menacer d'une plainte pénale pour une infraction que rien ne permet sérieusement de soupçonner est un moyen en soi inadmissible (ATF 120 IV 17 c. 2a/bb pp. 20 s.). En revanche, réclamer le paiement d'une créance ou menacer de déposer une plainte pénale (lorsque l'on est victime d'une infraction) constituent en principe des actes licites; ils ne le sont plus lorsque le moyen utilisé n'est pas dans un rapport raisonnable avec le but visé et constitue un moyen de pression abusif, notamment lorsque l'objet de la plainte pénale est sans rapport avec la prestation demandée ou si la menace doit permettre d'obtenir un avantage indu (ATF 120 IV 17 c. 2a/bb p. 20 et les arrêts cités; au sujet de la contrainte susceptible d'être réalisée par un commandement de payer,
cf. arrêt 6S. 853/2000 du 9 mai 2001 et 6S. 874/1996 du 26 février 1997).
Pour une personne de sensibilité moyenne, faire l'objet d'un commandement de payer d'une importante somme d'argent est, à l'instar d'une plainte pénale, une source de tourments et de poids psychologique, en raison des inconvénients découlant de la procédure de poursuite elle-même et de la perspective de devoir peut-être payer le montant en question. Un tel commandement de payer est ainsi propre à inciter une personne de sensibilité moyenne à céder à la pression subie, cas échéant, donc à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d’action (cf. ATF 120 IV 17 c. 2 aa ; ATF 96 IV 58 c. 3). Certes, faire notifier un commandement de payer lorsqu’on est fondé à réclamer une telle somme est licite. En revanche, utiliser un tel procédé comme moyen de pression pour dissuader la personne visée d’agir correctement par exemple dans sa profession est clairement abusif, donc illicite (cf. ATF 115 III 18 c. 3, 81 c. 3b et SJ 1987 p. 156 ss). Il est donc concevable qu’une tentative de contrainte soit réalisée lorsqu’un commandement de payer d’un montant important est notifié, que le poursuivi allègue que la créance est manifestement inexistante et que le procédé a pour but de pousser le poursuivi à adopter un certain comportement (CAPE 3 juin 2011/35 c. 3.2)
Enfin, l’infraction de l’art. 181 CP est intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant (Dupuis et al., Petit Commentaire du Code pénal, Bâle 2012, nn. 35 et 36 ad art. 181 CP et les référence citées).
3.3
En l’espèce, il semble constant que la relation contractuelle a été nouée exclusivement entre R._ et G._ SA, comme cela ressort du contrat du 10 décembre 2008 (P. 8/3). Le dossier révèle que c’est bien ainsi qu’R._ paraissait le concevoir puisqu’il n’a déposé son action en dommages intérêts au Danemark qu’en son nom et seulement contre G._ SA (P. 29/2/21). On peut également citer la requête d’expertise hors procès entre les mêmes parties, même si cette procédure ne noue pas l’instance au fond.
Néanmoins, on trouve au dossier cinq factures adressées par G._ SA non pas à R._ personnellement, mais bien à B._ SA, sans aucune référence à R._ personnellement (P. 23/5 à 23/9). Les appelantes ne prennent pas position sur ce point et elles ne soutiennent en particulier pas que ces factures reposeraient sur une autre relation contractuelle qui n’aurait rien à voir avec le litige. Ces factures ont été établies sur une période de plusieurs mois (le 5 janvier 2010, le 1
er
janvier 2011, le 20 février 2011 et le 1
er
mars 2011), ce qui ne laisse pas forcément penser qu’il s’agit d’une erreur, mais bien que les appelantes elles-mêmes ont tenu à ces occasions B._ SA pour leur débitrice. Dans ces circonstances, il n’apparaît pas critiquable d’avoir voulu interrompre la prescription également en faveur de B._ SA, car la situation juridique, sur le plan civil, n’apparaissait pas d’une clarté indiscutable du fait des appelantes elles-mêmes.
La question est plus délicate en ce qui concerne les poursuites notifiées à L._ elle-même. A cet égard, la référence à l’art. 55 al. 3 CC, retenue par le premier juge, n’est pas dénuée de pertinence. A cela s’ajoute le fait que certains procès-verbaux mentionnent comme architecte du maître de l’ouvrage « Mme L._ [...] » (nom de jeune fille de L._) ou « Mme L._ », sans référence à G._ SA (P. 23/11 et 23/12). De plus, une responsabilité délictuelle ne pouvait pas d’emblée être exclue. Dans ces circonstances, il était certes précautionneux, mais en tout cas pas abusif, de se prémunir contre tout risque en cherchant à interrompre la prescription aussi contre L._ personnellement.
Finalement, lors de l’envoi des deux premières séries de commandements de payer, tout risque de dommage total de l’immeuble, à savoir l’obligation de démolir et de reconstruire en raison des défauts, ne pouvait être raisonnablement exclu. Le montant des poursuites est certes important, mais peut encore être considéré comme compatible avec les démarches d’un plaideur prudent. A cela s’ajoute que le montant des réquisitions a été adapté, lorsque l’intimé a eu connaissance des constatations de l’expert.
On peut également douter que l’aspect subjectif de l’infraction soit réalisé, puisque l’intimé a, à chaque fois, proposé au préalable aux plaignantes de signer des déclarations de renonciation à la prescription, dont la teneur était parfaitement usuelle, en ce sens qu’elles mentionnaient expressément qu’elles ne contenaient aucune reconnaissance de responsabilité. Le prévenu n’a ainsi pas voulu faire pression sur les appelantes, mais se retrouvait lui-même contraint à faire notifier des poursuites, ne disposant pas d’autre moyen, en tout cas avant le dépôt des conclusions de l’expert, pour interrompre la prescription.
4.
4.1
En définitive, mal fondés, les appels de L._ et G._ SA doivent être rejetés et le jugement attaqué confirmé.
4.2
Une indemnité d’un montant de 1'620 fr., TVA comprise, sera allouée à R._ à titre de dépens pénaux pour la procédure d’appel (art. 429 al. 1
let. a CPP). Son défenseur, Me Pai, a produit une liste des opérations faisant état de 9.75 heures, hors audience, à 350 fr. de l’heure, consacrées à la défense des intérêts de l’intimé R._ (P. 52). Le temps indiqué est excessif compte tenu des caractéristiques du dossier et du fait qu’au stade de la procédure d’appel, le défenseur, consulté depuis le début de la procédure pénale, avait déjà acquis une parfaite connaissance du dossier ; il sera ainsi ramené à 4.6 heures, audience comprise, pour la procédure d’appel. Compte tenu de la difficulté modérée de la cause, la tarif horaire doit également être ramené à 300 francs. Les appelantes en seront solidairement débitrices (art. 428 al. 1 CPP).
4.3
Vu l'issue de la cause, les frais d’appel, constitués du seul émolument de jugement, par 1'390 fr. (art. 21 al. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]) seront mis, par moitié chacune, à la charge des appelantes qui succombent.
La Cour d’appel pénale
appliquant les art. 126 al. 1 let. b, 348 ss, 398 ss, 428 et 429 CPP,
prononce :
I.
L’appel est rejeté.
II.
Le jugement rendu le 4 mars 2015 par le Tribunal de police de l’arrondissement de l’Est vaudois est confirmé selon le dispositif suivant :
"
I. déclare R._ non coupable de diffamation et de tentative de contrainte et l’acquitte ;
II. rejette les conclusions civiles de L._ et de G._ SA, ainsi que leurs conclusions en paiement d’une indemnité à forme de l’art. 433 CPP ;
III. laisse les frais de la cause, arrêtés à 1'450 fr., à la charge de l’Etat ;
IV. alloue à R._ une indemnité de 13'500 fr. (treize mille cinq cents francs) pour ses frais de défense et dit ne pas y avoir lieu d’indemniser plus amplement R._ au titre de l’art. 429 CPP.
"
III.
Une indemnité de 1'620 fr., TVA incluse, est allouée à titre de dépens pénaux pour la procédure d’appel à R._, à la charge des appelantes, solidairement entre elles.
IV.
Les frais d'appel, y compris l'indemnité allouée au chiffre III ci-dessus, sont mis par moitié à la charge de L._ et par moitié à la charge de G._ SA.
V.
Le jugement motivé est exécutoire. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c03c3fa0-aa71-46f3-b815-1267919f114c | En fait :
A.
Par jugement du 4 novembre 2013, le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a constaté que D._ s’est rendu coupable d’abus de confiance (I), l’a condamné à une peine pécuniaire de 80 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 20 fr., et a suspendu l’exécution de cette peine avec un délai d’épreuve de deux ans (II), l’a condamné en outre à une amende de 600 fr. à titre de sanction immédiate et a dit que la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif est de 30 jours (III), a dit que D._ est le débiteur de J._ et lui doit immédiat paiement de la somme de 151 fr. 05 à titre de dommages et intérêts (IV) et a dit que D._ est le débiteur de J._ et lui doit immédiat paiement d’une indemnité pour ses frais de défense pénale qui s’élèvent à 3’319 fr. 50, TVA comprise (VI).
B.
Le 5 novembre 2013, D._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d’appel du 19 novembre 2013, il a conclu, avec suite de frais et dépens des deux instances, principalement à la modification du jugement en ce sens qu’il est acquitté, subsidiairement exempté de toute peine. Subsidiairement, il a conclu à l’annulation du jugement, la cause étant renvoyée à l’autorité de première instance pour nouveau jugement dans les sens des considérants de l’arrêt à intervenir.
Le Ministère public s’en est remis à justice quant à la recevabilité de l’appel et a renoncé à déposer un appel joint. L’intimée J._ a conclu au rejet de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1. Né en 1983, célibataire, le prévenu D._ est au bénéfice d’une formation de plâtrier-peintre. Après avoir été occupé dans son métier par plusieurs employeurs et exercé d’autres activités, dont au service de J._, il n’a actuellement pas de travail. Il perçoit des prestations de l’assurance-chômage. Son revenu mensuel net s’élève à 2'250 fr. environ. Son loyer se monte à 700 francs. Le prévenu fait l’objet de poursuites pour un montant de l’ordre de 70'000 fr., ainsi que d’une saisie de salaire, soit de revenus. Son casier judiciaire est vierge.
2. A Morges, le 21 avril 2012, alors qu’il était seul employé et responsable du magasin J._, le prévenu a prélevé 4'000 fr. de la caisse du commerce et a gardé cette somme pour ses propres besoins au lieu de la verser sur le compte postal de l’entreprise, comme cela figure sur le journal de caisse du jour en question.
Agissant par sa direction lausannoise, J._ a déposé plainte le 26 juin 2012. Elle a pris des conclusions civiles à hauteur de 151 fr. 05 en capital à l’encontre du prévenu. Son préjudice a été réparé à hauteur de 3'848 fr. 95 en capital par compensation avec le salaire dû au travailleur (P. 25), celui-ci y ayant du reste consenti (P. 6).
3. Pour sa part, le prévenu conteste les faits incriminés. Admettant avoir prélevé la somme de 4'000 fr. de la caisse du magasin le matin du 21 avril 2012, il soutient s’être aussitôt rendu au guichet de la poste de Morges, où il aurait versé ce même montant au crédit du compte postal de son employeur. Il dit avoir alors reçu de la buraliste un récépissé du paiement et prétend avoir agrafé ce document au journal de caisse. Il nie ainsi avoir conservé par devers lui le montant prélevé dans la caisse du magasin.
Appréciant la culpabilité du prévenu, le tribunal de police a tenu la faute commise pour non négligeable, l’intéressé ayant trompé la confiance de son employeur en utilisant à son profit le produit de la vente des marchandises de la plaignante. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (cf. art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
3.1
L’appelant ne conteste pas avoir prélevé un montant de 4'000 fr. de la caisse qui lui était confiée par son employeur. Invoquant une violation de la présomption d’innocence, il fait en revanche valoir qu’il aurait aussitôt reversé ce même montant au crédit du compte postal de la plaignante au moyen d’un versement en espèces effectué au guichet de l’office postal de Morges, ce que le premier juge aurait écarté à tort.
3.2.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin,
in
: Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
3.2.2
La présomption d'innocence, qui est garantie par l'art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_18/2011 du 6 septembre 2011 c. 2.1). Dans cette mesure, la présomption d'innocence se confond avec l'interdiction générale de l'arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (TF 6B_216/2010 du 11 mai 2010 c. 1.1.1 et 1.1.2 et la jurisprudence citée).
3.3
La conviction du premier juge repose sur un faisceau d’indices, à savoir :
- Le prévenu admet avoir prélevé la somme de 4'000 fr. dans la caisse du magasin dont il avait la charge le 21 avril 2012.
- Aucun enregistrement correspondant au prétendu versement effectué le même jour par l’appelant n’apparaît dans les comptes de versement de La Poste.
- A supposer que l’employée de la poste aurait omis d’enregistrer ce versement (hypothèse toute théorique), on aurait dû retrouver dans le classeur qui contenait le journal de caisse le récépissé postal que le prévenu dit avoir reçu et qu’il aurait agrafé au journal de caisse; or il n’y en a pas.
- Le prévenu gérait seul le magasin de Morges, de sorte que nul autre que lui n’avait accès au journal de caisse; à supposer le contraire (hypothèse à nouveau toute théorique), personne n’aurait eu intérêt à faire disparaître un récépissé attestant d’un paiement postal, saut peut-être dans le but de nuire à l’appelant, hypothèse que l’intéressé ne soutient même pas.
- Le prévenu était en proie à des difficultés financières, ce qui lui fournissait un mobile particulier.
La cour de céans fait siens les éléments d’appréciation ci-dessus, qui sont convergents et parfaitement convaincants. Leur rapprochement permet d’écarter tout doute raisonnable en faveur du prévenu. On ne discerne dès lors pas où résiderait la violation de la présomption d’innocence que l’appelant croit déceler dans le jugement. Bien plutôt, l’appelant se limite à exposer sa propre version des faits en isolant çà et là un élément forgeant la conviction du premier juge pour déduire une violation du principe
in dubio pro reo
ou conclure que l’appréciation de la preuve serait arbitraire. Pour le surplus, la qualification des faits incriminés n’est pas contestée en tant que telle, à juste titre.
4.
Subsidiairement, l’appelant conclut à ce qu’il soit exempté de toute peine. Il n’étaye cependant pas cette conclusion. Il n’existe du reste aucun motif légal d’exemption de peine. D’abord, sous l’angle de l’art. 53 CP, le dommage n’a pas été réparé; à cet égard, la compensation avec le salaire opérée par l’employeur à hauteur de 3'848 fr. 05 en capital (cf. jugement, p. 6; recte : 3'848 fr. 95) selon l’art. 323b al. 2 CO, si elle réduit dans une large mesure le préjudice économique de la plaignante, n’implique pas pour autant le repentir actif de l’auteur, faute de toute initiative prise dans ce sens par ce dernier pour réparer le dommage dans la mesure de ses moyens. Ensuite, de manière plus générale, sous l’angle de l’art. 52 CP, la culpabilité de l’auteur et les conséquences (économiques) de son acte sont importants, de sorte que l’on ne saurait considérer qu’il n’y a pas d’intérêt à punir. Par identité de motifs, la compensation partielle au profit de la lésée n’y change rien. Pour le reste, la peine n’est contestée en tant que telle ni dans sa nature, ni dans sa quotité.
5.
L’appel doit dès lors être rejeté.
Vu l'issue de l’appel, les frais de la procédure d'appel doivent être mis à la charge du prévenu (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP).
Outre l'émolument, les frais d’appel comprennent l’indemnité allouée au défenseur d’office du prévenu, pour les opérations liées à la procédure d'appel (cf. les art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP).
L'indemnité allouée au défenseur d'office du prévenu peut être fixée sur la base de la liste d’opérations produite (P. 39) en tenant compte en outre de la durée de l’audience d’appel, soit sur la base d'une durée d'activité de quatre heures au tarif horaire de 180 fr., plus une unité de débours à 120 fr. et 10 fr. pour les timbres, TVA en sus (art. 135 al. 1 CPP), à 918 francs.
Le prévenu ne sera tenu de rembourser à l’Etat l’indemnité en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c04686a8-740f-4c9c-95ae-330b321f8b3b | En fait :
A.
Par jugement du 14 mai 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a constaté que B.J._ s’est rendu coupable de violation des règles de la circulation routière (I), l’a condamné à une amende de 350 fr. (II), a dit qu’à défaut de paiement de l’amende, la peine privative de liberté de substitution sera de quatre jours (III) et a mis les frais de procédure, à hauteur de 800 fr., à la charge du prévenu (IV).
B.
Le 15 mai 2013, B.J._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel du 3 juin 2013, il a conclu à l’annulation du jugement, à son acquittement et à l’octroi de dépens, les frais étant laissés à la charge de l’Etat.
Le 7 juin 2013, le Ministère public a annoncé qu’il renonçait à présenter une demande de non-entrée en matière et à déclarer un appel joint.
Par courrier du 19 juin 2013, la Présidente a informé les parties que l'appel serait traité d'office en procédure écrite (art. 406 al. 1 let. c CPP).
L’appelant a produit un mémoire motivé dans le délai qui lui a été fixé à cet effet (art. 406 al. 3 CPP), confirmant les conclusions de sa déclaration d’appel.
Par courrier du 8 juillet 2013, le Ministère public a déclaré ne pas déposer des déterminations et se référer aux considérants du jugement entrepris.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né en 1970 en France, pays dont il est originaire, B.J._ est au bénéfice d’une double formation en micro-mécanique de mesures physiques avec instruments de précisions mécaniques et optiques et en gestion-qualité. Depuis huit ans, il travaille auprès de [...] SA, à Genève, en tant que responsable qualité, logistique et achats et perçoit un salaire de 10'000 fr. environ. Marié et père de deux enfants, âgés de 7 et 14 ans, il est propriétaire, avec son épouse, de leur logement sis à Longchaumois, en France. Il n’a pas de dettes, hormis la dette hypothécaire grevant l’immeuble.
2.
2.1
Le mercredi matin 29 août 2012, B.J._ circulait à une vitesse d’environ 60 km/h au volant de son véhicule de marque Nissan X-Trail de St-Cergue en direction de Nyon, où la vitesse est limitée à 80 km/h. Il suivait à une quinzaine de mètres, soit à une distance insuffisante, le véhicule de marque Mitsubishi Lancer conduit par A._, qu’il a rattrapé et dépassé. A._ l’a à son tour suivi à une distance de quinze mètres, puis devancé. Parvenu au lieu-dit "Contour de la Capite à Moto", où la route décrit une courbe prononcée vers la droite selon son sens de marche, A._ a freiné. Surpris, B.J._, qui roulait à une distance insuffisante, a également freiné, s’est décalé sur la gauche, soit sur la partie de la route réservée au sens inverse, afin d’éviter un choc avec la voiture d’A._, puis a accéléré et dépassé ce dernier à l’intérieur du virage, alors que la visibilité y est mauvaise. Au terme de sa manœuvre, B.J._ s’est rabattu sur la droite, heurtant l’aile avant gauche du véhicule d’A._ avec la roue arrière droite de sa voiture. Suite au choc, les deux automobilistes se sont arrêtés et ont fait appel à la police.
2.2
Pour ces faits, objet du rapport de police du 2 octobre 2012, le Préfet de Nyon, après avoir entendu les deux automobilistes séparément et ensemble ainsi que le témoin C.J._, épouse de B.J._ et passagère avant du véhicule de ce dernier, a, par ordonnances pénales du 4 janvier 2013, reconnu A._ et B.J._ coupables de violation des règles de la circulation routière et a condamné le premier à une amende de 250 fr., convertible en une peine privative de liberté de substitution de trois jours, et le second à une amende de 350 fr., convertible en une peine privative de liberté de substitution de quatre jours, les frais ayant été mis à leur charge, par 100 fr. chacun.
B.J._ a fait opposition. Le Préfet a, par courrier du 15 janvier 2013, décidé de maintenir l’ordonnance pénale le concernant –A._ n’ayant quant à lui pas fait opposition –, de sorte que le dossier a été transmis au Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte par avis du Ministère public central du 17 janvier 2013.
2.3
Dans son jugement du 14 mai 2013, le Tribunal de police, qui a entendu le prévenu B.J._ et, en qualité de témoins, A._ ainsi que C.J._, a tenu pour constants les faits relatés dans le rapport de police et les premières déclarations des intéressés devant les gendarmes, a confirmé la condamnation de B.J._ à une amende de 350 fr. ainsi que la peine privative de liberté de substitution de quatre jours et a mis les frais, par 800 fr., à la charge de ce dernier. Il a précisé que le comportement dangereux d’A._ avant le virage de la grande boucle n’annihilait en rien la conduite dangereuse de B.J._ consistant à circuler à une distance insuffisante et à procéder au dépassement dans un virage sans visibilité, heurtant le véhicule d’A._ au moment de se rabattre. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, l'appel a été déposé en temps utile.
Interjeté dans les formes contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable.
L’appel concernant une contravention, la procédure applicable est écrite (art. 406 al. 1 let. c CPP) et la cause est de la compétence d'un membre de la cour d'appel statuant comme juge unique (art. 14 al. 3 LVCPP [Loi d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009, RSV 312.01]).
2.
Aux termes de l’art. 398 al. 4 CPP, lorsque seules des contraventions ont fait l’objet de la procédure de première instance, l’appel ne peut être formé que pour le grief que le jugement est juridiquement erroné ou que l’état de fait a été établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite. Cet appel restreint a été prévu pour les cas de peu d’importance, soit concernant des infractions mineures, le droit conventionnel international admettant en pareil cas des exceptions au droit à un double degré de juridiction (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 22-23 ad art. 398 CPP).
3.
B.J._ conteste les faits retenus par le tribunal et invoque une appréciation arbitraire des preuves. Il reproche au premier juge de s’être fondé sur ses premières déclarations sans prendre en considération les modifications demandées lorsqu’il avait pris connaissance de sa déposition, d’avoir refusé de retenir le témoignage de C.J._, de n’avoir pas tenu compte de la trace de contact visible sur la photo du véhicule accidenté d’A._ (P. 11), trace qui, selon lui, prouverait que ce dernier a accéléré au moment du dépassement, causant ainsi l’accident, et d’avoir privilégié la version des faits fournie par A._.
3.1
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le Tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2).
En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (Kistler Vianin, op. cit., n. 28 ad art. 398 CPP). L'appréciation des preuves est en particulier arbitraire lorsque le juge de répression n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 136 III 552 c. 4.2; TF 1C_517/2010 du 7 mars 2011 c. 2.1).
3.2
En l’espèce, le tribunal a retenu que B.J._ avait eu une conduite dangereuse en circulant à une distance insuffisante pour circuler en file et en procédant au dépassement du véhicule d’A._ dans un virage sans visibilité et qu’il avait manqué de prudence en heurtant l’autre voiture au moment où il s’était rabattu. Il a également considéré qu’A._, dans une portion précédente de la route, avait eu une conduite dangereuse et qu’il avait été sanctionnée par une ordonnance pénale.
On ne saurait considérer que le premier juge a fait preuve d’arbitraire dans l’appréciation des preuves. Il a au contraire examiné en détail les versions des faits contradictoires des deux conducteurs et a expliqué pourquoi il privilégiait leurs premières déclarations, retranscrites par la police.
Contrairement à ce que soutient l’appelant (appel, p. 5), les apparentes contradictions d’A._ sur la vitesse à laquelle il roulait au moment du dépassement litigieux – ce dernier ayant d’abord affirmé avoir freiné dans le virage (pièce 4, dossier préfectoral, rapport de police du 2 octobre 2012, p. 4; PV aud. du 10 décembre 2012), avant de dire le contraire devant le tribunal (jugt, p. 6) – n’ont pas échappé au premier juge, qui a résumé les déclarations en cause en page 12 de sa décision. De toute manière, cette contradiction, qui n’enlève rien au constat que B.J._ a dépassé A._ et l’a heurté au moment où il s’est rabattu, n’est pas déterminante, puisque le tribunal a admis qu’A._ avait freiné au moment d’aborder la courbe et qu’il n’a pas été retenu que B.J._ avait effectué le dépassement à une vitesse inadaptée, comme l’a laissé entendre A._ devant le tribunal. Ainsi, on se réfèrera intégralement sur ce point à l’appréciation du premier juge, qui est claire et convaincante.
L’appelant, qui demande la modification de ses déclarations rapportées par la gendarmerie, perd de vue qu’il a contresigné sa déposition et qu’ainsi, contrairement à ce qu’il affirme (appel, p. 3
in fine
), il n’a pas demandé leur modification "immédiatement", soit dès qu’il en a eu connaissance, mais plus de deux mois après, par courrier de son avocat qu’il venait de consulter (pièce 4, dossier préfectoral, lettre de Me Henri Bercher du 6 novembre 2012). En outre, l’interprétation subséquente donnée par B.J._ concernant les expressions "j’ai été surpris" et "afin de l’éviter" n’est pas convaincante (
ibidem
). En effet, de l’avis du premier juge, auquel il convient de se rallier, les explications données par B.J._ sur la peur qu’il aurait ressentie en raison du comportement routier d’A._ "n’enlèvent rien à la dangerosité de sa conduite" et, comme l’a relevé à juste titre le tribunal, "on ne voit pas en quoi le dépassement était la seule façon d’échapper" à A._ (jugt, p. 13). Ensuite, B.J._ exagère lorsqu’il prétend, par courrier de son conseil du 6 novembre 2012, que le véhicule d’A._ était "pratiquement arrêté" au milieu du virage, puisqu’il ressort de ses propres déclarations – tant devant le Préfet que devant le tribunal – qu’A._ roulait "lentement" (PV aud. du 10 décembre 2012; jugt, p. 3), ce qui n’est pas surprenant en soi, vu la configuration des lieux, la police parlant d’une "courbe prononcée" et l’appelant lui-même d’une "épingle" (rapport de police précité, pp. 3 et 4; cf. ég. pièce 1 [extrait de "Google Map"] du bordereau du 10 décembre 2012 produit par Me Bercher à l’audience préfectorale). On relèvera du reste une contradiction à cet égard dans les propos tenus par l’appelant, qui a d’abord affirmé qu’A._ avait "planté" sur les freins (rapport de police précité, p. 4), avant de préciser qu’il "suppos[ai]t" qu’il allait le faire et qu’il avait donc pris l’initiative de le dépasser (PV aud. du 10 décembre 2012). Les explications fournies sur ce point par B.J._ lors de son audition par le Préfet, selon lesquelles il craignait que l’autre automobiliste s’arrête dans le virage et sorte de son véhicule pour s’en prendre physiquement à lui et à sa femme, sont peu crédibles. Enfin, les versions que les parties ont données à la police concordent quant à l’endroit où A._ a freiné, soit "dans le virage", et non à la sortie de celui-ci, comme l’appelant l’a ensuite prétendu devant le Préfet.
Quant à savoir où le dépassement a été effectué, on comprend des déclarations d’A._ et de B.J._ devant le Préfet que la manœuvre se situe à l’intérieur du tournant, soit, selon A._, "dans la deuxième partie du virage", ce qui est confirmé par B.J._ qui a admis avoir pris "l’initiative" du dépassement "entre le point 7 et 7a" du plan (Google Map) figurant au dossier (pièce 1 du bordereau du 10 décembre 2012).
B.J._ affirme encore que la photographie du véhicule accidenté d’A._ établit que lors du choc, les deux véhicules roulaient à la même vitesse. Il soutient que le conducteur A._ a accéléré alors qu’il était l’objet d’un dépassement, ce qui serait la cause unique du contact entre les deux voitures. On s’étonne qu’entendus par la police, ni l’appelant ni son épouse n’aient immédiatement dénoncé ce comportement dangereux. En outre, lors de son audition par le préfet, l’appelant n’a pas prétendu qu’A._ avait accéléré, mais a uniquement affirmé : "je ne m’explique pas comment il se fait que lorsque je le dépasse il est pratiquement à l’arrêt et que nous nous sommes touchés en me rabattant". Puis, à l’audience de jugement, il a encore précisé qu’au moment où il s’est rabattu, il était "convaincu qu’il avait largement la place de le faire", admettant implicitement que tel n’avait finalement pas été le cas. En outre, le fait que la photographie du véhicule d’A._ révèle une marque de contact et non un frottement ne permet pas de retenir que ce conducteur a volontairement cherché à provoquer un accident en lançant sa voiture contre celle de l’appelant.
S’agissant ensuite des faits qui ont précédé cette touchette, l’appelant perd de vue qu’A._ a été condamné pour sa conduite dangereuse. Il impute la distance insuffisante qui lui a été reprochée à des freinages intempestifs et sans nécessité du véhicule qu’il suivait. Toutefois, les explications du conducteur A._ sur la forme ou l’animal qu’il a cru voir sont vraisemblables et ses imprécisions à cet égard n’entachent pas la crédibilité de ses déclarations.
B.J._ reproche encore au premier juge de n’avoir pas tenu compte du témoignage de C.J._. Outre le fait, comme l’a retenu le tribunal, qu’il faut prendre la déposition de ce témoin avec retenue en raison de son lien conjugal avec l’appelant, ses déclarations contredisent celles de ce dernier quant à l’endroit où le dépassement a eu lieu, le témoin situant cette manœuvre "au point 7b" du plan (jugt, p. 4).
Enfin, on comprend mal pour quel motif l’appelant, s’il a vraiment cru à un "conducteur fou" au volant d’un véhicule beaucoup plus puissant que le sien, a voulu lui échapper en le dépassant, puis en restant derrière lui, puis encore en le devançant dans un virage, sur une route de montagne, alors qu’il lui suffisait de s’arrêter pour le laisser prendre de la distance.
Partant, au vu des éléments qui précèdent, il est parfaitement soutenable de retenir (jugt, p. 13) que B.J._ a circulé à une distance insuffisante pour circuler en file et a procédé au dépassement du véhicule d’A._ dans un virage sans visibilité, heurtant, au moment où il s’est rabattu, la voiture devancée. L'appréciation du tribunal n’est donc pas arbitraire au sens indiqué ci-dessus (c. 3.1).
Le moyen, mal fondé, doit dès lors être rejeté.
4.
L’appelant fait valoir que les infractions des art. 34 al. 3 et 4 LCR (Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958; RS 741.01) et 12 al. 1 OCR (Ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962; RS 741.11) ne sont pas réalisées.
4.1
Selon l’art. 34 al. 3 LCR, le conducteur qui veut modifier sa direction de marche, par exemple pour obliquer, dépasser, se mettre en ordre de présélection ou passer d’une voie à l’autre, est tenu d’avoir égard aux usagers de la route qui viennent en sens inverse ainsi qu’aux véhicules qui le suivent. L’art. 34 al. 4 LCR prévoit que le conducteur doit observer une distance suffisante notamment lorsque des véhicules se suivent. Cette disposition est concrétisée à l’art. 12 al. 1 OCR, selon lequel lorsque des véhicules se suivent, le conducteur se tiendra à une distance suffisante du véhicule qui le précède, afin de pouvoir s’arrêter à temps en cas de freinage inattendu. L’irrespect d’une distance suffisante constitue une violation simple (art. 90 ch. 1 LCR), le cas échéant grave (art. 90 ch. 2 LCR) des règles de la circulation (ATF 131 IV 133 c. 3; Weissenberger, Kommentar zum Strassenverkehrsgesetz, n. 51 ss ad art. 34 LCR).
4.2
En l’espèce, B.J._ a dû à plusieurs reprises freiner brusquement. Selon la jurisprudence, c’est au conducteur du véhicule qui suit de régler l’intervalle par rapport au véhicule qui précède, de manière à éviter une collision avec ce véhicule ou d’être obligé de se placer en position de dépassement comportant un risque pour les véhicules en sens inverse, comme cela a été le cas en l’occurrence. Par ailleurs, si l’espace à l’origine suffisant diminue parce que le véhicule qui précède ralentit, c’est au conducteur de la voiture qui suit à veiller au rétablissement de la distance suffisante (ATF 137 IV 326 c. 3.3.3 et les références citées, not. ATF 81 IV 47, JT 1955 I 418; ég. ATF 115 IV 248). Or, on ne saurait retenir que les décélérations brusques du véhicule de l’appelant étaient toutes liées à des freinages inutiles du conducteur A._. Le prévenu n’a ainsi pas respecté une distance minimale suffisante avec ce conducteur.
En outre, il ressort des déclarations des deux automobilistes (cf. c. 3.2, p. 7
in fine, supra
) que le prévenu a effectué le second dépassement dans un virage, manquant ainsi de prudence et d’égards envers les véhicules qui étaient susceptibles de venir en sens inverse, étant précisé sur ce point que, selon la jurisprudence,
la manœuvre de dépassement est entreprise lorsque, dans l’intention de devancer un autre usager, le dépasseur déboîte et commence à le rattraper, au point qu’il devrait ralentir son allure s’il devait reprendre sa droite en respectant une distance suffisante derrière le dépassé (ATF 101 IV 72 c. 1a, JT 1975 I 433).
Enfin, en touchant le véhicule qu’il dépassait au moment où il s’est rabattu, le prévenu n’a à l’évidence pas respecté une distance suffisante et a manqué de prudence.
C’est donc à bon droit que le premier a retenu les contraventions aux art. 34 al. 3 et 4 LCR et 12 al. 1 OCR.
5.
L’amende de 350 fr. et la peine privative de liberté de substitution de quatre jours, correspondant aux montants arrêtés par l’autorité préfectorale dans son ordonnance du 4 janvier 2013, doivent être confirmés. Cette sanction apparaît modérée, compte tenu de la fourchette de la peine prévue à l’art. 106 CP, auquel renvoie l’art. 90 ch. 1 LCR. Par ailleurs, la faute commise par B.J._ est prépondérante, ce qui justifie une peine d’amende plus élevée que celle infligée à A._.
6.
En conclusion, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être mis à la charge de B.J._ (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c0b4d145-f11b-4843-8080-909acb6d5876 | En fait :
A.
Par jugement du 20 octobre 2008, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a notamment constaté qu’U._ s’est rendu coupable de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (III), l’a astreint à 40 heures de travail d’intérêt général (IV), a suspendu l’exécution de la peine et a fixé au condamné un délai d’épreuve de 2 ans (V) et a mis les frais de justice à sa charge (VI).
Il est reproché à U._ d’avoir, le 10 juillet 2007, dans le train Lausanne-Vevey, à proximité de Vevey, refusé de montrer une pièce d’identité selon la demande du contrôleur. Celui-ci a alors prévenu la police ferroviaire car U._ se montrait de plus en plus énervé et injurieux. Arrivés sur place, les agents M._ et S._ ont tenté à leur tour de calmer U._ avant de le prier de les suivre sur la plate-forme. Comme il refusait de les accompagner et continuait à s’agiter, ils ont tenté de lui mettre des menottes. Entre-temps, trois autres agents étaient arrivés en renfort. U._ s’est débattu de plus belle, frappant les agents sur les bras, si bien que M._ n’a pas eu d’autre choix que de faire usage de son spray au poivre. Après l’avoir menotté, les agents ont fait descendre U._ du train en gare de Vevey pour procéder au contrôle d’identité.
B.
Par arrêt du 16 mars 2009, le Président de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a déclaré irrecevable le recours formé le 14 novembre 2008 par U._. La Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par U._ par arrêt du 22 mai 2009.
Par arrêt du 23 octobre 2013, la Cour d’appel pénale a déclaré irrecevable la demande de révision formée par U._. La Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours interjeté par U._ par arrêt du 6 mai 2014.
C.
Par acte du 22 avril 2015 (déposé au guichet du greffe puis adressé par courrier simple), U._ a demandé la révision du jugement du Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne du 20 octobre 2008. Il a conclu, avec suite de frais et dépens, à son annulation en ce sens qu’une nouvelle décision est rendue par le Tribunal cantonal, que S._, M._ et N._ sont entendus et condamnés pour obstruction à la justice, que les frais mis à sa charge sont annulés, qu’il est entendu et que l’assistance judiciaire lui est accordée. Il a produit plusieurs pièces. | En droit :
1.
Aux termes de l'art. 453 al. 1 CPP, les recours formés contre les décisions rendues avant l'entrée en vigueur du présent code sont traités selon l'ancien droit par les autorités compétentes sous l'empire de ce droit.
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, lorsque, comme en l'occurrence, une personne lésée par un jugement rendu sous l'ancien droit en demande la révision après l'entrée en vigueur du nouveau droit, la demande de révision peut être traitée par la nouvelle juridiction d'appel (art. 21 al. 1 let. b CPP) selon les règles de procédure prévues aux art. 411 ss CPP (TF 6B_41/2012 du 28 juin 2012 c. 1.1). Les motifs de révision restent, en revanche, ceux qui sont prévus par le droit applicable au moment où la décision soumise à révision a été rendue (TF 6B_41/2012 du 28 juin 2012 c. 1.1; Schmid, Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, 2009, n. 2
in fine
ad art. 453 CPP; également Lieber, in : Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2010, n. 5 ad art. 453 CPP). Cette réserve est toutefois sans portée en l’espèce, dès lors que, s’agissant d’une révision en faveur du condamné, le motif de révision prévu à l’art. 410 al. 1 let. a CPP correspond à celui de l’art. 385 CP (Code pénal; RS 311.0), qui n’a d’ailleurs formellement pas été abrogé (cf. Fingerhuth, in : Donatsch/ Hansjakob/Lieber [éd.], op. cit., n. 1 ad art. 410 CPP; Heer, in : Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Bâle 2014, n. 7 ad art. 410 CPP).
La Cour de céans est donc compétente pour connaître de la présente requête.
2.
2.1
L'art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par un jugement entré en force d'en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné.
Cette disposition reprend la double exigence posée à l'art. 385 CP selon laquelle les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être nouveaux et sérieux (Message du Conseil fédéral relatif à l'unification de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 II 1057 ss, spéc. 1303; TF 6B_310/2011 c. 1.2 et les références citées). Les faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsque le juge n’en a pas eu connaissance au moment où il s’est prononcé, c’est-à-dire lorsqu’ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit. Ils sont sérieux lorsqu’ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l’état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 137 IV 59 c. 5.1.2; ATF 130 IV 72 c. 1; TF 6B_310/2011 c. 1.2).
2.2
Pour être valides en la forme, les demandes de révision doivent être motivées et adressées par écrit à la juridiction d’appel, les motifs de révision devant être exposés et justifiés dans la demande (art. 411 al. 1 CPP; Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, 3
e
éd., Schulthess § 2011, n. 2092, p. 679; Heer, in : Niggli/Heer/Wiprächtiger [éd.], Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozess-ordnung Jungenstrafprozessordnung, 2
e
éd., Bâle 2014, n. 6 ad art. 411 CPP. L’art. 412 al. 2 CPP prescrit que la juridiction d'appel n'entre pas en matière sur la demande de révision si celle-ci est manifestement irrecevable ou non motivée ou si une demande de révision invoquant les mêmes motifs a déjà été rejetée par le passé. La procédure de non-entrée en matière selon cette disposition est en principe réservée à des vices de nature formelle; il est toutefois également possible de prononcer une décision de non-entrée en matière lorsque les motifs de révision invoqués apparaissent d'emblée non vraisemblables ou mal fondés (TF 6B_293/2013 du 19 juillet 2013 c. 3.3; TF 6B_415/2012 du 14 décembre 2012 c. 1.1 et les références citées).
2.3
En l’espèce, le requérant a produit avec sa requête du 22 avril 2015 plusieurs pièces qui établissent qu’il a fait des recherches avec l’aide de son ancien avocat et du bâtonnier pour retrouver l’identité d’un témoin. Or ces pièces démontrent seulement que ces recherches ont été vaines. Pour le reste, le requérant ne soulève aucun argument nouveau qui n’aurait pas été présenté dans sa première demande de révision déclarée irrecevable par jugement du 23 octobre 2013. Sa requête ne se fonde dès lors sur aucun élément de fait ou moyen de preuve nouveau susceptible de motiver l’acquittement au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP.
3.
Sur le vu de ce qui précède, il ne sera pas entrée en matière sur la demande de révision d’U._ au sens de l’art. 412 al. 2 CPP.
Il s’ensuit que la requête d’assistance judiciaire doit être rejetée.
Vu l’issue de la cause, les frais de révision, par 550 fr. (art. 21 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), par renvoi de l'art. 22 de cette loi), doivent être mis à la charge d’U._. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c0dc3987-059a-4f9c-91f7-cb93bbd15e8f | En fait :
A.
Par jugement du 16 octobre 2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré Q._ des chefs d’accusation de menaces, actes d’ordre sexuel avec des enfants, contrainte sexuelle, subsidiairement actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (I), alloué à Q._ une indemnité de 1'000 fr. en réparation du tort moral subi (II), rejeté les conclusions civiles prises par A.T._ tant en son nom qu’en celui de sa fille (III) et laissé à la charge de l’Etat les frais de procédure, y compris les indemnités allouées au conseil d’office de A.T._ et au défenseur d’office de Q._.
B.
Par annonce d’appel du 21 octobre 2014, puis déclaration motivée du 1
er
décembre 2014, A.T._ a formé appel contre ce jugement, concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que Q._ soit reconnu coupable de menaces, d’actes d'ordre sexuel avec des enfants, de contrainte sexuelle, subsidiairement d’actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de discernement ou de résistance, qu’il soit condamné à une peine fixée à dire de justice et à payer à C.T._ une somme de 15'000 fr., avec intérêts à 5% l’an dès le 10 janvier 2013 à titre de réparation morale, les frais de justice étant mis à la charge de Q._. Subsidiairement, A.T._ a conclu à l’annulation du jugement, la cause étant renvoyée au tribunal de première instance pour complément d’instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants de l’arrêt à intervenir.
Le 20 octobre 2014, le Ministère public a annoncé faire appel, avant de retirer son annonce le 12 novembre suivant. Par courrier du 19 janvier 2015, il a indiqué qu’il n’entendait pas intervenir à l’audience d’appel et qu’il renonçait à déposer des conclusions.
Aux débats de ce jour, Q._ a déposé des conclusions civiles, en précisant que celles-ci reprenaient les conclusions de première instance et ne s’y ajoutaient pas. Il a conclu au rejet de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Ressortissant afghan, le prévenu Q._ est né le [...] 1966 à [...]. Il vit en Suisse depuis vingt-quatre ans et bénéficie d’un permis B depuis 2005. Il a fait une demande de naturalisation qui est toujours en cours. Il a commencé un stage de cuisinier à [...] le 1
er
février 2015 et réalise un salaire mensuel brut de 3'748 fr., versé treize fois l’an. Il bénéficiait auparavant du revenu d’insertion. Il loge à l’hôtel [...]. Il a 45'000 fr. de dettes environ. Il n’a personne à charge et n’a pas de famille en Suisse. Il souffre de dépression.
Son casier judiciaire suisse est vierge.
2.
2.1
C.T._, née le [...] 2006, et D.T._, né le [...] 2005, sont les enfants de A.T._ et d’B.T._. A l’époque des faits décrits ci-dessous, cette dernière était partie au Pakistan pour une certaine période, laissant A.T._ seul s'occuper de leurs enfants sans le moindre soutien extérieur alors qu'il travaillait à plein temps. Sans solution de garde, A.T._ s’est adressé à Q._ qui était une connaissance. Celui-ci a accepté de s'occuper de C.T._ et de D.T._ dès le 7 janvier 2013.
2.2
Le mercredi 9 janvier 2013, C.T._ a déclaré à son père que le matin même, alors que son frère était à l’école et qu’elle se trouvait seule dans le studio du prévenu sis rue [...] à [...],Q._ lui aurait demandé d’aller se coucher. Alors qu’elle faisait semblant de dormir, il lui aurait caressé le ventre, puis embrassé la poitrine. Il lui aurait ensuite demandé de se mettre à genoux la tête en avant et lui aurait baissé son pantalon pour voir sa culotte.
A la suite de ces déclarations, A.T._ a contacté Q._ pour qu’ils se retrouvent le soir même à Lausanne. Accompagné de ses enfants, A.T._ a rapporté les accusations de C.T._ au prévenu. Au cours de leur discussion, Q._ a pleuré.
Le jeudi et le vendredi suivants, A.T._ a à nouveau confié ses enfants à Q._.
2.3
Le 13 janvier 2013, A.T._ a déposé plainte contre Q._, en qualité de représentant qualifié de sa fille, et s'est constitué demandeur au pénal et au civil.
Le même jour, C.T._ a été entendue par une inspectrice de la police lausannoise. Elle a déclaré qu’elle n’allait plus chez le prévenu parce qu’il serait méchant et qu’il « enlèverait la culotte ». Elle a expliqué qu’il serait entré dans les toilettes quand elle s’y trouvait et aurait ri en déclarant « elle a un zizi ». Elle serait ensuite allée se coucher et le prévenu lui aurait caressé le ventre et la poitrine par-dessous ses vêtements, avant de l’embrasser aux mêmes endroits, ainsi que sur la main. Le prévenu aurait également menacé de lui couper le cœur avec un couteau – l’enfant a évoqué dans un premier temps une paire de ciseaux – qu’il aurait pointé contre sa poitrine. Il lui aurait fait mal en la touchant avec cet objet. La fillette a ensuite affirmé que le prévenu aurait maquillé et habillé son frère d’une robe et qu’il les aurait frappés tous les deux au visage avec les poings. Elle a expliqué également que le prévenu lui aurait demandé de se mettre à genoux la tête en avant contre le sol et qu’il lui aurait mis un coussin sur la tête, avant de se mettre debout dessus puis de se coucher sur celui-ci. Il aurait ensuite mis le feu à ce coussin, ce qui lui aurait brûlé la tête. Enfin, elle a affirmé qu’il lui aurait également baissé son pantalon pour mettre un mouchoir dedans. Il lui aurait remis ce mouchoir à chaque fois qu’elle l’enlevait et elle aurait finalement dormi avec le soir.
2.4
Q._ a été interpellé le 14 janvier 2013. Il a contesté les faits qui lui étaient reprochés. Aucun vêtement féminin ni produit de maquillage n’a été découvert lors de la perquisition de son logement.
3.
Interpellé sur la situation de C.T._, le Service de protection de la jeunesse (ci-après : SPJ) s’est déterminé le 20 septembre 2013. Il ressort de son rapport et des pièces qu’il a produites les éléments qui suivent.
Le SPJ a relevé qu’il existait des difficultés socio-éducatives depuis plusieurs années au sein de la famille de C.T._ et que celles-ci s’étaient exacerbées lors de l’hiver 2012-2013. Il était intervenu une première fois au sein de la famille au début de l’année 2010, B.T._ s’étant plainte de violence physique de la part de son époux. Un réseau de soutien avait été mis en place autour de leurs enfants et le dossier avait finalement été archivé en mai 2012. Le 4 décembre 2012, le Centre d’accueil Malley Prairie a adressé un nouveau signalement au SPJ. Le SPJ a décidé d’attendre le retour d’B.T._ pour intervenir. Il ressort du signalement précité qu’B.T._ a séjourné au centre avec ses enfants du 30 août au 21 septembre 2012 pour la sixième fois depuis 2010. Le centre a fait part de ses inquiétudes quant à l’absence de préoccupation de la mère pour ses enfants.
Le SPJ a indiqué qu’il avait observé un contexte passablement dysfonctionnel au sein de cette famille. B.T._ semblait s’être absentée seule plusieurs fois et pour de longues périodes au Pakistan sans donner de date de retour précise, laissant à son époux la charge des enfants. Ceux-ci semblaient passablement perturbés lors des absences de leur mère et livrés à eux-mêmes. S’agissant de C.T._ en particulier, le SPJ a indiqué qu’elle avait montré des signes inquiétants, comme de l’agressivité envers l’adulte, très rapidement après sa présumée agression. Avant janvier 2013, l’école la décrivait comme une petite fille adéquate en classe. S’agissant de D.T._, le dossier du SPJ révèle qu’il présentait des difficultés comportementales telles qu’il était inenvisageable qu’il intègre une classe ordinaire. Ces difficultés existaient déjà avant les faits qui étaient reprochés au prévenu. Il ne faisait notamment plus la différence entre la fiction et la réalité (cf. P. 43, échanges de courriels entre M. [...] à Mme [...] les 14 février et 3 mai 2013).
Selon le SPJ, une absence prolongée d’B.T._ ne pouvait pas être la seule explication à la souffrance que les enfants pouvaient ou avaient pu exprimer, des événements traumatiques pouvant en être la cause.
4.
Après avoir apprécié les différents éléments au dossier, le premier juge a libéré le prévenu de tous les chefs d’accusations. Sans remettre en cause la souffrance de C.T._, il a considéré que celle-ci avait de multiples causes. Il a estimé qu’un doute important subsistait quant aux faits reprochés à Q._ et que ce doute devait lui profiter. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délai légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de A.T._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
L’appelant conteste l’acquittement du prévenu et invoque une appréciation incomplète et erronée des faits, ainsi que la violation du principe
in dubio pro reo
.
3.1
3.1.1
A teneur de l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d’innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU Il (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1). Comme règle d’appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 la 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 précité, c. 2.2.2).
3.1.2
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
3.2
3.2.1
L’appelant reproche au premier juge de n’avoir pas correctement tenu compte de l’appréciation du SPJ et d’avoir notamment retenu que la famille de l’appelant était dysfonctionnelle.
Même si, comme le dit l’appelant, son fils D.T._ semble plus perturbé que sa fille C.T._, le dossier du SPJ révèle que la famille a rencontré des difficultés importantes durant plusieurs années, difficultés qui ne sont certes pas en lien avec des abus sexuels, mais qui établissent un contexte familial passablement dysfonctionnel. On ne saurait faire abstraction de ce contexte qui, contrairement à ce que soutient l’appelant, ne renforce pas la crédibilité de l’enfant. En outre, l’affirmation du SPJ selon laquelle l’enfant a montré des signes inquiétants, comme de l’agressivité envers l’adulte, très rapidement après sa présumée agression est contredite par l’enseignante de l’enfant selon laquelle C.T._ présentait des troubles de comportement déjà à la fin de l’année 2012. Au demeurant, le SPJ est intervenu à nouveau à la mi-janvier 2013 après le dépôt de la plainte pénale et ne suivait plus la famille à la fin de l’année 2012. Mal fondé, le grief de l’appelant doit être écarté.
3.2.2
L’appelant reproche au premier juge de n’avoir pas correctement tenu compte des déclarations de la psychologue de C.T._.
[...] n’a jamais douté que C.T._ avait peur de Q._. Elle a rapporté que l’enfant lui avait demandé de l’aider à oublier le prévenu et qu’elle s’était montrée rassurée lorsqu’elle l’avait dessiné en prison. Cette professionnelle a néanmoins aussi déclaré qu’elle n’arrivait pas à comprendre ce qui s’était passé et qu’elle avait parfois l’impression que l’enfant faisait mal la distinction entre la réalité et ce qui relevait du fantasme. Même si le premier juge ne cite que partiellement son témoignage, l’état de fait n’en est pas pour autant incomplet, l’essentiel des déclarations de ce témoin a été mentionné par le tribunal.
3.2.3
L’appelant fait grief au premier juge d’avoir mis en cause sa crédibilité et partant, celle de sa fille, en retenant sans tenir compte de sa situation personnelle particulière, qu’il avait à nouveau confié ses enfants au prévenu après le prétendu abus et qu’il avait tardé à se rendre à la police pour déposer plainte.
Il n’y pas lieu de se pencher longuement sur cette question. Aussi explicables ou excusables soient-ils, ces faits qui sont avérés ne sont pas déterminants quant à l’appréciation des déclarations de C.T._.
3.2.4
L’appelant reproche au premier juge de n’avoir pas examiné la crédibilité du témoignage de [...]. Ce grief tombe à faux dès lors que le premier juge n’a pas fondé sa conviction sur celui-ci.
3.2.5
L’appelant soutient que les contradictions ressortant des déclarations de Q._ n’ont pas été prises en compte. Ce grief doit également être écarté : même s’il ne s’y attarde pas, le premier juge les a relevées.
3.2.6
Compte tenu de ce qui précède, on ne saurait considérer que l’état de fait du jugement attaqué est incomplet ou erroné.
3.3
Il reste à examiner, selon la propre appréciation de la Cour, l’ensemble des éléments au dossier.
Le visionnement du DVD de l’audition de C.T._, qui s’est déroulée quelques jours après les faits, démontre de manière claire que l’enfant a de la peine à faire la différence entre la vérité et le mensonge, notamment lorsqu’elle ment sur son âge avant de devoir admettre qu’elle raconte des histoires, qu’elle explique comment le prévenu se serait mis debout sur le coussin qu’il lui aurait posé sur la tête, avant de se coucher dessus puis d’y mettre le feu, ou encore lorsqu’elle reproduit les coups de poing que son frère et elle auraient reçus au visage. A aucun moment, elle n’a évoqué qu’elle aurait suffoqué sous le poids du prévenu, qu’elle aurait eu peur lorsque ses cheveux brûlaient ou qu’elle aurait eu mal ensuite de ses brûlures ou des coups que le prévenu lui aurait infligés. Au contraire, l’enfant, qui est vive, ne montre ni gêne ni tristesse au cours de son audition et ne semble pas apeurée. Elle donne l’impression de jouer un rôle et d’ajouter des détails en suivant son imagination, par exemple lorsqu’elle évoque le mouchoir que le prévenu lui aurait remis plusieurs fois dans le pantalon et avec lequel elle aurait fini par dormir le soir. Ce n’est en outre que devant l’inspectrice qu’elle a évoqué avoir reçu des coups, alors que son père n’aurait pas manqué de l’indiquer à la police s’il en avait eu connaissance. De même, alors qu’il n’en avait jamais été question auparavant, C.T._ a déclaré plus tard à sa psychologue – après que celle-ci lui a indiqué qu’elle serait entendue par le procureur – que le prévenu aurait menacé son frère avec un couteau et a également affirmé à sa mère que le prévenu lui aurait fait mal au vagin.
Certes, C.T._ évoque des faits troublants comme l’a relevé l’inspecteur [...] au terme de son rapport; mais celui-ci mentionne également qu’en raison de son comportement agité et de son manque de coopération, il était difficile de différencier la réalité de l’imaginaire dans ses déclarations, surtout que la fillette semblait avoir de la peine à faire la part des choses entre la vérité et le mensonge. La psychologue [...] a elle aussi expliqué qu’elle n’arrivait pas à se faire une idée de ce qui s’était passé et se demandait si C.T._ inventait certaines choses. Elle avait l’impression que l’enfant faisait mal la distinction entre la réalité et le fantasme. Même si elle ne l’a pas questionnée directement sur les abus dont elle s’est plainte à la police, on relèvera qu’il est troublant que C.T._ ne lui en ait pas parlé d’elle-même, dès lors que le prévenu a été au centre de certaines de leurs discussions et qu’elle lui a spontanément déclaré, lorsque [...] lui a expliqué qu’elle était elle-même convoquée chez le procureur, que le prévenu aurait menacé son frère avec un couteau.
[...] a affirmé que l’enfant ne pouvait pas inventer le sentiment de peur qu’elle nourrit à l’égard du prévenu et que la première chose que C.T._ lui avait demandée était de l’aider à oublier Q._. Il n’est toutefois pas établi que ce sentiment soit la conséquence d’un abus qu’il aurait commis sur elle. On relèvera que le plaignant a déclaré que sa fille n’avait pas eu peur de retourner chez Q._ après les faits et que celle-ci avait accepté d’y aller. On ne conçoit guère qu’une enfant à qui on aurait baissé le pantalon pour voir la culotte, qui aurait reçu des coups de poing au visage, se serait fait brûler les cheveux ou aurait vu son frère se faire maltraiter ait accepté de se rendre encore deux jours chez le prévenu sans manifester d’une façon ou d’une autre son angoisse à son père. Comme relevé précédemment, elle n’a pas semblée apeurée lors de son audition par la police. Par conséquent, il n’est pas exclu que ce sentiment, que la Cour de céans ne remet pas en cause, puisse s’être développé par la suite, compte tenu des implications concrètes de ses déclarations et des réactions des adultes. [...] n’a rencontré l’enfant pour la première fois que le 10 avril 2013. Elle a en outre dû se résoudre à accepter la présence de C.T._ lors de ce premier entretien qui n’aurait dû se dérouler qu’avec ses parents précisément afin d’éviter de « contaminer » l’enfant. On relèvera en outre que la fillette a été directement confrontée au prévenu après l’avoir accusé et qu’elle l’a vu pleurer. On ne saurait faire abstraction de l’ensemble de ces éléments pour apprécier le sentiment de peur qu’éprouve C.T._, dès lors qu’il est envisageable que celui-ci ait été alimenté voire provoqué par le discours des adultes.
Selon le SPJ, des éléments traumatiques autres que l’absence de la mère seraient à l’origine des troubles de comportement des enfants. Cela n’indique toutefois pas encore que C.T._ a été victime d’actes d’ordre sexuel notamment de la part du prévenu. L’enseignante de l’enfant a au demeurant noté qu’elle était perturbée avant Noël 2012 déjà.
Force est de constater qu’il est impossible de déterminer si le discours de l’enfant est crédible et dans quelle mesure. Le dossier ne comporte aucun élément concret à l’appui de ses accusations. A cet égard, on relèvera que le plaignant n’aurait pas manqué de rapporter que sa fille présentait des traces de brûlure sur la tête ou de coups au visage, s’il l’avait constaté. Par ailleurs, aucun vêtement féminin ni produit de maquillage n’a été découvert au domicile du prévenu, alors que l’enfant a affirmé que celui-ci aurait maquillé son frère et qu’il lui aurait fait porter une robe. L’audition de D.T._ sur ce point n’a amené aucun élément.
Il est certes troublant, comme l’a relevé l’appelant, que Q._ et l’enfant décrivent des faits semblables en inversant les rôles. Le prévenu a expliqué que la fillette lui soulevait le pyjama pour voir ses fesses, alors que celle-ci a indiqué que c’était le prévenu qui lui avait baissé le pantalon. De même, le prévenu a expliqué que C.T._ était entrée dans la salle de bain pendant qu’il se douchait et qu’elle n’avait pas arrêté de dire « zizi », alors que, de son côté, l’enfant a affirmé que le prévenu était entré lorsqu’elle était aux toilettes et avait ri en déclarant qu’elle avait un zizi. De même encore, le prévenu a indiqué que C.T._ voulait se coucher avec lui, alors que, selon ce que la fillette a indiqué à son père, ce serait le prévenu qui lui aurait dit d’aller s’allonger. Le prévenu a indiqué que les enfants l’avaient vu nu et qu’ils entraient dans la salle de bain lorsqu’il était aux toilettes, mais ceci peut s’expliquer par le fait que la porte de cette pièce ne fermait pas à clef. Comme l’a relevé le premier juge, le prévenu s’est parfois contredit au cours de l’enquête. En outre, le mobile qu’il prête à l’appelant, à savoir qu’il aurait déposé plainte à son encontre parce qu’il ne voulait plus garder ses enfants, n’est pas convainquant. Il a lui-même reconnu lors de sa première audition que les accusations à son encontre étaient portées par C.T._ elle-même. Ces derniers éléments ne sont pas suffisants pour retenir les faits constitutifs d’actes d’ordre sexuel ou de menaces et fonder une condamnation du prévenu. Le fait qu’il ait pleuré lorsque le plaignant lui a rapporté les accusations de sa fille ne signifie pas pour autant qu’il ait reconnu les faits. L’appelant considère que le témoignage de [...] serait un indice de culpabilité du prévenu dès lors qu’il aurait menti pour lui fournir un alibi. Certes, le témoin a affirmé que C.T._ et D.T._ n’avaient pas causé de misères au prévenu, alors que de toute évidence ces enfants sont agités et difficilement gérables. Certes encore, il a soutenu qu’il avait toujours été présent lorsque le prévenu s’occupait des enfants, alors que ce dernier lui-même a déclaré que le témoin était sorti à un moment donné (PV 3 page 4). Cependant, aussi peu crédible soit-il, ce témoignage ne permet pas de lever les doutes beaucoup trop importants que laissent planer les déclarations de C.T._ et d’imputer au prévenu les faits qu’elle lui reproche.
3.4
Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de considérer qu’il subsiste trop d’incertitudes sur la réalité des faits reprochés au prévenu. La souffrance de C.T._ est indéniable : son audition par la police témoigne d’un profond mal-être. Il n’est toutefois pas établi que celui-ci résulterait d’un abus dont le prévenu se serait rendu coupable. Il y a lieu en conséquence de confirmer l’acquittement.
4.
Au vu de la libération du prévenu, le rejet des conclusions civiles prises par l’appelant doit être confirmé.
5.
Il n’y a pas lieu de se pencher sur la question des conclusions civiles déposée à l’audience d’appel par Q._ dans la mesure où elles n’ont pas été formulées en lien avec la procédure d’appel. Comme l’a précisé l’intimé, celles-ci ne font que reprendre les conclusions de première instance qui lui ont été allouées et ne s’y ajoutent pas.
6.
En définitive, l’appel formé par A.T._ doit être rejeté et le jugement rendu le 16 octobre 2014 par le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne confirmé.
7.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel seront supportés par A.T._ (art. 428 al. 1 CPP). Ces frais comprennent l'émolument de jugement, par 5’964 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1], ainsi que l'indemnité allouée au conseil d'office de l'appelant (art. 135 al. 2 CPP; art. 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFIP).
A cet égard, Me Mazou a produit une liste des opérations faisant état de 22 heures et 24 minutes de temps consacré pour la défense des intérêts de l’appelant, dont 17 heures et 24 minutes effectuées par des stagiaires. Ce temps doit être ramené à un total de 12 heures s’agissant du travail effectué par les avocats-stagiaires et de 3 heures pour celui de Me Mazou. Il n’y a en effet pas lieu de tenir compte du surplus d’heures engendré par le changement de stagiaire intervenu au sein de l’étude de Me Mazou, ni des nouvelles photocopies facturées à hauteur de 83 fr. et de la vacation du stagiaire pour les effectuer. C'est ainsi un montant de 1'860 fr. d'honoraires qui sera alloué à Me Mazou, auquel doit s'ajouter une vacation, par 80 fr., des débours arrêtés à 50 fr., et la TVA, par 159 fr. 20, ce qui représente un total de 2'149 fr. 20.
L'acquittement de Q._ ayant été confirmé, ce dernier a droit à une indemnité pour ses frais de défense (art. 429 al. 1 let. a CPP).
Me Julsaint Buonomo a produit une note d’honoraires faisant état de 6 heures et 50 minutes consacrées à la défense des intérêts de son client, audience d’appel non comprise, ce qui est justifié. C’est ainsi un montant de 1'440 fr. d’honoraires qui lui sera alloué, auquel s’ajoute une vacation, par 120 fr., et la TVA, par 124 fr. 80 fr., ce qui représente un total de 1'684 fr. 80, qui doit mis à la charge de A.T._ (ATF 139 IV 45 c. 1.2).
A.T._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son conseil d’office et du défenseur d'office de Q._ que lorsque sa situation financière le permettra. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c124ba38-0ea6-4792-8604-75bb1b7d2656 | En fait :
A.
Par jugement du 19 juin 2013, le Tribunal criminel de l’arrondissement de Lausanne a notamment constaté qu’J._ s’est rendu coupable de meurtre, lésions corporelles simples, lésions corporelles simples qualifiées, vol, dommages à la propriété, injure, menaces, violation de domicile, infraction à la Loi fédérale sur les étrangers, infraction à la Loi fédérale sur les armes, les accessoires d’armes et les munitions, ainsi que contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants (I), l’a condamné à une peine privative de liberté de 12 ans, sous déduction de 790 jours de détention avant jugement, à une peine pécuniaire d'un jour-amende à 10 fr. le jour, ainsi qu’à une amende de 100 fr., convertible en 10 jours de privation de liberté en cas de non paiement (II), a ordonné qu’J._ soit soumis à un traitement psychiatrique ambulatoire en cours de détention (III) et a ordonné que ce dernier soit maintenu en détention, sous le régime de l'exécution de la peine, à titre de mesure de sûreté (IV).
Par jugement du 6 novembre 2013, la Cour d’appel pénale a admis l’appel formé par le Ministère public et réformé le chiffre III du dispositif précité, en ce sens qu’il est ordonné qu’J._ soit soumis à une mesure d’internement au sens de l’art. 64 al. 1 let. a CP.
Par arrêt du 26 juin 2014 (TF 6B_253/2014), la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis le recours d’J._, annulé le jugement attaqué en tant qu’il ordonne l’internement du condamné et renvoyé la cause à l’autorité cantonale pour complément d’instruction et nouvelle décision.
B.
Faisant suite à l’arrêt du Tribunal fédéral, par avis du 5 août 2014, le président de la Cour de céans a informé les parties qu’il entendait requérir un complément d’expertise afin d’éclaircir la question du risque de récidive présenté par le condamné, et leur a imparti un délai pour se déterminer sur cette manière de procéder.
Par courriers des 8 et 11 août 2014, les parties ont déposé des déterminations.
Le 21 août 2014, le Président de la cour de céans a imparti un nouveau délai aux parties pour qu’elles déposent un éventuel questionnaire à l’attention de l’expert.
En temps utile, le Ministère public et le prévenu se sont déterminés et ont déposé une liste de leurs questions.
Par écriture du 26 septembre 2014, la direction de la procédure a mandaté le Dr [...], Département de psychiatrie, site de Céry, pour qu’il procède à un complément d’expertise dans le but de déterminer si le condamné présentait un risque de récidive pour des infractions mentionnées à l’art. 64 al. 1 CP et, cas échéant, de quantifier précisément ce risque.
Le complément d’expertise a été déposé le 17 février 2015.
Dans ses déterminations du 11 mars 2015, le Ministère public a maintenu les conclusions de son appel, en ce sens qu’J._ est soumis à une mesure d’internement au sens de l’art. 64 al. 1 let. a CP.
Par écriture du même jour, le prévenu, soutenant que les conditions pour ordonner une mesure d’internement ne sont pas réalisées, a conclu au rejet de l’appel.
Le 16 mars 2015, J._ s’est spontanément déterminé sur les observations du Ministère public.
Par avis du 17 mars 2015, les parties ont été informées que la cause serait traitée en procédure écrite. Un délai a été imparti au défenseur du prévenu pour déposer une éventuelle demande d’indemnité.
Le 20 mars 2015, Me Disch a conclu à l’octroi en faveur de son client d’une indemnité de l’art. 429 CPP d’un montant total de 7'673 fr. 25, selon listes d’opérations produites.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
J._ est né le [...] 1986 à [...] en Algérie, pays dont il est ressortissant. Il est le cadet d’une fratrie de deux. Il a vécu dans son pays jusqu’en 1994, avant de rejoindre la Suisse avec son père et son frère en 1997 et déposer une demande d’asile. Dans notre pays, le prévenu s'est senti déraciné et perdu. Ses difficultés existentielles se sont aggravées lorsque son père s'est remarié avec une Suissesse et a emménagé avec celle-ci. Son parcours scolaire a été difficile. Dès l’âge d'onze ou douze ans, l'intéressé a commis des actes de petite délinquance. A l'adolescence, il a commencé à consommer des stupéfiants. En raison de son comportement, il a été placé dans divers foyers. Il n'est pas parvenu à terminer une formation professionnelle.
Le casier judiciaire suisse d’J._ fait état des condamnations suivantes :
- 7 mars 2002, Tribunal des mineurs Lausanne, vol, dommages à la propriété, violation de domicile, contravention à la LF sur les stupéfiants, détention 9 jours, préventive 9 jours;
- 9 juillet 2002, Tribunal des mineurs Lausanne, brigandage, contravention à la LF sur les stupéfiants, détention 15 jours, sursis 1 an, sursis révoqué le 7 septembre 2004;
- 9 septembre 2004, Tribunal des mineurs Lausanne, lésions corporelles simples, lésions corporelles simples (avec du poison/une arme ou un objet dangereux), vol, complicité de vol, brigandage, dommages à la propriété, recel, injure, contrainte, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, délit contre la LF sur les armes, délit et contravention à la LF sur les stupéfiants, contravention à la LF sur le transport public, détention 5 mois, 110 jours détention préventive, règle de conduite;
- 14 avril 2005, Tribunal correctionnel Lausanne, rixe, agression, vol, contravention à la LF sur les stupéfiants, emprisonnement 12 mois, détention préventive 248 jours, expulsion 5 ans (répercussion abolie) avec sursis;
- 1
er
mai 2006, Juge d’instruction de Lausanne, voies de fait, menaces, vol, dommages à la propriété, emprisonnement 3 mois;
- 30 octobre 2006, Juge d’instruction Lausanne, contravention à la LF sur les stupéfiants, circuler sans permis de circulation ou plaques de contrôle, circuler sans assurance-responsabilité civile, conduire un véhicule défectueux, emprisonnement 10 jours, amende 300 fr.;
- 10 mars 2008, Tribunal correctionnel Lausanne, remettre à des enfant des substances nocives, vol, actes d’ordre sexuel avec un enfant, délit et contravention contre la LF sur les stupéfiants, travail d’intérêt général 480 heures, travail d'intérêt général 40 heures ;
- 11 mars 2008, Tribunal de police Lausanne, lésions corporelles simples, rixe, travail d’intérêt général 200 heures, détention préventive 12 jours;
- 3 avril 2009, Cour de cassation pénale Lausanne, agression, vol, contravention à la LF sur les stupéfiants, peine privative de liberté 18 mois, amende 100 fr., détention préventive 240 jours, remplace le jugement du 19 février 2009 du Tribunal correctionnel de Lausanne, libération conditionnelle le 25 janvier 2010, peine restante 4 mois, délai d’épreuve 1 an, révoqué le 3 mars 2011;
- 3 mars 2011, Tribunal correctionnel Lausanne, agression, vol d’usage (tentative), dommages à la propriété, vol, contravention à la LF sur les stupéfiants, peine privative de liberté 6 mois, amende 100 fr., détention préventive 88 jours.
1.2
Pour les besoins de la présente cause, J._ a été détenu avant jugement du 22 avril 2011 au 19 juin 2013, soit durant 790 jours. Depuis lors, il exécute sa peine de manière anticipée.
2.
J._ a été renvoyé devant le Tribunal criminel de l’arrondissement de Lausanne selon acte d'accusation du 14 décembre 2012. La cour de céans se réfère à l’état de fait tel que retenu par les premiers juges, celui-ci n’étant pas contesté en appel. En particulier, elle relève ce qui suit s’agissant des faits reprochés au prévenu en lien avec les infractions contre la vie et l’intégrité corporelle :
Au cours de la nuit du 21 au 22 avril 2011, J._, alors sous l’effet de l’alcool et de stupéfiants, a cambriolé un atelier en emportant notamment un poignard et un petit couteau. Au cours d’une altercation survenue vers 05h40, le prévenu s’est servi de ces couteaux pour asséner des coups à A.S._ et son frère, B.S._. Le premier a subi des blessures à l’arrière d’une oreille dans le cuir chevelu, à l’arrière du crâne ainsi que sur le flanc gauche. Le second, souffrant de huit lésions, a succombé à ses blessures le même jour.
3.
3.1
Mandatés en cours d'enquête, les Dr. [...] et [...], Département de psychiatrie du CHUV, ont procédé à l’expertise psychiatrique d’J._. Dans leur rapport du 3 novembre 2011 (P. 131), ces experts ont posé les diagnostics suivants : trouble de la personnalité dyssociale, syndrome de dépendance à l’alcool, utilisation épisodique, utilisation nocive pour la santé de cocaïne, de sédatifs ou hypnotiques, et un syndrome de dépendance au cannabis. Ils ont retenu que la diminution de la responsabilité de l’expertisé était légère au moment des faits. Quant au risque de récidive, ils ont relevé que celui-ci était susceptible de commettre à nouveau des actes du même registre que ceux pour lesquels il était prévenu. Se déterminant sur les mesures à prendre pour diminuer ce risque, ils ont indiqué que le traitement psychothérapeutique entamé auprès d’une psychologue ne pouvait pas prévenir des actes de violence, dès lors que les capacités d’introspection de l'intéressé restaient faibles et limitaient les chances de succès d’une thérapie déjà, d’un point de vue théorique, rarement efficace dans les situations de trouble de la personnalité dyssociale. De plus, l'engagement de l’expertisé était faible. Un traitement institutionnel ou ambulatoire ne paraissait pas davantage en mesure de prévenir la commission de nouvelles infractions, au vu de la présence simultanée du trouble de la personnalité, les actes punissables étant en lien avec ce trouble, et la consommation de substances psychoactives étant censée renforcer l'impulsivité et les comportements agressifs. Enfin, au vu du parcours pénal et des antécédents du prévenu, une mesure de placement ne paraissait pas davantage indiquée.
3.2
Aux débats de première instance (cf. jgt., p. 12), le Dr ...][...] a déclaré que le risque de récidive lui paraissait possible pour l'ensemble des actes commis, notamment de violence. Il a ajouté que peu d'éléments avaient amené une amélioration, qu'il voyait mal ce qui avait changé, qu'un simple traitement des addictions était voué à l'échec et devait être couplé avec un suivi psychothérapeutique, traitement pour lequel J._ devait être durablement demandeur. Ce médecin a aussi relevé que les troubles de la personnalité n'étaient pas des maladies mentales, mais qu'on les retrouvait dans les classifications des troubles psychiatriques.
3.3
Dans son complément d’expertise du 17 février 2015 (P. 298), le Dr [...] a confirmé le diagnostic de personnalité de type dyssocial, auquel s’associait une problématique de consommation de substances psyho-actives multiples. Selon lui, l’expertisé restait actuellement susceptible de commettre des infractions telles que celles énumérées à l’art. 64 al. 1 CP, y compris des actes de violence pouvant mettre en danger la vie d’autrui. Quant à l’importance de ce risque, il a relevé ce qui suit :
« dans le cadre carcéral, au vu du comportement de ces dernières années, et si l’on se basait sur l’ensemble des éléments à notre disposition, des actes tels qu’un assassinat, un meurtre ou des lésions corporelles graves ne paraissaient actuellement susceptibles de se produire qu’avec une probabilité faible à modérée. En dehors du cadre carcéral, de tels actes apparaissaient aujourd’hui comme « possibles » à « vraisemblables », si Monsieur J._ venait à se retrouver dans les mêmes circonstances de vie qu’auparavant : séjour illégal en Suisse, sans activité professionnelle, socialement désinséré et sous l’effet de substances psycho-actives. Ce risque, que l’on peut qualifier de « possible » à « vraisemblable », ne paraît ainsi, par ailleurs, pas devoir être considéré comme imminent ».
Pour le surplus, l’expert a confirmé les conclusions de son rapport du 3 novembre 2011. | En droit :
1.
Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision. Il peut également renvoyer l'affaire à l'autorité qui a statué en première instance (art. 107 al. 2 LTF [loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral, RS 173.110]). L'autorité à laquelle l'affaire est renvoyée doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit contenus dans l'arrêt de renvoi. Elle ne peut en aucun cas s'écarter de l'argumentation juridique du Tribunal fédéral, aussi bien en ce qui concerne les points sur lesquels il a approuvé la motivation précédente que ceux sur lesquels il l'a désapprouvée. Il n'est pas possible de remettre en cause ce qui a été admis – même implicitement – par le Tribunal fédéral (Corboz,
in
: Commentaire de la LTF, Berne 2009, ch. 27 ad art. 107 LTF).
2.
L’appel relève de la procédure écrite, dès lors que seul un point de droit doit être tranché (art. 406 al. 1 let. a CPP).
3.
Le Tribunal fédéral n’a pas contesté le fait qu’en commettant un meurtre, le recourant s’était rendu coupable d’une infraction entrant dans le catalogue de l’art. 64 al. 1 CP. Il a toutefois considéré que les constatations des experts psychiatres, sur lesquelles s’était fondée la Cour de céans dans son jugement du 6 novembre 2013, ne permettaient pas de conclure clairement à l’existence d’un risque qualifié de récidive en lien avec des infractions susceptibles de justifier une mesure d’internement. Il a dès lors renvoyé la cause à l’autorité cantonale pour qu’elle recueille des preuves complémentaires lui permettant d’examiner si les conditions de l’art. 64 al. 1 let. a CP étaient réalisées dans le cas d’espèce.
3.1
3.1.1
Selon l'art. 56 al. 1 CP, une mesure doit être ordonnée si une peine seule ne peut écarter le danger que l'auteur commette d'autres infractions (let. a), si l'auteur a besoin d'un traitement ou que la sécurité publique l'exige (let. b) et si les conditions prévues aux art. 59 à 61, 63 ou 64 sont remplies (let. c).
Pour ordonner une des mesures prévues aux art. 59 à 61, 63 et 64 CP, le juge doit se fonder sur une expertise; celle-ci doit se déterminer sur la nécessité et les chances de succès d'un traitement, la vraisemblance que l'auteur commette d'autres infractions et la nature de celles-ci, et sur les possibilités de faire exécuter la mesure (art. 56 al. 3 CP). Selon la jurisprudence, le juge apprécie en principe librement une expertise et n'est pas lié par les conclusions de l'expert. Toutefois, il ne peut s'en écarter que lorsque des circonstances ou des indices importants et bien établis en ébranlent sérieusement la crédibilité; il est alors tenu de motiver sa décision de ne pas suivre le rapport d'expertise (ATF 133 II 384 c. 4.2.3; ATF
129 I 49 c. 4; 128 I 81 c. 2). Inversement, si les conclusions d'une expertise judiciaire apparaissent douteuses sur des points essentiels, le juge doit recueillir des preuves complémentaires pour tenter de dissiper ses doutes. A défaut, en se fondant sur une expertise non concluante, il pourrait commettre une appréciation arbitraire des preuves et violer l'art. 9 Cst. (ATF 136 II 539 c. 3.2).
3.1.2
L'internement fondé sur l'art. 64 CP suppose que l'auteur ait commis l'une des infractions énumérées à l'al. 1 de cette disposition, à savoir un assassinat, un meurtre, une lésion corporelle grave, un viol, un brigandage, une prise d'otage, un incendie, une mise en danger de la vie d'autrui, ou une autre infraction passible d'une peine privative de liberté de cinq ans au moins et qu'il ait par là porté ou voulu porter gravement atteinte à l'intégrité physique, psychique ou sexuelle d'autrui. Il faut en outre que l'une des conditions alternatives posées à l'art. 64 al. 1 CP soit réalisée, à savoir que, en raison des caractéristiques de la personnalité de l'auteur, des circonstances dans lesquelles il a commis l'infraction et de son vécu, il soit sérieusement à craindre qu'il ne commette d'autres infractions du même genre (let. a) ou que, en raison d'un grave trouble mental chronique ou récurrent en relation avec l'infraction, il soit sérieusement à craindre que l'auteur ne commette d'autres infractions du même genre et que la mesure prévue à l'art. 59 CP – à savoir une mesure thérapeutique institutionnelle – apparaisse vouée à l'échec (let. b).
3.1.3
Par rapport aux autres mesures, l'internement n'intervient qu'en cas de danger « qualifié ». Il suppose un risque de récidive hautement vraisemblable. Pratiquement, le juge devra admettre un tel risque s'il ne peut guère s'imaginer que l'auteur ne commette pas de nouvelles infractions du même genre. Une supposition, une vague probabilité, une possibilité de récidive ou un danger latent ne suffisent pas (ATF 137 IV 59 c. 6.3). Le risque de récidive doit concerner des infractions du même genre que celles qui exposent le condamné à l'internement. En d'autres termes, le juge devra tenir compte, dans l'émission de son pronostic, uniquement du risque de commission d'infractions graves contre l'intégrité psychique, physique ou sexuelle (ATF 137 IV 59 c. 6.3; ATF 135 IV 49 c. 1.1.2).
3.2
En l’occurrence, dans son complément d’expertise du 17 février 2015 (P. 298), le Dr [...] a confirmé que le prévenu restait, à ce jour, susceptible de commettre des infractions telles qu’énumérées à l’art. 64 al. 1 CP, y compris des actes de violence pouvant mettre en danger la vie d’autrui. En dehors du cadre carcéral, il a qualifié le risque de récidive de « possible » à « vraisemblable »; il a précisé à cet égard que ce risque ne paraissait pas devoir être considéré comme imminent.
Sur la base de ces constatations, on ne saurait admettre que le risque de récidive présenté par le prévenu est hautement vraisemblable, soit qu’il confine à la certitude. Le danger n’étant pas qualifié au sens de la jurisprudence précitée, les conditions pour prononcer un internement ne sont pas réalisées, de sorte que le prévenu ne peut pas être soumis à une telle mesure.
3.3
En conséquence, l’appel du Ministère public doit être rejeté et le jugement entrepris entièrement confirmé.
4.
Vu le sort de l’appel, le prévenu a droit à l’allocation de dépens pour l’ensemble de la procédure d’appel.
A cet égard, ce dernier réclame une indemnité d’un montant total de 7'673 fr. 25, au tarif horaire de 350 francs. En particulier, il requiert l’octroi d’une somme de 5'263 fr., correspondant à une activité de 13h41, plus la TVA et des débours par 84 fr., pour les opérations antérieures au jugement sur appel (cf. P. 304/1), et d’une somme de 2'410 fr. 25, correspondant à une activité de 6h13, plus la TVA et des débours par 55 fr. 90, pour les opérations postérieures à l’arrêt du Tribunal fédéral (cf. P. 304/2).
4.1
4.1.1
Aux termes de l’art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s’il bénéficie d’une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure. Cette indemnité concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix (ATF 138 IV 205 c. 1).
Les dépenses à rembourser au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP sont essentiellement les frais de défense. Cette disposition transpose la jurisprudence selon laquelle l’Etat ne prend en charge ces frais que si l’assistance était nécessaire compte tenu de la complexité de l’affaire en fait ou en droit et que le volume de travail et donc les honoraires de l’avocat étaient ainsi justifiés (ibidem).
4.1.2
Conformément à l’art. 26a TFIP (Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1), dont la teneur est la même que sous l’ancienne loi (cf. art . 26a aTFJP, Tarif des frais judiciaires pénaux), le tarif déterminant est de 250 fr. au minimum et de 350 fr. au maximum pour l’activité déployée par l’avocat (al. 1). Dans les causes particulièrement complexes ou nécessitant des connaissances particulières, ce tarif peut être augmenté jusqu’à 400 francs (al. 2).
4.3
4.3.1
En l’espèce, s’agissant tout d’abord du tarif horaire, il est relevé que la présente affaire portait certes sur une question délicate qui pouvait avoir de graves conséquences pour le prévenu; cela étant, le point litigieux était limité et ne posait pas de difficultés particulières. Dans ces conditions, on ne saurait retenir ni le tarif usuellement appliqué dans le cadre d’affaires dites « ordinaires », soit 350 fr., ni le minimum légal de 250 francs. Tout bien considéré, il sera tenu compte d’un tarif horaire de 300 francs.
4.3.2
Quant aux opérations antérieures au jugement du 6 novembre 2013, il est relevé que Me Disch n’a pas déposé de déterminations sur l’appel du Ministère public qui portait uniquement sur la mise en œuvre d’une mesure d’internement. Par ailleurs, celui-ci a consacré 4h20 pour l’étude du dossier et 2h30 pour les conférences avec son client; dans la mesure où la question litigieuse a été examinée et débattue en première instance, le temps consacré à ces opérations paraît excessif. Le nombre de conférences avec le client entre l’audience de jugement et les débats est également trop important. Tout bien considéré, 3 heures pour la préparation des débats d’appel et 50 minutes pour une conférence avec le client sont suffisantes. De plus, on ne saurait prendre en considération le temps consacré, soit plus de 30 minutes, pour la rédaction d’une lettre ainsi que pour divers téléphones à une assistante sociale, ces opérations sortant de la notion d’exercice raisonnable des droits de défense.
Sur le vu de ce qui précède, il sera tenu compte d’une durée de 9 heures pour les opérations antérieures au jugement du 6 novembre 2013. Compte tenu d’un tarif horaire de 300 fr., de la TVA et de débours par 84 fr., c’est une indemnité de 3'006 fr. 70 qui sera allouée au prévenu pour cette partie de procédure.
4.3.3
Quant aux opérations postérieures à l’arrêt du Tribunal fédéral, le temps consacré à la réplique – spontanée – du 16 mars 2015 et à un deuxième examen du rapport complémentaire ensuite de celle-ci, représentant 35 minutes, ne peut pas être indemnisé. Pour le reste, le temps annoncé ne paraît pas excessif. En conséquence, c’est une indemnité de 1'885 fr. 60, correspondant à 5h38 d’activité au tarif horaire de 300 fr., plus la TVA et 55 fr. 90 de débours, qui doit être octroyée au prévenu pour cette deuxième partie de procédure.
4.4
En conclusion, un montant global de 4'892 fr. 30, TVA et débours compris, sera alloué à J._ à titre de dépens pour l’ensemble de la procédure d’appel.
5.
Vu l’issue de la cause, les frais de la procédure d’appel antérieure à l’arrêt du Tribunal fédéral, par 2'900 fr., ainsi que ceux de la procédure d’appel postérieure à cet arrêt, par 1’430 fr., doivent être laissés à la charge de l’Etat
(art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c1febcd0-e242-4f36-9f7f-20ebd246e4c3 | En fait :
A.
Par jugement du 5 janvier 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que X._ s'était rendu coupable de tentative de vol (I), a condamné X._ à 60 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à CHF 50.- (II), a suspendu l'exécution de la peine pécuniaire et a fixé à X._ un délai d'épreuve de trois ans (III), a alloué ses conclusions à Bell SA et dit que X._ était son débiteur de la somme de CHF 1'634.20 avec intérêts à 5 % l'an dès le 30 mai 2009 et de la somme de CHF 800.- à titre de participation à ses frais d'intervention pénale (IV), a dit que le séquestre Numéro 1753 (DVD de caméra de surveillance) restait au dossier comme pièce à conviction (V) et a mis les frais de procédure, par CHF 1'841.-, à la charge de X._ (VI).
B.
Le 9 janvier 2011, X._ a annoncé faire appel de ce jugement. Dans sa déclaration d'appel du 13 février suivant, il a conclu implicitement à la réforme du jugement contesté en ce sens qu'il est libéré des fins de l'action pénale. Il faisait valoir qu'il "(n'était) pas l'auteur de cette tentative de vol".
Invitée à se déterminer, la plaignante Z._, intimée à l'appel, a conclu à la non-entrée en matière faute de motivation valide. Suite à la décision d'entrée en matière prise par la cour de céans, le Ministère public a renoncé à comparaître à l'audience.
Les parties ont confirmé leurs conclusions respectives à l'audience du 16 mai 2011. L'appelant a fait savoir ce qui suit : « Je travaillais depuis huit ans chez Z._. J’avais reçu plusieurs avertissements, justifiés ou non, de mon employeur, le premier sur un problème de contrôle de viande, le deuxième sur un problème de prélèvement de viande durant mes vacances, le troisième en relation avec mes responsabilités de chef du service de désossage. En ce qui concerne la présente tentative de vol pour laquelle j’ai été dénoncé, la personne qui m’a vu a indiqué que l’auteur de la tentative correspondait à mon signalement. Je conteste ce dernier point. En outre, je considère démesurée la manière dont j’ai été appréhendé par la police, puis détenu durant deux heures.». La procédure probatoire a été clôturée à l'issue de l'audience.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
Né en 1964, boucher de formation, l'appelant a été engagé par Z._ au début des années 2000, avec la fonction de chef désosseur auprès de la succursale de [...] de son employeur. Son casier judiciaire est vierge. Sa situation financière est relativement tendue. En effet, il a des dettes pour 540'000 fr. pour un salaire mensuel net supérieur à 6'300 fr. A raison des faits qui lui sont reprochés dans le cadre de la présente enquête, il a été licencié pour justes motifs le 30 mai 2009 avec effet immédiat. Il n'a pas contesté cette mise à pied devant la juridiction compétente en matière de conflits du travail. Quelques semaines plus tard, il a été engagé par un autre employeur et occupe pour l'heure toujours ce nouveau poste.
Il a été déféré devant le tribunal de police par ordonnance du 24 mars 2010 sous le chef d'accusation de tentative de vol. L'ordonnance retient que, le 29 mai 2009, vers 2h55, sur son lieu de travail, l'intéressé a tenté de dérober 18,4 kg de viande et de charcuterie au préjudice de son employeur, ce pour un montant total de 600 fr. Ce projet a été mis en échec par l'intervention d'un agent de sécurité, lequel avait repris la marchandise alors que l'accusé reculait sa voiture pour la charger.
L'accusé a toujours contesté les faits, survenus alors qu'il était au milieu d'une période de vacances. Il a fait valoir que, s'il se trouvait alors effectivement sur les lieux, c'est qu'il entendait aussi bien prendre connaissance des courriels reçus sur son ordinateur que contrôler la présence de l'un de ses subordonnés désosseur qui, selon lui, ne respectait pas les horaires. Il a ajouté que, lorsque, en sortant de l'immeuble, il avait aperçu la caisse contenant la marchandise en cause, il s'était approché avec son véhicule pour voir ce qu'il en était. Par la suite, il était rentré chez lui.
Le tribunal de police a entendu comme témoins le responsable de la succursale de Z._, l'agent Securitas qui se trouvait sur les lieux la nuit en question et un collègue de travail de l'accusé.
Le chef de succursale a fait savoir qu'il était persuadé, au vu du signalement qui lui avait été donné, que la personne que l'agent de sécurité avait vue sortir avec une importante quantité de viande était l'accusé. Les morceaux de viande avaient du reste été particulièrement bien choisis. Confirmant son rapport écrit, l'agent de sécurité a indiqué avoir vu, lors de sa ronde, une caisse avec de la marchandise posée sur un muret à côté des escaliers métalliques vers la porte. Resté sur place, il a vu s'approcher un véhicule en marche arrière, phares allumés, qui s'est arrêté à quelques mètres de la caisse. Une personne en est sortie et s'est dirigée vers la caisse. Voyant alors le garde, elle a repris place au volant sans un mot et a quitté les lieux. Trois minutes plus tard, ce témoin avait vu arriver une personne à pied, que le témoin a appelée à trois reprises d'une distance d'environ 30 mètres sans obtenir de réponse. Il ne l'a pas poursuivie, d'une part du fait qu'il ne voulait pas laisser la marchandise sans surveillance et, d'autre part, parce qu'il savait qu'elle allait passer dans le champ des caméras de surveillance. Enfin, le collègue de travail de l'accusé a indiqué que, s'il pouvait arriver qu'une caisse avec de la marchandise se trouvât hors de la zone de désossage, hors de réfrigérateurs, il était invraisemblable que la viande fût laissée en dehors du bâtiment en vue d'une livraison, surtout la nuit; en effet, toute livraison se fait contre quittance. S'agissant de la situation économique de l'accusé, celui-ci semblait parfois avoir des problèmes de liquidités liés à sa procédure de divorce alors en cours, mais il ne semblait pas pâtir d'ennuis financiers sérieux; il était arrivé au témoin de lui prêter une petite somme, laquelle avait immédiatement été rendue. Le matin du même jour, vers 9 h, le témoin a reçu un sms de l'accusé, message dont la teneur était la suivante "je pense que tu es au courant qu'ils m'ont licencié pour vol, t'appelle plus tard". Le même jour encore, lors d'une conversation téléphonique ultérieure, l'accusé a donné des explications confuses à son collègue. Ce dernier a ressenti qu'il essayait de cacher quelque chose et qu'il se fourvoyait dans ses explications.
L'examen du film de la caméra de surveillance a montré que c'était l'accusé qui était passé à proximité de l'entrée du bâtiment lors des faits incriminés. Le tribunal de police a retenu que l'accusé, qui disposait d'un libre accès aux locaux de son employeur, n'avait aucune raison de contrôler les horaires de travail de ses collaborateurs durant ses vacances. S'agissant du courrier électronique de l'accusé reçu en l'absence de son destinataire, il était contrôlé par le collègue entendu comme témoin, qui avait pour mission d'avertir l'intéressé, ce qui avait été fait tous les jours avant les faits incriminés.
Le matin des faits, à la reprise du travail, l'accusé a été entendu par son responsable de succursale et par la cheffe des ressources humaines de l'entreprise, lesquels lui ont alors notifié son congé. L'un et l'autre ont évoqué une attitude ambiguë de l'intéressé, lequel aurait donné des explications fantaisistes.
D.
Appréciant les faits de la cause, le tribunal de police a considéré que l'accusé était l'auteur des faits incriminés, dont la qualification devait être celle de tentative de vol.
Appréciant la culpabilité de l'accusé, le premier juge a retenu, à charge, qu'il avait profité de sa position de cadre, qui lui laissait une grande latitude dans l'accès à son entreprise, pour y soustraire de la marchandise. Au surplus, l'intéressé ne pouvait, toujours de l'avis du tribunal de police, faire valoir aucune circonstance atténuante, hormis celle de l'art. 22 al. 1 CP. Aucun élément n'est expressément mentionné à décharge. Les conditions du sursis ont au surplus été tenues pour remplies. | En droit :
1.
Tant l'annonce que la déclaration d'appel sont intervenus en temps utile. Des conclusions pouvant être déduites de ses motifs, la motivation de la déclaration d'appel satisfait aux exigences légales (art. 399 al. 3 let. b CPP).
2.
L'appelant conteste l'appréciation du premier juge, formulée selon l'art. 81 al. 3 let. a CPP, selon laquelle il devait être déduit du rapprochement des faits tenus pour déterminants qu'il était l'auteur de la tentative de vol incriminée.
3.1
La cour de céans jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués (art. 398 al. 2 CPP). L'appelant invoque implicitement l’excès respectivement l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 398 al. 3 let. a CPP), ainsi que la constatation incomplète ou erronée des faits (art. 398 al. 3 let. b CPP). Il ressort de ses moyens qu'il conteste le raisonnement par lequel le premier juge a acquis la conviction qu'il était l'auteur de l'infraction.
3.2
La présomption d'innocence, qui est garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU, 6 par. 2 CEDH et 32 al. 1 Cst., ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là
(ATF 127 I 38, c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010, c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31, c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38, c. 2a).
4.
Le premier juge a tenu pour établi que l'appelant était bien l'auteur de la tentative de vol incriminée. Il s'est fondé sur des éléments matériels conformes aux pièces du dossier, s'agissant notamment de l'enregistrement de la caméra de surveillance, qu'il a complétés par les témoignages recueillis à l'audience. Point n'est au surplus besoin de compléter les faits au seul vu du dossier, étant précisé qu'il a d'ores et déjà été renoncé à l'administration de toute preuve nouvelle.
5.1
L'appelant était sur les lieux lors des faits, ainsi que l'établit l'enregistrement effectué par la caméra de surveillance. Il disposait d'un accès libre aux locaux de son employeur. Il est en outre établi qu'il n'avait aucune raison légitime de se trouver sur son lieu de travail en pleine nuit durant ses vacances, alors que son courrier électronique était traité de manière adéquate par l'un de ses collègues. Qui plus est, l'appelant avait des ennuis financiers qui, sans certes être aigus, n'en étaient pas moins significatifs. A ceci s'ajoute qu'il est invraisemblable que la viande ait été laissée pour une durée significative en dehors du bâtiment en vue d'une livraison, surtout la nuit. En effet, toute livraison se fait contre quittance uniquement et une telle rupture de la chaîne du froid (notamment au mois de mai, donc par des températures clémentes) contrevient à l'évidence aux règles d'hygiène les plus élémentaires applicables aux produits carnés. Enfin, la qualité des morceaux de viande déposés dans la caisse témoigne des aptitudes professionnelles de la personne les ayant choisis et conditionnés, étant rappelé à cet égard que l'appelant était chef désosseur. Pour le reste, les appréciations portées par les organes de la plaignante sur l'attitude de l'intéressé durant la matinée suivant les faits, ainsi que l'interprétation du sms adressé à l'un de ses collègues et de la conversation qu'il avait ensuite eue avec celui-ci contribuent à fonder la culpabilité du prévenu, sans qu'il soit nécessaire de se référer aux avertissements, justifiés ou non, précédemment reçus par l'appelant de son employeur.
5.2
Il s'ensuit que l'appelant doit être tenu pour l'auteur des faits incriminés.
6.
Cela étant, il convient de statuer d'office sur la qualification des faits, ainsi que sur le genre et la quotité de la peine (art. 404 al. 2 CPP).
6.1
La qualification (tentative de vol) ne prête pas le flanc à la critique. En effet, si le vol n'a pas été consommé, ce n'est que pour des motifs indépendants de la volonté de l'appelant, qui avait accompli les actes devant mener au résultat escompté (cf. l'art. 22 al. 1 CP, rapproché de l'art. 139 al. 1 CP). Les éléments constitutifs de l'infraction réprimée, au stade de la tentative, sont ainsi réunis.
Une peine pécuniaire (art. 34 CP) est adéquate pour réprimer une infraction relevant de la moyenne délinquance, commise par un auteur dépourvu d'antécédents et bien socialisé (cf. ATF 134 IV 82, c. 4.1; TF 6B_541/2007 du 13 mai 2008). De même, à l'aune de l'art. 47 CP, la quotité de la peine fixée par le premier juge tient compte notamment de la valeur de l'objet de l'infraction ainsi que de la gravité des faits, l'appelant ayant abusé de sa position de cadre et du libre accès aux locaux que celle-ci lui conférait pour tenter de s'enrichir illicitement au préjudice de son employeur. Enfin, le jour-amende tient compte de la modicité des ressources de l'accusé.
6.2
Pour le reste, c'est à juste titre que le premier juge a alloué à la plaignante ses conclusions civiles à la charge de l'accusé, sur la base du décompte produit par cette dernière, dont l'exactitude n'a pas été remise en cause par l'accusé. C'est également à bon droit que des dépens, dont la quotité apparaît justifiée au vu de l'ampleur des opérations du mandataire en cours d'enquête, ont été alloués à la plaignante.
7.
Partant, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé.
8.
Vu l'issue de la cause, les frais du présent jugement selon l'art. 424 CPP doivent être laissés à la charge de l’appelant (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). Faute d'avoir procédé utilement, motif pris notamment du fait que l'appelant n'était pas assisté à l'audience, l'intimée ne saurait prétendre à des dépens de deuxième instance. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c243f20b-5fcb-4e37-8b6b-7b832fa3bd12 | En fait :
A.
Par jugement du 21 juin 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de l'Est vaudois a libéré Z._ du chef d'accusation d'escroquerie (I); a constaté qu'elle s'était rendue coupable de faux dans les titres (II); l'a condamnée à la peine de 120 jours-amende, le montant du jours-amende étant fixé à 20 francs (III); a suspendu l'exécution de la peine et fixé à la condamnée un délai d'épreuve de 3 ans (IV); a donné acte à T._ de ses réserves civiles à l'encontre de Z._ (V); a mis les frais de la cause par 9'910 fr. à la charge de Z._ (VI) et dit qu'elle ne devait supporter l'indemnité de son défenseur d'office par 6'200 fr. que si sa situation financière s'améliore (VII).
B.
En temps utile Z._ a interjeté appel contre ce jugement. Elle conclut à sa réforme en ce sens qu'elle est acquittée du chef d'accusation de faux dans les titres, qu'il n'est pas donné acte à T._ de ses prétentions civiles et que les frais de la cause ainsi que l'indemnité due à son conseil d'office sont mis à la charge de l'Etat.
Le Ministère public a renoncé à présenter une demande de non-entrée en matière et à déclarer un appel joint.
Le 11 août 2011, T._ a déclaré un appel joint. Il a conclu à la condamnation de Z._ pour abus de confiance et utilisation frauduleuse d'un ordinateur, au paiement immédiat par Z._ d'un montant de 3'917 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 21 juin 2011 et à ce qu'il lui soit donné acte de ses réserves civiles à l'encontre de Z._.
Par acte du 5 septembre 2011, Z._ a déposé une demande de non-entrée en matière relative à l'appel joint formé par T._.
Dans un délai prolongé au 3 octobre 2011, T._ a conclu au rejet de la demande de non-entrée en matière de Z._.
Le 7 octobre 2011, le président a rejeté la demande de non-entrée en matière présentée par Z._, la procédure d'appel suivant son cours, conformément à l'art. 403 al. 4 CPP.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Z._ est née le 27 novembre 1982 à Kumanovo, en Macédoine, pays dont elle est ressortissante. Elle est mariée et mère de deux enfants. Elle est au bénéfice d'un permis C. Elle est sans emploi depuis les faits concernant la présente procédure.
Son casier judiciaire suisse est vierge de toute inscription.
2.
Le Loto express se joue sur des machines installées par la Loterie romande dans des établissements publics. Le joueur remplit un ticket qui est validé dans la machine après paiement de la mise à la serveuse. Si le ticket est gagnant, le gain est systématiquement et immédiatement réglé jusqu'à 50 francs. Au-delà et jusqu'à 2'000 fr., la serveuse ou le patron décide si le gain sera payé immédiatement ou non. Au-delà de 2'000 fr., les gains sont encaissés directement auprès de la Loterie romande.
Chaque employé et le patron de l'établissement dépositaire de la machine disposent d'un code d'accès à la machine et d'un mot de passe, tous deux confidentiels. Chaque employé introduit son code personnel dans la machine au moment où il prend son service. Il doit ensuite traiter les enjeux des clients. Les serveuses ne sont pas autorisées à jouer pour leur propre compte durant leurs heures de services. Les enjeux sont encaissés dans la même bourse que les consommations. A la fin de son service, la serveuse remplit une fiche sur laquelle sont précisés les montants des encaissements du jour pour les consommations, pour la petite boulangerie ou autres snacks, pour la vente de cigarettes, ainsi que le résultat, positif ou négatif, du Loto express. A l'appui de ce dernier chiffre, la serveuse joint le rapport journalier qu'elle imprime à la fin de son service sur la machine du Loto express. Ce rapport mentionne le code d'utilisateur. En fin de journée, l'employeur dépositaire de la machine installée dans son établissement a la possibilité de tirer une vue d'ensemble, qui ne comporte aucun code d'utilisateur et sur laquelle figurent les résultats nets de la Loterie express pour la journée. Le dépositaire a la possibilité de contrôler si le montant indiqué sur cette vue d'ensemble correspond à l'addition de ceux figurant sur les rapports de tous les employés ayant eu accès à la machine durant la journée. Chaque mardi, le dépositaire doit imprimer la facture que lui adresse la Loterie romande pour les sept jours qui précèdent. Le dépositaire est responsable du paiement de tous les enjeux encaissés dont il faut déduire les gains payés aux joueurs. Le montant de la facture est débité directement du compte postal ou bancaire qu'a ouvert le dépositaire à ce seul effet. Le dépositaire peut vérifier à l'aide de tous les décomptes d'utilisateurs de la semaine écoulée l'exactitude de la facture. A l'époque des faits litigieux, le plaignant ne procédait pas à ce contrôle.
T._, patron du Buffet de la Gare à [...], est dépositaire d'un terminal du jeu "Loterie express". A l'époque des faits litigieux, les codes d'accès ainsi que les mots de passe de tous les employés étaient rangés dans un tiroir sous la caisse, accessibles à tous. En outre, T._ ne vérifiait pas si le montant figurant sur la vue d'ensemble correspondait à l'addition de ceux figurant sur les rapports de tous les employés ayant eu accès à la machine durant la journée, se bornant à vérifier l'adéquation des fiches journalières avec le montant se trouvant dans les bourses de ses serveuses à la fin du service de chacune d'elle, soit deux fois par jour.
Z._ a travaillé dans l'établissement public de T._ en qualité de serveuse. Il lui est reproché d'avoir, entre le 10 novembre 2008 et le 15 janvier 2009, alors qu'elle se trouvait sur son lieu de travail, détourné diverses sommes d'argent provenant de l'exploitation du terminal de jeu de "Loterie express" de la Loterie romande installé dans l'établissement de T._, sur lequel elle jouait très fréquemment. Pendant son service, Z._ aurait changé une ou plusieurs fois le code, en utilisant ceux de ses collègues de travail en leur absence. Chaque code faisant l'objet d'un rapport imprimé, Z._ aurait présenté à son employeur T._ celui qui lui était le plus favorable, créant ainsi un manco dans la caisse du terminal. Z._ aurait agi de la sorte à 32 reprises en détournant des montants compris entre 25 fr. et 1'257 fr., créant un préjudice total de 15'871 francs. T._ a pris conscience d'un problème lorsque le 15 janvier 2009 il est apparu que son compte postal devant être débité par la Loterie romande présentait un manco de près de 4'000 francs.
T._ a déposé plainte contre Z._ et il s'est constitué partie civile.
D.
A l'audience d'appel, les parties ont signé une convention par laquelle Z._ s'est reconnue débitrice de T._ de la somme de 3'917 fr., ceci sans reconnaissance de sa responsabilité pénale. Z._ s'est engagée à s'acquitter de sa dette par le versement mensuel régulier de 150 fr. dès le
1
er
janvier 2012 sur le compte postal CCP [...] dont T._ est titulaire, un retard dans plus de deux versements mensuels entraînant l'exigibilité de l'entier de la dette en souffrance. Z._ s'est également engagée à retirer l'action déposée auprès du Tribunal des prud'hommes de l'Est vaudois, chaque partie se donnant quittance pour solde de compte et de toute prétention du chef du contrat de travail qui les liait. Quant à T._, il a retiré sa plainte et sa constitution civile ainsi que l'appel joint qu'il a déposé le 11 août 2011. | En droit :
1.1
Aux termes de l'art. 386 CPP quiconque a interjeté un recours peut le retirer, s'agissant de la procédure orale, avant la clôture des débats (al. 2 lit. a).
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
1.2
La Cour de céans prend acte du retrait de l'appel joint déposé le 11 août 2011 par T._.
Au surplus, interjeté dans les forme et délai légaux par une partie ayant la qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP), l'appel de Z._ suffisamment motivé au sens de l’art. 399 al. 3 et 4 CPP, est recevable. Il convient donc d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Z._ fait grief aux premiers juges d'avoir utilisé le terme "aveux" à propos du courrier qu'elle avait adressé à T._ le
31 janvier 2009.
3.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, op. cit., n. 19 ad art. 398 CPP).
3.2
En l'occurrence, si la fraude n'a jamais été admise par Z._, il ressort cependant des termes employés dans son courrier du 31 janvier 2009 qu'elle a reconnu des erreurs de manipulation justifiant selon elle la réparation du dommage causé. Le terme "aveux" employé par les premiers juges n'a guère d'autre signification. Leur conviction ne repose de surcroît pas exclusivement ou de façon prépondérante sur cet élément, les premiers juges ayant d'ailleurs relevé que Z._ contestait l'incrimination pénale. Par conséquent, la constatation des faits retenues par les premiers juges n'est ni incomplète ni erronée. Ce grief, mal fondé, doit être rejeté.
4.
Z._ conteste sa condamnation pour infraction de faux dans les titres. Si elle admet, en effet, que les rapports journaliers qu'elle a remis durant la période en cause pouvaient relever de faux intellectuel, elle leur dénie toute valeur probante accrue au sens de l'art. 251 ch. 1 CP.
4.1
L'art. 251 CP réprime celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre.
Le faux dans les titres est une infraction intentionnelle. Le dol éventuel suffit aussi également pour ce dessin. L'art. 251 CP exige de surcroît un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes alternatives, soit le dessein de nuire ou le dessein d'obtenir un avantage illicite (CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3e éd. 2010, n. 171 ss ad art. 251 CP; MARKUS BOOG, Basler Kommentar, Strafrecht II, 2e éd. 2007, n. 86 ss ad art. 251 CP).
Sont notamment des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique (cf. art. 110 ch. 4 CP). L'art. 251 CP vise non seulement le faux matériel, qui consiste dans la fabrication d'un titre faux ou la falsification d'un titre, mais également le faux intellectuel, soit la constatation d'un fait inexact, en ce sens que la déclaration contenue dans le titre ne correspond pas à la réalité. Constitue un faux matériel un titre dont l'auteur réel ne coïncide pas avec l'auteur apparent. Le faux intellectuel vise quant à lui un titre qui émane de son auteur apparent mais qui est mensonger dans la mesure où son contenu ne correspond pas à la réalité (TF 6B_382/2011 du 26 septembre 2011 c. 2.1 et les références citées).
Il convient de distinguer entre le faux intellectuel et le simple mensonge écrit, lequel n'est pas punissable. Par exemple, un mensonge dans un mémoire, une note ou une facture, qui est par sa nature soumis à discussion ou vérification, ne peut pas constituer un faux intellectuel, parce que le document n'est pas apte à prouver un fait. Ainsi, le faux intellectuel est un mensonge écrit qualifié, qui se distingue, par sa capacité de convaincre, d'une simple allégation unilatérale (CORBOZ, op. cit., n. 115 ss ad art. 251 CP et la jurisprudence citée).
L'existence d'un faux intellectuel ne doit être retenue que si le document a une capacité accrue de convaincre, parce qu'il présente des garanties objectives de la vérité de son contenu (ATF 126 IV 65 c. 2.a et les références citées;
ATF 125 IV 277 c. 3a). Il doit résulter des circonstances concrètes ou de la loi que le document est digne de confiance, de telle sorte qu'une vérification par le destinataire n'est pas nécessaire et ne saurait être exigée (TF 6B_502/2009 du
7 septembre 2009 c.2).
4.2
Dans le cas d'espèce, les premiers juges ont retenu que les rapports journaliers servaient avant tout à établir le montant de la bourse de la sommelière dont l'identité était attestée par le code d'utilisateur figurant sur le document. Dès lors ces rapports journaliers constituent une preuve comptable et donc un titre
(cf. jgt., p. 24). Les premiers juges ont également retenu que ces rapports journaliers devaient être vérifiés en comparaison avec la vue d'ensemble journalière sur laquelle figurent les résultats nets de la Loterie express pour la journée et avec la facture hebdomadaire transmise par la Loterie romande. Ils ont relevé que le plaignant n'avait toutefois pas procédé à ces contrôles.
Appréciant les preuves, la cours de céans retient que Z._ a fourni à T._ des rapports journaliers en introduisant des codes d'utilisateur qui n'étaient pas les siens. Il s'agit en réalité d'une manipulation informatique, sans toutefois que cela ne constitue une usurpation d'identité, les codes d'identification ne pouvant être assimilés à une signature. On ne peut, dans ces circonstances, pas retenir qu'un titre a de la sorte été créé, l'usage de code d'accès indu ne correspondant pas à une falsification. Par conséquent, l'infraction de faux dans les titres sanctionnée par l'art. 251 CP n'est pas réalisée. L'appel de Z._ est admis sur ce point. Il s'ensuit que l'appelante est libérée du chef d'accusation de faux dans les titres.
5.
Le comportement de Z._ tombe en réalité sous le coup de l'art. 150 CP.
5.1
Il ressort de cette disposition que celui qui, sans bourse délier, aura frauduleusement obtenu une prestation qu'il savait ne devoir être fournie que contre paiement, notamment celui qui se sera servi d'un ordinateur ou d'un appareil automatique, sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
S'agissant notamment de l'utilisation frauduleuse d'un appareil automatique, l'auteur doit agir frauduleusement, par exemple en utilisant un code d'accès auquel il n'avait pas droit (CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I. Berne 2002, n. 24 ad art. 150 CP et les références citées).
5.2
Dans le cas d'espèce, il est en effet établi que Z._ a très fréquemment joué à la Loterie express sur son lieu de travail, utilisant le code d'utilisateur de ses collègues en leur absence et présentant à son employeur le rapport journalier qui lui était le plus favorable à la fin de son service. Elle a ainsi détourné à son profit des montants compris entre 25 fr. et 1'257 francs. Au vu de ce qui précède, les conditions tant objective que subjective de l'infraction visée à l'art. 150 CP sont réalisées.
A supposer que l'appelante ait été également renvoyée pour cette infraction, il faut relever que sa poursuite nécessite une plainte du lésé. Or, T._ a retiré sa plainte à l'issue des débats d'appel. C'est un motif supplémentaire pour renoncer à prononcer une sanction à l'encontre de Z._ et mettre fin à l'action pénale la concernant.
6.
La Cour d'appel pénale prend acte pour valoir jugement de la convention passée entre Z._ d’une part et T._ d’autre part.
7.
En définitive, il est pris acte du retrait de l'appel joint de T._. L'appel de Z._ est admis.
8.
Vu l'issue de la cause, les frais de procédure d'appel, arrêtés en application de l'art. 21 TFJP et comprenant l’indemnité allouée au défenseur d'office de l'appelante par 1’220 fr. 40 (mille deux cent vingt francs et quarante centimes), TVA et débours inclus (cf. art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP ;
art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP), sont laissés à la charge de l'Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c2766bda-b34a-40bd-a599-06f8af852eea | En fait :
A.
Par jugement du 26 novembre 2012, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a notamment constaté que G._s'est rendu coupable d'injure et J._ de lésions corporelles simples et menaces (I), condamné G._ à cinq jours-amende avec sursis pendant deux ans, le montant du jour-amende étant fixé à 20 francs (II), fixé à 2'118 fr. 60, débours et TVA compris, l'indemnité du défenseur de G._, Me Alexandre Lehmann (IV), dit que J._ est débiteur de G._ de la somme de 278 fr., au titre de dommages-intérêts et rejeté toutes autres conclusions (VI) et mis à la charge de G._ sa part des frais de la cause par 1'075 fr., et par 5'762 fr. 80, à la charge de J._, le remboursement à l'Etat de l'indemnité prévue au chiffre IV ci-dessus et comprise dans le total des frais mis à sa charge ne sera exigé que dans la mesure où sa situation économique le permet (VII).
Statuant sur l’appel déposé contre ce jugement par G._, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a, par jugement du 25 mars 2013, rejeté l'appel et confirmé le jugement attaqué (CAPE 2013/78).
B.
Par arrêt du 12 septembre 2013, la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis le recours de G._, annulé le jugement de la Cour d’appel pénale du 25 mars 2013 et renvoyé la cause à l’autorité cantonale pour qu’elle prononce l’acquittement du recourant et pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale (TF 6B_557/2013).
En bref, la Haute cour a conclu que le terme « bouffon » employé par G._ à l’encontre de l’intimé, soulignait le ridicule du comportement de ce dernier, respectivement de sa personne prête à engager une altercation pour l’usage d’un appareil de fitness, ce qui en soi n’est pas attentatoire à l’honneur, cette apostrophe n’étant pas susceptible – dans les circonstances d’espèce – de mettre en doute l’honnêteté, la loyauté ou la moralité de l’intimé ou d’être perçu comme une grave atteinte à sa dignité (TF 6B_557/2013 c. 1.4.2).
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1
G._ est né le 12 janvier 1988. Il est étudiant en dernière année à l'Ecole hôtelière de Lausanne et vit chez ses parents qui subviennent à ses besoins. Son père, entrepreneur indépendant, lui donne 500 fr. d'argent de poche par mois. A la suite des faits objet de la présente cause, G._ a débuté un suivi thérapeutique qu'il poursuit encore à ce jour. Il a en outre précisé être susceptible de présenter un syndrome de bipolarité et prendre des médicaments pour traiter cette maladie.
Le casier judiciaire de G._ est vierge.
2.
Le 12 avril 2012 vers 14h00, G._ et J._ se trouvaient tous les deux dans les locaux du fitness [...], à [...]. L'appelant, muni d'écouteurs, s'entraînait sur deux appareils de musculation. J._ a, pendant plusieurs minutes, insisté pour pouvoir utiliser l'un des appareils sur lequel l'appelant s'entraînait, sans que ce dernier ne réagisse. Manifestement furieux de l'absence de réaction de G._, J._ s'est approché de lui pour exiger qu'il libère l'appareil. L'appelant l'a alors traité de "bouffon".
J._ a déposé plainte.
D.
Invité à déposer ses déterminations suite à l’arrêt du Tribunal fédéral, G._ a conclu, avec suite de frais et dépens, à sa libération de tous les frais de procédure qui ont été mis à sa charge tant en première qu’en deuxième instance, y compris l’indemnité allouée au défenseur d’office (art. 423 al. 1 et 422 al. 2 let. 2 CPP). Il a en outre requis que lui soit allouée une indemnité au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP, à raison de 1'406 fr. 40, ainsi qu’un montant minimum de 2'000 fr. à titre de tort moral au sens de l’art. 429 al. 1 let. c CPP. Il a produit à l’appui de cette dernière requête un certificat médical établi le 15 octobre 2013 par le Dr [...], spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie à Lausanne. Il ne s’est, par ailleurs, pas opposé à ce que la cause soit jugée en procédure écrite.
Le Ministère public a renoncé à se déterminer. | En droit :
1.
L'autorité à laquelle la cause est renvoyée doit fonder sa décision sur les considérants en droit de l'arrêt du Tribunal fédéral (Corboz, in Corboz/Wurzburger/Ferrari/Frésard/Aubry Girardin, Commentaire de la LTF, Berne 2009, nn. 26 et 27 ad art. 107 LTF, p. 1078). Elle voit donc sa cognition limitée par les motifs de l’arrêt de renvoi, en ce sens qu’elle est liée par ce qui a déjà été jugé définitivement par le Tribunal fédéral et par les constatations de fait qui n’ont pas été attaquées devant lui. La juridiction cantonale n’est libre de sa décision que sur les points qui n’ont pas été tranchés par l’arrêt de renvoi ou dans la mesure où elle se fonde sur des faits complémentaires établis postérieurement à l’arrêt (ATF 133 III 201 c. 4.2 ; ATF 131 III 91 c. 5.2 et les arrêts cités).
2.
L’autorité de céans peut traiter l’appel en procédure écrite en application de l’art. 406 al. 1 let. a et d CPP.
3.
Conformément aux considérants de l’arrêt du Tribunal fédéral, il y a lieu de retenir que le terme « bouffon » employé par G._ à l’encontre de l’intimé J._ n’est pas attentatoire à l’honneur (cf. supra consid. B). Partant, G._ doit être libéré du chef d’inculpation d’injure.
4.
L'appelant a conclu à sa libération de tous les frais de procédure mis à sa charge tant en première qu’en deuxième instance, y compris l’indemnité allouée à son défenseur d’office.
L’art. 428 al. 1 CPP dispose notamment que les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé.
Compte tenu de son acquittement, la part des frais de procédure de première instance mise à la charge de l’appelant par 1'075 fr., doit être supportée par l’Etat. Il en va de même des frais de la procédure d’appel antérieure à l’arrêt du Tribunal fédéral ainsi que de ceux de la présente procédure d’appel.
5.
L’appelant a conclu à l'allocation d'une indemnité de 1'406 fr. 40, correspondant à la différence entre le montant dont il s’est acquitté auprès de son défenseur de choix et l’indemnité de 3'000 fr. allouée par le Tribunal fédéral à titre de dépens.
5.1
Aux termes de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s’il bénéficie d’une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure. Cette indemnité concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix (ATF 138 IV 205). L’autorité pénale examine d’office les prétentions du prévenu. Elle peut enjoindre à celui-ci de les chiffrer et de les justifier (al. 2).
Les dépenses à rembourser au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP sont essentiellement les frais de défense. Cette disposition transpose la jurisprudence selon laquelle l’Etat ne prend en charge ces frais que si l’assistance était nécessaire compte tenu de la complexité de l’affaire en fait ou en droit et que le volume de travail et donc les honoraires de l’avocat étaient ainsi justifiés (ibidem).
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l’allocation d’une indemnité pour les frais de défense selon l’art. 429 al. 1 let. a CPP n’est pas limitée aux cas de défense obligatoire visés par l’art. 130 CPP. Elle peut être accordée dans les cas où le recours à un avocat apparaît tout simplement raisonnable compte tenu de la complexité de l’affaire en fait ou en droit, de la durée de la procédure
et de son impact sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu
(ATF 138 IV 197 c. 2.3.5).
S'agissant de la quotité de l'indemnité à allouer, l’indemnité visée par l’art. 429 al. 1 let. a CPP doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule et englober la totalité des coûts de défense (TF 6B_392/2013 du 4 novembre 2013, c. 2.3).
5.2
En l’espèce, le défenseur de l’appelant a produit devant le Tribunal fédéral une note d’honoraire de 4'406 fr. 40, TVA comprise, pour la procédure de recours. Le Tribunal fédéral a alloué à l’appelant une indemnité de dépens de
3'000 fr à titre d’indemnité pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure pour la période s’écoulant entre le jugement d’appel et son arrêt sur recours. L’appelant ne peut dès lors, comme il le fait, réclamer la différence entre le montant des honoraires déclarés par son défenseur et l’indemnité de 3'000 fr. allouée par le Tribunal fédéral. Seuls les frais occasionnés par l’exercice raisonnable de ses droits dans la présente procédure d’appel, soit du 12 septembre au 9 décembre 2013, doivent être pris en considération.
Le conseil de G._ a produit une liste d'opérations couvrant la période du 5 septembre au 3 décembre 2013, dont il ressort que son avocat stagiaire a consacré 3 heures 20 à ce mandat (P. 55). Cette durée est à l'évidence trop élevée s’agissant de la rédaction de deux courriers et d’un relevé d’opérations.
Tout bien considéré, c’est une indemnité correspondant à deux heures de travail, rémunérées au tarif horaire de 150 fr. appliqué pour les avocats stagiaires, qui doit être retenue. Partant, un montant de 300 fr., doit être alloué à l’appelant au titre de l’art. 429 al. 1 let. a CPP.
6.
L’appelant requiert que lui soit alloué un montant fixé à dire de justice, mais au minimum de 2'000 fr., à titre de tort moral au sens de l’art. 429 al. 1 let. c CPP. Il soutient avoir subi un traumatisme particulier à la suite de sa condamnation successive par trois autorités, étant rappelé qu’une inscription à son casier judiciaire n’est pas compatible avec ses projets d’avenir (carrière professionnelle aux Etats-Unis).
6.1
L’art. 429 al. 1 let. c CPP dispose notamment que le prévenu acquitté a droit à une réparation du tort moral subi en raison d’une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté.
La base légale fondant un droit à des dommages et intérêts et à une réparation du tort moral a été créée dans le sens d’une responsabilité causale. L’Etat doit réparer la totalité du dommage qui présente un lien de causalité avec la procédure pénale au sens du droit de la responsabilité civile (Message du Conseil fédéral relatif à l’unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 pp. 1057 ss, spéc. p. 1313).
6.2
En l’espèce, l’appelant ne démontre pas avoir subi des inconvénients en lien avec la procédure pénale qui justifieraient une réparation. Par ailleurs, la procédure pénale en cause se poursuivant sur plainte et non d’office, c’est bien l’appelant qui a saisi la justice et non la justice qui s’est saisie de l’appelant. Enfin, l’appelant était assisté tout au long de la procédure.
Au vu de ce qui précède, l’appelant n’a subi aucune atteinte particulièrement grave à sa personnalité. Le certificat médical qu’il a produit (P. 50/1) ne permet pas d’aboutir à une conclusion différente. Il n’y a dès lors pas lieu d’allouer à l’appelant une indemnité pour tort moral au sens de l’art. 429 al. 1 let. c CPP.
7.
En définitive, l’appel de G._ doit être partiellement admis en ce sens qu’il est acquitté du chef d’accusation d’injure et libéré des frais de procédure de première instance d’une part et de ceux mis à sa charge dans la procédure d’appel antérieure à l’arrêt du Tribunal fédéral, d’autre part. Le jugement de première instance doit dès lors être réformé dans ce sens.
G._ a en outre droit à une indemnité de
300 fr.,
pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure dans le cadre de la présente procédure d’appel.
Les frais de la procédure d’appel postérieure à l’arrêt du Tribunal fédéral, constitués uniquement d’un émolument d’arrêt de 880 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFJP [tarif des frais judiciaires pénaux; RSV 312.03.1]), doivent être laissés à la charge de l’Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c294f8f0-62be-49e5-a7c6-b8ab8551d356 | En fait :
A.
Par jugement du 18 mai 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a notamment libéré X._ des infractions de tentative de meurtre, tentative de lésions corporelles graves, mise en danger de la vie d'autrui et menaces qualifiées (II); l'a condamnée pour lésions corporelles simples qualifiées à une peine pécuniaire de 20 (vingt) jours-amende sous déduction de 225 jours de détention avant jugement et a fixé le montant du jour-amende à 30 fr. (trente francs) (IV); a suspendu l'exécution de la peine pécuniaire et a fixé à X._ un délai d'épreuve de deux ans (V); a mis les frais par 13'656 fr. 55 à la charge de X._ dont 4'343 fr. d'indemnité à son conseil d'office et a dit que cette indemnité ne sera due par X._ que pour autant que sa situation financière le permette (VIII) et a laissé le solde des frais à la charge de l'Etat (IX).
B.
Le 27 mai 2011, X._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 20 juin 2011, l'appelante a conclu, principalement, à la réduction à dire de justice des frais mis à sa charge, et éventuellement de ceux mis à la charge de son coaccusé, F._, et, subsidiairement, à l'annulation du jugement entrepris.
Dans le délai imparti, le Ministère Public et F._ ont déclaré renoncer à déposer une demande de non-entrée en matière et à déposer un appel joint.
L'appel a été instruit en procédure écrite. Dans ses déterminations du
3 août 2011, le Ministère Public a conclu à l'admission partielle de l'appel en ce sens que les frais mis à la charge de l'appelante sont réduits à 11'875 fr. 50 centimes.
F._, quant à lui, a renoncé à se déterminer sur l'appel.
Par courrier du 23 août 2011, X._ a confirmé ses conclusions d'appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Née à Luanda, en Angola, en 1966, X._ avait entre onze et douze ans lorsque sa famille a quitté ce pays en pleine guerre d'indépendance, pour le Portugal. Après avoir achevé une scolarité secondaire, elle a entamé différentes études universitaires, sans jamais obtenir de diplôme. En 1987, l'appelante a rencontré F._, qu'elle a épousé aussitôt, mais qu'elle n'a rejoint en Suisse qu'en 1991. Sur le plan professionnel, par le biais d'un ORP, elle a fait un stage à la Croix-Rouge où elle a finalement été engagée en qualité d'aide-soignante en 1996. Elle est restée à ce poste durant trois ans. Par la suite et jusqu'à son incarcération en 2009, elle a travaillé en qualité d'aide-soignante auprès de personnes privées. Depuis sa sortie de prison, elle n'a plus exercé d'activité professionnelle. Elle envisage toutefois une formation d'assistante en soins et santé communautaires pour laquelle elle doit encore passer un test d'aptitude préalable. Actuellement, elle est soutenue par les Services sociaux et perçoit une allocation de 1'110 fr. par mois. Son assurance-maladie est subsidiée par l'Organe cantonal de contrôle. Le loyer de l'appartement conjugal dans lequel elle réside avec ses fils est payé par son mari, F._. A ce jour, il n'existe aucune décision judiciaire qui règle la séparation du couple. Contrairement à son mari, X._ ne souhaite pas reprendre la vie commune.
En cours d'enquête, X._ a été soumise à une expertise psychiatrique du Centre d'expertises du Département de psychiatrie du Chuv. Dans leur rapport du 19 novembre 2009, les experts posent le diagnostic de syndrome de dépendance à l'alcool, actuellement abstinente mais dans un environnement protégé et troubles dépressifs récurrents, actuellement en rémission. Les experts ont relevé trois épisodes dépressifs chez l'appelante en 2001, 2005 et 2009. Les épisodes de 2005 et 2009 ont été décrits comme étant en lien avec un conflit de couple sans que X._ n'ait fait état de violences conjugales spécifiquement. C'est lors de sa détention préventive qu'elle a évoqué une consommation quotidienne d'alcool depuis décembre 2008, dans un but anxiolytique et sédatif, en relation avec des violences domestiques. Les conclusions de l'expertise quant à la responsabilité de X._ sont qu'elle avait, au moment des faits, une faculté conservée d'apprécier le caractère illicite de son acte mais qu'en raison de son alcoolisation aiguë (1,19 g o/oo), sa faculté de se déterminer d'après cette appréciation conservée était restreinte dans une mesure légère. Les experts ont considéré le risque de récidive d'un nouveau passage à l'acte violent comme non négligeable si elle continuait la vie commune et reprenait sa consommation d'alcool. Ils ont préconisé un traitement ambulatoire de sa dépendance à l'alcool avec des contrôles sanguins réguliers. Du 25 janvier 2010 au 21 juillet 2010, X._ a effectué un séjour à la Fondation des Oliviers au cours duquel elle a présenté quelques difficultés au début, notamment pour sortir de la minimisation de sa consommation. Par la suite, elle a pu s'investir tant dans son séjour que dans le secteur des ateliers. En date du
12 avril 2011, l'appelante a passé un contrat de consommation contrôlée avec la Fondation précitée. Depuis le 11 janvier 2011, elle est en outre suivie par la Fondation vaudoise de probation qu'elle rencontre à raison d'une fois par mois.
Pour les besoins de l'instruction, X._ a été détenue du 15 juin 2009 au 25 janvier 2010, soit pendant 225 jours.
Son casier judiciaire est vierge de toute inscription.
2.
X._ et F._
ont connu de sérieuses difficultés conjugales depuis 2007 au moins.
A Lausanne, dans le courant du mois d'avril 2009 et entre le 7 et le
9 juin de cette même année, F._ a donné des coups et des gifles à l'appelante, ce qui lui a occasionné des hématomes. De manière générale, F._ a contesté avoir donné des coups à son épouse, admettant toutefois avoir parfois eu des gestes violents à son encontre. L'instruction ayant permis d'établir les violences domestiques, F._ a été condamné pour voies de fait qualifiées.
A Lausanne, le 15 juin 2009, alors que son voisin venait de lui refuser un verre d'alcool à la demande de F._, X._ est rentrée au domicile conjugal, dans un état de grand énervement. Dans sa colère, elle a commencé à crier contre son époux qui regardait la télévision, puis s'est rendue à la cuisine où elle s'est emparée d'un couteau de cuisine de 20 cm environ, dont une douzaine de centimètres de lame, pointue et micro-dentelée. Munie de cet instrument, elle s'est approchée de F._ qui s'est assis sur le canapé. Selon les déclarations de X._, l'idée était d'impressionner son mari et de lui faire comprendre qu'elle n'avait plus peur de lui et n'entendait plus le laisser lui manquer de respect. En effet, elle avait ressenti très vivement le fait que ce dernier fasse part de son alcoolisme à leurs voisins, en leur demandant de ne plus lui servir de l'alcool. Elle en avait conçu une très grande honte. Lors des débats de première instance, F._ a déclaré qu'elle ne le visait pas avec le couteau qu'elle agitait devant lui. Il n'a jamais pensé qu'elle voulait le blesser ou le tuer. Il a levé la jambe par réflexe à l'approche de sa femme et a été blessé au tibia. Puis, X._ s'est déplacée un peu sur le côté droit de son mari et alors qu'il a levé le bras droit, la lame a pénétré dans son avant-bras lui occasionnant une plaie de 4 cm qui a dû être suturée par 6 points. La plaie à la jambe droite a, quant à elle, été suturée à l'aide de 2 agrafes. Au moment de son arrestation, X._ présentait un taux d'alcoolémie de 1,19 g o/oo. Elle a été condamnée pour lésions corporelles simples qualifiées par dol éventuel. Au vu des déclarations concordantes des parties, les infractions de tentative de lésions corporelles graves, tentative de meurtre et menaces qualifiées ont été abandonnées. | En droit :
1.1
L'appel doit être annoncé dans les 10 jours qu suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin: in: Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d'appel doit, quant à elle, être déposée dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l'occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement rendu par un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 2 CPP), par une partie ayant la qualité pour le faire (art. 399 al. 3 CPP), l'appel est recevable. Il convient d'entrer en matière sur le fond.
1.2
En vertu de l'art. 406 al. 1 let. d CPP, la juridiction d'appel peut traiter l'appel en procédure écrite si seuls des frais, des indemnités ou la réparation du tort moral sont attaqués.
En l'espèce, l'appelante ne conteste que les frais ayant été mis à sa charge, de sorte que l'appel a été traité en procédure écrite.
2.
En vertu de l'art. 422 al. 1 CPP, les frais de procédure se composent des émoluments visant à couvrir les frais et des débours effectivement supportés. La Confédération et les cantons règlent le calcul des frais de procédure et fixent les émoluments (art. 424 al. 1 CPP). L'art. 426 al. 1 CPP prévoit que le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné. Lorsque la procédure fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 426 al. 2 CPP). Le prévenu ne supporte pas les frais que la Confédération ou les cantons ont occasionnés par des actes de procédure inutiles ou erronés
(art. 426 al. 3 let. a CPP).
En application des dispositions qui précèdent, le Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010 (TFJP; RSV 312.03.1) prévoit que lorsqu'il y a plusieurs prévenus, chaque prévenu supporte une part des frais communs et les frais qui lui sont propres, et que les frais communs sont répartis proportionnellement entre les prévenus, le prévenu ne supportant pas les frais relatifs aux infractions à raison desquelles il a été libéré (art. 6 TFJP).
3.
En l'espèce, les premiers juges ont mis à la charge des accusés les deux tiers des frais de justice, lesquels ont été répartis à raison de deux tiers à la charge de X._ et d'un tiers à la charge de F._, ayant été précisé que les frais de détention et le solde des frais étaient supportés par l'Etat.
3.1
Sans critiquer les postes pris en compte dans la note de frais, X._ soutient que la part globale des frais mis à sa charge est arbitraire en ce sens qu'elle ne tient pas compte du fait qu'elle a été libérée de tous les chefs d'accusation sauf un. Elle relève en outre une erreur de calcul qui, si la proportion des frais mise à sa charge n'était pas réduite, ramènerait l'addition à
11'849 fr. 55 au lieu de 13'656 fr. 55 centimes.
3.2
Le Ministère Public, quant à lui, est d'avis que les premiers juges n'ont pas outrepassé leur pouvoir d'appréciation dès lors que les infractions les plus graves dont a été libérées l'appelante ne sont que des qualifications alternatives à celle finalement retenue, s'agissant du même complexe de faits. Le Ministère Public soutient toutefois que le décompte de frais présente deux erreurs: d'abord, les frais de traduction d'une commission rogatoire auraient été mis à tort à charge de l'appelante par 333 fr. 35 alors que cet acte d'instruction concernait son coaccusé; ensuite, si l'appelante ne s'est vue mettre à charge les deux tiers de l'indemnité d'office de son premier conseil d'office, l'entier de l'indemnité de son second conseil a été mise à sa charge à la place des deux tiers. Le Ministère Public conclut dès lors à l'admission partielle de l'appel en ce sens que les frais mis à charge de X._ s'élèveraient en fait à 11'875 fr. 50 centimes.
3.3
Selon la liste des frais relative à l'affaire en cause, la somme des frais communs aux deux coaccusés s'élève à 8'804 fr. 05 (4'500 fr. + 3'000 fr. + 10 fr. + 844 fr. 05 + 450 fr.) alors que la somme des débours propres de l'appelante s'élève à 12'169 fr. 05 (5.50 fr. + 75 fr. + 150 fr. + 150 fr. + 4'680.55 fr. + 75 fr. + 2'690 fr. + 4'343 fr.). Si l'appelante avait été condamnée pour tous les chefs d'accusation retenus contre elle, elle aurait dû supporter la moitié des frais communs et l'entier de ses frais propres, soit 16'571 francs. En application des principes légaux découlant des art. 426 CPP et 6 TFJP, notamment de celui selon lequel un prévenu ne peut se voir, sauf exception, mettre à charge que les frais liés aux infractions pour lesquelles il a été condamné, il se justifie de réduire le montant des frais de justice. Cette réduction doit tenir compte des chefs d'accusation dont X._ a été libérée. A cet égard, la réduction admise par les premiers juges de quatre neuvième (deux tiers de deux tiers) est insuffisante compte tenu du fait que l'appelante a été libérée de quatre chefs d'accusation sur cinq. Tenant compte du fait que ces infractions visaient pour l'essentiel le même complexe de faits, une réduction de trois quarts paraît adéquate.
En conséquence, les frais de justice mis à la charge de X._ sont arrêtés à 4'142 fr. 75 (1⁄4 de 16'571 fr.) dont 1'758 fr. 25 d'indemnités à ses conseils d'office successifs (1⁄4 de 2'690 fr. et 1⁄4 de 4'343 francs).
4.
Dans ses conclusions, X._ a laissé entendre que le montant des frais à charge de son coaccusé F._ pourrait également être revus.
Aux termes de l'art. 392 al. 1 CPP, lorsque, dans une même procédure, un recours a été interjeté par certains prévenus ou des condamnés seulement et qu'il a été admis, la décision attaquée est annulée ou modifiée également en faveur de ceux qui n'ont pas interjeté recours si l'autorité juge les faits différemment (a) ou, si les considérants valent aussi pour les autres personnes impliquées (b).
Quand bien même l'art. 392 CPP permet, dans certaines conditions, à la juridiction d'appel d'étendre sa décision à des condamnés qui n'ont pas fait appel, l'on ne se trouve pas en l'espèce dans l'un des deux cas visé par cette disposition dont le but est d'éviter des jugements contradictoires (Calame, in: Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, op. cit., n. 2 ad art. 392 CPP). En effet, le fait de diminuer la part des frais de justice d'un coaccusé n'a en l'occurrence pas pour effet d'influer sur la part de l'autre. En outre, dans le cas particulier, F._ n'a non seulement pas formé appel ni appel joint, mais a encore expressément renoncé à toute détermination bien qu'il ait été assisté.
5.
Au vu de ce qui précède, l'appel de X._ doit être admis. Les frais de justice mis à sa charge doivent être réduits de 13'656 fr. 55 à 4'142 fr. 75, la différence restant à la charge de l'Etat.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel, comprenant l'indemnité d'office de Me Christian Bacon arrêtée à 776 fr. 60, TVA comprise, doivent être laissés à la charge de l'Etat (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c2af3cdf-5e20-4997-a52b-d74e7e8e92fe | En fait :
A.
Par jugement du 30 janvier 2015, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Côte a notamment constaté que S._ s’est rendu coupable d’infraction et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants (I), a révoqué le sursis accordé à S._ le 16 juin 2011 par la Chambre pénale de Genève et ordonné l’exécution de la peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de 50 jours de détention préventive (II), a condamné S._ à une peine pécuniaire de 180 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 80 fr., sous déduction de 73 jours de détention avant jugement (III), l’a en outre condamné à une amende de 2'500 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l’amende étant de 31 jours (IV), a statué sur le sort des séquestres ordonnés (V à VII), a rejeté les conclusions de S._ tendant à dire que l’Etat de Vaud est son débiteur et lui doit immédiat paiement des sommes de 5'238 fr. 50, 20'000 fr. et 5'000 fr. (VIII), a fixé à 2'960 fr., débours et TVA compris, l’indemnité allouée au défenseur d’office de S._ (IX), a dit que les frais de procédure sont arrêtés à 23'615 fr., comprenant l’indemnité mentionnée au chiffre IX ci-dessus ainsi que les indemnités allouées au précédent défenseur d’office du prévenu, et a mis une part de ces frais, par 8'000 fr., à la charge de ce dernier, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (X), et a dit que le condamné ne sera tenu de rembourser à l’Etat la part mise à sa charge des indemnités allouées à ses défenseurs d’office successifs que pour autant que sa situation financière le permette (XI).
B.
Par annonce du 2 février 2015, puis déclaration motivée du 11 février suivant, S._ a formé appel contre ce jugement, en concluant, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens que le chiffre II du dispositif précité est annulé et que le sursis qui lui a été accordé le 16 juin 2011 n’est pas révoqué.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
S._ est né le [...] à [...] au Portugal, pays dont il est ressortissant et où il a été élevé par sa mère avant de venir en Suisse à l’âge de 10 ans. Il est titulaire d’un permis C. Il a suivi toute sa scolarité obligatoire à Genève, avant d’entreprendre pendant quelques mois un apprentissage d’employé de commerce dans une fiduciaire, dont il a toutefois été renvoyé ensuite d’une incarcération de quelques jours. Il a par la suite occupé divers emplois temporaires. Depuis 2006, il exploite la raison individuelle [...], société active dans la vente de matériel électronique. Pour cette activité, il perçoit un revenu mensuel net d’environ 2'700 francs. Il travaille en outre dans un bar à tapas qu’il a repris en 2013 avec son épouse, à laquelle il est marié depuis juillet 2011 et avec qui il a eu un enfant, né le 30 avril 2012. Cette activité lui procure un revenu mensuel net d’environ 2'700 francs. Sa femme, qui travaille également dans ce bar, exploite en parallèle une boutique d’accessoires. Son salaire global net s’élève à environ 4'000 fr. par mois. De plus, la location d’une patente lui procure un revenu annuel brut de 30'000 francs. Les charges mensuelles du couple se composent de 1'763 fr. de loyer, de 200 fr. pour la location d’un garage et d’environ 450 fr. d’assurance maladie pour chacun des époux et de 100 fr. pour celle de leur enfant. L’année dernière le couple a payé environ 5'000 fr. d’impôts, somme incluant un remboursement lié à un gain de loterie. Le prévenu n’a ni économies, ni dettes, ni fortune.
L’extrait judiciaire suisse de S._ mentionne les condamnations suivantes :
- 31 mai 2007, Ministère public du canton de Genève, conducteurs se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule autom., taux alcoolémie qualifié), peine pécuniaire 10 jours-amende à 100 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 3 ans, amende 1'000 fr. ;
- 16 juin 2011, Chambre pénale Genève, délit selon l’art. 19 al. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants, peine privative de liberté 12 mois, sous déduction de 50 jours de détention préventive, sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 3 ans.
Pour les besoins de la présente affaire, S._ a été détenu provisoirement du 19 février au 1
er
mai 2012, soit pendant 73 jours.
2.
2.1
A Versoix notamment, entre le mois de juillet 2011, les faits antérieurs étant prescrits, et le mois de février 2012, S._ a régulièrement consommé de la marijuana ou du haschich, à raison de 10 g par mois.
2.2
A Nyon, devant le McDonald’s, le 12 janvier 2012, S._ a vendu 2,5 kg de haschich pour un montant de 6'000 fr. à [...].
2.3
A Versoix, route [...], le 19 février 2012, S._ était en possession de 160 g de haschich et de 6,8 g de marijuana lors de la perquisition de son domicile. Il détenait en outre du matériel servant à la culture indoor de marijuana dans un garage-box qu’il louait. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de S._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
L’appelant ne remet en cause ni les faits retenus par les premiers juges, ni leur qualification. Il ne conteste pas non plus la quotité de la peine, mais uniquement la révocation du sursis qui lui été accordé le 16 juin 2011 par la Chambre pénale de Genève.
3.1
Selon l'art. 46 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel (al. 1, 1re phr.). S'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation (al. 2, 1
re
phr.).
La commission d'un crime ou d'un délit durant le délai d'épreuve n'entraîne pas nécessairement une révocation du sursis. Seul un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné peut justifier la révocation. A défaut d'un pronostic défavorable, le juge doit renoncer à celle-ci. Autrement dit, la révocation ne peut être prononcée que si la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve (ATF
134 IV 140 c. 4.2 et 4.3; TF 6B_163/2011 du 24 novembre 2011 c. 3.2). Dans l'appréciation des perspectives d'amendement à laquelle il doit procéder pour décider de la révocation d'un sursis antérieur, le juge doit tenir compte des effets prévisibles de l'octroi ou non du sursis à la nouvelle peine. Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L'inverse est également admissible (ATF 134 IV 140 précité c. 4.5). Ainsi, un critère déterminant pour juger du risque de réitération et, partant, pour poser le pronostic prévu par la loi est celui de l'effet de choc et d'avertissement issu de la condamnation précédente, y compris en ce qui concerne l'aménagement ultérieur de la vie de l'intéressé; s'il est avéré, un tel effet constitue un facteur favorable – même s'il n'est pas déterminant à lui seul – dans l'examen du pronostic (cf. ATF 134 IV 140 c. 5.3).
3.2
L’appelant soutient que le pronostic à poser quant à son comportement futur n’est pas défavorable. En particulier, il se prévaut de sa situation personnelle – notamment du fait qu’il est désormais marié et père d’un enfant – et financière actuelle stable, de son comportement irréprochable depuis février 2012 et de son abstinence aux stupéfiants. Il expose en outre que la sanction globale résultant de la présente procédure, à savoir le paiement d’un montant d’environ 20'000 fr. compte tenu de la peine pécuniaire prononcée, de l’amende et des frais judiciaires, ainsi que les 73 jours de détention préventive subis, aura l’effet dissuasif escompté.
En l’occurrence, la question de savoir si l’appelant ne récidivera pas en raison de sa situation personnelle doit être examinée à l’aune de la situation qui prévalait au moment des faits ayant conduit à sa dernière condamnation. Selon l’arrêt rendu le 16 juin 2011 par la Chambre pénale genevoise (P. 51/2), le prévenu vivait en concubinage avec sa future épouse depuis 2008 et exploitait déjà la société [...]; si son entreprise ne lui a certes pas rapporté de revenus en 2008 et 2009, il a néanmoins gagné à la loterie romande un montant de 20'100 fr. (dont 7'000 fr. à soustraire à titre d’impôt anticipé) en 2008, puis une somme d’environ 62'000 fr. nette en 2009, qui a été versée avant son interpellation du 29 octobre 2009; par ailleurs, il ressort également de cet arrêt que lorsque le prévenu a été interpellé, il détenait environ 1 kg de marijuana à son domicile et que les gains de loterie ont permis de financer l’achat de 40 kg de haschich à Zürich (P. 51/2, p. 9). Ainsi, sur la base de ces éléments, il faut constater que tant son concubinage – transformé par la suite en mariage – que ses gains substantiels à la loterie ne l’ont pas dissuadé de choisir la voie de l’illégalité plutôt que celle de la légalité. Certes, le prévenu est désormais père d’un enfant. Cela étant, il a considérablement menti lors des débats de première instance en livrant des explications fumeuses, voire absurdes, et ce malgré le fait que son avenir était en jeu.
Pour le reste, avec les premiers juges, il faut considérer que le fait que l’appelant soit abstinent est sans pertinence, ce dernier s’étant en effet livré à un trafic de stupéfiants non pas pour financer sa propre consommation, mais par appât du gain.
En conséquence, les changements – minimes – intervenus dans la vie de l’appelant ne sont à l’évidence pas suffisants pour poser un pronostic favorable quant à son comportement futur.
Quant à l’argument tiré de l’effet choc résultant de la nouvelle sanction, il est relevé que dans le cadre de l’affaire genevoise, l’appelant avait déjà été détenu provisoirement pendant 50 jours et condamné à une privation de liberté d’une durée non négligeable; en outre, les frais judiciaires avaient également été mis à sa charge. Ces circonstances ne l’ont néanmoins pas dissuadé de vendre 2,5 kg de haschich en janvier 2012, soit quelques mois seulement après sa condamnation, et ce malgré une situation stable, notamment son mariage en juillet 2011 et la grossesse de son épouse.
Enfin, il faut également tenir compte de l’absence de prise de conscience et de reconnaissance de ses fautes, qui a d’ailleurs pu être confirmée à l’audience d’appel, le prévenu ayant refusé de s’exprimer sur les faits qui lui étaient reprochés, alors que son appel se limitait à la seule question du sursis. Au demeurant, il est rappelé qu’il n’existe aucune condition particulièrement favorable qui aurait pu justifier l’octroi du sursis à la peine pécuniaire prononcée (cf. art. 42 al. 2 CP), ce que l’appelant n’a d’ailleurs pas contesté dans le cadre de son appel.
Sur le vu de ce qui précède, c’est à bon droit que les premiers juges ont révoqué le sursis accordé au prévenu le 16 juin 2011 par la Chambre pénale de Genève et ordonné l’exécution de la peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction des 50 jours de détention préventive subis.
Au demeurant, le prévenu pourra, si les conditions en sont remplies, exécuter cette peine en semi-détention (art. 77b CP), de sorte que la sanction prononcée n’affectera pas notablement sa situation personnelle.
4.
En définitive, l’appel de S._ doit être rejeté et le jugement entrepris entièrement confirmé.
5.
Vu l’issue de la cause, les frais de la présente procédure, constitués de l’émolument de jugement, par 1’390 fr., et de l’indemnité allouée au défenseur d’office, par 1’285 fr. 20
,
TVA et débours inclus, doivent être mis à la charge de l’appelant (art. 428 al. 1 CPP).
Ce dernier ne sera tenu de rembourser à l’Etat l’indemnité en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. b CPP)
.
6.
Le dispositif communiqué après l’audience d’appel est entaché d’une erreur manifeste à son chiffre II, dès lors qu’il ne mentionne pas le chiffre XI du dispositif du jugement de première instance. En application de l’art. 83 CPP, il sera complété d’office. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c2d8caa3-7257-4fc1-bcfe-8d8f873c8a99 | En fait :
A.
Par jugement du 30 novembre 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a constaté que S._ s'est rendu coupable d'incendie par négligence qualifié (I), condamné S._ à une peine pécuniaire de 60 (soixante) jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 80 fr. (huitante), suspendu l'exécution de la peine et fixé au condamné un délai d'épreuve de 2 (deux) ans (II), dit que S._ doit payer à A.K._, C.K._ et B.K._ une somme de 18'344 fr. (dix-huit mille trois cent quarante-quatre) à titre de dépens pénaux et leur a donné acte de leurs réserves civiles à l'encontre de S._ pour le surplus (III), ordonné le maintien au dossier à titre de pièces à conviction du raccord mâle/femelle séquestré sous fiche n° 1 (IV) et mis à la charge de S._ les frais de la cause par 18'115 fr. (dix-huit mille cent quinze) (V).
B.
Le 9 janvier 2012, S._ a formé appel contre ce jugement, concluant, avec suite de frais et dépens, à son acquittement.
Par courrier du 13 janvier 2012, le Ministère public a renoncé à déposer un appel joint et n'a pas présenté de demande de non-entrée en matière, s'en remettant à justice quant à la recevabilité de l'appel. Il a conclu au rejet de l'appel.
Le 31 janvier 2012, les plaignants A.K._, B.K._ et C.K._ ont renoncé à déposer un appel joint ou à présenter une demande de non-entrée en matière. Ils ont conclu, avec suite de dépens, au rejet de l'appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
S._ est né le 23 décembre 1974 à Nyon. Il a effectué sa scolarité à Rolle et, au terme de celle-ci, a entrepris avec succès deux apprentissages successifs, soit celui de carreleur de 1990 à 1993 et celui de fumiste de 1993 à 1995. Après avoir travaillé comme carreleur et comme fumiste pour le compte de divers employeurs, il s'est mis à son compte en juillet 2002 et travaille seul depuis lors. Ses revenus se montent en moyenne à 6'000 fr. brut par mois. Depuis 2009 - 2010, il est salarié de son entreprise pour le même revenu. Dans le cadre de son activité, le prévenu est également revendeur pour le compte de la société [...] SA qui fabrique en particulier des cuisinières à bois et ne vend pas directement ses produits. A ce titre, il dépend d’un vendeur [...] qui travaille sur les cantons de Vaud, Genève, Neuchâtel et Jura. Pour sa part, son activité se concentre essentiellement sur Vaud et Genève. Du point de vue privé, S._ est divorcé depuis le mois de février 2010. Il a un enfant qui vit avec sa mère, à qui il verse une contribution d'entretien de 1'250 fr. en sus d'une pension de 1'000 fr. qu'il paie à son ex-épouse jusqu'en 2015. S._ est propriétaire de la maison dans laquelle il vit avec son amie à Vaulion. Cette dernière, qui est active professionnellement, participe aux charges courantes, mais non au paiement des charges hypothécaires qui s'élèvent à 900 fr. par mois. L'hypothèque sur son immeuble est de 300'000 francs. Le prévenu a encore indiqué que son assurance maladie se montait à 274 fr. par mois et ses impôts à 600 fr. ou 700 fr. par mois. Il n’a pas de dette ni de fortune particulière.
Le casier judiciaire de S._ est vierge.
2.
