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SOC. IK COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle M. CATHALA, président Arrêt n° 1122 FP-P+B+I sur le pourvoi incident Pourvois n° R 18-13.771 S 18-13.772 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société AGC France, société par actions simplifiée, dont le siège est 100 rue Léon Gambetta, BP 1, 59168 Boussois, a formé les pourvois n° R 18-13.771 et S 18-13.772 contre deux arrêts rendus le 19 janvier 2018 par la cour d'appel de Caen (1re chambre sociale), dans les litiges l'opposant respectivement : 1°/ à M. Q... W..., domicilié [...] , 2°/ à M. F... T..., domicilié [...] , 3°/ à Mme L... S..., domiciliée [...] , prise en qualité de mandataire liquidateur de la société AGC David miroiterie, 4°/ à l'AGS CGEA de Rouen, dont le siège est 73 rue de Martainville, CS 11716, 76108 Rouen cedex 1, défendeurs à la cassation. MM. W... et T... ont formé chacun un pourvoi incident contre les mêmes arrêts. La demanderesse invoque, à l'appui de chacun de ses pourvois principaux, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Les demandeurs invoquent, à l'appui de chacun de leur pourvoi incident, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société AGC France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. T... et W..., l'avis oral de Mme Berriat, avocat général et l'avis écrit de M. Weissmann, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Ricour, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mmes Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, Richard, conseillers, Mmes Ala, Chamley-Coulet, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° R 18-13.771 et S 18-13.772 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Caen, 19 janvier 2018), le groupe David, composé de la société David miroiterie et de la société David services, a été repris le 22 septembre 2010 par le groupe verrier japonais AGC (Asahi Glass Compagny limited). La société AGC France exerçait la présidence de la nouvelle société AGC David miroiterie venue aux droits de la société David miroiterie et ayant absorbé la société David services. Les actions de la société AGC David miroiterie étaient détenues par une autre société du groupe, également présidée par la société AGC France. 3. Les salariés non protégés ont été licenciés pour motif économique le 16 mai 2012, en raison de la cessation d'activité de la société AGC David miroiterie. Celle-ci a été placée le 9 janvier 2013 en liquidation judiciaire avec poursuite d'activité jusqu'au 9 avril 2013, Mme S... étant désignée en qualité de liquidatrice. 4. MM. W... et T..., salariés protégés, ont été licenciés le 18 avril 2013 par la liquidatrice après autorisation de l'inspecteur du travail. 5. Contestant leur licenciement, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement d'une indemnité supra conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts à l'encontre de la société AGC David miroiterie et de la société AGC France, invoquant la qualité de coemployeur de celle-ci. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi principal de la société AGC France, pris en sa première branche ; ci-après annexé 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen du pourvoi principal de la société AGC France, pris en sa seconde branche ; Enoncé du moyen 7. La société AGC France fait grief aux arrêts d'allouer aux salariés une somme au titre de l'indemnité supra conventionnelle de licenciement, de dire qu'elle est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de cette somme et de la condamner au paiement de cette somme, alors « qu'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en retenant, pour décider que la société AGC France avait la qualité de coemployeur des salariés à la cause, qu'à compter de février 2012, la société AGC David miroiterie a délégué à cette société la gestion de ses ressources humaines, que cette dernière lui a facturé son intervention, que dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, que cette dernière société a géré sa trésorerie et, qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, elle a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour cette dernière, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David miroiterie, violant ainsi l'article L. 1221-1 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1221-1 du code du travail : 8. La Cour juge de façon constante que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière (Soc., 2 juillet 2014, n° 13-15.209 et s., Bull. 2014, V, n° 159, Molex ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-27.266 et s., Bull. 2016, V, n° 146, Continental ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-26.541, Bull. 2016, V, n° 145, Proma ; Soc., 6 juillet 2016, n° 15-15.481 à 15-15.545, Bull. 2016, V, n° 147, 3 Suisses). 9. Le premier de ces arrêts a ainsi été commenté par la chambre sociale (Site de la Cour, mensuel du droit du travail n° 56, juillet 2014, p. 4) : "L'arrêt confirme l'importance prise par ce critère d'immixtion dans la gestion économique et sociale de sa filiale par la société mère. Seule est susceptible d'être reprochée à une société mère son immixtion globale et permanente dans le fonctionnement de sa filiale, qui doit prendre à la fois une dimension économique et une dimension sociale. (...) Il n'y a immixtion sociale qu'à condition que la direction du personnel et la gestion des ressources humaines soient prises en main par la société mère qui ne permet plus à la filiale de se comporter comme le véritable employeur à l'égard de ses salariés. La situation de coemploi devrait donc rester exceptionnelle". 10. Il apparaît nécessaire eu égard à l'évolution du contentieux de préciser les critères applicables en la matière. 11. Il y a lieu de juger, en application de l'article L. 1221-1 du code du travail précité, que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière. 12. Pour dire que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement et au remboursement de diverses sommes et la condamner au paiement de ces sommes, les arrêts retiennent que les sociétés AGC David miroiterie, AGC France, les autres filiales ou sous-filiales oeuvraient toutes dans le domaine du verre et en ce qui concerne les filiales - dont AGC David miroiterie - plus particulièrement dans la transformation du verre. 13. Les arrêts relèvent également que la société AGC France présidait, par l'intermédiaire d'un directeur, M. A..., qui la représentait, d'une part, la société AGC David miroiterie, d'autre part, la société Isatis, actionnaire de la société AGC David miroiterie. Ils constatent que M. A... avait réalisé des rapports et projets sur la situation de la société AGC David miroiterie, géré des litiges commerciaux, signé des contrats de location, de maintenance, des lettres d'embauche, d'avertissement, de rupture, ainsi qu'un accord salarial en février 2011 et accordé des congés payés, sans que soit démontrée l'existence de consignes particulières données par la société AGC David miroiterie à ces diverses occasions. 14. Les arrêts constatent encore que si les éléments produits ne permettent pas d'établir que les achats de fournitures et de machines étaient autorisés par la société AGC France ni que celle-ci fixait les prix de vente, il était imposé en revanche à la société AGC David miroiterie de traiter diverses commandes, rarement rentables, pour d'autres sociétés du groupe, qu'elle était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe et bénéficiait également de prêts. 15. Les arrêts retiennent enfin qu'il existait, entre les sociétés AGC France et AGC David miroiterie, une confusion de direction, d'intérêt et d'activités qui s'est traduite par une immixtion anormale de la société AGC France dans la gestion sociale de la société AGC David miroiterie, la seconde ayant délégué à la première, à compter de février 2012, la gestion de ses ressources humaines et la société AGC France lui ayant facturé son intervention. Ils ajoutent que cette confusion s'est également traduite par une immixtion anormale dans la gestion économique puisque, dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une autre filiale du groupe, moyennant redevance, et que la trésorerie a été gérée par la société AGC France. Les arrêts observent que, en outre, entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, la société AGC France a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit d'autres filiales dans des conditions désavantageuses pour la société AGC David miroiterie. 16. En se déterminant ainsi, sans caractériser une immixtion permanente de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. Et sur le moyen du pourvoi incident des salariés, pris en sa première branche Enoncé du moyen 17. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la légèreté blâmable de l'employeur, alors « que la décision de l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui auraient causé cette faute ou légèreté blâmable dans l'exécution du contrat de travail ; qu'en déboutant le salarié au motif de l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte de son emploi qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, la cour d'appel a violé l'article 1382 alors applicable du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. » Réponse de la Cour Vu le principe de séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III : 18. La décision d'autorisation de licenciement prise par l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions judiciaires compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi. 19. Pour débouter les salariés de leur demande de dommages-intérêts au titre de la faute ou la légèreté blâmable de l'employeur les arrêts retiennent que les salariés ont été licenciés, après autorisation de l'inspection du travail, à raison de la liquidation judiciaire de l'employeur qui conduit à la fermeture définitive de son établissement et à sa cessation d'activité, ce qui implique la suppression de leur poste, et leur licenciement, aucun reclassement dans un emploi correspondant à leurs compétences n'étant possible. 20. Les arrêts constatent ensuite que les salariés soutiennent que la cessation d'activité de la société AGC David Miroiterie trouve son origine dans la faute ou la légèreté blâmable de la société et réclament des dommages-intérêts "à raison du préjudice subi", antérieur, selon eux, à la rupture de leur contrat de travail. 21. Les arrêts relèvent que, toutefois, ils caractérisent ce préjudice par le fait que "l'absence de faute et de légèreté blâmable aurait permis le maintien de l'engagement contractuel", considérant ce faisant, que leur préjudice est bien constitué par la perte de leur emploi et donc par le licenciement et n'établissent pas, ni même ne soutiennent, que la faute et la légèreté blâmable de leur employeur leur auraient occasionné un préjudice distinct. 22. Les arrêts retiennent enfin qu'en l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte d'emploi, qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, ils seront déboutés de cette demande. 23. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils jugent que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de la somme de 15 000 euros allouée respectivement à MM. W... et T... au titre de l'indemnité supra-légale de licenciement, disent qu'à l'égard de la société AGC France cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2013, la condamnent au paiement de ces sommes, déboutent MM. W... et T... de leur demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la légèreté blâmable de l'employeur, disent que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de la somme allouée en application de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens de première instance et d'appel, et la condamnent au paiement de ces sommes, les arrêts rendus par la cour d'appel de Caen le 19 janvier 2018 ; Remet, seulement sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ; Condamne la société AGC France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société AGC France et la condamne à payer à MM. W... et T..., chacun, la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour la société AGC France, demanderesse au pourvoi principal n° R 18-13.771 Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir alloué à M. W... la somme de 15.000 euros au titre de l'indemnité supra conventionnelle de licenciement, d'avoir dit que la société AGC France était tenue in solidum avec la société AGC David Miroiterie au paiement de cette somme et de l'avoir condamnée au paiement de cette somme ; AUX MOTIFS QUE ( .) ; sur l'indemnité supra conventionnelle ; que le PSE établi par la société AGC David Miroiterie prévoit le versement d'une indemnité supra conventionnelle de 15.000 euros bruts par salarié, versée "au moment de la rupture pour motif économique du contrat de travail" ; que les salariés entrant dans le dispositif de reclassement interne sont exclus de cette disposition ; qu'il est constant que celle indemnité n'a pas été versée à M. W... ; que la société AGC David Miroiterie et la société AGC France soutiennent que la situation de M. W... est différente de celle des autres salariés car il a été licencié, hors cadre PSE, par le liquidateur et non par la société AGC David Miroiterie ; qu'il ressort toutefois du PSE que le site a fermé et que tous les salariés devaient être licenciés ; que M. W..., licencié à raison de la fermeture du site et de sa cessation d'activité, était dans une situation identique à celle des autres salariés ; que le défaut de versement de cette indemnité laisse donc présumer une discrimination ; que société AGC David Miroiterie et la société AGC France soutiennent que M. W... était placé dans une situation différente de celle des autres salariés à raison de la date de son licenciement, parce qu'il a été licencié par la liquidatrice et non par la société elle-même et ce, plus tardivement, ce qui lui a permis d'être payé plus longtemps que les autres salariés ; que le fait que son licenciement ait été différé à raison de la durée de la procédure à suivre pour un salarié protégé et d'un premier refus d'autorisation de licencier opposé par l'inspection du travail ne constitue pas un élément objectif étranger à toute discrimination ; que M. W... est donc fondé à obtenir paiement de cette indemnité ; que sur le co-emploi : que M. W... soutient que la société AGC France est coemployeuse parce que, selon lui, elle préside la société AGC David Miroiterie et en est l'unique actionnaire, que le directeur de la société AGC David Miroiterie a été écarté des décisions, que la société AGC France autorise l'achat des fournitures et des machines, fixe les prix de vente et intervient dans l'activité commerciale, dicte les choix stratégiques, contrôle, gère, à la place de la société AGC David Miroiterie et lui facture des frais à ce titre, parce que la décision de restructurer et de fermer le site a été prise par la société AGC France et mise en oeuvre par cette société ; que l'AGSCGEA de Rouen ajoute qu'en outre, la société AGC France a dépouillé la société AGC David Miroiterie de ses actifs ; que certaines de ces allégations sont confirmées par les éléments produits, d'autres sont inexactes ou ne sont pas démontrées ; que comme indiqué en introduction, la société AGC France préside, par l'intermédiaire d'un directeur, M. A... qui la représente, d'une part, la société AGC David Miroiterie, d'autre part, la société Isatis, actionnaire de la société AGC David Miroiterie ; qu'elle n'est donc pas directement actionnaire de la société AGC David Miroiterie ; que néanmoins, cette construction démontre l'absence structurelle d'autonomie de la société AGC David Miroiterie ; que le directeur, M. A..., a réalisé des rapports et projets sur la situation de la société AGC David Miroiterie, géré des litiges commerciaux (avec la société Verre et Bleu), signé des contrats de location, de maintenance, des lettres d'embauche et de rupture, accordé des congés payés, signé des lettres d'avertissement et un accord salarial en février 2011 ; qu'il n'est pas démontré l'existence de consignes particulières données par la société AGC David Miroiterie à ces diverses occasions ; que toutefois, le 22 février 2012, il a donné pouvoir à M. I..., "HR Country Manager France" de la société AGC France de le représenter « dans le cadre de la procédure de plan social initiée au niveau du pôle architectural France », ce qui impliquait, aux termes de ce mandat, notamment, délégation pour « effectuer toutes les formalités nécessaires aux licenciements économique » (convocation à entretien préalable, lettre de licenciement et toute transaction) ; que l'ensemble de la procédure de licenciement a donc été mené directement par la société AGC France sans intervention du directeur de la société AGC David Miroiterie et a été financée par la société AGC France (paiement des derniers salaires, indemnités de rupture, indemnité supra légale, financement de la cellule de reclassement) ; que cette convention de management a été facturée 90.000 € à la société AGC David Miroiterie par la société AGC France ; qu'en outre a été refacturée à la société AGC David Miroiterie, selon une clé de répartition dont le commissaire aux comptes n'a pas obtenu justification, une partie des frais de restructuration (269.000€) de l'ensemble des sociétés du groupe ; que dès sa reprise par la société AGC France, la société AGC David Miroiterie a contracté avec une autre filiale du groupe, la société AIV, un contrat d'assistance portant sur la direction, la maintenance, la qualité, la sécurité et environnement et la comptabilité ; que seules les factures relatives à ce contrat sont produites, pour un montant d'environ 11.000 € mensuels (ce qui correspond, sur un exercice, à 124.000 € selon le compte rendu de clôture établi, en 2012, par M. E..., commissaire aux comptes) ; que le contrat lui-même n'est pas versé aux débats ; que selon M. E..., il porte sur toute la gestion administrative de la société ; qu'en vertu d'une convention signée le 18 octobre 2010 entre la société AGC David Miroiterie et la société AGC France, David miroiterie a donné mandat à AGC France de gérer sa trésorerie ; que la société AGC France était chargée de gérer et de coordonner la trésorerie du groupe, elle disposait d'un compte bancaire centralisateur ouvert à son nom destiné à "rationaliser" la trésorerie au niveau du groupe afin que les excédents de trésorerie d'une société puissent combler les besoins d'autres sociétés, les soldes débiteurs étant facturés et les avances rémunérées ; que cette convention prévoit que la société AGC David Miroiterie conserve ses comptes bancaires propres pour ses recettes et dépenses mais instaure un nivellement des comptes "par ou vers le compte centralisateur" ; que même si la société AGC David Miroiterie fonctionnait au quotidien grâce à ses propres comptes bancaires la gestion de sa trésorerie lui échappait ; que les éléments produits ne permettent d'établir ni que les achats de fournitures et de machines étaient autorisés par la société AGC France ni que c'est elle qui fixait les prix de vente ; qu'il est en revanche démontré qu'il était imposé à la société AGC David Miroiterie de traiter diverses commandes pour d'autres sociétés du groupe, commandes rarement rentables, a admis M. A... le 14 décembre 2011 lors d'une réunion des délégués du personnel ; qu'il a toutefois ajouté que ces commandes "rendaient service" car elles permettaient "de couvrir une partie des charges fixes" ; qu'il est également admis par la société AGC France que la société AGC David Miroiterie était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe qui oeuvraient dans le même domaine qu'elle, la société AGC France indique que la société AGC David Miroiterie a également bénéficié de prêts ; qu'avant le dépôt de bilan de la société AGC David Miroiterie, les locaux de la société AGC David Miroiterie ont été vidés de tous les matériels, vendus en dessous de leur valeur nette comptable, pour l'essentiel à d'autres sociétés du groupe pour un prix correspondant à une valeur décidée par le groupe sans valorisation à dire d'expert. Le coût du démontage et du transport a été pris en charge par la société AGC David Miroiterie ; que les contrats de crédit-bail d'une valeur théorique de 200 à 600 000 € selon le commissaire aux comptes ont été cédés pour 0€ à la société AGC France ; que le commissaire aux comptes n'a pas été en mesure de se prononcer sur le prix de cession du stock qui figurait en 2011 dans les comptes pour 343 000 € et qui ne figurait plus au 31 décembre 2012 ni au bilan ni physiquement dans les locaux de l'entreprise ; qu'il ressort de ces différents points qu'il existait, entre les deux sociétés, une confusion de direction, d'intérêt et d'activités (AGC David Miroiterie, AGC France, ses autres filiales ou sous-filiales oeuvrant dans toutes dans le domaine du verre et en ce qui concerne les filiales - dont David Miroiterie - plus particulièrement dans la transformation du verre) qui s'est traduite par une immixtion anormale de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David Miroiterie : - dans le domaine social, la société AGC David Miroiterie a délégué, à compter de février 2012, à la société AGC France la gestion de ses ressources humaines (entièrement consacrées au licenciement collectif de l'ensemble des salariés) et la société AGC France lui a facturé son intervention, - dans le domaine économique, dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David Miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, et la société AGC France a géré sa trésorerie ; qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, la société AGC France a repris les actifs de la société AGC David Miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour la société AGC David Miroiterie ; que la société AGC France doit donc être reconnue comme coemployeuse et, à ce titre, sera tenue, in solidum avec la société AGC David Miroiterie, au paiement des dommages et intérêts alloués à M. W... ; ( .) ; que sur les points annexes ; ( ) ; qu'à l'égard de la société AGC France, la sommes accordée à M. W... produira intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2013, date de réception par la société AGC David Miroiterie, par la société AGC France et l'AGS-CGEA de Rouen de leur convocation devant le bureau de conciliation ; 1°) ALORS QU'il n'y a discrimination que si le traitement défavorable dont se plaint le salarié est fondé sur un des motifs prohibés par l'article L. 1132-1 du code du travail ; qu'en jugeant, pour allouer à M. W... la somme de 15.000 euros à titre d'indemnité supra conventionnelle de licenciement, que ce dernier avait été victime d'une discrimination, sans préciser sur quel motif prohibé par l'article L. 1132-1 du code du travail reposait le traitement défavorable dont aurait fait l'objet le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en retenant, pour décider que la société AGC France avait la qualité de coemployeur de M. W..., qu'à compter de février 2012, la société AGC David Miroiterie a délégué à cette société la gestion de ses ressources humaines, que cette dernière lui a facturé son intervention, que dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David Miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, que cette dernière société a géré sa trésorerie et, qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, elle a repris les actifs de la société AGC David Miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour cette dernière, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David Miroiterie et, partant, a violé l'article L. 1221-1 du code du travail. Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. W..., demandeur au pourvoi incident n° R 18-13.771 Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre de la légèreté blâmable de l'employeur. AUX MOTIFS QUE M. W... a été licencié, après autorisation de1'inspection du travail, à raison de la "liquidation judiciaire de (son) employeur qui conduit à la fermeture définitive de son établissement et à sa cessation d'activité" ce qui implique la suppression de son poste et à son licenciement aucun reclassement "dans un emploi correspondant à (ses) compétences" n'étant possible. Il soutient que la cessation d'activité de la SAS AGC David Miroiterie trouve son origine dans la faute ou à la légèreté blâmable de la société et réclame des dommages et intérêts "à raison du préjudice subi", antérieur, selon lui, à la rupture de son contrat de travail. Toutefois, il caractérise ce préjudice ainsi : "l'absence de faute et de légèreté blâmable aurait permis le maintien de l'engagement contractuel". Il considère, ce faisant, que son préjudice est bien constitué par la perte de son emploi (et donc par le licenciement) et n'établit pas, ni même ne soutient, que la faute et la légèreté blâmable de son employeur lui auraient occasionné un préjudice distinct. En l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte d'emploi - qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires -, il sera débouté de cette demande. 1° ALORS QUE la décision de l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui auraient causé cette faute ou légèreté blâmable dans l'exécution du contrat de travail ; qu'en déboutant le salarié au motif de l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte de son emploi qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, la cour d'appel a violé l'article 1382 alors applicable du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. 2° ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les éléments de la cause ; que pour débouter le salarié de sa demande, la cour d'appel a considéré que le préjudice allégué par le salarié était celui lié à la perte de son emploi ; que cependant elle a relevé que le salarié se prévalait d'un préjudice antérieur à la rupture tenant au fait que l'absence de faute aurait permis le maintien du lien contractuel ; qu'en considérant que la faute de l'employeur n'avait causé au salarié aucun préjudice distinct de celui de la rupture, quand celui-ci se prévalait du préjudice de perte de chance de conserver son emploi, la cour d'appel a violé le principe selon lequel les juges ne peuvent dénaturer les éléments de la cause et l'article 1134 alors applicable du code civil. Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour la société AGC France, demanderesse au pourvoi principal n° S 18-13.772 Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir alloué à M. T... la somme de 15.000 euros au titre de l'indemnité supra conventionnelle de licenciement, d'avoir dit que la société AGC France était tenue in solidum avec la société AGC David Miroiterie au paiement de cette somme et de l'avoir condamnée au paiement de cette somme ; AUX MOTIFS QUE ( .) ; sur l'indemnité supra conventionnelle ; que le PSE établi par la société AGC David Miroiterie prévoit le versement d'une indemnité supra conventionnelle de 15.000 euros bruts par salarié, versée "au moment de la rupture pour motif économique du contrat de travail" ; que les salariés entrant dans le dispositif de reclassement interne sont exclus de cette disposition ; qu'il est constant que celle indemnité n'a pas été versée à M. T... ; que la société AGC David Miroiterie et la société AGC France soutiennent que la situation de M. T... est différente de celle des autres salariés car il a été licencié, hors cadre PSE, par le liquidateur et non par la société AGC David Miroiterie ; qu'il ressort toutefois du PSE que le site a fermé et que tous les salariés devaient être licenciés ; que M. T..., licencié à raison de la fermeture du site et de sa cessation d'activité, était dans une situation identique à celle des autres salariés ; que le défaut de versement de cette indemnité laisse donc présumer une discrimination ; que société AGC David Miroiterie et la société AGC France soutiennent que M. T... était placé dans une situation différente de celle des autres salariés à raison de la date de son licenciement, parce qu'il a été licencié par la liquidatrice et non par la société elle-même et ce, plus tardivement, ce qui lui a permis d'être payé plus longtemps que les autres salariés ; que le fait que son licenciement ait été différé à raison de la durée de la procédure à suivre pour un salarié protégé et d'un premier refus d'autorisation de licencier opposé par l'inspection du travail ne constitue pas un élément objectif étranger à toute discrimination ; que M. T... est donc fondé à obtenir paiement de cette indemnité ; que sur le co-emploi : que M. T... soutient que la société AGC France est coemployeuse parce que, selon lui, elle préside la société AGC David Miroiterie et en est l'unique actionnaire, que le directeur de la société AGC David Miroiterie a été écarté des décisions, que la société AGC France autorise l'achat des fournitures et des machines, fixe les prix de vente et intervient dans l'activité commerciale, dicte les choix stratégiques, contrôle, gère, à la place de la société AGC David Miroiterie et lui facture des frais à ce titre, parce que la décision de restructurer et de fermer le site a été prise par la société AGC France et mise en oeuvre par cette société ; que l'AGS-CGEA de Rouen ajoute qu'en outre, la société AGC France a dépouillé la société AGC David Miroiterie de ses actifs ; que certaines de ces allégations sont confirmées par les éléments produits, d'autres sont inexactes ou ne sont pas démontrées ; que comme indiqué en introduction, la société AGC France préside, par l'intermédiaire d'un directeur, M. A... qui la représente, d'une part, la société AGC David Miroiterie, d'autre part, la société Isatis, actionnaire de la société AGC David Miroiterie ; qu'elle n'est donc pas directement actionnaire de la société AGC David Miroiterie ; que néanmoins, cette construction démontre l'absence structurelle d'autonomie de la société AGC David Miroiterie ; que le directeur, M. A..., a réalisé des rapports et projets sur la situation de la société AGC David Miroiterie, géré des litiges commerciaux (avec la société Verre et Bleu), signé des contrats de location, de maintenance, des lettres d'embauche et de rupture, accordé des congés payés, signé des lettres d'avertissement et un accord salarial en février 2011 ; qu'il n'est pas démontré l'existence de consignes particulières données par la société AGC David Miroiterie à ces diverses occasions ; que toutefois, le 22 février 2012, il a donné pouvoir à M. I..., "HR Country Manager France" de la société AGC France de le représenter « dans le cadre de la procédure de plan social initiée au niveau du pôle architectural France », ce qui impliquait, aux termes de ce mandat, notamment, délégation pour « effectuer toutes les formalités nécessaires aux licenciements économique » (convocation à entretien préalable, lettre de licenciement et toute transaction) ; que l'ensemble de la procédure de licenciement a donc été mené directement par la société AGC France sans intervention du directeur de la société AGC David Miroiterie et a été financée par la société AGC France (paiement des derniers salaires, indemnités de rupture, indemnité supra légale, financement de la cellule de reclassement) ; que cette convention de management a été facturée 90.000 € à la société AGC David Miroiterie par la société AGC France ; qu'en outre a été refacturée à la société AGC David Miroiterie, selon une clé de répartition dont le commissaire aux comptes n'a pas obtenu justification, une partie des frais de restructuration (269.000€) de l'ensemble des sociétés du groupe ; que dès sa reprise par la société AGC France, la société AGC David Miroiterie a contracté avec une autre filiale du groupe, la société AIV, un contrat d'assistance portant sur la direction, la maintenance, la qualité, la sécurité et environnement et la comptabilité ; que seules les factures relatives à ce contrat sont produites, pour un montant d'environ 11.000 € mensuels (ce qui correspond, sur un exercice, à 124.000 € selon le compte rendu de clôture établi, en 2012, par M. E..., commissaire aux comptes) ; que le contrat lui-même n'est pas versé aux débats ; que selon M. E..., il porte sur toute la gestion administrative de la société ; qu'en vertu d'une convention signée le 18 octobre 2010 entre la société AGC David Miroiterie et la société AGC France, David miroiterie a donné mandat à AGC France de gérer sa trésorerie ; que la société AGC France était chargée de gérer et de coordonner la trésorerie du groupe, elle disposait d'un compte bancaire centralisateur ouvert à son nom destiné à "rationaliser" la trésorerie au niveau du groupe afin que les excédents de trésorerie d'une société puissent combler les besoins d'autres sociétés, les soldes débiteurs étant facturés et les avances rémunérées ; que cette convention prévoit que la société AGC David Miroiterie conserve ses comptes bancaires propres pour ses recettes et dépenses mais instaure un nivellement des comptes "par ou vers le compte centralisateur" ; que même si la société AGC David Miroiterie fonctionnait au quotidien grâce à ses propres comptes bancaires la gestion de sa trésorerie lui échappait ; que les éléments produits ne permettent d'établir ni que les achats de fournitures et de machines étaient autorisés par la société AGC France ni que c'est elle qui fixait les prix de vente ; qu'il est en revanche démontré qu'il était imposé à la société AGC David Miroiterie de traiter diverses commandes pour d'autres sociétés du groupe, commandes rarement rentables, a admis M. A... le 14 décembre 2011 lors d'une réunion des délégués du personnel ; qu'il a toutefois ajouté que ces commandes "rendaient service" car elles permettaient "de couvrir une partie des charges fixes" ; qu'il est également admis par la société AGC France que la société AGC David Miroiterie était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe qui oeuvraient dans le même domaine qu'elle, la société AGC France indique que la société AGC David Miroiterie a également bénéficié de prêts ; qu'avant le dépôt de bilan de la société AGC David Miroiterie, les locaux de la société AGC David Miroiterie ont été vidés de tous les matériels, vendus en dessous de leur valeur nette comptable, pour l'essentiel à d'autres sociétés du groupe pour un prix correspondant à une valeur décidée par le groupe sans valorisation à dire d'expert. Le coût du démontage et du transport a été pris en charge par la société AGC David Miroiterie ; que les contrats de crédit-bail d'une valeur théorique de 200 à 600 000 € selon le commissaire aux comptes ont été cédés pour 0€ à la société AGC France ; que le commissaire aux comptes n'a pas été en mesure de se prononcer sur le prix de cession du stock qui figurait en 2011 dans les comptes pour 343 000 € et qui ne figurait plus au 31 décembre 2012 ni au bilan ni physiquement dans les locaux de l'entreprise ; qu'il ressort de ces différents points qu'il existait, entre les deux sociétés, une confusion de direction, d'intérêt et d'activités (AGC David Miroiterie, AGC France, ses autres filiales ou sous-filiales oeuvrant dans toutes dans le domaine du verre et en ce qui concerne les filiales - dont David Miroiterie - plus particulièrement dans la transformation du verre) qui s'est traduite par une immixtion anormale de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David Miroiterie : - dans le domaine social, la société AGC David Miroiterie a délégué, à compter de février 2012, à la société AGC France la gestion de ses ressources humaines (entièrement consacrées au licenciement collectif de l'ensemble des salariés) et la société AGC France lui a facturé son intervention, - dans le domaine économique, dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David Miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, et la société AGC France a géré sa trésorerie ; qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, la société AGC France a repris les actifs de la société AGC David Miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour la société AGC David Miroiterie ; que la société AGC France doit donc être reconnue comme coemployeuse et, à ce titre, sera tenue, in solidum avec la société AGC David Miroiterie, au paiement des dommages et intérêts alloués à M. T... ; ( .) ; que sur les points annexes ; ( ) ; qu'à l'égard de la société AGC France, la sommes accordée à M. T... produira intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2013, date de réception par la société AGC David Miroiterie, par la société AGC France et l'AGS-CGEA de Rouen de leur convocation devant le bureau de conciliation ; 1°) ALORS QU'il n'y a discrimination que si le traitement défavorable dont se plaint le salarié est fondé sur un des motifs prohibés par l'article L. 1132-1 du Code du travail ; qu'en jugeant, pour allouer à M. T... la somme de 15.000 euros à titre d'indemnité supra conventionnelle de licenciement, que ce dernier avait été victime d'une discrimination, sans préciser sur quel motif prohibé par l'article L. 1132-1 du code du travail reposait le traitement défavorable dont aurait fait l'objet le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en retenant, pour décider que la société AGC France avait la qualité de coemployeur de M. T..., qu'à compter de février 2012, la société AGC David Miroiterie a délégué à cette société la gestion de ses ressources humaines, que cette dernière lui a facturé son intervention, que dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David Miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, que cette dernière société a géré sa trésorerie et, qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, elle a repris les actifs de la société AGC David Miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour cette dernière, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David Miroiterie, violant ainsi l'article L. 1221-1 du code du travail. Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. T..., demandeur au pourvoi incident n° S 18-13.772 Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre de la légèreté blâmable de l'employeur. AUX MOTIFS QUE M. T... a été licencié, après autorisation de1'inspection du travail, à raison de la "liquidation judiciaire de (son) employeur qui conduit à la fermeture définitive de son établissement et à sa cessation d'activité" ce qui implique la suppression de son poste et à son licenciement aucun reclassement "dans un emploi correspondant à (ses) compétences" n'étant possible. Il soutient que la cessation d'activité de la SAS AGC David Miroiterie trouve son origine dans la faute ou à la légèreté blâmable de la société et réclame des dommages et intérêts "à raison du préjudice subi", antérieur, selon lui, à la rupture de son contrat de travail. Toutefois, il caractérise ce préjudice ainsi : "l'absence de faute et de légèreté blâmable aurait permis le maintien de l'engagement contractuel" et fait valoir que les emplois qu'il a pu retrouver lui assurent une rémunération inférieure ce qui a entrainé des difficultés financières et l'a conduit, malgré son âge, à assurer des astreintes de nuit pour améliorer sa rémunération. Il considère, ce faisant, que son préjudice est bien constitué par la perte de son emploi (et donc par le licenciement) et par les désagréments qui en ont découlé. Il n'établit pas que la faute et la légèreté blâmable de son employeur lui auraient occasionné un préjudice distinct. Il évoque le fait que son employeur l'aurait « dénoncé » auprès de l'employeur qu'il avait retrouvé entre la fermeture du site et son emploi. Toutefois il n'en justifie pas. Ce fait, en outre, constituerait en soi une faute, sans rapport avec la légèreté blâmable imputée à son employeur quant à la gestion et à la fermeture de l'entreprise. En l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte d'emploi - qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires -, il sera débouté de cette demande. 1° ALORS QUE la décision de l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui auraient causé cette faute ou légèreté blâmable dans l'exécution du contrat de travail ; qu'en déboutant le salarié au motif de l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte de son emploi qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, la cour d'appel a violé l'article 1382 alors applicable du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. 2° ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les éléments de la cause ; que pour débouter le salarié de sa demande, la cour d'appel a considéré que le préjudice allégué par le salarié était celui lié à la perte de son emploi ; que cependant elle a relevé que le salarié se prévalait d'un préjudice antérieur à la rupture tenant au fait que l'absence de faute aurait permis le maintien du lien contractuel ; qu'en considérant que la faute de l'employeur n'avait causé au salarié aucun préjudice distinct de celui de la rupture, quand celui-ci se prévalait du préjudice de perte de chance de conserver son emploi, la cour d'appel a violé le principe selon lequel les juges ne peuvent dénaturer les éléments de la cause et l'article 1134 alors applicable du code civil.
La décision d'autorisation de licenciement prise par l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions judiciaires compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi. Dès lors, encourt la cassation l'arrêt qui, pour débouter le salarié protégé de sa demande de dommages-intérêts au titre de la faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, retient que le préjudice découlant de la perte de son emploi ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires
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SOC. IK COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Rejet M. CATHALA, président Arrêt n° 1152 FS-P+B Pourvoi n° Y 19-18.681 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 Le comité d'entreprise de l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées (AMAPA), dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-18.681 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2019 par la cour d'appel de Metz (chambre des urgences), dans le litige l'opposant à l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées (AMAPA), dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du comité d'entreprise de l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 21 mars 2019), statuant en référé, le comité d'entreprise de l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées (le comité d'entreprise) a saisi le président du tribunal de grande instance pour faire constater le trouble manifestement illicite résultant de délégations par l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées (AMAPA) de la présidence du comité d'entreprise à des salariés mis à disposition de l'association. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deuxième à cinquième branches, ci-après annexé 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. Le comité d'entreprise fait grief à l'arrêt de le débouter de toutes ses demandes, alors « qu'en vertu de l'article L. 2325-1 du code du travail dans sa version alors applicable, le comité d'entreprise est présidé par l'employeur, soit la personne titulaire statutairement du pouvoir de direction ; que si celui-ci peut désigner un représentant chargé de présider le comité, ce représentant doit faire partie des effectifs de l'entreprise ; qu'en jugeant que M. V..., président du comité d'entreprise, avait valablement pu donner une délégation de pouvoir pour présider le comité à MM. G... et P..., respectivement salariés de DG Help et de Doc Gestio mis à disposition de l'association, la cour d'appel a violé l'article L. 2325-1 du code du travail dans sa version alors applicable. » Réponse de la Cour 4. En application de l'article L. 2325-1, alinéa 2, du code du travail, alors applicable, le comité d'entreprise est présidé par l'employeur, assisté éventuellement de deux collaborateurs qui ont voix consultative. 5. L'employeur peut déléguer cette attribution qui lui incombe légalement, à la condition que la personne assurant la présidence par délégation de l'employeur ait la qualité et le pouvoir nécessaires à l'information et à la consultation de l'institution représentative du personnel, de nature à permettre l'exercice effectif des prérogatives de celle-ci, peu important que le délégataire soit mis à disposition de l'employeur par une autre entreprise. 6. Après avoir relevé que le président de l'AMAPA avait expressément délégué pour le représenter à la présidence du comité d'entreprise, successivement, M. G... et M. P... salariés mis à disposition de l'association AMAPA par des entreprises extérieures pour exercer respectivement les fonctions de chargé de mission du président pour la direction opérationnelle et stratégique et chargé de la gestion des ressources humaines, et constaté que ces deux salariés mis à disposition étaient investis au sein de l'association de toute l'autorité nécessaire pour l'exercice de leur mission et qu'ils disposaient de la compétence et des moyens pour leur permettre d'apporter des réponses utiles et nécessaires à l'instance et d'engager l'association dans ses déclarations ou ses engagements. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne le comité d'entreprise de l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour le comité d'entreprise de l'association Aide maintien accompagnement des personnes âgées Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le comité d'entreprise de toutes ses demandes relatives à la présidence du comité, annulation des réunions du comité d'entreprise et des décisions qui en découlent, et de sa demande de provision sur dommages-intérêts. AUX MOTIFS propres QUE c'est à juste titre et par des motifs pertinents que la cour adopte, que le juge des référés a conclu à l'absence de trouble manifestement illicite et a débouté le comité d'entreprise de l'AMAPA de ses demande d'injonction sous astreinte et d'annulation des réunions des 23 février et 18 mai 2017 ; qu'en effet, il résulte de la convention de mise à disposition du 2 janvier 2017 et de l'avenant au contrat de travail du même jour, que M. G... a été mis à disposition de l'association AMAPA par la SARL DG Help en sa qualité de chargé de mission du président pour la direction opérationnelle et stratégique de l'association, l'objet de la mission étant notamment de présider le comité d'entreprise, mission pour laquelle il tient du président de l'association tous les moyens et pouvoirs nécessaires (pièces n°9 et 10) ; qu'il est constant que M. V..., président de l'association, a été représenté par M. G... aux réunions du comité d'entreprise en date des 23 février et 18 mai 2017 en vertu d'une délégation de pouvoirs signée le 1er janvier 2017 (pièce n°ll) aux termes de laquelle le président lui a donné tous pouvoirs de décision en ce qui concerne la tenue des réunions du comité d'entreprise avec mission de convoquer les réunions, établir les ordres du jour et présider les réunions, M. G... étant pour cela investi par l'association de toute l'autorité nécessaire pour l'exercice de sa mission et disposant de tous les moyens nécessaires à l'exercice de cette mission ; que de plus, en qualité de chargé de mission du président pour la direction opérationnelle et stratégique suivant la convention de mise à disposition, il bénéficiait de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires pour apporter des réponses utiles et nécessaires à l'instance et engager l'association dans ses déclarations ou ses engagements ; que de la même manière, M. P... a été mis à disposition de l'association AMAPA par la SA Docte Gestio pour assurer la gestion des ressources humaines au sein de l'association et notamment représenter l'employeur au sein du comité d'entreprise aux termes de la convention de mise à disposition en date du 7 juillet 2017 (pièce n°12) ; que cette convention précise que pour réaliser sa mission, M. P... dispose notamment de tous les moyens humains du service ressources humaines et d'un accès plein et entier à toute information dont il jugerait la communication nécessaire aux instances représentatives du personnel ; qu'il est constant que M. V... a été représenté par M. P... aux réunions du comité d'entreprise en date des 5 décembre, 21 décembre 2007 et 4 janvier 2018 ; que compte tenu de la mission qui lui a été confiée par le président de l'association, il bénéficiait nécessairement de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires pour réaliser sa mission de représentation de l'employeur au sein du comité d'entreprise de l'association AMAPA ; que si l'article 2 des statuts de l'association prévoit que le président peut donner une délégation générale à d'autres membres de la direction pour l'exercice de ses fonctions de représentation légales, judiciaires et extra-judiciaires, cette disposition ne concerne que la délégation générale des pouvoirs du président et ne l'empêche pas de donner une délégation de pouvoir limitée à une fonction particulière à d'autres personnes que des membres de la direction ; qu'enfin, s'il n'est pas justifié que l'association AMAPA a procédé à l'information et à la consultation des institutions représentatives du personnel concernant les conventions de mise à disposition de M. G... et de M. P..., le texte précité ne prévoit pas que cette absence de consultation entraîne de plein droit la nullité de la convention de mise à disposition ; que ce moyen est inopérant ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le comité d'entreprise ne démontre pas l'existence d'un trouble manifestement illicite. AUX MOTIFS adoptés QUE le code du travail prévoit que le Comité d'Entreprise est présidé par l'employeur ; qu'il est cependant admis qu'il puisse se faire représenter ; qu'à défaut d'interdiction formelle, rien n'impose à l'employeur de désigner un représentant qui soit salarié de l'entreprise (ou de l'association) pourvu que ce représentant dispose de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ; qu'en l'espèce, Monsieur G..., ancien salarié de l'AMAPA et alors délégué par l'employeur pour présider le Comité d'Entreprise de l'AMAPA, est maintenant salarié de DG HELP, mis à disposition de l'AMAPA ; que les deux structures sont présidées par le même dirigeant ; que l'AMAPA exerce les activités opérationnelles de DG HELP et DG HELP exerce la direction des opérations à savoir stratégie, encadrement, recrutement marketing, coordination des actions de l'AMAPA ; que les deux entités sont liées par des conventions de service et de mise à disposition ; que Monsieur G... dispose donc d'une connaissance approfondie de l'entreprise, de son fonctionnement et de ses perspectives et donc de la capacité d'informer le Comité d'Entreprise et de répondre à ses interrogations, des connaissances juridiques, des moyens matériels, humains, financiers ; qu'en l'état de la délégation reçue de Monsieur V..., qu'il a acceptée, il dispose également, a priori, de l'autonomie d'initiative nécessaire à la présidence par délégation du Comité d'Entreprise ; que la contestation du Comité d'entreprise de l'AMAPA est donc mal fondée ; qu'il n'y a dès lors pas de trouble manifestement illicite. 1° ALORS tout d'abord QU'en vertu de l'article L.2325-1 du code du travail dans sa version alors applicable, le comité d'entreprise est présidé par l'employeur, soit la personne titulaire statutairement du pouvoir de direction ; que si celui-ci peut désigner un représentant chargé de présider le comité, ce représentant doit faire partie des effectifs de l'entreprise ; qu'en jugeant que Monsieur V..., président du comité d'entreprise, avait valablement pu donner une délégation de pouvoir pour présider le comité à Messieurs G... et P..., respectivement salariés de DG Help et de Doc Gestio mis à disposition de l'association, la cour d'appel a violé l'article L.2325-1 du code du travail dans sa version alors applicable. 2° ALORS ensuite QU'en vertu de l'article L.2325-1 du code du travail dans sa version alors applicable, le comité d'entreprise est présidé par l'employeur ; que si celui-ci peut désigner un représentant chargé de présider le comité, la délégation est, dans une association, valable dans les conditions autorisées par les statuts ; que dans le silence des statuts, une délégation particulière à une personne non membre de la direction ou du bureau de l'association n'est pas autorisée ; que les statuts de l'AMAPA stipulent que le président assume les fonctions de représentation légale dans tous les actes de la vie civile et qu'il peut donner délégation aux membres de la direction pour l'exercice de ses fonctions de représentation, soit au trésorier et au secrétaire ; qu'il en résulte que la délégation à des tiers, non salariés mis à disposition de l'association, n'est pas autorisée par les statuts ; qu'en jugeant pourtant que l'article 2 des statuts ne concerne que la délégation générale des pouvoirs du président et ne l'empêche pas de donner une délégation de pouvoir limitée à une fonction particulière à d'autres personnes que des membres de la direction, la cour d'appel a violé l'article L.2325-1 du code du travail, ensemble les articles 1 et suivants de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association et l'article 1134, devenu 1103 du code civil. 3° ALORS qu'à tout le moins à cet égard QU'en vertu de l'article L.2325-1 du code du travail dans sa version alors applicable, le comité d'entreprise est présidé par l'employeur ; que si celui-ci peut désigner un représentant chargé de présider le comité, la délégation est, dans une association, valable dans les conditions autorisées par les statuts ; que dans le silence des statuts, une délégation particulière à une personne non membre de la direction ou du bureau de l'association n'est pas autorisée ; que les statuts de l'AMAPA prévoient que le président assume les fonctions de représentation légale dans tous les actes de la vie civile et qu'il peut donner délégation aux membres de la direction pour l'exercice de ses fonctions de représentation, soit au trésorier et au secrétaire ; qu'il en résulte que la délégation à des tiers, non salariés mis à disposition de l'association, n'est pas autorisée par les statuts ; qu'en jugeant pourtant que si l'article 2 des statuts de l'association prévoit que le président peut donner une délégation générale à d'autres membres de la direction pour l'exercice de ses fonctions de représentation légales, judiciaires et extra-judiciaires, cette disposition ne concerne que la délégation générale des pouvoirs du président et ne l'empêche pas de donner une délégation de pouvoir limitée à une fonction particulière à d'autres personnes que des membres de la direction, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des statuts, en violation de l'article 1134, devenu 1103 du code civil. 4° ALORS enfin QUE l'absence de consultation du comité d'entreprise dans un cas où elle est légalement obligatoire constitue un trouble manifestement illicite ; qu'aux termes de l'article L.8241-2 3° du code du travail dans sa version alors applicable, le comité d'entreprise de l'entreprise utilisatrice est informé et consulté préalablement à l'accueil de salariés mis à la disposition de celle-ci dans le cadre de prêts de main-d'oeuvre ; que la cour d'appel a constaté que l'association ne justifiait pas avoir procédé à l'information et à la consultation des institutions représentatives du personnel concernant les conventions de mise à disposition de M. G... et de M. P..., ce dont il résultait que le trouble manifestement illicite était caractérisé ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article L.8241-2 3° du code du travail dans sa version alors applicable, ensemble l'article 809 alinéa 1 du code de procédure civile. 5° ALORS enfin QU'aux termes de l'article L.8241-2 3° du code du travail dans sa version alors applicable, le comité d'entreprise de l'entreprise utilisatrice est informé et consulté préalablement à l'accueil de salariés mis à la disposition de celle-ci dans le cadre de prêts de main-d'oeuvre ; que le défaut de consultation suffit à caractériser le trouble manifestement illicite ; qu'en écartant l'existence d'un trouble manifestement illicite, au motif inopérant que l'article L.8241-2 3° du code du travail ne prévoyait pas que l'absence de consultation entraînait de plein droit la nullité de la convention de mise à disposition, la cour d'appel a violé l'article L.8241-2 3° du code du travail dans sa version alors applicable, ensemble l'article 809 alinéa 1 du code de procédure civile.