Dans le courant du deuxième trimestre 2008, S._ a posé une nouvelle cuisinière combinée, équipée d'un poêle à bois recouvert d'une plaque chauffante en fonte et d'un four électrique surmonté de plaques de cuisson de type vitrocéram, dans la partie habitation de la ferme de C.K._ et A.K._, comprenant trois étages, attenante à une grange.
2.1
Cette cuisinière était un modèle [...]. Les prescriptions relatives à l'homologation de cette cuisinière, connues de S._, sont recensées dans le répertoire suisse de la protection incendie, également édictées par l'Association des établissements cantonaux d'assurance incendie (ci-après: AEAI) auxquelles fait référence la documentation de la cuisinière. Il est notamment précisé à l'art. 62 de cette directive (directive 25-03 installations thermiques) que les installations techniques doivent être conçues et réalisées de manière à garantir un fonctionnement sans danger correspondant aux prescriptions et à limiter les dommages en cas de dérangement (al. 1). Elle doivent être conformes à l'état de la technique et toutes les parties doivent résister aux sollicitations thermiques, chimiques et mécaniques susceptibles de se produire (al. 2). Le chiffre 4.1.13 fait référence aux distances de sécurité à respecter. Il est ainsi prescrit que les parois contre lesquelles l'appareil est construit ou placé doivent être en briques, en béton ou en matériau incombustibles équivalent sur toute la hauteur du local. Elles doivent dépasser latéralement l'appareil de 20 cm et avoir une épaisseur de 12 cm. Une distance de sécurité de 30 cm est requise entre les parois latérales de la cuisinière et des matériaux combustibles, une distance de sécurité de 35 cm est requise entre la face arrière de la cuisinière et des matériaux combustibles, une distance de sécurité de 50 cm est requise entre le haut du dispositif d'évacuation de la vapeur des matériaux combustibles et enfin une distance de 80 cm est requise entre la face avant de la cuisinière et des matériaux combustibles. Il est enfin prescrit que seul des tuyaux de raccordement peuvent servir à relier les appareils de chauffage aux conduits de fumée (chapitre 6 § 6.1 al. 2).
2.2
Lors de l'installation de la cuisinière, S._ n’a toutefois pas respecté les prescriptions suivantes – s'agissant des distances de sécurité par rapport aux matériaux combustibles :
- sur le côté gauche de la cuisinière, le meuble de cuisine en bois était en contact avec la cuisinière, alors qu’une distance de sécurité de 30 cm était requise ;
- à l’arrière de la cuisinière, dans un espace de 19 cm entre la cuisinière et le mur, se trouvaient des tuyaux d’une ancienne installation de chauffage central, dont certains comportaient encore une couche d’étoupe, ainsi qu’une ligne électrique. La distance entre la cuisinière et ces matériaux inflammables aurait dû être d’au moins 35 cm.
En outre, S._ a comblé l'espace restant entre le mur et la cuisinière électrique avec du Wedi, panneau de construction non ignifuge, constitué d'une mousse rigide de polystyrène armé des deux côtés avec un tissu de fibres de verre et revêtue, également des deux côtés, d'un mortier contenant une matière plastique. Il a construit un canal en maçonnerie de briques réfractaires, en guise de conduit d’évacuation de fumées, pour raccorder la cuisinière au conduit de cheminée. Lors de la construction du canal et de la pose de la cuisinière, la partie arrière de celle-ci a heurté le canal, provoquant un déplacement des briques réfractaires. Le prévenu a dû les remettre en place avant de poser définitivement la cuisinière, sans attendre que le mortier soit sec.
3.
Le 11 janvier 2009, vers 18h00, alors que du feu était allumé dans le poêle de la cuisinière, un incendie s'est déclenché au niveau de l’arrière de la cuisinière. Le feu s’est propagé à toute la cuisine, qui a été entièrement détruite, ainsi qu’au 1
er
étage où trois chambres ont été détruites par le feu et de la fumée. Le salon, le jardin d’hiver, la buanderie et trois chambres au 2
e
étage ont été endommagés par la fumée. Lors de ces événements, A.K._, C.K._ et D.K._, ainsi que J._ se trouvaient dans l'appartement. C.K._ a été incommodée par la fumée de manière légère.
Après l’intervention des gendarmes et des pompiers, les inspecteurs du service d’identité judiciaire de la police cantonale se sont rendus sur place le
12 janvier 2009. Ils ont établi un rapport technique le 2 mars 2009 accompagné d’un cahier photos (P. 9). Les constations suivantes ressortent de ce rapport : la cuisinière se trouvait à environ 15 cm du mur. Elle était reliée à une ancienne cheminée par un conduit maçonné en briques réfractaires jusqu'à une porte de ramonage modifiée pour la circonstance. Des tuyaux métalliques isolés avec un tissu genre jute et provenant de l'ancienne installation de chauffage étaient présents à cet endroit. Une conduite électrique était noyée dans le socle en béton soutenant les briques réfractaires du canal d'évacuation des fumées et suit ce dernier sur sa hauteur. Une lambourde en bois était fixée au mur derrière la cuisinière, sur la largeur de la partie électrique de l'appareil. L'espace entre la hotte de ventilation et la cuisinière était composé d'une plaque en bois recouverte de deux couches de catelles. Les policiers scientifiques ont relevé que la détérioration de la ligne électrique n'était pas d'origine électrique et ils ont écarté une cause criminelle de l'incendie. Ils ont notamment conclu que l'origine de l'incendie se situe derrière la cuisinière combinée bois-électricité, au niveau de la ligne électrique longeant le canal d'évacuation des fumées et qu'une fissure dans la jointure des briques réfractaires laissant échapper des gaz brûlants à l'endroit où se trouvait cette ligne électrique est la cause la plus probable de cet incendie (P. 8).
L’inspecteur du Groupe incendie en charge de l’enquête a rendu son rapport le 6 mars 2009, dans lequel il confirme les constations et conclusions du rapport technique. Il a ainsi relevé que les prescriptions d'homologation n'avaient pas été respectées lors de l'installation de la cuisinière, s'agissant notamment des distances de sécurité (P. 12, réponse n° 2), concluant que la cause la plus probable de l'incendie est une fuite des gaz chauds au niveau des briques réfractaires lesquelles avaient été décollées accidentellement lors de la pose de la nouvelle cuisinière, alors que plusieurs matériaux combustibles étaient présents dans les environs immédiats de la sortie arrière du fourneau. Les gaz chauds ont ainsi mis le feu à ces parties inflammables sises dans un milieu confiné et quasi hermétique
(P. 12 p. 6).
4.
Une expertise a été confiée à W._, collaborateur scientifique auprès de l’Institut de police scientifique de l’université de Lausanne. Dans son rapport du 12 octobre 2009 (P. 19), l’expert a confirmé que l'incendie s'est déclaré dans la cuisine de l'habitation, à l'arrière d'une cuisinière combinée, équipée d'un poêle à bois recouvert d'une plaque chauffante en fonte, et d'un four électrique surmonté des plaques de cuisson de type vitrocéram. Après avoir exclu comme source de chaleur la ligne électrique scellée dans le bloc en béton situé sous les briques réfractaires et l’intervention humaine directe, fortuite ou délibérée, l’expert a exposé que les gaz issus de la combustion du bois constituaient nécessairement la source de chaleur qui avait provoqué l'allumage des matériaux combustibles situés dans le proche environnement du canal en maçonnerie (briques réfractaires) qui relie la face arrière de la cuisinière au conduit d'évacuation des fumées. Il explique en substance que l'espace compris entre la cuisinière et le mur en maçonnerie, soit le volume situé à l'arrière de la cuisinière, constituait un milieu confiné, entravant la dissipation de la chaleur et favorisant ainsi une augmentation de la température à l'intérieur de celui-ci. L’expert a conclu qu’un transfert de chaleur de l'intérieur du canal construit en pierre réfractaire ou/et du panneau arrière de la cuisinière vers un milieu confiné, contenant notamment des matériaux combustibles, constituait la cause de l'incendie survenu le 11 janvier 2009 (P. 19 p. 6).
A la demande de l'appelant, un complément d’expertise a été ordonné. Dans son rapport complémentaire d’expertise du 25 mai 2010 (P. 36), l'expert retient en substance qu'il n'y pas de directives ni de normes concernant le délai de mise en service de la cuisinière après son installation, bien qu'il soit – selon les professionnels - important que les éléments de maçonnerie sèchent correctement. Il a également relevé qu'une mise en marche prématurée de la cuisinière à bois, en pratiquant un feu d'une intensité telle que les matériaux réfractaires ne sèchent pas correctement, peut provoquer des fissures dans les briques réfractaires. Dans ces conditions, un défaut d'isolement peut apparaître sur le raccord. Si le raccordement n'est pas étanche, il est possible que des gaz chauds se propagent à l'extérieur du canal construit en briques réfractaires, sans que la quantité de gaz chauds qui s'échappent ainsi ne soit quantifiable. Selon l'expert, il n'est pas possible de déterminer si ce flux de gaz est permanent et constant lors de chaque utilisation du poêle. Les gaz chauds vont se dissiper dans le milieu confiné situé à l'arrière de la cuisinière et augmenter ainsi la température dans le proche environnement du raccordement. Une augmentation de la température dans le volume confiné situé à l'arrière de la cuisinière peut enflammer les matériaux combustibles présents dans le proche environnement du raccordement. | En droit :
1.1
Interjeté dans les formes et délais légaux (cf. art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure
(art. 398 al. 1 CPP), l'appel de S._ est recevable.
1.2
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.
S._ soutient, en substance, que l'état de fait retenu par les juges est incomplet et erroné, et que faute de pouvoir établir si l'installation qu'il avait effectuée était étanche ou non, il aurait dû être acquitté en application du principe in dubio pro reo.
2.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, op. cit., n. 19 ad art. 398 CPP).
2.2
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, qui est garantie par l'art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1; ATF 127 I 38 c. 2a).
Comme règle d'appréciation des preuves, elle est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c;
TF 6B_831/2009 précité c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
2.3
L'appelant ne conteste pas que la cause de l'incendie est un transfert de chaleur de l'intérieur du canal construit en pierres réfractaires et/ou du panneau arrière de la cuisinière, au travers duquel sont évacués les gaz de combustion et les fumées, vers un milieu confiné contenant notamment des matériaux combustibles. Il ne conteste pas non plus ne pas avoir respecté les distances de sécurité prescrites lors de l'installation de la cuisinière.
Fondés sur les rapports d'expertises (P. 8, 12 et 19), les premiers juges ont conclu que l'incendie s'est déclaré au niveau et à proximité du canal en briques réfractaires maçonné par l'appelant ou de la buse de raccordement arrière de la cuisinière par l'inflammation des matériaux combustibles situés derrière la cuisinière et laissés sur le bas de l'installation (jgt. pp. 67-68, ch. 10). Ils ont évoqué cinq hypothèses permettant d'expliquer les raisons qui ont rendu possible le transfert de chaleur et en ont écarté deux pour finalement retenir, sans que l'appelant ne remette en question ce choix, les trois hypothèses suivantes : 1) un défaut d'étanchéité du canal en brique dû à une malfaçon dans sa construction par le prévenu ou suite au déplacement des briques lors de la mise en place de la cuisinière, 2) un défaut d'étanchéité au niveau du raccordement (buse) entre la cuisinière et le conduit d'évacuation en briques réfractaires, 3) un défaut d'étanchéité consécutif à des feux trop importants ayant endommagé les briques et/ou le mortier réfractaire.
S'agissant de la première hypothèse, le Tribunal est arrivé à la conclusion logique que si elle était réalisée, elle était imputable à l'appelant, celui-ci ayant conçu et fabriqué le canal en briques réfractaires (jgt., p. 71). Le fait, comme le soutient l'appelant, qu'il aurait vu si une brique avait été fissurée ou déplacée, n'est pas déterminant. Ce que le Tribunal relève à ce stade c'est si le défaut d'étanchéité provenait d'une malfaçon dans la construction du canal en briques réfractaires, cette malfaçon était imputable à l'appelant, ce qui n'est pas contestable. Cette argumentation, motivée et convaincante, ne prête pas le flanc à la critique.
S'agissant de la seconde hypothèse, les premiers juges sont arrivés à la même conclusion, dès lors que l'appelant a conçu et installé le raccordement en cause (jgt., p. 73). Là encore, leur démonstration motivée et convaincante ne peut qu'être suivie.
Quant à la troisième hypothèse, les premiers juges ont conclu que si elle devait être privilégiée, "aucune faute de l'appelant sur ce point ne pourrait être retenue" dès lorsqu'il avait dûment informé les plaignants des précautions à prendre (jgt., p. 74).
Après avoir examiné de manière approfondie ces trois hypothèses
(jgt., pp. 71-74), les premiers juges sont arrivés à la conclusion qu'ils n'étaient pas en mesure d'écarter ou de retenir définitivement l'une ou l'autre (jgt., p. 74) mais qu'il importait peu de savoir laquelle était réalisée puisqu'il s'agissait en tous les cas de l'une des trois (jgt., pp. 78-79). Or, dans tous les trois cas de figure, il est clairement établi que l'appelant n'a pas respecté les distances de sécurité en vigueur dans la branche - et connues de lui - créant ainsi un espace confiné. Il avait, en outre, laissé à proximité de son installation des matériaux inflammables. Fondés sur ces éléments, les premiers juges ont conclu que la responsabilité pénale de l'appelant
était engagée, quelle que soit l'hypothèse à l'origine du sinistre finalement retenue (jgt., p. 78).
3.1
Aux termes de l'art. 222 al. 1 CP, celui qui, par négligence, aura causé un incendie et aura ainsi porté préjudice à autrui ou fait naître un danger collectif, sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
L'incendie par négligence est réalisé par celui qui adopte un comportement objectivement propre à provoquer un incendie qui soit dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec celui-ci (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3ème éd., 2010, n. 1 et 5 ad art. 222 CP; ATF 129 IV 119, c. 2.2 et les références citées).
Un comportement est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des conditions sine qua non, c'est-à-dire si, sans lui, le résultat ne se serait pas produit. La constatation du rapport de causalité naturelle relève du fait
(ATF 138 IV 57 c. 4.1.3; ATF 133 IV 158 c. 6.1, ATF 125 IV 195 c. 2b). Il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse de la cause unique ou immédiate du résultat. Il n'est pas non plus nécessaire qu'il soit établi avec certitude que le comportement de l'auteur est la cause du résultat; il suffit que ce comportement apparaisse, avec un haut degré de vraisemblance ou avec une vraisemblance confinant à la certitude, comme la cause du résultat tel qu'il s'est produit (ATF 116 IV 306 c. 2a).
Lorsque la causalité naturelle est établie, il faut encore rechercher si le comportement incriminé est la cause adéquate du résultat. Il s'agit là d'une question de droit (ATF 138 IV 57 c. 4.1.3), qui doit dès lors être tranchée par les juges et non par les experts. La causalité adéquate suppose une prévisibilité objective. Il faut se demander si un tiers observateur neutre, voyant l'auteur agir dans les circonstances où il agit, pourrait prédire que le comportement considéré aura très vraisemblablement les conséquences qu'il a effectivement eues, quand bien même il ne pourrait prévoir le déroulement de la chaîne causale dans ses moindres détails. L'acte doit être propre, selon une appréciation objective, à entraîner un tel résultat ou à en favoriser l'avènement, de telle sorte que la raison conduit naturellement à imputer le résultat à la commission de l'acte (ATF 131 IV 145 c. 5.1). Tel est le cas lorsque, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 c. 4.1.3). La causalité adéquate sera admise même si le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 c. 5.2). La causalité adéquate peut toutefois être exclue si une autre cause concomitante, par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte revête une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 c. 4.4.2 et les arrêts cités).
3.2
En l'espèce, l'appelant a installé une cuisinière mixte "électricité/bois", la raccordant à la cheminée par un conduit de briques réfractaires maçonné par ses soins, sans respecter les distances de sécurité émises par l'AEAI. Il a de ce fait créé un espace confiné, violant ainsi, de manière fautive et par des actes concrets, ses devoirs de prudence. Par ailleurs, ainsi que l'a retenu l'expert aux débats (jgt., p. 28), si les normes de sécurité avaient été respectées, il n'y aurait pas eu d'espace confiné. Or, c'est bien un transfert de chaleur à l'intérieur du canal construit en pierre réfractaire et / ou du panneau arrière de la cuisinière vers un milieu confiné contenant notamment des éléments combustibles qui constitue la cause de l'incendie (rapport d'expertise du 12 octobre 2009, P. 19/2, p. 6/11).
Ainsi, en installant une cuisinière mixte "électricité/bois" sans respecter les distances de sécurité, l'appelant a violé ses devoirs de prudence, adoptant un comportement objectivement propre à provoquer un incendie. En effet, si le prévenu avait respecté les distances de sécurité, il n'y aurait pas eu de confinement, et donc pas d'incendie. La causalité naturelle est donc donnée. Le comportement illicite du prévenu était en outre, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, propre à entraîner le résultat qui s'est produit. Il tombe ainsi sous le sens que ne pas respecter les distances de sécurité en matière incendie est propre à entraîner un tel résultat. Le fait que le sinistre se soit déclaré huit mois après l'installation de la cuisinière n'y change rien, dès lors qu'il est dans l'ordre des choses de faire des feux plus fréquents et plus importants en hiver, moment où le sinistre s'est déclaré, qu'au printemps, période à laquelle l'appelant a installé la cuisinière. La causalité adéquate est donc également donnée. L'hypothèse selon laquelle les plaignants auraient, malgré les indications de l'appelant, fait sans attendre des feux trop violents, si elle était réalisée (hypothèse n° 3 évoquée plus haut, consid. 2.3) ne suffirait pas à rompre le lien de causalité. D'abord, une telle circonstance n'apparaît pas si exceptionnelle qu'on ne puisse s'y attendre une cuisinière à bois, est justement un appareil construit pour y faire du feux et, surtout, elle apparaît tout à fait secondaire par rapport au comportement de l'auteur.
Il résulte de ce qui précède que l'appelant s'est rendu coupable d'incendie par négligence au sens de l'art. 222 al. 2 CP, dès lors que l'intégrité corporelle des habitants de la ferme a été mise en danger.
4.
S._ ne critique pas la peine infligée, à savoir une peine pécuniaire de soixante jours-amende à 80 fr. le jour, assortie du sursis pendant deux ans. La quotité de la peine est adéquate au regard des infractions commises, de la culpabilité de l’appelant et de sa situation personnelle. Elle ne relève ni d’un abus ni d’un excès du pouvoir d’appréciation dont jouit l’autorité de première instance, laquelle n’a ignoré aucun des critères déterminants consacrés à l’art. 47 CP. Elle sera donc confirmée.
5.
En définitive, l'appel de S._ est rejeté et le jugement du Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte est confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel, par 2'130 fr. (art. 422 CPP;
art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010,
RSV 312.03.1]), sont mis à la charge de S._ (art. 428 al. 1 CPP).
Une indemnité est allouée à Me Marville par 5'400 fr., TVA et débours inclus, à titre de dépens pénaux et mise à la charge de S._. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c3158fca-dc07-4aae-93e3-aae66152f032 | En fait :
A.
Par jugement du 7 février 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a libéré A.M._ des accusations d'injure et de menaces qualifiées (I); l'a reconnu coupable de lésions corporelles simples qualifiées et de voies de fait qualifiées (II); a condamné A.M._ à une peine privative de liberté de 7 (sept) mois et à une amende de CHF 500.- (cinq cents) (III); a suspendu l'exécution de la peine privative de liberté pour une durée de trois ans (IV); a dit qu'en cas de non-paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution sera de cinq jours (V); a alloué ses conclusions à B.M._, en ce sens que A.M._ est reconnu son débiteur de la somme de CHF 5'000.- (cinq mille) avec intérêts à 5% l'an dès le 8 avril 2009, à titre de réparation de son tort moral, avec la précision que A.M._ a reconnu devoir ce montant (VI); a dit que A.M._ participera, à hauteur de CHF 4'500.-, aux frais d'intervention pénale de B.M._ (VII) et mis les frais de procédure, par CHF 3'260.-, à la charge de A.M._ (VIII).
B.
En temps utile, A.M._ a interjeté appel contre ce jugement. Il conclut à la réforme des chiffres III et IV de son dispositif, en ce sens qu'il est condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amendes, le montant du jour-amende étant fixé à 40 fr., en lieu et place d'une peine privative de liberté de 7 mois. Il a également demandé que la quotité des dépens mise à sa charge soit réduite à 2'000 fr., compte tenu de la liste d'opérations fournie par le conseil de B.M._.
Le 21 avril 2011, le Ministère public a renoncé à déposer un appel joint et à comparaître en personne lors de l'audience publique du 17 juin 2011. Il a pour le surplus conclu au rejet de l'appel.
Par courrier du 26 avril 2011, B.M._ n'a pas contesté l'entrée en matière, ni n'a déposé d'appel joint, mais s'est déterminée sur le fond en concluant au rejet de l'appel en tant qu'il porte sur le montant des dépens qui lui reviennent.
Le 15 juin 2011, l'appelant a fait savoir que, suite à un accord conclu avec son épouse, son appel sur les dépens n'avait plus d'objet et devait être considéré comme retiré. Compte tenu de cet élément, B.M._ a été dispensée, à sa demande, de comparaître personnellement à l'audience du 17 juin 2011.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
A.M._ est né en 1961 à Kelibia en Tunisie, d'où il est originaire. Il est parti s'installer à La Rochelle, en France, une fois sa formation de mécanicien sur automobile achevée. Il y a rencontré B.M._ et l'a épousée en 1990, après huit années de vie commune. Le couple s'est ensuite installé en Suisse et deux enfants sont issus de cette union, C.M._, née en 1994 et D.M._, né en 2000. Au bénéfice d'un permis C, A.M._ travaille comme mécanicien sur automobile au service d'un garage à Renens, réalisant un salaire mensuel net de 4'300 francs. Le couple a acquis une petite maison à Ecublens, hypothéquée à hauteur de 430'000 fr., dans laquelle A.M._ a entrepris d'importants travaux de réhabilitation. Aujourd'hui, les époux sont séparés, dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale. Interdiction est faite à A.M._ d'approcher son épouse et ses enfants, et de se rendre au domicile conjugal. Il loue un appartement à Morges pour un loyer de 880 fr., et paie une prime mensuelle d'assurance maladie de 393 fr. 35. Il exerce un droit de visite usuel sur son fils cadet, sa fille ne souhaitant pas, pour le moment, avoir de contacts avec lui. Le casier judiciaire suisse de A.M._ est vierge.
Alors qu'il ressort des déclarations de A.M._ et de B.M._ qu'au début de leur union, tout allait pour le mieux, au fil des ans, l'inculpé semble s'être montré plus nerveux et a répondu de plus en plus régulièrement aux contrariétés quotidiennes par de la violence. C'est ainsi qu'entre avril 2004 et le 7 avril 2009, l'inculpé a régulièrement giflé, tiré les cheveux, bousculé et saisi par le bras son épouse, lui occasionnant des marques. Il a également à plusieurs reprises giflé et tiré les cheveux de sa fille aînée, qui devenant adolescente, avait une attitude qui ne correspondait pas aux critères stricts qu'il entendait faire respecter. A la suite d'un licenciement en janvier 2009, A.M._ a pris l'habitude de donner des coups de poing au visage et sur le corps de son épouse, deux à trois fois par semaine. Ni la mère ni l'enfant ne s'en sont plaintes, par crainte de devoir quitter le domicile familial. Le soir du 7 avril 2009, A.M._ a cependant fait preuve d'une violence particulière à l'encontre de son épouse et de sa fille, à l'occasion d'un repas familial durant lequel le couple avait consommé du vin blanc. Alors que s'achevait le repas auquel le frère de l'inculpé ainsi qu'un ami de la famille étaient invités, une dispute a commencé entre A.M._ et B.M._, du fait que leur fille n'avait pas salué son oncle. A.M._ a alors giflé sa fille, au moins à une reprise, et lui a tiré les cheveux. B.M._ a tenté de s'interposer entre son époux et leur fille. Ce dernier l'a alors violemment saisie par le bras, l'a poussée contre le mur, l'a griffée et lui a assené de multiples coups de poing et de pied au niveau du visage et du corps, la faisant tomber au sol à plusieurs reprises. Finalement, B.M._ est parvenue à se réfugier avec ses deux enfants chez ses voisins qui lui ont prodigué les premiers soins et qui ont appelé la police. Elle a déposé une plainte pénale contre son époux le même jour. B.M._ a subi un arrêt de travail à 100% du 8 au 14 avril 2009 en raisons des lésions subies ce soir-là. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
L'appelant rappelle que le 7 avril 2009, il avait consommé du vin blanc et qu'il était – tout comme son épouse – en état d'ébriété. Il estime qu'au moment de fixer la peine, les premiers juges n'ont pas suffisamment tenu compte de l'effet de l'alcool sur son comportement et que la peine doit être atténuée en raison d'une diminution légère de sa responsabilité pénale au sens de l'art. 19 al. 2 CP.
a)
Aux termes de cette disposition, le juge atténue la peine si, au moment d'agir, l'auteur ne possédait que partiellement la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d'après cette appréciation. Dans un arrêt récent (ATF 136 IV 55), le Tribunal fédéral a exposé les principes qui président à la fixation de la peine en cas de diminution de la responsabilité pénale. Partant de la gravité objective de l'acte (die objektive Tatschwere), le juge doit apprécier la faute subjective (das subjektive Tatverschulden). Il doit mentionner, dans le jugement, les éléments qui augmentent ou diminuent la faute dans le cas concret et qui permettent d'apprécier la faute en relation avec l'acte. Le législateur mentionne plusieurs critères qui jouent un rôle important pour apprécier la faute et peuvent même conduire à diminuer celle-ci de telle manière qu'il convient de prononcer une peine inférieure au cadre légal ordinaire de la peine. Parmi ceux-ci figure notamment la diminution de la responsabilité au sens de l'art. 19 CP. Dans ce cas, contrairement à la lettre de la disposition et en modification de la jurisprudence en vigueur (ATF 134 IV 132 c. 6.1.), il s'agit de diminuer la faute et non la peine; la réduction de la peine n'étant que la conséquence de la faute plus légère (ATF 136 IV 55 c. 5.5).
En matière d'absorption d'alcool, l'abrutissement passager ou la désinhibition provoquée par l'alcool ne suffit pas à admettre une diminution de responsabilité (Favre/Pellet/Stoudmann, Code pénal annoté, Lausanne 3
ème
éd. 2007, n° 2.4 ad art. 19 CP). La présomption réfragable d'une alcoolémie générant une diminution de responsabilité existe selon la jurisprudence à partir d'un taux de deux grammes pour mille (ATF 122 IV 49, JT 1998 IV 10; Roth/Moreillon [éd.], Commentaire romand, Bâle 2009, n° 27 ad art. 19 CP).
b)
En l'occurrence, ni le juge d'instruction, ni les premiers juges n'ont estimé que la consommation d'alcool de l'appelant constituait une raison sérieuse de douter de sa responsabilité pénale et n'ont pas ordonné en conséquence d'expertise sur ce point (art. 20 CP). L'appelant n'a pas davantage requis cette mesure d'instruction, que ce soit en première instance ou dans sa déclaration d'appel. Il ressort du jugement, qui restitue sur ce point les témoignages du frère de l'appelant et d'un voisin recueillis aux débats, qu'un problème d'alcool existait au sein du couple, chacun buvant parfois plus que de raison, l'état d'ébriété de A.M._ n'étant toutefois pas décelable. Le 7 avril 2009, ayant bu du vin blanc, les deux époux étaient en état d'ébriété. L'alcool a ainsi joué un rôle dans le comportement de l'appelant par son effet désinibiteur comme l'indique le jugement (cf. jgt., p. 15). Lors de son audition du 24 juin 2009 (pv. aud. 4, lignes 24 et 25), A.M._ a déclaré que ce soir-là, il avait beaucoup moins bu que sa femme. Toutefois, entendu par la police le 8 avril 2009, il a contradictoirement déclaré qu'avant le repas, sa femme et lui avaient consommé deux whisky Coca chacun, mais aucun alcool durant le souper (pièce 9 p. 4). Si la consommation excessive d'alcool de l'appelant n'est pas contestable, elle n'atteint toutefois pas l'ampleur nécessaire pour se convaincre d'une diminution de responsabilité pénale générale durant tous les épisodes de violence conjugale qui lui sont reprochés, ni lors de la scène finale du 7 avril 2009 ayant débouché sur l'intervention de la justice pénale à son encontre. En effet, l'existence d'une responsabilité restreinte n'est admise que lorsque la structure mentale de l'auteur s'écarte de façon importante de la normale par rapport aux autres sujets de droit, mais aussi par rapport aux délinquants comparables (Roth/Moreillon, op. cit., n° 26 ad art. 19 CP). Or, l'appelant durant ces années de violence conjugale, a mené une vie en tous points normale, travaillant régulièrement, à part une brève période sans activité professionnelle, gérant ses finances, ne commettant pas d'autres infractions sous l'effet de l'alcool, ne connaissant pas de problèmes de conduite automobile en relation avec l'alcool, n'attirant pas l'attention des autorités, ne manifestant pas d'agressivité particulière envers autrui, mise à part celle dirigée contre son épouse et sa fille, ne se faisant pas soigner pour une dépendance à la boisson. Cette normalité exclut d'attribuer à ses excès d'alcool une intensité telle que sa conscience et volonté d'enfreindre la loi pénale en auraient été altérées. Mal fondé, le moyen doit être écarté.
4.
A.M._ considère que la reconnaissance de dette qu'il a signée aux débats aurait dû être prise en considération comme élément à décharge par les premiers juges. Il soutient que ceux-ci ont ainsi abusé de leur pouvoir d'appréciation et fait une mauvaise application des art. 47, 48 et 50 CP.
a)
Aux termes de l'art. 50 CP, le juge doit motiver sa décision de manière suffisante. Sa motivation doit permettre de vérifier s'il a tenu compte de tous les éléments pertinents et comment ils ont été appréciés (ATF 135 I 91 c. 1.1 non publié; ATF 134 IV 1 c. 4.2.1; ATF 128 IV 193 c. 3a). L'art. 50 CP n'exige cependant pas que le jugement soit motivé dans les moindres détails (Queloz/Humbert, Commentaire romand, Code pénal I – art. 1-110 CP, Helbling Lichtenhan 2009,
n° 19 ad art. 50 CP; Alain Macaluso in: Commentaire romand, op. cit., n. 10 ad art. 80 CPP).
b)
En l'espèce, les premiers juges ont tenu compte de la reconnaissance de dette au même titre que d'autres éléments positifs comme les qualités de travailleur et de citoyen sans histoire de l'appelant, même s'ils n'ont pas mentionné expressément cet élément dans la discussion de la peine. Ils l'ont évoquée dans le corps du jugement (cf. jgt., p. 15 et 16) et au chiffre VI de son dispositif, de sorte que leur motivation satisfait aux exigences rappelées plus haut.
Pour le surplus, c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pas assimilé la reconnaissance de dette signée à un repentir sincère au sens de l'art. 48 let. d CP (Favre et alii, op. cit., n° 1.12 ad. art. 48 CP; Pellet, Commentaire romand, Code pénal I – art. 1-110 CP, Helbling Lichetenhan 2009,n° 36 et 38 ad. art. 48 CP). En effet, non seulement, il n'y a pas eu réparation par actes concluants, mais uniquement reconnaissance du dommage, ce qui est en soi insuffisant à dénoter un effort particulier (Favre et alii, op. cit., n° 1.12 ad art. 48 CP; Pellet, op. cit., n° 36 et 38 ad art. 48 CP). A cet égard, on ne discerne pas chez l'appelant que cet engagement résulterait uniquement d'une prise de conscience, ce dernier ayant nié les faits après les avoir reconnus dans un premier temps, et ayant banalisé son attitude (cf. jgt., p. 3 et 10), ayant admis finalement avoir "bousculé" son épouse à quelques reprises et avoir à l'occasion donné une correction à sa fille (cf. jgt., p. 11). Au lieu d'admettre les faits, de reconnaître ainsi ses torts et d'exprimer des regrets, A.M._ a ainsi louvoyé, ergoté et tergiversé. Depuis la séparation, il n'a pas tenté ou entrepris, le cas échéant par l'intermédiaire de tiers, de rassurer les victimes, de faire amende honorable et de se réconcilier avec elles autant que faire se peut, en payant de sa personne. On relève ainsi que la plaignante a exprimé devant les premiers juges qu'elle avait peur de sortir de chez elle où elle vit recluse, de crainte de croiser son époux. Durant l'enquête, sa fille a également exprimé la peur que lui inspirait son père (pv. aud. 1 p. 2). S'il a déclaré aux débats d'appel avoir adressé une lettre d'excuses à son épouse et souffrir d'être séparé des siens, A.M._ a surtout donné l'impression d'être centré sur lui-même, sans développer d'empathie profonde à l'égard de ses victimes. Mal fondé ce grief doit dès lors être rejeté.
5.
A.M._ a le sentiment que les premiers juges ont fixé la peine un peu trop haut pour infliger une peine privative de liberté avec sursis. Il évoque un arrêt du Tribunal fédéral sous l'empire de l'ancien droit (ATF 118 IV 337).
a)
La question de l'incidence réductrice sur la quotité de la peine telle qu'elle résulte de la jurisprudence citée par l'appelant ne se pose qu'en matière de sursis et non en matière de genres de peine (André Kuhn, in : Roth/Moreillon [éd.], op. cit., n° 12 ad art. 42 CP et note infrapaginale 14). Dans le cas d'espèce, le sursis octroyé n'est pas contesté. En outre, la question induite par l'éventuel effet de seuil se résout désormais par la prise en considération des effets de la peine sur l'avenir du condamné (art. 47 al. 1 in fine CP). Faute de portée en terme de sursis, le moyen s'avère ainsi dépourvu de consistance.
b)
Il convient toutefois de se demander si la peine infligée correspond à la culpabilité de l'appelant au sens de l'art. 47 CP. Compte tenu du concours des lésions corporelles simples qualifiées, la peine maximale était théoriquement de 4,5 ans (art. 49 et 123 CP). On relève que l'intensité des infractions est allée crescendo durant cinq années dans lesquelles on peut distinguer trois phases : d'abord, de 2004 à fin 2008, l'appelant a pris l'habitude de donner des gifles, de tirer les cheveux, de bousculer et de serrer les membres au point d'occasionner des marques, puis, durant le premier trimestre 2009, une phase plus grave durant laquelle l'appelant a pris l'habitude de frapper son épouse en lui donnant des coups de poing au visage et au corps deux à trois fois par semaine et, enfin, le passage à tabac du 7 avril 2009, contraignant la plaignante à plusieurs jours d'arrêt de travail (cf. pièce n° 5 : certificat médical faisant état de 40 lésions différentes pour les seuls faits du 7 avril 2009). Eu égard à la durée, à la fréquence et à la sauvagerie de ses actes délictueux ciblés exclusivement sur les membres féminins de sa famille, une peine de 7 mois, soit 210 jours, est adéquate au vu de la culpabilité de l'appelant.
6.
A.M._ ajoute encore que les premiers juges auraient dû prendre en considération les conséquences que les infractions qui lui étaient reprochées avaient sur lui au sens de l'art. 54 CP. Il précise que depuis le mois d'avril 2009, il a dû quitter le domicile familial dont il a l'interdiction d'approcher et qu'il vit séparé de son épouse et de ses enfants, "perdant le centre de gravité de sa vie."
a)
L'article 54 CP prévoit l'exemption de peine pour celui qui a été directement atteint par les conséquences de son acte au point qu'une peine serait inappropriée (Cornu, Exemption de peine et classement: absence d'intérêt à punir, réparation et atteinte subie par l'auteur du fait de son acte [art. 52-54 CP], RPS 127 (2009), p. 409). Différentes conditions doivent être réalisées pour que l'art. 54 CP trouve application, soit une atteinte subie par l'auteur, une atteinte directe et le degré de l'atteinte. S'agissant de l'atteinte subie par l'auteur, on pense d'abord à une atteinte physique sérieuse, comme une invalidité ou des souffrances importantes dues à des brûlures ou d'autres blessures, mais il peut également s'agir d'atteintes psychologiques (TF 6B_592/2010 du 17 mars 2011, c. 2.3.4; ATF 119 IV 280 c. 1a, JT 1994 I 760; Cornu, op. cit., p. 410). En ce qui concerne la deuxième condition, l'atteinte subie doit se trouver en relation directe avec l'acte délictueux (Cornu, op. cit., p. 410), un lien étroit devant exister entre le bien protégé et la lésion subie. Concernant la gravité de l'atteinte, d'après la jurisprudence, l'application de
l'art. 54 CP est limitée aux cas dans lesquels la "sanction" subie par l'auteur en raison des conséquences de son acte est suffisamment lourde pour qu'on puisse en attendre un effet d'amendement et de resocialisation, de sorte qu'il serait
vain de prononcer une peine (TF 6B.111/2009 du 16 juillet 2009, c. 3.2; ATF 117 IV 245 c. 2b). Pour déterminer, dans un cas concret, si l'auteur peut bénéficier de l'art. 54 CP, il faut donc mettre en balance la gravité de l'atteinte qu'il a subie, d'une part, et, d'autre part, la gravité de son acte et le degré de sa faute, autrement dit sa culpabilité au sens de l'art. 47 CP (Cornu, op. cit., p. 411), de sorte que plus la faute est lourde, plus les conséquences touchant la personne de l'auteur doivent être graves pour rendre la peine inadéquate (Message du Conseil fédéral,
FF 1985 II 1021, spéc. p. 1030; TF 6B.111/2009 du 16 juillet 2009, c. 3.2;
ATF 117 IV 245 c. 2a).
b)
En l'occurrence, les premiers juges ont fait état de ce que l'appelant paraît souffrir de sa situation de séparation (cf. jgt., p. 10), éprouvant un sentiment de perte à l'égard de sa famille et de sa maison. De plus le juge des mesures protectrices de l'union conjugal lui a interdit d'approcher les siens et il ne voit plus que son fils, sa fille et son épouse refusant d'avoir des contacts avec lui. Cependant, dans son état d'esprit il faut faire la part du remord et celle de l'auto apitoiement. De même, dans la situation de vie actuelle de l'appelant, il faut distinguer les conséquences induites par la séparation résultant du conflit conjugal de celles découlant étroitement de la commission des violences domestiques. Au surplus, on relève que l'appelant n'est pas écrasé par le poids de sa culpabilité au point qu'une sanction paraîtrait inéquitable, inappropriée ou excessive dans son quantum au sens de l'art. 54 CP. Au contraire, sa prise de conscience est imparfaite. Il n'a pas fait de travail d'introspection, notamment auprès d'un thérapeute, pour éviter à l'avenir d'user de violence à l'encontre de ses proches. Enfin, ce dont l'appelant se plaint, à savoir la désunion familiale et la perte de la jouissance du logement familial, constituent des conséquences indirectes (décisions judiciaires en lien avec la procédure de séparation des époux et rejet affectif des victimes) et non directes de ses infractions (Killias/Kurth, Commentaire romand n° 5 ad art. 54 CP). Mal fondé, ce grief doit être rejeté.
7.
A.M._ relève qu'il n'a pas d'antécédent de sorte que les premiers juges auraient dû lui infliger une peine pécuniaire ou une peine de travail d'intérêt général en lieu et place d'une peine privative de liberté. Il considère que les premiers juges n'ont pas correctement appliqué l'art. 34 CP et qu'ils n'ont pas expliqué la raison pour laquelle ils ont préféré infliger une peine privative de liberté plutôt qu'une peine pécuniaire ou de travail d'intérêt général.
a)
Dans la conception de la nouvelle partie générale du Code pénal, la peine pécuniaire constitue la sanction principale. Les peines privatives de liberté ne doivent être prononcées que lorsque l'Etat ne peut garantir d'une autre manière
la sécurité publique (Mazzucchelli, Strafrecht I, 2
ème
éd., Bâle 2007, n. 11 ad
art. 41 CP). En vertu du principe de la proportionnalité, il y a en règle générale lieu, lorsque plusieurs peines entrent en considération et apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute, de choisir celle qui restreint le moins sévèrement la liberté personnelle de l'intéressé, ou celle qui le touche le moins durement. La peine pécuniaire et le travail d'intérêt général représentent des atteintes moins importantes et constituent ainsi des peines plus clémentes. Cela résulte également de l'intention, qui était au cœur de la révision de la partie générale du Code pénal en matière de sanction, d'éviter les courtes peines de prison ou d'arrêts, qui font obstacle à la socialisation de l'auteur, et de leur substituer d'autres sanctions
(ATF 134 IV 82 c. 4.1; ATF 134 IV 60 c. 4.3).
Aux termes de l'art. 50 CP, le choix de la sanction, comme la quotité et la durée de celle qui est prononcée, doit être motivé de manière suffisante. La motivation adoptée doit permettre de vérifier si les éléments pertinents ont été pris en compte et comment ils ont été appréciés (ATF 134 IV 1 c. 4.2.1 et les arrêts cités).
b)
En l'occurrence, l'appelant a été condamné à une peine privative de liberté de 7 mois avec sursis pendant trois ans. Au surplus, il n'a pas d'inscription à son casier judiciaire. Or, le jugement n'indique pas les motifs pour lesquels la peine privative de liberté l'a emporté sur la peine pécuniaire. Sur ce point, l'appel doit être admis, rien ne justifiant d'infliger à l'appelant, délinquant primaire, une peine privative de liberté plutôt qu'une peine pécuniaire affectant son patrimoine.
8.
Quant au montant du jour-amende, l'appelant propose 40 fr., sans toutefois justifier ce chiffre.
a)
Aux termes de l'art. 34 CP, sauf disposition contraire de la loi, la peine pécuniaire ne peut excéder 360 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l’auteur (al. 1). Le jour-amende est de 3'000 fr. au plus. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l’auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d’assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).
Le Tribunal fédéral a exposé de manière détaillée les principes régissant la fixation de la peine pécuniaire, la quotité du jour-amende en particulier (ATF 135 IV 180 et les références citées). Il a ainsi rappelé que la quotité du jour-amende doit être fixée conformément au principe du revenu net, soit celui que l'auteur réalise en moyenne quotidiennement, quelle qu'en soit la source, ce qui inclut notamment les prestations d'aide sociale. Le principe du revenu net exige que seul le disponible excédant les frais d'acquisition du revenu soit pris en considération, dans les limites de l'abus de droit. Ce qui est dû en vertu de la loi ou ce dont l'auteur ne jouit pas économiquement doit en être soustrait (ATF 134 IV 60 c. 6.4.1). Il en va ainsi des obligations d'assistance pour autant que le condamné s'en acquitte effectivement. Des charges financières extraordinaires peuvent conduire à une réduction lorsqu'elles correspondent à des besoins financiers accrus, résultant de la situation de l'auteur et indépendantes de sa volonté (ATF précité, c. 6.4.4). Le revenu net ainsi défini en droit pénal est le point de départ pour fixer la quotité du jour-amende. Dans ce contexte, le minimum vital mentionné à l'art. 34 al. 2 CP constitue un correctif permettant au juge de s'écarter du principe du revenu net et d'arrêter le jour-amende à un niveau sensiblement inférieur. Pour les condamnés qui vivent en dessous ou au seuil du minimum vital, le jour-amende doit être réduit dans une mesure telle que, d'une part, le caractère sérieux de la sanction soit rendu perceptible par l'atteinte portée au niveau de vie habituel et que, d'autre part, l'atteinte apparaisse supportable au regard de la situation personnelle et économique. Un abattement du revenu net de la moitié au moins apparaît adéquat à titre de valeur indicative. Pour une peine ferme, ce sont avant tout les facilités de paiement accordées par l'autorité d'exécution (art. 35 al. 1 CP) qui doivent permettre de pallier une charge excessive. Lorsque le nombre des jours-amende est considérable - en particulier au-delà de nonante jours-amende - une réduction supplémentaire de 10 à 30 % est indiquée car la contrainte économique, partant la pénibilité de la sanction, croît en proportion de la durée de la peine. La situation financière concrète est toujours déterminante. La fixation de la quotité du jour-amende dans le cas concret procède d'un pouvoir d'appréciation exercé avec soin.
La loi se réfère, enfin, au minimum vital, dont la portée dans la fixation de la quotité du jour-amende demeure peu claire. On peut cependant conclure des travaux préparatoires que ce minimum vital ne correspond pas à celui du droit des poursuites et que la part insaisissable des revenus (art. 93 LP, Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889, RS 281.1) ne constitue pas une limite absolue. S'il fallait, dans chaque cas, établir le minimum vital du droit des poursuites et que seul soit disponible l'excédent, un cercle étendu de la population (personnes en formation, étudiants, conjoints s'occupant du ménage, chômeurs, bénéficiaires de l'assistance sociale, requérants d'asile, marginaux, etc.) serait exclu de la peine pécuniaire. Cela n'était précisément pas la volonté du législateur
(TF 6B_845/2009 du 11 janvier 2010, c. 1.1.5).
b)
En l'espèce, l'appelant réalise un revenu mensuel de 4'297 francs. Le studio qu'il occupe lui coûte 880 fr. par mois charges comprises (cf. pièce 32). Il verse une contribution d'entretien globale de 1'200 francs. Ses frais de déplacement professionnels mensuels lui reviennent à 250 francs. Sa prime d'assurance-maladie obligatoire est de 393 fr. 35 par mois. La dette hypothécaire grevant la maison familiale est de 430'000 fr. environ (pièce 14). En partant d'un revenu journalier de l'ordre de 140 fr. et en en déduisant 90 fr. consacrés aux frais d'assurance-maladie, à la contribution d'entretien et à d'autres dépenses incompressibles, on aboutit à un montant de 50 fr. par jour-amende.
9.
En définitive, l'appel est partiellement admis et les chiffres III et IV du dispositif du jugement attaqué modifiés dans le sens que A.M._ est condamné à une peine pécuniaire de 210 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 50 fr., ainsi qu'à une amende de 500 francs. L'exécution de la peine de jours-amende est suspendue pour une durée de trois ans.
10.
L'appelant obtenant partiellement gain de cause (art. 428 al. 1 CPP), les frais de procédure d'appel, arrêtés en application des art. 21 et 23 TFJP, sont mis par moitié à sa charge, le solde restant à la charge de l'Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c35f1150-730a-4cb1-bf05-6dea54901ead | En fait :
A.
Par jugement du 18 février 2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de la Côte a constaté que E._ s'est rendu coupable de violation simple des règles de la circulation routière (I), l’a condamné à une amende de 350 fr. (II), a dit qu’à défaut de paiement de l’amende, la peine privative de liberté de substitution sera de 4 jours (III), et a mis les frais de justice, par 400 fr., à sa charge (IV).
B.
Le 19 février 2014, E._ a annoncé faire appel à l'encontre de ce jugement. Par déclaration d'appel motivée du 17 mars 2014, il a conclu principalement à son acquittement du chef d’accusation de violation simple des règles de la circulation et subsidiairement à ce que le jugement entrepris soit annulé et la cause renvoyée en première instance pour nouvelle instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants à intervenir.
Par avis du 23 avril 2014, la Présidente de céans a informé les parties que l’appel serait traité en procédure écrite par un juge unique.
Par courrier du 27 mai 2014, le Ministère public central, division affaires spéciales contrôle et mineurs a déclaré renoncer à déposer des déterminations dans cette affaire.
Quant à E._, il n’a pas déposé de nouvelles observations.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
E._ est né le [...] mars 1972 à [...]. Il a suivi une formation complète de juriste. Après avoir échoué à l’examen du brevet d’avocat en 20 [...], il a collaboré durant deux ans auprès d’une étude d’avocats. Depuis 2009, il dirige la société [...] SA, entreprise active dans la distribution de biens de consommation. Son revenu mensuel brut issu de cette activité s’élève à 6'000 fr. environ. Parallèlement, il exerce une activité de conseil qui lui procure un revenu complémentaire de 3'000 fr. brut. Son loyer mensuel s’élève à 2'250 fr. charges comprises et ses primes d’assurances maladie à 390 fr. par mois. Il est célibataire et verse une pension alimentaire mensuelle de 900 fr. pour sa fille. E._ est créancier de sa société à hauteur de 110'000 francs. Il n’a pas d’autre fortune, ni de dettes.
Son casier judiciaire et l’extrait de son fichier ADMAS sont vierges.
2.
Le 31 juillet 2013 à 15 heures 15, sur l’autoroute Genève-Lausanne (A1), chaussée Lac, dès le km 34.500 (Nyon-Gland), district de Nyon, E._ a circulé au volant du véhicule VD [...] sans respecter une distance suffisante pour circuler en file. De plus, il a fait un usage abusif de signaux avertisseurs optiques.
Par lettre du 5 août 2013, au Commandant de la police cantonale, il a en bref contesté avoir commis toute infraction et dénoncé l’attitude contraire aux règles de la bonne foi des agents.
Par ordonnance du 19 août 2013, le Préfet du district de Nyon a condamné E._ à une amende de 350 fr. pour violation simple des règles de la circulation routière.
Contestant les faits reprochés, le prévenu a formé opposition à cette ordonnance par courrier du 21 août 2013. Le Préfet a décidé de maintenir sa décision et le Ministère public a transmis le dossier de la cause à l’autorité de première instance en vue des débats, en application de l’art. 356 al. 1 CPP.
Devant le Tribunal de police, E._ a maintenu son opposition. | En droit :
1.
1.1
Selon l’art. 399 CPP (Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0), l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (al. 1). La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (al. 3).
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de E._ est recevable.
1.2
S'agissant d'un appel dirigé contre une contravention, la procédure applicable est écrite (art. 406 al. 1 let. c CPP) et la cause ressort de la compétence d'un juge unique (art. 14 al. 3 LVCPP [loi vaudoise d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009, RSV 312.01]).
1.3
Selon l’art. 398 al. 4 CPP, lorsque seules des contraventions ont fait l’objet de la procédure de première instance, l’appel ne peut être formé que pour le grief que le jugement est juridiquement erroné et que l’état de fait est établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite. Cet appel restreint a été prévu pour les cas de peu d’importance, soit concernant des infractions mineures, le droit conventionnel international admettant en pareil cas des exceptions au droit à un double degré de juridiction (Kistler Vianin, in: Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, nn. 22 et 23 ad art. 398 CPP).
En l’espèce, seule une contravention à la législation sur la circulation routière a fait l’objet de l’accusation et du jugement de première instance, de sorte que l’appel est retreint.
2.
E._ soutient principalement que le Tribunal de police de l’arrondissement de la Côte a fait preuve d’arbitraire dans son appréciation des preuves et l’établissement des faits.
2.1
A teneur de l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d’innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU Il (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1). Comme règle d’appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 la 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 précité, c. 2.2.2).
2.2
L’appréciation des preuves est l’acte par lequel le juge du fond évalue la valeur de persuasion des moyens de preuve à disposition et pondère ces différents moyens de preuve afin de parvenir à une conclusion sur la réalisation ou non des éléments de fait pertinents pour l’application du droit pénal matériel. Le serment, en particulier celui prêté pour l’exercice de leur fonction par les policiers, n’entraîne aucune conséquence particulière en matière d’appréciation des preuves. Cette dernière est dite libre, car le juge peut par exemple attribuer plus de crédit à un témoin, même prévenu dans la même affaire, dont la déclaration va dans un sens, qu’à plusieurs témoins soutenant la thèse inverse; il peut fonder une condamnation sur un faisceau d’indices; en cas de versions contradictoires, il doit déterminer laquelle est la plus crédible. En d’autres termes, ce n’est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (Jean-Marc Verniory, in: Kuhn/Jeanneret (éd.), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n° 34 ad art. 10 et les références jurisprudentielles citées).
3.
3.1
E._ soutient que le tribunal a retenu à tort les faits tels que relatés dans le rapport de police du 13 août 2013 ainsi que les explications fournies par les gendarmes, relatives à la coexistence entre ce rapport et le procès-verbal du 31 juillet 2013, dont les contenus ne sont pas identiques. Comme grief concomitant, le prévenu soutient qu’il est pour le moins contradictoire d’admettre, comme l’a fait le premier juge, que l’écoulement du temps et la fréquence élevée des infractions que les policiers ont à traiter puissent légitimement altérer les souvenirs des gendarmes et simultanément admettre qu’un rapport rédigé 13 jours après les faits soit considéré comme plus fiable qu’un procès-verbal rédigé le jour même de son interpellation.
En l’espèce, le dossier contenait à l’origine seulement la première page du procès-verbal du 31 juillet 2013. C’est à l’audience du 18 février 2014 que le caporal H._ a produit l’entier de celui-ci et a exposé que seul le rapport de police du 13 août 2013 faisait foi. Il a expliqué qu’en cas de contravention, un devait être établi dans les 48 heures après les faits, faute de quoi un rapport devait être rédigé. Dans le cas d’espèce, le gendarme G._ a dressé le procès-verbal le jour des faits et le caporal H._ l’a corrigé. Toutefois, comme il ne l’a pas fait dans les 48 heures, il a dû établir un rapport. Or, ce dernier n’a pas le même contenu que le procès-verbal initial, lequel indique que le prévenu circulait à une distance d’environ 10 mètres de la voiture de service, soit à une distance insuffisance pour circuler en ligne, et qu’il a fait des appels de phares. Quant au rapport, il décrit des faits plus graves et indique que le prévenu s’est placé à courte distance derrière la voiture banalisée des policiers, ne permettant pas d’observer la partie de la calandre inférieure aux phares, ceci sur 1'000 mètres, et qu’il a fait des appels de phare à plusieurs reprises. Ce rapport mentionne par ailleurs la lettre du prévenu au Commandant de la police du 5 août 2013. Toutefois, tant le procès-verbal que le rapport indiquent que E._ a reconnu les faits dont il a admis le bien-fondé et qu’il s’est montré poli et correct.
A l’audience de première instance, les deux gendarmes ont confirmé la version des faits retenue dans le rapport du 13 août 2013, affirmant que E._ les suivait à courte distance de sorte qu’ils ne pouvaient pas voir la partie de la calandre inférieure aux phares.
Or, on peine à comprendre, s’agissant d’une simple contravention comme les gendarmes en constatent régulièrement, pour quelles raisons le procès-verbal établi le jour même de l’interpellation du prévenu n’a pas été considéré comme définitif, au simple motif que le caporal H._ devait le relire, alors qu’il contenait déjà l’ensemble des faits constatés et que toutes ses rubriques était remplies à satisfaction de droit. On ignore aussi pour quelles raisons le rapport de police du 13 août 2013 n’a pas le même contenu que le procès-verbal du 31 juillet 2013 s’agissant d’un point déterminant, à savoir le déroulement des faits, et en retient de plus graves. Dans ces circonstances et même si les deux gendarmes ont confirmé à l’audience les faits tels que relatés dans le rapport du 13 août 2013, il y a lieu de s’en tenir aux faits constatés dans le procès-verbal du 31 juillet 2013. Au demeurant, ce procès-verbal indique que le prévenu a reconnu les faits. Surtout à l’audience, E._ a indiqué qu’il était très probable qu’il soit arrivé à deux ou trois reprises trop près du véhicules des gendarmes, du fait qu’il avait la vitesse bloquée sur le tempomat, admettant déjà implicitement les faits.
3.2
L’appelant relève que suivre un véhicule à une distance d’environ 10 mètres (procès-verbal du 31 juillet 2013) s’avère moins grave que de le suivre à une distance si courte que le pilote du véhicule talonné ne puisse observer la partie de la calandre inférieure aux phares (rapport du 13 août 2013). Selon lui, il aurait dû être poursuivi sur la base de ce rapport pour violation grave des règles de la circulation alors que le chef d’accusation retenu est celui d’une violation simple. En effet, l’amende prononcée au vu des faits décrits dans le rapport du 13 août 2013 apparaîtrait bien clémente. Peu importe toutefois dès lors qu’il y a lieu de s’en tenir au premier procès-verbal qui correspond au demeurant aux faits tels que retenus dans l’ordonnance pénale.
3.3
Le prévenu reproche également au premier juge de n’avoir pas tenu compte du fait que les gendarmes auraient abusé de la voie de gauche, provoquant en cela délibérément les infractions qui lui sont reprochées. Selon lui, comme ils étaient en dépassement de plusieurs véhicules, ils auraient dû se rabattre notamment en présence d’une brèche dans la file de voitures droite. Il souligne également qu’il est impossible de s’approcher à plusieurs reprises d’un véhicule, de s’introduire dans une brèche du trafic sur la voie de droite, de remonter à sa hauteur, de retourner derrière lui avant de le dépasser en moins de 30 secondes, soit le temps nécessaire pour parcourir une distance de 1'000 mètres à une vitesse de 120 km/h, à savoir la distance que les gendarmes ont retenu dans leur rapport du 13 août 2013. L’appelant en tire la conclusion qu’un doute sérieux existe quant aux déroulement des faits, doute qui doit lui profiter.
A titre préliminaire, on rappellera que la vitesse maximale sur autoroute est de 120 km/h (art. 4a al. 1 let. d OCR [ordonnance fédérale sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962, RS 741.11]) et que la vitesse minimale est de 80 km/h (art. 35 al. 1 OCR). La vitesse règlementaire, comme la qualifie l’appelant notamment dans sa lettre du 5 août 2013, n’est ainsi pas de 120 km/h. En outre, conformément à l’art. 35 LCR [loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958, RS 741.1] et 8 al. 1 OCR, il appartient au conducteur de rouler sur la voie de droite, à moins qu’il ne dépasse.
En l’occurrence, il n’est pas possible de retenir que la voiture des gendarmes aurait roulé abusivement sur un ou des kilomètres sur la voie de gauche au lieu de se rabattre. En tout état de cause, le prévenu n’apporte pas d’éléments tangibles permettant d’infirmer les constats de gendarmes dans leur procès-verbal du 31 juillet 2013. De plus, même si un tel abus devait être admis, cela ne justifierait en aucune manière le comportement du prévenu consistant à talonner cette voiture et à lui faire des appels de phares. L’argument consistant à affirmer que les gendarmes auraient agi de manière déloyale est ainsi quoiqu’il en soit vain. Il en va de même de la question de savoir si talonner un autre véhicule, remonter à sa droite, revenir derrière lui puis le dépasser peut être réalisé sur 1'000 mètres ou non. En effet, le simple fait de talonner un véhicule, au mépris des règles de sécurité, constitue déjà une violation des règles de la circulation routière.
3.4
E._ invoque la violation des art. 78 al. 5 et 158 CPP.
A teneur de l’art. 78 al. 5 CPP, à l'issue de l'audition, le procès-verbal est lu ou remis pour lecture à la personne entendue. Après en avoir pris connaissance, la personne entendue appose sa signature au bas du procès-verbal et en paraphe chaque page. Si elle refuse de lire intégralement ou de signer le procès-verbal, le refus et les motifs invoqués sont consignés au procès-verbal.
Quant à l’art. 158 CPP, il dispose à son alinéa 1 qu’au début de la première audition, la police ou le ministère public informent le prévenu dans une langue qu'il comprend qu'une procédure préliminaire est ouverte contre lui et pour quelles infractions (let. a), qu'il peut refuser de déposer et de collaborer (let. b), qu'il a le droit de faire appel à un défenseur ou de demander un défenseur d'office (let. c) et qu'il peut demander l'assistance d'un traducteur ou d'un interprète (let. d). L’alinéa 2 de cette disposition précise que les auditions effectuées sans que ces informations aient été données ne sont pas exploitables.
En l’espèce, le procès-verbal dressé après les faits ne relate pas les déclarations d’une partie, mais les constats de la police. Il constitue une pièce du dossier et non un procès-verbal d’audition qui devrait être signé et n’a pas au demeurant la même valeur probante s’agissant des déclarations du prévenu. Les art. 78 al. 5 et 158 CPP ne sont ainsi pas applicables.
3.5
En conclusion, il y a lieu de s’en tenir aux faits tels que décrits par le procès-verbal du 31 juillet 2013, qui correspondent au demeurant à ceux retenus par l’ordonnance pénale. Ceux-ci constituent une violation simple de la loi sur la circulation routière, l’appelant ayant enfreint les art. 12 al. 1 et 29 al. 1 OCR. Vérifiée d’office, la peine paraît adéquate, étant précisé que les faits tels que décrits ci-dessus ne justifient pas une réduction de l’amende au vu de la faute commise.
4
En définitive, l'appel de E._ doit être rejeté et le jugement attaqué entièrement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel, par 810 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale] du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), doivent être mis à la charge de E._ (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c3c6d56f-5ad2-4eaf-9a9b-73e86f258c64 | En fait :
A.
Par jugement du 11 juin 2015, le Tribunal de police l’arrondissement de l'Est vaudois a libéré A.W._ du chef d'accusation de voies de fait qualifiées (I), libéré B.W._ des chefs d'accusation de menaces qualifiées et de dénonciation calomnieuse (II), constaté que A.W._ s'est rendu coupable d'injure, de contrainte et d'insoumission à une décision de l'autorité (III), constaté que B.W._ s'est rendue coupable d'injure mais l'a exemptée de toute peine (IV), condamné A.W._ à une peine pécuniaire de 120 jours-amende, le jour-amende étant arrêté à 60 fr. (V), suspendu l'exécution de la peine pécuniaire prononcée ci-dessus et fixé au condamné A.W._ un délai d'épreuve de deux ans (VI), condamné A.W._ à une amende de 1'200 fr. et dit que la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l'amende sera de 20 jours (VII), ordonné le maintien au dossier à titre de pièce à conviction d'un CD contenant un message vocal laissé sur la combox de A.W._ (fiche no 10'063) (VIII), arrêté l'indemnité du défenseur d'office de A.W._ à 3'922 fr. 80 pour toutes choses, dont à déduire 1'300 fr. 85 d'ores et déjà versés (IX), arrêté l'indemnité du défenseur d'office de B.W._ à 4'178 fr. 70 pour toutes choses (X), mis les frais, arrêtés à 7'447 fr. 80 comprenant l'indemnité due à son défenseur d'office, à la charge de A.W._ (XI), dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité du défenseur d'office Me Michèle Meylan ne sera exigé que si la situation financière de A.W._ s'améliore notablement (XII), dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité du défenseur d'office Me Luc Del Rizzo ne sera exigé que si la situation financière de B.W._ s'améliore notablement (XIII).
B.
Par annonce du 11 juin 2015, puis par déclaration motivée postée le 7 juillet 2015, A.W._ a interjeté appel contre ce jugement en concluant à sa libération de l'infraction de contrainte, à la réduction de la peine pécuniaire, le jour-amende étant de 30 fr., et à la réduction de l'amende à dire de justice, les frais de la cause étant répartis entre B.W._, lui-même et l'Etat.
Par acte du 20 juillet 2015, le Ministère public a formé un appel joint en demandant que le nombre de jours-amende soit augmenté à 150 jours-amende à
60 fr. le jour avec sursis pendant deux ans et que les frais de la procédure d'appel soit mis à la charge de l'appelant.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
A.W._, né le 1
er
novembre 1961 en Italie, habite en Suisse depuis de nombreuses années. Il est représentant en produits alimentaires italiens pour le compte de l'entreprise [...] dont le siège est au Tessin et travaille pour l’ensemble de la Suisse romande. Il gagne environ 5'500 fr. nets par mois. Jusqu'en mai 2015, il ne payait pas ses primes d'assurance-maladie. Il a des
dettes. Au 24 avril 2015, il faisait l’objet d’actes de défaut de biens pour somme de 60'678 fr. 25, et de poursuites à hauteur de 35'544 fr. 95.
Entre 1995 et 2012, A.W._ a été marié à B.W._, dont il a eu trois enfants, [...] né en 1992, [...] né en 1996 etE.W._[...] née en 2000. Peu après la naissance du troisième enfant, les relations du couple se sont dégradées. Après plusieurs séparations, le divorce a été prononcé en avril 2012.A.W._ a été astreint à verser une pension alimentaire de 700 fr. à chacun de ses deux enfants mineurs.
B.W._ est née le 21 août 1967 en Italie. Coiffeuse de formation, elle exerce ce métier en qualité d'indépendante, activité dont elle tire actuellement des revenus de l'ordre de 2'500 fr. à 2'800 fr. par mois. Ses primes d'assurance-maladie sont subsidiées. Les enfants [...] et [...] vivent avec elle.
Le casier judiciaire de A.W._ est vierge, de même que celui de B.W._.
2.
Depuis le mois de septembre 2010 et jusqu'au 25 septembre 2013 à tout le moins, à Chailly-sur-Montreux, Glion, Clarens, Montreux et Vevey notamment, A.W._ s'est livré à des actes de persécution de nature obsessionnelle à rencontre de B.W._. Il n'a eu de cesse de l'importuner en manifestant ostensiblement ou furtivement sa présence dans sa vie privée quotidienne, restreignant ainsi sa liberté d'action. Pour ce faire, il l'a harcelée plusieurs fois par semaine en la suivant en voiture et dans la rue, ainsi qu'en se rendant à son domicile et à proximité de son lieu de travail. Lorsqu'il croisait la plaignante, il lui arrivait souvent de créer du scandale en public, de l'injurier verbalement ou de cracher dans sa direction. Il l'importunait également au moyen d'appels et de SMS à caractère injurieux.
Au cours des trois années incriminées, les enfantsE.W._B.W._ et D.W._ ont pour leur part estimé ce harcèlement à rencontre de leur mère à une fréquence de 2 à 5 fois par semaine.
De plus, dans le cadre de leur difficultés conjugales, diverses décisions provisionnelles et au fond ont interdit à A.W._ de s'approcher de B.W._, qu'il n'a, par son comportement, guère respectées. Par ordonnance de mesures superprovisionnelles, rendue le 18 novembre 2011 par la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois, il a été interdit à A.W._ de s'approcher de B.W._ à moins de 200 m et d'approcher de son domicile, sous la commination de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP. Par convention de mesures provisionnelles du 8 mars 2012 ratifiée pour valoir jugement par la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois, il a été interdit à A.W._ de s'approcher de B.W._ à moins de 200 m et d'approcher de son logement [...] à l'exception des fois où il exercera son droit de visite sur ses enfants mineurs, sous la commination de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP. Cette dernière convention a été ratifiée pour valoir jugement dans le cadre du jugement de divorce rendu par la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois le 10 avril 2012, entré en force le 15 mai 2012.
Les épisodes suivants ont pu être établis :
2.1
A une date indéterminée en septembre ou octobre 2010, à Glion, A.W._ a tenté d'intimider B.W._ en avançant lentement avec son véhicule devant son lieu de travail, à la[...].
2.2
Le 5 août 2011, à Clarens, alors que B.W._ arrivait en voiture chez une amie, avec sa fille [...], le prévenu est arrivé et a frappé un coup avec sa main sur le capot du véhicule de la plaignante et l'a injuriée. Il est ensuite resté durant deux heures sur le t
rottoir d'en face à observer les deux amies qui se trouvaient sur le balcon. Il a enfin tenté d'entrer dans l'immeuble en secouant la porte d'entrée, en vain. B.W._ a dû le menacer d'appeler la police pour qu'il finisse par quitter les lieux. Vers 22h00, les deux amies se sont rendues à Vevey pour boire un verre à la place du Marché. Le prévenu les a suivies et lorsqu'elles ont voulu rentrer chez elles, il a stationné son véhicule derrière celui de B.W._, les empêchant de sortir de leur place de parc. Il est ensuite descendu de son véhicule pour parler à B.W._.
2.3
En décembre 2011, à Clarens, alors que B.W._ avait rendez-vous chez une amie avec sa fille[...], en vue d'aller manger au restaurant, A.W._ est arrivé en même temps qu'elles. Il les a attendues en bas de l'immeuble et les a ensuite suivies jusqu'au restaurant. La plaignante a fait appel à la police, qui est intervenue. A.W._ a quitté les lieux mais est resté dans sa voiture en face du restaurant.
2.4
Le 21 août 2012, à Montreux, alors que B.W._ buvait un café sur une terrasse avec une amie, A.W._ est arrivé et l'a injuriée en italien, notamment en lui disant
"d'aller faire le métier qu'elle connaissait"
et
"qu'elle ne savait que sucer"
. Il leur a également craché dessus. Les deux amies se sont alors réfugiées à l'intérieur de rétablissement où le prévenu les a suivies.
2.5
Le 13 septembre 2012, à Montreux, dans P._ A.W._ a vitupéré contre B.W._B.W._ qui prenait un café avec une amie, et l'a traitée notamment de
"voleuse"
et en déclarant que
"la seule chose qu'elle savait faire c'était écarter les jambes"
. Peu après, à l'extérieur de l'établissement, alors que les deux amies se dirigeaient en direction du centre commercial du[...] A.W._ les a rattrapées et a continué à injurier B.W._ en la traitant de
"voleuse"
, de
"pute"
et de
"salope"
et en lui disant que
"sa tenue s'approchait de celle des péripatéticiennes de la route de Genève à Lausanne".
2.6
Le 24 septembre 2012, à Chailly-sur-Montreux, A.W._ s'est rendu au domicile de B.W._. Il a créé du scandale et l'a injuriée, en présence de leur fille.
2.7
Le 27 septembre et le 3 octobre 2012, à Lausanne, le prévenu s'est rendu devant le lieu de travail de B.W._, à l'académie de coiffure.
2.8
Le 15 octobre 2012, à Chailly-sur-Montreux, A.W._ a suivi en voiture B.W._, qui allait amener un ami à Vevey. A un feu rouge, il est sorti de son véhicule et s'est approché de la vitre de celui de son épouse et l'a insultée en italien. Celle-ci a poursuivi sa route et il a continué à la suivre de près jusqu'à Vevey, puis en direction de Chailly-sur-Montreux. La plaignante s'est arrêtée à la station-service de la Tour-de-Peilz. Le prévenu a placé son véhicule derrière le sien, l'empêchant ainsi de repartir. Il a recommencé à l'injurier en italien. Il a finalement reculé son véhicule. B.W._ a donc pu quitter les lieux et se rendre au poste de police de Clarens. Le prévenu l'a suivie jusqu'à cet endroit, allant jusqu'à essayer d'entrer de force dans le local ou se trouvait la plaignante.
2.9
Le 16 mai 2013, à Clarens, A.W._ a attendu derrière le domicile de B.W._ sous prétexte de parler à son fils,[...].
2.10
Le 19 juillet 2013, à [...], il s'est présenté devant le salon de coiffure où travaillait B.W._ et a collé son visage contre la vitrine pour observer à l'intérieur du salon.
2.11
Le 23 juillet 2013, à [...], il s'est installé à une terrasse d'un café fermé, près de l'entrée où la plaignante travaille et a stationné son véhicule à proximité du sien.
2.12
Les 28 et 29 août 2013, à Vevey, en début et en fin de journée, le prévenu s'est rendu aux abords du salon de coiffure où travaille la plaignante et a observé B.W._ et son ami depuis son véhicule qu'il avait stationné à proximité.
2.13
Le 30 août 2013, à Montreux, alors que B.W._ et son ami amenaient [...] à la gare de Montreux, le prévenu les a suivis en voiture jusqu'à leur destination, avant de garer son véhicule devant la [...] en face de leur véhicule en les fixant du regard.
2.14
Le 13 septembre 2013, à [...], le prévenu, qui était stationné devant la poste, à proximité du domicile de la plaignante, a suivi en voiture le bus dans lequel est montée cette dernière jusqu'à l'arrêt de [...]
2.15
Les 18, 19 et 21 septembre 2013, entre [...] et Clarens, il a, à chaque fois, pris le même bus que B.W._ et son ami, et s'asseyait systématiquement en face d'eux, en les regardant avec insistance.
2.16
Le 25 septembre 2013, à [...] alors que B.W._ et son ami attendaient le bus à l'arrêt [...] le prévenu est passé à côté d'eux et a craché à deux reprises à leurs pieds. Il est ensuite entré dans sa voiture et les a regardés fixement durant une vingtaine de minutes, jusqu'à ce que leur bus arrive.
B.W._ a déposé plainte le 24 septembre 2012.
3.
Le 15 février 2013, à l'hôpital, au cours d'une altercation,A.W._ a pincé B.W._ au niveau du sein.
4.
Le 29 avril 2013, B.W._ a appelé A.W._ au moyen du téléphone portable de son fils, [...], et a laissé sur sa boîte vocale le message suivant
: "merda schifoso, je te jure que ça, tu n'as pas intérêt à te retrouver sur mon chemin, avec cette histoire, t'as pas intérêt, parce que je te démonte, tu peux te le garder comme témoin, ça (...) merda schifoso, vieni qua".
A.W._ a déposé plainte le 18 juillet 2013.
5.
A la suite du dépôt de la plainte du 24 septembre 2012, A.W._ a reçu une convocation par le Ministère public, l'informant d'une enquête ouverte contre lui pour "violences domestiques".
A.W._ a déposé plainte pour calomnie le 15 octobre 2012. | En droit :
1.
Interjeté dans les forme et délai légaux contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP; [Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007; RS 312.0]), l'appel de A.W._ et l'appel joint du Ministère public sont recevables.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables. Des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective. Une solution n'est pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution eût été possible (CAPE 19 décembre 2013/308 consid. 5b et les références citées).
2.2
L'appelant conteste avoir systématiquement suivi et cherché le contact avec son ex-épouse. Il allègue que certaines rencontres seraient dues au hasard ou voulues par la plaignante. Il se décrit comme une victime que son ex-épouse aurait fait passer pour le
"grand méchant loup"
, raison pour laquelle ses enfants ne voudraient plus le voir (P. 34, p. 2). Il ne se serait approché de la plaignante que pour voir ses enfants. Il aurait aussi répondu aux insultes et aux provocations de cette dernière. Il n'aurait jamais fait pression sur elle. Il ne l'aurait approchée qu'à une vingtaine de reprises en trois ans et pas davantage, sans quoi il aurait perdu son travail. A ce sujet, les témoignages seraient emprunts de partialité et l’acte d'accusation peu précis.
2.3
Ces arguments ne résistent pas à l’analyse. L'appelant pouvait, en tant que représentant en produits alimentaires, travailler avec son Natel et donc suivre son épouse sans risquer de perdre son emploi. En outre, contrairement à ce qu’il soutient, les rencontres n'étaient pas dues au hasard, car, plusieurs fois par semaine durant 3 ans, il se rendait sur les lieux son ex-épouse fréquentait. Les dires des témoins corroborant les plaintes de B.W._ ont été confirmés par les déclarations des enfants du couple, E.W._ (PV aud. 6 du 27 février 2013, p. 2) et D.W._ (PV aud. 7 du 1
er
mars 2013). Même à supposer que l’une des rencontres ou l’autre ait été fortuite, ce qui importe c’est que l’essentiel n’était pas dû au hasard.
3.
Les éléments qui précèdent amènent la cour de céans à être convaincue de la réalité des faits reprochés à A.W._ et à tenir pour avéré qu’entre le mois de septembre 2010 et le mois de septembre 2013 à tout le moins, le prévenu s’est rendu plusieurs fois par semaine au domicile, aux lieux de travail et de sortie de la plaignante pour la harceler.
4.
L'appelant se plaint d'une violation de l'art. 181 CP. A ses yeux, B.W._ n'aurait pas été entravée dans sa liberté d'action par son comportement et n'aurait pas été "obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte". En outre, la plaignante n'aurait jamais indiqué qu'elle avait changé ses habitudes et la condition subjective de l'infraction ─ l’intention ─ ne serait pas remplie puisqu’il voulait seulement parler des enfants.
4.1
Se rend coupable de contrainte au sens de l'art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte.
La menace est un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l'auteur, sans toutefois qu'il soit nécessaire que cette dépendance soit effective (ATF 117 IV 445 consid. 2b; 106 IV 125 consid. 2a) ni que l'auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (ATF 105 IV 120 consid. 2a).
Il peut également y avoir contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime "de quelque autre manière" dans sa liberté d'action; cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive; n'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas; il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action; il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 119 IV 301 consid. 2a et les références).
Selon la jurisprudence, la contrainte n'est contraire au droit que si elle est illicite (ATF 120 IV 17 consid. 2a p. 19 et les arrêts cités), soit parce que le moyen utilisé ou le but poursuivi est illicite, soit parce que le moyen est disproportionné pour atteindre le but visé, soit encore parce qu'un moyen conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue, au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux moeurs (ATF 137 IV 326 consid. 3. 3. 1 p. 328; 134 IV 216 consid. 4.1 p. 218; 120 IV 17 consid. 2a/bb p. 20).
Sur le plan subjectif, il faut que l'auteur ait agi intentionnellement, c'est-à-dire qu'il ait voulu contraindre la victime à adopter le comportement visé en étant conscient de l'illicéité de son comportement; le dol éventuel suffit (ATF 120 IV 17 consid. 2c p. 22).
4.2
En l’espèce, le prévenu, à plusieurs reprises, a bloqué le véhicule de la plaignante avec le sien, l'empêchant de partir (cf. supra, chiffres. 2.2 et 2.8). A d'autres occasions, il a imposé sa présence non désirée et fait du scandale, ce qui a obligé la plaignante à se rendre au poste de police ou à appeler les forces de l'ordre (cf. supra, chiffres 2.2, 2.3 et 2.8). A une autre occasion, la plaignante a dû se réfugier dans un café (cf. supra, chiffre 2.4). De plus pour tenter d'échapper à son ex-époux B.W._ a changé son numéro de téléphone ; elle se cachait ou se voyait contrainte de quitter les établissements publics où elle cherchait à se détendre avec des amis (PV aud. 5 du 22 janvier 2013) ; témoignage de[...]). Tout cela en vain. A bout de nerfs, la plaignante n'osait plus sortir (PV aud. 4 du 22 janvier 2013 ; témoignage Mme [...]) et lors de sa dernière audition, (PV aud. 9 du 26 septembre 2013), son inquiétude n’était toujours pas dissipée. Elle avait alors refait sa vie et craignait que son ex-époux ne se donne à nouveau en spectacle devant la fille de son ami intime. Globalement, le prévenu a imposé physiquement sa présence et la plaignante n'a pas eu d'autre choix que de la subir. Les conditions objectives de la contrainte sont bien réunies.
Il résulte en outre des faits qu'à de nombreuses reprises, le prévenu s'est assis dans le bus et s'est contenté de regarder la plaignante et son ami avec insistance (cf. supra chiffres 2.15 et 2.16). Souvent aussi il l'a suivie en voiture et n'a rien fait d'autre que l'observer longuement (par exemple, supra, chiffres 2.10. à
2.16). A.W._ ne saurait donc sérieusement soutenir qu’il voulait lui parler. En tout état de cause, s’il y a eu ici ou là une tentative de discussion, cela ne n’exclut pas la contrainte dans les autres situations. L’élément subjectif est donc également réalisé.
4.3
En définitive, l’attitude de A.W._ tombe bien sous le coup de
l’art. 181 CP.
5.
L’appelant conteste la peine.
5.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 p. 19 s.; 129 IV 6 consid. 6.1 p. 20).
Le droit au sursis s'examine selon les critères posés à l'art. 42 CP qui ont été rappelés dans l'arrêt publié aux ATF 135 IV 180 consid. 2.1. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 5 consid. 4.2.2).
D'après l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.
5.2.1
Invoquant une violation de l'art. 47 CP, l’appelant conteste en premier lieu la quotité de la peine pécuniaire parce qu'il estime devoir être libéré de l'accusation de contrainte. Cette condamnation étant justifiée, ce grief devient sans objet.
5.2.2
A.W._ soutient qu'il n'a agi qu'à une vingtaine de reprises en trois ans. Il se réfère aux épisodes décrits plus précisément dans l’acte d’accusation et repris ci-dessus (cf. supra, chiffres 2.1 à 2.16). Cependant, le comportement punissable dépasse ces cas isolés. Il faut, en effet, se référer au préambule décrit ci-dessus (cf. supra, chiffre 2), dont il résulte que le prévenu suivait son épouse plusieurs fois par semaine et l'importunait en outre avec des appels et SMS. C'est bien ainsi que l'a compris le premier juge qui relève que les rencontres prétendument fortuites
"se comptent par dizaines sur plus de trois ans"
(jugement p. 17), et cela n’est pas critiquable.
5.2.3
L'appelant sollicite une fois de plus les faits lorsqu'il fait valoir qu'il voulait seulement parler à sa femme et que s'il l'a injuriée, c'était
"certainement"
dû à des provocations de la part de celle-ci. Or cela n'est pas établi.
5.2.4
L'appelant conteste l'appréciation du premier juge selon laquelle il aurait fait de la vie de sa femme un enfer. Il soutient que cela ne ressort pas des auditions de la plaignante ou de l'acte d'accusation.
Cet argument ne tient pas. Il s'agit d'une opinion du premier juge, qui considère ─ non sans raison ─ qu'être harcelé quasi quotidiennement durant trois ans est forcément infernal, sans qu'il soit besoin que cette précision ressorte des plaintes, encore moins de l'acte d'accusation. D'ailleurs, le fait que B.W._ ait fait appel aux forces de l'ordre et déposé plainte signifie bien qu'elle n'appréciait pas les attentions de son ex-mari.
5.2.5
L'appelant fait valoir que les faits les plus récents remontent à deux ans, qu’il a refait sa vie, et qu'il tente de rétablir une relation normale avec ses enfants. Ce délai d’amendement plus court que la période d’activité délictueuse ne saurait justifier une réduction de la quotité de la peine de 120 jours-amende infligée de manière adéquate par le premier juge. Certes, le fait que prévenu soit enfin parvenu à tourner la page justifie l'octroi du sursis, mais la sanction doit avoir effet punitif et dissuasif pour le futur. En effet, si le comportement reproché correspond au caractère du prévenu, il pourrait récidiver à l’occasion d’une rupture sentimentale.
6.
L'appelant demande que le jour-amende soit fixé à 30 francs. Il ne motive pas du tout ce point de l'appel.
6.1
Aux termes de l’art. 34 CP, sauf disposition contraire de la loi, la peine pécuniaire ne peut excéder 360 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l’auteur (al.1). Le jour-amende est de 3000 francs au plus. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l’auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d’assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).
Par revenu, il faut entendre le salaire mensuel net (Message 1998, p. 1825) au moment du jugement entrepris. Au chapitre des déductions, les frais hypothécaires, les dettes privées et les frais de logement ne sont en principe pas pris en compte (TF du 18 mars 2008 6B_366/2007, consid. 6.4).
6.2
Le prévenu gagne 5'500 fr. net. Il devait payer 700 fr. par enfant mineur. Au moment du jugement, il n’en subsiste qu’un seul. Il ne payait jusqu'à l'audience de première instance pas sa prime d'assurance-maladie. Il n'a pas de fortune mais des dettes. En l'état du dossier, le montant de 60 fr. est correct et peut être confirmé.
7.
L'appelant demande aussi une réduction de l'amende en raison de sa situation financière et du fait que certaines des contraventions qui lui sont reprochées
"datent de plus de quatre ans".
7.1
D'après l'art. 42 al. 4 CP, le juge peut prononcer, en plus d'une
peine assortie du sursis, une peine pécuniaire sans sursis ou une amende selon
l'art. 106 CP. L'art. 106 al. 1 CP dispose que sauf disposition contraire de la loi le montant maximum de l'amende est de 10'000 francs.
7.2
En l'espèce, il ressort du jugement que l'amende n'a pas été prononcée que pour punir les contraventions, mais aussi à titre de sanction immédiate pour les délits.
S'agissant des contraventions, le premier juge a retenu, à juste titre, que les faits de décembre 2011 étaient prescrits. Le premier épisode daté qui est puni est donc celui du 21 août 2012 (cf. supra chiffre 2.4).
Le prévenu, qui gagne 5'500 fr. net par mois, a violé moult fois l'interdiction de périmètre entre août 2012 et septembre 2013. L'amende de 1'200 fr. ─ qui, on le rappelle, sanctionne aussi les délits ─ n'est donc pas excessive.
8.
Le prévenu estime qu'il ne doit pas supporter l'entier des frais de première instance parce qu'il est libéré de certaines infractions (voies de faits qualifiées; chiffre I du dispositif). Il demande aussi qu'une partie des frais soit mise à la charge deB.W._, reconnue coupable d’injure.
8.1
D'après l'art. 426 al. 1 CPP, le prévenu supporte les frais de procédure s’il est condamné. Font exception les frais afférents à la défense d’office; l’art. 135, al. 4, est réservé. L’alinéa deux prévoit que lorsque la procédure fait l’objet d’une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s’il a, de manière illicite et fautive, provoqué l’ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.
Selon l’art. 427 al. 2 CPP, en cas d’infractions poursuivies sur plainte, les frais de procédure peuvent être mis à la charge de la partie plaignante ou du plaignant qui, ayant agi de manière téméraire ou par négligence grave, a entravé le bon déroulement de la procédure ou rendu celle-ci plus difficile lorsque la procédure est classée ou le prévenu acquitté (let. a), ou lorsque que le prévenu n’est pas astreint au paiement des frais conformément à l’art. 426 al. 2 (let. b).
La règle de l’art. 427 al. 2 CPP a un caractère dispositif; le juge peut donc s’en écarter si la situation le justifie. La loi est muette sur les motifs pour lesquels les frais sont ou non mis à la charge de la partie plaignante. Le juge doit statuer selon les règles du droit et de l’équité (art. 4 CC; ATF 138 IV 248 consid. 4.2.4). A cet égard, il dispose d’un large pouvoir d’appréciation.
8.2
II faut d'abord constater que seuls les frais de procédure au sens strict et l'indemnité de son défenseur ont été mis à la charge de l'appelant. L'indemnité due au défendeur de B.W._ n'a pas été mise à sa charge, ni d'ailleurs à celle de l'intéressée, formellement, bien que le dispositif prévoie son remboursement à l’Etat. Les deux ex-époux sont à la fois prévenus et plaignants, mais n'ont pris aucune conclusion civile l'un contre l'autre (jugement p. 9). L'appelant n'est pas libéré de l'accusation de contrainte, contrairement à ce qu'il espérait. Il a été libéré de l'accusation de voies de fait qualifiées parce qu'il n'est pas établi qu'il a agi a réitérées reprises et qu'il n'y a pas de plainte dans les trois mois qui suivent l'épisode isolé décrit dans l'acte d'accusation. Il a été libéré de certains faits d'injure également en raison du défaut de plainte en temps utile, et de certains faits d'insoumission à une décision de l'autorité en raison de la prescription. Il est néanmoins établi qu'il a eu des comportements civilement illicites vis-à-vis de la plaignante, qui justifiaient une enquête. C'est donc dans le respect des règles procédurales en vigueur que les frais ont été mis à la charge de l'appelant et non de l'intimée qui n'a pas la maîtrise de la procédure pénale pour les infractions, poursuivies d'office, de voies de fait qualifiées et d'insoumission a une décision de l'autorité. De même, on ne saurait reprocher à B.W._ l'ouverture d'une enquête pour des injures dont elle ne s'est pas plainte.
Comme prévenue,B.W._ est libérée de l'accusation de menaces parce que son mari n'a pas été effrayé par le message litigieux (cf. supra, chiffre 3). Elle est reconnue coupable d'injure (pour le même message) mais exemptée de toute peine parce qu'elle a agi en réaction au harcèlement de son mari. En d'autres termes, là encore, c'est A.W._ qui est responsable de la situation. S'il est cohérent de ne pas mettre les frais y relatifs à la charge de B.W._, on ne peut pas pour autant les mettre à la charge du prévenu qui n'a pas entravé le déroulement de la procédure. Il reste l'accusation de dénonciation calomnieuse, pour avoir dénoncé à tort des violences domestiques. Le premier juge a libéré B.W._ en considérant, de façon correcte, que sa plainte ne portait pas sur des violences domestiques mais a été mal interprétée ou qualifiée. Il s'agit d'une infraction poursuivie d'office, qualification choisie au stade du renvoi en jugement par le Procureur. A.W._ avait déposé plainte pour "calomnie". Cette plainte était mal fondée mais on ne peut pas considérer qu'elle était téméraire dans les circonstances particulières du cas d'espèce. Il se justifierait que les frais y relatifs soient laissés à la charge de l’Etat. Il est donc correct que les frais de défense de l'intimée soient laissés à la charge de l'Etat ; si c'est déjà le cas, ce n'est pas dit clairement dans le dispositif, qu’il convient de rectifier en précisant dans ce sens le chiffre XI et en supprimant le chiffre XIII.
D'un point de vue des frais d'enquête (hors indemnités d'avocat), de 3'525 fr., il n’est pas possible, dans le dossier global, de déterminer précisément ce que représentent les accusations portées contre l'épouse. L'enquête et l'audience devaient de toute façon porter sur les relations des conjoints et leurs errements possibles. Il n’y a donc pas lieu de laisser une partie des frais d’enquête à la charge de l’Etat.
9.
Le Ministère public a déposé un appel joint pour demander que la peine pécuniaire passe de 120 à 150 jours. Il relève, à l’appui de sa demande, que le prévenu est dans le déni et a récidivé en cours d'enquête, soit jusqu'en 2014, voire 2015, selon les déclarations de la plaignante. Or les faits de 2014 et 2015 n'ont pas été instruits. Quant au déni, il justifie l’amende infligée à titre de sanction immédiate et non pas une aggravation de la peine en quotité. Pour le surplus, on peut se référer aux motifs développés au considérant 5 ci-dessus.
10.
En définitive, l'appel de A.W._ et l'appel joint du Ministère public doivent être rejetés. Le jugement entrepris doit donc être confirmé et rectifié d'office dans le sens des considérants.
11
. Il reste à fixer les frais et les indemnités.
11.1
D'après la jurisprudence, le tarif horaire de l'avocat d'office est de
180 fr. pour l'avocat breveté et de 110 fr. pour l'avocat-stagiaire, plus les débours et la TVA à 8 % (TF 6B_810/2010 du 25 mai 2011 consid. 2.4, et les références citées). Lorsque le juge statue sur la base d'une liste de frais dont il entend s'écarter, il doit avoir au moins brièvement indiqué les raisons pour lesquelles il tient certaines prétentions pour injustifiées, afin que son destinataire puisse attaquer la décision en connaissance de cause (CAPE 12 août 2013/192 et réf.).
11.2
Me Michèle Meylan a produit une liste d'opérations faisant état de 1'713 fr. 40 d'honoraires et 171 fr. de frais. De cette liste, on retranchera 220 fr. pris en compte pour des opérations futures. Pour le reste, compte tenu de l'ampleur de l'affaire, de la connaissance du dossier acquise en première instance, et du fait qu'une bonne partie de la défense des intérêts de A.W._ a été confiée à un avocat-stagiaire lequel a également comparu devant la cour de céans,
une indemnité de défenseur d'office pour la procédure d'appel d'un montant de
1'802 fr. 70 sera allouée à Me Michèle Meylan, audience comprise. Ce montant tient compte de 13 h 35 de travail au tarif de l'avocat-stagiaire (110 fr.), de 15 minutes au tarif de l'avocat breveté (180 fr.), d'une vacation de stagiaire (80 fr.), de 50 fr. de débours et de 8 % de TVA.
11.3
Compte tenu de la connaissance du dossier acquise en première instance et du travail effectué pour la procédure d'appel, on allouera à Me Luc Del Rizzo l'indemnité de conseil d'office qu'il demande, soit montant de 1'414 fr. 80, audience incluse. Cela correspond à 6 h 20 d'honoraires à 180 fr. une vacation d'avocat breveté (120 fr.), 50 fr. de débours et 8 % de TVA.
11.4
Vu le sort des appels, les frais de seconde instance, par 6'007 fr. 50 , y compris les indemnités d'office, sont mis par quatre cinquièmes, soit 4'806 fr., à la charge de A.W._, le solde, par 1'201 fr. 50, étant laissé à la charge de l'Etat.
11.5
A.W._ ne sera tenu de rembourser à l'Etat les quatre cinquièmes des indemnités allouées ci-dessus lorsque sa situation financière le permettra. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c3cc0e11-6556-4829-b660-6e43ee12a3bf | En fait :
A.
Par jugement du 15 décembre 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a constaté que Z._ s'est rendu coupable de diffamation (I), condamné Z._ à la peine de trente jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 50 fr. (cinquante francs) (II), suspendu l'exécution de la peine et imparti au condamné un délai d'épreuve de deux ans (III), condamné Z._ à une amende de 750 fr. (sept cent cinquante francs) et dit qu'à défaut de paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution sera de quinze jours (IV), dit que Z._ est le débiteur d'X._ de la somme de 1'000 fr. (mille francs), avec intérêts à 5 % l'an dès le 1
er
avril 2010 au titre de réparation du tort moral (V), alloué à X._ un montant de 2'500 fr. (deux mille cinq cents francs) au titre de dépens pénaux (VI) et mis les frais de procédure, arrêtés à 1'800 fr. (mille huit cents francs), à la charge de Z._ (VII).
B.
Par actes des 23 décembre 2011 et 24 janvier 2012, Z._ a interjeté appel contre ce jugement, dont il a requis qu'il soit réformé en ce sens qu'il est libéré du chef d'inculpation de diffamation, les chiffres II à VII du dispositif étant, pour le surplus, annulés.
Interpellé, le Ministère public a renoncé à présenter une demande de non-entrée en matière ou de déclarer un appel-joint.
Le 6 mars 2012, les parties ont été informées de la composition de la cour et citées à comparaître.
Par pli du 12 mars 2012, le Ministère public a renoncé à comparaître à l'audience fixée, ainsi qu'à déposer des conclusions motivées.
Une audience s'est tenue le 25 avril 2012, au cours de laquelle l'appelant et la plaignante ont été entendus.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Z._ est né le 24 novembre 1975 en Italie. Au terme de sa scolarité secondaire effectuée au collège de la [...], il a débuté un apprentissage de boulanger-pâtissier, formation qu'il a abandonnée au bout d'un an et demi. A la date du jugement de première instance, il exerçait la profession de chauffeur pour le compte des [...] et réalisait un salaire mensuel net de 5'000 fr. A ce jour, Z._ est incapable de travailler en raison d'une dépression, et reçoit des indemnités journalières pour un total de 4'780 fr. nets par mois. Il paie un loyer mensuel
de 1'300 fr. et ses primes d'assurance-maladie s'élèvent à 375 fr. par mois. Il verse encore 650 fr. chaque mois au Bureau de recouvrement et d'avances des pensions alimentaires (BRAPA).
2.
Entre le 12 juillet 2010 et le 25 août 2010, Z._ a adressé plusieurs courriers aux services sociaux, dans lesquels il affirmait, en bref, que son ex-concubine, X._, profitait du système social. Il a notamment écrit que cette dernière travaillait au noir et qu'elle voulait se séparer de lui pour pouvoir bénéficier d'un appartement pris en charge par les services sociaux (P. 13, 29/2 et 29/3). Ces écrits de Z._ ont provoqué l’ouverture d’une enquête administrative à l’encontre d’X._ et la suspension momentanée des prestations. L’enquête n'a pas abouti à des éléments permettant de remettre en cause le droit au revenu d'insertion (RI) d'X._. Z._ a agi de la sorte après que sa compagne l’avait quitté, principalement pour dire du mal d'elle.
X._ a déposé plainte le 30 novembre 2010 et s'est constituée partie civile le 28 février 2011 en concluant à l'allocation d'un montant de 1'000 fr. plus intérêts dès le 1
er
avril 2010 pour tort moral.
Pour ces faits, Z._ a été reconnu coupable de diffamation au sens de l'art. 173 CP, et condamné (cf. supra, A). | En droit :
1.
1.1
Interjeté dans les formes et délais légaux (cf. art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable
.
1.2
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.
Invoquant une violation de l’art. 173 CP, l’appelant soutient avoir apporté les preuves libératoires de la vérité et de la bonne foi. Il nie avoir agi pour se venger de la plaignante et fait derechef valoir qu'X._ a quitté le domicile familial pour pouvoir bénéficier de prestations sociales plutôt que d'aller travailler. Il relève que la plaignante lui a encore proposé de venir vivre chez elle sans rien déclarer aux services sociaux, de manière à pouvoir conserver l'entier du revenu d'insertion (RI). Il soutient que sa démarche auprès des services sociaux, suite aux confidences faites par X._, avait pour seul but de dénoncer, par civisme, des abus.
2.1
L’art. 173 ch. 1 CP réprime le comportement de celui qui, en s’adressant à un tiers, aura accusé une personne, ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l’honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, ou aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon.
Ce comportement peut être réalisé sous n’importe quelle forme d’expression, notamment par l’écriture ou l’image (ATF 131 IV 160 c. 3.3 p. 163). Cette disposition protège la réputation d’être une personne honorable, c’est-à-dire de se comporter comme une personne digne a coutume de le faire selon les conceptions généralement reçues. L’honneur protégé par le droit pénal est conçu de façon générale comme un droit au respect qui est lésé par toute assertion propre à exposer la personne visée au mépris en sa qualité (ATF 132 IV 112 c. 2.1; 117 IV 27 c. 2c p. 28/29). Les art. 173 ss CP ne protègent que l’honneur personnel, la réputation et le sentiment d’être un homme honorable, de se comporter, en d’autres termes, comme un homme digne a coutume de le faire selon les idées généralement reçues. Echappent à ces dispositions les déclarations qui sont propres seulement à ternir de quelque autre manière la réputation dont jouit quelqu’un dans son entourage ou à ébranler sa confiance en lui-même : ainsi en va-t-il des critiques qui visent comme tel l’homme de métier, l’artiste ou le politicien (ATF 128 IV 53 c. la p. 58; 119 IV 44 c. 2a p. 47).
Lorsqu’on évoque la commission d’un crime ou d’un délit intentionnel, la jurisprudence admet qu’il y a atteinte à l’honneur (ATF 132 IV 112; 118 IV 248 c. 2b). lI n’est toutefois pas nécessaire que le comportement soit réprimé par la loi pénale, il suffit qu’il soit moralement réprouvé (ATF 117 IV 27 c. 2d p. 30).
Pour déterminer si une déclaration est attentatoire à l’honneur, il ne faut pas se fonder sur le sens que lui donne la personne visée, mais sur une interprétation objective selon le sens qu’un destinataire non prévenu doit, dans les circonstances données, lui attribuer (ATF 128 IV 53 c. la p. 58 et les arrêts cités). Pour que l’auteur se rende coupable de diffamation, l’atteinte à l’honneur doit être communiquée à un tiers et porter sur un fait (TF 6B_371/2011 du 15 août 2011 c. 5.1
in fine
).
2.1.1
L’art. 173 ch. 2 CP dispose que l’inculpé n’encourra aucune peine s’il prouve que les allégations qu’il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu’il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies.
Le juge examine d’office si ces conditions sont emplies (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3ème éd. 2010, n. 54 ad art. 173, p. 592). C'est toutefois à l’auteur du comportement attentatoire à l’honneur de décider s’il veut apporter des preuves libératoires. lI s’agit, en effet, d’une possibilité offerte à l’accusé (Corboz, op. cit., n. 51, ad art. 173, même page).
La preuve de la bonne foi est apportée lorsque l’auteur établit qu’il avait des raisons sérieuses de tenir de bonne foi ses allégations pour vraies. L’auteur est de bonne foi s’il a cru à la véracité de ce qu’il disait. La bonne foi ne suffit cependant pas, encore faut-il que l’auteur ait eu des raisons sérieuses de croire ce qu’il disait, il doit donc démontrer avoir accompli les actes qu’on pouvait attendre de lui, selon les circonstances et sa situation personnelle, pour contrôler la véracité de ses allégations et la considérer comme établie. Autrement dit, l’auteur doit prouver qu’il a cru à la véracité de ses allégations après avoir fait consciencieusement tout ce que l’on pouvait attendre de lui pour s’assurer de leur exactitude. Une prudence particulière doit être exigée de celui qui donne une large diffusion à ses allégations par la voie d’un média. L’auteur ne saurait se fier aveuglément aux déclarations d’un tiers. Pour déterminer si l’auteur avait des raisons sérieuses de tenir de bonne foi ses allégations pour vraies, il faut se fonder exclusivement sur les éléments dont il avait connaissance au moment où il a tenu les propos litigieux.
Il n’est pas question de prendre en compte des moyens de preuve découverts ou des faits survenus postérieurement. Il appartient à l’auteur d’établir les éléments dont il disposait à l’époque, ce qui relève du fait. Sur celle base, le juge doit déterminer si ces éléments étaient suffisants pour croire à la véracité des propos, ce qui relève du droit (ATF 124 IV 149 c. 3b p. 151 s. et les références citées).
La preuve de la vérité est apportée lorsque l’auteur de la diffamation établit que tous les éléments essentiels des allégations qu’il a articulées ou propagées sont vraies (ATF 102 IV 176 c. lb et les références citées). Il peut apporter même des éléments de preuve qui lui étaient inconnus au moment où il s’est exprimé, car la seule question pertinente est celle de la véracité du propos (ATF 124 IV 149 c. 3a p. 150; 122 IV 311 c. 2c p. 316 et 2e p. 318). La question de savoir ce qui est vrai relève du fait (TF 6S.451/2002 du 10 janvier 2003 c. 2.1).
2.1.2
Aux termes de l’art. 173 ch. 3 CP, l’inculpé ne sera pas admis à apporter ces preuves et sera punissable si ses allégations ont été articulées ou propagées sans égard à l’intérêt public ou sans autre motif suffisant, principalement dans le dessein de dire du mal d’autrui, notamment lorsqu’elles ont trait à la vie privée ou à la vie de famille.
L'admission à la preuve libératoire constitue la règle, de sorte que les conditions d'un refus sont interprétées plutôt restrictivement. La preuve libératoire ne peut être refusée que si l'auteur s'est exprimé sans motif suffisant (intérêt public ou privé) et s'il a agi principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui. Les deux conditions doivent être réalisées cumulativement pour refuser les preuves libératoires. Ainsi, l’accusé sera admis aux preuves libératoires s’il a agi pour un motif suffisant (et ce, même s’il a agi principalement pour dire du mal d’autrui) ou s’il n’a pas agi pour dire du mal d’autrui (et ce, même si sa déclaration n’est pas fondée sur un motif suffisant) (TF 6S.752/2000 du 6 décembre 2000 c. 2d, ainsi que la doctrine et le jurisprudence citées).
3.
3.1
En l’espèce, le contenu des courriers adressés par l’appelant aux services sociaux est attentatoire à l’honneur. En effet, dans ses diverses missives, Z._ a notamment mentionné qu’X._ travaillait au noir (chez [...]) et qu’elle s’était séparée de lui pour pouvoir bénéficier d’un appartement payé par les services sociaux. En outre, l’atteinte à l’honneur a porté sur des faits précis - le fait de profiter indûment des services étatiques - et a été portée à la connaissance de tiers, à savoir les services sociaux.
3.2
L’appelant a reconnu, dans le cadre de ses dépositions, qu’en agissant de la sorte, il avait voulu
"[...] rendre la monnaie de sa pièce à X._ [...]".
Devant l'autorité de céans, il soutient que, d’origine italienne, cette expression ne comporte à son sens aucune connotation vengeresse. Il ne saurait être suivi sur ce point. En effet, d’une part, l’appelant - qui a effectué sa scolarité [...] - est en Suisse depuis de nombreuses années et comprend, de ce fait, bien le français. D’autre part, ses déclarations en première instance sont claires; elles sont par ailleurs corroborées par les relevés de ses SMS, qui attestent d’un fort conflit conjugal entre les parties et de l’esprit vengeur de l’appelant (P. 23 p. 11ss) : ainsi l’appelant y emploie aussi l’expression
"[...] à la guerre comme à la guerre [...]"
ou encore lui explique
"[...] qu’il est en train de faire 1000 procédures à son encontre dans lesquelles elle devra s’expliquer, le social l’attendant de pied ferme [...]".
Dans ces conditions, on doit admettre, comme le premier juge (jugement p. 13), que l’appelant a uniquement agi pour dire du mal d’X._.
L’ensemble des allégations qui sont reprochées à l’appelant s'inscrit dans le cadre d’un profond litige conjugal. En effet, il résulte du relevé des SMS précité de l’appelant que celui-ci n’a pas supporté la séparation et ses conséquences - assumer seul le loyer de l'appartement du couple trop cher pour lui, devoir changer d'appartement (annexe 1 à la P. 29/4); ne plus voir régulièrement son enfant, devoir payer une pension alimentaire -, et qu’il en voulait à la plaignante. L’aspect privé de ce litige prédomine. Appréciés globalement, les faits déshonorants allégués par l’appelant visaient à atteindre la plaignante, afin que celle-ci ne puisse plus obtenir l’aide des services sociaux et soit éventuellement contrainte de revenir au domicile familial. Ses dénonciations ont précisément conduit le Centre social régional (CSR) d’Orbe à diligenter une enquête administrative contre X._ et à reporter le versement des indemnités qui lui étaient destinées. L’appelant n’a donc pas agi pour des motifs d’intérêt public, ni pour un autre motif suffisant. On ne saurait, par conséquent, en conclure qu’il avait une raison objectivement suffisante de s’exprimer comme il l’a fait.
Ainsi, l'intéressé a agi dans le dessein de dire du mal et sans motif suffisant. Le premier juge n’a donc pas violé le droit fédéral (art. 173 al. 3 CP) en ne l’autorisant pas à apporter les preuves libératoires de l’art. 173 ch. 2 CP.
3.3
Quand bien même l’appelant aurait été autorisé à apporter les preuves libératoires, il aurait échoué dans l’administration de celles-ci.
3.3.1
L’appelant n'a pas apporté la preuve de la vérité. Au cours de la procédure, il a fait assigner des témoins aux débats afin d'établir qu’effectivement son ex-compagne percevait des prestations alors même qu’elle travaillait au noir et qu’elle n’aurait cherché à se séparer de lui que dans l’unique but d’obtenir un appartement pris en charge par les services sociaux. Or les témoins entendus en première instance n'ont en aucune manière démontré que l’intimée travaillait au noir ou profitait des services sociaux. Au contraire, [...] a déclaré avoir accueilli la plaignante à plusieurs reprises durant sa grossesse alors qu’elle n’allait pas bien et subissait de nombreuses pressions de la part son conjoint. Il a ajouté qu’elle n’avait jamais travaillé chez lui contre rémunération (jugement, p. 5). De même, [...] assistant social rattaché au CSR d’Orbe, a déclaré que les revenus de la plaignante avaient été déclarés, que le travail au noir n’avait pu être prouvé, et que les conclusions de l'enquête étaient une
"[...]fraude non avérée [...]"
(jugement, p 6).
3.3.2
L’appelant a également échoué dans l’administration de la preuve de sa bonne foi. En effet, les éléments dont il s’est prévalu pour adresser ses différents courriers au CSR d’Orbe ne reposaient sur aucun fondement. Le prévenu n’a pas été à même d’établir les éléments dont il aurait éventuellement disposé à l’époque de sa dénonciation. Il n'a par ailleurs procédé à aucune vérification. Il lui aurait pourtant été facile de vérifier la véracité de ses assertions en interrogeant, par exemple, [...] au sujet des conditions dans lesquellesX._ aurait travaillé chez lui. Il aurait alors su que celle-ci n'était pas rémunérée. Dans ces conditions, les allégations de l'intéressé apparaissent comme étant le seul fruit de son imagination et de sa rancoeur envers la plaignante, ce que confirme le contenu de ses SMS (P. 23). On relèvera encore que le prévenu n'est pas crédible lorsqu'il affirme que ses dénonciations se fondent sur les dires de l’intimée, fait qu'il n'est d'ailleurs pas en mesure d'établir. Les déclarations X._ pouvaient, en revanche, être prises en considération, car elle a expliqué, de façon constante et convaincante, qu'elle avait quitté l'appartement du couple en raison des fortes pressions psychologiques subies. Ses propos concordent d'ailleurs avec les déclarations des témoins (jugement, pp. 5 et 9).
Pour ces motifs, c'est à bon droit que l'autorité de première instance a reconnu Z._ coupable de diffamation.
4.
4.1
Pour fixer la peine, on remarquera queZ._ s'est enferré dans un système de défense parfaitement maladroit et n'a manifestement pas voulu saisir la gravité de ses actes. Il n'a pas hésité à prétendre n'avoir fait que son devoir civique et à réitérer ses accusations contre son ex-compagne. Sa culpabilité n'est donc pas négligeable. Par ailleurs, il peine à prendre conscience du sérieux de la situation, ce qui justifie le prononcé d'une amende. Au regard de l'ensemble des éléments à prendre en considération -étant encore relevé que l'absence d'antécédent constitue un élément neutre et non pas un élément à décharge- la peine de 30 jours-amende combinée à une amende de 750 fr. ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmée.
Quant à la quotité du jour-amende, elle ne saurait être revue en défaveur de l'appelant (art. 404 al. 1 et 2 CPP). Fixée à 50 fr. le jour, elle est toutefois faible si l'on tient compte du salaire net de Z._ au moment du jugement (5'000 fr. nets par mois et 4'870 fr. depuis le début de son incapacité de travail), et de ses charges déterminantes (TF 6B_366/2007 du 17 mars
2008, c. 6.4, à savoir 2'225 fr. [1'200 fr. de minimum vital + 650 fr. au BRAPA
+ 375 fr. d'assurance-maladie]), ce qui lui laisse un disponible mensuel
de 2'645 fr., soit 88 fr. par jour.
4.2
Au regard de l'absence d'antécédent, la peine infligée peut être suspendue
,
faute de pronostic défavorable. Compte tenu du comportement de l'intéressé tout au long de la procédure, une amende doit être infligée à l'appelant pour le dissuader clairement et définitivement de commettre de nouvelles infractions et d'ancrer en lui la conscience de la faute commise.
4.3
Pour le surplus, un montant doit être alloué à X._ pour son tort moral (art. 49 al.1 CO), dès lors qu'elle a souffert psychiquement des agissements du prévenu qui n'a pas cessé de la harceler via les service sociaux. Le montant de cette indemnité est modique (1'000 fr. avec intérêts à 5 % dès le 1
er
avril 2010). Il correspond toutefois à ce qu'avait requis X._ le 28 février 2011. Sa fixation ne procède pas d'un abus ou d'un excès du très large pouvoir d'appréciation dont dispose le juge en la matière (ATF 129 IV 22 c. 7.2 p. 36/37).
5.
Vu ce qui précède, le jugement entrepris est en tous points conforme au droit. Il doit être confirmé, ce qui entraîne le rejet de l'appel interjeté aux frais de son auteur.
La plaignante, qui obtient gain de cause, a droit à des dépens pénaux qu'il convient de fixer à 1'000 fr., celle-ci ayant requis un montant de 3'500 fr. pour les procédures de première et seconde instance. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c491df24-abb3-4f45-9241-874320129ade | En fait :
A.
Par jugement du 7 février 2012, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a constaté que X._ s'est rendu coupable de brigandage, d'injure, de violation simple des règles de la circulation, de vol d'usage, de conduite sans permis de conduire et de contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants (I), l'a condamné à 30 (trente) mois de peine privative de liberté, sous déduction de 256 (deux cent cinquante-six) jours de détention avant jugement, peine complémentaire à celle ordonnée par le Ministère public de Neuchâtel selon ordonnance pénale du 19 décembre 2011 (II), ordonné que X._ soit soumis à une mesure de placement dans un établissement pour jeunes adultes (III), ordonné le traitement psychiatrique et psychothérapeutique ambulatoire de X._ (IV), ordonné le maintien en détention du condamné pour des motifs de sûreté (V), ordonné la confiscation et la destruction des objets séquestrés sous fiche n° 413, soit un sachet minigrip contenant du cannabis et deux cubes de pollen de cannabis (VI), mis les frais, par 18'891 fr. 95 à la charge de X._, étant précisé que ce montant comprend l'indemnité allouée à son défenseur d'office, l'avocat Fabien Mingard, par 7'316 fr. 90, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (VII) et dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité allouée au chiffre VII ci-dessus à son défenseur d'office ne sera exigible de X._ que pour autant que sa situation se soit améliorée (VIII).
B.
Le 10 février 2012, X._ a formé appel contre cette décision. Dans sa déclaration d'appel motivée du 5 mars 2012, il conclut à la réforme du jugement en ce sens qu'il est libéré des chefs d'accusation de brigandage et d'injures et qu'il est condamné à une peine privative de liberté inférieure à trente mois. Il requiert également la suppression du chiffre III du dispositif s'agissant de son placement dans un établissement pour jeunes adultes et la réduction du montant des frais de première instance mis à sa charge.
Le Ministère public n'a présenté ni demande de non-entrée en matière, ni appel joint. Il a conclu au rejet de l'appel.
Les plaignants A.U._, B.U._, N._ et E._ n'ont pas présenté de demande de non-entrée en matière, ni d'appel joint. Ils ont renoncé à se déterminer sur l'appel du prévenu.
Aux débats d'appel du 1
er
mai 2012, B.U._ et A.U._ ont retiré leur plainte et n'ont présenté aucune conclusion civile à l'encontre du prévenu.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
X._ est né le 24 février 1990 à Kinshasa au Congo, pays dont il possède la nationalité. Peu après le divorce de ses parents, sa mère a émigré en Suisse pour y refaire sa vie. Il a été élevé avec un frère et une sœur par ses grands-parents maternels. Traumatisé par la violence d'un père alcoolique, qui aurait battu à mort son grand frère devant ses yeux, alors qu'il était âgé de six ou sept ans, et par l'état de guerre qui régnait dans son pays, le prévenu a présenté d’importants retards du développement. A son arrivée en Suisse avec sa sœur, en 2002, X._ était analphabète et souffrait d’importantes difficultés relationnelles avec les autres enfants. Malgré un entourage aimant et une famille élargie par l’arrivée de deux enfants en 2004 et en 2007 issus du nouveau mariage de sa mère, X._ n’a pas réussi à trouver un équilibre et a rapidement plongé dans la délinquance. Sa mère et son beau-père ont recouru au service psychiatrique pour soutenir son évolution. Il a ainsi été placé à la Fondation de Verdeil en 2005. En juillet 2006, il a été hospitalisé au Centre de psychiatrie du Nord vaudois en raison d’une intoxication à l’alcool et d’un trouble du comportement. Par la suite, il a été placé successivement dans divers foyers et a subi des périodes de détention à Valmont. Il a également effectué des stages à l’AFIRO, au Repuis et à Oli-One, sans succès, en raison
d’un manque de motivation, d’absentéisme et de troubles du comportement. Le
22 juillet 2008, le Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent a demandé et obtenu sa mise sous tutelle depuis juillet 2009.
X._ bénéficie d’une rente extraordinaire mensuelle de 1'520 fr. versé par l'assurance-invalidité. Celle-ci a toutefois été suspendue pendant son incarcération. Alors que sa mère, sa sœur et le nouveau mari de sa mère ont obtenu un permis B, il est toujours au bénéfice d’un permis F.
Depuis le 16 décembre 2008, il est le père d’une petite fille, [...]. Il ne vit pas avec la mère et n'a pas reconnu l’enfant. La relation est conflictuelle.
Le casier judiciaire de X._ mentionne les condamnations suivantes :
- 28 mai 2008, Tribunal des mineurs Lausanne, 3 jours de privation de liberté, pour brigandage, utilisation d’un cycle ou cyclomoteur sans droit, circulation sans permis de conduire et contravention à l’ordonnance sur les règles de la circulation routière ;
- 1
er
avril 2010, Tribunal correctionnel de la Broye et du Nord vaudois, peine privative de liberté de 24 mois, amende de 100 francs et mesure institutionnelle pour jeunes adultes, sous déduction de 384 jours de détention préventive, peine partiellement complémentaire au jugement du 28 mai 2008 mentionné ci-dessus, pour voies de fait, vol, infraction d’importance mineure (vol), brigandage, dommages à la propriété, injure, menaces, contrainte, violation de domicile, faux dans les certificats, circulation sans permis de conduire et délit contre la Loi fédérale sur les stupéfiants.
Le fichier ADMAS du prévenu et les décisions produites par le service des automobiles et de la navigation font état des mesures suivantes :
- 5 octobre 2007, refus de délivrance d’un permis d’élève ou de conduire durant 12 mois à compter de l’âge minimum requis, soit dès le
21 février 2008, pour avoir conduit un véhicule automobile sans être titulaire d’un permis de conduire, vol d’usage et marche arrière, avec accident ;
- 22 août 2008, refus de délivrance d’un permis d’élève ou de conduire durant 12 mois à compter du 19 juin 2008, étant précisé qu’en cas de demande une expertise psychologique auprès de l’Unité de médecine du trafic sera mise en œuvre, pour avoir conduit un véhicule automobile sans être titulaire d’un permis de conduire et vol d’usage ;
- 31 mars 2009, refus de délivrance d’un permis d’élève ou de conduire durant 18 mois à compter du 16 décembre 2008, étant précisé qu’en cas de demande une expertise psychologique auprès de l’Unité de médecine du trafic sera mise en œuvre, pour avoir conduit un véhicule automobile sans être titulaire d’un permis de conduire et vol d’usage ;
- 7 mars 2011, refus de délivrance d’un permis d’élève ou de conduire durant 24 mois à compter du 23 décembre 2010, étant précisé qu’en cas de demande une expertise psychologique auprès de l’Unité de médecine du trafic sera mise en œuvre, pour avoir conduit un véhicule automobile sans être titulaire d’un permis de conduire et vol d’usage. Cette décision précise que cette mesure a un caractère sécuritaire.
2.
Dans le cadre de l’affaire jugée par le Tribunal correctionnel du Nord vaudois le 1
er
avril 2010, une expertise psychiatrique avait été mise en œuvre. Dans leur rapport du 26 mai 2009, les experts avaient posé le diagnostic de trouble de la personnalité dyssocial et retard mental léger. Ils avaient estimé que la responsabilité de X._ était diminuée de manière légère à moyenne et que le risque de récidive était élevé en raison de l’impulsivité et de la faible tolérance à la frustration du prévenu. Les experts avaient insisté sur la nécessité d'un placement dans un établissement pour jeunes adultes, estimant qu’il s’agissait de la mesure la plus indiquée pour permettre au prévenu d'accomplir un projet de réinsertion socioprofessionnelle et pour garantir sa réintégration sociale. Fondé sur les conclusions de cette expertise, le Tribunal correctionnel de la Broye et du Nord vaudois a ordonné, dans son jugement du 1
er
avril 2010, le placement de X._.
Par décision du 9 juillet 2010, l’Office d’exécution des peines (OEP) a ordonné le placement de X._ à la prison du Bois-Mermet avec effet rétroactif au 1
er
avril 2010, puis au Centre éducatif de Pramont « dès que son admission sera réalisable ».
Saisi d’une proposition de l'OEP datée du 23 août 2010, tendant à la levée de la mesure thérapeutique institutionnelle prononcée le 1
er
avril 2010 en faveur de X._, le Juge d'application des peines a relevé le manque chronique de places dans les établissements spécialisés dans la prise en charge des jeunes adultes dans le canton de Vaud. Tenant compte de l'opposition constante démontrée par X._ quant à son intégration au Centre éducatif de Pramont, qu'il percevait comme une contrainte, ce magistrat a estimé que les perspectives de réussite d'un tel placement étaient quasi inexistantes. Le 22 novembre 2010, il a décidé de lever la mesure institutionnelle pour jeunes adultes et a ordonné l’exécution par X._ du solde de la peine privative de liberté suspendue. Il a retenu qu’on pouvait espérer que le prévenu arriverait à se soumettre au cadre qui lui serait imposé et que la perspective de devoir purger le solde de sa peine aurait un effet dissuasif, dans la mesure où X._ était bien entouré par sa famille et sa tutrice et qu'il disposait d’un projet professionnel adapté, puisqu’il avait réussi à décrocher une place dans l’atelier protégé de POLYVAL. Le Juge d'application des peines a dès lors accordé à X._ la libération conditionnelle, avec délai d’épreuve d’un an. Il a au surplus assorti la libération conditionnelle d’une assistance de probation.
Par ordonnance pénale du 19 décembre 2011, entrée en force le
10 janvier 2012, le Ministère public du canton de Neuchâtel a condamné X._ à 20 jours de peine privative de liberté ferme pour un vol commis
le 13 février 2011, ainsi qu’à une amende de 400 fr. pour avoir créé du scandale et perturbé le contrôle de la police, n’obtempérant pas aux divers ordres de la police, à cette même date. Dans cette ordonnance, le Ministère public de Neuchâtel a également révoqué la libération conditionnelle accordée le 22 novembre 2010 et ordonné la mise à exécution du reste de la peine restante de 3 mois et 20 jours. Fondé sur cette ordonnance, l'OEP a fait exécuter cette peine par le prévenu sous son autorité.
3.
Pour les besoins de la présente affaire, X._ est détenu avant jugement à La Croisée depuis le 28 mai 2011. Il a vécu difficilement cette incarcération; c'est ainsi qu'il a tenté de se suicider et qu'il a eu deux altercations avec d'autres détenus. Il a été sanctionné pour ces deux incidents, respectivement par un avertissement du Directeur de la prison donné le 16 novembre 2011 pour atteinte à l’intégrité physique et par le prononcé de deux jours d’arrêt avec sursis pendant trois mois le 5 janvier 2012 pour atteinte à la liberté.
Depuis sa nouvelle incarcération, X._ est suivi par le Professeur R._ à raison d'une fois par mois. Aux débats de première instance, il a exprimé son désir d’acquérir une formation de cuisinier et de se faire enfin une place dans la vie, insistant sur son espoir qu’on lui donne une dernière chance. S'agissant de son placement au Centre éducatif de Pramont, il a manifesté son refus, qu'il a réitéré aux débats d'appel, préférant purger sa peine en prison, poursuivre un traitement psychiatrique et psychothérapeutique de manière ambulatoire avec le Professeur R._ et faire ensuite une formation dans le cadre du Repuis malgré un précédent échec.
Dans un rapport du 9 janvier 2012, le Professeur R._ a relevé qu'il a suivi le prévenu très régulièrement pendant ses deux longues périodes de détention préventive à la prison du Bois-Mermet en 2009 et jusqu’en novembre 2010 et que ce dernier n’avait jamais donné suite à la démarche qui avait été prévue, soit un suivi sur le plan psychiatrique par l’Unité de psychiatrie ambulatoire d’Yverdon-les-Bains. Ce n'est donc qu'après sa nouvelle incarcération à la prison de La Croisée que X._ a bénéficié d'un suivi régulier avec lui, selon un rythme mensuel, l'objectif de ce suivi thérapeutique étant essentiellement d'apporter au prévenu un soutien pour l’aider à gérer, autant que faire ce peut, ses difficultés comportementales et l’incarcération à laquelle il doit faire face.
4.
Dans le cadre de la présente enquête, X._ a été soumis à une nouvelle expertise psychiatrique confiée au Département de psychiatrie du Nord vaudois. Le Dr [...], médecin adjoint qui avait déjà rencontré le prévenu pour établir dans le passé l’expertise du 27 mai 2009, a déposé un nouveau rapport le
10 août 2011. Ce spécialiste a estimé que le diagnostic de trouble de la personnalité dyssocial et de retard mental léger pouvait être confirmé et devait être considéré comme grave dans la mesure où il influence massivement le comportement de l’expertisé, qui a tendance à réagir de manière impulsive et violente quand il est face à des conflits émotionnels. Il a estimé que ce diagnostic devait être complété par celui de dépendance à l’alcool. Il a relevé que la fragilité du prévenu était perceptible et qu’il semblait sincère dans ses regrets et dans son désir de changer mais qu'il n’avait pas la maturité pour entretenir une relation affective stable et responsable avec la mère de sa fille, quand bien même il disait souhaiter avoir une famille « normale ». L’expert a estimé que l’association du grave trouble de la personnalité dont souffre X._, avec un déficit intellectuel et l’effet de l’alcool et du cannabis était de nature à diminuer la capacité du prévenu de se déterminer par rapport au caractère illicite de l’acte, de manière légère à moyenne. S’agissant du risque de récidive, ce spécialiste a estimé qu’il était évident et important, l’impulsivité, la profonde fragilité psychologique, l’immaturité et la tendance au passage à l’acte violent étant autant de facteurs faisant craindre de nouvelles infractions de même nature.
L’expert a préconisé que X._ poursuive le traitement psychiatrique et psychothérapeutique déjà entrepris par le Professeur R._ depuis son incarcération, ainsi qu'un placement dans un centre éducatif pour jeunes adultes, ceci nonobstant le refus réitéré de l'intéressé s'agissant de cette mesure.
5.1
A Yverdon-les-bains, au chemin [...], entre le 23 et le
24 décembre 2010, X._ a dérobé le véhicule de son beau-père, K._, après avoir subtilisé ses clés. Le prévenu a conduit ledit véhicule alors qu'il n'était pas titulaire d'un permis de conduire. Entre Yvonand et Yverdon-les-Bains, le prévenu a circulé avec le véhicule de son beau-père à 100 km/h, au lieu de 80 Km/h, vitesse autorisée hors localités. Le 25 décembre 2010, K._ a retrouvé son véhicule en ville d'Yverdon-les-Bains alors que X._ était au volant de ce dernier. K._ a déposé plainte. Le prévenu a admis ces faits.
5.2
A Yverdon-les-Bains, chemin [...], le 28 mai 2011, vers 4h15, X._ s'est approché d'un groupe de jeunes qui se trouvaient sur le parking du badminton pour leur réclamer leurs effets personnels. X._ a empoigné E._ et N._ et leur a réclamé tout ce qu'ils avaient sur eux en les menaçant de mort. Il s'est ensuite emparé du natel de E._ dans sa poche. N._ a profité d'un moment d'inattention du prévenu pour lancer son porte-monnaie et son iPhone sous une voiture. Voyant qu'il ne se pliait pas à ses ordres, le prévenu, énervé, a insulté N._ en le traitant de "fils de pute" et de "merde", et lui a ensuite asséné une dizaine de gifles au visage.
A.U._ est ensuite arrivé sur les lieux en compagnie de sa sœur, C.U._, et de B._. Les deux jeunes filles, voyant la situation, ont pris la fuite. Le prévenu s'est alors adressé à A.U._ pour lui réclamer ses affaires. A ce moment, en vue de calmer le prévenu, N._ lui a remis un paquet de cigarettes, un sachet contenant 3 gr de cannabis et deux cubes de pollen de cannabis. Ceci n'a pas calmé la situation et X._ a asséné plusieurs gifles à A.U._. Voyant la situation dégénérer, B.U._ a remis au prévenu son porte-monnaie qui contenait 90 francs. Le prévenu lui a encore réclamé son natel et les clés de son véhicule. B.U._ a alors emmené le prévenu vers son véhicule, dans lequel se trouvait son amie, G._, pour lui donner les clés qui se trouvaient au contact. A ce moment, N._ a suggéré à B.U._ de remettre au prévenu son natel en enlevant sa carte SIM. X._, énervé, a asséné plusieurs claques à N._ et l'a menacé de mort en lui disant "si tu pars, je te crève". Le prévenu a ensuite demandé à toutes les personnes présentes de monter dans le coffre dudit véhicule pour les prendre en otage, ceci en les menaçant de leur couper la tête. Au moment d'ouvrir le coffre, E._ a asséné un coup de poing à X._ et a pris la fuite. A ce moment, le prévenu a menacé les personnes présentes en déclarant "s'il ne revient pas je vous tue, de toute façon je vous tuerai tous". Voyant la police arriver, X._ a restitué à B.U._ les clés de son véhicule avant de se faire interpeller par la police. Il a été soumis à un test éthylomètre révélant une alcoolémie de 1,06 gr o/oo à 4H35. Lors de sa fouille, deux natels, 90 fr., un sachet minigrip contenant de la marijuana et deux morceaux de cannabis ont été trouvés sur le prévenu.
Un rapport médical du 15 juin 2011 indique que N._ présentait une plaie palpébrale droite de 2 cm avec un hématome palpébral et périorbitaire, une dermabrasion pariétale et occipitale à droite et quelques dermabrasions des mains. La plaie pourrait entraîner une cicatrice au niveau palpébral droit. Un deuxième rapport médical du 15 juin 2011 indique que A.U._ se plaignait de douleurs à la palpation de la pommette gauche. X._ a admis les faits.
B.U._, A.U._, E._ et N._ ont déposé plainte.
5.3
Entre le mois d'octobre 2008 et le mois de mai 2011, les contraventions antérieures étant prescrites, X._ a consommé régulièrement du cannabis. Le prévenu a admis ces faits. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP). L'appel joint doit être interjeté dans un délai de vingt jours dès la réception de la déclaration d'appel (art. 400 al. 3 CPP).
Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l’annulation ou à la modification d’une décision a qualité pour recourir contre celle-ci (art. 382 al. 1 CPP).
Interjeté dans les forme et délai légaux par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de X._ suffisamment motivé au sens de l’art. 399 al. 3 et 4 CPP, est recevable. Il convient donc d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, op. cit., n. 19 ad art. 398 CPP).
3.
Dans un premier grief, l'appelant conteste que les conditions de l'infraction de brigandage soient réalisées. S'il a admis les faits survenus le
28 mai 2011, il estime que ces faits sont constitutifs d'une extorsion au sens de l'art. 156 CP, infraction pour laquelle il n'a pas été renvoyé.
3.1.1
Aux termes de l'art. 140 ch. 1 CP, celui qui aura commis un vol en usant de violence à l’égard d’une personne, en la menaçant d’un danger imminent pour la vie ou l’intégrité corporelle ou en la mettant hors d’état de résister sera puni d’une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d’une peine pécuniaire de
180 jours-amende au moins.
La doctrine précise les éléments constitutifs objectifs et subjectifs de cette infraction: d'un point de vue objectif, l'infraction doit porter, à l'instar du vol, sur une chose mobilière appartenant à autrui. Il doit en outre y avoir soustraction de cette chose sans le consentement de celui qui l'avait précédemment. L'auteur doit s'emparer de la chose qu'il vient de prendre - ou la conserver - par l'emploi d'un moyen de contrainte, en usant de violence, c'est-à-dire par toute action physique immédiate sur le corps de la personne qui doit défendre la possession de la chose. Au lieu de la violence, l'auteur peut employer la menace d'un danger imminent pour la vie ou l'intégrité corporelle, à l'exclusion d'autres biens juridiquement protégés, sans qu'il ne soit nécessaire que la victime ait été mise dans l'incapacité de se défendre. La menace doit cependant être sérieuse, même si la victime ne l'a pas crue. Elle peut intervenir par actes concluants, par exemple en exhibant une arme. D'un point de vue subjectif, l'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction, y compris ceux du vol. En outre, l'auteur doit avoir le dessein de s'approprier la chose en vue de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (Corboz, Les principales infractions, vol. I, Berne 2010,
n.1 à 12 ad art. 140 CP ainsi que la doctrine et la jurisprudence citées).
3.1.2
Se rend coupable d'extorsion, au sens de l’article 156 alinéa 1
er
CP, celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura déterminé une personne à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers, en usant de violence ou en la menaçant d’un dommage sérieux.
L'extorsion suppose que l'auteur soit dans l'incapacité de se passer du concours de sa victime pour réaliser son dessein. On cite volontiers l'exemple de l'auteur qui doit obtenir de sa victime qu'elle lui donne son code de carte bancaire ou qu'elle lui signe un chèque (Corboz, Les infractions en droit suisse, Vol. I, 3
e
éd, Berne 2010, n. 22 ad art. 140 CP et n. 30 ad art. 156 CP, ainsi que les références citées; Dupuis/Geller/Monnier/Moreillon/Piguet/Bettex/Stoll, Petit commentaire, Code pénal, Bâle 2012, n. 41 ad art. 140 CP).
3.2
Dans le cas d'espèce, l'appelant n'a pas contesté les faits survenus le 28 mai 2011 tels qu'ils ont été retenus par les premiers juges. Il a notamment admis s'être emparé du téléphone portable de E._ dans sa poche (jgt., p. 19), ce qui constitue un acte de soustraction avec violence et menace. Aux débats d'appel, A.U._ a confirmé les déclarations qu'il avait faites à la police, à savoir que l'appelant lui avait pris son natel de la poche de son pantalon (PV aud. 4). Les conditions du brigandage sont dès lors réalisées. Il est vrai que pour ce qui concerne les autres victimes, la dépossession s'est faite par la remise des valeurs de ces dernières à l'appelant. Contrairement à ce qu'il soutient, cela ne suffit toutefois pas à fonder le crime d'extorsion, visé à l'art. 156 CP. En effet, au regard de la jurisprudence et de la doctrine rappelées plus haut (consid. 3.1.2), l'état de fait du jugement de première instance ne permet pas de retenir une absence de soustraction. Ce moyen, mal fondé, doit être rejeté.
4.
Dans un second moyen, l'appelant relève que la victime des injures, à savoir N._, s'est désintéressée de cette affaire et des suites données à sa plainte. Il ne s'est ainsi présenté ni à son audition devant la Procureure ni aux débats de première instance. L'appelant estime qu'en application de l'art. 33 CP, ce comportement doit être considéré comme un retrait de plainte, entraînant sa libération du chef d'accusation d'injures.
4.1
Aux termes de l'art. 304 CPP, la plainte pénale doit être déposée auprès de la police, du ministère public ou de l’autorité pénale compétente en matière de contraventions, par écrit ou oralement; dans ce dernier cas, elle est consignée au procès-verbal (al. 1). Le fait de renoncer à porter plainte ou le retrait de la plainte pénale sont soumis aux mêmes exigences de forme (al. 2).
4.2
En l'occurrence, il ne s'agit pas d'examiner s'il y a eu violation de l'art. 33 CP comme le prétend l'appelant, mais s'il y a eu violation de l'art. 304 al. 2 CPP. Cette disposition impose un parallélisme des formes: il faut la forme écrite pour retirer la plainte si celle-ci a été déposée par écrit, comme c'est le cas ici. Or, l'appelant ne soutient pas que le plaignant N._ aurait retiré sa plainte. Par ailleurs, on ne se trouve pas dans un cas d'application de l'art. 316 al. 1 CPP qui s'applique à la procédure de conciliation. Par conséquent, ce moyen, mal fondé, doit être rejeté.
5.
X._ fait ensuite grief aux premiers juges de n'avoir pas suffisamment tenu compte du degré de diminution de sa responsabilité pénale, qualifiée de légère à moyenne par les experts.
5.1.1
L'art. 47 al. 1 CP prévoit que la peine doit être fixée d'après la culpabilité de l'auteur, en tenant compte des antécédents et de la situation personnelle de ce dernier ainsi que de l'effet de la peine sur son avenir. L'alinéa 2 de cette disposition énumère, de manière non limitative, une série de critères à prendre en considération pour déterminer la culpabilité de l'auteur. Ces critères correspondent à ceux établis par la jurisprudence relative à l'art. 63 aCP
(TF 6B_38/2011 du 26 avril 2011 c. 3.2; ATF 134 IV 17 c. 2.1 ; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
Pour fixer la peine, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Il y a toutefois violation du droit fédéral lorsque le juge sort du cadre légal, lorsqu'il fonde sa décision sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, lorsqu'il omet de prendre en considération des éléments prévus par cette disposition ou lorsqu'il a abusé de son pouvoir d'appréciation en fixant une peine exagérément sévère ou excessivement clémente (TF 6B_327/2011 du 7 juillet 2011 c. 2.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1).
Selon l'art. 50 CP, le juge doit motiver sa décision de manière suffisante. Sa motivation doit permettre de vérifier s'il a été tenu compte de tous les éléments pertinents et comment ils ont été appréciés (cf. ATF 134 IV 5 c. 4.2.1;
ATF 128 IV 193 c. 3a).
5.1.2
Aux termes de l'art. 19 al. 2 CP, le juge atténue la peine si, au moment d'agir, l'auteur ne possédait que partiellement la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d'après cette appréciation.
Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a jugé que la réduction purement mathématique d'une peine hypothétique, comme le permettait l'ancienne jurisprudence, était contraire au système, qu'elle restreignait de manière inadmissible le pouvoir d'appréciation du juge et conduisait à accorder un poids trop important à la diminution de la capacité cognitive ou volitive telle qu'elle a été constatée par l'expert (ATF 136 IV 55).
Dorénavant, pour fixer la peine en cas de diminution de la responsabilité pénale, le juge doit partir de la gravité objective de l'acte (objektive Tatschwere), et apprécier la faute subjective (subjektives Tatverschulden). Il doit mentionner, dans le jugement, les éléments qui augmentent ou diminuent la faute dans le cas concret et qui permettent d'apprécier la faute en relation avec l'acte. Le législateur mentionne plusieurs critères, qui jouent un rôle important pour apprécier la faute et peuvent même conduire à diminuer celle-ci de telle manière qu'il convient de prononcer une peine inférieure au cadre légal ordinaire de la peine. Parmi ceux-ci, figure notamment la diminution de la responsabilité au sens de l'art. 19 CP. Dans ce cas, contrairement à la lettre de la disposition et en modification de la jurisprudence en vigueur (ATF 134 IV 132 c. 6.1), le juge doit décider sur la base des constatations de fait de l'expertise dans quelle mesure la responsabilité pénale de l'auteur doit être restreinte sur le plan juridique et comment cette diminution de la responsabilité se répercute sur l'appréciation de la faute. La faute globale doit être qualifiée et désignée expressément dans le jugement (art. 50 CP). Dans un second temps, il convient de déterminer la peine hypothétique, qui correspond à cette faute. La peine ainsi fixée peut enfin être modifiée en raison de facteurs liés à l'auteur (Täterkomponente) ainsi qu'en raison d'une éventuelle tentative selon
l'art. 22 al. 1 CP. Il s'agit de diminuer la faute et non la peine, la réduction de la peine n'étant que la conséquence de la faute plus légère (ATF 136 IV 55 c. 5.5 et 5.7).
Le juge jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour apprécier ces éléments. Il n'est pas tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentage l'importance qu'il accorde à chacun des éléments qu'il cite. Pour cette raison déjà, il ne peut opérer une réduction linéaire de la peine selon un tarif particulier. Du reste, il n'existe pas de méthode scientifique exacte permettant de définir objectivement le taux de réduction de responsabilité, de sorte que la pratique distingue simplement selon que la diminution est légère, moyenne ou grave. Lorsque l'expert évalue le degré de la diminution de la responsabilité, il dispose d'une grande liberté d'appréciation. Cela peut certes constituer un point de départ lors de la fixation de la peine, mais celui-ci doit être affiné en fonction des particularités du cas. En d'autres termes, le juge doit apprécier juridiquement une expertise psychiatrique. Il est libre et n'est pas lié par les conclusions de l'expertise. Il doit aussi tenir compte de la cause de la diminution de la responsabilité (ATF 136 IV 55 c. 5.6).
5.2
Dans le cas d'espèce, les premiers juges ont considéré que la culpabilité de l'appelant était très lourde. A charge, ils ont retenu les antécédents du prévenu, dans les mêmes registres d’infractions, savoir principalement le vol avec violence et la conduite de véhicule sans permis de conduire. Sur ce point, ils ont relevé que la récidive en matière de circulation routière est intervenue après une longue période de détention et juste un mois après la décision du Juge d’application des peines qui a mis le prévenu au bénéfice d’une libération conditionnelle. Ils ont également constaté que l’ouverture d’une enquête pénale pour les faits intervenus entre le 23 et le 24 décembre 2010, l’amenant une nouvelle fois devant l’autorité, n’avait nullement dissuadé le prévenu de commettre un vol le 13 février 2011 et le brigandage du 28 mai 2011. Ils ont relevé une certaine montée dans la gravité des actes commis, l'appelant n'hésitant pas à accompagner ses actes de violence et d’injures. Les premiers juges ont considéré que le comportement du prévenu témoignait de son mépris total pour autrui et pour les biens essentiels que sont l’intégrité physique et la sécurité routière. Ils ont retenu que les infractions étaient en concours et ont enfin relevé que le prévenu n’avait pas hésité pas à s’en prendre seul à un groupe de personnes, ce qui démontrait clairement son caractère impulsif et déraisonnable et le fait qu'il ne semble pas capable de se tenir tranquille lorsqu’il n’est pas en prison (jgt., p. 21 et 22).
A décharge, les premiers juges ont tenu compte d'une diminution de responsabilité légère à moyenne du prévenu, de son jeune âge, de son enfance particulièrement difficile et des importants traumatismes qu'il a subi dans son pays d'origine ainsi que de son intégration difficile, notamment scolaire, à son arrivée en Suisse. Ils ont également retenu que l'appelant semblait amorcer un début de prise de conscience quant à la gravité de ses problèmes et qu'il admettait avoir besoin d’aide, semblant prêt à entreprendre un apprentissage pour sortir d’une vie dont il comprenait peut-être enfin qu’elle ne lui offre aucune perspective. Ils ont encore tenu compte de la bonne collaboration du prévenu durant les débats et des lettres d’excuses qu’il a adressées à ses victimes (jgt., p. 23).
Au vu de l’ensemble de ces éléments, une peine de trente mois de privation de liberté se justifie. La quotité de la peine infligée par les premiers juges est ainsi adéquate au regard des infractions commises, de la culpabilité de l’appelant et de sa situation personnelle, notamment d'une diminution de responsabilité légère à moyenne telle qu'attestée par les experts. Elle ne relève ni d’un abus ni d’un excès du pouvoir d’appréciation dont jouit l’autorité de première instance, laquelle n’a ignoré aucun des critères déterminants consacrés à l’art. 47 CP. Elle sera donc confirmée.
6.
X._ fait enfin grief aux premiers juges d'avoir ordonné son placement dans un établissement pour jeunes adultes, alors que – selon lui – cette mesure est vouée à l'échec.
6.1
A teneur de l'art. 59 al. 1 CP, lorsque l'auteur souffre d'un grave trouble mental, le juge peut ordonner un traitement institutionnel s'il a commis un crime ou un délit en relation avec ce trouble (let. a) et s’il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce dernier (let. b).
Aux termes de l'art. 61 CP, lorsque l’auteur avait moins de 25 ans au moment de l’infraction et qu’il souffre de graves troubles du développement de la personnalité, le juge peut ordonner son placement dans un établissement pour jeunes adultes à la condition que l’auteur a commis un crime ou un délit en relation avec ces troubles (lit. a) et s'il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ces troubles (b).
Il ressort de l'art. 62 al. 1 let. c CP que la mesure est levée si son exécution ou sa poursuite paraît vouée à l’échec.
Pour qu'une mesure soit considérée comme "vouée à l'échec", il faut qu'elle soit définitivement inopérante. S'agissant de la décision sur le pronostic, le principe
in dubio pro reo
n'est pas applicable (TF 6B_950/2009 du 10 mars 2010,
c. 3.2 et les références citées; ATF 127 IV 1 c. 2a). Le choix de la mesure est l'affaire du juge, non celle du médecin (Roth/Thalmann, Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 41 et ss ad art. 56 CP).
6.2
En l'occurrence, les premiers juges ont estimé que X._ devait bénéficier d'un placement dans le Centre éducatif de Pramont, nonobstant son refus constant s'agissant de cette mesure.
La cour de céans retient que s'il est de la compétence de l’expert de déterminer si une mesure de placement dans un établissement pour jeunes adultes est nécessaire, c'est en revanche au juge de faire le choix de la mesure en fonction du pronostic de réussite de dite mesure. Considérant l'âge de l'appelant, son refus constant s'agissant de cette mesure, des infractions commises qui témoignent de sa nature violente et enfin la structure d'encadrement proposée par le Centre éducatif Pramont, force est d'admettre que cette mesure est vouée à l'échec. Compte tenu de sa récente prise de conscience quant à la gravité de ses actes ainsi que son projet professionnel la cour de céans souhaite faire confiance en l'appelant. En poursuivant le suivi thérapeutique dont il bénéficie en prison avec le Dr. R._, il faut espérer que X._ saura puiser les ressources nécessaires en lui-même et auprès de sa famille pour trouver sa place dans la société sans retomber dans la délinquance. Il y a dès lors lieu d'admettre l'appel sur ce point et d'annuler la mesure de placement ordonnée par le tribunal de première instance.
7.
En définitive, l'appel est partiellement admis et le chiffre III du dispositif du jugement de première instance est modifié en ce sens que la mesure de placement au Centre éducatif de Pramont est annulée.
Compte tenu de l'admission partielle de l'appel, les frais de la procédure d'appel sont mis à la charge de X._ à raison de deux tiers, par
3'141 fr., le solde étant laissé à la charge de l’Etat (art. 428 al. 1 CPP).
Une indemnité de défenseur d'office pour la procédure d'appel d'un montant de 2'031 fr. 50, TVA et débours compris, est mise à la charge de X._.
L'appelant ne sera tenu de rembourser à l'Etat le montant de l'indemnité en faveur de son défenseur d'office prévue ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c4a22f36-c694-4c8c-b5ea-d6caaddc1bea | En fait :
A.
Par jugement du 12 février 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a constaté que C.O._ s’était rendu coupable d’incendie par négligence (I), a condamné C.O._ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 10 fr. (II), a suspendu l’exécution de la peine pécuniaire et a fixé à C.O._ un délai d’épreuve de 2 ans (III), a dit qu’il n’y avait pas lieu à indemnité selon l’art. 429 CPP en faveur de C.O._ (IV), a constaté qu’A.O._ s’était rendu coupable d’incendie par négligence (V), a condamné A.O._ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 10 fr. (VI), a suspendu l’exécution de la peine pécuniaire et a fixé à A.O._ un délai d’épreuve de 2 ans (VII), a dit
qu’il n’y avait pas lieu à indemnité selon l’art. 429 CPP en faveur d’A.O._ (VIII), a ordonné le maintien au dossier à titre de pièce à conviction du CD contenant des photographies inventorié sous fiche n° 4331 (IX), a dit que C.O._ et A.O._, conjointement et solidairement, devaient payer à P._ les sommes suivantes (X) :
- 250'000 fr. (deux cent cinquante mille francs) avec intérêts à 5 % à dater du 25 février 2013 à titre de dédommagement correspondant à la valeur du bâtiment détruit par l’incendie sous déduction de la valeur des « restes » ;
- 21'850 fr. (vingt et un mille huit cent cinquante francs) avec intérêts à 5 % à dater du 1
er
janvier 2014 à titre de dédommagement pour la perte de loyer jusqu’au 31 décembre 2014 ;
- 950 fr. (neuf cent cinquante francs) par mois dès le 1er janvier 2015 jusqu’à reconstruction complète de la maison détruite par l’incendie du 25 février 2013 à titre de dédommagement pour la perte de loyer ;
- 20'971 fr. 90 (vingt mille neuf cent septante et un francs et nonante centimes) à titre de dédommagement pour les frais de déblaiement,
a dit qu’il sera déduit des sommes mentionnées sous chiffre X tout montant que P._ touchera d’une assurance en raison du sinistre correspondant à l’incendie de la maison dont il est propriétaire le 25 février 2013, en particulier de l’ECA et de la Bâloise Assurance (XI), a dit que C.O._ et A.O._, conjointement et solidairement, devaient verser à P._ la somme de 10'000 fr. à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (XII), a mis les frais de procédure, arrêtés à 7'564 fr. 50, par moitié à la charge de C.O._ (soit 3'782 fr. 25) et par moitié à celle d’A.O._ (soit 3'782 fr. 25) (XIII).
B.
Par annonce du 19 février 2015, puis par déclaration d’appel motivée du 21 avril 2015, C.O._ a conclu, avec suite de frais et dépens, à la réforme des chiffres I, II, III, X et XII en ce sens qu’il est libéré du chef de prévention d’incendie par négligence (I à III), libéré du paiement des sommes réclamées à titre de prétentions civiles (X) et à la réduction de l’indemnité à titre de réparation du dommage (XII).
C.O._ a requis à titre de mesure d’instruction, l’audition des parties à la cause, ainsi que celle du père de P._.
Par annonce du 20 février 2015, puis par déclaration d’appel motivée du 27 avril 2015, A.O._ a conclu, avec suite de frais et dépens, à la réforme à titre principal des chiffres V,VI, VII, X et XII en ce sens qu’il est libéré du chef de prévention d’incendie par négligence (V à VII), du paiement des sommes réclamées à titre de prétentions civiles (X) et du paiement de 10'000 fr. à titre d’indemnité (XII). A titre subsidiaire, il a conclu à la réduction des indemnités fixées sous chiffres X et XII.
A.O._ a requis, à titre de mesure d’instruction, l’audition des parties, celle du père de P._ et la production par P._ de l’ensemble des documents relatifs à l’indemnisation de l’ECA et/ou de toute autre assurance.
Le 4 mai 2015, le Ministère public a déclaré qu’il n’entendait ni présenter de demande de non-entrée en matière, ni déclarer un appel joint.
Par courriers des 6, 8 et 20 mai 2015, A.O._, C.O._ et P._ ont renoncé à présenter une demande de non-entrée en matière ou une déclaration d’appel joint.
Par lettre du 4 juin 2015, la Cour de céans a rejeté la réquisition de preuve tendant à l’audition du père de P._ au motif que cette audition apparaissait ni nécessaire ni utile à l’instruction des appels déposés. Elle a ordonné la production des documents relatifs aux indemnités versées par l’ECA et toute autre assurance en mains de P._.
Par lettre du 9 juin 2015, le Ministère public a déclaré qu’il n’entendait pas comparaître à l’audience du 7 septembre 2015 et a conclu au rejet des deux appels, à la confirmation du jugement rendu le 12 février 2015, les frais de la procédure d’appel devant être mis à la charge de C.O._ et A.O._.
Dans sa motivation, le Ministère public a déclaré que les conditions d’application de l’art. 222 CP avaient été exposées de manière claire, complète et cohérente par le tribunal de première instance. Il a estimé avoir procédé aux recherches utiles et nécessaires pour établir les causes du sinistre, en procédant notamment à un complément d’expertise, et en instruisant à charge et à décharge.
Par lettre du 18 juin 2015, P._ a produit un document de l’ECA du 22 juillet 2014.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
a)
Originaire de Lancy/GE, C.O._ est né le 21 octobre 1991 à Martigny/VS. Il est marié et a une fille, née le [...]. Il œuvre comme [...] indépendant pour un revenu annuel de 10'000 fr., soit environ 834 fr. par mois. Son épouse n’exerce aucune activité lucrative. Il a récemment déménagé dans un appartement à Nyon, dont le montant du loyer n’est pas connu. Ses charges d’assurance maladie sont de l’ordre de 810 fr. pour lui et son épouse. L’extrait du casier judiciaire le concernant ne contient aucune inscription.
b)
Originaire de Lancy/GE, A.O._ est né le 16 janvier 1967 à Skopje en Macédoine. Il est marié et a trois enfants, dont C.O._. Il est chauffeur de taxi salarié et réalise un revenu mensuel net d’environ 2'600 francs. Il a récemment déménagé dans un appartement à Gland, dont le montant du loyer n’est pas connu. Ses charges mensuelles se composent de 370 fr. d’assurance maladie. Il s’acquitte de 400 fr. d’impôts par année. Il n’a ni dettes, ni économies, ni fortune, si ce n’est une petite maison en Macédoine, dont la valeur n’est pas connue, mais serait faible et ne rapporterait rien. L’extrait du casier judiciaire le concernant ne contient aucune inscription.
2.
2.1
Le 1
er
décembre 2011, A.O._ a loué une villa individuelle avec une annexe et un jardin, sis au chemin de la Forge 18 à Fournex appartenant à P._ pour un montant de 2'500 fr. par mois. A partir du 1
er
novembre 2012, C.O._ a loué à la même adresse un studio avec une terrasse-jardin pour un montant de 950 fr. par mois.
2.2
Les deux fils d’A.O._ (C.O._ et D.O._) s’étaient installés dans l’annexe de la villa en janvier 2012, annexe qui n’était pas considérée comme habitable. A cet endroit, A.O._ et son fils C.O._ ont remplacé le calorifère à mazout, non-conforme et installé par l’ancien locataire, par un poêle à bois qu’ils ont acheté chez Hornbach. Le diamètre du conduit de la cheminée étant compatible avec la sortie du poêle à bois, ils ont simplement soulevé ledit conduit pour effectuer le raccordement de cet appareil, sans demander ni obtenir d’autorisation que ce soit celle du propriétaire – par l’intermédiaire de l’agence immobilière Lacour – ou celle du ramoneur officiel. Le ramoneur avait avisé la famille [...] que l’ancienne installation n’était pas en ordre dès lors que le canal de fumée qui avait été monté par l’ancien locataire, sans autorisation, l’avait été avec des produits non conformes aux normes de l’Association des établissements cantonaux de l’assurance incendie. Malgré ces injonctions, les intéressés ont procédé au montage de ce poêle à bois et l’ont utilisé.
2.3
Le dimanche 24 février 2013, C.O._ a allumé le fourneau à bois aux alentours de minuit et est allé se coucher. Le lendemain matin, il s’est levé vers 4h20 et s’est ensuite rendu dans la villa afin de se préparer.
Ce même jour, vers 16h30, un incendie s’est déclaré dans l’annexe de la villa occupée par C.O._. Il n’y avait personne dans les locaux lors des faits. L’appartement situé dans ladite annexe a été entièrement détruit par les flammes. Le salon se trouvant également dans l’annexe a subi des dégâts en raison des travaux d’extinction et le toit de l’immeuble à été partiellement détruit par les flammes.
2.4
D’après les investigations policières, l’origine de l’incendie a été située dans la chambre de l’annexe, à proximité du canal de la cheminée, à la hauteur d’une poutre composant le châssis du plafond/plancher. L’incendie a été causé par une distance insuffisante entre la cheminée en acier inoxydable du chauffage à bois et les parties de construction et matériaux combustibles du plafond/plancher du galetas. La chaleur dégagée par les fumées de combustion du poêle à bois s’est transmise à travers le canal en acier inoxydable à la poutre en bois qui, dans un milieu confiné et peu aéré, s’est lentement consumé avant de s’embraser (P. 8).
C.O._ a allumé le fourneau à bois aux alentours de minuit, le dimanche 24 février 2013. En règle générale, la durée de combustion est estimée à quatre heures et on peut en déduire que l’incendie s’est déclenché douze heures après que le feu se soit éteint par lui-même. La chaleur dégagée par les fumées de combustion du poêle à bois s’est transmise par conduction, à travers le canal en acier inoxydable, à la poutre en bois. En effet, dans un milieu quasi isolé ou confiné, il y a une transmission de la totalité de la puissance thermique et à la suite des utilisations du chauffage, le bois se dessèche, sa texture s’altère, sa température d’auto-inflammation s’abaisse et permet l’établissement d’une combustion lente ou feu couvant. Dans ces circonstances, une incandescence, née au sein du matériau combustible, peut, au contact de l’air et même après plusieurs jours, se transformer en feu avec flammes (P. 13).
L’expertise technique, sollicitée par C.O._ et rendue le 23 avril 2014, a retenu que la cause du sinistre établie par les investigations policières n’était infirmée par aucun élément au dossier. Les experts ont pu établir qu’aucune autre cause que celle du transfert de chaleur à partir du canal de cheminée du poêle à bois ne pouvait constituer l’origine de l’incendie. Les experts ont ajouté que plusieurs éléments corroboraient cette conjoncture de cause, à savoir la répartition des traces de calcination de l’ossature en bois du plafond à proximité du canal de la cheminée, la distance mesurée entre le canal de cheminée et une poutre en bois de l’ossature après reconstitution, la nature du combustible (bois) permettant l’initiation et la progression d’une incandescence et la configuration du milieu favorisant un transfert de chaleur.
2.5
P._ s’est constitué partie civile le 18 mars 2013. Il a chiffré ses conclusions civiles à hauteur d’environ 400'000 francs. Il a pour se faire produit un rapport d’expertise en valeur immobilière du 23 octobre 2014 dont il ressort que la valeur intrinsèque des bâtiments s’élève à CHF 252'800 francs.
2.6
L’ECA a admis une indemnité totale de 125'454.20 fr., dont un montant de 40'000 fr. a été versé le 7 mai 2013 au plaignant. Ce dernier a fait opposition à la décision de l’ECA concernant la fixation de la valeur des bâtiments. | En droit :
1.
Interjetés dans les forme et délai légaux (art. 399 CPP) par des parties ayant qualité à recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP ; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
3.1
Les appelants estiment devoir être libérés du chef de prévention d’incendie par négligence, au motif qu’ils n’auraient pas violé leur devoir de prudence et que les causes de l’incendie ne sont pas parfaitement connues, de sorte que le principe
in dubio pro reo
devrait être appliqué.
3.2
3.2.1
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2).
La présomption d'innocence, garantie par l’art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1 ; ATF 127 I 38 c. 2a). Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes ; on parle alors de doutes raisonnables (TF 6B_831/2009 précité c. 2.2.2 ; ATF 120 Ia 31 c. 2c). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (TF 6B_18/2011 du 6 septembre 2011 c. 2.1).
3.2.2
A teneur de l'art. 222 al. 1 CP, celui qui, par négligence, aura causé un incendie et aura ainsi porté préjudice à autrui ou fait naître un danger collectif sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
Les éléments objectifs de l'incendie par négligence sont a) un incendie, b) un comportement qui consiste à mettre le feu, c) un résultat correspondant soit à porter préjudice à autrui ou à faire naître un danger collectif et d) un rapport de causalité entre le comportement de l'auteur et le résultat précité. La notion d'incendie vise un feu d'une telle ampleur qu'il ne peut plus être éteint par celui qui l'a allumé (ATF 117 IV 285 c. 2a), compte tenu de sa situation, de ses connaissances et des moyens qu’il a à sa disposition (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3e éd., 2010, n. 7 ad art. 221 CP). Il n’est pas nécessaire que le feu soit composé de flammes ouvertes, une combustion lente suffit dès lors que l’auteur en a perdu la maîtrise (ATF 105 IV 127 c. 1b). L'incendie par négligence est réalisé par celui qui adopte un comportement objectivement propre à provoquer un incendie, qui soit dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec celui-ci et qui ait pour conséquence de porter préjudice à autrui ou crée un danger collectif (Corboz, op. cit., n. 1 et 5 ad art. 222 CP ; ATF 129 IV 119 c. 2.2 et les références citées). Par préjudice à autrui, il faut entendre le dommage patrimonial causé à un tiers et résultant directement des dégâts commis à la chose incendiée. La notion de danger collectif vise de manière générale une mise en péril, même relativement indéterminée au moment de l'acte, de n'importe quel bien juridiquement protégé, et non pas spécifiquement de la personne humaine (ATF 117 IV 285 c. 2a) ; elle est remplie lorsqu’il existe le danger que le feu se propage (Corboz, op. cit., n. 23 ss ad. art. 222 CP).
Enfin, l'élément subjectif est la négligence. D’après l'art. 12 al. 3 CP, agit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle. Ainsi, deux conditions doivent être remplies pour qu'il y ait négligence.
En premier lieu, il faut que l'auteur ait d'une part violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 134 IV 255 c. 4.2.3 p. 262; ATF 133 IV 158 c. 5.1 pp. 162 s.). Pour déterminer plus précisément quels étaient les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents; à défaut de dispositions légales ou réglementaires, on peut se référer à des règles analogues qui émanent d'associations privées ou semi-publiques lorsqu'elles sont généralement reconnues. La violation des devoirs de la prudence peut aussi être déduite des principes généraux, si aucune règle spéciale de sécurité n'a été violée (ATF 133 IV 158 c. 5.1 p. 162). Un comportement viole le devoir de prudence lorsque l'auteur, au moment des faits, aurait pu, compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de la mise en danger d'autrui et qu'il a simultanément dépassé les limites du risque admissible (ATF 136 IV 76 c. 2.3.1 p. 79; ATF 135 IV 56 c. 2.1 p. 64; ATF 134 IV 255 c. 4.2.3 p. 262). C'est en fonction de la situation personnelle de l'auteur que l'on doit apprécier son devoir de prudence (ATF 135 IV 56 c. 2.1 p. 64; ATF 133 IV 158 c. 5.1 p. 162; ATF 122 IV 145 c. 3b/aa p. 147).
En second lieu, pour qu'il y ait négligence, il faut que la violation du devoir de prudence soit fautive, c'est-à-dire que l'on puisse reprocher à l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, une inattention ou un manque d'effort blâmable (TF 6B_614/2014 et les références citées; ATF 135 IV 56 c. 2.1 p. 64; ATF 134 IV 255 c. 4.2.3 p. 262; ATF 129 IV 119 c. 2.1 p. 121).
L’infraction de l’art. 222 CP se caractérise par le fait que le résultat est causé par un manque de diligence jouant un rôle dans la survenance du dommage. La négligence peut par exemple consister en l’irrespect des règles de prudence imposées par les circonstances. La négligence peut porter tant sur le comportement ayant provoqué la survenance de l’incendie que sur la conséquence (préjudice à autrui ou danger collectif) exigée par le loi (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 5 ad. art. 222 CP et les références citées).
3.3
3.3.1
En l’espèce, il faut rappeler que l’annexe de la villa dans laquelle vivait C.O._ était équipée d’un calorifère à mazout qui avait été jugé non-conforme par le ramoneur. Il avait constaté que le conduit était en bon état mais que la distance de sécurité entre l’extérieur du conduit et le tableau électrique n’était pas suffisante et qu’il devrait y avoir un mur d’une épaisseur de 10 cm au minimum afin de garantir la sécurité en cas de feu de cheminée. Le fourneau installé ne respectait pas les distances de sécurité entre la paroi en bois fixe et les faces du fourneau. Le montage d’une manchette double était également nécessaire pour la jonction du tuyau et boucher correctement l’ancien raccordement (P. 5/2). La famille [...] a été avisée de la situation par lettre du 12 décembre 2011 (P. 5/1). En dépit de cet avis, C.O._ et son père A.O._ ont décidé d’installer un poêle à bois. Pour ce faire, les intéressés ont simplement soulevé le conduit pour effectuer le raccordement de l’appareil, ceci sans demander ni obtenir l’autorisation du ramoneur et ont, de ce fait, manqué à leur devoir de prudence.
3.3.2
Les appelants soutiennent que la faute en revient au propriétaire qui les a laissés occuper l’annexe, alors que celle-ci n’était pas considérée comme habitable. Ils reprochent en outre à P._ de ne pas avoir fait le nécessaire pour enlever le calorifère à mazout non-conforme et de ne pas les avoir informés de la défectuosité du canal de cheminée.
Il est vrai que l’on peut s’interroger sur la location de l’annexe considérée comme non-habitable, puisque le propriétaire, ou à tout le moins la gérance immobilière, était au courant de la situation et l’a toutefois tolérée (P. 5/1). Néanmoins, cette question n’est pas pertinente sur le plan pénal, dès lors qu’elle n’a aucune incidence sur la responsabilité pénale des appelants s’il s’avère que par négligence, ils ont déclenché un incendie.
3.3.3
Les appelants soutiennent ne pas avoir été au courant de la non-conformité du canal de fumée. Cette allégation est en contradiction avec l’ensemble des éléments figurant au dossier. En effet, A.O._ a déclaré que lors du passage du ramoneur, celui-ci avait vu l’installation de chauffage dans l’annexe et lui avait dit qu’elle n’était pas en ordre. L’intéressé lui a même indiqué qu’il allait l’enlever (PV aud. 2, p. 3). Ceci est confirmé par les déclarations de son fils C.O._ qui a indiqué lors de son audition du 27 février 2013 « je sais que mon père a demandé au ramoneur si nous pouvions installer ce poêle à bois dans l’annexe. Le ramoneur a répondu par la négative du fait que le conduit n’était pas dans les normes. Comme j’avais froid, nous avons décidé d’installer ce poêle à bois dans l’annexe malgré l’interdiction du ramoneur » (PV aud. 3, p. 3). Lors de ses déclarations du 17 juin 2013, C.O._ a également expliqué qu’il s’était renseigné chez Hornbach sur les prescriptions de sécurité et que le ramoneur officiel lui avait indiqué qu’il n’était pas possible de faire fonctionner le poêle à bois de cette manière, mais qu’il était nécessaire pour ce faire de construire une cheminée. Les intéressés ne l’ont pas fait, estimant que cela n’était pas nécessaire, puisqu’il y avait de la laine de verre sur le conduit, ce matériau ne prenant en principe pas feu (PV aud. 4 p. 2). En ce qui concerne les prescriptions de sécurité relatives à l’installation d’un tel appareil, A.O._ a, quant à lui, déclaré qu’il ne s’était pas renseigné à ce sujet ni au moment de l’achat, ni auprès du ramoneur officiel. Il s’est uniquement contenté de regarder que l’appareil soit solide et pas cher (PV aud. 2 p. 3). Lors de son audition du 17 juin 2013, ce dernier a indiqué qu’il savait qu’il était nécessaire de créer un conduit pour l’évacuation de la fumée et de la chaleur lors de l’installation du poêle à bois. Le ramoneur a par ailleurs avisé la gérance immobilière par courrier du 10 février 2012 et indiqué clairement que cette installation ne devait plus être mise en service jusqu’à sa remise en conformité (P. 5/2). Le gérant de la villa a en outre précisé à l’audience de première instance que les appelants étaient au courant que le calorifère à mazout n’était pas conforme.
Ainsi, au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il faut retenir que par leur comportement, A.O._ et C.O._ ont fait preuve d’une imprévoyance coupable en ne procédant pas aux contrôles et aux travaux nécessaires au moment de l’installation du poêle à bois.
3.3.4
Les appelants contestent le lien de causalité entre l’installation défectueuse et l’incendie, au motif qu’il ne serait pas suffisamment établi, d’autres causes d’incendie restant possibles, telle qu’une installation électrique défectueuse.
Tant le rapport d’investigation de la police du 18 mars 2013 (P. 8) et le rapport d’expertise technique (P. 26) sont clairs. L’origine de l’incendie a pu être située dans la chambre de l’annexe, à proximité du canal de cheminée, à la hauteur d’une poutre composant le châssis du plafond/plancher. La cause de l’incendie est un feu par conduction et rayonnement dû à une distance insuffisante entre les parties de construction et matériaux combustibles et le canal de cheminée. La chaleur dégagée par les fumées de combustion du poêle à bois s’est transmise à travers le canal en acier inoxydable à la poutre en bois qui, dans un milieu confiné et peu aéré, s’est lentement consumée avant de s’embraser (P. 8, p. 5).
Dans leur rapport d’expertise technique, les experts ont relevé que la cause de l’incendie établie par la police cantonale correspondait à une typologie de sinistres dont la réalité a été maintes fois démontrée (initiation d’une combustion lente par transfert de chaleur entre une surface chaude et un matériau combustible) et ainsi confirmé la conclusion de la police cantonale s’agissant de la cause, en raison de la répartition des traces de calcination à proximité du canal de cheminée, de la distance mesurée entre le canal de cheminée et la poutre en bois de l’ossature après reconstruction, de la nature du combustible – en l’occurrence du bois – permettant l’initiation et la progression d’une incandescence et la configuration du milieu favorisant un transfert de chaleur. Les experts ont en outre examiné de manière détaillée les autres causes possibles de l’incendie, à savoir une machine à laver installée dans la salle de bain, un poste de repassage dans un petit local, un convecteur électrique contre lequel était adossé le lit de C.O._ et un appareil pour le paiement par carte qui se trouvait sur le lit. L’examen de ces quatre sources potentielles de chaleur a permis d’exclure leur implication dans l’incendie (P. 26, p. 9 s).
Il ressort au point 3 de ce rapport que : «
L’entretien d’une combustion lente au sein d’une pièce de bois massif peut perdurer durant plusieurs heures voire plusieurs dizaines d’heures. Le dégagement limité de chaleur et de fumées entraîne que ce phénomène peut demeurer indécelable. La combustion progresse au sein du matériau sous la forme d’une incandescence ; au moment où elle arrive en surface du combustible, au contact avec l’air, la réaction s’accélère et la combustion évolue en feu avec flammes. L’influence de la température ambiante sur l’allumage et la progression d’une incandescence est insignifiante, de même que sur son évolution en combustion vive. Dans ces conditions, l’intervalle de temps d’environ 12 heures qui sépare la fin de la combustion dans le poêle à bois et le moment où l’incendie est découvert n’exclut aucunement qu’un transfert de chaleur à partir du canal de cheminée constitue la cause de l’incendie ».
3.3.5
Les appelants soutiennent que l’expertise technique est lacunaire au motif qu’elle n’a été ordonnée qu’une année après le sinistre et que les experts ne se sont pas rendus sur les lieux, se fondant uniquement sur les investigations de la police, lesquelles auraient d’emblée été orientées à charge. Ils reprochent également aux experts de ne pas avoir examiné le réseau électrique qui était défaillant.
Comme relevé par le premier juge, des problèmes électriques avaient été relevés à la fin de l’année 2011. Dans son courrier du 23 décembre 2011 (P. 32/2), l’entreprise [...] a indiqué avoir entrepris les mesures nécessaires pour supprimer les défauts constatés, ce qui a été confirmé dans un rapport de sécurité de l’installation électrique émanant de [...] Sàrl du 22 février 2012 (P. 48), de sorte que le système électrique était aux normes au moment du sinistre. De plus, dans leur rapport, les experts ont expressément indiqué que plus d’une année s’était écoulée entre le sinistre et la réquisition d’expertise, qu’un retour sur les lieux afin de procéder à une investigation du site n’était dès lors pas envisageable et que dans ces conditions, la réponse énoncée dans le mandat d’expertise s’était fondée sur les informations qui avaient été transmises ou qui avaient pu être récupérées, en se référant aux pièces du dossier et aux photographies prises le 26 février 2013, soit le lendemain des événements.
3.4
En définitive, il n’existe aucun élément permettant de penser que l’installation électrique pourrait être la cause du sinistre. On ne saurait reprocher aux experts d’avoir procédé comme ils l’ont fait et aucun élément au dossier ne permet de mettre en doute leur neutralité. L’expertise est claire, complète et convaincante. Dès lors, il faut partir de l’idée que l’incendie a été causé par l’installation non autorisée et non-conforme du poêle à bois. C’est ainsi à juste titre que les appelants ont été reconnus coupables d’incendie par négligence.
4.
Reste à examiner la peine prononcée à l’encontre des appelants.
4.1
4.1.1
L’art. 222 CP prévoit une peine privative de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire.
4.1.2
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1).
4.1.2
Selon l'art. 42 CP, le juge suspend en règle générale l’exécution d’une peine pécuniaire, d’un travail d’intérêt général ou d’une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu’une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l’auteur d’autres crimes ou délits (al. 1). Si, durant les cinq ans qui précèdent l’infraction, l’auteur a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de six mois au moins ou à une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins, il ne peut y avoir de sursis à l’exécution de la peine qu’en cas de circonstances particulièrement favorables (al. 2).
Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement de l'auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement (ATF 134 IV 1 c. 4.2.1). Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (TF 6B_492/2008 du 19 mai 2009 c. 3.1.2 ; ATF 134 IV 1 c. 4.2.2).
4.2
Les appelants, dont les casiers judiciaires respectifs sont vierges de toute inscription, ont été condamnés à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à 10 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans. Les peines prononcées à l’encontre d’A.O._ et de C.O._ sont, au vu des faits et de leur comportement négligent, adéquates pour ne pas dire modérées et doivent par conséquent être confirmées. La nature et la quotité de la peine n’ont pour le surplus pas été contestées par les appelants.
5.
Reste à examiner la question des prétentions civiles réclamées par P._.
5.1
Les appelants contestent le montant du dommage mis à leur charge dans la mesure où le premier juge a retenu la valeur intrinsèque des bâtiments touchés par l’incendie, soit 250'000 fr. et non la valeur fixée par l’ECA du dommage causé audits bâtiments. Ils allèguent également que le plaignant aurait dû contribuer à la réduction de son dommage en procédant à des travaux de reconstruction pour pouvoir ensuite relouer son bien et réduire le préjudice. Ils soutiennent une faute concomitante de la part de P._ qui aurait toléré la présence d’installations de chauffage non-conformes, ceci sans intervenir, dans une annexe qui n’était pas habitable.
5.2
D'après l'art. 41 CO (Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse, RS 220), celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer (al.1). La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).
L’art. 126 al. 1 CPP prévoit que le tribunal statue sur les conclusions civiles présentées lorsqu’il rend un verdict de culpabilité à l’encontre du prévenu (let. a) ou lorsqu’il acquitte le prévenu et que l’état de fait est suffisamment établi (let. b).
L’art. 126 al. 2 CPP dispose que le tribunal renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsque la procédure pénale est classée ou close par la procédure de l'ordonnance pénale (let. a) ; lorsque la partie plaignante n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (let. b) ; lorsque la partie plaignante ne fournit pas les sûretés en couverture des prétentions du prévenu (let. c) et lorsque le prévenu est acquitté alors que l'état de fait n'a pas été suffisamment établi (let. d).
L’art. 126 al. 3 CPP prévoit encore que dans le cas où le jugement complet des conclusions civiles exigerait un travail disproportionné, le tribunal peut traiter celles-ci seulement dans leur principe et, pour le surplus, renvoyer la partie plaignante à agir par la voie civile. Les prétentions de faible valeur sont, dans la mesure du possible, jugées par le tribunal lui-même.
5.3
Le premier juge s’est fondé sur l’absence de contestation spécifique par les prévenus du montant du dommage, alors que leur culpabilité était établie. Cette motivation est insuffisante, puisque les prévenus contestaient en première instance toute responsabilité. Il apparaît au demeurant qu’ils n’ont aucunement acquiescé aux conclusions civiles, acquiescement qui devrait, quoi qu’il en soit, figurer au procès-verbal (art. 124 al. 3 CPP). Il appartenait donc au plaignant d’établir ses prétentions civiles. Or, elles ne sont pas suffisamment fondées et portent sur des postes du dommage nécessitant une instruction qui excède le cadre de la procédure pénale.
Dans le cas d’espèce, le rapport d’expertise portant sur la valeur immobilière a été effectué par un expert privé à la demande de la partie plaignante. Il s’agit ainsi d’une expertise unilatérale émanant d’un expert qui n’a pas été choisi de manière indépendante et dont la valeur probante n’a pas été discutée contradictoirement. Elle n’a donc pas une valeur probante suffisante.
En outre, il sied de relever que P._ n’a effectivement procédé à aucun travaux depuis le sinistre, au motif que le montant perçu par l’ECA n’était pas suffisant et qu’il restait dans l’attente de l’indemnisation des prévenus. On doit dès lors se demander s’il a suffisamment contribué à réduire son dommage.
Pour le surplus, l’instruction de la cause en appel n’implique pas que l’on examine l’éventuelle faute concomitante alléguée par les prévenus et rejetée par le plaignant. Cette question doit être réglée devant l’autorité civile.
Ainsi, au vu de ce qui précède, la partie plaignante est renvoyée à agir devant le juge civil pour les questions concernant ses prétentions civiles. Le jugement est modifié dans ce sens.
6.
En définitive, les appels de C.O._ et d’A.O._ doivent être partiellement admis.
6.1.
Vu l’issue de la cause, les frais d’appel, par 3'120 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), doivent être mis par un tiers à la charge d’A.O._, un tiers à la charge de C.O._ et un tiers à la charge de P._ (428 al. 1 CPP). Outre l'émolument, qui se monte à 3’120 fr. ces frais comprennent l’indemnité allouée au défenseur d’office de C.O._.
7.
L’indemnité du défenseur d’office de C.O._.
7.1
Aux termes de l’art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d’office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès.
Selon la jurisprudence, le défenseur d'office a droit au remboursement intégral de ses débours ainsi qu'à une indemnité s'apparentant aux honoraires perçus par le mandataire plaidant aux frais de son client; pour fixer cette indemnité, l’autorité doit tenir compte de la nature et de l’importance de la cause, des difficultés particulières qu’elle peut présenter en fait et en droit, du temps que le défenseur d’office y a consacré et de la qualité de son travail, du nombre de conférences, d’audiences et d’instances auxquelles il a pris part, du résultat obtenu et, enfin, de la responsabilité qu’il a assumée (TF 6B_745/2009 du 12 novembre 2009 c. 10.1 et les réf. citées).
Lorsque le juge fixe le montant des dépens sur la base d'une liste de frais et qu’il entend s'en écarter, il doit alors au moins brièvement indiquer les raisons pour lesquelles il tient certaines prétentions pour injustifiées, afin que son destinataire puisse attaquer la décision en connaissance de cause (TF 5D_45/2009 du 26 juin 2009 c. 3.1; TF 1P.85/2005 du 15 mars 2005 c. 2 et les réf. cit.). L’autorité chargée de fixer la rémunération du défenseur d’office peut se prononcer sur le caractère excessif du temps que celui-ci allègue avoir consacré à sa mission et ne rétribuer que l’activité qui s’inscrit raisonnablement dans le cadre de l’accomplissement de la tâche du défenseur, à l’exclusion des démarches inutiles ou superflues ou des tâches relevant d’un simple soutien moral ou d’une aide sociale sans rapport avec la conduite du procès pénal; l’avocat doit toutefois bénéficier d’une marge d’appréciation suffisante pour déterminer l’importance du travail qu’exige l’affaire (ATF 109 Ia 107 c. 3b).
D'après la jurisprudence fédérale, le tarif horaire de l'avocat d'office est de 180 fr. pour l'avocat breveté et de 110 fr. pour l’avocat-stagiaire, plus la TVA à 8 % et les débours (ATF 132 I 201 c. 8.7 ; TF 6B_810/2010 du 25 mai 2011 c. 2.4).
7.2
Dans la liste des opérations produite à l’audience d’appel par Me Kavadze, avocate-stagiaire en l’étude de Me Tron, il est fait état de 48.65 heures, hors audience, consacrées à la défense des intérêts de C.O._ pour la période allant du 3 février au 4 septembre 2015. Ces heures comprennent 12.85 heures à un tarif horaire de 350 fr. consacrées par Me Tron, le solde concernant le travail effectué par l’avocate-stagiaire dont le tarif horaire a été fixé à 225 fr. Cette durée est manifestement disproportionnée. Il ressort de la liste d’honoraires que l’essentiel des opérations effectuées ont porté sur des contacts avec les assurances. Ces opérations n’entrant pas dans le cadre de l’exercice du mandat de défenseur d’office, seules les opérations suivantes seront prise en considération : entretien avec le client, déclaration d’appel, participation à l’audience d’appel. De ce fait, il sera tenu compte de 2 heures consacrées par Me Tron au tarif horaire usuel de 180 fr., de 15 heures consacrées par l’avocate-stagiaire au tarif horaire usuel de 110 fr., d’une vacation au tarif forfaitaire de 80 fr., et de débours, par 50 fr., plus la TVA, par 171 fr. 20.
Ainsi, une indemnité pour la procédure d'appel d'un montant de 2'311 fr. 20, TVA et débours inclus, est allouée au défenseur d'office de C.O._.
C.O._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son conseil d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 CPP).
8.
P._ a conclu à l’allocation d’un montant de 4'104 fr. pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure.
8.1
Aux termes de l’art. 433 al. 1 let. a CPP, la partie plaignante peut demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu’elle obtient gain de cause (let. a). La partie plaignante adresse ses prétentions à l’autorité pénale et doit les chiffrer et les justifier (al. 2).
La partie plaignante a obtenu gain de cause au sens de cette disposition lorsque le prévenu a été condamné et/ou si les prétentions civiles ont été admises (Schmid, Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, Zurich/Saint-Gall 2009, n. 6 ad art. 433 CPP). La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, couvre les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante, à l'exclusion de toutes démarches inutiles ou superflues (Mizel/Rétornaz, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, Bâle 2011, n. 8 ad art. 433 CPP; Schmid, op. cit., n. 3 ad art. 433 CPP). Sont prises en considération tant l’activité ayant contribué à la condamnation du prévenu que celle ayant servi à l’obtention et la réparation du dommage, pour autant que la partie plaignante n’ait pas été renvoyée à faire valoir cette dernière devant le juge civil (Mizel/Rétornaz, op. cit., n. 10 ad art. 433 CPP; Schmid, op. cit., n. 23 ad art. 433 CPP).
8.2
P._ n’ayant pas obtenu entièrement gain de cause, seul le montant de 2'800 fr., correspondant aux deux tiers du montant requis, lui sera alloué.
9.
A.O._ a conclu à l’allocation d’un montant de 8'746 fr. 20 pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure. Au vu du sort de l’appel, c’est une indemnité de 1'500 fr. qui sera mise à la charge de P._ qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c4c008bd-cfc4-4eaf-9610-6d2a412a6755 | En fait :
A.
Par jugement du 30 novembre 2011, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a constaté que Z._ s'est rendu coupable de gestion déloyale (I), l'a condamné à une peine privative de liberté de 15 mois (II), a suspendu l'exécution de la peine et a fixé à Z._ un délai d'épreuve de cinq ans (III), a ordonné à Z._, durant le délai d'épreuve, au titre de règle de conduite en réparation du dommage, de rembourser chaque année au 31 décembre au plus tard, la première fois le 31 décembre 2012, à la société H._ la somme de 120'000 fr., à raison de versements en principe mensuels de 10'000 fr., jusqu'à extinction complète de la créance fixée sous chiffre VII ci-dessous (IV), a renoncé à révoquer le sursis accordé à Z._ le 23 août 2002 par le Juge d'instruction de Lausanne (V), a donné acte à V._ de ses réserves civiles à l'encontre de Z._ (VI), a dit que Z._ est le débiteur de la société H._ de la somme de 674'571 fr. 70, plus intérêts à 5 % l'an selon précisions ci-après :
- 147'063 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 21 novembre 2007,
- 192'874 fr. 35, avec intérêts à 5 % l'an dès le 27 novembre 2007,
- 192'874 fr. 35, avec intérêts à 5 % l'an dès le 21 novembre 2007,
- 141'760 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 17 avril 2007,
et a rejeté pour le surplus les conclusions civiles de la société H._ (VII), a dit que Z._ est le débiteur de V._ de la somme de 30'440 fr., TVA et débours compris, et de la société H._ de la somme de 11'772 fr., TVA et débours compris, à titre de dépens pénaux (VIII) et a mis les frais de la cause, par 4'560 fr., à la charge de Z._ (IX).
B.
Le 12 décembre 2011, Z._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d’appel du 30 janvier 2012, il a conclu principalement, avec suite de frais, à l'annulation du jugement du 30 novembre 2011 et du prononcé du 29 novembre précédent du tribunal correctionnel admettant la constitution de partie plaignante de la société H._, une indemnité de 30'000 fr. lui étant allouée pour les honoraires et frais de son conseil. Subsidiairement, il a conclu à la modification du jugement en ce sens qu'il est acquitté et que les conclusions civiles de la société H._ et de V._ sont rejetées, qu'une indemnité qui n'est pas inférieure à 45'708 fr. 60 lui est allouée pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure, les frais étant mis à la charge de V._, subsidiairement laissés à celle de l'Etat. D'autres conclusions principales, dirigées contre le prononcé et déduites de motifs de récusation invoqués à l'encontre d'un membre de la cour ayant rendu le jugement entrepris, relèvent de la compétence de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal. Cette autorité les a rejetées par arrêt du 14 février 2012 (56/2012), définitif et exécutoire.
Le 26 avril 2012, le Président de la Cour d'appel pénale a refusé d'ordonner production des pièces requises par l'appelant.
Lors de l'audience du 1
er
juin 2012, la Cour d'appel a rejeté la requête incidente de l'appelant tendant à la production d'une pièce 103 (dossier complet de la mise à l'enquête).
L'audience d'appel du 1
er
juin 2012 a été suspendue à la requête des parties afin de leur permettre de mener à terme des pourparlers transactionnels. H._, intimée à l'appel, a produit diverses pièces.
A l'audience de reprise de cause du 13 septembre 2012, la conciliation a échoué. L'appelant a été entendu. Il a confirmé les conclusions de son appel. Le Procureur a conclu au rejet de l'appel, à l'instar des intimés V._ et H._, laquelle a requis de pleins dépens pour la procédure d’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1 Le prévenu Z._, né en 1960, juriste de formation, est marié et père de deux enfants. Son casier judiciaire comporte une inscription, relative à une peine de dix jours d'emprisonnement avec sursis durant cinq ans et à une peine de 1'000 fr. d'amende, prononcées le 23 août 2002 par le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne pour vol d'importance mineure et pornographie.
Le prévenu exerce l'activité de gérant d'entreprises et est directeur de plusieurs sociétés. En 2010, il a gagné 218'870 fr. et son épouse, dont il est séparé de biens depuis 1996, 112'649 francs. Sa rémunération annuelle 2011 est de l'ordre de celle réalisée en 2010. Il dirige notamment, avec son épouse, la société R._, dont le siège est à [...]. Les époux ont chacun la signature individuelle en leur qualité d'associés-gérants; le mari a une part de 11'000 fr., son épouse une part de 9'000 francs. Cette société a, selon l'extrait du Registre du commerce versé au dossier, pour but le "nettoyage de tout récipient à ordures ménagères" (P. 5/1). De fait, elle est active dans la désinfection de conteneurs à ordures collectifs enterrés. Elle a réalisé un bénéfice de 90'343 fr. en 2010. Le prévenu gère également une société S._, dont le siège est à [...]. Il détient 30 % des actions de cette société, son épouse la moitié et un tiers les 20 % restant. Cette société a, selon le prévenu, réalisé un bénéfice d'environ 140'000 fr. en 2010. Le prévenu en est l'administrateur unique. Il dit qu'il n'a pas encore été décidé s'il percevra des tantièmes de cette société pour l'exercice 2010 (jugement, p. 26). Enfin, une société R._ est détenue à 100 % par S._.
L'épouse de Z._ est propriétaire d'un terrain et d'une maison que les époux estiment eux-mêmes à 3'500'000 fr. environ et qui est actuellement grevée d'hypothèques à hauteur de 2'900'000 fr. selon l'épouse, qui en assume la charge.
1.2 V._, architecte, exploite la société V._, à [...].
Le 5 juillet 2002, Z._ a passé avec lui une convention concernant un projet de construction et de vente portant sur des villas à bâtir sur la parcelle feuillet [...] du Registre foncier de [...]. L'accord (P. 20/1) prévoyait, en son chiffre 6, une répartition des gains par moitié entre les associés au terme de l'opération; un résumé chiffré non signé, reposant sur cette convention, daté du 13 janvier 2009, fait état d'un solde créditeur de 494'371 fr. 03 en faveur de V._ (P. 11). Sise au chemin [...], la parcelle était alors propriété de l'hoirie [...]. Par le même accord, le prévenu s'est réservé "pour lui-même une des parcelles (env. 1000 m
2
), étant précisé que "[l]e financement de cette acquisition est couverte (sic) à 80 % par la vente des autres parcelles" (ch. 4 de l'accord) et que "M. V._ réalisera en tant qu'architecte, gratuitement le projet de villa de M. Z._" (ch. 5 de l'accord).
Le 1
er
juillet 2003, Z._ a fondé avec V._ la société H._, dont le but statutaire était "les transactions immobilières" (art. 2 des statuts, P. 5/3). Le capital social, de 20'000 fr. (minimum légal; cf. l'art. 782 al. 2 CO), a été divisé en deux parts sociales égales, entièrement libérées, en faveur de l'un et de l'autre des associés-gérants (cf. not. l'art. 3 des statuts). De fait, H._ a été créée pour s'occuper en premier lieu d'acquérir des parcelles propriétés de l'hoirie [...] dans le périmètre dit des H._ et de réaliser des opérations de promotion immobilière sur ces terrains, même si, comme on le verra plus avant ci-dessous, le prévenu a déclaré que le but de la société n'était pas de fait limité à la promotion [...]. A partir de 2003, et jusqu'en 2006 en tout cas, H._ a ainsi acquis divers terrains appartenant à l'hoirie [...], qu'elle a revendus (P. 5/10 ss).
Ainsi, le 26 août 2003 en particulier, les hoirs [...] ont passé avec H._ une promesse de vente et d'achat avec cession d'un droit d'emption sur l'un des immeubles de la succession (P. 5/10). Les promettants-vendeurs s'engageaient à céder ce bien-fonds à la société ou à ses nommables, à un prix convenu d'avance. L'immeuble (feuillet n° [...]) a été divisé en quatre parcelles sous lettres A à D. L'acte était toutefois soumis à la condition suspensive de l'acceptation, par l'autorité compétente, d'un nouveau plan de quartier englobant la totalité de la parcelle promise-vendue, à obtenir, tout délai de recours échu, pour le 10 décembre 2004 au plus tard (P. 5/10, p. 5).
Le 15 décembre 2004, les associés ont passé une "convention en cas d'abandon (par la commune,
réd
.) du PPA (plan de quartier,
réd
.) H._" (P. 20/2). Cet accord est entré en vigueur vu l'abandon du plan de quartier, selon le prévenu. Il prévoyait ce qui suit :
"(...)
1. sur la base de la promesse de vente et d'achat n° [...] signée auprès du notaire [...] en date du 26.08.03, les 2 associés gérants susmentionnés décident de procéder à la radiation du droit d'emption du 28.08.03 sur les lots B (RF [...]) et C (RF [...]) selon plan de fractionnement ci-joint établi par le géomètre [...] en date du 03.12.04.
2. M. Z._ acquiert le lot C (RF [...]).
3. Pour compenser le chiffre d'affaire à réaliser par M. Z._ sur la parcelle C, il est décidé qu'en ce qui concerne la parcelle A, l'entier du gain sur la vente du terrain de même l'entier du chiffre d'affaire et bénéfice concernant 4 unités à réaliser sur cette même parcelle, sont entièrement attribué (sic) à M. V._.
4. En cas de réalisation d'une cinquième unités sur la parcelle C., le chiffre d'affaire et bénéfice y relatif sont réparti (sic) pour moitié entre MM. Z._ et V._".
Un nommé P._ a procédé à un échange de terrains voisins avec l'hoirie le 8 septembre 2004 (P. 5/19). H._ a donné son consentement à cet échange le 11 septembre suivant en sa qualité de bénéficiaire d'un droit d'emption grevant la parcelle de l'hoirie concernée par cette opération (P. 5/20). Après cette première transaction, qui avait été passée dans les locaux de V._ en présence de Z._, les associés ont, par lettre du 11 janvier 2005 à l'en-tête de H._ et signée à deux, derechef pris contact avec P._ pour conférer de l'acquisition d'autres terrains dont celui-ci était propriétaire dans le même périmètre (P. 5/21).
Par courriel du 3 février 2005 (P. 7/1), V._ a reproché à son associé d'avoir, selon lui, réalisé un gain de 678'478 fr. sur la parcelle [...]. Il a demandé le partage par moitié de ce bénéfice ou, à défaut, sa restitution totale à l'hoirie. Il ajoutait qu'il considérait que "la situation actuelle (était) une
escroquerie
(souligné dans le texte,
réd
.) vis-à-vis de (lui), de la (sic) hoirie [...] mais aussi vis-à-vis de la société H._". Z._ n'a pas donné suite à ce message, si ce n'est pour proposer une rencontre à son associé (ibid.).
Le 11 février 2005, V._ a envoyé à Z._ un courrier dont la teneur était la suivante (P. 77) :
"(...). Comme déjà mentionné lors de notre récente rencontre, je constate que le fait que tu aies acquis la parcelle n° [...] (B) au prix de frs 17’000. -- a pour conséquence que notre implication réciproque dans le projet global de [...], par le biais de notre société [...], n’est plus du tout équitable.
(...).
Afin de visualiser cet aspect plus concrètement je joins à la présente un tableau global intégrant les prix d’achat et de vente des différentes parties du terrains (sic) (A-B-C-D). Il en ressort très clairement que je suis très largement pénalisé par la situation actuelle. En effet, tenant compte exclusivement du terrain, le bénéfice que je peux espérer par la vente de 7269m2 à frs 500.-- n’est que de frs 491'500.--, alors que la vente des 3202m2 que tu as acquis te rapportent (sic) un bénéfice de frs 1'194'000.-- soit 60% de plus !!
Même si l’on tient compte de villas à construire, il reste une différence finale de frs 300'000.-- environ !!
Tu noteras que en plus, ces résultats son atteints si l’entier des 7269m2 restant me sont attribués.
(...).
D’autre part je t’informe qu’en ce qui concerne l’échange avec M. [...] je souhaite le réaliser au plus vite et selon le PPA même si le nombre de m2 n’est pas tout à fait identique. Je dois voir le fils de M. [...] dans 10 jours et j’ai l’intention d’aller de l’avant. Comme convenu lors de notre dernière rencontre je prends note que tout ce qui concerne le lot du fils de M. [...] est géré désormais exclusivement par moi.
En ce qui concerne la société [...] je pense qu’elle doit prendre en charge que 2/3 de la facture de Me [...] concernant la promesse. Le solde doit être à ta charge.
Je te remercie également de me rembourser au plus vite la moitié de la facture de Me [...] et la moitié des impôts payés.
Tant que tous les points susmentionnés ne seront pas réglés il est hors de question que j’établisse à titre gracieux le projet de ta villa comme je m’y étais engagé. Je précise que seul le projet est offert. dans (sic) tous les cas, la réalisation sera facturée selon la norme sia.
Je te rappelle que nous avons signé le 5 juillet 2002 une convention toujours en vigueur, dans laquelle il est clairement précisé que toute l’opération “[...]” doit être réalisée pour un profit égal pour chacun des 2 partenaires. (...)."
A la fin du mois de février 2005, les associés ont rencontré P._ dans les locaux de V._ afin de discuter de l'objet mentionné par leur lettre du 11 janvier précédent. P._ a accepté d'entrer en matière. Les trois protagonistes se sont alors séparés, se laissant le temps de la réflexion. Sitôt après l'entretien, P._ et Z._ ont bu l'apéritif et fait connaissance sur le plan personnel. P._ a contacté le prévenu par téléphone le 1
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mars 2005 et l'a autorisé à arpenter son terrain. Z._ l'a rappelé autour du 5 mars suivant pour annoncer que l'arpentage aurait lieu incessamment, hors sa présence. Par la suite, le prévenu l'a à nouveau contacté pour lui proposer une rencontre en tête-à-tête.
Entendu comme témoin par le tribunal correctionnel, P._ a fait savoir que cette rencontre avait eu lieu le 9 mars 2005. Il a alors fait savoir à son interlocuteur qu'il était obligé de vendre, même si c'était à contrecœur. Dans sa déposition, le témoin a précisé qu'il avait été mal à l'aise dans les locaux de V._ et qu'il était également mal à l'aise dans toute forme de négociation triangulaire. D'après le témoin, le prévenu lui a alors indiqué qu'il était également mal à l'aise dans sa relation avec son associé et lui a suggéré, respectivement proposé de traiter à deux directement. Il a ajouté que l'acte pourrait être passé avec R._. Il lui a, toujours selon le témoin, précisé qu'il était en train de se séparer de son associé et a ajouté qu'il estimait qu'il était préférable pour le promettant de traiter avec R._ "pour ne pas être mêlé au litige [...]". Le témoin a précisé que, pour lui, l'important était de n'avoir qu'un seul interlocuteur, quel qu'il soit. Il a ajouté qu'il rechignait à traiter avec un professionnel de l'immobilier, vu le harcèlement dont il faisait l'objet de la part de ces milieux depuis 1991. Il a toutefois fait une exception en faveur de H._ car il avait eu de bons contacts avec l'hoirie [...] et celle-ci avait traité avec la société, de sorte qu'il avait reporté sur la société la confiance que lui avait accordée l'hoirie. Après avoir demandé un temps de réflexion, il a, par appel téléphonique du 15 mars 2005 au prévenu, accepté de vendre. Il a toutefois traité directement avec Z._ et a donné son consentement définitif à la constitution d'un droit d'emption sur son fonds le 26 mars suivant après règlement des conditions de la vente. Il a précisé que, si le prévenu ne lui avait pas donné des informations sur les relations qu'il avait avec son associé, il aurait signé avec H._. Partant toutefois du principe que les relations entre associés n'étaient pas bonnes, le témoin ne souhaitait pas passer convention avec la société, ni avec les deux associés. C'est à la suite de ces démarches et réflexions que le droit d'emption a été accordé à R._ ou à ses nommables, ce par acte notarié du 13 avril 2005 (P. 14/2), comme on le verra en détail plus loin ci-dessous.
Interrogé par le Juge d'instruction le 27 mars 2009, le prévenu a fait savoir qu'il s'était séparé de son associé le 7 mars 2005 (PV aud. 4, lignes 19-20). Il a confirmé ce propos à l'audience de première instance. Lors d'une audition antérieure, le 17 décembre 2008, il avait imputé cette rupture immédiate, sans en préciser la date, au motif que V._ avait refusé de dresser gratuitement les plans de sa villa, qui devait être construite sur l'une des parcelles nouvellement acquises (PV aud. 3, lignes 25-30). Le 5 avril 2005, à 10 h 45, il a toutefois adressé un courriel à son associé pour le tenir informé du déroulement de divers projets portant sur des ventes de parcelles qui ne sont pas en cause dans la présente procédure. Ce message commençait par la formule "cher [...] (sic)" et se terminait par la phrase "j'attends toujours ta prise de position pour notre collaboration depuis deux mois, cordialement". Un exemplaire produit en copie en procédure comportait cependant, à son pied, la mention manuscrite suivante, signée du prévenu, mais non datée séparément : "Je prends note que tu essaye (sic) de (illisible) tous les avantages pour (sic) ton côté. Comme discuté à notre séance du 7.3.05, ou (sic) je t'avais prévenu de ne plus travailler avec toi et de faire l'affaire tout seul, je ne vois aucun changement ! Essaye de vendre les maisons à [...] (illisible). Pour moi c'est fini, pas de nouvelles affaires avec toi !!!" (P. 20/4).
V._ a fait savoir que, s'agissant de ses relations avec le prévenu, il y avait bien eu quelques tensions, mais que, pour lui, jamais elles n'avaient été interrompues. Il a ajouté qu'il avait continué à faire des affaires avec le prévenu sauf erreur jusqu'en 2007, année de la vente du dernier terrain issu de l'hoirie [...]. Il a précisé ce qui suit : "Formellement, je n'ai pas réalisé que M. Z._ ne voulait plus faire d'affaires avec moi". Il n'est pas établi que V._ ait jamais reçu sous quelque forme que ce soit la partie manuscrite figurant au pied du message. L'une des deux copies du courriel produites par le prévenu en annexes à ses déterminations adressées au Juge d'instruction le 7 janvier 2009 (P. 7/2) ne comporte d'ailleurs aucun ajout manuscrit.
Le 17 juin 2005, les associés ont passé une "convention finale de répartition" (P. 20/6). Cet accord prévoyait pour l'essentiel que le bénéfice sur la vente de certains lots serait attribué à parts égales au prévenu, par versement au crédit du compte de R._, et la société anonyme d'architecture exploitée par son associé ([...], déjà mentionnée) et le bénéfice issu de la vente d'autres lots serait versé à la société en question. Il disposait aussi que, concernant l'une des parcelles issues de la partition de la parcelle [...], acquise de P._, si [...] obtenait le mandant de la réalisation de la villa à construire sur ce fonds, elle versera, "dès signature du contrat d'architecte", un montant de 20'000 fr. à Z._. Ce montant a été versé selon quittance paraphée le 22 mai 2006 par dame Z._ qui engageait expressément son époux par sa signature (P. 7/5).
Après même la constitution du droit d'emption en faveur de R._ déjà mentionné, soit le 1
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juillet 2005, le prévenu et V._ ont acquis des terrains de l'hoirie (P. 14 en annexe à la plainte pénale). Entendu à ce sujet à l'audience de première instance, le prévenu a fait savoir ce qui suit :
"Je ne me sentais lié que par la convention de 2002, personnellement je n'aurais plus fait d'affaires avec M. V._. J'ai dit à M. V._ que je ne restais avec lui que pour la mise en valeur des terrains [...]. On n'a pas dissous cette société [...] bien que M. V._ ne fait (sic; recte : me l'ait) demandé en 2007.
Je ne me considérais lié que pour la réalisation des terrains [...]. Pour moi c'était une chance de réunir des fonds propres me permettant de construire ma maison.
(...).
En mars 2006, M. V._ qui savait que j'avais acheté les terrains P._, m'a demandé s'il pouvait faire visiter un des terrains à un client. Plus tard, la société de M. V._ a payé fr. 20'000.- à Mme Z._ pour obtenir un mandat d'architecte.
Le but de la société H._ n'était pas limité à l'affaire [...] ni pour moi ni pour M. V._. (...).
Je précise qu'au moment où on a signé la convention M. V._ a payé fr. 20'000.- pour avoir un mandat d'architecte.
Je n'ai rien fourni à M. V._ ni copie du droit d'emption ni un plan. J'affirme que la question du droit d'emption a été abordée lors des assemblées générales des [...]. (...).
On (les associés,
réd
.) a signé une convention finale en 2005, pour moi on réglait là toutes les questions concernant notre collaboration pour les terrains [...] et P._. (...) Il (V._,
réd
.) m'a donné décharge, il a demandé la dissolution de la société pour (sic) moi tout était en ordre. (...)."
A une date indéterminée du mois d'avril 2005, mais antérieure au 13, P._ a rencontré l'une de ses voisines, [...], en présence du prévenu. P._ a annoncé à dame [...] qu'il allait vendre son terrain au prévenu. Ce dernier a alors demandé à la voisine d'attendre un jour ou deux que l'acte soit signé pour en parler, notamment à V._. [...] a déclaré qu'elle avait alors compris que V._ n'était pas au courant de la prochaine conclusion de ce contrat et qu'il ne fallait pas qu'il le soit.
L'opération portant sur le terrain P._ a été passée par Z._ seul, agissant à l'insu de V._ en sa qualité d'associé-gérant de R._. Comme déjà mentionné, P._ a ainsi, par acte authentique instrumenté le 13 avril 2005 par le notaire [...] (P. 14/2), accordé un droit d'emption sur la parcelle convoitée à R._, représentée par Z._ engageant la société sous sa signature individuelle, ou ses nommables qu'elle se réservait d'indiquer. Constitué à l'échéance du 13 avril 2008, soit pour une durée de trois ans, prolongeable, ce droit portait sur une part de bien-fonds "d'environ quatre mille mètres carrés" à détacher de la parcelle feuillet n° [...] du Registre foncier de [...] selon un plan d'intention de fractionnement établi par un géomètre officiel et annexé à l'acte authentique. La valeur du m
2
a été arrêtée à 360 francs. Le domaine ainsi promis-vendu a été divisé en quatre parcelles, portant numéros de feuillet [...] à [...] (P. 14/2 précitée). Le droit d'emption a été inscrit au Registre foncier. Les 16 avril et 20 novembre 2007, agissant à titre personnel et par R._, le prévenu a exercé son droit d'emption et a revendu ces quatre parcelles à divers tiers acquéreurs. Ce faisant, il a réalisé un bénéfice total de 699'940 fr. (P. 14/7, 12, 10 et 6, s'agissant respectivement des parcelles [...] à [...]).
L'assemblée des associés a donné quitus aux associés-gérants pour les exercices annuels 2005 et 2006 lors des assemblées du 31 janvier et du 4 décembre 2007 respectivement et les a réélus à l'unanimité en qualité de gérants pour l'exercice suivant (P. 5/8 et 5/9).
1.3 Le 20 novembre 2008, V._ a déposé plainte pénale et s'est constitué partie civile à raison de l'opération du 13 avril 2005 (P. 4). Il mentionne notamment dans sa plainte que Z._ l'avait informé en juin 2005 de l'acquisition d'une partie de la parcelle promise-vendue par P._ (plainte, ch. 17); il ajoute qu'il avait appris de [...], par ailleurs l'une de ses clientes, que son associé s'était porté promettant-acquéreur des terrains en question (ch. 15). Il précise enfin qu'il n'a pas vérifié la véracité des informations données par dame [...] (ch. 16).
Entendu le 26 mai 2009 par le Juge d'instruction en sa qualité de plaignant, V._ a déclaré qu'il avait connaissance, en mai 2006, du fait que Z._ avait acquis des terrains pour son propre compte, qu'il n'avait pas cautionné l'opération du 13 avril 2005, qu'il savait que cette promesse de vente était irréversible et qu'il était juste en quête d'un mandat de construction d'une maison (cf. PV aud. 5, lignes 51 ss).
1.4 A une date indéterminée de l'année 2009, mais postérieure au 28 janvier, le prévenu, qui avait eu accès au dossier, a invité P._ à dîner pour lui reprocher de ne pas avoir dit la vérité lorsqu'il avait été interrogé dans la présente enquête à propos de la vente de son terrain, ce qui l'avait fâché. P._ lui aurait déclaré qu'il n'était pas satisfait de la manière dont l'audition s'était passée et qu'il entendait rectifier certains points lors d'une prochaine audition. Z._ lui a proposé de faire corriger ses déclarations devant notaire, ce que P._ a refusé. Le témoin n'a pas été réentendu durant l'enquête. Comme on l'a vu, il l'a toutefois été à l'audience de première instance.
1.5 A la requête de V._ (P. 75), un commissaire a été désigné à H._ par décision du juge civil compétent du 20 janvier 2011 (P. 76), dont les motifs ont été communiqués aux parties le 28 mars suivant. Cette décision a été confirmée par arrêt de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du 8 juin suivant (P. 37/1); la demande d'effet suspensif assortissant un recours en matière civile interjeté par Z._ contre l'arrêt cantonal a été rejetée par ordonnance du 4 octobre 2011 de la Présidente de la I
re
Cour de droit civil du Tribunal fédéral (4A_527/2011; P. 37/2). Par procédé du 14 octobre 2011, H._ a demandé à participer au procès en qualité de demanderesse au pénal et au civil (P. 36), requête à laquelle la direction de la procédure a fait droit par prononcé du 24 octobre suivant (P. 55; recte : 54/1). Un recours interjeté contre ce prononcé a été déclaré irrecevable par arrêt du 10 novembre 2011 de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (476/2011) pour le motif que la décision entreprise n'était pas sujette à recours, mais ne pouvait, bien plutôt, être attaquée qu'avec le jugement final.
Le 21 novembre 2011, Z._ a présenté au tribunal correctionnel une requête tendant à ce que H._ ne soit pas admise au procès en qualité de partie civile (P. 66 et 67). L'incident a été traité à l'audience du fond avant l'ouverture des débats, la requête étant rejetée par prononcé du 23 novembre 2011. Par prononcé du 29 novembre 2011, la direction de la procédure a rejeté la requête, admettant la qualité de partie au procès pénal de H._ comme demanderesse au civil.
1.6 A l'audience de première instance, V._ a conclu qu'il lui soit donné acte de ses réserves civiles contre le prévenu. Pour sa part, H._ a conclu, selon procédé écrit, que le prévenu soit reconnu son débiteur de 674'571 fr. 70, savoir 147'063 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 21 novembre 2007, 192'874 fr. 35, avec intérêts à 5 % l'an dès le 27 novembre 2007, 192'874 fr. 35, avec intérêts à 5 % l'an dès le 21 novembre 2007 et 141'760 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 17 avril 2007 (P. 72). Elle a déposé une conclusion additionnelle, fondée sur l'art. 73 al. 1 let. a et c et al. 2 CP, tendant à l'allocation en sa faveur de la peine pécuniaire ou de l'amende qui pourraient être prononcées, respectivement du montant de la créance compensatrice mise à la charge du prévenu.
2. Appréciant les faits de la cause, les premiers juges ont d'abord considéré qu'il existe, pour les associés et les gérants d'une sàrl, un devoir de réserve et d'abstention procédant de l'art. 803 CO et de l'art. 812 CO respectivement. Ils ont ensuite relevé que le prévenu avait fait fi des devoirs de réserve et de fidélité qui lui incombaient envers H._ en sa qualité d'associé-gérant de la société, ce qui ne pouvait lui échapper comme juriste. En effet, sachant que les contacts avec P._ avaient été noués par lettre du 11 janvier 2005 à l'en-tête de H._ et signée par les deux associés-gérants, l'acquisition et la mise en valeur des terrains de ce promettant relevaient clairement de l'activité de la société. Les premiers juges ont en outre retenu que le prévenu avait, ce faisant, porté atteinte aux intérêts pécuniaires de son associé et de la société. Le tribunal correctionnel a considéré que l'auteur avait agi avec intention et qu'il avait de surcroît été mû par l'appât du gain, à l'exclusion des motifs dont il s'était prévalu, à savoir les relations de confiance particulières nouées avec le promettant P._, ses lourdes dissensions alléguées avec son associé et la décharge (quitus) donnée par V._ pour chacun des exercices 2005 et 2006 de la société. Quant à ce dernier moyen en particulier, la cour a retenu que ni l'une ni l'autre des décharges n'emportait consentement par acte concluant à ce que le prévenu mène seul l'affaire avec P._. En effet, V._ n'a pas eu connaissance des faits litigieux avant la fin de l'année 2007, du moins le prévenu n'a-t-il pas établi le contraire. Le tribunal correctionnel a ainsi retenu que les éléments constitutifs, objectifs et subjectifs, de l'infraction de gestion déloyale étaient réunis, l'infraction n'ayant été définitivement consommée qu'au moment ou le prévenu avait exercé son droit d'emption pour aliéner les parcelles, soit en avril et en novembre 2007. A ceci s'ajoute, sous l'angle de la circonstance aggravante prévue par l'art. 158 ch. 1 al. 3 CP, que l'auteur avait agi dans le dessein de se procurer un enrichissement illégitime.
Appréciant la culpabilité du prévenu, les premiers juges ont retenu, à charge, le fait que l'intéressé avait caché ses agissements à son associé pendant près de deux ans, que l'infraction avait été commise par un homme particulièrement averti vu sa formation de juriste, qu'aux débats de première instance encore, l'auteur n'avait fait preuve d'aucune prise de conscience ni de remords et, enfin, que l'infraction avait été perpétrée durant le délai d'épreuve d'une précédente condamnation. Aucune circonstance n'a expressément été retenue à décharge. Les conditions objectives et subjectives du sursis ont été tenues pour remplies. Pour aider le prévenu à s'amender, la peine a toutefois été assortie du délai d'épreuve maximal et de règles de conduite visant à la réparation du dommage subi par H._ selon les conclusions civiles allouées, remboursable à hauteur de 120'000 fr. par an, en principe sous la forme de versements mensuels de 10'000 francs.
3. Statuant sur les conclusions civiles de H._, le tribunal correctionnel a en effet considéré que le prévenu devait réparation du gain manqué, établi par pièces. Il les a tenues pour fondées dans leur principe et dans les quotités réclamées, en capital et intérêts, pour ce qui est de la réparation du préjudice allégué. Il a en revanche rejeté la conclusion additionnelle de la demanderesse tendant à l'allocation de la peine pécuniaire ou de l'amende qui pourraient être prononcées, ou encore du montant de la créance compensatrice mise à la charge du prévenu. Les premiers juges ont en outre fait droit à la conclusion de V._ tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ses réserves civiles contre le prévenu. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
3.
L'appelant se prévaut en premier lieu d'une constatation incomplète ou erronée des faits par les premiers juges, sur plusieurs points.
3.1
L’appelant reproche d'abord aux premiers juges de ne pas avoir tenu compte de la rupture de confiance intervenue entre les deux associés (cf. appel, pp. 7 à 9). Il faut lui donner acte du fait que certains des éléments des relations contractuelles entre parties au fil du temps ne sont pas mentionnés dans l’état de fait du jugement de première instance. Il s'ensuit que l’état de fait peut être tenu pour incomplet sur ce point. Partant, le moyen doit être admis. Cela étant, l’état de fait établi par la Cour d’appel complète cet historique contractuel en retraçant l'évolution des rapports entre parties durant les faits déterminants. Pour le surplus, le point de savoir dans quelle mesure la rupture précoce du lien de confiance entre les deux associés, alléguée par l'appelant, est de nature à influer sur la question du devoir de fidélité doit être examinée ci-dessous sous l'angle du droit matériel.
3.2
L’appelant reproche aux premiers juges d’avoir retenu que H._ aurait pu acquérir les terrains de P._ (appel, pp. 10-11). Mais à tort. En effet, si le tribunal correctionnel a retenu que le promettant-vendeur aurait aussi vendu à la sàrl, c'est pour les motifs qu'il était prêt à faire une exception en faveur de cette société, même si, par ailleurs, donc en principe, il ne souhaitait pas vendre à une société immobilière. Ce qui l'en a dissuadé, c'est le fait que les relations entre les associés n'étaient pas bonnes, comme le lui avait déclaré l'appelant (jugement, p. 41). Il est au demeurant établi que, pour ce promettant, l'important était de n'avoir qu'un seul interlocuteur, quel qu'il soit. P._ a même précisé que, s'il rechignait à traiter avec un professionnel de l'immobilier, c'était en raison du harcèlement dont il faisait l'objet de la part de ces milieux depuis 1991. Il a ajouté qu'il avait fait une exception en faveur de H._ car il avait eu de bons contacts avec l'hoirie [...] et que celle-ci avait traité avec la société, de sorte qu'il avait reporté sur la société la confiance que lui avait accordée l'hoirie. Ces déclarations ne sont pas contradictoires, s'agissant tant de celles qui ont été tenues durant l'enquête (PV aud. 1, déjà cité) que ce telles tenues à l'audience de première instance (jugement, pp. 13 à 15). Elles emportent la conviction, dès lors que l'on ne voit pas quel intérêt aurait eu leur auteur à travestir la réalité. Elles sont du reste dans une large mesure subjectives et, partant, échappent à toute réfutation factuelle. Il s'ensuit que le fait que P._ ait déclaré lors des débats de première instance qu’il ne souhaitait pas contracter avec la société ni avec les deux associés en raison du fait que les relations entre ces derniers n’étaient pas bonnes (jugement, p. 15 in initio) ne suffit pas à retenir
a contrario
qu’il n’aurait pas vendu à la sàrl. En effet, ce n'est que l'appelant qui, dans le cadre de ses démarches consistant à obtenir le droit d’acheter tout seul, peut être l’auteur des déclarations ayant fondé cette ultime déclaration du promettant, sachant que P._ n'avait rien contre V._. C'est du reste sur la foi des propos du prévenu quant à ses prétendues mauvaises relations avec V._ que P._ a pris la décision d'exclure ce dernier de sa promesse de vente, plus précisément d'octroi d'un droit d'emption. Cette origine enlève tout caractère décisif aux déclarations de P._, d’autant que l’on sait que, lorsqu’il a eu connaissance des premières déclarations du promettant-vendeur dans le cadre de la procédure pénale, le prévenu est intervenu auprès de lui pour tenter de l'influencer à son profit (jugement, p. 39). Ce moyen de l'appelant doit donc être rejeté.
3.3
L’appelant reproche aux premiers juges d’avoir retenu que V._ ignorait qu'il avait acquis un droit d’emption sur les terrains de P._.
A cet égard, il y a matière à compléter l’état de fait, voire même à le rectifier pour ce qui est de la question de la connaissance par V._ de l’acquisition par l'appelant des terrains de P._, soit du droit d'emption concédé en sa faveur, respectivement au profit de R._. Il ressort en effet de sa plainte pénale que V._ avait été informé par l'appelant, en juin 2005, de l'acquisition d'une partie de la parcelle promise-vendue par P._ le 13 avril précédent. Cet élément est d'ailleurs établi par la pièce 20/6, citée dans les faits ci-dessus. Il doit donc tenu pour avéré que le plaignant avait eu connaissance de l'acte passé le 13 avril 2005 en juin 2005 au plus tard, en tout cas avant le 18 de ce mois, la convention de répartition étant datée du 17. Ce moyen doit être admis dans cette mesure.
3.4
L’appelant reproche aux premiers juges d’avoir retenu qu’il avait sciemment dissimulé à son associé le droit d’emption acquis sur le bien-fonds de P._. L’état de fait n’est toutefois ni erroné, ni sujet à la critique à quelqu'égard que ce soit en tant qu’il retient que le prévenu avait demandé à dame [...] de ne rien dire à ce sujet, notamment à V._, avant la passation de l'acte. Pour le surplus, le point de savoir dans quelle mesure cette déclaration permet ou non de retenir la conscience et la volonté de l'appelant de violer ses devoirs de gérant sera examiné plus bas, sur la base de l’entier des éléments factuels retenus.
3.5
L’appelant conteste la quotité du dommage retenu. Ce moyen amalgame fait et droit. Pour ce qui est du fait, le jugement de première instance se limite à mentionner le gain manqué brut, fixé à 699'940 fr., pour un gain manqué net de 674'571 fr. 70, une fois déduit les droits de mutation et les frais de notaire, à tout le moins ceux allégués en procédure (p. 41). Cet énoncé procède de l'admission des conclusions de H._, dont il reprend implicitement les motifs. C'est ainsi que, par procédé écrit du 29 novembre 2011 (P. 72, déjà mentionnée), la demanderesse a demandé, en capital, les différences entre le prix d'achat et le prix de vente de chacune des parcelles [...] à [...] promises-vendues en 2005 et aliénées en 2007 par le prévenu ou par R._, à savoir respectivement 373'680 fr. et 537'420 fr.; 373'680 fr. et 570'900 fr.; 373'680 fr. et 570'900 fr.; 318'960 fr. et 460'720 francs. Le jugement passe sous silence cette répartition des postes du dommage allégué alors qu'il aurait incombé au tribunal correctionnel d'en établir le détail, quitte à se référer au procédé de la demanderesse. Le moyen doit donc être admis dans cette mesure. Pour le reste, la notion de dommage est une question de droit et les autres moyens de l'appel à cet égard seront examinés ci-dessous.
3.6
L’appelant reproche également aux premiers juges de ne pas avoir tenu compte des décharges données lors des clôtures d’exercice par les assemblées des associés. Il est exact que l'état de fait passe ce point sous silence. Le fait invoqué est établi par les pièces 5/7 et 5/8, mentionnées dans les faits ci-dessus. Pour le surplus, comme pour les autres faits complétés ou rectifiés, les effets juridiques du fait allégué seront discutés ci-dessous avec l'examen du droit matériel.
4.
Contestant toujours les faits retenus, l’appelant plaide la violation du principe de la présomption d’innocence.
4.1
La présomption d'innocence, qui est garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables au prévenu sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
4.2
En l’espèce, il résulte de ce qui précède qu’il se justifier de rectifier, respectivement de compléter l’état de fait des premiers juges dans la mesure ressortant du considérant 3 ci-dessus; c'est sur la base de cet état de fait qu'il sera statué en droit. Une fois ces rectifications et compléments apportés, il n’y a plus d’éléments desquels découlerait un doute suffisant qu'il appartiendrait à la cour de céans de lever en faveur du prévenu. Partant, l’argument doit être rejeté pour autant qu’il ait encore un objet.
5.
L'appelant conteste s'être rendu coupable de gestion déloyale, concluant à son acquittement.
5.1
5.1.1
Aux termes de l'art. 158 CP, celui qui, en vertu de la loi, d'un mandat officiel ou d'un acte juridique, est tenu de gérer les intérêts pécuniaires d'autrui ou de veiller sur leur gestion et qui, en violation de ses devoirs, aura porté atteinte à ces intérêts ou aura permis qu'ils soient lésés sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (ch. 1 al. 1). Le cas de la gestion déloyale aggravée est réalisé lorsque l'auteur a agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (ch. 1 al. 3).
5.1.2
Sur le plan objectif, l'infraction de gestion déloyale au sens de l'art. 158 ch. 1 al. 1 CP suppose la réalisation de trois éléments : il faut que l'auteur ait eu un devoir de gestion ou de sauvegarde, qu'il ait violé une obligation qui lui revient en cette qualité et qu'il en soit résulté un dommage; sur le plan subjectif, il faut qu'il ait agi intentionnellement. Le dol éventuel suffit, à la condition qu’il soit strictement caractérisé (Corboz, Les infractions en droit suisse, Vol. I, 3
e
éd., n. 13 ad art. 158 CP).
Le devoir de gestion implique un pouvoir sur les biens d'autrui comportant une indépendance suffisante, un droit de disposition autonome, une certaine latitude qui caractérise le devoir de fidélité dont la violation est punissable (ATF 123 IV 17 c. 3b). Ce pouvoir peut se manifester non seulement par la passation d'actes juridiques, mais également par la défense, sur le plan interne, d'intérêts patrimoniaux ou par des actes matériels. Il faut cependant que le gérant ait une autonomie suffisante sur tout ou partie de la fortune d'autrui, sur les moyens de production ou le personnel d'une entreprise (ATF 123 IV 17, précité c. 3b; 120 IV 190 c. 2b).
Un tel devoir incombe notamment aux organes des sociétés commerciales, soit aux membres du conseil d'administration et à la direction, ainsi qu'aux organes de fait (Trechsel, Schweizerisches Strafgesetztbuch, Praxiskommentar, St-Gall 2008, n. 6 ad art. 158 CP; Niggli/Wiprächtiger, Strafgesetzbuch, Basler Kommentar, n. 21 ss ad art. 158 CP; Garbarski, La responsabilité pénale des organes dirigeants des sociétés anonymes, Zurich 2006, p. 282; Donatsch, Aspekte der ungetreuen Geschäftsbesorgung gemäss Art. 158 Ziff. 1 StGB in der Aktiengesellschaft, unter besonderer Berücksichtigung der Delegation von Kompetenzen durch den Verwaltungsrat, in RPS 120/2002, pp. 4 ss.).
Pour qu'il y ait gestion déloyale, il ne suffit pas que l'auteur ait été gérant, ni qu'il ait violé une quelconque obligation. Le terme de gestion déloyale et la définition légale de l'infraction exigent que l'obligation qu'il a violée soit liée à la gestion confiée (ATF 120 IV 190, précité c. 2b). Il convient donc d'examiner de manière concrète si les actes de gestion reprochés violaient un devoir de gestion spécifique. Les devoirs de gestion ou de sauvegarde qui déterminent le comportement délictueux sont déterminés par les obligations imposées au gérant. Ces obligations sont d'abord définies par la loi, mais peuvent aussi l'être par les statuts, les règlements ou les décisions de l'assemblée générale pour ce qui est d'une société anonyme (Garbarski, op. cit., pp. 284 s.).
Parmi les devoirs des administrateurs et des tiers chargés de tout ou partie de la gestion figurent notamment les devoirs de diligence et de fidélité envers la société, qui leur imposent de veiller fidèlement aux intérêts de celle-ci (art. 717 al. 1 CO). Pour déterminer si la personne recherchée a manqué à son devoir de diligence, on doit se demander si elle a déployé les efforts que l'on pouvait exiger d'elle pour remplir correctement sa mission. Il faut donc se pencher sur sa mission et se demander concrètement ce qu'elle devait faire ou ne pas faire. Le contenu de la mission peut résulter soit des lois et des statuts, soit dépendre des circonstances concrètes (Corboz, dans : Tercier/Amstutz [éd.], Commentaire romand, Code des obligations II, Bâle 2008, n. 24 ad art. 754 CO).
L'infraction de gestion déloyale n'est consommée que s'il y a eu un dommage patrimonial. Ce préjudice doit être en rapport de causalité avec la violation des devoirs (Corboz, op. cit., n. 10 ad art. 158 CP). Le dommage est une lésion du patrimoine sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation de passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif, mais aussi d'une mise en danger de celui-ci telle qu'elle a pour effet d'en diminuer la valeur du point de vue économique. Par ailleurs, un préjudice temporaire suffit (ATF 122 IV 279 c. 2a; 121 IV 104 c. 2c; 120 IV 122 c. 6b/bb). Il n'est pas nécessaire que le dommage corresponde à l'enrichissement de l'auteur, ni qu'il soit chiffré; il suffit qu'il soit certain (ATF 123 IV 17 c. 3d). L’infraction est consommée lorsque l’auteur a causé un dommage au patrimoine qu’il devait protéger (Corboz, op. cit., ibid.).
Il importe peu que le comportement délictueux soit une action ou une omission (FF 1991 II 1019), un acte juridique ou un acte matériel (Corboz, op. cit., n. 9 ad art. 158 CP et les réf. cit.).
5.1.3
S'agissant en particulier de la gestion d'une sàrl, les normes applicables ont fait l'objet d'amples modifications par la loi fédérale du 16 décembre 2005 (Droit de la société à responsabilité limitée; adaptation des droits de la société anonyme, de la société coopérative, du registre du commerce et des raisons de commerce), en vigueur depuis le 1
er
janvier 2008. Alors même que la revente des parcelles a été parachevée en 2007 encore, les premiers juges se sont expressément fondés sur le nouveau droit des sociétés pour retenir une violation de son devoir de fidélité par le prévenu.
L'ancien droit se limitait à prévoir, sous la note marginale
Prohibition de faire concurrence
, qu'aucun associé gérant ne peut, dans la branche exploitée par la société et sans le consentement des autres associés, faire des opérations pour son compte personnel ou pour le compte d'un tiers (art. 818 al. 1, in initio, aCO, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007). Dans sa teneur actuelle, l'art. 803 al. 2 CO dispose, sous la note marginale
Devoir de fidélité et interdiction de faire concurrence
, que les associés s’abstiennent de tout ce qui porte préjudice aux intérêts de la société; qu'ils ne peuvent en particulier gérer des affaires qui leur procureraient un avantage particulier et qui seraient préjudiciables au but de la société; que les statuts peuvent prévoir que les associés doivent s’abstenir de faire concurrence à la société. Sous la note marginale
Devoirs de diligence et de fidélité; prohibition de faire concurrence
, l'art. 812 CO prévoit que les gérants ainsi que les tiers chargés de la gestion exercent leurs attributions avec toute la diligence nécessaire et veillent fidèlement aux intérêts de la société (al. 1) et qu'ils sont tenus au même devoir de fidélité que les associés (al. 2).
Indépendamment des termes utilisés par le législateur, il doit être retenu que l'ancien droit, applicable
ratione temporis
aux faits de la cause, imposait aux associés, en tout cas aux associés-gérants, le devoir de fidélité mis en exergue par les premiers juges, même si ceux-ci se sont fondés sur la novelle du 16 décembre 2005. Peu importe du reste le droit intertemporel. Il est à cet égard déterminant que les termes
prohibition de faire concurrence
figurent dans la note marginale tant de l'art. 818 ancien CO que de l'art. 812 nouveau CO, l'art. 803 nouveau CO consacrant pour sa part l'expression
interdiction de faire concurrence
. Point n'est besoin pour le juge pénal de procéder à une plus ample exégèse du droit commercial pour en déduire que l'obligation de fidélité des associés-gérant n'a pas été instituée par le législateur au 1
er
janvier 2008 seulement, mais que la novelle n'a, bien plutôt, fait que préciser les obligations en question par rapport à l'ancien droit.
5.2
5.2.1
En l’espèce, l’existence d’un devoir de gestion de l’appelant en sa qualité d’associé et de gérant de la sàrl est avérée pour les motifs développés par les premiers juges, même s'ils sont fondés sur les normes topiques selon le nouveau droit des sociétés (cf. ci-dessus). L’appelant ne saurait en particulier se prévaloir du fait que les associés avaient passé certains accords hors du cadre de la sàrl, sachant qu’il résulte des autres achats et ventes de terrains que ces opérations-là avaient lieu au nom de la société. Il est établi, ne serait-ce que par la lettre du 11 janvier 2005 et la présence des deux associés à la rencontre de fin février 2005, que l'intention des deux associés était de faire ensemble, par l'intermédiaire de la sàrl, l'opération P._. Le premier élément objectif de la gestion déloyale est donc donné.
5.2.2
Il n’en est pas autrement s’agissant du point de savoir si l’appelant a violé ce devoir de gestion en contrevenant à son obligation de fidélité et d'information envers la société : co-gérant d’une petite société dont le but était de faire de la promotion immobilière et qui venait d’entamer des démarches pour discuter de la situation concernant des terrains qu'elle convoitait, l’appelant a violé son devoir de gestion en passant un acte constituant un droit d'emption sur un bien-fonds à fins de revente – donc dans le domaine d'activité statutaire de H._ – au nom de sa propre société, tout en faisant valoir auprès du promettant-vendeur qu’il envisageait de se séparer de son associé avec lequel ses relations étaient prétendument mauvaises et qu’il fallait donc traiter avec l’un ou avec l’autre seulement. Par cet acte de concurrence accompli à l'insu de la société, dont son associé était l'unique autre gérant, le prévenu a ainsi à l'évidence agi au détriment de la société aux intérêts de laquelle il avait la charge de veiller.
L’appelant fait grand cas d'une volonté qu'il impute à P._ de ne pas traiter avec un professionnel de l’immobilier, ni avec H._, pas plus qu'avec V._. Au vu des faits retenus, les déclarations du stipulant, crédibles, ne permettent pas de parvenir à une autre appréciation que celle des premiers juges. Il y a dès lors lieu d'y renvoyer. L’appelant conteste avoir encore été lié par son devoir de fidélité lors des faits litigieux, soutenant notamment avoir alors déjà rompu toute relation avec V._. Outre qu’une rupture entre associés n’est pas établie, rien ne permettait à l'appelant d’imaginer qu’il était délié de son devoir de fidélité à l’égard de la sàrl. En effet, en 2005, celle-ci n’était ni dissoute, ni en voie de dissolution. Au demeurant, l'appelant s'opposait encore à sa liquidation l’année suivante (jugement, pp. 24-25, précitées), ce qui démontre davantage encore que les relations entre associées n'étaient pas aussi délétères qu'il le prétend, même s'il existait assurément des désaccords entre eux avant le 13 avril 2005 déjà. Le fait que les associés étaient en litige s’agissant d’une plus-value obtenue par l’un d’entre eux sur l’un des terrains de l'hoirie [...] et quant à la gratuité d’un mandat d’architecte promis par V._ en faveur de l'appelant n’exempte pas non plus celui-ci de son devoir de fidélité et d'information envers la société, donc avec son associé en sa qualité d'unique autre gérant. Le deuxième élément objectif de la gestion déloyale est donc également réalisé.
5.2.3
L’existence d’un dommage subi par la sàrl, sous la forme d’un gain manqué, en raison des agissements du prévenu, est aussi manifeste. Le pacte d'emption a privé H._ d'une affaire qui lui était promise selon les déclarations du promettant lui-même, lequel aurait sans autre accepté de traiter avec elle pour autant qu'il n'ait eu qu'un seul interlocuteur. Si la société avait réalisé l’opération envisagée par les associés au début de l'année 2005, elle en aurait retiré un profit conséquent, comme le prouve le bénéfice obtenu en 2007 par l'appelant après division et revente du bien-fonds promis-vendu le 13 avril 2005. Le troisième et dernier élément objectif de la gestion déloyale est donc aussi donné.
A noter au surplus que les premiers juges considèrent que la signature de l’acte d’emption du 13 avril 2005 n’était pas constitutive de l’infraction, laquelle n’aurait été consommée que lors de
l’exercice
du droit d’emption par le prévenu aux fins de revente des parcelles. Indépendamment de son exercice, c'est toutefois le droit d'emption lui-même qui a empêché la sàrl de négocier avec le promettant-vendeur et de signer quelque acte que ce soit avec lui, alors même que la société envisageait de le faire quelque trois mois auparavant en tout cas. En effet, sa lettre à P._ du 11 janvier 2005 exprime de manière on ne peut plus claire et reconnaissable la volonté de sàrl d’acquérir les parcelles litigieuses. Partant, l’existence du droit d’emption cédé au prévenu a suffi à causer à la sàrl un dommage sous la forme d’un gain manqué.
5.2.4
Reste à examiner l'élément subjectif de la gestion déloyale.
Il est établi qu'une partie au moins des opérations concernant les deux gérants était effectuée en leurs noms propres et que des conventions séparées étaient conclues pour la répartition des bénéfices. C'est ainsi, par exemple, que la pièce 7/6 prévoit notamment l’abandon sur deux parcelles par la société du droit d’emption dont elle était titulaire (cf. P. 5/10). Il est plus insolite que le solde de la pièce 7/6 et l’entier de la pièce 7/3 mentionnent, selon les lots, l’attribution des bénéfices provenant de la vente soit à l'appelant soit à V._, alors que l’existence d’une sàrl constituée pour des opérations déterminées commanderait que tous les bénéfices lui reviennent. Il résulte même des comptes au dossier que cette société n’était pas loin d’être une coquille vide. En effet, elle a réalisé 122'000 fr. et 222'000 fr. de chiffre d’affaires en 2005 et en 2006 respectivement, alors qu'elle avait été constituée pour des opérations ayant entraîné des centaines de milliers de francs de plus-value.
Malgré ces différents éléments, rien ne permet d’admettre l’existence d’un accord, même tacite, dont il résulterait que chaque associé avait l'assentiment de l’autre pour conclure en son nom propre toutes les affaires qu’il voudrait. La répartition de certains bénéfices directement par les associés est une chose; une liberté de contracter de part et d’autre à l’encontre du but et des intérêts de la société en est une autre. Celle-ci ne peut être déduite de celle-là. Au surplus, et cet élément est décisif, au moment où l'appelant a fait le choix de solliciter séparément P._ pour obtenir de lui la promesse de vente de la parcelle en cause, la situation était tout à fait claire : agissant ensemble, les deux associés avaient entrepris moins de trois mois auparavant, soit le 11 janvier 2005, de négocier au nom de la sàrl, qui venait d’en acquérir d’autres, l’acquisition de dites parcelles. Il s'ensuit que l'inscription au Registre foncier du droit d'emption incriminé pour une durée de quelque deux ans, dont l'appelant se prévaut pour exciper du consentement de V._, n'a pas la portée qu'il tente de lui conférer. La publicité de l'acte par l'effet de son inscription n'affecte en effet pas l'intention dolosive initiale de son auteur. De plus, l'inscription est de toute manière postérieure aux négociations menées avec le promettant-vendeur par le prévenu en violation de son devoir de réserve et de fidélité. C'est le lieu de rappeler que le comportement incriminé n'est pas l'aliénation des parcelles issu du démembrement du fonds promis-vendu, mais la captation du droit d'emption quelque deux ans auparavant; une éventuelle connaissance par V._ du pacte d'emption par consultation du Registre foncier – du reste non établie – est dès lors à distinguer de tout éventuel consentement tacite à l'acte de gestion déloyale. Pour le reste, il est établi que le prévenu a délibérément agi à l'insu de son associé et, partant, de la société, ce dans le dessein de se procurer un avantage économique indu. La discrétion qu'il a sollicitée de dame [...] en témoigne davantage encore si besoin en était. Les éléments qui précèdent infirment le moyen, articulé par l'appelant en plaidoirie, d'un consentement tacite résultant d'un désintérêt manifesté à l'égard de l'opération vu la durée écoulée du 13 avril 2005 aux reventes. Partant, l’intention du prévenu de violer ses devoirs de gestion, dans le dessein de se procurer un enrichissement illégitime, ne fait pas de doute. L'élément subjectif de l'infraction est donc aussi donné.
5.2.5
La condamnation de l’appelant pour gestion déloyale est ainsi bien fondée.
6.
L'appelant ne conteste expressément ni le genre, ni la quotité de la peine, pas plus que le délai d'épreuve ou la règle de conduite assortissant le sursis. Il y a cependant lieu de statuer d'office sur ces points, dès lors que l'appelant a expressément conclu à son acquittement.
6.1
La peine prononcée se situe dans les limites de l'art. 158 ch. 1 CP, étant précisé que la circonstance aggravante de l'art. 158 ch. 1 al. 3 CP est donnée vu le dessein d'enrichissement illégitime. Elle ne prête pas le flanc à la critique sous l'angle de l'art. 47 CP, compte tenu de la culpabilité du prévenu, de sa situation personnelle et de l'effet de la peine sur son avenir. L'intéressé ne manifeste en effet aucun remord et n'a pas même pris conscience de la gravité de ses actes; il a agi durant une longue période avec une volonté soutenue et en tirant profit de ses aptitudes de juriste. En particulier, il a mis sur pied un montage financier raffiné en mettant son patrimoine au nom de son épouse pour tenter d'échapper aux conséquences économiques de ses actes illicites. Il a en outre procédé de manière particulièrement dolosive en tentant de suborner un témoin. Enfin, l'infraction a été perpétrée durant le délai d'épreuve d'une précédente condamnation. On relève l'écoulement du temps depuis les faits incriminés. Au regard de l'ensemble des éléments, la peine privative de liberté de quinze mois prononcée par les premiers juges doit être confirmée.
6.2
La durée du délai d'épreuve doit être déterminée en fonction des circonstances du cas, ainsi que du risque de récidive (TF 6B_1030/2008 du 23 février 2009 c. 3.1).
En l'espèce, le délai d'épreuve assortissant le sursis octroyé par les premiers juges équivaut à la limite supérieure de l'art. 44 al. 1 CP. Le tribunal correctionnel motive la longueur de ce délai par l'impératif d'aider le prévenu à s'amender. Les premiers juges ont toutefois oublié que le prévenu bénéficie d'une bonne intégration sociale, exerce apparemment avec compétence des activités économiques pérennes et n'a pas attiré l'attention des autorités pénales depuis les faits litigieux, qui remontent à une bonne demi-douzaine d'années, soit plus que le délai d'épreuve maximal prévu par la loi. Au vu de ces éléments favorables, d'une portée évidente, aucun motif particulier de prévention spéciale n'impose un délai d'épreuve fixé au maximum légal. Le délai d'épreuve retenu par le tribunal correctionnel apparaît ainsi excessif, même s'il convient assurément de fixer un délai proche de la limite supérieure de l'éventail légal. Il doit en effet être tenu compte de l'attitude de déni du prévenu durant toute la procédure et de ses multiples manœuvres pour échapper à ses responsabilités, éléments qui ne sont pas de bon pronostic. Tout bien pesé, c'est un délai d'épreuve de quatre ans qui doit assortir le sursis, un tel délai paraissant adéquat pour prévenir efficacement tout risque de réitération. Le jugement doit être réformé dans cette mesure.
6.3
Pour ce qui est de la règle de conduite assortissant le sursis, prévue par l'art. 44 al. 1 CP, il s'agit d'un aménagement légal tendant à l'amendement du condamné, donc à limiter le danger de réitération; ce sont dès lors des motifs de prévention spéciale qui doivent prévaloir (Kuhn, dans : Roth/Moreillon [éd.], Commentaire romand, Bâle 2009, n. 16 ad art. 44 CP, p. 448). Dans le cas particulier, les premiers juges ont considéré que la règle imposée procède, à l'instar du délai d'épreuve, de l'impératif d'aider le prévenu à s'amender. Cette motivation est conforme à la loi dans son principe, tout comme il est adéquat de prévoir, toujours au titre de la règle de conduite, la réparation du préjudice économique causé du fait de l'infraction réprimée (art. 94 CP).
Cependant, quant à l'ampleur de la règle à imposer, il y a lieu de prendre garde à ne pas entamer le minimum vital du condamné. Il est établi qu'en 2010, l'appelant a gagné 218'870 fr. et son épouse, dont il est séparé de biens depuis 1996, 112'649 francs; R._ a réalisé un bénéfice de 90'343 fr. en 2010; la société S._ a, selon le prévenu, réalisé un bénéfice d'environ 140'000 fr. en 2010. Le prévenu en est l'administrateur unique; il n'a pas encore été décidé s'il percevra des tantièmes de cette société pour l'exercice 2010; sa fortune personnelle est pour l'essentiel constituée de sa part de 30 % dans S._ ainsi que d'une part dans R._. Ces revenus sont certes très confortables. Il n'en reste cependant pas moins qu'il ne saurait être fait abstraction de la charge fiscale y afférente, qui doit être tenue pour élevée à un tel niveau de revenu. A ceci s'ajoute que le prévenu est père de deux enfants. Au vu de ces éléments, le paiement annuel de 120'000 fr. imposé au titre de règle de conduite est de nature à compromettre son minimum vital, même par versements en principe mensuels de 10'000 francs. Ce montant équivaut en effet à la charge hypothécaire de la villa occupée par le couple et excède le gain de R._ pour ascender à plus de la moitié du revenu propre total du prévenu pour l'année 2010. Il s'ensuit que le condamné serait alors tributaire de la marche des affaires de S._, ce qui est un aléa auquel il ne peut raisonnablement être exposé par une règle de conduite légale. La réparation du dommage doit ainsi être étalée sur un délai sensiblement supérieur. Le jugement doit donc être réformé en ce sens que le prévenu est tenu, durant le délai d'épreuve, au titre de règle de conduite en réparation du dommage, de rembourser chaque année au 31 décembre au plus tard, la première fois le 31 décembre 2012, à la société H._ la somme de 60'000 fr., à raison de versements en principe mensuels de 5'000 francs.
7.
Outre le principe et la quotité des conclusions civiles allouées à H._, l'appelant conteste la qualité de partie de celle-ci au procès pénal. Il y a lieu de statuer sur cette conclusion avant tout examen de la créance en réparation au fond, son admission étant de nature à priver d'objet la question du dédommagement en droit matériel comme on le verra plus en détail ci-dessous.
7.1
La plainte pénale à l'origine de la présente procédure a été déposée par V._ agissant en son nom propre. La sàrl n’est jamais intervenue, sachant que les désaccords entre ses organes dirigeants empêchaient à partir de 2009 la tenue de toute assemblée générale. Ce n’est que peu avant l’audience du tribunal correctionnel qu’est devenue exécutoire la décision du juge civil nommant un commissaire à la sàrl, la juridiction fédérale ayant, par décision du 4 octobre 2011, refusé d'accorder l'effet suspensif au recours interjeté par l'appelant contre cette décision. Le commissaire a immédiatement déclaré que la sàrl entendait participer au procès en tant que plaignante au pénal et demanderesse au civil (P. 36). La direction de la procédure du tribunal correctionnel a admis la sàrl au procès en qualité de partie civile plaignante par prononcé du 24 octobre 2011. Le 22 novembre suivant, elle a rejeté la requête du prévenu tendant au rejet de la demande de la sàrl. Enfin, le 29 novembre 2011, le tribunal correctionnel a rejeté la requête du prévenu (jugement, pp. 11 s.). Par arrêt du 10 novembre 2011, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal (476/2011) a déclaré irrecevable le recours dirigé contre le prononcé du 24 octobre 2011, pour le motif que la décision entreprise n'était pas sujette à recours, mais ne pouvait, bien plutôt, être attaquée qu'avec le jugement final. Il s'ensuit que la question doit être tranchée par la cour de céans, l’intérêt juridique de l’appelant étant évident. En effet, si la sàrl ne pouvait être admise au procès, ses conclusions civiles ne pourraient par principe lui être allouées.
7.2
Selon l'art. 94 al. 1er CPP, une partie peut demander la restitution du délai si elle a été empêchée de l’observer et qu’elle est de ce fait exposée à un préjudice important et irréparable; elle doit toutefois rendre vraisemblable que le défaut n’est imputable à aucune faute de sa part. A teneur de l'art. 94 al. 5 CPP, les al. 1 à 4 s’appliquent par analogie à l’inobservation d’un terme. Si la demande de restitution est acceptée, la direction de la procédure fixe un nouveau terme. Les dispositions relatives à la procédure par défaut sont réservées.
En l'espèce, la sàrl n'est pas intervenue à la procédure avant la clôture de la procédure préliminaire, contrairement à l'exigence posée par l'art. 118 al. 3 CPP. Elle n'en est cependant pas moins fondée à obtenir une restitution de délai au sens de l'art. 94 al. 1 CPP, cette disposition s'appliquant par analogie (art. 94 al. 5 CPP). En effet, d'une part, on doit, au regard des circonstances, nier toute faute imputable à la société, cette dernière ayant par ailleurs immédiatement réagi (cf. l'art. 94 al. 2 CPP) une fois la décision civile devenue exécutoire. D'autre part, on doit admettre qu'elle subirait un préjudice important et irréparable si elle ne pouvait participer à la procédure pénale. Certes, elle conserve la faculté de faire valoir ses conclusions en réparation contre son ancien associé-gérant dans le cadre d'une procédure civile distincte. Il n'en reste cependant pas moins qu'elle garde un intérêt à obtenir la condamnation de l'appelant (elle s'est d'ailleurs également constituée partie pénale). Ce moyen de l'appelant doit donc être rejeté. Il doit dès lors être entré en matière sur les conclusions de l'appel portant sur la réparation civile en droit matériel.
8.
L'appelant conteste tant le principe que la quotité des conclusions en réparation allouées à H._.
8.1
Les premiers juges ont admis le rapport de causalité entre le comportement incriminé (soit, selon eux, le détournement du bénéfice de l'affaire; cf. jugement, p. 45 in fine) et le préjudice allégué par la demanderesse. Ils ont ensuite considéré que le gain manqué par la demanderesse correspondait au bénéfice que le prévenu avait retiré de l’opération, à savoir au gain brut sous déduction des impenses. A noter à cet égard qu'un dommage au sens de l'art. 41 CO peut consister tant en une diminution d'actif qu'en une non-augmentation d'actif, soit en un gain manqué (ATF 133 III 462; 129 III 18).
8.2
L’appelant soutient d'abord que le lien de causalité ferait défaut dès lors que P._ n’aurait pas traité avec la sàrl. Ce moyen doit être écarté pour des motifs relevant de l’établissement des faits et qui ont été examinés plus haut. Pour le reste, le lien de causalité, naturel et adéquat, entre la violation du devoir de gestion incombant à l'appelant et le dommage est évident. En effet, comme on l'a vu, la sàrl aurait pu vendre, avec profit, les parcelles promises-vendues par P._ si l'appelant n'avait dolosivement acquis un droit d'emption sur le bien-fonds en question dans les circonstances déjà décrites; même si l'acte illicite est la captation de la promesse de vente du 13 avril 2005, le profit issu des quatre ventes effectuées en 2007 était escompté dès le début des négociations avec le stipulant et il est dans le cours normal des choses, en l'état du marché immobilier, que des plus-values sont réalisées en cas de partition d'un terrain constructible pour y édifier des villas.
Ensuite, l’appelant fait grand cas des accords passés avec V._ pour la répartition du bénéfice résultant des opérations précédentes et des décharges données aux gérants, par les deux associés, dans le cadre des assemblées générales de la sàrl (P. 5/8 et 5/9, précitées). Il se méprend cependant sur la portée de telles décharges. En effet, lorsqu’une société donne quitus à ses organes, la décharge ne peut par définition porter que sur les actes accomplis par dits organes ès qualités ou, en cas d’omission, par les actes qui auraient dû l’être; elle ne peut concerner des actes illicites, surtout lorsqu’ils ont été commis, comme dans le cas d’espèce, en dehors de l’activité de gestion de la sàrl, ce qui est du reste précisément la raison pour laquelle ils sont illicites. Comme l’appelant le relève lui-même (appel, p. 22), la décharge exclut toute action sociale. Or, en l’espèce, les conclusions civiles de la sàrl ne relèvent précisément pas d’une action sociale. C'est donc en vain que l'appelant se prévaut de l'art. 758 al. 1 CO, applicable à la sàrl par renvoi de l'art. 827 CO. Au surplus, les personnes qui ont coopéré d’une manière quelconque à la gestion des affaires sociales ne peuvent prendre part aux décisions qui donnent ou refusent décharge au conseil d’administration (art. 695 al. 1 CO, non modifié par la novelle du 16 décembre 2005 et également applicable à la sàrl par renvoi de l'art. 827 CO).
Quant à la convention du 17 juin 2005, elle ne saurait être interprétée comme une renonciation de la sàrl à exiger la couverture de son dommage. D’abord parce qu’il s’agit d’un accord entre les associés qui n’engage pas la société. Ensuite car il ne ressort pas de cette convention que V._ ait renoncé à se prévaloir d’une couverture du dommage causé par l’opération d’achat des terrains promis-vendus par P._. Il n'y a donc pas de faute concomitante selon l'art. 44 al. 1 CO ni tout autre facteur de nature à rompre le rapport causal entre l'acte illicite et le préjudice.
8.3
Pour ce qui est de la quotité du dédommagement, l’appelant conteste les calculs effectués par les premiers juges. A cet égard, le tribunal correctionnel a repris purement et simplement le décompte qui lui était soumis par la partie civile dans son procédé écrit déposé à l'appui de ses conclusions en réparation du gain manqué (P. 72, précitée). Il s'est ainsi fondé sur un gain manqué brut de 699'940 fr., d'où, une fois déduits les droits de mutation et les frais de notaire, un préjudice de 654'571 fr. 10 (jugement, pp. 45 s.).
Le gain brut s’élève effectivement à 699'940 francs. Pour le reste, toutefois, les calculs figurant dans la pièce 72 ne sont pas corrects : si on l'on soustrait 18'839 fr. 70, 3'212 fr. 75 et 1'132 fr. 90 du bénéfice brut de 197'720 fr. obtenu par la vente de la parcelle [...], on n’obtient pas 192'874 fr., mais 174'034 fr. 65. Il en va de même pour la parcelle [...]. Il faut retrancher des gains bruts toutes les impenses dont l’existence est établie pour les parcelles [...] à [...] et dont la partie admet dans la pièce 72 qu’elles peuvent l’être, étant précisé que la demanderesse n'avoue aucune impense afférente à la parcelle [...] dans le relevé en question.
Pour la parcelle [...], l’appelant n’a pas établi d’impenses par quelque voie que ce soit. La pièce produite avec l’appel n'emporte pas la conviction (P. 90/4/7; cf. aussi P. 59). En effet une déclaration fiscale signée par la partie qui s’en prévaut n’est pas probante du bien-fondé des déductions qui y sont mentionnées, mais n'exprime que la position du contribuable envers le fisc. Il faut bien plutôt constater d'abord que la quotité du droit de mutation (2,2 % pour le canton et 1,1 % pour la commune, soit 3,3 % de l'assiette fiscale) est prévue par les normes applicables sans que de plus amples calculs soient nécessaires, étant rappelé que la cour de céans applique le droit d’office (art. 10 de la loi cantonale concernant le droit de mutation sur les transferts immobiliers et l'impôt sur les successions et donations [LMSD], RSV 648.11; art. 23 ss de la loi cantonale sur les impôts communaux [LICom], RSV 650.11). Il convient de relever ensuite que cette quotité résulte des pièces produites pour les autres parcelles, alors que le montant de base (460'720 fr.) est par ailleurs connu. Il faut donc en tenir compte d’office, ce qui implique une déduction supplémentaire de 15'203 fr. 70.
Le gain manqué net s’élève ainsi à 621'688 fr. 60 en capital. Le jugement doit être réformé dans cette mesure. Pour le surplus, les points de départ des intérêts tel qu’arrêtés par les premiers juges sur la base de la date de chacune des ventes successives des parcelles peuvent être confirmés. En effet, les dates des aliénations des quatre parcelles à l'origine des gains illicites peuvent être présumées coïncider avec l'encaissement des prix indûment obtenus.
8.4
L’appelant soutient encore que la quotité de son bénéfice doit être appréciée en tenant compte des montants à lui facturés par R._, à raison de 43'040 fr. pour chacune des parcelles [...] à [...]. On ignore cependant la cause du versement de montants aussi conséquents à R._. D’ailleurs, cette société est en mains de l’appelant et de son épouse, d’où un intérêt économique manifeste de la partie à augmenter les revenus de cette entreprise. Qui plus est, on ne voit au surplus nullement, vu son but social (nettoyage de conteneurs à ordures), à quel titre elle serait intervenue pour faire des impenses sur ces parcelles. La facture de R._ à l'appelant mentionne uniquement «(...) notre note d’honoraires d’intervention en ce qui concerne la vente de la parcelle n° (...)» (P. sous liasse 60, non numérotée séparément). A défaut de toute précision, cette mention est très insuffisante pour retenir qu’il y ait ici une impense, à plus forte raison que dite impense soit justifiée. Il n’y a donc pas lieu à tenir compte de ces montants.
9.
L’appelant, invoquant l’art. 115 CPP, conteste enfin qu’il soit donné acte de ses réserves civiles à V._, faute pour ce dernier d'avoir, selon lui, la qualité de lésé au sens de l'art. 115 CPP. Il conclut dès lors à ce que les conclusions civiles de ce dernier soient rejetées, à savoir qu'il ne lui soit pas même donné acte de ses réserves civiles, et à ce que des dépens ne lui soient pas alloués.
L’instruction pénale a été ouverte par suite d’une plainte de V._ dirigée contre le prévenu pour gestion déloyale. Le prévenu n’a jamais contesté que V._ ait eu qualité pour déposer plainte. V._ a été plaignant dès le début de la procédure (introduite sous l'empire de l'ancien droit), sans que l'appelant n'ait soulevé de moyen à ce propos à quelque phase que ce soit de l’instruction pénale. Il a ainsi notamment participé aux débats en qualité de plaignant sans que le prévenu – qui a pourtant contesté par la voie incidente que la sàrl participe au procès en qualité de partie civile – ne s’y soit opposé.
Or, le plaignant est de plein droit partie à la procédure pénale selon le principe consacré par l'art. 104 al. 1 let. b CPP, applicable en droit intertemporel en vertu de l'art. 448 al. 1 CPP, ce principe étant du reste prévu auparavant par l'art. 42 CPP-VD. Sachant que la qualité de plaignant de V._ n'a pas été mise en cause, il est vain de lui contester désormais celle de lésé, cette qualité-là impliquant celle-ci (art. 115 al. 2 et art. 118 al. 1 et 2 CPP). Il résulte au surplus de l’article 119 al. 2 CPP que le lésé peut, cumulativement ou alternativement, (a) demander la poursuite et la condamnation de la personne pénalement responsable de l’infraction (plainte pénale) ou (b) faire valoir des conclusions civiles déduites de l’infraction (action civile) par adhésion à la procédure pénale.
Au surplus, s’il résulte de l’art. 115 CPP que le lésé doit, pour prétendre à cette qualité, avoir été touché directement par l’infraction et s’il est admis que, en règle générale, tel n’est pas le cas de l’actionnaire d’une personne morale touchée par une infraction (cf., outre les références citées par l’appelant [déclaration d'appel, ch. 4, p. 23], Piquerez/Macaluso, Procédure pénale suisse, 3
e
éd., Genève/Zurich/ Bâle 2011, n° 1622, p. 555), la situation de l’espèce est bien plus complexe. D’abord parce que la personne morale n’avait tant comme titulaires de parts sociales que comme gérants que les deux parties. Ensuite pour le motif que les relations entre les deux associés quant aux affaires immobilières du quartier des [...] étaient en partie traitées hors du cadre de la sàrl, s’agissant en particulier de la répartition des bénéfices. Dans ces conditions, il eût été arbitraire de dénier à V._ la qualité de déposer plainte et de demander la poursuite pénale et la condamnation de l'appelant.
Sachant que le plaignant a obtenu gain de cause à l'action pénale, c’est ainsi à juste titre que les premiers juges lui ont alloué des dépens pénaux conformément à l’art. 433 al. 1 let. a CPP, applicable en vertu de l'art. 448 al. 1 CPP pour ce qui est du droit transitoire. La quotité des dépens n’est par ailleurs pas contestée.
Il résulte de ce qui précède que ni la qualité de plaignant de V._, ni l’allocation de dépens à celui-ci ne peuvent être remises en cause. Cela étant, l'appelant conteste aussi le jugement dans la mesure où son dispositif donne acte au plaignant de ses réserves civiles. Sur ce point, il convient de constater que cette décision n’a pas d’effet condamnatoire. Partant, l’appelant n’a pas d’intérêt juridiquement protégé au sens de l'art. 382 al. 1 CPP à la contester par la voie de l’appel.
L’appel doit donc être rejeté pour ce qui est des conclusions civiles de V._.
10.
Enfin, l'appelant conteste le sort des frais de première instance. Le prévenu succombant à l'action pénale, c’est à juste titre sur le principe que les frais ont été mis à sa charge (cf. l'art. 426 al. 1, 1
e
phrase, CPP). Cela étant, l'appelant obtient gain de cause à raison de quelque 10 % sur les conclusions civiles de l'intimée. Ce gain très partiel du procès ne justifie cependant pas que les frais soient répartis entre ces deux parties. En effet, l'appelant se limite à profiter de menues erreurs de calcul des premiers juges sur le relevé de la demanderesse; il n'obtient gain de cause sur aucun poste de dommage quant au principe. Or, l'art. 427 al. 1, notamment let. c, CPP ne permet de mettre à la charge de la partie plaignante les frais de procédure causés par ses conclusions civiles qu'en cas de perte du procès quant au
principe
desdites conclusions. Il n'y a dès lors pas matière à déroger au principe posé par l'art. 426 al. 1, 1
e
phrase, CPP. Cette conclusion de l'appel doit donc aussi être rejetée.
11.
Les mêmes considérations s'appliquent
mutatis mutandis
aux frais de l'instance d'appel. Si le prévenu obtient gain de cause partiellement, il ne bénéficie de l'adjudications de ses conclusions sur aucune question de principe, mais uniquement – et encore dans une mesure limitée – quant à deux modalités du sursis (le délai d'épreuve et la règle de conduite), ainsi, comme on l'a vu, que sur le montant de la réparation civile, dans une faible mesure là encore. En outre, les modalités du sursis n'ont pas même fait l'objet de conclusions séparées mais ont été examinées d'office. La modification de la décision en faveur de l'appelant doit donc être tenue pour de peu d'importance au sens de l'art. 428 al. 2 let. b CPP. A contrario, de telles circonstances excluent toute mise à charge, si partielle soit-elle, des frais à l'Etat ou à une partie intimée en application de l'art. 428 al. 1 CPP. Le sort de l'appel doit ainsi rester sans effet sur celui des frais, qui doivent donc être entièrement mis à la charge du prévenu.
12.
L'intimée H._ a requis une indemnité au titre des dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel. Cette conclusion doit lui être entièrement allouée en application de l'art. 433 al. 1 let. a CPP, sachant que cette partie, représentée par un avocat de choix, obtient gain de cause sur le principe à l'encontre de l'appelant. L'indemnité doit être arrêtée à 5'200 fr., TVA comprise, au vu de la liste détaillée produite à l'audience par le conseil de l'intimée (art. 433 al. 2, 1
e
phrase, CPP).
Quant à l'intimé V._, il n'a pas requis d'indemnité pour ses dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel, ni chiffré et motivé de telles prétentions. Or, l'art. 433 CPP exclut qu'elle soit allouée d'office.
L'appelant succombant sur le principe, la conclusion de l'appel tentant à l'octroi d’une indemnité selon l'art. 429 al. 1 CPP en sa faveur doit être rejetée. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c52e6077-ee9d-4f0f-835a-6e516f8b5eb6 | En fait :
A.
Par jugement du 29 juillet 2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a constaté que M._ s’est rendue coupable de contravention à une mise à ban (I), l’a condamnée à une amende de 80 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l’amende étant d’un jour (II), et a mis les frais de procédure, par 700 fr., à la charge de M._ (III).
B.
M._ a annoncé faire appel de ce jugement par pli posté le 6 août 2014. Elle a déposé une déclaration d’appel motivée mise à la poste le 6 septembre 2014, concluant à l’annulation du jugement et implicitement au renvoi de la cause au premier juge pour nouvelle décision dans le sens des considérants de l’arrêt à intervenir. Elle a produit diverses pièces.
L’intimée N._, dénonciatrice, s’est référée à ses déclarations faites à l’audience de jugement de première instance.
Le Ministère public a renoncé à présenter une demande de non-entrée en matière ou une déclaration d’appel joint.
A l’invitation de la direction de la procédure, le premier juge s’est déterminé le 2 octobre 2014 sur l’un des moyens de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1. La prévenue M._, née en 1944, retraitée, divorcée, perçoit une rente AVS de 2'300 fr. par mois et effectue de petits travaux. Elle obtient ainsi un revenu total de 3'500 fr. à 4'000 fr. selon les mois.
Son casier judiciaire est vierge.
2.1 La prévenue a été dénoncée pour avoir, le jeudi 7 novembre 2013, à 12 h 53, parqué son véhicule immatriculé VD [...], décrit comme étant de couleur gris-bleu clair, sur une place privée sise [...], à Gland, mise à ban en faveur des usagers de l’immeuble abritant l’institut de beauté exploité par N._.
Par ordonnance pénale du 2 décembre 2013, la Commission de police de Gland a condamné M._ à une amende de 80 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l’amende étant d’un jour, et a mis les frais de procédure, par 50 fr., à sa charge.
2.2 Cette décision a été frappée d’opposition, laquelle a été adressée à la dénonciatrice pour que celle-ci fournisse de plus amples renseignements quant aux faits incriminés. Par lettre du 16 janvier 2014 adressée à la commission de police, la dénonciatrice a confirmé que, le 7 novembre 2013, la voiture immatriculée [...] avait bien stationné sur les places réservées à sa clientèle, de sorte, notamment, que sa cliente ayant rendez-vous à 13 h 15 le jour en question avait dû se parquer ailleurs. Disant ne pas connaître personnellement M._, la dénonciatrice n’en a pas moins indiqué qu’elle avait, selon elle à la mi-novembre 2013, eu une altercation avec une femme d’âge mûr, inconnue d’elle, qui avait fait irruption dans l’institut de beauté pour tenir des propos acerbes relatifs à son «déménagement de sa place de parc» sollicité par la bénéficiaire de la mise à ban. La dénonciatrice ajoutait qu’elle avait, quelques instants auparavant, vu son interlocutrice sortir d’un véhicule dont elle n’avait pas relevé le numéro de plaque et qui était parqué sur l’une des places de parc mises à ban. Elle avait invité l’automobiliste en question à libérer l’emplacement qu’elle occupait indûment, ce à quoi son interlocutrice lui aurait rétorqué qu’elle n’était pas habilitée à l’amender, avant de remonter dans sa voiture et de quitter les lieux (pièce non numérotés sous P. 4).
La commission de police a maintenu son ordonnance.
2.3 Dans des déterminations adressées au tribunal d’arrondissement le 12 mars 2014, la prévenue, confirmant son opposition, a fait valoir que, le 7 novembre 2013, elle aurait uniquement utilisé la ou les places privée(s) de la dénonciatrice pour effectuer une manœuvre avant de se parquer plus loin sur un emplacement licite dans la même rue. Elle a demandé l’audition de trois personnes qui auraient été en sa compagnie le 7 novembre 2013 lors d’un repas de midi pris dans un restaurant sis à proximité immédiate des lieux. Elle a en outre requis l’audition de la cliente de l’institut de beauté qui aurait été gênée par son véhicule parqué le jour en question. La prévenue a également demandé que la dénonciatrice indique la date de la visite qu’elle aurait faite à l’institut de beauté à la mi-novembre 2013 (P. 6). Dans des déterminations complémentaires du 6 mai 2014, elle a indiqué avoir été en croisière du 12 au 22 novembre 2013, puis avoir séjourné à Barcelone, avant de rentrer en Suisse le 24 novembre suivant. Elle a produit diverses pièces (P. 7).
2.4 Outre la prévenue et la dénonciatrice, le premier juge a entendu quatre témoins à l’audience de jugement, à savoir [...], [...], [...] et [...]. Le témoin [...], en particulier, a déclaré avoir été au restaurant avec la prévenue et la petite-fille de celle-ci pour un repas de midi à l’automne 2013, à Gland, et qu’en sortant, les convives avaient croisé le témoin [...]. A ce moment, le témoin a constaté que la voiture de la prévenue et la sienne étaient parquées côte à côte devant le restaurant (jugement, p 8). Le témoin [...] a confirmé avoir pris un repas au restaurant en compagnie de sa grand-mère et du témoin [...] à l’automne 2013, «peu avant» le départ en croisière de celle-là (jugement, p. 9).
La déposition du témoin [...] a notamment la teneur suivante :
«Je confirme être cliente de l’institut [...]. Vous me parlez du 7.11.2013 et me demandez si je me souviens de quelque chose. Je n’ai simplement pas pu me parquer sur les places de l’institut car une voiture y était et empiétait sur les deux places. Vous me demandez si je me souviens de l’heure de mon rendez-vous. Peut-être 10h30 ou 11h. Je sais que c’était un jeudi. Quand (sic) vous me demandez si cela pourrait être 13h15. A votre demande, je vérifie sur mon téléphone portable. Je vous confirme que c’était le jeudi 07.11.2013 à 13h15. Je ne m’en souvenais plus, car d’habitude j’y allais le matin. Vous me demandez si je me souviens de quelque chose concernant la voiture qui se trouvait sur les places. Elle était de couleur claire, peut-être gris-bleu. Je me souviens avoir été frappée par le fait qu’il s’agissait d’une plaque à cinq numéros. Je suis allée me parquer sur les places visiteurs. (...).» (jugement, p. 7).
3. Appréciant les faits de la cause, le tribunal de police a considéré que les témoins [...], [...] et [...], respectivement coiffeuse, amie et petite-fille de la prévenue, avaient paru mal à l’aise lors de leurs auditions, revenant sur certaines de leurs déclarations suite à des interventions de M._. C’est ainsi que le témoin [...] a rectifié sa déposition pour relever que la petite-fille de la prévenue était venue au restaurant non avec elle, mais avec sa grand-mère (jugement, p. 8). De même, ce n’est après été reprise par la prévenue que le témoin [...] a dit se souvenir d’avoir croisé le témoin [...] en sortant du restaurant (jugement, p. 9). Le premier juge a ainsi estimé que ces dépositions ne devaient être appréciées qu’avec retenue. Il a en revanche ajouté foi au témoignage de [...], laquelle a fait bonne impression. Au demeurant, la description par le témoin du véhicule empiétant sur les places du parc correspondait à celui de la prévenue pour ce qui était de sa couleur et du nombre de chiffres composant son numéro de plaque. [...] a expressément nié entretenir un lien d’amitié particulier avec la dénonciatrice, dont elle n’était qu’une simple cliente (jugement, p. 7). A cet égard le tribunal de police a expressément écarté l’assertion de la prévenue selon laquelle le témoin aurait été mue par le dessein d’obtenir des «soins gratuits» de l’institut de beauté.
Pour sa part, N._ a confirmé les faits dénoncés, alors que M._ a réitéré ses dénégations. Le premier juge a estimé que celles-ci comportaient des contradictions, dans la mesure notamment où le témoin [...] avait nié avoir, le 7 novembre 2013, pris son repas dans le même restaurant que la prévenue accompagnée des témoins [...] et [...], mais s’était limitée à relever n’avoir fait que croiser inopinément les intéressées à leur sortie de l’établissement.
A l’issue de l’appréciation des preuves, le premier juge a ainsi tenu pour avérés les faits constituant l’objet de la dénonciation. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP, applicable par analogie par renvoi de l’art. 30 LVCPP), l’appel est recevable.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). Toutefois, lorsque seules des contraventions ont fait l'objet de la procédure de première instance, l'appel ne peut être formé que pour le grief que le jugement est juridiquement erroné ou que l'état de fait a été établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit; aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite (art. 398 al. 4 CPP).
2.2
En l’espèce, l’appel étant restreint, les pièces produites en 2
eme
instance ne sont recevables qu’en tant qu’il s’agit de copies de pièces figurant déjà au dossier de première instance. En revanche, il découle de l’art. 398 al. 4 CPP que les pièces véritablement nouvelles sont quant à elles irrecevables.
2.3
La cause ne portant que sur une contravention, l’appel relève de la procédure écrite (art. 406 al. 1 let. c CPP) et de la compétence du juge unique (art. 14 al. 3 LVCPP). Le tribunal de police a entendu la dénonciatrice comme témoin (art. 166 CPP). Elle a toutefois la qualité de partie en sa qualité de dénonciatrice directement touchée dans ses droits, dès lors qu’il s’agissait pour elle de faire sanctionner la violation de la mise à ban (art. 258 CPC) promulguée à sa demande et dans son intérêt (art. 105 al. 2 et 301 al. 3, a contrario, CPP). C’est ainsi comme intimée qu’elle a été invitée à se déterminer sur l’appel.
3.
3.1
L’appelante conteste l’appréciation des faits par le premier juge. Ni la mise à ban de l’immeuble au sens de l’art. 258 CPC, ni la punissabilité du comportement incriminé, pas plus que les éléments constitutifs de l’infraction (art. 13 LContr), ne sont mis en cause en tant que tels.
3.2
Il découle de l’art. 398 al. 4 CPP que l’appelant peut se plaindre de toute violation du droit. Quant aux constatations de fait, en revanche, le pouvoir d'examen de l’autorité cantonale de dernière instance étant limité à l'arbitraire, la partie doit exposer en quoi le premier juge aurait fait preuve d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et dans l’établissement des faits.
Une constatation erronée ne suffit pas. Les faits doivent résulter d’un établissement manifestement faux, par exemple dans la mesure où ils ne prendraient pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, ou se tromperaient manifestement sur son sens ou sa portée ou encore tireraient des éléments recueillis des constatations insoutenables. Enfin, la partie peut faire valoir que l’établissement des faits peut résulter de la violation d’une règle de droit (Kistler Vianin, dans : Kuhn/Jeanneret [éd.], Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, Bâle 2011, nn. 28 et 29 ad art. 398 CPP).
Le juge du fait dispose d'un large pouvoir d'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 c. 4b p. 40; TF arrêt 6B_247/2012 du 18 septembre 2012 c. 2.1). Lorsque le juge a forgé sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Il n'y a pas d'arbitraire si l'état de fait retenu pouvait être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs sont fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (TF arrêt 6B_398/2013 du 11 juillet 2013 c. 2.1; TF arrêt 6B_689/2011 du 1
er
mars 2012 c. 1.1).
4.
4.1
Dans le cas particulier, le premier juge devait trancher entre la version de l’appelante selon laquelle, le 7 novembre 2013, elle aurait uniquement utilisé la ou les places privée(s) de la dénonciatrice pour effectuer une manœuvre avant de se parquer plus loin sur un emplacement licite dans la même rue et celle de la dénonciatrice selon laquelle, ce même jour, l’appelante avait longuement stationné son véhicule en empiétant sur les deux cases réservées à sa clientèle.
Après avoir relativisé la portée des témoignages de dames [...], [...] et [...] (p. 18), le tribunal de police s’est fondé sur le témoignage de [...] pour acquérir la conviction que l’appelante avait bien parqué son véhicule en violation de la mise à ban et que le témoin avait alors été empêchée d’occuper l’une des places en question. Ce témoin a confirmé que, le 7 novembre 2013, alors qu’elle avait rendez-vous chez N._, elle n’avait pu se parquer sur les places de parc de l’institut de beauté, en raison de la présence d’un véhicule qui empiétait sur deux places. Elle a en outre confirmé, après avoir vérifié dans son agenda inclus dans son téléphone portable, qu’elle a avait bien rendez-vous à 13 h 15 le jour en question, bien que ces séances eussent d’ordinaire lieu en matinée.
4.2
Appréciant ce témoignage, le premier juge a indiqué, s’agissant de l’heure du rendez-vous, que le fait que la cliente de l’institut de beauté ait, dans un premier temps, parlé du matin ne remettait nullement en cause sa crédibilité, mais démontrait au contraire la spontanéité de ses déclarations; en effet, si elle a expliqué que, d’habitude, elle prenait plutôt ses rendez-vous le matin mais, vérification faite dans son téléphone portable, elle avait pu confirmer que, le 7 novembre 2014 (
recte
: 2013), elle avait effectivement rendez-vous à 13 h 45 (jugement, p. 19).
L’appelante soutient qu’en réalité le témoin [...] avait, durant son audition, confié sa fille, à laquelle elle avait remis son téléphone mobile pour se distraire, à la dénonciatrice qui attendait dans les pas perdus. Le témoin aurait d’abord dit que le rendez-vous avait eu lieu un samedi vers 10 heures, soit lors du seul jour où son travail lui laissait la possibilité de se rendre à l’institut. Le tribunal lui aurait alors indiqué qu’elle se trompait et l’aurait autorisée à sortir de la salle d’audience pour consulter son agenda électronique. Or, ce serait à l’extérieur qu’elle aurait demandé à la dénonciatrice le jour et l’heure qu’elle devait indiquer.
Dès lors que le procès-verbal ne mentionne pas ces faits, le juge de céans a recueilli les déterminations du premier juge à ce sujet (art. 390 al. 2 CPP). La procédure d’audition des témoins n’interdit pas formellement de permettre à un témoin de vérifier un souvenir en consultant un titre, mais les écrits en question sont alors versés au dossier en fin d’audition (art. 143 al. 6 CPP). En revanche, si les comparants doivent être entendus séparément (art. 146 al. 1 CPP), cette injonction ne couvre pas les cas où le juge autoriserait un témoin à quitter brièvement la salle d’audience en cours d’audition sans forcément prévoir que cette circonstance lui permettra d’échanger brièvement avec une partie ou un autre témoin déjà entendu.
Dans ses déterminations adressées à l’autorité de céans, le premier juge a confirmé la véracité du fait allégué par l’appelante, à savoir que le témoin [...] avait été autorisée à quitter la salle d’audience pour aller chercher son téléphone portable, dont elle avait dit à la présidente que sa fille jouait avec, dans les pas perdus, afin d’effectuer une vérification quant à la date et l’heure du rendez-vous. La magistrate ajoutait qu’étant restée en salle d’audience, elle ne pouvait dire si, à cette occasion, le témoin avait discuté avec N._; néanmoins, l’huissier a rapporté ne pas en avoir de souvenir particulier. Le premier juge a encore précisé que le témoin avait regagné la salle d’audience, avec son téléphone portable, après un bref instant.
En définitive, le contact allégué entre le témoin et la dénonciatrice ne peut être tenu pour établi. Même si ce fait était vérifié, il ne rendrait pas pour autant la preuve inexploitable au sens de l’art. 141 al. 2 CPP, mais aurait tout au plus comme effet de relativiser le cas échéant son appréciation. Comme l’indique le premier juge, le témoin et la dénonciatrice, celle-là étant cliente de celle-ci, auraient eu tout loisir de s’accorder auparavant sur les réponses à donner depuis le début de la procédure. L’affirmation de l’appelante selon laquelle le témoin aurait été influencé par la dénonciatrice lorsqu’elle avait consulté son téléphone portable n’est ainsi pas étayée, l’appelante ne soutenant pas même avoir assisté à l’entretien dont elle subodore l’existence et qui n’a pu être que bref. On ne voit au demeurant pas comment le premier juge aurait pu ordonner le versement au dossier de l’extrait numérique contenu par la mémoire du téléphone portable du témoin. Qui plus est, le fait que le témoin ait initialement cru avoir eu rendez-vous le matin et non en tout début d’après-midi n’est pas de nature à entamer sa crédibilité, pour les motifs, pertinents, indiqués par le premier juge (c. 4.1 in fine et 4.2 ci-dessus).
4.3
Pour le reste, l’appelante tente de tirer argument de ce que la dénonciatrice se serait emmêlée ou contredite dans ses propos. Toutefois, cette déposition n’a pas fait l’objet d’une appréciation arbitraire, dès lors qu’elle a été confrontée aux autres éléments du dossier. Ainsi, le jugement fait état avec précision (jugement, p. 18) de ce que la dénonciatrice n’avait su quoi dire lorsqu’il était apparu qu’elle situait une altercation avec une automobiliste à la mi-novembre 2013 alors que la prévenue était en voyage à l’étranger à cette époque. La lettre de l’intimée adressée à la commission de police le 16 janvier 2014, soit plusieurs semaines après les faits, assortissait de réserves la mention de la période en cause («[...] je dirai à la mi-novembre [...]»). Elle ne saurait dès lors être comprise au jour près, mais peut inclure la période comprise entre le 7 du mois et le départ en croisière de l’appelante, soit le 12. Au surplus, l’heure indiquée sur le formulaire de dénonciation correspond à celle du rendez-vous du témoin [...], qui a expressément indiqué que les places réservées à la clientèle étaient occupées précisément au moment de son arrivée.
4.4
L’appelante critique également l’impression du premier juge selon laquelle les témoins [...], [...] et [...] lui avaient paru mal à l’aise (jugement, p. 18). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l’intime conviction qu’il retire de la procédure (art. 10 al. 2 CPP). S’agissant d’apprécier la crédibilité d’un témoin ou la solidité de sa déposition, il n’y a donc aucun arbitraire à se fonder, notamment, sur l’impression subjective suscitée par la déposition. A cela s’ajoute que les auditions de ces témoins font état d’interventions de la prévenue aux fins de corriger leurs dires, élément que l’appelante ne nie pas.
En définitive, l’état de fait du jugement est exempt d’arbitraire. Il ne résulte pas de la violation de règles qui imposerait son annulation.
4.5
Pour le surplus, la quotité de la peine n’est pas contestée.
5.
L’appel doit dès lors être rejeté.
Vu l'issue de l’appel, les frais de la procédure d'appel doivent être mis à la charge de la prévenue, qui succombe entièrement (art. 428 al. 1, 1
re
phrase, CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c54e08ec-7b06-4ce4-82ab-8449d9341158 | En fait :
A.
Par jugement du 24 février 2011 le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que J._ s'est rendu coupable de calomnie (I), l'a astreint à une peine de travail d'intérêt général de 360 (trois cent soixante) heures (II); a suspendu l'exécution de la peine et fixé à J._ un délai d'épreuve de 3 (trois) ans (III); a condamné en outre J._ a une amende de CHF 1'000.- (mille francs) et dit que la peine de substitution en cas de non paiement de l'amende sera de 15 (quinze) jours (IV); dit que J._ est débiteur : a) de H._ et lui doit une indemnité de CHF 10'000.- (dix mille) francs, TVA et débours inclus, à titre remboursement des dépenses obligatoires causées par la procédure pénale, b) de X._ et lui doit une indemnité de CHF 10'000.- (dix mille) francs, TVA et débours inclus, à titre remboursement des dépenses obligatoires causées par la procédure pénale, c) de M._ et lui doit une indemnité de CHF 10'000.- (dix mille) francs, TVA et débours inclus, à titre remboursement des dépenses obligatoires causées par la procédure pénale (V); a donné acte à H._, M._ et X._ de leurs réserves de droit civil à l'encontre de J._ pour le surplus (VI); et mis à la charge de J._ l'entier des frais de justice par CHF 2'753.- (VII).
B.
Les faits retenus sont les suivants :
J._, né en 1962, a travaillé dès le mois de mai 1984 au service de M._ puis M._SA, à Lausanne, d'abord en qualité d'aide gérant, puis dès le 14 décembre 1990 comme courtier au service des ventes et enfin à compter du 12 décembre 2001 en tant que mandataire commercial, bénéficiant, à titre de gratification d'entrée, de vingt parts du fond de placement collectif [...]. Le 14 mai 2007, M._ SA a résilié le contrat de travail de J._ avec effet au 31 août 2007 et l'a dispensé de son obligation de travailler jusqu'à la fin des rapports de travail, lui reprochant d'avoir adopté une attitude générale de critique et de dénigrement vis-à-vis de la direction, d'avoir connu des problèmes relationnels avec certains collègues et d'avoir fait preuve d'une insoumission délibérée à certaines instructions. J._ a contesté les motifs de ce congé. Par acte du 19 février 2008, il a assigné M._ SA devant la Cour civile du Tribunal cantonal en paiement d'un montant de 743'038.50 fr., en annulation de la clause de prohibition de concurrence incluse dans le contrat de travail et en délivrance d'un certificat de travail. La procédure est toujours pendante à ce jour.
A l'audience préliminaire qui s'est tenue le 26 novembre 2008 sous la présidence du juge instructeur de la Cour civile, J._ a maintenu ce qu'il avait déjà déclaré dans ses allégués, à savoir qu'à l'occasion de deux acquisitions d'immeubles dans le canton de Genève par X._, entre décembre 2005 et mai 2006 puis en mars 2007, H._, qui était administrateur–directeur délégué de M._ SA, aurait perçu des commissions sans avoir reçu de mandat de courtage au sujet de ces deux transactions. J._ soutient que ces commissions ont été mises à la charge du fond de placement collectif [...], et qu'il a été licencié notamment pour que H._ puisse continuer à procéder ainsi. H._, X._ et M._ SA ont porté plainte contre J._ pour calomnie, subsidiairement pour diffamation, respectivement les 23 décembre 2008, 19 janvier et 12 février 2009. Le premier juge a conclu que J._ avait porté les accusations de gestion déloyale, d'autres malversations ou de détournements à l'encontre de H._, de X._ et M._ SA alors qu'il savait ses propos sans fondement. Jugeant que le requérant avait agi avec conscience et volonté de porter atteinte à la considération des plaignants, le premier juge a considéré que J._ s'était rendu coupable de calomnie.
C.
Le 19 avril 2011, J._ a déposé une demande de révision de ce jugement. Il conclut à son annulation, en ce sens que la cause est renvoyée à un autre tribunal de police pour nouveau jugement. A l'appui de sa requête, il fait valoir que le vice-président du Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne aurait dû se récuser dans la mesure où il avait participé, en qualité de greffier de l'ancien Tribunal administratif du canton de Vaud, à une procédure fiscale divisant la société [...] SA, dont J._ et ses parents sont administrateurs, d'avec l'Administration cantonale des impôts et l'Administration fédérale des contributions en 2006. J._ considère que ces circonstances donnaient l'apparence d'une prévention et faisait objectivement redouter une attitude partiale du premier juge. Par acte distinct, daté du même jour, J._ a formé un appel contre le jugement, concluant à son annulation en ce sens qu'il est acquitté. | En droit :
1.
Par mesure de simplification, il convient de traiter de manière anticipée la demande de révision dans le cadre d'une procédure distincte de celle de l'appel, même si la révision du jugement faisant l'objet d'un appel, donc non entré en force, est en principe exclue.
Selon l’art. 410 al. 1 let. a CPP, toute personne lésée par un jugement entré en force, une ordonnance pénale, une décision judiciaire ultérieure ou une décision rendue dans une procédure indépendante en matière de mesures, peut en demander la révision s’il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l’autorité inférieure et qui sont de nature à motiver la condamnation d'une personne acquittée.
En l'occurrence, le requérant, qui a été jugé coupable de calomnie et condamné en conséquence, est admis à déposer une demande de révision au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP (cf. Marc Rémy, Commentaire romand n. 4 ad art. 410 CPP).
2.
Aux termes de l'art. 412 CPP, la juridiction d'appel examine préalablement la demande de révision en procédure écrite (al. 1). Elle n'entre pas en matière si la demande est manifestement irrecevable ou non motivée ou si une demande de révision invoquant les mêmes motifs a déjà été rejetée par le passé
(al. 2).
L'examen préalable sert avant tout à constater si les motifs invoqués à l'appui de la demande de révision sont vraisemblables. Cet examen porte sur la recevabilité formelle de la demande mais également sur son bien-fondé. A ce titre les juges analysent la pertinence des moyens invoqués en se demandant notamment si les nova sont propres à faire douter du bien-fondé du jugement attaqué au point de rendre possible un acquittement ou du moins une modification sensible du jugement (cf. Marc Rémy, op. cit. n. 2 et 3 ad art. 412 CPP).
3.
J._ soutient que l'on pouvait vraisemblablement douter de l'impartialité du premier juge, ce dernier ayant fonctionné comme greffier de l'ancien Tribunal administratif du canton de Vaud, dans une affaire fiscale le concernant, lui et ses parents, en 2006.
Selon l'art. 30 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), dont la portée est de ce point de vue identique à celle de l'art. 6 par. 1 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101), toute personne dont la cause doit être jugée dans une procédure judiciaire a droit à ce que sa cause soit portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. Cette garantie permet d'exiger la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître des doutes sur son impartialité et tend à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de la part du juge ne peut guère être prouvée ; il suffit que les circonstances donnent l'apparence d'une prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Toutefois, seules des circonstances objectives doivent être prises en compte, les impressions purement individuelles des parties au procès n’étant pas décisives
(ATF 134 I 20 c. 4.2 ; ATF 134 I 238 c.2.1 et les arrêts cités).
Aux termes de l'art. 58 CPP, lorsqu'une partie entend demander la récusation d'une personne qui exerce une fonction au sein d'une autorité pénale, elle doit présenter sans délai à la direction de la procédure une demande en ce sens, dès qu'elle a connaissance du motif de récusation; les faits sur lesquels elle fonde sa demande doivent être rendus plausibles. Le degré de preuve exigé correspond à
la vraisemblance prépondérante. Cette réserve temporelle introduite par l'art.
58 al. 1 CPP, concrétise le principe de bonne foi des particuliers prévu par
l'art. 5 al. 3 Cst. Ainsi, la demande doit être introduite sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation. Cette exigence résulte de la jurisprudence fédérale depuis déjà longtemps. Elle a pour ratio d'éviter que les parties n'utilisent la récusation comme "bouée de sauvetage", en ne formulant leur demande qu'après avoir pris connaissance d'une décision négative ou s'être rendu compte que l'instruction ne suivait pas le cours désiré. Une demande de récusation tardive est irrecevable (cf. Jean-Marc Verniory, op. cit. n. 3 et 5 ad. art. 58 CPP et les
réf. citées).
4.
En l'occurrence, le motif de révision soulevé par le requérant, à savoir la récusation du premier juge en raison de son éventuelle partialité, concerne la procédure de première instance et non un fait nouveau relatif aux actes pour lesquels il a été condamné. Or, la révision est une voie de recours extraordinaire, dirigée contre une décision de condamnation, voire d'acquittement, revêtue de l'autorité de la chose jugée, entachée d'une erreur de fait et non d'une erreur de droit (cf. Marc Rémy, op. cit. n. 1 et 2 ad. art. 410 CPP). On peut ainsi se demander si le motif invoqué constitue un moyen de révision au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP. La question peut toutefois rester ouverte dans la mesure où la demande de révision doit de toute manière être déclarée irrecevable.
En effet, en premier lieu, on ne peut suivre le requérant lorsqu'il affirme ne pas s'être rendu compte de l'identité du premier juge avant d'avoir évoqué le jugement attaqué avec ses parents. Lui-même indique que la procédure fiscale menée en 2006 concernant la société [...] SA– administrée par lui et ses parents – a été longue les intéressés allant, déjà à l'époque, jusqu'à saisir le Tribunal fédéral pour demander la récusation des membres de l'ancien Tribunal administratif du canton de Vaud qui avaient participé à dite procédure. Tout porte dès lors à croire que le requérant connaissait l'identité du juge de première instance et qu'il pouvait faire le rapprochement avec la précédente affaire qu'il évoque avant l'issue de la procédure pénale. Pour ce motif déjà, son droit de demander la récusation du vice-président du Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne est périmé et sa demande doit être rejetée.
En second lieu, l'art. 56 al. 1 let b CPP prohibe d'une manière générale à toute personne soumise à récusation d'intervenir dans une cause pénale lorsqu'elle a agi à un autre titre dans la même cause. Les termes "la même cause" doivent toutefois s'entendre de manière formelle et il doit réellement s'agir de la même procédure pénale (cf. Jean-Marc Verniory, op. cit. n. 14 et 16 ad art. 56 CPP;
TF 4P_198/2004 du 23 mars 2005 c. 3.1). En l'espèce, le premier juge a participé en 2006 - en qualité de greffier - à une procédure fiscale distincte de la
procédure pénale dont il est question ici, de sorte qu'il n'y a pas matière à récusation (cf. Jean-Marc Verniory, op. cit. n. 17 ad. art. 56 CPP et les références citées).
Le motif de révision invoqué est dès lors dépourvu de fondement et il n'est pas susceptible d'aboutir à une sanction réduite du requérant. La demande de révision est ainsi manifestement irrecevable.
5.
En définitive, la demande de révision présentée par J._ est manifestement irrecevable. Vu l'issue de la cause, les frais de révision (art. 21, par renvoi de l'art. 22 du TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux, RSV
312.03.1
]) sont mis à sa charge et il n'y a pas lieu de lui allouer de dépens (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c56f02b2-e9c0-4ea9-ab2e-f7c0bf20c8c5 | En fait :
A.
Par jugement du 17 avril 2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a constaté que I._ s'est rendu coupable de violation grave des règles de la circulation routière (I), condamné I._ à une peine pécuniaire de 102 jours-amende à 240 fr. le jour et à une amende de 6'120 fr. (II), suspendu l'exécution de la peine pécuniaire et fixé le délai d'épreuve à deux ans (III), dit que la peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif de l'amende sera de 25 jours (IV), arrêté les frais de justice à la charge de I._ à 550 fr. (V), et rejeté en tant qu'elle est recevable la requête de I._ de mettre ses frais de conseil à charge du Ministère public (VI).
B.
Par annonce du 29 avril 2014, puis par déclaration motivée postée le 19 mai 2014, I._ a interjeté appel contre ce jugement, en concluant à la modification des chiffres II, IV, V et VI de son dispositif dans le sens d'une réduction de la quotité de la peine et de l'amende, les frais étant laissés à la charge de l'Etat, et une indemnité de 4'500 fr. lui étant allouée, à la charge du Ministère public, pour ses frais de défense.
C.
Les faits, qui ne sont pas contestés, sont les suivants :
1.
Né le 16 novembre 1958 à (...) titulaire d'un permis C, I._ est marié et père de trois enfants. Il est venu en Suisse en 1967 et exerce, depuis cette époque, une activité (...) au sein (...) et qui lui a versé un revenu variable de l'ordre de 7'661 fr. 50 par mois jusqu'au jugement de première instance (avril 2014). I._ ne vivrait depuis lors que de ses revenus immobiliers (procès-verbal p. 3), soit principalement du loyer mensuel de 6'000 dollars tiré d'un immeuble sis au Etats-Unis, ceux provenant de l'immeuble situé en Suisse, de 8'000 fr. hypothèque déduite, étant affectés à l'amortissement d'un emprunt contracté fin 2013 (40'000 fr.) pour la transformation dudit bien. La fortune de I._ se monte à 1'100'000 fr., ses charges annuelles se composent de 90'000 fr. de loyer, 40'000 fr. d'impôts, et
17'400 fr. de primes d'assurance-maladie. Il fait en outre l'objet de deux poursuites, notifiées en février 2014, pour respectivement 13'608 fr. 15 et 27'444 fr. 60 et intérêt, représentant des arriérés d'impôts pour 2010 et 2011.
2.
Le casier judiciaire suisse de I._ est vierge.
3.
Le 26 juillet 2013, à 8 h 57, à Lucens, sur la route principale
Lausanne-Berne, en direction de Moudon, I._ a circulé au volant d'un véhicule automobile à la vitesse de 127 km/h (marge de sécurité déduite) dépassant ainsi de 47 km/h la vitesse maximale autorisée hors localité, soit 80 km/h. On retiendra encore, au vu des descriptions et photos contenues dans rapport de la police cantonale du 9 septembre 2013 (P. 4), qu'il faisait beau, et que le tronçon sur lequel a eu lieu l'infraction était rectiligne et peu fréquenté. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de I._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
3.1
Les faits étant postérieurs à l'entrée en vigueur du premier volet
"via sicura"
s'applique ici l'art. 90 LCR (Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958; RS 741.01) dans sa nouvelle teneur entrée en vigueur le 1
er
janvier 2013, dont les trois alinéas suivants :
Celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 90 nLCR al. 2).
Celui qui, par une violation intentionnelle des règles fondamentales de la circulation, accepte de courir un grand risque d'accident pouvant entraîner de graves blessures ou la mort, que ce soit en commettant des excès de vitesse particulièrement importants, en effectuant des dépassements téméraires ou en participant à des courses de vitesse illicites avec des véhicules automobiles est puni d'une peine privative de liberté d'un à quatre ans (art. 90 nLCR al. 3).
L’al. 3 est toujours applicable lorsque la vitesse maximale autorisée a été dépassée d’au moins 40 km/h, là où la limite était fixée à 30 km/h (let. a), d’au moins 50 km/h, là où la limite était fixée à 50 km/h (let. b), d’au moins 60 km/h, là où la limite était fixée à 80 km/h (let. c), et d’au moins 80 km/h, là où la limite était fixée à plus de 80 km/h (let. d)
(art. 90 nLCR al. 4).
3.2
Les principes applicables sous l'égide de l'ancien droit étaient fixés par la jurisprudence en ces termes (cf. TF 6B_1011/2013 du 13 mars 2014 c. 2.1) :
"L'infraction réprimée par l'art. 90 ch. 2 aLCR (le nouvel art. 90 al. 2 LCR, en vigueur depuis le 1
er
janvier 2013, n'est pas plus favorable) est objectivement réalisée lorsque l'auteur viole grossièrement une règle fondamentale de la circulation et met ainsi sérieusement en danger la sécurité d'autrui; une mise en danger abstraite accrue est toutefois suffisante. Subjectivement, l'infraction suppose un comportement sans scrupule ou gravement contraire aux règles de la circulation. Cette condition est toujours réalisée si l'auteur est conscient du danger que représente sa manière de conduire. En cas d'acte commis par négligence, l'application de l'art. 90 ch. 2 aLCR implique à tout le moins une négligence grossière (ATF 131 IV 133 c. 3.2 p. 136).
Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence, afin d'assurer l'égalité de traitement, a été amenée à fixer des règles précises. Ainsi, le cas est objectivement grave, c'est-à-dire sans égard aux circonstances concrètes, en cas de dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l'intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes dont les chaussées, dans les deux directions, ne sont pas séparées et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (ATF 132 II 234 c. 3.1 p. 237 s.; 124 II 259 c. 2b p. 261 ss). Le conducteur qui dépasse de manière aussi caractérisée la vitesse autorisée agit intentionnellement ou à tout le moins par négligence grossière. Il existe un lien étroit entre la violation objectivement grave et l'absence de scrupule sous l'angle subjectif, sous réserve d'indices contraires spécifiques. Le Tribunal fédéral a régulièrement nié l'existence de telles circonstances à décharge (cf. arrêt 6B_571/2012 du 8 avril 2013 c. 3.4 et les références citées)".
I._ a été reconnu coupable de violation grave des règles de la circulation routière, ce qui n'est pas remis en cause et doit, au vu des faits retenus et admis par l'appelant, être confirmé.
4.
I._ conteste la quotité de la peine infligée dès lors qu'elle aurait été fixée en référence aux nouveaux barèmes contenus à l'art. 90 al. 3 LCR qui consacrent le crime de chauffard, et non pas conformément à la pratique jurisprudentielle demeurant applicable aux autres usagers de la route.
4.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
En matière de circulation routière, le Tribunal fédéral a précisé que si le juge pouvait s'aider des recommandations de la conférence des autorités de poursuite pénale de suisse (ci-après : la CAPS) pour exercer son pouvoir d'appréciation, ces recommandations ne pouvaient l'empêcher de se faire en toute indépendance son propre avis sur la peine qui correspond à la culpabilité du condamné et aux autres circonstances pertinentes au regard de l'art. 47 CP
(TF 6B_379/2009 du 22 septembre 2009 c. 1.2).
4.2
Au vu des arguments de l'appelant, le point qu'il faut trancher est celui de savoir si la jurisprudence consacrée à l'arrêt TF 6B_379/2009 du 22 septembre 2009 susmentionnée continue à s'appliquer telle quelle nonobstant l'adoption des alinéas 3 et 4 de l'art. 90 nLCR ou s'il convient, à tout le moins lorsque l'excès de vitesse est particulièrement grave au point de s'approcher des seuils de l'art. 90 al. 4 nCR, de tenir compte – à la hausse – dans la quotité de la peine, du principe
"d'équité qui doit fonder toute décision pénale"
comme le précise l'autorité inférieure en page 7 de son jugement.
On précise que d'après les recommandations de la CAPS postérieures à l'adoption des dispositions dites
"via sicura"
(adoptées le 22 février 2013), la peine pour un dépassement équivalent à celui commis par I._ est de 90 jour-amende, alors que celles antérieures, adoptées le 3 novembre 2006, retenaient, pour le même cas, une peine de 30 jours-amende au moins.
4.3
En l'espèce, la culpabilité de I._ n'est importante qu'au regard de la gravité de l'excès de vitesse. Il n'y a pas d'antécédents. Si la route Lausanne-Berne est dangereuse et qu'un danger a été créé en l'espèce, ce n'est qu'en raison de l'excès de vitesse. Rien ne permet de retenir à charge une configuration particulière ou un comportement du prévenu qui viendrait s'ajouter à la gravité de l'excès de vitesse lui-même. D'après les constatations de la police cantonale, il faisait jour, le temps était beau, le tronçon sur lequel a eu lieu le dépassement de vitesse était rectiligne et peu fréquenté (P. 4). Ainsi, rien ne justifie que l'appelant soit assimilé même indirectement à l'un des chauffards visés par la modification législative entrée en vigueur le 1
er
janvier 2013, à l'art. 90 ch. 3 nLCR. L'excès de vitesse commis par I._ étant encore assez éloigné de ceux
"particulièrement importants"
mentionnés à l'art. 90 al. 3 nLCR, on ne saurait tirer prétexte de cette disposition exceptionnelle pour s'écarter notablement des décisions rendues ces dernières années dans des cas similaires à celui commis par le prévenu. Au vu des éléments qui précèdent, le prévenu ayant reconnu les faits, une peine pécuniaire de 70 jours-amende paraît adéquate pour sanctionner son comportement. L'appel doit donc être admis sur le principe.
5.
Vu ses autres revenus et sa fortune, la quotité du jour-amende, fixée à 240 fr., doit être confirmée nonobstant la péjoration de la situation professionnelle du recourant, qui a débuté en 2013 et s'est aggravée en 2014. Elle n'est d'ailleurs pas contestée. Elle est en outre adéquate au vu des principes les principes fixés par la jurisprudence fédérale (TF 6B_217/2007 du 14 avril 2008 et TF 6B_541/2007 du 13 mai 2008).
6.
Le droit au sursis s'examine selon les critères posés à l'art. 42 CP qui ont été rappelés dans l'arrêt publié aux ATF 135 IV 180 c. 2.1. Il y est renvoyé. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 5 c. 4.2.2). En l'espèce, ni le sursis, dont les conditions objectives et subjectives sont réalisées, ni sa durée, fixée au minimum légal de deux ans (art. 44 CP), ne sont remis en cause. Le jugement doit donc être confirmé sur ces deux points qui échappent à la critique.
7.
I._ conteste la quotité de l'amende, fixée sans plus amples motifs à 6'120 fr. par le premier juge. Il demande qu'elle soit réduite dans une mesure fixée à dire de justice.
7.1
Conformément à l’art. 42 al. 4 CP, le juge peut prononcer, en plus du sursis une peine pécuniaire sans sursis ou une amende selon l’art. 106 CP. Dans ce contexte, au plan quantitatif, la sanction ferme doit, toutefois, demeurer secondaire par rapport à la peine pécuniaire principale soumise au sursis, dont elle n’est que l’accessoire. Sa fonction consiste, notamment, sous l’angle de la prévention tant générale que spéciale, à renforcer l’effet coercitif modéré de la peine pécuniaire avec sursis, par un signal concret (Denkzettelfunktion). Le juge ne peut donc, par ce biais, contourner le principe de l’octroi du sursis à la peine pécuniaire. Selon la jurisprudence, sous réserve d’exceptions non pertinentes en l’espèce, ces exigences ne sont pas respectées lorsque l’amende excède dans sa quotité 1/5 de la sanction globale, respectivement 1/4 de la peine conditionnée au sursis (CAPE 2 mai 2013/99 c. 5.2 et les références citées).
7.2
Dans le cas présent, l'amende ne saurait donc dépasser 4'200 fr. (70 jours X 240 fr. x 1⁄4), de sorte que le montant fixé par le premier juge apparaît excessif et que le grief est fondé.
S'agissant plus précisément de la peine d'amende, l'art. 106 al. 3 CP prescrit au juge de fixer celle-ci, ainsi que la peine privative de liberté de substitution, en tenant compte de la situation de l'auteur, afin que la peine corresponde à la faute commise. La situation économique déterminante est celle de l'auteur au moment où l'amende est prononcée (TF 6B_988/2010 du 3 mars 2011 c. 2.1 in fine et réf.).
Au vu de ces critères, une amende de 2'000 fr., convertible, en cas de non paiement fautif, à 20 jours de peine privative de liberté de substitution à 100 fr. le jour, est adéquate pour sanctionner le comportement du prévenu (art. 47 et 106 CP).
8.
En définitive, l'appel de I._ doit être admis et le jugement attaqué réformé dans le sens des considérants.
9.
I._ demande que les frais soient laissés à la charge de l'Etat et qu'une indemnité de 4'500 fr., lui soit allouée, à la charge du Ministère public, pour ses frais de défense.
Succombant à l'action pénale, c'est à juste titre que I._ a été chargé des frais de première instance (550 fr.), réduits de moitié pour tenir compte de la brièveté de l'audience (jugement p. 9). Vu le résultat positif de l'appel (réduction de la quotité de la peine et du montant de l'amende), les frais de seconde instance peuvent être laissés à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP).
L'intéressé ayant été condamné (cf. ch. I du dispositif) et la réduction de peine obtenue en appel ne correspondant pas à un acquittement total ou partiel, les réquisits de l'art. 429 al. 1 let. a CPP ne sont pas réunis et le droit à une indemnité pour frais de défense n'est pas ouvert. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c5787cf9-69ab-42b3-9262-5ea6bac6f635 | En fait :
A.
Par jugement du 15 janvier 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que A.P._ s'est rendu coupable d'escroquerie (I), condamné A.P._ à une peine pécuniaire de 150 jours-amende, le montant du jour-amende étant arrêté à 20 fr. (II), et mis les frais de la cause, par 800 fr., à la charge de A.P._ (III).
B.
Par annonce du 15 janvier 2015, puis déclaration motivée du 27 janvier 2015, A.P._ a fait appel contre ce jugement, en concluant avec suite de frais à sa libération.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
A.P._, ressortissant congolais, né le 30 août 1968 et père de plusieurs enfants restés en Afrique, est venu une première fois en Suisse en 1996 pour y déposer une demande d'asile. Il a été débouté et est retourné en Afrique. Il est revenu dans notre pays en 1998 et y a épousé B.P._, une compatriote titulaire d'un permis B, dont il vit séparé depuis le mois de juin 2014. Une procédure judiciaire est en cours. L'intéressé est actuellement au bénéfice d'un permis C. Dès son arrivée en Suisse, il a travaillé dans la restauration et dans le bâtiment. A ce jour, il perçoit un revenu de l'ordre de
2'300 fr. par mois, composé du salaire versé par [...] où il oeuvre à 60% et complété par le revenu d'insertion (RI) qui prend en charge son loyer de 850 fr.
par mois. En raison de sa situation financière, il perçoit un subside pour son assurance-maladie et ne paie pas d'impôts. Il a des dettes et fait l'objet de poursuites pour un montant qu'il ignore.
Il ressort de l'extrait de casier judiciaire suisse de A.P._ que celui-ci a été condamné, le 7 mars 2005, par le Juge d'instruction de Lausanne, pour escroquerie, à deux mois d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans.
2.
Entre novembre 2007 et janvier 2010, exceptés les mois de janvier, juin et octobre 2009 et depuis le mois de janvier 2012, les époux A.P._ ont bénéficié du revenu d'insertion (RI) de couple délivré par le Centre social régional de Lausanne (ci-après : CSR).
A l'occasion de leurs demandes RI des 4 décembre 2007 et 21 février 2012, comme lors de leurs déclarations mensuelles de revenus, les époux A.P._ ont rempli et signé un formulaire ad hoc. Par ce document, ils ont été à rendus attentifs à leurs obligations de bénéficiaires de l'aide sociale, en particulier à celle de déclarer tout revenu et tout changement intervenant dans leur situation financière. A cet égard, la page qu'ils ont paraphée l'un et l'autre contenait les indications suivantes :
"[...] Les soussignés certifient qu'ils ont déclaré tous leurs revenus ainsi que ceux des membres de leur famille qui vivent sous le même toit (...) qu'ils ont également déclaré leur épargne, leur fortune et leurs éventuels gains immobiliers (...) qu'ils ont annoncé toutes les personnes qui partagent leur logement et que leur déclaration par rapport à leur situation familiale est conforme à la réalité [...]".