En application de l'article L. 2325-1, alinéa 2, du code du travail, alors applicable, le comité d'entreprise est présidé par l'employeur, assisté éventuellement de deux collaborateurs qui ont voix consultative. L'employeur peut déléguer cette attribution qui lui incombe légalement, à la condition que la personne assurant la présidence par délégation de l'employeur ait la qualité et le pouvoir nécessaires à l'information et à la consultation de l'institution représentative du personnel, de nature à permettre l'exercice effectif des prérogatives de celle-ci, peu important que le délégataire soit mis à disposition de l'employeur par une autre entreprise
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SOC. / ELECT LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Rejet M. CATHALA, président Arrêt n° 1153 FS-P+B+I Pourvoi n° B 19-60.222 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 L'union départementale CGT du Puy-de-Dôme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 19-60.222 contre le jugement rendu le 21 juin 2019 par le tribunal d'instance de Clermont-Ferrand (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposan à la société Aurilis Group Flauraud, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. En présence : 1°/ de M. N... O..., domicilié [...] , 2°/ de M. J... D..., domicilié [...] , 4°/ à M. Q... B..., domicilié [...] , 3°/ du syndicat CFDT métallurgie, dont le siège est [...] . Le dossier a été communiqué au procureur général. Les parties ou leurs mandataires ont produit des mémoires. Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Aurilis Group Flauraud, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Clermont-Ferrand, 21 juin 2019), la société Aurilis Group Flauraud a organisé le 16 mai 2019 le second tour des élections des membres du comité social et économique, le premier tour ayant donné lieu à procès-verbal de carence faute de quorum. Le pourcentage de femmes et d'hommes au sein du premier collège était respectivement de 13,36 % et de 86,61 %. 2. Invoquant le non-respect par une liste de candidats libres, composée de trois hommes, des règles de la représentation équilibrée des femmes et des hommes, l'union départementale CGT du Puy-de-Dôme (le syndicat CGT) a saisi le tribunal d'instance, le 28 mai 2019, d'une demande d'annulation de l'élection des deux élus du sexe masculin selon elle surnuméraires. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. Le syndicat CGT fait grief, en substance, au jugement de dire la liste de candidats libres régulière, alors : 1° / que lorsque plus de deux postes sont à pourvoir, la liste doit comporter au moins un candidat du sexe sous-représenté dans le collège considéré, peu important que la proportion d'hommes et de femmes soit très déséquilibrée ; 2°/ que l'article L. 2314-32 du code du travail prévoit que la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à l'alinéa premier de l'article L. 2314-30 du code du travail entraîne l'annulation de l'élection. Réponse de la Cour 4. Aux termes de l'article L. 2314-30 du code du travail, pour chaque collège électoral, les listes présentées aux élections professionnelles qui comportent plusieurs candidats sont composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale. 5. Les dispositions de l'article L. 2314-30, éclairées par les travaux parlementaires, s'appliquent aux organisations syndicales qui doivent, au premier tour pour lequel elles bénéficient du monopole de présentation des listes de candidats et, par suite, au second tour, constituer des listes qui respectent la représentation équilibrée des femmes et des hommes. Elles ne s'appliquent pas aux candidatures libres présentées au second tour des élections professionnelles. 6. Le tribunal d'instance a constaté que la demande d'annulation de l'élection des élus faute de respect des règles sur la représentation équilibrée des femmes et des hommes était dirigée contre une liste de candidatures libres. Les dispositions invoquées à l'appui de la demande en annulation n'étaient donc pas applicables. 7. Par ce motif de pur droit, suggéré par la défense et substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par l'article 620, alinéa 1er, du code de procédure civile, la décision déférée se trouve légalement justifiée. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt.
Aux termes de l'article L. 2314-30 du code du travail, pour chaque collège électoral, les listes présentées aux élections professionnelles qui comportent plusieurs candidats sont composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale. Les dispositions de l'article L. 2314-30, éclairées par les travaux parlementaires, s'appliquent aux organisations syndicales qui doivent, au premier tour pour lequel elles bénéficient du monopole de présentation des listes de candidats et, par suite, au second tour, constituer des listes qui respectent la représentation équilibrée des femmes et des hommes. Elles ne s'appliquent pas aux candidatures libres présentées au second tour des élections professionnelles
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SOC. IK COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Rejet M. CATHALA, président Arrêt n° 1154 FS-P+B Pourvoi n° C 19-19.996 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 1°/ le syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière, dont le siège est [...] , 2°/ le syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d'Oise, dont le siège est [...] , 3°/ le syndicat Commerce indépendant démocratique, dont le siège est [...] , ont formé le pourvoi n° C 19-19.996 contre l'arrêt rendu le 15 mars 2019 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), dans le litige les opposant à la société Meubles Ikea France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat du syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière, du syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d'Oise et du syndicat Commerce indépendant démocratique, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Meubles Ikea France, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, M.Huglo, conseiller doyen, M.Rinuy, Mmes Ott, Sommé, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 mars 2019), statuant en référé, le syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière a mis en demeure, le 6 avril 2018, la société Ikea, d'ouvrir des négociations pour mettre en place des salles d'allaitement dans les établissements employant plus de cent salariées. 2. Contestant le refus de l'employeur de faire droit à cette demande, le syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière, le syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d'Oise et le syndicat Commerce indépendant démocratique (les syndicats) ont saisi le président du tribunal de grande instance statuant en référé pour qu'il soit enjoint à l'employeur de mettre en place des salles d'allaitement. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses troisième, quatrième et sixième branches, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches Enoncé du moyen 4. Les syndicats font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors : « 1°/ que constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu'un dommage imminent le fait, pour un employeur tenu en application de l'article L. 1225-32 du code du travail d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement lorsqu'il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu'en constatant que la société Ikea ne contestait pas avoir atteint l'effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation de salles d'allaitement et en jugeant néanmoins que l'absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail ; 2°/ que constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu'un dommage imminent, le fait, pour un employeur tenu en application de l'article L. 1225-32 du code du travail d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement lorsqu'il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu'en constatant que la société Ikea ne contestait pas avoir atteint l'effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation de salles d'allaitement et en jugeant néanmoins que l'absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, aux motifs inopérants que la fédération des services CFDT, la CFE CGC SNEC, la CGT Fédération du commerce, de la distribution et des services et la FEC CGT FO avaient conclu avec la société Ikea un accord d'entreprise du 20 avril 2017 relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, pour une période du 20 avril 2017 au 19 avril 2020, mettant en place dans chaque établissement un local permettant aux salariées de titrer leur lait une heure par jour, la cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail ; 5°/ que constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu'un dommage imminent, le fait, pour un employeur tenu en application de l'article L. 1225-32 du code du travail d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement lorsqu'il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu'en constatant que la société Ikea ne contestait pas avoir atteint l'effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation de salles d'allaitement et en jugeant néanmoins que l'absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, aux motifs inopérants que les syndicats parties à l'accord du 20 avril 2017 mettant en place des locaux tire-lait dans l'ensemble des établissements avant avril 2020 auraient, en signant cet accord, acté du caractère satisfactoire, sur la période visée, des engagements pris par l'entreprise, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail. » Réponse de la Cour 5. Aux termes de l'article L. 1225-32 du code du travail, tout employeur employant plus de cent salariées peut être mis en demeure d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement. 6. Cette mise en demeure émane des agents de contrôle de l'inspection du travail dans les conditions prévues par l'article R. 4721-5 du code du travail. 7. La cour d'appel relève que la mise en demeure d'avoir à installer une salle d'allaitement émanait d'une organisation syndicale, que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a été saisie de la question de l'absence de salles d'allaitement au sein de l'entreprise Ikea, et qu'il n' a pas été n'a pas donné suite à cette demande. 8. L'employeur n'a donc pas été mis en demeure, au sens de l'article L. 1225-32 visé ci-dessus, d'installer des locaux dédiés à l'allaitement. 9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, après avis donné aux parties, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision déférée se trouve légalement justifiée. Sur le second moyen Enoncé du moyen 10. Les syndicats font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à la condamnation de la société Ikea à leur verser une certaine somme à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice portée à l'intérêt collectif de la profession du fait de l'absence de mise en place du local d'allaitement pour la période antérieure à l'assignation, alors « que la cassation à intervenir sur l'une ou l'autre des branches du premier moyen de cassation emportera par voie de conséquence et en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif ayant confirmé l'ordonnance du 14 août 2018 du tribunal de grande instance de Versailles en ce qu'elle avait dit n'y avoir lieu à référé et rejeté la demande tendant à la condamnation de la société Ikea à verser au syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d'Oise et à la Fédération des employés et cadres du commerce de la CGT Force ouvrière la somme de 20 000 euros pour chacun des vingt-neuf établissements dont l'effectif excède le seuil de cent salariées, à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession du fait de l'absence de mise en place du local d'allaitement pour la période antérieur à l'assignation, soit 580 000 euros. » Réponse de la Cour 11. Le rejet du premier moyen rend sans objet le second moyen, qui invoque une cassation par voie de conséquence. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne le syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière, le syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d'Oise et le syndicat Commerce indépendant démocratique aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour le syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière, le syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d'Oise et le syndicat Commerce indépendant démocratique PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé et rejeté le surplus des demandes en ce comprises celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte du principe de l'égalité professionnelle entre les femmes et hommes et de la lutte contre les discriminations, affirmés tant au niveau national, notamment par les articles L. 1225-32 et L. 4152-1 du code du travail français, qu'au niveau international par l'article 3 de la convention n° 156 de l'Organisation internationale du travail (OIT), ratifiée par la France le 16 mars 1989, et la recommandation n° 165 de l'OIT sur les travailleurs ayant des responsabilité familiales, que l'adoption et la mise en oeuvre dans les organisations publiques comme privées de mesures appropriées à la protection des femmes salariées allaitantes s'inscrivent dans la promotion des droits des travailleuses et participent en conséquence à l'ordre public social ; qu'en conséquence, l'action introduite par les syndicats sur le fondement de la défense de l'intérêt collectif des salariées de l'entreprise Ikea aux fins d'obtenir la mise en place de salles d'allaitement est recevable du seul fait que cette demande, peu important son bien-fondé à hauteur de référé, repose sur la violation alléguée d'une règle d'ordre public social destinée à promouvoir l'égalité professionnelle des femmes et des hommes notamment par la protection des travailleuses allaitantes, et peu important le fait qu'une de ces organisations, en l'occurrence le syndicat CGT-Force Ouvrière des Employés et Cadres du Commerce du Val d'Oise a pour objet statutaire la défense des intérêts collectifs et individuels des travailleurs du commerce qui exercent en toute ou partie de leur activité dans le Val d'Oise habitent dès lors qu'il est constant que la mesure sollicitée au niveau national a vocation à bénéficier aux salariées de l'entreprise travaillant dans les établissements dudit département ou y demeurant ; qu'il s'en déduit qu'il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée du défaut d'intérêt à agir de la Fédération des Employés et Cadres du Commerce de la CGT Force Ouvrière et du syndicat Commerce indépendant et démocratique et de l'infirmer en ce qu'elle a dit irrecevables les demandes du syndicat CGT Force Ouvrière des employés et cadres du commerce du Val d'Oise comme excédant le champ de ce département ; qu'au principal, sur les demandes de mise en place de salles d'allaitement par la société Ikea et de provision subséquentes ( ) ; Que les appelants, le syndicat CGT-Force Ouvrière des Employés et Cadres du Commerce du Val d'Oise, la Fédération des Employés et Cadres du Commerce de la CGT Force Ouvrière et le syndicat Commerce indépendant et démocratique, fondent expressément et exclusivement leur demande de mise en place de salles d'allaitement sur l'article 809, alinéa 1, du code de procédure civile , afin de faire cesser le trouble manifestement illicite et de prévenir le dommage imminent allégués ; que la cour rappelle qu'aux termes de l'article 809 alinéa 1er du code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit ; qu'il s'ensuit que, pour que la mesure sollicitée soit prononcée, il doit nécessairement être constaté, à la date à laquelle le premier juge a statué et avec l'évidence qui s'impose à la juridiction des référés, l'imminence d'un dommage, d'un préjudice ou la méconnaissance d'un droit, sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines ; qu'un dommage purement éventuel ne saurait donc être retenu pour fonder l'intervention du juge des référés ; que la constatation de l'imminence du dommage suffit à caractériser l'urgence afin d'en éviter les effets ; qu'en l'espèce, les syndicats demandeurs à l'action se prévalent de la violation manifeste par la société Ikea des dispositions protectrices de l'article L.4152-1 du code du travail qui institue des mesures de protection au profit des femmes allaitantes, à leur retour de maternité et plus particulièrement de l'article L.1225-32 qui prévoit que, sous la condition d'atteindre un effectif minimum de 100 salariées, l'employeur peut être mis en demeure de mettre en place des locaux d'allaitement dans ou à proximité de l'établissement, de l''article R .1227-6 du même code, qui précise notamment que la méconnaissance de cette obligation constitue une contravention et des articles R. 4152-13 et suivants, qui fixent les modalités de la mise en oeuvre du local dédié à l'allaitement, notamment sa superficie minimale, les restrictions à son emplacement, sa hauteur et son équipement obligatoire ; que la société Ikea, qui ne conteste pas avoir atteint l'effectif minimum de salariés dans certains de ses établissements, y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation des salles d'allaitement, se prévaut en premier lieu le défaut d'autorité de la part des syndicats à mettre en demeure l'entreprise, en application de l'article L. 1225-32 sus visé, l'absence de mise en demeure par l'administration du travail, seule habilitée à la délivrer, caractérisant, selon elle, une « contestation sérieuse » de la demande des syndicats ; qu'outre le fait que l'absence de contestation sérieuse n'est pas requise aux termes de l'article 809, alinéa 1, du code civil, seul fondement visé par les demandeurs à la présente action, la cour relève qu'il ne résulte ni de la lettre ni de l'esprit de l'article L. 1225-32 du code du travail que la mise en demeure requise émane de la seule autorité administrative telle que la médecine du travail ou l'inspection du travail, ou plus largement d'une autorité publique ; Que dès lors est inopérant le moyen tiré de l'impossibilité pour les syndicats, qui représentent les intérêts collectifs de la profession et disposent de la possibilité de présenter, à cette fin, des revendications, collectives comme individuelles des salariés, de mettre en demeure la société Ikea afin qu'elle respecte son obligation d'installation des salles d'allaitement ; qu'en ce qui concerne le trouble manifestement illicite allégué et le dommage imminent qu'il conviendrait de faire cesser, la cour relève que, s'il est établi que la société Ikea n'a pas installé, en l'état, dans ses établissements de salles d'allaitement, la Fédération des services CFDT, la CFE CGC SNEC, la CGT Fédération du commerce, de la distribution et des services, et la FEC CGT FO ont récemment conclu avec la société un accord d'entreprise en date du 20 avril 2017 « relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes » , pour une période courant du 20 avril 2017 au 19 avril 2020 ; qu'aux termes de cet accord collectif et de son avenant n° 1, la société Ikea s'est engagée à prendre diverses mesures de lutte contre la discrimination en matière d'emploi et de profession et à promouvoir une réelle égalité de traitement, notamment par l'adoption de dispositions protectrices des femmes en retour de congé maternité - échange formel organisé au retour dudit congé entre le « manager » et la salariée/ suivi, au besoin, par une formation individualisée ayant pour objet la mise à jour des connaissances/ congés et temps de pause supplémentaires, rémunérés, accordés à la salariée durant sa grossesse/suppression de la modulation pendant la période de grossesse/égalité de rémunération pour les salariés de retour de congé parental d'éducation/revalorisation de leur salaire et d'une prise en compte de la durée totale du congé pour la détermination des avantages liés à l'ancienneté - et plus particulièrement la « mise en place, dans chaque établissement, d'un local permettant aux salariées de tirer leur lait » ; que chaque salariée bénéficie, en application de l'accord collectif (article 15) d'une heure par jour travaillé pour tirer son lait et ce temps de pause, rémunéré pendant les six premiers mois suivant l'accouchement ; que l''accord collectif précise que ce local, qui permet de garantir l'intimité des salariées ( notamment grâce à une pancarte en interdisant l'accès quand le local est en cours d'utilisation), est pourvu de fauteuils confortables, d'un réfrigérateur, de prises de courant et d'un point d'eau. ; que l'intimée indique, sans être utilement contestée sur ces points, qu'elle a déjà mis en place ces locaux « pour tirer le lait » dans certains de ses établissements et rappelle qu'elle s'est, « en tout état de cause, engagée à ce que l'ensemble de ses établissements soient dotés de ces locaux avant avril 2020 », date du terme prévu à l'application de l'accord collectif du 20 avril 2017 ; Que s'il est constant que ces locaux ne sont pas les salles d'allaitement, objet du présent litige et que le consensus trouvé quant à leur mise en place n'est pas exclusif d'autres revendications, il résulte néanmoins de ces éléments d'information et de l'accord collectif conclu par quatre organisations syndicales représentatives, dont un des syndicats appelants, que n'est pas caractérisé, à la date à laquelle le premier juge a statué, en août 2018, et avec l'évidence requise en référé, le caractère manifeste du trouble allégué ou l'imminence d'un dommage, certain quoique futur, à ladite date, soit durant la période d'application de l'accord du 20 avril 2017 et la mise en oeuvre de mesures de nature à promouvoir l'égalité professionnelle des hommes et des femmes notamment par la protection effective des salariées en retour de congé maternité et l'installation d'un local leur permettant de tirer leur lait, étant relevé que les syndicats, parties au présent accord, en le signant, ont acté du caractère satisfactoire, sur la période visée, des engagements ainsi pris par l'entreprise et qu'est prévue en outre la réalisation d'une étude sur l'année 2018 concernant les différents dispositifs de gardes d'enfants en crèche d'entreprise, pour une éventuelle mise en oeuvre début 2019 ; que la cour relève qu'en tout état de cause, les demandes, objet du présent litige, ne se fondent que sur l'obligation de mettre en place les salles d'allaitement prévues par les textes existants, et non sur la mise en place d'un mode de garde dans l'entreprise, aucun texte légal ou conventionnel ne fixant, en l'état, d'obligation à cette fin à la société Ikea France ; qu'enfin, corrobore l'absence d'évidence du trouble et de l'imminence du dommage allégués le fait que la Direccte et le ministère des Droits de la femme successivement saisis, par lettres du 15 mars 2013 de la question de l'absence de salles d'allaitement au sein de l'entreprise Ikea France, demandant notamment à la Dirrecte de « procéder à la mise en demeure prévue par l'article R.4721-5 du code du travail afin qu'elle se mette en conformité avec le texte précité dans les meilleurs délais pour son établissement de Franconville", n'ont pas donné suite à ces courriers, à la date à laquelle le premier juge a statué, tout comme à celle du présent arrêt ; qu'il résulte de l'ensemble de ces constatations et énonciations qu'il convient de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit, à bon droit, n'y avoir lieu à référé sur les demandes d'injonction à la société Ikea de mettre en place, sous astreinte, une salle d'allaitement pour chacun de ses établissements atteignant un effectif de 100 salariées, d'assurer que la salle d'allaitement soit tenue conformément aux dispositions réglementaires en vigueur et de justifier, sous astreinte, de la mise en oeuvre de la salle d'allaitement dans son établissement de Nice dans le cadre de son projet d'ouverture ; que pour les motifs sus retenus et en conséquence de la contestation sérieuse en découlant, au sens de l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile quant à l'existence d'un préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession du fait de l'absence de mise en place du local d'allaitement pour la période antérieure à l'assignation, il convient de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision à valoir sur la réparation dudit préjudice ; ET, AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES, QU'aux termes de l'article 809 du Code de Procédure Civile, le Président du Tribunal de Grande Instance peut, « même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite » ; et« dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable » , « accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire » ; que les demandeurs invoquent les dispositions de l'article R. 4743-2 du code du travail, la convention n° 156 et la recommandation n° 165 de l'OIT ; que selon l'article L .1225-32 du code du travail : « Tout employeur employant plus de cent salariées peut être mis en demeure d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement » ; que l'article R. 4743-2 du même code prévoit que le fait de méconnaître les dispositions des articles... ainsi qu'à l'allaitement, est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, prononcée autant de fois qu'il y a de salariés concernés par l'infraction ; que le texte ne définit pas l'autorité habilitée à délivrer la mise en demeure prévue par l'article L .1225-32 du code du travail ; que la défenderesse soutient que cette mise en demeure ne peut émaner que de l'inspection du travail ou de la médecine du travail, et non d'un syndicat et qu'alors qu'elle s'est engagée à mettre en place des salles tire-lait, l'installation de salles d'allaitement ne présente qu'un intérêt réduit en l'absence de mode de garde à proximité de l'entreprise ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, l'obligation de la défenderesse est sérieusement contestable et les demandeurs ne démontrent l'existence ni d'un dommage imminent ni d'un trouble manifestement illicite ; qu'il n'y a pas lieu à référé sur les demandes d'injonction et de provision ; que l'équité et la situation économique des parties ne commandent pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile ; que les demandeurs, qui succombent, seront condamnés aux dépens ; 1°) ALORS QUE constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu'un dommage imminent le fait, pour un employeur tenu en application de l'article L. 1225-32 du code du travail d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement lorsqu'il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu'en constatant que la société IKEA ne contestait pas avoir atteint l'effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation de salles d'allaitement et en jugeant néanmoins que l'absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail ; 2°) ALORS QUE constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu'un dommage imminent, le fait, pour un employeur tenu en application de l'article L. 1225-32 du code du travail d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement lorsqu'il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu'en constatant que la société IKEA ne contestait pas avoir atteint l'effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation de salles d'allaitement et en jugeant néanmoins que l'absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, aux motifs inopérants que la fédération des services CFDT, la CFE CGC SNEC, la CGT Fédération du commerce, de la distribution et des services et la FEC CGT FO avaient conclu avec la société IKEA un accord d'entreprise du 20 avril 2017 relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, pour une période du 20 avril 2017 au 19 avril 2020, mettant en place dans chaque établissement un local permettant aux salariées de titrer leur lait une heure par jour, la cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail ; 3°) ALORS QUE dans leurs conclusions d'appel délaissées (cf. p. 14 à 23, productions), les syndicats exposants faisaient valoir que la mise en place d'un local tire-lait ne pouvait avoir pour effet d'exonérer l'employeur de son obligation de mettre en place la salle d'allaitement prévue par l'article L. 1223-32 du code du travail, que la salle tire-lait était une simple salle où la mère tirait son lait pour le conserver et le donner au terme de sa période de travail, une fois revenue à son domicile, au biberon à son enfant et qu'elle ne permettait donc pas d'allaiter son enfant directement dans une salle dédiée à cet effet et permettant à la mère de nourrir son enfant à proximité de son lieu de travail en fonction de ses besoins, que la salle d'allaitement supposait que les enfants soient accueillis par du personnel qualifié en nombre suffisant au sein de l'entreprise pour permette à leur mère de venir donner le sein, que plusieurs salariées s'étaient plaintes de n'avoir pu tirer leur lait dans des conditions décentes et de ne pas avoir pu le conserver en vue de nourrir leurs enfants, que la société Ikea avait refusé de mettre en place un réfrigérateur pour conserver le lait, que le local de tire-lait était simplement utile aux femmes qui ne souhaitaient pas allaiter au sein de l'entreprise et que sa mise en place n'était nullement exclusive de celle de la salle d'allaitement, que l'absence de mise en oeuvre de la salle d'allaitement obligeait les femmes concernées à choisir entre maintenir l'allaitement ou reprendre leur emploi, que la salle d'allaitement s'adressait aux femmes souhaitant allaiter leur enfant directement au sein de l'établissement ou à proximité afin justement de ne pas tirer leur lait pour le donner au biberon, que la salle de tire-lait ne venait d'être mise en place que dans 7 magasins uniquement et que si la société IKEA prévoyait l'implantation de tels locaux d'ici à 2020, elle devrait déjà disposer dans au moins 32 de ses 35 établissements des locaux d'allaitement prévus par la réglementation ; qu'en déboutant les exposants de leurs demandes, sans avoir répondu à ces chefs pertinents de leurs conclusions d'appel, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en déboutant les syndicats exposant de leurs demandes, sans se prononcer sur le courrier de démission de Mme Q... du 27 juillet 2018 (cf. pièce n°15, productions) dans lequel elle précisait : « « Je vous rappelle que je n'avais pas pu allaiter comme je le souhaitais mon premier enfant, faute par IKEA de mettre en place les commodités pour me permettre de poursuivre l'allaitement sur mon lieu de travail. À cette époque, le service des ressources humaines avait refusé que je puisse même tirer mon lait pour le conserver, malgré ma proposition de mettre en place un réfrigérateur. La seule solution qui avait été évoquée par l'entreprise était que j'arrête l'allaitement ou que je demande un congé parental. Il n'était pas question de pouvoir davantage allaiter sur place. (..). Pour ne pas devoir revivre cette situation, j'ai donc été amenée à prendre un congé parental pour me permettre de poursuivre l'allaitement, l'économie réalisée sur le coût de garde rendant cet effort supportable au détriment de ma carrière professionnelle. (...) J'adresse une copie de ma lettre aux représentants du personnel pour qu'ils puissent se saisir de cette situation afin qu'elle ne puisse se reproduire avec d'autres salariées » et qui démontrait que la salariée n'avait pu allaiter son enfant alors que l'employeur était tenu, en application de l'article L. 1225-32 du code du travail, de mettre en place des salles d'allaitement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 5°) ALORS QUE constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu'un dommage imminent, le fait, pour un employeur tenu en application de l'article L. 1225-32 du code du travail d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement lorsqu'il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu'en constatant que la société IKEA ne contestait pas avoir atteint l'effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation de salles d'allaitement et en jugeant néanmoins que l'absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, aux motifs inopérants que les syndicats parties à l'accord du 20 avril 2017 mettant en place des locaux tire-lait dans l'ensemble des établissements avant avril 2020 auraient, en signant cet accord, acté du caractère satisfactoire, sur la période visée, des engagements pris par l'entreprise, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail ; 6°) ALORS QUE constitue un trouble manifestement illicite et/ou un dommage imminent, le fait, pour un employeur tenu en application de l'article L. 1225-32 du code du travail d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement lorsqu'il emploie plus de cent salariées, de méconnaitre cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu'en constatant que la société IKEA ne contestait pas avoir atteint l'effectif minimum de salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l'installation de salles d'allaitement et en jugeant néanmoins que l'absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, aux motifs inopérants que la Direccte et le ministère des droits de la femme successivement saisis, par lettres du 15 mars 2013 de la question de l'absence de salles d'allaitement au sein de l'entreprise IKEA France et demandant notamment à la Direccte de « procéder à la mise en demeure prévue par l'article R. 4721-5 du code du travail afin qu'elle (la société IKEA) se mette en conformité avec le texte précité dans les meilleurs délais pour son établissement de Franconville » n'avaient pas donné suite à ces courriers à la date à laquelle le premier juge avait statué tout comme à celle du présent arrêt, la cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé et rejeté la demande tendant à la condamnation de la société IKEA à verser au syndicat CGT Force Ouvrière des employés et cadres du commerce du val d'Oise et à la fédération des employés et cadres du commerce de la CGT Force Ouvrière la somme de 20.000 euros pour chacun des 29 établissements dont l'effectif excède le seuil de 100 salariées, à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession du fait de l'absence de mise en place du local d'allaitement pour la période antérieur à l'assignation, soit 580.000 euros ; AUX MOTIFS QUE pour les motifs sus retenus et en conséquence de la contestation sérieuse en découlant, au sens de l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile quant à l'existence d'un préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession du fait de l'absence de mise en place du local d'allaitement pour la période antérieure à l'assignation, il convient de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision à valoir sur la réparation dudit préjudice, soit 580 000 euros ; ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'une ou l'autre des branches du premier moyen de cassation emportera par voie de conséquence et en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif ayant confirmé l'ordonnance du 14 août 2018 du tribunal de grande instance de Versailles en ce qu'elle avait dit n'y avoir lieu à référé et rejeté la demande tendant à la condamnation de la société IKEA à verser au syndicat CGT Force Ouvrière des employés et cadres du commerce du val d'Oise et à la fédération des employés et cadres du commerce de la CGT Force Ouvrière la somme de 20.000 euros pour chacun des 29 établissements dont l'effectif excède le seuil de 100 salariées, à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession du fait de l'absence de mise en place du local d'allaitement pour la période antérieur à l'assignation, soit 580.000 euros.