Durant la période incriminée, les époux prénommés ont dissimulé au CSR l'existence des comptes bancaires [...] sur lesquels des salaires ont été versés. Ils ont encore caché à l'autorité l'exercice d'activités lucratives rémunérées, de même que les revenus obtenus en avril 2013 auprès de l'agence[...]. Il ressort en outre du rapport final d'enquête du 20 décembre 2012 que B.P._ exerçait une activité rémunérée d'aide soignante dans des EMS de la région et [...] par le biais [...], que d'après les employeurs [...], certains salaires n'ont pas été annoncés et que des montants non déclarés ont été constatés sur les comptes [...] entre septembre 2009 et septembre 2012. Les époux A.P._ ont ainsi indûment perçu l'aide sociale pour un montant total de 15'966 fr. 15. Le CSR a ordonné la restitution de l'indu par trois décisions administratives notifiées aux intéressés entre février et octobre 2013.
Le 28 mars 2014, le CSR a déposé plainte pénale contre les époux A.P._ et B.P._ (P. 4). Ceux-ci ont été condamnés pour escroquerie par ordonnance pénale rendue le 27 juin 2014 par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne. Cette ordonnance est exécutoire pour B.P._. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP; Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007; RS 312.0) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de A.P._ est recevable.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
3.1
Aux termes de l’art. 146 CP, se rend coupable d’escroquerie, celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais, ou l’aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers.
L'escroquerie suppose en particulier que l'auteur ait usé de tromperie à l’égard de la dupe et que celle-ci ait été astucieuse (ATF 128 IV 18 c. 3a ; ATF 122 II 422 c. 3a ; ATF 122 IV 246 c. 3a et les arrêts cités). Selon la jurisprudence, l’astuce est réalisée non seulement lorsque l’auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manoeuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu’il se borne à donner de fausses informations dont la vérification n’est pas possible, ne l’est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l’auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu’elle renoncera à le faire, par exemple en raison d’un rapport de confiance particulier (ATF 133 IV 256 c. 4.4.3 ; ATF 128 IV 18 c. 3a).
Ces principes sont également applicables en matière d'aide sociale (ATF 127 IV 163 ; TF 6B_22/2011 du 23 mai 2011 c. 2.1). L'autorité agit de manière légère lorsqu'elle n'examine pas les pièces produites ou néglige de demander à celui qui requiert des prestations les documents nécessaires afin d'établir ses revenus et sa fortune, comme par exemple sa déclaration fiscale, une décision de taxation ou des extraits de ses comptes bancaires. En revanche, compte tenu du nombre de demandes d'aide sociale, une négligence ne peut être reprochée à l'autorité lorsque les pièces ne contiennent pas d'indice quant à des revenus ou à des éléments de fortune non déclarés ou qu'il est prévisible qu'elles n'en contiennent pas (TF 6B_576/2010 du 25 janvier 2011 c. 4.1.2 et les réf. citées).
La jurisprudence a notamment considéré comme une escroquerie le fait de dissimuler des éléments de revenus ou de patrimoine à l’autorité d’aide sociale dans le dessein de capter des prestations (CAPE 23 août 2013/186 c. 3.2 ; CAPE 31 août 2011/105 c. 5.1.2; CCASS 11 janvier 2010/4 c. 3a). Lorsque l’acte litigieux consiste dans le versement par l’Etat de prestations prévues par la loi, il ne peut y avoir escroquerie consommée que si le fait sur lequel portait la tromperie astucieuse et l’erreur était propre, s’il avait été connu par I’Etat, à conduire au refus, conformément à la loi, de telles prestations. Ce n’est en effet que dans ce cas, lorsque les prestations n’étaient en réalité pas dues, que l’acte consistant à les verser s’avère préjudiciable pour l’Etat et donc lui cause un dommage. A défaut de dommage, il n’y a pas escroquerie consommée; seule une tentative au sens de
l’art. 22 CP peut être envisagée à charge de l’auteur (ATF 128 IV 18 c. 3b; TF 6B_791/2013 du 3 mars 2014 c. 3.1.3).
Du point de vue subjectif, l’auteur doit avoir agi intentionnellement et dans un dessein d’enrichissement illégitime, un résultat correspondant n’étant cependant pas une condition de l’infraction (ATF 134 IV 210 c. 5.3 ; ATF 119 IV 210 c. 4b). Le dol éventuel suffit.
3.2
Selon l'art. 75 LASV (Loi sur l'action sociale vaudoise du 2 décembre 2003; RSV 850 051), celui qui aura trompé l'autorité par des déclarations inexactes, aura omis de lui fournir les informations indispensables ou ne lui aura pas fourni les informations par elle requises, est passible d'une amende de 10'000 fr. au plus. Contrairement à l'escroquerie (art. 146 CP), les infractions de l'art. 75 LASV ne nécessitent pas un comportement astucieux (CREP du 24 juillet 2013/503 c. 2.3 et les références citées).
3.3
Est un coauteur celui qui collabore intentionnellement et de manière déterminante avec d'autres personnes dans la décision de commettre une infraction, dans son organisation ou son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux. La coactivité suppose donc une décision commune soit expresse, soit résultant d'actes concluants. Le coauteur doit réellement s'associer soit à la décision, soit à la réalisation, dans des conditions et dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal. Il faut que le coauteur ait une certaine maîtrise des opérations et que son rôle soit plus ou moins indispensable (ATF 120 IV 17 c. 2d).
4.
A.P._ fait valoir que son épouse serait la seule responsable des abus dénoncés par les services sociaux. S'il admet avoir su que son épouse travaillait à 30 ou 40 %, il prétend avoir ignoré ce qu'elle déclarait ou non à l'administration aux motifs que leurs relations étaient mauvaises, et qu'il remplissait et signait en premier le formulaire, avant de laisser sa femme en faire autant pour ce qui la concernait. N'ayant, pour sa part, rien caché et en se taisant parce qu'il ne savait rien, l'appelant qu'il n'aurait commis aucune infraction, pas même une violation de l'art. 75 LASV, faute de volonté délictuelle.
En apposant sa signature sur le formulaire ad hoc rempli par les deux conjoints pour leur RI de couple, A.P._ attestait de la réalité des indications fournies à l'autorité. L'appelant savait en effet que son épouse travaillait et, à l'évidence, ne pouvait ignorer qu'un revenu d'insertion, dont ils bénéficiaient les deux, était perçu mois après mois. D'ailleurs, les époux avaient déjà été condamnés ensemble en 2005 pour le même motif, de sorte que la version de l'appelant n'est pas crédible.
En outre, la dissimulation n'était pas facilement vérifiable puisque seule l'enquête administrative incluant l'analyse des transactions bancaires a permis d'établir la réalité des faits incriminés, jusque là soupçonnés. Il s'agit donc bien d'une tromperie astucieuse au sens de l'art. 146 CP, ce qui exclut une application
de l'art. 75 LASV (cf. supra c. 3.2).
Sur la base de ces renseignements erronés, l'administration a fourni aux époux A.P._ des prestations qu'elle aurait été amenée à refuser en tout ou partie si elle avait connu la réalité des faits. Avec son épouse, le prévenu a profité de ces prestations. Il s'est donc également enrichi illégitimement aux dépens de l'Etat.
Enfin, le caractère intentionnel de la dissimulation ne fait aucun doute puisque A.P._ ne pouvait ignorer, par les formules qu'il a signées, qu'il devait annoncer au CSR toutes les ressources des personnes vivant sous le même toit. Tel était bien le cas à l'époque des faits incriminés, puisqu'aux dires du prévenu, le couple ne se serait séparé qu'en juin 2014. L'élément subjectif est donc également réalisé, le dol éventuel étant d'ailleurs suffisant.
A.P._ s'est donc rendu coupable d'escroquerie
(art. 146 CP), comme coauteur.
5.
5.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1 p. 19 s.; 129 IV 6 c. 6.1 p. 20).
Le droit au sursis s'examine selon les critères posés à l'art. 42 CP qui ont été rappelés dans l'arrêt publié aux ATF 135 IV 180 c. 2.1. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 5 c. 4.2.2).
5.2
L'appelant demande principalement son acquittement, conclusion mal fondée, et à titre subsidiaire, une peine avec sursis.
Toutefois, c'est une peine pécuniaire ferme qui doit sanctionner le comportement illicite de A.P._. En effet, le pronostic est défavorable au vu du déni obstiné de A.P._, ainsi qu'au regard de ses antécédents.
Compte tenu de la durée de la période délictueuse, de l'importance des montants perçus à tort et de la récidive, une peine de 150 jours-amende est adéquate pour sanctionner le comportement de A.P._. Le montant du jour-amende sera arrêté à 20 fr. pour tenir compte de sa situation financière au moment du jugement (art. 34 CP; ATF 134 IV 1 c. 4. 2. 1 p. 5).
6.
En définitive, l'appel de A.P._ doit être rejeté et le jugement entrepris confirmé.
6.1
Il convient d'allouer à Me Denis Weber l'indemnité d'office qu'il demande, soit 1'933 fr. 20. Ce montant, qui tient compte du travail effectué et de l'ampleur du dossier, représente 9 heures d'honoraires, une vacation à 120 fr., 50 fr. de débours et 8% de TVA.
6.2
Les frais d'appel, par 3'623 fr. 20, ainsi que l'indemnité d'office allouée au défenseur d'office, sont mis à la charge deA.P._, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). Ce dernier sera tenu de rembourser à l’Etat l’indemnité en faveur de son défenseur d’office, dès que sa situation financière le permettra. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c5c02e67-d62b-4150-b932-ff942bde52fe | En fait :
A.
Par jugement du 17 décembre 2013, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois a libéré B._ du chef d'accusation d'escroquerie (I), a libéré W._ du chef d'accusation d'escroquerie (II), a condamné B._, pour abus de confiance, à une peine privative de liberté de 45 jours, avec sursis durant cinq ans (III), a condamné W._, pour abus de confiance, à 70 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à dix francs, avec sursis durant deux ans (IV), a pris acte, pour valoir jugement, de l’engagement souscrit par W._ en faveur de J._ en page 12 du procès-verbal (V), a alloué à J._ ses conclusions civiles à l'encontre de B._ à hauteur de 899 fr. et a dit que B._ est son débiteur d'un montant de 899 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 20 septembre 2011 (VI), a dit que l’indemnité du défenseur d’office de J._ est fixée à 1'941 fr. 85 et l’a laissée à la charge de l’Etat (VII) et a mis les frais de la cause, par 2'275 fr., à la charge de B._ à hauteur de 1'137 fr. 50 et à la charge de W._ à hauteur de 1'137 fr. 50 (VIII).
B.
B._ a annoncé faire appel de ce jugement le 27 décembre 2013 (P. 43). Il a déposé une déclaration d’appel motivée le 29 janvier 2014, concluant, avec suite de frais, à la modification du jugement en ce sens, principalement, qu’il est libéré du chef d’accusation d’abus de confiance et qu’une indemnité au sens de l’art. 429 CPP lui est allouée et, subsidiairement, qu’il est libéré du chef d’accusation d’abus de confiance pour ce qui est du téléphone et qu’il est condamné à une peine de 30 jours-amende à 10 fr., avec sursis pendant deux ans, et qu’une indemnité au sens de l’art. 429 CPP lui est allouée.
A l’audience d’appel, le prévenu B._ a confirmé ses conclusions; la plaignante J._, intimée, a conclu, avec suite de frais, au rejet de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1
Né en 1972, ressortissant de Serbie-Monténégro, le prévenu B._ est arrivé en Suisse à l‘âge de 16 ans, avec sa mère, pour demander l’asile. Au bénéfice d’un permis F, il a travaillé comme manœuvre-étancheur au service de diverses entreprises. Actuellement, il ne serait plus en mesure de travailler. Une demande de prestations de l’assurance-invalidité est pendante. Le prévenu ne sait ni lire, ni écrire, mais est en mesure de compter. Marié et père d’un enfant né en 2013, il vit avec les siens chez sa mère, qui les entretient. Il fait l’objet de poursuites pour environ 40'000 fr. selon lui.
Son casier judiciaire comporte une condamnation à une peine d’emprisonnement d’un mois, avec sursis pendant cinq ans, prononcée le 8 février 2006 par le Juge d’instruction de l’Est vaudois pour abus de confiance.
1.2
La plaignante J._, née en 1967, est rentière de l’assurance-invalidité. Fragile psychologiquement, elle a séjourné en institution, à savoir à la [...], à [...]. Durant ce séjour, elle a fait la connaissance d’un ami de B._, W._, né en 1959, avec lequel elle a noué une relation amoureuse qui a duré un peu plus d’un mois. Durant cette période, soit en septembre 2011, elle a fait la connaissance de B._. Ce dernier a gagné sa confiance en se faisant passer pour un gestionnaire de divers complexes hôteliers à l’étranger. Les prévenus ont ainsi appris que J._ avait 9'000 fr. sur son compte PostFinance, issu notamment d’arrérages de rentes de l’assurance-invalidité versés au début du mois de septembre de la même année.
A Vevey, le 16 septembre 2011, les prévenus ont fait croire à J._ que cette somme allait lui être ponctionnée en raison de son statut de rentière de l’assurance-invalidité et qu’il fallait donc la cacher en la plaçant sur un compte en Crête. Convaincue par ces propos et craignant la perte de son argent, la plaignante, accompagnée des deux prévenus, s’est rendue le même jour à la poste de Vevey pour retirer 7'000 francs. Elle a confié l’entier de cette somme à son compagnon de l’époque W._. Sur cette somme, W._ a remis 5'000 fr. à B._ afin d’ouvrir un compte en Crête au nom de J._ et a gardé le solde, soit 2'000 fr,, devant servir de garantie de loyer pour un appartement que les deux comparses avaient promis à J._. Pour convaincre leur victime, les acolytes l’ont emmenée à Montreux, près d’un immeuble qu’il lui ont désigné comme étant le lieu de son futur logement. Ils lui ont également fait croire qu’ils connaissaient le propriétaire et qu’ils étaient en contact en vue de la remise du logement. J._, qui voulait trouver un appartement pour reprendre sa vie en mains, a accepté l’aide prétendument offerte par les comparses. Par la suite, elle a encore versé 500 fr. à B._, en ajoutant foi aux dires de celui-ci selon lesquels il fallait au moins 5'500 fr. pour ouvrir un compte en Crête. Par la suite, W._ a restitué à J._ 1'000 fr. sur les 2'000 fr. confiés.
Peu de temps après la fin du mois de septembre 2011, B._ a réclamé à J._ une somme de 1'350 fr. devant correspondre au premier loyer de l’appartement montreusien prétendument loué en sa faveur. La victime a remis 1'000 fr. au prévenu.
Toujours sous l’emprise des prévenus, J._ a, le 20 septembre 2011, souscrit à son nom un abonnement de téléphonie mobile afférent à un iPhone 4, acheté le même jour (P. 32). Elle a ensuite remis cet appareil, en état de fonctionnement, à B._ pour une durée censée ne pas dépasser quelques jours, soit cinq jours (PV aud. 1, lignes 35-39).
Voyant que les projets ne se réalisaient pas, J._ a réclamé à plusieurs reprises à B._ le remboursement du montant total de 6'500 fr. qu’elle lui avait confié, ainsi que de l’appareil remis, mais en vain. En effet, ce prévenu, persistant dans ses mensonges, a continué à prétendre que le logement promis à sa victime finirait par lui être fourni.
Le 8 octobre 2011, tout en établissant une reconnaissance de dette, B._ a remis à W._ le montant de 6'500 fr., afin que ce dernier restitue cette somme à J._. Malgré l’engagement pris, il n’en a rien fait. La victime n’a pas recouvré un centime sur le montant total de 7'500 fr. versé aux prévenus, pas plus qu’elle n’a récupéré son iPhone, dont on ignore le sort ultérieur.
Elle a dû payer l’objet en question, d’un prix de 899 fr., plus un accessoire d’une valeur de 44 fr. 90, notamment en souscrivant à un abonnement d’une durée de deux ans afférent à cet appareil, d’une valeur de 720 fr. (P. 32).
1.3
J._ a déposé plainte le 14 octobre 2011 (PV aud. 1). Elle a pris des conclusions civiles à hauteur de 8'656 francs. W._ a admis avoir reçu 7'000 fr. de la plaignante et ne pas les lui avoir restitués, ajoutant qu’il avait dépensé cet argent notamment en compagnie de son co-prévenu. Pour sa part, B._ a contesté l’ensemble des faits qui lui étaient reprochés.
2.
Appréciant les faits de la cause, le premier juge a écarté les dénégations du prévenu B._, considérées comme mensongères, au profit des allégations de la victime. Il a ainsi tenu pour avéré que le prévenu s’était bien vu remettre le téléphone acheté par J._ et qu’il ne le lui avait pas restitué, d’où la condamnation pour abus de confiance, infraction dont les éléments objectifs et subjectifs ont été tenus pour réunis. En revanche, en ce qui concerne l’argent confié par la victime, le premier juge a relevé que, pendant l’instruction, W._ avait, à un moment donné, décidé d’endosser seul toute la responsabilité de la disparition de ces espèces, qu’il devait répondre d’abus de confiance pour ces faits et qu’il devait en répondre seul, puisqu’il avait décidé de décharger son comparse de toute responsabilité à cet égard. Appréciant la culpabilité du prévenu B._, le tribunal de police a pris en compte, à charge, le déni du prévenu et l’absence de réparation, ainsi que le fait que l’infraction réprimée avait été commise quelques mois seulement après l’échéance du sursis assortissant la précédente sanction pénale et qu’il s’agissait de la même infraction. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (cf. art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
Invoquant une violation du principe « in dubio pro reo », l’appelant reproche d’abord au premier juge d’avoir écarté ses dénégations pour préférer la version de la plaignante, sans que des éléments particuliers ne permettent, selon lui, d’accorder une valeur prépondérante aux déclarations de cette dernière.
3.1
L’art. 10 CPP dispose que toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le Tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Le tribunal se fonde sur l’état de fait le plus favorable au prévenu lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation (al. 3).
S'agissant plus précisément de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits, il s’agit de l’acte par lequel le juge du fond évalue librement la valeur de persuasion des moyens de preuve à disposition et pondère ces différents moyens de preuve afin de parvenir à une conclusion sur la réalisation ou non des éléments de fait pertinents pour l’application du droit pénal matériel. Le juge peut fonder une condamnation sur un faisceau d’indices; en cas de versions contradictoires, il doit déterminer laquelle est la plus crédible. En d’autres termes, ce n’est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (Verniory,
in
: Kuhn/Jeanneret [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 34 ad art. 10 CPP et les références jurisprudentielles citées).
Lorsque l'autorité a forgé sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables au prévenu sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
3.2
L’appelant se trompe en affirmant qu’il aurait été condamné en raison de l’argent qui lui aurait été confié par la plaignante. En effet, le premier juge a relevé que, pendant l’instruction, W._ avait, à un moment donné, décidé d’endosser seul toute la responsabilité de la disparition de l’argent confié, qu’il devait répondre d’abus de confiance pour ces faits et qu’il devait en répondre seul, puisqu’il avait décidé de décharger son comparse de toute responsabilité à cet égard. Ainsi, l’appelant n’a finalement pas été condamné pour les faits qu’il conteste.
En revanche, l’appelant a été condamné, pour abus de confiance, dès lors qu’il n’a pas restitué l’IPhone 4 en état de fonctionnement qui lui avait été confié, pour quelques jours, par la plaignante, propriétaire de l’objet en question. Ces faits peuvent être retenus en se fondant, d’une part, sur les premières déclarations de W._, qui a confirmé que la plaignante lui avait touché deux mots au sujet de ce natel, mais qu’il n’y avait pas porté attention, dès lors que cela ne le concernait pas (cf. PV aud. 2, R. 7, p. 3), et, d’autre part, sur les déclarations de la plaignante (cf. PV aud. 1 et 5), qui sont constantes à ce sujet. En outre, cette dernière a été en mesure de donner des détails précis au sujet de ce téléphone, notamment quant au lieu d’achat (cf. PV aud. 5, du 8 août 2012, lignes 80-81, confirmé par la P. 32, produite le 27 novembre 2013). Ces éléments attestent de la crédibilité de ses allégations, qui n’ont jamais varié quant à l’essentiel des faits. Pour sa part, l’appelant a tenu des déclarations contradictoires et peu cohérentes (cf. en particulier PV aud. 4, lignes 75-76, 103-105 et 164). Enfin, le fait que l’appelant nie avoir jamais été en possession de cet objet (PV aud. 4, lignes 103-105) et les rétractations ultérieures de W._ ne suffisent pas à mettre en doute la véracité de la version de la plaignante, ce d’autant que le co-prévenu n’a pas été condamné en relation avec l’appropriation indue de l’iPhone de la plaignante.
4.
L’appelant conteste ensuite la qualification d’abus de confiance. Il fait valoir que toute volonté d’appropriation fait défaut, dès lors qu’il n’a pas employé le montant confié par la plaignante et qu’il l’a d’ailleurs restitué.
4.1
Aux termes de l’art. 138 ch. 1 al. 1 CP, celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, se sera approprié une chose mobilière appartenant à autrui et qui lui avait été confiée, sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
L'abus de confiance suppose qu'une chose mobilière appartenant à autrui ait été confiée à l'auteur. Il doit exister un rapport avec autrui (rapport de confiance) qui permet à l'auteur d'entrer en possession de la chose, mais qui détermine l'usage qu'il doit en faire. L'auteur, qui a reçu la chose pour en faire un certain usage dans l'intérêt d'autrui, s'approprie cependant cette chose, en violation de ce rapport de confiance, c'est-à-dire dispose de la chose comme si elle lui appartenait. Le rapport de confiance est une circonstance personnelle spéciale, de sorte que seul celui auquel la chose ou la valeur patrimoniale a été confiée peut être auteur ou coauteur d'un abus de confiance (ATF 98 IV 147 c. 4 p. 150).
4.2
Pour les motifs déjà exposés, les critiques de l’appelant tombent à faux dans la mesure où elles concernent l’argent confié par la plaignante, ces faits n’ayant finalement pas été imputés à l’intéressé.
Pour le reste, la plaignante a remis un iPhone à l’appelant, pour que celui-ci puisse l’utiliser quelques jours, plus précisément pour une durée censée être limitée à cinq jours, avant de devoir le lui restituer. Or, l’intéressé a refusé de lui rendre cet objet, dont on ignore au surplus le sort ultérieur. Ce faisant, il s’est approprié une chose qui lui avait été confiée, en violation du rapport de confiance existant entre lui-même et la plaignante, laquelle n’a jamais consenti à lui laisser le téléphone sans réserve, ce d’autant qu’elle présentait une faiblesse psychologique. Il est manifeste, et d’ailleurs établi par pièce (P, 32), que cette dernière a subi un préjudice de ce fait, dès lors qu’elle a dû payer l’objet en question sans quasiment en avoir eu la jouissance, avant qu’elle ne fasse bloquer le numéro. Dans la même mesure, il y a également eu un enrichissement illégitime de l’appelant, qui a gratuitement disposé de la chose confiée et de l’abonnement jusqu’à la suspension de celui-ci par la victime. A cet égard, le fait que cette dernière ait fait bloquer l’abonnement afférent à son téléphone n’implique nullement qu’elle ait acquiescé à son usage, par l’appelant, pour la période antérieure. Il s’agissait bien plutôt d’une mesure élémentaire, dictée par l’urgence de la situation, tendant à préserver ses intérêts pécuniaires d’une atteinte plus lourde encore.
Au regard de ces éléments, la condamnation de l’appelant pour abus de confiance ne viole pas le droit fédéral.
5.
L’appelant conteste le genre ainsi que la quotité de la peine qui lui a été infligée.
5.1
Aux termes de l'art. 41 al. 1 CP, le juge peut prononcer une peine privative de liberté ferme de moins de six mois uniquement si les conditions du sursis à l'exécution de la peine (art. 42 CP) ne sont pas réunies et s'il y a lieu d'admettre que ni une peine pécuniaire, ni un travail d'intérêt général ne peuvent être exécutés.
En vertu du principe de la proportionnalité, il y a en règle générale lieu, lorsque plusieurs peines entrent en considération et apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute, de choisir celle qui restreint le moins sévèrement la liberté personnelle de l'intéressé, respectivement qui le touche le moins durement. La peine pécuniaire et le travail d'intérêt général représentent des atteintes moins importantes et constituent ainsi des peines plus clémentes. Cela résulte également de l'intention essentielle, qui était au cœur de la révision de la partie générale du Code pénal en matière de sanction, d'éviter les courtes peines de prison ou d'arrêt, qui font obstacle à la socialisation de l'auteur, et de leur substituer d'autres sanctions. Pour choisir la nature de la peine, le juge doit prendre en considération l'opportunité de la sanction déterminée, ses effets sur l'auteur et son milieu social, ainsi que son efficacité préventive (ATF 134 IV 97 c. 4 pp. 100 ss; TF 6B_102/2012 du 22 juin 2012 c. 2.1).
5.2
En l’occurrence, le premier juge a prononcé une courte peine privative de liberté avec sursis, ce que la loi ne permet pas (art. 41 al. 1 CP, a contrario). Une peine de travail d’intérêt général n’apparaît pas exécutable. En effet, le prévenu, qui se dit inapte au travail, est dans l’attente d’une décision de l’assurance-invalidité. S’agissant de la peine pécuniaire, la seule absence de revenus de l’auteur ne permet pas d’exclure ce genre de sanction; bien plutôt, l’impécuniosité de l’auteur ne doit avoir d’effet que sur le montant du jour-amende, dont la jurisprudence fixe le minimum à dix francs (ATF 135 IV 180 c. 1.4.2), étant précisé qu’un montant de cinq francs a été jugé modique au point de contrevenir au droit fédéral (ATF 135 IV 180 c. 1.4.3). C’est ainsi une peine pécuniaire qui doit être prononcée plutôt qu’une peine privative de liberté ou encore qu’une peine de travail d’intérêt général. Vu l’impécuniosité et le désoeuvrement de l’auteur, la quotité du jour-amende doit être fixée au montant minimum, soit dix francs.
Il convient de fixer la quotité de la nouvelle peine. Il y a lieu, à cet égard, de renvoyer aux éléments retenus à charge et à décharge par le premier juge, auxquels il convient d’ajouter que la chose confiée, récemment acquise à titre onéreux par la victime, était d’une valeur significative et qu’elle n’a pas été restituée. Au regard de la culpabilité de l’appelant, il se justifie, conformément aux conclusions subsidiaires de l’appel, de prononcer une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à dix francs le jour-amende. Le sursis à l’exécution de la peine accordé par le premier juge doit être confirmé compte tenu de l’interdiction de la reformatio in pejus.
La condamnation étant confirmée dans son principe, il n’y a pas matière à revoir le sort des frais de première instance. Pour le reste, il n’y a pas davantage lieu d’allouer à l’appelant, représenté par un défenseur de choix, une indemnité selon l’art. 429 CPP. En effet, le plaideur n’a ni chiffré, ni justifié ses prétentions alors même qu’il y avait été enjoint par la direction de la procédure conformément à l’art. 429 al. 2 CPP.
6.
En définitive, l’appel doit être partiellement admis dans le sens des considérants. Vu la mesure dans laquelle l’appelant obtient gain de cause, les frais de la procédure d'appel seront mis par moitié à sa charge, le solde étant laissé à celle de l’Etat (art. 428 al. 1 CPP).
Outre l'émolument, les frais d’appel comprennent l’indemnité allouée au conseil d’office de l’intimée, qui obtient gain de cause sur le principe, pour les opérations liées à la procédure d'appel (cf. les art. 135 al. 2 CPP, par renvoi de l’art. 138 al. 1 CPP; art. 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFJP).
Vu l'ampleur et la complexité de la cause en appel, l'indemnité allouée au conseil d'office de l’intimée doit être fixée sur la base d'une durée d'activité de quatre heures d’avocat breveté, à 180 fr. l'heure, plus 170 fr. de débours requis, TVA en sus (art. 135 al. 1 CPP), soit à un total de 961 fr. 20. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c5d2c88a-6d39-4e79-9755-2c4d547cce32 | En fait :
A.
Par jugement du 8 mai 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que J._ s’est rendu coupable d’infraction à la Loi fédérale sur les étrangers (I), l’a condamné à une peine pécuniaire de 180 (cent huitante) jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à CHF 10.- (dix francs) sous déduction de 12 (douze) jours de détention avant jugement (II) et a mis les frais de la cause, par CHF 1'075.- à sa charge (III).
B.
Par déclaration du 3 juin 2013, J._ a formé appel contre ce jugement. Il a conclu à sa réforme en ce sens qu’il est acquitté du chef d’accusation d’infraction à la Loi fédérale sur les étrangers. Il a en outre requis l’allocation d’une indemnité au sens de l’art. 429 CPP à hauteur de 2'108 fr. 40 à titre de frais de défense, TVA et débours compris et de 2'400 fr., à titre d’indemnité pour détention injustifiée. Il a enfin conclu à ce que les frais de la cause soient laissés à la charge de l’Etat.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Ressortissant de Côte d’Ivoire, né le 1
er
janvier 1984, J._ est le quatrième d’une fratrie de six. Il a été élevé par ses parents jusqu’au décès de son père, puis a été pris en charge par son oncle. Il a été scolarisé jusqu’à l’âge de 11 ans ; ensuite il a travaillé dans un garage automobile. J._ a quitté son pays à l’âge de 19 ans pour se rendre en Suisse, où il a déposé une demande d’asile en juin 2003. Par décision du 24 octobre 2003, définitive et exécutoire dès le 27 novembre 2003, sa demande d’asile a été rejetée. J._ a dès lors fait l’objet d’une décision de renvoi de Suisse mais n’a jamais quitté le pays depuis lors.
2.
Le casier judiciaire de J._ fait état des condamnations suivantes :
- 21 avril 2004, Juge d’instruction cantonal Lausanne, 3 mois d’emprisonnement avec sursis durant 2 ans pour délit et contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants et contravention à la Loi fédérale sur le transport public ; expulsion 3 ans (répercussion abolie) ; sursis révoqué le 20 janvier 2006 par le Juge d’instruction de Lausanne ;
- 5 octobre 2004, Juge d’instruction cantonal Lausanne, un mois d’emprisonnement pour délit contre la Loi fédérale sur les stupéfiants, expulsion 3 ans (répercussion abolie) ;
- 26 mai 2005 , Juge d’instruction de Lausanne, 2 mois d’emprisonnement pour faux dans les certificats, rupture de ban et violation d’une mesure (mesures de contrainte en matière de droit des étrangers ; art. 23a LSEE) ;
- 20 janvier 2006, Juge d’instruction de Lausanne, 3 mois d’emprisonnement pour rupture du ban, violation d’une mesure (mesures de contrainte en matière de droit des étrangers ; art. 23a LSEE) et contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants ;
- 26 janvier 2006, Juge d’instruction de Lausanne, 4 mois d’emprisonnement pour rupture de ban et violation d’une mesure (mesures de contrainte en matière de droit des étranges ; art. 23a LSEE) ;
- 14 juin 2010, Cour de cassation pénale Lausanne, 120 jours-amende à CHF 10.- pour séjour illégal.
3.
A Lausanne notamment, entre le 15 juin 2010 et le 11 octobre 2012, J._ a séjourné en Suisse alors qu’il n’était pas titulaire d’un permis de séjour valable. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (al. 1). La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (al. 3).
Interjeté dans les forme et délai légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de J._ est recevable. Il y a donc lieu d’entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
L’appelant fait grief au tribunal de première instance d’avoir violé l’art. 115 al. 1 let. b LEtr (Loi fédérale sur les étrangers, du 16 décembre 2005 ; RS 142.20). Selon lui, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à l’art. 23 LSEE (Loi fédérale sur le séjour et l’établissement des étrangers, du 26 mars 1931 ; en vigueur jusqu’au 31 décembre 2007) – applicable par analogie – ce serait à tort que le tribunal de première instance n’a pas tenu compte des condamnations prononcées à son encontre les 26 mai 2005, 20 et 26 janvier 2006 dans le calcul des peines totales qui lui ont été infligées pour séjour illégal. Il conclut à son acquittement en se fondant sur deux jurisprudences fédérales (TF 6_B 819 / 2008 et ATF 135 IV 6 = JdT 2010 IV 61). Il soutient en particulier que les condamnations pour infraction à la LSEE procèdent d’une même intention, sous réserve de celles poursuivies en 2004.
3.1
La LEtr est entrée en vigueur le 1
er
janvier 2008, en remplacement de la LSEE.
L’art. 115 al. 1 LEtr punit d’une peine privative de liberté d’un an au plus ou d’une peine pécuniaire quiconque contrevient aux dispositions sur l’entrée en Suisse (a), séjourne illégalement en Suisse, notamment après l’expiration de la durée du séjour non soumis à autorisation ou du séjour autorisé (b), exerce une activité lucrative sans autorisation (c), et entre en Suisse ou quitte la Suisse sans passer par un poste de frontière autorisé (d).
L’art. 13e LSEE disposait que l’autorité compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée s’il n’est pas titulaire d’une autorisation de séjour ou d’établissement et trouble ou menace la sécurité et l’ordre publics (a), s’il est frappé d’une décision exécutoire de renvoi ou d’expulsion (b) et s’il n’a pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire (c).
Aux termes de l’art. 23a LSEE, quiconque n’observe pas les mesures ordonnées en vertu de l’art. 13e
LSEE sera puni d’une peine privative d’un an au plus ou d’une peine pécuniaire, s’il s’avère que l’exécution du renvoi ou de l’expulsion est impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.
Le fait de résider en situation irrégulière de manière durable et ininterrompue conformément à l'art. 23 al. 1 ch. 4 LSEE constitue un délit continu qui procède d’une même intention délictueuse (ATF
135 IV 6, JdT 2010 IV 61 c. 3.2,
ATF 104 IV 186 c. 1 ; TF 6S.485/2005 du 8 février 2006 c. 1.2.1, JdT 1979 IV 158, rés.). Chaque condamnation opère une césure, si bien qu’une nouvelle condamnation ne viole pas le principe "ne bis in idem" (ATF 104 IV 230 c. 3). Dans cette hypothèse, une nouvelle condamnation pour les infractions qui ne sont pas visées par le premier jugement est donc possible (
ATF 135 IV 6 c. 3.2 et les références citées).
3.2
En l’espèce, l’appelant a été notamment condamné à trois reprises les 26 mai 2005, 20 janvier 2006 et 26 janvier 2006 pour infraction à l’art. 23a LSEE (violation d’une mesure de contrainte en matière de droit des étrangers) à 2, respectivement 3 et 4 mois d’emprisonnement. Il a également été condamné à une reprise, le 14 juin 2010, pour séjour illégal au sens de l’art. 115 al. 1 lett. b LEtr, à une peine pécuniaire de 120 jours-amende. Les condamnations prononcées en 2005 et en 2006 font mention d’un concours d’infractions sans qu’il ne soit possible de déterminer la quotité de la peine afférente à l’infraction à l’art. 23a LSEE.
Il est exact que les termes de « précédentes condamnations » doivent être interprétés au sens large conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral citée par l’appelant. Ce dernier a toutefois été condamné en application de la LSEE pour violation d’une mesure de contrainte en matière de droit des étrangers ensuite du rejet de sa demande d’asile. Cette décision est entrée en force le 27 novembre 2003. L’art. 23a LSEE ne punit pas l’intention de séjourner illégalement en Suisse, mais le fait, pour l’auteur, de ne pas demeurer sur le territoire suisse qui lui est assigné. Or, l’appelant a déclaré qu’il allait entreprendre une nouvelle procédure d’asile car il se sentait bien en Suisse (jgt p. 4). Il s’agit là d’une intention distincte. C’est donc à tort qu’il soutient que l’art. 23a LSEE sanctionne son intention de séjourner illégalement en Suisse, seul l’art. 115 al. 1 let. b LEtr étant applicable pour les faits reprochés dans la présente cause.
Il s’ensuit que le premier juge ne devait tenir compte que de la condamnation pour séjour illégal à 120 jours-amende prononcée par la Cour de cassation pénale le 14 juin 2010, de sorte que, en prononçant une peine de 180 jours-amende, le Tribunal de police n’a pas dépassé la peine maximale prévue par cette disposition.
Ce grief, mal fondé, doit être rejeté.
6.
L’appelant requiert l’allocation d’une indemnité au sens de l’art. 429 al. 1 CPP.
Ce grief, fondé sur la prémisse de son acquittement, est sans objet.
7.
L’appel, mal fondé, doit ainsi être rejeté et le jugement confirmé.
8.
Vu l’issue de la cause, les frais de la procédure d’appel, comprenant l’émolument par 1'170 fr. (art. 21 al. 1 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010 ; RS 312.031]), auquel il convient d’ajouter l’indemnité allouée à Me Fabien Mingard, doivent être mis à la charge de J._ (art. 428 al. 1 CPP).
Le conseil de J._ a produit une liste d’opérations faisant état de 2h25 consacrées à son mandat. Compte tenu de la nature et de la complexité de la cause, cette durée paraît adéquate. Une indemnité de défenseur d’office de 615 fr. 60, TVA et débours compris, doit dès lors lui être allouée pour la procédure d’appel.
J._ ne sera tenu de rembourser l’indemnité allouée à son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c5d7a994-2636-4ba9-b582-d4b02d40bb15 | En fait :
A.
Par jugement du 7 novembre 2012, le Tribunal des mineurs a, notamment, libéré Z._ des chefs d’accusation d’actes d’ordre sexuel avec des enfants et d’actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement et de résistance (I), rejeté les prétentions civiles de Q._ et B.D._ (II), dit qu’aucune indemnité pour réparation du tort moral n’est allouée à Z._ (III), et laissé les frais de la procédure à la charge de l’Etat (V).
B.
Par annonce du 12 novembre 2012, et par déclaration motivée du 28 décembre 2012, le Ministère public a fait appel de ce jugement, concluant à la réforme des chiffres I et V de son dispositif en ce sens que Z._ condamné pour actes d’ordre sexuel avec des enfants et actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance à une peine privative de liberté de deux mois, dont un mois avec sursis pendant deux ans, et à ce que les frais de procédure sont mis à la charge du prévenu.
Par cette même écriture, le Parquet a sollicité l’audition, aux débats d’appel, de l’expert [...] Cette requête a été rejetée par la direction de la procédure le 7 mars 2013.
Par annonce du 12 novembre 2012, puis par déclaration motivée du 9 janvier 2013, Q._ et B.D._, pour eux-mêmes et pour leur fille A.D._, ont également fait appel de ce jugement, concluant à réforme des
chiffres I et Il du en ce sens que Z._ est reconnu coupable d’actes d’ordre sexuel avec des enfants et actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance et condamné à une peine fixée à dire de justice et qu’il est alloué leurs conclusions civiles à A.D._, Q._ et B.D._
« selon des précisions qui seront fournies à l’audience d’appel ».
C.
Z._ né le 25 avril 1994, est accusé des faits suivants qu’il conteste :
Le lundi 8 mars 2010, en début de soirée, au domicile de la familleZ._, sis route de la Crottaz 26, à Corseaux, la A.D._ (née le 4 août 2006) regardait un film d’animation dans la chambre du fils de sa maman de jour, le prévenu Z._. Profitant d’un moment où il était seul dans la pièce avec la fillette, Z._ lui aurait introduit un doigt dans l’anus.
D.
Le Tribunal des mineurs a considéré que l’instruction n’avait pas permis d’établir avec suffisamment de certitude la réalité des faits dénoncés, qu’il persistait des doutes sérieux et irréductibles, et non seulement hypothétiques ou théoriques quant à la culpabilité du prévenu, et que ces doutes devaient profiter à l’intéressé et conduire à sa libération. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP; Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0) contre le jugement d'un tribunal ayant clôt la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels sont recevables. Il y a lieu d'entrer en matière.
2.
Les appelants estiment que le dossier contient suffisamment d’indices de la culpabilité du prévenu. Ils reprochent en particulier au Tribunal des mineurs d’avoir écarté l’expertise de crédibilité des déclarations de l’enfant sans motifs pertinents.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L’appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d’appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L’appel tend à la répétition de l’examen des faits et au prononcé d’un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafpr 201.1, n. 1 ad art. 398). L’immédiateté des preuves ne s’impose toutefois pas en instance d’appel. Selon l’art. 389 al. 1 CPP, la procédure d’appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d’appel administre d’office ou à la demande d’une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP ; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n’ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d’administrer la preuve d’un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l’administration d’un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kist Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
2.2
En l’occurrence, le dossier contient les éléments suivants :
2.2.1
A l’appui de sa plainte du 4 avril 2010, Q._ a invoqué les faits suivants :
Depuis août 2007, sa fille A.D._ présentait souvent des rougeurs sur les lèvres du sexe lorsqu’elle revenait de chez sa maman de jour [...],
surnommée
« Zia »,
mère du prévenu. Elle avait consulté le pédiatre de l’enfant, le [...], qui n’avait pas pu se prononcer. Les parents avaient demandé à la maman de jour si Z._ changeait parfois l’enfant, et requis qu’il ne le fasse cas échéant plus. Comme les rougeurs persistaient, ils avaient demandé à la fillette si la maman de jour avait
« frotté trop fort»,
ce à quoi elle avait à chaque fois acquiescé. Le 9 mars 2010, au retour d’une nuit chez la maman de jour, l’enfant présentait, selon la mère, une inflammation importante de la région anale. B.D._ avait à nouveau interrogé l’enfant, qui avait répondu que
«Zia»
avait certainement frotté trop fort. La maman ne s’est pas contentée de cette réponse. Comme l’enfant avait l’air très mal à l’aise, la maman a ajouté qu’elle pouvait tout lui dire. C’est alors que la fillette avait dit :
«Z._ m’a mis un doigt dans le cul-cul»,
qu’elle ne voulait pas, mais qu’il en avait envie. Elle a ensuite répété trois fois :
«L’histoire est finie, le secret est dit».
La mère a demandé à sa fille qui avait dit que c’était un secret. A.D._ avait répondu que c’était elle. La plaignante avait alors dit à sa fille que l’histoire n’était pas finie, que c’était très grave mais que ce n’était pas de sa faute ; elle a insisté pour que l’enfant lui raconte tout en détail. A.D._ a d’abord dit qu’elle était aux toilettes, puis dans la chambre de Z._, sur le lit, qu’elle avait la culotte en bas, qu’il lui avait
«mis le doigt dans le cul-cul »,
que cela lui avait fait mal, qu’elle avait pleuré, et que Z._ lui avait dit
«casse-toi »,
que la maman de jour avait demandé pourquoi elle pleurait, et que Z._ lui avait répondu qu’il lui avait donné une fessée, ce à quoi elle avait rétorqué qu’il devait arrêter de donner des fessées à A.D._. Le 10 mars 2010, Q._ avait emmené sa fille chez le pédiatre, qui avait dit que les rougeurs restantes pouvaient être dues à un papier toilette plus rêche. Le 11 mars 2013, la plaignante avait dit à A.D._ qu’elle irait à la crèche ; la fillette ne comprenait pas pourquoi elle n’allait pas chez
« Zia ».
Elle lui avait expliqué que Z._ lui avait fait du mal et qu’elle ne voulait pas que cela se reproduise. L’enfant avait répondu qu’elle était sûre que
« il ne va plus faire
» ; elle avait aussi dit spontanément qu’elle
« pardonnait Seb ».
Le 2 avril 2010, l’enfant avait dit à sa mère qui lui faisait faire l’avion pour jouer :
« Tiens, tu fais comme Seb; tu mets la main sur la zizi comme Seb
». Q._ a aussi dit se souvenir qu’en février, A.D._ avait déjà demandé à quelques reprises à ses parents, lorsqu’ils la lavaient, de ne
« pas lui mettre le doigt dans le trou parce que cela lui faisait mal » (P. 601).
On constate ainsi que A.D._ ne s’est pas spontanément plainte de quelque chose. A la question de sa mère, elle commencé par dire que « Zia » avait frotté trop fort, et ce n’est que sur l’insistance de sa maman qu’elle a incriminé le prévenu en donnant des explications variables sur le lieu de l’événement. Par ailleurs, la plaignante soupçonnait déjà le prévenu depuis plus de deux ans. Une suggestion involontaire n’est donc pas exclue.
2.2.2
D’un point de vue médical, Q._ été examinée par le Dr [...] le 10 mars 2010 (P. 506), puis par le psychologue [...] du Secteur psychiatrique de l’Est vaudois dès le 26 mars 2010 (P. 507).
Dans le rapport du 7 septembre 2010 du Dr [...] on lit
que: «
MmB.D._ m’apprend que la veille, A.D._ présente un siège très, voire trop rouge, avec une irradiation péri-anale. Les questions posées à sa fille de moins de 4 ans mettent en cause le fils de la maman de jour, qui aurait provoqué
(sic)
des attouchements. Les termes de [doigt], [culotte] et [toilette] reviennent, dans la discussion mais A.D._ se contredit par la suite et donne d’autres renseignements. Lors de la consultation, A.D._ (...) parle peu et confirme les renseignements inclus dans les questions de la maman».
Le pédiatre n’a par ailleurs rien constaté hormis une très légère rougeur périnéale sans aucune lésion équivoque (cf. p. 1).
On constate ainsi que le praticien ne met en exergue aucune atteinte relevante d’un point de vue médical, que les propos de l’enfant sont contradictoires et ne sont pas spontanés mais répondent à des questions de la maman.
Dans son rapport du 10 septembre 2010 (P. 507), le psychologue [...] indique que l’enfant a une intelligence au-dessus de la moyenne (p. 2), avec un langage très bon et qui a valeur communicative. L’ancrage dans la réalité correspond à l’âge. La fillette a pu s’adapter aux conséquences psychique d’un possible abus ; ce sont les conséquences de ses dires, soit la séparation d’avec la maman de jour, qui l’ont le plus affectée (p. 3). On y lit aussi que l’objectif de la consultation pour la mère est d’éliminer le doute sur la réalité des
attouchements. A ses dires, «
Il paraît vraisemblable que A.D._ ait vécu les attouchements sexuels dont il est question »
(même page).
Force est de constater que ce psychologue n’a jamais directement recueilli de propos de A.D._ relatifs à un ou des attouchements éventuellement subis de la part du prévenu ; il n’a donc pas pu constater son état émotionnel ; il a dû pour cela, se fier aux déclarations des parents. Il utilise d’ailleurs le pluriel (les attouchements) ce qui montre qu’il relaie les craintes plus générales des parents. Il a en outre constaté qu’avec le temps la fillette avait davantage souffert de l’ambiance générale marquée par les suspicions d’attouchements que par l’éventuel traumatisme qu’elle aurait subi à l’époque.
2.2.3
A.D._ a été entendue par la police le 4 avril 2010 (P. 501). Elle n’a évoqué l’incident qu’une fois son attention attirée sur la
«chose racontée à sa maman
» (p. 2). Elle a alors répété en substance ses accusations, en montrant ses fesses de la main, sans toutefois évoquer tous les détails périphériques mentionnés dans la plainte sa mère (elle ne voulait pas, maisZ._ en avait envie; le secret est dit; cela lui avait fait mal, elle avait pleuré). Selon elle,
« Zia »
aurait dit à Z._ :
« Faut pas mettre les doigts dans le culcul ».
La vidéo de l’entretien permet de constater que l’enfant ne parle pas spontanément du prévenu. Lorsqu’on lui demande si a elle eu des bobos, des problèmes avec d’autres personnes, elle évoque d’autres épisodes. Lorsqu’elle finit par confirmer ses propos, elle dit
«des doigts»
et pas
«le doigt».
Lorsqu’elle montre ses fesses, elle est assise et glisse sa main derrière elle, de sorte qu’on ne voit pas grand-chose. Enfin, la maman de jour aurait utilisé une formule qui n’est pas exactement celle décrite dans la plainte et qui, sous cette forme, paraît peu vraisemblable dès lors qu’elle implique qu’elle ait été au courant du geste incriminé.
2.2.4
A la demande du Tribunal des mineurs, le Dr [...] pédopsychiatre, a effectué une expertise de crédibilité.
2.2.4.1
Dans son rapport du 17 novembre 2011 (P. 508), l’expert fait un bref rappel des faits sur la base d’un entretien qu’il a eu avec les parents de A.D._. Ceux-ci ont expliqué à l’expert avoir fait savoir à l’enfant que l’entretien était en rapport avec l’histoire qui s’est déroulée avec Z._ et qu’il avait pour but de définir les mesures à prendre pour A.D._ et/ou ses parents (p. 13). L’expert relaie aussi d’autres faits signalés par les parents de l’enfant, en particulier que la petite avait eu besoin d’être rassurée longtemps après les faits (p. 6).
Il analyse ensuite l’audition de la fillette par la police qui a eu lieu lorsque l’enfant avait 3 ans et 8 mois. Il remarque qu’elle avait un excellent niveau de langage pour son âge, qu’elle avait parlé de divers sujets anodins, manœuvres de diversion qui semblaient en lien avec une certaine anxiété, mettant en exergue que l’enfant comprenait l’enjeu de la discussion. Lorsque A.D._ a fini par parler des faits incriminés, elle l’avait fait spontanément et tout en restant parfaitement calme (p. 9).
Passant en revue la littérature scientifique, l’expert indique que le taux de fausses dénonciations ne dépasse en général pas 3 à 8 % des cas. Ce chiffre s’accroît considérablement dans le cadre de la séparation des parents, dans les cas d’enfants très jeunes, et chez certains adolescents. Les critères sont l’analyse du discours (la grille consensuelle d’analyse n’étant toutefois pertinente que pour des enfants de plus de six ou sept ans), le contexte émotionnel du discours, les changements de comportements et d’affects rapidement après les faits, et la relation entre la victime et l’abuseur (pp. 10 et 11).
Pour ce qui est de A.D._, l’expert indique que malgré l’excellent niveau de développement du langage de l’enfant, la grille d’analyse du discours ne peut pas être utilisée. Il fait donc une analyse du discours tenu lors de l’audition par la police sans cet outil. A.D._
«semble avoir parfaitement bien compris »
l’objet de l’entrevue; son attitude est sous-tendue par une anxiété. Lorsque, après avoir
«tourné autour du pot»,
elle finit par parler de ce qui s’est passé, l’expert constate que :
« Certes, au-delà de la formulation initiale, elle ne donne que très peu d’explications. Elle mime toutefois le geste dont elle rend le prévenu responsable »
(p. 11). La fillette n’est pas en mesure de donner des explications sur les circonstances de l’acte incriminé, ce que le praticien trouve normal compte tenu de l’âge et du développement cognitif global de l’enfant (p. 14).
L’expert mentionne avoir rencontré A.D._ le 14 septembre 2011. Celle-ci a été introduite par ses parents qui lui ont expliqué l’objet et le but de l’entretien. Il note que l’enfant est
« immédiatement à l’aise dans la relation ».
Son développement est parfaitement normal. Elle ne présente aucune surcharge psychologique qui se traduirait par une symptomatologie dépressive ou anxieuse. Quand l’expert lui demande si quelqu’un a été méchant avec elle, elle répond Z._, puis des enfants de sa classe. Le spécialiste renonce à la questionner à nouveau sur les faits ; il observe qu’elle
« ne semble visiblement pas traumatisée par cet événement.
» (p. 14).
Le rapport d’expertise se réfère également aux observations du psychologue [...], qui a suivi A.D._. Ce psychologue, qui n’avait jamais recueilli directement des propos de la fillette confirmant ses accusations, n’était pas en mesure de donner un avis péremptoire. Il notait toutefois que l’enfant avait plus souffert de l’ambiance générale marquée par ces suspicions que par l’éventuel traumatisme subi à l’époque et concluait en ces termes :
«Sur la base des propos rapportés par les parents, un doute persiste quant à l’existence d’actes d’ordre sexuel perpétrés par Z._ envers A.D._»
(p. 16).
Dans la partie « discussion de son rapport » (p.17), l’expert rappelle d’abord certaines déclarations des parents : quelques semaines avant le 9 mars fatidique, ils avaient noté un changement de comportement chez leur fille, qui avait passé de la joie à la tristesse ; au moment de la révélation, l’enfant avait
«démontré une surcharge émotionnelle se traduisant par des pleurs quand sa maman lui a demandé ce qui avait bien pu se passer chez sa maman de jour» ;
dans les semaines qui avaient suivi, elle avait répété plusieurs fois spontanément ses propos sans aucune suggestion. L’expert en tire la conclusion qu’il y a
«un certain nombre de points qui semblent aller dans le sens de confirmer les propos de la fillette»
(p. 18 bas de la page) : le fait qu’elle en ait parlé à sa mère tout en exprimant une surcharge émotionnelle; qu’elle ait confirmé les faits à la police, en joignant le geste à la parole, en présentant durant une bonne partie de l’entretien des caractéristiques d’anxiété ; qu’elle les ait répétés spontanément par la suite et qu’elle ait exprimé le sentiment d’être sale, doléance fréquente chez des victimes d’attouchements, habituellement chez des enfants plus âgés. L’expert relève encore que A.D._ n’a pas présenté de modifications importantes de son comportement après les faits. Le suivi psychologique l’avait sans aucun doute aidée.
Le spécialiste émet encore quelques considérations sur les propos du prévenu et de sa mère (p. 19) en précisant qu’ils sont contradictoires sur la question de savoir si l’intéressé a eu l’occasion de changer les couches de la fillette. Il relève chez le prévenu une
«perturbation sévère de son rapport à la sexualité»,
tout en observant que cela n’en fait pas d’emblée d’un abuseur sexuel (p. 20).
En fin de rapport, l’expert indique qu’aucune certitude absolue ne peut être avancée »
(p. 21). Il conclut cependant qu’il apparaît peu probable que les propos retransmis par A.D._ aient été inventés et que ces propos sont incontestablement en lien avec une situation qui l’avait interpellée à titre personnel.
2.2.4.2
Selon la jurisprudence fédérale, une expertise de crédibilité doit permettre au juge d'apprécier la valeur des déclarations de l'enfant, en s'assurant que ce dernier n'est pas suggestible, que son comportement trouve son origine dans un abus sexuel et n'a pas une autre cause, qu'il n'a pas subi l'influence de l'un de ses parents et qu'il ne relève pas de la pure fantaisie de l'enfant. Pour qu'une telle expertise ait une valeur probante, elle doit répondre aux standards professionnels reconnus par la doctrine et la jurisprudence récente. Si l'expert judiciaire est en principe libre d'utiliser les méthodes qui lui paraissent judicieuses, sa méthode doit toutefois être fondée, suivre les critères scientifiques établis, séparer soigneusement les constatations de fait du diagnostic et exposer clairement et logiquement les conclusions. En cas de suspicion d'abus sexuel sur des enfants, il existe des critères spécifiques pour apprécier si leurs déclarations correspondent à la réalité. L'expert doit examiner si la personne interrogée, compte tenu des circonstances, de ses capacités intellectuelles et des motifs du dévoilement, était capable de faire une telle déposition, même sans un véritable contexte expérientiel. Dans ce cadre, il analyse le contenu et la genèse des déclarations et du comportement, les caractéristiques du témoin, de son vécu et de son histoire personnelle, ainsi que divers éléments extérieurs. (...). Concernant plus particulièrement l'appréciation du résultat d'une expertise, le juge n'est en principe pas lié par ce dernier. Mais s'il entend s'en écarter, il doit motiver sa décision et ne saurait, sans motifs déterminants, substituer son appréciation à celle de l'expert, sous peine de verser dans l'arbitraire. En d'autres termes, le juge qui ne suit pas les conclusions de l'expert n'enfreint pas
l'art. 9 Cst (Constitution fédérale de la confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101) lorsque des circonstances bien établies viennent en ébranler sérieusement la crédibilité. Tel est notamment le cas lorsque l'expertise contient des contradictions et qu'une détermination ultérieure de son auteur vient la contredire sur des points importants, ou lorsqu'elle se fonde sur des pièces et des témoignages dont le juge apprécie autrement la valeur probante ou la portée. Si, en revanche, les conclusions d'une expertise judiciaire apparaissent douteuses sur des points essentiels, celui-ci doit recueillir des preuves complémentaires pour tenter de dissiper ses doutes. A défaut, en se fondant sur une expertise non concluante, il pourrait commettre une appréciation arbitraire des preuves et violer l'art. 9 Cst (TF 6 B_993/2010 du 10 février 2011, c. 3.2.1 et les références citées).
2.2.4.3
Avec les premiers juges, on peut émettre des doutes sur cette conclusion – en relevant d’emblée qu’elle ne comporte aucune certitude – pour les motifs suivants :
L’avis de spécialiste se limite au développement de l’enfant et à l’absence de perturbation mentale. Pour le surplus, l’expert fait le même travail que le tribunal : il analyse les indices (déclarations, attitudes, etc.).
Ensuite, l’expert accorde crédit à tous les faits décrits par les parents de A.D._ sans aucun recul. Pourtant, ceux-ci amalgament toutes leurs inquiétudes ; dès lors qu’ils sont convaincus de l’existence d’abus, le risque existe qu’ils interprètent chaque geste ou parole de leur fille dans ce sens. Ainsi, par exemple, dans la plainte pénale – et en audience du Tribunal des mineurs –Q._ dit que A.D._ était
«mal à l’aise»
lorsqu’elle l’a interrogée. Devant l’expert, elle a dit qu’elle pleurait, ce qui amène ce dernier à conclure qu’il y avait une manifestation émotionnelle
«plutôt intense»
, ce qui est différent ; le malaise était peut-être dû au fait que la mère ne voulait pas se contenter de la première réponse obtenue. Il en va de même lorsque les parents affirment que l’enfant s’est exprimée spontanément, sans suggestion, à plusieurs reprises, alors que personne d’autre n’a pu le constater : la police a dû rappeler à l’enfant la
«chose racontée à sa mère»
et n’a pas obtenu tous les détails périphériques narrés dans la plainte. L’expert retient encore que la fillette n’a pas été influencée par des tiers. Pourtant, lors du premier interrogatoire maternel, l’enfant a donné une autre première réponse et la mère ne s’en est pas contentée. On ne peut donc pas exclure que l’enfant ait cherché une autre explication à ses rougeurs parce que sa mère lui disait que cela ne pouvait pas être imputé à « Zia ».
L’expert émet ainsi des appréciations sur les dires et le comportement du prévenu et de sa mère alors qu’il ne l’a jamais vu ou entendu. Il donne la préférence aux propos échangés à ce sujet entre la maman de jour et la plaignante, selon lesquels l’intéressé changeait souvent les couches de l’enfant. Ce faisant, il paraît prendre parti pour la plaignante qu’il a entendue par deux fois.
Il est aussi étonnant que l’expert trouve normal, compte tenu de l’âge de l’enfant, que celui-ci ne puisse pas donner de détails spatio-temporels fiables, ce qui permet d’évacuer toute la question du contexte, et de tenir pour crédible la seule phrase incriminante comme reflétant un événement
ressenti »
, dont le contenu et la signification ne seraient pas douteux. Cette phrase n’apparaît pourtant pas si limpide, en réalité. A.D._ parle
«des doigts»
et non d’un doigt, de
«son zizi»
et de
«ses cuculs».
Son geste apparaissant sur la vidéo de la police n’est pas univoque; il pourrait tout aussi bien montrer une fessée, ou un autre geste méchant du prévenu. On relève d’ailleurs que A.D._ met au même niveau la méchanceté de Z._ et celle des enfants de sa classe.
S’agissant des réactions émotionnelles de l’enfant, cette fois observées par des médecins et non relatées par les parents, l’expert note une anxiété de l’enfant devant la police, mais perd de vue qu’au moment de raconter l’abus proprement dit, A.D._ est parfaitement calme selon son propre constat. L’enfant n’est pas traumatisée par l’événement, mais par le climat de suspicion ambiant. Dans ce contexte, on ne peut pas exclure que ses besoins de réassurance soient liés à l’attitude des parents qui lui rappellent sans cesse que si elle ne peut pas retourner chez sa maman de jour, c’est parce que le prévenu lui a fait quelque chose de grave. D’ailleurs les parents ont mentionné à l’expert un changement de comportement (de la joie à la tristesse) avant le 9 mars 2010.
En définitive, l’expert ne dit jamais expressément que le récit de A.D._ est crédible. Il se contente de préciser que
«plusieurs éléments vont dans ce sens»
et qu’elle
«semble exprimer des actes qu’elle a subis»
en se fondant sur des indices qui ne sont pas vraiment convaincants (savoir, la surcharge émotionnelle qui ne ressort pas de la plainte, l’anxiété au moment d’évoquer les faits devant la police qui contredit la constatation de l’expert, la répétition soit-disant spontanée des accusations, la crainte d’être sale, plainte formulée en général par des enfants plus âgés).
2.2.5
Z._ (P. 401) et sa mère (P. 402) ont été entendus par la police. Le dossier contient aussi les déclarations d’ [...] (sœur du prévenu) faites en audiences du Tribunal des mineurs (P. 403 et 404). Les faits étant contestés, ces auditions portent surtout sur les relations et interactions entre auteur et victime présumée, soit notamment sur le fait de savoir si le premier changeait les couches de la seconde, s’il était parfois seul avec elle, et sur la façon dont s’était déroulé le dernier passage de A.D._ chez la maman de jour.
Le prévenu a déclaré que, le soir du 8 mars 2010, sa soeur [...], la fillette et lui avaient regardé un dessin animé dans sa chambre. A un moment donné [...] avait reçu un appel téléphonique. Ils avaient arrêté le film et l’intéressé avait joué avec A.D._. Il lui avait donné deux ou trois petites tapes sur les fesses. Il ne se souvenait pas qu’elle aurait pleuré. Il est à noter qu’à la fin de son audition, le prévenu a eu subitement très mal au ventre et a été amené à l’hôpital par les policiers (P. 401 pp. 5 et 6).
Ce récit est peu précis, voire contradictoire notamment sur le point de savoir si [...] est sortie ou non de la chambre durant le coup de fil : le prévenu a d’abord dit qu’elle était restée dans la chambre, [...] n’a rien dit sauf que son frère n’est pas resté seul avec A.D._ . Par la suite le prévenu a dit que sa sœur était sortie de la chambre, et comme on lui faisait remarquer la contradiction, il s’est corrigé.
Interrogé sur la notion du
«secret »,
le prévenu a affirmé que A.D._ disait en avoir un à lui confier et lui déclarait alors
«je t’aime»
(P. 401 p. 6). Plus tard il a déclaré que la fillette ne l’aimait pas (P. 404 p. 3).
Ces petites contradictions, qui ne portent pas sur des points essentiels et ne sont pas déterminantes. De même, on ne peut rien déduire de l’existence de versions divergentes sur la question de savoir si oui ou non le prévenu changeait parfois les couches de l’enfant. Un adolescent qui se sent modérément utile, par exemple en collant les élastiques latéraux des couches, peut avoir la tentation d’exagérer l’importance de son intervention, par vantardise. Les souvenirs peuvent aussi être inexacts.
2.2.6
La personnalité du prévenu est certes atypique. Z._ a une sexualité pour le moins libre. Sa mère le laisse surfer sur Internet sans aucun contrôle (P. 402, pp. 2 et 5). Le prévenu consulte des sites pour adultes (P. 505 p. 7). lI a acheté un vagin artificiel dans un sex-shop, au su de sa mère
(P. 401, p. 4; P. 402 p. 5). Comme il
«se cherchait
», il dit avoir eu des relations sexuelles avec des filles et des garçons, dès l’âge de 11 ans (P. 401, p. 3). Il visionnait des vidéos pornographiques qui, selon le Tribunal des mineurs, mettent en scène des adultes consentants qui s’adonnent de manière répétitive, selon des scénarios sensiblement identiques, essentiellement à la pénétration et à la fellation, sans violence, et sans aucune scène de pédophilie, ni de torture.
Pour le surplus, le prévenu est au gymnase. Il dit vouloir devenir pédiatre. Il a suivi une formation d’animateur jeunesse dans le cadre des
«Samas’ Kids »
(les jeunes samaritains ; ndlr.).
Ses antécédents montrent qu’en 2007 il a créé un faux blog au nom d’une ex-copine, laissant entendre qu’elle adorait le sexe, ce qui lui a valu une plainte (retirée par la suite) pour calomnie (P. 401 p. 2). On y voit également qu’il s’est fait interpeller quand il avait 13-14 ans pour avoir volé des préservatifs et de la colle (P. 401, p.2).
Interrogé sur ses précédentes relations avec la police, le prévenu a dit avoir été masturbé à Lavey-les-Bains par un homme tellement influent que la police l’aurait pressé de retirer sa plainte. La version officielle est qu’il s’est masturbé tout seul, qu’il a été surpris, et que, par crainte d’avoir des ennuis, il aurait inventé cette histoire (P. 509 ; P. 404 p. 17).
Ces éléments montrent que l’intéressé apparaissait, en tous cas à l’âge de 15 ans, extrêmement préoccupé par le sexe, mais, comme le relève avec pertinence le [...], n’en font pas un agresseur sexuel.
2.2.7
En définitive, un doute irréductible persiste sur la réalité des faits décrits dans l’acte d’accusation. Tout d’abord, rien n’étaie des abus répétés depuis deux ans : A.D._ n’accuse pas le prévenu et ne présente pas de symptômes du traumatisme auquel on aurait pu s’attendre si elle avait fait l’objet d’attouchements réguliers. On ignore donc toujours la cause des rougeurs observées par la mère avant le 9 mars 2010.
Ensuite, malgré son excellent niveau de langage pour son âge, A.D._ reste une très petite fille et on ne comprend pas toujours ce qu’elle veut dire : lorsqu’elle dit devant la police qu’elle ne connaît pas « Zia », ou lorsqu’elle dit à sa mère, lorsqu’elle lui fait faire «l’avion» qu’elle fait «comme Z._». Il est intellectuellement insatisfaisant de considérer que l’accusation proférée doit être tenue pour strictement exacte, mais que tous les détails périphériques éventuellement donnés peuvent ne pas être fiables.
Troisièmement, contrairement à ce que plaident les appelants, les avis médicaux ne sont pas catégoriques et n’excluent pas toute incertitude. Point n’est ainsi besoin de s’en écarter formellement pour pouvoir admettre l’existence d’un doute.
Quatrièmement, la petite A.D._ n’a pas dénoncé spontanément l’abus litigieux avec une «surcharge émotionnelle» évidente. Lorsqu’elle en reparle devant la police, elle est nerveuse
«en général»,
mais
«parfaitement calme»
au moment d’évoquer les faits. Elle ne présente aucun traumatisme, dit avoir pardonné à Z._, et souhaite retourner chez sa maman de jour.
Enfin, si mensonge de l’enfant n’entre pas en considération, A.D._ n’ayant aucune raison de mentir, en revanche, on ne peut totalement exclure la possibilité d’une suggestion involontaire de la mère – qui avait déjà des soupçons contre le prévenu lorsqu’elle l’a amenée à chercher une autre explication à ses rougeurs –. On ne peut exclure que le récit de l’enfant recouvre en réalité un geste différent, par exemple une fessée ou autre méchanceté.
Le jour des faits, il aurait fallu que le prévenu profite d’un téléphone de sa sœur [...] pour, soit déshabiller l’enfant, soit glisser la main sous ses vêtements, pour commettre l’acte qui lui est reproché, en sachant que sa sœur pouvait revenir à tout moment dans la pièce dont la porte était restée ouverte.
Comme le retient le Tribunal des mineurs, il existe un doute sérieux sur la réalité des fait reprochés au prévenu, de sorte que c’est à juste titre qu’il a été acquitté.
2.3
En définitive, les appels mal fondés, doivent être rejetés, ce qui entraîne la confirmation du jugement entrepris.
3.
Vu le sort des appels, les frais de la procédure de seconde instance sont laissés à la charge de l'Etat (art. 428 al. 1 CPP).
Me Nicolas Mattenberger, défenseur d’office du prévenu, a produit une liste des opérations requérant, audience non comprise, 10 h 10 d’honoraires,
54 francs de débours de 180 francs pour ses frais de déplacement jusqu’à Lausanne. Vu l’ampleur de la présente procédure, qui a notamment nécessité la comparution à une audience d’appel et la rédaction d’un mémoire d’intimé, il convient d’arrêter à 2'520 fr. 70, débours et TVA compris, l’indemnité d’office à allouer à ce mandataire. Ce montant correspond à 12 heures à 180 francs, 120 francs de vacations plus 54 francs de débours et 8 % de TVA.
Me Mélanie Freymond, conseil d’office de la partie plaignante et civile, a produit une liste d’opérations par laquelle elle demande dix heures d’honoraires audience comprise et des débours de 180 fr. 45. Cette requête paraît raisonnable au vu de l’ampleur de la procédure. Il convient d’y faire droit et d’arrêter à 2'232 fr., débours et TVA compris, l’indemnité d’office à lui allouer pour la procédure d’appel. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c5e685bb-1940-4e4b-83af-a57f61eddc09 | En fait :
A.
Par jugement du 6 août 2014, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois a condamné X._, pour violation simples des règles de la circulation routière, à une amende de 600 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l'amende étant de six jours et mis les frais, par 450 fr., à la charge d’X._.
Par arrêt du 17 novembre 2014, la Présidente de la Cour d'appel pénale a annulé le jugement précité.
Par jugement du 1
er
septembre 2015, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois a condamné X._, pour violation simples des règles de la circulation routière, à une amende de 600 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l'amende étant de six jours (I), dit qu'il n'y a pas lieu à indemniser X._ au titre de
l'art. 429 CPP (II) et mis les frais, par 1'150 fr., à la charge d'X._ (III).
B.
Par annonce du 2 septembre 2015, puis déclaration motivée du 25 septembre 2015, X._ a formé appel contre ce dernier jugement et conclu, avec suite de frais et dépens,
à son acquittement et à l'octroi d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP.
Le 13 octobre 2015, la Présidente a informé les parties que l'appel serait traité d'office en procédure écrite et relevait de la compétence d’un juge unique.
Dans le délai qui lui avait été imparti, l'appelant a déposé un mémoire complémentaire et confirmé les conclusions de son appel.
Par courrier du 5 novembre 2015, le Ministère public a conclu au rejet de l’appel.
Par courrier du 13 novembre 2015, X._ a déclaré maintenir son appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né en 1950, X._ est avocat, marié, avec deux enfants à charge. Selon ses déclarations aux débats de première instance, son revenu annuel net est de 160'000 francs. Sa maison lui coûte quelque 50'000 fr. par an et les primes d'assurance-maladie, y compris celles de ses enfants, s'élèvent à 1'500 fr. par mois.
Son casier judiciaire est vierge, de même que son fichier ADMAS.
2.
Dans un procès-verbal du 9 septembre 2013, la Gendarmerie vaudoise a dénoncé X._ pour avoir circulé au volant de son véhicule Mercedes VD [...], le 18 juillet 2013, sur la chaussée Lac de l'autoroute A9 Lausanne-Simplon (km 12.075), sur la commune de Lutry, à une vitesse de 112 km/h, marge de sécurité déduite, au lieu de la vitesse maximale de 80 km/h autorisée, vitesse limitée en raison de travaux. | En droit :
1.
1.1
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP [Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007; RS 312.0]) contre le jugement du tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable.
1.2
S'agissant d'un appel dirigé contre une contravention, la procédure est écrite (art. 406 al. 1 let. c CPP) et la cause relève de la compétence d'un juge unique (art. 14 al. 3 LVCPP [loi vaudoise d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009 , RSV 312.01]).
1.3
Selon l'art. 398 al. 4 CPP, lorsque seules des contraventions ont fait l'objet de la procédure de première instance, l'appel ne peut être formé que pour le grief que le jugement est juridiquement erroné et que l'état de fait est établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite. Cet appel restreint a été prévu pour les cas de peu d'importance, soit concernant des infractions mineures, le droit conventionnel international admettant en pareil cas des exceptions au droit à un double degré de juridiction (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 22-23 ad art. 398 CPP).
En l'espèce, seule une contravention à la législation sur la circulation routière est retenue par le juge de première instance, de sorte que l'appel est restreint. Le pouvoir d'examen de l'autorité d'appel est ainsi limité dans l'appréciation des faits à ce qui a été établi de manière arbitraire, la formulation de l'art. 398
al. 4 CPP correspondant à celle de l'art. 97 al. 1 LTF. En revanche, la juridiction d'appel peut revoir librement le droit (cf. TF 66_1247/2013 du 13 mars 2014 c. 1.2 et les réf. citées).
2.
L'appelant invoque l'arbitraire dans la constatation des faits.
2.1
II y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur des éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (Kistler Vianin, op. cit., n. 28 ad art. 398 CPP).
2.2
L'appelant relève que c'est le véhicule circulant sur la voie de gauche qui a enclenché le radar, mais qu'aucun véhicule ne figure toutefois sur la première photographie derrière la Skoda. Il en conclu qu’il serait impossible que son propre véhicule, plus haut et long que la voiture précitée, ait été caché et qu'il serait donc également impossible qu'il se soit retrouvé derrière ce même véhicule une seconde après, soit sur le second cliché. Il soutient que ces deux photographies n'ont pas pu être prises en même temps et qu'il s'agit d'un photomontage.
Cette critique doit être rejetée. En effet, conformément aux déclarations du gendarme [...], entendu à l’audience de première instance, et contrairement à ce que pense l'appelant, les photographies figurant au dossier ne permettent pas d'aboutir aux conclusions souhaitées par celui-ci. Les photos en question n’ont pas été prises au moment ni à l'endroit où l'excès de vitesse a été mesuré et permettent uniquement d'identifier le véhicule en infraction. Selon les déclarations du gendarme, la vitesse est mesurée environ 35 mètres avant le déclenchement de la photographie et la position des véhicules sur la photo n'est pas liée à l'excès dans ce cas-là. La mesure s'effectue sur 5 à 10 mètres lorsque le radar constate un véhicule en infraction, puis il le suit s'il est en infraction. C'est l'appareil qui déclenche la photo. Le sensor envoie les mesures au calculateur – qui est une sorte d'ordinateur – et c'est l'ordinateur qui déclenche automatiquement l'appareil photo quand une infraction est constatée. Les photos sont donc prises après la mesure de l'excès de vitesse.
Ainsi, il n’est pas possible de tirer des conclusions du fait que le véhicule de l'appelant ne soit pas visible sur la première photo, puis légèrement en retrait de la Skoda sur le second cliché. En effet, il n'est pas exclu, et au contraire d'ailleurs même hautement vraisemblable, que le prévenu ait freiné suite au flash déclenché par le radar. Il s'agit au demeurant d'un réflexe que l'on peut constater chez bon nombre d'automobilistes. De plus, les photos prises permettent uniquement d'identifier le véhicule en infraction, alors que la vitesse a été mesurée et validée plusieurs dizaines de mètres avant le déclenchement de la photo. Ainsi, l’analyse détaillée des photographies radar au dossier telle que s’évertue à le faire l’appelant n’est pas probante, dès lors qu’il est très vraisemblable que les véhicules aient modifié leur vitesse sur les 35 mètres séparant le moment de la mesure de la vitesse et celui de la photographie.
2.3
Au vu des éléments qui précèdent, qui emportent la conviction, il n’y a pas lieu de remettre en question la validité des mesures effectuées par le radar, ni même les indications de la machine selon lesquelles le dépassement de vitesse a été effectué sur la « voie 2 ». Il doit ainsi être retenu que c’est bien le véhicule de l’appelant qui, circulant sur la voie de gauche le 18 juillet 2013 à une vitesse de
112 km/h – marge de sécurité déduite –, a déclenché le radar.
En circulant à cette vitesse sur un tronçon limité à 80 km/h, l’appelant s’est rendu coupable de violation simple des règles de la circulation routière et sa condamnation pour cette infraction doit être confirmée.
2.4
L’appelant, qui a conclu à son acquittement, ne conteste pas formellement la quotité de l’amende. Examinée d’office, celle-ci ne prête pas le flanc à la critique et l’amende de 600 fr. prononcée en première instance doit être confirmée.
3.
En définitive, manifestement mal fondé, l’appel de X._ doit être rejeté et le jugement attaqué confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d’appel, constitués du seul émolument de jugement, par 540 fr. (art. 21 al. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), sont mis à la charge de l’appelant qui succombe. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c60ca798-ac9b-43f1-bb27-cda15c18e2a8 | En fait :
A.
Par jugement du 15 mai 2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Côte a notamment constaté que N._ s’est rendu coupable d’infraction grave et de contravention la Loi fédérale sur les stupéfiants (I), l’a condamné à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de la détention provisoire subie (II), a suspendu l’exécution d’une partie de la peine portant sur 6 mois et fixé à N._ un délai d’épreuve de 5 ans (III), a condamné N._ à une amende de 500 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l’amende étant de 5 jours (IV), a renoncé à révoquer les sursis accordés le 9 juillet 2009 par le Juge d’instruction de l’Est vaudois et le 24 mars 2011 par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne (V), a ordonné le maintien au dossier au titre de pièces à conviction des objets séquestrés (VI), a mis à la charge de N._ les frais de la cause, y compris l‘indemnité allouée à son défenseur d’office (VIII), et a dit que le remboursement à I’Etat de cette indemnité ne pourra être exigé du condamné que si et dans la mesure où sa situation financière s’améliore (IX).
B.
Par annonce du 23 mai 2014, puis déclaration motivée du 10 juin suivant, le Ministère public a formé appel contre ce jugement, en concluant, sous suite de frais, à la réforme des chiffres II, III et V du dispositif en ce sens que N._ est condamné à une peine privative de liberté de 18 mois, l’exécution de cette peine étant suspendue pendant 9 mois, et que le sursis accordé à celui-ci le 9 juillet 2009 par le Juge d’instruction de l’Est vaudois est révoqué.
Le 2 juillet 2014, N._ a déposé un appel joint. Il a conclu à la réforme du jugement en ce sens que la peine qui lui a été infligée est assortie du sursis complet.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
N._ est né le [...] 1978 au Laos. Aîné d’une fratrie de 5 enfants, il a vécu dans son pays natal jusqu’à l’âge de six ans, avant de s’installer avec sa famille en Thaïlande. Il est arrivé en Suisse alors qu’il avait dix ans. Il a effectué sa scolarité à [...], puis a entrepris un apprentissage d’électricien et obtenu son CFC. Après avoir travaillé deux ans à [...], il est retourné vivre en [...] où il a œuvré comme boulanger dans la boulangerie de ses parents, avant d’occuper divers autres emplois. Au printemps 2012, il a été engagé par la société [...]. Il y a d’abord travaillé à titre temporaire, puis a finalement obtenu un poste fixe à compter du 1
er
septembre 2014. Pour cette activité, il perçoit un revenu annuel de base de 60'450 fr., plus une part de 1'511 fr. par an en cas de réalisation des objectifs. Toutefois, en raison de saisies de salaire, il ne perçoit que le minimum vital. Ses dettes sont constituées d’arriérés d’impôts et de factures impayées. Il n’a pas de fortune. Le prévenu s’est marié traditionnellement au Laos où vivent toujours sa femme et son fils de quatre ans. Il contribue financièrement à leur entretien en leur transférant environ 400 fr. par mois. De juillet 2011 à début 2014, il a vécu à [...], puis a emménagé à [...] avec sa petite amie. Leur loyer mensuel s’élève à 720 francs.
Le casier judiciaire de N._ fait état des condamnations suivantes :
- 28.09.2005, Untersuchungsrichteramt Bern-Mittelland, conducteur se trouvant dans l’incapacité de conduire, contravention à la LStup, amende 1100 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans;
- 09.07.2009, juge d’instruction Est vaudois, délit contre la aLStup, contravention à la LStup, peine pécuniaire 120 jours-amende à 50 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 4 ans, peine partiellement complémentaire au jugement du 28.09.2005;
- 24.03.2011, Ministère public Lausanne, circuler sans assurance responsabilité civile, peine pécuniaire 20 jours-amende à 50 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 3 ans, amende 1000 francs.
2.
2.1
Depuis son domicile à [...] notamment, ainsi que dans les cantons de Vaud et du Valais, entre le 9 juillet 2009, date de sa dernière condamnation pour infraction à la Loi fédérale sur les stupéfiants, et février 2012, soit quelques mois avant son arrestation du 5 juillet 2012, N._ a agi comme intermédiaire pour la remise de pilules thaïes et a vendu au total 530 pilules à différents acheteurs, notamment 150 à [...], 60 à [...], 220 à [...] et au moins 100 à des tiers non identifiés.
Le prévenu achetait la pilule entre 28 et 35 fr, puis la revendait entre
40 et 50 francs. Le bénéfice qu’il retirait de son trafic était non seulement utilisé pour financer sa propre consommation et payer ses frais de voyage auprès de ses fournisseurs à Bienne, mais également pour rendre service à sa communauté.
2.2
A son domicile d’[...] notamment, ainsi que dans les cantons de Vaud et du Valais, entre le 27 novembre 2010, les contraventions antérieures étant prescrites, et février 2012, soit quelques mois avant son arrestation du 5 juillet 2012, le prévenu a consommé des pilules thaïes à raison d’une à deux pilules par jour, voire jusqu’à trois ou quatre pilules lorsqu’il était de sortie; à certaines périodes, il ne consommait que deux à trois pilules par semaine. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP) par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel du Ministère public ainsi que l’appel joint de N._ sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
Le Ministère public soutient que la peine infligée au prévenu est trop clémente.
3.1
3.1.1
Les règles générales régissant la fixation de la peine ont été rappelées dans les arrêts publiés aux ATF 136 IV 55 et 134 IV 17 (c. 2.1 et les références citées), auxquels il peut être renvoyé.
En matière de trafic de stupéfiants, il y a lieu de tenir compte plus spécifiquement des éléments suivants. Même si la quantité de drogue ne joue pas un rôle prépondérant, elle constitue sans conteste un élément important. Elle perd cependant de l'importance au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la limite à partir de laquelle le cas doit être considéré comme grave. Le type de drogue et sa pureté doivent aussi être pris en considération. Le type et la nature du trafic en cause sont aussi déterminants. L'appréciation est différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, il importera de déterminer la nature de sa participation et sa position au sein de l'organisation. L'étendue du trafic entrera également en considération. Un trafic purement local sera en règle générale considéré comme moins grave qu'un trafic avec des ramifications internationales. Enfin, le nombre d'opérations constitue un indice pour mesurer l'intensité du comportement délictueux. S'agissant d'apprécier les mobiles qui ont poussé l'auteur à agir, le juge doit distinguer le cas de celui qui est lui-même toxicomane et agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain (TF 6B_632/2014 du 27 octobre 2014 c. 1.2 et les références citées; TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; TF 6B_380/2008 du 4 août 2008 c. 6.1.1).
3.1.2
Commet une infraction grave à la LStup notamment celui-ci qui sait ou ne peut ignorer que l'infraction peut directement ou indirectement mettre en danger la santé de nombreuses personnes; cette infraction est passible d'une peine privative de liberté d'un an au moins et peut être cumulée avec une peine pécuniaire (art. 19 al. 2 let. a LStup).
Dans un arrêt du 21 avril 1999, le Tribunal fédéral a considéré qu’il ne pouvait y avoir de cas grave en matière d’ecstasy (ATF 125 IV 90 c. 3). S’agissant de l’amphétamine, le seuil de gravité a été fixé à 36 g (ATF 113 IV 35). Les juges fédéraux ne se sont toutefois pas encore prononcés sur le commerce de pilules thaïes, lesquelles contiennent de la méthamphétamine, soit une substance plus puissante et donc plus dangereuse que l’amphétamine (cf. communiqué du 17 mars 2000 du Département fédéral de justice et police, P. 6/1). La Cour de cassation du Tribunal cantonal neuchâtelois a admis, dans un jugement du 22 août 2006, que le cas grave pour ce type de trafic était réalisé à partir de 36 g purs de méthamphétamine (P. 6/3). Selon un rapport de juin 2010 établi par la section de toxicologie de la société suisse de médecine légale (P. 6/2, annexe 2), il y a mise en danger de nombreuses personnes en cas de mise en circulation de 12 g de méthamphétamine. Dans la mesure où une pilule thaïe contient en moyenne 0,024 g de méthamphétamine, une telle quantité correspond à un seuil de 500 pilules (cf. recommandation du 23 septembre 2010 de la conférence des autorités de poursuite pénale de la Suisse romande et du Tessin, commission stupéfiants; P. 6/2).
3.2
En l’espèce, N._ s’est rendu coupable d’infraction grave à la Loi fédérale sur les stupéfiants au sens de l’art. 19 al. 2 let. a LStup (dans sa version actuelle, l’ancienne disposition ne lui étant pas plus favorable), ce qui n’est au demeurant pas contesté. La quantité de drogue mise à sa charge, soit 530 pilules thaïes, est importante et celui-ci ne pouvait ignorer la dangerosité du produit, ne serait-ce par sa précédente condamnation et sa propre consommation. Cela étant, il sera tenu compte du fait que son trafic se situe à la limite inférieure du seuil de gravité. Pour le reste, il faut encore retenir, à charge, la récidive commise immédiatement après une condamnation pour le même type d’infraction et les antécédents en matière de circulation routière.
A décharge, l’appelant se prévaut de l’art. 19 al. 3 let. b LStup lequel prévoit une atténuation de peine lorsque l’auteur est toxico-dépendant et que la commission de l’infraction est destinée à financer sa propre consommation. Si cette disposition semble avoir été appliquée par les premiers juges bien qu’ils ne l’aient pas expressément citée (jgt., p. 14), son application doit néanmoins être notablement relativisée. Certes, l’appelant était lui-même consommateur. Toutefois, il n’est pas établi ni véritablement soutenu que ce dernier était toxico-dépendant. Sa consommation n’a par ailleurs porté que sur une partie de la période concernée par le trafic. Enfin, ses déclarations sur la question du financement ne sont pas si claires : il a en effet admis devant les premiers juges que son commerce ne visait pas uniquement à financer sa consommation, mais également à rendre service à sa communauté à une époque où il vivait aux crochets de celle-ci (jgt., p. 4).
Pour le reste, il sera retenu, comme élément à décharge, le fait que les activités délictueuses du prévenu ont cessé avant son interpellation de juillet 2012 ainsi que sa stabilisation socioprofessionnelle. Quant à sa collaboration, elle ne saurait être prise en considération dès lors qu’elle n’a pas été bonne.
Au vu de ces éléments, notamment de la récidive et des antécédents, on ne saurait s’en tenir comme l’ont fait les premiers juges à la peine minimale d’un an prévue à l’art. 19 al. 2 LStup. Tout bien considéré, une privation de liberté de
15 mois réprime adéquatement les agissements du prévenu. La détention avant jugement sera déduite de cette peine.
Enfin, l'amende de 500 fr. réprimant la contravention à la LStup et la peine privative de liberté de substitution de cinq jours, qui ne sont au demeurant pas contestées, sont adéquates et doivent être confirmées.
4
Estimant que le pronostic à poser quant à son comportement futur est « extrêmement » favorable, l’appelant requiert l’octroi du sursis complet.
4.1
Aux termes de l’art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits. Selon l’art. 43 al. 1 CP, le juge peut suspendre partiellement l’exécution d’une peine pécuniaire, d’un travail d’intérêt général ou d’une peine pécuniaire d’un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l’auteur.
De jurisprudence constante, les conditions subjectives auxquelles l'art. 42 CP soumet l'octroi du sursis intégral s'appliquent également à l'octroi du sursis partiel prévu à l’art. 43 CP (ATF 134 IV 1 c. 5.3.1; ATF 135 IV 180 c. 2.1). Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement (ATF 134 IV 1 c. 5.3.1; ATF 135 IV 180 c. 2.1). Lorsque le pronostic quant au comportement futur de l'auteur n'est pas défavorable, la loi exige que l'exécution de la peine soit au moins partiellement suspendue. En revanche, un pronostic défavorable exclut également le sursis partiel. En effet, s'il n'existe aucune perspective que l'auteur puisse être influencé de quelque manière par un sursis complet ou partiel, la peine doit être entièrement exécutée (ATF 134 IV 1 c. 5.3; TF 6B_713/2007 du 4 mars 2008 c. 2.1).
4.2
En l’espèce, les premiers juges ont retenu que la faute et la culpabilité du prévenu étaient importantes. Ils ont notamment relevé que celui-ci avait agi pendant une période conséquente, que ses actes étaient objectivement graves, qu’il avait persisté dans son activité délictueuse malgré une précédente condamnation assortie du sursis – condamnation qui n’était au demeurant pas son seul antécédent –, et qu’il ne semblait pas avoir réellement et sincèrement pris conscience de la gravité de ses actes et de leurs conséquences. Ils ont cependant pris acte de l’apparente stabilité socioprofessionnelle de l’intéressé et du fait que celui-ci avait cessé toute consommation, en relevant toutefois à cet égard qu’en cas de rechute, le risque de récidive était patent. Sur la base de ces éléments, le tribunal correctionnel a considéré que le sursis partiel était approprié.
Le Cour de céans reprend à son compte l’argumentation pertinente des premiers juges. Au vu de la récidive immédiate commise par le prévenu, de ses condamnations en matière de circulation routière, de sa collaboration très moyenne et de sa légère prise de conscience, le sursis total est exclu. Cela étant, il faut prendre acte de son évolution particulièrement positive, notamment sur le plan professionnel, depuis 2012 et admettre que le pronostic à poser quant à son comportement futur n’est pas totalement défavorable. L’appelant doit par conséquent être mis au bénéfice du sursis partiel, ce qui n’est au demeurant pas contesté par le Ministère public. Compte tenu de sa stabilisation socioprofessionnelle avérée, la partie à exécuter doit être arrêtée au minimum légal de 6 mois. Le délai d’épreuve sera quant à lui fixé à 5 ans.
5.
Le Ministère public estime que le sursis accordé au prévenu le 9 juillet 2009 doit être révoqué.
5.1
En vertu de l'
art. 46 CP
, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel (al. 1, 1
ère
phrase). S'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation (al. 2, 1
ère
phrase). La commission d'un crime ou d'un délit durant le délai d'épreuve n'entraîne pas nécessairement une révocation du sursis. Seul un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné peut justifier la révocation. A défaut d'un pronostic défavorable, le juge doit renoncer à celle-ci. Autrement dit, la révocation ne peut être prononcée que si la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve (ATF 134 IV 140 c. 4.2 et 4.3 ; TF 6B_163/2011 du 24 novembre 2011 c. 3.2).
5.2
En l’espèce, le raisonnement du Ministère public ne peut pas être suivi. Comme indiqué ci-dessus, le pronostic posé quant au comportement futur de l’intéressé n’est pas totalement défavorable – ce que l’appelant admet lui-même –, de sorte que la révocation des sursis antérieurs ne se justifie pas. L’exécution d’une partie de la nouvelle peine étant suffisante pour atteindre l’effet dissuasif escompté, il serait d’ailleurs incohérent de soutenir parallèlement que l’exécution de la peine infligée en 2009 serait nécessaire.
6.
En définitive, l’appel du Ministère public doit être partiellement admis et l’appel joint de N._ rejeté. Le jugement entrepris sera modifié aux chiffres II et III de son dispositif en ce sens que le prévenu est condamné à une peine privative de liberté de 15 mois, dont 6 mois ferme, et que le délai d’épreuve est fixé à 5 ans. Pour le surplus, le jugement attaqué doit être confirmé.
7.
Vu l’issue de la cause, les frais de la procédure d’appel, constitués de l'émolument de jugement, par 1’610 fr., et de l'indemnité allouée au défenseur d'office, par 1'843 fr. 80, débours et TVA compris, doivent être mis par moitié à la charge de N._.
Ce dernier ne sera tenu de rembourser à l’Etat la moitié du montant de l'indemnité d’office précitée que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP).
8.
Il s’avère que le dispositif communiqué à l’audience d’appel est entaché d’une erreur manifeste à son chiffre VII en tant qu’il prononce le caractère exécutoire du jugement alors même qu’une peine privative de liberté a été prononcée à l’encontre du prévenu. Or, les recours au Tribunal fédéral
dirigés contre une décision prononçant une peine privative de liberté ferme, y compris avec sursis partiel, ont de plein droit un effet suspensif
(cf. art. 103 al. 1 et 2 let. b LTF; Thommen in : Niggli/Uebersax/Wiprächtiger, Basler Kommentar, Bundesgerichtsgesetz, 2. Aufl., Bâle 2011, n. 19 ad art. 103 LTF). Par conséquent, en application de l’art. 83 CPP, le chiffre VII du dispositif doit être supprimé d’office. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c61890e2-1f6d-4781-ad43-07f1c26b406d | En fait :
A.
Par jugement du 13 mars 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré M._, F._, V._, S._ et X._ des chefs d’accusation de lésions corporelles simples qualifiées, subsidiairement lésions corporelles par négligence, agression et abus d’autorité (I–V), leur a alloué des indemnités au sens de l’art. 429 CPP (VI–X), a ordonné le maintien au dossier à titre de pièces à conviction des objets séquestrés sous fiches n° 145, 146 et 147 (XI) et a laissé les frais à la charge de l’Etat (XII).
B.
Par annonce du 17 mars 2015, puis déclaration d’appel motivée du 14 avril 2015, P._ a conclu, avec suite de frais et dépens, principalement à la réforme des chiffres I à XI du jugement en ce sens que M._, F._, V._, S._ et X._ se sont rendus coupables d’abus d’autorité, de lésions corporelles simples qualifiées et d’agression (I-V), au prononcé de peines à dires de justice (VI-X), les frais de première et deuxième instances étant mis à la charge des prévenus, solidairement entre eux (XI). A titre subsidiaire, P._ a conclu à l’annulation du jugement et au renvoi de la cause devant le Tribunal de première instance pour nouvelle décision, les frais de première et deuxième instances étant mis à la charge des prévenus, solidairement entre eux.
Par courriers des 21 avril, 5, 6 et 7 mai 2015, le Procureur général, ainsi que M._, F._, V._, S._, X._ ont renoncé à présenter une demande de non-entrée en matière et à déposer un appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
Né le 20 mai 1975, M._, ressortissant suisse, titulaire d’un CFC de mécanicien sur motos, a travaillé notamment en qualité de mécanicien sur automobiles et sur poids lourds au service de divers employeurs. Il a été engagé par le Service pénitentiaire du canton de Vaud en qualité d’agent de détention auprès de la prison du Bois-Mermet dès le 1
er
septembre 1999 et a été nommé surveillant sous-chef de maison le 1
er
mars 2002, puis promu à cette fonction le 1
er
septembre 2004. Dès le 1
er
mai 2008, M._ a été nommé surveillant-chef de maison - responsable d’établissement en milieu de détention à la prison du Bois-Mermet, fonction qu’il a exercée jusqu’au 30 avril 2011. Depuis lors, il occupe cette même fonction à la prison de la Croisée à Orbe. Il réalise un revenu mensuel net de quelque 7'400 fr., versé treize fois l’an.
Divorcé, il n’a personne à charge. Il s’acquitte d’un loyer de 1'150 fr. par mois et de primes d’assurance maladie mensuelles de 260 fr. Il n’a pas de dettes, si ce n’est un leasing pour son véhicule de 560 fr. par mois, ni de fortune.
Le casier judiciaire de M._ fait état d’une condamnation à 15 jours-amende à 80 fr. avec sursis pendant 2 ans et à 640 fr. d’amende pour violation grave des règles de la circulation routière prononcée le 2 février 2011 par le Ministère public central.
1.2
Né le 10 septembre 1982, F._, originaire de Cronay, a obtenu un CFC de quincaillier puis a oeuvré en qualité de vendeur auprès de divers employeurs. Il a travaillé pour le Service pénitentiaire du canton de Vaud en qualité d’agent de détention du 1
er
juillet 2007 au 31 janvier 2014, d’abord à la prison du Bois-Mermet, puis à la prison de la Croisée. Il a obtenu son brevet fédéral d’agent de détention en 2010. Entre janvier 2009 et novembre 2012, F._ a également effectué des remplacements réguliers en qualité de responsable de l’atelier d’intendance à la prison du Bois-Mermet. Du 1
er
février 2014 au 31 août 2015, il a travaillé en qualité de vendeur pour la société [...] et percevait à ce titre un salaire mensuel brut de 4'750 fr., versé treize fois l’an. Depuis le 1
er
septembre 2015, il a débuté un apprentissage d’assistant socio-éducatif.
Marié, F._ et son épouse, qui travaille à un taux de 60%, ont deux enfants à charge. Ils sont propriétaires de la villa conjugale qui leur coûte environ 1'600 fr. par mois, amortissement compris. Hormis ce crédit hypothécaire, il n’a pas de dettes.
Le casier judiciaire de F._ est vierge de toute inscription.
1.3.
Né le 23 novembre 1975 à Lille en France, V._, ressortissant suisse, a obtenu un CFC de chauffeur et mécanicien sur poids lourds. Il a travaillé dans son métier jusqu’en 2002 et a également formé des apprentis dans ce domaine. Il a travaillé en qualité d’agent de détention au sein de la prison du Bois-Mermet du 1
er
novembre 2002 au 31 mars 2012, période durant laquelle il a obtenu un brevet fédéral d’agent de détention. Il œuvre depuis lors auprès de l’établissement du Simplon à Lausanne. Il réalise selon ses dires un salaire mensuel net d’environ 5'800 fr., versé treize fois l’an.
Marié, V._ a deux enfants à charge. Son épouse travaille à un taux d’activité variant entre 40% et 50%. Son loyer est de 1'500 fr. par mois et les primes d’assurance maladie mensuelles pour l’ensemble de la famille s’élèvent à quelques 800 fr. Il rembourse un crédit par des acomptes mensuels de 600 fr. et n’a pas de fortune.
Le casier judiciaire de V._ ne mentionne aucune condamnation.
1.4
Né le 23 juin 1982, S._, originaire du Chenit, a obtenu un CFC de plâtrier-peintre. Il a exercé son métier au sein de différentes entreprises. Il a ensuite travaillé en qualité d’agent de détention au sein de la prison du Bois-Mermet du 1
er
septembre 2008 au 31 mars 2014. Le 1
er
avril 2014, il a été promu en qualité d’agent technique en milieu de détention et a exercé sa fonction au sein de l’établissement de détention pour mineurs « Aux Léchaires ». Depuis le 1
er
septembre 2015, il exerce son activité au sein de la prison de la Croisée. Selon ses déclarations, il réalise un salaire mensuel net de quelque 5'400 fr., versé treize fois l’an.
S._
est marié et père de deux enfants âgés de trois et huit ans. Le loyer de la famille s’élève à environ 2'000 fr. par mois et il s’acquitte de primes d’assurance maladie mensuelles de 300 fr., subsides déduits, pour l’ensemble de la famille. Il n’a pas de dettes hormis des mensualités de leasing de 670 fr. environ.
Le casier judiciaire de S._ fait état d’une condamnation à 25 jours-amende à 50 fr. avec sursis pendant 2 ans et à 500 fr. d’amende pour violation grave des règles de la circulation routière prononcée le 1
er
septembre 2011 par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois.
1.5
Né le 31 août 1965, X._, de nationalité suisse, titulaire d’un CFC de boucher-charcutier, a œuvré dans son métier auprès de différents commerces. Par la suite, il a travaillé en équipe auprès de [...] durant quatorze ans avant de devenir [...] pendant cinq ans. Le 1
er
septembre 2008, il a été engagé par le Service pénitentiaire du canton de Vaud en qualité d’agent de détention au sein de la prison du Bois-Mermet. Du 1
er
avril 2012 au 30 septembre 2013, il a travaillé dans cette fonction à la prison du Simplon et a été promu centraliste - agent technique en milieu de détention le 1
er
octobre 2013. Depuis cette date, il exerce cette fonction au sein de la prison de la Croisée. Il réalise, un salaire mensuel net d’environ 6'300 fr., versé treize fois l’an.
Marié, X._ et son épouse, qui travaille à un taux de 40%, ont des enfants à charge. Leur loyer est de 2'000 fr. par mois et les primes d’assurance maladie mensuelles de la famille s’élèvent à 1'000 francs. Il n’a pas de dettes, si ce n’est un leasing qu’il rembourse par des mensualités de 309 francs.
Le casier judiciaire de X._ mentionne une condamnation à 27 jours-amende à 70 fr. avec sursis pendant 2 ans et à 1'000 fr. d’amende pour conducteurs se trouvant dans l’incapacité de conduire (véhicule automobile, taux d’alcoolémie qualifié) prononcée le 27 juillet 2010 par l’Office régional du Juge d’instruction du Bas-Valais.
2.
2.1
Dans le cadre d'une procédure pénale menée par le Ministère public de la Confédération pour blanchiment d’argent, trafic aggravé de stupéfiants et appartenance à une organisation criminelle, P._ a été détenu avant jugement, du 23 juillet au 15 octobre 2009 (P. 59), à la prison du Bois-Mermet, à Lausanne, établissement dans lequel M._ occupait la fonction de surveillant chef et avait sous ses ordres les agents de détention F._, X._, S._ et V._.
P._ n’était pas considéré comme une personne dangereuse par les agents de détention. Toutefois, ils ont tous relevé qu’il était lors de son séjour carcéral particulièrement difficile, oppositionnel, fatiguant et imprévisible.
2.2
Le 8 septembre 2009, une enquête disciplinaire avait été ouverte par la directrice de l’établissement, T._, à l’encontre d’P._, pour infractions aux articles 37 (dommage à la propriété) et 40 (inobservation des règlement et directives) du règlement du 26 septembre 2007 sur le droit disciplinaire applicable aux détenus avant jugement et aux condamnés (P. 10/9). Dans le cadre de cette procédure disciplinaire, P._ devait être entendu, le 18 septembre 2009, en début de matinée, par la directrice de la prison du Bois-Mermet, T._. A ces fins, il a été amené, vers 8h20, par les gardiens S._ et V._, afin d’être placé en cellule d’attente. Dans le cadre du contrôle de sécurité par palpation, l’agent V._ a remarqué un objet dans la poche de pantalon du plaignant. Ce dernier a indiqué qu’il s’agissait d’un tube de pommade. Il a rapidement sorti ce tube pour se mettre de la crème sur sa jambe blessée, pour ensuite le remettre dans sa poche, sans que les agents aient eu le temps de le voir. Les deux agents lui ont alors demandé, à plusieurs reprises, de sortir l’objet de sa poche pour pouvoir l’examiner, ce qu’il a refusé de faire. Quelques minutes plus tard, alertés par le bruit, les gardiens M._, F._ et X._, qui étaient à l’étage, sont arrivés devant la cellule du plaignant. M._ a, lui aussi, à plusieurs reprises, sommé le plaignant à travers la guignarde de donner le tube de pommade, en vain. Il l’a également averti que s’il refusait de le remettre, lui et ses collègues seraient contraints de venir le chercher de force.
Le plaignant refusant d’obtempérer, M._ a donné l’ordre d’intervenir pour récupérer le tube de pommade. Les prévenus sont alors entrés dans la cellule, V._, S._ et X._ ont tenu les bras du plaignant et M._ a plaqué le haut de son corps, côté face, sur la petite table, aidé par F._. Au cours de la fouille, le plaignant était difficile à maîtriser, car il résistait avec force et se débattait violemment et tentait de donner des coups. Seul S._ a dit dans sa première audition que ceux-ci les avaient atteints (PV aud. 7 p. 3). A un moment donné, V._ a réussi à sortir le tube de la poche du plaignant et a eu de la crème plein les mains. Il s’agissait d’un petit tube de crème du genre « Vitamerfen » d’environ 20 grammes. M._ a alors donné l’ordre de lâcher le plaignant et de quitter la cellule. Les prévenus ont commencé à sortir les uns après les autres, M._ et F._, en dernier.
Tandis que les agents sortaient, le plaignant a encore tenté de leur asséner des coups. Il a attrapé F._ par le col de son pull, le retenant à l’intérieur de la cellule. F._ a tenté de repousser le plaignant et tous deux sont tombés au sol, P._ sur F._. M._ et V._ sont alors intervenus, afin de faire lâcher le plaignant qui retenait toujours leur collègue par le col, lequel se débattait, sans succès. V._ a notamment essayé de tirer F._ hors de la cellule, mais sans y parvenir. Finalement, M._ a donné un coup de pied dans les parties intimes du plaignant pour qu’il libère F._, ce qu’il a fait. Puis tous les trois sont sortis de la cellule et la porte a été fermée.
Les agents de détention ont à ce moment pu pour la première fois examiner l’objet détenu par P._ et constater qu’il ne s’agissait que d’un tube de pommade d’environ 20 grammes qui ne contenait rien de dangereux.
2.3
Vers 8h45, le plaignant a vu la directrice, T._, accompagnée notamment de son assistante, R._. Il est arrivé très agité à l’audition et a affirmé avoir été maltraité et bousculé par 4 ou 5 gardiens. Il a indiqué être blessé à la tête, aux bras, aux jambes et avoir reçu plusieurs coups dans ses parties intimes. Il est ressorti de cet entretien qu’P._ avait entamé une grève de la faim depuis deux jours. Il a contesté avoir commis des dégâts dans sa cellule (dommages à l’interphone). Il s’est également expliqué au sujet d’un incident survenu le 17 septembre 2009 lors d’une consultation médicale, durant laquelle il s’est montré oppositionnel et a saisi son dossier médical, a quitté la pièce en courant, s’est introduit dans une cellule et a jeté ledit dossier par la fenêtre (P. 10/6 et 10/11). A part une bosse sur le front d’P._, T._ n’a constaté aucune marque visible sur son visage. Elle n’a constaté ni marques, ni sang, ni blessure sur lui. Elle n’a pas de souvenir que l’intéressé lui ait montré des marques sur ses membres supérieurs et inférieurs. (PV aud. 16 lignes 106 à 110, audition à l’audience de jugement du 13 mars 2015 p. 27). R._ n’a également pas constaté de marques ou de sang sur le corps d’P._. Elle a indiqué qu’il était stressé et bougeait sa jambe durant l’entretien. Elle se souvient qu’il avait parlé d’une bosse au front, mais ne l’a pas constatée elle-même (audition à l’audience de jugement du 13 mars 2015 p. 30).
Il ressort des déclarations de la directrice de l’établissement pénitentiaire qu’il n’était pas interdit de conserver un tube de crème ou tout autre médicament prescrit durant les entretiens avec des tiers, dans la mesure où celui-ci était préalablement contrôlé par les agents de détention. En outre, en raison d’une micro-coupure de l’alimentation électrique entre 8h14 et 8h33, la caméra qui se trouvait dans la cellule d’attente n’a pas enregistré les événements qui ont suivi.
2.4
Le rapport d’événements particuliers du 19 septembre 2009 établi par le surveillant-chef M._ relate ce qui suit (P.10/14) :
« Le vendredi 18 septembre 2009 à 8h20 environ, M. P._ est placé en cellule d’attente 422, afin d’être entendu par la Direction dans le cadre d’une procédure disciplinaire ouverte à son encontre.
Conformément à la procédure, les agents de détention TG121 et CP176 lui demandent s’il a quelque chose dans les poches avant de le placer en cellule d’attente. M. P._ répond qu’il a des médicaments. Les agents de détention demandent à vérifier ces dires. M. P._ montre un tube. L’agent de détention TG121 demande à contrôler l’objet. C’est alors que M. P._ s’étale de la pommade sur sa blessure au mollet gauche. L’agent de détention TG121 insiste pour vérifier l’objet. A ce moment là M. P._ part en courant en direction de la « Porte 7 » en mettant l’objet dans sa poche. Alarmé par les bruits, je me rends sur place. Je somme M. P._, qui entre temps a été placé en cellule d’attente, de me montrer ce qu’il a sur lui. Ce dernier refuse d’obtempérer. Connaissant le personnage, vu ses antécédents et vu la nature de l’entretien qui va suivre, je donne l’ordre aux agents de détention présents (TG121 / TR172 / CP176 / JD192) de lui retirer cet objet de gré ou de force. Je suis également impliqué dans l’altercation. M. P._ résiste avec force, se débat violemment, nous obligeant ainsi à utiliser la force pour le maîtriser.
Une fois l’objet retirer (sic) (un tube de pommade), M. P._ continue de nous agresser et tente de nous frapper.
Nous le maîtrisons tant bien que mal et sortons les uns après les autres de la cellule. Je précise qu’aucun coup n’a été porté volontairement dans le but de blesser l’intéressé.
Lors de l’audition, à laquelle j’étais présent, M. P._ fait le constat de ces (sic) blessures devant la directrice. Il relève une bosse sur le front, des griffures aux avants bras, une éraflure sur le mollet gauche (qu’il avait déjà avant l’altercation) et dis (sic) avoir mal aux parties intimes.
L’audition se passe sans encombre.
A 14h00, l’agent de détention TG121 m’informe que M. P._ s’est automutilé dans sa cellule. Nous observons de nouvelles lésions sur son visage et sur ses genoux.
A 17h00, le Dr [...] (sic) et Mlle [...], infirmière, rencontrent M. P._, afin de faire un premier constat.
A toutes fins utiles, le SMPP avait d’ores et déjà fixé un rendez-vous au CHUV pour le mardi 22 septembre 2009, afin que M. P._ ait (sic) faire constater ces (sic) blessures. »
2.5
Le premier constat dressé par le Dr [...] (P. 10/2) le jour même des faits, à 17 heures, fait état au niveau de la tête de deux dermabrasions frontrales droite (4 cm x 2 cm) et gauche (3 cm x 1 cm), d’une dermabrasion sur le menton à droite et à gauche et d’une dermabrasion circulaire d’un diamètre de 0,5 cm au zygoma droite ; au niveau du cou, dermabrasions des deux côtés ; au niveau du bras gauche, des dermabrasions au coude et au bras ; à la main droite, 3
ème
et 4
ème
doigt légèrement douloureux à la flexion, des entailles superficielles au coude droit ; au niveau du genou gauche, une dermabrasion pré-rotulienne avec croûte de sang coagulé mais légèrement saignante ; au niveau du membre inférieur gauche, plusieurs dermabrasions, dont la plus grande se situe sur la cuisse (7 cm x 3 cm) ; au niveau du membre inférieur droit, dans la région pré-tibiale, deux dermabrasions de 1,5 cm et 2,5 cm de long ; au niveau du squelette, la colonne cervicale douloureuse à la rotation droite et très douloureuse à la flexion antérieure ; au niveau des côtes, douleur à l’inspiration très superficielle, palpation du grill costal gauche extrêmement douloureuse, mais sans hématome ; au niveau de la région parastérnale supérieure gauche, très douloureuse à la palpation, de même que les muscles pectoraux ; au niveau de l’épaule droite, très douloureuse à la palpation, compatible avec une pathologie musculo-tendineuse. A la demande du patient, les testicules n’ont pas été examinés. Il s’est plaint de photophobies et de céphalées en casque. Du Paracétamol à raison de 1gr/soir lui a été prescrit.
Quant au rapport médical du Dr [...] du 22 septembre 2009 (P. 10/3, P. 86/1 à 14), les lésions suivantes ont été constatées :
« a) au niveau de la tête :
- dans la région frontale gauche, à environ 1 cm au-dessous de la limite du cuir chevelu, une tuméfaction ecchymotique verdâtre, mesurant 4 x 2 cm, comprenant deux abrasions cutanées rosées, la supérieure mesure 0,3 cm de diamètre et l’inférieure est recouverte d’une croûtelle brunâtre linéaire, à disposition oblique vers le bas et l’arrière, et mesure 0,4 cm de long ;
- dans la région frontale droite, à environ 1,5 cm en dessous de la limite du cuir chevelu, une ecchymose verdâtre mal délimitée, mesurant environ 3,5 x 2,5 cm comprenant trois abrasions cutanées rosées. L’interne mesure 0,6 x 0,5 cm, la moyenne est punctiforme et est distante de 0,7 cm de la précédente, et l’externe, distante de 1 cm de la précédente, est linéaire et peu prononcée, à disposition oblique vers le bas et l’arrière et mesure 0,8 cm de long ;
- dans la région temporale gauche, à environ 2,5 cm en arrière de la commissure palpébrale externe, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle beige, mesurant 0,6 cm de diamètre ;
- au niveau de la joue droite, juste en dessous de la pommette, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle brunâtre, mesurant 0,8 cm de diamètre ;
b) au niveau du thorax :
- à la face antérieure de l’hémithorax droit, en regard du tiers moyen de la clavicule, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle beige, linéaire, oblique vers le bas et l’avant, mesurant 0,6 cm de long ;
- à la partie antérieure de l’hémithorax droit, à 2,5 cm au-dessus et 1 cm en dedans du mamelon, une ecchymose jaune verdâtre, mesurant 4,5 cm de diamètre ;
c) au niveau de l’abdomen :
- au niveau du flanc gauche, une ecchymose vert violacé, à disposition oblique vers le bas et l’avant, mesurant 3 x 1,5cm ;
d) au niveau du membre supérieur droit :
- à la partie antérieure de l’épaule, une cicatrice ancienne blanchâtre, mesurant 1,2 x 0,7 cm (dont l’intéressé ne peut préciser l’origine);
- à la partie postéro-externe du coude, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle brunâtre, à disposition verticale, mesurant 1,5 x 0,3 cm ;
- à la partie postérieure du tiers supérieur de l’avant-bras, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle brunâtre, linéaire, oblique vers le bas et l’avant, mesurant 1 cm de long ;
- à la partie antéro-interne du tiers inférieur de l’avant-bras, une ecchymose verdâtre, peu prononcée, mesurant environ 2 x 1,5 cm ;
- à environ 2 cm en dessous et 1,5 cm en dehors de la lésion susmentionnée, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle beige, à disposition verticale, mesurant 0,4 x 0,2 cm ;
e) au niveau du membre supérieur gauche :
- à la partie antéro-interne du tiers supérieur du bras, une ecchymose jaune vert violacé, mesurant 5 cm de diamètre ;
- à la partie postérieure du coude, une abrasion cutanée rosée, comportant un lambeau épidermique et mesurant 1 x 0,5 cm ;
- à la partie postéro-externe du tiers supérieur de l’avant-bras, sur une zone mesurant 4 x 4 cm, plusieurs abrasions cutanées rosées en partie recouvertes de croûtelles brunâtres punctiformes, linéaires, à disposition horizontale ou oblique vers le bas et l’arrière, la plus grande mesurant 1,2 cm de long ;
f) au niveau du membre inférieur droit :
- à la partie antérieure du tiers moyen de la cuisse, une ecchymose verdâtre, mesurant environ 2,5 x 2 cm ;
- à la partie antéro-interne du tiers moyen de la cuisse, à 1,7 cm en dedans de la lésion susmentionnée, une ecchymose verdâtre, mesurant jusqu’à 4 cm de large et jusqu’à 2,5 cm de haut ;
- à environ 0,5 cm en dessous de la lésion susmentionnée, s’étendant de la partie antéro-interne du tiers moyen au tiers inférieur de la cuisse, une ecchymose verdâtre, mal délimitée, mesurant 11 cm de long et jusqu’à 5 cm de large ;
- à la partie antéro-externe du tiers moyen de la cuisse, une ecchymose verdâtre, mal délimitée, mesurant environ 5 x 4 cm ;
- à la partie antéro-interne du genou, une cicatrice chirurgicale ancienne blanchâtre, mesurant environ 7cm de long et jusqu’à 0,4 cm de large ;
- à la partie antéro-interne du genou, à environ 3 cm en avant de la cicatrice susmentionnée, une ecchymose jaune verdâtre, mesurant environ 3 cm de diamètre ;
- à la partie antérieure du tiers moyen de la jambe, en regard de la crête tibiale, une ecchymose verdâtre, mesurant 2,5 x 1,5 cm ;
- juste en dessous de la lésion susmentionnée, une discoloration cutanée violacée, mesurant 0,7cm de diamètre ;
- à 1,8 cm en dessous de la lésion susmentionnée, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle beige, oblique vers le bas et le dehors, mesurant 0,8 x 0,2 cm ;
- à la partie antéro-interne du tiers inférieur de la jambe, une abrasion cutanée rosée recouverte d’une croûtelle beige à disposition verticale, mesurant 3 x 0,5 cm et dont la partie inférieure siège au sein d’une ecchymose verdâtre, mesurant 2,5 x 1 cm ;
g) au niveau du membre inférieur gauche :
- à la partie antérieure du genou, sur une zone mesurant environ 2 x 1,5 cm, plusieurs abrasions cutanées rosées recouvertes de croûtelles rouge brunâtre, à disposition oblique vers le bas et le dehors, en partie confluentes, mesure 1,5 cm pour la plus longue ;
- à la partie antérieure du tiers supérieur de la jambe, une abrasion cutanée rosée mesurant 2 x 1 cm et comprenant plusieurs croûtelles brunâtres dont la plus grande mesure 0,2 cm de diamètre et la plus petite est punctiforme ;
- à la partie antéro-interne du tiers supérieur de la jambe, une abrasion cutanée rosée recouverte croûtelle brunâtre, linéaire, mesurant 0,2 cm de long ;
- à la partie postéro-externe du tiers moyen de la jambe, une abrasion cutanée rougeâtre avec quelques croûtelles beiges, grossièrement rectangulaire, orientée vers le bas et l’avant, mesurant 3,5 x 2 cm ;
- à la partie antéro-externe du tiers moyen de la jambe, une croûte rouge brunâtre, mesurant 6,5 cm de long et jusqu’à 3,5 cm de large, bordée d’un liseré érythémateux ;.
A noter que M. P._ n’a pas souhaité que nous examinions la région génitale externe et les fesses. »
2.6
Le 13 novembre 2009, P._ a déposé plainte contre M._, F._, V._, S._ et X._ pour abus d’autorité (article 312 CP) et lésions corporelles simples aggravées (art. 122 ch. 2 CP) leur reprochant, en substance, de l’avoir frappé, sans raison le 18 septembre 2009 (P. 5 et 6). | En droit :
1.
Interjeté dans les forme et délai légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant qualité à recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
Dans la phase qui précède la mise en accusation, le principe
in dubio pro duriore
, qui impose qu’en cas de doute la procédure se poursuive, est applicable. Une application particulièrement stricte de ce principe s’impose lorsqu’un individu prétend de manière défendable avoir été traité de façon inhumaine ou dégradante par un ou plusieurs agents de la force publique. Il a alors droit à une enquête officielle approfondie et effective, qui doit pouvoir mener à l’identification et à la punition des responsables (ATF 140 I 125 c. 2 ; ATF 138 IV 88 c. 3.1.1 ; ATF131 I 462 c. 1.2.5 ; Cherpillod, Arrêt de la procédure pénale par le ministère public sans condamnation, ni instruction: l'ordonnance de non-entrée en matière, RPS 133/2015 p. 192 ss, spéc. pp. 201-204 et jurisprudences européenne et fédérale citées).
En revanche, dans la procédure suivant la mise en accusation, c’est le principe
in dubio pro reo
, qui veut que le doute profite à l’accusé, qui s’applique. Selon ce principe concrétisé à l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte
ONU II
(Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
signifie que le juge pénal ne peut pas se déclarer convaincu de l’existence d’un fait défavorable à l’accusé s’il existe, sur la base d’un examen objectif de la situation, des doutes quant à l’existence de ce fait. La présomption d’innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
En matière d’appréciation des preuves et d’établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l’autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu’elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (Kistler Vianin, in: Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 28 ad art. 398 CPP). L’appréciation des preuves est en particulier arbitraire lorsque le juge de répression n’a manifestement pas compris le sens et la portée d’un moyen de preuve, s’il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d’un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 136 III 552 c. 4.2; TF 1C_517/2010 du 7 mars 2011 c. 2.1).
Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, lorsqu'un individu est placé en garde à vue alors qu'il se trouve en bonne santé et que l'on constate qu'il est blessé au moment de sa libération, il incombe à l'État de fournir une explication plausible pour l'origine des blessures, à défaut de quoi l'art. 3 CEDH est manifestement violé (arrêt Selmouni contre France du 28 juillet 1999, Recueil CourEDH 1999-V § 87). La Cour européenne fonde cette présomption sur l'état de vulnérabilité de toute personne placée en garde à vue, qui se trouve entièrement aux mains des fonctionnaires de police (arrêt Turan Cakir contre Belgique du 10 mars 2009, § 54 et les arrêts cités, notamment l'arrêt Rivas contre France du 1er avril 2004, § 38). Comme un détenu se trouve en mains des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire de la même manière qu'un gardé à vue se trouve en mains de la police, la même solution s'applique en cas de blessures constatées sur un détenu après une intervention des gardiens: le lien de causalité entre l'action des seconds et les blessures constatées sur le premier est présumé (TF 6B_274/2009 du 16 février 2010 c. 3.2.2.1). Toutefois, le Tribunal fédéral a précisé qu’au contraire de la présomption d'innocence, cette présomption n'est qu'une présomption de fait ou de l'homme, puisqu'il suffit, pour la renverser, que soient établis des faits qui font peser un doute sur la version du plaignant (arrêt Turan Cakir contre Belgique du 10 mars 2009, § 54 et les arrêts cités). Elle ne renverse ni n'allège le fardeau de la preuve, qui repose entièrement sur l'accusation (TF 6B_274/2009 précité).
4.
Invoquant une constatation inexacte et incomplète des faits, l’appelant reproche au premier juge d’avoir écarté ses déclarations au profit de celles des cinq agents de détention, alors même que leur déclarations ont varié et qu’elles ne coïncident pas avec le rapport établi le lendemain des événements par le surveillant-chef de la prison, M._.
4.1
4.1.1
a)
Comme le relève l’appelant, les prévenus n’ont pas été entendus juste après les faits mais pour la première fois près de deux ans après ceux-ci, soit en mai et juillet 2011, puis en février 2012, à l’audience de jugement en mars 2015 et à l’audience d’appel le 31 août 2015. En outre, comme souligné par l’appelant, l’agent de détention F._, interpellé sur le fait qu’il donnait plus de détails dans sa deuxième audition du 21 février 2012 que dans celle du 18 juillet 2011 a répondu : « à force de relire les pièces du dossier et d’en discuter avec les collègues, j’ai l’impression que les souvenirs me reviennent » (PV aud. 11, lignes 145-146). Ainsi, s’agissant des déclarations des prévenus, il y a lieu de tenir compte du rapport rédigé le 19 septembre 2009 par M._, soit en dehors de toute procédure judicaire, ainsi que de leurs premières déclarations. Les déclarations subséquentes sont, de par l’écoulement du temps, déjà moins crédibles et n’ont été retenues que si elles sont corroborées par d’autres éléments au dossier.
b) Au demeurant, des divergences existent dans les déclarations des cinq agents de détention, mais sur des points annexes. Le fait qu’ils n’aient pas une version arrangée et unanime, alors même qu’ils ont eu tout le temps de s’accorder, renforce leur crédibilité. Enfin, il sied de relever, à l’instar du premier juge, que les états de service des cinq agents de détention sont irréprochables.
4.1.2
S’agissant de la crédibilité de l’appelant, il y a lieu d’abord de relever que sa plainte pénale, déposée le 13 novembre 2009, soit un peu plus de deux mois après les événements, est particulièrement floue et lacunaire. Elle ne permet pas de déterminer le déroulement des faits, même grossièrement. Ses déclarations subséquentes ne sont également pas précises. En outre, le plaignant a passablement varié dans ses déclarations, y compris sur des points cruciaux. Ainsi, par exemple, P._ a tout d’abord affirmé que les agents de détention avaient fermé la porte de la cellule derrière eux avant de s’en prendre à lui, pour finalement prétendre aux débats ne plus s’en souvenir. Dans sa plainte, l’intéressé a expliqué avoir indiqué aux agents de détention qu’il était porteur d’un tube de crème et avoir refusé de le remettre. Il ressort donc de cette plainte qu’il ne l’a pas montré. Puis, il a déclaré lors de son audition en mai 2011, avoir passé par un détecteur de métaux, qui n’avait pas réagi, et avoir montré le tube pour ensuite dire aux débats de première instance avoir montré le tube de crème après que le détecteur de métaux a sonné, pour finalement indiquer au premier juge ne pas réellement se souvenir s’il avait sonné. Il a également précisé aux débats de première instance qu’on ne lui avait jamais demandé de remettre le petit tube de crème pour contrôle, mais de le remettre durant toute sa présence en cellule d’attente ainsi que durant l’entretien. Il a ensuite admis savoir que c’était la procédure habituelle, mais avoir estimé que cette fois-là, on ne lui aurait pas remis le tube pour l’embêter. Pour finalement penser qu’il était en droit de garder ce tube. Il en va de même quant au nombre d’agents de détention intervenus : il a dans un premier temps déclaré avoir été transféré par cinq agents, pour finalement indiquer qu’ils n’étaient que deux. Il a d’abord exposé avoir été frappé par les cinq agents, puis a indiqué au médecin de l’Unité de Médecine des Violences qu’ils étaient quatre, pour finalement admettre qu’il était impossible qu’ils se soient tous pris à lui compte tenu de la dimension de la cellule. En outre, il sied de relever qu’P._ a une propension à interpréter les événements, à les exagérer, et à faire porter la responsabilité de ses actes sur autrui. Le plaignant a, ainsi, contesté les faits relatifs à la procédure disciplinaire précédent les événements suite aux dégâts causés sur son interphone alors que son codétenu, Q._, l’a aperçu verser de l’eau sur et dans l’interphone parce qu’il n’obtenait pas ce qu’il voulait de la part des surveillants. Ce qui a été confirmé par un agent de détention qui l’avait surpris en flagrant délit (P. 10/7 et 10/12).
De surcroît, le Tribunal de première instance a relevé qu’P._ avait menti s’agissant de la fermeture de la porte de la cellule d’attente par les agents de détention, les photographies au dossier démontrant que celles-ci ne sont pas munies de poignées, de sorte qu’il est impossible de fermer ou d’ouvrir la porte de l’intérieur. Il sied de relever que l’intéressé a été décrit par le personnel médical, la directrice de l’établissement pénitentiaire, son codétenu, divers agents de détention comme étant une personne manipulatrice, agitée, cherchant à pousser le personnel de surveillance à la faute en le provoquant (P.10/4, 10/6, 10/7, 10/12, ainsi que les déclarations de [...] et [...], agents de détention, à l’audience de première instance). Enfin, P._ n’a cessé de soutenir une théorie du complot, selon laquelle tant le personnel de la prison du Bois-Mermet, que sa directrice, que le corps médical du Service pénitentiaire auraient reçus des instructions de la part du Ministère public de la Confédération. Cette théorie ne repose sur aucun élément concret. Au vu de l’ensemble de ces éléments, la crédibilité de P._ est faible.
4.2
L’appelant reproche au premier juge d’avoir retenu que V._ et S._ n’ont jamais pu voir le tube de pommade, ni à plus forte raison le contrôler.
L’appelant cite à cet égard un passage de l’arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du 9 novembre 2011, repris ensuite par le Tribunal fédéral, qui indique que le plaignant a montré le tube aux deux agents. Or, ce passage ne fait que reprendre le rapport du 19 septembre 2009 (P. 10/14) et il y a lieu dans l’appréciation des faits de tenir compte de tous les éléments du dossier, étant précisé que l’appréciation faite par les tribunaux chargés de contrôler les principes légaux régissant les enquêtes ne lient pas les autorités pénales statuant au fond à l’issue d’une instruction complète qui jouisse d’une entière liberté d’appréciation, conformément aux principes rappelés sous chiffre 3 ci-dessus.
Il ressort du rapport du surveillant-chef du 19 septembre 2009 précité, que le plaignant a dit aux deux agents de détention qu’il avait sur lui des médicaments et qu’il a montré un tube. Or, dans sa plainte du 13 novembre 2009, le plaignant expose seulement qu’il a indiqué aux agents qu’il avait un tube de crème contre l’eczéma et qu’il a refusé de laisser le tube à l’extérieur de la cellule d’attente en expliquant qu’il en avait besoin. Il ne dit pas qu’il leur avait montré ce tube, ce qui ne manque pas de surprendre. Entendu le 5 mai 2011 par le Procureur, il a affirmé qu’il avait vidé ses poches et montré le tube de pommade. En revanche, entendu le 14 juillet 2011, V._ a affirmé qu’il avait senti un objet qu’il n’a pas pu identifier dans la poche du prévenu lors de sa fouille. Il a demandé au plaignant de lui montrer l’objet, ce que ce dernier a refusé. P._ a dit que c’était un tube de pommade et a mis de la pommade dans un geste rapide sur sa blessure à la jambe. Il a rapidement remis le tube dans sa poche de sorte que V._ affirme qu’il n’a pas pu le voir. S._ a également affirmé qu’il savait qu’il s’agissait d’un tube de pommade parce qu’P._ le leur avait dit, mais que celui-ci refusait de montrer ce tube.
Dans la mesure où l’auteur du rapport, M._, n’était pas présent au début des événements qu’il décrit et que le plaignant lui-même dans sa plainte n’indique pas avoir montré ce tube, il y a lieu de s’en tenir aux déclarations des deux prévenus et de retenir que le plaignant ne leur a pas montré ce tube, mais qu’il l’a sorti de sa poche pour se mettre rapidement de la crème sur sa jambe blessée. Compte tenu de la taille de ce tube, ils n’ont pas pu le voir et le contrôler.
Enfin, il est établi et incontesté que le plaignant a refusé par la suite de montrer ce tube et de le remettre aux agents. On relève de surcroît les déclarations d’P._ devant le premier juge qui attestent qu’il s’est fermement opposé à montrer ce tube de crème : « j’estime que cette fois-là, on ne m’aurait pas remis le tube juste pour m’embêter. Selon moi, ils m’ont mis dans la cellule et je pensais que j’étais en droit de garder ce tube », alors qu’il savait qu’il devait être contrôlé : « j’admets que c’est la procédure habituelle ». Il ne fait aucun doute non plus que d’emblée le plaignant a indiqué qu’il avait dans sa poche un tube de pommade pour soigner la lésion qu’il avait à la jambe, lésion qui était visible, et que les cinq agents avaient tous conscience avant leur intervention qu’il devait s’agir d’un tube de pommade. Ainsi, l’intervention a eu pour but de vérifier les dires du plaignant, soit qu’il s’agissait seulement d’un tube de pommade.
4.3
S’agissant du déroulement de la fouille, l’appelant affirme que le rapport du 19 septembre 2009 ne mentionne nulle part qu’il aurait donné des coups aux prévenus et que les déclarations des agents, au demeurant contradictoires, n’ont aucune crédibilité.
L’appelant perd de vue que dans son jugement le premier juge n’a pas retenu toutes les déclarations des prévenus. En ce qui concerne l’appréciation de l’appelant au sujet du rapport précité, celle-ci ne peut être suivie. Ce rapport indique que le détenu « résiste avec force », « se débat violemment » et qu’une fois l’objet retiré, qu’il « continue de nous agresser et tente de nous frapper ». Ces constats ne sont absolument pas compatibles avec la version des faits de l’appelant, selon laquelle il s’agissait d’un passage à tabac sur une victime passive. Dans sa plainte, P._ affirme en effet que sans aucune raison et alors qu’il ne présentait aucun signe d’agressivité et encore moins de dangerosité quelle qu’elle soit, les agents de détention lui auraient asséné des coups à plusieurs reprises au niveau de la tête, l’auraient griffé à la gorge puis l’auraient jeté à terre et qu’il a alors reçu deux coups de pied au niveau des parties génitales et des coups au niveau du thorax et des épaules. Ce rapport fait, au contraire, état de résistance, de violence, d’agression et de tentatives de coups. Tous les prévenus ont décrit, en termes différents, qu’il résistait, qu’il se débattait et qu’il était très agité. Lors de ses deux auditions, le surveillant-chef M._ a indiqué que le plaignant leur « est venu contre » en tentant de leur donner des coups de pied et de poing, sans toutefois savoir si quelqu’un avait été touché. Seul l’agent S._ a précisé lors de sa première déposition qu’il avait reçu des coups lorsque le plaignant se débattait. L’agent de détention F._ a déclaré dans sa première audition qu’il ne lui semblait pas qu’il avait donné des coups, mais qu’il faisait des grands gestes. Dans ces circonstances, il y a lieu de retenir que le plaignant avait un comportement oppositionnel, agressif et qu’il a tenté de donner des coups aux agents de détention, il n’est ainsi pas tenu compte des déclarations de l’agent S._ qui sont trop isolées.
Le surveillant-chef M._ a déclaré qu’P._ s’en était pris physiquement à l’agent F._ en le prenant par le col et en l’empêchant de sortir de la cellule, celui-ci ne voulant pas lâcher prise, raison pour laquelle il a dû retourner dans la cellule. Les déclarations de F._ sur la manière dont le plaignant l’a agrippé par le col de son polo, l’empêchant de sortir de la cellule, coïncident avec celles des autres intervenants. Elles sont crédibles et, en outre, confirmées par le témoin [...] qui a vu la scène depuis l’écran de l’ordinateur de surveillance. Au demeurant, le jugement ne retient pas que le plaignant a étranglé ou tenté d’étrangler un agent, comme le soutien le plaignant dans son d’appel. Les griefs de l’appelant à cet égard sont vains.
C’est dans ces circonstances, alors que le plaignant tenait l’agent de sécurité par le col de son polo, qu’ils sont tous deux tombés au sol. Comme F._ n’arrivait pas à se libérer, malgré l’aide des autres prévenus, M._ a donné un coup de pied dans les parties intimes du plaignant pour le faire lâcher prise. Le coup a permis à l’agent F._ de se libérer. Les témoignages des prévenus sont concordants sur ce point.
Le jugement de première instance indique que le plaignant a tenté de mordre M._ au bras. Or, cette tentative de morsure ressort uniquement des déclarations de l’agent lui-même lors de son audition du 5 mai 2011 et à l’audience de jugement. Cet événement n’a à aucun moment été mentionné par les autres intervenants, de sorte qu’il n’a pas à être retenu.
4.4
L’appelant fait valoir encore que la constatation des faits est incomplète.
L’appelant reproche au premier juge de ne pas avoir indiqué que les prévenus eux-mêmes considéraient que le plaignant n’était pas dangereux. C’est en effet ce qui ressort des différentes auditions des agents de détention. Néanmoins, il était vu comme une personne « révoltée contre l’autorité », qui « avait beaucoup de peine à respecter les règles de la détention et de l’établissement », qui « se montrait peu respectueux à l’égard du personnel de surveillance » (PV aud. 5 lignes 63 à 64). Il était « difficile et fatiguant. Il était dans la négation et l’opposition. Ce n’était pas quelqu’un de méchant » (PV aud. 6 lignes 53-54). Il était connu comme « pénible et surtout pinailleur » (PV aud. 7 lignes 43-44). Il était « plus oppositionnel et contestataire que la moyenne des détenus » (PV aud. 9 lignes 48). L’état de fait a été complété sur ce point.
L’appelant affirme que le jugement ne fait pas mention que V._ et S._ ont placé le détenu dans la cellule d’attente avant que M._ vienne parlementé avec lui par la guignarde. Cet élément ressort effectivement du rapport du surveillant-chef (P. 10/14), ainsi que des auditions des agents V._ et S._ (PV aud. 6 ligne 100 ; jugement p. 5 et 8).
L’appelant soutient que la directrice de l’établissement pénitentiaire avait affirmé qu’il avait le droit de conserver son tube de pommade. En effet, cela ressort des déclarations de T._ du 25 octobre 2010. Elle s’est exprimée en ces termes : « [...] la procédure exige que le détenu soit fouillé par palpation avant d’être laissé en cellule. Cette procédure s’applique lorsque le détenu doit rencontrer un tiers ou sortir de l’établissement. Lors de cette fouille, un objet a été détecté dans la poche de M. P._. Pour cette raison, et dans la mesure où le détecteur de métaux avait réagi, les agents de surveillance lui ont demandé de montrer l’objet qui était dans sa poche. M. P._ a, selon le personnel, sorti rapidement quelque chose de sa poche dans son poing. Les agents lui ont demandé de pouvoir voir cet objet. Le précité a tout à fait le droit d’avoir un tube de crème avec lui. Il fallait simplement qu’il le montre. Au lieu de cela, il s’est mis à courir [...] ». Le jugement a été complété dans ce sens.
L’appelant ne fait valoir aucun moyen relatif à l’absence d’enregistrement. Il ressort en effet du jugement que des micro-coupures de l’alimentation électrique étaient relativement fréquentes à l’époque des faits. Il est techniquement impossible d’en indiquer la cause, précisant toutefois que le journal des événements indique ce qui se passe au fur et à mesure, sans que personne puisse le modifier. Le système prend un certain temps à se réinitialiser après une panne. Le premier juge a estimé que l’ensemble des éléments techniques au dossier, les différents témoignages à ce sujet et le fait que l’heure exacte de l’entretien avec la directrice n’était pas connue sont suffisamment convaincants pour acquérir l’intime conviction qu’aucun enregistrement concernant ces événements n’a existé et exclure toute intervention humaine qui aurait exigé de grandes connaissances techniques pour précisément cibler cet instant. L’appréciation du premier juge est convaincante et ne prête pas le flanc à la critique. Il sied encore de préciser qu’il s’agissait d’une coupure qui a duré un court laps de temps, soit de 8h14 à 8h33, et qu’aucun agent de détention n’était au courant qu’un problème d’enregistrement avait eu lieu et n’avait par ailleurs le moyen de le savoir.
4.5
En ce qui concerne les blessures de l’appelant, celles-ci ont été attestées par deux certificats médicaux. Le premier a été établi par le Service de médecine et psychiatrie universitaire suite à une consultation le jour des événements à 17 heures (P. 10/2) et fait état de diverses dermabrasions à la tête, au cou, bras gauche et membres inférieurs, d’une légère douleur au 3
ème
et 4
ème
doigt de la main droite, ainsi que de diverses douleurs à la palpation au niveau du haut du corps. Hormis les dermabrasions constatées au niveau du cou, le second constat médical effectué par l’Unité de Médecine des Violences du CHUV le 22 septembre 2009 fait état des mêmes blessures, mais de manière plus détaillée en ce qui concerne les ecchymoses et abrasions cutanées constatées sur les membres supérieurs et inférieurs. Le premier médecin a également constaté des dermabrasions sur le menton à droite et à gauche, tandis que le deuxième médecin a, lui, constaté une abrasion cutanée dans la région temporale gauche (10/3). On ne peut exclure que des blessures soient apparues, respectivement aient disparues, peu de temps après les faits.
L’appelant a indiqué qu’il était couvert de sang suite à l’intervention des agents. Il ressort des différentes déclarations des prévenus qu’aucun n’a constaté de blessures lorsqu’ils ont quitté la cellule. Certains d’entre eux admettent avoir dû user de beaucoup de force et que la manière, dont il avait été maîtrisé, pouvait avoir provoqué certaines des marques décrites dans les rapports. Juste après l’altercation, le plaignant a eu un entretien avec la directrice et son assistante qui n’ont constaté d’elles-mêmes aucune trace de sang sur lui, ni aucune marque que ce soit, alors même qu’il était vêtu d’un t-shirt blanc et d’un short. Lors de cet entretien, il leur a montré une bosse sur le front. Elles n’ont en particulier pas constaté d’autres blessures sur son visage, alors même que le certificat médical établi le jour même mentionne notamment des dermabrasions sur le menton et au zygoma droite et que ces lésions sont clairement reconnaissables sur les photographies. S’il est vraisemblable que des hématomes n’apparaissent pas tout de suite, tel n’est pas le cas des griffures et plaies. Il ressort en outre du rapport établi le 19 septembre 2009 par M._ que lors de l’audition, à laquelle il a assisté, le détenu a fait le constat de ses blessures devant la directrice, qu’il a relevé une bosse sur le front, des griffures aux avants bras, une éraflure sur le mollet gauche, qu’il avait déjà avant l’altercation, et qu’il a déclaré avoir mal aux parties intimes.
Ainsi l’affirmation de l’appelant, selon laquelle il était couvert de sang est fausse. En outre, il est fait mention dans le rapport du surveillant-chef du 19 septembre 2015 qu’un agent de détention l’avait informé qu’P._ s’était automutilé, observant de nouvelles lésions sur son visage et sur ses genoux (P. 10/14). Ces faits sont vigoureusement niés par le plaignant. Ceci ressort également du rapport de jour de la prison du Bois-Mermet du 18 septembre 2009 qui indique qu’à 14 heures « M. P._ s’automutile en cellule au visage et au genou gauche (probablement dans le but d’exagérer les faits lors de son passage à l’unité de médecine légale pour constat, suite à l’altercation de ce matin en cellule d’attente) ». (P. 36/3, p. 2). Lors de sa première audition, l’agent de détention V._ a en effet déclaré qu’il avait vu l’appelant faire des gestes d’automutilation : « il était debout vers la table et, avec un objet que je ne peux pas décrire, il se frottait le bras ou la jambe [...]. Pour moi, le geste qu’il faisait avait clairement pour but de marquer son bras ou sa jambe. Il n’était pas en train de simplement se gratter ou de se passer un objet anodin sur le corps ».
Au vu de ce qui précède, force est de constater que la plupart des blessures sont compatibles avec les événements, soit avec la fouille énergique, soit avec le corps à corps entre l’agent F._ et le plaignant. Un doute existe toutefois s’agissant notamment de la blessure au visage. Néanmoins, compte tenu du fait que l’appelant avait été surpris auparavant et dans d’autres circonstances en se tapant la tête contre les murs, il paraît des plus vraisemblable que toutes ses blessures ne sont pas uniquement liées à l’altercation. L’automutilation ne peut dès lors être exclue.
4.6
Enfin, en première instance, la taille du tube de pommade a été longuement discutée. Il y a lieu de renvoyer aux considérants du jugement entrepris, dès lors que l’appelant ne fait valoir aucun argument à cet égard et qu’ils sont convaincants.
Qualifications juridiques
5.
L’appelant fait valoir qu’il n’existe aucune base légale autorisant les gardiens du Bois-Mermet à faire usage de la force à l’encontre des détenus. Il se réfère notamment à la jurisprudence européenne.
5.1
5.1.1
Le Tribunal fédéral a examiné récemment la légalité des fouilles dans les prisons et a relevé ce qui suit dans son arrêt du 7 avril 2015 (ATF 141 I 141
c. 6.3) :
« 6.3.1 Au niveau conventionnel, l'art. 3 CEDH prévoit que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Sur le plan constitutionnel, l'art. 7 Cst. prescrit de son côté que la dignité humaine doit être respectée et protégée. A teneur de l'art. 10 al. 3 Cst., la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits [...] Au niveau législatif enfin, l'art. 3 al. 1 CPP rappelle le principe du respect de la dignité humaine. L'art. 234 al. 1 CPP prévoit que la détention provisoire et pour des motifs de sûreté est exécutée, en règle générale, dans des établissements réservés à cet usage et qui ne servent qu'à l'exécution de courtes peines privatives de liberté. L'art. 235 CPP régit l'exécution de la détention; il pose le principe général de proportionnalité (al. 1) et précise que les cantons règlent les droits et les obligations des prévenus en détention (al. 5; sur l'exécution de la détention, voir MATTHIAS HÄRRI, in Basler Kommentar StPO, 2
e
éd. 2014, ad art. 234 et 235 CPP).
6.3.2 S'agissant plus particulièrement de la fouille corporelle, l'art. 85 al. 2 CP précise que le détenu soupçonné de dissimuler des objets interdits sur lui ou à l'intérieur de son corps peut être soumis à une fouille corporelle. Celle-ci doit être exécutée par une personne du même sexe. Si elle implique un déshabillage, elle se fera en l'absence d'autres détenus. L'examen de l'intérieur du corps doit être effectué par un médecin ou un autre membre du personnel médical. [...]
6.3.3 Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, en application de l'art. 15 let. b du Statut du Conseil de l'Europe (RS 0.192.030), a adopté le 11 janvier 2006 la Recommandation Rec (2006) 2 sur les Règles pénitentiaires européennes (RPE). Ces règles prennent notamment en compte le travail mené par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) ainsi que les normes qu'il a développées dans ses rapports généraux, et visent à garantir des conditions de détention qui ne portent pas atteinte à la dignité humaine. La règle 1 pose que les personnes privées de liberté doivent être traitées dans le respect des droits de l'homme, alors que la règle 3 souligne que les restrictions imposées aux personnes privées de liberté doivent être réduites au strict nécessaire et doivent être proportionnelles aux objectifs légitimes pour lesquels elles ont été imposées. La règle 54 traite plus particulièrement des fouilles et des contrôles. Ainsi, le personnel doit suivre des procédures détaillées lorsqu'il fouille des détenus (règle 54.1 let. b). Les situations dans lesquelles ces fouilles s'imposent, ainsi que leur nature, doivent être définies par le droit interne (règle 54.2). Le personnel doit être formé à mener ces fouilles en vue de détecter et de prévenir les tentatives d'évasion ou de dissimulation d'objets entrés en fraude, tout en respectant la dignité des personnes fouillées et leurs effets personnels (règle 54.3). Les personnes fouillées ne doivent pas être humiliées par le processus de fouille (règle 54.4). Les personnes peuvent uniquement être fouillées par un membre du personnel du même sexe (règle 54.5). Aucun examen des cavités corporelles ne peut être effectué par le personnel pénitentiaire (règle 54.6). Un examen intime dans le cadre d'une fouille ne peut être réalisé que par un médecin (règle 54.7).
Ces règles ont été précisées dans un Commentaire établi par le CPT (Commentaire de la Recommandation Rec (2006) 2 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les règles pénitentiaires européennes, in Règles pénitentiaires européennes, 2006, p. 41 ss). Celui-ci précise ainsi que la règle 54 énonce le principe selon lequel chaque prison doit disposer d'un ensemble de procédures bien comprises décrivant en détail les situations dans lesquelles des fouilles s'imposent, les méthodes à employer et leur fréquence. Il n'est pas contesté que les détenus individuels, en particulier ceux soumis à des restrictions de sécurité moyennes ou maximales, doivent également faire l'objet de fouilles régulières en vue de s'assurer qu'ils ne portent pas d'objets pouvant servir lors de tentatives d'évasion, à blesser d'autres personnes, se blesser eux-mêmes, ou d'objets non autorisés tels que les drogues illicites. L'intensité de ces fouilles doit varier en fonction des situations. Elles ne devraient toutefois pas être employées lorsqu'elles ne présentent aucune utilité et ne devraient jamais être utilisées comme une forme de sanction. Le Commentaire précise également que les détenus ne devraient jamais avoir à se dévêtir complètement pour les besoins d'une fouille (cf. Commentaire, p. 81 s.).
Les RPE - et a fortiori leur commentaire - ont le caractère de simples directives à l'intention des Etats membres du Conseil de l'Europe. Cependant, en tant que reflet des traditions juridiques communes à ces Etats, le Tribunal fédéral en tient compte de longue date dans la concrétisation de la liberté personnelle et des autres droits fondamentaux garantis par la Cst. et par la CEDH. On parle à leur propos de "code de la détention pénitentiaire" ou de "soft law", néanmoins relativement contraignante pour les autorités (voir ATF 140 I 125 consid. 3.2 p. 133 et les références).
[...]
6.3.5 La Cour européenne des droits de l'homme a également été amenée à statuer sur les conditions relatives aux fouilles corporelles des détenus. Elle a ainsi considéré comme parfaitement concevable qu'un individu qui se trouve obligé de se soumettre à un traitement de cette nature se sente de ce seul fait atteint dans son intimité et sa dignité, tout particulièrement lorsque cela implique qu'il se dévêtisse devant autrui, et plus encore lorsqu'il lui faut adopter des postures embarrassantes. Un tel traitement n'est pourtant pas en soi illégitime: des fouilles corporelles, même intégrales, peuvent parfois se révéler nécessaires pour assurer la sécurité dans une prison - y compris celle du détenu lui-même -, défendre l'ordre ou prévenir les infractions pénales. Il n'en reste pas moins que les fouilles corporelles doivent, en sus d'être "nécessaires" pour parvenir à l'un de ces buts, être menées selon des "modalités adéquates", de manière à ce que le degré de souffrance ou d'humiliation subi par les détenus ne dépasse pas celui que comporte inévitablement cette forme de traitement légitime. A défaut, elles enfreignent l'art. 3 CEDH. Il va en outre de soi que plus importante est l'intrusion dans l'intimité du détenu fouillé à corps (notamment lorsque ces modalités incluent l'obligation de se dévêtir devant autrui ou lorsque le détenu doit en sus prendre des postures embarrassantes), plus grande est la vigilance qui s'impose (arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme Frérot contre France du 12 juin 2007, n° 38).
Prise isolément, une fouille à corps qui se déroule selon des modalités adéquates et qui est concrètement nécessaire pour assurer la sécurité dans une prison, défendre l'ordre ou prévenir des infractions pénales, n'est pas incompatible avec l'art. 3 CEDH; sauf spécificités tenant à la situation de la personne qui en fait l'objet, l'on ne saurait dire que par principe, une telle fouille implique un degré de souffrance ou d'humiliation dépassant l'inévitable. Cela vaut même lorsqu'il est fait obligation au détenu de se pencher et de tousser en vue d'une inspection anale visuelle "dans les cas précis de recherches d'objet ou de substance prohibés", étant entendu qu'une telle mesure n'est admissible que si elle est absolument nécessaire au regard des circonstances particulières dans lesquelles elle s'inscrit et s'il existe des soupçons concrets et sérieux que l'intéressé dissimule de tels objet ou substance dans cette partie du corps (arrêt précité Frérot contre France du 12 juin 2007, n° 41). A l'inverse, même isolée, une fouille corporelle peut s'analyser comme en un traitement dégradant eu égard à la manière dont elle est pratiquée, aux objectifs d'humiliation et d'avilissement qu'elle peut poursuivre et à son caractère injustifié (arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme Valasinas contre Lituanie du 24 juillet 2001, Recueil CourEDH 2001-VIII p. 425 § 117). La pratique de la fouille corporelle, même selon des modalités "normales", a un effet dégradant et s'analyse en une violation de l'art. 3 CEDH, dès lors qu'elle a lieu chaque semaine, de manière systématique, routinière et sans justification précise tenant au comportement du requérant (arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme Van der Ven contre Pays-Bas du 4 février 2003, Recueil CourEDH 2003-II p. 33 § 62, et Ciupercescu contre Roumanie du 15 juin 2010, n° 117). »
5.1.2
En ce qui concerne l’usage de la force dans le domaine carcéral, la Recommandation Rec (2006)2 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les Règles pénitentiaires européennes prévoit dans le chapitre
Recours à la force
les principes suivants :
64.1 Le personnel pénitentiaire ne doit pas utiliser la force contre les détenus, sauf en cas de légitime défense, de tentative d’évasion ou de résistance active ou passive à un ordre licite et toujours en dernier recours.
64.2 La force utilisée doit correspondre au minimum nécessaire et être imposée pour une période aussi courte que possible.
65. Des procédures détaillées doivent régir le recours à la force et préciser notamment :
a. les divers types de recours à la force envisageables ;
b. les circonstances dans lesquelles chaque type de recours à la force est autorisé ;
c. les membres du personnel habilités à appliquer tel ou tel type de recours à la force ;
d. le niveau d’autorité requis pour décider d’un recours à la force ; et
e. les rapports à rédiger après chaque recours à la force.
66. Le personnel en contact direct avec les détenus doit être formé aux techniques permettant de maîtriser avec le minimum de force les individus agressifs.
67.1 Le personnel des autres services de maintien de l’ordre ne doit intervenir sur des détenus à l’intérieur des prisons que dans des circonstances exceptionnelles.
67.2 Les autorités pénitentiaires et le service de maintien de l’ordre concerné doivent auparavant conclure un accord formel, à moins que ces relations ne soient déjà régies par le droit interne.
67.3 Ledit accord doit stipuler :
a. les circonstances dans lesquelles les membres d’autres services de maintien de l’ordre peuvent entrer dans une prison pour résoudre une situation conflictuelle ;
b. l’autorité dont dispose le service de maintien de l’ordre concerné lorsqu’il est dans la prison et ses relations avec le directeur de l’établissement ;
c. les divers types de recours à la force que les membres de ce service peuvent appliquer ;
d. les circonstances dans lesquelles chaque type de recours à la force est envisageable ;
e. le niveau d’autorité requis pour décider d’un recours à la force ; et
f. les rapports à rédiger après chaque recours à la force.