Aux termes de l'article L.1225-32 du code du travail, tout employeur employant plus de cent salariées peut être mis en demeure d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement. Cette mise en demeure doit émaner des agents de contrôle de l'inspection du travail dans les conditions prévues par l'article R. 4721-5 du code du travail
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle Mme BATUT, président Arrêt n° 713 FS-P+I Pourvoi n° N 19-18.786 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société SNCF Voyageurs, venant aux droits de l'établissement public à caractère industriel et commercial SNCF Mobilités, dont le siège est 9 rue Jean-Philippe Rameau, 93212 La Plaine-Saint-Denis, a formé le pourvoi n° N 19-18.786 contre l'arrêt rendu le 27 juin 2019 par la cour d'appel de Toulouse (3e chambre), dans le litige l'opposant à M. T... K..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. M. K... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le Défendeur des droits a présenté des observations écrites en application de l'article 33 de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société SNCF Voyageurs, de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de M. K..., et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 27 juin 2019), M. K..., atteint d'un handicap qui l'oblige à se déplacer en fauteuil roulant, a, par acte du 19 septembre 2017, assigné l'établissement public à caractère industriel et commercial SNCF Mobilités, aux droits duquel vient la société SNCF Voyageurs (la SNCF) en réparation du préjudice constitué, lors de voyages en train effectués au cours de l'année 2016, par le fait d'avoir été placé dans l'allée centrale et par l'impossibilité d'accéder aux toilettes et au bar. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche, qui est préalable Enoncé du moyen 2. M. K... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande visant à voir juger que la SNCF a manqué à ses obligations légales en matière d'accessibilité de ses équipements de transport aux personnes en situation de handicap, alors « que si, s'agissant de l'entrée en vigueur de certaines des dispositions du règlement n° 1371/2007 du 23 octobre 2007 applicable à compter du 3 décembre 2009, les États membres pouvaient accorder des dérogations aux opérateurs ferroviaires, pour une durée de cinq ans renouvelable deux fois, une seule dérogation avait été mise en place en France, par l'article L. 2151-2 du code des transports, son renouvellement devant être pris par décret ; que ces décrets n'ont, toutefois, pas été adoptés, de sorte qu'à compter du 4 décembre 2014 les dispositions de ce règlement étaient applicables dans leur intégralité ; qu'en refusant de déclarer opposables à la SNCF les articles 22 à 24 du règlement du 23 octobre 2007, la cour d'appel a violé ces dispositions par refus d'application. » Réponse de la Cour Vu les articles 2, paragraphes 4 et 5, et 22 à 24 du règlement CE n° 1371/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires, L. 2151-2 et L. 1112-2-1 à L. 1112-3 du code des transports : 3. Selon l'article 2, paragraphes 4 et 5, de ce règlement, entré en vigueur le 3 décembre 2009, un Etat membre peut déroger à ses dispositions à l'exception des articles 9, 11, 12, 19, 20, paragraphe 1, et 26 en ce qui concerne, d'une part, les services ferroviaires urbains, suburbains et régionaux, d'autre part, les services ferroviaires intérieurs de transport de voyageurs pendant une période ne dépassant pas cinq ans, renouvelable deux fois pour une période maximale de cinq ans à chaque fois. 4. Les articles 22 à 24 de ce règlement mettent à la charge des entreprises ferroviaires et des gestionnaires des gares une obligation d'assistance dans les gares et à bord des trains et définissent les conditions auxquelles est fournie cette assistance. 5. L'article L. 2151-2 du code des transports dispose : « Les services publics de transport ferroviaire de voyageurs urbains, départementaux ou régionaux réalisés sur le réseau ferroviaire tel que défini à l'article L. 2122-1 sont soumis à l'application des seuls articles 9, 11, 12, 19, 26 ainsi que du I de l'article 20 du règlement précité. Les autres services intérieurs de transport ferroviaire de voyageurs sont soumis à l'application des seuls articles 9, 11, 12, 19, 26 ainsi que du I de l'article 20 du même règlement pour une période de cinq ans. Celle-ci peut être renouvelée, par décret, deux fois par période maximale de cinq ans. A l'issue de cette période, l'ensemble des dispositions du même règlement est applicable à ces services. » 6. En vertu des articles L. 1112-2-1 et L. 1112-2-2 du code des transports, issus de l'ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014, la SNCF dispose d'un délai maximum de neuf ans à compter du 29 août 2016, date de l'approbation du schéma directeur d'accessibilité - agenda d'accessibilité programmée, pour mettre en oeuvre, notamment, les mesures destinées à assurer l'accessibilité du matériel roulant aux personnes handicapées et à mobilité réduite. Enfin, selon l'article L. 1112-3 du même code, si tout matériel roulant acquis lors d'un renouvellement ou à l'occasion de l'extension des réseaux est accessible aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, le matériel roulant routier, guidé et ferroviaire en service le 13 février 2015 peut être exploité après cette date. 7. Dès lors que ces dispositions ne visent pas les articles 22 à 24 du règlement précité et qu'aucun décret n'a renouvelé le délai de cinq ans prévu à l'article L. 2151-2 du même code, ces articles du règlement étaient applicables aux services de transport ferroviaire à la date des voyages en cause. 8. Pour écarter l'existence d'un manquement de la SNCF à ses obligations légales en matière d'assistance aux personnes en situation de handicap et rejeter la demande de M. K..., l'arrêt retient que les articles 22 à 24 du règlement ne sont pas opposables à la SNCF. 9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Et sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche Enoncé du moyen 10. La SNCF fait grief à l'arrêt de la déclarer responsable, lors de l'exécution du contrat de transport, d'une atteinte à la dignité de M. K... et de la condamner à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors « que, si le contrat oblige non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi, le juge ne peut rattacher une obligation à un contrat à titre accessoire qu'à la condition que cette obligation n'ait pas été déjà édictée par l'usage ou le législateur ; qu'en matière de transport ferroviaire, le législateur a défini, par une loi du 11 février 2005, complétée par une ordonnance du 26 septembre 2015, relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées, ratifiées par une loi du 5 août 2015, les obligations à la charge des transporteurs ferroviaires en matière d'accessibilité de ses services aux personnes handicapées ; qu'à ce titre, il a notamment prévu la mise en place d'un calendrier précis et matériellement réalisable, ainsi que des plans de financement, sous la forme d'un « schéma directeur d'accessibilité – agenda d'accessibilité programmée », établi en concertation avec les associations de personnes handicapées ; qu'en l'espèce, après avoir considéré que la SNCF avait respecté les obligations imposées par la loi en la matière, la cour d'appel a néanmoins jugé que le transporteur ferroviaire était tenu, à l'égard des voyageurs, d'une « obligation générale de soins et doit leur assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort » ; qu'elle a considéré que M. K... ayant réglé ses billets pour un prix identique aux autres voyageurs, n'avait pas accès à toutes les prestations annexes au contrat de transport, et que l'inconfort généré par l'inaccessibilité des toilettes caractérisait une atteinte à la dignité et un « manquement à l'obligation de la SNCF mobilités d'assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène » ; qu'en édictant ainsi une « obligation générale de soins et doit leur assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort », tandis que les modalités d'accessibilité des personnes handicapées aux transports ferroviaires, y compris en matière d'hygiène et de confort, sont encadrées par la loi, la cour d'appel a violé l'article 1135 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1194 du même code. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 11. La recevabilité du moyen est contestée en défense, en raison de sa nouveauté. 12. Le moyen, né de la décision attaquée, est recevable. Bien-fondé du moyen Vu les articles 1135 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, L. 1112-2-1 à L. 1112-3 et L. 2151-1 et suivants du code des transports : 13. Les obligations incombant à la SNCF au titre de la mise en conformité du matériel roulant aux normes destinées à en permettre l'accès aux personnes handicapées ou dont la mobilité est réduite, notamment quant à la dimension des couloirs et des toilettes, sont régies par les dispositions du code des transports susvisées. 14. Pour déclarer la SNCF responsable, lors de l'exécution du contrat de transport, d'une atteinte à la dignité de M. K... et la condamner à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que le transporteur ferroviaire est tenu, à l'égard des voyageurs, d'une obligation générale de soins et doit leur assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort, et que l'inconfort généré par l'inaccessibilité des toilettes caractérise une atteinte à la dignité et un manquement à l'obligation du transporteur ferroviaire d'assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène. 15. En statuant ainsi, alors qu'elle avait préalablement constaté que la SNCF justifiait avoir mis en place un schéma directeur d'accessibilité des services ferroviaires nationaux (SDNA), élaboré en concertation avec les associations de personnes handicapées et souscrit au schéma des Ad'AP (Agenda d'adaptabilité programmée) en réalisant un schéma intégré pour SNCF Mobilités et pour SNCF Réseau, pour le compte de l'Etat, validé le 29 août 2016, et avait ainsi respecté ses obligations légales quant à la mise aux normes progressive des voitures destinée à assurer l'accessibilité des couloirs et des toilettes dans les trains aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare le juge judiciaire incompétent pour prononcer une injonction à l'encontre de SNCF Mobilités et renvoie M. K... à mieux se pourvoir, l'arrêt rendu le 27 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ; Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société SNCF Voyageurs IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré SNCF Mobilités responsable, lors de l'exécution du contrat de transport, d'une atteinte à la dignité de M. K..., et d'avoir condamné SNCF Mobilités à verser à M. K... la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts ; AUX MOTIFS QUE le contrat de transport de voyageurs est un contrat d'entreprise générateur d'une obligation de résultat mise à la charge du transporteur quant à l'arrivée à la destination et à l'heure convenues ; que le transporteur ferroviaire a également, au regard des voyageurs, une obligation générale de soins et doit leur assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort ; que l'exécution matérielle du transport stricto sensu, relève du régime de la responsabilité contractuelle ; que si la SNCF justifie avoir mis en place un schéma directeur d'accessibilité des services ferroviaires nationaux (SDNA), élaboré en concertation avec les associations de personnes handicapées et a souscrit au schéma des Ad'AP (Agenda d'adaptabilité programmée) en réalisant un schéma intégré pour SNCF Mobilités et pour SNCF Réseau, pour le compte de l'État, validé le 29 août 2016, il est néanmoins établi que les billets réglés par M. K..., pour un prix identique à celui des autres voyageurs, ne lui permettent pas l'accès à toutes les prestations annexes au contrat de transport à la différence des voyageurs valides. Et, l'inconfort généré par l'inaccessibilité des toilettes caractérise une atteinte à la dignité et un manquement à l'obligation de SNCF Mobilités d'assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, ce d'autant que le dernier alinéa de l'article L. 2151-2 du code des transports susvisés prévoit que le présent article ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente pour l'organisation d'un service public ferroviaire de transport de voyageurs décide d'appliquer tout ou partie des dispositions non obligatoires de ce règlement ; que le préjudice résultant de ce manquement sera indemnisé par l'octroi d'une somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts (arrêt, p. 14 § 3 et 4) ; 1°) ALORS QUE si le contrat oblige non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi, le juge ne peut rattacher une obligation à un contrat à titre accessoire qu'à la condition que cette obligation n'ait pas été déjà édictée par l'usage ou le législateur ; qu'en matière de transport ferroviaire, le législateur a défini, par une loi du 11 février 2005, complétée par une ordonnance du 26 septembre 2015, relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées, ratifiées par une loi du 5 août 2015, les obligations à la charge des transporteurs ferroviaires en matière d'accessibilité de ses services aux personnes handicapées ; qu'à ce titre, il a notamment prévu la mise en place d'un calendrier précis et matériellement réalisable, ainsi que des plans de financement, sous la forme d'un « schéma directeur d'accessibilité – agenda d'accessibilité programmée », établi en concertation avec les associations de personnes handicapées ; qu'en l'espèce, après avoir considéré que la SNCF avait respecté les obligations imposées par la loi en la matière (arrêt, p. 11 et 12), la cour d'appel a néanmoins jugé que le transporteur ferroviaire était tenu, à l'égard des voyageurs, d'une « obligation générale de soins et doit leur assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort » (arrêt, p. 14 § 3) ; qu'elle a considéré que M. K... ayant réglé ses billets pour un prix identique aux autres voyageurs, n'avait pas accès à toutes les prestations annexes au contrat de transport, et que l'inconfort généré par l'inaccessibilité des toilettes caractérisait une atteinte à la dignité et un « manquement à l'obligation de la SNCF Mobilités d'assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène » (arrêt, p. 14 § 4) ; qu'en édictant ainsi une « obligation générale de soins et doit leur assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort », tandis que les modalités d'accessibilité des personnes handicapées aux transports ferroviaires, y compris en matière d'hygiène et de confort, sont encadrées par la loi, la cour d'appel a violé l'article 1135 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1194 du même code ; 2°) ALORS QUE, EN TOUT HYPOTHESE, le contrat de transport ferroviaire oblige le transporteur à assurer, d'une part, le transport de ses clients, d'autre part, leur sécurité ; qu'il ne prévoit aucune obligation générale de soins lui imposant d'assurer un transport dans des « conditions normales d'hygiène et de confort » ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenus les articles 1103, 1194 et 1231-1 du même code ; 3°) ALORS QU'à supposer que le contrat de transport ferroviaire comporte une obligation générale de soins imposant au transporteur d'assureur un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort au profit des personnes en situation de handicap, cette obligation ne peut être que de moyens ; que sa mise en oeuvre dépend en effet, d'une part, de l'ancienneté et de l'adaptabilité des équipements de la ligne empruntée, d'autre part, de la nature du handicap de la personne transportée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que SNCF Mobilités avait manqué à son « obligation générale de soins et [d']assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort » dès lors qu'il était établi « que les billets réglés par M. K..., pour un prix identique à celui des autres voyageurs, ne lui permettent pas l'accès à toutes les prestations annexes au contrat de transport à la différence des voyageurs valides » et que « l'inconfort généré par l'inaccessibilité des toilettes caractérise une atteinte à la dignité et un manquement à l'obligation de SNCF Mobilités d'assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène » (arrêt, p. 14 § 3 et 4) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée (concl., p. 14, 17 § 4 et 5 et p. 22), si la SNCF proposait un service d'accessibilité à ses trains aux personnes en fauteuil roulant, via une application, la possibilité de commander au bar et d'utiliser un bouton pour qu'un chef de bord apporte la commande à la personne concernée et n'était pas tenue à une mise aux normes d'accessibilité des trains visés par M. K... dans sa réclamation, mis en service avant 2005, notamment s'agissant de l'accès aux toilettes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du même code ; 4°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, le juge est tenu de respecter et de faire respecter le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour considérer que SNCF Mobilités avait manqué à son « obligation générale de soins et [d']assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort », la cour d'appel a notamment jugé que « le dernier alinéa de l'article L. 2151-2 du code des transports susvisé prévoit que le présent article ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente pour l'organisation d'un service public ferroviaire de transport de voyageurs décide d'appliquer tout ou partie des dispositions non obligatoires de ce règlement » (arrêt, p. 14 § 4 in fine) ; qu'aucune des parties n'invoquait dans ses écritures l'application de l'article L. 2151-2 du code des transports ni ne soutenait que ce texte aurait permis d'imposer une telle obligation à SNCF Mobilités ; que la cour d'appel, qui a relevé un moyen d'office, sans inviter les parties à présenter préalablement leurs observations sur ce point, a violé l'article 16 du code de procédure civile et le principe de la contradiction ; 5°) ALORS QUE, EN TOUTE HYPOTHESE, l'article L. 2151-2 du code des transports précise, d'une part, les dispositions du règlement n°1371/2007 applicables aux voyageurs urbains, départementaux ou régionaux à compter de son insertion dans le droit national soit le 4 décembre 2009 (al. 1), d'autre part, les dispositions de ce même règlement applicables aux autres services intérieurs de transport ferroviaire de voyageurs pendant une période transitoire de cinq ans, renouvelable deux fois, à l'issue de laquelle l'ensemble du règlement doit être appliqué (al. 2) ; que, durant cette période transitoire, il était permis à l'autorité compétente, à titre de simple faculté, d'appliquer tout ou partie des dispositions du règlement non encore obligatoires ; qu'en l'espèce, pour considérer que SNCF Mobilités avait manqué à son « obligation générale de soins et [d']assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort », la cour d'appel a jugé que « le dernier alinéa de l'article L. 2151-2 du code des transports susvisé prévoit que le présent article ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente pour l'organisation d'un service public ferroviaire de transport de voyageurs décide d'appliquer tout ou partie des dispositions non obligatoires de ce règlement » (arrêt, p. 14 § 4 in fine) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que l'article L. 2151-2 du code des transports, qui se borne à offrir une simple faculté d'application des dispositions non obligatoires du règlement pendant la période transitoire, ne pouvait fonder une telle obligation, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du même code et l'article L. 2151-2 du code des transports ; 6°) ALORS QUE le principe de non-discrimination n'est pas méconnu lorsque la différence de traitement est justifiée par la différence de situation entre les personnes concernées ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que SNCF Mobilités avait manqué à son « obligation générale de soins et [d']assurer un transport dans des conditions normales d'hygiène, de sécurité et de confort » dès lors qu'il était établi « que les billets réglés par M. K..., pour un prix identique à celui des autres voyageurs, ne lui permettent pas l'accès à toutes les prestations annexes au contrat de transport à la différence des voyageurs valides » (arrêt, p. 14 § 4) ; qu'en se prononçant, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., p. 20), si SNCF Mobilités proposait, à titre gratuit, aux personnes à mobilité réduite, un service dénommé « Accès Plus » permettant notamment l'accueil en gare, et l'accompagnement de ces personnes dans les matériels roulants jusqu'à ou depuis leur place dans le train afin de les aider à y embarquer/débarquer et la fourniture de toutes les informations utiles pour préparer leur voyage, par exemple réserver l'un des espaces dédiés aux voyageurs en fauteuil roulant ou solliciter des prestations d'accueil et d'accompagnement jusqu'à la place dans le train, ce dont il résultait que le prix acquitté par M. K... pour son billet lui donnait l'accès à des services dédiés aux personnes à mobilité réduite, auxquels n'avaient pas accès les clients ne présentant aucune difficulté de mobilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du même code ; 7°) ALORS QUE le juge est tenu de motiver sa décision ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a alloué une somme de 5.000 € à M. K... au titre du « préjudice résultant » du manquement imputé à SNCF Mobilités (arrêt, p. 14 § 4) ; qu'en se prononçant ainsi, sans préciser en quoi le préjudice allégué consistait, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. K... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. K... de sa demande visant à voir juger que la SNCF avait manqué à ses obligations légales en matière d'accessibilité de ses équipements de transport aux personnes en situation de handicap, Aux motifs propres que le règlement européen 1371/2007 concernait les droits et obligations des voyageurs ferroviaires relatifs à la notion d'accessibilité et aux droits de la personne handicapée à un accès non discriminatoire au transport ; qu'il était d'application immédiate en vertu de l'article 288 du traité de fonctionnement de l'union européenne ; qu'en effet, selon cet article, pour l'accomplissement de leur mission, les institutions européennes pouvaient adopter, aux termes de l'article 288 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), des règlements, directives, décisions ou encore des recommandations ou avis ; que ces différents actes constituaient ce que l'on appelle le droit dérivé ( ) ; que le champ d'application du règlement, entré en vigueur le 3 décembre 2009, visait l'ensemble des transports ferroviaires de personnes, tant à l'intérieur d'un État membre (« services ferroviaires intérieurs ») qu'au sein de l'Union européenne et ce pour tous les types de services ferroviaires (services réguliers et services occasionnels, courte et longue distance, urbains, suburbains et régionaux) ; que l'article 2 § 3 prévoyait qu'à partir de l'entrée en vigueur du présent règlement, les articles 9, 11, 12, et 19, l'article 20, paragraphe 1, et l'article 26 s'appliquaient dans l'ensemble de la Communauté à tous les services ferroviaires de transport de voyageurs ; que ces dispositions d'application impérative, relatives à certains droits minimums, étaient : le droit à la disponibilité des billets et des réservations (article 9), la responsabilité du transporteur à l'égard du voyageur (article 11), le droit au transport des personnes handicapées à mobilité réduite (article 19 et 20 § 1), ainsi que les mesures relatives à la sécurité personnelle des voyageurs (article 26) ; que l'article 19 était relatif à la mise en place de règles d'accès non discriminatoires applicables au transport de personnes handicapées et de personnes à mobilité réduite, avec la participation active d'organisations représentatives des personnes handicapées et des personnes à mobilité réduite (alinéa 1), à l'absence de supplément pour leurs réservations et leurs billets et à l'interdiction de refuser une réservation ou d'émettre un billet pour une personne handicapée ou une personne à mobilité réduite ou requérir qu'une telle personne soit accompagnée par une autre personne (alinéa 2) ; que l'article 20 § 1 prévoyait la communication aux personnes handicapées et aux personnes à mobilité réduite, sur demande, d'informations sur l'accessibilité des services ferroviaires ainsi que sur les conditions d'accès au matériel roulant conformément aux règles d'accès visées à l'article 19, paragraphe 1, et sur les équipements à bord ; que M. K... justifiait désormais en cause d'appel avoir utilisé le service Accès plus (pièces 19 à 21) ; qu'ainsi que le soulignait SNCF Mobilités, il démontrait ainsi qu'avait été mis en oeuvre l'article 20 § 1 susvisé ; que les articles 2 § 4 et 5, disposaient que, sauf en ce qui concernait les dispositions visées au paragraphe 3, un État membre pouvait, selon des modalités transparentes et non discriminatoires, octroyer une dérogation pendant une période ne dépassant pas cinq ans, renouvelable deux fois pour une période maximale de cinq ans à chaque fois, à l'application des dispositions du présent règlement en ce qui concernait les services ferroviaires intérieurs, urbains, suburbains et régionaux de transport de voyageurs ; qu'ainsi les articles 22 sur l'assistance dans les gares, 23 sur l'assistance à bord (définie comme les efforts faits, dans la mesure du raisonnable, pour permettre à une personne handicapée ou à une personne à mobilité réduite d'avoir accès aux mêmes services à bord du train que ceux dont bénéficient les autres voyageurs si son handicap est tel ou sa mobilité était réduite à un point tel qu'elle ne peut avoir accès à ces services de façon autonome et sûre), 24 sur les conditions de l'assistance n'étaient pas d'application impérative à la date de l'arrêté et relevaient de la possibilité de dérogation édictée à l'article 2 ainsi que l'avait justement retenu le tribunal, Alors, d'une part, que si, s'agissant de l'entrée en vigueur de certaines des dispositions du règlement n° 1371/2007 du 23 octobre 2007 applicable à compter du 3 décembre 2009, les États membres pouvaient accorder des dérogations aux opérateurs ferroviaires, pour une durée de cinq ans renouvelable deux fois, une seule dérogation avait été mise en place en France, par l'article L. 2151-2 du code des transports, son renouvellement devant être prise par décret ; que ces décrets n'ont, toutefois pas été adoptés, de sorte qu'à compter du 4 décembre 2014, les dispositions de ce règlement étaient applicables dans leur intégralité ; qu'en refusant de déclarer opposables à la SNCF Mobilités les articles 22 à 24 du règlement du 23 octobre 2007, la cour d'appel a violé ces dispositions par refus d'application, Alors d'autre part et subsidiairement, qu'en se bornant à relever la possibilité pour les États membres de retarder l'entrée en vigueur de certaines dispositions du règlement du 23 octobre 2007 et en statuant sans préciser le fondement juridique la conduisant à considérer qu'une telle dérogation avait bien été accordée à la SNCF dans la mise en oeuvre de ce règlement, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé l'article 12 du code de procédure civile.
Les articles 22, 23 et 24 du règlement (CE) n° 1371/2007 du 23 octobre 2007, entré en vigueur le 3 décembre 2009, qui mettent à la charge des entreprises ferroviaires et des gestionnaires des gares une obligation d'assistance dans les gares et à bord des trains en faveur des personnes handicapées et à mobilité réduite et qui définissent les conditions auxquelles est fournie cette assistance, étaient applicables dès 2016 aux transports ferroviaires autres qu'urbains, départementaux et régionaux, le report de leur application pour une durée de cinq ans prévu à l'article L 2151-2 du code des transports n'ayant pas été renouvelé
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation Mme BATUT, président Arrêt n° 714 FS-P+B+I Pourvoi n° J 19-21.060 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société Chaîne thermale du soleil, société par actions simplifiée, dont le siège est 32 avenue de l'Opéra, 75002 Paris, a formé le pourvoi n° J 19-21.060 contre le jugement rendu le 27 mai 2019 par le tribunal d'instance de Manosque, dans le litige l'opposant : 1°/ à M. L... H..., 2°/ à Mme F... H..., domiciliés tous deux [...], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la société Chaîne thermale du soleil, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme H..., et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Manosque, 27 mai 2019), rendu en dernier ressort, par acte du 15 juin 2017, M. et Mme H... ont souscrit un contrat d'hébergement auprès de la société Chaîne thermale du soleil (la société) pour la période du 30 septembre 2017 au 22 octobre 2017 pour un montant total de 926,60 euros, payé le 30 septembre 2017. Le 4 octobre, M. H..., hospitalisé en urgence, a dû mettre un terme à son séjour. Mme H... a quitté le lieu d'hébergement le 8 octobre. 2. Soutenant n'avoir pu profiter des deux dernières semaines de leur séjour en raison d'une circonstance revêtant les caractères de la force majeure, M. et Mme H... ont assigné la société en résolution du contrat et indemnisation. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. La société fait grief au jugement de prononcer la résiliation du contrat à compter du 9 octobre 2017 et de la condamner au paiement d'une certaine somme, alors « que, si la force majeure permet au débiteur d'une obligation contractuelle d'échapper à sa responsabilité et d'obtenir la résolution du contrat, c'est à la condition qu'elle empêche l'exécution de sa propre obligation ; qu'en retenant que l'état de santé de M. H... était constitutif d'une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de la société à lui reverser les sommes perçues, quand ces difficultés de santé ne l'empêchaient aucunement d'exécuter l'obligation dont il était débiteur, mais uniquement de profiter de la prestation dont il était créancier, le tribunal d'instance a violé l'article 1218 du code civil. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 4. M. et Mme H... contestent la recevabilité du moyen. Ils soutiennent qu'il serait contraire aux arguments développés par la société devant le tribunal d'instance. 5. Cependant la société a contesté l'application de la force majeure dans ses conclusions. 6. Le moyen est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu l'article 1218, alinéa 1, du code civil : 7. Aux termes de ce texte, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. 8. Il en résulte que le créancier qui n'a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure. 9. Pour prononcer la résiliation du contrat à compter du 9 octobre 2017, après avoir énoncé qu'il appartenait aux demandeurs de démontrer la force majeure, le jugement retient que M. H... a été victime d'un problème de santé imprévisible et irrésistible et que Mme H... a dû l'accompagner en raison de son transfert à plus de cent trente kilomètres de l'établissement de la société, rendant impossible la poursuite de l'exécution du contrat d'hébergement. 10. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que M. et Mme H... avaient exécuté leur obligation en s'acquittant du prix du séjour, et qu'ils avaient seulement été empêchés de profiter de la prestation dont ils étaient créanciers, le tribunal a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 27 mai 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Manosque ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence ; Condamne M. et Mme H... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Chaîne thermale du soleil Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation du contrat conclu le 15 juin 2017, à compter du 9 octobre 2017, et d'avoir condamné en conséquence la société Chaine Thermale du Soleil à payer aux époux H... la somme de 522,34 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 17 juin 2018 ; Aux motifs que : « L'article 1103 du code civil dispose que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». L'article 1218 du code civil dispose que « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1 ». L'article 1228 du code civil indique que « Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts. » L'article 1229 du Code civil dispose que « La résolution met fin au contrat. La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice. Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation. Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9. » En l'espèce, il appartient aux époux H... de démontrer le cas de force majeure fondant leur demande de résolution du contrat litigieux. Sur la qualité de partie au contrat de Monsieur L... H..., il ressort des documents fournis que si Madame F... H... apparait effectivement seule sur le contrat signé le 15 juin 2017, il est expressément précisé que seront hébergés deux adultes. En outre, par attestation du 8 octobre 2017, la résidence Le mistral CHAÎNE THERMALE DU SOLEIL a attesté de l'hébergement de Monsieur et madame H... L... du 30 septembre 2017 au 8 octobre 2017 au sein de son établissement. Ainsi, la CHAINE THERMALE DU SOLEIL ne peut légitimement soulever que son seul co-contractant serait Madame F... H.... Or, Monsieur et Madame H... versent aux débats des pièces médicales précises, les certificats médicaux fournis indiquant : - en date du 4 octobre 2017, « l'état de santé de Monsieur H... L... nécessite l'arrêt total des soins thermaux de façon définitive à partir du 05.10.17 (journées non récupérables-pb de rétentions urinaire avec sondage). Un bulletin de situation de la clinique du Cap d'or à la SEYNE SUR MER fait état de l'hospitalisation de Monsieur H... du 10 au 13 octobre 2017. Ainsi, il ne fait aucun doute à la lecture de ces pièces que Monsieur L... H... n'était pas en capacité de poursuivre la cure, au sein de l'établissement LA CHAINE THERMALE DU SOLEIL, et ce à compter du 4 octobre 2017, suite à une « rétention urinaire ». Il est également établi qu'il a été hospitalisé à la SEYNE SUR MER, soit à plus de 130km de GREOUX LES BAINS à compter du 10 octobre 2017. Il n'est pas contesté par l'établissement que Monsieur et Madame H... ont quitté les lieux le 8 octobre 2017. Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les problèmes de santé de Monsieur L... H... qui nécessitaient l'arrêt immédiat de la cure, ont rendu impossible l'exécution du contrat conclu avec la CHAÎNE THERMALE DU SOLEIL, le concernant. Si Madame H... a pu rester dans la résidence jusqu'au 8 octobre 2017, son mari étant hospitalisé à proximité, il apparaît qu'elle s'est également retrouvée dans l'impossibilité de poursuivre la cure en raison du transfert de son époux à la SEYNE SUR MER, à plus de 130 km de l'établissement de la CHAINE THERMALE DU SOLEIL. Or, rien n'indique que de problème de santé de Monsieur H... était prévisible pour Madame H... comme pour son époux, et ce même si celui-ci était âgé de plus de 70 ans au moment des faits. Au surplus, au regard de l'âge du couple, il est possible de dire que madame H... ne pouvait pas, sans aide extérieure, demeure seule à GREOUX LES BAINS tandis que son mari était hospitalisé à des centaines de kilomètres plus loins suite à une soudaine rétention urinaire nécessitant des soins importants. Ainsi, il convient de prononcer la résiliation du contrat signé entre Madame H... et la CHAINE THERMALE DU SOLEIL le 15 juin 2017, à compter du 9 octobre 2017. En conséquence, Monsieur et Madame H... sont redevables envers la CHAINE THERMALE DU SOLEIL, pour 9 jours d'hébergement, de la somme de 379,06 euros. Ayant réglé la somme de 926,60 euros, étant précisé que l'établissement a remboursé 25,20 euros au titre de la taxe de séjour, la CHAINE THERMALE DU SOLEIL devra payer à Monsieur et Madame H... la somme de 522,34 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2018. » 1°) Alors que, premièrement, si la force majeure permet au débiteur d'une obligation contractuelle d'échapper à sa responsabilité et d'obtenir la résolution du contrat, c'est à la condition qu'elle empêche l'exécution de sa propre obligation ; qu'en retenant que l'état de santé de M. H... était constitutif d'une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de l'exposante à lui reverser les sommes perçues, quand ces difficultés de santé ne l'empêchaient aucunement d'exécuter l'obligation dont il était débiteur, mais uniquement de profiter de la prestation dont il était créancier, le tribunal d'instance a violé l'article 1218 du code civil ; 2°) Alors que, deuxièmement, pour qu'un évènement de force majeure soit caractérisé, celui-ci doit avoir pour effet de rendre impossible l'exécution de son obligation par le débiteur ; qu'en retenant que l'état de santé de M. H... était constitutif d'une situation de force majeure, empêchant l'exécution de l'obligation pesant sur les époux H..., alors que ces derniers avaient déjà exécuté cette obligation, le tribunal d'instance n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi les articles 1218 du code civil et 455 du code de procédure civile ; 3°) Alors que, troisièmement, le débiteur d'une obligation contractuelle de somme d'argent inexécutée ne peut s'exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure ; qu'en retenant que l'état de santé de M. H... était constitutif d'une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de l'exposante à lui reverser les sommes perçues, quand les époux H... étaient uniquement débiteurs d'une obligation de somme d'argent au titre du contrat litigieux, le tribunal d'instance a violé l'article 1218 du code civil ; 4°) Alors que, quatrièmement, lorsque le débiteur est informé, lors de la conclusion du contrat, de la possibilité de souscrire une assurance annulation couvrant ses éventuelles difficultés de santé, et qu'il refuse d'y souscrire, il ne peut se prévaloir d'un cas de force majeure en cas de réalisation du risque couvert par ledit contrat ; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher, comme il y était invité, si en refusant de souscrire au contrat d'assurance annulation proposé lors de la souscription du contrat d'hébergement, les époux H... n'avaient pas accepté d'assumer le risque lié à la survenance de difficultés de santé, en refusant de prendre les mesures permettant d'en éviter les effets, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard l'article 1218 du code civil.