5.1.3
En droit cantonal, les dispositions légales topiques figurent dans le Règlement sur le statut des détenus avant jugement et des condamnés placés dans un établissement de détention avant jugement et les régimes de détention applicables du 16 janvier 2008 (RSDAJ, RSV 340.02.5) et dans le Règlement de la prison de Bois-Mermet à Lausanne du 9 septembre 1977 (R-BM, 340.11.2). Le RSDAJ prévoit notamment à son art. 5 que la détention doit être organisée de manière à garantir la sécurité. L’art. 77 RSDAJ réglemente la fouille de personnes et d’objets. L’ordre de fouille est de la compétence de la direction de l’établissement. Cependant l’art. 78 RSDAJ, qui réglemente la fouille des détenus en des circonstances particulières (déplacements), ne prévoit pas expressément que cette fouille relève de la compétence de la direction de l’établissement. Le R-BM mentionne les missions générales du surveillant-chef et des surveillants. Les art. 111 R-BM pour le surveillant-chef et 141 R-BM pour les surveillants leur imposent de veiller à l’application des dispositions réglementaires. L’art. 123 R-BM confère au surveillant-chef la responsabilité des mesures de sûreté nécessaires à la garde des détenus, d’organiser et de surveiller leurs déplacements à l’intérieur de l’établissement. L’art. 142 R-BM rappelle aux surveillants leur obligation d’appliquer les mesures de sûreté nécessaires à la garde des détenus. (...) Quant à l’usage de la contrainte pour l’exercice d’une telle fouille, il n’est pas réglementé, notamment pas subordonné à un ordre exprès de la direction de l’établissement, et pour cause, dans la mesure où il découle naturellement de l’une des missions premières du personnel de tout établissement pénitentiaire, soit de maintenir l’ordre et la sécurité. On peut s’agissant de cette mission faire le parallélisme avec l'art. 24 de la loi sur la police cantonale (RSV 131.11, LPol), qui interdit au fonctionnaire de police de faire subir à quiconque un outrage ou des mauvais traitements, mais prévoit que la police peut, pour l'accomplissement de son service, utiliser la force, dans une mesure proportionnée aux circonstances, lorsqu'il n'existe pas d'autre moyen d'agir. La mission des agents de détention ne pourrait donc tout simplement pas être remplie si l’usage de la contrainte était systématiquement subordonné à validation hiérarchique, que l’intervention soit urgente ou non (CREP 22 mars 2013/361 c. 3 c).
5.2
Ainsi, il y a lieu de retenir que l’art. 85 al. 2 CP, constitue non seulement la base légale permettant de procéder à des fouilles sur des détenus, mais encore à les imposer contre leur volonté. Au demeurant la Recommandation sur les règles pénitentiaires européennes admet que les agents de détention aient recours à la force et à la contrainte dans le cadre de leur mission. Certes, ce règlement et son commentaire européen prévoient que chaque prison doit disposer d’un ensemble de procédures décrivant en détail notamment les méthodes de fouilles et l’usage de la violence. La réglementation vaudoise n’est à cet égard pas exhaustive. Toutefois, cela n’implique pas, comme le voudrait l’appelant, qu’on se trouve dans un cas d’absence de base légale qui entraînerait que l’usage de la force soit exclu et que les fouilles ne pourraient être réalisées qu’avec l’accord du détenu lui-même.
Les gardiens sont détenteurs de la puissance publique et par conséquent légitimés à faire usage de contrainte dans le cadre de leur mission, ceci en respectant le principe de proportionnalité, principe qui est au demeurant rappelé à l’art. 74 CP s’agissant de l’exécution des peines privatives de liberté. Sauf à vouloir vider de son sens leur mission sécuritaire, que ce soit pour protéger les tiers, la société ou les détenus eux-mêmes, il va de soi que les agents de détention peuvent faire usage de la force. Une fouille effectuée avec l’usage de la contrainte n’est ainsi pas illicite en elle-même. L’appel doit être rejeté sur ce point.
6.
L’appelant fait valoir que les agents de détention ont commis un abus d’autorité au sens de l’art. 312 CP.
6.1
Aux termes de l'art. 312 CP, les membres d'une autorité et les fonctionnaires qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, ou dans le dessein de nuire à autrui, auront abusé des pouvoirs de leur charge, seront punis d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
Cette disposition punit l'abus d'autorité, soit l'emploi de pouvoirs officiels dans un but contraire à celui recherché. Elle protège, d'une part, l'intérêt de l'Etat à disposer de fonctionnaires loyaux qui utilisent les pouvoirs qui leur ont été conférés en ayant conscience de leur devoir et, d'autre part, l'intérêt des citoyens à ne pas être exposés à un déploiement de puissance étatique incontrôlé et arbitraire. L’incrimination pénale doit être interprétée restrictivement, compte tenu de la formule très générale qui définit l’acte litigieux (ATF 127 IV 209 c. 1b; TF 6S.171/2005 du 30 mai 2005 c. 2.1 ; Heimgartner, Basler Kommentar, Strafrecht II, 3
e
éd. Bâle 2013, n. 4 ss ad art. 312 CP).
Sur le plan objectif, cette infraction suppose que l’auteur soit un membre d’une autorité ou un fonctionnaire au sens de l’art. 110 al. 3 CP, qu’il ait agi dans l’accomplissement de sa tâche officielle et qu’il ait abusé des pouvoirs inhérents à cette tâche (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, Berne 2010, n. 1 ss ad art: 312 CP). La jurisprudence admet que l'auteur abuse de son autorité lorsqu'il use illicitement des pouvoirs qu'il détient de sa charge, c'est-à-dire lorsqu'il décide ou contraint en vertu de sa charge officielle dans un cas où il ne lui était pas permis de le faire. L'infraction peut aussi être réalisée lorsque l'auteur poursuit un but légitime, mais recourt, pour l'atteindre, à des moyens disproportionnés. Une violation insoutenable des pouvoirs confiés n’est en revanche pas nécessaire. (ATF 127 IV 209 c. 1a/aa; ATF 113 IV 30 c. 1; 104 IV 22 c. 2 ; Stratenwerth/Bommer, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil II, 7
ème
éd., Berne 2013, n. 10 ad § 59). La jurisprudence a récemment précisé qu'on ne peut généralement limiter, en matière de violence physique ou de contrainte exercée par un fonctionnaire, le champ d'application de l'art. 312 CP aux cas où l'utilisation des pouvoirs officiels a pour but d'atteindre un objectif officiel. Ainsi, au moins en matière de violence et de contrainte exercées par un fonctionnaire, l'application de l'art. 312 CP dépend uniquement de savoir si l'auteur a utilisé ses pouvoirs spécifiques, s'il a commis l'acte qui lui est reproché sous le couvert de son activité officielle et s'il a ainsi violé les devoirs qui lui incombent. L'utilisation de la force ou de la contrainte doit apparaître comme l'exercice de la puissance qui échoit au fonctionnaire en vertu de sa position officielle (ATF 127 IV 209 c. 1b).
Du point de vue subjectif, l’infraction suppose un comportement intentionnel, au moins sous la forme du dol éventuel. L’auteur doit avoir conscience de son statut et accepter l’éventualité d’abuser des pouvoirs de sa charge. A cette condition s’ajoute un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes alternatives, soit le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite ou le dessein de nuire à autrui (Corboz, op. cit., n. 9 s. ad art. 312 CP; TF 6B_688/2010 du 21 octobre 2010, c. 2.1).
6.2
6.2.1
En l’espèce, les gardiens étaient à l’évidence fondés à vérifier quel objet le plaignant avait dans sa poche et à le contrôler. Pour des raisons de sécurité, ils ne pouvaient pas se contenter simplement des déclarations du détenu, même s’il n’avait auparavant pas fait preuve de violence physique et qu’il n’était pas considéré comme dangereux. Cette vérification s’impose pour tout détenu, pour des raisons de sécurité évidentes, mais elle s’impose encore plus pour un détenu oppositionnel, qui s’en était déjà pris auparavant au matériel et qui devait précisément être entendu dans le cadre d’une enquête pour déprédation de celui-ci. Aucune relation de confiance et aucun dialogue ne pouvait quoiqu’il en soit être noué avec lui. Enfin, l’appelant avait commencé une grève de la faim, ce qui démontre à tout le moins qu’il était très révolté et prêt à mettre en péril sa propre intégrité physique. Il a par ailleurs lui-même admis devant l’autorité de première instance qu’il savait que la vérification de l’objet faisait partie de la procédure habituelle de contrôle. La question de savoir s’il pouvait ou non détenir ce tube dans la cellule d’attente et lors de son entretien avec la directrice n’est ainsi pas déterminante.
En définitive, au vu du comportement d’P._ depuis son incarcération et le jour des événements, et des tentatives infructueuses des agents de détention de parvenir, par la parole et par des avertissements, à ce qu’il remette de son propre chef l’objet qu’il détenait dans sa poche pour contrôle, les agents étaient fondés à le fouiller contre son gré et en conséquence à faire usage de la force.
6.2.2
Reste à déterminer si l’usage de celle-ci était proportionné.
C’est en raison du comportement d’P._, qui s’est opposé et a résisté très vigoureusement, que les agents de détention ont été obligés de le maintenir à plusieurs. Dans ces circonstances, ils n’avaient pas d’autre choix que de le contraindre en le maintenant fortement, ce d’autant plus qu’il s’est débattu et a tenté d’asséner des coups. Les marques que présentait l’appelant sur les poignets, les bras et les jambes sont compatibles avec des prises faites sur une personne qui résiste. En outre, l’appelant s’en est pris à l’agent de détention F._ en le saisissant par le col de son polo et en l’empêchant de sortir de la cellule d’attente. L’agent de détention ainsi que le détenu sont tombés au sol. Cette chute a également pu entraîner des marques sur la tête et sur tout le corps de l’appelant. Le coup de pied que M._ lui a alors asséné dans les parties intimes n’avait pour seul but que de lui faire lâcher prise pour libérer son collègue. Au demeurant, si l’on peut concevoir que celui-ci a été douloureux, voire très douloureux, on ignore s’il a laissé des traces dès lors que le prévenu a refusé d’être examiné. Or, vu la situation et dans la mesure où P._ avait à ce moment physiquement le dessus, qu’il était fou de rage, qu’il fallait secourir un agent de détention en difficulté et au contact physique avec un détenu, le fait d’asséner un coup qui n’a eu comme seul but de faire lâcher prise était licite. Au demeurant, il sied de préciser que le détenu ne s’est pas plaint de douleurs dans les parties intimes auprès des médecins qu’ils l’ont ausculté quelques heures après les faits, ni lors de la consultation à l’Unité de Médecine des Violences du CHUV le 22 septembre 2009.
6.2.3
Enfin, s’agissant de l’élément subjectif de l’infraction d’abus d’autorité, celui-ci n’est pas réalisé dans le cas d’espèce dès lors qu’il n’est nullement établi qu’à un quelconque moment, les cinq agents de détention ont intentionnellement soumis le plaignant à des mauvais traitements pour lui nuire.
Au vu de ce qui précède, le comportement de F._, V._, M._, S._, X._ ne tombe pas sous le coup de l’art. 312 CP. L’appel doit être rejeté sur ce point.
7.
L’appelant conclut à la condamnation des cinq agents de détention pour lésions corporelles simples qualifiées.
7.1
7.1.1
Selon l’art. 123 CP, celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une autre atteinte à l’intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire (ch.1). La peine sera une peine privative de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire et la poursuite aura lieu d’office, s’il s’en est pris à une personne hors d’état de se défendre (ch. 2 al. 2).
L'art. 123 CP réprime les lésions du corps humain ou de la santé qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Cette disposition protège l'intégrité corporelle et la santé tant physique que psychique. Elle implique une atteinte importante aux biens juridiques ainsi protégés. A titre d’exemples, la jurisprudence cite l’administration d’injections, la tonsure totale et tout acte qui provoque un état maladif, l’aggrave ou en retarde la guérison, comme les blessures, les meurtrissures, les écorchures ou les griffures, sauf si ces lésions n’ont pas d’autres conséquences qu’un trouble passager et sans importance du sentiment de bien-être (ATF 119 IV 25 c. 2a p. 26 ; 107 IV 40 c. 5c p. 42 ; 103 IV 65 c. 2c p. 70).
Les voies de fait, réprimées par l’art. 126 CP, se définissent comme des atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles, ni dommage à la santé. Une telle atteinte peut exister même si elle n’a causé aucune douleur physique (ATF 119 IV 25 c. 2a p. 26 ; 117 IV 14 c. 2a p. 15 ss).
La distinction entre les lésions corporelles et les voies de fait peut se révéler délicate, notamment lorsque l’atteinte est limitée à des meurtrissures, des écorchures, des griffures ou des contusions. Ainsi, une éraflure au nez avec contusion a été considérée comme une voie de fait ; de même une meurtrissure au bras et une douleur à la mâchoire sans contusion. En revanche, un coup de poing au visage donné avec une violence brutale propre à provoquer d’importantes meurtrissures, voire une fracture de la mâchoire, des dents ou de l’os nasal, a été qualifié de lésion corporelle ; de même de nombreux coups de poing et de pied provoquant chez l’une des victimes des marques dans la région de l’œil et une meurtrissure de la lèvre inférieure et chez l’autre une meurtrissure de la mâchoire inférieure, une contusion des côtes, des écorchures de l’avant-bras et de la main (ATF 119 IV 25 c. 2a p. 26/27). La question peut parfois être résolue de manière satisfaisante par l’application de l’art. 123 ch. 1 al. 2 CP, qui permet une atténuation libre de la peine dans les cas de peu de gravité (cf. ATF 119 IV 25 c. 2a p. 27).
Dans les cas limites, il faut tenir compte de l’importance de la douleur provoquée, afin de déterminer s’il s’agit de lésions corporelles simples ou de voies de fait. Comme les notions de voies de fait et d’atteinte à l’intégrité corporelle, qui sont décisives pour l’application des art. 123 et 126 CP, sont des notions juridiques indéterminées, la jurisprudence reconnaît, dans ces cas, une certaine marge d’appréciation au juge du fait car l’établissement des faits et l’interprétation de la notion juridique indéterminée sont étroitement liés. Dans ces circonstances, le Tribunal fédéral s’impose une certaine réserve dans la critique de l’interprétation faite par l’autorité cantonale, dont il ne s’écarte que si cela s’avère nécessaire (ATF 119 IV 25 c. 2a p. 27 et les arrêts cités).
Enfin, il s’agit d’infractions de nature intentionnelle, le dol éventuel étant toutefois suffisant (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 12 ad art. 123 CP et n. 8 ad art. 126).
7.1.2
En vertu de l’art. 14 CP, quiconque agit comme la loi l’ordonne ou l’autorise se comporte de manière licite, même si l’acte est punissable en vertu du présent code ou d’une autre loi.
La licéité de l'acte est, en tous les cas, subordonnée à la condition qu'il soit proportionné à son but (ATF 107 IV 84 c. 4). Il faut donc se demander si le préjudice porté aux droits de tiers n'excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre le but qui le justifie (ATF 107 IV 84, précité, c. 4 et 4a; ATF 94 IV 5 c. 1 et 2a). Le respect de la proportionnalité est une question de droit, qui relève avant tout de l'appréciation, laquelle doit intervenir en se replaçant dans les circonstances concrètes du cas, en tenant compte de la justification et du type de la mesure prise, des moyens et du temps dont disposait l'intéressé selon la représentation qu'il avait des faits au moment où il a agi, de la réalité du terrain, de l'urgence ou encore de l'état de tension dans lequel l'auteur pouvait être légitimement plongé (TF 6B_930/2008 du 15 janvier 2009 c. 3.1 et la référence citée). Ainsi, les autorités judiciaires ne doivent pas se livrer à des raisonnements a posteriori trop subtils pour établir si l'auteur des mesures de défense n'aurait pas pu ou dû se contenter d'avoir recours à des moyens moins dommageables (Monnier ; in : Roth/Moreillon [éd.], Commentaire romand, Code pénal I, Art. 1-110 CP, Bâle 2009, n. 5 ad art. 14-18 CP et les références citées).
7.2
Il est indéniable que le plaignant a subi des lésions corporelles simples, respectivement des voies de fait, en partie du moins liées à l’intervention des agents de détention. Néanmoins, compte tenu de ce qui a déjà été exposé ci-dessus, l’usage de la force pour procéder à la fouille reposait sur une base légale formelle suffisante. En outre, l’usage de la force était proportionné au vu du comportement oppositionnel de l’appelant au moment des faits. Dans ces circonstances, à l’instar du Tribunal de première instance, l’art. 14 CP doit être appliqué dans le cas d’espèce. L’appel est rejeté sur ce point.
8.
L’appelant conclut que les agents de détention soient condamnés pour agression au sens de l’art. 134 CP.
8.1
Aux termes de l'art. 134 CP, celui qui aura participé à une agression dirigée contre une ou plusieurs personnes au cours de laquelle l'une d'entre elles ou un tiers aura trouvé la mort ou subi une lésion corporelle sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
Pour que les éléments constitutifs de l'agression, qui est une infraction de mise en danger, soient réunis, il faut qu'une ou plusieurs des personnes agressées soient blessées ou tuées. Il s'agit là d'une condition objective de punissabilité. Cela signifie que l'auteur se rend passible d'une peine du seul fait de sa participation à l'agression. Par conséquent, il suffit de prouver l'intention de l'auteur de participer à l'agression, sans qu'il ne soit nécessaire d'établir qu'il a voulu donner la mort ou provoquer des lésions corporelles (ATF 118 IV 227 c. 5b).
8.2
Au vu des faits retenus dans les considérants qui précèdent, la Cour de céans se rallie à l’appréciation du Tribunal de première instance, selon laquelle cette infraction n’est pas réalisée. L’appel doit être rejeté sur ce point.
9.
9.1
En définitive, l’appel d’P._ doit être rejeté et le jugement attaqué confirmé. Vu l’issue de la cause, les frais de la procédure d'appel, constitués de l'émolument de jugement, par 4’660 fr. (art. 21 al. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]) doivent être mis à la charge de l’appelant qui succombe (art. 428 al. 1 CPP).
9.2
L'acquittement de M._, F._, V._, S._, X._ ayant été confirmé, ces derniers, assistés d’un défenseur de choix, ont chacun droit à une indemnité pour leurs frais de défense (art. 429 al. 1 let. a CPP). Les indemnités suivantes doivent être allouées : 4'424 fr. 50, TVA et débours inclus, à M._ ; 4'795 fr. 20, TVA et débours inclus, à F._ ; 4'536 fr., TVA et débours inclus, à V._ ; 5'032 fr. 80, TVA et débours inclus, à S._ ; 4'861 fr. 05, TVA et débours inclus, à X._. Ces indemnités seront mises à la charge de l’appelant (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c671f3c2-84fc-4780-a6c7-d1924f813e78 | En fait :
A.
Par jugement du 15 janvier 2014, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré X._ de l’accusation de menaces (I), a constaté que X._ s’était rendue coupable de lésions corporelles simples et injure (II), a condamné X._ à la peine pécuniaire de 60 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 20 fr. (III), a suspendu l’exécution de la peine mentionnée sous chiffre III avec un délai d’épreuve de deux ans (IV), a donné acte à A.W._ de ses réserves civiles (V), a mis les frais par 3'882 fr. 20 à la charge de X._, y compris l’indemnité due à son défenseur d’office, Me Ana Rita Perez, dont le montant a été fixé à 2'507 fr. 20, débours et TVA compris (VI), a dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité allouée à Me Ana Rita Perez ne serait exigible que pour autant que la situation financière de X._ le permette (VII) et a dit qu’il n’y avait pas lieu à indemnité au sens de l’art. 429 CPP (VIII).
B.
Le 15 janvier 2014, X._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel du 18 février 2014, elle a conclu, avec suite de frais et dépens, principalement, à la réforme dudit jugement en ce sens qu’elle est libérée des accusations de lésions corporelles simples et injure, et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à l’autorité de première instance pour jugement dans le sens des considérants.
Par déterminations du 26 février 2014, le Ministère public de l'arrondissement de La Côte a conclu au rejet de l’appel et à la confirmation du jugement du 15 janvier 2014.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
X._ est née le [...] 1969 à [...], au Portugal, pays dont elle est ressortissante. Elle a suivi sa scolarité au Portugal. En 1993, elle s’est mariée avec S._. Le couple a eu trois enfants qui sont aujourd’hui âgés de 18, 14 et 6 ans. La famille est venue s’installer en Suisse en 2011. En août 2012, les époux se sont séparés. Depuis lors, X._ bénéficie de l’aide sociale et perçoit un revenu d’insertion de 1’100 francs. Elle exerce en outre la profession de femme de ménage auprès de [...] et perçoit un revenu mensuel brut de l’ordre de 800 fr. pour cette activité. Elle ne touche pas de pension alimentaire. Elle n’a ni dettes, ni poursuites.
Son casier judiciaire suisse est vierge.
2.
Le 5 janvier 2013 vers 20h00, à Nyon, au [...][...], A.W._ a accompagné le mari de la prévenue, S._, alors qu’il venait récupérer des affaires qui lui appartenaient dans la cave de son épouse dont il vit séparé. Au moment où A.W._ et S._ se rendaient à la cave, ils ont rencontré X._ qui s’est très vite énervée. Celle-ci a immédiatement pris à partie verbalement A.W._ et l’a injuriée en la traitant de « pute » et « salope ». Puis, elle lui a violemment tiré les cheveux vers l’avant et lui a assené une gifle.
A.W._, duquel il ressort qu’elle souffrait de douleurs à la palpation du processus épineux de C7 et de la musculature paravertébrale au niveau de T6 et de C3. Le lendemain, elle s’est rendue chez son médecin, le Dr [...], qui a indiqué, dans des rapports datés des 5 et 30 septembre 2013, avoir constaté que la patiente souffrait de douleurs au niveau de la colonne cervicale, que la flexion et les rotations de la tête étaient douloureuses et limitées et que la patiente présentait également des tuméfactions au niveau du visage. Il a posé un diagnostic d’ « entorse cervicale assez grave », précisant qu’il n’avait pas eu connaissance de troubles similaires chez cette patiente avant le 7 janvier 2013. A.W._ a subi une incapacité de travail depuis le 7 janvier 2013, avec reprise à 50% dès le 21 janvier 2013, puis à 100% le 1er mars 2013, après une série de 24 séances de physiothérapie.
A.W._ a déposé plainte le 6 janvier 2013. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de X._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L’appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d’appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L’appel tend à la répétition de l’examen des faits et au prononcé d’un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L’immédiateté des preuves ne s’impose toutefois pas en instance d’appel. Selon l’art. 389 al. 1 CPP, la procédure d’appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d’appel administre, d’office ou à la demande d’une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
Invoquant une constatation erronée des faits, l’appelante critique tout d’abord le fait que le tribunal ait retenu le témoignage d’T._. En particulier, elle conteste que le témoin, qui se serait trouvé dans sa voiture en stationnement devant l’entrée principale de l’immeuble au moment des faits, ait pu assister à la scène qui s’est déroulée près des caves. Elle considère donc que l’autorité de première instance ne pouvait pas se fonder sur le témoignage d’T._ pour admettre les infractions de lésions corporelles simples et d’injure et qu’en l’absence de témoignage fiable confirmant les déclarations de la plaignante, le principe
in dubio pro reo
aurait dû conduire à son acquittement. A l’appui de cette affirmation, X._ a produit, à l’audience d’appel, un lot de photographies de l’entrée et du hall de l’immeuble (P. 36).
3.1
A teneur de l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a). Dans cette mesure, la présomption d'innocence se confond avec l'interdiction générale de l'arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (TF 6B_216/2010 du 11 mai 2010 c. 1.1.1 et 1.1.2 et la jurisprudence citée).
3.2
S’agissant des faits décrits sous chiffre 2 ci-dessus, la culpabilité de l’appelante doit être retenue sur la base des éléments qui suivent :
Tant la lecture du dossier que l’audience d’appel du 26 juin 2014 ont permis de mettre en exergue le climat houleux qui règne entre les parties. A cet égard, on peut d’ailleurs lire ce qui suit dans un rapport d’évaluation du Service de protection de la jeunesse du 30 avril 2013 (P : 11, p. 5) :
« Madame [X._] n’a pas toujours été adroite envers son mari et l’amie de celui-ci (ndlr A.W._), elle a débordé face aux agissements de ces derniers. Notons toutefois qu’ils ont aussi provoqué et critiqué Madame à plusieurs reprises ».
S’agissant en particulier des événements du 5 janvier 2013, les versions de X._ et d’A.W._ divergent. X._ a admis que, le jour des faits, A.W._ et S._ s’étaient présentés devant son immeuble pour récupérer des clés de voiture ainsi que des sièges qui se trouvaient dans sa cave et qu’elle avait eu une altercation verbale avec la plaignante. Toutefois, elle a toujours contesté s’en être prise physiquement à la plaignante et l’avoir traitée de « pute » ou de « salope », comme l’a soutenu A.W._.
Plusieurs témoins ont été entendus à l’audience de première instance. T._ a indiqué être une connaissance d’A.W._ et avoir assisté à l’altercation entre les deux femmes le 5 janvier 2013 depuis sa voiture, alors qu’elle était parquée sur un parking provisoire proche du bâtiment. Elle a affirmé avoir entendu X._ insulter A.W._, puis l’avoir vue la pousser, la gifler et lui arracher les cheveux. Elle a ajouté qu’en s’approchant de la victime pour voir si elle avait besoin d’aide, elle avait pu constater que « des touffes de cheveux tombaient le long de son corps ». Le juge de première instance a également procédé à l’audition de B.W._, fille d’A.W._. Celle-ci n’a pas assisté à l’altercation, mais elle a rejoint sa mère à l’Hôpital de Nyon le soir- même. Elle a expliqué que lorsqu’elle avait passé ses doigts dans les cheveux de sa mère, une poignée de ceux-ci lui était restée dans la main.
L’appelante soutient qu’il n’est pas possible qu’T._ ait pu assister à l’altercation depuis sa voiture et que son témoignage doit dès lors être écarté. Certes, il existe un doute sur le lieu exact où s’est déroulée l’altercation. Toutefois, il ressort des différentes dépositions des deux femmes que celles-ci se sont rencontrées quelque part entre le hall d’entrée de l’immeuble et le couloir qui mène aux caves qui se trouvent sur le même étage que le hall, le lieu exact ayant finalement peu d’importance vu ce qui suit. En effet, le soir des faits, en hiver vers 20 heures, il faisait nuit et les protagonistes avaient assurément allumé la lumière du hall. Dès lors, et contrairement à ce que soutient l’appelante, il n’était pas impossible pour le témoin T._ qui se trouvait dans sa voiture en stationnement devant l’immeuble – soit à quelques mètres de la porte d’entrée selon les photos produites par l’appelante à l’audience d’appel – d’observer ce qui se passait tant dans le hall de l’immeuble que dans le couloir qui mène aux caves. C’est donc à juste titre que l’autorité de première instance a accordé du crédit à ce témoignage.
Enfin, la version de l’appelante ne permet pas d’expliquer les lésions dont a souffert la plaignante et qui ont pourtant été constatées par les médecins de l’Hôpital de Nyon, ainsi que parT._ et B.W._.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, l'appréciation du tribunal, qui est fondée sur plusieurs éléments matériels, n'est pas critiquable au point de faire naître un doute concret. Comme on l’a vu, il y a en effet des éléments objectifs suffisants permettant de retenir que l’appelante a bien injurié et agressé physiquement la plaignante. Le moyen tiré d’une appréciation erronée des preuves est donc mal fondé et doit être rejeté.
4.
Cela étant, il reste à qualifier les actes incriminés.
4.1.
L’appelante conteste la qualification juridique de lésions corporelles simples, soutenant que le lien de causalité adéquate entre la gifle ou le tirage de cheveux et l’entorse cervicale dont a souffert A.W._ ne saurait être prouvé et que, tout au plus, les lésions constatées à l’Hôpital de Nyon le jour des faits relèveraient des voies de fait.
4.2
On doit qualifier de voies de fait, au sens de l'art. 126 CP, les atteintes physiques, même si elles ne causent aucune douleur, qui excèdent ce qu'il est admis de supporter selon l'usage courant et les habitudes sociales, et qui n'entraînent ni lésions corporelles, ni atteinte à la santé; un coup de poing doit ainsi être qualifié de voies de fait pour autant qu'il n'entraîne aucune lésion du corps humain ou de la santé (ATF 119 IV 25 c. 2a; 117 IV 14 c. 2a/bb et cc).
Lorsque l'atteinte à l'intégrité corporelle se manifeste par des meurtrissures, écorchures, griffures et contusions provoquées par des coups ou d'autres causes du même genre, la distinction entre les voies de fait et les lésions corporelles simples est délicate (ATF 125 II 265 c. 2e/bb p. 272; 119 IV 25 c. 2a p. 26). Il faut alors tenir compte de l'importance de la douleur provoquée afin de déterminer s'il s'agit de lésions corporelles simples ou de voies de fait (ATF 119 IV 25 c. 2a p. 27; 117 IV 1 c. 4a; 107 IV 40 c. 5c). En tous les cas, un hématome, c'est-à-dire la rupture de vaisseaux sanguins avec épanchement sous-cutané, qui laisse normalement des traces pendant plusieurs jours, doit être qualifié de lésion corporelle simple au sens de l'art. 123 CP, même si une telle lésion du corps humain est superficielle et de peu d'importance (ATF 119 IV 25 c. 2a p. 27).
4.3
Il est établi que X._ a violemment tiré les cheveux d’A.W._, au point que la victime a perdu des touffes de cheveux. En agissant de la sorte, l’appelante a assurément très brutalement tiré la tête de la plaignante et un tel geste est susceptible de provoquer les lésions décrites dans les rapports médicaux, soit des douleurs au niveau de la colonne et une entorse cervicale assez grave. A cet égard, il n’y a pas lieu de retenir l’argument de l’appelante selon lequel ces lésions préexistaient à l’altercation du 5 janvier 2013, dès lors que le Dr [...] a indiqué dans son dernier rapport qu’il n’avait pas eu connaissance de troubles similaires chez sa patiente avant le 7 janvier 2013.
Compte tenu de ce qui précède, les lésions constatées – qui ont engendré une incapacité de travail de quinze jours à 100% puis d’un mois à 50%, ainsi qu’une série de vingt-quatre séances de physiothérapie – sont bien constitutives de lésions corporelles simples au sens de l’art. 123 ch. 1 CP et il est manifeste qu’elles ont été provoquées par le comportement de l’appelante, de sorte que le lien de causalité est réalisé.
5.
L’appelante ne conteste pas la peine en tant que telle. Examinée d’office, la Cour d’appel conclut que celle-ci a été fixée en application des critères légaux à charge et à décharge et conformément à la culpabilité de X._. L’octroi du sursis et la durée du délai d’épreuve sont également conformes aux règles légales. La peine et le délai d’épreuve doivent dès lors être confirmés. Enfin, les frais de première instance doivent être mis à la charge de la prévenue condamnée (art. 426 al. 1, 1ère phrase, CPP).
6.
En définitive, l’appel de X._ est rejeté et le jugement rendu le 15 janvier 2014 par le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne est confirmé.
6.1
Vu l'issue de l’appel, les frais de la procédure d'appel doivent être mis à la charge de la prévenue, qui succombe entièrement (art. 428 al. 1, 1
re
phrase, CPP).
Outre l’émolument d’arrêt, par 1’910 fr., les frais d’appel comprennent l’indemnité allouée au défenseur d’office de la prévenue pour les opérations liées à la procédure d'appel (cf. les art. 135 al. 2 et 422 al. 2 let. a CPP; art. 2 al. 2 ch. 1 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]).
L'indemnité allouée au défenseur d'office de l’appelante doit être fixée à 1'155 fr. 60, en tenant compte d'une durée d'activité utile de cinq heures d’avocat breveté – à savoir une heure d’étude du jugement, une heure de conférence avec sa cliente, deux heures de préparation du mémoire et de l’audience et une heure d’audience d’appel – plus les débours par 170 fr., dont 120 fr. au titre de frais de vacation, TVA en sus (art. 135 al. 1 CPP).
La prévenue ne sera tenue de rembourser à l’Etat l’indemnité en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP).
Il n’y a pas lieu à indemnité au sens de l’art. 429 CPP.
6.2
L'art. 433 al. 1 CPP prévoit que la partie plaignante peut demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure, soit lorsqu'elle obtient gain de cause, soit lorsque le prévenu est astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 CPP. A.W._ S'agissant de la quotité de l'indemnité à allouer, l’indemnité visée par l’art. 433 CPP doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule et englober la totalité des coûts de défense (TF 6B_392/2013 du 4 novembre 2013, c. 2.3). A la suite de l’arrêt du Tribunal fédéral du 4 novembre 2013 (TF 6B_392/2013), le Tribunal cantonal a adopté le 18 février 2014 une modification du tarif des frais judiciaires pénaux (RSV 312.03.1; FAO du 28 février 2014, p. 3), entrée en vigueur le 1
er
avril 2014.
En l'espèce, le conseil d'office d’A.W._ a produit aux débats d'appel sa liste des opérations faisant état d’un total de 4 heures, hors temps d’audience (P. 37) à un tarif horaire de 450 fr. de l’heure. Compte tenu de la nature de la cause et de la connaissance du dossier acquise en première instance, le temps consacré à la présente procédure doit être arrêté à 3 heures, audience comprises, à un tarif de 250 fr. de l’heure en application du tarif des frais judiciaires pénaux. Il convient encore d’ajouter 250 fr. de débours et vacation. Partant, c'est un montant de 1’080 fr., TVA et débours compris, qui doit être alloué à A.W._ à titre d’indemnité de l’art. 433 CPP pour la procédure d’appel. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c6ab2d67-c064-4433-96da-e1149cc9c5aa | En fait :
A.
Par jugement du 10 juillet 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a admis l’opposition formée par R._ contre l’ordonnance pénale rendue le 19 décembre 2012 par le préfet du district de la Broye-Vully (I), l’a libéré du chef de prévention de violation simple des règles de la circulation routière (II), a refusé de lui allouer une indemnité pour ses frais de défense nécessaire (III) et a laissé les frais de justice à la charge de l’Etat (IV).
B.
Par annonce du 16 juillet 2013, puis par déclaration d’appel du 26 juillet 2013, R._ a formé appel contre ce jugement, concluant, avec suite de frais et dépens, à la modification du chiffre III du jugement attaqué en ce sens qu’une indemnité équitable lui est allouée pour ses frais de défense au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP.
Dans son courrier du 16 août 2013, le Ministère public a déclaré ne pas présenter une demande de non-entrée en matière ou déposer d’appel joint.
Le 23 août 2013, la Présidente de la Cour de céans a informé R._ que son appel serait traité en procédure écrite et que, s’agissant d’une contravention, la cause ressortirait de la compétence d’un juge unique.
Par mémoire motivé déposé dans le délai prolongé au 30 septembre 2013, R._ a conclu à l’octroi de la somme de 6'785 fr. 80 à titre d’indemnité équitable au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP pour ses opérations de première et seconde instances.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
R._ est né le [...] 1932 à [...] en Suisse. Il a été élevé par ses deux parents et a obtenu, à la suite de son certificat d’études secondaire, un CFC de mécanicien automobile. Au long de sa carrière professionnelle, il a obtenu différents permis de conduire, soit automobile, camion, moto et moniteur d’auto-école. Il a également obtenu une maîtrise fédérale de mécanicien automobile et a œuvré durant de nombreuses années dans cette branche. Actuellement à l’AVS, R._ poursuit une activité d’administrateur de la société [...] SA. Il s’est marié en [...]. Il gagne 1'400 fr. par mois pour son activité d’administrateur, 900 fr. à titre de deuxième pilier et environ 1'600 fr. de l’AVS.
Son casier judiciaire, ainsi que le registre des mesures administratives en matière de circulation routière (ci-après : ADMAS) ne mentionnent aucune inscription.
2.
Le 21 novembre 2012, à 18h00, R._ circulait sur la route principale d’Avenches, à Cudrefin au volant du véhicule immatriculé [...]. A un embranchement, après le passage d’une colonne de véhicules venant en sens inverse, l’intéressé a bifurqué à gauche ; un choc s’est produit avec un véhicule automobile venant en sens inverse.
Par ordonnance pénale du 19 décembre 2012, le Préfet du district de la Broye-Vully a constaté que R._ s’était rendu coupable de violation simples des règles de la circulation routière (I), l’a condamné à une amende de 400 fr. (II), a dit qu’à défaut de paiement de l’amende, la peine privative de liberté de substitution sera de quatre jours (III) et a mis les frais, par 250 fr., à sa charge (IV). Le prononcé préfectoral retient une violation de l’art. 36 al. 3 LCR, ainsi que des art. 3 al. 1 et 14 al. 1 OCR, car il était reproché au prévenu d’avoir circulé sans vouer toute son attention à la route et à la circulation et, de ce fait, n’avoir pas accordé une priorité, en obliquant à gauche, à un véhicule venant en sens inverse.
R._ s’est opposé le 28 décembre 2012 à cette ordonnance. Il a ensuite fait appel à un avocat de choix ; il a conclu devant le premier juge à son acquittement et à l’octroi d’une indemnité au sens de l’art. 429 CPP d’un montant de 3'897 fr. 20 pour ses frais de défense.
Le Tribunal de police de la Broye et du Nord vaudois a mis R._ au bénéfice du doute et retenu qu’il n’avait pas commis d’inattention lorsqu’il avait obliqué sans voir le véhicule noir dépourvu d’éclairage, en pleine nuit, venant en sens inverse, après le passage d’une colonne de voitures dont les feux de celles-ci l’avaient momentanément ébloui. Le premier juge a ainsi considéré qu’aucune violation des règles de la circulation routière ne pouvait être reprochée à l’endroit de l’intéressé. Il a refusé de lui allouer une indemnité pour ses frais de défense au motif que la cause ne présentait aucune difficulté, que l’acquittement n’était pas fondé sur des développement juridique complexes, mais sur une absence de preuves et que l’intéressé n’encourrait pas de sanction administrative importante. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et le délai légal contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Conformément à l'art. 406 al. 1 let. d CPP, l'appel est traité en procédure écrite, seule la question de l’indemnité fondée sur l’art. 429 CPP étant litigieuse en l'espèce.
Par ailleurs, dans la mesure où seule une contravention a fait l’objet de la procédure de première instance, un membre de la Cour d'appel pénale statue comme juge unique, conformément à l'art. 14 al. 3 LVCPP (Loi d'introduction du Code de procédure pénale suisse du 19 mai 2009, RSV 312.01).
3.
L’appelant fait valoir que même s’il s’agissait d’une contravention et que la condamnation était modeste, la présente affaire présentait une certaine complexité nécessitant le recours à un avocat. A l’appui de son grief, il a exposé qu’il avait fallu démontrer que le travail de la police n’était pas irréprochable et que sans analyse méticuleuse du dossier par son défenseur de choix, il n’était pas sûr qu’il aurait été acquitté. Il a également soutenu qu’il y avait tout lieu de penser qu’il aurait fait l’objet d’un retrait de permis en cas de condamnation pénale, mettant en exergue le fait que la tendance actuelle de l’autorité administrative en la matière serait de criminaliser le moindre comportement routier, ce qui rendait ainsi le risque de retrait de permis concret.
3.1
Aux termes de l’art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s’il bénéficie d’une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure. Cette indemnité concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix (ATF 138 IV 205 c. 1). L’alinéa 2 de cette disposition précise en outre que l’autorité pénale examine d’office les prétentions du prévenu et peut enjoindre à celui-ci de les chiffrer et de les justifier.
La base légale fondant un droit à des dommages et intérêts et à une réparation du tort moral a été créée dans le sens d’une responsabilité causale. L’Etat doit réparer la totalité du dommage qui présente un lien de causalité avec la procédure pénale au sens du droit de la responsabilité civile (Message du Conseil fédéral relatif à l’unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 pp. 1057 ss, spéc. p. 1313). Les dépenses à rembourser au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP sont essentiellement les frais de défense. Cette disposition transpose la jurisprudence selon laquelle l’Etat ne prend en charge ces frais que si l’assistance était nécessaire compte tenu de la complexité de l’affaire en fait ou en droit et que le volume de travail et donc les honoraires de l’avocat étaient ainsi justifiés (ibidem).
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l’allocation d’une indemnité pour les frais de défense selon l’art. 429 al. 1 let. a CPP n’est pas limitée aux cas de défense obligatoire visés par l’art. 130 CPP. Elle peut être accordée dans les cas où le recours à un avocat apparaît tout simplement raisonnable. Il faut garder à l’esprit que le droit pénal matériel et le droit de procédure sont complexes et représentent, pour des personnes qui ne sont pas habituées à procéder, une source de difficultés. Celui qui se défend seul est susceptible d’être moins bien loti. Cela ne dépend pas forcément de la gravité de l’infraction en cause. On ne peut pas partir du principe qu’en matière de contravention, le prévenu doit supporter en général seul ses frais de défense. Autrement dit, dans le cadre de l’examen du caractère raisonnable du recours à un avocat, il doit être tenu compte, outre de la gravité de l’infraction et de la complexité de l’affaire en fait ou en droit, de la durée de la procédure et de son impact sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu (cf. ATF 138 IV 197 c. 2.3.5). S’agissant d’une contravention à la LCR, dans le cadre d’une affaire qui ne présentait aucune difficulté ni en fait ni en droit et dont l’impact était limité dès lors que le recourant ne risquait plus un retrait de permis, le Tribunal fédéral a considéré que l’indemnisation d’un avocat au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP ne se justifiait pas (TF 6B_563/2012 du 1
er
novembre 2012 ; voir dans le même sens
CAPE 16 mai 2012/132, CAPE 19 avril 2013/101).
3.2
En l’espèce, l’appelant a déposé, seul, une opposition dûment motivée, étant précisé que l’art. 354 al. 2 CPP n’exige pas de motivation. Il a ensuite consulté un avocat. Seuls les faits étaient litigieux, en particulier la question de savoir si R._ avait pu voir le véhicule impliqué dans la collision et si l’autre conducteur avait enclenché ses phares. Les arguments qui ont abouti à son acquittement étaient donc simples et de pur fait, de sorte que même une personne non juriste pouvait les maîtriser sans une assistance juridique. L’affaire ne présentait en outre aucune difficulté en droit. Le conducteur du véhicule impliqué a certes été légèrement blessé ; cependant R._ n’a pas été renvoyé pour lésions corporelles simples par négligence, mais uniquement pour contravention à la LCR.
En outre,
malgré le fait que le Service des automobiles et de la navigation ait suspendu la procédure administrative dans l’attente de la clôture de la procédure pénale, rien n’indique, au vu de l’absence d’antécédents administratifs de R._ en matière de circulation routière qu’il aurait fait l’objet d’un retrait de permis de conduire significatif, contrairement à ce que l’appelant allègue. Du reste, il sied de relever que l’intéressé n’a pas un besoin professionnel de son permis de conduire. Enfin, il est ordinaire qu’une personne soit confrontée au moins une fois dans sa vie à une procédure pénale pour un cas de peu de gravité en matière de LCR, comme le relève le Tribunal fédéral (cf. TF 6B_563/2012 précité c. 1.4).
En conséquence, l’assistance d’un avocat ne justifiait pas, compte tenu de la simplicité de la cause en fait et en droit.
4.
En définitive, l'appel doit être rejeté et le jugement du 30 octobre 2012 confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel, comprenant l'émolument du présent jugement, par 630 fr. (art. 21 al. 1 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), doivent être mis à la charge de l’appelant qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c6b11eea-bf1d-47f2-a2fc-1806b2dfe5a8 | En fait :
A.
Par jugement du 30 septembre 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré P._ du chef d'inculpation de vol en bande (I), a constaté qu'il s'est rendu coupable de vol, dommages à la propriété, violation de domicile et infraction à la Loi fédérale sur les étrangers (II), a condamné le prénommé à une courte peine privative de liberté de 60 jours, sous déduction de 47 jours de détention avant jugement (III), a dit que cette peine est partiellement complémentaire à celle prononcée par le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne le 16 novembre 2009 (IV), a révoqué le sursis accordé à P._ par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois le 4 août 2009 et ordonné l'exécution de la peine privative de liberté de sept mois (V), a donné acte à J._ et T._ de leurs réserves civiles à l'encontre du prévenu (VI), a ordonné la confiscation et la dévolution à l'Etat de la somme de 95 fr. 85 sous fiche de séquestre n° 46634 (VII) et la confiscation et la destruction du pied de biche séquestré sous fiche n° 46634 (VIII), a mis les frais de la cause par 11'198 fr. 05, y compris l'indemnité allouée à son défenseur d'office par 1'506 fr. 60, TVA comprise, à la charge de P._ (IX) et a dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité allouée au chiffre IX ci-dessus ne sera exigible que pour autant que la situation économique du prévenu se soit améliorée (X).
B.
Le 4 octobre 2011, P._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 7 novembre 2011, il a conclu à sa réforme en ce sens qu'il est libéré de l'accusation de vol à raison des événements du 16 novembre 2009 et des accusations de vol, dommages à la propriété et de violation de domicile à raison des événements du 26 février 2010, que le sursis accordé par jugement rendu le 4 août 2009 par le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois est prolongé selon ce que justice dira et que la somme de 95 fr. 85 séquestrée lui est restituée. Sous réserve de deux pièces produites à l'appui de son appel et qui correspondent partiellement à la pièce 59 du dossier, l'appelant n'a requis aucune mesure d'instruction.
Le 14 novembre 2011, le Ministère public a annoncé qu'il s'en remettait à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et qu'il renonçait à déclarer un appel joint.
Les intimés J._ et T._ ne se sont, quant à eux, pas manifestés.
Le Ministère public a, par courrier du 20 décembre 2011, déclaré qu'il renonçait à déposer des conclusions.
Par courrier du 12 janvier 2012, le Président de la cour de céans a ordonné l'audition du témoin V._.
Bien que régulièrement cité, le prévenu ne s'est pas présenté aux débats du 27 janvier 2012; il s'y est fait représenter par son défenseur. Les plaignants, ainsi que ledit témoin, ont été entendus. Le défenseur de P._ s'est référé expressément aux moyens développés dans son écriture et a confirmé ses conclusions. Chacun des plaignants a maintenu sa plainte, mais a renoncé à faire valoir des prétentions civiles.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né le 20 août 1986 en Algérie, pays dont il est ressortissant, P._ a été élevé avec ses sept frères et sœurs et a suivi l'école jusqu'à l'âge de 14 ans. Par la suite, il a entrepris une formation de cuisinier couronnée après trois ans par l'obtention d'un diplôme. Il a exercé son métier durant quelques mois, avant de quitter l'Algérie pour la Turquie, où il a séjourné pendant trois mois, puis s'est installé en Grèce durant une année et ensuite en Italie pour la même période. Dans tous ces pays, il n'aurait exercé aucune activité. Il s'est ensuite rendu en France, où il a travaillé comme cuisinier, et est arrivé en Suisse en 2008. Il aurait alors travaillé au noir en qualité de cuisinier au service de divers employeurs jusqu'en 2010. Depuis lors, il n'a plus d'activité ni de revenu et vit au sleep-in grâce à l'aide de la mosquée. Célibataire, le prévenu fréquente une amie suisse avec laquelle il souhaite se marier. Il n'a pas de charges, hormis les frais du sleep-in. Sa situation financière doit être obérée, compte tenu des frais de justice d'ores et déjà mis à sa charge par ses précédentes condamnations.
A son casier judiciaire figurent trois inscriptions :
- 4 août 2009, Tribunal correctionnel de l'Est vaudois, vol par métier, dommages à la propriété, violation de domicile, séjour illégal, peine privative de liberté 14 mois dont sursis 7 mois, délai d'épreuve 2 ans, détention préventive 199 jours;
- 19 octobre 2009, Juge d'instruction de Lausanne, séjour illégal, peine privative de liberté 30 jours;
16 novembre 2009, Juge d'instruction de Lausanne, séjour illégal, activité lucrative sans autorisation, peine privative de liberté 30 jours, peine partiellement complémentaire au jugement du 19 octobre 2009 du Juge d'instruction de Lausanne.
2.
2.1
Du 23 octobre 2009 au 30 septembre 2011, P._ a séjourné illégalement en Suisse, n'étant titulaire d'aucun document d'identité et n'étant au bénéfice d'aucun permis de séjour.
2.2
Le 16 novembre 2009, le prénommé, accompagné d'un individu non-identifié, a pénétré dans l'appartement de J._, sis ch. du [...], à Lausanne, et a dérobé divers objets et bijoux. Il a été surpris dans l'appartement par le locataire. En s'enfuyant, il a perdu une de ses chaussures dans laquelle son ADN a été prélevé.
J._ a déposé plainte pénale le 16 novembre 2009.
2.3
Le 26 février 2010, P._, B._ et S._ ont pénétré dans l'appartement de T._, sis ch. des [...], à Lausanne, en forçant un store et une fenêtre. Ils y ont dérobé 200 francs. Ils ont été surpris par le beau-fils du plaignant, V._. Celui-ci a poursuivi, puis rattrapé le prévenu sur le chemin de Villard. Une patrouille de police est intervenue à la suite de l'appel de V._. Parallèlement, les deux autres malfrats ont été interceptés par une autre patrouille à proximité du Guest House.
T._ a déposé plainte pénale le 26 février 2010. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Tout d'abord, s'agissant des événements du 16 novembre 2009, s'il admet avoir pénétré dans l'appartement de J._, P._ conteste en revanche l'accusation de vol. Il soutient que le premier juge aurait dû éprouver un doute quant à sa culpabilité, dans la mesure où la preuve de ce qui aurait été dérobé dans ledit appartement n'a pas été suffisamment démontrée.
3.1
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a). Dans cette mesure, la présomption d'innocence se confond avec l'interdiction générale de l'arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (TF 6B_216/2010 du 11 mai 2010 c. 1.1.1 et 1.1.2 et la jurisprudence citée).
3.2
En l'espèce, P._ relève que dans la plainte du 16 novembre 2009, le lésé s'était engagé à transmettre aux autorités la liste des objets qui auraient été volés (pièce 48) et que la seule liste figurant au dossier est celle déposée par le plaignant lors des débats, soit presque deux ans après les faits (pièce 58). Le prévenu fait valoir que cette liste, très détaillée, avec indication tout aussi précise de la valeur des objets prétendument dérobés, s'éloigne radicalement des indications qui figurent au dossier, ce qui démontre, selon lui, qu'elle a été composée a posteriori, de sorte qu'on ne peut lui accorder aucun crédit, ni aucune force probante.
Le tribunal a retenu que les explications du lésé étaient crédibles et constantes. Cette appréciation ne prête pas le flanc à la critique. En effet, il est normal que le lésé ignore quels objets ont été volés au moment où il a déposé plainte peu après les faits. Il avait alors déclaré à la police qu'à tout le moins '"un agenda, une montre homme et divers bijoux" avaient été dérobés, comme cela figure sous la rubrique "Butin-Préjudice" dans le rapport du 19 avril 2010 (Dossier B, pièce 11); la liste en question, qui mentionne deux montres, un agenda électronique, des colliers et des bagues, ne diffère pas "radicalement" des premières indications, contrairement à ce qu'affirme l'appelant.
Quant à savoir qui était à l'origine de ce vol, on remarquera que lors de sa première audition par la police, le 28 janvier 2010, P._, après avoir affirmé qu'il n'avait rien dérobé, semble admettre le contraire en déclarant : "je n'ai fait qu'un seul vol" (Dossier B, pièce 1, p. 3
in initio
). Quoi qu'il en soit, le premier juge n'a pas retenu que le prénommé aurait emporté lui-même ces objets, mais a admis qu'il avait agi en qualité de co-auteur. Cette appréciation est pertinente et convaincante, d'autant plus que le prévenu n'a pas exclu que son comparse – qu'il a qualifié de "copain" et prétendu en même temps ne pas connaître – ait volé quelque chose, mais s'est limité à dire qu'il l'ignorait (Dossier B, pièce 1, p. 2
in fine
; jugt, p. 6).
Ensuite, c'est à tort que l'appelant fait valoir qu'il aurait fait preuve d'honnêteté en reconnaissant d'entrée de cause s'être introduit dans l'appartement de J._, à un moment où il ignorait encore le résultat de l'expertise génétique qui le confondait, puisqu'il ressort de son audition par la police qu'il a d'abord nié avoir commis d'autres vols que ceux pour lesquels il avait déjà été jugé, avant d'admettre, face aux évidences qui lui étaient opposées, son implication dans le vol du 16 novembre 2009 (Dossier B, pièce 1, p. 2).
Ainsi, les explications fournies par le plaignant J._ ainsi que l'attitude et les propos, non exempts de contradictions, tenus par P._ sont suffisamment probants pour retenir l'infraction de vol à la charge de celui-ci.
Enfin, on ne comprend pas comment l'appelant peut aboutir à la conclusion qu'il doit être purement libéré de l'accusation de vol, alors que, compte tenu de la violation de domicile admise et de ses propres déclarations (ibidem), il devrait à tout le moins être reconnu coupable de tentative de vol.
En définitive, le moyen tiré d'une violation du principe
in dubio pro reo
est mal fondé et doit donc être rejeté.
4.
P._ conteste ensuite toute participation au vol survenu le 26 février 2010 dans l'appartement de T._. Il soutient que les constatations de fait du jugement sont incomplètes ou erronées.
4.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
4.2
Pour retenir les faits à la charge de P._, le premier juge s'est fondé sur le rapport de police du 8 mars 2009 (pièce 19). Il ressort de ce document que V._ a, le jour des faits, avisé la centrale de police qu'il avait mis en fuite deux cambrioleurs qu'il venait de surprendre dans l'appartement de son beau-père et qu'il avait pourchassé et interpellé l'un d'eux sur le chemin de Villard, où il a ensuite été rejoint par une patrouille de police. Identifié, l'individu intercepté par V._ s'est avéré être P._, que ledit témoin a ensuite formellement reconnu derrière une vitre sans tain. Le jugement attaqué retient en outre qu'une seconde patrouille de gendarmerie a, parallèlement, interpellé deux autres individus à proximité du Guest House, soit B._ et S._ et que ce dernier a, en cours d'enquête, admis avoir commis le cambriolage.
L'appelant critique l'appréciation des preuves opérée par le tribunal. Il invoque le fait que le constat technique auquel a procédé la police dans ledit appartement (pièce 33) n'a révélé aucune trace le concernant, alors que des traces de souliers appartenant à B._ y ont été retrouvées. Selon lui, il s'agit d'un élément essentiel le mettant hors de cause. Cet argument tombe à faux. Force est de constater qu'au moment de son interpellation, P._ portait des souliers identiques à ceux de B._, comme cela ressort clairement du constat technique précité (pièce 33, p. 3), qui fait état, dans les deux cas, de "chaussures 'Dolce Gabbana', noires, usées, pointure 42 (...), le dessin de la plante de la semelle [étant] formée de lignes épaisses en arc horizontaux et, au niveau du talon, de chevrons épais"; or, cette description correspond à la trace de semelle 147944-0-1-CF retrouvée dans l'appartement du plaignant (pièce 33, p. 2). Il n'est donc pas exclu que cette trace soit en réalité celle du soulier de P._, la police ayant d'ailleurs uniquement conclu à une correspondance "possible" entre la trace de semelle en question et la chaussure de B._ (pièce 33, p. 4; pièce 35). Dans ces conditions, on ne saurait trop facilement admettre que l'appelant n'a pas pénétré dans l'appartement de T._. Quoi qu'il en soit, il suffit de constater, avec le tribunal, que l'absence d'empreintes des chaussures de P._, supposée avérée, n'exclut pas sa présence sur les lieux de l'infraction et qu'il est tout à fait possible que celui-ci ait fait le guet pendant que les deux autres pénétraient dans l'appartement.
L'appelant développe ensuite tout un raisonnement dans lequel il échafaude un scénario qu'il cherche à opposer à la version des faits retenue par le premier juge (mémoire d'appel, n° 31 à 35). Tout d'abord, le fait que S._ ait reconnu s'être introduit dans l'appartement n'a pas d'incidence en l'espèce. Il en va de même s'agissant des réflexions sur B._, dans la mesure où les éléments invoqués par l'appelant constituent uniquement des indices d'une éventuelle culpabilité de cet individu, mais n'excluent pas la participation du prévenu au cambriolage. Plus particulièrement, l'apparente contradiction qui ressort de la page 2 du rapport de police du 8 mars 2010 entre, d'une part, l'indication selon laquelle les deux cambrioleurs poursuivis par V._ avaient pris la fuite "sur le chemin de Villard en direction des voies CFF" et, d'autre part, le fait que seul P._ ait été interpellé sur ledit chemin, a été levée par l'audition du témoin susmentionné à l'audience d'appel, qui a précisé que les deux voleurs étaient partis dans des directions différentes et qu'il avait instinctivement poursuivi l'un d'eux. V._, dont les déclarations initiales n'ont pas été protocolées par la police et qui n'a pas été entendu en première instance, a d'ailleurs pu décrire en détail à la Cour de céans le trajet suivi par P._ depuis l'appartement de T._ jusqu'au chemin de Villard sur la base du plan que le prévenu a produit en annexe à son appel (pièce 64/2). En outre, ce témoin a non seulement indiqué avoir pu reconnaître le prévenu à son habillement, qu'il a su décrire, mais a encore précisé qu'au moment où il l'a l'intercepté, celui-ci portait des gants, ce qui est établi (pièce 11; cf. ég. pièces 7 et 12, d'où il ressort que les deux autres individus portaient aussi des gants). Enfin, le fait que V._ n'ait vu que deux cambrioleurs n'exclut pas la présence d'un troisième individu, contrairement à ce que prétend l'appelant.
Partant, la Cour d'appel pénale, en se fondant sur la motivation adéquate du tribunal ainsi que sur ses propres constatations, en particulier sur les déclarations complètes et sans équivoques de V._, considère, avec le premier juge, que la culpabilité de P._ est clairement établie.
Il n'y a en définitive aucune constatation incomplète ou erronée des faits retenus dans le jugement. Ce grief, mal fondé, doit donc être rejeté.
5.
P._ conteste enfin la révocation du sursis partiel accordé le 4 août 2009.
Le raisonnement tenu par le prénommé part de la prémisse que ses précédents moyens sont admis. Or, tel n'est pas le cas, de sorte que ses arguments perdent pour l'essentiel de leur substance.
5.1
Au demeurant, on rappellera que selon l'art. 46 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel (al. 1). S'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation (al. 2).
La commission d'un crime ou d'un délit durant le délai d'épreuve n'entraîne pas nécessairement une révocation du sursis. Seul un pronostic défavorable peut justifier la révocation. A défaut d'un tel pronostic, le juge doit renoncer à celle-ci. Autrement dit, la révocation ne peut être prononcée que si la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve (
ATF 134 IV 140
c. 4.2 et 4.3 p. 142 s.). Le juge doit poser un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. Pour émettre ce pronostic, le juge doit se livrer à une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Il doit tenir compte de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il ne peut accorder un poids particulier à certains critères et en négliger d'autres qui sont pertinents (
ATF 134 IV 1
c. 4.2.1 p. 5). Lors de l'examen de l'éventuelle révocation du sursis pour une peine privative de liberté, il y a également lieu de tenir compte du fait que la nouvelle peine est prononcée avec ou sans sursis. Le juge peut notamment renoncer à révoquer le sursis si une peine ferme est prononcée et, à l'inverse, lorsque le sursis est révoqué, compte tenu de l'exécution de la peine, cela peut conduire à nier un pronostic défavorable. L'effet préventif de la peine à exécuter doit donc être pris en compte (
ATF 134 IV 140
c. 4.5 p. 144).
5.2
En l'espèce, c'est à juste titre que le premier juge a révoqué le sursis partiel précédemment accordé. L'appelant doit répondre d'infraction à la LEtr, de violation de domicile, de dommages à la propriété et de vol. On relèvera tout d'abord qu'il a déjà été condamné à trois reprises, à savoir le 4 août 2009 par le Tribunal correctionnel de l'Est vaudois, pour vol par métier, dommages à la propriété, violation de domicile et séjour illégal, à une peine privative de liberté de 14 mois, avec sursis partiel de deux ans sur 7 mois, le 19 octobre 2009 par le Juge d'instruction de Lausanne, pour séjour illégal, à une peine privative de liberté de 30 jours et, enfin, le 16 novembre 2009 par le Juge d'instruction de Lausanne, pour séjour illégal et activité lucrative sans autorisation, à une peine privative de liberté de 30 jours, partiellement complémentaire à celle précédente. Or, il n'est pas contestable que l'existence d'antécédents pénaux est un point non seulement pertinent mais incontournable du pronostic (TF 6B_510/2010 du 4 octobre 2010 c. 1.2.2). En l'occurrence, ces précédentes condamnations et les périodes de détention subies (d'un total de 9 mois) n’ont manifestement eu aucun effet dissuasif sur l’intéressé, qui persiste à maintenir, depuis son arrivée en Suisse en 2008, le même comportement répréhensible. Plus particulièrement, le fait de récidiver en matière d'infractions contre le patrimoine dans le délai d'épreuve dont il a bénéficié et, qui plus est, en cours d'enquête démontre que l'appelant fait fi de l'ordre juridique suisse et des décisions des autorités judiciaires
.
Ensuite, il convient de souligner le mode de vie que mène l'intéressé, qui choisit de rester dans un pays dans lequel il ne peut avoir aucune occupation, faute de titre de séjour, et demeure donc livré à lui-même.
Enfin, l'attitude que le prévenu a eue en cours d'enquête n'est pas aussi honnête qu'il veut bien le dire, puisque non seulement il a récidivé en cours d'enquête en matière de vol, mais il a également persisté à nier les évidences, ce qui tend à démontrer au surplus un défaut de prise de conscience.
Il résulte de ce qui précède, quant au comportement futur de P._, un pronostic défavorable. Le fait qu'il ait présenté des excuses à J._ à l'audience du 30 septembre 2011 ne constitue pas un comportement particulièrement méritoire et est en tout cas insuffisant pour renverser le pronostic posé.
C'est donc à bon droit que le tribunal a révoqué le sursis antérieur sur la base de l'art. 46 CP. P
artant, ce moyen est mal fondé et doit être rejeté.
6.
L'appelant ne discute pas la peine.
Il suffit de constater, sur ce point, que ni le choix du genre de peine, ni l'appréciation de la quotité de la peine par le premier juge ne sont critiquables, de sorte que la peine privative de liberté de 60 jours peut être confirmée.
Le tribunal était dès lors parfaitement fondé à mettre les frais de la cause à la charge du prévenu (art. 426 al. 1 CPP).
7.
Enfin, P._ conclut à ce que le montant de 95 fr. 85 séquestré lui soit restitué.
Qu'il provienne du cambriolage de l'appartement de T._ ou, comme l'admet le prévenu, de son activité clandestine (PV aud. 1, p. 2), il est dans tous les cas le produit d'une infraction et doit, pour ce motif, être confisqué et dévolu à l'Etat (art. 70 CP).
8.
En conclusion, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être mis à la charge de P._ (art. 428 al. 1 CPP). Outre l'émolument, ces frais comprennent l’indemnité allouée à son défenseur d’office, par 1'470 fr. 50, TVA et débours compris.
Le prévenu ne sera tenu de rembourser à l’Etat le montant de l'indemnité en faveur de son défenseur d'office prévue ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a et 426 al. 4 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c6ba8548-b3ee-4b95-9123-a1952738f695 | En fait :
A.
Par jugement du 24 août 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que A.E._ s’était rendu coupable de violation grave des règles de la circulation routière (I), condamné A.E._ à 180 jours-amende, la valeur du jour-amende étant fixée à 20 fr. (II), renoncé à révoquer le sursis accordé à A.E._ le 3 août 2011 par le Ministère public de Lausanne (III) et mis les frais par 4'875 fr. à la charge de A.E._ (IV).
B.
Par annonce du 25 août 2015, puis par déclaration motivée postée le 12 octobre 2015, A.E._ a fait appel de ce jugement en concluant principalement à sa libération de tout chef d'accusation relativement à l'excès de vitesse commis le 11 septembre 2015 et subsidiairement à ce que sa peine soit assortie d'un sursis de trois ans, celui accordé le 3 août 2011 n'étant pas révoqué.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
Né le 6 décembre 1969 à Pully, A.E._, ressortissant allemand, séjourne en Suisse au bénéfice d’un permis C. Il est marié à C.E._, née [...], dont il a eu deux enfants, aujourd'hui âgés de 13 et 7 ans. Le prévenu est également père de deux enfants majeurs nés d’une précédente union, dont un fils de 24 ans avec qui il dit avoir gardé un bon contact. Au bénéfice d'une formation de carrossier-peintre, l'intéressé œuvre depuis vingt ans comme agent de sécurité. A ce jour, et depuis dix ans, il travaille de nuit pour le compte d'un établissement public lausannois nommé [...] qui lui verse un salaire mensuel moyen de 1'000 fr. Dès lors que A.E._ n'a pas d'autre revenu, c'est son épouse ─ occupée à plein temps comme secrétaire en l'étude [...], à [...] ─ qui subvient pour l’essentiel à l’entretien de la famille, dont le loyer mensuel se monte à 1'950 francs.
1.2
Le casier judiciaire suisse du prévenu fait état de trois condamnations :
- 23 septembre 2004 : Préfecture de Lausanne, pour violation grave des règles de la circulation, 400 fr. d’amende avec un délai d’épreuve en vue de la radiation anticipée au casier judiciaire ;
- 25 septembre 2007 : Tribunal de police de Lausanne, pour pornographie et conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait, 360 heures de travail d’intérêt général ;
- 03 août 2011 : Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, pour violation d’une obligation d’entretien, peine pécuniaire 120 jours-amende à 30 fr. sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 3 ans.
Le fichier ADMAS de A.E._ indique ce qui suit :
- du 7 novembre 2007 au 6 novembre 2008 ; retrait du permis de conduire ;
- du 14 novembre 2006 au 13 mai 2007 ; retrait du permis de conduire ;
- du 24 mai 2006 au 23 juillet 2006 ; retrait du permis de conduire ;
- du 2 novembre 2005 au 1
er
janvier 2006 ; retrait du permis de conduire ;
- du 2 mars 2004 au 24 avril 2004 ; retrait du permis de conduire ;
- du 17 avril 2002 au 16 octobre 2002 ; retrait du permis de conduire ;
- du 26 février 2001 au 25 août 2001 ; retrait du permis de conduire et cours d'éducation routière ;
- du 28 janvier 1999 au 27 février 1999 ; retrait du permis de conduire ;
- 17 février 1986 pour une durée indéterminée ; retrait du permis de conduire.
2.
Le 11 septembre 2013, vers 11h15-11h30, le fils du prévenu, B.E._, alors âgé de 13 ans, s'est blessé dans son école à Echallens. Sa blessure devait être suturée.
Ce jour-là, sa maman, C.E._, était à son travail en l'étude d'avoca[...] Lausanne (PV aud. 3). Sa grand-maman, qui le garde, ainsi que sa petite sœur de sept ans quand leur maman n'est pas là, était invitée à un anniversaire (PV aud. 2). Quant à son demi-frère, fils aîné de A.E._, également titulaire du permis de conduire, il travaillait sur appel au service d'un [...] (jugement p. 3).
Œuvrant de nuit dans la sécurité, c'est A.E._ qui gardait ses deux jeunes enfants ce 11 septembre 2013 (PV aud. 2 p. 3, PV aud. 3, p.3 et PV aud. 6 p. 2).
Ayant appris l'accident de son fils, A.E._ l'a amené aux urgences du CHUV, à Lausanne, avec [...] dont il est propriétaire, véhicule qu'il ne prête que rarement et à sa femme seulement (PV aud. 3).
Avant de prendre la route, vers 12h15, le prévenu a appelé son épouse pour l'informer de l'accident (P. 12). C.E._ a reçu l'appel sur le téléphone portable du prévenu (P. 12) qu'elle avait ce jour-là sur elle. Au moment de l'appel, l'épouse prénommée prenait sa pause de midi sur son lieu de travail avec les autres secrétaires. C'est ce qu'elle faisait d'ailleurs tous les jours, n'ayant guère le temps de rentrer déjeuner à la maison (PV aud. 3).
A 12h30, à Romanel-sur-Lausanne, le prévenu a été flashé en direction de Lausanne à une vitesse de 95 km/h (marge de sécurité déduite) sur un tronçon où la vitesse maximale autorisée était limitée à 50 km/h. Il était au volant de [...]sus-désignée. Le contrôle s'est fait au moyen d'un radar 6F, surveillé par un personnel spécialisé, sans poste d'interception (PV aud. 2).
A.E._ est arrivé peu après au CHUV où son enfant B.E._ a été pris en charge à 12h37 (P. 17).
3.
Pour ces faits, le prévenu a été condamné par ordonnance pénale du 28 juillet 2014 du Ministère public de l'arrondissement de Lausanne à laquelle il a fait opposition et a été renvoyé devant l'autorité de première instance qui l'a débouté par le jugement attaqué. Le 8 janvier 2014, le Service des automobiles et de la navigation (SAN) a suspendu la procédure administrative dans l'attente de l'issue pénale. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux (art. 399 CPP; Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007; RS 312.0) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de A.E._ est recevable.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
2.2
Le Tribunal fédéral a eu l’occasion de rappeler les principes applicables lorsque le détenteur d’un véhicule conteste en avoir été le conducteur et choisit de garder le silence. La présomption d’innocence, garantie par l’art. 32 al. 1 Cst.,
l’art. 6 §2 CEDH et l’art. 14 al. 2 Pacte ONU II, porte sur la répartition du fardeau de la preuve dans le procès pénal, d’une part et sur la constatation des faits et l’appréciation des preuves, d’autre part. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l’accusation et que le doute doit profiter à l’accusé. Comme règle sur l’appréciation des preuves, elle est violée lorsque le juge, qui s’est déclaré convaincu, aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité de l’accusé au vu des éléments de preuves qui lui étaient soumis. Dans cette mesure, elle se confond avec l’interdiction générale de l’arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates et sans pertinence (Ibidem).
Selon la jurisprudence, le conducteur d’un véhicule automobile ne saurait se voir condamner à une infraction de la LCR que s’il est établi à satisfaction de droit qu’il est bien l’auteur de cette infraction. Autrement dit, le juge ne peut prononcer une telle condamnation que s’il a acquis la conviction que c’est bien l’intéressé qui a enfreint les règles de la circulation. Lorsqu’une infraction a été dûment constatée, sans cependant que son auteur puisse être identifié, l’autorité ne saurait se borner à présumer que le véhicule était piloté par son détenteur, sauf à ce dernier à rapporter la preuve qu’il l’était en réalité par un tiers
Lorsque l’auteur d’une infraction constatée ne peut être identifié sur le champ, le juge peut certes, dans un premier temps, partir de l’idée que le détenteur du véhicule en question en était aussi le conducteur au moment critique. Mais, dès lors que cette version est contestée par l’intéressé, il lui appartient d’établir sa culpabilité sur la base de l’ensemble des circonstances, sans franchir les limites de l’arbitraire. S’il arrive à la conclusion que le détenteur, malgré ses dénégations, est bien le conducteur fautif, la condamnation est fondée. Il ne suffit pas au détenteur d’invoquer le droit au silence ou le droit de ne pas s’auto-incriminer pour échapper à une sanction lorsque sa culpabilité n’est pas douteuse. Lorsque l’accusé fait des déclarations contradictoires notamment, il ne peut invoquer la présomption d’innocence pour contester les conclusions défavorables que le juge a, le cas échéant, tiré de ses déclarations.
Selon certains auteurs, le droit de se taire et de ne pas témoigner contre soi-même découle directement de la présomption d’innocence. La CEDH considère que ce droit fait partie des normes internationales généralement reconnues qui se trouvent au cœur de la notion de procès équitable, selon l’art. 6§1 CEDH. Le droit de se taire interdit au juge de fonder une condamnation exclusivement ou essentiellement sur le silence du prévenu, ou sur son refus de répondre à des questions ou de déposer. En revanche, ce droit n’interdit pas de prendre en considération le silence du prévenu dans des situations qui appellent assurément une explication de sa part, pour apprécier la force de persuasion des éléments à charge ; à cet égard, le droit de se taire n’a donc pas de portée absolue. Pour apprécier si le fait de tirer de son silence des conclusions défavorables au prévenu est contraire à l’art. 6 CEDH, il faut tenir compte de l’ensemble des circonstances et rechercher dans chaque cas si les charges de l’accusation sont suffisamment sérieuses pour appeler une réponse. Le juge de la cause pénale ne peut pas conclure à la culpabilité du prévenu simplement parce que celui-ci choisit de garder le silence. C’est seulement si les preuves à charge appellent une explication que l’accusé devrait être en mesure de donner, que l’absence de celle-ci peut permettre de conclure, par un simple raisonnement de bon sens qu’il n’existe aucune explication possible et que l’accusé est coupable (cf. sur tous ces points, CAPE 28 mai 2014/130, consid. 4.1 et les références citées).
2.3
Le prévenu n'a pas l'obligation de déposer contre lui-même. Il a notamment le droit de refuser de déposer et de refuser de collaborer avec la justice (art. 113 al. 1 première phrase CPP).
Selon l'art. 168 CPP, les personnes liées par des liens de parenté, d'alliance ou affectifs avec le prévenu, en raison d'une forte présomption de partialité et donc de crédibilité présumée douteuse bénéficient du droit de se taire en justice.
Il résulte ainsi de ces principes que le droit de se taire protège contre l'auto-incrimination, d'une part, contre l'incrimination des proches, d'autre part, mais qu'elle ne dispense pas le prévenu de s'expliquer sur d'autres éléments, en particulier sur des faits qui pourraient mettre en cause des tiers.
3.
3.1
Dès sa première audition par la gendarmerie le 6 novembre 2013, en cours d'enquête et devant le premier juge, A.E._ a systématiquement déclaré faire usage de son droit au silence. Il a refusé de donner toute explication, en particulier sur le conducteur, au moment des faits, du véhicule[...] pris en infraction. Par le biais de son avocat, le 5 décembre 2013 (pièce 7), il a dit vouloir garder le silence parce que la police aurait refusé de lui transmettre la photo du radar et parce que le conducteur serait un proche à qui il aurait prêté sa voiture en raison d'une urgence médicale et à qui il ne pouvait pas reprocher l'infraction commise en raison des circonstances. Il invoque encore son droit au silence lorsqu'il s'agit de répondre à la question de savoir si le conducteur était un ami de la famille (PV aud. 4).
3.2
A.E._ n'a pas contesté que le véhicule flashé était le sien. On peut en outre tenir pour constant qu'il s'agissait de mener à l'hôpital le fils de l'appelant, âgé de 13 ans, qui s'était blessé. Une attestation du CHUV confirme que cet enfant a consulté les urgences le 11 septembre 2013 et qu'il a été pris en charge à 12 heures 37. Ni l'école, ni le CHUV n'ont toutefois pu dire qui accompagnait l'enfant lors de son arrivée.
3.3.1
S’agissant du cercle des personnes susceptibles d’être le conducteur en cause, on trouve en premier lieu l’épouse du prévenu, C.E._.
Celle-ci a toutefois déclaré clairement qu’elle travaillait le jour des faits, ce que ses employeurs ont attesté (pièce 16). Elle a précisé qu'à l'heure de l'infraction, elle prenait sa pause de midi sur son lieu de travail avec ses collègues, comme elle le faisait chaque jour, puisqu'elle n'avait jamais le temps de rentrer manger à domicile (PV aud. 3). Aucun élément ne permettant de douter de ce qui précède, on peut exclure que C.E._ se soit trouvée volant du véhicule incriminé au moment de l'infraction.
3.3.2
Tout en invoquant son droit à se taire, le prévenu a, à demi-mot, fait allusion au fait que ses deux enfants majeurs pourraient avoir conduit la voiture prise en excès de vitesse (jugement p. 3).
A ce sujet, on relève que le fils ainé, de 24 ans, est le seul à être titulaire d’un permis de conduire, à l’exclusion de sa sœur de 19 ans. De plus, ce jeune homme travaille, certes sur appel, mais régulièrement au[...] Enfin, aucun élément au dossier ne fournit d’indice qu’il pourrait avoir été l’auteur des faits, en conduisant son demi-frère au milieu de la journée à l’hôpital. Il ressort au contraire des témoignages de X._ et de C.E._ que le prévenu ne lui prêtait pas sa voiture. Il ne la prêtait d'ailleurs qu'à de rares occasions et seulement à son épouse (PV aud. 3). Il sied donc d'exclure également du cercle des suspects les deux enfants majeurs du prévenu.
3.3.3
Pour le reste, on sait par le dossier (PV aud. 2, PV aud. 3 et PV aud. 6) que A.E._ devait se trouver à la maison pour garder les enfants le jour de l'infraction, et qu'il était le seul à pouvoir le faire puisqu'il ne travaillait que la nuit, cela contrairement aux autres membres de la famille (épouse et fils aîné) et puisque que la grand-maman ─ qui gardait les cadets en l'absence de la maman ─, était invitée à un anniversaire (PV aud. 2, D7). On sait aussi, au vu des développements qui précèdent, que l'épouse de l'appelant n'a pas pu avoir conduit le véhicule flashé puisqu'elle était au travail au moment de l'infraction (PV aud. 3).
Si l'appelant avait été absent ou empêché, la personne qui aurait trouvé l'enfant blessé aurait appelé une ambulance ou aurait utilisé son propre véhicule, hypothèse qui n'est pas réalisée puisqu'il est constant que c'est le véhicule de l'appelant qui a été pris en infraction.
Dans ces conditions, on ne voit pas qui d'autre que le prévenu aurait conduit l'enfant accidenté au service des urgences le jour de l'infraction.
Dans un ultime moyen, A.E._ se réfère au relevé des données téléphoniques rétroactives selon lequel son numéro de portable [...] a été localisé le jour des faits à 12 heures 16 à Villamont à Lausanne (P. 12) et prétend s'être trouvé à Lausanne
"pour des motifs non professionnels",
de sorte qu'il ne pouvait pas être conducteur fautif (jugement p. 3). Dans son appel, il reprend cet argumentaire (cf. mémoire p. 3).
A examiner ledit relevé, la Cour de céans constate toutefois que le plus grand nombre des antennes activées par le portable précité[...]) sont distantes de 300 mètres et que l'étude où travaille l'épouse de l'appelant se trouve presque exactement entre les deux antennes. Elle observe en outre que ce relevé fait état de nombreux appels entre la "maison" et le "portable", et que la "maison" a notamment appelé le "portable" peu après l'accident (survenu aux alentours d’11h15-11h30; PV aud. 3 p. 3), mais environ quinze minutes avant la photo radar (prise à 12h30). Au vu de ces éléments et des échanges que C.E._ a eus avec ses proches dans les jours qui ont suivi l'accident (PV aud. 3 et PV aud. 6), il apparaît donc manifeste que c'est l'épouse du prévenu qui détenait le téléphone mobile ce jour-là et qu'elle a été appelée par son mari après que leur fils a été accidenté. Les indications horaires ne sont pas incompatibles avec cette appréciation. La présence dudit portable en ville de Lausanne le jour des faits ne permet donc pas d'exculper l'appelant.
On relèvera enfin, quoique cela ne soit pas décisif en soi, que l'intéressé a un long historique de retraits de permis, qu'il peine manifestement à respecter les règles de la circulation routière et qu'il a l'habitude de rouler vite (PV aud. 2).
4.
Au vu de tous ces indices, la cour de céans a acquis la conviction que c’est bien A.E._ qui était au volant du véhicule pris en infraction le 11 septembre 2013. C'est ce que retient le jugement attaqué qui n'apparaît dès lors pas critiquable sur ce point.
5.
Au vu des faits ci-dessus, B.E._ s’est rendu coupable d’une violation grave des règles de la circulation routière au sens de l’art. 90 al. 2 LCR, comme le retient à juste titre le jugement entrepris.
6.
Il reste à examiner si la peine fixée en première instance est conforme au droit.
6.1
Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l’auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l’acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 p. 19 s.; 129 IV 6 consid. 6.1 p. 20).
Le droit au sursis s'examine selon les critères posés à l'art. 42 CP qui ont été rappelés dans l'arrêt publié aux ATF 135 IV 180 consid. 2.1. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 5 consid. 4.2.2).
6.2
Condamné à 180 jours-amende à 20 fr., A.E._ ne conteste pas sa peine en tant que telle. Celle-ci est d'ailleurs justifiée au regard de la gravité de l'excès de vitesse dont il s'est rendu coupable (95 km/h marge de sécurité déduite, sur un tronçon limité à 50 km/h), excès proche du délit de chauffard au sens l'art. 90 al. 4 LCR. Le risque créé en localité pour l'intégrité et la vie des autres usagers et des piétons est conséquent.
6.3
A titre subsidiaire, A.E._ requiert que sa peine soit assortie d'un sursis de 3 ans, celui accordé le 3 août 2011 n'étant pas révoqué. Au vu de ses antécédents, le pronostic est défavorable, de sorte que les conditions du sursis ne sont pas remplies. Le fait que l'appelant ait entrepris d'emmener son fils blessé à l'hôpital ne constitue pas un fait justificatif (cf. TF 6B_503/2015 du 30 septembre 2015 consid. 4.4) et ne permet pas de renverser ce pronostic. Cette conclusion doit être rejetée.
6.4
Vu ce qui précède, la peine ferme infligée à A.E._ est conforme au droit et doit être confirmée.
7.
Les autres points du jugement n'ont pas été critiqués. Vérifiés d'office (404 al. 2 CPP), ils ne prêtent pas le flanc à la critique.
8.
En définitive, l'appel de A.E._ apparaît mal fondé et doit être rejeté, ce qui entraîne la confirmation du jugement attaqué. Vu le sort de l'appel, les frais de la présente procédure, par 1'610 fr. doivent être mis à la charge de l'appelant, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c72957f6-cc74-4e2a-8f20-eb6468ac2213 | En fait :
A.
Par jugement du 2 juillet 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a notamment constaté que N._ s’est rendue coupable de tentative de contrainte et instigation à contrainte (I), l’a condamnée à une peine pécuniaire de 200 jours-amende à 60 fr. l’unité, sous déduction de 4 jours de détention avant jugement (II), a dit qu’elle est la débitrice de W._ de la somme de 4'000 fr. avec intérêts à 5% l’an dès le 21 mai 2012 au titre d’indemnité pour tort moral (X), a dit que N._, P._ et M._ sont solidairement débiteurs de W._ de la somme de 10’514 fr. 55 portant intérêts à 5% l’an dès le 2 juillet 2013 au titre de frais d’avocat (XI), et a mis à la charge de l’intéressée sa part des frais de la cause par 4'812 fr. 30 (XVI).
B.
Par annonce du 12 juillet 2013, puis par déclaration motivée du 13 août 2013, N._ a formé appel contre ce jugement en concluant à sa réforme en ce sens qu’elle s’est rendue coupable de tentative de contrainte, qu’elle est condamnée à une peine pécuniaire fixée à dire de justice n’excédant pas 90 jours-amende à 60 fr. l’unité, sous déduction de 4 jours de détention avant jugement, que le chiffre X de la décision attaquée est supprimé, qu’elle est la débitrice de W._ au titre des frais d’avocat de celui-ci d’un montant fixé à dire de justice mais n’excédant pas 1'500 fr. et que les frais de la cause, fixés à dire de justice soient mis à sa charge mais n’excédent pas 2'000 francs.
Le 29 janvier 2014, la Cour d’appel a relevé Me Alain Brogli de son mandat de défenseur d’office en faveur de W._ et nommé Me Sabrina Lampo en remplacement.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
a) N._ est née le 21 février 1980 à Hoa Hghia au Vietnam, pays dont elle est ressortissante. Ses parents demeurent au Vietnam; elle a deux sœurs et un petit frère. Elle a fréquenté l’université dans son pays et a suivi des cours d’agent de voyages. Selon ses dires, elle s’est mariée une première fois en 2000 avec M. [...]. Après un divorce prononcé en 2005, elle a épousé son compatriote W._ en 2006. Elle n’a pas d’enfant. Lorsqu’elle est arrivée en Suisse, N._ a appris l’allemand. Elle a travaillé à 50% avec son beau-père dans un magasin d’horlogerie. Elle travaille actuellement comme comptable dans une assurance et perçoit un revenu mensuel de 8'100 fr. brut. Elle n’a pas de dettes et a des économies à hauteur de 31'000 francs. Elle possède une maison au Vietnam.
Le casier judiciaire suisse de N._, au bénéfice d’un permis de séjour Etabli C, ne comporte aucune inscription.
Dans le cadre de la présente cause, N._ a été détenue avant jugement du 24 au 27 mai 2012, soit durant 4 jours.
b) Le divorce des époux N._ et W._ a été prononcé en janvier 2012. Peu après, N._ a réclamé un montant de 8'200 fr. à son ex-mari, se décomposant de la manière suivante : 1'000 fr. relatifs à un prêt consenti en 2010, 1'200 fr. relatifs à des frais de justice consécutifs au divorce et 6'000 fr. relatifs à une partie de sa LPP mais touchée par W._. A cours d’argent, ce dernier a alors proposé à son ex-femme, laquelle se trouvait dans une situation financière confortable, un paiement échelonné, proposition qu’elle n’a pas acceptée. Le 25 avril 2012, N._ l’a alors mis aux poursuites pour le capital réclamé. W._, a fait une opposition totale au commandement de payer. Il lui a néanmoins versé le 16 avril 2012 une somme de 2'200 francs. Un échange de correspondances entre les parties s’en est dès lors suivi. Finalement, à partir du 15 mai 2012 probablement, N._ a demandé à son frère M._ de se charger de recouvrer la somme qu’elle estimait lui être due, ce dernier devant uniquement, et selon leurs dires, faire signer une reconnaissance de dette à W._, dont trois exemplaires ont d’ailleurs été retrouvés dans le véhicule.
Il est toutefois ressorti des opérations d’enquête, et en particulier des mesures de surveillances entreprises, qu’à partir de la mi-mai 2012 en tout cas, tant N._ que son frère M._, ont tenté, en recourant à l’intimidation et aux menaces, d’amener W._ à payer le montant en souffrance. N._ n’a ainsi pas hésité à contacter son ex belle-mère au Vietnam le 21 mai 2012 pour l’informer qu’en cas de défaut de paiement, quelqu’un allait attendre son fils devant chez lui pour lui faire signer une reconnaissance de dette. Elle a par ailleurs rédigé plusieurs SMS ne pouvant qu’inspirer la crainte, les contenus n’excluant pas un éventuel recours à la force. Ainsi, N._ a notamment écrit :
- le 15 mai 2012 à son frère : « Contacte 1 de tes amis à Bienne. Ne parle pas encore à propos de l’argent. Quand j’en aurais besoin, je te le dirais. Je veux donner une leçon à [...]. »
- le 17 mai 2012 à son ex-mari : « Je veux voir comment tu te défends. Je t’avais déjà averti samedi passé, mais tu n’y a pas cru. On va voir ce que mon frère et moi on peut te faire ».
- le 18 mai 2012 à son ex-mari : « Merci de t’inquiéter pour moi, mais occupe-toi de toi d’abord. Si tu avais les moyens alors tu ne m’aurais déjà pas laissé tranquille. Quant à mes menaces, si tu as assez confiance en toi, alors fais-le (selon la mère de l’interprète, cela voudrait dire : alors riposte). Tu es aussi en train de me menacer !? et « Je te promets que je récupérerai tout ce qui m’appartient... Entre toi et moi il y a des dettes (à comprendre toute sorte de dettes et pas que l’argent) qui ne peuvent pas encore être réglées».
- le 20 mai 2012 à son ex-mari : « Maintenant, est ce que tu te sens fatigué ? J’ai déjà dit que je récupérerai tout ce qui m’appartient. Tu dois payer pour toutes les bêtises que tu as faites. Tu penses qu’avec ta fausse signature, ça fera de moi une perdante ? il suffit juste que je récupère 8200 à la fin juin et peut-être que les choses seront ok.
- le 21 mai 2012 à son frère : « Le numéro de la mère de [...] [...], tu le regardes et réfléchis bien avant d’agir. Si jamais appelle-moi ».
- 21 mai 2012 à un tiers au Vietnam : [...] a envoyé des « gangsters » le voir pour le forcer à signer une reconnaissance de dettes, parce que hier [...] a envoyé des gens au Vietnam pour qu’ils aillent parler avec sa famille. Si jamais [...] te téléphone pour te raconter, peut-être à midi, si elle prend sa pause ».
- le 21 mai 2012 à son frère : « Ne t’énerve pas trop. J’ai déjà téléphoné à [...]. S’il ne signe pas, on agira au Vietnam. Comme je le pense, il suffit juste de l’effrayer et pour agir plus fort (probablement sous-entendu avec violence) alors on laisse ça au Vietnam parce que j’ai peur que ça affecte ma situation ».
M._ a pour sa part écrit :
- le 17 mai 2012 :à son ex beau-frère :« Réfléchis bien. Si ça se passe tu vas regretter...alors réfléchis bien. Ce que [...] le dit alors il le fait » et « En vérité, au Vietnam, récupérer des dettes c’est mon métier. Ton histoire c’est petit. Tu veux jouer avec moi ? Ton adresse au Vietnam, je l’ai dans la main. On joue les règles de la mafia (pas vraiment la mafia, mais quand même violent selon l’interprète). Est-ce que tu oses jouer avec moi ? Je te laisse réfléchir ».
Le 21 mai 2012 dans la matinée, M._ s’est rendu à Bienne afin d’y rencontrer P._. A cet endroit, M._ a demandé au précité de le véhiculer à Lausanne afin d’y rencontrer W._.
Arrivés à dans cette localité en milieu d’après-midi, les prévenus M._ et P._ ont attendu devant le domicile de W._, sis au chemin de [...], que ce dernier revienne de son travail situé à proximité d’Ouchy.
Vers 17h30, alors qu’il arrivait à l’angle de son bâtiment, W._ a aperçu son ex beau-frère accompagné de P._, individu qu’il n’avait jamais rencontré auparavant. Pris par la peur, W._ a alors commencé à courir en direction de son bâtiment afin de pouvoir y entrer rapidement. M._ a toutefois réussi à lui en bloquer l’accès, en se positionnant devant la porte d’entrée. W._ a été maintenu à cet endroit par M._ et P._. Immédiatement et sans qu’il lui soit présenté un quelconque document, P._ lui a assené un coup de poing au visage, puis d’autres coups qu’il ne pouvait repousser compte tenu du fait qu’il se trouvait bloqué contre la porte. W._ a par ailleurs entendu le précité tenir des propos menaçants et faire état de ses dettes. Simultanément, W._ s’est aperçu que M._ était porteur d’un grand couteau, placé sous sa veste. Avec cet arme, soit un couteau finlandais (type machette) d’une lame de 30 cm, M._ a fait un mouvement en direction de son visage et l’a tenu à cet endroit, à une distance de 30 ou 40 cm. W._ a alors tenté de s’en emparer de sa main droite, mais en vain, tandis que P._ continuait à le frapper. W._, pris de panique et agité après avoir été coupé à la main, a alors tenté de repousser son ex beau-frère pour pouvoir s’enfuir. N’y parvenant pas, il a néanmoins sorti un couteau dentelé, d’une lame de 9 cm, qu’il avait pris de son lieu de travail et placé dans la poche droite de son pantalon avant de rentrer chez lui compte tenu des menaces dont il avait fait l’objet et notamment au regard de l’appel téléphonique qu’il avait reçu de sa mère. M._ a été touché par cet objet au niveau du thorax. Quant à W._, il a été très sérieusement atteint au niveau des bras notamment par les coups de machette assenés par M._.
Alertés par des témoins, les secours sont intervenus et ont pris en charge W._ pour le transporter au CHUV. Quant à M._ et P._, ils ont quitté les lieux avec leur voiture, dans laquelle le couteau finlandais a notamment été retrouvé, et se sont dirigés vers la gare, endroit où ils ont pu être interpellés. M._ a également été conduit au CHUV.
M._ présentait deux plaies thoraciques, avec la présence d’air tant dans la cavité thoracique que dans la cavité péritonéale, signant ainsi une effraction de ces cavités. Les plaies sont compatibles et évocatrices de lésions provoquées par un instrument tranchant et piquant. La vie de M._ n’a pas été mise en danger.
W._ présentait une plaie profonde au niveau du bras droit allant jusqu’à l’os avec section des muscles, une plaie profonde à l’avant-bras droit allant jusqu’à l’os avec une section des muscles extenseurs, des veines principales, du nerf radial et d’une petite branche du nerf médial ainsi qu’une ouverture de l’articulation du coude, une plaie profonde du pouce droit, au niveau de l’articulation interphalangienne avec une section des ligaments et une ouverture de la capsule articulaire, deux plaies profondes à l’avant bras, du poignet gauche ainsi qu’à la main gauche avec des lésions musculaires ainsi que deux plaies superficielles à la jambe droite. Les plaies à bords nets observées sont compatibles et évocatrices de lésions provoquées par un instrument tranchant et/ou piquant. La vie de W._, vu la lésion des vaisseaux avec saignement important, a été mise en danger. De plus, il a perdu la mobilité de son poignet droit. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de N._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP ; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
a)
L’appelante fait grief aux premiers juges de l’avoir condamnée pour instigation à contrainte alors que, d’une part elle n’a pas été renvoyée devant le Tribunal correctionnel pour cette infraction et, d’autre part, aucun des autres protagonistes n’a été condamné pour contrainte.
b) L’instigation est une forme de participation à une infraction déterminée. Ces éléments matériels sont ceux de cette infraction. Savoir s'il y a eu instigation à une infraction donnée doit donc être déterminé en référence aux éléments de cette infraction.
c) En l’espèce, les autres protagonistes n’ont pas été condamnés pour l’infraction de contrainte, mais uniquement pour tentative de contrainte. On voit dès lors mal comment N._ pourrait être condamnée pour instigation à contrainte. Seule subsiste l’infraction d’instigation à tentative de contrainte, celle-ci entrant alors en concours réel avec les tentatives de contrainte qu’elle a commises seule par le truchement des SMS qu’elle envoyait. Mais l’intéressée n’a été renvoyée que pour tentative de contrainte (et non pour instigation à tentative de contrainte). L’acte d’accusation n’a pas été aggravé. Dans ces conditions, N._ ne pourra qu’être condamnée pour tentative de contrainte puisque tous les autres chefs d’accusation ont été abandonnés par le Tribunal.
Vu ce qui précède, c’est à juste titre que l’appelante soutient que seule la tentative de contrainte peut être retenue à son encontre, à l’exclusion de l’instigation à contrainte. Bien fondé, ce grief doit être admis.
4.
a)
L’appelante a été condamnée à une peine pécuniaire de 200 jours-amende à 60 fr. l’unité, sous déduction de 4 jours de détention avant jugement. Elle conteste la quotité de cette peine.
b)
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
Pour fixer la peine, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Il y a toutefois violation du droit fédéral lorsque le juge sort du cadre légal, se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (TF 6B_85/2013 précité c. 3.1, ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1 et les références citées)
c) L’acquittement de N._ du chef d’accusation d’instigation à contrainte doit conduire à réduire la quotité de la peine. Il reste que la culpabilité de l’appelante est non négligeable. A cet égard, on notera que le constat fait par les premiers juges n’aurait pas été diamétralement différent sans cette infraction supplémentaire. Ainsi, les premiers juges ont admis que N._ ne voulait pas qu’on use de violence autre que verbale à l’endroit de son ex-mari. Il a aussi été relevé qu’elle n’a pas donné de directives particulières ou laissé entendre à son frère qu’il devait utiliser la violence physique à l’encontre de W._ (jugement entrepris, p. 41). L’instigation à contrainte n’a donc pas pesé lourd dans l’esprit des juges au moment de fixer la peine. C’est surtout la détermination glaçante de l’appelante, son absence d’émotion devant les blessures et la souffrance de W._ ainsi que son manque de compassion pour ce dernier qui ont motivé la peine prononcée (jugement entrepris, p. 45ss), constat que la Cour d’appel reprend à son compte.
Compte tenu de tous ces éléments, la peine sera réduite à 150 jours-amende à 60 fr. l’unité.
d) Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l’octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l’auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l’accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d’une appréciation d’ensemble, tenant compte des circonstances de l’infraction, des antécédents de l’auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l’état d’esprit qu’il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l’ensemble du caractère de l’accusé et ses chances d’amendement. Il n’est pas admissible d’accorder un poids particulier à certains critères et d’en négliger d’autres qui sont pertinents. Le juge doit par ailleurs motiver sa décision de manière suffisante (cf. art. 50 CP). Sa motivation doit permettre de vérifier s’il a été tenu compte de tous les éléments pertinents et comment ils ont été appréciés
(cf. ATF 134 IV 5 c. 4.2.1; ATF 128 IV 193 c. 3a; 118 IV 9 c. 2b). Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s’écarter qu’en présence d’un pronostic défavorable. Il prime en cas d’incertitude (cf. 134 IV 5 c. 4.2.2).
e) En l’espèce, N._ est une délinquante primaire. Tant à l’audience de jugement qu’aux débats d’appel, elle a formulé des regrets. Les conditions légales à l’octroi du sursis sont en l’état réalisées et rien ne s’oppose à ce qu’elle bénéficie d’un sursis complet. Le délai d’épreuve sera fixé à deux ans.
5.
a)
L’appelante soutient que les lésions subies par W._ ne sauraient lui être imputées ni sur le plan pénal, ni sur le plan civil, expliquant notamment qu’elle n’a jamais demandé à M._ d’user de violence physique envers W._.
b) En raison de sa nature, l’indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage ne pouvant que difficilement être réduit à une simple somme d’argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites; l’indemnité allouée doit toutefois être équitable. Le juge en proportionnera donc le montant à la gravité de l’atteinte subie et évitera que la somme accordée n’apparaisse dérisoire à la victime (ATF 125 III 269; ATF 118 II 410).
c) En l’espèce, P._ et M._ ont été reconnu débiteurs de W._ de la somme de 26'000 fr., à titre de tort moral, solidairement entre eux. Quant à l’appelante, elle a été reconnue seule débitrice d’un montant de 4'000 fr., également à titre de tort moral. Se pose dès lors la question du lien de causalité entre les souffrances physiques et psychologiques de la victime et l’acte illicite commis par l’appelante, qui prend la forme d’une tentative de contrainte. En premier lieu, on constate que c’est avant tout l’agression qui est à la source des souffrances de W._. Ensuite, même si ce dernier n’a pas obtempéré aux menaces, il a réellement craint pour son intégrité. En effet, rien ne lui a été épargné : une multitude de SMS à la hauteur de la détermination de N._, des menaces de s’en prendre à lui et à son entourage, en particulier à sa famille restée au Vietnam. C’est par conséquent bien l’énorme pression mise par l’appelante sur W._ qui a effrayé ce dernier au point qu’il se munisse d’un couteau pour sortir de chez lui. C’est encore sous l’effet de cette pression intense que W._, se sentant en grand danger, a sorti ce couteau pendant l’altercation durant laquelle il s’est fait physiquement violemment agresser. Il ne fait dès lors aucun doute que c’est sur impulsion de l’appelante que toute cette affaire a démarré. Force est dès lors de constater qu’elle est en partie responsable des souffrances de W._.
En définitive, mal fondé, ce moyen doit être rejeté.
6.
a)N._, P._ et M._ ont été condamnés à payer, solidairement entre eux, des dépens à hauteur de 10'514 fr. 55 avec intérêt à 5% l’an dès le 2 juillet 2013, en faveur de W._, au titre de frais d’avocat. L’appelante estime que seule une infime partie des frais d’avocat peut être mise à sa charge, le solde des frais devant être supporté par les deux autres condamnés, solidairement entre eux.
b) En l’occurrence, on rappellera que toute cette affaire prend sa source dans la volonté affichée et déterminée de l’appelante de récupérer par des moyens illicite une somme d’argent. Elle est donc, par son acte illicite, à l’origine de l’enquête pénale. Même si, on en convient, N._ n’a pas souhaité que les évènements prennent cette tournure, c’est elle qui a fait appel à son frère et à un tiers pour accentuer les pressions. On rappellera également qu’elle a envoyé une multitude de SMS menaçants qui ont déclenché un fort sentiment s’insécurité chez la victime, laquelle s’est munie d’un couteau tant elle avait peur de sortir. A cela s’ajoute que la présence d’un avocat était indispensable pour assumer la défense des intérêts de la victime.
Dès lors, sur ces bases, et même si les coprévenus sont plus impliqués que l’appelante dans le débats pénal, il ne se justifie aucunement que cette dernière ne participe pas, avec les autres, à ce poste du dommage de la victime.
Mal fondé, ce moyen doit être rejeté.
7.
a) Enfin, l’appelante se plaint du montant la part des frais de justice mis à sa charge, soit 4'812 fr. 30, estimant notamment que celui-ci tient compte des 4 jours de détention préventive qu’elle a subi.
b) Lorsque le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s’il a, de manière illicite et fautive, provoqué l’ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 426 al. 2 CPP).
Les frais de procédure se composent des émoluments visant à couvrir les frais et les débours effectivement supportés (art. 2 al 1 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux, RSV
312.03.1]
). Sont notamment des débours les notes établies par les autres services de l’Etat à l’exception des frais afférant à la détention avant jugement (art. 2 al. 2 ch. 6 TFJP).
c) En premier lieu, l’appelante se trompe lorsqu’elle estime qu’elle a dû payer les frais relatifs à sa détention avant jugement, ceux-ci n’étant plus considérés comme des débours depuis l’entrée en vigueur du nouveau CPP suisse au 1
er
janvier 2011. Ensuite, comme exposé sous chiffre 5b ci-dessus, il ne fait aucun doute que N._ est à l’origine de l’action pénale. En d’autres termes, elle est responsable de l’enquête qui s’est ouverte contre elle en tentant de contraindre son ex-mari, par des moyens illicites, de lui verser une somme d’argent, puis en faisant appel à des tiers pour parfaire sa contrainte. Dans ces conditions, il est évident que l’équité ne commande pas qu’une part des frais soit laissée à la charge de l’Etat et cela même si, au final, plusieurs chefs d’accusation ont été abandonnés.
Mal fondé, ce grief doit être rejeté.
8.
En définitive, l’appel doit être partiellement admis et N._ doit être libérée du chef d’infraction d’instigation à contrainte. Elle sera condamnée à une peine de 150 jours.amende à 60 fr. l’unité, avec sursis pendant deux ans.
Une indemnité de conseil d'office pour la procédure d'appel d'un montant de 200 fr., TVA et débours inclus, est allouée à Me Alain Brogli, qui a assisté W._ au début de la procédure d’appel. Une indemnité de conseil d’office pour la procédure d’appel d’un montant de 1’076 fr. 60 fr., TVA et débours inclus, est allouée à Me Sabrina Lampo, qui l’a ensuite remplacé.
Vu l’issue de la cause, les frais d’appel, par 3'406 fr. 60, y compris les indemnités dues à Mes Alain Brogli, par 200 fr. et Sabrina Lampo, par 1'076 fr. 60, sont mis par moitié, soit 1'076 fr. 60, à la charge de N._, le solde, par 1'703 fr. 30, étant laissé à la charge de l’Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c7931bce-4842-4288-8e85-da8318b5f691 | En fait :
A.
Par jugement du 7 février 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a condamné T._ pour violations simples et graves des règles de la circulation à huitante jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 80 fr., avec sursis pendant trois ans et 960 fr. (I), dit que la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement de l'amende serait de douze jours (II) et mis les frais de justice par 1383 fr. à la charge de la prénommée (III).
B.
Le 15 février 2011, T._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 21 mars 2011, T._ a conclu à l'annulation du jugement précité et à ce qu'elle soit "libérée de toute charge à son encontre". Elle n’a pas requis l’administration de preuves.
Le 11 avril 2011, le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne a annoncé qu’il renonçait à présenter une demande de non-entrée en matière et à déclarer un appel joint.
Aux débats du 20 mai 2011, l'appelante a confirmé ses déclarations faites devant le tribunal de première instance. Elle a déclaré contester l'ensemble des infractions retenues contre elle.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Née en 1959, T._, d'origine bosniaque, naturalisée suisse, est restauratrice à son compte à Lausanne. Son casier judiciaire est vierge. La situation personnelle de la prévenue n'a pas évolué depuis le jugement du 7 février 2011. Elle gagne 100'000 fr. net par an et paie par mois 850 fr. de loyer, 1'900 fr. d'impôts, 300 fr. d'assurance-maladie et 2'000 fr. de leasing pour son véhicule.
2.
2.1
Le samedi 11 juillet 2009, vers 08h15, sur les autoroutes A1 et A9, entre les jonctions de Belmont et de Morges-Est, T._, qui circulait au volant de son Audi Q7, a roulé à une vitesse de l'ordre de 140 km/h entre le km 11.000 et 9.500, alors que la vitesse était limitée à 80 km/h.
2.2
Au même endroit, alors que la circulation était déviée par un marquage spécifique sur la voie de droite et sur la bande d'arrêt d'urgence, elle n'a pas observé le marquage et a poursuivi sa route sur la voie de droite, franchissant la ligne de sécurité.
2.3
Entre la jonction de Vennes et le km 3.000, sur une distance de 500 mètres, alors que la vitesse était limitée à 100 km/h, la prévenue a roulé à une allure de l'ordre de 150 km/h.
2.4
Sur ce même tronçon, l'intéressée a continuellement circulé sur la voie centrale, alors que des espaces suffisants lui auraient permis de réintégrer la voie de droite.
2.5
Peu avant l'échangeur de Villars-Ste-Croix, l'appelante a rattrapé un usager sur la voie centrale et l'a dépassé par la droite, sans faire usage des indicateurs de direction.
2.6
Peu avant l'échangeur d'Ecublens, elle a rattrapé un automobiliste sur la voie de gauche et l'a devancé par la droite, sans enclencher son signofile.
2.7
Dans la courbe à droite de l'échangeur d'Ecublens, T._ a rattrapé un camion sur la voie de droite, a fait usage de son indicateur de direction gauche pour le dépasser et s'est déplacée sur la voie de gauche, contraignant l'automobiliste qu'elle venait de devancer à freiner.
2.8
Enfin, à l'approche de la zone de travaux Ecublens-Morges, la prénommée a suivi un automobiliste sur plusieurs centaines de mètres, à une vitesse de l'ordre de 80 km/h, à une distance de 5 à 10 mètres, avant de quitter l'autoroute à la sortie Morges-Est, où elle a été interpellée par la police. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
T._ "remet en cause l'intégralité des faits" constatés dans le jugement (recours, p. 2
in initio
; art. 399 al. 3 let. a CPP). Elle soutient au préalable que les gendarmes qui l'ont interpellée à la sortie de l'autoroute ont été contrariés par le fait qu'elle ait contesté les infractions qui lui étaient reprochées. Elle relève que le rapport de police du 19 juillet 2009 (pièce 4) sur lequel s'est fondé le premier juge est faux et totalement incohérent. Elle se réfère plus particulièrement sur ce point au témoignage de son frère (jugt, p. 3) qui a confirmé qu'elle ne s'était pas agenouillée devant les policiers, contrairement à ce qui a été constaté par ces derniers; selon l'appelante, "cette seule description dans le rapport de gendarmerie d'une attitude qu'[elle] n'a pas eue suffit à décrédibiliser complètement [ledit] rapport" (recours, p. 3, par. 2).
3.1
Le principe de l'appréciation libre des preuves, consacré par l'art. 10 al. 2 CPP (cf. art. 379 et 389 al. 1 CPP) interdit d'attribuer d'entrée de cause une force probante accrue à certains moyens de preuve, comme par exemple des rapports de police. Cela ne signifie pas pour autant, en application de la maxime
in dubio pro reo
, qu'en présence de moyens de preuve contradictoires, le Tribunal doive automatiquement privilégier les plus favorables pour le prévenu (TF 1P.283/2006 du 4 août 2006 c. 2.3 et la réf. cit.). Contrairement à ce que paraît penser l'appelante, on ne saurait non plus dénier d'emblée toute force probante à un rapport de police. Celui-ci est en effet, par sa nature, destiné et propre à servir de moyen de preuve, dans la mesure où le policier y reproduit des faits qu'il a constatés et il est fréquent que l'on se fonde, dans les procédures judiciaires, sur les constatations ainsi transcrites. Il en va de la sorte en matière de circulation routière (TF 6B_285/2010 du 4 avril 2010 c. 3.1 et les réf. cit.).
3.2
On ne voit pas, en l'espèce, ce qui justifierait de traiter différemment le rapport de police du 19 juillet 2009 sur lequel s'est fondé le tribunal. On ne saurait, comme le fait valoir T._, lui dénier toute force probante pour le seul motif que le témoin [...] a déclaré en audience que l'appelante ne s'était pas agenouillée devant les gendarmes au moment de son interpellation. On constatera sur ce point que le lien familial du témoin avec la prévenue peut justifier une certaine réserve dans l'appréciation de sa déposition. A cela s'ajoute que ledit témoin, qui a admis ignorer quels étaient les propos exacts tenus par sa sœur, a affirmé que celle-ci ne s'était pas énervée, alors qu'il ressort clairement des pièces du dossier que l'appelante a refusé de signer tout document (pièces 5 et 6), qu'elle a contesté tous les faits au moment de son interpellation – ce qu'elle admet d'ailleurs elle-même dans son recours (p. 3) – et qu'elle a dit en cours d'instruction, en référence avec les événements litigieux, "qu'il y a beaucoup de racisme" (PV aud. 1); sur la base de ces éléments, la remarque du rapport de police (pièce 4, p. 4) selon laquelle la saisie du permis de conduire a déclenché "un comportement d'énervement" de la part de T._ n'est pas absolument farfelue, comme celle-ci le prétend. Le témoignage de son frère ne modifie pas cette appréciation et le fait qu'il ait été soi-disant impressionné par la manière dont la prévenue a été interpellée n'est pas pertinent (recours, p. 3). Enfin et surtout, la déposition dont se prévaut la prénommée ne porte pas directement sur les faits qui lui sont reprochés, la question de savoir si elle s'est agenouillée ou non n'étant pas déterminante pour l'issue de la cause.
Cela étant, c'est à juste titre que l'autorité cantonale, confrontée à deux versions des faits, a estimé qu'aucune raison objective ne permettait de mettre en doute le rapport de police, confirmé par ses auteurs lors des débats. On relèvera à cet égard qu'il s'agit d'agents assermentés, que leurs déclarations sont concordantes et qu'elles sont à tout le moins partiellement confirmées par les éléments du dossier. En effet, on observera sur ce dernier point que les dénonciateurs ont indiqué correctement que la prévenue avait contesté toutes les fautes qui lui étaient reprochées (pièce 4, p. 4; PV aud. 2) et leurs explications quant à l'endroit où a eu lieu l'interpellation et à la manière dont ils ont rattrapé le véhicule de l'intéressée sont corroborées par les déclarations tant du témoin précité que de l'appelante elle-même. Il ne peut donc être retenu que les gendarmes ont tout inventé, comme le prétend T._. De surcroît, l'instruction n'a pas permis de confirmer la version exposée par la prévenue, qui a du reste renoncé à l'administration de toute preuve nouvelle.
Il s'ensuit que la démarche consistant à établir les faits sur la base du rapport de police du 19 juillet 2009 n'est pas contraire à la maxime
in dubio pro reo
au stade de l'appréciation des preuves.
Autre est la question de déterminer quelles sont les conclusions qui peuvent être tirées de ce rapport.
4.
T._ invoque la constatation incomplète ou erronée des faits (art. 398 al. 3 let. b CPP). Il ressort de ses moyens qu'elle conteste le raisonnement par lequel le premier juge a acquis la conviction qu'elle avait commis les infractions qui lui étaient reprochées.
4.1
La constatation est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, op. cit., n. 19 ad art. 398 CPP).
La présomption d'innocence, qui est garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009, précité, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38, c. 2a).
4.2
4.2.1
L'appelante reproche tout d'abord au tribunal d'avoir retenu deux excès de vitesse sans respecter les règles usuelles en la matière, à savoir l'art. 6 OOCCR-OFROU (Ordonnance de l'OFROU concernant l'ordonnance sur le contrôle de la circulation routière du 22 mai 2008, RS 741.013.1) et les instructions de l'OFROU concernant les contrôles de vitesse par la police et la surveillance de la circulation aux feux rouges du 22 mai 2008. Selon elle, les policiers n'ont utilisé aucun des systèmes admis par les dispositions susmentionnées pour constater les excès de vitesse, de sorte que c'est à tort qu'elle a été reconnue coupable de violations graves des règles de la circulation pour ces faits.
4.2.2
Il ressort du rapport de dénonciation du 19 juillet 2009 (pièce 4, p. 2) ainsi que du jugement attaqué (pp. 5 et 7) que la voiture de police qui a suivi T._ était un véhicule banalisé sans tachygraphe et que le compteur kilométrique n'a pas été étalonné. Il faut donc considérer que la voiture de police était dépourvue de tout système de mesure calibré.
L'art. 7 al. 3 OOCCR-OFROU autorise les mesures de vitesse effectuées au moyen d'un véhicule suiveur sans système de mesure calibré, précisant toutefois qu'elles doivent être limitées aux cas de dépassement de vitesse massifs, par quoi il faut entendre des infractions flagrantes, à savoir des dépassements excessifs de vitesse (cf. ATF 118 IV 188 c. 2d; TA FR, 26 août 1992
in
RFJ 1992 p. 350, JT 1993 I 699).
Dans ce cas, l'art. 8 al. 1 let. g de cette même ordonnance prévoit la déduction d'une marge de sécurité de 15 km/h pour une valeur mesurée inférieure ou égale à 100 km/h (ch. 1) et de 15 % pour les vitesses supérieures à 100 km/h (ch. 2).
Avant l'entrée en vigueur de l'OOCCR-OFROU, il n'existait pas de disposition spécifique à cet égard. Les instructions du DFJP recommandaient, en cas de dépassement de vitesse constaté par une voiture de police dépourvue d'un appareil enregistrant la vitesse, de déduire d'abord du résultat obtenu l'écart de vitesse indiqué dans le rapport de vérification, puis encore 15 % si la police avait suivi le véhicule sur moins de 500 mètres ou 10 % si la poursuite avait eu lieu sur une distance supérieure (JT 1993 I 699 précité). Le Tribunal fédéral a toutefois eu l'occasion de préciser que de telles instructions n'avaient pas le caractère de loi et étaient dénuées de toute force obligatoire, de sorte que le juge n'était nullement lié par elles (ATF 123 II 106 c. 2, JT 1997 I 725; ATF 121 IV 64 c. 3, JT 1997 IV 62; ATF 102 IV 271, SJ 1978 p. 49). Il en va dès lors de même des instructions de l'OFROU du 22 mai 2008. C'est donc en vain que T._ invoque une violation du droit en référence avec lesdites instructions (recours, p. 5; Kistler Vianin, op. cit., n. 14 ad art. 398 CPP).
Ainsi, avec l'art. 8 al. 1 let g OOCCR-OFROU, qui constitue la concrétisation d'une appréciation raisonnable des preuves par le juge pénal dans le domaine des excès de vitesse, les anciennes instructions du DFJP édictées en matière de mesure de vitesse sans système d'enregistrement sont entrées dans la loi, étant rappelé que par droit fédéral, on doit entendre les normes ressortant de la loi, ou d'arrêtés ou d'ordonnances pris en application et en conformité de la loi (ATF 102 IV 271, SJ 1978 p. 49 précité).
4.2.3
En l'espèce, la police, qui a suivi T._ sur une distance de 1500 mètres, a constaté, à la sortie du tunnel de Belmont, où la vitesse est limitée à 80 km/h, que la conductrice roulait à une allure de l'ordre de 140 km/h, ce qui, après déduction d'une marge de sécurité de 15 % (art. 8 al. 1 let. g ch. 2 OOCCR-OFROU), représente une vitesse de 119 km/h, soit un dépassement de 39 km/h de la vitesse autorisée à cet endroit.
Un tel excès de vitesse sur une autoroute est bien constitutif d'une violation grave des règles de la circulation au sens de l'art. 90 ch. 2 LCR (Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958) et ce, même si, comme c'est le cas en l'occurrence, la visibilité est excellente et le trafic de moyenne densité (
ATF 118 IV 188 précité).
S'agissant en revanche du second excès de vitesse, la police a indiqué que la prévenue circulait à une allure de l'ordre de 150 km/h sur un tronçon où la vitesse est limitée à 100 km/h. Cette vitesse correspond, marge de sécurité déduite, à un excès de 27,5 km/h par rapport à la vitesse autorisée.
Il s'agit donc, pour ce dernier cas, d'une violation simple – et non pas grave – des règles de la circulation, comme le tribunal l'a retenu.
Les éventuelles conséquences sur la peine de cette modification de la qualification pénale seront examinées ci-après.
4.3
T._ allègue ensuite que dans la mesure où le rapport de police a retenu qu'elle était restée continuellement sur la voie de droite, le premier juge a constaté à tort qu'elle avait franchi la ligne de sécurité du marquage temporaire permettant la déviation de la circulation sur la voie de droite et sur la bande d'arrêt d'urgence (jugt, p. 5, c. 2, ch. 1.2).
Contrairement à ce que fait valoir la prénommée, le fait qu'elle soit restée "continuellement sur la voie de droite" n'exclut pas qu'elle ait franchi la ligne de sécurité. L'intéressée fait une mauvaise interprétation de la phrase litigieuse. La simple lecture du rapport permet de comprendre qu'en réalité, en raison des travaux et d'un marquage spécial sur la chaussée, l'appelante aurait dû se rabattre sur la bande d'arrêt d'urgence pour se conformer à la signalisation. En restant sur la voie de droite, elle a franchi la ligne de sécurité du marquage temporaire "pour dépasser les autres usagers". Cette conclusion est d'autant plus logique qu'à la sortie du tunnel de Belmont, soit à la hauteur des travaux en question, l'intéressée roulait à une vitesse nettement excessive, comme on l'a rappelé ci-avant, ce qui lui a donc permis de rester sur la voie de droite et de dépasser les autres automobilistes, mais en franchissant la ligne de sécurité.
Partant, le moyen tiré d'une constatation erronée des faits est mal fondé et doit être rejeté.
4.4
T._ conteste toute faute pour ne pas avoir réintégré la voie de droite entre la jonction de Vennes et l'échangeur de Villars-Ste-Croix.
Contrairement à ce qu'elle prétend, cette contravention n'a pas seulement été commise aux abords de l'échangeur où se trouvent la jonction pour Yverdon, celle pour Genève et la sortie de Crissier, mais elle l'a également été sur la section précédente, où il n'y a aucun changement de direction à envisager. En outre, dès lors que "chaque justiciable a connaissance de ce tronçon", comme la prévenue l'admet elle-même (recours, p. 7, par. 2), elle savait quelle "portion d'autoroute" – pour reprendre ses propres termes – elle devait emprunter pour se rendre à Morges, où son frère l'attendait, les panneaux indicateurs de direction pour Genève étant d'ailleurs bien visibles à l'approche de l'échangeur en question. L'appelante ne saurait ainsi rien tirer en sa faveur de l'indication du tribunal selon laquelle il n'est pas toujours aisé de savoir exactement ce qu'il faut faire à cet endroit (jugt, p. 7), ce d'autant plus qu'en l'occurrence, le trafic était fluide, ce qui rendait possible l'usage de la bonne voie, comme l'a précisé le premier juge (
ibidem
); ce dernier point est confirmé par le fait que l'intéressée n'a pas hésité à dépasser un automobiliste par la droite, comme on le verra ci-après. Enfin, T._ ne saurait se prévaloir du fait qu'elle n'a créé aucune mise en danger de la circulation, puisque seul l'art. 90 ch. 1 LCR, qui ne prévoit pas cette condition, a été retenu pour ces faits.
Mal fondé, le moyen doit donc être rejeté.
4.5
L'appelante soutient que le premier juge a retenu à tort que peu avant l'échangeur de Villars-Ste-Croix, elle avait rattrapé un usager sur la voie centrale et l'avait dépassé par la droite, sans faire usage des indicateurs de direction, puisqu'il ressort du rapport de police que l'automobiliste qui la précédait circulait "normalement", ce qui signifie, selon elle, que ce dernier roulait sur la voie de droite.
La prévenue a tort. Contrairement à ce qu'elle affirme (recours, p. 8, par. 1), les gendarmes ont bel et bien précisé, en page 2, paragraphe 2, du rapport de dénonciation, que l'usager qu'elle avait rattrapé circulait sur la voie centrale, ce qui n'exclut pas, comme elle le prétend, que cet automobiliste roulait "normalement en direction de Genève". Partant, on ne saurait reprocher au tribunal, qui a indiqué que la prénommée avait dépassé par la droite un véhicule qui circulait sur la voie centrale, d'avoir constaté les faits de manière erronée. Il n'y a, dès lors, aucune contradiction entre le rapport de police et le jugement attaqué.
Le moyen est mal fondé et doit donc être rejeté.
4.6
L'appelante soulève la même objection s'agissant du dépassement par la droite d'un véhicule allemand. Encore une fois, son argumentation procède d'une mauvaise lecture du rapport de police, puisque celui-ci indique clairement que le conducteur qui précédait la prévenue roulait sur la voie de gauche. Replacée dans le contexte auquel elle appartient, l'expression selon laquelle l'automobiliste en question conduisait "normalement" se réfère non pas à la voie de circulation, mais à sa vitesse, l'intéressée, quant à elle, "roula[n]t toujours à une vitesse supérieure à celle prescrite", comme le précise le rapport.
Par conséquent, mal fondé, ce grief doit également être rejeté.
4.7
T._ s'en prend ensuite à l'indication du tribunal selon laquelle, après le dépassement du conducteur allemand par la droite, elle a contraint ce dernier à freiner au moment où elle s'est déplacée sur la voie de gauche. Elle estime avoir été "surprise par la vitesse de la voiture allemande" et avoir ainsi été "contrainte (...) de se rabattre sur la voie de gauche" (recours, p. 9, let F, par. 5).
Outre le fait que ce n'est pas sur la voie de gauche, mais sur celle de droite que la prénommée s'est rabattue, il résulte du rapport de dénonciation qu'elle a rattrapé un camion sur la voie de droite, ce qui sous-entend qu'elle n'a pas pu maintenir son allure avant la tentative de dépassement qui a contraint l'automobiliste allemand à freiner. Cela explique également pourquoi ce dernier circulait à une vitesse supérieure à celle de l'appelante. Rien ne démontre, en revanche, que l'usager allemand roulait à une allure "extrêmement élevée", comme le soutient la prévenue; si tel devait être le cas, on se demande alors quelle vitesse aurait dû atteindre T._ pour dépasser à son tour le véhicule en question, le rapport précisant en effet que l'intéressée a accéléré et s'est déplacée à nouveau à gauche devant ledit conducteur, ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas. Quoi qu'il en soit, le fait que l'appelante ait réintégré la voie de droite démontre que sa manœuvre a effectivement gêné l'automobiliste allemand qui a dû freiner, ce qui constitue bel et bien une violation grave des règles de la circulation.
Mal fondé, le moyen ne peut dès lors qu'être rejeté.
4.8
T._ reproche enfin au tribunal d'avoir retenu qu'elle avait talonné un autre automobiliste à l'approche de la zone de travaux Ecublens-Morges. Elle fait valoir que le rapport de police ne contient aucune indication quant à la distance entre son véhicule et celui des gendarmes, de sorte que ceux-ci ne pouvaient affirmer de manière aussi péremptoire qu'elle circulait à une distance de 5 à 10 mètres de la voiture qui la précédait.
Cet argument tombe à faux. Le rapport de dénonciation précise clairement que les policiers ont suivi l'appelante sur une longue distance, soit sur environ quinze kilomètres (jugt, p. 7
in fine
), qu'il n'y avait pas beaucoup de trafic et que la visibilité était bonne. Dans ces conditions, l'indication des gendarmes, reprise par le tribunal, selon laquelle la prévenue a suivi l'automobiliste qui la précédait à une distance variant entre 5 et 10 mètres ne souffre aucune critique. Même si l'on admettait que les dénonciateurs se trouvaient à 40 mètres de T._, comme celle-ci le prétend (recours, p. 10), cela n'exclurait pas en soi, vu les circonstances, qu'ils aient pu déterminer que la prénommée talonnait un autre véhicule. Au contraire, le fait que l'intéressée ait suivi la voiture en question sur plusieurs centaines de mètres, ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas, a permis aux gendarmes d'établir à quelle distance approximative la prévenue roulait de l'autre usager.
Au surplus, il ressort du rapport (p. 3) qu'à l'endroit incriminé, la chaussée était réduite à une seule voie de circulation, que la vitesse était limitée à 80 km/h, que T._, qui avait circulé jusque là à une vitesse excessive, avait "rattrapé" le véhicule en cause et qu'elle était en retard au rendez-vous. Au vu de ces éléments, le talonnage qui est reproché à l'appelante est établi.
Le jugement ne contient dès lors aucune constatation incomplète ou erronée des faits. Le moyen est mal fondé et doit donc être rejeté.
5.
Reste à déterminer dans quelle mesure la modification de la qualification pénale d'une violation grave en violation simple des règles de la circulation (cf. ch. 4.2.3
supra
) influe sur la peine fixée par le tribunal, étant précisé que T._ ne conteste pas en soi la sanction qui lui a été infligée, si ce n'est pour affirmer, en partant du principe que tous ses moyens sont admis, qu'elle doit être acquittée. On rappellera sur ce point que la Cour d'appel pénale peut statuer d'office sur le genre et la quotité de la peine (art. 404 al. 2 CPP).
5.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
Selon la jurisprudence développée sous l'empire de l'art. 63 aCP, les éléments fondant la culpabilité que le juge doit examiner en premier lieu sont ceux qui se rapportent à l'acte lui-même, à savoir : du point de vue objectif, le résultat de l'activité illicite, le mode et l'exécution de l'acte ainsi que, du point de vue subjectif, l'intensité de la volonté délictueuse de l'auteur ou la gravité de la négligence et ses mobiles. En second lieu, le juge prendra en considération les éléments concernant la personne de l'auteur : ses antécédents, sa situation personnelle, tant familiale que professionnelle – qui comprend l'éducation reçue et la formation suivie – son intégration sociale, voire sa réputation ainsi que son attitude et son comportement après les faits et dans le cadre de la procédure pénale (Nicolas Queloz/Valérie Humbert, in : Roth/Moreillon [éd.], Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 7 ad art. 47 CP; ATF 129 IV 6 c. 6.1, JT 2005 IV 229 c. 6.1; ATF 127 IV 101 c. 2a; ATF 118 IV 21 c. 2b).
L'art. 47 al. 1 CP fixe le principe et reprend le critère des antécédents et de la situation personnelle. La portée de l'absence d'antécédents doit être relativisée. En effet, sauf circonstances exceptionnelles, elle a un effet neutre sur la fixation de la peine et n'a donc plus à être prise en considération dans un sens atténuant (ATF 136 IV 1 c. 2.6.4). L'art. 47 al. 1 CP enjoint encore au juge de prendre en considération l'effet de la peine sur l'avenir du condamné. Cet aspect de prévention spéciale ne permet toutefois que des corrections marginales, la peine devant toujours rester proportionnée à la faute (TF 6B_14/2007 du 17 avril 2007, c. 5.2).
Codifiant la jurisprudence rendue sous l'empire de l'ancien droit (art. 63a CP), l'art. 47 al. 2 CP énumère de manière non limitative les critères permettant de déterminer le degré de gravité de la culpabilité de l'auteur. Ainsi, le juge devra prendre en considération la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné ainsi que le caractère répréhensible de l'acte, qui correspondent respectivement au "
résultat de l'activité illicite
" et au "
mode et exécution de l'acte
" de la jurisprudence (TF 6B_710/2007 du 6 février 2008 c. 3.2 et les réf. cit.). Sur le plan subjectif, le texte légal cite la motivation et les buts de l’auteur, qui correspondent aux mobiles de l’ancien droit (art. 63 aCP), et la mesure dans laquelle l’auteur aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, qui se réfère au libre choix de l’auteur entre la licéité et l’illicéité (ATF 127 IV 101, précité, c. 2a). Concernant ce dernier élément, le législateur enjoint le juge de tenir compte de la situation personnelle de l’intéressé et des circonstances extérieures (TF 6B_143/2007 du 25 juin 2007 c. 8.1).
En vertu de l'art. 50 CP, le choix de la sanction, comme la quotité et la durée de celle qui est prononcée, doivent être motivés de manière suffisante. Le juge doit exposer dans sa décision les éléments essentiels relatifs à l'acte et à l'auteur qu'il prend en compte, de manière à ce que l'on puisse vérifier que tous les aspects pertinents ont été pris en considération et comment ils ont été appréciés, que ce soit dans un sens atténuant ou aggravant. La motivation doit justifier la peine prononcée, en permettant de suivre le raisonnement adopté, mais le juge n'est nullement tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentage l'importance qu'il accorde à chacun des éléments qu'il cite (ATF 127 IV 101 c. 2c et les arrêts cités). Plus la peine est élevée, plus la motivation doit être complète (ATF 134 IV 17 c. 4.2.1 et les arrêts cités).
5.2
En définitive, T._ s'est rendue coupable de cinq violations simples et de trois violations graves des règles de la circulation au sens de l'art. 90 ch. 1 et 2 LCR, qui entrent en concours (art. 49 al. 1 CP).
Les violations graves des règles de la circulation consistent en un excès de vitesse, une tentative de dépassement qui a contraint un autre automobiliste à freiner d'urgence et un talonnage. Les règles enfreintes étant essentielles à la sécurité routière, il s'agit bel et bien de cas entraînant l'application de l'art. 90 ch. 2 LCR, ce qui n'est en soi pas contesté. A cela s'ajoutent ainsi cinq contraventions pour franchissement d'une ligne de sécurité, excès de vitesse, circulation abusive sur la voie centrale et deux dépassements par la droite sans l'usage des indicateurs de direction. Cette énumération montre que, compte tenu du concours de délits et de l'accumulation de contraventions, la peine prononcée par le premier juge est encore parfaitement justifiée.
La Cour d'appel pénale considère, à l'instar du premier juge (jugt, p. 7
in fine
), que la culpabilité de T._ n'est pas légère.
On rappellera que c'est prise dans son ensemble que la peine prononcée doit correspondre à la culpabilité de l'auteur telle qu'elle est définie par la loi. C'est donc en regard de la sanction globale que l'autorité de céans doit examiner si la quotité de la peine pécuniaire et l'amende ont été fixées conformément aux principes qui viennent d'être rappelés (TF 6S.677/1996 du 4 novembre 1996 c. 2a). Partant, la modification de la qualification juridique d'un excès de vitesse telle que retenue ci-avant n'entraîne pas à elle seule une diminution des jours-amende. Si tel devait être le cas, il faudrait augmenter le montant de l'amende pour la contravention supplémentaire ainsi que la quotité de la peine privative de liberté de substitution, ce qui pourrait constituer une aggravation de la sanction, interdite par l'art. 391 al. 2 CPP (CCASS, 14 février 2007, n° 118). A cela s'ajoute que le tribunal a suivi le Ministère public dans sa réquisition tout en précisant à bon droit que la peine demandée était clémente (jugt,
idem
), de sorte que, pour ce second motif également, le fait de modifier la qualification d'une seule infraction peut rester sans conséquence dans le cas d'espèce, ce d'autant plus que la qualification des infractions prises dans leur ensemble ne subit, quant à elle, aucun changement, T._ étant toujours reconnue coupable de violations simples et graves des règles de la circulation. Enfin, le tribunal a retenu que l'absence d'antécédents atténuait – certes légèrement – la culpabilité de la prévenue, alors que, comme on l'a vu ci-haut, cet élément ne doit pas être pris en considération dans un sens atténuant, sauf circonstances exceptionnelles, inexistantes en l'espèce.
Ensuite, par son attitude tant devant la police que devant le Juge d'instruction, la prénommée a démontré, comme le tribunal l'a à juste titre relevé (jugt, p. 7
in fine
), une absence totale de prise de conscience, se limitant dans un premier temps à nier les faits, avant de prétendre qu'elle était victime de racisme de la part des policiers (PV aud. 1, p. 2), et allant jusqu'à affirmer pour finir (recours, pp. 3 et 11) que les dénonciateurs ont été contrariés par son attitude de déni et que c'est pour ce motif qu'ils ont tout inventé.
Le comportement autoroutier de l'intéressée est d'autant plus inquiétant que moins de cinq mois avant les faits litigieux, elle a reçu un avertissement du Service des automobiles pour excès de vitesse (jugt, p. 5; PV aud. 1, p. 1
in fine
).
Pour le reste, une peine pécuniaire (art. 34 CP) est adéquate pour réprimer une infraction relevant de la moyenne délinquance, commise par un auteur dépourvu d'antécédents et bien socialisé (cf. ATF 134 IV 82 c. 4.1; TF 6B_541/2007 du 13 mai 2008), et le montant du jour-amende tient compte des ressources de la prévenue (jugt, p. 5
in initio
).
En définitive, une peine pécuniaire de huitante jours-amende à 80 fr. le jour-amende, avec sursis pendant trois ans, et une amende de 960 fr. apparaissent adéquates.
6.
En conclusion, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé,
la modification de la qualification juridique retenue étant sans incidence sur le dispositif du jugement entrepris.
Vu l'issue de la cause, les frais du présent jugement selon l'art. 424 CPP doivent être mis à la charge de l’appelante (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c7df67af-bd90-4891-8b8c-5ce24f129797 | En fait :
A.
Par jugement du 7 septembre 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré P._ des infractions de dénonciation calomnieuse et de contravention à la Loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (I), a constaté que la prénommée s'est rendue coupable d'infraction à la Loi fédérale sur les étrangers (II), l'a condamnée à une peine pécuniaire de dix jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr. (III), a suspendu l'exécution de la peine pécuniaire et fixé à P._ un délai d'épreuve de deux ans (IV), a pris acte de la transaction passée par la prénommée et Q._ pour valoir jugement (V), a mis les frais de la cause par 6'223 fr. 60 à la charge de P._, dont 3'693 fr. 60 d'indemnité à son conseil d'office (VI), a dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité d'office ne sera exigible que pour autant que la situation financière de la prévenue le permette (VII), a arrêté l'indemnité d'office de Me Christophe Tafelmacher, conseil de Q._, à 4'100 fr. et l'a laissée à la charge de l'Etat (VIII).
B.
Le 20 septembre 2011, P._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d'appel motivée du 16 décembre 2011, elle a conclu à sa réforme en ce sens qu'elle est libérée du chef d'accusation d'infraction à la Loi fédérale sur les étrangers, les frais de la cause étant laissés à la charge de l'Etat. EIle a en outre requis l'audition comme témoins de K._ et G._.
Le 6 janvier 2012, le Ministère public a annoncé qu'il s'en remettait à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et qu'il renonçait à déclarer un appel joint.
Par courrier du 12 janvier 2012, la Présidente de la cour de céans a rejeté les réquisitions de preuve de P._ pour le motif qu'aucune des hypothèses de l'art. 389 CPP n'était réalisée.
Le Ministère public a, par courrier du 27 janvier 2012, déclaré qu'il renonçait à déposer des conclusions.
En raison de sa santé précaire, l'appelante a, par lettre du 10 février 2012, demandé d'être dispensée de la comparution à l'audience d'appel. La Présidente a fait droit à cette requête.
A l'audience de ce jour, le défenseur de P._ s'est référé expressément aux moyens développés dans son écriture et a confirmé ses conclusions.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Née en 1923 en Italie, pays dont elle est ressortissante, domiciliée à Prilly, P._ est au bénéfice d'un permis C. Veuve de [...], c'est son fils [...] qui s'occupe de ses affaires depuis mars 2008. La prévenue bénéficie d'une rente AVS et de prestations complémentaires, ce qui lui donne droit à environ 80 heures de ménage par mois. Son casier judiciaire est vierge.
2.
2.1
A Prilly, suite à un entretien du 7 décembre 2007 entre Q._, d'une part, et P._ et sa voisine K._, d'autre part, P._ a engagé et employé, du 10 décembre 2007 au 17 mai 2008, Q._ comme femme de ménage, alors que celle-ci était en situation illégale en Suisse, n'étant titulaire d'aucun permis de séjour, partant, d'aucune autorisation de travail.
2.2
Le 19 mai 2008, la prévenue a déposé plainte pénale pour le vol de 1'150 fr. survenu à son domicile entre le 5 et le 17 mai 2008, portant ses soupçons sur son ex-employée Q._. Un non-lieu définitif a été rendu sur ces faits en faveur de cette dernière.
Q._ a, à son tour, déposé plainte le 26 mai 2008 contre P._ pour diffamation et calomnie, plainte qu'elle a retirée à la suite de la conciliation survenue à l'audience de première instance au cours de laquelle la prévenue s'est reconnue sa débitrice de la somme de 500 fr. à titre de tort moral, sans reconnaissance de responsabilité et pour solde de tout compte.
2.3
Se fondant sur les déclarations concordantes de Q._ et de K._, le premier juge a retenu que lors de l'entretien d'embauche, Q._ avait dit à la prévenue et à sa voisine K._, qui assistait à cette entrevue, qu'elle n'avait pas de permis de travail. Le tribunal a donc conclu que la prévenue savait, au moment où elle l'a engagée, que Q._ était en situation irrégulière en Suisse. Il a dès lors reconnu P._ coupable d'infraction à la Loi fédérale sur les étrangers, mais l'a libérée de la contravention à la Loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers applicable pour la période allant du 10 au 31 décembre 2007, cette infraction étant prescrite.
Le tribunal n'a en revanche pas retenu la dénonciation calomnieuse à l'encontre de la prévenue. Il a expliqué, sur la base des propos tenus par K._ et Q._, que dans la mesure où il ne pouvait exclure qu'en raison de son grand âge, l'appelante avait fait quelques confusions tant sur la question de l'argent dérobé que sur l'auteur du vol en question, il n'était pas parvenu à se convaincre qu'elle avait pleinement conscience de la fausseté de ses accusations à l'encontre de Q._. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
L'appelante conteste s'être rendue coupable d'infraction à la Loi fédérale sur les étrangers au sens de l'art. 117 al. 1 LEtr. Elle soutient n'avoir pas agi intentionnellement et n'être dès lors pas punissable. Elle aurait agi tout au plus par négligence.
3.1
L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de la Loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (ci-après : LEtr, RS 142.20) a entraîné l'abrogation de la Loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 26 mars 1931 (ci-après : aLSEE ).
Aux termes de l'art. 23 aLSEE, celui qui, intentionnellement, aura occupé des étrangers non autorisés à travailler en Suisse sera, en plus d'une éventuelle sanction en application de l'al. 1, puni pour chaque cas d'étranger employé illégalement d'une amende jusqu'à 5'000 fr. Celui qui aura agi par négligence sera puni d'une amende jusqu'à 3'000 fr. Dans les cas de très peu de gravité, il peut être fait abstraction de toute peine. Lorsque l'auteur a agi par cupidité, le juge peut infliger des amendes d'un montant supérieur à ces maximums (al. 4).
D'après l'art. 117 al. 1 LEtr, quiconque, intentionnellement, emploie un étranger qui n'est pas autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse ou a recours, en Suisse, à une prestation de services transfrontaliers d'une personne qui n'a pas l'autorisation requise est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire. Dans les cas graves, la peine sera une peine privative de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire. En cas de peine privative de liberté, une peine pécuniaire est également prononcée.
Les dispositions précitées divergent sur deux points essentiels. D'une part, l'art. 117 LEtr ne punit que les actes commis intentionnellement, alors que l'art. 23 al. 4 aLSEE sanctionne également la négligence. D'autre part, le nouveau droit prévoit la peine privative de liberté, soit des sanctions plus sévères que sous l'ancienne loi (TF 6B_184/2009 du 20 mai 2009 c. 1.2.1 et la référence citée).
Selon l'art. 2 al. 1 CP, la loi pénale ne s'applique qu'aux faits commis après son entrée en vigueur (principe de la non-rétroactivité de la loi pénale). Cependant, en vertu de l'al. 2 de cette disposition, une loi nouvelle s'applique aux faits qui lui sont antérieurs si, d'une part, l'auteur est mis en jugement après son entrée en vigueur et si, d'autre part, elle est plus favorable à l'auteur que l'ancienne (exception de la lex mitior; cf. ég. art. 126 al. 4 LEtr).
Dès lors, pour la période antérieure au 1
er
janvier 2008, si l'auteur a agi par négligence, il doit être acquitté en vertu du nouveau droit. En revanche, si l'intention, qui comprend également le dol éventuel, doit être retenue, c'est l'ancienne LSEE qui s'applique, les sanctions prévues étant alors plus favorables à l'intéressé (TF 6B_184/2009 précité, c. 1.2.2).
En l'occurrence, comme le premier juge l'a à juste titre retenu, la LEtr est applicable pour la période du 1
er
janvier au 17 mai 2008. L'aLSEE l'est à titre de lex mitior pour la période du 10 au 31 décembre 2007 puisque la contravention réprimée par l'art. 23 al. 4 de cette loi, érigée en délit par le nouveau droit, est aujourd'hui prescrite.
3.2
Selon l'art. 11 LEtr, tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d’une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour. Il doit la solliciter auprès de l’autorité compétente du lieu de travail envisagé (al. 1). Est considérée comme activité lucrative toute activité salariée ou indépendante qui procure normalement un gain, même si elle est exercée gratuitement (al. 2). En cas d’activité salariée, la demande d’autorisation est déposée par l’employeur (al. 3).
Nonobstant une formulation différente, l'art. 117 LEtr, qui réprime le fait d'employer un étranger qui n'est pas autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse, n'a pas de portée distincte de l'art. 23 al. 4 aLSEE. Dans cette mesure, la jurisprudence relative à cette dernière disposition conserve donc sa valeur. Subséquemment, le terme "employer" doit être compris de manière large, comme consistant non seulement à conclure et exécuter un contrat de travail au sens des art. 319 ss CO (Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse, RS 220), mais également à faire exécuter une activité lucrative à quelqu'un, quelle que soit la nature du rapport juridique entre l'auteur et la personne employée. Il doit s'agir d'un comportement actif; une simple permission ou tolérance ne suffit pas. Il n'est en revanche pas nécessaire que l'auteur ait la compétence de donner des instructions à la personne employée. Il suffit qu'il entre dans ses attributions de décider qui peut, ou ne peut pas, participer à l'exécution de la tâche et qu'ainsi sa décision conditionne l'activité lucrative de l'intéressé (ATF 137 IV 153 c. 1.5 et les références citées).
3.3
3.3.1
Le grief soulevé par l'appelante, qui reproche au tribunal d'avoir retenu qu'elle connaissait le caractère irrégulier de la situation de Q._ au moment où elle l'a engagée, revient à critiquer l'appréciation des preuves et l'établissement des faits par le premier juge, ce que l'auteur d'une infraction savait, voulait ou l'éventualité à laquelle il consentait relevant du fait (ATF 130 IV 20 c. 1.3 et les arrêts cités), comme la prévenue le rappelle d'ailleurs elle-même en page 3 de son mémoire d'appel.
Or, selon l'art. 10 al. 2 CPP, le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure.
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
3.3.2
En l'espèce, le tribunal a tenu pour crédibles les déclarations durant l'enquête et aux débats de Q._ et celles de K._, soit la voisine de l'appelante qui a assisté à l'entretien d'embauche du 7 décembre 2007 et qui a rédigé le contrat de travail du 10 décembre 2007 (pièce 8/1) – ce qui n'est pas contesté. Selon les affirmations concordantes des deux prénommées, Q._ a, lors de cette entrevue, informé ses interlocutrices, soit P._ et K._, qu'elle n'avait pas de permis de séjour. Cette appréciation doit être confirmée.
L'appelante fait valoir que le témoignage de K._ n'est pas crédible, dès lors que leur relation s'est fortement détériorée depuis l'époque des faits; selon elle, il existe de forts doutes d'une instrumentalisation et ce témoignage est à prendre avec précaution. On relèvera d'emblée que cet argument n'a jamais été invoqué auparavant, alors que la prévenue n'a tout au long de la procédure à aucun moment contesté les déclarations de K._, telles qu'elles ressortent de son interrogatoire par le Juge d'instruction du 30 mars 2010 (PV aud. 9), ni demandé à ce que celle-ci soit réentendue; d'ailleurs, l'appelante n'a pas réagi au courrier du conseil de la plaignante du 1
er
septembre 2011 (pièce 52) demandant la renonciation à l'audition dudit témoin aux débats et soumettant expressément cette requête "à la réserve que Madame P._ ne remette pas en cause les déclarations de Madame K._" (cf. ég. pièce 55, p. 2). A cela s'ajoute que cette dernière a été entendue en qualité de complice d'infraction à la LEtr et qu'elle s'est incriminée elle-même en affirmant que Q._ les avaient informées, lors de son entretien d'embauche, qu'elle n'était titulaire d'aucun permis de séjour, ce qui tend à rendre ses déclarations d'autant plus crédibles. On ne voit pas en effet quel intérêt K._, qui n'était pas assistée (pièce 29), pouvait avoir à tenir de tels propos;
il aurait été plus simple pour elle de se taire, possibilité qui lui a du reste été offerte lors de son audition par le magistrat instructeur.
En outre, K._ n'a pas caché que ses relations avec la prévenue s'étaient détériorées, ni quelles en étaient les raisons.
De surcroît, il importe peu de savoir quels sont les motifs qui ont poussé Q._ à solliciter, par courrier du 8 mars 2010 (pièce 27), l'audition comme témoin de K._. Aucun élément du dossier ne permet au demeurant d'affirmer, contrairement à ce que prétend la prévenue sans plus amples explications (appel, p. 5), que la plaignante savait que les rapports entre P._ et K._ étaient tendus à l'époque, et que, partant, le témoignage de cette dernière a été instrumentalisé.
Enfin, l'appelante perd de vue que le jugement entrepris se base sur les déclarations de Q._ et de K._, d'une part, pour la libérer de l'infraction de dénonciation calomnieuse et, d'autre part, pour la condamner pour infraction à la LEtr. C'est dire si leurs déclarations, nuancées, sont crédibles.
Au vu de ces différents éléments, l'appréciation des preuves par le tribunal échappe à la critique.
Mal fondé, le moyen ne peut dès lors qu'être rejeté.
4.
P._ soulève encore une série de moyens tendant à établir qu'elle a cru de bonne foi que Q._ avait un permis de travail. Or, dans la mesure où, comme on vient de le voir, il est établi que la jeune femme a, au cours de son entretien d'embauche, informé l'appelante qu'elle n'était titulaire d'aucun permis de séjour, tous ces griefs sont mal fondés. Pour le surplus, ils doivent être rejetés pour les raisons qui suivent.
4.1
Comme premier moyen, la prévenue fait valoir que c'est son fils [...] qui s'occupait de ses affaires à l'époque des faits. Or, il ressort de l'audition de ce dernier du 24 novembre 2009 (PV aud. 6) ainsi que de la pièce 22/1 (p. 2) qu'il s'en occupe depuis mars 2008 seulement – soit postérieurement à l'engagement de Q._ – et non depuis mars 1988 comme l'a retenu à tort le tribunal, auquel cas on comprend mal pourquoi il n'aurait pas assisté à l'entretien ou rédigé lui-même le contrat (pièce 8/1). A cela s'ajoute que le prénommé n'a pas prétendu être l'employeur de la jeune femme. Sur ce point, il suffit de constater que toutes les démarches ont été faites par l'appelante et que c'est elle qui a signé la convention en février 2009 mettant fin au litige civil l'opposant à la plaignante après que celle-ci eut saisi le Tribunal des Prud'hommes pour obtenir le paiement du salaire du mois de mai 2008 (pièce 23/2).
4.2
Dans un deuxième moyen, P._ se réfère aux déclarations de G._ (PV aud. 7), employée au Service social de Prilly, pour soutenir qu'elle a demandé en vain à plusieurs reprises à Q._ son permis de séjour, ce qui démontrerait qu'elle croyait de bonne foi que cette dernière était titulaire d'un tel permis. Outre le fait que ledit témoin fait référence à une déclaration que la prévenue lui a faite à "fin 2008" (PV aud. 7, p. 1
in fine
), soit une année – et non quelques jours (appel, p. 4
in initio
) – après l'engagement de la jeune femme, ce témoignage a trait à des propos tenus après que l'appelante s'est retrouvée elle-même prévenue d'infraction à la LEtr. Cette dernière se fonde ensuite sur l'affirmation dudit témoin selon laquelle la prévenue "a voulu procéder de manière régulière en ce qui concerne l''annonce' de l'emploi de Mme Q._ puisqu'elle a pris contact avec [lesdits] services et a fait nécessaire pour ouvrir un dossier". Cependant, on ne saurait rien tirer de cette déclaration. La prévenue semble en effet oublier que ce n'est pas elle qui payait son employée, mais la caisse de compensation et que pour obtenir les prestations complémentaires lui donnant droit à 80 heures de ménage par mois, elle devait collaborer avec les services sociaux de Prilly. Sur ce point, on remarquera que la volonté de la prévenue d'être en règle doit être nuancée, dans la mesure où elle a reçu plusieurs rappels de la caisse AVS pour son affiliation en tant qu'employeur (cf. pièces 22/5, 22/6 et 22/7). A cela s'ajoute que les seuls documents nécessaires à "l'annonce" de Q._ auprès des services sociaux étaient un certificat AVS de la jeune femme ainsi qu'un certificat de l'assurance-accident et une attestation LPP de P._ (pièces 22/2, 22/4 et 22/7). Contrairement à ce qu'affirme cette dernière (pièce 22/1), qui se fonde sur un document manuscrit non daté et non signé (pièce 22/3), la production du permis de séjour n'était pas requise, G._, dont il n'y a pas lieu de remettre en cause les compétences, ayant d'ailleurs clairement expliqué qu'aucun contrôle quant au statut de séjour en Suisse de l'employé n'est effectué dans ce genre de cas.
4.3
P._ soutient ensuite que dans la mesure où le salaire était versé par la Caisse cantonale vaudoise de compensation, elle pouvait penser de bonne foi que celle-ci avait procédé aux contrôles adéquats. C'est oublier que la prévenue a répondu à une annonce et qu'elle a souhaité engager elle-même une employée, comme G._ l'a également relevé lors de son audition (PV aud. 7). D'ailleurs, comme on vient de le voir, l'appelante n'a pas fourni en temps utile les renseignements requis par les services sociaux et par la caisse AVS, qui auraient été bien en peine, dans ces conditions, de faire les vérifications nécessaires.
4.4
La prévenue indique encore que la durée du contrat de travail de 5 mois était trop courte pour lui laisser le temps de régulariser son employée (sous-entendu : en déclarant son emploi – PV aud. 6), d'autant plus que celle-ci a systématiquement trouvé des excuses pour ne pas produire son permis de séjour. On ne saurait suivre ce raisonnement. Certes, Q._ a admis que l'appelante ou son fils lui avait demandé son permis (PV aud. 8, p. 2); toutefois, comme on l'a relevé ci-dessus, aucun permis de séjour n'était requis des services sociaux pour que la prévenue puisse affilier sa femme de ménage à la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS (PV aud. 7). Il n'est au surplus pas reproché à P._ de n'avoir pas fait les démarches nécessaires pour que sa femme de ménage soit annoncée aux services compétents, mais de l'avoir engagée et fait travailler pendant 5 mois alors qu'elle n'avait pas de permis.
4.5
L'appelante fait enfin valoir que Q._ était au bénéfice d'un numéro AVS, ce qui signifiait pour elle qu'elle était autorisée à travailler en Suisse. Cet argument tombe à faux, dans la mesure où le statut au regard du droit des étrangers n'est pas lié au numéro AVS, celui-ci étant en effet attribué, selon l'art. 50c al. 1 LAVS (Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946, RS 831.10), lorsqu'une personne est domiciliée en Suisse ou y a sa résidence habituelle (let. a) ou lorsqu'elle réside à l'étranger et s'acquitte de cotisations, ou bien perçoit des prestations ou en demande (let. b). Quoi qu'il en soit, il appartenait à la prévenue de se renseigner et de s'assurer que ses obligations d'employeur étaient respectées. On observera encore sur ce point qu'à l'entretien d'embauche, Q._ a présenté non seulement sa carte AVS, mais également son passeport équatorien (PV aud. 8, p. 2; PV aud. 9, p. 1) – ce qui n'est pas contesté. Or, il ressort des déclarations de la jeune femme (PV aud. 1, p. 2) et du rapport de police du 10 juillet 2008 (pièce 9/1, p. 6) que ce passeport était échu depuis octobre 2006. Dans ces conditions, la prévenue pouvait bien se douter que la jeune femme n'était pas autorisée à travailler en Suisse et il lui incombait de s'informer si les documents produits par cette dernière répondaient aux exigences de la loi. Dans ces circonstances, la seule méconnaissance de la loi ne suffit pas à admettre que l'appelante a agi par négligence, les prétendues "subtilités de la loi" (PV aud. 6, p. 2) ne l'ayant d'ailleurs pas empêchée, malgré son grand âge, de se renseigner auprès des services sociaux compétents et d'entreprendre toutes les démarches nécessaires afin d'annoncer son employée.
4.6
En définitive, mal fondés, tous les griefs soulevés par P._ doivent être rejetés.
C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que la prénommée avait agi avec conscience et volonté et qu'elle a été reconnue coupable d'infraction à la LEtr au sens de l'art. 117 al. 1 de cette loi.
5.
L'appelante ne discute pas la peine, dès lors qu'elle conclut à son acquittement.
Il suffit de constater, sur ce point, que ni le choix du genre de peine, ni l'appréciation de la quotité de la peine par le premier juge ne sont critiquables, de sorte que tant la peine pécuniaire de dix jours-amende que le montant du jour-amende, fixé à 30 fr., peuvent être confirmés.
Le tribunal était dès lors parfaitement fondé à mettre les frais de la cause, non contestés, à la charge de la prévenue (art. 426 al. 1 CPP).
6.
En conclusion, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé, étant toutefois précisé que dans la mesure où les faits tombant sous le coup de l'art. 23 aLSEE sont prescrits (ch. 3.1
supra
), ceux finalement retenus à l'encontre de P._ s'étendent du 1
er
janvier au 17 mai 2008 et non du 10 décembre 2007 au 17 mai 2008 comme cela figure sur la page de garde du jugement attaqué.
6.1
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel doivent être mis à la charge de P._ (art. 428 al. 1 CPP).
6.2
Le défenseur de la prévenue, Me Jean-Michel Duc, a produit une liste détaillée des opérations effectuées en deuxième instance, pour un montant total de 11 heures 30, justifiant avoir dû consacrer personnellement 50 minutes au dossier, en sus du travail de secrétariat (20 minutes), le reste étant réparti entre l'activité déployée par Me Jana Burysek, avocate-stagiaire, et par Me Alexandre Lehmann, collaborateur, l'une faisant état de 3 heures 15 et l'autre se prévalant d'avoir consacré 6 heures 55 à l'étude du dossier, aux recherches juridiques et à la préparation de l'audience d'appel. O
n précisera d'emblée que compte tenu de la nature publique du mandat qui lui a été conféré, l'avocat nommé d'office n'est pas libre, sauf autorisation expresse de la direction de la procédure, de charger un autre avocat de le remplacer en cours de procédure, ce même s'il s'agit de collaborateurs ou associés au sein de la même étude.
Cela étant, il sied de relever que le total de 11 heures 30 est à l'évidence trop élevé. Plus particulièrement, il est injustifié de facturer les opérations découlant du transfert de mandat ("Reprise et étude du dossier"), soit 3 heures, et de se prévaloir d'avoir consacré encore 3 heures 55 à la préparation de l'audience d'appel, alors que tous les arguments exposés aux débats l'ont été dans la déclaration d'appel motivée.
Dans la mesure où Me Duc a été consulté pour la fixation de l'audience, il ne saurait en effet faire supporter par sa cliente les frais occasionnés par son remplacement (pièces 76 et 78).
A cela s'ajoute qu'il faut appliquer à l'ensemble des opérations menées par Me Burysek, à savoir 3 heures 15, le tarif horaire de 110 fr. (tarif en usage pour les avocats-stagiaires).
En conséquence, les opérations effectuées postérieurement au jugement entrepris n'impliquaient nullement une activité de 11 heures 30. Tout bien considéré, c'est un montant de 1'166 fr. 40, TVA comprise, correspondant à 6 heures (au tarif horaire de 180 fr.), qui doit être alloué à titre d'indemnité au défenseur d'office de P._ pour la procédure d'appel.
La prévenue ne sera tenue de rembourser à l’Etat le montant de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office prévue ci-dessus que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a et 426 al. 4 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c7ec9174-e8d4-4382-a15a-315ec2dba63d | En fait :
A.
Par jugement du 27 février 2012, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a libéré J._ de l'accusation de contravention à la LASV (I), a dit que les frais de justice sont laissés à la charge de l'Etat (II), a dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité selon l'art. 429 CPP à J._ (III) et a refusé de désigner un défenseur d'office à J._ (IV).
B.
Le 20 février 2012, J._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d'appel motivée du 22 mars 2012, il a conclu, avec suite de dépens, principalement à la réforme, soit à la modification du jugement en ce sens qu'une indemnité de 3'880 fr. lui est allouée pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. Subsidiairement, il a conclu à ce qu'un défenseur d'office lui soit désigné en la personne de Me Guy Longchamp et à ce que l'indemnité à ce défenseur soit arrêtée en conformité avec les listes d'opérations déposées, établies les 28 février et 22 mars 2012.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1. J._, né en 1948, a perçu le revenu minimum de réinsertion (RMR) jusqu'au 31 décembre 2005, ainsi que l'aide sociale vaudoise; il a en outre bénéficié par la suite du revenu d'insertion (RI), introduit au 1
er
janvier 2006 par la nouvelle loi sur l'action sociale vaudoise (LASV) et qu'il avait sollicité à l'avance par demande du 30 novembre 2005. Le 11 avril 2009, alors qu'il percevait le revenu d'insertion, il a encaissé sur son compte bancaire un montant de 121'883 fr. 10 en capital, versé par [...] au titre de prestation de libre passage de la prévoyance professionnelle. Le 14 avril suivant, le prévenu a retiré le montant en question de son compte. Il était tenu de remplir chaque mois un formulaire annonçant ses revenus et sa situation de fortune au Centre social régional de Cossonay. Ainsi, il avait signé un tel document le 15 avril 2008, puis le 15 mai suivant. Il n'a pourtant annoncé ni dans l'une ni dans l'autre de ces déclarations qu'il avait perçu le capital en question.
Dans le cadre d'un réexamen de son droit au revenu d'insertion, le bénéficiaire a été amené à présenter un extrait de son compte bancaire au centre social régional, ce qu'il a fait le 5 août 2009. C'est alors que le versement porté au crédit de son compte le 11 avril 2008 a été découvert. L'autorité a interpellé l'intéressé en lui demandant de fournir les justificatifs relatifs à cet encaissement. Le 23 août 2009, J._ a fait savoir au centre social qu'il renonçait au revenu d'insertion pour l'avenir.
Par ordonnance du 11 août 2011, le Préfet du district de Morges a ordonné le classement de la cause pénale introduite contre J._ pour contravention à la loi sur l'aide sociale vaudoise. Le 29 août suivant, le Ministère public a formé opposition à cette décision. Par ordonnance pénale du 6 septembre 2011, le Préfet du district de Morges a constaté que J._ s'est rendu coupable d'infraction à la LASV (I), l'a condamné à une amende de 1'000 fr. (II), a dit qu'à défaut de paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution sera de dix jours (III) et a mis les frais, par 50 fr., à sa charge (IV). Le prévenu a formé opposition à cette ordonnance. | 2. En droit, le tribunal de police a retenu que le prévenu s'était rendu coupable de contravention à la LASV (au sens de l'art. 75 de la loi) pour le motif qu'il avait, en violation des obligations découlant du droit social cantonal, dissimulé le versement de sa prestation LPP. Il a toutefois considéré que l'action pénale était prescrite à la date où le Préfet avait statué pour réprimer l'infraction, soit le 6 septembre 2011. En effet, le délai de prescription triennal de l'art. 109 CP courait depuis la signature du formulaire mensuel au moyen duquel le prévenu aurait dû porter à la connaissance de l'autorité le capital reçu de sa caisse de pensions, soit à compter du 15 avril 2008, voire du 15 mai suivant.
Quant aux dépens pénaux requis par le prévenu, le premier juge a considéré que, l'intéressé n'étant libéré des fins de l'action pénale qu'en raison de l'écoulement du temps, il ne saurait prétendre à une indemnité de procédure au sens de l'art. 429 CPP, ce d'autant qu'il ne devait sa libération qu'au fait qu'il avait obtenu du préfet une suspension de la procédure de plusieurs mois, durant laquelle la prescription avait été acquise. Pour ce qui est enfin de la demande du prévenu tendant à bénéficier de l'assistance judiciaire, son avocat de choix étant désigné comme défenseur d'office, le tribunal de police a considéré que les conditions posées par l'art. 132 CPP n'étaient pas remplies. En effet, d'abord le prévenu s'exposait tout au plus à une amende; en outre et surtout, la cause était simple, s'agissant de faits litigieux clairs et de questions juridiques circonscrites à quelques points ne présentant pas de difficultés particulières, à telle enseigne, toujours selon le premier juge, que la partie pouvait parfaitement faire valoir ses droits sans avoir recours aux services d'un avocat.
En droit :
1.1
Interjeté dans les formes et délais légaux (cf. art. 399 CPP) contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel est recevable.
L'appel concernant une contravention, la cause relève de la compétence du juge unique (art. 14 al. 3 de la loi cantonale d'introduction du Code de procédure pénale suisse [LVCPP]). Par identité de motif, l'appel doit être traité en procédure écrite sans interpellation des parties (art. 406 al. 1 let. c CPP).
1.2
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.
Selon la jurisprudence, la condamnation aux frais d'un prévenu acquitté ou mis au bénéfice d'un non-lieu et le refus de lui allouer une indemnité à titre de dépens ne sont admissibles que si l'intéressé a provoqué l'ouverture de la procédure pénale dirigée contre lui ou s'il en a entravé le cours. A cet égard, seul un comportement fautif et contraire à une règle juridique, qui soit en relation de causalité avec les frais imputés, entre en ligne de compte (ATF 119 Ia 332 c. 1b p. 334; ATF 116 Ia 162 c. 2c p. 168). Pour déterminer si le comportement en cause est propre à justifier l'imputation des frais ou le refus d'une indemnité, le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l'ordre juridique suisse pris dans son ensemble, dans le sens d'une application par analogie des principes découlant de l'art. 41 CO (ATF 119 Ia 332 c. 1b p. 334; 116 Ia 162 c. 2c p. 168 ss; cf. aussi TF 6B_337/2008 du 7 janvier 2009 c. 7.2; 1P.779/2006 du 6 février 2007 c. 4.1; 1P.519/2000 du 10 novembre 2000 c. 3a). Le fait reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement (ATF 119 Ia 332 c. 1b p. 334; ATF 116 Ia 162 c. 2d p. 171 et c. 2e p. 175). Enfin, la condamnation aux frais, fondée sur la seule commission de l'infraction pénale ne doit pas constituer une sanction pénale déguisée (TF 6B_387/2009 du 20 octobre 2009 et les références citées). Ces principes dégagés par la jurisprudence ont depuis lors été codifiés à l'art. 426 al. 2 CPP.
3.
En l’espèce, l’appelant s’était engagé par écrit envers les services sociaux à annoncer tout changement concernant sa situation financière, y compris en cas de versement d’un capital au titre de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP). Le 11 avril 2008, il a perçu un capital LPP. Le 15 avril suivant, puis un mois plus tard le 15 mai, il a signé une déclaration ad hoc de revenus ne mentionnant pas le montant versé sur son compte par l'institution de prévoyance. Lorsque invité l’année suivante, à la suite d’un contrôle de ses relevés bancaires, à fournir les justificatifs relatifs à cet encaissement, l’appelant n’a pas davantage donné suite, mais s'est limité à informer les services sociaux qu’il renonçait à percevoir le revenu d'insertion pour l'avenir.
Il résulte de ce qui précède que l’appelant a violé son obligation de signaler sans retard tout changement de sa situation économique. Il suffit à cet égard de renvoyer aux normes topiques citées à bon droit par le premier juge (art. 38, spéc. al. 4 LASV et 29 al. 2 let. g du règlement d'application de ladite loi [RLASV]). Nonobstant l’acquittement prononcé en raison de la prescription de l'action pénale, le comportement de l'appelant est contraire à ses engagements et aux règles légales (et réglementaires) régissant l'obligation de renseigner l'autorité d'aide sociale. Ce comportement fautif est en lien de causalité adéquate avec la dénonciation du prévenu au Préfet. Partant, il aurait justifié que les frais de justice soient mis à sa charge conformément aux principes résumés au considérant 2 ci-dessus, respectivement en application de l'art. 426 al. 2 CPP. Faute d’un appel du Ministère public sur ce point, la décision entreprise ne saurait toutefois être réformée en défaveur de l’appelant. Il n’en demeure cependant pas moins que, dans ces conditions, l’octroi d’une indemnité au sens de l’art. 429 al. 1 let. a CPP est exclue en raison du comportement fautif du prévenu. L’appel doit donc être rejeté sur ce point.
4.
Les conclusions subsidiaires de l’appel tendant à la désignation d’un conseil d’office selon l'art. 132 CPP et à l’indemnisation de celui-ci d'après l'art. 135 CPP doivent elles aussi être rejetées. D’abord parce que, si l’appelant entendait requérir la désignation d’un défenseur d’office pour la procédure de première instance, il convenait qu’il s’adresse à temps à la direction de la procédure en présentant une requête en ce sens. Or, la lettre de son conseil du 23 janvier 2012 (P. 10) n'est pas suffisamment explicite à cet égard pour être tenue pour une telle requête et les conclusions prises en ce sens au terme de la plaidoirie devant le tribunal de police sont tardives. Il s'ensuit que le plaideur est forclos à cet égard. Mais ensuite et surtout parce que les conditions de l’art. 132 al. 2 CPP n’étaient pas remplies; en effet, comme le relève le premier juge, la cause était simple en fait et en droit et l’affaire était de peu de gravité, également sous l'angle des minima de l'art. 132 al. 3 CPP. Les conditions légales posées à la désignation d’un défenseur d’office au stade de l’appel ne sont ainsi pas remplies.
5.
Vu l'issue de la cause, les frais d'arrêt selon l'art. 424 CPP doivent être mis à la charge de l'appelant, qui succombe (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c80dc049-ee2f-4187-814a-b9453c14d64e | En fait :
A.
Par jugement du 15 janvier 2015, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a libéré par défaut U._ des chefs de prévention de voies de fait et de viol (I), renvoyé N._ à agir devant le juge civil contre U._ (II), ordonné le maintien au dossier jusqu’à jugement définitif et exécutoire de la clé USB qui y figure sous fiche de pièce à conviction n° 14299/13 (III) et laissé les frais de la cause par 13'190 fr. 95 à la charge de l’Etat, y compris les indemnités allouées au défenseur d’office de U._, par 3'556 fr. 35, et au conseil d’office de N._, par 5'577 fr. 10 (IV).
B.
Par annonce du 26 janvier 2015, puis déclaration motivée du 17 février suivant, N._ a formé appel contre ce jugement, en concluant avec suite de frais et dépens principalement à la réforme de ses chiffres I, II et IV en ce sens que U._ est reconnu coupable de viol et de voies de fait, partant condamné à une peine fixée à dire de justice, et qu’il est reconnu son débiteur de la somme de 10'000 fr. à titre de tort moral, les frais de la cause étant mis à sa charge. Subsidiairement, l’appelante a conclu à l’annulation du jugement, la cause étant renvoyée à l’autorité de première instance pour nouvelle instruction et décision dans le sens des considérants à intervenir.
A titre de mesure d’instruction, l’appelante a requis l’audition de cinq témoins.
Par avis du 24 mars 2015, la présidente de la Cour de céans a rejeté cette réquisition de preuve au motif qu’elle ne répondait pas aux conditions de l’art. 389 CPP et qu’elle n’apparaissait, au surplus, pas pertinente.
Par courrier du 30 mars 2015, l’appelante a réitéré sa requête, laquelle a été à nouveau rejetée le 22 avril suivant.
A l’audience de ce jour, U._ et le Ministère public ont conclu au rejet de l’appel.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Le prévenu U._ est né le [...] 1980 à [...] au Kosovo, pays dont il est originaire. Il y a suivi sa scolarité puis le gymnase, avant de travailler en qualité de chauffeur poids lourd. Il est entré illégalement en Suisse en 2008. Il y a effectué différents petits travaux. Actuellement, on ignore où il réside.
Le casier judiciaire suisse du prévenu comporte l’inscription suivante :
- 29.10.2013, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois, entrée illégale, séjour illégal et activité lucrative sans autorisation, peine pécuniaire 90 jours-amende à 40 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans, amende 800 francs.
2. a)
U._ et la plaignante N._ se sont rencontrés le 10 avril 2010 dans une discothèque lausannoise. Le prévenu a demandé la main de la plaignante deux mois plus tard et le couple a célébré ses fiançailles en décembre 2010 entouré de proches. En septembre 2011, la précédente union de la plaignante a été dissoute par le divorce. En janvier 2012, U._ et N._ ont entrepris des démarches auprès de l’Etat civil pour se marier. Le Service de la population (ci-après : SPOP) a alors mis en œuvre une procédure et les a entendus en juin 2012, après avoir indiqué que le séjour du prévenu serait exceptionnellement toléré jusqu’au 31 décembre 2012.
Au cours des mois qui ont suivi, les fiancés n’ont pas vécu ensemble, le prévenu ayant conservé son propre appartement à Lausanne. De nombreuses disputes ont éclaté au sein de leur couple et U._ a exercé une pression sur la plaignante pour que leur union soit officialisée rapidement. Le 13 novembre 2012, ne souhaitant plus se marier, N._ a téléphoné à l’Etat civil et demandé que la procédure en cours soit annulée.
b)
Le 30 novembre 2012, invité par N._, U._ s’est rendu au domicile de la plaignante, à [...], à l’occasion de l’anniversaire de cette dernière. Au cours de la soirée, ils ont entretenu une relation sexuelle. Deux heures plus tard, N._ a lancé au visage du prévenu un téléphone portable, lui occasionnant une coupure à la pommette droite. En réaction, celui-ci l’a giflée au visage, derrière les oreilles. N._ a contacté la police à 00h45 et s’est enfermée dans la salle de bain jusqu’à son arrivée. Les agents ont constaté qu’elle présentait un taux d’alcoolémie de 1.88 g 0/00 à 1h50. Le prévenu était quant à lui sobre.
N._ a déposé plainte le 1
er
décembre 2012 à l’encontre du prévenu en affirmant, entre autres, qu’elle n’avait pas consenti à la relation sexuelle qu’ils avaient entretenue plus tôt dans la soirée.
c)
Le 10 décembre 2012, la plaignante a adressé un courrier au SPOP en indiquant qu’elle renonçait à son projet de mariage et en annexant une copie de sa plainte pénale.
Durant les mois qui ont suivi, U._ et N._ ont conservé des contacts téléphoniques et le prévenu a passé le réveillon du 31 décembre 2012 chez la plaignante avec les enfants de celle-ci.
Le 6 mars 2013, se sachant recherché, U._ s’est présenté dans les locaux de la police cantonale qui lui a remis une citation à comparaître à l’audience du Ministère public.
Par décision du 9 avril 2013, le SPOP a rejeté la demande d’autorisation de séjour du prévenu en vue du mariage et prononcé son renvoi de Suisse, fondant sa décision sur le courrier que la plaignante avait adressé le 10 décembre précédent.
Le 3 mai 2013, le prévenu été entendu par le procureur. Il ne s’est en revanche pas présenté aux deux audiences fixées successivement par le Tribunal correctionnel les 27 août 2014 et 14 janvier 2015.
d)
Fragile et vulnérable, N._ bénéficie d’un suivi psychologique. Le certificat médical établi le 19 août 2014 par la psychologue [...] indique que la plaignante a pris contact avec l’Unité de psychiatrie ambulatoire d’Orbe une première fois en mai 2012, puis après une interruption, une seconde fois en décembre 2012. Elle a entrepris un suivi en coordination avec son médecin traitant et une infirmière en psychiatrie, suivi dans le cadre duquel elle a affirmé avoir été violée par le prévenu. Indiquant n’avoir aucune raison de ne pas croire les déclarations de N._, [...] a en outre écrit ce qui suit :
« Elle nous a fait part d’angoisses et autres manifestations de type post-traumatiques qui ont suivi ces événements : angoisse que cet homme rôde autour de chez elle, de se retrouver face à lui, de revivre à nouveau sa pression pour accepter ce mariage, pour retirer sa plainte et de ne pas savoir comment se protéger. Aujourd’hui encore, quand elle vit ce type d’angoisse, Mme N._ a tendance à rester enfermée chez elle où elle se sent en sécurité, sortant uniquement accompagnée de ses enfants. Par ailleurs, lorsqu’elle évoque cet événement ou tout autre événement qui lui fait vivre un même sentiment d’impuissance à se faire entendre, à tenir bon pour ne pas être forcée de se soumettre à la volonté d’un homme auquel elle s’attache mais qui ne tient pas compte de ce qu’elle dit, tout cela ravive des pleurs, de l’angoisse, le risque de fuir, d’agresser l’autre ou elle-même (avaler des médicaments pour ne plus rien sentir ni penser, voire s’auto-mutiler) ». | En droit :
1.
Interjeté dans les forme et délai légaux (art. 399 CPP) par une partie ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de N._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
La plaignante conteste la libération du prévenu des chefs d’accusation de viol et de voies de fait. Affirmant que l’état de fait retenu par les premiers juges est incomplet et erroné, elle invoque une appréciation arbitraire des faits ainsi qu’une violation du principe
in dubio pro reo
et des art. 15 et 16 al. 2 CP.
3.1
3.1.1
A teneur de l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d’innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU Il (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1). Comme règle d’appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l’accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 la 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 précité, c. 2.2.2).
3.1.2
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011,
n. 19 ad art. 398 CPP).
3.2
3.2.1
L’appelante reproche aux premiers juges de ne pas avoir mentionné et retenu à charge les deux défauts du prévenu aux débats de première instance et le fait qu’il n’ait pas sollicité de sauf-conduit.
Conformément à l’art. 113 al. 1 CPP, le prévenu n’a pas l’obligation de déposer contre lui-même. Il a notamment le droit de refuser de déposer et de refuser de collaborer à la procédure. Il est toutefois tenu de se soumettre aux mesures de contrainte prévues par la loi. L’article 113 al. 2 CPP prévoit que la procédure est poursuivie même si le prévenu refuse de collaborer. La règle selon laquelle nul ne peut être contraint de s’auto-incriminer constitue un principe général découlant de l’art. 32 Cst (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RSV 101) et qui s’applique à la procédure pénale. Celui qui est prévenu dans le cadre d’une procédure pénale n’est donc pas tenu de déposer. Se fondant sur son droit de ne pas répondre, il a la faculté de se taire, sans que cette attitude lui porte préjudice et sans qu’elle constitue une preuve ou un indice à sa charge. La reconnaissance juridique du droit de ne pas répondre se limite au droit de se taire. Elle n’empêche pas que, dans un jugement fondé sur la libre appréciation des preuves au sens de l’art. 10 al. 2 CPP, le juge prenne en considération le comportement adopté par le prévenu dans le cadre de sa déposition. La jurisprudence considère que, dans des circonstances déterminées il est admissible de tirer du silence du prévenu des conclusions qui lui sont défavorables, dans la mesure où il existe d’autres preuves directes à sa charge, qui ont permis de faire la lumière sur les faits de telles manière que son refus de répondre doit être raisonnablement interprété comme un élément à sa charge (TF 6B_825/2014 c. 3.2 in SJ 2015 I 25).
Compte tenu de ces principes, on ne saurait retenir à la charge du prévenu le fait d’avoir fait défaut, ce d’autant plus qu’il n’a pas l’autorisation de séjourner en Suisse. On relèvera par ailleurs que, se sachant recherché, le prévenu s’est présenté dans les locaux de la police cantonale et qu’il s’est également rendu à l’audience du procureur. Quant aux propos, rapportés par l’appelante, qu’aurait tenus l’avocat du prévenu selon lesquels son client ne se présenterait pas de peur d’une condamnation, ceux-ci n’ont à l’évidence aucune portée.
3.2.2
L’appelante reproche aux premiers juges de n’avoir fait aucune mention de la situation qui prévalait à l’époque au sein de leur couple.
L’état de fait du jugement entrepris est effectivement lacunaire sur ce point. La rencontre des parties, leur décision de se marier, les démarches entreprises et les procédures administratives initiées, ainsi que l’appel téléphonique de l’appelante au SPOP du 13 novembre 2012 indiquant qu’elle ne souhaitait plus se marier ont été intégrés dans l’état de fait du présent arrêt, au même titre que les disputes du couple qui ressortent des déclarations du prévenu. Les pressions exercées par ce dernier sur la plaignante afin d’officialiser rapidement leur union ont également été retenues. A cet égard, les déclarations de la plaignante apparaissent en effet crédibles compte tenu du statut précaire du prévenu dont le séjour illégal en Suisse était toléré exceptionnellement par le SPOP jusqu’au 31 décembre 2012, de la particularité de l’histoire du couple qu’ils formaient, notamment de la rapidité de la demande en mariage présentée par le prévenu (à peine deux mois après leur rencontre), du fait qu’ils ne faisaient pas ménage commun – la plaignante ignorant même où il vivait –, et de la vulnérabilité de N._. L’audition de témoins requise en appel sur ce point n’est pas nécessaire. Ces pressions sont de surcroît corroborées par le certificat médical établi le 19 août 2014.
3.3
3.3.1
L’appelante critique l’appréciation des preuves faites par les premiers juges.
En substance, contestant la libération de U._ du chef de prévention de viol, elle leur reproche de n’avoir pas correctement apprécié les contradictions de celui-ci et d’avoir considéré que l’attitude qu’il avait adoptée le soir des faits n’était pas celle d’un violeur. Elle leur fait grief d’avoir mis en doute la véracité de ses accusations en tenant compte du taux d’alcoolémie qu’elle présentait ce soir-là et d’avoir retenu que ses explications étaient « extrêmement vagues et diffuses », alors qu’elles seraient corroborées par le certificat qu’a établi sa psychologue. Elle leur reproche également d’avoir retenu que son attitude après les faits litigieux avait été troublante au lieu de tenir compte du contexte de leur rupture et des réactions particulières que les victimes de violence sexuelle peuvent avoir (3.3.2).
S’agissant de la gifle que le prévenu lui a infligée, l’appelante conteste que les conditions de légitime défense ou de défense excusable au sens des art. 15 et 16 CP étaient réunies (3.3.3).
3.3.2
Il ressort du rapport d’intervention le soir des faits que les gendarmes ont constaté que N._ avait manifestement bu de l’alcool, mais qu’elle tenait néanmoins des propos cohérents. Elle présentait un taux d’alcoolémie de 1.88 g 0/00 à 1h50. Le prévenu était quant à lui sobre. Les gendarmes ont indiqué que l’état physique de ce dernier était « en ordre » et qu’il présentait une coupure à la pommette droite.
Les déclarations de la plaignante s’agissant des circonstances du viol ont été de plus en plus précises au cours de la procédure. Entendue par la police qui est intervenue dans son appartement, elle a en effet seulement déclaré que le prévenu l’avait forcée à avoir une relation vers 22 heures, que cela s’était passé dans sa chambre, qu’elle pleurait, qu’il n’avait pas tenu compte de ses larmes et qu’elle lui avait dit à plusieurs reprises d’arrêter et de la respecter. Le 21 février 2013 devant le procureur qui l’a entendue en qualité de personne appelée à donner des renseignements, la plaignante a donné plus de détails en précisant qu’il l’avait maintenue par la force sur le lit, qu’il lui tenait les bras en dessus de la tête, qu’elle lui avait clairement dit non plusieurs fois et qu’il avait compris qu’elle n’était pas d’accord puisqu’il lui avait dit de ne pas exagérer. La plaignante a également expliqué qu’il lui avait couru après dans l’appartement.
C’est ainsi seulement après son audition que le procureur a ouvert une instruction pour viol. A l’audience de première instance, la plaignante a donné plus de détails sur la manière dont le prévenu l’aurait contrainte en expliquant qu’il l’avait forcée à avancer dans le couloir qui séparait la cuisine de la chambre à coucher, qu’il l’avait empêché de bouger d’une main et déshabillée entièrement de l’autre. Elle a donc précisé et complété ses propos en cours de procédure devant le procureur et surtout à l’audience de jugement.
L’appelante n’a pas pu expliquer pourquoi, au lieu d’appeler immédiatement la police après le prétendu viol, elle ne l’a fait que deux heures plus tard, soit après la gifle qu’elle a reçue et qui a suivi le lancer du téléphone portable. Elle n’a pas consulté de médecin immédiatement après les faits et la police ne lui a pas dit ou suggéré de le faire. Elle n’a en outre pas évoqué d’hématome, même léger, au bras ou aux poignets malgré le recours à la force physique qu’elle décrit.
Les déclarations de la plaignante ne sont pas claires sur le point de savoir quand elle a compris que les sentiments de son ami n’étaient pas sincères. Il est à cet égard établi qu’elle a téléphoné au SPOP le 13 novembre 2012 pour annuler la procédure de mariage en cours et, partant, qu’elle souhaitait mettre un terme à cette relation. On ignore toutefois quand elle a pris cette décision, dès lors qu’elle semble avoir été pendant plusieurs mois ambivalente. Elle a appelé le SPOP pour annuler la procédure de mariage, puis, deux semaines plus tard, accueilli son ami chez elle le jour de son anniversaire. Elle a déposé plainte contre lui et écrit pour annuler la procédure de mariage, puis l’a invité à passer le réveillon chez elle avec ses enfants. Elle lui a téléphoné à de nombreuses reprises au cours du premier semestre 2013, dont le 14 mai, où on l’entend détendue et chaleureuse au téléphone. Elle a déclaré le 21 février 2013 au procureur qu’elle aimait le prévenu, tout en l’accusant de viol, puis n’a plus voulu parler à ce dernier. Ainsi, l’attitude qu’elle a adoptée pendant les semaines qui ont suivi les faits litigieux ne correspond guère à celle d’une femme victime d’un viol, même en admettant qu’elle était sous l’emprise du prévenu et qu’elle avait encore des sentiments pour lui.
L’appelante n’a jamais allégué que le prévenu avait eu un comportement violent physiquement ou sexuellement à son égard, hormis le 30 novembre 2012. En outre, le comportement du prévenu tel qu’elle le décrit laisse songeur : on peine à imaginer qu’un homme puisse violer une femme pour mieux la persuader ensuite de l’épouser.
Les souffrances de la plaignante sont réelles et clairement établies par le certificat médical qu’elle a produit. La psychologue qui la suit a écrit qu’elle n’avait aucune raison de ne pas croire ce qu’elle lui avait confié. Elle indique notamment que la plaignante a fait part d’angoisses et d’autres manifestations de type post-traumatiques à la suite des événements qu’elle a relatés. Elle craint en particulier que le prévenu rôde autour de chez elle, de se retrouver face à lui, de revivre à nouveau la pression qu’il a exercée sur elle pour accepter le mariage et retirer sa plainte et de ne pas savoir comment se protéger. Aujourd’hui encore, quand elle vit ce type d’angoisse, elle reste enfermée chez elle, ne sortant qu’accompagnée de ses enfants. La psychologue indique également que «
lorsqu’elle (
ndlr : la plaignante
) évoque cet événement ou tout autre événement qui lui fait vivre un même sentiment d’impuissance à se faire entendre, à tenir bon pour ne pas être forcée de se soumettre à la volonté d’un homme auquel elle s’attache mais qui ne tient pas compte de ce qu’elle dit, tout cela ravive des pleurs, de l’angoisse, le risque de fuir, d’agresser l’autre ou elle-même
». On relèvera cependant que les angoisses et les manifestations de type post-traumatiques rapportées dans ce certificat semblent être mises en lien avec la pression vécue au sein de leur relation et non directement avec le viol.
Entendu le soir-même par la police, le prévenu a reconnu avoir eu une relation sexuelle avec la plaignante. Il était calme : ses propos ont alors été mesurés. Cette attitude ne correspond guère à celle d’un agresseur sexuel. Il n’a été entendu qu’une seule fois par le procureur quatre mois plus tard où il a d’abord nié avoir eu une relation sexuelle, pour le reconnaître ensuite. Il a nié avoir usé de contrainte à l’encontre de la plaignante. Il a déclaré que les fiançailles étaient rompues en indiquant qu’il avait lui-même annulé la procédure de mariage, mais précisé plus loin qu’il n’avait pas fait de démarches auprès des autorités, mais auprès de sa fiancée. Il a mis leurs disputes en lien avec la consommation d’alcool de son amie et non avec des problèmes de couple. Il a déclaré qu’il avait de réels sentiments pour elle. On relèvera que lors de cette audition, le prévenu s’est contredit et a été plus imprécis, en indiquant notamment que le soir des faits litigieux, ils faisaient « une pause » tout en affirmant plus loin qu’ils étaient toujours ensemble (PV audition n. 2 l. 47, 70 et 136). Il a en outre admis qu’ils ne vivaient pas ensemble alors qu’il avait soutenu quelques instants plus tôt qu’ils avaient fait ménage commun durant une année et demie (PV audition n. 2 l. 40 et 85-86). A cela s’ajoute le fait qu’il n’a pas daigné répondre aux convocations de la justice, rendant difficile l’appréciation des preuves. En définitive, ses propos et son comportement, hormis le soir des faits, manquent de franchise.
.
Il apparaît certain qu’il y a eu une relation sexuelle dans le cadre d’une relation amoureuse complexe où la plaignante a été mise sous pression, trahie et instrumentalisée. Cependant, au regard de l’ensemble des éléments précités et notamment du comportement des protagonistes à l’arrivée de la police, du fait que la plaignante n’a fait appel aux forces de l’ordre qu’après avoir reçu une gifle et ce, deux heures après leur relation sexuelle, du fait qu’elle était fortement sous l’emprise de l’alcool et enfin compte tenu des contacts que les parties ont conservés les mois suivants, il subsiste un doute sérieux quant à la réalité du viol allégué par la plaignante. Le certificat médical produit ne suffit pas à lever ce doute qui doit conduire à la libération du prévenu du chef de prévention de viol.
L’appel de la partie plaignante doit en conséquence être rejeté sur ce point.
3.3.3
S’agissant de la gifle infligée par le prévenu à la plaignante, les premiers juges ont retenu qu’il avait agi en état de légitime défense voire de défense excusable, en voulant la calmer, dès lors qu’elle se trouvait dans un état d’ébriété avancé, et éviter qu’elle lui jette d’autres objets.
Aux termes de l'art. 15 CP, quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d'une attaque imminente a le droit de repousser l'attaque par des moyens proportionnés aux circonstances. Cette disposition n'est plus applicable lorsque l'attaque est achevée. Une attaque n'est pas achevée aussi longtemps que le risque d'une nouvelle atteinte ou d'une aggravation de celle-ci par l'assaillant reste imminent (ATF 102 IV 1 c. 2b; TF 6B_82/2013 du 24 juin 2013 c. 3.1.1).
Selon l'art. 16 CP, si l'auteur, en repoussant une attaque, a excédé les limites de la légitime défense au sens de l'art. 15 CP, le juge atténue la peine (al. 1). Si cet excès provient d'un état excusable d'excitation ou de saisissement causé par l'attaque, l'auteur n'agit pas de manière coupable (al. 2). Selon la jurisprudence, tel n'est le cas que si l'attaque est la seule cause ou la cause prépondérante de l'excitation ou du saisissement et pour autant que la nature et les circonstances de l'attaque rendent excusable cette excitation ou ce saisissement. La loi ne précise pas plus avant le degré d'émotion nécessaire, lequel doit toutefois revêtir une certaine importance. Il appartient au juge d'apprécier de cas en cas si ce degré d'émotion était suffisamment marquant et de déterminer si la nature et les circonstances de l'attaque le rendaient excusable. Plus la réaction de celui qui se défend aura atteint ou menacé l'agresseur, plus le juge se montrera exigeant quant au degré d'excitation ou de saisissement nécessaire (TF 6B_926/2009 du 15 décembre 2009 c. 3.2).
En l’espèce, les parties présentent la même version des faits: le prévenu a frappé la plaignante après avoir été blessé par le téléphone portable qu’elle lui a jeté au visage. La police a constaté que prévenu présentait une coupure à la pommette droite. Toutefois, il n’est pas établi que la plaignante entendait continuer à lancer des objets sur le prévenu et que celui-ci devait se défendre. En outre, ce dernier avait le choix d’agir autrement et n’était pas en état de nécessité. Ainsi, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, les art. 15 et 16 CP ne trouvent pas application dans le cas d’espèce. Par conséquent, une gifle devant être qualifiée de voies de fait au sens de l’art. 126 CP (Dupuis et al. [éd.], Petit commentaire, Code pénal, Bâle 2012, n°5 ad art. 126 CP), U._ doit être reconnu coupable de cette infraction. Il y a lieu en revanche de retenir que ces voies de fait résultent d’une riposte immédiate à des voies de fait, ce qui entraîne une exemption de peine (art. 177 al. 3 CP ; Dupuis et al. [éd.], op. cit., n° 30 ad art. 177 al. 3 CP ; Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3
e
éd., Berne 2010, n. 35 ad art. 177 CP).
Sur ce point, l’appel de la partie plaignante doit donc être partiellement admis.
4.
Dans la mesure où l’acquittement du prévenu s’agissant du chef de prévention de viol est confirmé et que, s’agissant des voies de fait retenues, il est exempté de toute peine en application de l’art. 177 al. 3 CPP, la conclusion de l’appelante tendant à l’allocation d’une indemnité pour tort moral doit être rejetée.
5.
En définitive, l’appel de N._ doit être partiellement admis, le jugement entrepris étant réformé dans le sens des considérants qui précèdent.
6.
Vu l’issue de la cause, les frais de la présente procédure, constitués de l’émolument d’arrêt, par 1’940 fr., et des indemnités allouées au défenseur d'office du prévenu, arrêtée à 972 fr. 30, TVA et débours inclus, et au conseil d'office de la plaignante, par 2'559 fr. 60, TVA et débours inclus
,
doivent être mis par quatre cinquièmes à la charge de N._, le solde étant laissé à la charge de l’Etat. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c87f2a0c-f4ce-4c76-9337-5b35f142aacd | En fait :
A.
Par jugement du 19 juillet 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que B.F._ et A.F._ se sont rendus coupables d'escroquerie et d'infraction à la loi sur l'action sociale vaudoise (I et II), a condamné chacun des époux A.F._ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (soixante), le montant du jour-amende étant fixé à 10 fr. (dix) (III et V), a suspendu l'exécution de la peine pécuniaire et fixé à chacun des époux A.F._ un délai d'épreuve de 2 (deux) ans (IV et VI), a condamné chacun des époux A.F._ à une amende de 300 fr. (trois cents), la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement étant fixée à 3 (trois) jours (VII et VIII), a mis les frais de la cause arrêtés à 2'995 fr. 20, y compris l'indemnité servie au défenseur d'office, Me Joëlle Druey, par 2'160 fr. 20, à la charge de B.F._ (IX), a mis les frais de la cause arrêtés à 3'143 fr., y compris l'indemnité servie au défenseur d'office, Me Cyrielle Cornu, par 2'268 fr., à la charge de A.F._ (X), a dit que le remboursement à l'Etat de l'indemnité allouée aux défenseurs d'office de chacun des époux A.F._ ne sera exigible que pour autant que la situation économique de l'un, respectivement de l'autre ne le permette (XI et XII).
B.
Le 28 juillet 2011, les époux A.F._ ont formé appel contre ce jugement.
Par deux déclarations d'appel motivées du 5 septembre 2011, les appelants ont respectivement conclu principalement à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'ils sont libérés des chefs d'accusation d'escroquerie et d'infraction à la loi sur l'action sociale vaudoise. Subsidiairement, ils ont requis l'annulation du jugement et le renvoi de la cause au tribunal de première instance pour qu'il soit procédé à de nouveaux débats et qu'un nouveau jugement soit rendu.
Le 25 juillet 2011, le Ministère public a déposé une annonce d'appel contre le jugement du 19 juillet 2011. Il l'a toutefois retirée le 22 août suivant, se ralliant intégralement à ses considérants et à ses conclusions. Dans le délai imparti, il a indiqué, par courrier du 7 septembre 2011, renoncer à présenter une demande de non-entrée en matière et à déclarer un appel joint.
Le Service de prévoyance et d'aide sociales ne s'est, quant à lui, pas manifesté.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1.
A.F._,
né en 1956, est titulaire d'un CFC de mécanicien de précision. Il a exercé sa profession sous une forme indépendante durant une vingtaine d'années. Après la radiation de sa société [...], le 29 novembre 2004, par suite de cessation d'activité, il n'a plus jamais retrouvé de situation professionnelle stable. Il a été contraint de vendre aux enchères forcées l'appartement dont il avait hérité en raison de graves difficultés financières, vente qui lui a permis de se mettre à jour dans le paiement des pensions alimentaires dues à son ex-femme pour l'entretien de leurs deux enfants. A.F._ est en mauvaise santé, consomme excessivement de l'alcool et souffre de crises d'épilepsie.
B.F._, née en 1956 au Pérou, est économiste de formation. Elle a travaillé à la Banque [...] au terme de ses études à l'université de Lima. Venue en Suisse pour la première fois en 1980, elle a occupé un poste pour le Bureau international du travail et a repris des études de développement socio-économique avant de retourner dans son pays natal. Elle est revenue en Suisse par la suite et a fait la connaissance de A.F._ en 1991, avant de l'épouser en 1994. Elle a acquis la nationalité suisse. Elle n'exerce aucune activité lucrative, souffre de dépression et d'insomnie nécessitant la prise de médicaments.
1.2.
De l'union du couple est né, en 2000, un enfant qui est trisomique et lourdement handicapé. Les époux perçoivent une rente AI de 1'600 fr. par mois environ et une allocation de 455 fr. à titre de contribution de l'AMINH (allocation en faveur des familles s'occupant d'un mineur handicapé). La famille occupe un appartement à Prilly dont le loyer est de 1'700 fr. par mois. Les primes d'assurance-maladie du couple sont entièrement subsidiées.
Les casiers judiciaires suisses des appelants ne comportent aucune inscription.
2.
2.1.
A Prilly, entre le 1
er
mai 2006 et le 1
er
octobre 2008, les appelants ont perçu chaque mois le revenu d'insertion (ci-après : le RI), soit au total la somme de 49'919 fr. 40, alors qu'ils n'en remplissaient pas les conditions d'octroi.
2.2.
Le 4 mai 2006, les époux ont eu un premier entretien avec un assistant social du CSR (Centre social régional) de Prilly/Echallens. Ils ont rempli un formulaire de demande RI dans lequel ils n'ont fait mention d'aucun revenu, ont déclaré le montant de 455 fr. à titre de contribution de l'AMINH et ont précisé ne pas avoir de fortune. De la liste des documents à transmettre au CSR, visée par l'assistant social le même jour, le couple devait, dans les dix jours, remettre notamment une copie de la dernière déclaration d'impôt, de la dernière décision de taxation, des relevés bancaires et postaux, ouverts tant par le requérant que par son conjoint, ce pour les trois derniers mois. A ce titre, il a été admis que la taxation 2004 avait été produite, qu'en outre, des relevés du compte jaune Postfinance n° 10-24452-8 ouvert au nom de A.F._, pour les mois de février à avril 2006 avaient également été transmis et que des relevés d'un compte au moins, ouvert par B.F._, avaient également été remis.
Le 4 juillet 2006, le CSR, ayant pris connaissance de mouvements sur le compte n° 10-24452-8 pour un montant total de 96'182 fr. 70, de février à avril 2006, a exigé des époux A.F._ les justificatifs de ces opérations. Le versement du RI du mois de juin 2006 a été suspendu dans cette attente. Puis, une fois les renseignements demandés fournis, ce forfait a à nouveau été versé.
2.3.
Le 15 mai 2008, le CSR a mandaté l'Unité de contrôle et de conseil (ci-après : l'UCC) du SPAS (Service de prévoyance et d'aide sociales) aux fins d'effectuer une enquête sur la situation des époux A.F._. L'enquêteur a délivré son rapport le 1
er
septembre 2008.
Il en est ressorti que B.F._ était, en plus de celui qui avait été mentionné sur le formulaire de demande de RI, titulaire de deux autres comptes, soit un compte Jaune Deposito n° 17-775215-3 et un compte Jaune E-Deposito n° 92-481811-8.
Le 10 janvier 2006, soit quatre mois avant la demande RI, les époux A.F._ disposaient, sur leurs différents comptes postaux et bancaires, d'une fortune globale de 156'774 fr. 72. Ils ont dépensé la somme de 101'017 fr. 15 entre le 10 janvier et le 30 avril 2006. En outre, en date du 30 avril 2006, les époux disposaient encore, sur leurs différents comptes postaux et bancaires, d'une fortune globale de 55'757 fr. 57, soit de 40'561 fr. 70 sur le compte Jaune Deposito 17-775215-3 ouvert au nom de B.F._, de 7'510 fr. 97 sur le compte Jaune 10-24452-8 ouvert au nom de A.F._, de 2'494 fr. 90 sur le compte Jaune 17-499341-4 ouvert au nom de B.F._ et de 5'190 fr. sur le compte BCV 5118.78.48 ouvert aux fins de dépôt de la garantie de loyer. L'enquêteur a, à cet égard, estimé que la fortune mobilière des époux s'élevait, à fin juillet 2008 à environ 20'000 fr., montant auquel s'ajoutait encore la valeur de leur véhicule. L'enquête a révélé que les époux avaient possédé une voiture WV Passat achetée le 12 janvier 2006, pour un montant de 38'400 fr., qu'ils ont vendu cette dernière le 25 septembre 2008 pour un montant de 22'500 fr., et qu'ils ont acheté un nouveau véhicule valant 17'000 francs.
Le SPAS a porté plainte le 30 janvier 2009, mais n'a pas pris de conclusions civiles. Il a exigé la restitution de l'indu, soit, selon son courrier du 9 mars 2010, le montant de 52'154 fr. 20 pour la période allant de février 2007 à juillet 2008. Depuis le mois de février 2010, une somme de 70 fr. est prélevée chaque mois sur le RI du couple, à titre de remboursement partiel.
3.
A l'audience du 19 juillet 2011, l'appelante a déclaré que le compte n° 17-775215-3 avait été ouvert en 2005 pour disposer d'un compte privé sur lequel verser l'indemnité AI en faveur de leur fils et que le compte n° 17-499341-4 avait été ouvert avant le précédent, pour recevoir l'indemnité AMINH. Elle a en outre précisé que sa mère lui versait de l'argent sur le compte Deposito n° 17-775215-3, argent qu'elle remboursait de main à main à celle-ci lorsque cette dernière venait en Suisse. Elle a ajouté qu'après la faillite de l'entreprise de son mari, elle avait pu rembourser à sa mère un montant allant de 20'000 à 43'000 fr., sans être en mesure de préciser sur quel compte avait été versée cette somme. Par la suite, elle a encore indiqué qu'un montant de 31'000 fr., transféré le 1
er
mai 2006 du compte n° 17-775215-3 sur le compte n° 92-481811-8 ouvert à son nom, avait pour but l'achat de titres et qu'il avait en outre la fonction de permettre le remboursement de sa mère et la mise à disposition d'argent lorsque cette dernière venait en Suisse ou lorsqu'elle en avait besoin sur le lieu de sa résidence. Elle a encore révélé que cet argent servait aussi à sa sœur lorsque leur mère donnait pour instruction de verser de l'argent à celle-ci. Elle a encore ajouté que cet argent n'avait jamais été utilisé pour elle-même et qu'elle n'en n'avait pas fait état puisqu'il s'agissait de l'argent de sa mère.
L'appelant a quant à lui confirmé que sa belle-mère avait prêté à son couple une somme de l'ordre de 100'000 fr., montant qui avait été versé sur le compte Deposito n° 17-775215-3. Il a reconnu qu'il n'ignorait pas que son épouse avait trois comptes ouverts à son nom mais qu'il ne lui était pas venu à l'esprit qu'il faille tous les déclarer au moment de la demande RI. Il a précisé qu'une somme d'environ 101'017 fr. 15 avait été dépensée entre le 10 janvier et le 30 avril 2006, qu'une part de 30'000 fr. avait servi à rembourser des clients créanciers commerciaux et qu'une part de 38'000 fr. avait servi à acheter un véhicule, après le refus de l'Abbé [...] d'être remboursé, à la suite d'un prêt. Il a ajouté qu'il ne pensait pas nécessaire de déclarer le compte de garantie loyer dans la mesure où il s'agissait d'argent bloqué. Finalement, il a expliqué qu'il n'a pas pensé qu'il était nécessaire de déclarer de l'argent qui ne lui appartenait pas et qu'il ne lui est pas venu à l'esprit que s'il avait déclaré l'argent de sa belle-mère, le couple n'aurait pas pu bénéficier du RI, puisque cet argent n'était pas le sien.
Devant la cour de céans, le 28 novembre 2011, l'appelante a précisé que le compte n° 17-7752215-3 destiné au remboursement a été utilisé à cette fin jusqu'au 30 avril 2006, ensuite il a été remplacé par le compte n° 92-481811-8. Les deux appelants ont indiqué qu'ils n'avaient pas déclaré les deux comptes dans la mesure où l'argent appartenait à la mère de B.F._. | En droit :
1.
L’appel doit être annoncé dans les 10 jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l'occurrence, interjetés dans les formes et délais légaux contre un jugement d'un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels sont recevables. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Sans contester la commission de l'infraction à la LASV, les appelants, dont les griefs se recoupent largement, soutiennent que l'intention délictueuse de l'escroquerie fait défaut.
3.1.
Selon l'art. 146 CP, commet une escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.
Sur le plan objectif, l'escroquerie suppose en particulier que l'auteur ait usé de tromperie et que celle-ci ait été astucieuse (Corboz, Les infractions en droit suisse, Vol. I, Berne 2010, n. 16 ad art. 146 CP). L'astuce est réalisée lorsque l'auteur recourt à des manœuvres frauduleuses, à une mise en scène comportant des documents ou des actes ou à un édifice de mensonges qui se recoupent de façon si raffinée que même une victime critique se laisserait tromper (ATF 126 IV 165 c. 2a, JT 2001 IV 77; ATF 122 IV 197 c. 3d, JT 1997 IV 145; Corboz, op. cit., n. 18 ad art. 146 CP). Sont considérées comme des machinations particulières les inventions et les mesures telles que l'utilisation d'événements qui, à eux seuls ou appuyés par des mensonges et des manœuvres frauduleuses, sont propres à tromper la victime ou à la conforter dans son erreur (ATF 122 IV 197, précité). On ajoutera que l'affirmation fallacieuse peut résulter de n'importe quel acte concluant. Il n'est ainsi pas nécessaire que l'auteur fasse une déclaration. Il suffit qu'il adopte un comportement dont on déduit l'affirmation d'un fait (ATF 127 IV 163; Corboz, op. cit., n. 5 ad art. 146 CP).
L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 17 ad art. 146 CP et les références citées). Il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait escroquerie, que la dupe ait fait preuve de la plus grande diligence et qu'elle ait recouru à toutes les mesures de prudence possibles : la question n'est donc pas de savoir si elle a fait tout ce qu'elle pouvait pour éviter d'être trompée (ATF 128 IV 18 c. 3a; ATF 126 IV 165, précité). Pour qu'il y ait astuce, il n'est ainsi pas exigé que la dupe soit exempte de la moindre faute ; l'astuce est exclue uniquement si la dupe n'a pas observé les mesures de précaution élémentaires (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 17 ad art. 146 CP). Cet aspect de la responsabilité de la dupe doit, selon la jurisprudence récente, aussi être pris en compte en cas de manœuvres frauduleuses de la part de l'auteur (ATF 122 IV 197, précité). Il n'y a en effet pas de motif pour admettre l'astuce lorsque, par exemple, l'auteur utilise un faux grossier, aisément reconnaissable comme tel par la dupe (Cassani, Der Begriff der arglistigen Täuschung als kriminalpolitische Herausforderung, RPS 117/1999, p. 152 ss, spéc. p. 162).
On ajoutera que pour apprécier si l'auteur a usé d'astuce et si la dupe a omis de prendre les mesures de prudence élémentaires, il ne suffit pas de se demander comment une personne raisonnable et expérimentée aurait réagi à la tromperie; il faut, au contraire, prendre en considération la situation particulière de la dupe, telle que l'auteur la connaît et l'exploite. Ce principe dit de coresponsabilité ne saurait être utilisé pour nier trop aisément le caractère astucieux de la tromperie (ATF 128 IV 18, précité). Ainsi, le Tribunal fédéral a précisé qu'il y avait astuce si, en fonction des circonstances, une vérification ne pouvait pas être exigée de la dupe et que l'auteur exploitait cette situation (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 19 et 20 ad art. 146 CP). Il a considéré qu'il y avait tromperie astucieuse dans le cas où l'auteur avait conclu un contrat en ayant d'emblée l'intention de ne pas fournir sa prestation, alors que son intention n'était pas décelable (ATF 118 IV 359 c. 2, JT 1994 IV 172). Il y a également astuce si l'auteur exploite un rapport de confiance préexistant qui dissuade la dupe de vérifier (ATF 126 IV 165, précité; Corboz, op. cit., n. 21 ad art. 146 CP).
Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle, l'intention devant porter sur tous les éléments constitutifs. L'auteur doit en outre avoir agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (ATF 119 IV 210 c. 4b, JT 1995 IV 139; Corboz, op. cit., n. 39 ss ad art. 146 CP).
3.2.
3.2.1.
En l'espèce, les appelants se prévalent de ce que les premiers juges n'ont pas fait mention du courrier adressé par Postfinance le 6 novembre 2008 à B.F._ (cf. pièce 3 du bordereau du 5 novembre 2010 du conseil du défenseur de B.F._), celui-ci indiquant, s'agissant du compte n° 17-499341-4, que cette dernière avait indiqué à sa conseillère lors de ses deux entretiens de conseils financiers des 8 et 27 février 2008, que le capital de 15'000 fr. investi en fonds de placement et en obligation de caisse lui avait été confié par sa mère demeurant au Pérou. Les appelants se réfèrent en outre au témoignage écrit de la mère de B.F._ (cf. pièce 1 du bordereau du 18 juillet 2011) qui n'a, selon eux, pas non plus été pris en compte par le tribunal, et qui explique que le témoin a prêté de l'argent sans intérêt à sa fille qui la remboursait petit à petit lorsqu'elle en avait la possibilité. Ils font également référence au témoignage de la sœur de B.F._ qui va dans le même sens que celui de la mère de celle-ci et qui n'aurait pas non plus été pris en compte par le Tribunal de police. Finalement, ils affirment qu'ils ne pensaient pas avoir à déclarer l'argent provenant de la mère de B.F._ puisque celui-ci ne leur appartenait pas.
A l'appui de sa conviction, le premier juge a retenu que les prévenus se perdaient en explications invraisemblables, contradictoires et contraires aux éléments de faits tels qu'établis par les extraits bancaires (jgt., pp. 15-16) et que le prévenu avait lui-même déclaré qu'il fournissait les bouclements de tous les comptes, notamment celui du compte postal n° 17-775215-3 à l'AVIVO (Association des vieillards, invalides, veuves et orphelins) pour établir sa déclaration d'impôts (jgt, pp. 7 et 16) et que de ce fait, les prévenus ne pouvaient pas ignorer qu'ils étaient titulaires et ayants droit économiques dudit compte et avaient ainsi l'obligation d'en faire état aux services sociaux lors de leur demande d'octroi du RI (jgt., p. 16). Le premier juge a finalement estimé que les prévenus avaient sciemment dissimulé une partie de leur fortune afin de percevoir le RI (jgt., p. 16).
3.2.2.
Il est certes constant qu'aux débats les prévenus ont fait quelques erreurs sur les dates ou sur les montants transférés sur les différents comptes. En revanche, ils ont soutenu, tout au long de la procédure, que les deux comptes ouverts au nom de B.F._, soit les comptes n° 17-775215-3 et 92-481811-8, n'avaient pas été déclarés puisque l'argent qui s'y trouvait n'était pas le leur mais appartenait à la mère de l'appelante. A ce titre, il convient de souligner que l'élément retenu par le tribunal selon lequel A.F._ avait affirmé avoir déclaré le compte n° 17-775215-3 à l'AVIVO pour établir sa déclaration d'impôts ne tient plus. En effet, ce dernier a modifié ses déclarations à l'audience de ce jour (cf., procès-verbal de l'audience du 28 novembre 2011, p. 4). Le premier juge a admis que la mère de l'appelante avait prêté au couple une somme d'environ 100'000 francs. Il ne paraît ainsi pas invraisemblable d'admettre que cette somme lui a été remboursée de main à main du moins en partie, après la faillite de l'entreprise de l'appelant. De même, il n'apparaît pas dénué de sens, qu'en proie à des difficultés financières, le couple ait honoré diverses factures du ménage avec l'argent provenant du compte n° 17-775215-3. Dès lors, au vu des circonstances, il ne semble pas non plus inconcevable que les appelants, au motif que cet argent ne leur appartenait pas et ne se considérant ainsi pas comme les ayant droits économiques et titulaires de ces deux comptes, n'aient pas jugé nécessaire de les déclarer au CSR.
Au vu de ces éléments, la cour de céans est convaincue que les explications des appelants, certes confuses, sont sincères et doivent ainsi être retenues. Dès lors, faute d'élément subjectif, l'escroquerie ne sera pas retenue.
4.
Les appelants, sans contester l'infraction à l'art. 75 LASV, soutiennent que l'activité coupable reprochée s'est exercée par la signature de la demande du RI, le 4 mai 2006, et que dès lors, ladite infraction est prescrite depuis le 4 mai 2009 en vertu de l'art. 109 CP.
4.1.
Selon l'article 75 de la Loi sur l'action sociale vaudoise, celui qui aura trompé l'autorité par des déclarations inexactes, aura omis de lui fournir les informations indispensables ou ne lui aura pas fourni les informations par elle requise, est passible d'une amende de 10'000 francs au plus. Il s'agit donc d'une contravention de droit cantonal (art. 2 LContr, [Loi sur les contraventions, RSV, 312.11]), dont la prescription est de trois ans selon l'art. 109 CP, auquel renvoie l'art. 20 LContr.
L'art. 98 let. c CP prévoit que la prescription court dès le jour où les agissements coupables ont cessé s'ils ont eu une certaine durée. La loi, in casu le formulaire de demande du RI, oblige à annoncer tout changement de situation, donc a fortiori sa situation financière réelle (Commentaire romand, note 14 ad art. 98 CP)
4.2.
En l'espèce, les agissements coupables des auteurs au sens de l'art. 75 LASV sont l'omission de fournir à l'autorité les informations indispensables. Il apparaît que celle-ci a duré durant toute la période de perception du RI. Dans la mesure où le premier jugement condamnatoire est intervenu le 11 novembre 2010, il conviendrait en réalité d'appliquer in casu l'art. 97 al. 3 CP, ce qui reviendrait en d'autres termes à admettre que seul le comportement antérieur au 11 novembre 2007 est atteint par la prescription. Toutefois, étant donné que le Ministère public n'a pas recouru sur ce point, il faut s'en tenir à la période retenue par le Tribunal de police dans son jugement du 19 juillet 2011, la reformatio in pejus étant proscrite.
On admettra dès lors que les prévenus se sont dessaisis de leur véhicule VW Passat le 25 septembre 2008 pour un montant de 22'500 fr., que leur fortune était ainsi jusqu'à cette dernière date supérieure à 20'000 fr. et qu'ils pouvaient de ce fait pas bénéficier du RI. Il convient au surplus de constater que, s'il s'avère que la Cour de cassation, dans son jugement du 21 février 2011 a écarté, comme le soutient l'appelant, la question de l'escroquerie en ce qui concerne ce véhicule, il n'en demeure pas moins que ce bien faisait bel et bien partie intégrante de la fortune du couple.
5.
Le dispositif lu à l'issue de l'audience du 28 novembre 2011 et envoyé aux parties ne mentionne pas que le jugement de la Cour d'appel pénale est exécutoire. Il s'agit d'une inadvertance manifeste qu'il y a lieu de corriger d'office, conformément à l'art. 83 al. 1 CPP, par l'ajout d'un chiffre VI le précisant.
6.
En définitive, les appels doivent être partiellement admis, en ce sens que les appelants sont libérés du chef d'accusation d'escroquerie. Les frais de la procédure d'appel sont laissés à la charge de l'Etat (art. 428 al. 1 CPP). En revanche, dans la mesure où il est admis que les appelants se sont rendus coupables d'infraction à la LASV, les frais de première instance demeurent à leur charge, dans la mesure fixée par le Tribunal de police, s'agissant de même complexe de faits. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c89248e1-9688-40f5-a066-19e135ace405 | En fait :
A.
Par jugement du 18 décembre 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a libéré V._ du chef d’accusation de menaces (I), a constaté qu’il s’est rendu coupable d’injure (II), l’a condamné à une peine pécuniaire de 20 jours-amende, le jour-amende étant fixé à 30 fr. (III), a dit que cette peine est entièrement complémentaire à celles prononcées par le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne les 27 septembre et 6 novembre 2012 (IV) et a mis les frais de la cause par 1'981 fr. à la charge de V._ (V).
B.
Le 29 décembre 2013, V._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel du 8 février 2014, il a conclu, avec suite de frais, à la réforme du jugement en ce sens qu’il est aussi acquitté du chef d’accusation d’injure et libéré de toute peine et de tous frais.
Par courrier du 14 février 2014, le Ministère public de l’arrondissement de Lausanne a déclaré renoncer à déposer une demande de non-entrée en matière ou un appel joint.
Par courrier du 20 mars 2014, la procureure a indiqué qu’elle n’interviendrait pas à l’audience et n’entendait pas déposer de conclusions écrites.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
V._ est né le [...] 1965 à [...] en Tunisie. Il est arrivé en Suisse en 1990, à la Chaux-de-Fonds, où il y a travaillé pendant six ans en tant qu’ouvrier qualifié dans l’horlogerie. Après avoir rencontré son épouse, une suissesse habitant Lausanne, il l’y a rejointe et le couple s’est marié à la fin des années 90. Deux filles sont nées de leur union. Ces dernières sont aujourd’hui âgées de douze ans et demi et deux ans et demi. Son épouse travaille à 70 % en tant que cadre à la [...] à Lausanne. Lorsqu’il est arrivé à Lausanne, l’appelant a travaillé pendant deux ou trois ans auprès de l’entreprise [...] à [...]. Il a ensuite effectué de petits travaux tels que de la saisie de données en arabe classique pour le compte de [...]. Il a également travaillé dans une entreprise de démontage de déchets électroniques ainsi que dans une fabrique de CD/DVD. Peu après la naissance de sa fille aînée, V._ a cessé de travailler pour s’occuper d’elle et n’a depuis cela plus exercé d’activité lucrative. La famille vit avec le salaire de son épouse et les quelques revenus que lui procure la location de terres dont il est propriétaire en Tunisie.
Le casier judiciaire suisse de V._ comporte les inscriptions suivantes :
-
24 juillet 2008, Office régional du Juge d’instruction du Bas-Valais à St-Maurice, violation grave des règles de la circulation routière, peine pécuniaire à 20 jours-amende à 60 fr., sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 2 ans, amende à 600 francs ;
-
12 août 2011, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois, Vevey, violation grave des règles de la circulation routière, peine pécuniaire à 20 jours-amende à 60 francs ;
-
30 avril 2012, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois, Vevey, conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis, peine pécuniaire à 15 jours-amende à 30 francs ;
-
11 juin 2012, Ministère public de l’arrondissement de l’Est vaudois, Vevey, conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis, peine pécuniaire à 40 jours-amende à 30 francs ;
-
27 septembre 2012, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, violation des règles de la circulation routière, conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis, concours (plussieurs peines du même genre), peine pécuniaire à 60 jours-amende à 30 fr., amende à 300 francs ;
-
6 novembre 2012, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage de permis, concours (plusieurs peines du même genre), peine pécuniaire à 40 jours-amende à 30 fr., peine complémentaire au jugement du 27 septembre 2012, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne ;
-
7 mars 2013, Ministère public de l’arrondissement de Lausanne, violation des règles de la circulation routière, conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis, peine privative de liberté de 90 jours, amende à 300 francs.
2.
A Lausanne au [...], entre le 14 juillet et le 14 octobre 2012, V._ a, à de nombreuses reprises, traité N._ de « fille de chien », lui déclarant également « ta mère est une pute ». Le 14 octobre 2012, il l’a également menacée en ces termes : « je vais tous vous égorger », passant son doigt sous le cou.
N._ a déposé plainte le 15 octobre 2012. | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délai légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de V._ est recevable.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L’appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d’appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L’appel tend à la répétition de l’examen des faits et au prononcé d’un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L’immédiateté des preuves ne s’impose toutefois pas en instance d’appel. Selon l’art. 389 al. 1 CPP, la procédure d’appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d’appel administre, d’office ou à la demande d’une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
L’appelant, qui a été libéré au bénéfice du doute de l’accusation de menaces, conteste avoir proféré des insultes à l’encontre de N._. Dans sa déclaration d’appel, il s’est contenté d’affirmer que les premiers juges ont eu tort de retenir les dires de la plaignante, qui selon lui ment, et d’écarter ses propres déclarations.
3.1
3.1.1
La constatation des faits est incomplète au sens de l’art. 398 al. 3 let. b CPP lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n’ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Kuhn/Jeanneret [éd.], Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
3.1.2
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
S'agissant plus précisément de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits, il s’agit de l’acte par lequel le juge du fond évalue librement la valeur de persuasion des moyens de preuve à disposition et pondère ces différents moyens de preuve afin de parvenir à une conclusion sur la réalisation ou non des éléments de fait pertinents pour l’application du droit pénal matériel. Le juge peut fonder une condamnation sur un faisceau d’indices; en cas de versions contradictoires, il doit déterminer laquelle est la plus crédible. En d’autres termes, ce n’est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (Verniory, op. cit., n. 34 ad art. 10 CPP; Kistler Vianin, op. cit., nn. 19 ss ad art. 398 CPP, et les références jurisprudentielles citées).
Lorsque l'autorité a forgé sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables au prévenu sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a; cf. aussi, quant à la notion d’arbitraire, ATF 136 III 552 c. 4.2).
3.2
En procédant à sa propre appréciation s’agissant des faits décrits sous chiffre 2 ci-dessus, la cour de céans constate ce qui suit:
L’appelant conteste toujours en bloc les faits et affirme n’avoir jamais adressé la parole à la plaignante N._. Il a, par contre, évoqué que sa femme et la plaignante avaient été en conflit, mais qu’il ne s’en était pas mêlé. Cependant, la version des faits de N._, retenue par la première juge, est claire et cohérente. Elle a paru s’être vraiment sentie menacée. D’ailleurs, ses déclarations ont été corroborées par un témoin. Bien que ce dernier soit le compagnon de N._, il a paru crédible lors des débats de première instance de sorte que l’on ne saurait écarter son témoignage. De plus, on ne voit pas pour quelles raisons la plaignante et son compagnon inventeraient de telles accusations contre l’appelant. La thèse d’un éventuel complot contre V._ n’est fondée sur aucun motif sérieux. Pour le surplus, la plaignante et son compagnon ont été assez mesurés dans leurs propos. Ils avaient notamment relevé que l’appelant s’était « calmé » depuis que l’acte d’accusation avait été rendu. Devant la Cour de céans, la plaignante a confirmé qu’il n’y avait plus réellement de problème ni de contact avec l’appelant depuis de nombreux mois. On voit donc qu’ils n’ont pas exagéré, ni amplifié les faits.
En définitive, la Cour de céans peut se forger la même conviction que la première juge. A cela s’ajoute que l’appelant n’a donné aucun motif, ni aucune explication qui vaudrait qu’on apprécie autrement les faits de la cause. La culpabilité de l’appelant doit ainsi être retenue, l’infraction d’injure étant à l’évidence réalisée.
4.
La quotité de la peine n’est pas contestée. Vérifiée d’office, elle s’avère d’ailleurs conforme aux exigences de l’art. 47 CP. Tant dans sa nature que dans sa quotité, la peine est adéquate. Celle-ci doit ainsi être confirmée.
5.
Manifestement mal fondé, l’appel de V._ doit être rejeté.
Vu l’issue de la cause, les frais de la procédure d’appel, par 1’060 fr., sont mis à la charge de l’appelant, qui succombe entièrement (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c8a2e067-6325-41fc-8df6-fe94279fb7a8 | En fait :
A.
Par jugement du 7 novembre 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a constaté que M._ s'est rendu coupable de violation grave des règles de la circulation, conduite d'un véhicule défectueux, défaut de port de permis de conduire et défaut de port de permis de circulation (I), l'a condamné à cinquante jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 60 fr. et à une amende de 420 francs (II), a dit qu'à défaut de paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution sera de sept jours (III), a ordonné le maintien au dossier, comme pièce à conviction, d'un CD versé au dossier sous fiche n° 13250/11 (IV) et a mis les frais par 2'547 fr. 80 à la charge de M._ (V).
B.
Le 17 novembre 2011, M._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d'appel du 14 décembre 2011, il a conclu, avec suite de frais et dépens, à l'admission de l'appel (I), principalement, à la réforme du jugement entrepris en ce sens qu'il est libéré de l'infraction de violation grave des règles de la circulation et condamné à une amende d'ordre pour conduite d'un véhicule défectueux, défaut de port de permis de conduire et défaut de port du permis de circulation (II) et, subsidiairement, à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal de première instance pour qu'il soit procédé à de nouveaux débats et pour qu'un nouveau jugement soit rendu (III). L'appelant a également produit une pièce et renouvelé ses réquisitions de preuves tendant à la mise en œuvre d'une expertise et à la production du rapport d'étalonnage du système Bredar ainsi que du graphique des vitesses mesurées pendant le contrôle.
Le 19 décembre 2011, le Ministère public a déclaré s'en remettre à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et ne pas déposer d'appel joint.
Le 10 janvier 2012, le Président de la Cour de céans a informé l'appelant que ses réquisitions de preuves étaient rejetées dès lors que les preuves en question n'apparaissaient pas nécessaires au traitement de l'appel.
Le 16 janvier 2012, le Ministère public a déclaré qu'il n'entendait pas intervenir en personne aux débats d'appel et qu'il se référait intégralement au jugement rendu par le Tribunal de police de la Broye et du Nord vaudois, concluant ainsi au rejet de l'appel, frais à son auteur.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
M._ est né le 5 février 1972 à Lausanne. Cadet d'une famille de deux enfants, il a été élevé par ses parents à Vulliens, sur le domaine agricole familial. A l'issue de sa scolarité obligatoire, il a fait un apprentissage d'agriculteur, qu'il a terminé avec succès. En 2008, il a repris le domaine agricole. Son activité d'agriculteur lui rapporte entre 60'000 et 80'000 fr. par an. En 2003, il a épousé F._, avec laquelle il a eu deux enfants nés en 2004 et 2006. Depuis 2009, il est séparé de son épouse et verse une pension de 2'500 fr. par mois pour l'entretien des siens, hors allocations, selon un arrangement à l'amiable. Sa prime d'assurance-maladie s'élève à 290 fr. par mois. La dette qui grève le domaine est de 1,4 million de francs environ. L'appelant paie quelque 1'000 fr. par mois d'impôt et dispose d'économies pour un montant de l'ordre de 30'000 francs.
Le casier judiciaire de M._ mentionne une condamnation le 17 juillet 2007 par le Tribunal de police de l'Est vaudois à quinze jours-amende à 100 fr. avec sursis pendant deux ans et à 400 fr. d'amende, pour violation simple LCR et ivresse au volant qualifiée.
Le fichier ADMAS fait état d'un retrait de permis de quatre mois, soit du 20 décembre 2007 au 19 avril 2008, pour ébriété et inattention.
2.
Le vendredi 3 septembre 2010, vers 20 heures, M._ circulait au guidon de sa moto de marque Ducati Zdm 600 M, immatriculée [...], sur la route cantonale n° 601a Berne-Lausanne, entre Lucens et Moudon. Il venait de Villeneuve FR et se rendait à son domicile à Vulliens.
Au même moment, le sergent A._ et le caporal T._ procédaient à une surveillance du trafic et avaient pris place dans une WV Passat banalisée assez puissante, équipée d'un appareil de mesure Bredar, stationnée sur la voie d'accès à la route cantonale Lausanne-Berne depuis la route de Lucens à Curtilles. Leur attention a été attirée par la moto de M._ qui circulait à vive allure en sens inverse, de Payerne en direction de Lausanne. Ils ont fait demi-tour et ont pris la moto en chasse. Ils l'ont perdue de vue sur le pont qui surplombe la Broye, mais ils ont retrouvé un contact visuel sur le tronçon rectiligne entre la sortie de Lucens et l'ancienne centrale nucléaire. La moto se trouvait à une distance d'environ 200 mètres. Les gendarmes ont enclenché l'appareil Bredar et ont procédé à une mesure de la vitesse de l'appelant jusqu'à l'entrée de Moudon, sur une distance de 3'234 mètres. L'intervalle qui les séparait de l'appelant était de
200 mètres environ et n'était pas inférieur à cette distance à la fin de la mesure. Après avoir traversé Moudon, les gendarmes ont interpellé M._. Ce dernier n'a pu présenter ni permis de conduire, ni permis de circulation. De plus, sa moto ne portait pas sa plaque d'immatriculation. Cette plaque, interchangeable, se trouvait sur un autre véhicule stationné à Villeneuve/FR au moment des faits.
Informé de l'excès de vitesse, l'appelant s'est étonné que les gendarmes l'aient suivi à la vitesse de 149 km/h, expliquant que sa moto ne pouvait pas atteindre cette vitesse.
3.
Le protocole de relevé de l'appareil Bredar a la teneur suivante:
- date de calibrage: 02.08.10
- heure de calibrage: 15:16:51
- date: 03.09.10
- départ secteur A: 20:12:26
- stop secteur A: 20:13:40
- distance du relevé: 3'234.1 m
- durée du relevé: 1 min 13 s
- vitesse max: 190 km/h
- vitesse moyenne: 159 km/h
- déduction de la tolérance: 6%
- vitesse totale:
149km/h
La vitesse de 190 km/h n'est pas celle de M._, mais celle maximale atteinte par la voiture de gendarmerie banalisée. Le système de mesure choisi est celui de la distance libre. Contrairement au système de mesure en distance constante, la distance entre l'auteur et la voiture suiveuse peut varier pendant la mesure, mais à la fin de la mesure, elle doit être au moins égale ou supérieure à celle du début de la mesure.
4.
Selon le rapport de dénonciation, lors de la mesure, le ciel était dégagé, le trafic de faible densité et la chaussée sèche. Le tracé est rectiligne et présente une déclivité en palier. La visibilité est étendue et la vitesse limitée à 80 km/heure.
Les faits ont été filmés au moyen d'une caméra équipant le véhicule banalisé. Les images ont été gravées sur un CD qui a été versé au dossier comme pièce à conviction sous fiche n° 1325/11.
Il ressort des images de la vidéo qu'une distance d'environ cinq bornes sépare les deux véhicules au début et à la fin de la mesure.
5.
Selon le permis de circulation, la moto Ducati Zdm 600 M a été immatriculée le 3 juin 1998 et a passé deux expertises les 30 mai 2006 et 27 octobre 2008. Il ressort de la fiche d'homologation que la puissance de la moto est de 24 kW (environ 32,6 ch) et sa vitesse maximale de 140 km/h. Pour être limité à 24 kW, le moteur doit présenter les adaptations suivantes:
- une réduction du diamètre des ouvertures du boîtier d'admission d'air par une douille de caoutchouc;
- une réduction de la section des deux pipes d'admission par un disque métallique perforé d'une ouverture oblongue d'une largeur de 12,5 mm, du bord du disque au centre, avec un rayon intérieur de 6,25 mm;
- une réduction à l'entrée des deux silencieux d'échappement, par une douille métallique d'un diamètre intérieur de 12,5 mm.
La moto a été soumise le 25 mars 2011 à un examen de la Division technique du Services des automobiles et de la navigation. Dans un rapport du 18 avril 2011, les experts ont constaté après démontage que les réducteurs mentionnés ci-dessus faisaient tous défaut. La moto ne correspond donc pas à la version de son homologation suisse. Elle ne répond plus aux exigences légales démontrées par sa réception suisse par type, notamment au niveau des émissions de bruit au passage et de gaz d'échappement. La vitesse n'a pas été mesurée. Cependant, les experts ont estimé que les non-conformités constatées leur permettaient de confirmer que les performances du véhicules étaient augmentées, en particulier la vitesse maximale.
6.
Selon une fiche publiée par Wikipédia, la Ducati 600 Monster a été produite entre 1994 et 2001. Dans sa version d'origine, elle a une puissance de 53 chevaux et peut atteindre la vitesse maximale de 200 km/heures.
7.
M._ a fait procéder à une expertise privée, qu'il a confiée à l'ingénieur S._. Celui-ci a examiné la moto le 28 juin 2011 et rendu son rapport le 29 juin 2011. Il n'a pas eu connaissance du rapport du SAN du 18 avril 2011. L'ingénieur précité a effectué un contrôle de vitesse et de puissance maximale sur le banc d'essai Dynostar Modèle 70, chez [...] à Saint-Légier. Il a constaté que la vitesse maximale atteinte était de 142 km/h et que la puissance maximale s'élevait à 25,4 kW, soit 34,5 chevaux.
L'exploitant de l'entreprise [...], N._, a confirmé à l'ingénieur S._ que la moto était entretenue par ses soins. En 2003, il aurait mis la moto aux normes en limitant la course du boisseau agissant sur l'alimentation du moteur. Selon l'ingénieur F._, cette procédure dictée par des impératifs techniques, n'est pas conforme aux prescriptions en vigueur, mais débouche sur des résultats identiques. Le moteur est bridé au niveau de l'alimentation au lieu de l'échappement.
En conclusion, l'ingénieur S._ a déclaré que la moto était conforme aux données de l'homologation en ce qui concerne les performances. Selon lui, la vitesse moyenne de 149 km/h retenue par le dénonciateur n'est pas compatible avec les performances de la moto, à moins que M._ n'ait circulé sur un tronçon avec une déclivité descendante et/ou un fort vent dans le dos.
A l'audience de première instance, S._ a confirmé les conclusions de son rapport du 29 juin 2011. Il n'avait pas connaissance du rapport technique du SAN du 18 avril 2011. Il lui a été donné lecture du passage suivant de ce rapport:
"Ce véhicule ne correspond pas à la version de son homologation suisse par les réducteurs d'entrée du filtre à air, des pipes d'admission et des échappements, qui fond défaut. La vitesse maximale du véhicule n'a pas été mesurée. Néanmoins, les non-conformités constatées nous permettent de confirmer les performances du véhicule sont augmentées, notamment sa vitesse maximale".
L'ingénieur S._ a déclaré qu'il ne connaissait pas les raisons de ces modifications, mais il a confirmé qu'elles permettaient normalement d'améliorer les performances de la moto. Il a observé que le SAN n'avait pas tenu compte des modifications faites au niveau de l'alimentation et déploré que ce service n'ait pas procédé à des mesures pour vérifier la portée des modifications. En réponse à une question du défenseur du prévenu, il a expliqué qu'il était possible de procéder à des modifications techniques, notamment en modifiant le diamètre de l'entrée d'air, pour permettre à la moto d'augmenter ses performances et d'atteindre des vitesses de l'ordre de 200 km/h.
D.
Aux débats d'appel, M._ a renouvelé sa requête incidente tendant à la mise en œuvre d'une expertise pour établir la vitesse maximale que sa moto était susceptible d'atteindre et à la production du rapport d'étalonnage du système Bredar, du graphique des vitesses mesurées durant le contrôle ainsi qu'un rapport sur l'état des pneus du véhicule de police.
Délibérant immédiatement à huis clos, la Cour de céans a rejeté cette requête incidente. | En droit :
1.
Selon l'art. 399 al. 1 CPP, l'appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la notification du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit.
La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour le faire (art. 382 al. 1 CPP) et contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel interjeté par M._ est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
M._ estime que la procédure de relevé de l'excès de vitesse n'aurait pas été respectée dans la mesure où le véhicule suiveur de la gendarmerie a atteint 190 km/h durant la poursuite enregistrée ce qui exclurait un intervalle de 200 mètres entre véhicules. De plus, l'appelant soutient que les images du CD démontreraient que les prescriptions d'intervalle en début et en fin d'enregistrement n'auraient pas été respectées.
3.1
Conformément à l'art. 106 al. 1 LCR (Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958; RS 741.01), le Conseil fédéral arrête les prescriptions nécessaires à l'application de cette loi et désigne les autorités fédérales compétentes pour son exécution. Il peut autoriser l'Office fédéral des routes (OFROU) à régler les modalités. En application de cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a édicté l'ordonnance du 28 mars 2007 sur le contrôle de la circulation routière (OCCR; RS 741.013). Conformément à l'art. 9 OCCR, pour les contrôles effectués à l'aide de moyens techniques, l'OFROU fixe, en accord avec l'office fédéral de métrologie, les modalités d'exécution et la procédure qui s'y rapporte (let. a) ainsi que les exigences liées aux systèmes et aux genres de mesures et les marges d'erreur inhérentes aux appareils et aux mesures (let. b). L'OFROU fixe les exigences posées au personnel chargé des contrôles et de l'évaluation (al. 3). Cet office a édicté, le 22 mai 2008, une Ordonnance (OOCCR-OFROU; RS 741.013.1), ainsi que, en accord avec l'Office fédéral de métrologie (METAS), des Instructions concernant les contrôles de vitesse par la police et la surveillance de la circulation aux feux rouges. Les art. 6 à 9 OOCCR-OFROU précisent notamment les types de mesures (art. 6 et 7), les marges de sécurité (art. 8) ainsi que les exigences relatives à la documentation des vitesses mesurées, soit essentiellement la prise de photographies (art. 9) (cf. arrêt 6B_129/2010 du 10 juin 2010 c. 2.1).
S'agissant d'un contrôle de vitesse effectué avec un véhicule-suiveur équipé d'un tachygraphe avec calculatrice et vidéo, l'annexe 1 à l'OOCCR-OFROU, intitulée "marge de sécurité lors de contrôle par véhicule-suiveur", selon la méthode de la distance libre, précise que la distance variable doit être plus grande à la fin qu'au début.
Les Instructions de l'OFROU du 22 mai 2008 concernant les contrôles de vitesse par la police et la surveillance de la circulation aux feux rouges énoncent que les contrôles au moyen d'un véhicule-suiveur, avec documentation photographique (chiffre 10.5), s'agissant des mesures effectuées en adaptant librement la vitesse (chiffre 10.5.2), nécessitent qu'à la fin de la mesure, la distance entre le véhicule suiveur et le véhicule contrôlé soit égale ou supérieure à celle du début. En revanche, en cours de poursuite, la distance entre les deux véhicules pourra être réduite (chiffre 10.5.2.1).
3.2
En l'occurrence, dans la mesure où le suiveur peut en partie rattraper le suivi ou se faire distancer en cours de mesure, le fait que le véhicule de police ait atteint une vitesse maximale de 190 km/h pendant la mesure effectuée durant une minute et 13 secondes sur une distance de 3'234 mètres ne permet donc pas de conclure à l'irrégularité du relevé. En effet, une pointe élevée n'est pas déterminante et n'implique pas que l'intervalle entre véhicules aurait fondu en cours d'enregistrement pour être finalement inférieur à celui du début.
La preuve du respect de la règle du maintien d'une distance au moins initiale en fin de mesure résulte de la déposition du dénonciateur. Le sergent A._, formé à ces procédures, a ainsi déclaré qu'au début, l'appelant se trouvait à environ 200 mètres devant le véhicule de police et, qu'à la fin, la distance n'était en tout cas pas inférieure à celle du début, soit celle de 200 mètres (jgt., p. 3). Aucun élément ne permet de battre en brèche ce témoignage. De plus, on ne discerne pas pour quels motifs ce policier expérimenté n'aurait pas dit la vérité ou plus généralement mal fait son travail.
La deuxième preuve du respect de la règle de l'intervalle réside dans les images de la vidéo. L'appelant soutient à cet égard que la distance observée était largement supérieure à 200 mètres. Outre qu'il s'agissait de 200 mètres environ, ce qui est décisif n'est pas l'étendue précise de ces distances, mais leur rapport, soit que la distance finale ne soit pas inférieure à la distance initiale. Or, le visionnement des images de la vidéo permet précisément d'acquérir cette conviction. En effet, l'on peut compter cinq bornes ou balises jalonnant le côté de la route entre le véhicule-suiveur et la moto en début et en fin de contrôle ce qui ne laisse aucune place à l'erreur et au doute.
3.3
Fondé sur ce qui précède, la Cour de céans a acquis la conviction que la distance séparant les deux véhicules n'était pas inférieure en fin de contrôle qu'elle ne l'était au début de ce dernier. Partant, la procédure de relevé de vitesse a été respectée.
Le grief de l'appelant, mal fondé, doit être rejeté.
4.
Se référant à la fiche d'homologation de sa moto, aux essais pratiqués par son mécanicien et au rapport, ainsi qu'à la déposition de l'ingénieur S._, l'appelant soutient que la puissance de sa moto ne lui permettait objectivement pas d'atteindre la vitesse de 149 km/h, donc que le contrôle est erroné.
4.1
En l'occurrence, la fiche d'homologation (P. 10/1) indiquant une vitesse maximale de 140 km/h est sans portée dès lors qu'il est établi que le véhicule a été modifié, ce que l'appelant ne conteste plus après avoir faussement affirmé lors de son audition par la greffière du Juge d'instruction que sa moto était d'origine et qu'il n'y avait apporté aucune modification (PV audition 1), et que l'inspection technique effectuée par les experts du SAN le 25 mars 2011 a établi que les trois réducteurs de vitesse désignés dans le document d'homologation faisaient défaut avec pour effet d'augmenter les performances du véhicules, notamment sa vitesse maximale (P. 14).
Dans son rapport du 29 juin 2011 (P. 28/1), l'ingénieur S._, après avoir procédé à un contrôle de la puissance et de la vitesse maximales de la moto sur un banc d'essai dans le garage usuel de l'appelant, a fait état d'une vitesse maximale de 142 km/h en reprenant les explications du mécanicien N._ du même garage selon lesquelles une intervention a été pratiquée en 2003 sur cette moto pour limiter la course du boisseau agissant sur l'alimentation du moteur. Il a indiqué qu'une vitesse supérieure à celle mesurée de 142 km/h était possible sur un tronçon accusant une déclivité descendante et/ou un fort vent de dos. Or, la portion de route rectiligne sur laquelle le contrôle est intervenu présente une déclivité en palier. Ramené aux conditions de circulation du cas, ce rapport n'exclut donc pas une vitesse supérieure à 142 km/heure.
Ainsi que cela résulte de son audition par le premier juge (jgt., p. 5), l'ingénieur S._, censé fonctionner comme expert privé, ignorait la teneur du rapport antérieur du SAN. Il a admis que les modifications relevées par ce service permettaient normalement d'augmenter les performances du véhicule jusqu'à atteindre des vitesses de l'ordre de 200 km/heure. Or, il s'agit là de la vitesse maximale que ce modèle de moto, non modifié, peut atteindre (P. 19), sans exclure qu'il puisse aussi s'agir de vitesses maximales plus basses comme les 175 km/h relevés sur une fiche d'homologation concernant une autre moto produite par l'appelant (P. 35/2, p. 2).
Dans le cas présent, ce qui est décisif, c'est que divers équipements installés sur la moto pour en réduire la vitesse lors de son homologation avaient été enlevés, ce qui contribuait à augmenter celle-là. Il importe en l'occurrence peu qu'un autre système de limitation de puissance ait été installé en 2003. En effet, d'une part, le fonctionnement effectif de cette installation lors de l'excès de vitesse du 3 septembre 2010 n'est pas établi et, d'autre part, l'effet simultané ou adjonctif de la suppression des autres réducteurs de vitesse n'est pas d'avantage établi.
En définitive, puisqu'on ignore le cas échéant quels réducteurs de vitesse équipaient la moto le jour du contrôle, on ne peut en inférer que la vitesse relevée à cette occasion ne pouvait objectivement être atteinte. Ces incertitudes factuelles empêchent de se convaincre d'une prétendue impossibilité d'atteindre la vitesse moyenne de 149 km/h et ne sauraient donc aboutir à ôter toute portée au contrôle. Enfin, comme l'a relevé le premier juge, la vitesse maximale relevée par S._, soit de 142km/h, ne diffère que de 7 km/h de celle de 149 km/h résultant du contrôle et cette marge peut être expliquée puisque l'expert privé a réservé une possibilité de vitesse plus élevée sur un trajet en déclivité comme dans le cas particulier.
4.2
En conséquence, mal fondé, le grief de l'appelant doit être rejeté.
5.
Au vu de ce qui précède, l'appel interjeté par M._ est mal fondé et doit être rejeté.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel sont mis à la charge de M._ (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c8c174b5-d6d3-429b-9f01-c4adf6d34c3b | En fait :
A.
Par jugement du 14 novembre 2011, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a libéré A.W._ de l’infraction de recel et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants (ci-après : LStup; RS 812.121) (I), condamné A.W._ pour blanchiment d’argent, infraction grave à la LStup, infraction à la Loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (ci-après : LSEE; RS 142.20) et à la Loi sur les étrangers (ci-après : LEtr; RS 142.20), à une peine privative de liberté de 4 (quatre) ans, sous déduction de 127 (cent vingt-sept) jours de détention provisoire (II), maintenu A.W._ en détention pour des motifs de sûreté (III), mis les frais de la cause, arrêtés à 8'997 fr. 90, y compris l’indemnité due à son défenseur d’office par 2'995 fr. 15, TVA comprise, à la charge d’A.W._ (IV) et dit que l’indemnité servie à son défenseur d’office ne sera due que si sa situation financière s’améliore (V).
B.
Le 23 novembre 2011, A.W._ a déposé une annonce d'appel contre ce jugement. Par déclaration d'appel motivée du 15 décembre 2011, le prévenu a requis la fin de sa détention pour des motifs de sûreté, et a conclu à une peine privative de liberté n'excédant pas trois ans, sous déduction de 127 jours de détention provisoire, peine assortie d'un sursis, subsidiairement, d'un sursis partiel portant sur 18 mois au moins.
Par décision du 20 décembre 2011 (CAPE, 20 décembre 2011/234), le Président de la Cour d'appel pénale a rejeté la requête de mise en liberté d'A.W._, dès lors que, notamment, il existait un risque de fuite aggravé par l'importance de la sanction prononcée en première instance, ainsi qu'un risque de réitération, le trafic de cocaïne étant le seul moyen d'existence du prévenu.
Le 23 décembre 2011, le Ministère public a renoncé à déposer une demande de non-entrée en matière ou à déclarer un appel joint.
Le 12 janvier 2012, les parties ont été informées de la composition de la cour et citées à comparaître.
Une audience s'est tenue le 13 février 2012 au cours de laquelle A.W._ a été entendu. Il a confirmé toutes ses déclarations antérieures et précisé que sa situation personnelle n'avait pas changé.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
A.W._ est né le 31 décembre 1987 en [...]. Enfant unique, il a grandi en [...] auprès de ses parents. Après sa scolarité, il a acquis une formation de soudeur dans son pays, avant de se rendre au Portugal puis en Suisse. En 2008, il a été renvoyé en Guinée. En 2010, il est retourné au Portugal où il a travaillé comme aide-maçon. Il gagnait 1'100 € par mois et payait un loyer mensuel de 250 €, ainsi qu'un montant de 50 € pour son assurance-maladie.
1.2
Le casier judiciaire suisse de A.W._ est vierge, le jugement rendu le 22 janvier 2009 ayant été mis à néant par l'admission de la demande de relief.
2.
2.1
Il est reproché à A.W._ d'avoir été actif dans le trafic de cocaïne, sur la Riviera, depuis une période indéterminée et jusqu'au 22 janvier 2008, date de son arrestation. Sous le surnom [...]A.W._ a remis un total d'au moins 64'000 fr. à B.W._, ce qui représente un trafic portant sur 984 grammes de cocaïne, soit 393, 6 grammes de cocaïne pure.
On précisera ici qu'interpellé dans le cadre d'une opération dite [...] qui a permis de mettre à jour un important trafic de cocaïne, le dénommé B.W._ a avoué avoir tenu une comptabilité dans un petit calepin noir où il notait les sommes reçues d'autres trafiquants africains. Il y inscrivait le nom ou le surnom de l'Africain qui lui remettait de l'argent, ainsi que le montant donné. Sa mission consistait à transférer cet argent en [...], ou à le garder à la disposition de ses compatriotes en Suisse. Une fois l'argent acheminé en [...] ou restitué à son propriétaire, B.W._ biffait la somme et le nom.
2.2
A.W._, dont la demande d'asile déposée en 2005 a été rejetée, a admis avoir séjourné illégalement en Suisse depuis 2007 en tous cas.
D.
Pour ces faits, A.W._ a été reconnu coupable et
condamné (cf. A). | En droit :
1.
1.1
Déposé en temps utile et contenant des conclusions suffisantes, l'appel est recevable (art. 399 al. 1 et 3 CPP; Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0).
1.2
Aux termes de l'art. 398 CPP, la juridiction d'appel jouit d'un plein pouvoir d'examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L'appel peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète des faits et pour inopportunité.
2.
2.1
A.W._ fait tout d'abord valoir que la quantité de drogue retenue par le Tribunal (984 grammes ou 393,6 grammes de cocaïne pure) procède d’une constatation erronée des faits, singulièrement d’une mauvaise lecture de la
pièce no 4 du dossier, et de la non prise en compte de ses déclarations pourtant corroborées par celles de B.W._. Il prétend que les montants indiqués avec
des "+" figurant en colonne et sur la droite de montants plus importants, ne doivent pas être additionnés mais inclus dans ces derniers. Il chiffre ainsi à 40'970 fr., le produit de sa vente. Cette somme, dont à déduire les montants indéchiffrables, convertie selon les modalités retenues par le Tribunal, révèle un trafic de moindre importance que celui retenu par le jugement entrepris (à savoir, 241, 66 grammes de substance active au lieu de 393, 6 grammes), ce qui justifie une réduction de la peine.
2.2
Analysant la pièce no 4 du dossier (le rapport de la Police municipale de Lausanne du 20 septembre 2007) qui reproduit, en page 2, une photocopie du calepin de B.W._, l'autorité de première instance a retenu, en bref, que les sommes inscrites par ce dernier devaient être additionnées. L'étude de cette pièce permet de se convaincre de la justesse de ce raisonnement. En effet, les sommes sont séparées du signe "+" et sont biffées en une seule opération et non à chaque apport d’argent. Enfin, c'est à juste titre que les premiers juges ont écarté la version des faits présentée par l'appelant, laquelle n'expliquerait pas pour quelles raisons une suite de chiffres ne traduirait pas toujours une augmentation des montants. Au demeurant, B.W._ a expliqué (pièce no 1, procès-verbal d'audition du 19 juin 2007, réponse à D.3) qu'il inscrivait les sommes dans son calepin et les biffait une fois la somme transportée. Il a également affirmé qu'il lui est arrivé "à quelques reprises" de procéder comme l'appelant le prétend, ce qui n'est pas confirmé par le calepin. Cela étant, si l'on additionne les montants inscrits dans la comptabilité de B.W._, le trafic de l'appelant a rapporté 66’400 fr., ce qui est conforme aux pièces du dossier, singulièrement au rapport complémentaire établi au cours de l'enquête [...] par la Police municipale de Lausanne le 8 avril 2008, lequel fait état d'un montant de
"[...] plus de 66'000 fr. [...]"
(pièce no 14, p. 3). Le Tribunal s'est distancié de ce chiffre; il n'a retenu que 64'000 fr., au vu de la difficulté à déchiffrer certaines sommes (jugement, p. 12). Pour déterminer la quantité de cocaïne écoulée par le prévenu, le Tribunal a divisé 64'000 fr. par 65 fr. Ce dernier chiffre représente le bénéfice réalisé par A.W._ pour chaque gramme de cocaïne vendu (rapport de police du 8 avril 2008 précité, même page), ce qui donne 984 grammes (64'000 fr./ 65 fr.), soit de 393, 6 grammes de cocaïne pure au taux moyen de pureté de l'année 2008 (40 %), non contesté par l'appelant et conforme à la jurisprudence (cf. jugement, pp. 12 et 13).
Vu ce qui précède, le moyen tiré de la constatation erronée des faits apparaît mal fondé et ne permet pas à l’appelant de critiquer la quotité de la sanction.
3.
On retiendra donc, avec les premiers juges, qu'au vu de l'ampleur de son trafic (le volume de cocaïne pure dépasse largement les 18 grammes), l'appelant s'est rendu coupable d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants au sens des art. 19 ch. 1 et 2 litt. a LStup, la nouvelle teneur de cette disposition n'étant pas plus favorable (art. 2 CP). Le comportement de l'intéressé tombe également sous le coup de l'art. art. 305
bis
CP (blanchiment d'argent) et son séjour illégal est sanctionné par l'art. 23 LSEE pour la période allant jusqu'au 31 décembre 2007 et par l'art. 115 al. 1 litt. b LEtr dès le 1
er
janvier 2008.
4.
A.W._ soutient que l'autorité de première instance a abusé de son pouvoir d'appréciation en lui infligeant une peine arbitrairement sévère et supérieure à celle que les tribunaux fixent généralement dans ce genre d’affaire.
4.1.1
Selon l’art. 47 al. 1 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir. Selon l’al. 2 de cette même disposition, la culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures. Ces critères correspondent à ceux développés par la jurisprudence relative à l'art. 63 aCP, à laquelle on peut se référer. Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation de la peine (ATF 134 IV 17 c. 2.1 p. 19).
En matière de trafic de stupéfiants, même si elle ne joue pas un rôle prépondérant, la quantité de drogue – à l’instar du degré de pureté de celle-ci – constitue un élément important pour la fixation de la peine, qui perd cependant de l'importance au fur et à mesure que s'éloigne la limite à partir de laquelle le cas est grave au sens de l'art. 19 ch. 2 litt. a LStup (ATF 122 IV 299 c. 2c ; ATF 121 IV 193 c. 2b/aa, 202 c. 2d/cc). Le type et la nature du trafic en cause sont déterminants. Aussi l'appréciation sera-t-elle différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, tant la nature de sa participation que sa position au sein de l'organisation doivent être prises en compte. L'étendue géographique du trafic entre également en
considération : l'importation en Suisse de drogue a des répercussions plus graves que le seul transport à l'intérieur des frontières. S'agissant d'apprécier les mobiles qui ont poussé l'auteur à agir, le juge doit distinguer le cas de celui qui est lui-même toxicomane et agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain (TF 6B_265/2010 du 13 août 2010 c. 2.3). Le comportement du délinquant lors de la procédure peut aussi jouer un rôle. Le juge pourra atténuer la peine en raison de l'aveu ou de la bonne coopération de l'auteur de l'infraction avec les autorités policières ou judiciaires notamment si cette coopération a permis d'élucider des faits qui, à ce défaut, seraient restés obscurs ATF IV 202 c. 2d/aa; 118 IV 342 c. 2d).
4.1.2
Consommateur de marijuana et de cocaïne, l'appelant a indiqué aux débats de première instance (procès-verbal, p. 6) avoir profité de la générosité de tiers pour sa consommation. Il ne s'est ainsi pas adonné au trafic pour financer son vice, et son mobile s’apparente à l’appât du gain. Il n'a pas collaboré à l'instruction, a persisté à nier les quantités de drogue écoulées et n'a fait preuve d'aucun regret. Minimisant l’incrimination pénale, il a fait montre d'une non prise de conscience de la gravité de ses agissements. Les infractions commises par A.W._ sont en concours (blanchiment d'argent, infraction grave à la LStup, infraction à la LSEE et à la LEtr), ce qui alourdit la peine (art. 49 CP). On tiendra compte également de l'importance du trafic, qui même s'il était local, s'est étendu sur quasi deux ans et a porté sur presque un kilo de cocaïne. A la décharge du prévenu, on considérera l'écoulement du temps, ainsi que sa situation personnelle : lors de son arrestation, il paraissait socialisé à l'étranger. Ces éléments à charge et à décharge n'ont pas été méconnus par les premiers juges, qui ont constaté, cela étant, que la culpabilité de l'intéressé était lourde et qu'une peine privative de liberté de 4 ans, sous déduction de 127 jours de détention provisoire, était adéquate (cf. jugement, p. 15). Cela n'est pas critiquable. Au reste, le recourant ne démontre pas qu'un facteur pertinent aurait été ignoré ou qu'un facteur non pertinent aurait, à tort, été pris en considération pour la fixation de la peine.
Les premiers juges n'ont donc pas abusé de leur pouvoir d'appréciation et ce grief tombe à faux.
4.2
L'analyse comparative à laquelle se livre l'appelant pour soutenir que sa peine est trop lourde n'est pas davantage pertinente. Selon une jurisprudence bien établie, eu égard aux nombreux paramètres qui interviennent dans la fixation de la peine, une comparaison avec des affaires concernant d'autres accusés et des faits différents est d'emblée délicate et généralement stérile dès lors qu'il existe presque toujours des différences entre les circonstances, objectives et subjectives, que le juge doit prendre en considération dans chacun des cas (ATF 120 IV 136 c. 3a p. 144; ATF 116 IV 292). Il ne suffit notamment pas que le recourant puisse citer l'un ou l'autre précédent où une peine particulièrement clémente a été fixée pour prétendre à un droit à l'égalité de traitement (ATF 120 IV 136 c. 3a p. 144 et les arrêts cités). Le principe de la légalité prime du reste sur celui de l'égalité (ATF 124 IV 44, c. 2c p. 47) (TF 6B_279/2011 du 20 juin 2011 c. 3.3.1). La référence à deux affaires récentes est vaine.
En conclusion la peine infligée à A.W._ par les premiers juges respecte le droit fédéral et doit être confirmée.
4.3
La quotité de cette peine (4 ans) étant incompatible avec le sursis (art. 42 et 43 CP), l'appel devient sans objet sur ce point.
5.
Vu ce qui précède, l'appel doit être rejeté et le jugement entrepris confirmé.
6.
Vu le sort de l'appel, les frais de seconde instance, qui comprennent l'indemnité due à son défenseur d'office, doivent être mis à la charge de A.W._ (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c9058d50-2fdc-4848-84e6-103ed66495b2 | En fait :
A.
Par jugement du 10 juillet 2014, le Tribunal criminel de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a constaté que G.C._ s'était rendu coupable d’infraction grave à l’ancienne LStup (loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes; RS 812.121), d’infraction à la LStup, de faux dans les certificats, d’entrée illégale sur le territoire suisse et de séjour illégal en Suisse (I), condamné G.C._ à une peine privative de liberté de 13 ans, sous déduction de 846 jours de détention avant jugement, cette peine étant partiellement complémentaire à celle prononcée le 24 juillet 2006 (II), ordonné le maintien de G.C._ en détention pour des motifs de sûreté (III), ordonné la confiscation et la destruction des objets suivants séquestrés sous fiche n° 11937/07 : une balance Reichmann, quatre téléphones portables, un papier avec une addition, un contrat de location de voiture, un carnet de billets d’avion, cinq packs sunrise et un agenda avec notes manuscrites (IV), ordonné la confiscation et la destruction des objets suivants séquestrés sous fiche n° 11941/07 : trois téléphones portables, une feuille manuscrite contenant un itinéraire de la région zurichoise, une bouteille d’ammoniaque entamée et un carnet de notes (V), ordonné la confiscation et la dévolution à l’état de la somme de 21'668 fr. 10 séquestrée sous fiche n° 11937/07 et de la somme de 1'320 fr. séquestrée sous fiche n° 11941/07 (VI), ordonné le maintien au dossier à titre de pièces à conviction de trois DVD d’enregistrements de conversations téléphoniques, de quatre disquettes et un CD de relevés des contrôles téléphoniques rétroactifs enregistrés sous fiche n° 11958/07, de deux DVD d’enregistrements de conversations téléphoniques et de deux classeurs contenant leurs transcriptions manuscrites enregistrés sous fiche n° 12064/07, ainsi que du titre de légitimation espagnol séquestré par les autorités du canton de Schaffhouse (VII), arrêté l’indemnité de Me Renaud Lattion, en sa qualité de défenseur d’office de G.C._, à 25'265 fr. 55, débours et TVA compris (VIII), mis une partie des frais par 40’531 fr. 85, y compris l’indemnité allouée sous chiffre VIII ci-dessus, à la charge de G.C._, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (IX) et dit que l’indemnité de défense d’office allouée à Me Renaud Lattion ne serait remboursable à l’Etat de Vaud que si la situation économique de G.C._ s’améliorait (X).
B.
Par annonce du 24 juillet 2014 suivie d’une déclaration motivée du
15 août 2014, G.C._ a formé appel contre ce jugement, concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à l'annulation des chiffres I à VI, IX et X du dispositif de celui-ci, ainsi qu'à sa condamnation uniquement pour entrée illégale sur le territoire suisse et séjour illégal en Suisse, laquelle devrait être sanctionnée par une peine modérée de jours-amende, les frais étant au surplus laissés à la charge de l'Etat. Subsidiairement, il a conclu au renvoi du dossier de la cause au Tribunal criminel pour nouveau jugement dans le sens des considérants. Il a enfin requis l'audition de G._ en qualité de témoin.
Par déclaration d'appel joint du 8 septembre 2014, le Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois a conclu à la réforme du chiffre II du jugement entrepris en ce sens que G.C._ soit condamné à une peine privative de liberté de 14 ans, sous déduction de la détention subie avant jugement.
Par courrier du 4 novembre 2014, la présidente de la Cour de céans a rejeté les réquisitions de preuve que comportait la déclaration d'appel.
A l'audience d'appel, le Ministère public a conclu au rejet de l'appel. Les parties ont pour le surplus confirmé les conclusions de leurs actes respectifs.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
Le prévenu G.C._ est né le [...] 1977. Aîné d'une famille de six enfants, il a été élevé par ses parents au Nigeria, Etat dont il est ressortissant et où il a effectué toute sa scolarité. Il a ensuite travaillé et étudié dans une laboratoire de chimie durant deux ans. En 2001, il est venu en Suisse, à Zurich, et a déposé une demande d'asile.
En 2004, le prévenu a fait la connaissance de Z._, avec laquelle il a eu une liaison durant environ deux mois de juin à juillet 2004. Un enfant est issu de cette union. En décembre 2004, par l’intermédiaire d’un ami africain à Zurich, le prévenu a fait la connaissance de S._. Leur relation est devenue plus sérieuse à partir du mois de février 2005 et ils se sont installés à Lausanne chez le futur beau-père du prévenu. Le 8 février 2006, le prévenu a épousé S._. Le couple s’est par la suite installé à Payerne, avec la fille de celle-ci née d’un premier lit.
En 2006, les revenus de la famille étaient limités, le prévenu ayant exposé que ni lui ni son épouse ne travaillaient et qu’ils étaient momentanément sans revenu sous réserve de l’aide financière fournie par la famille de S._. Il ressort cependant des déclarations de cette dernière qu’elle a bénéficié de prestations financières de l’aide sociale au moins jusqu’au mois d’août 2006. Elle a confirmé l’aide fournie par sa famille, en particulier son beau-père.
Le 4 octobre 2006, la police a interpellé les quatre occupants d'une voiture, à savoir le prévenu, S._, P._ et X._, qu'elle soupçonnait d'être impliqués dans un important trafic de cocaïne dans les régions d'Yverdon-les-Bains, Moudon et Payerne. Le prévenu a été détenu jusqu'au 29 juin 2007. Durant cette période de détention, le prévenu et S._ se sont séparés. Le mariage a finalement été déclaré nul en 2010, au motif qu'un premier mariage de S._, célébré aux Etats-Unis, n’avait jamais été dissous.
Le prévenu a quitté la Suisse en 2009 pour se rendre en France, où il a séjourné un mois, puis en Espagne où il est resté deux ou trois mois. Il est ensuite revenu en Suisse et s’est installé à Schaffhouse, sous l’identité de son frère B.C._. Selon ses déclarations, depuis son retour, le prévenu a vécu de petits travaux fournis par des amis.
Le 16 décembre 2012, le prévenu a à nouveau été interpellé en ville de Schaffhouse. Il est détenu depuis lors.
1.2
Le casier judiciaire du prévenu comporte l'inscription suivante :
- 24.07.2006 : Juge d’instruction du Nord vaudois, violation des règles de la circulation routière, conducteur se trouvant dans l’incapacité de conduire (taux d’alcoolémie qualifié) et contravention à l’ordonnance sur l’admission des personnes et véhicules à la circulations routière, 3 jours d’emprisonnement avec sursis durant deux ans, et 500 fr. d'amende.
Sous l’appellation [...], même date de naissance, le prévenu a été condamné le 12 février 2004 par le Procureur de Zurich à une peine d’emprisonnement de trois mois, avec sursis durant 2 ans, sous déduction de 16 jours de détention préventive, pour infraction à la LStup.
Le prévenu a fait l’objet d’enquêtes pour des trafics de cocaïne en 2004 et 2008 à Zurich.
Le prévenu a fait l’objet de trois mesures d’interdiction de faire usage d’un permis étranger, le 13 mai 2006 pour une durée de 3 mois, le 28 octobre 2007 pour une durée de 4 mois et le 16 avril 2009 pour une durée indéterminée.
1.3
Pendant l’enquête, le prévenu a été détenu avant jugement entre les
7 et 11 septembre 2006, soit 5 jours, entre le 4 octobre 2006 et le 29 juin 2007, soit 269 jours, ainsi que depuis le 16 décembre 2012, soit 572 jours au jour du jugement de première instance, ce qui correspond à un total de 846 jours de détention avant jugement.
Selon un rapport de la Prison de la Croisée du 7 juillet 2014, le prévenu a respecté les règles d’hygiène et les directives imposées. Il n’a fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire et s’entend bien avec ses codétenus. Actif dans l’atelier « bois », il a donné entière satisfaction à ses responsables, ayant une attitude adéquate. Le prévenu est un excellent sculpteur et a d’excellentes capacités au niveau des finitions dans les objets confectionnés. Il a suivi des cours de français, de musique et d’informatique.
2.
2.1
A Payerne, dès mars 2006 et jusqu'à son arrestation le 4 octobre 2006, le prévenu a réceptionné à son domicile de la cocaïne en provenance des Pays-Bas, laquelle lui était adressée par un certain " [...]".
La drogue était transportée par des "mules", cachée notamment dans des semelles de leurs chaussures, dans des boîtes de chips, ou encore dans la doublure de porte-documents. Les quantités transportées variaient de 1,2 à 2 kg par "mule". Entre juin et fin septembre 2006, dix à quinze mules ont chacune livré une cargaison de cet ordre au prévenu. Ce dernier, après avoir reconditionné ces livraisons en quantités moindres, les remettait à des "grossistes", qui venaient se fournir à son appartement. Ceux-ci étaient actifs surtout dans le Nord vaudois et la Broye-Vully, mais aussi à Montreux, Bienne, Zurich et Saint-Gall. Le prix d'achat de la cocaïne auprès du fournisseur hollandais s'élevait à
40 fr./g. Le prévenu revendait la drogue au prix de 45 fr./g aux ressortissants du Nigeria, de 55 fr./g à ceux de Côte d'Ivoire et de 60 fr./g à ceux de la Guinée. Au total, le prévenu a réceptionné et revendu au moins 23 kg de cocaïne pour un chiffre d'affaires d'au moins 1'150'000 fr., réalisant un bénéfice d'au moins 230'000 francs.
Le prévenu ne vendait en principe pas la cocaïne au détail à des consommateurs. Au cours de l'été 2006, il a toutefois vendu de la cocaïne à E._, pour un total de 5 grammes et un prix de 500 francs.
2.2
Après avoir quitté la Suisse en 2009, où il ne disposait plus d'autorisation administrative de séjour, le prévenu a brièvement séjourné en France, puis en Espagne, où il a dérobé le permis de séjour de son frère. Son passage en douane à son retour en Suisse a été contrôlé le 3 avril 2010 sous le nom de son frère. A Schaffhouse, entre le mois d'avril 2010 et le 16 décembre 2012, le prévenu a séjourné sous le nom de son frère B.C._ et s'est légitimé à l'aide du permis de séjour espagnol de celui-ci.
2.3
De juin 2012 jusqu'à son arrestation, le 16 décembre 2012, le prévenu a logé chez G._, à qui il a remis en tout 10 g de cocaïne au titre de paiement de son loyer.
2.4
Enfin, le 16 décembre 2012, à Schaffhouse, le prévenu a été interpellé en compagnie de Z._ alors qu'il transportait quatre boulettes de cocaïne, d'un poids total de 1,8 g, d'un taux moyen de pureté de 29,5 %, destinées à la vente dans une discothèque. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délais légaux par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel du prévenu et l’appel joint du Ministère public sont recevables.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves (TF 6B_78/2012 du 27 août 2012). L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (al. 3).
3.
L'appelant conteste les faits retenus par le Tribunal criminel, à l'exception de ceux en relation avec la police des étrangers.
3.1
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le Tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe de la présomption d'innocence est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s'agir de doutes importants irréductibles, qui s'imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011,
n. 19 ad art. 398 CPP).
3.2
3.2.1
En l'espèce, l'appelant soutient tout d'abord que l'accusation en lien avec le cas 2.1 reposerait essentiellement sur les déclarations de son ancienne compagne S._ et que ce serait à tort que le Tribunal criminel aurait tenu celles-ci pour crédibles.
Le Tribunal criminel a examiné les indices à disposition de façon détaillée et est parvenu à la conclusion que l'appelant était bien l'auteur des faits qui lui étaient reprochés. Les motifs retenus par le Tribunal criminel sont convaincants et la Cour de céans s'y rallie. En bref, il y a lieu de souligner le fait que les explications fournies par S._, qui sont très précises, ont permis de mettre au jour un important trafic de cocaïne, dans le cadre duquel l'appelant a joué un rôle de "grossiste", qui s'est chargé de réceptionner la marchandise en provenance de l'étranger et de la distribuer pour l'essentiel à d'autres dealers, qui la remettaient eux-mêmes à des dealers "de rue". En se fondant notamment sur des contrôles téléphoniques rétroactifs, la police a procédé à un travail de recoupement minutieux, lequel a dans plusieurs cas permis de confirmer les déclarations de S._ mettant en cause l'appelant (cf. jugement entrepris, pp. 27-28; P. 86 et 129, spéc. P. 129/3). Il a en outre été retrouvé au domicile du couple une bouteille d'ammoniaque, laquelle a pu servir à évaluer la pureté de la drogue, une balance de précision cachée dans une chaussette – dans la cave du domicile –, des parachutes de cocaïne et diverses sommes d'argent en liquide cachées dans des chaussettes, pour un montant total de 16'500 francs. A cela s'ajoute le fait que lorsque l'appelant avait été interpellé une première fois en septembre 2006 dans le cadre d'une autre affaire, on avait trouvé sur lui un montant de 4'500 fr. en liquide. Lors de la deuxième interpellation de l'appelant, le 4 octobre 2006, c'était un montant de 5'000 fr. qui avait été trouvé sur lui. Il y a enfin lieu de relever que l'appelant a une formation de chimiste (cf. jugement entrepris, p. 30; PV aud. 33, réponse 4) et que les personnes en compagnie desquelles il se trouvait lors des arrestations des 4 octobre 2006 et
16 décembre 2012 apparaissent toutes liées au trafic de cocaïne (cf. jugement entrepris, pp. 29 et 32, et les références au dossier citées). Au vu de ce qui précède, contrairement à ce que soutient l'appelant, les déclarations de S._, qui sont précises et corroborées par d'autres éléments d'enquête, sont crédibles et la Cour de céans est convaincue que l'importance du trafic et le rôle joué par l'appelant dans celui-ci correspondent à la description donnée par l'intéressée.
Les éléments mis en avant par l'appelant pour se disculper ont pour l'essentiel déjà été examinés par le Tribunal criminel, qui les a écartés pour des motifs convaincants. L'appelant soutient principalement que S._ l'aurait délibérément chargé faussement, pour différents motifs. Elle aurait ainsi cherché à obtenir la clémence des enquêteurs par des réponses leur convenant, ainsi qu'à se débarrasser de l'appelant, qui n'était pas apprécié par sa belle-famille (déclaration d'appel, p. 5). Ces allégations sont en contradiction manifeste avec la précision des détails fournis, ainsi qu'avec les recoupements qui ont pu être effectués par la suite. Contrairement à ce que soutient l'appelant, les éléments au dossier sur la santé psychique de S._ ne portent pas atteinte à la crédibilité de ses déclarations. Ainsi, s'il est vrai qu'il ressort du rapport d'expertise à laquelle celle-ci a été soumise qu'elle peut avoir des difficultés à s'affirmer et à dire non aux autres (P. 168, p. 18, question 2b), elle est également présentée comme soumise à l'appelant et incapable de lui dire non (même pièce, pp. 13-14). De façon générale, les experts ne font nullement état d'une quelconque tendance de S._ au délire ou à l'affabulation. S'agissant des relations de l'appelant avec sa belle-famille, il est vrai que cette dernière l'avait accusé d'abus sexuels à l'encontre de l'enfant de S._ en septembre 2006, soit quelques semaines avant l'arrestation du 4 octobre 2006. Il apparaît cependant que S._ a vivement défendu l'appelant dans ce cadre, la procédure aboutissant à un non-lieu. L'hypothèse d'un subit changement de stratégie consécutif à la naissance de tensions dans le couple n'est fondée sur aucun indice concret. Aux débats de première instance, l'appelant a en outre soutenu implicitement que ce serait en réalité S._ qui serait l'auteur des faits qui lui sont reprochés, en prétendant notamment qu'appartenaient à celle-ci les téléphones portables correspondant aux raccordements téléphoniques utilisés pour les contrôles rétroactifs; de même, ce serait en réalité à cette dernière qu'appartiendraient les parachutes de cocaïne retrouvés au domicile du couple. Il est vrai que S._ a à nouveau été arrêtée le 26 novembre 2006 à Bâle, alors qu'elle se rendait aux Pays-Bas en compagnie d'un tiers, semble-t-il son amant, en vue de négociations avec un fournisseur de cocaïne (cf. P. 68). Ainsi que l'a déjà retenu le Tribunal criminel (jugement entrepris, p. 25), les explications de l'intéressée (cf. spéc. PV aud. 39, lignes 29 à 59), qui évoque des pressions du fournisseur de l'appelant, qui aurait exigé le remboursement de dettes de ce dernier, ne sont pas dénuées de cohérence. Apparaît de toute manière décisif le fait que les éléments qui ressortent du rapport d'expertise psychiatrique concernant S._ sont incompatibles avec le rôle central, "au sommet de la pyramide", de l'utilisateur des raccordements téléphoniques tel que mis en évidence par l'enquête (cf. P. 129/3). S._ présente en effet un quotient intellectuel à la limite inférieure de la norme et un fonctionnement psychotique de la personnalité marqué par l'immaturité et la dépendance; la dépendance de S._ envers l'appelant a en outre été soulignée (cf. P. 168, spéc. p. 14).
Pour le surplus, on ne peut rien déduire du fait que la quantité de drogue retrouvée au domicile de l'appelant est sans commune mesure avec l'importance du trafic qui lui est reproché (déclaration d'appel, p. 2), ni du fait que le juge d'instruction en charge de l'affaire a décidé de renoncer à maintenir l'appelant en détention préventive en juin 2007 (déclaration d'appel, p. 3). De même, le fait que l'appelant est demeuré en Suisse après sa libération ne saurait constituer un indice en sa faveur, étant rappelé qu'il est parti à l'étranger quelques mois entre 2009 et 2010, et que dès son retour, en avril 2010, il a vécu en Suisse sous une fausse identité. L'appelant fait encore valoir la modestie de son train de vie, qui ne correspondrait pas à celui de la personne qui aurait réalisé le bénéfice qui lui est reproché (déclaration d'appel, p. 3). Force est cependant de constater qu'en réalité, contrairement à ce qu'affirme l'appelant, on ignore tout du train de vie de ce dernier entre sa sortie de détention préventive en 2007 et sa nouvelle arrestation en 2012. Par ailleurs, compte tenu des circonstances, on ne saurait s'étonner que l'appelant ait fait preuve de prudence à la suite de sa sortie de détention. Le fait que le dossier ne comporte qu'un unique témoignage de consommateur (cf. déclaration d'appel, p. 4) est pour sa part cohérent avec la position d'importateur-grossiste qu'a occupée l'appelant dans le trafic. Enfin, l'appelant soutient que rien ne relierait à un trafic de drogue les sommes d'argent retrouvées sur lui, respectivement à son domicile (déclaration d'appel, p. 7). S'agissant de l'argent retrouvé au logement de l'appelant et de S._, celui-ci était dissimulé dans des chaussettes. L'appelant n'a jamais été capable de donner des explications crédibles sur ce point, ni sur le fait que la somme se présentait sous la forme de nombreuses petites coupures, mais a au contraire multiplié les allégations contradictoires (cf. jugement entrepris, pp. 30 à 31 et les références au dossier citées). Le fait que S._ a reconnu que l'argent en question provenait bien du trafic de drogue et ne constituait nullement une aide financière de sa famille apparaît à ce titre déterminant (cf. spéc. PV aud. 41, lignes 7 à 13), étant relevé que dans le cas contraire, elle aurait pu prétendre à récupérer tout ou partie de la somme en question, dont la quotité n'est pas négligeable. Quant à l'argent liquide retrouvé sur l'appelant lors de son arrestation du 4 octobre 2006, contrairement à ce que soutient celui-ci, le fait qu'il a été établi que les quatre personnes arrêtées ce jour-là devaient aller rencontrer un agent immobilier le jour même n'est pas un indice de la licéité de l'origine de la somme en question. En bref, c'est à juste titre que le Tribunal criminel a considéré que l'entier des sommes séquestrées provenait du trafic de cocaïne.
Au vu de ce qui précède, l'implication et le rôle de l'appelant dans le trafic sont établis.
3.2.2
S'agissant de l'importance du trafic lui-même, les 23 kg retenus dans l'acte d'accusation et repris par le Tribunal criminel sont fondés sur les déclarations de S._, qui évoque 10 à 15 livraisons de plus de 2 kg (cf. spéc. PV aud. 29, réponse 1), ainsi que sur un tableau récapitulatif des quantités remises à différents dealers (cf. jugement entrepris, p. 23 et P. 129, p. 3); ce tableau récapitulatif repose pour partie uniquement sur les déclarations de S._ et pour partie sur des déclarations de celle-ci corroborées par d'autres éléments au dossier. Il y a lieu de s'en tenir à ces estimations, qui sont crédibles, dès lors qu'elles sont fondées sur deux méthodes de calcul différentes, étant relevé que le chiffre de 23 kg finalement retenu se trouve au bas de la fourchette de ces estimations.
En ce qui concerne le taux de pureté, le Tribunal criminel a retenu un taux de pureté de 73 % correspondant au taux moyen de pureté de l'année 2006 pour les quantités supérieures à 1'000 g, plutôt que le taux de pureté moyen, toutes quantités confondues, de 47 %. Compte tenu du poids unitaire des livraisons remises à l'appelant, de l'ordre de 2 kg, et du fait que l'appelant remettait à ses acolytes des quantités importantes, de plusieurs centaines de grammes à chaque fois, le choix du Tribunal criminel ne prête pas le flanc à la critique, de sorte que la quantité nette retenue s'élève à 16,79 kg (73 % x 23 kg).
Le calcul du bénéfice n'est pas expressément critiqué par l'appelant. Le raisonnement du Tribunal criminel (cf. jugement entrepris, p. 31), qui a suivi les calculs du Ministère public, apparaît correct et peut être confirmé, dans la mesure où il est fondé sur un prix moyen estimé à 50 fr./g qui correspond aux déclarations, ici encore précises, de S._.
3.2.3
Après avoir constaté que la LStup dans sa teneur actuelle n'était pas plus favorable à l'appelant que la LStup dans sa teneur à l'époque des faits (ci-après aLStup; cf. art. 2 al. 2 CP), le Tribunal criminel a retenu que les faits du cas 2.1 étaient constitutifs d'infraction grave à l'aLStup. Selon l'art. 19 ch. 2 aLStup, le cas est grave notamment lorsque l'auteur agit comme membre d'une bande formée pour se livrer de manière systématique au trafic illicite de stupéfiants (let. b) ou lorsqu'il se livre au trafic par métier et qu'il réalise un chiffre d'affaires ou un gain important (let. c).
L'appelant ne conteste pas la qualification juridique des faits en tant que telle. Compte tenu des faits retenus, celle-ci ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmée.
3.3
L'appelant soutient ensuite que le comportement décrit pour le cas 2.2, dont la matérialité n'est pas contestée, ne serait pas constitutif de faux dans les certificats.
Selon l'art. 252 CP, se rend coupable de faux dans les certificats celui qui, dans le dessein d'améliorer sa situation ou celle d'autrui, aura contrefait ou falsifié des pièces de légitimation, des certificats ou des attestations, aura fait usage, pour tromper autrui, d'un écrit de cette nature, ou aura abusé, pour tromper autrui, d'un écrit de cette nature, véritable mais non à lui destiné. Tel est par exemple le cas de celui qui utilise le passeport d'un tiers afin de passer la frontière (TF 6S.425/2004 du 28 janvier 2005 c. 3).
Pour l'appelant (cf. déclaration d'appel p. 10), la photographie de son frère figurant sur la pièce d'identité qu'il a utilisée ne lui ressemblerait pas du tout, au point qu'une lecture rapide du document permettrait de se rendre compte que celui-ci ne se rapporte pas à lui. La Cour de céans a cependant pu elle-même constater que l'appelant et la photographie de la pièce en cause présentent une certaine ressemblance, ce dont l'appelant ne pouvait qu'être conscient, puisqu'il l'a utilisée pour se légitimer. En outre, comme l'a déjà relevé le Tribunal criminel, deux auditions ont été menées par les autorités schaffhousoises avant qu'elles ne réalisent que la personne entendue ne correspondait pas à la carte d'identité présentée, ce qui a notamment conduit à la perquisition du domicile lucernois du frère de l'appelant. C'est également le nom du frère de l'appelant qui a été enregistré lorsque ce dernier a franchi la frontière suisse en avril 2010. Au vu de ce qui précède, l'appelant a bien abusé, pour tromper autrui, d'une pièce de légitimation véritable qui ne lui était pas destinée, de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé sur ce point également.
3.4
3.4.1
S'agissant du cas 2.3, l'appelant admet aujourd'hui que G._ l'a hébergé et admet avoir remis à plusieurs reprises de la cocaïne à ce dernier, mais soutient n'avoir remis qu'un total de 5 à 6 g, non de 10 g, et que cette remise de drogue serait intervenue à titre amical, non à celui du paiement d'un loyer. Les déclarations de l'appelant ont cependant varié et à un moment donné de la procédure, il a admis devant les autorités schaffhousoises l'exactitude des déclarations de G._, à savoir la remise d'un total de 10 g à titre de paiement de loyer (cf. dossier D, PV d'audition du 10 janvier 2013, pp. 2 et 3 de la traduction). Etant relevé qu'au vu de l'ampleur globale du trafic reproché à l'appelant, le point litigieux ne revêt qu'une importance très relative, il y a lieu de s'en tenir aux aveux faits devant les autorités schaffhousoises pour les motifs retenus par le Tribunal criminel. Interpellé par ce dernier sur les contradictions entre ses déclarations successives, l'appelant n'a en effet pas été en mesure de s'expliquer, en se bornant à se prévaloir d'un problème de compréhension à l'époque de l'audition du 10 janvier 2013. Celui-ci n'est toutefois guère plausible, attendu que l'appelant parle tant l'allemand que l'anglais et qu'un interprète était de surcroît présent lors de cette audition.
Le taux moyen de pureté en 2012 s'élevant à 32 % pour les quantités inférieures à 1 g, la quantité nette en cause correspond à 3,2 g (32 % x 10 g).
3.4.2
L'appelant ne développe aucun moyen en relation avec le cas 2.4, en se bornant à contester toute implication dans un trafic de drogue (cf. ch. 12 de la déclaration d'appel). Sur ce point, la Cour de céans peut se contenter de se rallier à l'appréciation du Tribunal criminel. Ce dernier a en effet soigneusement examiné les indices et est parvenu à la conclusion que contrairement à ce que soutenait le prévenu, les quatre boulettes de cocaïne que ce dernier avait avalées lors de son interpellation n'étaient pas destinées à sa consommation personnelle, mais à la vente à des tiers. Cette appréciation se fonde notamment sur le passé de l'appelant, sur la destination du taxi dans lequel il se trouvait lors de son interpellation, à savoir un bar connu comme un lieu de marché de la drogue, sur le fait que du matériel pour la constitution de boulettes de cocaïne a été retrouvé au domicile de l'appelant, ainsi que sur le fait que le téléphone portable saisi sur lui contenait plusieurs numéros de personnes connues des services de police schaffhousois en qualité de consommateurs de cocaïne.
Les quatre boulettes pesant 1,8 g au total et le taux moyen de pureté de celle-ci ayant été déterminé à 29,5 %, la quantité nette pour ce cas s'élève à 0,531 g.
3.4.3
La qualification juridique retenue par le Tribunal criminel pour les cas 2.3 et 2.4 n'est pas contestée. La Cour de céans peut se borner à constater que les cas sont constitutifs d'infractions au sens de l'art. 19 al. 1 let. b et c LStup, tandis que les conditions d'un cas grave au sens de l'art. 19 al. 2 LStup ne sont pas remplies. Au vu des six ans qui séparent les faits de ces cas de celui du cas 2.1 et en l'absence de tout indice donnant à penser que l'appelant aurait poursuivi son activité criminelle dans l'intervalle, on ne saurait considérer qu'il s'agit d'un cas de délit continu.
4.
L'appelant critique en outre spécifiquement la confiscation et la dévolution à l'Etat des sommes séquestrées, ainsi que la confiscation et la destruction de divers objets séquestrés (déclaration d'appel, p. 11). Il soutient qu'il n'existerait pas de preuves suffisantes que ces montants seraient issus d'une activité délictueuse, respectivement que ces objets auraient été utilisés dans le cadre d'une telle activité.
Ces moyens reposent essentiellement sur la contestation de l'existence même de l'activité délictueuse, grief qui a déjà été écarté (cf. c. 3 supra). Le lien entre les objets et sommes d'argent séquestrés, d'une part, et l'activité délictueuse, d'autre part, a également déjà été examiné et admis dans ce cadre (cf. spéc. c. 3.2.1). La confiscation au sens des art. 69 et 70 CP est dès lors justifiée. S'agissant des sommes d'argent, il y a en outre lieu de relever que les conditions d'une créance compensatrice au sens de l'art. 71 CP apparaissent également réunies.
5.
L'appelant conteste enfin la quotité de la peine de 13 ans prononcée par le Tribunal criminel, laquelle serait extrêmement sévère. Dans son appel joint, le Ministère public conclut pour sa part à une aggravation de la condamnation à 14 ans.
5.1
Les règles générales régissant la fixation de la peine ont été rappelées dans les arrêts publiés aux ATF 136 IV 55 et 134 IV 17 (c. 2.1 et les références citées), auxquels il peut être renvoyé.
En matière de trafic de stupéfiants, il y a lieu de tenir compte plus spécifiquement des éléments suivants. Même si la quantité de drogue ne joue pas un rôle prépondérant, elle constitue sans conteste un élément important. Elle perd cependant de l'importance au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la limite à partir de laquelle le cas doit être considéré comme grave au sens de l'art. 19 al. 2 let. a LStup (cf. ancien art. 19 ch. 2 let. a LStup; ATF 138 IV 100 c. 3.2; TF 6B_632/2014 du 27 octobre 2014 c. 1.2 et les références citées). Le type de drogue et sa pureté doivent aussi être pris en considération. Si l'auteur sait que la drogue est particulièrement pure, sa culpabilité sera plus grande. En revanche, sa culpabilité sera moindre s'il sait que la drogue est diluée plus que normalement (ATF 122 IV 299 c. 2c; ATF 121 IV 193 c. 2b/aa; TF 6B_632/2014 précité c. 1.2). Le type et la nature du trafic en cause sont aussi déterminants. L'appréciation est différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, il importera de déterminer la nature de sa participation et sa position au sein de l'organisation. L'étendue du trafic entrera également en considération. Un trafic purement local sera en règle générale considéré comme moins grave qu'un trafic avec des ramifications internationales. Enfin, le nombre d'opérations constitue un indice pour mesurer l'intensité du comportement délictueux. Celui qui écoule une fois un kilo d'héroïne sera en principe moins sévèrement puni que celui qui vend cent grammes à dix reprises. S'agissant d'apprécier les mobiles qui ont poussé l'auteur à agir, le juge doit distinguer le cas de celui qui est lui-même toxicomane et agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain (TF 6B_632/2014 précité c. 1.2;
TF 6B_107/2013 du 15 mai 2013 c. 2.1.1 et les références citées). Enfin, le comportement du délinquant lors de la procédure peut aussi jouer un rôle. Le juge pourra atténuer la peine en raison de l'aveu ou de la bonne coopération de l'auteur de l'infraction avec les autorités policières ou judiciaires notamment si cette coopération a permis d'élucider des faits qui, à ce défaut, seraient restés obscurs (ATF 121 IV 202 c. 2d/aa; ATF 118 IV 342 c. 2d; TF 6B_567/2012 du 18 décembre 2012 c. 3.2 et les références citées).
5.2
En l'espèce, la culpabilité de l'appelant est extrêmement lourde. A la suite du Tribunal criminel, il y a en effet tout d'abord lieu de souligner la quantité très importante de 23 kg, respectivement 16,79 kg en quantité nette, s'agissant des faits de 2006, et le bénéfice réalisé, qui met en évidence l'appât du gain de l'appelant. Compte tenu du fait que la drogue a été écoulée en l'espèce de quelques mois, l'activité criminelle doit être qualifiée de très intense. Il faut en outre rappeler la position élevée de l'appelant dans la hiérarchie du trafic, celui-ci ayant pour rôle de réceptionner les livraisons de l'étranger puis de fournir des grossistes, ce qui implique des responsabilité d'organisation. Au vu de la quantité de drogue et de la structure du trafic de 2006, l'activité criminelle s'est déployée dans plusieurs cantons et a touché un grand nombre de personnes. En bref, les faits reprochés à l'appelant sont graves au regard de chacun des critères évoqués par la jurisprudence. En outre, comme l'a relevé le Tribunal criminel, il y a lieu de tenir compte du fait que l'appelant n'a pas hésité à impliquer des proches dans ses activités. De façon générale, son attitude et ses actes dénotent une absence totale de scrupules. Dans le cadre de la procédure pénale, l'appelant a fait preuve d'un manque crasse de collaboration; il a non seulement nié toute implication, mais n'a pas hésité à tenter de faussement incriminer son ancienne épouse. Il y a en outre lieu de tenir compte de la récidive dans le même type d'infraction, le concours entre les diverses infractions commises et une absence totale de prise de conscience. Enfin, contrairement à ce que soutient l'appelant, aucun élément ne donne à penser que celui-ci a été plus puni par le Tribunal criminel parce qu'il a récidivé que s'il avait commis un délit continu. A décharge, il y a lieu de tenir compte des bons renseignements obtenus sur le comportement de l'appelant en prison.
Les éléments qui précèdent ont tous été mentionnés par le Tribunal criminel, lequel a toutefois été relativement clément dans l'appréciation globale de ceux-ci, la peine de 14 ans demandée par le Ministère public apparaissant plus adéquate.
5.3
Cela étant, il faut constater que l'instruction pénale a débuté en octobre 2006, soit il y a plus de huit ans, de sorte que la question d'une violation du principe de célérité se pose.
5.3.1
Le principe de célérité (cf. art. 5 CPP) impose aux autorités de mener la procédure pénale sans désemparer, dès le moment où l'accusé est informé des soupçons qui pèsent sur lui, afin de ne pas le maintenir inutilement dans l'angoisse (ATF 133 IV 158 c. 8; TF 6B_473/2011 du 13 octobre 2011 c. 4.2). Il s'agit d'une exigence à l'égard des autorités pénales, qui se distingue de la circonstance atténuante du temps relativement long (cf. art. 48 let. e CP), laquelle est liée à l'approche de la prescription et suppose que l'accusé se soit bien comporté dans l'intervalle. Comme les retards dans la procédure pénale ne peuvent être guéris, le Tribunal fédéral a fait découler de la violation du principe de célérité des conséquences sur le plan de la peine. Le plus souvent, la violation de ce principe conduira à une réduction de la peine, parfois même à la renonciation à toute peine ou encore, en tant qu'ultima ratio dans des cas extrêmes, à une ordonnance de non-lieu (ATF 133 IV 158 c. 8; ATF 130 IV 54 c. 3.3.1 et les références citées).
La notion de délai raisonnable ne peut être définie de manière abstraite. Elle doit être appréciée in concreto, suivant les circonstances de l'affaire en question (cf. TF 6P.14/2007 du 19 avril 2007 c. 6.3). Il convient en premier lieu de tenir compte des particularités de la cause, notamment de la nature et de la gravité de l'infraction poursuivie. L'élément déterminant, pour cette appréciation, est sans doute la complexité de l'affaire. Celle-ci peut découler de la nature de l'infraction, mais aussi du nombre d'accusés, des mesures probatoires nécessaires – en particulier des témoins à entendre et des investigations à l'étranger –, du volume du dossier, des questions de faits et de droit qui peuvent se poser et, en définitive, des incidences concrètes de la procédure sur la situation de l'accusé. Le comportement de ce dernier revêt également de l'importance : l'accusé ne peut certes pas être tenu à une collaboration active, et on ne saurait lui reprocher de tirer pleinement parti des voies de recours qui lui sont offertes par le droit interne, mais on pourra tenir compte des démarches purement dilatoires qu'il aura pu entreprendre. Comme on ne peut pas exiger de l'autorité pénale qu'elle s'occupe constamment d'une seule et unique affaire, il est inévitable qu'une procédure comporte quelques temps morts. Lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut; des périodes d'activités intenses peuvent donc compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires (ATF 124 I 139 c. 2c). Selon la jurisprudence européenne, apparaissent comme des carences choquantes une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction, un délai de quatre ans pour qu'il soit statué sur un recours contre l'acte d'accusation, un délai de dix ou onze mois pour que le dossier soit transmis à l'autorité de recours (ATF 124 I 139 c. 2c; ATF 119 IV 107c. 1c). Le principe de la célérité peut être violé, même si les autorités pénales n'ont commis aucune faute; elles ne sauraient ainsi exciper des insuffisances de l'organisation judiciaire
(ATF 130 IV 54 c. 3.3.3). Le point de départ, pour le calcul de la durée globale de la procédure, est le moment où la personne se trouve formellement informée de l'accusation qui pèse contre elle.
5.3.2
En l'espèce, entre la fin de l'année 2007 et le début de l'année 2009, très peu d'opérations d'instruction ont été entreprises. Par arrêt du 20 mars 2009, statuant sur une réclamation de S._, alors co-prévenue dans la cause, le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal, sans formellement trancher la question de savoir s'il l'on se trouvait en présence d'une violation du principe de célérité, a invité le juge d'instruction a rendre plusieurs décisions dans les meilleurs délais. Un temps mort similaire doit être constaté entre la fin de l'année 2009 et le début de l'année 2014, sous réserve de diverses opérations de disjonction de causes auxquelles il a été procédé en 2013. L'examen du dossier n'explique pas les raisons concrètes de ces temps morts. Il y a dès lors lieu de constater l'existence d'une violation du principe de célérité. S'agissant du comportement de l'appelant, il est vrai que celui-ci s'est montré peu collaborant, comme on l'a vu (cf. c. 5.2 supra); il n'a cependant jamais entrepris de démarches à caractère purement dilatoire. Il y a enfin lieu de tenir compte du fait que pendant les périodes d'inactivité, l'appelant n'était plus en détention préventive. Dans ces circonstances, une réduction de la peine de
2 ans se justifie, ce qui porte la peine prononcée de 14 à 12 ans.
6.
En définitive, l'appel de G.C._ doit être partiellement admis, tandis que l'appel joint du Ministère public doit être rejeté. Le chiffre II du dispositif du jugement entrepris doit être modifié en ce sens que la peine à laquelle l'appelant est condamné est ramenée à 12 ans (cf. c. 5.3.2 supra).
Le défenseur d'office de l'appelant a déposé une liste d'opérations faisant état de vingt-deux heures et trente minutes de travail uniquement pour la procédure d'appel, ainsi que de débours par 1'259 fr. 80, TVA non comprise. Au vu des caractéristiques de la cause et de la connaissance du dossier acquise en première instance, le nombre d'heures allégué, qui comprend notamment cinq conférences avec l'appelant, est excessif. Les débours réclamés comprennent en outre la rémunération au tarif horaire ordinaire de diverses vacations, ainsi que les débours y relatifs, sans prise en compte de la jurisprudence cantonale (cf. CAPE
7 avril 2014/80 c. 7; Juge unique CREP 10 mai 2012/289 c. 3c), qui prévoit, pour l'avocat breveté, une indemnité forfaitaire de 120 fr. par vacation, débours compris. Au vu de ce qui précède, il sera tenu compte de quinze heures de travail d'avocat
(15 x 180 fr. = 2'700 fr.), de trois vacations (3 x 120 fr. = 360 fr.) et de débours arrêtés au montant forfaitaire de 50 fr., qui correspond approximativement aux débours allégués après imputation des vacations. L'indemnité de défenseur d'office allouée pour la procédure d'appel sera par conséquent fixée à 3'110 fr., plus la TVA, par 248 fr. 80, soit 3'358 fr. 80.
Au vu du sort de la procédure, les frais d'appels, par 6'068 fr. 80, constitués de l'émolument de jugement (art. 422 al. 1 CPP), par 2'710 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1), et de l'indemnité allouée au défenseur d'office (art. 422 al. 1 et 2 let. a CPP), par 3'358 fr. 80, seront mis par deux tiers, soit 4'045 fr. 80, à la charge de l'appelant, qui succombe sur l'essentiel de ses conclusions (art. 428 al. 1 CPP), le solde étant laissé à la charge de l'Etat.
L'appelant ne sera tenu de rembourser à l’Etat la part mise à sa charge de l’indemnité en faveur de son défenseur d’office que lorsque sa situation financière le permettra. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c94762ae-0e09-4d36-b2f5-a7de96c0b00d | En fait :
A.
Par jugement du 23 mai 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Côte a libéré S._ du chef d'accusation d’utilisation frauduleuse d'un ordinateur par métier (I), a constaté qu’il s'est rendu coupable de vol en bande et par métier, d’utilisation frauduleuse d'un ordinateur et d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers (II), a condamné le prénommé à une peine privative de liberté de vingt-quatre mois, sous déduction de 186 jours de détention provisoire et 74 jours d'exécution anticipée de peine (III), a ordonné en tant que de besoin le maintien de la détention de S._ pour des motifs de sûreté (IV), a dit que S._ est le débiteur de K._ de la somme de 857 fr., valeur échue, à titre de dommages-intérêts (V), d’A._ de la somme de 500 fr., valeur échue, à titre de dommages-intérêts (VI) et de L._ de la somme de 3'989 fr. avec intérêts à 5% l’an dès le 11 juillet 2012, acte étant donné à cette dernière de ses réserves civiles contre S._ pour le surplus (VII), a donné acte à J._ de ses réserves civiles contre S._ (VIII), a arrêté
les honoraires dus à Me
Marianne Fabarez-Vogt
, avocate d'office, à
7'268 fr. 40, débours et TVA inclus (IX), a mis les frais de procédure, arrêtés à 16'101 fr. 90, comprenant l'indemnité de défenseur d'office de Me Marianne Fabarez-Vogt prévue sous chiffre IX, à la charge de S._ (X) et a dit que ce dernier ne sera tenu de rembourser à l'Etat l'indemnité allouée à son défenseur d'office, conformément au ch. IX ci-dessus, que pour autant que sa situation financière le permette (XI).
B.
Le 27 mai 2013, S._ a formé appel contre ce jugement.
Par déclaration d’appel motivée du 19 juin 2013, il a conclu à sa réforme en ce sens qu’il est condamné à une peine privative de liberté de dix-huit mois, sous déduction de 186 jours de détention provisoire et des jours d’exécution anticipée de peine effectués, les frais étant laissés à la charge de l’Etat. Il a requis la production par le CHUV d’un certificat médical actuel le concernant.
Par courrier du 9 juillet 2013, le Ministère public a annoncé qu'il s'en remettait à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel et a déposé ses déterminations, concluant au rejet de l’appel et à la confirmation du jugement attaqué.
Sur demande du Président, qui a donné suite à la requête de S._, le CHUV a produit, par courrier et fax du 6 septembre 2013, un rapport médical actualisé concernant l’appelant.
A l’audience du 25 septembre 2013, S._ a confirmé les conclusions de sa déclaration d’appel. Le Ministère public a, quant à lui, conclu au rejet de l’appel et à la confirmation de la peine privative de liberté de vingt-quatre mois prononcée par les premiers juges.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né le 30 avril 1969 à Casablanca, au Maroc, pays dont il est ressortissant, S._ affirme n’avoir pas suivi l’école et avoir rapidement émigré en France, avant de venir en Suisse, il y a plus de seize ans, où il aurait travaillé au noir comme peintre en bâtiment ou comme déménageur, gagnant entre 1'500 et 1'800 fr. par mois. Célibataire et sans enfant, il vivrait actuellement à Genève avec une amie. Il dit ne percevoir aucun revenu et être aidé par des amis. Il est atteint d’un diabète de type II nécessitant des soins et des examens réguliers et est également suivi médicalement pour des problèmes d’hypertension artérielle et d’hypercolestérolémie.
A son casier judiciaire figurent six inscriptions :
- 04 octobre 2004, Juges d’instruction de Genève, vol, infraction LSEE, emprisonnement 30 jours, sursis à l’exécution de la peine, délai d’épreuve 5 ans, détention préventive 14 jours, sursis révoqué le 26 septembre 2007;
- 24 janvier 2005, Juges d’instruction de Genève, vol, emprisonnement 20 jours, détention préventive 7 jours;
- 14 octobre 2005, Juge d’instruction de La Côte, rupture de ban, emprisonnement 1 mois, peine partiellement complémentaire au jugement du 24 janvier 2005 des Juges d’instruction de Genève;
- 24 février 2007, Staatsanwaltschaft Zürich-Limmat, infraction LSEE, peine privative de liberté 90 jours, détention préventive 2 jours, peine partiellement complémentaire aux jugements des 4 octobre 2004 et 24 janvier 2005 des Juges d’instruction de Genève et 14 octobre 2005 du Juge d’instruction de La Côte;
- 26 septembre 2007, Juges d’instruction de Genève, vol, peine privative de liberté 2 mois, détention préventive 6 jours;
- 20 février 2009, Juge d’instruction de Lausanne, vol, escroquerie (complicité), peine privative de liberté 60 jours, peine complémentaire aux jugements des 24 février 2007 du Staatsanwaltschaft Zürich-Limmat et 26 septembre 2007 des Juges d’instruction de Genève.
Dans le cadre de la présente affaire, S._ est détenu avant jugement depuis le 6 septembre 2012, date de son interpellation.
2.
Entre le 20 avril et le 6 septembre 2012, S._ a commis treize vols et une tentative de vol. Il a toujours agi en compagnie d’une autre personne, à savoir X._ pour les cas décrits ci-après sous chiffres 2.1 à 2.9, un dénommé E._ (cf. ch. 2.10 ci-après), G._ (cf. ch. 2.12 à 2.14) et une femme, dont l’identité n’a pas pu être établie (cf. ch. 2.11).
2.1
Ainsi, le 20 avril 2012, vers 17h30, à Vich, au centre commercial [...],S._ s’est approché de [...], qui portait son enfant de quatre mois dans son porte-bébé, et lui a demandé s’il pouvait l’aider à ranger ses courses, ce qu’elle a accepté. Le prévenu en a profité pour s’emparer du sac à main de la jeune femme, qui contenait notamment des cartes bancaires, un appareil photo et 50 francs. Au moyen de la carte VISA dérobée, il a ensuite procédé à des achats à la station-service [...] à Vich et dans une boutique à Nyon et a prélevé 1'000 fr. à un bancomat à Gland.
2.2
Le 19 mai 2012, vers 11h30, à Aubonne, sur le parking d’ [...], [...], qui avait mis son sac à main derrière le siège conducteur, est allée remettre son caddie en place. Sa mère, qui était assise sur le siège passager avant, est sortie du véhicule pour aller chercher quelque chose dans le coffre. Au moment où celle-ci s’apprêtait à retourner s’asseoir dans la voiture, le prévenu ou son comparse a couru vers elle, en lui demandant si c’était la direction du supermarché, tandis que l’autre en a profité pour dérober le sac à main, qui contenait notamment 350 fr. et différentes cartes bancaires.
2.3
Le 14 juin 2012, vers 11h30, à Vich, sur le parking du centre commercial [...], le prévenu s’est emparé du sac à main de J._ contenant de l’argent et des documents bancaires, pendant que celle-ci chargeait ses courses dans la voiture.
2.4
Le 10 juillet 2012, vers 11h15, au même endroit, le prévenu a bousculé [...] pendant que celle-ci rangeait ses achats et s’est emparé du sac à main suspendu au chariot et contenant 700 fr., différents documents et des cartes bancaires. Quelques minutes plus tard, il a utilisé l’une des cartes dérobées pour tenter de prélever de l’argent au Postomat du centre commercial de [...], à [...].
2.5
Le 11 juillet 2012, entre 13h00 et 13h15, à Chavannes-de-Bogis, sur le parking du centre commercial [...], le prévenu a profité du fait que L._ chargeait ses commissions dans le coffre de sa voiture pour s’emparer de son sac à main déposé sur le siège avant droit du véhicule et contenant 5'000 fr., des cartes bancaires ainsi que divers effets et documents. Le prévenu a ensuite tenté, à tout le moins une fois, de retirer de l’argent au moyen d’une des cartes bancaires dérobées.
2.6
Le 14 juillet 2012, entre 11h00 et 11h30, à Aubonne, sur le parking d’ [...], pendant que K._ était occupée à charger ses courses, le prévenu a subtilisé son sac à main déposé à terre ou sur la banquette de la voiture et qui contenait différents effets, des documents, de l’argent, soit 290 fr. et 60 euros, ainsi qu’un chéquier.