Aux termes de l'article 1218, alinéa 1, du code civil, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. Il en résulte que le créancier qui n'a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure
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CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Rejet Mme BATUT, président Arrêt n° 718 FS-P+I Pourvoi n° X 19-14.908 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020 1°/ M. E... A..., 2°/ Mme D... H..., domiciliés tous deux [...], ont formé le pourvoi n° X 19-14.908 contre l'arrêt rendu le 6 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige les opposant : 1°/ à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est 15 rue de l'Hôtel de ville, 92200 Neuilly-sur-Seine, prise en qualité de mandataire liquidateur de la société Vensolia énergies, 2°/ à la société BNP Paribas Personal Finance, société anonyme, dont le siège est 1 boulevard Hausmann, 75009 Paris, venant aux droits de la société Sygma banque, défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dazzan, conseiller référendaire, les observations et les plaidoiries de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. A... et de Mme H..., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société BNP Paribas Personal Finance, et l'avis de Mme Legohérel, avocat général référendaire, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Dazzan, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Le Gall, Kloda, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, Mme Legohérel, avocat général référendaire, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 février 2019), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 31 janvier 2018, pourvoi n° 16-28.138), M. A... et Mme H... (les emprunteurs) ont, le 9 juin 2012, après un démarchage à domicile, acquis une éolienne auprès de la société Vensolia énergies (le vendeur), qui a été placée en liquidation judiciaire le 24 octobre 2012. Ils ont souscrit, le jour de l'acquisition, auprès de la société Sygma banque, aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas Personal Finance (la banque), un prêt destiné à la financer. L'éolienne a été installée le 2 juillet 2012 et la banque a versé les fonds au vendeur au vu d'un certificat signé par Mme H... attestant de la livraison de l'éolienne et de la réalisation des travaux et lui demandant de débloquer les fonds. 2. Par acte du 21 octobre 2013, les emprunteurs ont assigné la banque et le liquidateur judiciaire du vendeur, ès qualités, en annulation des contrats de vente et de prêt, en restitution des échéances payées et en paiement de dommages-intérêts, en se prévalant d'irrégularités du contrat de vente relatives à l'absence de certaines mentions obligatoires. 3. Le contrat de vente ainsi que le contrat de crédit ont été annulés. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à restituer à la banque le capital prêté, alors : « 1°/ que la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit accessoire, en conséquence de l'annulation du contrat constatant la vente qu'il finançait, emporte, pour l'emprunteur, l'obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, hors le cas de faute de ce dernier ; que, commet une faute de nature à le priver de sa créance de restitution, le prêteur qui, en exécution d'un contrat de crédit affecté, libère les fonds prêtés sans vérifier la régularité du contrat principal ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé que l'offre de vente du vendeur auquel était affecté le contrat de prêt consenti par la banque, ne respectait pas les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile ; qu'en jugeant, pour condamner solidairement les emprunteurs au remboursement de l'emprunt à la banque, qu'il n'appartenait pas à la banque de procéder à une lecture minutieuse du contrat de vente, la cour d'appel a violé les articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; 2°/ que, commet une faute, le prêteur d'un crédit affecté qui n'effectue aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles les contrats de vente ont été souscrits ; qu'en jugeant qu'à supposer critiquable la signature d'un contrat entraînant occupation du bien des emprunteurs par la pose d'un panneau publicitaire sans attendre l'expiration du délai de réflexion en violation des dispositions de l'article L. 121-26 du code de la consommation, aucun élément ne permettait de supposer que la banque avait eu connaissance de cette convention pour laquelle son concours n'était pas sollicité, quand la banque, tenue à une obligation de prudence, devait vérifier la régularité de l'ensemble des modalités de l'offre de vente du vendeur, la cour d'appel a derechef violé les articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; 3°/ que, la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit accessoire, en conséquence de l'annulation du contrat constatant la vente qu'il finançait, emporte, pour l'emprunteur, l'obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, hors le cas de faute de ce dernier ; que, commet une faute, le prêteur d'un crédit affecté qui n'effectue aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles les contrats de vente et de crédit ont été souscrits ; qu'en retenant, pour condamner solidairement les emprunteurs au remboursement de l'emprunt à la banque, que les nullités pouvant sanctionner les irrégularités affectant le contrat de prêt consenti par la banque, étaient destinées à leur seule protection, la cour d'appel, qui a statué par une motivation totalement inopérante à écarter la faute de la banque, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; 4°/ que, le manquement du prêteur d'un crédit affecté à son obligation de contrôle des conditions dans lesquelles les contrats de vente et de crédit ont été souscrits relève, non pas d'une obligation d'information sanctionnée par une perte de chance pour les emprunteurs d'avoir renoncé au contrat, mais d'une faute d'imprudence, le privant de sa créance de restitution ; qu'en retenant « au surplus, que même à considérer que la société Sygma Banque devait déceler les anomalies précitées et en avertir ses clients pour leur permettre d'opter ou non pour une nullité, sa faute s'analysant comme un manquement à une obligation d'information qui ne pourrait être sanctionnée que sur le fondement d'une perte de chance », non alléguée par les demandeurs, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ; 5°/ que, les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige ; que, dans leurs écritures d'appel, les emprunteurs avaient invoqué le manquement du prêteur à son obligation de prudence, tel que retenu par le jugement, soit, suivant les motifs de celui-ci, le fait d'avoir confié, aux fins de démarchage, des formulaires vierges portant son en-tête, à une entreprise qui était seule bénéficiaire des crédits accordés, sans effectuer aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles les contrats étaient souscrits, et notamment au regard de la pose d'un panneau publicitaire incitée par l'octroi d'une contrepartie financière future, au jour de la souscription et sans attendre l'expiration du délai de réflexion en violation des dispositions de l'article L. 121-26 du code de la consommation ; qu'en jugeant que les emprunteurs ne reprenaient pas à leur compte cette argumentation, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. La résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté. 6. Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute. 7. Après avoir constaté que les emprunteurs avaient reçu, sans émettre de réserves, une éolienne en bon état de fonctionnement et que la banque avait débloqué les fonds à leur demande, la cour d'appel a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, qu'ils ne justifiaient pas d'un préjudice en lien avec la faute invoquée, tenant à l'absence de vérification de la régularité formelle du contrat principal, de sorte qu'elle n'a pu qu'en déduire qu'ils devaient restituer le capital emprunté. 8. Il s'ensuit que le moyen, qui critique des motifs surabondants de l'arrêt relatifs à la faute de la banque, est inopérant. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. A... et Mme H... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. A... et Mme H.... Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement M. E... A... et Mme D... H... à payer à la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Sygma banque, la somme de 19 000 euros, le paiement devant se faire en deniers ou quittances ; Aux motifs que, sur le paiement de la facture de la société Vensolia énergies, le 2 juillet 2012, Mme H... a signé un certificat de livraison de bien ou de fourniture de services, ce document précisant que la vente portait sur une éolienne et un ballon thermodynamique ajoutant d'une part qu'elle acceptait l'ouvrage sans réserve après avoir constaté que tous les travaux devant être effectués l'avaient été, d'autre part qu'elle demandait au prêteur de procéder au déblocage des fonds au profit des vendeurs ; que ces dispositions sont conformes à celles du contrat de prêt prévoyant le paiement direct du vendeur, M. A... et Mme H... donnant encore instruction irrévocable au prêteur de procéder au versement promis sur justification de la livraison du bien ; qu'enfin M. A... et Mme H... n'ont pas contesté, devant les premiers juges, la livraison de l'ouvrage ni sa bonne marche, l'annulation du contrat de vente, prononcée par la décision déférée, étant liée à la violation du formalisme requis du contrat de vente en cas de démarchage à domicile ; que dans leurs écritures d'appel, ils soutiennent : avoir été trompés sur le taux de TVA, celui annoncé étant de 7 %, ne pouvoir, en raison de la procédure collective, bénéficier de la garantie promise de 15 ans ni davantage du versement annoncé de 1 000 euros en rémunération de la pose d'un panneau publicitaire sur leur terrain convenue entre les parties ; Puis, surabondamment (page 7) que le défaut de livraison libère les emprunteurs de leur obligation de remboursement et que l'ouvrage présente un défaut de conformité, tant aux règles de l'art leur fournisseur d'électricité, la régie du syndicat électrique intercommunal du Pays chartrain (RSEIPC) ayant sollicité le retrait d'un câble dans le coffrage du compteur électrique, qu'aux prescriptions contractuelles, les économies d'énergies escomptées n'étant pas avérées ;qu'outre que le bon de commande précise que seul le matériel bénéficie d'un taux de TVA minoré, la pose -d'un montant de 836,12 euros- étant taxée à 19,6 %, que les factures produites ne démontrent pas de hausse de consommation d'électricité, celle-ci étant de 16675 kWh de février 2010 à janvier 2011 puis 14 141 kWh de janvier 2011 à janvier 2012 enfin de 14883 kWh l'année suivante ; que BNPPPF ne saurait assumer les conséquences dommageables de la procédure collective ne permettant pas la mise en oeuvre du contrat lié au panneau publicitaire ou d'une garantie de 15 ans ;qu'un défaut de conformité - à le supposer démontré, aucune pièce autre qu'un courrier des appelants ne démontrant que la RSEIPC a demandé la dépose d'un câble, l'existence de cet élément n'étant même pas avérée pas plus que son installation par la société Vensolia énergies - ne saurait déchoir la banque de son droit à restitution du capital emprunté lorsque les maîtres d'ouvrage ont réceptionné le bien acquis sans réserve, la banque n'ayant pas à vérifier la réalité de leurs déclarations ni s'assurer personnellement de la conformité des livraisons ; que pour condamner la banque au paiement de 1 500 euros de dommages-intérêts, les premiers juges ont estimé que Sygma Banque avait manqué à son obligation de prudence en acceptant de confier aux fins de démarchage, des formulaires vierges portant son en-tête, à une entreprise qui était la seule bénéficiaire des crédits accordés et qu'elle aurait dû constater que la société Vensolia énergies prenait des engagements dès le jour de la souscription (pose d'un panneau publicitaire) en contravention avec les dispositions de l'article L. 121-6 du code de la consommation - après avoir reproché au prestataire, dans le cadre de la fixation de dommages-intérêts au passif de la procédure, de ne pas avoir respecté cet engagement - ; mais qu'à supposer que la signature d'un contrat entraînant occupation du bien de M. A... et Mme H... soit critiquable alors qu'en y procédant ces derniers perdaient leur qualité de consommateur pour devenir prestataires de service d'un professionnel, excluant l'application du texte visé, qu'aucun élément ne permet de supposer que la banque avait connaissance de cette convention pour laquelle son concours n'était pas sollicité ; qu'en toute hypothèse, cette argumentation n'est pas reprise en cause d'appel, M. A... et Mme H... se bornant à caractériser (à titre principal) un manquement de Sygma Banque à son obligation de prudence pour n'avoir effectué aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles les contrats étaient souscrits, question qu'il convient d'examiner ; que sur la déchéance de BNPPPF en raison des vices affectant le contrat de vente, pour faire droit à la demande d'annulation du contrat de vente, les premiers juges ont constaté (à la lecture du verso d'une pièce dont seul le recto est communiqué devant la cour) : que le formulaire de rétractation n'était pas précédé de la mention « Si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre », que le 6º de l'article L. 121-23 du code de la consommation se termine, dans le contrat fourni, par « l'article L. 331-1 » et non « l'article L. 331-1-7 » comme le précise le texte, que les conditions générales ne sont pas paraphées par les clients, que le dernier alinéa de l'article L. 121-26 concernant la fourniture de services mentionnés dans le code du travail par des associations ou entreprises agréés par l'État n'est pas reproduit ; que si ces omissions peuvent être sanctionnées par une nullité relative du contrat selon les articles L. 121-23 et L. 121-24 du code de la consommation dans leur version applicable à l'époque des faits, il apparaît d'une part qu'elles ne se révèlent qu'à une lecture particulièrement minutieuse du contrat, laquelle ne peut être imposée à la banque en l'absence de toute prévision légale, tandis que la sanction encourue est soumise, au regard des anomalies relevées, notamment l'absence de paraphe des conditions générales ou l'omission d'une disposition ne concernant pas l'hypothèse d'espèce à l'appréciation du juge auquel la banque ne peut se substituer ; qu'il apparaît ainsi que la banque ne pouvait refuser de débloquer le prêt et s'opposer aux instructions formelles données à son client pour y procéder, ce dernier étant libre de se prévaloir ou non des nullités édictées en sa faveur ; Qu'au surplus même à considérer que Sygma Banque devait déceler les anomalies précitées et en avertir ses clients pour leur permettre d'opter ou non pour une nullité, sa faute s'analysant comme un manquement à une obligation d'information ne pourrait être sanctionnée que sur le fondement d'une perte de chance pour les emprunteurs d'avoir renoncé au contrat ; qu'un tel préjudice n'est pas allégué tandis que les pièces produites démontrent que les appelants ont reçu un ouvrage en bon état de fonctionnement qu'ils ne prétendent pas avoir déposé ou détruit comme autorisé par décision exécutoire du tribunal se bornant, comme il vient d'être exposé, à déplorer l'absence de garantie de longue durée, la perte des 1 000 euros promis, préjudices liés à la seule déconfiture de leur prestataire, ou encore leur déception sur l'efficacité du système en terme d'économie d'énergie, tous préjudices sans lien avec un éventuel manquement de la banque ; qu'en conséquence, la banque ne peut être privée de son droit au remboursement du capital prêté et il convient, infirmant le jugement déféré de ce chef, aucune autre disposition n'étant critiquée, de débouter M. A... et Mme H... de leur demande de déchéance ; Alors 1°) que, la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit accessoire, en conséquence de l'annulation du contrat constatant la vente qu'il finançait, emporte, pour l'emprunteur, l'obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, hors le cas de faute de ce dernier ; que, commet une faute de nature à le priver de sa créance de restitution, le prêteur qui, en exécution d'un contrat de crédit affecté, libère les fonds prêtés sans vérifier la régularité du contrat principal ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé que l'offre de vente de la société Vensolia Energies auquel était affecté le contrat de prêt consenti par la société BNP Paribas Personal Finance, ne respectait pas les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile ; qu'en jugeant, pour condamner solidairement M. A... et Mme H... au remboursement de l'emprunt à la banque, qu'il n'appartenait pas à la société BNP Paribas Personal Finance de procéder à une lecture minutieuse du contrat de vente, la cour d'appel a violé les articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 ; Alors 2°) que, commet une faute, le prêteur d'un crédit affecté qui n'effectue aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles les contrats de vente ont été souscrits ; qu'en jugeant qu'à supposer critiquable la signature d'un contrat entrainant occupation du bien des emprunteurs par la pose d'un panneau publicitaire sans attendre l'expiration du délai de réflexion en violation des dispositions de l'article L. 121-26 du code de la consommation, aucun élément ne permettait de supposer que la banque avait eu connaissance de cette convention pour laquelle son concours n'était pas sollicité, quand la société BNP Paribas Personal Finance, tenue à une obligation de prudence, devait vérifier la régularité de l'ensemble des modalités de l'offre de vente de la société Vensolia Energies, la cour d'appel a derechef violé les articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 ; Alors 3°) que, la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit accessoire, en conséquence de l'annulation du contrat constatant la vente qu'il finançait, emporte, pour l'emprunteur, l'obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, hors le cas de faute de ce dernier ; que, commet une faute, le prêteur d'un crédit affecté qui n'effectue aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles les contrats de vente et de crédit ont été souscrits ; qu'en retenant, pour condamner solidairement M. A... et Mme H... au remboursement de l'emprunt à la banque, que les nullités pouvant sanctionner les irrégularités affectant le contrat de prêt consenti par la société BNP Paribas Personal Finance, étaient destinées à leur seule protection, la cour d'appel, qui a statué par une motivation totalement inopérante à écarter la faute de la banque, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 ; Alors 4°) que, le manquement du prêteur d'un crédit affecté à son obligation de contrôle des conditions dans lesquelles les contrats de vente et de crédit ont été souscrits relève, non pas d'une obligation d'information sanctionnée par une perte de chance pour les emprunteurs d'avoir renoncé au contrat, mais d'une faute d'imprudence, le privant de sa créance de restitution ; qu'en retenant « au surplus, que même à considérer que la société Sygma Banque devait déceler les anomalies précitées et en avertir ses clients pour leur permettre d'opter ou non pour une nullité, sa faute s'analysant comme un manquement à une obligation d'information qui ne pourrait être sanctionnée que sur le fondement d'une perte de chance », non alléguée par les exposantes, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ; Alors 5°) que, les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige ; que, dans leurs écritures d'appel, les exposants avaient invoqué le manquement du prêteur à son obligation de prudence, tel que retenu par le jugement, soit, suivant les motifs de celui-ci, le fait d'avoir confié, aux fins de démarchage, des formulaires vierges portant son en-tête, à une entreprise qui était seule bénéficiaire des crédits accordés, sans effectuer aucun contrôle sur les conditions dans lesquelles les contrats étaient souscrits, et notamment au regard de la pose d'un panneau publicitaire incitée par l'octroi d'une contrepartie financière future, au jour de la souscription et sans attendre l'expiration du délai de réflexion en violation des dispositions de l'article L. 121-26 du code de la consommation; qu'en jugeant que M. A... et Mme H... ne reprenaient pas à leur compte cette argumentation, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.
La résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté. Le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle Mme BATUT, président Arrêt n° 728 F-P+B Pourvoi n° V 18-24.769 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société [...] , entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° V 18-24.769 contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2018 par la cour d'appel d'Angers (chambre A, civile), dans le litige l'opposant au GAEC des Tesnières, groupement agricole d'exploitation en commun, dont le siège est [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société [...] , de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat du GAEC des Tesnières, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Vitse, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 18 septembre 2018), le groupement agricole d'exploitation en commun des Tesnières (le GAEC) a débuté une activité d'engraissement de bovins à la fin de l'année 2011. Après avoir acheté les animaux à la société [...] (la SARL), il assurait leur engraissement puis, sauf exception, les revendait à la société [...] (l'EURL). 2. Invoquant l'existence d'un contrat d'intégration irrégulier, le GAEC a assigné l'EURL, la SARL et le gérant de celle-ci en nullité. La SARL a été placée en liquidation judiciaire. 3. La nullité du contrat d'intégration conclu verbalement entre le GAEC et l'EURL a été prononcée. Examen des moyens Sur le premier moyen, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 5. L'EURL fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au GAEC la somme de 173 377 euros au titre des restitutions consécutives à l'annulation du contrat d'intégration, alors « que, pour remettre les parties d'un contrat d'intégration annulé dans leur état antérieur, seules doivent être prises en considération les prestations fournies par chacune d'elles en exécution de ce contrat ; qu'en condamnant l'EURL à effectuer une restitution comprenant des prestations contractuelles entre le GAEC et la SARL, et non au prorata du nombre effectif d'animaux que l'EURL a pu acquérir avant la rupture des relations contractuelles, quand elle avait seulement prononcé la nullité du contrat d'intégration conclu entre le GAEC et l'EURL, de sorte qu'elle ne pouvait condamner cette dernière à procéder à des restitutions résultant d'un contrat qui n'avait pas été annulé, la cour d'appel a violé les articles 1234, devenu 1342, et 1304, devenu 1178, du code civil. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 6. Le GAEC conteste la recevabilité du moyen, en raison de sa nouveauté. 7. Cependant, le moyen, qui est de pur droit, est recevable. Bien-fondé du moyen Vu l'article 1234 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : 8. Pour remettre les parties à un contrat d'intégration annulé dans leur état antérieur, seules doivent être prises en considération les prestations fournies par chacune d'elles en exécution de ce contrat. 9. Pour condamner l'EURL a payer au GAEC une somme excédant les restitutions consécutives à l'annulation du contrat d'intégration ayant lié ces parties, l'arrêt retient que les relations avec le GAEC ont impliqué, dès l'origine et de manière concertée, tant la SARL, vendeur des animaux maigres, que l'EURL, destinataire des animaux engraissés, de sorte que celle-ci doit également s'acquitter des restitutions relatives au contrat d'intégration ayant lié le GAEC à la SARL. 10. En statuant ainsi, alors que l'EURL ne pouvait être tenue que des restitutions consécutives à l'annulation du contrat d'intégration l'ayant personnellement liée au GAEC, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'EURL [...] à verser au GAEC des Tesnières la somme de 173 377 euros hors taxe avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance et capitalisation des intérêts, l'arrêt rendu le 18 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ; Condamne le GAEC des Tesnières aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour la société [...] PREMIER MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la nullité du contrat d'intégration conclu verbalement et ayant existé entre le Gaec des Tesnières et l'Eurl [...] et d'avoir condamné l'Eurl [...] à verser au Gaec des Tesnières la somme de 173 377 euros HT avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance et capitalisation des intérêts ; AUX MOTIFS QUE « Au terme des dispositions de l'article L. 326-2 du code rural et de la pêche maritime, la définition légale du contrat d'intégration dans le secteur de l'élevage est la suivante: "Dans le domaine de l'élevage sont réputés contrats d'intégration les contrats par lesquels le producteur s'engage envers une ou plusieurs entreprises à élever ou à engraisser des animaux, ou à produire des denrées d'origine animale, et à se conformer à des règles concernant la conduite et l'élevage, l'approvisionnement en moyens de production ou l'écoulement des produits finis". En l'espèce, le GAEC des Tesnières entend caractériser le contrat d'intégration ayant existé avec cette partie. Il n'y a eu aucune convention écrite signée entre les parties. S'agissant de contrat mixte intervenu entre un non-commerçant le GAEC des Tesnières et des commerçants la SARL [...] et l'EURL [...] , la preuve d'un éventuel contrat d'intégration est libre. L'existence de l'accord consacré par l'écrit du 10 mai 2012 entre le GAEC des Tesnières et la SARL [...] n'est pas susceptible de produire effet dans les rapports entre le GAEC des Tesnières et l'EURL [...] dès lors que la renonciation d'action ne concerne que les éventuelles réclamations à l'encontre du GAEC à l'encontre de la seule société [...] . La société EURL [...] n'entend pas s'en prévaloir. Par référence aux dispositions de l'article L. 326-2 du code rural visé ci-dessus, pour qu'il y ait contrat d'intégration en matière d'élevage, il faut mais il suffit d'établir : - que le producteur s'engage envers une ou plusieurs entreprises à élever ou à engraisser des animaux ; - et à se conformer à des règles concernant la conduite et l'élevage, l'approvisionnement en moyens de production ou l'écoulement des produits finis". En l'espèce, il est soutenu par le GAEC des Tesnières que sa mission consistait à accueillir sur son exploitation des vaches laitières de réforme dites 'vaches maigres' pour les engraisser en plein-air afin de les livrer après engraissement directement à l'EURL [...] ou à la SARL [...] laquelle les revendait à l'EURL [...] . Le GAEC des Tesnières soutient qu'il n'était libre ni du choix, ni du nombre, ni du prix d'acquisition des animaux lesquels étaient contrôlés avant leur introduction sur l'exploitation par le vétérinaire dans les locaux de S... bétail. Il précise qu'à cette occasion, un certain nombre de bovins étaient identifiés par une boucle jaune 'C' en vue de leur écoulement auprès des abattoirs Charal avec lesquels l'EURL [...] était en relation commerciale. Il précise qu'il ne maîtrisait pas non plus le choix et le prix des animaux lors de leur revente après engraissement, cette opération étant effectuée par M. E... et S... bétail. Ainsi le GAEC des Tesnières entend caractériser le contrat d'intégration par l'engagement pris d'engraisser les vaches et d'écouler les vaches engraissées selon des règles édictées par les sociétés [...] et [...] . Il lui incombe la charge d'apporter par tous moyens la preuve de ces éléments sans qu'il ne soit nécessaire d'établir encore la preuve d'une immixtion de ses partenaires quant à la nature et au choix de l'alimentation, au suivi sanitaire et plus généralement au respect de préconisations en matière d'élevage durant la période où les animaux se trouvaient sur l'exploitation depuis leur introduction jusqu'à leur enlèvement. En effet, les divers éléments visés par l'article L 362-2 du code rural ne sont pas cumulatifs entre eux. La liberté consentie à l'agriculteur dans la conduite de son élevage n'est pas exclusive de l'existence d'un contrat d'intégration, dès lors que l'éleveur se trouve en état de dépendance économique en matière d'approvisionnement en moyens de production et dans le domaine de la commercialisation et de l'écoulement des produits finis ce qui est allégué en l'espèce. En l'espèce et bien qu'en l'absence d'écrit, le GAEC des Tesnières ne peut, autrement que par un faisceau d'éléments de fait concordants établir qu'un approvisionnement exclusif en vaches maigres aux conditions financières édictées par la société [...] lui était imposé, il résulte des vérifications opérées par l'expert : - que 470 vaches ont été introduites par le vendeur de bestiaux [...] sur l'exploitation entre le 5 décembre 2011 et mars 2012 selon un rythme s'accélérant au fil du temps après que les opérations préalables à cette introduction (prise de sang, bouclage, fouille pour diagnostic de gestation) soient effectuées chez S... bétail par des vétérinaires de la clinique des Alouettes, cabinet vétérinaire qui n'est pas celui du vétérinaire-traitant de l'acheteur mais un cabinet proche des locaux où transitaient les animaux, - que 235 de ces bovins ont été revendus soit directement à [...] , soit indirectement via [...] qui les a revendus [...] , - que dès avant leur introduction sur l'exploitation du GAEC des Tesnières, certains de ces bovins avaient été individualisés par un bouclage spécifique en vue de leur écoulement par l'EURL [...] aux abattoirs Charal avec lequel [...] était en relation d'affaires ; que cette sélection s'est opérée dans les locaux du vendeur, qu'elle a échappé totalement au GAEC lequel a cependant supporté la charge d'une commission de 38 € pour cette prestation, déduite de la facture lors de la revente après engraissement, - que le choix des animaux destinés à l'abattage était effectué par M. E... et M M... S... O... en présence de M. E... qui a indiqué devant l'expert sans être contredit par M. E... et M. A... qu'il les assistait simplement pour effectuer ce tri. Il apparaît que l'avocat de [...] et de l'EURL [...] a contesté par dire cette affirmation de l'expert. L'expert a confirmé ce qu'il a écrit comme correspondant à ce qui avait été dit par les parties visées et il a ajouté qu'il relève qu'il n'est pas observé couramment sur le terrain lors de transaction de ce type que le vendeur des animaux maigres soit présent lors de la sélection en vue de