2.7
Le 19 juillet 2012, vers 10h45, à Vich, sur le parking du centre commercial [...], profitant de l’absence de [...], qui était allée remettre son caddie en place, S._ a volé le sac à main que la prénommée avait déposé dans sa voiture et qui contenait une Postcard, divers objets, 50 fr. et des chèques Reka pour environ 100 francs. Le prévenu a ensuite utilisé la Postcard dérobée pour procéder à des retraits à l’ [...] de Vermont/GE pour un total de 1'000 fr. et a encore tenté de prélever de l’argent à la station-service [...] de Meyrin.
2.8
Le 20 juillet 2012, vers 12h30, à Aubonne, sur le parking d’ [...],S._ s ‘est emparé du sac à main de [...] qui contenait différents effets, documents et cartes bancaires, pendant que celle-ci rangeait son caddie.
2.9
Le même jour, à Vich, sur le parking du centre commercial [...], le prévenu a dérobé le sac à main de [...] qui contenait 200 euros ainsi que divers documents et effets personnels.
2.10
Le 10 août 2012, entre 13h00 et 13h10, à Chavannes-de-Bogis, sur le parking du centre commercial [...],S._ a subtilisé le sac à main d’A._ qui contenait notamment 600 fr. et 100 euros, ainsi que différents objets, documents et cartes bancaires. Il a ensuite tenté à deux reprises de procéder à des prélèvements au moyen d’une des cartes de crédit volées.
2.11
Le 15 août 2012, dans la même localité, après être resté quelques minutes à l’intérieur du centre commercial [...], le prévenu a suivi [...] jusqu'à sa voiture et a profité de l’absence de cette dernière, qui était allée ranger son caddie, pour pénétrer dans l’habitacle du véhicule, dans lequel était assis un enfant, âgé de quatre ans, afin de se saisir du sac à main de la jeune femme. Au moment où elle regagnait sa voiture, [...] a remarqué que le prévenu tentait de subtiliser son sac, l’a rattrapé et a pu récupérer son bien, avant que l’intéressé ne prenne la fuite sans rien emporter.
2.12
Le 4 septembre 2012, vers 10h35, toujours à Chavannes-de-Bogis, sur le parking du centre commercial [...],S._ a volé le sac à main de [...] contenant divers effets personnels, des cartes bancaires et 100 fr., pendant que celle-ci remettait son caddie à sa place.
2.13
Le 6 septembre 2012, vers 11h45, à Vich, sur le parking du centre commercial [...], le prévenu s’est emparé du réticule de [...] que ce dernier avait déposé dans le vide poche de la porte avant gauche de son véhicule et qui contenait notamment des cartes bancaires et 550 francs.
2.14
Le même jour, vers 14h00, à Chavannes-de-Bogis, sur le parking du centre commercial [...], le prévenu a dérobé le sac à main d’ [...], avant d’être interpellé par la police peu après.
2.15
S._ a séjourné dans notre pays sans titre de séjour valable pendant de nombreuses années, jusqu’à son arrestation dans le cadre de la présente affaire, travaillant occasionnellement au noir.
3.
Chacun des lésés a déposé plainte en temps utile et l'a maintenue, à l'exception de [...] et d’ [...], qui l’ont retirée. A l'audience de première instance, S._ s'est reconnu débiteur de K._ de 857 fr. et d’A._ de 500 francs. Le tribunal a en outre donné acte à J._ de ses réserves civiles. Il a encore alloué à L._ la somme de 3'989 fr. à la charge de S._, lui donnant acte de ses réserves civiles contre le prévenu pour le surplus. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit. La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP).
En l’occurrence, interjeté dans les formes et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
S._ invoque l’abus du pouvoir d’appréciation dans la fixation de la peine, dont il estime qu’elle ne reflète pas sa réelle culpabilité et qu’elle est exagérément sévère. Il conclut au prononcé d’une peine privative de liberté de dix-huit mois.
Au contraire de sa position en première instance, l’appelant ne conteste ni les faits, ni les qualifications juridiques (p. 3
in initio
), de sorte que le jugement attaqué, d’ailleurs très détaillé dans son analyse factuelle et juridique des multiples cas reprochés au prévenu (jugt, p. 12 à 38), doit être entièrement confirmé sur ces questions.
3.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1; ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
3.2
Dans leur appréciation de la culpabilité du prévenu (jugt, p. 39), les premiers juges ont considéré que les actes commis par S._ étaient graves en raison de leur répétition et du butin obtenu. A charge, ils ont tenu compte des antécédents, de la lâcheté démontrée par le prévenu, dans la mesure où il s’en était pris à des proies faciles et vulnérables et avait usé de la ruse, du caractère organisé de l’activité délictueuse, de l’absence de scrupules, de l’attitude de l’intéressé durant l’instruction et du fait que celui-ci n’avait opéré aucune remise en cause.
A décharge, les premiers juges ont dit ne voir guère d’éléments à prendre en considération. Ils ont néanmoins retenu un parcours de vie difficile et une santé diminuée.
3.3
S._ considère tout d’abord que le tribunal a retenu à tort qu’il s’était rendu coupable de vols par ruse ou par astuce. Il fait valoir sur ce point qu’il a uniquement dérobé des sacs laissés momentanément sans surveillance et qu’il a seulement profité de la distraction de ses victimes.
L’appelant ne saurait être suivi, au contraire des premiers juges. Dans un cas au moins, il a proposé à une jeune femme de l’aider à ranger ses courses, avant de lui subtiliser son sac à main (cas n° 1 de l’acte d’accusation; c. 2.1 p. 11
supra
). Lors du vol suivant, référencé sous cas n° 2 de l’acte d’accusation (c. 2.2 p. 12
supra
), S._ ou son comparse a détourné l’attention de la victime pendant que l’autre en a profité pour s’emparer du sac. A une autre occasion, le prévenu n’a pas hésité à bousculer une dame âgée pour voler son sac suspendu au chariot des commissions (cas n° 4; c. 2.4 p. 12
supra
). Il résulte de ces faits, non contestés finalement, que si ce n’est dans tous les cas, du moins dans certains d’entre eux, l’appelant a fait preuve d’une certaine ruse. On relèvera à cet égard que l’appelant est allé jusqu’à dire, à l’audience d’appel, que les sacs qu’il avait volés étaient "abandonnés", ce qui est absurde.
On ne saurait non plus reprocher au tribunal d’avoir retenu que S._ choisissait des "proies faciles" (jugt, p. 38
in fine
; appel, p. 3, par. 3). En effet, il ressort du dossier que l’intéressé s’en est pris notamment à des dames âgées (cas n° 3, 4 et 7) ou des jeunes femmes accompagnées de leur enfant avec lequel il a d’ailleurs été en contact physique (cas n° 1 et 11; c. 2.1 et 2.11 pp. 11 et 13
supra
). On notera à ce sujet que l’intéressé a même prétendu que le fait que l’on puisse s’en prendre à des personnes âgées lui faisait "mal au coeur" (PV aud. 2, R. 16) et qu’il n’avait "pas le courage de voler une femme avec un bébé" puisqu’il trouvait que cela n’était "pas bien" (PV aud. 11, R. 8).
S._ fait valoir, comme élément à décharge, le fait qu’il ne s’est pas attaqué à des personnes physiques, ce qu’il a également soutenu aux débats d’appel en précisant n’avoir jamais arraché les sacs à main, ni avoir fait preuve de violence. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un élément à décharge, dans la mesure où le prévenu n’a pas été renvoyé pour brigandage. Le fait qu’il soit parvenu, dans la plupart des cas, à dérober ses victimes sans entrer en contact avec elles ou même sans être aperçu (cf. cas n° 3, 5, 6, 7, 8, 9 et 13; cf. ég. les déclarations des lésés ad P. 21, pp. 23, 25 à 28 et 32) dénote plutôt un certain professionnalisme.
C’est également à tort que l’appelant nie avoir "choisi" ses victimes, prétendant avoir uniquement saisi l’occasion de voler des sacs laissés dans les véhicules non verrouillés (jugt, p. 4
in fine
). Il suffit de se référer à cet égard aux faits décrits sous chiffre 2.11 ci-dessus (p. 13), d’où il résulte que le prévenu a repéré sa victime, qui se trouvait à l’intérieur du centre commercial, et l’a suivie jusqu’à sa voiture. Il a d’ailleurs lui-même admis, en cours d’instruction, qu’il lui arrivait de "suivre les dames" (PV aud. 2, R. 13).
L’appelant soutient ensuite qu’on ne doit pas, sur le plan subjectif, considérer le fait qu’il n’ait pas admis certains cas comme étant la démonstration qu’il ne se remet pas en cause. En réalité, c’est de l’attitude générale de l’intéressé qu’on peut conclure à cette absence de remise en cause et de prise de conscience de l’ampleur de ses actes. En effet, le prévenu, qui persiste à se décrire comme purement "opportuniste" (appel, p. 3, par. 4; jugt, p. 4; PV aud. 2, R. 13; PV aud. 11, R. 12), n’a cessé de donner des explications invraisemblables, prétextant que d’autres individus agissait à l’identique sur les mêmes lieux et aux mêmes dates (PV aud. 11, R. 25; PV aud. 13, lignes 42, 54, 74, 75 et 79) et que s’il s’était rendu de son domicile, à Genève, aux centres commerciaux de Vich (cas n° 3) et de Chavannes-de-Bogis (cas n° 12), c’était dans le seul but de se promener (PV aud. 2, R. 9; jugt, p. 5). L’intéressé a par ailleurs multiplié les dénégations contre toute évidence, ce qui démontre ce caractère de délinquant endurci qu’ont relevé les premiers juges. Même lorsqu’il a été surpris en flagrant délit et interpellé par la police (cas n° 14), il a minimisé les faits, qualifiant le vol en cause de "hasard" (PV aud. 2, R. 4, p. 3, par. 3). L’absence de prise de conscience chez S._ est d’autant plus évidente qu’il est allé jusqu’à déclarer, s’agissant du cas n° 3 (c. 2.3 p. 12
supra
), que s’il n’avait pas commis de vol dans le centre [...] de Vich (ce qui est faux; cf. c. 2.1, 2.3, 2.7 et 2.13
supra
), c’est parce qu’il n’avait pas eu de "chance" (PV aud. 11, R. 12).
S._ tente d’expliquer ses dénégations par le fait que "si ce n’est pas lui qui dérobait le sac à main ou le porte-monnaie, pour lui, c’était un autre qui commettait le vol et pas lui" (appel, p. 3, par. 5). On ne saurait suivre ce raisonnement. Le prénommé a admis qu’il avait toujours été accompagné lors des vols et que ses comparses et lui avaient à chaque fois partagé le butin (PV aud. 11, R. 34). En outre, en précisant, d’une part, qu’une seule personne commettait le vol "au sens propre" tandis qu’une autre effectuait ensuite le retrait d’argent au moyen des cartes dérobées et, d’autre part, qu’il n’avait personnellement jamais effectué les retraits en question par peur des caméras de surveillance (
ibidem
), le prévenu a implicitement admis avoir commis de sa propre main les vols qui lui sont reprochés, ce qui est renforcé par le fait qu’il a poursuivi son activité malgré l’arrestation de son comparse X._. D’ailleurs, le fait que le prévenu, qui n’a pas de permis de conduire (PV aud. 2, R. 4), ait été conduit sur les lieux par ses comparses, depuis Genève, et que le dénommé E._ se soit adressé à lui pour savoir où voler (PV aud. 11, R. 27) en dit long sur le rôle de l’appelant, sur sa réputation dans le milieu de la délinquance et sur l’intensité de sa volonté délictueuse. Enfin, en retenant que S._ avait toujours été accompagné d’une autre personne, qui avait surtout servi de chauffeur, le tribunal n’a rien fait d’autre que d’attribuer un rôle à chacun de ces coauteurs, ce qui n’est pas critiquable, contrairement à ce que fait valoir l’intéressé.
L’appelant a également tort lorsqu’il affirme que les premiers juges n’ont pris en considération aucun élément à décharge, puisque le jugement attaqué retient un parcours de vie difficile et une santé diminuée (jugt, p. 39
in fine
). Sur ce point, le prévenu reproche au tribunal de n’avoir pas suffisamment pris en compte son mauvais état de santé lors de la fixation de la peine. A l’audience d’appel, il a expliqué que sa santé ne cessait de se détériorer et que le fait d’avoir des ennuis judiciaires n’améliorait pas la situation (p. 3
supra
). Ce moyen est toutefois mal fondé. Tout d’abord, le tribunal n’a pas méconnu la mauvaise situation de santé de l’appelant, contrairement à ce que soutient celui-ci. En effet, en se référant à un rapport médical du CHUV du 24 avril 2013 (pièce 88), le jugement attaqué mentionne (p. 11), au chapitre initial de la situation personnelle de S._, que celui-ci est "gravement atteint dans sa santé", souffrant d’importants problèmes somatiques en lien avec un diabète instable nécessitant des soins et des examens réguliers. L’on ne saurait reprocher aux premiers juges de ne pas avoir expressément repris tous ces éléments au stade de la peine. Comme le jugement forme un tout, l’on doit admettre qu’au moment de fixer la peine, le juge garde à l’esprit les éléments qui y figurent, de sorte qu’il n’est pas tenu de les mentionner à nouveau, à moins qu’il s’agisse d’éléments décisifs (TF 6B_281/2013 du 16 juillet 2013 c. 3.2.2). Le fait d’avoir retenu, parmi les éléments à décharge, que le prévenu avait "une santé diminuée" n’est pas non plus critiquable, puisque le rapport médical susmentionné (pièce 88) fait état d’une amélioration au niveau somatique. Quoi qu’il en soit, les troubles dont souffre le prévenu, soit un diabète de type II, une hypertension artérielle et une hypercolestérolémie (pièce 105 [rapport actualisé du 6 septembre 2013]), ne sont pas de nature à accroître sa sensibilité à la peine de manière telle qu'ils justifieraient une atténuation de celle-ci (sur les conditions permettant une telle atténuation, cf. arrêts 6B_626/2009 du 3 novembre 2009 c. 2.2 et 6S.120/2003 du 17 juin 2003 c. 2.2). Si elles compliquent la vie de l’appelant, ces pathologies ne lui occasionnent toutefois pas de problèmes difficilement gérables en milieu carcéral. Ces troubles, qui sont chroniques et qui existaient déjà avant l’activité délictueuse, ne l’ont d’ailleurs pas empêché de commettre les faits qui lui sont reprochés. Enfin, les douleurs thoraciques dont s’est plaint S._ en détention et qui ont nécessité son transfert d’urgence au CHUV n’ont pas le degré de gravité que le prénommé leur prête (appel, p. 4
in initio
), puisqu’elles ont pu être traitées par antalgie simple (Dafalgan, Irfen), comme cela ressort des pièces (94 et 107) produites par l’appelant lui-même.
En définitive, procédant à sa propre appréciation, la Cour d’appel pénale retient, parmi les éléments à charge, le nombre de vols commis en seulement quatre mois et demi, soit quatorze – dont un seul est resté au stade de la tentative –, le concours d’infractions, la détermination et l’efficacité dont a fait preuve S._ dans ses agissements, le fait que seule son arrestation a mis fin à ses activités, son mobile, soit l’appât du gain, ses mauvais antécédents,
sa mentalité déplorable et endurcie, manifestée par ses dénégations malgré des évidences, son défaut de collaboration et
son comportement en détention, l’intéressé ayant fait l’objet de deux mises en garde (pièce 91). Parmi les éléments à décharge, on retiendra, avec les premiers juges, le parcours de vie difficile et le mauvais état de santé du prénommé, dans la mesure décrite ci-dessus. Même si le prévenu a finalement reconnu l’intégralité des faits et s’est excusé à l’audience d’appel (p. 3
supra
), la cour de céans considère qu'il s'agit là de regrets de circonstance. En effet, l’appelant, qui a invoqué des pertes de mémoire (PV aud. 2, R. 4, 6 et 7), a persisté à minimiser la gravité de ses agissements et s’est retranché derrière l'excuse facile de ses problèmes financiers (PV aud. 2, R. 16). Tout cela n'est pas compatible avec une réelle prise de conscience, sans parler du fait que S._ s'est apitoyé sur son propre sort et sur les vicissitudes de son existence.
Compte tenu de tous ces éléments, la cour de céans est d’avis que la peine privative de liberté de vingt-quatre mois prononcée par les premiers juges se justifie.
Mal fondé, le moyen tiré d'une violation de l'art. 47 CP doit donc être rejeté.
Le caractère ferme de la peine – non contesté – n’est pas non plus critiquable, dans la mesure où les précédentes peines privatives de liberté fermes n’ont eu aucun effet dissuasif sur le prévenu, pas plus que la détention qu’il a subie par le passé pour vol notamment (PV aud. 2, R. 3).
4.
Il convient encore de relever que la détention subie depuis le jugement de première instance est déduite. Le maintien en détention de S._ à titre de sûreté sera ordonné au regard du risque de fuite avéré compte tenu de la situation personnelle de l'appelant et de la longueur de la peine prononcée.
5.
En conclusion, l'appel doit être rejeté et le jugement attaqué intégralement confirmé
.
5.1
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel,
comprenant l'indemnité allouée à son défenseur d'office, arrêtée à
2’364 fr. 40, TVA et débours compris
, selon liste des opérations produite à cet effet par son conseil (pièce 108),
seront mis à la charge du prévenu.
5.2
S._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat l'indemnité allouée à son défenseur d'office que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c9637609-6280-45e0-8d64-84da1ef670ee | En fait :
A.
Par jugement du 24 septembre 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de l’Est vaudois a admis partiellement l’appel formé par F._ à l’encontre de l’ordonnance pénale rendue le 25 juin 2013 (I), a constaté que F._ a contrevenu aux art. 27 al. 1 LCR et 79 al. 1
ter
OSR (II), l’a condamné à une amende de 40 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif étant d’un jour (III et IV), et a mis une partie des frais de la cause à la charge du condamné (V).
Par jugement du 29 novembre 2013, le Président de la Cour d’appel pénale a rejeté l’appel formé par F._, a confirmé le jugement entrepris et a mis les frais d’appel à la charge de ce dernier.
Par arrêt du 13 novembre 2014 (TF 6B_238/2014), la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis le recours formé par F._, a annulé le jugement attaqué et a renvoyé la cause à l’autorité cantonale pour nouveau jugement.
Invitées à déposer d’éventuelles observations complémentaires, les parties ont renoncé à se déterminer.
B.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Ressortissant suisse, F._ est né le [...] 1941 à [...] en Allemagne. Il est marié et vit à [...].
Son casier judiciaire ainsi que l’extrait du fichier ADMAS sont vierges.
2.
Le 2 avril 2013, vers 14h25, devant la gare CFF de Vevey, F._ a garé son véhicule de marque [...] immatriculé VD [...] hors de toute case de stationnement, sur un emplacement dépourvu de marquage et de signalisation. | En droit :
1.
Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision. Il peut également renvoyer l'affaire à l'autorité qui a statué en première instance (art. 107 al. 2 LTF [Loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral; RS 173.110]). L'autorité à laquelle l'affaire est renvoyée doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit contenus dans l'arrêt de renvoi. Elle ne peut en aucun cas s'écarter de l'argumentation juridique du Tribunal fédéral, aussi bien en ce qui concerne les points sur lesquels il a approuvé la motivation précédente que ceux sur lesquels il l'a désapprouvée. Il n'est pas possible de remettre en cause ce qui a été admis – même implicitement – par le Tribunal fédéral (Corboz, in: Commentaire de la LTF, Berne 2009, ch. 27 ad art. 107 LTF).
2.
Le Tribunal fédéral, examinant l’interdiction de stationner éventuellement opposable à l’appelant, relève que le jugement cantonal ne constate pas l’existence d’une obligation de parquer dans des cases, se trouvant à moins de cinq ou six véhicules de l’endroit où a eu lieu le stationnement incriminé, dont on pourrait déduire une interdiction de parquer à cet emplacement conformément à la jurisprudence.
2.1
L’art. 79 OSR (Ordonnance sur la signalisation routière du
5 septembre 1979, RS 741.21) règle les marques régissant l’arrêt ou le stationnement des véhicules. L’art. 79 al. 1
ter
OSR prévoit que là où sont délimitées des cases de stationnement les véhicules doivent stationner uniquement dans les limites de ces cases. De cette obligation de stationner dans les cases, la jurisprudence a déduit une interdiction de stationner hors des cases (ATF 101 IV 87, ATF 98 IV 227 c. 4, ATF 84 IV 26). Après avoir posé le principe de l’interdiction de stationner hors des cases (ATF 84 IV 26), elle a précisé la portée de cette interdiction. Ainsi, il a été jugé que l’interdiction s’appliquait également au trottoir adjacent à la chaussée (ATF 98 IV 227 c. 4) et qu’elle s’étendait, dans une rue droite qui n’est pas interrompue par des intersections, sur une distance correspondant à la longueur de 5 à 6 voitures au-delà de la limite des cases marquées (ATF 101 IV 87). De, la même manière, sur une route étroite, où le stationnement de véhicules des deux côtés de la chaussée gênerait la circulation, le marquage de cases de stationnement d’un côté de la chaussée a pour conséquence d’interdire le parcage de l’autre côté de celle-ci (ATF 118 IV 394 c. 2).
2.2
En l’espèce, on distingue sur la photographie n° 9 (annexe à la P. 8) que, sur la place de la gare CFF de Vevey, des places de stationnement en épi se trouvent à proximité des cases marquées de deux diagonales et interdites au parcage (art. 79 al. 4 OSR). Toutes ces places sont desservies par le même chemin d’accès pour entrer sur la place depuis les voies de circulation publiques. En outre, la limite des cases marquées et prévues pour le stationnement se trouve à une distance inférieure à la longueur de 5 à 6 voitures. Il en résulte que l’appelant avait bien l’obligation de stationner sur les places de parcage se trouvant à proximité immédiate et que le stationnement sur l’emplacement où se trouvait son véhicule était donc interdit. La contravention aux art. 27 al. 1 LCR et 79 al. 1 OSR doit ainsi être confirmée.
3.
En définitive, l'appel de F._ doit être rejeté et le jugement entrepris intégralement confirmé.
4.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel constitués de l’émolument de jugement, par 450 fr., doivent être mis à la charge de l’appelant (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c96d3c6c-3380-483d-956a-5f1668b4c57f | En fait :
A.
Par jugement du 24 juin 2011, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que I._ s'était rendu coupable de lésions corporelles simples qualifiées (I), constaté qu'Y._ s’était rendu coupable de lésions corporelles simples (II), libéré Y._ du chef d’accusation de lésions corporelles simples qualifiées (III), condamné I._ à une peine pécuniaire de 40 (quarante) jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 55 fr. (cinquante-cinq francs) et à une amende de 550 fr. (cinq cent cinquante francs), la peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement fautif de l’amende étant de 10 (dix) jours (IV), suspendu l’exécution de la peine pécuniaire ci-dessus et fixé à I._ un délai d’épreuve de 2 (deux) ans (V), condamné Y._ à une peine pécuniaire de 5 (cinq) jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 50 fr. (cinquante francs) (VI), suspendu l’exécution de la peine pécuniaire ci-dessus et fixé à Y._ un délai d’épreuve de 2 (deux) ans (VII), alloué
à I._ des dépens arrêtés à 1'000 fr. (mille francs) à charge dY._ et rejeté toutes autres conclusions civiles (VIII), alloué à Y._ 2'500 fr. (deux mille cinq cents francs) à titre d’indemnité pour tort moral et 5'000 fr. (cinq mille francs) à titre de dépens à la charge de I._ (IX), mis les frais de justice, par 2'189 fr. 55, à charge de I._ et par 5'387 fr. 85 à la charge d'Y._ dont 3'937 fr. 60 à titre d’indemnité à son conseil d’office Me Frank Tièche, et laissé le solde à la charge de l’Etat (X), et dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité au conseil d'office allouée au chiffre X ci-dessus, sera exigible pour autant que la situation financière d'Y._ se sera améliorée (XI).
B.
1.
Contre ce jugement, I._ a, par l'intermédiaire de son mandataire, déposé une annonce d'appel du 4 juillet 2011, puis une déclaration d'appel datée du 2 août 2011. Il a conclu à l'admission de son appel et à l'annulation du jugement entrepris, la cause étant renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle appréciation.
A titre de mesures d'instruction, il a requis une expertise à confier à un médecin légiste pour déterminer l'origine des lésions physiques et auditives dont il a souffert consécutivement aux événements de la nuit du 18 au 19 octobre 2008.
2.
Y._ a
fait appel contre le jugement précité par actes datés du 30 juin et du 22 juillet 2011. Il a conclu, avec suite de frais et dépens, à sa libération du chef d'accusation de lésions corporelles simples. Pour le surplus, il a requis que de pleins dépens lui soient octroyés, que les frais de justice soient mis à la charge de I._, et que toutes autres contraires ou plus amples conclusions soient rejetées.
3.
Par lettre du 8 août 2011, le Ministère public s'en est remis à justice au sujet de la recevabilité des appels de I._ et d'Y._ et a indiqué ne pas vouloir déposer d'appel joint.
Par pli du 25 août 2011, I._ a confirmé ses conclusions et indiqué ne pas vouloir déposer d'appel joint.
Le 12 septembre 2011, le Président de la Cour de céans a rejeté la requête d'expertise de I._.
Le 13 septembre 2011, les parties ont été informées de la composition de la cour; elles ont été citées à comparaître aux débats fixés au 1
er
novembre 2011, voire à déposer des conclusions écrites motivées jusqu'au 28 septembre 2011.
Par lettre du 16 septembre 2011, le Ministère public a renoncé à comparaître à l'audience appointée et a conclu au rejet des appels en se référant aux considérants du jugement entrepris.
Par lettre du 29 septembre 2011, I._ a requis l'assignation et l'audition du témoin C._ à l'audience du 1
er
novembre 2011. Par décision du 5 octobre suivant, le Président de la cour de céans a rejeté cette requête, C._ ayant déjà été entendu, et les conditions de la répétition de l'administration des preuves du tribunal de première instance n'étant pas réunies.
4.
Une audience s'est tenue le 1
er
novembre 2011, au cours de laquelle I._ et Y._ ont été entendus.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
I._, ressortissant suisse né le 8 décembre 1984, ingénieur en audiovisuel, a travaillé jusqu'à fin août 2011 en tant que carméraman/monteur vidéo auprès de Standard Production pour un salaire mensuel net de 4'000 fr. payé douze fois l'an. Actuellement au bénéfice de l'assurance-chômage dont il perçoit une indemnité de 145 fr. 15 par jour, il vit seul dans un appartement dont le loyer se monte à 600 fr. par mois, et n'a ni dettes, ni fortune. Il paie 600 fr. par mois pour ses primes d'assurance-maladie.
Le casier judiciaire suisse de I._ est vierge.
2.
2.1
Y._, ressortissant italien, né le 24 décembre 1973, est au bénéfice d'un permis C. Il a vécu dans son pays d’origine, puis en Suisse où il a exercé plusieurs activités manuelles, avant d'œuvrer comme fromager et d'ouvrir une entreprise de vente de fromages et charcuteries italiens. Cette activité, exercée uniquement lors de marchés, lui rapporte en moyenne 5'000 francs nets par mois. Dépourvu de fortune, l'intéressé fait l'objet, d'une poursuite de 47'000 francs dont il conteste le montant. Père d'une fille, il vit maritalement depuis 8 ans avec [...] qui travaille à Genève pour un revenu de 5'000 fr. par mois et qui l'aide à payer les 1'700 fr. de loyer mensuel de l'appartement du couple. Le prévenu paie mensuellement 200 à 250 fr. pour son assurance-maladie.
2.2
Le casier judiciaire suisse d'Y._ comporte deux inscriptions :
- 16.06.2004, [...], violation grave des règles de la circulation routière, amende 400 fr. avec sursis, délai d’épreuve 1 an;
- 19.06.2007 [...], Vevey, violation grave des règles de la circulation routière et entrave à la circulation publique, peine pécuniaire de 60 jours-amende à 40 francs.
3.
Le 19 octobre 2008 à environ trois heures du matin, dans la discothèque [...], à Lausanne, I._ et Y._ se sont bousculés sur la piste de danse, d'abord involontairement, puis intentionnellement. Lors de cette bousculade, I._ est tombé en arrière contre l'estrade, sur le dos, ce qui a causé une ecchymose. I._par derrière sur le sommet du crâne au moyen d'une bouteille de bière de 3 dl, qui s'est brisée. Y._ s'est retourné. Les deux prévenus se sont à nouveau mutuellement repoussés alors que I._ tenait encore le tesson de la bouteille dans sa mainY._ au visage et au thorax.
Pour ces faits, le premier juge a condamné I._ pour lésions corporelles simples qualifiées et Y._ pour lésions corporelles simples. Il a alloué à Y._ une indemnité pour tort moral de 2'500 fr. pour la blessure au thorax. | En droit :
1.
Déposés en temps utile et contenant des conclusions suffisantes, les appels sont recevables (art. 399 al.1 et 3 CP; Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007, RS 312.0).
2.
Aux termes de l'art. 398 CPP, la juridiction d'appel jouit d'un plein pouvoir d'examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L'appel peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète des faits et pour inopportunité.
Appel de I._
3.
3.1
Dans sa déclaration d'appel du 2 août 2011
,
I._ n'a conclu qu'à l'annulation du jugement et au renvoi de l'affaire à l'autorité précédente pour nouvelle appréciation. En audience du 1
er
novembre 2011, il a complété ses conclusions : il a requis, à titre principal, son acquittement et à titre subsidiaire, l'application de l'art. 15 CP (légitime défense). Plus subsidiairement encore, il a demandé une atténuation de la peine en raison de circonstances atténuantes (menace grave; art. 48 let. a CP). On peut laisser ouverte en l'espèce la question de savoir si les conclusions prises en audience sont recevables, alors qu'elles n'ont pas été formulées dans la déclaration d'appel, contrairement à l'obligation faite à l'appelant (art. 399 al. 3 let. b CPP). En effet, la déclaration d'appel est pour le surplus longuement motivée et il appartient en définitive exclusivement à l'autorité de deuxième instance de déterminer si le jugement doit être modifié ou annulé (art. 409 al. 1 CP).
3.2
Comme on va le voir ci-après, la cour de céans est en mesure de statuer sur la base des éléments au dossier tels qu'ils ressortent des preuves complètes et régulières administrées en cours d'enquête et en première instance (art. 389 al. 2 CPP). L'affaire n'ayant donc pas à être renvoyée en première instance et il convient de statuer sur les moyens de l'appelant I._
4.
Il invoque tout d'abord une constatation erronée des faits.
4.1
I._, le premier juge n'aurait pas dû retenir qu'il était tombé en arrière sur le dos suite aux premières bousculades, parce que cette version ne correspond ni aux déclarations des parties, ni à celles du seul témoin présent.
L'appelant perd de vue que le tribunal disposait d’autres moyens de preuve, à savoir, un constat médical montrant une ecchymose au bas de son dos (pièce 16, p. 2 et pièce 17/3), ainsi que les observations de la Dresse [...] médecin assistant ORL/CHUV (pièce 28). Le premier juge a fondé, à juste titre, son appréciation des faits sur ces pièces médicales concordantes (jugement, p. 25). On ne saurait donc reprocher à l'autorité de première instance de ne pas avoir privilégié les déclarations des parties.
4.2
L'appelant conteste avoir agressé Y._ par derrière, en lui portant un coup à la tête, dès lors que seul l'avant du cuir chevelu d'Y._ a été touché. Il ajoute qu'en tout état de cause, les faits retenus en définitive par le premier juge sont contredits par la première version d'Y._.
A nouveau, la version des parties ne s'imposait pas d'elle-même. En effet, le médecin légiste entendu en première instance s'est prononcé en faveur de la compatibilité des lésions constatées sur Y._ avec un coup donné par l'arrière, cela même en tenant compte de la taille respective des antagonistes (procès-verbal, p. 13). En outre, ces déclarations concordent tant avec les constatations faites par le Dr [...] dans son rapport d'expertise (pièce 40), et aux débats de première instance (jugement p. 23) qu'avec le témoignage de C._ qui est formel : il a vu I._ frapper Y._ à l'aide d'un objet non défini depuis l'arrière (procès-verbal, p. 3). Sur ce point, les faits retenus par le tribunal reposent sur des preuves fiables et concordantes.
4.3
L'intéressé prétend qu'il n'est pas l'auteur de la blessure infligée au thorax d'Y._, motifs pris que ce dernier aurait dit s'être rendu directement aux toilettes après avoir reçu un coup sur la têteC._ aurait indiqué s'être interposé.
Dès lors que ces déclarations seraient contredites par les constats médicaux, en particulier au sujet de la gravité et la multiplicité des lésions infligées, c'est à juste titre que le premier juge ne les a pas tenus pour décisifs.
En outre, rien ne permet d'exclure que I._I._ a tenu le tesson de bouteille à la main lors de bousculade et qu'il a causé la lésion au thorax d'Y._ lorsqu'il a repoussé son antagoniste. Une nouvelle fois, le premier juge s'est fondé sur un avis médical constatant que la profondeur de la lésion supposait un geste ayant accompagné le tesson, la coupure étant nette et verticale (pièce 40/1). Cet avis n'est d'ailleurs pas infirmé par les déclarations des parties Y._ a indiqué dans une de ses versions, avoir été attaqué avec un tesson de bouteille (procès-verbal d'audition du 18 novembre 2008, pièce 2, p. 2).
4.4
Plaidant la légitime défense I._ prétend avoir reçu une chope de bière sur le côté droit du visage, geste violent consécutif aux bousculades survenues entre les protagonistes, ce qui serait attesté par la pièce 6 du dossier (recte, pièce 16, p. 3), qui constate une tuméfaction jugale, ainsi qu'une parésie du membre supérieur droit et une labyrinthite traumatique de l'oreille droite. Compte tenu de la surprise, du choc et de la douleur, il aurait lancé de manière spontanée sa bière contre Y._ qui serait sorti de la discothèque pour se mettre en sécurité. A ses yeux, sa réaction était proportionnée à l'attaque subie (mémoire d'appel, p. 10).
Cette version ne résiste pas à l'examen. En effet, le témoin C._ a vu l'appelant agresser Y._ par derrière alors qu'il n'était pas l'objet d'une attaque à ce moment-la. Ce témoignage est probant. Au demeurant, la pièce 16 invoquée ne démontre pas la réalité du coup de chope de bière allégué. L'argument de la légitime défense doit être rejeté et c'est en vain que l'appelant discute du caractère proportionné de sa défense.
4.5
Le prévenu qualifie de farfelu le point de vue du premier juge selon lequel les lésions au thorax ont été infligées par dol éventuel, dès lors que cette appréciation ne se fonderait que sur le sentiment d'un témoin.
D'après la jurisprudence, il y a dol éventuel lorsque l'auteur envisage le résultat dommageable mais agit néanmoins, même s'il ne le souhaite pas, parce qu'il s'en accommode pour le cas où il se produirait (ATF 131 IV 1 c. 2.2 p. 4 s.; 131 IV 58 c.8.2 p. 61). Ce que l'auteur d'une infraction savait, voulait ou l'éventualité à laquelle il consentait relève du fait (ATF 130 IV 20 c. 1.3 p. 23 et les arrêts cités).
Contrairement à ce que soutient l'appelant, ce n'est pas le sentiment d'un témoin qui a fondé l'appréciation du premier juge, mais bien des constatations médicales : à dires de médecin, la lésion au thorax n'est pas accidentelle, pas davantage le résultat d'une projection de verre, mais bien le fait d'un tesson tenu à la main (pièce 40/1). Ainsi, on peut retenir avec le premier juge, que dans l'échauffourée, I._ n'avait pas l'intention de blesser son antagoniste (pas de dol direct) mais s'est accommodé du risque de blesser à nouveau celui-ci (dol éventuel) en tenant le tesson à la main (jugement p. 26). Cette constatation n'a rien d'arbitraire.
4.6
I._ estime qu'il aurait dû être libéré au bénéfice du doute, compte tenu des nombreuses versions des protagonistes, ainsi que des incohérences affectant les déclarations d'C._. Il reproche au tribunal de l'avoir condamné en donnant un crédit démesuré aux deuxièmes et troisièmes versions Y._.
La présomption d’innocence, garantie par les art. 14 par. 2 Pacte ONU II (Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, RS 0.103.2), 6 par. 2 CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, RS 0.101) et 32 al.1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l’appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d’innocence signifie que toute personne prévenue d’une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu’il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF du 25 mars 2010 6B_831/2009, c. 2.2.1).
Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (cf. ATF 120 Ia 31 2c; TF 6B_831/2009, précité, c.2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s'agir de doutes importants et irréductibles, qui s'imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38, c. 2a).
En l'espèce, le tribunal a indiqué les motifs qui ont fondé sa conviction (jugement pp. 21 à 26). Il s’est en grande partie distancié des déclarations des parties, trop contradictoires et orientées. A juste titre, il a privilégié les constats médicaux qui étaient concordants et qui démontraient à satisfaction de droit la réalité des faits retenus en définitive. Ainsi, l'appelant fait fausse route en affirmant que le premier juge a accordé un crédit démesuré aux deuxième et troisième versions d'Y._ et qu'il a violé le principe de la présomption d'innocence.
4.7
Il résulte de ce qui précède que le raisonnement du premier juge échappe à la critique et que la constatation des faits reprochés à l'appelant n'est ni incomplète, ni erronée. L'appel de I._ doit donc être rejeté en tant qu'il remet en cause l'état de fait du premier juge.
5
. Au vu des faits retenus, c'est à juste titre que l'appelant a été condamné pour lésions corporelles simples qualifiées.
6.
La peine prononcée (soit, 40 jours-amende à 55 fr. avec sursis pendant deux ans et une amende de 550 fr. convertible en dix jours de peine privative de liberté de substitution) est adéquate au regard de l'infraction commise, de la culpabilité de l'appelant et de sa situation personnelle. Elle ne relève ni d'un abus, ni d'un excès du pouvoir d'appréciation dont jouit l'autorité de première instance, laquelle n'a ignoré aucun des critères déterminants consacrés à l'art. 47 CP. Elle sera donc confirmée. On relèvera encore qu'au regard des faits, l'appelant n'a pas agi sous le coup d'une menace grave, de sorte que c'est en vain qu'il invoque cette circonstance atténuante pour obtenir une atténuation de sa peine.
7.
I._ remet en cause le bien fondé de l'allocation d'une indemnité pour tort moral à Y._, arguant que ce dernier ne souffre ni physiquement, ni psychiquement de la cicatrice qu'il porte sur son thorax (mémoire d'appel p. 15). Il conteste aussi le montant alloué en se prévalant de la faute concomitante de la victime.
En l'espèce, on peut tenir pour constant qu'après avoir été poussé par son antagoniste, l’appelant est tombé et s’est blessé légèrement au dos. Il s’est relevé. Y._ lui tournait alors le dos et ne représentait plus une menace. L’appelant l’a alors frappé au moyen de la bouteille de bière puis du tesson et l’a blessé au visage et au thorax. Le geste de I._ a provoqué chez Y._ une blessure durablement visible, donc une atteinte physique permanente (jugement p. 27 et 28) justifiant l'octroi d'un montant pour tort moral.
Quand bien même la responsabilité initiale d’Y._ dans le déclenchement des hostilités représenterait une faute concomitante, le montant de 2’500 fr. alloué par le premier juge à titre de réparation du tort moral la prend à l’évidence en considération, compte tenu de l’atteinte permanente subie. En outre, le tribunal a accordé un montant limité pour tenir compte de l'absence de conséquence psychologique et du fait que l'aspect un peu épais de la cicatrice est lié à la qualité de peau dY._Y._ (jugement p. 28). L'indemnité allouée à Y._ par l'autorité de première instance pour son tort moral doit donc être confirmée tant dans son principe que dans sa quotité.
En définitive, l'appel de I._ doit être rejeté.
Appel d' Y._
8.
Y._ reproche au tribunal d'avoir procédé à une appréciation arbitraire des preuves en retenant qu’il avait bousculé de manière volontaire I._, qui serait tombé en arrière et aurait souffert d'une ecchymose au bas du dos. En se prévalant du témoignage de C._, il nie la réalité de ces faits. Il prétend en outre qu'il aurait à tout le moins dû être acquitté au bénéfice du doute dès lors qu'aucune pièce au dossier ne prouve son implication dans la chute de I._ et les conséquences de celle-ci.
A ce sujet, le premier juge s’est fondé sur le constat médical de l'Unité de médecine des violences (pièce 16; jugement p. 25). Peu importe, cela étant, que la version de I._ soit contradictoire et incohérente sur de nombreux points. Peu importe également que le constat médical précité ait été établi deux jours après les faits et que I._ se soit plaint de nombreux autres maux à cette occasion. Au surplus, tant I._ qu'Y._ ont expliqué s’être poussés mutuellement avant que l’altercation ne dégénère. Le fait retenu par le tribunal n’a donc rien d’arbitraire.
On relèvera encore que le grief de l'appelant relève de la témérité lorsqu'il affirme que rien dans le jugement ne permet de retenir qu'il aurait causé la chute de I._, alors que le premier juge fait état d'une bousculade volontaire (jugement p. 25).
Ensuite, contrairement à ce que soutient l'appelant, le premier juge a tenu compte de la responsabilité largement prépondérante de I._ (jugement p. 27), comme le démontrent tant les peines prononcées que les montants alloués en dédommagement.
Au demeurant, dès lors que sa condamnation repose sur des preuves médicales tangibles (pièce 16), c'est également en vain que l’appelant plaide la violation du principe de la présomption d’innocence.
Enfin, examinant d'office le droit, la cour de céans relève que le tribunal n'a pas violé le droit fédéral en condamnant d’Y._ pour lésions corporelles simples en présence d’une atteinte limitée à l’intégrité corporelle ne se manifestant que par des griffures ou des contusions. Le juge dispose en effet d’une certaine marge d’appréciation lorsque la distinction entre voies de fait et lésions corporelles est délicate (ATF 119 IV 1 c.4 et 25 c.2a). En l’espèce, l’ecchymose ayant subsisté plusieurs jours après les faits, il n’est pas arbitraire de l’avoir considérée comme une lésion corporelle.
La peine fixée pour cette infraction est adéquate (art. 47 CP) et n'a pas à être revue; elle n'est au demeurant pas discutée (404 al.1 CPP).
Vu les faits retenus et la condamnation de l'appelant, le jugement entrepris ne paraît pas non plus critiquable sur la question des frais (art. 426 CPP) et des dépens.
L’appel d’Y._ doit en conséquence également être rejeté.
9.
Vu le sort des appels, les frais de la procédure d'appel sont mis par moitié à la charge d'Y._, l’autre moitié étant mise à la charge de I._ (art. 428 al. 1 CPP; art. 20 et 21 TFJP, tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010; RSV 312.03.01). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c9767439-bcbc-4c34-9b6c-5577eb7b9161 | En fait :
A.
Par jugement du 18 septembre 2013 rectifié le 27 septembre 2013, le Tribunal correctionnel de La Broye et du Nord vaudois a constaté que S._ s'était rendu coupable de contrainte sexuelle, de menaces qualifiées, de voies de fait qualifiées, de dommages à la propriété, d’injure, d’utilisation abusive d’une installation de télécommunication, de violation de domicile, de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants, de violation simple des règles de la circulation, de tentative de dérobade aux mesures visant à déterminer l’incapacité de conduire, d’ivresse au volant qualifiée, de conduite en état d’incapacité, de non-port des permis de conduire et de circulation et d’infraction à l’ordonnance réglant l’admission à la circulation routière (I), a condamné S._ à une peine privative de liberté de 20 (vingt) mois, sous déduction de 113 jours de détention avant jugement, peine partiellement complémentaire à celle prononcée par le Juge d’instruction de l’arrondissement de Lausanne dans son ordonnance de condamnation du 7 janvier 2010 (II), ordonné un traitement ambulatoire psychiatrique et psychothérapique avec surveillance de l’abstinence à l’alcool (III), révoqué le sursis accordé à S._ par le Juge d’instruction de l’arrondissement de Lausanne dans son ordonnance de condamnation du 7 janvier 2010 (IV), pris acte pour valoir jugement des reconnaissances de dettes signées par S._, par lesquelles celui-ci s'est reconnu débiteur de A._ de la somme de 618 fr. 30 avec intérêt à 5% l’an dès le 19 septembre 2013 et de 2'500 fr. à titre de participation pour ses frais de défense (V), a dit que S._ devait payer à A._ la somme de
2'000 fr. plus intérêt à 5% l’an dès le 27 décembre 2010, à titre d’indemnité pour tort moral, ainsi que le montant de 8'000 fr. plus intérêt à 5% l’an dès le 1
er
juillet 2012, à titre de solde pour la participation de ses frais de défense (VI), a rejeté toutes autres ou plus amples conclusions civiles prises par A._ à l’encontre de S._ (VII), ordonné le maintien au dossier à titre de preuves des objets séquestrés sous numéros 44125 et 43853, ainsi que de l’objet inventorié comme pièce à conviction sous numéro 13272/11 (VIII), arrêté l’indemnité allouée à Me Claire Charton, conseil d’office de S._, à un montant de 14'222 fr. 15, débours et TVA compris (IX), mis à la charge de S._ les frais de justice par
36'411 fr. 75, somme comprenant l’indemnité allouée à son défenseur d’office, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (X), et dit que le remboursement à l’Etat de l’indemnité de conseil d’office allouée à Me Claire Charton était subordonné à l’amélioration de la situation économique du condamné (XI).
B.
Par annonce du 23 septembre 2013, puis par déclaration du 21 octobre 2013, S._ a fait appel de ce jugement en concluant à ce que sa peine privative de liberté soit réduite de 20 à 15 mois, à la suppression de son abstinence à l’alcool surveillée dans le cadre de son traitement ambulatoire, au non versement d’une indemnité pour tort moral à A._ et à ce que sa peine privative de liberté soit compatible avec une semi-détention.
Par déclaration d’appel joint du 31 octobre 2013, le Ministère public, a conclu à ce que S._ soit condamné, frais à sa charge, à une peine privative de liberté de 28 mois, sous déduction de 113 jours de détention avant jugement, à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 40 fr. le jour (pour l’infraction d’injure), ainsi qu'à une amende de 800 fr. convertible en 20 jours de peine de substitution pour les contraventions à la LStup (Loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951; RS 812.121), à la LCR (Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958; RS 741.01), à l’OAC (Ordonnance du 27 octobre 1976 réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière, le non-port des permis de conduire et de circulation; RS 741.51), ainsi que l’utilisation abusive d’une installation de télécommunication, peine partiellement complémentaire à l’ordonnance de condamnation du 7 janvier 2010. Concernant l’octroi d’un sursis partiel au condamné, le Ministère public a déclaré s’en remettre à justice.
Pour A._, plaignante et partie civile, Me Alain Dubuis a conclu avec suite de dépens, au rejet des conclusions de l’appel de S._ et s’en est remis à justice s’agissant de l’appel joint du Ministère public.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
a)
S._, né le 17 mars 1978, a grandi à[...]. Ayant quitté l’école sans obtenir de certificat de fin de scolarité, il a été employé comme boucher, comme bûcheron, puis comme étancheur, métier acquis sans apprentissage et qu'il a exercé pendant six ans pour le compte [...] étanchéité [...]. Après une période de chômage, il a retrouvé du travail au cours de l'année 2012, par l'intermédiaire d'une société intérimaire, dans une entreprise d’étanchéité de la région [...]. Cet emploi lui procure un revenu mensuel net d’environ 3'750 fr., treizième salaire et vacances compris, respectivement de 3'126 fr. en déduisant vacances et jours de congé. A ce jour et depuis sa sortie de détention avant jugement, le 19 avril 2011, l'intéressé vit à [...] qui lui offrent le gîte et le couvert et à qui il verse 450 fr. par mois. Il souhaite toutefois retrouver un appartement dans la région [...] pour se rapprocher de son lieu de travail et pour mener une vie plus indépendante.
S._ a épousé [...] le 20 septembre 2002. Deux enfants nés en 2003 et 2006 sont issus de cette union. Séparé depuis le 1
er
juillet 2008, puis divorcé en septembre 2009, le prévenu verse mensuellement 1'350 fr. à son ex-épouse pour l’entretien de ses deux enfants et exerce son droit de visite un week-end sur deux.
b)
Le casier judiciaire de S._ mentionne sa condamnation le 7 janvier 2010 par le Juge d’instruction de Lausanne à 12 jours-amende à 60 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'à une amende
de 600 fr., pour voies de fait, injure, utilisation abusive d’une installation de télécommunication, menaces et contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants.
Son fichier ADMAS fait état d'un retrait du permis, le 20 novembre 2008, pour une durée de trois mois pour distance insuffisante et un autre, le 29 septembre 2009, d'une durée de quatre mois, pour vitesse.
c)
S._ a été détenu avant jugement du 28 décembre 2010 au 19 avril 2011.
D.
S._ a été soumis à une expertise psychiatrique confiée au Département de psychiatrie, Secteur psychiatrique Nord, à Yverdon-les-Bains. La [...], cheffe de clinique, a déposé un rapport le 21 avril 2011 (P. 44) qu'elle a complété le 7 décembre 2011 (P. 40) et par sa déposition du 17 septembre 2013 devant l'autorité de première instance. Elle a posé le diagnostic de trouble de la personnalité émotionnellement labile de type borderline, retard mental léger, utilisation d’alcool nocive pour la santé, dépendance au cannabis, abstinence en milieu protégé, et utilisation de cocaïne nocive pour la santé. Les troubles psychiques dont souffre le prévenu ont été considérés comme graves, chroniques et invalidants. Le fonctionnement psychique du prévenu est marqué par une labilité d’humeur, la peur du vide, le manque, l’abandon, la perturbation de l’image de soi et le besoin d’être étayé par l’autre, notamment par les femmes avec lesquelles il tisse un lien si intense que l’éloignement de celles-ci est perçu comme un abandon difficilement surmontable, le plongeant dans un profond désarroi. Une des caractéristiques du trouble de l’intéressé est la composante impulsive, représentant une défense par un agir violent envers la personne qui le blesse, notamment lorsqu’il se sent abandonné, rejeté ou dévalorisé. L’expertisé présente une fragilité narcissique en lien avec une intelligence légèrement déficiente, qui entraîne des difficultés de compréhension du monde qui l’entoure et qui l’amène, lorsqu’il se sent infériorisé ou incompétent, à une réaction de prestance qui passe par une défense active de soi et qui peut générer de la violence. Le processus qui amène le prévenu à commettre ses actes délictueux est toujours le même, qu'il s'en prenne à des objets ou à des personnes. Ainsi, des ruptures de lien ou des blessures de son image laissent craindre l’émergence de gestes impulsifs essentiellement dirigés contre des objets lui appartenant ou appartenant à la personne avec qui il est en lien et qui compte pour lui, dans des menaces ou insultes, ou alors dans des actes agressifs dirigés contre soi, comme des mutilations ou des idées suicidaires. Pour que le prévenu s’en prenne physiquement à une personne, celle-ci doit être quelqu'un de significatif pour lui, comme une compagne. Les débordements émotionnels de S._ sont plus forts lorsqu’il est alcoolisé, l’alcool ayant un effet désinhibant – sans être causal dans le passage à l'acte – qui renforce, chez lui, la difficulté à gérer ses émotions, notamment ses débordements impulsifs et violents. Si les troubles du prévenu ont laissé intacte sa capacité d’apprécier le caractère illicite de ses actes au moment des faits, ses capacités volitives s'en trouvaient altérées, de sorte que sa responsabilité devait être considérée comme restreinte de façon légère. Quant au risque de récidive, il est élevé si S._ se trouve dans une même situation que celles rencontrées dans la présente affaire, où il se sent rejeté, abandonné, éloigné, dévalorisé. Les troubles du prévenu amplifient au quintuple ses sentiments de contrariété et de frustration, même face à des événements courants de la vie. Si la thérapie suivie (depuis 2011) par S._ a déjà des effets positifs, seul un traitement de longue durée – sept à huit ans pour des personnalités labiles de type borderline telles que celle de l'intéressé – se révèlera efficace. Un traitement psychiatrique et psychothérapique ambulatoire est nécessaire pour apprendre à l'intéressé à gérer ses émotions autrement que de manière impulsive. De même, il convient de mettre en place une surveillance de l'abstinence à l'alcool, la cessation de cette consommation étant de nature à diminuer le risque de récidive, même si la problématique principale de S._ est son trouble de la personnalité. Ce traitement ambulatoire avec contrôle de l'abstinence à l'alcool est compatible avec l'exécution d'une peine de privative de liberté.
Un meilleur contrôle du comportement ressort également du certificat médical établi le 3 juillet 2013 par le médecin traitant qui préconise toutefois la poursuite de la thérapie (P. 74/1).
En janvier 2013, S._ a fait l'objet d'une plainte de sa nouvelle amie, [...], qui lui faisait grief de la harceler suite à leur séparation. Finalement, la plainte a été retirée suite à l'engagement du prévenu de laisser la plaignante tranquille, ce qu'il a respecté.
E.
a) A Thierrens,[...], à une date indéterminée au mois de mars 2008, dans la matinée, l'accusé S._ a contraint son épouse, [...], à subir un rapport sexuel anal en la maintenant sur le lit au niveau de la nuque. L'accusé est passé outre les refus de son épouse, allant même jusqu'à lui dire que
"d'habitude, [elle] aimait cela".
Le soir, lorsque [...] lui a demandé de partir, l’accusé s’est énervé et il a retourné le lit contre le mur. Il a également frappé avec son poing contre une porte-fenêtre, ce qui a eu pour effet de la briser. La fille du couple, alors âgée de 2 ans, se trouvait à proximité lors de cet accès de colère.
b) A une date indéterminée durant l'été 2008, l’accusé a fait irruption dans l'appartement d’un ami chez qui [...] passait la soirée. A cette occasion, il a déclaré à son épouse qu'il allait la
"crever".
c) Le 17 juillet 2008, l'accusé a envoyé un sms à son épouse, rédigé en ces termes :
"Appelle la police, j'arrive !".
[...] a été véritablement effrayée par ce message, dans la mesure où son mari avait déjà fait irruption au domicile conjugal le 1
er
juillet 2008 à 5 h 45. A cette occasion, il lui avait déclaré qu'elle avait un quart d'heure pour habiller les enfants et partir, tout en cassant divers objets dans l'appartement. Suite au sms de l’accusé, [...] s'est immédiatement habillée et a quitté le logement avec ses enfants.
d)
Le 4 août 2008, S._ a écrit un sms à [...], rédigé en ces termes :
"Tu peux mourir, je serai bien content. Tu n'es pas une bonne mère, je regrette d'avoir fait des enfants avec toi. Un jour, tu le regretteras. Je m'en assurerai, fais-moi confiance
".
e)
Le 8 octobre 2008, S._ a laissé un message sur la boîte vocale de son épouse, indiquant qu'elle était une
"voleuse",
qu'il se
"vengerait d'une façon ou d'une autre" et que s’il "choppait [...] [ndr : un ami de [...]], [il] le prendrait et [il] le retournerait tout comme [il] le ferait avec [...].",
ajoutant qu’il "
ne sera pas tranquille tant que cela ne se sera pas produit".
[...] a perçu le ton emprunté dans ce message comme froid et déterminé. Une cassette audio fait l'objet de la fiche de pièce à conviction n° 43853.
f) A une date indéterminée entre le 8 octobre et le 18 novembre 2008, lors d'une conversation téléphonique avec sa femme, S._ a dit à cette dernière que [...]
"allait y passer",
cherchant à alarmer [...] en dirigeant sa menace contre le compagnon de cette dernière. Il a ajouté qu’il ne comprenait pas pourquoi elle l’avait quitté et s’était mise en couple avec [...].
g)
A [...], le 19 décembre 2008, alors que [...] amenait ses enfants à son mari pour qu'il exerce son droit de visite, ce dernier l'a injuriée et lui a dit
" [...] que cela prendrait un ou deux ans mais qu'il [...] couperait les couilles [à [...]]".
h) Durant la période de novembre 2009 (les contraventions antérieures étant prescrites), et à tout le moins jusqu'au 16 décembre 2010, le prévenu S._ a fumé du cannabis à raison de 2 joints par jour en moyenne. Depuis sa sortie de prison le 19 avril 2011, S._ a consommé occasionnellement de ce stupéfiant. Il a investi 100 fr. par mois pour l'achat de cette drogue.
i) Le lundi 11 octobre 2010 [...], les concubins A._ et S._ se sont disputés. S._ a commencé à jeter divers objets dans l'appartement puis il s'est emparé d'une chaise et a fait mine de la fracasser sur la tête de son amie. Il a reposé la chaise par terre et s'est muni d'un couteau à viande, en faisant semblant de s'ouvrir les veines. Il a ensuite saisi son amie, l'a projetée contre un mur et lui a donné plusieurs gifles tout en la traitant de
"pute",
de
"salope",
et de
"connasse".
Après cela, S._ a quitté les lieux en voiture, alors qu'il était toujours armé du couteau. A._ a déposé plainte le 11 octobre 2010.
j) Le vendredi 26 novembre 2010, entre 19 h 00 et 20 h 00 [...], le prévenu S._ a saccagé l'appartement en lançant à terre et cassant nombre d'objets qui lui tombaient sous la main. A._ a déposé plainte le 27 novembre 2010.
k) Le jeudi 16 décembre 2010, vers 23 h 00, S._ a pris le volant de sa voiture [...], qui était stationnée au chemin du [...], alors qu'il était sous l'influence de l'alcool (taux d'alcoolémie le plus favorable : 1.49 g ‰ au moment des faits), de cannabis (taux de THC supérieur à la valeur limite définie par la loi) et sans avoir enclenché l'éclairage de sa machine. Au débouché du chemin du [...], il s'est trouvé en présence d'une voiture de gendarmerie dont les occupants lui ont fait signe de s'arrêter. Il a toutefois poursuivi sa route et a été pris en chasse par les policiers. Après avoir garé son véhicule sur la route de Lausanne, il a pris la fuite à pied à travers champs. Il a finalement pu être interpellé derrière le Collège du
[...]. Il n'était pas porteur de ses permis de conduire et de circulation, et n'avait pas effectué son changement d'adresse sur ce dernier document.
l)
Durant la période du 17 au 27 décembre 2010, S._ a téléphoné à de très nombreuses reprises à A._, alors qu'elle venait d'emménager au chemin du [...]. En outre, il attendait tous les jours la plaignante devant son nouveau domicile. Il l'a menacée à plusieurs reprises en lui répétant qu'il allait
"s'en prendre à elle, et que ses parents ne la reconnaîtraient pas".
Le 27 décembre 2010 dans la journée, il a enfoncé la porte de l'appartement de A._. A l'intérieur, il a renversé, cassé et démoli plusieurs meubles et a jeté par la fenêtre de la vaisselle et des habits. Peu après, il a brisé la vitre latérale avant droite de la voiture de la lésée et en a également endommagé l'aile avant gauche. A._ a déposé plainte le 27 décembre 2010. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (al. 1). La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (al. 3). L’appel joint doit, quant à lui, être interjeté dans un délai de vingt jours dès la réception de la déclaration d’appel
(art. 400 al. 3 CPP).
Interjeté dans les forme et délai légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de S._ est recevable. Il en va de même de l’appel joint du Ministère public.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié (b), pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012 c. 3.1).
3.
La juridiction d'appel n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP).
En l'espèce, les chefs de condamnation ne sont pas contestés dans les déclarations d'appel, de sorte qu'il n'y a pas lieu de les examiner à nouveau, même si l'appelant a déclaré à l'audience d'appel qu'il persistait à n'avoir infligé aucune contrainte sexuelle à son ex-épouse.
Les appels portent sur la nature et la quotité de la sanction et, accessoirement, sur une modalité de la mesure et sur un poste des conclusions civiles. En raison de leur imbrication, ils seront traités simultanément.
4.
4.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale. Pour fixer la peine, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Il y a toutefois violation du droit fédéral lorsque le juge sort du cadre légal, se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (TF 6B_85/2013 du 4 mars 2013 c. 3.1 et les références citées).
4.2
Aux termes de l'art. 43 CP, le juge peut suspendre partiellement l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté d'un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur (al. 1). La partie à exécuter ne peut excéder la moitié de la peine (al. 2). En cas de sursis partiel à l'exécution d'une peine privative de liberté, la partie suspendue, de même que la partie à exécuter, doivent être de six mois au moins. Les règles d'octroi de la libération conditionnelle (art. 86) ne lui sont pas applicables (al. 3).
Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents. Le nouveau droit pose des exigences moins élevées quant au pronostic pour l'octroi du sursis. Auparavant, il fallait que le pronostic soit favorable. Désormais, il suffit qu'il n'y ait pas de pronostic défavorable. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude. Pour qu'il ait un sursis partiel, il faut un pronostic mitigé, à savoir que l'octroi du sursis à l'exécution d'au moins une partie de la peine nécessite, à des fins de prévention spéciale, que l'autre partie de la peine soit exécutée, à savoir qu'il existe des doutes très importants au sujet du comportement futur de l'auteur, notamment au vu de ses antécédents (cf. sur tous ces points, ATF 134 IV c. 4.2.1, 4.2.2 et TF 6B_492/2008 du 19 mai 2008 c. 3.1 auxquels renvoie TF 6B_676/2012 du 10 mai 2013 c. 2.1).
4.3
Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (art. 49 al. 2 CP). Le cas (normal) de concours réel rétrospectif se présente lorsque l'accusé, qui a déjà été condamné pour une infraction, doit être jugé pour une autre infraction commise avant le premier jugement, mais que le tribunal ignorait. L'art. 49 al. 2 CP enjoint au juge de prononcer une peine complémentaire ou additionnelle (Zusatzstrafe), de telle sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement. Concrètement, le juge doit se demander comment il aurait fixé la peine en cas de concours simultané, puis déduire de cette peine d'ensemble hypothétique la peine de base, soit celle qui a déjà été prononcée (TF 6B_455/2013 du 29 juillet 2013 c. 2.4.1 et les références citées). Le prononcé d'une peine complémentaire suppose que les conditions d'une peine d'ensemble au sens de l'art. 49 al. 1 CP sont réunies. Une peine additionnelle ne peut ainsi être infligée que lorsque la nouvelle peine et celle qui a déjà été prononcée sont du même genre. Des peines d'un genre différent doivent en revanche être infligées cumulativement car le principe d'absorption n'est alors pas applicable (TF 6B_1082 du 18 juillet 2011 c.2.2 et les références citées).
4.4
Lorsque le juge est appelé à connaître d’un crime ou d’un délit que l’auteur a commis après une précédente condamnation à une peine assortie du sursis, il est également compétent pour statuer sur la révocation de ce dernier
(cf. art. 46 al. 3 CP). Il doit donc examiner si les conditions d’une révocation sont réunies, laquelle postule que le crime ou le délit dont il est appelé à connaître ait été commis pendant le délai d’épreuve du sursis antérieur et qu’il y ait dès lors lieu de prévoir que l’auteur commettra de nouvelles infractions (cf. art. 46 al. 1 CP). Cette dernière condition implique l’existence d’un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné (ATF 134 IV 140 c. 4.3 p. 143). Elle correspond donc à l’une des conditions de l’octroi du sursis, de sorte que, comme dans ce dernier cas, le pronostic à émettre doit reposer sur une appréciation d’ensemble de tous les éléments pertinents (arrêt précité, c. 4.4 et les arrêts cités in TF 6B_855/2010 du 7 avril 2011, c. 2.1).
Dans l’appréciation des perspectives d’amendement à laquelle il doit procéder pour décider de la révocation d’un sursis antérieur, le juge doit tenir compte des effets prévisibles de l’octroi ou non du sursis à la nouvelle peine. Il peut parvenir à la conclusion que l’exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L’inverse est également admissible : si le sursis précédent est révoqué, l’exécution de la peine qui en était assortie peut, par l’effet de choc et d’avertissement (Schock-und Warnungswirkung) issu de la condamnation précédente, y compris en ce qui concerne l’aménagement ultérieur de la vie de l’intéressé, conduire à nier l’existence d’un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (ATF 134 IV 140 c. 4.5 p. 144, spéc. 147 ss).
4.5
Dans leur examen de la sanction à infliger, les premiers juges n’ont évoqué qu’une peine privative de liberté (jugement p. 49) qu'ils ont considérée
comme étant partiellement complémentaire à la sanction infligée à S._ par l'ordonnance de condamnation rendue le 7 janvier 2010 par le
Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne, à savoir 12 jours-amende
à 60 fr. le jour avec sursis pendant deux ans et 600 fr. d'amende, pour voies de fait, injure, utilisation abusive d'une installation de communication, menaces et contravention à la LStup. Or, comme le relève le Ministère public dans son appel joint, le concours d’infractions prévu à l’art. 49 al. 1 CP n’est envisageable qu’à l’égard de plusieurs peines du même genre et, en présence d’infractions punies de sanctions distinctes dans leur genre, le juge doit prononcer cumulativement une peine privative de liberté et une peine pécuniaire et/ou amende le cas échéant (Dupuis et alii, Petit Commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 16 ad art. 49 CP).
Ainsi, les premiers juges auraient dû prononcer une peine pécuniaire pour sanctionner les trois injures proférées lors de la dispute du 11 octobre 2010, au cours de laquelle le prévenu a traité A._ de
"pute"
, "
salope"
et
"connasse",
(jugement p. 42 ch. 2), les propos offensants tenus entre juillet et novembre 2008 étant prescrits. L'injure est passible d'une peine pécuniaire de 90 jours-amende au plus (art. 177 al. 1 CP). Pour ces trois injures proférées à la chaîne, 10 jours-amende suffisent.
La valeur du jour-amende, doit être fixée à 20 fr. le jour au vu la situation financière de l'intéressé, soit compte tenu du fait qu'il réalise un revenu net moyen de 3'216 fr. 40, qu'il paie 450 fr. de frais d'hébergement, qu'il verse une pension alimentaire de 1'350 fr. par mois pour ses deux enfants (ATF 134 IV 60 c. 6) et qu'il supporte des frais de déplacement pour se rendre au travail, une prime d'assurance-maladie et quelques frais médicaux.
L'appel joint du Ministère public donc être partiellement admis dans le sens de ce qui précède.
4.6
S._ a également été reconnu coupable de voies de fait qualifiées (art. 126 al. 1 et al. 2 let b
bis
CP) pour des gifles assenées à A._ et pour l’avoir projetée contre un mur le 11 octobre 2010 (jugement p. 42), d'utilisation abusive d’une installation de communication (art. 179 septies CP) pour des appels dérangeants à destination de A._, effectués entre le 17 et le 27 décembre 2010 (jugement p. 42 in fine), de contravention à la LStup pour de la consommation de cannabis (art. 19a LStup) jusqu’au 16 décembre 2010 (jugement p. 41 et 42) et de violation simple des règles de la circulation (art. 90 ch. 1 LCR) pour une circulation de nuit sans éclairage (art. 41/1 LCR et 31/2/a OCR), une inobservation des ordres et signaux de la police (art. 27/1 LCR), un non-port des permis de conduire et de circulation (art. 99 ch. 3 LCR) et un changement d’adresse non effectué sur le permis de circulation (art. 143 ch. 3 OAC), contraventions commises le 16 décembre 2010 (jugement p. 42). Les conditions d'une peine d'ensemble n'étant pas réunies s'agissant de peines de genres différents, une amende doit être prononcée, en plus de la peine privative de liberté (ATF 102 IV 242) et des jours-amende, pour sanctionner ces contraventions passibles
d’une peine maximale de 10'000 fr. (art. 106 al. 1 CP), mis à part celle de
l’art. 143 ch. 3 OAC dont l'amende est plafonnée à 100 francs.
Au vu de la multiplicité des contraventions relevant de domaines aussi divers que la protection de l’intégrité physique et de l’honneur, la protection de la sphère privée, la santé publique et la circulation routière, ainsi que des ressources économiques du condamné (art. 106 al. 3 CP), une amende de 1'000 fr., convertible en 10 jours de peine privative de liberté de substitution, se justifie.
Sur ce point également l’appel du Ministère public doit être partiellement admis.
4.7
L'appelant a conclu que sa peine privative de liberté soit assortie du régime de la semi-détention. Aux débats d'appel, il a précisé cette conclusion en ce sens que la quotité de la peine privative de liberté doit être compatible avec une semi-détention.
Comme cela résulte de la lettre de l’art. 77b CP, la semi-détention est une modalité d’exécution des peines de six mois à un an que l’autorité compétente prononce lorsqu’il n’y a pas lieu de craindre la fuite ou la récidive du détenu. L’autorité compétente est l’autorité d’exécution des peines (Petit commentaire, op.cit. n. 7 ad art. 77 b CP), soit dans le canton de Vaud l’Office d’exécution des peines
(art. 19 al. 1 let b LEP, Loi sur l'exécution des condamnations pénales du 4 juillet 2006; RSV 340.01). En définitive, l'appelant demande que de sa peine privative de liberté, après déduction de la détention avant jugement et exclusion de la partie de la peine soumise à délai d’épreuve par un sursis, soit d'une durée compatible avec une semi-détention.
Selon la jurisprudence, l'institution de la semi-détention est désormais réglée par l’art. 77b CP qui dispose qu’une peine privative de liberté de six mois à un an est exécutée de cette manière s’il n’y a pas lieu de craindre que le détenu ne s’enfuie ou ne commette de nouvelles infractions. Le détenu continue à travailler ou à se former à l’extérieur de l’établissement; il passe ses heures de loisirs et de repos dans l’établissement. L’accompagnement du condamné doit être garanti pendant le temps d’exécution. Par ailleurs, conformément à l’art. 79 al. 1 CP, cette forme d’exécution des peines privatives de liberté s’applique également, dans la règle, aux sanctions de moins de six mois et aux soldes de moins de six mois après imputation de la détention subie avant le jugement (art. 79 al. 1 CP). La semi-détention en est désormais le mode d’exécution ordinaire impératif (TF 6B_583/2010 du 11 janvier 2011, c. 3.1 et les références citées). Dans un autre arrêt (TF 6B_494/2011 du 4 octobre 2011), le Tribunal fédéral a précisé, s’agissant des limites de durée de peine de l’art. 77b CP, qu'il faut (aussi) prendre en compte, en cas de sursis partiel, la durée de la peine à exécuter et non la partie de la peine assortie du sursis.
4.8
Qualifiant la culpabilité de très lourde, les premiers juges ont fixé la peine à 20 mois de peine privative de liberté et écarté tout sursis (jugement p. 46 à 50) en insistant surtout sur les réitérations en cours d’enquête et l’attitude agressive de S._ envers les femmes avec lesquelles il noue une relation, relevant notamment que le prévenu considère les femmes comme des objets qui doivent se soumettre à toutes ses volontés. A décharge, le tribunal a évoqué l’intelligence limite, la diminution légère de la responsabilité pénale, les difficultés existentielles, le cadre familial inadéquat, le traitement entrepris, et l'attachement du prévenu à ses enfants. S._ fait valoir que sa culpabilité aurait été appréciée de manière trop sévère, que l’impact de 20 mois de prison sur son activité professionnelle et son avenir n’aurait pas été suffisamment pris en compte. Mettant surtout en avant la contrainte sexuelle, le Ministère public estime la peine infligée trop légère et conclut à ce qu’elle soit augmentée de 8 mois pour passer à 28 mois.
La peine privative de liberté sanctionne une contrainte sexuelle, des menaces qualifiées, des dommages à la propriété, une tentative de dérobade aux mesures visant à déterminer l’incapacité de conduire, une ivresse au volant qualifiée et une conduite en état d’incapacité. Au vu de l’étalement dans le temps des infractions (menaces et dommages) et en particulier de l’entêtement du prévenu à retomber dans le même schéma délictuel, nonobstant les interventions et les mises en garde répétées des autorités, l’appréciation de la culpabilité intégrant les éléments à charge et à décharge, notamment la sanction du délit d'injure et les contraventions par d'autres genres de peine, ainsi que le caractère non complémentaire de la peine, conduit à confirmer la peine de 20 mois infligée en première instance, le prévenu n’ayant pas encore totalement pris conscience de sa faute et de son comportement destructeur envers ses compagnes successives.
En revanche, le pronostic n’est pas entièrement défavorable, mais mitigé. En effet, si la problématique de l'agressivité à l'égard de ses compagnes demeure, un traitement bien suivi est en cours et le prévenu progresse lentement. Sa conduite à l’égard de sa dernière amie est certes blâmable, mais ses actes répréhensibles se sont limités à une insistance pénible, toutefois dépourvue de violence, le classement dont il a bénéficié ne portant que sur un abus d’installation de télécommunication. On peut voir une forme de progrès dans ce moindre dérapage.
Il est important de maintenir l’ancrage professionnel, social et familial en favorisant une semi-détention. L’exécution de la peine sous cette forme et la perspective de devoir purger le solde en régime ordinaire en cas de récidive
– ajoutée à la révocation du sursis antérieur dont les conditions sont réunies, l'intéressé ayant récidivé pendant le délai d'épreuve, trahissant ainsi la confiance placée en lui par la justice (art. 46 al. 1 CP; jugement p. 51) – devrait constituer un barrage suffisant à la commission de nouvelles infractions.
Les premiers juges ont considéré que la peine privative de liberté à infliger à S._ était partiellement complémentaire à celles de
12 jours-amende à 60 fr. avec sursis pendant 2 ans et d'une amende de 600 fr. prononcées le 7 janvier 2010 (jugement p. 49), dès lors que les infractions à juger avaient en partie été commises avant ce jugement, in casu, de mars 2008 à décembre 2010. Si l'on considère les infractions prescrites (les contraventions antérieures au 18 septembre 2010; [art.109 CP]) et celles qui ne peuvent plus faire l'objet d'une poursuite pénale du fait du retrait de plainte intervenu le 11 janvier 2013 (les injures et les menaces proférées contre [...] à janvier [...] [P. 49]), seule la contrainte sexuelle subie par la prénommée en mars 2008 est antérieure au premier jugement. La peine privative de liberté fixée ci-dessus pour sanctionner notamment cette infraction ne saurait toutefois être
partiellement complémentaire à celles, d'un genre différent, infligées le 7 janvier 2010 (cf. supra, c. 4. 3). Le dispositif du jugement entrepris sera donc modifié pour supprimer le caractère complémentaire de la peine.
Il convient donc d’admettre partiellement l’appel du Ministère public et d’infliger 20 mois dont 10 avec sursis au sens de l’art. 43 CP, le délai d’épreuve étant de quatre ans au vu de la profondeur du trouble, dont à déduire la détention subie avant le jugement de première instance. Par cohérence, le sursis partiel s’appliquera également à la peine pécuniaire.
5.
Suivant la recommandation de l’expert psychiatre visant à réduire le risque de récidive (jugement p. 10, 37, 38), les premiers juges ont décidé une surveillance de l’abstinence à l’alcool comme modalité du traitement psychiatrique ambulatoire instauré (jugement p. 50). Durant les débats, S._ avait notamment déclaré à ce sujet :
"J’adhère au traitement ambulatoire préconisé par l’expert et je suis prêt à me soumettre à un suivi de mon abstinence
"
(jugement p. 30).
Dans son appel, S._ demande contradictoirement que l’abstinence à l’alcool ne lui soit plus imposée et, partant, qu’elle ne soit pas contrôlée. Il fait valoir à cet égard que cette abstinence forcée serait inutile dans la mesure où l’écoulement du temps durant plus de trente-trois mois aurait démontré qu’il ne présente plus de problème en relation avec la boisson.
Il est conforme à l’art. 63 al. 1 CP de combiner dans un traitement ambulatoire celui, principal, d’un grave trouble mental, et celui, secondaire d’une addiction à l’alcool.
Pour ordonner une des mesures prévues aux art. 59 à 61, 63 et 64 CP, le juge doit se fonder sur une expertise. Celle-ci doit se déterminer sur la nécessité et les chances de succès d’un traitement, la vraisemblance que l’auteur commette d’autres infractions et la nature de celles-ci, et sur les possibilités de faire exécuter la mesure (art. 56 al. 3 CP). Selon la jurisprudence, le juge apprécie en principe librement une expertise et n’est pas lié par les conclusions de l’expert. Toutefois, il ne peut s’en écarter que lorsque des circonstances ou des indices importants et bien établis en ébranlent sérieusement la crédibilité; il est alors tenu de motiver sa décision de ne pas suivre le rapport d’expertise (ATF 133 lI 384 c. 4.2.3;
ATF 129 I 49 c. 4; ATF 128 I 81 c. 2).
On lit dans le rapport d’expertise du 21 avril 2011 (P. 44 p. 8), confirmé par l’expert entendu à l’audience de jugement, que S._ reconnaissait notamment une consommation d’alcool et admettait une désinhibition induite par cette consommation. Lors de ses hospitalisations en 2006, 2008 et 2010, le diagnostic posé incluait la dépendance à l’alcool (P. 44 p. 9). L’expertise (p. 11) retient quant à elle l’utilisation (quasi quotidienne) d’alcool nocive pour la santé tout en excluant la dépendance (p. 13). Dans ses conclusions (p. 18), l’expert a exposé que l’alcool – représentant une composante non négligeable dans sa problématique de gestion de la violence (p. 14) – était le toxique le plus impliqué dans les délits commis par l’expertisé, celui-ci devant cesser sa consommation d’alcool pour diminuer le risque de récidive. L’avis de l’expert n’a pas à être revu. La nécessité de s’abstenir de boire demeure d’autant plus d’actualité que S._ a derechef adopté un comportement de harcèlement, certes moins violent, lors sa dernière rupture sentimentale en automne 2012 (P. 56/1, P. 56/2), un retrait de plainte
(P. 56/3) lui permettant d’échapper à une sanction pénale. Il présente donc toujours un trouble sérieux de la personnalité activé dans ses relations avec les femmes et qui l’amène à commettre des infractions à leur encontre avec une facilitation des passages à l’acte en cas de consommation d’alcool. L’appel de S._ est mal fondé sur ce point et doit être rejeté.
6.
A._ avait notamment conclu à l’allocation d’une indemnité pour tort moral de 5'000 fr. en capital (jugement p. 26); les premiers juges lui ont accordé 2'000 fr. pour ce poste en considérant que l’appelant lui avait causé des souffrances importantes en lui faisant subir des violences physiques, matérielles et verbales sur plus d’une année en la maltraitant, en la poursuivant et en l’harcelant de manière à faire de sa vie un enfer et en la maintenant dans un climat de peur et d’insécurité, lui faisant redouter son apparition (jugement pp. 51 et 52).
S’en prenant au principe et non à la quotité de la réparation morale
(art. 49 CO), S._ conteste tout traumatisme, dès lors que l’intéressée n’a pas consulté de médecin ou de thérapeute, et soutient que l’existence d’un trouble post-traumatique n’est pas établie et ne peut l’être sur la seule base des déclarations de la victime.
6.1
En vertu de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les circonstances particulières à prendre en compte se rapportent à l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé,
l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent une longue période de souffrance et d'incapacité de travail, de même que les préjudices psychiques importants (TF 6B 345/2012 du 9 octobre 2012 c. 3.1 et les références citées).
6.2
Les déclarations détaillées, répétées et crédibles de la plaignante relatives à l’impact destructeur sur sa personnalité du comportement persécuteur de l'appelant (p. 17 à 19 et 27), plus particulièrement quant aux peurs ressenties à long terme et aux pertes de confiance amenant à l’isolement, emportent la conviction. Cette victime a d’ailleurs vécu une trajectoire et des souffrances semblables à celles de la première victime. L’interrogatoire et la déposition de parties sont un mode de preuve en procédure civile (art. 168 al. 1 let. f CPC, Code de procédure civile du 19 décembre 2008; RS 272). Pour que le contenu des déclarations évoquant les souffrances causées par l’auteur des actes illicites soient considérées comme prouvé, il n’est donc pas nécessaire qu’elles soient recueillies par un tiers médecin ou soignant plutôt que directement par le juge. Sur cette question l’appel doit être rejeté.
7.
En définitive, l'appel de S._ doit être rejeté et celui du Ministère public partiellement admis dans le sens des considérants.
8.
Compte tenu de l'ampleur de la procédure et de la connaissance du dossier déjà acquise en première instance, une indemnité de défenseur d'office pour la procédure d'appel d'un montant de 3'538 fr. 60, débours et TVA inclus, est allouée à Me Claire Charton. Cela correspond à 18 heures à 180 fr., plus 36 fr. 50 de débours et 8 % de TVA.
Vu le sort des appels, les frais de seconde instance, y compris l'indemnité allouée au défenseur d'office ci-dessus, sont mis à la charge de S._ (art. 428 al. 1 CPP). S._ ne sera tenu de rembourser à l'Etat l'indemnité en faveur de son défenseur d'office que lorsque sa situation financière le permettra. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c9c5846a-4347-4f09-9817-96075293943c | En fait :
A.
Par jugement du 1
er
juin 2011, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a notamment libéré E._ des accusations de contrainte sexuelle, abus de la détresse et contravention à la Loi fédérale sur les professions médicales (I), a constaté qu'E._ s'était rendu coupable d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (II), l'a condamné à une peine privative de liberté de deux ans et cinq jours, dont neuf mois à titre ferme et le solde avec sursis pendant cinq ans, peine complémentaire à celles infligées le 27 février 2006 par le Juge d'instruction de Lausanne et le 8 octobre 2009 par le Juge d'instruction de la Côte (III).
Par jugement du 23 septembre 2011, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal a partiellement admis l'appel formé par E._ (I), a modifié les chiffres I et II du dispositif de première instance en ce sens qu'E._ a été libéré des accusations d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, d'abus de détresse et de contravention à la Loi fédérale sur les professions médicales et a constaté qu'il s'était rendu coupable de contrainte sexuelle (II), a alloué au conseil d'office d'E._, Me Nicolas Gillard, une indemnité pour la procédure d'appel d'un montant de 2'721 fr. 60, TVA comprise (III), a alloué au conseil d'office de D._, Me Antonella Cereghetti Zwahlen, une indemnité pour la procédure d'appel d'un montant de 1'584 fr. (IV), a mis les frais d'appel, par 6'655 fr. 60, y compris les indemnités d'office, à la charge d'E._ (V), a dit qu'E._ ne sera tenu de rembourser le montant de l'indemnité en faveur de son défenseur d'office que lorsque sa situation financière le permettra.
Par arrêt du 29 juin 2012, la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis le recours d'E._, annulé l'arrêt entrepris et renvoyé la cause à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision au sens des considérants de l'arrêt (1), a admis la requête d'assistance judiciaire de D._ et désigné Me Antonella Cereghetti Zwahlen conseil d'office de l'intimée (2), n'a pas perçu de frais (3), a dit que le canton de Vaud versera la somme de 3'000 fr. au recourant à titre de dépens (4), a alloué une indemnité de 1'000 fr. à Me Antonella Cereghetti Zwahlen par la caisse du Tribunal fédéral, au titre de l'assistance judiciaire (5), et a communiqué l'arrêt aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (6).
B.
Par courrier du 6 août 2012, E._ a déposé des observations et réquisitions de preuves. Il a requis deux expertises psychiatriques pour déterminer si et dans quelles mesures et pour des raisons psychiques, D._ et Q._ étaient incapables de discernement au moment des faits les plus graves qui lui sont reprochés. Il a également demandé que la Dresse J._ soit entendue une nouvelle fois. Au surplus, l'appelant a réitéré l'intégralité des requêtes d'instruction qu'il avait déjà formées dans sa déclaration d'appel du 5 juillet 2011. Enfin, E._ a sollicité la production du dossier médical de Q._.
Par courrier du 8 août 2012, D._ s'est opposée aux réquisitions de preuve d'E._.
Par courrier du 16 août 2012, la Direction de la procédure a informé les parties qu'elle allait procéder à l'audition de Q._ en qualité de témoin à l'audience du 15 octobre 2012. Pour le surplus, elle a rejeté toutes les autres réquisitions formulées par E._.
Par courrier du 29 août 2012, E._ a une nouvelle fois requis la production du dossier médical de Q._. Il a également informé la Cour qu'il renouvellerait à l'audience l'intégralité des réquisitions de preuves qui lui avaient été refusées.
Par courrier du 27 septembre 2012, le Procureur a requis à son tour la production du dossier médical de Q._.
Par courrier du 1
er
octobre 2012, la Direction de la procédure a imparti un délai au 4 octobre 2012 à Q._ pour produire l'intégralité de son dossier médical établi par E._. Par courrier du 3 octobre 2012, Q._ a informé la Cour avoir détruit l'intégralité du dossier afin de tirer un trait sur cette période destructrice de sa vie.
A l'audience du 15 octobre 2012, l'appelant a renouvelé sa requête de mesures d'instruction, qui a été rejetée par la Cour.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
E._ est né en 1957 à Fribourg. Il est divorcé depuis 1997 et père de quatre enfants, dont deux partiellement à sa charge bien que majeurs. Depuis son divorce, il est suivi par le Dr N._, psychothérapeute à Lausanne. Ce praticien voit l'appelant comme un patient souffrant d'un état dépressif anxieux récurrent, avec une certaine fragilité personnelle et qui connaît, par phases irrégulières, des problèmes liés à sa consommation d'alcool. L'objectif de ces rencontres entre l'appelant et son thérapeute est de permettre au premier de mettre des limites entre les enjeux professionnels et les enjeux médicaux, ainsi qu'entre l'identité personnelle et l'identité médicale. En effet, selon le Dr N._, E._ a une tendance au surinvestissement dans son activité professionnelle, sans toutefois que cela n'entraîne une altération de sa responsabilité pénale. Au bénéfice d'un diplôme fédéral de médecine générale, E._ a travaillé comme médecin généraliste à Vidy-Med. Il a toutefois quitté cet établissement pour ouvrir son cabinet à Lausanne à la suite de la présente affaire, plus spécialement d'une suspension d'autorisation de pratiquer infligée le 9 juillet 2008 pour une durée de six mois, sanction qui a été exécutée durant le second semestre de l'année 2009. A l'audience de ce jour, E._ a dit percevoir un revenu mensuel qui oscillait entre 10'000 fr. et 12'000 francs. Pour le surplus sa situation personnelle et financière n'a pas évolué. Il s'acquitte de pensions alimentaires pour un montant de 4'400 fr. par mois.
Le casier judiciaire d'E._ fait mention de deux condamnations portant sur des violations des règles de la circulation routière, à savoir une peine d'emprisonnement de 25 jours et une amende de 2'000 fr. prononcées le 27 février 2006 par le Juge d'instruction de Lausanne, ainsi qu'une peine pécuniaire de 90 jours-amende à 60 fr. le jour et une amende de 300 fr. infligées le 8 octobre 2009 par le Juge d'instruction de La Côte.
2.
D._ est née en 1968. Victime d'abus sexuels dans son enfance et en plein mal-être, elle a consulté E._ dès 1992 pour des problèmes de médecine générale. Lors d'une consultation en 1994, elle lui a fait savoir qu'elle avait été victime d'un viol alors qu'elle était âgée de 6 ans. L'appelant lui a proposé une liste de psychiatres qu'elle n'a finalement pas consultés. E._ a alors fait savoir à D._ qu'il avait suivi une formation de deux ans de psychiatrie, qu'il était qualifié pour traiter les personnes abusées et qu'il était prêt à la prendre en charge. C'est ainsi qu'il lui a proposé une thérapie à base de jeux de rôle, lui faisant signer un "contrat thérapeutique" le 25 octobre 1994, et l'a suivant jusqu'à fin 2006. Très rapidement, E._ a nourri à l'égard de sa patiente des sentiments ambigus, sachant qu'elle était extrêmement faible du point de vue psychologique et qu'il avait créé un lien de dépendance d'elle envers lui. Il a notamment admis aux débats de première instance que D._ était incapable de refuser un acte dépassant un cadre thérapeutique normal de soins.
2.1
Entre juillet 1995 et fin 1999, E._ a profité, lors d'une dizaine de séances de jeux de rôle, de commettre divers attouchements à caractère sexuels sur D._. Ainsi, au motif de lui faire revivre le viol de l'intérieur afin de ne pas développer un syndrome de "compulsion de répétition", E._ prenait le rôle du violeur et demandait à sa patiente de s'asseoir sur ses genoux. Dans cette position, à chaque fois qu'il passait son bras par-dessus les épaules de D._, E._ lui touchait les seins. Il profitait également de lui mettre les mains sur le haut des cuisses, sans toutefois toucher le pubis.
2.2
Entre 1995 et 2003, E._ prenait régulièrement D._ dans ses bras "pour la réconforter". En 2002 ou en 2003, alors qu'il l'enlaçait, il en a profité pour lui caresser le dos, à même la peau, durant près de cinq minutes. Il lui a déclaré que son geste devrait lui "faire chaud en bas". Reprenant le concept du "débriefing psychologique", E._ y a ajouté des actes à caractère sexuel, à savoir des fessées qu'il a administrées en décembre 1996, juillet 1998 et les 6 et 7 juin 2002, sous le couvert d'actes symboliques exécutés dans le cadre d'une "sexothérapie".
Toujours sous le couvert d'actes symboliques, E._ a fait subir à D._ deux touchers vaginaux les
11 octobre 1996 et 11 décembre 1999. La plaignante a précisé qu'en 1996, elle avait indiqué à l'appelant qu'elle avait été incommodée par le caractère d'un gynécologue qu'elle venait de consulter. Elle ressentait une douleur au bas-ventre et E._ a alors procédé au premier toucher vaginal. Concernant le toucher commis en décembre 1999, la plaignante a précisé que l'appelant l'avait convaincue – aux cours des séances journalières, samedi compris, qui avaient précédé – que cette opération lui permettrait de se sentir moins "sale", la prenant dans ses bras et la rassurant en lui disant qu'elle était "à la fois la petite fille de six ans amenée au docteur par ses parents et la femme qui prenait soins de son enfant intérieur". Convaincue par E._ qu'il s'agissait de son dernier espoir pour se "sortir du viol", D._ ne s'est pas opposée aux instructions données par l'appelant, à savoir enlever ses habits du bas et se coucher sur le dos sur le lit d'examen. E._ a mis un gant en latex à sa main droite dont il a enduit les doigts de lubrifiant. Il a posé sa main gauche sur le bas-ventre de D._ et a introduit deux ou trois doigts dans son vagin. Après avoir tourné les doigts à l'intérieur à plusieurs reprises, il les a sortis en déclarant avoir "enlevé le zizi du violeur". Il a réintroduit ses doigts pour les tourner à nouveau dans le vagin de la plaignante tout en déclarant qu'il était en train de "nettoyer". Il les a ressortis et a demandé à D._ s'il y "avait encore quelque chose". La plaignante ayant déclaré qu'elle ne savait pas, E._ a introduit une troisième fois ses doigts dans le vagin de sa patiente pour "vérifier". Au terme de ses agissements, E._ a pris D._ dans ses bras pour la "féliciter".
2.3
Au début de l'année 2004, E._ a pris D._ dans ses bras et lui a ensuite posé ses deux mains sur les seins, par dessus ses habits. Il a laissé ses mains sur la poitrine de sa patiente pendant une minute, nonobstant le fait que cette dernière lui a dit, en reculant, qu'elle ne voulait pas d'un tel geste.
2.4
Entre janvier et mars 2004, E._ a expliqué à D._ qu'il devait pratiquer un autre acte symbolique à des fins de "purification". Il lui a ainsi demandé d'enlever ses habits du haut et de s'asseoir sur le lit de consultation. Il a pris de l'eau tiède et a massé les seins de D._, à mains nues, pendant deux à trois minutes.
2.5
De manière générale, l'appelant s'est immiscé dans la vie privée de D._ au point de s'inviter à la cérémonie lors de laquelle cette dernière a été consacrée pasteure ou de corriger le courrier que la plaignante entendait adresser à son entourage ou encore d'exiger de rencontrer ses partenaires intimes; en 2001, elle a dû lui présenter deux collègues et amis qui ont assisté à plusieurs séances. E._ était d'ailleurs conscient du fait que D._ était en situation de dépendance vis-à-vis de lui et qu'elle était incapable de repousser ou de s'opposer à un acte dépassant un cadre thérapeutique normal de soins. La plaignante a déclaré aux débats de première instance qu'avec le recul, elle avait le sentiment d'avoir été mise dans un état de dépendance, l'appelant critiquant son entourage, sa famille et son employeur de l'époque. Elle a relevé qu'E._ l'avait ainsi isolée et qu'elle avait accepté les actes symboliques qu'il lui proposait "par désespoir de ne pas guérir" et qu'il ne lui venait pas à l'esprit de lui dire non car elle voulait guérir.
A l'audience de ce jour, D._ a confirmé l'intégralité de ses précédentes déclarations. Elle a expliqué, encore traumatisée par ce qu'E._ lui avait fait subir, que l'appelant est parvenu à lui imposer les actes litigieux en exploitant son désespoir "avec cruauté". Elle a indiqué qu'elle avait accepté à l'époque cette thérapie, ces actes et ces jeux de rôle car elle pensait qu'il avait les compétences nécessaires de par sa formation en psychiatrie. Elle s'était également sentie en confiance du fait qu'il l'a crue quand elle lui avait parlé de son viol dans son enfance. Elle s'est également sentie obligée de suivre cette thérapie par le fait qu'E._ l'a appelée à plusieurs reprises chez elle, à la maison, pour qu'elle signe le contrat thérapeutique. Enfin, il lui a fait croire que si elle ne s'investissait pas dans la thérapie, elle ne s'en sortirait jamais, sous-entendant elle n'aurait "jamais une vie de femme" et qu'en vertu du syndrome de "compulsion de répétition" elle deviendrait à son tour une violeuse. Elle était dès lors terrorisée. Etant donné qu'elle avait l'impression qu'il était le seul à pouvoir l'aider, elle n'a pas eu d'autre choix que d'accepter ces actes et jeux de rôle si elle voulait guérir. Elle a précisé qu'elle devait répéter les jeux de rôle jusqu'à ce qu'elle les réussisse, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'elle n'éprouve plus d'émotion, jusqu'à ce qu'elle soit "désaffectée" selon l'expression d'E._. D'après les déclarations de la plaignante, elle lui a dit à plusieurs reprises qu'elle n'aimait pas ces jeux de rôle mais le prévenu lui rétorquait qu'elle était obligée de passer par là si elle voulait guérir. Elle a également confirmé ce qu'elle avait exprimé devant les premiers juges à savoir qu'E._ l'avait isolée en discréditant ses proches et en lui recommandant de ne pas s'ouvrir de cette thérapie auprès de tiers. D._ a ajouté qu'E._ était la seule personne à l'avoir prise dans ses bras en douze ans et que dans ces circonstances elle ne pouvait rien faire qui l'aurait blessé, déçu ou heurté.
D._ a déposé plainte contre E._ le
24 mars 2009.
3.
E._ était le médecin de famille de Q._ depuis 1992. En 2001, cette dernière lui a fait part du fait qu'elle avait été victime de viols dans sa jeunesse. Profitant de la fragilité psychologique de sa patiente, E._ a entamé une "thérapie" à base de jeux de rôle, de "débriefing" et de "sexothérapie" dont le schéma est identique à celui dont a été victime D._.
3.1
Ainsi, toujours sous le couvert d'actes dits thérapeutiques, E._ a régulièrement demandé à Q._ de se déshabiller et de l'enlacer, profitant de ces moments pour lui caresser le dos.
3.2
Entre 2001 et 2007, E._ a proposé à Q._ de "pratiquer" une "opération symbolique" visant à "extirper le mal de son corps". Pour ce faire, il lui a demandé de s'allonger sur le lit de consultation, en position gynécologique et il lui a introduit un couteau suisse (lame fermée) dans le vagin.
3.3
En 2007, E._ lui avait également demandé de recopier une lettre qu'il avait rédigée lui-même et qui décrivait les bienfaits de sa thérapie sur sa patiente Q._ (lettre du 7 mai 2007). Celle-ci lui faisant une confiance aveugle et sous l'effet de nombreux médicaments prescrits par E._ s'est exécutée sans se poser de questions. En outre, E._ ne lui avait pas entièrement expliqué les circonstances dans lesquelles cette lettre était rédigée. En effet, celui-ci souhaitait produire des témoignages favorables dans le cadre de la procédure disciplinaire diligentée contre lui à la suite de l'intervention de D._. Enfin, Q._ était sous son emprise; par sa "gentillesse", il arrivait à la mettre dans un état de confiance tel qu'elle ne pouvait plus lui résister. Afin d'inhiber tout éventuelle résistance, il lui a également administré des médicaments en début de séance, notamment lorsqu'elle posait trop de questions au sujet des "actes thérapeutiques". Il la mettait sous pression en insistant pour les jeux de rôle qu'elle n'arrivait pas à faire. Q._ avait expliqué à la police qu'elle s'était sentie violée une seconde fois à la suite de l'acte d'ordre sexuel que lui avait fait subir l'appelant.
Q._ s'est présentée à l'audience de ce jour et a été entendue en qualité de témoin. Elle présentait un état de stress et de tension tel qu'elle peinait à répondre aux questions de la Cour; se remémorer les faits paraissait une souffrance difficilement supportable pour elle. Elle a par ailleurs confirmé n'avoir conservé aucun document médical de l'époque et avoir détruit son dossier.
4.
Les actes commis par E._ sur ses patientes D._ et Q._ n'ont aucune justification médicale ou thérapeutique reconnue par le corps médical. | En droit :
1.
Dans son arrêt du 29 juin 2012 (TF 6B_785/2011), le Tribunal fédéral n'a pas remis en cause les faits retenus par la Cour de céans. Il a considéré que cette dernière avait exclu, pour des motifs convaincants, les actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de discernement ou de résistance. La Haute Cour a limité le débat à la question de la contrainte par des pressions psychiques, en relation avec les caresses du dos à même la peau, les fessées de 2002, les attouchements prolongés sur les seins, y compris leur massage à l'eau tiède, et le toucher vaginal de 1999 commis sur D._ ainsi que celui effectué sur Q._ au moyen d'un couteau suisse (c. 2). Le Tribunal fédéral a écarté le premier moyen soulevé par E._, soit la prétendue inexistence, au plan subjectif, de l'intention de se procurer ou d'induire sur ses patientes une excitation sexuelle (c. 3). S'agissant du deuxième moyen soulevé par le recourant, savoir la contestation de toute contrainte psychique sur ses patientes, le Tribunal fédéral a considéré que les développements de la cour de céans ne distinguaient pas clairement ce qui ressortissait à l'exploitation du rapport de dépendance d'avec les moyens supplémentaires, caractéristiques de la contrainte psychique. Le Tribunal fédéral a dès lors renvoyé la cause à la cour de céans afin qu'elle précise les agissements qui relèveraient de la dépendance thérapeutique ou de la contrainte, en exposant, cas échéant, en quoi ces derniers atteignent l'intensité exigée par la jurisprudence (4.3).
2.
E._ reconnaît la matérialité des faits qui lui sont reprochés. Il conteste toutefois leur qualification juridique et toute intention délictueuse.
2.1
Aux termes de l'art. 189 CP, celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d’ordre psychique ou en la mettant hors d’état de résister l’aura contrainte à subir un acte analogue à l’acte sexuel ou un autre acte d’ordre sexuel, sera puni d’une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d’une peine pécuniaire (al. 1).
L'infraction de contrainte sexuelle est intentionnelle. Comme pour le viol, le dol éventuel suffit. L'auteur doit savoir que la victime n'est pas consentante ou en accepter l'éventualité. Il doit vouloir accepter que la victime soit contrainte par le moyen qu'il met en œuvre ou la situation qu'il exploite. Il doit enfin vouloir ou accepter le caractère sexuel de son acte, ce qui généralement va de soi (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3
e
éd., Berne 2010, nn. 23-24 ad art. 189 CP et n. 11 ad art. 190 CP).
2.2
Selon l'art. 193 CP, celui qui, profitant de la détresse où se trouve la victime ou d'un lien de dépendance fondé sur des rapports de travail ou d'un lien de dépendance de toute autre nature, aura déterminé celle-ci à commettre ou à subir un acte d'ordre sexuel, sera puni d'un peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (al. 1).
2.3
Le crime réprimé par l'art. 189 CP (comme celui sanctionné par l'art. 190 CP) est une infraction de violence, qui suppose, en règle générale, une agression physique. En introduisant la notion de "pressions psychiques", le législateur a cependant aussi voulu viser les cas où la victime se trouve dans une situation sans espoir, sans pour autant que l'auteur ait recouru à la force physique ou à la violence. Ainsi, l'infériorité cognitive et la dépendance émotionnelle et sociale peuvent induire une pression psychique extraordinaire et, partant, une soumission comparable à la contrainte physique, rendant la victime incapable de s'opposer à des atteintes sexuelles. La jurisprudence parle de "violence structurelle", pour désigner cette forme de contrainte d'ordre psychique commise par l'instrumentalisation de liens sociaux (TF 6P.200/2006 et 6S.450/2006 du 20 février 2007 c. 7.1).
La délimitation entre les pressions psychiques au sens des art. 189 et 190 CP et la dépendance selon l'art. 193 CP (abus de la détresse) est parfois délicate. Lorsque l'auteur profite d'une situation de contrainte préexistante entraînant une dépendance de la victime envers l'auteur, c'est l'infraction définie à l'art. 193 CP qui entre en considération (TF 6S.143/2002 du 11 juin 2002 c. 1b; Maier, in Niggli/Wiprächtiger (éd.), Basler Kommentar, Strafrecht II, Art. 111-393 StGB, 2
e
éd., Bâle 2007, n. 4 ad art. 193 CP). Ainsi, une dépendance au sens de l'art. 193 CP peut résulter de la relation entre un psychothérapeute et son patient; mais la jurisprudence a précisé que si la dépendance peut en résulter, la seule existence du rapport thérapeutique ne suffit pas encore à l'établir (ATF 131 IV 114 c. 1; ATF 128 IV 106 c. 3b). En revanche, le juge appliquera les art. 189 ou 190 CP si l'auteur contribue à ce que la victime se trouve (subjectivement) dans une situation sans issue en usant de moyens d'action excédant la seule exploitation de la situation de dépendance (ATF 128 IV 106 c. 3b; TF 6P.200/2006 et 6S.450/2006 du 20 février 2007 c. 7.1; TF 6S.143/2002 du 11 juin 2002 c. 1b).
Pour que l'infraction de contrainte sexuelle soit réalisée, il faut que la situation soit telle qu'on ne saurait attendre de la victime qu'elle oppose une résistance; sa soumission doit, en d'autres termes, être compréhensible. L'exploitation de rapports généraux de dépendance ou d'amitié ou même la subordination ne suffisent en règle générale pas pour admettre une pression psychologique au sens des art. 189 al. 1 ou 190 al. 1 CP (ATF 131 IV 107 c. 2.2; TF 6P.200/2006 et 6S.450/2006 du 20 février 2007 c. 7.1). Dans un arrêt du 11 juin 2002, l'intensité caractéristique de la contrainte était réalisée dans le cas d'un thérapeute qui avait prétendu que ses soins auraient permis d'éviter le développement du SIDA chez sa patiente infectée, qui avait contribué à la dépendance économique de cette dernière et lui avait fait un chantage au suicide (TF 6S.143/2002 du 11 juin 2002). Dans l'ATF 131 IV 107, le Tribunal fédéral a précisé la notion de "violence structurelle instrumentalisée" dans le sens où l'auteur doit utiliser les relations sociales comme moyen de pression pour obtenir les faveurs sexuelles de la part de la victime. Ainsi, la considération selon laquelle la subordination cognitive et la dépendance émotionnelle et sociale peuvent produire une pression psychique doit être vue sous l'angle du délinquant sexuel, qui transforme cette pression en un moyen de contrainte pour parvenir à ses fins. Il ne suffit pas que l'auteur exploite une relation de pouvoir, privée ou sociale, préexistante, mais il doit encore créer concrètement une situation de contrainte (tatsituative Zwangssituation). Cela ne signifie cependant pas que l'auteur doive faire renaître cette situation de la même manière lors de chacun des actes subséquents. Il suffit, lorsque la victime résiste dans la mesure de ses possibilités, que l'auteur actualise alors sa pression pour qu'il puisse être admis que chacun des actes sexuels n'a pu être commis qu'en raison de cette violence structurelle réactualisée (ATF 131 IV 107 c. 2.4).
Une appréciation individualisée est nécessaire, laquelle doit reposer sur des éléments suffisamment typiques, tels que la personnalité de la victime, son âge ou sa situation familiale précaires, tout comme le caractère de l'auteur et son éventuelle position dominante, ainsi que l'existence de liens d'amitié ou de nature professionnelle entre les parties (ATF 128 IV 106 c. 3a/bb; ATF 124 IV 154 c. 3b; TF 6S.143/2002 du 11 juin 2002 c. 1 et 2).
2.4
En l'occurrence, D._ a consulté, pour la première fois, E._, en 1992 pour des problèmes de médecine générale. Ce n'est qu'en février 1994 qu'elle s'est ouverte pour la première fois à E._ du viol dont elle avait été victime enfant. Ce dernier a su l'écouter. Il l'a crue tandis que ses parents opposaient un déni total quant au viol. Connaissant la fragilité de sa patiente, notamment le sentiment de honte qui l'envahissait, l'absence de soutien de ses parents et les difficultés qu'elle rencontrait avec son fiancé de l'époque, E._ a profité de la confiance qui était placée en lui pour infliger à D._ les sévices objets de la présente procédure.
Tout d'abord, E._ a laissé croire à la plaignante qu'il était qualifié pour traiter les personnes abusées et qu'il pouvait la prendre en charge. Il lui a ainsi proposé une thérapie à base de jeux de rôle et lui a fait signer un "contrat thérapeutique", refusant d'entamer la thérapie si elle ne signait pas ce contrat. Il a téléphoné chez elle, à la maison, à plusieurs reprises afin qu'elle signe ce contrat thérapeutique, ce que D._ a fini par faire. Il lui a donné l'impression qu'il était le seul à pouvoir l'aider.
Il l'a ensuite mise dans une situation de désespoir l'obligeant à accepter les jeux de rôle qu'il lui proposait. Ces jeux reproduisaient la scène du pré-viol. Dès le premier jeu de rôle, elle s'est sentie agressée sexuellement ce qu'elle a exprimé à E._; toutefois ce dernier lui a répondu qu'elle devait apprendre à repousser l'agresseur. Il lui a fait croire que si elle ne s'investissait pas dans la thérapie, elle ne s'en sortirait jamais, n'aurait jamais "une vie de femme" et deviendrait à son tour une violeuse, ce qu'il appelait la "compulsion de répétition". D._ a ainsi revécu la scène du pré-viol, – en étant sur les genoux d'E._ qui jouait le rôle du violeur et qui passait son bras par-dessus ses épaules en touchant ses seins puis en posant ses mains à l'intérieur de ses cuisses sans toucher son pubis –, pas moins de dix fois. Elle devait continuer les jeux de rôle jusqu'à ce qu'elle les "réussisse". Ainsi, si elle ne se soumettait pas à ses jeux de rôle et à sa thérapie, il n'existait plus d'espoir pour elle de s'en sortir. L'appelant a agi en étant conscient du fait que D._ était en situation de dépendance vis-à-vis de lui et qu'elle était incapable de repousser ou de s'opposer à un acte dépassant un cadre thérapeutique normal de soins. Les consultations étaient multipliées, parfois quotidiennes.
En sus de ces pressions psychologiques la mettant dans une situation sans espoir, D._ était manipulée émotionnellement par E._. Celui-ci profitait de la relation inégalitaire pour l'amener à la soumission par des messages contradictoires. Il faisait preuve d'une part de violence unidirectionnelle à son égard : il lui donnait des fessées pour la discipliner, la traitait d'impertinente; d'autre part, il la récompensait lorsqu'elle accomplissait les actes litigieux. S'agissant du toucher vaginal de 1999, au cours duquel il a introduit à trois reprises ses doigts dans le vagin de sa victime pour "enlever le zizi", "nettoyer" et "vérifier", il a fallu à E._ de nombreuses séances journalières, samedis compris, pendant trois semaines pour réussir à convaincre la plaignante de se soumettre à un tel acte. Il lui a notamment expliqué qu'elle se sentirait moins "sale" à l'issue de cet "exercice". Lorsqu'il a accompli l'acte de "purification" en lui massant les seins, à mains nues, avec de l'eau tiède, elle n'avait également pas d'autres choix que d'accepter tellement elle était terrorisée de ne pas pouvoir s'en sortir. A l'issue de ces sévices qu'il venait de lui imposer, E._ la prenait de ses bras pour la réconforter et la féliciter. Il la maintenait de la sorte dans une situation ambivalente "soutenue-cadrée".
Enfin, pendant les douze années de thérapie, E._ a activement isolé D._ tant socialement qu'émotionnellement, la rendant ainsi plus fragile et toujours plus dépendante de lui. Après avoir rencontré sa famille, il a discrédité ses proches en traitant sa mère de folle et son père de pédophile et a demandé au frère de la plaignante de ne plus la contacter. E._ a également recommandé à D._ de ne pas s'ouvrir de sa thérapie auprès de tiers, prétextant que les gens ne la comprendraient pas et que son isolement serait d'autant plus grand. Ainsi, E._ a tissé sa toile autour de D._ et a éloigné petit à petit toute personne susceptible de la soutenir et de l'aider, l'affaiblissant et la rendant une proie toujours plus facile. Il lui a également déconseillé de rencontrer d'autres médecins, afin de la maintenir sous son emprise. Quand il lui a présenté la Dresse J._, c'était dans son cabinet afin de pouvoir garder le contrôle.
Afin de maintenir son emprise sur sa patiente, il s'est également immiscé de manière inadmissible et excessive dans la vie privée et professionnelle de D._ sans tenir compte de ses besoins. Il a exigé qu'elle lui présente ses partenaires intimes; en 2001, elle a été obligée de lui présenter deux amis et collègues qui ont assisté à plusieurs séances avec E._. L'appelant l'a également convaincue, bien qu'elle s'y opposât au départ, de joindre un document à un rapport qu'elle devait remettre à son employeur, ce qui lui a coûté son travail. Il l'a persuadée de se faire rebaptiser; elle a ainsi changé de prénom, ce qui l'a mise dans un conflit spirituel avec son employeur. Il s'est invité à son assermentation en qualité de pasteure. Il lui a corrigé un courrier qu'elle entendait envoyer à son entourage.
Par sa stratégie, E._ est parvenu à ses fins; il était le seul à la prendre dans ses bras en douze ans; dans ces circonstances, D._ avait le sentiment d'être prisonnière et n'osait rien faire qui aurait blessé, déçu ou heurté le prévenu. L'appelant a progressivement tissé sa toile autour de la plaignante jusqu'à ce qu'elle n'ait pas d'autre choix que d'accepter les attouchements et le toucher vaginal si elle voulait guérir et de peur de perdre la seule personne qui lui restait et en qui elle avait confiance, celui-ci l'ayant totalement isolée tant dans sa vie privée que professionnelle. Par ailleurs, les courriers de juin 2002 de D._ (P. 117 et 118) démontrent bien cette ambivalence constante dans laquelle elle se trouvait, d'un côté, désapprouvant et souffrant des méthodes d'E._ et, de l'autre, n'osant le peiner de peur de le perdre.
Les dessins de la plaignante décrivant les sévices qu'elle a subis, soit les caresses de ses seins, les caresses en bas du dos, le toucher vaginal et les étreintes, illustrent parfaitement la souffrance que chacun de ces actes lui causait (P. 73).
2.5
Le même mode opératoire a été appliqué pour Q._. En effet, l'appelant était le médecin de famille de cette dernière depuis 1992. Ce n'est qu'en 2001 que Q._ lui a confié avoir été victime d'un viol dans sa jeunesse. Quand celui-ci lui a proposé de suivre une thérapie, elle lui a fait confiance. Il la savait également fragile et a procédé de la même manière qu'avec D._ avec des jeux de rôle dans lesquels il jouait le rôle de l'agresseur. Il lui a également expliqué qu'elle devait passer par là pour retrouver "sa vie de femme". Il lui prescrivait de nombreux médicaments. Il lui administrait également des tranquillisants, en début de séance, dès que Q._ commençait à poser trop de questions au sujet des actes thérapeutiques qu'il lui proposait, afin d'inhiber toute éventuelle opposition. E._ avait également conçu en mai 2007 un brouillon de lettre que Q._ a recopié à sa demande et dans lequel elle était censé décrire la thérapie suivie auprès de lui de manière globalement positive, avec la conclusion que le traitement lui était bénéfique. L'appelant a admis un lien de dépendance, relevant que Q._ avait fait sur sa personne "un transfert d'ordre sentimental, la réciproque n'étant pas vraie". Elle lui faisait confiance. Elle a été anéantie par les agissements d'E._, ayant l'impression d'avoir été violée une seconde fois. Son état de panique et de terreur, l'empêchant de répondre plus de quelques minutes aux questions du Président à l'audience de ce jour et sa volonté de quitter la salle d'audience au plus vite pour mettre une croix sur le passé et essayer de retrouver une vie normale, ont démontré à quel point elle est encore traumatisée par ce qu'elle a vécu.
Les actes commis par l'appelant doivent être pris dans leur ensemble et c'est cet ensemble qui est constitutif de la contrainte exercée par E._ sur D._ et Q._ (ATF 129 IV 262, JT 2005 IV 207 c. 2).
Au vu de l'ensemble des pressions mises en place par l'appelant, la soumission de la plaignante D._ aux actes symboliques accomplis durant la thérapie, en particulier les touchers vaginaux de décembre 1999 ainsi que le lavage des seins à mains nues avec de l'eau tiède en mars 2004, ne peut pas être considérée comme un accord. Il en va de même pour le toucher vaginal au moyen du couteau suisse effectué sur Q._.
Le prévenu ne pouvait pas ne pas être conscient du fait que son comportement annihilait la capacité de résistance de ses patientes, et ne relevait pas d'une relation thérapeutique ordinaire. Il en a accepté les conséquences, dans le but de pouvoir poursuivre ses pseudo-thérapies. Il a bien agi intentionnellement.
2.6
Il ressort de ce qui précède que les éléments constitutifs, tant objectifs que subjectifs, de l'infraction à l'art. 189 CP sont réunis. E._ doit dès lors être reconnu coupable de contrainte sexuelle au sens de l'art. 189 CP pour les "actes symboliques" décrits plus haut auxquels il a soumis D._ et Q._i.
3.
L'appelant ayant été reconnu coupable par les premiers juges d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, chef d'accusation abandonné par la présente cour, il convient d'examiner sa peine pour la contrainte sexuelle retenue. Le cadre légal est cependant le même quant aux sanctions qui peuvent être infligées à l'auteur des infractions visées à l'art. 189 CP et à l'art. 191 CP.
3.1
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2). La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (TF 6B_335/2012 du 13 août 2012 c. 1.1 et les références citées).
3.2
En cas de concours rétrospectif partiel, soit lorsque, parmi plusieurs infractions à juger, l'une au moins a été commise avant d'autres jugées précédemment (cf. art. 49 al. 2 CP), il faut déterminer d'abord celle pour laquelle la loi prévoit la peine la plus grave. Lorsque l'infraction la plus grave à juger est celle qui a été commise avant le premier jugement, une peine complémentaire (hypothétique) au premier jugement doit être fixée et sa durée augmentée pour tenir compte des actes commis après ce premier jugement. L'élément de la peine d'ensemble relatif à l'acte en concours rétrospectif sera déterminé comme une peine additionnelle à celle déjà prononcée. Cette méthode permet d'appliquer l'art. 49 al. 1 CP sans négliger l'art. 49 al. 2 CP. Sur le plan formel, la sanction est toujours une peine d'ensemble mais, sur celui de sa quotité, il est tenu compte du concours rétrospectif (TF 6B_685/2010 du 4 avril 2011 c. 4.1 et les références citées). Lors de la fixation de la peine dans un tel cas de concours réel rétrospectif, l'art. 49 al. 2 CP enjoint au juge de prononcer une peine complémentaire ou additionnelle (Zusatzstrafe), de telle sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement; concrètement, le juge doit se demander comment il aurait fixé la peine en cas de concours simultané, puis déduire de cette peine d'ensemble hypothétique la peine de base, soit celle qui a déjà été prononcée (TF 6B_685/2010 du 4 avril 2011; TF 6B_28/2008 du 10 avril 2008 c. 3.3.1).
3.3
En application de l'art. 43 CP, le juge peut suspendre partiellement l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté d'un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur (al. 1). La partie à exécuter ne peut excéder la moitié de la peine (al. 2). En cas de sursis partiel à l'exécution d'une peine privative de liberté, la partie suspendue, de même que la partie à exécuter, doivent être de six mois au moins. Les règles d'octroi à la libération conditionnelle (art. 86 CP) ne lui sont pas applicables (al. 3). Le sursis partiel est exclu si la peine privative de liberté dépasse trente-six mois (ATF 134 IV 1 c. 5.3.2).
3.4
Aux termes de l'art. 67 CP, si l'auteur a commis un crime ou un délit dans l'exercice d'une profession, d'une industrie ou d'un commerce et qu'il a été condamné pour cette infraction à une peine privative de liberté de plus de 6 mois ou à une peine pécuniaire de plus de 180 jours-amende, le juge peut lui interdire totalement ou partiellement l'exercice de cette activité ou d'activités comparables pour une durée de six mois à cinq ans s'il y a lieu de craindre de nouveaux abus (al. 1). L'interdiction d'exercer une profession défend à l'auteur d'exercer cette activité de manière indépendante, en tant qu'organe d'une personne morale ou d'une société commerciale ou au titre de mandataire ou de représentant d'un tiers. Si le danger existe que l'auteur abuse de son activité professionnelle pour commettre des infractions alors qu'il agit selon les directives et sous le contrôle d'un supérieur, l'exercice de cette activité lui est entièrement interdit (al. 2).
Selon l'art. 67a CP, l'interdiction d'exercer une profession a effet à partir du jour où le jugement qui la prononce entre en force. La durée de l'exécution d'une peine privative de liberté ou d'une mesure entraînant une privation de liberté n'est pas imputée sur celle de l'interdiction (al. 1). Si l'auteur n'a pas subi la mise à l'épreuve avec succès et si la peine prononcée avec sursis est exécutée ou que la réintégration dans une peine ou une mesure est ordonnée, la durée de l'interdiction d'exercer une profession court dès le jour où l'auteur est libéré conditionnellement ou définitivement ou dès le jour où la sanction est remise ou levée (al. 2).
Cette mesure vise à rendre plus difficile, voire même empêcher la répétition d'infractions déterminées et à protéger la collectivité contre de nouveaux abus (Bischovsky, in Roth/Moreillon (éd.), Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 3, ad art. 67 CP; ATF 78 IV 217; FF 1999 1911).
3.5
En l'espèce, la culpabilité d'E._ est lourde. A charge, il convient de tenir compte du fait que le prévenu ne s'est pas contenté de commettre des attouchements sur une seule personne mais a persévéré dans sa pratique sur une seconde victime. Son comportement a des conséquences dévastatrices pour des patientes ayant servi de cobayes à ses théories absurdes, dangereuses, inédites, non reconnues médicalement, prétentieuses et stupides en matière de psychiatrie, et surtout à leur mise en pratique. Son comportement a perduré sur de nombreuses années avec des actes toujours plus graves. Sentant la fragilité de ses victimes, il abusait de leur confiance en les isolant du monde extérieur afin qu'elles restent sous son emprise et son contrôle. Il a même été jusqu'à prescrire des médicaments pour tranquilliser Q._ et pouvoir la manipuler plus facilement. La prise de conscience est totalement absente, comme l'avait déjà relevé le Tribunal de première instance. Enfin, le prévenu n'a fait preuve d'aucun amendement. Bien au contraire, en fin d'audience d'appel, lorsqu'il lui a été demandé s'il avait quelque chose à ajouter, il a encore minimisé ses actes et fait preuve d'un mépris incommensurable en répétant ce qu'il avait déjà prononcé en première instance, soit qu'"il n'y a pas eu mort d'homme". A décharge, seul peut être retenu le fait qu'il a admis les jeux de rôle et les fessées.
Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, seule une peine privative de liberté, d'une quotité sévère, entre en considération; de plus, seule l'exécution d'une partie de cette peine est de nature à amener le prévenu à réaliser la gravité de son comportement et à prendre conscience du mal qu'il a fait. C'est à cette seule condition que l'on peut envisager un pronostic non entièrement défavorable et prononcer un sursis partiel.
Cette peine est complémentaire à celles, fermes, infligées en 2006 et 2009 pour des infractions de la LCR non négligeables; ces deux dernières peines totalisent trois mois et vingt-cinq jours. La Cour estime, comme les premiers juges, que si elle avait eu à connaître de l'ensemble de l'activité délictueuse en une seule fois, elle aurait infligé une peine de vingt-huit mois de privation de liberté dont la moitié aurait été ferme. La peine à infliger, complémentaire aux précédentes peines, est donc de deux ans et cinq jours. Comme un certain temps s'est écoulé depuis la commission des infractions, on peut envisager de réduire la part ferme à exécuter à neuf mois, en envisageant d'octroyer un sursis de cinq ans, ne serait-ce que pour protéger le prévenu contre lui-même.
En outre, E._ a commis ces infractions dans le cadre de sa profession. Dès lors, afin d'éviter de nouveaux abus, il y a lieu de prononcer une interdiction d'exercer toute forme de psychothérapie pour la durée maximale prévue, soit cinq ans.
En conséquence, au regard des infractions commises, de la culpabilité du prévenu et de sa situation personnelle, il convient de confirmer la peine fixée par les premiers juges en ce sens qu'E._ est condamné à une peine privative de liberté de deux ans et cinq jours, dont neuf mois ferme et le solde avec sursis pendant cinq ans, ainsi que de prononcer une interdiction d'exercer toute forme de psychothérapie pour une durée de cinq ans.
4.
L'appelant conteste devoir des dommages et intérêts à la plaignante D._. Dans la mesure où sa culpabilité est confirmée et que les actes qu'il a commis ont indéniablement causé une souffrance à la plaignante, il est justifié de maintenir le montant fixé à 20'000 fr. par les premiers juges au titre d'indemnité pour tort moral.
5
. En définitive, l'appel est partiellement admis en ce sens qu'E._ est libéré du chef d'accusation d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance au sens de l'art. 191 CP. Il est en revanche reconnu coupable de contrainte sexuelle au sens de l'art. 189 CP.
6.
Vu l'issue de la cause et l'arrêt du Tribunal fédéral du 29 juin 2012, les frais, comprenant l'émolument des jugements ainsi que les indemnités des avocats d'office, sont partiellement mis à la charge d'E._.
6.1
Ainsi, les frais du jugement rendu le 23 septembre 2011 par la Cour de céans, totalisant 6'655 fr. 60, comprenant les indemnités des avocats d'office par 2'721 fr. 60, TVA et débours compris, pour Me Nicolas Gillard et, par 1'584 fr., TVA et débours compris, pour Me Antonella Cereghetti Zwahlen, sont mis à la charge d'E._.
6.2
Les frais du présent jugement comprenant l'émolument du présent arrêt ainsi que les indemnités des avocats d'office ensuite du retour du Tribunal fédéral sont laissés à la charge de l'Etat.
Au vu de la complexité de la cause, des opérations mentionnées dans la liste des opérations, il convient d'admettre que le défenseur d'office de l'appelant, Me Nicolas Gillard, a dû consacrer 10 heures à l'exécution de son mandat ensuite du retour du Tribunal fédéral. L'indemnité sera dès lors arrêtée à 1'800 fr. et 50 fr. de débours, plus la TVA par 148 fr., soit un total de 1'998 fr., TVA et débours compris. Il convient également d'admettre que le conseil d'office de l'intimée, Me Antonella Cereghetti Zwahlen, a dû consacrer 10 heures à l'exécution de son mandat ensuite du retour du Tribunal fédéral. Son indemnité sera dès lors arrêtée à 1'800 fr., plus la TVA par 144 fr., soit un total de 1'944 fr., TVA et débours compris.
7.
Il s'avère que le dispositif communiqué après l'audience d'appel est entaché d'une erreur manifeste à son chiffre III en tant qu'il alloue à Me Nicolas Gillard une indemnité de défenseur d'office d'un montant de 4'571 fr. 60 au lieu de 4'719 fr. 60 (2'721 fr. 60 + 1'998 fr.). En application de l'art. 83 CPP, le dispositif sera rectifié d'office.
Le dispositif communiqué est également manifestement incomplet en tant qu'il omet de dire qu'E._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat une partie du montant des indemnités allouées en faveur des défenseurs d’office, par 2'721 fr. 60, TVA et débours compris, pour Me Nicolas Gillard, et par 1'584 fr., TVA et débours compris, pour Me Antonella Cereghetti Zwahlen, que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). En application de l'art. 83 CPP, le dispositif sera rectifié d'office par l'ajout d'un chiffre VI. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,012 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
c9e71497-d83d-42cb-86be-b3da05488448 | En fait :
A.
Par jugement du 7 mars 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a libéré L._ du chef d’accusation de violation simple des règles de la circulation routière (I), constaté que L._ s’est rendu coupable d’infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants, violation grave des règles de la circulation, ivresse au volant qualifiée, vol d’usage et conduite malgré un retrait du permis de conduire (II), condamné L._ à une peine privative de liberté de deux ans, sous déduction de 56 jours de détention avant jugement (III), suspendu l’exécution d’une partie de la peine privative de liberté arrêtée sous chiffre III portant sur une année et fixé à L._ un délai d’épreuve de cinq ans (IV), constaté que I._ s’est rendu coupable d’infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants (V), condamné I._ à une peine privative de liberté de quatre ans, sous déduction de 733 jours de détention avant jugement au 7 mars 2013 (VI), ordonné le maintien en détention pour des motifs de sûreté de I._ pour une durée de six mois, soit jusqu’au 7 septembre 2013 (VII), ordonné la confiscation et le maintien au dossier à titre de pièces à conviction des supports d’enregistrement qui y figurent déjà sous fiches n° 12610/09, 12633/09, 12647/09, 12666/09, 12712/09 et 12777/09 (VIII), arrêté l’indemnité du défenseur d’office de L._, l’avocat Laurent Fischer, à 17'431 fr. 20, débours et TVA compris (IX), arrêté l’indemnité du défenseur d’office de I._, l’avocat Laurent Moreillon, à 14'334 fr. 30, débours et TVA compris (X), mis une partie des frais de la cause à la charge des condamnés, par 33'767 fr. 20 à la charge de L._, ce montant comprenant l’indemnité de son défenseur d’office, arrêtée au chiffre IX ci-dessus et par 74'564 fr. 20 à la charge de I._, ce montant comprenant l’indemnité de son défenseur d’office, arrêtée au chiffre X ci-dessus, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (XI) et dit que le remboursement des indemnités arrêtées sous chiffres IX et X ne pourra être exigé des condamnés L._ et I._ que lorsque leurs situations économiques se seront améliorées et le permettront (XII).
B.
Par annonce d’appel du 8 mars 2013, suivie d’une déclaration d’appel motivée le 2 avril suivant, L._ s'est opposé à ce jugement. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à sa libération des chefs d’accusation relevant de la loi fédérale sur les stupéfiants. Il a en outre requis la traduction de la conversation téléphonique qu’il a eue le 12 janvier 2008 avec I._ (P. 72 ch. 2.3.1), la production du journal d’enquête (jgt., p. 40), l’audition des «
sources bien informées
» ayant initié l’action pénale et l’audition de son beau-fils, [...], à titre de témoin.
Par annonce d'appel du 11 mars 2013, puis déclaration d’appel motivée du 2 avril suivant, I._ s'est opposé à ce jugement. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à son acquittement et à sa libération immédiate, au versement en sa faveur d’une indemnité au sens de l’art. 429 CPP de 216'600 fr., correspondant à 733 jours de détention préventive et avant jugement à 200 fr. le jour, à 50'000 francs, pour tort moral subi et à 20'000 fr., pour la couverture des frais d’avocats privés. Il a en outre requis l’audition de X._, C._, A._, P._, O._ et Z._ à titre de témoins, ainsi que la retraduction de sa conversation au parloir du 3 mars 2008 avec L._ (P. 12, ch. 2.2.3).
Par courriers du 10 mai 2013, le Président de la Cour d’appel pénale a refusé d’ordonner l’administration des preuves requises faute pour les conditions de l’art. 389 al. 2 et 3 CPP d’être remplies.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.1
I._ est né le 1
er
juin 1968 en Turquie, pays dont il est ressortissant. Il y a effectué sa scolarité obligatoire et est devenu membre du PKK dès l’âge de 15 ans. Il a ensuite quitté la Turquie pour venir en Suisse et y déposer une demande d’asile qui a été rejetée. Il est toutefois resté en Suisse durant 26 ans, travaillant sur des chantiers et dans le domaine du déménagement. Il a été expulsé de Suisse vers la Turquie à la suite d’une des condamnations dont il a fait l’objet et qui seront citées ci-dessous. I._ s’est alors rendu en France au moyen d’un faux passeport et est revenu en Suisse afin d’y voir ses trois enfants, soit des jumeaux nés le 29 août 1996 et un garçon né le 30 juin 2003 de sa liaison avec A._. Il a déclaré avoir des dettes à hauteur de plusieurs milliers de francs pour des frais de justice.
Le casier judiciaire suisse de I._ fait état des condamnations suivantes :
- 17 mars 1994, Cour suprême du canton de Berne, 4 ans de réclusion pour crime contre la loi fédérale sur les stupéfiants du 3 octobre 1951 (LStup) et contravention à dite loi. Par décision du 28 juillet 1995, I._ a été mis au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du 15 septembre 1995, avec délai d’épreuve de
2 ans et assistance de probation. Cette libération conditionnelle a été révoquée le
17 novembre 1997 ;
- 18 juin 1997, Cour suprême du canton de Berne, 5 ans et 6 mois de réclusion pour crime contre la LStup, contravention à dite loi et violence ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires ;
- 16 mai 2000, Cour suprême du Canton de Berne, 15 jours d’arrêts, pour désagréments causés par la confrontation à un acte d’ordre sexuel. Par décision du 6 février 2001, I._ a été mis au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du 3 avril 2001, avec un délai d’épreuve de 2 ans pour les condamnations infligées les 17 mars 1994, 18 juin 1997 et 16 mai 2000. ll a également été expulsé de Suisse. La libération conditionnelle a été révoquée le 20 juillet 2004 ;
- 19 novembre 2001, Office des Juges d’instruction du Jura Porrentruy, 20 jours d’emprisonnement pour rupture de ban ;
- 6 mars 2002, Service régional des Juges d’instruction I Jura bernois-Seeland, Bienne, 30 jours d’emprisonnement, pour rupture de ban et violation des règles de la circulation routière ;
- 17 mars 2004, Cour d’assises, Neuchâtel, 10 ans de réclusion, pour faux dans les certificats, rupture de ban, crime et contravention à la LStup et délit contre la loi fédérale sur les armes.
Avant sa mise en détention préventive, dans le cadre de la présente affaire, I._ purgeait des peines privatives de liberté de 1 an, 8 mois, 12 jours, 30 jours, 1 jour d’arrêts et 10 ans de réclusion à la suite de plusieurs décisions judiciaires. Par décision du 13 novembre 2012, l’Office d’application des peines et mesures de la République et canton de Neuchâtel l’a mis au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du 15 décembre 2012. Cette libération conditionnelle était subordonnée au renvoi de I._ dans son pays d’origine, une interdiction d’entrer ou de s’établir en Suisse sans être au bénéfice d’une autorisation valable étant posée à titre de règle de conduite. Elle était en outre assortie d’un délai d’épreuve de 3 ans, 10 mois et 36 jours, correspondant au solde des peines à purger.
Dans le cadre de la présente affaire, I._ a été détenu préventivement du 3 mars 2009 au 12 décembre 2010, puis le Tribunal des mesures de contraintes a ordonné, par décision du 11 décembre 2012, sa mise en détention pour des motifs de sûreté à compter du 15 décembre 2012.
1.2
L._ est né le 1
er
janvier 1961 en Turquie, pays dont il est originaire. Devant le Tribunal de première instance, il a affirmé avoir perdu sa nationalité turque faute d’avoir effectué son service militaire. A l’issue de sa scolarité obligatoire, il a débuté une formation universitaire en gestion d’entreprise qu’il a abandonnée après deux ans. Après avoir tenu une pâtisserie durant deux ans, il est parti en Allemagne pour y travailler comme serveur durant trois années. Il s’est ensuite rendu en Roumanie où il a ouvert un restaurant qu’il a exploité durant quatre ou cinq ans, avant de retourner en Turquie. En 1998, il s’est rendu en Suisse pour y déposer une demande d’asile qui a été rejetée. Il est toutefois resté en Suisse et y a exercé diverses activités en particulier dans la restauration. Père de quatre enfants majeurs, issus d’un précédent mariage, il est marié à une ressortissante danoise et est titulaire d’un permis d’établissement de type C. Il travaille comme serveur à 60% dans un restaurant à Bâle, où il réside durant la semaine. Toutes les deux semaines il retourne au domicile conjugal dont le loyer mensuel s’élève à
1'600 francs. Ses primes d’assurance-maladie sont de 360 fr., par mois et il a évoqué une dette pour des primes impayées sans être en mesure de la chiffrer.
Le casier judiciaire suisse de L._ fait état des condamnations suivantes :
- 23 avril 2002, Office du Juge d’instruction III Bern-Mitelland, Berne, 18 jours d’emprisonnement avec sursis durant 2 ans, amende de 1'000 fr., pour conducteur pris de boisson ;
- 19 février 2003, Tribunal du cercle VIII Bern-Laupen, Berne, 42 jours d’emprisonnement avec sursis durant 3 ans, amende de 1'000 fr., pour conducteur pris de boisson, circuler malgré un retrait ou refus du permis de conduire, violation des règles de la circulation routière, sursis révoqué le 28 juin 2006 ;
- 28 juin 2006, Tribunal du cercle X Thun, 4 mois d’emprisonnement, pour ébriété qualifiée (à réitérées reprises), conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait et violation des règles de la circulation routière.
Le 22 décembre 2006, L._ a été mis au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du 15 février 2007, avec délai d’épreuve d’un an et assistance de probation pour les condamnations des 19 février 2003 et 28 juin 2006.
L’extrait du fichier ADMAS concernant L._ comporte onze inscriptions depuis le 5 avril 2002. Il s’agit essentiellement de retraits du permis de conduire pour ébriété. Le permis de conduire lui a été retiré définitivement à compter du 1
er
septembre 2009, pour conduite malgré retrait ou interdiction.
Pour les besoins de la cause, L._ a été détenu avant jugement du 12 mars au 6 mai 2009, soit durant 56 jours.
2.1
En 2007, I._ se trouvait aux Etablissements de la Plaine de l’Orbe (ci-après : les EPO) pour y purger la peine de réclusion de 10 ans prononcée à son encontre le 17 mars 2004 par la Cour d’assises de Neuchâtel. Il a convaincu son codétenu X._ de lui prêter la somme de 25'000 fr. (PV aud. 15, R. 13). Ce montant a été remis le 28 septembre 2007 à P._, neveu de I._, par l’intermédiaire de [...], qui s’occupait de gérer le compte bancaire de X._ (P. 45/2 ; PV aud. 19, R. 2 ; PV aud. 25, lignes 19 à 31).
En janvier 2008, la police de sûreté vaudoise a été informée qu’un trafic de drogue entre la Turquie et la Suisse via la France s’organisait depuis les EPO et qu’une livraison identique avait été organisée en 2006. Ce trafic impliquait I._, X._ et L._, à des degrés divers dans l’organisation d’un transport de plusieurs kilos d’héroïne. R._, ancien codétenu libéré en septembre 2007, était l’expéditeur de la marchandise depuis la Turquie. La consultation du fichier des visites aux EPO a permis d’établir qu’en 2006 L._ avait en effet rendu visite à deux reprises à I._, soit le 11 juillet et le
4 octobre 2006. Le 9 janvier 2008, L._ a encore rendu visite à I._, de sorte que les enquêteurs ont pensé à l’organisation d’un nouveau transport (P. 4). Une enquête a dès lors été ouverte le 14 février 2008.
C’est ainsi que dès le 22 février 2008 les conversations de I._ ont été enregistrées lors de ses appels téléphoniques passés depuis le publiphone de sa division, soit le numéro [...]. Le numéro de portable [...] appartenant à L._ a aussi été placé sous surveillance. Les conversations de I._ durant les visites au parloir ont également été enregistrées. Ces diverses mesures techniques, qui se sont déroulées entre le 17 février et le 14 juillet 2008, ont fait l’objet de deux rapports de police, respectivement datés du 18 juin 2008 (P. 12) et du 21 juillet 2009 (P. 72). Leur analyse a permis d’établir ce qui suit :
Au début de l'année 2008, I._ a contacté à plusieurs reprises R._ qui se trouvait en Turquie. Lors de ces conversations, les deux hommes ont convenu, à mots couverts, qu’à réception d’un montant de 20'000 ou 30'000 francs de la part de I._, R._ préparerait une voiture pour acheminer une importante quantité d’héroïne de la Turquie vers la Suisse (P. 12 ch. 2.2.7,
ch. 2.2.10, ch. 2.5.1). P._ – qui avait reçu 25'000 fr. de la part de I._ en septembre 2007 – a, à la demande de ce dernier, remis à L._ la somme de 3'000 francs. L._ est alors parti en Turquie au mois de janvier 2008 (jgt., p. 43 ; PV aud. 6 p. 2, PV aud. 7, R. 4 ; jgt., p. 11 ; PV aud 17, R. 16, PV aud. 23, ligne 16).
Le 3 mars 2008, L._ est venu rendre visite à I._ en prison. A cette occasion, les deux hommes ont exprimé leur certitude que le téléphone portable de L._ était sur écoute et qu’ils étaient écoutés même en prison. I._ a notamment dit «
je sais des combines. Ca rapporte beaucoup et sans risque
», que «
R._ et [...] ont quelqu’un qui est d’accord de faire le trajet pour 20-30 mille.
» Il a également demandé à L._ de trouver G._, un ancien codétenu sorti de prison, et de lui téléphoner pour lui dire qu’il faut «
qu’il se fasse fermer la bouche. Sinon, il joue avec sa vie et la vie de ses proches.
» (P. 12 ch. 2.2.4).
Le 5 mars 2008, L._ s'est une nouvelle fois déplacé en Turquie, où il a rencontré R._ qui lui a remis deux trainings à l’attention de I._ et de X._. L._ a ensuite quitté Istanbul en voiture, avec son fils et sa fille ainsi que son gendre, [...], pour se rendre à Athènes. Le 10 mars 2008, L._ a pris l’avion seul à destination de Rome, alors que le reste du groupe a poursuivi le voyage en voiture en direction de Rome. Les protagonistes se sont retrouvés à la gare de Rome. En raison d’une panne de voiture, ils sont restés en Italie deux jours, logeant chez le frère de l’ex-épouse de L._. Laissant son fils chez ce parent en Italie, L._ est rentré en Suisse le
12 mars 2008 avec sa fille et [...]. Interpellés à la douane de Chiasso vers 22h40, leur voiture a été fouillée sans qu’aucun produit stupéfiant ne soit découvert. L._ et ses compagnons ont dès lors été laissés aller.
Le 8 mars 2008, I._ a contacté E._, ancien co-détenu expulsé de Suisse et vivant à Evian. Il lui a notamment dit «
il faut garder nos distances avec ces gens-là...Je ne savais pas avant...Tu changes de numéro si tu veux...Quant il t’appelle...Son nom, c’est G._ ( [...])...Il dénonce les gens ici. Il vient vers toi, il te propose de faire quelque chose et tout de suite après, il va à la direction.
» (P. 12 ch. 2.2.9).
Le 16 mars 2008, I._ a reçu la visite de A._ qui était accompagnée de leur fils. Les bruits ambiants (musique forte) ont rendu difficilement compréhensible l’entier de leur conversation qui était au surplus fréquemment entrecoupée par les jeux et les paroles de l’enfant. Il est toutefois clairement ressorti que les deux protagonistes ont parlé de «
l’arrivée de 200'000 fr. »
ou de
«
2 semaines
», que I._ a tenté de convaincre A._ de se rendre à Evian pour apporter un paquet contenant de l'argent à E._, qui devait en échange lui remettre une valise. Il a transmis à A._ le numéro de téléphone portable de E._ et lui a parlé d’une «
cachette que même le chien ne trouve pas
». A._ a toutefois refusé de s'impliquer dans cette transaction, déclarant «
je ne veux pas d’histoires. De nouveau, tu commences à prendre des gens et à mettre de l’argent à gauche à droite
». Les intéressés ont parlé d’argent et ont dit que «
sa marchandise est bonne
» (P. 12 ch. 2.4.1).
Lors d’une visite le 27 mars 2008, I._ a chargé L._ de prendre contact avec E._ pour lui remettre un montant de 25'000 fr. ou 30’000 fr., précisant qu’il «
faut faire sortir le maximum
» (P. 12 ch. 2.4.2).
Le 11 mai 2008, R._ a été arrêté en compagnie de quatre comparses au Kosovo, alors qu'il était en possession de 10 kg d'héroïne et de 5 kg de produit de coupage.
Le 21 mai suivant, X._ a parlé de cette arrestation lors d’une conversation téléphonique avec un certain [...], expliquant qu’il avait «
beaucoup d’espoir sur le type qui est parti d’ici
» mais qu’il «
est tombé (arrêté là-bas (Kosovo)
» et que c’est là-bas «
qu’il avait la cache. Je me suis brûlé moi (perdu de l’argent)
» et concluant sa conversation en disant «
Tu fais attention quand tu parles au téléphone.
» (P. 12 ch. 2.5.5). Le même jour, I._ a téléphoné à A._. Il ressort de cette conversation qu’il avait appris l’arrestation de R._ par le biais d'une chaîne de télévision kosovare (P. 12 ch. 2.5.6).
Par commission rogatoire du 21 juillet 2008, le juge d’instruction de l’arrondissement du Nord vaudois a requis des autorités kosovares qu’elles procèdent à l’audition de R._ et de ses complices, notamment au sujet de la provenance et de la destination de la drogue et du produit de coupage saisis en leur possession et confrontent R._ aux conversations et messages SMS enregistrés au cours des surveillances téléphoniques mises en œuvre dans le cadre de l’enquête menée à l’encontre de I._ (P. 15).
I._ et L._ contestent leur implication dans un trafic d’héroïne.
2.2 a)
Le samedi 20 juin 2009, durant la soirée, à [...], L._ a pris le volant de la voiture Mercedes Benz immatriculée BE- [...] de son épouse, à l'insu de celle-ci, alors même que son permis de conduire lui avait été retiré pour une durée indéterminée à compter du 14 octobre 2005 et qu'il se trouvait sous l'influence de l'alcool (taux d'alcoolémie le plus favorable : 1.89 g ‰ au moment des faits). Sur l'autoroute A1 en direction de [...], il a dépassé par la droite un automobiliste qui se déplaçait normalement devant lui.
b)
Le mardi 1
er
septembre 2009, vers 15h00, à [...], L._ a pris le volant de la voiture Mercedes Benz immatriculée BE- [...] de son épouse, à l'insu de celle-ci, malgré la mesure de retrait du permis de conduire dont il faisait l'objet depuis le 14 octobre 2005. Vers 16h20, il a été interpellé par une patrouille de police à [...].
c)
Le vendredi 30 octobre 2009, durant la soirée, L._ a conduit la voiture Mercedes Benz immatriculée BE [...], à l'insu de son épouse, malgré
la mesure de retrait du permis de conduire dont il faisait l'objet depuis le
14 octobre 2005.
d)
Le samedi 31 octobre 2009, vers 01h55, alors qu'il circulait sur [...], à [...], L._ a fait l'objet d'un contrôle-radar qui a permis de constater qu'il se déplaçait à une vitesse de 76 km/h (marge de sécurité déduite), dépassant ainsi de 26 km/h la vitesse maximale autorisée dans les localités, soit
50 km/h.
L._ a admis dans leur intégralité les infractions à la loi sur la circulation routière décrites ci-dessus (ch. 2.2). Il a confirmé être sous le coup d’un retrait définitif du permis de conduire et s’est dit conscient qu’il ne devait plus conduire. Il a en outre présenté ses excuses et regrets.
C.
Aux débats d’appel, les parties n’ont pas renouvelé leurs requêtes de mesures d’instruction. Elles ont au surplus confirmé leurs conclusions d’appel.
Le Ministère public a conclu au rejet des appels de I._ et de L._. | En droit :
1.1
Selon l’art. 399 al. 1 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 3 ad art. 399 CPP). La déclaration d’appel doit, quant à elle, être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 399 al. 3 CPP). L'appel joint doit être interjeté dans un délai de vingt jours dès la réception de la déclaration d'appel (art. 400 al. 3 CPP).
1.2
Interjetés dans les formes et délai légaux par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels
de I._ et de L._ sont recevables.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, op. cit., n. 19 ad art. 398 CPP).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
3.
I._ et L._ soulèvent des griefs similaires dans leurs appels respectifs, contestant tous les deux leur implication dans un trafic d’héroïne.
Ils reprochent aux premiers juges de les avoir condamnés sur la base de témoignages anonymes, sans qu’ils aient pu être confrontés à leurs dénonciateurs, ce qui constituerait, selon eux, une violation de l’art. 6 § 1 et § 3 let. d CEDH (Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; RS 0.101). I._ cite en particulier un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme [...] c. Suisse du 6 décembre 2012, requête n° 25088/07.
3.1
Aux termes de l’art. 6 § 1 CEDH, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.
Aux termes de l'art. 6 § 3 let. d CEDH, tout accusé a le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir la citation et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. Ce droit découle aussi de l'art. 29 Cst. (TF 6B_22/2012 du 25 mai 2012, consid. 3.1 et les réf. citées).
3.2
Contrairement à ce que soutiennent les appelants, leur condamnation ne s’appuie pas sur des témoignages anonymes, mais sur les résultats d’une enquête menée durant plusieurs mois. En effet, les renseignements des informateurs anonymes n’ont été que le déclencheur d’une enquête distincte qui a mené à l’inculpation des appelants, comme l’a d’ailleurs confirmé l’inspecteur Z._ aux débats de première instance (jgt., p. 41). Aucun élément concret ne permet de douter de la véracité de cette affirmation. Ce n’est ainsi que sur la base d’autres moyens de preuves, qui seront discutés plus avant, que les condamnations ont été prononcées.
La Cour de céans relève en outre que I._ lui-même prétend connaître le nom du ou des informateurs, qu’il a cité aux débats (jgt., p. 47), et à l’égard desquels il a formulé des menaces (P. 12 ch. 2.2.4). Ces éléments rendent sans objet la requête des appelants visant à connaître le nom du ou des informateurs. Compte tenu de ce qui précède, la référence à l’arrêt de la CEDH du
6 décembre 2012 est dénuée de pertinence. Ce grief, mal fondé, ne peut qu’être rejeté.
4.
Les appelants soutiennent que les premiers juges ont pris en compte des moyens de preuves obtenus illicitement, soit les enregistrements antérieurs au 21 février 2008, date de l’autorisation de mise en œuvre d’une surveillance en temps réel accordée par le juge d’instruction en charge du dossier (P. 8). L._ requiert leur retranchement du dossier.
4.1
L’art. 141 al. 2 CPP dispose que les preuves qui ont été administrées d’une manière illicites ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves.
Conformément à l’art. 84 al. 2 CP, les relations d’un détenu avec le monde extérieur à la prison peuvent être surveillées.
L’art. 10 de la loi vaudoise sur l’exécution des condamnations pénales du 4 juillet 2006 (LEP ; RSV 340.01) prévoit notamment que les établissements pénitentiaires doivent collaborer avec les autorités, institutions et organes ayant à connaître de la situation du condamné, en leur fournissant à cet égard toutes les informations utiles et en leur soumettant toutes les propositions opportunes (al. 3). Sont définis dans un règlement le statut des condamnés et le régime de détention qui leur est applicable (al. 4).
Aux termes de l’art. 93 al. 5 du Règlement sur le statut des condamnés exécutant une peine privative de liberté et les régimes de détention applicables
du 24 janvier 2007 (RSC ; RSV 340.01.1), les conversations des détenus depuis les cabines téléphoniques mises à leur disposition sont enregistrées et peuvent être contrôlées.
4.2
En l’occurrence, l’autorisation d’enregistrement des lignes téléphoniques utilisées par I._ et par L._ n’a effectivement été délivrée qu’après une requête du 21 février 2008, postérieure aux premiers enregistrements tels qu’ils figurent dans les rapports de police (P. 12 et P. 72). S’agissant des conversations au parloir, il est également exact que, si une autorisation de surveillance avait été requise du Tribunal d’accusation pour la première visite d’L._ à I._ le 3 mars 2008, aucune autorisation n’a été requise pour sa visite du 27 mars suivant (P. 12 ch. 2.4.2), ni pour celle de A._ le 16 mars 2008 (P. 12 ch. 2.4.1).
Avec les premiers juges, il faut cependant admettre la licéité de principe de l’enregistrement des conversations téléphoniques opérées antérieurement au
21 février 2008, conformément aux dispositions rappelées ci-dessus (jgt., pp. 5-6). Certes, les dispositions citées par les premiers juges ne sont que règlementaires. Toutefois, outre l’art. 10 al. 4 LEP qui constitue la base légale justifiant l’adoption de ces règlements, il faut constater que l’art. 84 al. 2 CP prévoit une exception aux règles de confidentialité lorsqu’il s’agit, comme en l’espèce, de mesures de procédure pénale (FF 1999, p. 1925). Enfin, il convient de tenir compte du facteur «
proportionnalité
» qui joue un rôle déterminant. En effet, on se trouve en présence d’un détenu qui a été condamné à trois reprises pour des crimes contre la LStup, à un total de 19 années de privation de liberté et qui est soupçonné d’organiser un nouveau trafic. Quand bien même des enregistrements de conversations constituent-ils une violation de la sphère privée, cette violation est dans le cas d’espèce amplement justifiée par la gravité des infractions commises et envisagées par les appelants. On relève d’ailleurs que ces derniers se doutaient bien que leurs conversations étaient surveillées «
même en prison
» (P. 12 ch. 2.2.4). Partant, l’enregistrement des conversations antérieures au 21 février 2008 n’avait à l’époque aucun caractère illicite. Ce grief, mal fondé, doit être rejeté.
5.
Les appelants soutiennent que les premiers juges ont abusé de leur pouvoir d’appréciation et que les rapports d’enquête ont été instruits systématiquement à charge, en violation du principe de la présomption d’innocence. Ils se réfèrent aux termes employés par les premiers juges lorsque ces derniers ont indiqué s’être forgés leur conviction «
non sans hésitation
» pour prononcer une condamnation.
5.1
Aux termes de l’art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (al. 3).
La présomption d'innocence, qui est garantie par l'art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 du 23 mars 2010, c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38, c. 2a ; TF 6B_18/2011 du 6 septembre 2011
c. 2.1).
5.2
Les premiers juges ont fondé leur conviction sur les éléments suivants : les contrôles téléphoniques ordonnés sur la cabine n° [...] des EPO et sur le n° [...] du téléphone portable de L._ dont on retrouve des retranscriptions qui ne laissent pas place au doute dans les différents rapports de police figurant au dossier, plus particulièrement ceux du 18 juin 2008 (P. 12) et du 21 juillet 2009 (P. 72) ; les enregistrements des visites entre I._ et L._ ainsi que A._, plus particulièrement sa visite du 16 mars 2008 ; l’audition de l’inspecteur principal adjoint Z._ aux débats corroborant les constatations faites en cours d’enquête ; les mesures d’instruction auxquels le tribunal a procédé aux débats ; les déclarations évolutives, contradictoires et à géométrie variable de L._ et de A._ et enfin les différentes auditions réalisées en cours d’enquête et aux débats (jgt., pp. 57-58).