l'acquisition par un tiers des mêmes animaux une fois engraissés. Cet indice supplémentaire accrédite le rôle actif des sociétés [...] et [...] dans le choix des animaux, l'éleveur ne disposant pas, face à ces deux professionnels du commerce de bestiaux d'une véritable indépendance pour sélectionner les animaux qu'il souhaitait acquérir puis présenter, à la date et aux conditions de son choix, à la revente. Il sera relevé que si l'ensemble des animaux introduits par [...] sur l'exploitation n'ont pas tous été revendus à [...] ou à S... bétail, la part la plus significative des ventes effectuées au profit de tiers et portant sur 109 animaux est intervenue après le 20 mai 2012, date de rupture des relations contractuelles. De ce fait, elles ne sauraient traduire une liberté de l'éleveur dans le choix de ses clients, durant la période d'exécution du contrat. La revente de 28 animaux par le GAEC des Tesnières à la société Privileg dont 16 sur 28 ont été revendus le 31 mai 2012 soit après rupture des relations contractuelles et 12 seulement durant la période d'exécution du contrat n'apparaît pas suffisamment importante pour permettre de caractériser une liberté de choix de l'éleveur de nature et exclure la qualification de contrat d'intégration. - qu'enfin le lien entre les factures vérifiées par l'expert permet d'établir que le prix de vente était fixé par référence au prix de la transaction entre l'abattoir et la SARL [...] ou l'EURL [...] . L'ensemble des éléments énoncés ci-dessus constitue un faisceau de faits accréditant la restriction à la liberté économique du GAEC des Tesnières, provoquée par une restriction à ses choix de commercialisation (destination et prix), et par des engagements d'approvisionnement qu'il ne pouvait maîtriser tant en volume qu'en prix caractérisant une subordination résultant d'un contrat d'intégration tel que défini par la loi en matière d'élevage. Au terme des dispositions des articles L 326-5 et L 326-6 du code rural, tout contrat d'intégration doit être conclu par écrit et contenir des mentions obligatoires. Le contrat verbal souscrit entre les parties contrevient à ces exigences et il doit de ce seul fait, être annulé. L'annulation d'une convention a pour effet de remettre les parties dans la situation initiale et il convient de prendre en considération les prestations fournies par chacune d'elles en exécution de ce contrat afin d'évaluer les éventuelles restitutions. Il est sollicité par l'éleveur une somme de 180.836,00 € HT correspondant au préjudice direct outre 30.000 € pour perte d'exploitation consécutive à l'absence de trésorerie sur le compte, ce qui constitue de fait une demande de dommages et intérêts. L'expert a chiffré l'ensemble des prestations fournies par l'éleveur pour 398 animaux vendus à une somme de 224.847 €. Puis, il a calculé le solde représentant le prix effectif payé à l'éleveur à une somme de 44.011 € auquel s'ajoute les frais de pension versés à hauteur de 7498,62 € HT par la SARL [...] . Il en résulte un manque à gagner effectif de 173.377 € HT et non de 180.836 ,00 € HT. Dès lors que les relations entre les parties ont impliqué dès l'origine non seulement la SARL [...] , vendeur des animaux maigres mais également l'EURL [...] auquel étaient destinés les animaux engraissés et que cette opération a été effectuée dès l'origine à l'initiative de ces deux sociétés en concertation entre elles, il convient de condamner la société [...] à effectuer cette restitution en son intégralité et non au prorata du nombre effectif des animaux qu'elle a pu acquérir soit directement soit indirectement avant la rupture des relations contractuelles ; » (arrêt p.7 in fine à p.11) 1°) ALORS QUE le moyen tiré de la chose jugée est d'ordre public quand, au cours de la même instance, il est statué sur les suites d'une précédente décision passée en force de chose jugée ; que le chef du jugement entrepris du tribunal de grande instance d'Angers du 11 janvier 2016 ayant déclaré irrecevable le Gaec des Tesnières en ses demandes à l'encontre de la société [...] était passé en force de chose jugée du fait du désistement d'appel du Gaec des Tesnières à l'égard de la société [...] ; que le Gaec des Tesnières sollicitait en appel qu'il soit jugé que les relations contractuelles existant entre lui, la société [...] et la société [...] constituaient un ensemble indivisible devant être requalifié en contrat d'intégration ; qu'en retenant, statuant sur appel du jugement du 11 janvier 2016, l'existence d'un contrat d'intégration impliquant la société [...] , vendeur des animaux maigres, ainsi que l'Eurl [...] , auquel étaient destinés certains des animaux engraissés par le Gaec des Tesnières, sans relever, au besoin d'office, l'autorité de chose jugée attachée au chef de dispositif du jugement déclarant irrecevable le Gaec des Tesnières en ses demandes à l'encontre de la société [...] , s'opposant nécessairement à la requalification en contrat d'intégration d'un ensemble contractuel ayant existé entre le Gaec des Tesnières, la société [...] et l'Eurl [...] , la cour d'appel a violé les articles 125 et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351, devenu 1355, du code civil ; 2°) ALORS, subsidiairement, QUE dans le domaine de l'élevage, sont réputés contrats d'intégration les contrats par lesquels le producteur s'engage envers une ou plusieurs entreprises à élever ou à engraisser des animaux, ou à produire des denrées d'origine animale, et à se conformer à des règles concernant la conduite de l'élevage, l'approvisionnement en moyens de production ou l'écoulement des produits finis ; qu'en se fondant, pour qualifier de contrat d'intégration les relations contractuelles entre le Gaec des Tesnières et l'Eurl [...] et prononcer l'annulation du contrat verbal conclu entre ces deux entités au mépris des prescriptions d'ordre public relatives à ce type de contrat, sur le fait que 470 vaches avaient été introduites par le vendeur de bestiaux [...] sur l'exploitation du Gaec des Tesnières selon un rythme s'accélérant et sur le rôle actif des sociétés [...] et [...] dans le choix des animaux, éléments impropres à justifier d'une dépendance économique, caractéristique du contrat d'intégration, du Gaec des Tesnières à l'égard de la seule Eurl [...] , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 326-1 et L. 326-2 du code rural et de la pêche maritime. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné l'Eurl [...] à verser au Gaec des Tesnières la somme de 173 377 euros HT avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance et capitalisation des intérêts ; AUX MOTIFS QUE « L'annulation d'une convention a pour effet de remettre les parties dans la situation initiale et il convient de prendre en considération les prestations fournies par chacune d'elles en exécution de ce contrat afin d'évaluer les éventuelles restitutions. Il est sollicité par l'éleveur une somme de 180.836,00 € HT correspondant au préjudice direct outre 30.000 € pour perte d'exploitation consécutive à l'absence de trésorerie sur le compte, ce qui constitue de fait une demande de dommages et intérêts. L'expert a chiffré l'ensemble des prestations fournies par l'éleveur pour 398 animaux vendus à une somme de 224.847 €. Puis, il a calculé le solde représentant le prix effectif payé à l'éleveur à une somme de 44.011 € auquel s'ajoute les frais de pension versés à hauteur de 7498,62 € HT par la SARL [...] . Il en résulte un manque à gagner effectif de 173.377 € HT et non de 180.836,00 € HT. Dès lors que les relations entre les parties ont impliqué dès l'origine non seulement la SARL [...] , vendeur des animaux maigres mais également l'EURL [...] auquel étaient destinés les animaux engraissés et que cette opération a été effectuée dès l'origine à l'initiative de ces deux sociétés en concertation entre elles, il convient de condamner la société [...] à effectuer cette restitution en son intégralité et non au prorata du nombre effectif des animaux qu'elle a pu acquérir soit directement soit indirectement avant la rupture des relations contractuelles ;» (arrêt p.10 et 11) 1°) ALORS QUE le moyen tiré de la chose jugée est d'ordre public quand, au cours de la même instance, il est statué sur les suites d'une précédente décision passée en force de chose jugée ; que le chef du jugement entrepris du tribunal de grande instance d'Angers du 11 janvier 2016 ayant déclaré irrecevable le Gaec des Tesnières en ses demandes à l'encontre de la société [...] était passé en force de chose jugée du fait du désistement d'appel du Gaec des Tesnières à l'égard de la société [...] ; que le Gaec des Tesnières sollicitait en appel qu'il soit jugé que les relations contractuelles existant entre lui, la société [...] et la société [...] soient requalifiées en contrat d'intégration ainsi que la condamnation de l'Eurl [...] à lui restituer en valeur l'intégralité des prestations issues de ces relations contractuelles ; qu'en condamnant l'Eurl [...] , statuant sur appel du jugement du 11 janvier 2016, à restituer en valeur au Gaec des Tesnières l'intégralité des prestations issues des relations contractuelles tant avec l'Eurl [...] qu'avec la société [...] sans relever, au besoin d'office, l'autorité de chose jugée attachée au chef de dispositif du jugement déclarant irrecevable le Gaec des Tesnières en ses demandes à l'encontre de la société [...] , autorité s'opposant nécessairement à la condamnation de l'Eurl [...] à restituer en valeur les prestations du contrat conclu entre le Gaec des Tesnières et la société [...] , la cour d'appel a violé les articles 125 et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351, devenu 1355, du code civil ; 2°) ALORS, en toute hypothèse, QUE pour remettre les parties d'un contrat d'intégration annulé dans leur état antérieur, seules doivent être prises en considération les prestations fournies par chacune d'elles en exécution de ce contrat ; qu'en condamnant l'Eurl [...] à effectuer une restitution comprenant des prestations contractuelles entre le Gaec des Tesnières et la société [...] , et non au pro-rata du nombre effectif d'animaux que la société [...] a pu acquérir avant la rupture des relations contractuelles, quand elle avait seulement prononcé la nullité du contrat d'intégration conclu entre le Gaec des Tesnières et l'Eurl [...] , de sorte qu'elle ne pouvait condamner cette dernière à procéder à des restitutions résultant d'un contrat qui n'avait pas été annulé, la cour d'appel a violé les articles 1234, devenu 1342, et 1304, devenu 1178, du code civil.
Pour remettre les parties à un contrat d'intégration annulé dans leur état antérieur, seules doivent être prises en considération les prestations fournies par chacune d'elles en exécution de ce contrat
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1269 FS-P+B+R+I Pourvoi n° K 18-22.069 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 1°/ Mme Q... I..., 2°/ Mme L... K..., toutes deux domiciliées [...] , ont formé le pourvoi n° K 18-22.069 contre l'arrêt rendu le 3 juillet 2018 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre C), dans le litige les opposant au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, dont le siège est tour Galliéni II, 36 avenue du général de Gaulle, 93175 Bagnolet cedex, défenderesse à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de Mme I..., de Mme K..., de Me Le Prado, avocat du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, M. Besson, Mme Leroy-Gissinger, Mme Bouvier, M. Martin, conseillers, M. Ittah, conseiller référendaire, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 3 juillet 2018), F... K... est décédé le 26 mai 2016 des suites d'un cancer du péritoine. Sa fille, Mme L... K... et sa compagne, Mme I..., ont saisi le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA) d'une demande de réparation de leurs préjudices personnels. Contestant l'offre d'indemnisation du FIVA, elles ont formé un recours devant une cour d'appel. Examen du moyen relevé d'office Vu les articles 27, 28 et 29 du décret n° 2001-963 du 23 octobre 2001 : 2. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. 3. Selon le premier des textes susvisés, lorsque la déclaration écrite du demandeur exerçant devant la cour d'appel une action contre le FIVA ne contient pas l'exposé des motifs invoqués, le demandeur doit déposer cet exposé dans le mois qui suit le dépôt de la déclaration, à peine d'irrecevabilité de la demande. Selon le deuxième, les pièces et documents justificatifs produits par le demandeur doivent être mentionnés dans la déclaration ou dans l'exposé des motifs et doivent être remis au greffe de la cour d'appel en même temps que cette déclaration ou cet exposé des motifs. Selon le troisième, dans le mois de la notification par le greffe de la déclaration de recours, le FIVA transmet le dossier au greffe de la cour d'appel. 4. Ces dispositions n'imposent pas à la cour d'appel d'écarter des débats les pièces produites à l'expiration des délais précités, lorsqu'il est établi que la partie destinataire de la communication a été mise, en temps utile, en mesure de les examiner, de les discuter et d'y répondre. 5. La jurisprudence initiée par l'arrêt du 13 septembre 2007 (2e Civ., 13 septembre 2007, n° 06-20.337, Bull. II, n° 217) ne peut être maintenue sans méconnaître les principes de l'égalité des armes et de contradiction inhérents au droit à un procès équitable garanti par l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En effet, en imposant à l'auteur du recours de déposer, à peine d'irrecevabilité, ses pièces et justificatifs dans un délai d'un mois alors que le délai imposé au FIVA n'est assorti d'aucune sanction, cette jurisprudence aboutit à placer l'auteur du recours dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire en matière d'administration de la preuve. En outre, elle ne lui permet pas de produire de nouvelles pièces en réponse à l'argumentation et aux pièces du FIVA. 6. Pour fixer l'indemnisation des préjudices personnels de Mme I... et de Mme L... K... à une certaine somme, l'arrêt énonce que sont irrecevables les pièces et documents justificatifs produits par le demandeur qui n'ont pas été déposés au greffe en même temps que la déclaration ou l'exposé des motifs ou qui ont été déposés postérieurement au délai d'un mois prescrit. Il ajoute qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la cour d'appel a été saisie du recours de Mmes A... et K... le 9 novembre 2017, que ces dernières devaient au plus tard déposer leurs pièces le 9 décembre 2017 et que les pièces 57 à 63, 67 à 75, 76 à 85 et 86 à 89, dont l'irrecevabilité est invoquée, ont été déposées postérieurement au délai d'un mois imparti. 7. En statuant ainsi, en considérant que les pièces litigieuses étaient irrecevables au seul motif qu'elles n'avaient pas été remises dans le délai imparti d'un mois, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence. Condamne le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante et le condamne à payer à Mmes I... et K... la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt, signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mmes I... et K... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité l'indemnisation des préjudices de Mme Q... I... et de Mme L... K... à la charge du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante aux sommes de 45.000 € au titre du préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie subi par la première et de 40.000 € au titre du préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie subi par la seconde après avoir déclaré irrecevables leurs pièces 57 à 63, 67 à 85 et 87 à 89 ; AUX MOTIFS QUE par dérogation aux dispositions du titre VI du livre II du code de procédure civile, les actions intentées devant les cours d'appel contre le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante sont formées conformément aux dispositions des articles 27 à 35 du décret nº 2001-963 du 23 octobre 2001 ; que selon ces dispositions les pièces et documents justificatifs produits par le demandeur doivent être mentionnés dans la déclaration ou être déposées dans le mois qui suit le dépôt de la déclaration sous peine d'irrecevabilité ; que par conséquent sont irrecevables les pièces et documents justificatifs qui n'ont pas été déposés au greffe en même temps que la déclaration ou l'exposé des motifs ou qui ont été déposées postérieurement au délai d'un mois prescrit ; qu'en l'espèce il n'est pas contesté que la cour ayant été saisie du recours contre l'offre du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante des dames I.../K... le 9 novembre 2017, ces dernières devaient au plus tard déposer leurs pièces dans le délai d'un mois, soit le 9 décembre 2017 ; qu'il n'est pas contesté que les pièces 57 à 63 ont été déposées le 19 janvier 2018, les pièces 67 à 75 le 4 mai 2018, les pièces 76 à 85 le 7 mai 2018 et les pièces 86 à 89 le 18 mai 2018 étant observé que les pièces 64 à 66, et 86 sont de la jurisprudence et que donc les pièces sus-énoncées ont été déposés postérieurement au délai d'un mois imparti ; qu'en outre il n'est pas démontré en quoi les dispositions réglementaires discutées fixant en droit interne les conditions de recours devant la cour d'appel et l'admissibilité des pièces méconnaissent les exigences du respect du contradictoire et du droit à un procès équitable ce d'autant qu'il apparaît qu'en l'espèce toutes les pièces dont l'irrecevabilité est soulevée sont antérieures à la saisine de la cour et pouvaient donc être déposées dans le délai prescrit ; 1°) ALORS QU' en imposant à l'auteur d'un recours contre une décision du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante un délai d'un mois à compter de l'exercice du recours, sans qu'aucune limite ne s'impose au Fonds pour la production de ses pièces devant la cour d'appel, les articles 27 et 28 du décret n° 2001-963 du 23 octobre 2001 instituent une rupture de l'égalité entre les deux parties au litige et méconnaissent le principe de l'égalité des armes ; qu'en se fondant dès lors en l'espèce sur ces dispositions qu'elle aurait dû écarter comme étant contraires à l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ; 2°) ALORS SURTOUT QUE dans leurs conclusions (p. 3, alinéa 11), les requérantes faisaient valoir que les pièces litigieuses avaient été produites pour répondre aux « contestations incessantes » du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante et qu'en laissant sans réponse ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 3°) ET ALORS, QU' en toute hypothèse, en vertu de l'article 22 du décret n° 2001-963 du 23 octobre 2001, la notification d'une décision du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante doit indiquer les délais et voies de recours contre cette décision ; que cette notification doit indiquer l'obligation pour le requérant, sous peine d'irrecevabilité, de déposer au greffe les pièces qu'il entend produire dans le mois qui suit le dépôt de la déclaration de recours ; qu'en déclarant irrecevables certaines pièces des requérantes au motif qu'elles avaient été déposées plus d'un mois après le dépôt de leur déclaration de recours, sans constater que la lettre de notification de la décision du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante faisait mention du fait que les pièces non déposées dans le mois suivant le délai de dépôt de la déclaration de recours seraient irrecevables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 22, 27 et 28 du décret n° 2001-963 du 23 octobre 2001. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité l'indemnisation des préjudices de Mme Q... I... et de Mme L... K... à la charge du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante aux sommes de 45.000 € au titre du préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie subi par la première et de 40.000 € au titre du préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie subi par la seconde ; AUX MOTIFS QUE L... K... et Q... I... reprochent tout d'abord au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante de proposer une indemnisation globale de ces deux postes de préjudices alors qu'ils doivent être évalués séparément ; que le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante considère en effet qu'il ne peut faire une offre d'indemnisation que sur une évaluation globale par référence à son barème indicatif ; que la cour retient effectivement que le préjudice d'accompagnement de fin de vie est une composante du préjudice global de la victime indirecte en lien avec la maladie et le décès, mais fait également observer que le barème indicatif ne s'impose pas à l'appréciation judiciaire de la réparation du préjudice intégral de la victime qui doit prendre en compte l'ensemble des troubles dans les conditions d'existence du proche ainsi que les conséquences morales et psychologiques ; que sur le préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie de Q... I..., l'offre d'indemnisation du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante qui ne conteste plus le lien de proximité de Q... I... avec la victime à hauteur de 32.600 € est formulée au titre du préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie ; que Q... I... réclame 15.000 € au titre de son préjudice d'accompagnement de fin de vie et 50.000 € au titre de son préjudice d'affection ; que les différents témoignages résultant des attestations produites par Q... I... de la communauté familiale et amicale et des personnels de santé, font clairement apparaître la constance de la présence de celle-ci au chevet de son compagnon malade même s'il n'avait pas le même domicile et rien ne permet de douter de l'intensité de la douleur ressentie par l'évolution inéluctable de la maladie et par la suite de la perte de l'être cher ; que la cour fait une appréciation globale du préjudice indemnisable de Q... I... à hauteur de la somme de 45.000 € ; que sur le préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie de L... K..., le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante propose à celle-ci, en sa qualité de fille du défunt, une somme de 25.000 € pour le poste de préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie ; que L... K... demande de porter l'indemnisation à la somme de 25.000 € pour le préjudice d'affection et 15.000 € pour le préjudice d'accompagnement et de fin de vie ; que la cour rappelle qu'elle considère que le préjudice d'accompagnement de fin de vie est une composante du préjudice global de la victime indirecte mais qu'elle retient aussi que le barème indicatif du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante ne s'impose pas à l'appréciation judiciaire de la réparation du préjudice intégral de la victime ; qu'il convient donc de rechercher l'indemnisation de l'ensemble des troubles dans les conditions d'existence du proche, en l'espèce la fille, et les conséquences morales et psychologiques, au regard de l'accompagnement de la fin de vie et de la proximité affective avec la victime de l'amiante ; que les différents témoignages résultant des attestations produites par les membres de la famille et les proches font clairement apparaître la constance de la présence de L... K... aux côtés de son père malade pendant les années précédant son décès ainsi que la proximité affective qui les unissait ; qu'au moment de la maladie et du décès de son père L... K... était une jeune adolescente et qu'il est établi par un certificat médical du docteur B... qu'elle a été très perturbée par le décès de son père survenant alors même qu'elle passait son baccalauréat et que ses troubles ont nécessité un suivi médical ; que la cour fait une appréciation du préjudice de L... K... à hauteur de la somme de 40.000 € ; ALORS QUE le préjudice d'accompagnement de fin de vie constitue un préjudice autonome qui doit être distingué du préjudice moral ; qu'en allouant une seule indemnité aux requérantes, au titre du « préjudice moral et d'accompagnement de fin de vie », sans distinguer les deux chefs de préjudice, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Q... I... de sa demande d'indemnisation de son préjudice économique ; AUX MOTIFS QUE sur le préjudice économique de Q... I..., celle-ci sollicite tout d'abord une somme de 104.562,39 € au titre de la perte à la contribution à l'entretien de la famille ; que si comme elle le soutient l'existence d'un préjudice économique pour le compagnon ou la compagne d'une victime n'impose pas une cohabitation sous le même toit, il convient toutefois de rapporter la preuve d'une communauté de vie économique entre la victime indirecte et le défunt ou l'octroi par le défunt d'une aide financière régulière ; qu'en l'espèce force est de constater que les pièces produites par Q... I... et retenues par la cour ne permettent pas de caractériser l'existence de cette communauté de vie économique ; qu'en effet il est constant qu'au quotidien Q... I... et F... K... vivaient dans des domiciles distants de plusieurs centaines de kilomètres ; qu'au plan fiscal ils établissaient chacun une déclaration distincte, Q... I... se déclarant parent isolé avec un enfant à charge et F... K... se déclarant seul ; que Q... I... ne verse aucune pièce permettant de retenir qu'il y avait un partage des charges communes comme les charges, d'eau, d'électricité, les impôts locaux à l'exception du fait que la victime avait assuré en même temps que son habitation la responsabilité civile de Q... I... et de leur fille L... ce qui est manifestement insuffisant à établir l'existence d'une communauté de vie économique, comme l'est également le fait qui n'est pas contesté que Q... I..., son compagnon décédé et leur fille se retrouvaient régulièrement pour les fins de semaines et les vacances ; que Q... I... ne justifie pas plus par la production de relevés de comptes bancaires par exemple de ce que le défunt lui versait régulièrement une somme d'argent pour contribuer à l'entretien du foyer qu'elle formait avec sa fille ; que par conséquent Q... I... à qui incombe la charge de la preuve ne démontre pas une perte de contribution aux charges du ménage et de la famille ; que Q... I... sollicite également une somme de 21.900,88 € au titre de la perte de salaire au motif que son compagnon étant le gérant majoritaire de la société qui l'employait, le décès de ce dernier a entraîné la mise en liquidation judiciaire de la société et par voie de conséquence son licenciement économique ; que cependant il sera rappelé que le préjudice causé par les blessures ou le décès d'un proche n'est admis qu'à la condition que le préjudice concerne un proche de la victime et que le préjudice soit également en relation de causalité directe et certaine avec le dommage corporel subi par la victime directe ; qu'en l'espèce la demande que forme Q... I... au titre de la perte de revenus en raison du décès de son employeur est formée en sa qualité de salariée de la personne décédée et non en sa qualité de proche ; qu'en outre il n'existe pas un lien suffisant de causalité directe puisque c'est la mise en liquidation judiciaire de la société qui employait Q... I... qui a entraîné son licenciement économique ; qu'enfin si Q... I... justifie du montant de son salaire avant son licenciement elle ne produit aucune pièce recevable sur sa situation ultérieure et notamment sur le point de savoir si elle a perçu les indemnités habituellement versées en matière de licenciement économique comme cela ressort du courrier de l'administrateur judiciaire ; ALORS QUE dans ses conclusions (p. 9, alinéa 1er), Mme Q... I... faisait valoir que c'est le décès de F... K... qui avait entraîné la mise en liquidation judiciaire de l'entreprise de celui-ci, son licenciement et la perte de revenus consécutives à ce licenciement, au titre de laquelle elle devait être indemnisée ; qu'en déboutant Mme I... de sa demande d'indemnisation de son préjudice économique, au motif qu'il « n'existe pas un lien suffisant de causalité directe puisque c'est la mise en liquidation judiciaire de la société qui employait Q... I... qui a entraîné son licenciement économique » (arrêt attaqué, p. 8, alinéa 10), sans répondre aux conclusions susvisées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme L... K... de sa demande d'indemnisation de son préjudice économique ; AUX MOTIFS QUE sur le préjudice économique de L... K..., celle-ci sollicite une somme de 44.813,47 € exposant que son père finançait depuis toujours ses études et aurait continué à le faire s'il n'était pas décédé et qu'elle utilise pour justifier de la somme demandée la méthode de calcul appliquée lorsqu'il existe une communauté de vie économique entre la victime et le proche du défunt ; que toutefois L... K... ne peut justifier de l'existence de cette communauté de vie économique ; qu'en effet il a déjà été exposé que L... K... vivait avec sa mère au quotidien cette dernière déclarant assumer seule cette enfant et ne percevoir aucune contribution de la part du père de son enfant ; que le fait que la victime ait ouvert un compte épargne logement à sa fille, lui fasse des cadeaux pour son anniversaire et même la garantisse dans le cadre d'une assurance responsabilité civile ne peut suffire à établir cette communauté de vie économique ; qu'il est constant qu'en l'absence de communauté de vie économique il est cependant admis que le proche qui bénéficie d'une aide financière apportée par le défunt subit un préjudice économique ; que toutefois dans cette hypothèse le préjudice s'apprécie in concreto la victime par ricochet devant rapporter la preuve par tous moyens (mandats, relevés bancaires, attestations....) de l'aide apportée, à défaut le préjudice demeure incertain ; qu'en l'espèce L... K... ne produit aucune pièce en ce sens ; que les nombreuses attestations versées au débat justifient de la réalité et de la qualité du lien affectif entre le père et sa fille mais n'apportent aucun élément concret sur l'aide financière ; qu'il n'est produit au débat par ailleurs aucun élément financier permettant d'établir que F... K... contribuait à l'entretien régulier de sa fille et encore moins d'apprécier le montant de cette contribution ; que par conséquent la cour ne peut en l'absence de ces éléments dire qu'il existe un préjudice économique certain et l'évaluer ; ALORS QUE la victime a droit à l'indemnisation intégrale de son préjudice ; que dans ses conclusions (p. 7), Mme L... K... indiquait que son père assurait sa responsabilité civile, avait souscrit pour elle une « complémentaire santé », lui avait ouvert un compte bancaire qu'il alimentait à l'occasion de son anniversaire, un plan d'épargne-logement et un contrat d'assurance-vie ; qu'en s'abstenant de rechercher si, pris dans leur ensemble, ces concours de F... K... au profit de sa fille ne caractérisait pas l'existence d'une aide financière dont la privation brutale devait être indemnisée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de réparation intégrale susvisé.