Cette analyse, convaincante, ne prête pas le flanc à la critique. La Cour de céans reprend notamment à son compte le raisonnement des premiers juges s’agissant des déclarations de A._ qu’ils ont retenues (jgt. pp. 61 à 63). Cette dernière a été entendue à quatre reprises en cours d’enquête. Lors de sa première audition le 18 mars 2009, elle a admis que I._ voulait qu’elle aille amener de l’argent, qu’un ami devait lui donner, à E._, précisant qu’il ne voulait pas qu’elle envoie cet argent par la poste à cause des traces (PV aud. 22
R. 16 p. 5). Elle a également admis que la somme d’argent devait être importante et qu’elle ne savait pas ce qui devait être dans la valise qu’elle aurait dû récupérer à Evian, mais qu’il s’agissait de drogue et que I._ lui avait dit qu’elle ne courrait aucun risque puisque même un chien ne trouverait pas la cachette (PV aud. 22 R. 16 p. 6). S’agissant de sa conversation téléphonique avec I._ le 21 mai 2008, elle a expliqué qu’elle espérait toucher de l’argent si son trafic avait réussi, sans toutefois connaître les détails de l’affaire, ni la quantité de drogue concernée. Elle a indiqué qu’elle se doutait bien que I._ était retombé dans le trafic de drogue (PV aud. 22 R. 17). Entendue par le juge d’instruction le 18 septembre 2009, elle a confirmé ses déclarations (PV aud. 24). Lors de sa première audition aux débats de première instance le 17 novembre 2010, elle a confirmé avoir refusé de se rendre à Evian pour y rencontrer E._ et lui donner de l’argent en échange d’un paquet (jgt., p. 9). Cela résulte d’ailleurs de manière claire de l’enregistrement de sa conversation avec I._ au parloir en mars 2008 (P. 12 ch. 2.4.1). Les revirements dans ses dernières déclarations du 11 juillet 2012 (jgt., p. 31) ne sont dès lors pas fiables et ne peuvent s’expliquer que par la volonté de A._ de protéger le père de son enfant ou de se protéger elle-même contre des représailles, qui au vu des diverses menaces mentionnées dans les écoutes téléphoniques, ne relèvent pas que de l’imaginaire.
S’agissant de l’affectation des 25'000 fr. que X._ a prêtés à I._, les intéressés ont admis que 3'000 fr. ont été remis à L._. La remise directe d’un tel montant en mains de R._ n’est certes pas établie, mais rien ne démontre non plus que cet argent a été utilisé pour payer l’avocat de I._ dans le cadre d’une demande de révision, contrairement aux explications fournies sur ce point par I._ (jgt., p. 46). X._ avait indiqué à [...] que cet argent devait servir à mettre sur pied un domaine agricole au Kosovo (PV aud. 25, lignes 21 à 22), alors que P._ a expliqué avoir versé 400 fr. ou 500 fr. à l’avocat de I._, 3'000 fr. à L._ pour payer les frais médicaux de sa fille en Turquie et enfin 5'000 fr. à un inconnu Kurde, à Yverdon-les-Bains (jgt., p. 11). I._ a indiqué que P._ avait dû remettre 4'000 fr. à son précédent conseil, Me Abderrahim et qu’il avait également payé un avocat privé à Neuchâtel, Me Kramer, à qui il avait versé 2'500 fr. (jgt., p. 46). R._ a quant à lui affirmé que l’appelant lui aurait prêté 15'000 fr. pour acheter du textile s’il ne les versait pas à son avocat (PV aud. 12 ; PV aud. 27, R. 2 et 4b et 4c). Toutes ces explications se contredisent ; celles données par R._, relatives au financement d’un prétendu commerce de textiles sont insoutenables dans la mesure où s’il s’était réellement agi d’un commerce de textiles, les conversations auraient été toutes différentes. En tout état de cause, pour qu’un prévenu prête 25'000 fr. à un autre prévenu qu’il connaît à peine, c’est que des promesses sérieuses ont été faites quant à l’utilisation des fonds. En l’absence d’explication crédible sur l’affectation de cette somme, et compte tenu des éléments décrits plus haut, il n’y a en définitive pas d’autre explication plausible que celle de la participation de I._ au financement d’un trafic d’héroïne organisé par R._. On retiendra les déclarations faites par le témoin C._ aux débats de première instance, lorsqu’il indique qu’il ne veut pas s’exprimer «
en raison de problèmes de survie
» (jgt., p. 18) ainsi que les menaces proférées par I._ à l’encontre de G._ «
qu’il se fasse fermer la bouche. Sinon, il joue avec sa vie et la vie de ses proches.
» (P. 12 ch. 2.2.4). Ces propos démontrent clairement que les protagonistes avaient quelque chose à cacher.
Il n’est en outre pas décisif que X._ ait été libéré de l’accusation pénale dirigée contre lui, dans la mesure où on ignore si les juges qui ont eu à examiner son dossier disposaient tous les éléments dont dispose la Cour de céans pour statuer.
Enfin, contrairement à ce qu’affirme l’appelant I._, les écoutes téléphoniques démontrent de manière explicite ses liens avec R._. Le fait que ce dernier n’ait jamais impliqué I._ n’est pas déterminant. En effet, alors même qu’il avait été arrêté en possession de 10 kg d’héroïne et de 5 kg de produit de coupage, R._ a continué de nier les faits qui lui étaient reprochés et pour lesquels il a été condamné une peine privative de liberté de onze ans. La crédibilité de ses déclarations est dès lors toute relative.
Quant à L._, ses explications fluctuantes et contradictoires s’agissant de ses voyages en Turquie sont de nature à jeter le discrédit sur ses propos et ne permettent pas d’apprécier de manière claire le but de son voyage en Turquie au mois de mars 2008. La Cour de céans retient qu’il a d’abord contesté avoir voyagé en Turquie au mois de mars 2008, n’admettant que le voyage effectué en janvier 2008 (PV aud. 5 R. 8). Il a également contesté avoir fait quelque chose pour une de ses connaissances à l’occasion de ces voyages (PV aud. 5 R. 9), pour finalement admettre avoir ramené deux trainings, des chaussettes et des chemises de corps d’Istanbul pour I._ (PV aud. 6). Il a ensuite donné des explications fluctuantes s’agissant des buts de son voyage en Turquie en mars 2008 (PV aud. 7 R. 4 ; PV aud.16 R. 2). Ce n’est que confronté aux déclarations de R._
(PV aud. 11, R. 27) qu’il a finalement admis avoir rencontré ce dernier en Turquie (PV aud. 16 R. 12) précisant même l’avoir vu à deux reprises (jgt., p. 43). Enfin ses explications s’agissant de ses contacts avec E._ ont également varié en cours d’enquête (PV aud. 7, R. 7 ; PV aud. 21, R. 2 ; jgt., p. 43). Il n’est certes pas déterminant que l’appelant ait parlé une fois de son fils et une fois de sa fille s’agissant du voyage qu’il a effectué en Turquie en janvier 2008, une erreur de traduction étant toujours possible. En revanche, la seule explication plausible qui peut être donnée aux autres omissions et mensonges formulés en cours d’enquête est que L._ veut cacher l’existence de la mission d’intermédiaire qui lui avait été confiée par I._.
Compte tenu de ce qui précède, l’expression «
non sans hésiter
» - ambiguë sinon inadéquate – figurant dans le jugement (jgt., p. 57) doit être replacée dans le contexte des principes de la présomption d’innocence et de la libre appréciation des preuves rappelés ci-dessus. La portée exacte de cette expression importe d’ailleurs peu, la Cour d’appel pénale ayant le devoir d’établir son propre état de fait sur la base de sa propre appréciation des preuves administrées. Les premiers juges ont procédé à un examen extrêmement minutieux et approfondi des éléments à leur disposition (jgt., pp. 57 à 64), et ils se sont posés au terme de cet examen la question de savoir si une condamnation se justifiait ou non.
L’argumentation des appelants, qui tentent de démonter séparément chacun des éléments invoqués par les premiers juges dans le cadre du raisonnement ayant conduit à la déclaration de culpabilité, n’est pas convaincante. Fondés sur un faisceau d’éléments les premiers juges ont acquis la conviction, sans doute raisonnable et sans abuser de leur pouvoir d’appréciation, que les appelants sont coupables des faits qui leurs sont reprochés.
La Cour d’appel pénale parvient à la même conclusion de culpabilité que les premiers juges s’agissant tant de I._ que de L._. Leur condamnation n’est dès lors pas contraire au principe de présomption d’innocence et doit être confirmée. Ce grief, mal fondé, doit être rejeté.
Tant la nature que la quotité des peines, qui ne sont d’ailleurs pas contestées par les appelants, ont été fixées en tenant compte des critères déterminants consacrés à l’art. 47 CP. Les peines prononcées sont adéquates au regard des infractions commises, de la culpabilité des appelants et de leur situation personnelle et doivent dès lors être confirmées. Il en va de même, en ce qui concerne L._, de la fixation de la partie de la peine à exécuter.
6.
Il convient encore de relever que la détention subie par I._ depuis le jugement de première instance sera déduite. Son maintien en détention à titre de sûreté sera ordonné au regard du risque de fuite avéré compte tenu de sa situation personnelle et de l’importance de la peine prononcée.
7.
En définitive, les appels de I._ et de L._ sont rejetés. Le jugement rendu le 7 mars 2013 par le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Broye et du Nord vaudois est intégralement confirmé.
Chacun des appelants succombant entièrement sur ses conclusions, les frais communs de la procédure d'appel, par 3'010 francs (art. 422 CPP; art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010 ; RSV 312.03.1]), doivent être mis à leur charge par moitié chacun (art. 428 al. 1, 1
ère
phrase, CPP). Chacun des appelants supportera en outre l'indemnité allouée à son défenseur d'office pour la procédure d'appel.
Au vu de l'ampleur et la complexité de la cause, une indemnité pour la procédure d’appel de 1'522 fr. 80, TVA et débours inclus, est allouée à Me Laurent Moreillon.
En ce qui concerne Me Fischer, les 32 heures annoncées au titre de la rédaction d’un appel paraissent tout à fait excessives s’agissant d’un avocat qui connaissait le dossier pour avoir assisté aux audiences successives tenues dans le cadre des débats de première instance. L’allocation d’une indemnité d’appel de
2'494 fr. 80, TVA et débours inclus, correspondant à un mandat de 12 heures, est adéquate.
I._ et L._ ne seront tenus de rembourser à l’Etat le montant des indemnités en faveur de leur conseil d’office que lorsque leur situation financière le permettra
. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
ca07f7f4-1ee6-4737-8846-8e2b8562d5ac | En fait :
A.
Par jugement du 11 juin 2013, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de La Côte a constaté que A.T._ s’est rendu coupable de lésions corporelles simples, lésions corporelles simples qualifiées, mise en danger de la vie d’autrui, menaces, contrainte, viol et insoumission à une décision de l’autorité (I), l’a libéré des chefs d’accusation de voies de fait, d’appropriation illégitime et d’utilisation abusive d’une installation de télécommunication (II), l’a condamné à une peine privative de liberté de 3 ans (III), l’a condamné à une amende de 2'000 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non paiement de l’amende étant fixée à 20 jours (IV), a dit que A.T._ versera à B.T._ la somme de 10'000 fr., avec intérêt à 5% l’an dès le 4 janvier 2011, à titre d’indemnité pour tort moral (V), a arrêté l’indemnité due à Me Rapahël Tatti, défenseur d’office de A.T._, à 6'792 fr. 55, TVA et débours compris (VI), a arrêté l’indemnité due à Me Marie Pomme Moinat, défenseur d’office d’B.T._ à 9'072 fr., TVA et débours compris, sous déduction du montant de 3'500 fr. reçu le 13 janvier 2012 à titre d’indemnité intermédiaire (VII), a arrêté les frais de la présente cause à 27'813 fr. 35, y compris les indemnités allouées à Me Raphaël Tatti, par 6’792 fr. 55, débours et TVA compris, à Me Dominique Alvarez, par 4'373 fr. 80, débours et TVA compris, et à Me Marie-Pomme Moinat, par 9'072 fr., débours de TVA compris (VIII), et a mis les frais de la présente cause par 18'741 fr. 35, comprenant les indemnités allouées à Mes Raphaël Tatti et Dominique Alvarez, à la charge de A.T._. L’indemnité due à Me Marie-Pomme Moinat a été laissée à la charge de l’Etat (IX).
B.
Le 13 juin 2013, A.T._ a formé appel contre ce jugement. Par déclaration d’appel motivée du 30 juillet 2013, il a conclu, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens que seule l’infraction d’insoumission à une décision de l’autorité au sens de l’art. 292 CP est retenue à son encontre, seule une peine d’amende de 1'000 fr. avec sursis étant prononcée, subsidiairement la peine de substitution étant fixée à 10 jours (I), qu’aucune indemnité pour tort moral n’est due à B.T._ (II) et que seul un dizième des frais de la cause est mis à la charge de A.T._ le solde étant laissé à la charge de l’Etat (III). À titre subsidiaire, dans l’hypothèse où une peine privative de liberté devait être prononcée, il a requis qu’elle soit assortie du sursis complet.
Par courrier du 13 août 2013, le Ministère public a déclaré s’en remettre à justice s’agissant de la recevabilité de l’appel de A.T._ et a déposé une déclaration d’appel joint concluant à la condamnation de A.T._ à une peine privative de liberté de 4 ans (I) et à la mise à sa charge des frais de justice (II), le jugement étant confirmé pour le surplus.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
Né le 15 avril 1977 au Kosovo, où il a vécu jusqu’à l’âge de 11 ou 12 ans, A.T._ a été élevé par sa grand-mère. Puis, il a rejoint ses parents, lesquels s’étaient établis à Lavigny et chez qui il vit toujours actuellement. Après sa scolarité obligatoire, il a effectué un apprentissage de peintre en bâtiment et obtenu son CFC. Depuis 2007, il travaille comme salarié dans l’entreprise de son frère, [...] à Lavigny et perçoit un salaire mensuel net se situant entre 4'300 fr. et 4'500 francs. Il a des dettes pour plus de 20'000 francs.
En 2000, A.T._ a fait la connaissance de B.T._ à Hambourg. Le couple s’est marié en 2002 et s’est installé à Lavigny, chez les parents du prévenu. Deux enfants sont issus de leur union : [...], née en 2004 et [...], né en 2007. Après être repartie auprès de sa famille, en octobre 2007, B.T._ est revenue au domicile conjugal au printemps 2008, puis a vécu dans un appartement que le prévenu louait pour elle, à Morges. Le couple a divorcé en août 2008, la garde des enfants étant confiée au père. En 2009, le prévenu s’est remarié. Il a divorcé de sa deuxième épouse en 2011. De cette union est né un enfant, pour lequel il s’acquitte d’une pension mensuelle de 400 francs.
Son casier judiciaire ne comporte aucune inscription. A.T._ fait actuellement l’objet d’une enquête pénale diligentée par le Ministère public de La Côte pour utilisation abusive d’une installation de télécommunication et menaces, ensuite d’une plainte déposée par le président du [...].
2.
A Lavigny, au domicile conjugal, puis à Morges, entre décembre 2006, les faits commis antérieurement étant prescrits, et le mois d’août 2009, la poursuite d’office se poursuivant jusqu’à une année après le prononcé du divorce, A.T._ a frappé régulièrement B.T._ sur le corps, en moyenne une fois par semaine, et à une reprise sur le visage, avec ses mains et au moyen d’autres objets, tels que ceinture ou câble, laissant ainsi souvent des marques de coups. B.T._, qui vivait sous l’emprise de son ex-époux au domicile de ses beaux-parents, n’a jamais consulté de médecin suite aux coups reçus, par peur.
B.T._ a déposé plainte le 14 janvier 2011, à la suite de l’intervention de la police, à son domicile, sur appel d’un de ses amis.
3.
A Morges, au domicile de B.T._, entre l’été 2008, soit depuis leur divorce, jusqu’au 12 janvier 2011, A.T._ a forcé son ex-épouse à entretenir des relations sexuelles complètes avec lui, sans préservatif, à raison d’une fois par semaine en moyenne. Bien que la victime lui ait signifié verbalement, en pleurant, qu’elle n’était pas consentante à de tels actes, le prévenu, qui s’énervait, arrivait à ce qu’elle se laisse faire sans opposer de résistance, par crainte de se faire battre.
4.
A Morges, avant 2005, à trois ou quatre reprises, A.T._ a placé un couteau contre le cou de B.T._. Il s’agissait d’un couteau plus gros que ceux qui sont normalement utilisés en cuisine et qui se trouvait sur l’armoire de leur chambre à coucher.
5.
A Morges, en décembre 2010, A.T._ a appelé B.T._ sur son téléphone portable et lui a demandé qui étaient les deux hommes qui se trouvaient derrière elle, alors qu’elle sortait d’un rendez-vous chez son avocate. La plaignante a alors aperçu le prévenu derrière la gare qui la surveillait. Tous deux se sont rendus à pieds au domicile de B.T._. A cet endroit, A.T._ est revenu sur la présence de ces deux hommes que la plaignante n’avait pas remarqués. Il a sorti son pistolet caché sous son t-shirt et l’a pointé sur la tempe de B.T._, tout en la sommant de passer aux aveux. Après qu’elle lui a assuré qu’elle ne voyait personne, le prévenu a baissé son arme et l’a posée sur la table, tout en lui déclarant que la prochaine fois, il la tuerait.
6.
A Morges, au domicile de B.T._, le 13 janvier 2011, une nouvelle dispute a éclaté entre celle-ci et A.T._ suite à laquelle ce dernier l’a enjointe de faire sa valise pour qu’elle retourne en Allemagne et lui a ordonné de lui remettre sa Postcard et son permis C. Après s’être exécutée, la plaignante est montée dans la voiture du prévenu par crainte de représailles. A.T._ avait l’intention de l’amener à la gare de Bâle, mais à hauteur de Cossonay, il a fait demi tour pour la déposer à la gare de Morges. Constatant que celle-ci était fermée, le prévenu a enfin ramené B.T._ à son appartement en précisant qu’il viendrait la chercher le lendemain.
7.
Entre le 15 février et le 27 avril 2011, A.T._ a tenté de joindre B.T._ par téléphone, de l’appeler depuis l’extérieur du bâtiment abritant le foyer Malley-Prairie et a rôdé aux abords de ce même bâtiment alors qu’une ordonnance de mesures superprovisionnelles avait été rendue par le Président du Tribunal d’arrondissement de La Côte le 3 février 2011. Cette ordonnance interdisait à A.T._ d’accéder, d’approcher ou de fréquenter les abords du foyer Malley-Prairie dans un rayon de 500 m. autour du bâtiment, d’accéder, d’approcher ou de fréquenter les abords du domicile de B.T._ dans un rayon de 300 m. autour du bâtiment, ainsi que de prendre contact avec cette dernière, notamment par téléphone, par écrit ou par voie électronique, ou de lui causer d’autres dérangements, sous menace, en cas d’insoumission, de l’amende prévue à
l’art. 292 CP. | En droit :
1.
Interjeté dans les forme et délai légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel est recevable. Il en va de même de l’appel joint déposé par le Ministère public.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP).
I. Appel de A.T._
3.
A.T._ soutient qu’il n’existe aucune preuve matérielle de la version des faits de B.T._ retenue par les premiers juges et qu’aucun élément au dossier ne permet d’écarter ses propres déclarations. Il invoque ainsi une violation du principe
in dubio pro reo
.
3.1
3.1.1
L’art. 10 CPP dispose que toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le Tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2). Le tribunal se fonde sur l’état de fait le plus favorable au prévenu lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation (al. 3).
S'agissant plus précisément de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits, il s’agit de l’acte par lequel le juge du fond évalue librement la valeur de persuasion des moyens de preuve à disposition et pondère ces différents moyens de preuve afin de parvenir à une conclusion sur la réalisation ou non des éléments de fait pertinents pour l’application du droit pénal matériel. Le juge peut fonder une condamnation sur un faisceau d’indices; en cas de versions contradictoires, il doit déterminer laquelle est la plus crédible. En d’autres termes, ce n’est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (Verniory, in : Kuhn/Jeanneret (éd.), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 34 ad art. 10 CPP et les références jurisprudentielles citées).
Lorsque l'autorité a forgé sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables au prévenu sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.2). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a).
3.1.2
L’art. 123 ch. 1 CP punit sur plainte celui qui, intentionnellement aura fait subir à une personne une autre atteinte à la santé (ch. 1). La poursuite aura lieu d’office si l’auteur est le conjoint de la victime et que l’atteinte a été commise durant le mariage ou dans l’année qui a suivi le divorce ( ch. 2 al. 3).
3.1.3
Selon l'art. 190 CP, se rend coupable de viol, celui qui, notamment en usant de menace ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d’ordre psychique ou en la mettant hors d’état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l’acte sexuel.
Le crime réprimé par l'art. 190 CP (comme celui sanctionné par l'art. 189 CP) est une infraction de violence, qui suppose, en règle générale, une agression physique. La violence désigne l'emploi volontaire de la force physique sur la personne de la victime dans le but de la faire céder
(
ATF 122 IV 97 c. 2b ; TF 6B_267/2007 du 3 décembre 2007 c. 6.3). En introduisant la notion de "pressions psychiques", le législateur a voulu viser les cas où la victime se trouve dans une situation sans espoir, sans pour autant que l'auteur ait recouru à la force physique ou à la violence (ATF 128 IV 106 c. 3a/bb; 122 IV 97 c. 2b et les références citées). L'auteur provoque intentionnellement chez la victime des effets d'ordre psychique propres à la faire céder et à permettre l'acte (TF 6B_28/2013 du 13 juin 2013 c. 5.2; ATF 131 IV 167 c. 3.1 et 3.2; Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3
e
éd., Berne 2010, n. 18 ad art. 189 CP). Le Tribunal fédéral a considéré qu'un climat de psycho-terreur entre époux pouvait, même sans violence, exercer une telle influence sur la volonté que la victime considère, de manière compréhensible, qu'elle n'a pas de possibilité réelle de résister (ATF 126 IV 124). La jurisprudence a également précisé que la pression psychique avait l'intensité requise pour que l'on retienne un acte de contrainte lorsque l'on était en présence de comportements laissant craindre des actes de violence à l'encontre de la victime ou de tiers (ATF 131 IV 167, JT 2007 IV 101).
L'infraction de viol est intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant. L'auteur doit savoir que la victime n'est pas consentante ou en accepter l'éventualité. Il doit vouloir accepter que la victime soit contrainte par le moyen qu'il met en œuvre ou la situation qu'il exploite. Il doit enfin vouloir ou accepter que la femme se soumette à l'acte sexuel sous l'effet de la contrainte (Corboz, op. cit, n. 11 ad art. 190 CP).
3.1.4
Selon l’art. 129 CP, l’infraction de mise en danger de la vie d’autrui est réalisée par celui qui, sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort imminent. Le danger de mort imminent suppose un risque concret, soit un état de fait dans lequel il existe, d’après le cours ordinaire des choses, la probabilité ou un certain degré de possibilité que le la vie d’autrui soit lésée, sans toutefois qu’un degré de probabilité supérieur à 50% soit exigé (ATF 121 IV 67 c. 2b et les arrêts cités). Du point de vue subjectif, il faut que l’auteur ait agi intentionnellement et que l’acte ait été commis sans scrupules. L’auteur doit avoir conscience du danger de mort imminent pour autrui et adopter volontairement un comportement qui le crée (ATF 121 IV 67 c. 2d, p. 75
in
fine
).
3.1.5
Se rend coupable de contrainte au sens de l'art. 181 CP, celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'aura obligée à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte.
Ainsi, l’art. 181 CP prévoit alternativement trois moyens de contrainte : l’usage de la violence, la menace d’un dommage sérieux ou tout acte entravant la personne dans sa liberté d’action. Il peut y avoir contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime "de quelque autre manière" dans sa liberté d'action; n'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas; il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action; il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 119 IV 301 c. 2a et les références).
Enfin, l’infraction de l’art. 181 CP est intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant (Dupuis et al., op. cit., nn. 35 et 36 ad art. 181 CP et les références citées).
3.2
Tout comme le tribunal correctionnel, la Cour de céans est convaincue par les déclarations de la victime, malgré les dénégations de l’appelant et ce pour les motifs exposés ci-après.
3.2.1
L’appelant invoque l’absence de documents tels que des interventions policières et des certificats médicaux attestant des coups reçus par B.T._.
Lors de situations de violences domestiques qui se déroulent à huis clos, l’absence de ce genre de documents est précisément caractéristique. En l’espèce, la victime s’est décidée à porter plainte uniquement après l’intervention de la police à son domicile, le 13 janvier 2011, après qu’un de ses amis qui s’inquiétait pour elle, a fait appel aux forces de l’ordre. Sans l’intervention de la police au domicile de la victime du 13 janvier 2011, il est même probable que B.T._ aurait continué à vivre dans la crainte de son ex-époux sans oser faire la démarche de dénoncer la situation aux autorités.
Le fait qu’aucun voisin ne s’est jamais non plus manifesté s’agissant des disputes du couple durant leur vie commune ou après leur séparation n’est pas non plus relevant et ne prouve pas à lui seul qu’aucun acte de violence n’a jamais eu lieu.
3.2.2
B.T._ a tenu tout au long de la procédure des propos constants et ses affirmations, lorsqu’elles ont pu être vérifiées, se sont révélées exactes. Ainsi, A.T._ détenait bel et bien la Postcard et le permis C de la victime, comme celle-ci l’avait déclaré, et un pistolet a effectivement été retrouvé au domicile de celui-ci. De plus, la plaignante n’avait aucun intérêt à mentir et à déposer plainte pour des faits inexacts dans le but de nuire à son ex-époux, en sachant que l’enjeu était la perte de ses enfants. Ses deux tentatives de suicide montrent de surcroît qu’elle n’arrivait plus à supporter les conditions dans lesquelles l’appelant l’obligeait à vivre. En revanche, A.T._ a moult intérêts à nier les faits qui lui sont reprochés.
De même, on ne peut que mettre en doute le témoignage de [...], unique témoin et ami du prévenu entendu lors des débats de première instance, lequel laissait comprendre que A.T._ était un époux prévenant dont le comportement envers ses épouses ne l’avait choqué à aucun moment.
3.2.3
Enfin, l’emprise que le prévenu exerçait sur sa victime était énorme. Il suffit de se référer à certains des propos tenus par l’appelant lors de l’enquête pour conclure que B.T._ était sous sa coupe tant avant qu’après leur mariage. Il a notamment affirmé que «
pour vous répondre, il est clair que c’est moi qui gueulait. Il y a des traditions chez nous que je désire respecter. La femme doit notamment respecter son mari
» (PV aud. 2, p. 4), que « s
elon nos coutumes, il est normal qu’une femme demande à son mari l’autorisation de sortir
» (PV aud. 4, p. 2), que «
même depuis le divorce, nous nous étions mis d’accord qu’elle me mette au courant si elle voulait sortir
» (PV aud. 4, p. 3) et encore que «
elle n’avait pas le droit de voir d’autres hommes. Nous nous étions mis d’accord là-dessus
» (PV aud. 4, p. 4). Au vu de ce qui précède, il ne fait aucun doute que A.T._ exerçait bel et bien sur son ex-femme une emprise constante et qu’il lui inspirait une peur qui ont longtemps empêché cette dernière de dénoncer les violences dont elle était victime.
3.3
En l’occurrence, s’agissant des lésions corporelles, elles doivent être qualifiées de lésions corporelles simples. En outre, l’absence de témoignages relatifs aux marques de coups sur le corps de B.T._ n’est pas déterminante. En effet, depuis son arrivée en Suisse et jusqu’à son divorce, la plaignante a vécu, quasiment recluse par son époux, sous le même toit que ses beaux-parents. Durant toute cette période, ainsi que durant celle qui a suivi son divorce, ses contacts avec des tiers extérieurs étaient alors réduits au strict minimum; elle ne sortait que rarement de chez elle et uniquement après avoir eu l’autorisation du prévenu. Il est vraisemblable que ce dernier frappait généralement des parties non visibles du corps, et pas le visage, et qu’il ne donnait son accord aux sorties de la plaignante que si elle ne présentait pas de marques visibles. B.T._ a encore déclaré que la fréquence des coups était moindre après le divorce.
Au vu de ce qui précède, il n’y a ni contradiction, ni invraisemblance à retenir l’infraction de lésions corporelles, en dépit du fait que les lésions consécutives aux coups portés n’ont pas été constatées par des témoins.
3.4
Les éléments objectifs et subjectifs de l’infraction de viol sont réalisés. Lors de ses auditions, B.T._ a répété avoir dit à A.T._ à chaque fois qu’elle ne voulait plus avoir de rapports sexuels avec lui étant donné qu’il était remarié. Le prévenu lui-même a déclaré qu’il a continué à entretenir des relations sexuelles avec son ex-femme même après leur divorce, à raison d’une fois par semaine environ (PV aud. 4, p. 3). Bien qu’il ait nié que la plaignante n’était pas consentante, il a affirmé avoir constaté qu’elle avait moins envie que pendant leur mariage (PV aud. 2, p. 7 et PV aud. 4, p. 3). Il a également précisé qu’en insistant un peu et après discussion, B.T._ acceptait d’avoir des relations sexuelles. Compte tenu de la mentalité du prévenu, qui, devant le refus de son ex-femme à entretenir des relations sexuelles, s’énervait contre elle la soupçonnant immédiatement d’avoir un autre homme dans sa vie, et qui continuait à la considérer comme sa propriété même après le divorce, n’hésitant pas à la frapper sous n’importe quel prétexte, il est vraisemblable que celui-ci n’ait pas respecté le refus de cette dernière. Comme l’a relevé la victime elle-même, le prévenu n’a jamais eu besoin de recourir à la force pour la contraindre à avoir des relations sexuelles. La crainte qu’il la frappe lui était suffisante pour se soumettre à la requête de A.T._. Malgré l’absence d’une contrainte physique, l’infraction de viol est réalisée. En effet, la jurisprudence expose qu’un climat de psycho-terreur entre époux peut exercer une telle influence sur la volonté que la victime considère, même sans violence, qu’elle n’a pas la possibilité de résister (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, n. 24 ad art. 189 CP). La résignation de la plaignante est tout à fait compréhensible au vu de l’attitude du prévenu lorsqu’il était contrarié.
3.5
S’agissant de la mise en danger de la vie d’autrui, A.T._ a placé à 3 ou 4 reprises un couteau contre le cou de la plaignante. Cette dernière a précisé qu’il s’agissait d’un couteau plus gros que ceux utilisés habituellement en cuisine, qu’il se trouvait sur l’armoire de leur chambre à coucher et que ces faits remontaient à avant 2005.
Une fois de plus, et pour les raisons précitées, la Cour de céans accorde aux déclarations de B.T._ une crédibilité nettement supérieure à celle des explications de l’appelant. En outre, les différentes circonstances susmentionnées - arme cachée ou placée à un endroit peu ordinaire, écoulement du temps et utilisation illicite de cet objet - expliquent de manière cohérente que l’arme n’ait pas été retrouvée. Cet argument n’est donc pas suffisant pour qu’un doute subsiste sur la réalité des faits dénoncés. Quant à l’utilisation faite de cet objet, il est établi, sur la base des déclarations de la victime, que le couteau était appliqué contre la gorge, endroit éminemment vulnérable. Dans ces conditions et eu égard au contexte de violence, peu importe que ce soit le tranchant ou le dos du couteau qui ait été appliqué contre le cou. Le moindre mouvement de défense de la victime pouvait provoquer un danger de mort imminent.
3.6
Enfin, concernant la contrainte, A.T._ s’est bel et bien rendu coupable de cette infraction en obligeant B.T._ à lui remettre sa Postcard et son permis C, et à monter dans sa voiture. L’appelant n’a pas eu besoin de recourir à la violence, la crainte qu’il lui inspirait et la peur de recevoir des coups étant suffisantes pour que la victime se plie aux exigences du prévenu. Être obligé de remettre des documents personnels et de monter dans une voiture constituent une entrave à la liberté d’action, obtenue en l’espèce par l’intimidation de sa victime. Il est évident que B.T._ n’a pas agi volontairement, puisque le prévenu a déclaré lors des débats de première instance qu’il avait constaté par lui-même qu’elle «
n’était pas
100% d’accord de partir en Allemagne
» (jgt, p. 5). Le caractère illicite de l’acte commis par le prévenu, n’est pas non plus remis en question, ce comportement étant manifestement contraire à la volonté de la plaignante. En outre, eu égard au contexte général de ce cas, il est évident que le refus ou l’opposition de B.T._ à la volonté du prévenu de la forcer à retourner en Allemagne était évident. L’intention propre de la plaignante était donc suffisamment reconnaissable pour le prévenu, qui, l’entravant dans sa liberté et l’intimidant, l’a contrainte à agir contre sa volonté.
Les premiers juges, n’ont ignoré aucune des circonstances susmentionnées, ont procédé à l’appréciation détaillée de tous les éléments dont ils disposaient et ont indiqué de manière convaincante les motifs pour lesquels ils les écartaient, ainsi que les raisons qui les avaient convaincus des la véracité des déclarations de la plaignante.
En définitive, l’appel est mal fondé sur tous les points qui précèdent et doit dans cette mesure être rejeté.
4.
L’appelant conteste ensuite le genre de la peine qui lui a été infligée, estimant qu’une peine pécuniaire devrait être prononcée. A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où une peine privative de liberté devait tout de même être ordonnée, il requiert à ce que sa quotité soit compatible avec l’octroi d’un sursis.
4.1
4.1.1
Aux termes de l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 c. 2.1; ATF 129 IV 6 c. 6.1).
4.1.2
Lorsque la peine privative de liberté est d'une durée telle qu'elle permette le choix entre le sursis complet (art. 42 CP) et le sursis partiel (art. 43 CP), soit entre un et deux ans au plus, l'octroi du sursis au sens de l'art. 42 est la règle et le sursis partiel l'exception. Cette dernière ne doit être admise que si, sous l'angle de la prévention spéciale, l'octroi du sursis pour une partie de la peine ne peut se concevoir que moyennant exécution de l'autre partie (ATF 134 IV 1 c. 5.5.2, p. 14). La situation est comparable à celle où il s'agit d'évaluer les perspectives d'amendement en cas de révocation du sursis (ATF 116 IV 97; TF 6B_664/2007 du 18 janvier 2008 c. 3.2.3.1). Lorsqu'il existe de sérieux doutes sur les perspectives d'amendement de l'auteur, qui ne permettent cependant pas encore, à l'issue de l'appréciation de l'ensemble des circonstances, de motiver un pronostic concrètement défavorable, le tribunal peut accorder un sursis partiel au lieu du sursis total. On évite de la sorte, dans les cas de pronostics très incertains, le dilemme du «tout ou rien». L'art. 43 CP permet alors que l'effet d'avertissement du sursis partiel autorise, compte tenu de l'exécution partielle ordonnée simultanément, un pronostic largement plus favorable pour l'avenir (ATF 134 IV 1 précité c. 5.5.2, p. 14). Un pronostic défavorable exclut également le sursis partiel. En effet, s’il n’existe aucune perspective que l’auteur puisse être influencé de quelque manière par un sursis complet ou partiel, la peine doit être entièrement exécutée (TF 6B_353/2008 du 30 mai 2008 c. 2.2 et les références citées).
4.2
4.2.1
La culpabilité de A.T._ est lourde. La Cour de céans reprend à son compte les éléments retenus à charge du prévenu par les premiers juges, à savoir que l’ensemble de l’activité délictueuse qui lui est reprochée démontre un égoïsme et un mépris total de sa victime, qui était en quelque sorte pour lui sa chose. A.T._ ne s’est jamais soucié de la peur et de la douleur que ses comportements engendraient, ni des séquelles pour sa victime. Il a agi de manière machiste pendant de nombreuses années, en estimant que la plaignante était un objet de sa possession et est même arrivé à mettre en péril sa vie. En outre, la durée et la répétition de ses actes délictueux ne font qu’alourdir la culpabilité du prévenu. Les infractions sont en concours.
L’absence d’antécédents pénaux étant un élément neutre, la Cour de céans ne retient aucun élément à décharge ; rien, dans le statut social et la situation personnelle du prévenu n’excuse, ni n’explique un tel comportement machiste et agressif.
Compte tenu de ce qui précède, la Cour de céans est d’avis que la peine de trois ans fixée par les juges de première instance répond aux critères de l’art. 47 CP et se justifie.
4.2.2
Quant au sursis, il y a lieu de prendre en considération le fait que tant l’attitude du prévenu au cours de l’instruction, puis aux débats et jusqu’à la procédure d’appel démontre qu’il n’a pas pris conscience des actes qui lui sont reprochés. Si le fait de nier est certes un droit, il n’en demeure pas moins qu’une telle attitude peut permettre de se faire une idée de l’estime dans laquelle il tenait sa victime et de la portée de sa prise de conscience. Tout, dans les explications qu’il a fourni au long du procès démontre qu’il continue à trouver son comportement adéquat et légitime. La Cour de céans retient cependant que A.T._ n’est qu’un délinquant primaire et n’a pas subi de détention provisoire. Elle retient également qu’il a la garde de ses enfants et qu’il a un emploi stable dans l’entreprise de son frère.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, le pronostic doit être tenu pour mitigé, de sorte que l’appelant ne peut bénéficier que du sursis partiel. Il convient dès lors de suspendre l’exécution de la peine privative de liberté pendant 18 mois et de fixer le délai d’épreuve à 3 ans.
5.
L’appelant conteste les conclusions civiles en faveur de la partie plaignante. Fondé sur la prémisse de ses conclusions, ce grief est sans objet. Au surplus, la quotité de l’indemnité pour tort moral allouée à B.T._ est adéquate et doit être confirmée.
II. Appel joint du Ministère public
6.
Le Ministère public considère que les chefs d’accusation qui ont été abandonnés en première instance – appropriation illégitime, utilisation abusive d’une installation de télécommunication et voies de fait - ne justifient pas une réduction de deux ans, par rapport aux cinq ans de peine de privation de liberté initialement requis.
Le grief doit être rejeté. En effet, la peine privative de liberté infligée au prévenu par les juges de première instance est adéquate au vu des motifs exposés ci-dessus et doit par conséquent être confirmée (c. 4.2.1
supra
).
7.
En conclusion, l’appel de A.T._ doit être partiellement admis et l’appel joint du Ministère public rejeté. Le jugement entrepris sera réformé dans le sens des considérants qui précèdent.
Vu l'issue de la cause et compte tenu du fait que le Ministère public n'est intervenu dans la procédure d'appel par voie de jonction et que son appel porte uniquement sur un point, les frais d'appel, par 5’511 fr. 40, y compris l’indemnité allouée au défenseur d'office de l’appelant, par 1’933 fr. 20, débours et TVA compris, ainsi que celle allouée au conseil d’office de l’intimée, par 1'198 fr. 20, débours et TVA compris, doivent être mis par deux tiers à la charge de A.T._, soit un montant global de 3'674 fr. 25, le solde, par 1'837 fr. 15, étant laissé à la charge de l’Etat.
A.T._ ne sera tenu de rembourser à l’Etat la part mise à sa charge de l’indemnité allouée à son défenseur que lorsque sa situation financière le permettra (art. 135 al. 4 let. a CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
ca15b738-ea32-4088-a0c2-f2624d904c21 | En fait :
A.
Par jugement du 29 juin 2015, le Tribunal de police de l’arrondissement de l'Est vaudois a constaté que C.X._ s'est rendue coupable de calomnie (I), l'a condamnée à une peine pécuniaire de quinze jours-amende à 100 fr. (II), a suspendu l'exécution de la peine pécuniaire et a fixé un délai d'épreuve à deux ans (III), a dit que C.X._ est la débitrice de B.X._ de la somme de 5'400 fr. à titre de dépens pénaux (IV), a mis les frais, par 4'845 fr. 65, à la charge de C.X._, y compris l'indemnité de son défenseur d'office, Me Cornelia Seeger Tappy, par 3'545 fr. 65, TVA et débours compris (V), et a dit que le remboursement à l'Etat de cette indemnité ne serait exigée que si la situation de C.X._ le permet (VI).
B.
Le 2 juillet 2015, C.X._ a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d'appel motivée du 16 juillet 2015, elle a conclu, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens qu'elle est acquittée de tout chef d'accusation et à ce que les frais de procédure sont laissés à la charge de l'Etat. Subsidiairement, elle a encore conclu à ce que le jugement du 29 juin 2015 soit annulé et la cause renvoyée à l'autorité de première instance pour complément d'instruction.
Par lettre du 28 juillet 2015, le Ministère public s'en est remis à justice.
Par appel joint du 10 août 2015, B.X._ a conclu, avec suite de frais et dépens, à ce que l'appel principal soit rejeté et que les propos tenus par C.X._, l'accusant de refuser de payer l'écolage de D.X._, soient déclarés attentatoires à l'honneur.
Dans ses déterminations du 7 septembre 2015, C.X._ s'en est remise à justice s'agissant de l'appel joint.
Par courrier du 29 octobre 2015, le Ministère public s'en est également remise à justice s'agissant du sort de l'appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
C.X._ est née le [...] à [...] en [...]. Elle s'est mariée à B.X._ avec qui elle a eu un enfant, D.X._, né le [...]. Les époux sont séparés depuis le [...] et un jugement de divorce vient d'être prononcé, mais n'est pas encore définitif. L'appelante ne travaille pas et a déclaré percevoir des prestations d’aliment mensuelles à hauteur de 7'385 fr. 70. Lors de l'audience d'appel, elle a toutefois indiqué que la pension alimentaire qu'elle percevrait si le jugement de divorce devenait définitif, s'élèverait à 2'800 francs. S'agissant de ses charges mensuelles, elles sont estimées à environ 4'600 francs. Enfin, ses dettes se chiffrent à hauteur de 20'676 fr. 50.
Aucune inscription ne figure au casier judiciaire suisse de la prévenue.
2.
B.X._ a déposé plainte contre C.X._ le 26 juillet 2013 ensuite du courrier électronique qu'elle a envoyé le 27 avril 2013 à F._, soeur du plaignant, dont la teneur est la suivante : "
I wonder F._, how would you feel if your child was kicked out of school because his father prefer to pay 1'500 fr. a month to a lawyer, to fight against keeping his own child in school? What do you think D.X._ should answer when you ask him how is doing? Oh great, I have been kicked out of school because my father does not want to support my education!? How would you feel if your husband has spent years and years and thousands of franks on prostitutes and all sorts of extramarital affairs, while you were moving the furniture around the world, organizing his life, cooking and putting up parties for advancement of his carrier?
"
Ce courriel fait suite à plusieurs échanges survenus auparavant. En effet, en date du 21 avril 2013, F._ a invité C.X._ et D.X._ à la confirmation de son fils. Par courriel du 22 avril 2013, la prévenue a décliné l'invitation. Le jour-même, F._ a transmis ce courriel à son frère. Ensuite de cela, ce dernier a envoyé un courriel à son fils le 23 avril 2013, pour lui demander si le refus était le sien, et lui rappeler que sa famille paternelle souhaitait le voir. C.X._ lui a écrit pour lui reprocher d’essayer de culpabiliser leurs fils (cf. P. 4/2/1). | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel de C.X._ est recevable. Il en va de même de l'appel joint interjeté par B.X._.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
La prévenue conteste s'être rendue coupable de calomnie ou de diffamation. Elle fait valoir à ce propos, que l'accusation d'adultère, eu égard à l'évolution des mœurs, n'est plus attentatoire à l'honneur. Elle soutient encore que les propos qu'elle a tenus au sujet de B.X._ sont vrais ou qu'elle avait de bonnes raisons de les tenir pour tels et qu'elle n'a pas agi sans motif suffisant.
3.1
3.1.1
Selon l'art. 173 ch. 1 CP, se rend coupable de diffamation celui qui, en s'adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, de même que celui qui aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon. La calomnie au sens de l'art. 174 CP se distingue de la diffamation par la présence d'un élément subjectif supplémentaire : l'auteur sait que le fait qu'il allègue est faux. La calomnie est ainsi une forme qualifiée de la diffamation (cf. Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. 1, 3
e
éd., Berne 2010, n. 1 ad art. 174 CP).
Ces dispositions protègent la réputation d'être une personne honorable, c'est-à-dire de se comporter comme une personne digne a coutume de le faire selon les conceptions généralement reçues. L'honneur protégé par le droit pénal est conçu de façon générale comme un droit au respect qui est lésé par toute assertion propre à exposer la personne visée au mépris en sa qualité d'homme (ATF 137 IV 313 consid. 2.1.1; ATF 132 IV 112 consid. 2.1; ATF 128 IV 53 consid. 1a). La diffamation suppose une allégation de fait et non un simple jugement de valeur (ATF 117 IV 27 consid. 2c). Il ne suffit pas d'abaisser une personne dans la bonne opinion qu'elle a d'elle-même ou dans les qualités qu'elle croit avoir. Echappent ainsi à la répression les assertions qui, sans faire apparaître la personne comme méprisable, sont seulement propres à ternir la réputation dont elle jouit ou à ébranler la confiance qu'elle a en elle-même (ATF 128 IV 53 consid. 1a). Pour apprécier si une déclaration est attentatoire à l'honneur, il faut se fonder non pas sur le sens que lui donne la personne visée, mais sur une interprétation objective selon la signification qu'un destinataire non prévenu doit, dans les circonstances d'espèce, lui attribuer (TF 6B_143/2011 du 16 septembre 2011 consid. 2.1.3 et les références citées; Corboz, op. cit., n. 42 ad art.173 CP).
L’ancienne jurisprudence sur le caractère attentatoire à l’honneur des allégations d’adultère n’est plus entièrement d’actualité. Elle n’est pas non plus complètement obsolète. Le Tribunal fédéral a notamment eu l'occasion de rappeler que – s'il n'est plus une cause de divorce et ne constitue plus une infraction pénale – l'adultère reste un acte illicite (TF 6S.5/2007 consid. 3.4). Il a souligné le fait que le conjoint qui entretient des relations intimes avec un tiers manque à ses engagements et trahit la confiance mise en lui par son partenaire et qu'il est bien souvent considéré encore aujourd'hui, dans la société, comme une personne déloyale, qui a manqué à sa parole; sa réputation, sans être ruinée, sera néanmoins fortement compromise. De façon générale, il faut considérer que les circonstances de l'espèce sont déterminantes (TF 6S. 752/2000 consid. 3 ; CREP, 20 décembre 2012/837).
Outre l'atteinte à l'honneur et sa communication à un tiers, l'infraction de calomnie suppose que l'auteur connaisse la fausseté de ses allégations. L'accusation doit donc établir que le fait est faux, d'une part, que l'auteur le savait, d'autre part. Les preuves libératoires de la vérité ou de la bonne foi n'ont donc pas de sens dans ce cadre (Dupuis et alii (éd.), Petit commentaire du Code pénal, 2012, n. 1 ad art. 174 CP et les références citées).
Lorsque ces éléments ne sont pas établis, il faut examiner s'il y a lieu de retenir la diffamation (art. 173 CP). Dans ce cadre, l'inculpé n'encourra aucune peine s'il prouve que les allégations qu'il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité (preuve de la vérité) ou qu'il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies (preuve de la bonne foi). Le juge doit examiner d'office si les conditions d'admission à la preuve libératoire sont remplies ; il faut toutefois préciser que l'admission à la preuve constitue la règle (Corboz, op. cit., n. 54 ad art.173 CP). Cette possibilité doit être refusée au prévenu lorsqu'il n'avait pas de motif suffisant pour proférer ses allégations injurieuses, d'une part, et qu'il a agi principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui, d'autre part ; ces deux conditions sont cumulatives (art. 173 ch. 3 CP). L'existence d'un motif suffisant est plus difficilement admise lorsque le fait touche à la vie privée ou à la vie de famille, comme cela résulte de la formulation de l'art. 173 ch. 3 in fine CP. Elle n'est cependant pas d'emblée exclue. Si l'auteur a un motif suffisant, même s'il ne s'agit pas du motif unique ou prépondérant de sa communication, il doit être admis à la preuve libératoire ; il suffit qu'il ne soit pas qu'un prétexte (ATF 82 IV 98, JT 1956 IV 142 ; Corboz, op. cit., p. 593). La preuve de la vérité est apportée si tous les éléments essentiels de l'allégation sont établis ; des exagérations bénignes, soit qui apparaissent proportionnellement sans importance, restent sans conséquence (ATF 102 IV 176, JT 1978 IV 12 ; Corboz, op. cit., n. 71 ad art. 173 CP).
Pour la preuve de la bonne foi, il faut se placer au moment de la communication litigieuse et rechercher, en fonction des éléments dont l'auteur disposait à l'époque, s'il avait des raisons sérieuses de tenir pour vrai ce qu'il a dit.
La jurisprudence a établi un certain lien entre les motifs suffisants pour faire la communication et les raisons sérieuses de tenir les allégations pour vraies ; en d'autres termes, le contenu et l'étendue du devoir de vérification s'apprécient en examinant les motifs que l'accusé avait de s'exprimer (Corboz, op. cit., n. 75 ad art. 173 CP).
3.1.2
En l'espèce, le mail litigieux, concrètement, accuse le plaignant d'avoir consacré « des années et des années » et des « milliers de francs » à des prostituées et « toutes sortes de relations extraconjugales ». Il ne s'agit pas d'un adultère « simple », encore pardonnable, mais d'un adultère « qualifié », répété et coûteux, comportement qui, chez un père de famille, est clairement réprouvé par les conceptions morales généralement admises. Ces allégations laissent entendre que le plaignant préfère consacrer son temps et son argent à satisfaire ses besoins sexuels hors des « liens sacrés du mariage » plutôt qu'à sa famille et font donc, comme l'a relevé le premier juge, apparaître le plaignant comme une forme de pervers (jgt, p. 15). L'appelante fait valoir qu'elle n'a jamais traité son mari de pervers mais a seulement relaté qu'il avait eu des relations extraconjugales, notamment avec des prostituées. Ce point de vue ne saurait être suivi ; si elle a estimé utile de mentionner ces prostituées, c'est précisément en raison de l'opprobre supplémentaire qui s'attache à ce type de pratique. On remarquera aussi que l'accent est mis sur le temps et l'argent consacré à ces relations extraconjugales, plus que sur le principe-même. C'est donc à juste titre que cette phrase a été considérée comme attentatoire à l'honneur.
Le plaignant ayant admis avoir fréquenté trois prostituées, deux en Australie et une en Nouvelle-Zélande, et entretenu au moins une relation extraconjugale de deux à trois mois en Suisse, et la plaignante n'ayant pas apporté la preuve d'une plus ample activité sexuelle extraconjugale, le premier juge a retenu que les faits décrits dans le courriel étaient en partie inexacts. Ce raisonnement ne peut être suivi. On ignore en effet quel temps et quel argent le plaignant a consacré à des maîtresses et des prostituées. On ignore combien de fois il est allé voir les prostituées et sa maîtresse,
combien elles lui coûtaient – les tarifs étant fort variables d'une dame à l'autre – et s'il a dépensé de l'argent pour voir sa maîtresse. Le plaignant ne s'exprime pas à ce sujet, si ce n'est par la plainte déposée. En litige avec sa future ex-épouse, il a évidemment un intérêt à mentir ou minimiser ; d'ailleurs, dans sa plainte, il reconnaît une relation conjugale et dit que tout le reste est inexact et ce n'est qu'à l'audience qu'il a admis avoir fréquenté trois prostituées. On constate en tout cas que ces pratiques se sont produites dans au moins trois pays différents et qu'elles se sont donc échelonnées sur plusieurs années. S'il n'est pas établi que le plaignant a consacré des années et des milliers de francs à ses à-côtés, le contraire n'est pas établi non plus, et ne peut être exclu. Une condamnation pour calomnie est donc exclue.
3.2
3.2.1
Une condamnation pour diffamation reste possible si la prévenue ne peut faire la preuve de la vérité ou de sa bonne foi, ou ne doit pas être admise à apporter une preuve libératoire.
Il est établi que le plaignant a eu des relations extra-conjugales, dont plusieurs avec des prostituées. Il n'est en revanche pas prouvé qu'il y a consacré des «années» et des «milliers de francs».
S'agissant de la preuve de la bonne foi, il résulte du dossier que la prévenue se fondait sur un aveu du plaignant, en ces termes admis par les deux parties : « I was fucking with whores, if that's what you want to know ». Dans la foulée le mari lui avait avoué une relation avec une maîtresse. Il paraît logique que cet aveu fasse suite à un interrogatoire, lié à des soupçons, eux-mêmes fondés sur des comportements suspects comme l'a expliqué la prévenue (cf. P. 11, lettre du 20 septembre 2013). L'appelante fait valoir qu'elle en a logiquement déduit qu'il avait consacré des années et des milliers de francs à cela. Cet argument est bien fondé. Les comportements suspects, la forme verbale utilisée, le pluriel de « whore », et la relation extra-conjugale avouée dans la foulée, permettaient de considérer que les « extras » ne constituaient pas des cas isolés mais réguliers. Il y a ainsi lieu d’admettre que la preuve de la bonne foi a été apportée par C.X._.
3.2.2
Il reste à s'assurer que l'appelante pouvait être admise à apporter cette preuve en examinant pour quel motif elle a envoyé le courriel litigieux. La prévenue soutient qu'il s'agissait d'expliquer à sa belle-soeur pourquoi elle avait refusé son invitation. Le premier juge n'a pas été convaincu ; il a relevé que F._ n'avait posé aucune question à ce sujet. Il a estimé que la prévenue avait pour dessein de se venger de B.X._ lorsqu'elle a envoyé le courriel litigieux à F._
, car elle avait reçu auparavant deux décisions défavorables du Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal dans la cause la divisant d'avec son mari (P. 4/2/5 et 4/2/9). Pourtant, ces arrêts ne sont pas si défavorables que cela à l'appelante puisque qu'elle a obtenu une amélioration de sa situation même si toutes ses conclusions n’ont pas été admises. Ensuite, le courriel litigieux commence bien par une phrase dans laquelle la prévenue fait référence à l'invitation refusée et au sentiment qu'elle a eu que sa belle-sœur aimerait comprendre les raisons du refus, alors qu’il ne mentionne pas les décisions judiciaires reçues quatre jours plus tôt. Si la prévenue avait voulu répandre des calomnies au sujet de son mari pour se venger, elle aurait pu les adresser à plusieurs membres de la famille voire à des personnes extérieures à la famille. Elle ne les aurait d'ailleurs pas réservées à la sœur du plaignant qui les prendrait forcément avec recul. Il est au contraire logique que C.X._ se soit sentie obligée – surtout après le courriel du père au fils tentant de lui faire changer d'avis – d'expliquer à sa belle-sœur pourquoi elle refusait, pour elle-même et son fils, tout contact avec son mari et la famille de celui-ci. Cette attitude de rejet n'était défendable, objectivement, que si des faits sérieux pouvaient être reprochés à l'époux. Certes, la prévenue aurait pu se contenter d'écrire qu'elle avait de sérieux griefs à faire valoir, sans entrer dans les détails. Mais cela aurait pu apparaître à la sœur du plaignant, a priori plutôt prévenue en sa faveur, comme une déclaration vide de sens. Evidemment, la colère transparaît dans le courriel, ce qui est logique d'une épouse qui se sent bafouée ; cela ne signifie pas pour autant que l'envoi de ce mail a été fait par pur esprit de vengeance. On peut aussi observer que la rupture est consommée depuis 2010 ; l'épouse aurait pu s'épancher plus tôt, si elle avait voulu étaler son malheur. Les décisions de justice paraissent un mince prétexte de vengeance. La rupture des époux est consommée depuis 2010 et C.X._ aurait pu s'épancher plus tôt si elle avait voulu étaler son malheur. La prévenue avait donc un motif sérieux de proférer ces allégations et n'a pas agi dans le seul but de dire du mal de B.X._, mais bien parce qu'elle souhaitait se justifier. Force est de constater que C.X._, étant admise à apporter une preuve libératoire, a fourni la preuve de sa bonne foi et ne s'est pas rendue coupable de diffamation.
Partant, il y a lieu d'admettre l'appel principal sur ce point et de libérer C.X._ de tout chef d'accusation.
4.
B.X._ soutient que C.X._ s'est rendue coupable de calomnie, subsidiairement de diffamation s'agissant des propos qui allèguent que D.X._ aurait été exclu de l'école par sa faute. Il soutient que le courriel litigieux laisserait entendre qu'il combattrait juridiquement pour empêcher son fils d'avoir accès à une éducation et qu'il préférerait financer ses relations adultères que payer l'écolage de son fils. Il fait enfin valoir que ce n'est pas son refus d'assumer l'écolage qui a abouti à l'exclusion de son fils de l'école.
C'est à juste titre que le premier juge a considéré que le destinataire du courriel litigieux devait forcément comprendre qu'il s'agissait d'un litige matrimonial et que de simples critiques relatives à la qualité de père n'étaient pas attentatoires à l'honneur. En effet, la lecture de ce courriel permet de comprendre qu'il s'agit d'un litige entre parents, qu'il y a un procès en cours puisqu'on y parle d'avocat, et qu'il est question d'écolage en établissement privé. On ne peut raisonnablement comprendre les phrases incriminées comme voulant dire que le père tenterait d'empêcher son fils d'aller à l'école. Il y a lieu de relever que le caractère attentatoire à l'honneur résulte principalement des propos laissant entendre que B.X._ préférerait consacrer son argent à ses besoins plutôt qu'à sa famille et non des phrases relatives à la scolarité qui n'ont pas de portée propre.
L'appel joint doit être rejeté.
5.
En définitive, l'appel principal est admis et le jugement entrepris réformé dans le sens des considérants qui précèdent. L'appel joint est rejeté.
Au vu du sort de la cause, les frais de procédure de première instance ainsi que l'indemnité de défenseur d'office allouée Me Cornelia Seeger Tappy seront mis à la charge de B.X._. En effet, ce dernier a déposé une plainte pénale qui n'était pas conforme à la vérité puisqu'il n'admettait qu'une seule relation extraconjugale (art. 427 al. 2 let. a CPP).
Il en va de même des frais de la procédure d'appel, par 4'538 fr. 80, comprenant, outre l'émolument de 1'800 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), l'indemnité de défenseur d'office allouée à Me Cornelia Seeger Tappy, par 2'738 fr. 80
,
TVA et débours inclus.
S'agissant des dépens requis par l'appelante pour les deux instances, ils doivent lui être refusés, celle-ci étant assistée d'un défenseur d'office. En outre, les conclusions civiles, en dépens, prises par B.X._ dans sa déclaration d'appel n'ont plus d'objet au vu de l'issue de la cause. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
ca44f68d-ed26-485d-bd86-18cc3defbfbb | En fait :
A.
Par jugement du 8 mars 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a libéré H._ du chef d’accusation de violation grave des règles de la circulation routière (articles 32 al. 1 LCR [vitesse] et 4a al. 1 let. b OCR [limitation générale de vitesse]) (I) et a laissé les frais à la charge de l’Etat (II).
B.
Le 12 mars 2013, le Ministère public a annoncé faire appel de ce jugement. Par déclaration d’appel du 3 avril 2013, il a conclu à l’admission de l’appel (I), à la modification du jugement en ce sens que H._ est déclaré coupable de violation grave des règles de la circulation routière, qu’il est condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à 80 fr. le jour-amende, que le sursis accordé à H._ le 3 mars 2011 par le Ministère public de l’arrondissement de La Côte est révoqué et que l’exécution de la peine y relative est ordonnée et que les frais de la décision par 600 fr. sont mis à la charge de H._ (II), subsidiairement au renvoi du dossier pour nouvelle instruction (III) et à ce que les frais de la procédure d’appel sont laissés à la charge de l’Etat (IV). Le Ministère public a en outre indiqué qu’il ne s’opposait pas à ce que l’appel soit traité en procédure écrite.
Le 10 avril 2013, le Président de céans a désigné Me Benoît Morzier comme défenseur d’office de H._.
Le 1
er
mai 2013, H._ a indiqué qu’il n’entendait pas présenter une demande de non-entrée en matière ou déclarer un appel joint. Il a également mentionné qu’il ne s’opposait pas à ce que la procédure d’appel se déroule en la forme écrite.
Par avis du 14 mai 2013, le Président de céans a informé les parties que l'appel sera traité en procédure écrite et qu’il partait de l’idée, sous réserve de contestation jusqu’au 21 mai 2013, que le Ministère public renonçait à déposer un mémoire supplémentaire.
Le 16 mai 2013, le Ministère public a renoncé à déposer un mémoire supplémentaire.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
H._, de nationalité suisse, est né le 29 avril 1973 à Lausanne. Il exerce la fonction de directeur général pour l’entreprise [...] à [...]. Son revenu annuel net est de 120'000 fr. et celui de son épouse de 60'000 francs. Leurs charges hypothécaires s’élèvent à 3'600 fr. et leurs primes d’assurance-maladie à 600 francs. Ils n’ont pas de fortune autre que le bien immobilier qu’ils ont acquis pour leur logement. Leur dette hypothécaire s’élève à 1'200'000 francs. Ils ont des dettes privées à hauteur de 70'000 francs. Leurs impôts ascendent à 3'700 fr. par mois. Le couple habite à la Route de [...], à [...], soit à 800 mètres de l’endroit où l’infraction a été commise.
Le casier judiciaire de H._ fait état d'une condamnation par le Ministère public de l’arrondissement de La Côte, le 3 mars 2011, à une peine pécuniaire de 35 jours-amende à 80 fr. le jour-amende, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu’à une amende de 960 fr., pour violation grave des règles de la circulation routière.
2.
Le dimanche 17 juin 2012, à 16h53, un radar a flashé, à la [...], au lieu dit [...], commune de [...], un conducteur au guidon du motocycle, immatriculé VD [...], propriété de H._. La vitesse du motocycle a été mesurée à 138 km/h, marge de sécurité déduite, sur un tronçon limité à 80 km/h.
Dans sa lettre d’opposition du 24 août 2012 à l’ordonnance pénale rendue par le Ministère public, H._ a indiqué qu’il ne connaissait pas le conducteur qui avait été flashé (P. 8). Entendu par le Ministère public le 7 novembre 2012, H._ a contesté être le conducteur du motocycle en cause. Il a expliqué que le casque figurant sur la photo radar (P. 5) ne lui appartenait pas et que sa morphologie était différente de celle apparaissant sur la photographie. Il a également affirmé ne pas pouvoir donner de nom et ne pas vouloir dénoncer un de ses amis à qui il avait prêté sa nouvelle moto (cf. PV aud. 1). A l’audience de jugement, H._ a maintenu avoir prêté sa moto le dimanche 17 juin 2012 à un de ses amis dont il ne pouvait pas dévoiler l’identité de peur de l’exposer à des sanctions pénales et administratives lourdes, ainsi qu’à un licenciement en cas de perte de son permis de conduire (jgt., p. 3). | En droit :
1.
Selon l’art. 399 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (al. 1). La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (al. 3).
Interjeté dans les forme et délais légaux par une partie ayant qualité pour recourir contre le jugement du tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel du Ministère public est recevable. Il y a donc lieu d’entrer en matière sur le fond.
2.
Aux termes de l'art. 398 CPP, la juridiction d'appel jouit d'un plein pouvoir d'examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L'appel peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronées des faits et pour inopportunité (al. 3).
3.
Le Ministère public reproche au premier juge d’avoir libéré H._ de toute infraction en se basant uniquement sur les déclarations de ce dernier selon lesquelles il n’était pas au guidon du motocycle quand il a été flashé et sur la photo radar qui ne correspondait pas à la morphologie du prévenu. Le Ministère public soutient que la veste en cuir du prévenu s’est gonflée au vent et a fait apparaître sa stature plus imposante. Il indique également que H._ s’est dénoncé de lui-même à la police en indiquant ses coordonnées, n’a pas contesté son retrait de permis de quatorze mois intervenu à la suite des événements du 17 juin 2012 et n’a pas été constant dans ses déclarations.
3.1
La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n'ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in: Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
3.2
La présomption d'innocence, qui est garantie par l'art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (ATF 127 I 38 c. 2a; TF 6B_562/2010 du 28 octobre 2010 c. 2.1.1; TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1).
Comme principe présidant à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes; on parle alors de doutes raisonnables (ATF 120 Ia 31 c. 2c; TF 6B_562/2010 du 28 octobre 2010 c. 2.1.1; TF 6B_831/2009 précité c. 2.2.2). Des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (ATF 127 I 38 c. 2a). Dans cette mesure, l'appréciation des preuves se confond avec l'interdiction générale de l'arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence.
3.3
Selon la jurisprudence, le conducteur d'un véhicule automobile ne saurait se voir condamner à une infraction de la loi fédérale sur la circulation routière que s'il est établi à satisfaction de droit qu'il est bien l'auteur de cette infraction. Autrement dit, le juge ne peut prononcer une telle condamnation que s'il a acquis la conviction que c'est bien l'intéressé qui a enfreint les règles de la circulation. Lorsqu'une infraction a été dûment constatée, sans cependant que son auteur puisse être identifié, l'autorité ne saurait se borner à présumer que le véhicule était piloté par son détenteur, sauf à ce dernier à rapporter la preuve qu'il l'était en réalité par un tiers. Lorsque l'auteur d'une infraction constatée ne peut être identifié sur-le-champ, le juge peut certes, dans un premier temps, partir de l'idée que le détenteur du véhicule en question en était aussi le conducteur au moment critique. Mais dès lors que cette version est contestée par l'intéressé, il lui appartient d'établir sa culpabilité sur la base de l'ensemble des circonstances, sans franchir les limites de l'arbitraire. S'il arrive à la conclusion que le détenteur, malgré ses dénégations, est bien le conducteur fautif, la condamnation est fondée. Il ne suffit pas au détenteur d'invoquer le droit au silence ou le droit de ne pas s'auto-incriminer pour échapper à une sanction lorsque sa culpabilité n'est pas douteuse. Lorsque l'accusé fait des déclarations contradictoires, il ne peut invoquer la présomption d'innocence pour contester les conclusions défavorables que le juge a, le cas échéant, tirées de ses déclarations. Le droit de se taire interdit au juge de fonder une condamnation exclusivement ou essentiellement sur le silence du prévenu, ou sur son refus de répondre à des questions ou de déposer. En revanche, ce droit n'interdit pas de prendre en considération le silence du prévenu dans des situations qui appellent assurément une explication de sa part, pour apprécier la force de persuasion des éléments à charge; à cet égard, le droit de se taire n'a donc pas de portée absolue. Pour apprécier si le fait de tirer de son silence des conclusions défavorables au prévenu est contraire à l'art. 6 CEDH, il faut tenir compte de l'ensemble des circonstances et rechercher dans chaque cas si les charges de l'accusation sont suffisamment sérieuses pour appeler une réponse. Le juge de la cause pénale ne peut pas conclure à la culpabilité du prévenu simplement parce que celui-ci choisit de garder le silence. C'est seulement si les preuves à charge appellent une explication que l'accusé devrait être en mesure de donner, que l'absence de celle-ci peut permettre de conclure, par un simple raisonnement de bon sens, qu'il n'existe aucune explication possible et que l'accusé est coupable (cf. TF 6B_562/2010 du 28 octobre 2010, JdT 2010 I 567 c. 2.1.2 et 2.1.3 et réf. cit.).
3.4
En l’espèce, le premier juge a retenu que la photo radar, prise de dos, ne permettait pas d’identifier le conducteur de la moto en cause. L’enquête n’avait d’ailleurs pas permis d’établir qui était au guidon de celle-ci le dimanche 17 juin 2012. De plus, la différence de corpulence entre le prévenu et le conducteur photographié était notable et les déclarations du prévenu n’avaient pas varié. Pour ces motifs, le Tribunal de police a estimé qu’il existait un doute sur l’identité du contrevenant, de sorte qu’il a libéré H._ du chef d’accusation de violation grave des règles de la circulation routière.
A l’instar du premier juge, la Cour de céans constate que les déclarations de H._ ont été constantes. Il a d’abord indiqué qu’il ne connaissait pas l’identité du conducteur, ayant prêté plusieurs dimanche de suite sa nouvelle moto à des amis (P. 8 et PV aud. 1 p. 2). Lorsqu’il a pris connaissance de la photo radar, il a contesté être celui qui conduisait le motocycle, le casque ne lui appartenant pas et la corpulence de l’homme photographié étant différente de la sienne. Par la suite, il a expliqué qu’il ne voulait pas dénoncer la personne qui était au guidon de son motocycle le 17 juin 2012. Le prévenu ne s’est ainsi aucunement contredit durant la procédure, il n’a simplement pas voulu révéler l’identité de la personne contrevenante dès le moment où il a été convaincu que ce n’était pas lui qui avait été flashé. S’agissant de la personne photographiée, il semble très clairement, à l’examen de la photo radar, et plus particulièrement à l’examen des cuisses du motard, que ce dernier soit un grand gabarit. La Cour de céans ne peut ainsi se rallier à la théorie du Ministère public, selon laquelle la veste du motard se serait gonflée au vent. Enfin, le fait que le prévenu n’ait pas recouru contre son retrait de permis et qu’il ait un antécédent pour excès de vitesse ne sont pas décisifs.
Partant, hormis le fait que H._ soit le détenteur du motocycle en cause, il n’existe pas d’éléments suffisants pour admettre sa culpabilité. En conséquence, c'est à bon droit que le Tribunal de police de l’arrondissement de La Côte a libéré le prévenu du chef d’accusation de violation grave des règles de la circulation routière.
5.
Le Ministère public estime qu’en cas de confirmation du jugement querellé, il y aurait lieu de renvoyer la cause pour nouvelle instruction afin de condamner le prévenu pour induction de la justice en erreur.
5.1
Selon l’art. 304 CP, se rend coupable d’induction de la justice en erreur, celui qui aura dénoncé à l’autorité une infraction qu’il savait n’avoir pas commise.
5.2
En l’occurrence, le Ministère public n’a jamais fait mention d’une condamnation pour induction de la justice en erreur dans son ordonnance pénale du 17 août 2012. Quoi qu’il en soit, au vu des éléments retenus ci-dessus (supra consid. 3.4), les éléments constitutifs de dite infraction ne sont manifestement pas réunis.
Ce grief, mal fondé, doit être rejeté.
5.3
Le droit de ne pas s’incriminer concerne la personne visée par l’enquête et ses proches, mais pas les tiers, au sens de l’art. 169 al. 2 CPP. Celui qui ne veut pas dénoncer un ami paraît donc susceptible de subir les conséquences de l’art. 176 CPP du fait qu’il est le détenteur en cause, le refus de révéler l’identité du réel conducteur ne pouvant conduire à une condamnation pour violation de la loi sur la circulation routière. Cette question n’a toutefois pas à être tranchée ici.
6.
En définitive, l'appel du Ministère public doit être rejeté en tant que manifestement mal fondé (art. 390 al. 2 CPP) et le jugement attaqué entièrement confirmé.
Une indemnité de défenseur d’office pour la procédure d’appel d’un montant de 388 fr., TVA comprise, est allouée à Me Morzier, tenant compte des opérations effectuées et du fait que l’avocat n’a finalement pas été requis de procéder sur le fond.
Vu l'issue de la cause, les frais d'appel comprenant l’émolument de 880 fr. (art. 21 al. 1 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1]) et l’indemnité allouée au défenseur d’office de l’intimé, par 388 fr., TVA comprise, doivent être laissés à la charge de l’Etat (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
cae9eac6-bc97-42a4-a42c-e85c6fa120b0 | En fait :
A.
Par ordonnance pénale du 25 février 2011, le Préfet du district de Morges a condamné A.I._ à une amende de 350 fr. pour infraction simple à la LCR (Loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la circulation routière, RS 741.01), dit qu'à défaut de paiement de l'amende, la peine privative de liberté de substitution sera de 4 jours et mis les frais, par 250 fr., soit 50 fr. à titre de frais du prononcé et 200 fr. relatifs aux frais d'intervention de la gendarmerie, à sa charge.
B.
Il ressort de l'ordonnance pénale du 25 février 2011 et du rapport de police du 28 novembre 2010 que A.I._ circulait le 27 novembre 2010 au volant du véhicule immatriculé [...] en direction d'Allaman, sur la route de la Gare. Dans une courbe à gauche, il a perdu la maîtrise de sa voiture qu'il conduisait à une vitesse inadaptée sur une route recouverte de neige. Son véhicule a ainsi glissé vers l'extérieur du virage avant d'escalader un trottoir et de terminer sa course en contrebas d'un talus, l'avant gauche contre un poteau métallique.
Entendu par la police cantonale, A.I._ a déclaré qu'il était seul à bord du véhicule en question.
C.
Par sommation du 12 avril 2011, le Préfet du district de Morges a sommé A.I._ de payer dans les 30 jours le montant de 630 fr., soit l'amende de 350 fr., les frais s'élevant à 250 fr. ainsi que les frais de sommation de 30 francs.
Par courrier du 16 juin 2011, le Préfet du district de Morges a imparti un délai de 10 jours à l'intéressé pour justifier du fait que sa situation matérielle s'était notablement détériorée sans sa faute depuis le prononcé de l'amende et a indiqué qu'à défaut, l'exécution de la peine serait ordonnée.
Par courrier du 26 juin 2011, le Tuteur général a exposé que la situation financière de A.I._ ne lui permettait pas de s'acquitter de l'amende. Le Préfet du district de Morges a répondu le 7 juillet 2011 que compte tenu de ces explications, il serait dans l'obligation de poursuivre la procédure pénale à son encontre en ordonnant la conversion de l'amende en peine privative de liberté de substitution.
Par ordonnance du 22 juillet 2011, le Préfet du district de Morges a ordonné la conversion de l'amende de 350 fr. en 4 jours de peine privative de liberté de substitution, conformément à l'ordonnance du 25 février 2011, et mis les frais, par 280 fr., à la charge de A.I._.
Dans une lettre du 16 juillet 2011 au Service des automobiles et de la navigation, l'intéressé a exposé que le 27 novembre 2010, en prétendant qu'il était au volant du véhicule, il avait menti pour protéger son fils, B.I._, qui conduisait sans autorisation. Il a expliqué que la situation lui portait préjudice à présent, son permis de conduire ayant été saisi, et qu'il souhaitait revenir sur la déposition faite aux deux agents de police le 27 novembre 2010.
D.
Par courrier du 19 juillet 2011, le Tuteur général a requis la révision de l'ordonnance pénale du 25 février 2011 condamnant A.I._ à une amende de 350 fr. ainsi qu'aux frais de la procédure, par 250 fr., compte tenu du fait que ce dernier s'était rétracté en expliquant ne pas être l'auteur des faits pour lesquels il avait été condamné.
Par courrier du 11 octobre 2011, le Procureur du Ministère public central, division affaires spéciales, contrôle et mineurs a exposé qu'une révision n'était envisageable que si les déclarations de A.I._ étaient confirmées par son fils B.I._ ainsi que par la détentrice du véhicule [...]. | En droit :
1.
1.1.
La requête de révision a été déposée le 19 juillet 2011 contre une ordonnance pénale rendue en février de la même année. Partant, c’est le Code de procédure pénale entré en vigueur le 1
er
janvier 2011 qui s’applique tant à la procédure qu’aux motifs de la révision (TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011 c. 1.1).
1.2.
La demande de révision a été déposée par le Tuteur général au nom de A.I._. Le Tuteur général a qualité pour agir au nom de son pupille (cf. art. 106 al. 2 et 410 al. 1 CPP). Ce dernier ayant été condamné par l'ordonnance litigieuse, il a un intérêt juridiquement protégé à en demander la révision. Motivée, la demande de révision est valide en la forme (cf. l'art. 411 al. 1 CPP). La juridiction d'appel est compétente pour statuer sur la demande de révision (art. 21 al. 1 let. b CPP). La requête en révision est ainsi recevable et il doit donc être entré en matière.
2.
2.1.
L'art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par un jugement entré en force d'en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné. Cette disposition reprend la double exigence posée par l'art. 385 CP selon laquelle les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être nouveaux et sérieux (Message du Conseil fédéral relatif à l’unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 II 1057 ss, spéc. 1303; TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011 c. 1.2 et les références citées).
Les faits ou moyens de preuve sont nouveaux lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire lorsqu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit. Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l'état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011 c. 1.2; ATF 130 IV 72 c. 1).
2.2.
Une demande de révision dirigée contre une ordonnance de condamnation doit être qualifiée d'abusive si elle repose sur des faits que le condamné connaissait initialement, qu'il n'avait aucune raison légitime de taire et qu'il aurait pu révéler dans une procédure ordinaire mise en oeuvre par une simple opposition. En revanche, une révision peut entrer en considération à l'égard d'une ordonnance de condamnation pour des faits et des moyens de preuve importants que le condamné ne connaissait pas au moment du prononcé de l'ordonnance ou dont il ne pouvait pas se prévaloir ou n'avait pas de raisons de se prévaloir à cette époque (ATF 130 IV 72 c. 2.3).
Dès lors que l'ordonnance pénale de l'art. 352 CPP revêt les mêmes caractéristiques que l'ancienne ordonnance de condamnation selon le Code de procédure pénale vaudois (Gilléron/Killias, in: Kuhn/Jeanneret (éd.), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, nn. 1 ss ad art. 352 CPP), cette jurisprudence, rendue sous l'empire de l'ancien droit, s'applique aussi à une procédure de révision régie par le CPP (TF 6B_310/2011 du 20 juin 2011 c. 1.3).
2.3.
En l'espèce, au titre de motif de révision, le requérant fait valoir qu'il n'était pas au volant du véhicule lors de la perte de maîtrise, mais qu'il s'agissait de son fils B.I._ qu'il avait voulu protéger. L'identité du conducteur n'est toutefois pas un élément de fait inconnu au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP, lequel serait nouvellement parvenu à la connaissance du requérant. En effet, les enquêteurs ont instruit le point de savoir qui était au volant et ont retenu les déclarations de A.I._ qui a affirmé avoir été au volant dudit véhicule lors de la perte de maîtrise. Si ce dernier n'était pas au volant du véhicule en question, il s'agit d'un fait qu'il connaissait initialement, qu'il n'avait aucune raison légitime de taire et qu'il aurait pu révéler dans une procédure ordinaire mise en oeuvre par une simple opposition à l'ordonnance pénale. Les conditions d'une révision ne sont dès lors manifestement pas réunies. Au demeurant, le requérant n'a réagi ni à la condamnation pénale à une amende, ni à la sommation, ni à la lettre du préfet lui impartissant un délai pour justifier la détérioration de sa situation financière. Il apparaît bien plutôt qu'il change sa version des faits une fois qu'il a compris les conséquences administratives des infractions réprimées. La demande déposée en son nom par le Tuteur général doit en conséquence être rejetée.
3.
Vu l'issue de la cause, les frais de révision (art. 21 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du 28 septembre 2010, RSV 312.03.1], par renvoi de l'art. 22 TFJP) sont mis à la charge de A.I._ (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,011 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
cb2b25b5-153f-45f7-89a9-27608b95b084 | En fait :
A.
Par jugement rendu le 13 novembre 2014, le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de Lausanne a condamné A.E._ pour brigandage qualifié, infraction et contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants à une peine privative de liberté de cinq ans et demi et à une amende de cent francs (I, II et IV). Il a également condamné B.E._ pour brigandage qualifié et contravention à la Loi fédérale sur les stupéfiants à une peine privative de liberté de cinq ans et demi et à une amende de 100 fr. (V, VI et VIII). Il a ordonné le maintien en exécution anticipée de peine des deux condamnés (III et VII). Il a encore pris acte des reconnaissances de dettes signées en page 19 du procès-verbal et a statué sur les conclusions civiles du plaignant (dommages-intérêts et tort moral) et les a rejetée pour le surplus (dépens pénaux) (IX à XI). Enfin, le Tribunal a statué sur les pièces à conviction, les frais et les indemnités d’office (XIV à XVIII).
B.
a)
Par déclaration d’appel du 15 décembre 2014, A.E._ a formé appel contre ce jugement, concluant à sa réforme, en ce sens qu’il est condamné pour brigandage qualifié au sens de l’art. 140 ch. 2 CP et contravention à la LStup à une peine privative de liberté assortie d’un sursis partiel. Subsidiairement, il a conclu à l’annulation du jugement et au renvoi de la cause en première instance pour nouvelle décision.
b) Par déclaration d’appel du 12 décembre 2014, B.E._ a également formé appel contre ce jugement, concluant à sa réforme en ce sens qu’il est condamné pour tentative de brigandage qualifié au sens de l’art. 140 ch. 2 CP et contravention à la LStup à une peine privative de liberté compatible avec un sursis partiel. Subsidiairement, il a conclu à l’annulation du jugement et au renvoi de la cause en première instance pour nouvelle décision.
c) Par télécopie du 10 mars 2015, N._ a requis le renvoi de l’audience d’appel en raison du fait qu’il n’avait pas été cité à comparaître (P. 222). Cette requête a été rejetée, les appels des prévenus ne portant pas sur les conclusions civiles allouées (P. 227).
C.
Les faits retenus sont les suivants :
La situation personnelle des accusés
1.
A.E._ est né le [...] en Italie, pays dont il est ressortissant. Second d’une famille de cinq enfants, il a été élevé d’abord par ses parents, puis dans différents foyers où il a été placé en raison de problèmes familiaux. Il a suivi l’école obligatoire durant douze ans, redoublant des classes à quatre reprises, puis a travaillé dans l’agriculture sans jamais acquérir de formation professionnelle. En 2005, il a séjourné durant dix mois en Suisse sans exercer d’activité lucrative. C’est à cette époque qu’il a rencontré sa future épouse, [...]. A.E._ est rentré en Sicile en février 2006 et dit y avoir travaillé comme vitrier. Par la suite, il a purgé différentes peines de prison, dont il sera question ci-dessous, d’abord en étant incarcéré, puis sous la forme d’arrêts domiciliaires. Après avoir été libéré en octobre 2011, il a à nouveau travaillé dans l’agriculture. C’est après la naissance de son fils [...], le [...], qu’A.E._ a décidé de s’installer à nouveau avec sa famille en Suisse, où ils sont arrivés le 18 mai 2012. Il ressort d’un certificat de travail établi le 3 février 2013 (P. 202) que le prévenu a travaillé pour le restaurant « [...]» à Lausanne en qualifié de remplaçant plongeur du 23 septembre 2012 au 14 janvier 2013. Il percevait alors un salaire horaire brut de 18 fr. 80, vacances, jours fériés et treizième salaire non compris. Par la suite, il s’est inscrit dans une agence temporaire et a été placé chez [...] durant un mois et demi. Pour le surplus, la famille percevait le revenu d’insertion. Les services sociaux s’acquittaient du loyer de la chambre occupée par la famille à l’Hôtel [...] et leurs primes d’assurances-maladie étaient entièrement subsidiées. Le prévenu dit n’avoir aucune dette dans notre pays. A l’audience d’appel, il a expliqué recevoir régulièrement des visites de sa famille, mais souffrir de ne pas avoir de relation avec son fils. Il souhaite entamer une formation de boulanger pâtissier en détention, et travaille déjà dans cet atelier. Il a encore indiqué avoir déjà passé un premier test pour débuter cette formation, laquelle devrait en principe durer deux ans.
Par décision du 4 octobre 2013, le Service de la population du canton de Vaud a refusé l’octroi d’une autorisation de séjour à A.E._ et a prononcé son renvoi. Aux débats de première instance, le prévenu a indiqué qu’il souhaitait s’installer auprès de sa famille en Belgique et œuvrer dans le domaine de la pâtisserie.
Le casier judiciaire suisse d’A.E._ est vierge de toute inscription. Son casier judiciaire italien fait en revanche état de trois condamnations :
- 17 octobre 2003 par la Cour d’appel pour les mineurs de Catagne pour violence sexuelle en réunion à trois ans de réclusion, la peine ayant été suspendue conditionnellement au sens de l’art. 163 du Code pénal italien ;
- 7 mai 2009 par le Tribunal de Cantagirone pour vol à main armée et usage illicite de cartes de crédit à une année et onze mois de réclusion et à une amende de 600 €, la peine ayant également été suspendue conditionnellement ;
- 21 juin 2010, par la Cour d’appel de Catagne, pour résistance à un officier public et vandalisme à deux ans et neuf mois de réclusion, peine réduite au total à 180 jours.
Pour les besoins de la présente cause, A.E._ a été détenu préventivement du 24 avril 2013 au 23 janvier 2014, soit durant 275 jours. Il exécute actuellement sa peine de façon anticipée depuis le 24 janvier 2014.
2.
De nationalité italienne, B.E._, frère d’A.E._, est né le [...]. Il a suivi l’école obligatoire durant huit ans et a été, tout comme son frère, placé durant pratiquement toute son enfance. A l’issue de sa scolarité en 2005, il a séjourné chez sa tante et l’un de ses frères domiciliés en Suisse. Il aidait alors sa tante qui travaillait le week-end sur des marchés. A son retour dans son pays, il a exercé divers petits emplois comme ouvrier agricole, coiffeur, cuisinier ou pizzaïolo mais également purgé différentes peines de prison dont il sera question ci-dessous. B.E._ s’est en outre mis en ménage avec son amie et a eu deux enfants, [...], né le [...], et [...], né [...]. Sa compagne a malheureusement perdu un troisième enfant à cinq mois de grossesse, ce qui a eu de graves conséquences sur sa santé. Elle a ainsi souffert d’un empoisonnement du sang qui a engendré un coma de deux mois, selon les dires de B.E._. Il ressort de certificats médicaux au dossier qu’elle a également souffert d’une thrombose et d’une insuffisance rénale.
Lorsqu’il a été arrêté, B.E._ dit avoir été en visite dans notre pays. Il n’avait alors aucune activité lucrative et c’est sa compagne qui subvenait aux besoins de la famille. Aux débats d’appel, il a expliqué que durant sa détention il travaillait dans l’atelier bois mais qu’il était dans l’attente d’une place dans l’atelier boulangerie pâtisserie dans lequel il préférerait travailler. Le dernier rapport de détention le concernant montre une nette amélioration de son attitude en détention (P. 226)
Le casier judiciaire suisse de B.E._ est vierge de toute inscription. Son casier judiciaire italien fait en revanche état de quatre mentions :
- le 22 novembre 2007, par le Tribunal des mineurs de Catagne, pour recel et tentative de vol, à une année de réclusions et 250 € d’amende ;
- le 7 mai 2009 par le Tribunal de Caltagirone pour vol à main armée et usage illicite de cartes de crédit à deux ans et deux mois de réclusion et 600 € d’amende, la peine ayant été réduite de cent trente-cinq jours au total ;
- le 16 octobre 2009 par la Cour d’appel des mineurs de Caltanissetta pour violence privée à deux mois de réclusion ;
- le 8 janvier 2010, le Procureur de la République pour mineurs de Caltanissetta a prononcé un cumul des peines infligées par les deux autorités susmentionnées, soit un total de deux ans et treize jours de réclusion et une amende de 600 Euros.
Pour les besoins de la présente cause, B.E._ a été détenu préventivement du 23 avril 2013 au 9 janvier 2014, soit durant 262 jours. Il exécute sa peine de façon anticipée depuis le 10 janvier 2014.
Les faits
3.
A Lausanne, entre le 19 et le 23 avril 2013, A.E._, qui connaissait les lieux où s’approvisionner en produits stupéfiants au contraire de ses deux comparses, a acquis et fourni de la cocaïne et de la marijuana au prévenu B.E._ et à [...]. A.E._ a notamment acheté 1.5 grammes de cocaïne qu’il a partagés à parts égales avec ces deux personnes le 23 avril 2013 à l’Hôtel [...].
4.
Le 23 avril 2013, en cours d’après-midi, alors qu’ils se trouvaient dans la chambre de l’Hôtel [...] à Lausanne occupée notamment par A.E._, ce dernier, son frère B.E._ et le prétendu beau-frère de celui-ci, [...] (enquête distincte), ont décidé de se procurer de l’argent par n’importe quel moyen. D’un commun accord, les manches de leurs vêtements ont été coupées afin de servir de cagoules pour cacher leurs visages lorsqu’ils agiraient. Munis de ces accessoires, les trois hommes se sont ensuite déplacés en transports publics, notamment au moyen du LEB jusqu’à l’arrêt dit « Le Lussex » à Jouxtens-Mézery. Ils ont ensuite pris place dans le véhicule automobile Fiat que leur tante, [...], avait stationné à cet endroit et se sont rendus chez une connaissance au [...], à Romanel-sur-Lausanne. Peu avant 19h00, ils ont quitté cet endroit et ont effectué le repérage, en voiture, d’un commerce dans les environs. Ils ont jeté leur dévolu sur le kiosque situé à la rue du [...] à Romanel, établissement qu’A.E._ connaissait pour s’y être rendu à quelques reprises auparavant. A.E._ a stationné le véhicule dont ils disposaient sur le parking situé près de la gare de Romanel-sur-Lausanne et les trois hommes se sont rendus ensemble à pied, vers le kiosque ciblé, chacun ayant pris soin de se munir d’une des cagoules artisanales décrites ci-dessus. A.E._ et B.E._ s’étaient en outre armés chacun d’un couteau à lame repliable, alors que [...] était porteur d’un poinçon.
Vers 19h05, alors que N._, exploitant du kiosque en question, faisait les comptes au terme de sa journée de travail et se tenait hors de son comptoir, le dos tourné vers la porte d’entrée, les trois intéressés ont pénétré dans la pièce, les visages dissimulés sous leurs cagoules et tenant chacun dans leurs mains leur arme respective, lame dépliée.
A.E._, entré en premier, s’est immédiatement dirigé vers le commerçant et l’a saisi de la main gauche, de face, au niveau du col, tout en pointant sur son visage, à distance, la lame du couteau qu’il tenait de la main droite, alors que B.E._ s’est directement rendu vers la caisse enregistreuse déposée sur le comptoir.
Par réflexe, N._ a tenté de repousser son agresseur en criant au secours. Dans ce mouvement, il a également tenté d’enlever la cagoule de A.E._, lui occasionnant des griffures au cou, alors que ce dernier s’y opposait. A.E._ et [...] ont ensuite poussé leur victime en arrière contre un mur, puis B.E._ est également intervenu. Il a notamment signifié à ses deux comparses de quitter les lieux.
Au cours de cette altercation, les deux prévenus à tout le moins ont utilisé leur arme respective et N._ a notamment subi des lésions au visage très près du cou, à un bras et au flanc, lesquelles ont provoqué un important saignement. Le sang de la victime a été relevé sur chacune des trois armes.
Les trois comparses ont quitté les lieux en emportant une somme estimée à 1'700 fr. en billets qui se trouvait dans la caisse enregistreuse. Ils ont ensuite rejoint leur véhicule pour se rendre à l’arrêt du LEB « Le Lussex » où ils se sont parqués avant de monter dans un convoi du LEB, tandis que la victime, en sang, était sortie de son commerce avant d’être prise en charge par l’exploitante d’un commerce voisin puis des secours.
B.E._ a été interpellé par la police dans le convoi du LEB alors que ses deux comparses sont parvenus à rejoindre Lausanne et l’Hôtel [...]. Ces derniers se sont encore rendus dans un établissement public en ville avant que [...] ne décide de prendre la fuite et qu’A.E._ ne rejoigne son domicile où il a été interpellé à son tour par la police. Le butin n’a pas été retrouvé.
5.
L’examen clinique de la victime N._ (P. 41) a permis de constater trois plaies à bords nets, suturées, respectivement à la face externe du bras gauche (2,3 cm), au niveau du flanc abdominal gauche (plaie pénétrante de 4 cm de long) et de l’oreille gauche au bord de la bouche (13 cm) ; quatre plaies à bords nets, dont certaines suturées, à la face antérieure des doigts de la main gauche (0,7, 1,5, 2,5, 3,5, 4,2 x 0,1 cm) ; plusieurs petites plaies superficielles du 3
ème
doigt de la main gauche mesurant jusqu’à 2 cm ; une plaie superficielle au niveau de la région thoracique latérale gauche (1 cm) ; deux dermabrasions croûteuses respectivement du front gauche et de la main droite ; deux ecchymoses respectivement au niveau de la face externe du bras à gauche (4x3,5 cm) et l’aile gauche du nez (0,5 x 0,3 cm). L’ensemble de ces lésions est compatible et évocateur d’une hétéro-agression.
L’examen par CT-Scan de la victime a mis en évidence une plaie du flanc gauche avec un emphysème sous-cutané en regard, un hématome des tissus mous et une suffusion hémorragique intra-péritonéale. Une infiltration du tissu adipeux sous-cutané en regard de l’arc axillaire de la 10
ème
côte à gauche a également été observée.
L’examen clinique du prévenu A.E._ a quant à lui permis de constater une ecchymose à la face antérolatérale droite du cou, ainsi que deux dermabrasions situées respectivement à la face antéro-externe du poignet droit et à la face postérieure de la main gauche. Ces lésions peuvent avoir été provoquées au moment des faits (P. 39).
L’examen clinique du prévenu B.E._, a permis de constater trois dermabrasions au niveau de la face postérieure de la main gauche. Ces lésions peuvent avoir été provoquées au moment de sa sortie du kiosque (P. 40). | En droit :
1.
Interjeté dans les formes et délais légaux par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), les appels de A.E._ et de B.E._ sont recevables.
2.
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé (a) pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, (b) pour constatation incomplète ou erronée des faits et (c) pour inopportunité (al. 3).
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves. L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement. L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l’appel (art. 389 al. 3 CPP ; TF 6B_78/2012 du 27 août 2012).
2. L’appel d’A.E._
2.1
A.E._ conteste tout d’abord avoir emporté la somme de 1'700 fr. ensuite de l’agression du buraliste. Il soutient qu’aucun des éléments d’appréciation contraire du Tribunal ne résiste à l’examen, plaidant ainsi la tentative de brigandage.
2.1.2
La constatation des faits est incomplète au sens de l’art. 398 al. 3 let. b CPP lorsque toutes les circonstances de fait et tous les moyens de preuve déterminants pour le jugement n’ont pas été pris en compte par le tribunal de première instance. Elle est erronée lorsque le tribunal a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces, par exemple (Kistler Vianin, in : Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 19 ad art. 398 CPP).
2.1.3
Pour fonder leur conviction que les auteurs avaient emporté 1'700 fr. en billets qui se trouvaient dans la caisse enregistreuse, les premiers juges se sont d’abord fondés sur les déclarations précises et documentées du plaignant qui démontrent effectivement un tel manco dans la caisse, manco constaté également par les enquêteurs sur la base d’une photographie de la bande de caisse montrant que la recette du jour s’élevaient à 2'706 fr. 70 et qui correspond au décompte effectué par le plaignant (P. 157/1, p. 5). On constate ainsi qu’il n’est pas vraisemblable que le plaignant ait fait état d’un butin qui aurait en réalité été inexistant et c’est en vain que l’appelant se prévaut des déclarations du plaignant sur le fait qu’il avait encore une somme de 4'500 fr. dans la poche de son pantalon au moment du brigandage, correspondant au fond de caisse de la veille. N._ a ainsi distingué les différentes sommes selon qu’elles se trouvaient dans la caisse enregistreuse ou dans sa poche et on ne discerne aucune incohérence dans son récit, une fois de plus corroboré par les investigations de la police.
A l’inverse, les prévenus n’ont cessé de livrer des versions minimalistes sur leur rôle respectif, en particulier également, comme on le verra, sur la violence dont ils ont fait preuve lors de la perpétration du délit. A.E._ ne peut donc rien déduire du fait que son frère a affirmé s’être approché de la caisse et avoir vu qu’elle était vide. D’abord, comme l’ont relevé les premiers juges, l’argent peut également avoir été pris dans un tiroir sous la caisse enregistreuse, comme l’a expliqué le plaignant. Ensuite et surtout, les déclarations des comparses ont été contradictoires au sujet de leur comportement dans le commerce, les uns soupçonnant les autres d’avoir pris l’argent (jugement attaqué, p. 36). Pour le reste, il est fort probable qu’une partie du butin, qui n’est pas important, a été dépensée et une autre dissimulée avant l’arrestation, raison pour laquelle les enquêteurs n’ont rien trouvé sur les prévenus au moment de leur interpellation.
Partant, ce premier grief doit être rejeté.
2.2
L’appelant ne conteste pas avoir été porteur d’une arme dangereuse au sens de l’art. 140 ch. 2 CP, mais conteste sa condamnation pour brigandage qualifié au sens de l’art. 140 ch. 4 CP. Il fait valoir qu’il n’a jamais eu l’intention de mettre en danger la vie de la victime ou de lui causer une lésion grave. Il explique que les lésions de la victime résulteraient avant tout du fait qu’elle s’est défendue. Il soutient en outre que les preuves font défaut pour démontrer que c’est l’arme dont il était porteur qui aurait provoqué les lésions au visage du plaignant. Il invoque une violation de la présomption d’innocence et une violation de l’art. 140 ch. 4 CP, portant sur son intention dolosive.
2.2.1
Selon l'art. 10 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force (al. 1). Le tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure (al. 2).
La présomption d'innocence, garantie par l’art. 32 al. 1 Cst. (Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 ; RS 101), ainsi que son corollaire, le principe
in dubio pro reo
, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. En tant que règle relative au fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie que toute personne prévenue d'une infraction pénale doit être présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement établie et, partant, qu'il appartient à l'accusation de prouver la culpabilité de celle-là (TF 6B_831/2009 du 25 mars 2010 c. 2.2.1 ; ATF 127 I 38 c. 2a). Comme règle d'appréciation des preuves, le principe
in dubio pro reo
est violé si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes ; on parle alors de doutes raisonnables (TF 6B_831/2009 précité c. 2.2.2 ; ATF 120 Ia 31 c. 2c). Sur ce point, des doutes simplement abstraits et théoriques ne suffisent pas, car de tels doutes sont toujours possibles et une certitude absolue ne peut être exigée. Bien plutôt, il doit s’agir de doutes importants et irréductibles, qui s’imposent au vu de la situation objective (TF 6B_18/2011 du 6 septembre 2011 c. 2.1).
2.2.2
Selon l’art. 140 CP, la gravité du brigandage est définie selon plusieurs niveaux. Cette infraction sera punie d’une peine privative de liberté d’un an au moins, si son auteur est muni d’une arme à feu ou d’une autre arme dangereuse (art. 140 ch. 2 CP). La peine sera de deux ans au moins si l’auteur a agi en qualité d’affilié à une bande formée pour commettre des brigandages ou des vols ou si, de toute autre manière, sa façon d’agir dénote qu’il est particulièrement dangereux (art. 140 ch. 3 CP). Enfin, le dernier stade d’aggravation est réalisé et la peine minimale sera de cinq ans, si le délinquant a mis la victime en danger de mort, lui a fait subir une lésion corporelle grave, ou l’a traitée avec cruauté (art. 140 ch. 4 CP).
La circonstance aggravante de la mise en danger de mort prévue à l’art. 140 ch. 4 CP doit être interprétée restrictivement en raison de l’importance de la peine, qui est une peine privative de liberté de cinq ans au moins et qui correspond ainsi à la peine du meurtre (art. 111 CP). Selon la jurisprudence, la mise en danger de mort de la victime suppose un danger concret, imminent et très élevé que la mort puisse survenir facilement, même sans la volonté de l’auteur (ATF 121 IV 67 c. 2b). Les circonstances de fait et le comportement concret de l’auteur sont décisifs pour déterminer si la victime a couru un risque réel de lésions mortelles (ATF 117 IV 427 c. 3b ; ATF 117 IV 419 c. 2).
En définitive, le danger de mort est réalisé, et partant l’art. 140 ch. 4 CP est applicable, si l’auteur a créé volontairement une situation telle que la mort pouvait survenir indépendamment de sa volonté, par l’effet du hasard, d’un geste incontrôlé de sa part ou d’une réaction de la victime ou d’un tiers (ATF 121 IV 67, précité, c. 2/bb).
Les circonstances aggravantes définies aux chiffres 2 à 4 de l’art. 140 CP constituent des circonstances dites réelles qui confèrent à l’acte une gravité objective plus grande et qui influent en conséquence sur le sort de tous les participants, à condition qu’ils les connaissent (par opposition aux circonstances personnelles). Ainsi, le coauteur et le complice du brigandage sont passible de la même sanction que les auteurs, même si un seul de ceux-ci réalise une des circonstances aggravantes, lorsque ce comportement relève de la décision dont l’infraction est le fruit (TF 6S.203/2005 du 6 septembre 2005 et les références citées).
2.2.3
En l’espèce, la Cour constate en premier lieu que les faits ont été retenus sans violation de la présomption d’innocence. A.E._ ne peut nier, et d’ailleurs il ne le fait pas dans sa déclaration d’appel, qu’il a fait usage d’un couteau pour agresser sa victime. Il ne peut non plus nier qu’il en a fait usage pour blesser sa victime puisque du sang de celle-ci a également été retrouvé sur la lame du couteau qu’il a utilisé. Il est par ailleurs établi, au vu des traces, que les trois auteurs du brigandage ont fait usage de leur arme (P. 90/1, p. 14). La sauvagerie de l’agression est encore illustrée par le cahier photos (P. 91), qui montre que la victime a abondamment saigné. En agressant de manière conjointe la victime dans le but de lui dérober de l’argent et en lui infligeant de nombreuses blessures sur le corps et le visage, les appelants sont à l’évidence les coauteurs de l’ensemble des lésions infligées à la victime, en particulier de la lésion corporelle grave retenue et qui n’est pas, en soi, contestée. En outre, en maniant à trois des armes blanches à proximité immédiate des zones vitales, en particulier du visage et du cou du plaignant, A.E._ réalise incontestablement objectivement et subjectivement la circonstance aggravante de la mise en danger de la mort de la victime. Contrairement à ce qu’a soutenu l’appelant en audience, tout mouvement incontrôlé de celle-ci pouvait avoir des répercussions fatales, alors que A.E._, dans sa propre version, a continué à tenir son couteau à proximité du visage durant toute l’agression. En se comportant de la sorte et en s’associant à la violence de ses comparses, l’appelant connaissait le risque mortel qu’il faisait courir à sa victime et qui s’est concrétisé par des lésions graves, et s’en est accommodé. Ainsi, la circonstance aggravante de la mise en danger de mort est réalisée, pour le moins sous la forme du dol éventuel, ce qui est suffisant.
Les conditions d’application de l’art. 140 ch. 4 sont donc remplies et le deuxième grief doit être rejeté.
2.3
L’appelant conteste sa condamnation pour infraction à la Loi fédérale sur les stupéfiants et soutient qu’il ne devrait être condamné que pour contravention à dite loi, s’agissant de consommation commune de drogue.
2.3.1
Aux termes de l’art. 19 al. 1 let. c, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire celui qui, sans droit, aliène ou prescrit des stupéfiants, en procure de toute autre manière à un tiers ou en met dans le commerce. Selon l’art. 19a LStup, celui qui, sans droit, aura consommé intentionnellement des stupéfiants ou celui qui aura commis une infraction à l'art. 19 pour assurer sa propre consommation est passible de l'amende.
2.3.2
Mis à part le fait de consommer, l’art. 19a LStup ne vise que les actes destinés exclusivement à permettre à l’auteur de se procurer de la drogue pour sa propre consommation. Les actes comme la vente et le courtage, qui conduisent à la consommation de stupéfiants par des tiers ou qui créent un risque concret d’aboutir à ce résultat, à l’exemple de la constitution d’un dépôt de drogue, ne peuvent bénéficier du traitement privilégié de l’art. 19a LStup (ATF 119 IV 183 ; ATF 118 IV 204).
2.3.3
En l’espèce, A.E._ savait où se fournir en cocaïne et était le seul à s’exprimer en français. C’est également lui qui a effectué seul la transaction, la présence de ses comparses au moment de la transaction n’est ainsi, contrairement à ce qu’il soutient, pas pertinente. La marchandise acquise dans les circonstances décrites supra C3 n’était donc pas destinée à sa seule consommation, mais à un partage en trois (PV aud. 17, l. 65). C’est donc à juste titre que les premiers juges ont qualifié de remise à des tiers la part de cocaïne qui n’a pas été consommée par A.E._.
2.3.4
La quotité de la peine infligée à A.E._ n’est au demeurant pas contestée. Compte tenu du fait que la loi prévoit une peine privative de liberté de cinq ans au moins pour un brigandage qualifié au sens de l’art. 140 ch. 4 CP, du concours et des antécédents judiciaires italiens de l’appelant, la peine de cinq ans et demi prononcée par les premiers juges constitue en réalité un minimum. Une amende de 100 fr. sanctionnera la contravention à la LStup.
3.
L’appel de B.E._
3.1
B.E._ conteste l’application de l’art. 140 ch. 4 CP. Il soutient que seule la circonstance aggravante de l’art. 140 ch. 2 CP pouvait être retenue.
3.1.1
S’agissant du brigandage qualifié, il peut être intégralement renvoyé au chiffre 3.2 ci-dessus.
3.1.2
Dans la mesure où B.E._ a endossé le même rôle que son frère A.E._ en faisant usage d’une arme blanche et en blessant la victime, car comme relevé précédemment, les trois armes comportaient du sang de N._, il tente vainement de démontrer qu’il ne s’est pas associé à la violence de ses comparses. Comme pour A.E._, l’appelant est coauteur de l’ensemble des blessures infligées à la victime, par un déploiement concerté de violence, et il doit se voir imputer, objectivement et subjectivement les lésions qui ont gravement blessé et mis en danger la victime.
L’appelant explique qu’il s’était muni d’une arme, tout comme ses comparses, dans le seul but d’effrayer N._ et qu’il ne s’était pas imaginé que celui-ci allait se défendre contre trois individus armés. Dès que N._ a commencé à manifester son opposition et à se défendre, les auteurs ont poursuivi leurs activités délictueuses, faisant usage de leur arme pour arriver à leur fin. Partant, quand bien même on pourrait imaginer qu’au départ qu’ils n’avaient pas l’intention d’utiliser leurs armes, ils ont tous accepté de recourir à la violence comme coauteurs. Partant, peu importe de savoir lequel d’entre eux a causé les lésions constatées sur N._.
Peu importe également de savoir si, comme l’a longuement soutenu l’appelant, la distance entre le couteau tenu par B.E._ et le visage de la victime était de 10 cm ou de 50 cm. N._ a été blessé notamment au visage, de manière à être mis en danger de mort.
Mal fondé, ce premier grief doit être rejeté.
3.2
B.E._ conteste également l’existence d’un butin, plaidant ainsi la tentative de brigandage.
3.2.1
Ici encore, il peut être intégralement renvoyé aux considérants du chiffre 2.1.3. Au demeurant l’hypothèse de l’appelant selon laquelle l’argent aurait été perdu lors du transport de la victime au CHUV ou lors de son arrivée dans le service ne repose sur aucun élément concret.
Ce second grief doit ainsi également être rejeté.
3.3
B.E._ ne conteste pas sa condamnation pour contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants.
3.4
La peine privative de liberté de cinq ans et demi, longuement motivée par les premiers juges et non contestée en tant que telle par le prévenu, est adéquate au regard de sa culpabilité et de ses antécédents judiciaires. Une amende de 100 fr. sanctionnera la contravention à la LStup.
4.
En définitive, tant l’appel d’A.E._ que celui de B.E._ doivent être rejetés.
Vu l'issue des appels, les frais d'appel, par 9'138 fr. 40, seront mis par moitié, soit 4’569 fr. 20, à la charge d’A.E._ et par moitié, soit 4'569 fr. 20, à la charge de B.E._, qui succombent (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]), ces frais comprennent les indemnités allouées aux défenseurs d'office des prévenus (art. 422 al. 1 et 2 let. a CPP).
L’indemnité de chacun des défenseurs d’office sera fixée à 3'229 fr. 20 fr., débours et TVA compris, compte tenu, pour chaque mandataire, d’une durée d’activité de 15h00 à 180 fr. l’heure, plus deux indemnités de déplacement à 120 fr. et 50 fr. de débours, TVA en plus.
Les prévenus ne seront tenus de rembourser les indemnités ci-dessus mises à leur charge que lorsque leur situation financière le permettra.
Enfin, le dispositif communiqué après l’audience d’appel contient une erreur de plume dans la mesure où il indique à son chiffre X que A.E._ et B.E._ sont les débiteurs, solidairement entre eux, de [...] d’un montant de 1'700 fr., avec intérêts à 5% l’an dès le 24 avril 2013 à titre de dommage et intérêts, alors qu’ils sont les débiteurs, solidairement entre eux, de N._. S’agissant d’une erreur manifeste, le dispositif doit être modifié d’office en application de l’art. 83 CP. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,015 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
cb8f82c7-e74a-4468-b35c-223ba79d2c7d | En fait :
A.
Par jugement du 29 octobre 2013, le Tribunal de police de l’arrondissement de l'Est vaudois a libéré T._ de l'accusation de lésions corporelles simples qualifiées (I), donné acte à V._ de ses réserves civiles (II), ordonné le maintien au dossier à titre de pièce à conviction du marteau séquestré sous fiche no 47 (III), arrêté l'indemnité du conseil d'office de T._ à 1'706 fr. 40, TVA et débours inclus (IV), arrêté l'indemnité du conseil d'office de V._ à 1'852 fr. 20, TVA et débours inclus (V), mis une partie des frais de la cause, par 948 fr., incluant les indemnités des conseils d'office à charge de T._, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (VI), et dit qu'il n'y avait pas lieu à indemnisation de l'art. 429 CPP (VII).
B.
Par annonce du 8 novembre 2013 suivie d’une déclaration motivée du
27 février 2014, V._ a formé appel contre ce jugement, concluant, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens que T._ est condamné à une peine à dire de justice pour lésions corporelles simples qualifiées, que T._ est reconnu son débiteur et lui doit immédiat paiement de la somme de 968 fr. 70, plus intérêt à 5 % l'an dès le 14 octobre 2012, à titre de réparation du dommage subi au titre des frais médicaux encourus et que T._ est reconnu son débiteur et lui doit immédiat paiement de la somme de 5'000 fr., plus intérêt à 5 % l'an dès le 14 octobre 2012 à titre de réparation du dommage subi au titre de tort moral, les frais et dépens de première et deuxième instance étant mis à la charge de T._. Subsidiairement, il a conclu à l'annulation du jugement entrepris, les frais et dépens de première et deuxième instance étant mis à la charge de T._.
Par déclaration d'appel joint du 10 mars 2014, T._ a conclu, avec suite de frais et dépens, à la réforme du chiffre VI du jugement du
29 octobre 2013 en ce sens qu'une part des frais de la procédure est mise à la charge de V._ en application de l'art 427 CPP, le solde étant laissé à la charge de l'Etat et le jugement étant maintenu pour le surplus.
Par courrier du 20 mai 2014, le Ministère public a déclaré s'en remettre à justice quant au sort de l'appel et de l'appel joint.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
1.1
Le prévenu T._
est né le [...] 1986 à Mogadiscio, en Somalie, pays dont il est ressortissant. Arrivé en Suisse en 1994, à l’âge de 7 ans, il y est depuis lors admis temporairement au bénéfice d’un permis F. A son arrivée, il a été logé chez une de ses tantes. Il a suivi sa scolarité obligatoire dans le canton de Vaud. Après avoir fini un apprentissage de monteur sanitaire entrepris en 2010, il a été engagé depuis le 17 septembre 2013 par la société [...]. Rémunéré selon un tarif horaire de 30 fr., brut, il réalise un revenu mensuel d'environ 4'000 fr. net par mois, des retenues en faveur de l’Etablissement vaudois d'accueil des migrants (ci-après : EVAM) étant effectuées chaque mois en raison de son statut de requérant. Il a des dettes envers l’EVAM pour deux ou trois mille francs. Son loyer mensuel s'élève à 619 fr. et sa prime d’assurance-maladie mensuelle à 433 francs. Il vit seul dans son logement depuis 2010.
1.2
Le casier judiciaire du prévenu contient les inscriptions suivantes :
- 01.09.2008 : Juge d’instruction de Lausanne : peine pécuniaire de 5 jours-amende à 30 fr. avec sursis durant deux ans, révoqué le 4 août 2010, pour violation de domicile.
- 04.08.2010 : Juge d’instruction de l’Est vaudois : peine pécuniaire de 15 jours-amende à 30 fr. pour vol et violation de domicile.
2.
2.1
Le prévenu a logé le plaignant V._ durant deux mois en 2012. Le 10 octobre 2012, le prévenu a été cambriolé et a soupçonné le plaignant d’avoir été mêlé à ce cambriolage, car il était le seul à détenir les clés de son domicile. Il dit avoir déposé une plainte pénale en relation avec ce vol, sans que l’instruction n'ait permis d’établir qui était l’auteur de ce méfait. Le prévenu a décidé de chasser le plaignant de chez lui le lendemain du cambriolage, le 11 octobre 2012. Il a été convenu que le plaignant viendrait ultérieurement rechercher le solde de ses affaires.
Le 14 octobre 2012 au soir, le plaignant, alcoolisé et en colère à cause des accusations portées à son encontre par le prévenu, s'est présenté à la porte du studio de ce dernier, qui se trouvait à l'intérieur, en compagnie de deux de ses amis. Lorsque le prévenu a ouvert la porte, le plaignant s'en est pris verbalement à lui, puis l'a pris par le col et lui a donné une claque. Il a continué à le bousculer, forçant le prévenu à reculer de quelques mètres jusqu'à se retrouver acculé contre une table. Le plaignant a alors tenté de frapper une nouvelle fois le prévenu, d'un coup de poing, mais celui-ci a esquivé le coup en passant sous le plaignant. Il s'est immédiatement saisi d'un marteau, pris dans une caisse qui contenait son matériel de travail, et a donné un unique coup sur la tête au plaignant, qui lui tournait encore le dos. Les deux hommes se sont ensuite brièvement empoignés, puis ont finalement été séparés par les amis du prévenu, qui ont maintenu le plaignant à terre.
2.2
Le plaignant a souffert d’un traumatisme crânien simple avec plaie occipitale d’environ 3 cm et contusion à la cheville droite, avec plaie d’1,5 cm de long et 0.5 cm de profond, lésions attestées par certificats médicaux. Le plaignant a été soigné ambulatoirement le soir des faits. Le traumatisme crânien a nécessité trois points de suture et la contusion à la cheville droite a été suturée de deux points. Le plaignant a pu ressortir après avoir reçu les premiers soins mais a encore souffert pendant une semaine après les faits. A ce jour, si sa cheville va bien, il souffre toujours de maux de têtes épisodiques justifiant la prise de médicaments anti-douleur. Selon avis médical, la vie du plaignant, qui n'a pas subi de dommages permanents, n'a cependant pas été mise en danger. Le plaignant a également été affecté par le choc subi en raison de l’atteinte. Les frais médicaux encourus, qui concernent également les soins de la cheville, se sont montés à 968 fr 70. Le plaignant a indiqué ne pas avoir subi d’incapacité de travail, étant sans emploi, ni avoir été soumis à un autre traitement que celui faisant l’objet de la facture produite.
Le plaignant a déposé plainte et s’est porté partie civile le 15 octobre 2012. Lors des débats de première instance, il a conclu à l’allocation de ses conclusions civiles à hauteur de 968 fr. 70 pour ses frais médicaux et de 5'000 fr. à titre de tort moral, avec suite de frais et dépens pénaux. | En droit :
1.
Interjetés dans les formes et délais légaux par des parties ayant la qualité pour recourir contre le jugement d’un tribunal de première instance qui a clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l’appel du plaignant et l’appel joint du prévenu sont recevables.
2.
2.1
Aux termes de l’art. 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3).
2.2
L'appel doit permettre un nouvel examen au fond par la juridiction d'appel. Celle-ci ne doit pas se borner à rechercher les erreurs du juge précédent et à critiquer le jugement de ce dernier; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et sa propre administration des preuves (TF 6B_78/2012 du 27 août 2012). L'appel tend à la répétition de l'examen des faits et au prononcé d'un nouveau jugement (Luzius Eugster, in: Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2011, n. 1 ad art. 398 CPP). L'immédiateté des preuves ne s'impose toutefois pas en instance d'appel. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. La juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel (art. 389 al. 3 CPP).
3.
Le plaignant, appelant, reproche tout d'abord au Tribunal de police d'avoir libéré le prévenu en le mettant au bénéfice de l'art. 16 al. 2 CP.
3.1
Quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d'une attaque imminente a le droit de repousser l'attaque par des moyens proportionnés aux circonstances; le même droit appartient aux tiers (art. 15 CP). Cette disposition n'est plus applicable lorsque l'attaque est achevée. Une attaque n'est pas achevée aussi longtemps que le risque d'une nouvelle atteinte ou d'une aggravation de celle-ci par l'assaillant reste imminent (ATF 102 IV 1 c. 2b; TF 6B_82/2013 du 24 juin 2013 c. 3.1.1).
Selon l'art. 16 CP, si l'auteur, en repoussant une attaque, a excédé les limites de la légitime défense au sens de l'art. 15 CP, le juge atténue la peine (al. 1). Si cet excès provient d'un état excusable d'excitation ou de saisissement causé par l'attaque, l'auteur n'agit pas de manière coupable (al. 2). Selon la jurisprudence, tel n'est le cas que si l'attaque est la seule cause ou la cause prépondérante de l'excitation ou du saisissement et pour autant que la nature et les circonstances de l'attaque rendent excusable cette excitation ou ce saisissement. La loi ne précise pas plus avant le degré d'émotion nécessaire, lequel doit toutefois revêtir une certaine importance. Il appartient au juge d'apprécier de cas en cas si ce degré d'émotion était suffisamment marquant et de déterminer si la nature et les circonstances de l'attaque le rendaient excusable. Plus la réaction de celui qui se défend aura atteint ou menacé l'agresseur, plus le juge se montrera exigeant quant au degré d'excitation ou de saisissement nécessaire (TF 6B_926/2009 du 15 décembre 2009 c. 3.2).
3.2
En l'espèce, la Cour de céans retient tout d'abord qu'on se trouve effectivement dans une situation d'excès de légitime défense. A ce titre, contrairement à ce que soutient le plaignant, le coup de marteau constituait bien une défense, non pas une contre-attaque. Il ressort clairement des faits retenus que le prévenu a été acculé par le plaignant, lequel, furieux et alcoolisé, s'en prenait à lui physiquement, en lui donnant notamment une claque, puis en tentant de lui asséner un coup de poing. Le coup de marteau, qui a immédiatement suivi l'esquive du coup de poing, doit dès lors être considéré comme une défense, rien ne permettant de considérer que l'attaque avait pris fin. Ni le fait que le prévenu ait frappé le plaignant de dos, ce qui s'explique par la façon dont le prévenu a esquivé le coup de poing et l'endroit où se trouvait initialement le marteau, ni le fait qu'une brève empoignade ait suivi le coup de marteau ne sont de nature à remettre en cause cette appréciation. En revanche, contrairement à ce que soutient le prévenu, le caractère excessif de la défense ne saurait être nié. Sur le plan objectif, les circonstances de l'espèce ne justifient en effet pas un coup donné à la tête d'un assaillant sans arme au moyen d'un objet aussi dangereux qu'un marteau.
Reste à savoir si cet excès provenait d'un état excusable d'excitation ou de saisissement causé par l'attaque. A ce titre, contrairement à ce que soutient le plaignant, s'il existait bien entre les intéressés un contentieux important, aucun élément concret ne conduit à considérer que le prévenu aurait agi sous l'emprise de la colère ou de la rancune. Bien au contraire, le déroulement de l'agression accrédite la version du prévenu, qui affirme avoir été "terrifié" par l'attaque du plaignant. Outre le fait que ce dernier était furieux et sous l'emprise de l'alcool, il ressort en effet de l'instruction que le prévenu, qui ne s'attendait pas à l'assaut subi, a d'abord dû reculer de plusieurs mètres le long du couloir d'entrée du studio, se défendant comme il pouvait, jusqu'à se trouver en quelques instants acculé à une table. Le fait que deux amis du prévenu se trouvaient dans le studio n'est pas décisif, puisque ceux-ci se trouvaient dans la pièce au bout du couloir et ne pouvaient dès lors pas intervenir immédiatement. Il faut encore prendre en considération le fait qu'un seul coup de marteau a été donné et l'absence de véritable séquelle physique, qui suggère que le coup n'a pas été porté avec une grande violence. En bref, pour la Cour de céans, le degré d'excitation était très important et pleinement excusable, si bien que le prévenu n'a pas agi de manière coupable.
Au vu de ce qui précède, l'appel est mal fondé sur ce point.
4.
L'appelant reproche ensuite au Tribunal de police de s'être borné à lui donner acte de ses réserves civiles, au lieu de les lui allouer.
4.1
Selon l'art. 126 al. 1 CPP, Le tribunal statue également sur les conclusions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu (let. a) ou lorsqu'il acquitte le prévenu et que l'état de fait est suffisamment établi (let. b). Il renvoie en revanche la partie plaignante à agir par la voie civile notamment lorsque celle-ci n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (al. 2 let. b) ou lorsque le prévenu est acquitté alors que l'état de fait n'a pas été suffisamment établi (al. 2 let. d).
Lorsqu'un acquittement est prononcé parce que les conditions de l'art. 16 al. 2 CP sont réalisées, l'acte reste illicite sur le plan civil et peut donner lieu à réparation (cf. Monnier, in : Roth/Moreillon [éd.], Commentaire Romand, Code pénal I, Bâle 2009, introduction aux art. 14 à 18 CP, n. 6; cf. ég. Monnier, op. cit., n. 2 ad art. 16 CP).
Selon l'art. 41 al. 1 CO (Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse [Livre cinquième: Droit des obligations]; RS 220), celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer. Le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d’homme, à la famille, une indemnité équitable à titre de réparation morale (art. 47 CO).
Selon l'art. 44 al. 1 CO, le juge peut réduire les dommages-intérêts, ou même n'en point allouer, lorsque la partie lésée a consenti à la lésion ou lorsque des faits dont elle est responsable ont contribué à créer le dommage, à l'augmenter, ou qu'ils ont aggravé la situation du débiteur.
4.2
En l'espèce, le Tribunal de police a considéré que l'acte demeurait illicite en dépit de l'acquittement. Il a cependant considéré que s'agissant de la facture de soins produite par le plaignant, on ne pouvait pas déterminer si et dans quelle proportion les frais médicaux encourus étaient en lien avec sa lésion à la cheville, pour laquelle aucun comportement illicite de l'accusé n'était retenu. S'agissant de la prétention en tort moral, il a relevé l'existence d'une faute concomitante du plaignant et le fait que ce dernier n'avait pas établi à satisfaction de droit la gravité de l'atteinte subie.
En l'espèce, les circonstances des faits ont été suffisamment établies pour qu'il soit statué sur les conclusions civiles du plaignant. En premier lieu, aussi bien les soins de la lésion à la cheville que de celle à la tête doivent donner lieu à indemnisation. En effet, même si l'instruction n'a pas permis d'établir le geste exact par lequel le prévenu a atteint la cheville du plaignant, il ressort clairement du dossier que la lésion a été occasionnée au cours de l'altercation, soit nécessairement par la défense du prévenu, avant ou après le coup de marteau. Comme cette défense était illicite sur le plan civil, la prétention en réparation du dommage que constituaient les frais médicaux doit dès lors, sur le principe, être admise. S'agissant de la prétention en tort moral, la gravité de l'acte subi et ses conséquences sur le bien-être du plaignant justifieraient l'allocation d'un montant de 1'500 francs. Pour tenir compte de la faute concomitante du plaignant, qui est importante, il y a lieu de réduire de moitié les montants alloués. En définitive, l'appel sera partiellement admis sur ce point et le prévenu sera reconnu le débiteur du plaignant de la somme de 1'234 fr. 35, plus intérêt à 5 % l'an dès le 14 octobre 2012, montant qui correspond à la moitié du total des postes du préjudice (968 fr. 70 + 1'500 fr. = 2'468 fr. 70).
5.
En ce qui concerne les conclusions du prévenu, appelant par voie de jonction, celui-ci reproche au Tribunal de police d'avoir partiellement mis à sa charge les frais de la cause.
5.1
Lorsque la procédure fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 426 al. 2 CPP).
5.2
En l'espèce, le caractère illicite et fautif du comportement du prévenu a déjà été reconnu. La mise à sa charge d'une part modérée des frais n'est dès lors pas critiquable.
6.
Au vu de ce qui précède, l'appel principal doit être très partiellement admis, tandis que l'appel joint doit être rejeté. Le jugement entrepris sera réformé en son chiffre II dans le sens des considérants qui précèdent et sera confirmé pour le surplus.
Vu l’issue de la cause, l'émolument de jugement, par 1'610 fr. (art. 21 al. 1 et 2 TFIP [Tarif des frais de procédure et indemnités en matière pénale du 28 septembre 2010; RSV 312.03.1]) sera mis par un tiers, soit 536 fr. 65, à la charge de l'appelant et par un tiers, soit 536 fr. 65, à la charge de l'appelant par voie de jonction, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (art. 428 al. 1 CPP). L'indemnité du conseil d'office du plaignant pour la procédure d'appel, arrêtée à 1'787 fr. 40, montant qui comprend le montant partiel de 1'166 fr. 40 alloué par décision du président de la Cour de céans du 3 avril 2014, sera également mise par un tiers, soit 595 fr. 80, à la charge du plaignant, ce qui porte la part totale des frais d'appels à sa charge à 1'132 fr. 45. Enfin, l'indemnité du défenseur d'office du prévenu pour la procédure d'appel, arrêtée à 1'048 fr. 80, sera mise par un tiers, soit 349 fr. 60, à la charge de ce dernier, ce qui porte la part totale des frais d'appels à sa charge à 886 fr. 25.
V._ et T._ ne seront tenus de rembourser à l’Etat chacun le tiers de l’indemnité allouée à leur conseil d’office que lorsque leur situation financière le permettra. | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,014 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |
cbcec64e-76ea-4c04-85a3-e424a3c25f91 | En fait :
A.
Par jugement du 22 novembre 2012, le Tribunal de police de l’arrondissement de Lausanne a constaté que S._ s'est rendu coupable de violation grave des règles de la circulation routière, de violation des devoirs en cas d'accident et de défaut du port de la ceinture de sécurité (I), condamné S._ à une peine pécuniaire de vingt jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 80 fr., et à une amende de 250 fr. (II), dit que la peine privative de liberté en cas de non paiement fautif de l'amende sera de cinq jours (III), révoqué le sursis octroyé à S._ le 10 mai 2010 par le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois et ordonné l'exécution de la peine pécuniaire de quinze jours-amende à 40 fr. (IV) et mis les frais de la cause par 1'672 fr. 50 à la charge de S._ (V).
B.
Par annonce d'appel du 26 novembre 2012, puis déclaration d'appel non motivée du 18 décembre suivant, S._ s'est opposé à ce jugement. Il a conclu à sa réforme en ce sens qu'il n'est condamné que pour défaut du port de la ceinture de sécurité, à la peine que Justice dira, avec sursis, qu'il est renoncé à révoquer le sursis octroyé le 10 mai 2010 par le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois, les frais de première instance étant mis à sa charge par 400 francs. Il a, en outre, requis l'audition de U._.
Par courrier du 14 janvier 2013, la Présidente de la Cour d'appel a rejeté la réquisition de preuve tendant à l'audition de U._, ce témoin ayant déjà été entendu en 1
ère
instance et le moyen sollicité ne répondant pas aux conditions de l'art. 389 CPP.
Par acte du 16 janvier 2013, le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne a conclu au rejet de l'appel de S._.
C.
Les faits retenus sont les suivants :
1.
S._ est né le 10 avril 1978 à Lausanne. Il a une formation d’économiste. Ensuite du décès de son père en juillet 2005, le prévenu a repris les activités professionnelles de ce dernier, en particulier la gestion des sociétés [...] SA, [...] Sàrl, [...] SA et [...] SA. De ces quatre sociétés, seule la première est toujours en activité. [...] SA, qui gérait une chaîne de magasins de textile, a liquidé une grande partie de ses activités et n’a gardé qu’un seul magasin situé à [...]. Selon ses dires, S._ ne perçoit aucun revenu de la société [...] SA. Sa fortune est évaluée entre 300'000 fr. et 400'000 francs. Il a trois immeubles, hérités de son père, dont il gère personnellement les baux commerciaux et d’habitation. Il en retire 300'000 fr. de loyers bruts. Il y a environ six mois, il a créé une nouvelle société informatique qui ne génère pas encore de revenu. S._ est également propriétaire de son logement qui était la maison de son père et ne paie donc pas de loyer. Il s’acquitte d’une prime d’assurance maladie d’environ 250 fr. par mois et estime le montant annuel de ses impôts – qui ne sont prélevés que sur sa fortune – à environ 3'000 fr. par an. Il a une Smart et une BMW qui sont enregistrées au nom de la société [...] SA.
Le casier judiciaire de S._ fait état des deux condamnations suivantes :
- 24.03.2006, Juge d’instruction Lausanne, violation grave des règles de la circulation routière, incapacité de conduire, 5 jours d’emprisonnement avec sursis pendant
2 ans et 1'000 fr. d’amende ;
- 10.05.2010, Tribunal de police de l’Est vaudois, violation grave des règles de la circulation routière, 15 jours-amende à 40 fr. avec sursis pendant 2 ans et 320 francs d’amende.
Le fichier ADMAS mentionne trois mesures, à savoir trois retraits du permis de conduire, le premier du 8 février 2006, pour un durée de cinq mois, soit du 27 novembre 2005 au 26 avril 2006, pour ébriété et vitesse, le deuxième du
26 novembre 2008, pour une durée d’un mois, soit du 24 novembre 2008 au
23 décembre 2008, pour vitesse, et le troisième pour une durée de douze mois, soit du 24 juillet 2010 au 23 juillet 2011, pour vitesse.
2.
La nuit du 6 au 7 mai 2011, S._ a passé la soirée dans divers établissements publics de Lausanne en compagnie d'un ami, N._. Vers 4h00, les deux hommes ont pris place dans le taxi conduit par U._. Dans un premier temps, ils ont fait un arrêt dans le quartier [...], pour aborder des prostituées. L'une d'elles est entrée dans le véhicule mais en est ressortie peu après, faute d'avoir trouvé un accord financier avec les deux hommes. Le véhicule est ensuite reparti vers la route [...]. A la demande de N._, U._ a laissé descendre ce dernier du véhicule devant l'établissement [...]. S._ est, quant à lui, resté dans le taxi pour retourner à son domicile à [...]. Il a informé U._ qu’il était à cours d’argent et qu’il s’acquitterait de la course à son arrivée à son domicile. Alors qu'ils se trouvaient à l'avenue [...], U._ a alors décidé de faire demi-tour pour amener son passager à la police afin de régler l'affaire. Il a ainsi emprunté la présélection gauche destinée aux usagers désirant s'engager sur la route [...], malgré la flèche du feu vert de la signalisation lumineuse l’obligeant à n’obliquer qu’à gauche. Après cette manœuvre, alors que la voiture roulait à une vitesse avoisinant les 60 km/h, S._, qui ne faisait pas usage de la ceinture de sécurité, a ouvert la portière afin de quitter le véhicule. U._ a eu l'impression que ce dernier voulait se jeter hors du véhicule et a tenté de le retenir en saisissant la portière avec la main droite. Il a alors perdu la maîtrise de son véhicule, dévié à gauche, franchi l’îlot séparant les sens du trafic, heurté avec l’angle avant droit de sa voiture un candélabre, donné un coup de volant à droite, circulé une dizaine de mètres à cheval sur l’îlot central, puis heurté un second candélabre. S._ est alors sorti de l’habitacle et a quitté les lieux, faisant fi de ses devoirs en qualité de personne impliquée dans un accident. | En droit :
1.
Selon l’art. 399 CPP, l’appel doit être annoncé dans les dix jours qui suivent la communication du jugement, soit la remise ou la notification du dispositif écrit (al. 1). La déclaration d’appel doit être déposée dans les vingt jours à compter de la notification du jugement motivé (al. 3).
Interjeté dans les forme et délais légaux contre un jugement d’un tribunal de première instance ayant clos la procédure (art. 398 al. 1 CPP), l'appel de S._ est recevable.
2.
L'appelant conteste s'être rendu coupable de violation grave des règles de la circulation routière et de violation des devoirs en cas d'accident. Aux débats d'appel, il a plaidé l'état de nécessité, déclarant qu'il s'était senti menacé et séquestré par le chauffeur de taxi à qui il avait demandé de s'arrêter pour le laisser sortir du véhicule.
2.1
L'art. 17 CP dispose que quiconque commet un acte punissable pour préserver d’un danger imminent et impossible à détourner autrement un bien juridique lui appartenant ou appartenant à un tiers agit de manière licite s’il sauvegarde ainsi des intérêts prépondérants. Aux termes de l'art. 18 CP, si l’auteur commet un acte punissable pour se préserver ou préserver autrui d’un danger imminent et impossible à détourner autrement menaçant la vie, l’intégrité corporelle, la liberté, l’honneur, le patrimoine ou d’autres biens essentiels, le juge atténue la peine si le sacrifice du bien menacé pouvait être raisonnablement exigé de lui (al. 1). L’auteur n’agit pas de manière coupable si le sacrifice du bien menacé ne pouvait être raisonnablement exigé de lui (al. 2).
Le Code pénal distingue l'état de nécessité licite (art. 17 CP) de l'état de nécessité excusable (art. 18 CP). L'auteur qui se trouve en état de nécessité licite sauvegarde un bien d'une valeur supérieure au bien lésé et agit de manière licite. En cas d'état de nécessité excusable, les biens en conflit sont de valeur égale; l'acte reste illicite, mais la faute de l'auteur est exclue ou, à tout le moins, atténuée. Que l'état de nécessité soit licite ou excusable, l'auteur doit commettre l'acte punissable pour se préserver d'un danger imminent et impossible à détourner autrement (TF 6B_720/2007 du 29 mars 2008, c. 5.1.1). Il suppose donc l'existence d'un danger imminent qui ne peut être détourné autrement. La subsidiarité est absolue. Elle constitue une condition à laquelle aucune exception ne peut être faite (TF 6B_176/2010 du 31 mai 2010, c. 2.1; TF 6S.529/2006 du 8 février 2007 c. 4; Seelmann, Basler Kommentar, Strafrecht I, 2
e
éd., Bâle 2007, n. 7 ad art. 17 et
n. 2 ad art. 18).
Le Code pénal ne prévoit pas expressément l'état de nécessité putatif. Une telle figure juridique est toutefois envisageable lorsque l'auteur, en raison d'une représentation erronée des faits, se croit en situation de danger. L'art. 13 CP est applicable (ATF 129 IV 6 c. 3.2, JT 2005 IV 215; ATF 122 IV 1 c. 2b). Aux termes de l'art. 13 al. 2 CP, celui qui pouvait éviter l'erreur en usant des précautions voulues est punissable pour négligence si la loi réprime son acte comme infraction de négligence (ATF 104 IV 261, JT 1979 I 444). L'ivresse au volant ainsi que toutes les autres infractions à la LCR en vertu de l'art. 100 de cette loi, sont punissables par négligence (Weissenberger, Kommentar zum Strassenverkehrsgesetz: Bundesgerichtspraxis, Zurich 2011, n. 22 ad art. 91 LCR).
L'art. 218 CPP dispose notamment que lorsque l’aide de la police ne peut être obtenue à temps, un particulier a le droit d’arrêter provisoirement une personne qu'il a surpris en flagrant délit de crime ou de délit ou l’a interceptée immédiatement après un tel acte (al. 1 let. a), la personne arrêtée étant remise à la police dès que possible (al. 3).
2.2
Le premier juge a retenu que la version de l'appelant selon laquelle il aurait paniqué en voyant U._ opérer un tourner sur route, se sentant menacé et séquestré, n’était pas crédible. D’une part, la responsabilité du litige au sujet du paiement de la course lui incombait, dès lors qu’il avait commandé un taxi sans en avoir les moyens. Il savait en outre quelle était l’intention du chauffeur puisqu’il a déclaré que ce dernier lui avait indiqué vouloir l’emmener auprès de la police afin de régler ce litige (audition du 20 octobre 2011, ligne 43-44; jgt. p. 4). On ne voit pas bien, dans ces circonstances, que le prévenu ait pu se sentir menacé au point de devoir descendre du véhicule en marche. D’autre part, l'appelant ne pouvait penser que U._, âgé de 68 ans au moment des faits, ait réellement pu représenter une menace pour lui (jgt., p. 13).
Cette analyse ne prête pas le flanc à la critique. Même si la réaction de U._ était inappropriée, on ne saurait admettre une atteinte à la liberté de l'appelant compte tenu du délai écoulé entre le moment où ce dernier a manifesté son souhait de quitter le véhicule et le moment où il a ouvert la portière, le véhicule ne pouvant s'arrêter immédiatement pour laisser le client sortir. Par ailleurs, au cours de la soirée, le chauffeur de taxi a, à la demande de l'appelant et de son ami N._, laissé monter puis sortir une prostituée du véhicule; il a également laissé sortir N._ lorsque ce dernier le lui a demandé. L'appelant a indiqué avoir voulu préserver sa sécurité. Pourtant, il savait qu'il allait être mené à un poste de police. Partant, il n'était pas dans une situation de danger imminent et impossible à détourner autrement et il n'avait pas d'intérêt prépondérant à sauvegarder par rapport à la sécurité des usagers de la route. De plus, le chauffeur de taxi, qui pouvait à juste titre penser que ce client ne paierait pas sa course, a agi uniquement pour garantir l'intervention des policiers et s'assurer que le client s'acquitterait de son dû (cf. art. 218 CPP).
Dans ces conditions, on ne saurait retenir un état de nécessité.
3.
L'appelant conteste sa condamnation pour violation grave des règles de la circulation routière.
3.1
Aux termes de l'art. 31 al. 3 LCR (Loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la circulation routière ; RS 741.01), le conducteur doit veiller à ne pas être gêné ni par le chargement, ni d'aucune autre manière. Les passagers sont tenus de ne pas le gêner ni le déranger. L'art. 60 al. 5 OCR (Ordonnance du 13 novembre 1962 sur les règles de la circulation routière; RS 741.11) prévoit que lorsqu'un véhicule automobile est en marche, il est interdit d'y monter, d'en descendre ou de se pencher au-dehors.
Il ressort de l'art. 90 LCR que celui qui viole les règles de la circulation prévues par la présente loi ou par les dispositions d’exécution émanant du Conseil fédéral est puni de l’amende (al. 1). Celui qui, par une violation grave d’une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d’autrui ou en prend le risque est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire (al. 2).
Pour dire si une violation d'une règle de la circulation doit être qualifiée de grave, il faut procéder à une appréciation aussi bien objective que subjective. Du point de vue objectif, l'auteur doit avoir commis une violation grossière d'une règle fondamentale de la circulation routière et mis sérieusement en danger la sécurité du trafic. Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue. Subjectivement, l'état de fait de l'art. 90 ch. 2 LCR exige, selon la jurisprudence, un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, c'est-à-dire une faute grave et, en cas d'acte commis par négligence, à tout le moins une négligence grossière. Celle-ci doit être admis lorsque le conducteur est conscient du caractère généralement dangereux de son comportement contraire aux règles de la circulation. Mais une négligence grossière peut également exister lorsque, contrairement à ses devoirs, l'auteur ne prend absolument pas en compte le fait qu'il met en danger les autres usagers, en d'autres termes s'il se rend coupable d'une négligence inconsciente. Dans un tel cas, une négligence grossière ne peut être admise que si l'absence de prise de conscience du danger créé pour autrui repose elle-même sur une absence de scrupules. Est notamment sans scrupules le comportement qui ne tient absolument pas compte des biens juridiques d'autrui. Il peut également en aller ainsi en cas de simple ignorance (momentanée) de la mise en danger des intérêts d'autrui (ATF 131 IV 133 c. 3.2).
Le cercle des auteurs possibles d'une infraction au sens de l'art. 90 LCR est extrêmement large; l'art. 90 LCR incrimine celui qui a violé une règle de la circulation, les qualités particulières de l'auteur étant alors définies dans ladite règle de circulation. Ainsi, ce sont tous les usagers de la route qui peuvent être auteurs d'une violation des règles de la circulation sanctionnées par l'art. 90 LCR, à savoir tous ceux qui, de près ou de loin, sont les acteurs de la voie publique et qui sont soumis à des règles de comportement figurant dans la législation routière. Il s'agit notamment des passagers (cf. Jeanneret, Les dispositions pénales de la LCR, Berne 2007, pp. 38 et 39).
L'art. 90 LCR ne sanctionne pas la violation de n'importe quelle règle prescrite dans le droit de la circulation routière. Selon le texte claire de la loi, il doit s'agir d'une règle de circulation et non, simplement, d'une prescription du droit routier en général. Les règles de la circulation sont celles qui régissent avant tout la façon dont les véhicules et les usagers doivent se mouvoir ou se comporter les uns par rapport aux autres ou par rapport aux conditions de la route et de la situation générale environnante (cf. Jeanneret,
ibidem
, p. 40; ATF 103 IV 192 c. 2c).
3.2
Avec le premier juge, on doit retenir qu'en ouvrant la portière du véhicule qui roulait, selon le disque d'enregistrement du tachygraphe du taxi (P. 11 et 22/2), à une vitesse avoisinant les 60 km/h, l'appelant a violé l'art. 60 al. 5 OCR en relation avec l'art. 90 ch. 2 LCR.
En effet, le fait d'ouvrir la portière d'un véhicule en marche constitue une violation grave des règles de la circulation. L'interdiction de descendre d'un véhicule en marche est une règle fondamentale de la circulation, dont la violation entraîne une mise en danger considérable de la sécurité routière. Le comportement reproché à l'appelant était de nature à créer concrètement un risque d'accident important et ce non seulement pour la voiture concernée, mais également pour les autres usagers de la route suivant le véhicule en question. Ce comportement s'avère dès lors objectivement grave.
Du point de vue subjectif, le comportement de l'appelant dénote un manque d'égards pour autrui. Il s'agit donc objectivement et subjectivement d'une violation grave de la circulation. La condamnation de l'appelant pour ce chef d'inculpation ne viole pas le droit fédéral et doit être confirmée.
4.
L'appelant conteste sa condamnation pour violation des devoirs en cas d'accident.
4.1
L'art. 92 ch. 1 LCR dispose que celui qui viole, lors d’un accident, les obligations que lui impose la loi sur la circulation routière, sera puni de l’amende.
Aux termes de l'art. 51 LCR, en cas d’accident où sont en cause des véhicules automobiles ou des cycles, toutes les personnes impliquées devront s’arrêter immédiatement. Elles sont tenues d’assurer, dans la mesure du possible, la sécurité de la circulation (al. 1). Si l’accident n’a causé que des dommages matériels, leur auteur en avertira tout de suite le lésé en indiquant son nom et son adresse. En cas d’impossibilité, il en informera sans délai la police (al. 3).
Cette disposition définit les devoirs généraux qui s'adressent aux personnes impliquées dans un accident, quelques qu'en soient les conséquences. Il convient en premier lieu de définir ce qu'est une personne impliquée, puisque c'est à elle, en principe, qu'incomberont, entre autres, ces devoirs généraux. Est impliquée dans un accident celui qui, d'une quelconque manière, directement ou indirectement, a participé à la survenance de l'accident, indépendamment du fait de savoir s'il supporte une responsabilité ou s'il en est la cause. Plus généralement, sont impliqués tous ceux dont l'attitude peut avoir une influence dans la survenance et donc quant à l'explication de l'accident. Ainsi, doit être considéré comme une personne impliquée le passager lorsque son comportement a provoqué l'accident ou lorsque son influence sur la conduite du véhicule est telle qu'il peut être assimilé à un conducteur. A l'exception de ces cas, le passager n'est en principe pas une personne impliquée (cf. Jeanneret,
ibidem
, p. 156). En cas d'accident, la personne impliquée telle que définie ci-dessus a le devoir de s'arrêter et d'assurer la sécurité.
L'immédiateté de l'avis requis par l'art. 51 al. 3 LCR doit être interprétée de manière stricte. Celui-ci doit être donné aussi rapidement que les circonstances le permettent. L'auteur ne peut différer l'avis pour des questions de convenance personnelle ou pour ne pas déranger de nuit le lésé (AF 92 IV 22 c. 2; TF 6S.8/2003 du 19 mars 2003, consid. 2; TF 6S.281/2004 du 10 février 2004, consid. 1.2.1). Si celui-ci n'est pas présent sur les lieux et qu'il ne peut être avisé immédiatement, parce qu'il n'est pas connu ou qu'il n'est pas atteignable, l'auteur de l'accident devra aviser la police.
En principe, les devoirs spécifiques prévus à l'art. 51 al. 3 LCR incombent à l'auteur du dommage et non aux personnes impliquées. L'auteur du dommage est celui dont le comportement est, même partiellement, à l'origine de l'une des causes de l'accident, indépendamment de toute faute et même s'il subit personnellement un dommage du fait de l'accident. A l'opposé, celui qu n'a exercé aucune influence sur le déroulement de l'accident, comme le simple passager, n'est pas l'auteur du dommage et, partant, n'est pas débiteur des devoirs spécifiques décrits à l'art. 51 al. 3 LCR (TF 6S.8/2003 du 19 mars 2003 consid. 2; Jeanneret, ibidem, p. 176; Weissenberger, Jahrbuch 2003, p. 356).
4.2
L'appelant a bel et bien violé les devoirs que lui imposait l'art. 92 ch. 1 LCR. En effet, d'une part, au regard du déroulement des événements tels qu'exposés ci-dessus (cf. chiffre 2 ci-dessus), il est clair que l'appelant est l'auteur d'un dommage, son comportement étant dans tous les cas l'une des causes de l'accident. D'autre part, il est parti immédiatement après l'accident sans indiquer son nom et son adresse aux divers lésés, à savoir le chauffeur de taxi et la Ville de Lausanne, propriétaire des installations endommagées.
5.
L'appelant requiert le prononcé d'une peine plus clémente, assortie du sursis.
5.1
a)
L'art. 34 CP dispose notamment que sauf disposition contraire de la loi, la peine pécuniaire ne peut excéder 360 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l’auteur. Sauf disposition contraire de la loi, la peine pécuniaire ne peut excéder 360 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l’auteur (al. 1). Le jour-amende est de 3'000 fr. au plus. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l’auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d’assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).
Le montant du jour-amende doit être fixé en partant du revenu net que l'auteur réalise en moyenne quotidiennement. Ce qui est dû en vertu de la loi ou ce dont l'auteur ne jouit pas économiquement doit en être soustrait. Il en va ainsi des impôts courants, des cotisations à l'assurance-maladie et accidents obligatoires ou encore des frais nécessaires à l'acquisition du revenu. La loi mentionne aussi spécialement d'éventuelles obligations d'assistance, familiales en particulier. La raison en est que les membres de la famille ne doivent, autant que possible, pas être affectés par la restriction apportée au train de vie. Le revenu net doit être amputé des montants dus à titre d'entretien ou d'assistance, pour autant que le condamné s'en acquitte effectivement. Le tribunal peut, dans une large mesure, se référer aux principes du droit de la famille en ce qui concerne le calcul de ces montants (ATF 134 IV 60 c. 6; TF 6B_845 du 11 janvier 2010 consid. 1, publié dans la SJ 2010 I 205).
b)
Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17; ATF 129 IV 6; TF 6B_759/2011; TF 6B_335/2012).
L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Par conséquent, celui-ci ne viole le droit fédéral en fixant la peine que s'il sort du cadre légal, s'il se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, s'il omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'il prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 136 IV 55; ATF 134 IV 17 précité; ATF 129 IV 6 précité).
5.2
S'agissant de la quotité de la peine, l'argumentation de l'appelant repose exclusivement sur la prémisse qu'il sera libéré des infractions de violation grave des règles de la circulation routière et de violation des devoirs en cas d'accident. Cette critique est vaine, les condamnations étant confirmées. Par ailleurs, au regard de la culpabilité de l'appelant, la peine prononcée ne prête pas le flanc à la critique. Il en va de même de la quotité du jour-amende compte tenu des revenus réalisés, de la fortune et du train de vie de l'intéressé.
Enfin, l'appelant a déjà été condamné à deux reprises pour des violations graves des règles de la circulation routière, respectivement en mars 2006 et en mai 2010. Entre novembre 2005 et juillet 2010, il a en outre fait l'objet de trois retraits du permis de conduire, pour des périodes allant de un à douze mois. Il n'a aucunement pris conscience de la gravité de ses actes. Partant, seul un pronostic défavorable peut être posé et le sursis ne saurait être accordé.
6.
L'appelant conteste la révocation du sursis accordé le 10 mai 2010 par le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois.
6.1
Aux termes de l'art. 46 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Il peut modifier le genre de la peine révoquée pour fixer, avec la nouvelle peine, une peine d'ensemble conformément à l'art. 49 CP. S'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation. Il peut adresser au condamné un avertissement et prolonger le délai d'épreuve de la moitié au plus de la durée fixée dans le jugement.
La révocation du sursis dépend des infractions commises dans le délai d'épreuve, lesquelles permettront d'établir un pronostic favorable ou défavorable (ATF 134 IV 140 c. 4.2). Seul un pronostic défavorable peut justifier la révocation; à défaut, le juge doit renoncer à celle-ci (ATF 134 IV 140 c. 4.3). Lorsqu'il s'agit de fixer le pronostic, le juge doit également tenir compte de l'effet dissuasif que peut exercer la nouvelle peine, si elle doit être exécutée; il en va de même s'agissant de l'effet de l'exécution d'une peine, à la suite de la révocation d'un sursis accordé précédemment. L'inverse est également admissible: si le sursis précédent est révoqué, l'exécution de la peine qui en était assortie peut conduire à nier l'existence d'un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (ATF 134 IV 140 c. 4.5). L'existence d'un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné, bien qu'elle soit une condition aussi bien du sursis à la nouvelle peine que de la révocation d'un sursis antérieur, ne peut faire l'objet d'un unique examen, dont le résultat suffirait à sceller tant le sort de la décision sur le sursis à la nouvelle peine que celui de la décision sur la révocation du sursis antérieur. Le fait que le condamné devra exécuter une peine – celle qui lui est nouvellement infligée ou celle qui l'avait été antérieurement avec sursis – peut apparaître suffisant à le détourner de la récidive et, partant, doit être pris en considération pour décider de la nécessité ou non d'exécuter l'autre peine. Il constitue donc une circonstance nouvelle, appelant un réexamen du pronostic au stade de la décision d'ordonner ou non l'exécution de l'autre peine. Il va par ailleurs de soi que le juge doit motiver sa décision sur ce point, de manière à ce que l'intéressé puisse au besoin la contester utilement et l'autorité de recours exercer son contrôle (TF 6B_855/2010 du 7 avril 2011, consid. 2.2).
6.2
En l'espèce, l'effet dissuasif de la nouvelle peine pécuniaire n'est pas suffisant pour renoncer à révoquer le sursis octroyé à l'appelant le 10 mai 2010. En effet, les trois retraits de permis montrent une insensibilité à la sanction et l'attitude de l'appelant dans la procédure est empreinte de mauvaise foi. Sa banalisation et sa négation des faits reprochés démontrent une absence totale de prise de conscience, le pronostic étant entièrement défavorable. Seul le prononcé d'une peine ferme et la révocation du sursis permettront de faire comprendre à l'appelant qu'aucune récidive en matière de circulation routière ne sera tolérée.
7.
En définitive, l'appel de S._ est rejeté et le jugement rendu le 22 novembre 2012 par le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne est intégralement confirmé.
Vu l'issue de la cause, les frais de la procédure d'appel, par 2'240 fr. (art. 422 CPP; art. 21 al. 1 et 2 TFJP [Tarif des frais judiciaires pénaux du
28 septembre 2010, RSV 312.03.1]), doivent être mis à la charge de S._ (art. 428 al. 1 CPP). | Criminal | Substantive Criminal | fr | 2,013 | VD_TC | VD_TC_003 | VD | Région lémanique |