Les dispositions des articles 27, 28 et 29 du décret n° 2001-963 du 23 octobre 2001, qui fixent au demandeur à une action contre le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) un délai pour déposer ses pièces et documents justificatifs et au FIVA un délai pour transmettre le dossier, n'imposent pas à la cour d'appel d'écarter des débats les pièces produites à l'expiration de ces délais lorsqu'il est établi que la partie destinataire de la communication a été mise, en temps utile, en mesure de les examiner, de les discuter et d'y répondre. En conséquence, viole ces textes la cour d'appel qui déclare irrecevables les pièces produites par le demandeur au seul motif qu'elles n'ont pas été remises dans le délai imparti d'un mois
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1273 F-P+B+I Pourvoi n° T 19-23.023 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La société Assurance mutuelle des motards, dont le siège est 270 impasse Adam Smith, CS 10100, 34470 Perols, a formé le pourvoi n° T 19-23.023 contre l'arrêt rendu le 4 juillet 2019 par la cour d'appel de Douai (3e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme Y... D..., épouse S..., 2°/ à M. B... S..., 3°/ à Mme O... S..., 4°/ à M. C... S..., représenté par sa tutrice Mme Y... D..., épouse S..., tous quatre domiciliés [...] , 5°/ à la société Generali Iard, société anonyme, dont le siège est 2 rue Pillet Will, 75009 Paris, 6°/ à l'Association pour la réalisation et la gestion d'un complexe motocycliste, dont le siège est mairie, place de la République, 59260 Lezennes, prise en la personne de son président, 7°/ à M. Q... J..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de l'Association pour la réalisation et la gestion d'un complexe motocycliste, 8°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Roubaix-Tourcoing, dont le siège est 6 rue Rémy Cogghe, 59100 Roubaix, 9°/ à l'association Mutuelle Pro BTP, dont le siège est 7 rue du Regard, 75006 Paris, et en son établissement Pro BTP, direction régionale Nord Pas-de-Calais, dont le siège est 111 rue Royale, 59800 Lille, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Assurance mutuelle des motards, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Generali IARD, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Désistement partiel 1. Il est donné acte à la société Assurance mutuelle des motards du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme Y... D... épouse S..., M. B... S..., Mme O... S..., M. C... S..., représenté par sa tutrice Mme Y... D... épouse S..., l'Association pour la réalisation et la gestion d'un complexe motocycliste (ARCM), prise en la personne de son président, M. Q... J..., en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de l'ARCM, la Caisse primaire d'assurance maladie de Roubaix-Tourcoing (la caisse) et l'association Mutuelle Pro BTP. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 juillet 2019), le 18 août 2012, M. C... S..., assuré auprès de la société Assurance mutuelle des motards au titre d'un contrat comportant, en exécution d'un avenant signé le 20 mars 2012, une garantie corporelle conducteur, a été victime d'un accident sur un circuit géré par l'ARCM, assurée au titre de sa responsabilité civile auprès de la société Generali Iard. 3. La société Assurance mutuelle des motards a versé à la victime une certaine somme à valoir sur son indemnisation et Mme D..., en qualité de représentante légale de son fils, M. C... S..., placé sous tutelle, a obtenu, en référé, l'allocation, de la part de cet assureur, d'une indemnité provisionnelle complémentaire. 4. Mme D..., agissant tant en son nom qu'en qualité de représentante légale de M. C... S..., a assigné l'ARCM, la société Generali Iard, la caisse, la société Mutuelle Pro BTP et la société Assurance mutuelle des motards, afin de voir mettre en cause la responsabilité de l'ARCM dans l'accident survenu et la garantie de son assureur. 5. La société Assurance mutuelle des motards a formé une demande reconventionnelle contre l'ARCM et la société Generali Iard, afin d'obtenir le remboursement des sommes dues en exécution du contrat souscrit par M. C... S..., arguant être subrogée dans les droits de ce dernier. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 6. La société Assurance mutuelle des motards fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes dirigées contre la société Generali Iard, alors « que l'assureur qui bénéficie d'une subrogation conventionnelle dans les droits et actions de l'assuré qu'il a dédommagé à l'encontre de la personne tenue de réparer le dommage dispose de la plénitude des actions que son assuré aurait été admis à exercer ; qu'il peut ainsi exercer l'action directe dont disposait la victime à l'encontre de l'assureur du tiers responsable ; qu'en l'espèce, après avoir relevé que le contrat d'assurance souscrit par la victime comprenait une clause prévoyant la subrogation de son assureur dans ses droits et actions contre tout responsable du dommage, la cour d'appel a néanmoins estimé que la Mutuelle des motards était mal fondée à agir à l'encontre de l'assureur du responsable du dommage ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1250, 1° du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article L. 124-3 du code des assurances. » Réponse de la Cour Vu l'article 1250,1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause, et les articles L.131-2, alinéa 2, L. 124-3 et L. 211-25 du code des assurances : 7. Il résulte des premier et troisième de ces textes que par l'effet de la subrogation conventionnelle prévue aux deuxième et dernier, l'assureur de la victime d'un dommage résultant d'une atteinte à la personne est, pour le recouvrement des prestations indemnitaires ou de l'avance sur indemnité qu'il a versées à son assuré, investi de l'ensemble des droits et actions dont celui-ci disposait contre la personne tenue à réparation ou son assureur. 8. Pour débouter la société Assurance mutuelle des motards de sa demande dirigée contre la société Generali Iard, l'arrêt énonce que les dispositions combinées des articles L. 131-2 et L. 211-25 du code des assurances autorisent, dans les contrats garantissant l'indemnisation des préjudices résultant d'une atteinte à la personne, l'assureur, pour le remboursement des indemnités à caractère indemnitaire, à être subrogé dans les droits du contractant contre le tiers responsable ou son assureur, à condition pour ce dernier que cette subrogation soit contractuellement prévue. Il ajoute qu'en l'espèce, les conditions générales de la police d'assurance produites par la société Assurance mutuelle des motards stipulent, dans un « article 9.80 subrogation » : « nous sommes subrogés dans vos droits et actions contre tout responsable du sinistre à concurrence de l'indemnité que nous avons payée » et définissent en page 5 la subrogation comme le « droit par lequel nous nous substituons à vous pour récupérer auprès du responsable du dommage les indemnités que nous vous avons versées ». L'arrêt retient encore que ces stipulations prévoient uniquement, de manière claire et précise, la possibilité d'un recours subrogatoire contre le responsable du dommage. Il en déduit que la société Assurance mutuelle des motards ne dispose d'aucune action subrogatoire conventionnelle contre la société Generali Iard, seule l'ARCM ayant été déclarée responsable, pour partie, de l'accident litigieux. 9. En statuant ainsi, alors que par l'effet de la subrogation conventionnelle, l'assureur de la victime est investi de l'action directe contre l'assureur du responsable, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ; Condamne la société Generali Iard aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Generali Iard et la condamne à payer à la société Assurance mutuelle des motards la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Assurance mutuelle des motards Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la Mutuelle des Motards de ses demandes dirigées contre la société Générali ; AUX MOTIFS QUE «en application de l'article L.211-25 du code des assurances, les deux premiers alinéas de l'article 33 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 sont applicables aux assureurs ; que lorsqu'il est prévu par contrat, le recours subrogatoire de l'assureur qui a versé à la victime une avance sur indemnité du fait de l'accident peut être exercé contre l'assureur de la personne tenue à réparation dans la limite du solde subsistant après paiement aux tiers visés à l'article 29 de la même loi du 5 juillet 1985 ; qu'il doit être exercé, s'il y a lieu, dans les délais impartis par la loi aux tiers payeurs pour produire leurs créances ; que la cour rappelle également qu'aux termes de l'article L. 131-2 du même code, dans l'assurance de personnes, l'assureur, après paiement de la somme assurée, ne peut être subrogé aux droits du contractant ou du bénéficiaire contre des tiers à raison du sinistre ; que toutefois, dans les contrats garantissant l'indemnisation des préjudices résultant d'une atteinte à la personne, l'assureur peut être subrogé dans les droits du contractant ou des ayants droit contre le tiers responsable, pour le remboursement des prestations à caractère indemnitaire prévues au contrat ; que les dispositions combinées des articles L. 131-2 et L.211-25 du code des assurances autorisent, dans les contrats garantissant l'indemnisation des préjudices résultant d'une atteinte à la personne, l'assureur, pour le remboursement des indemnités à caractère indemnitaire, à être subrogé dans les droits du contractant contre le tiers responsable ou son assureur, à condition pour ce dernier que cette subrogation soit contractuellement prévue ; que ce recours subrogatoire contre l'assureur du tiers responsable, si la police d'assurance le stipule, peut être exercé dans la limite du solde subsistant après paiement aux tiers visés à l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 ; qu'il s'ensuit que, lorsque les conditions du remboursement sont remplies, le recours de l'assureur s'exerce non seulement sur le solde de la part d'indemnité réparant le préjudice économique de la victime ou de ses ayants-droit et subsistant après paiement aux tiers prévus par l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, mais encore sur la part des indemnités de caractère personnel échappant au recours des tiers payeurs ; qu'en l'espèce, les conditions générales de la police d'assurance produites par la Mutuelle des Motards stipulent, dans un "article 9.8 Subrogation" : "nous sommes subrogés dans vos droits et actions contre tout responsable du sinistre à concurrence de l'indemnité que nous avons payée (Article L.121-12 du C.Ass)" ; que ces conditions générales définissent également en page 5 la "subrogation" comme suit : "droit par lequel nous substituons à vous pour récupérer auprès du responsable du dommage les indemnités que nous vous avons versées" ; que ces stipulations du contrat d'assurance souscrit par M. C... S... auprès de la Mutuelle des Motards ne prévoient uniquement la possibilité d'un recours subrogatoire de cette dernière contre le responsable du dommage ; qu'elles ne prévoient pas autre chose, ce dont il résulte de manière claire et précise, sans aucune dénaturation possible, que la Mutuelle des motards est mal fondée à soutenir qu'elle "pouvait parfaitement exercer son recours également à l'encontre de la société Générali" ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont considéré que "cet assureur ne dispose d'aucune action subrogatoire conventionnelle contre la compagnie Générali, seule l'ARCM ayant été déclaré responsable, pour partie, de l'accident litigieux" et qu'il "ne sera donc pas fait droit à la demande en paiement dirigée contre cette dernière compagnie d'assurances" ; que les stipulations contractuelles de la police d'assurance conclue entre M. C... S... et la mutuelle des Motards n'organisent que la possibilité d'un recours subrogatoire contre le responsable du dommage, le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la Mutuelle des Motards de ses demandes dirigées contre la société Générali » ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « sur la demande reconventionnelle dirigée contre l'ARCM et son assureur : que l'Assurance Mutuelle des Motards sollicite la somme de 120 000 euros en remboursement de la somme due en exécution, selon elle, de la police d'assurances souscrite par Monsieur C... S... le 16 janvier 2012 (pièce n°1 de cet assureur) en arguant être subrogée dans les droits de la victime à raison d'une quittance signée le 12 mars 2015 à hauteur de 25 000 euros (sa pièce n°6) et des termes de l'arrêt du 2 mars 2017 (sa pièce n°13) ; sur ce, et par référence aux textes précités de la loi du 5 juillet 1985, l'article 9.8 des conditions générales de la convention d'assurances conclue entre Monsieur C... S... et l'ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS (pièce n°2 de cet assureur) stipule un recours subrogatoire contre tout responsable du sinistre à concurrence de l'indemnité payée ; qu'il en résulte, en premier lieu, que cet assureur ne dispose d'aucune action subrogatoire conventionnelle contre la compagnie GENERALI, seule l'ARCM ayant été déclarée responsable, pour partie de l'accident litigieux ; qu'il ne sera donc pas fait droit à la demande en paiement dirigée contre cette dernière compagnie d'assurances ; [ ] sur la demande de garantie au titre des condamnations prononcées par la cour d'appel de Douai : qu'ainsi que précédemment relevé, cette prétention sera rejetée en ce qu'elle est dirigée contre la compagnie GENERALI » ; 1°/ ALORS QUE les contrats d'assurance garantissant l'indemnisation des préjudices résultant d'une atteinte à la personne peuvent prévoir que l'assureur ayant versé une indemnité d'assurance à la victime dispose d'un recours subrogatoire contre le responsable du dommage ; que l'article L.211-25, 2nd alinéa, du code des assurances, permet dans cette hypothèse à l'assureur de la victime d'exercer directement son recours subrogatoire à l'encontre de l'assureur du tiers responsable; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le contrat d'assurance souscrit par la victime comprenait une clause prévoyant, à concurrence de l'indemnisation lui ayant été versée, la subrogation de son assureur dans ses droits et actions contre tout responsable du dommage (v. arrêt attaqué p. 7, dernier §) ; qu'après avoir relevé que cette clause ne visait textuellement que le « responsable du dommage », la cour d'appel a estimé que la Mutuelle des Motards ne disposait d'aucun recours à l'encontre de l'assureur du responsable (v. arrêt attaqué p. 8, §§ 2-3) ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L.211-25, 2nd alinéa, du code des assurances, ensemble l'article L.131-2, 2nd alinéa du même code; 2°/ ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE l'assureur qui bénéficie d'une subrogation conventionnelle dans les droits et actions de l'assuré qu'il a dédommagé à l'encontre de la personne tenue de réparer le dommage dispose de la plénitude des actions que son assuré aurait été admis à exercer; qu'il peut ainsi exercer l'action directe dont disposait la victime à l'encontre de l'assureur du tiers responsable; qu'en l'espèce, après avoir relevé que le contrat d'assurance souscrit par la victime comprenait une clause prévoyant la subrogation de son assureur dans ses droits et actions contre tout responsable du dommage (v. arrêt attaqué p. 7, dernier §), la cour d'appel a néanmoins estimé que la Mutuelle des Motards était mal fondée à agir à l'encontre de l'assureur du responsable du dommage ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1250, 1° du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article L. 124-3 du code des assurances. 3°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'assureur qui a payé une indemnité d'assurance dispose contre le responsable du dommage du droit d'invoquer la subrogation conventionnelle prévue par l'article 1250 du code civil dans les droits de son assuré; qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable l'action subrogatoire de la Mutuelle des Motards à l'encontre de l'assureur du tiers responsable, la cour d'appel a en substance estimé que les mentions de la clause subrogatoire figurant dans la police d'assurance ne satisfaisaient pas aux prescriptions des articles L.131-2 et L.211-25 du code des assurances (v. arrêt attaqué p. 7, § 5 et p. 8, § 5) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la quittance subrogative consentie par son assuré, dont se prévalait la Mutuelle des Motards (v. conclusions d'appel p. 7, §§2-3), n'emportait pas en toute hypothèse subrogation conventionnelle dans les droits de celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1250, 1° du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.
Il résulte de l'article 1250, 1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et de l'article L. 124-3 du code des assurances, que par l'effet de la subrogation conventionnelle prévue aux articles L. 131-2, alinéa 2, et L. 211-25 du même code, l'assureur de la victime d'un dommage résultant d'une atteinte à la personne est, pour le recouvrement des prestations indemnitaires ou de l'avance sur indemnité qu'il a versées à son assuré, investi de l'ensemble des droits et actions dont celle-ci disposait contre la personne tenue à réparation ou son assureur. Encourt en conséquence la censure l'arrêt qui, pour débouter l'assureur de la victime de sa demande dirigée contre l'assureur du responsable du dommage retient que les stipulations de la police prévoient uniquement la possibilité d'un recours subrogatoire contre le responsable du dommage et non contre son assureur, alors que par l'effet de la subrogation conventionnelle, l'assureur de la victime est investi de l'action directe contre l'assureur du responsable
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CIV. 2 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1275 F-P+B+I Pourvoi n° H 19-16.435 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La société Cybele Rent, société à responsabilité limitée, dont le siège est Anse des Cayes, Bungalow 3, 97133 Saint-Barthélemy, a formé le pourvoi n° H 19-16.435 contre l'arrêt rendu le 25 février 2019 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Pantaenius, société de droit allemand, dont le siège est 34 quai Charles Rey, 98000 Monaco (Monaco), 2°/ à la société Ace European Group Ltd, société de droit anglais prise en sa succursale française, dont le siège est 8 avenue de l'Arche, 92419 Courbevoie, 3°/ à la société Ace European Group Ltd, société de droit allemand, dont le siège est Lurgiallee 10, 60439 Francfort (Allemagne), défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Cybele Rent, de la SCP Richard, avocat de la société Pantaenius et des sociétés Ace European Group Ltd, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 25 février 2019), la société Cybele Rent, qui a pour objet social la vente, la location de tout matériel roulant homologué à usage routier, éco durable et naviguant, la création et la promotion d'événements commerciaux et culturels et toutes les activités de conseil en découlant, est propriétaire d'un voilier qui s'est échoué, le 14 octobre 2012, lors du passage de la tempête Rafael. 2. La société Cybele Rent a assigné la société Pantaenius en exécution du contrat « multirisques plaisance » qu'elle avait souscrit, le 6 décembre 2011. 3. La société Pantaenius, affirmant qu'elle avait agi en qualité de courtier pour le compte de la société d'assurance de droit anglais, Ace European Group Ltd, cette dernière est intervenue à l'instance ainsi que la société de droit allemand, également dénommée Ace European Group Ltd. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 4. La société Cybele Rent fait grief à l'arrêt de dire que son préjudice total était évalué à la somme de 60 013,31 euros, franchise déduite et de rejeter sa demande tendant à l'indemnisation de son préjudice commercial à hauteur de 327 500 euros alors « qu'en toute hypothèse, les clauses d'exclusion doivent être formelles et limitées, et doivent se référer à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées qui excluent toute interprétation, de façon à permettre à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie ; qu'en jugeant que la clause selon laquelle « sont exclus de l'assurance les pertes et dommages indirects (par exemple diminution de l'aptitude à la course, moins value, dépréciation) » était formelle et limitée, bien qu'elle ait donné à la notion de dommage indirect ainsi visée un sens qui n'est pas celui admis par la jurisprudence, la cour d'appel, qui a ainsi interprété cette notion visée par la clause, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 113-1 du code des assurances : 5. Il résulte de ce texte que les clauses d'exclusion de garantie ne peuvent être tenues pour formelles et limitées dès lors qu'elle doivent être interprétées. 6. Pour rejeter la demande de la société Cybele Rent en indemnisation de son préjudice commercial, l'arrêt énonce que l'article 6a des conditions conventionnelles applicables du contrat d'assurance prévoit expressément que « sont exclus de l'assurance les pertes et dommages indirects (par exemple diminution de l'aptitude à la course, moins-value, dépréciation) » et que cette clause suffisamment explicite s'entend comme excluant tout préjudice qui ne découle pas directement du fait générateur, telle précisément la perte de revenus tirée de l'arrêt de l'exploitation. 7. La décision ajoute qu'il n'y a pas lieu de considérer cette clause comme vidant la garantie de sa substance et que c'est à raison que la réparation du préjudice commercial réclamée a été écartée par le premier juge. 8. En statuant ainsi, alors que cette clause d'exclusion de garantie, en ce qu'elle ne se réfère pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées, n'est pas formelle et limitée et ne peut recevoir application en raison de son imprécision, rendant nécessaire son interprétation, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 9. La cassation partielle de l'arrêt, qui ne porte que sur le chef de décision rejetant la demande d'indemnisation du préjudice commercial allégué, entraîne par voie de conséquence celle du chef de décision fixant la somme allouée à la société Cybele Rent au titre de son entier préjudice. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le préjudice total de la société Cybele Rent est évalué à la somme de 60 013,31 euros, franchise déduite et rejette toute autre demande plus ample ou contraire, l'arrêt rendu le 25 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; Remet, sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ; Condamne la société Pantaenius, société de droit allemand, la société ACE European Group Ltd, société de droit anglais, et la société ACE European Group Ltd, société de droit allemand, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Pantaenius, la société de droit anglais ACE European Group Ltd et la société de droit allemand ACE European Group Ltd et les condamne à payer à la société Cybele Rent la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Cybele Rent. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le préjudice total de la société Cybele Rent était évalué à la somme de 60 013,31 euros, franchise déduite et d'AVOIR rejeté la demande de la société Cybele Rent tendant à l'indemnisation de son préjudice commercial à hauteur de 327 500 euros ; AUX MOTIFS PROPRES QUE la société Cybele Rent fait état d'un préjudice commercial à hauteur de la somme totale de 327 500 euros, son activité de location, vente de bateau de plaisance ayant été interrompue depuis 67 mois du fait du sinistre du 10 octobre 2012 alors qu'elle venait d'achever des travaux de rénovation à hauteur de 67 000 euros ; qu'elle conteste la validité de la clause tirée de l'article 6a de la police souscrite qui exclurait l'indemnisation des "dommages indirects" aux motifs que l'assureur n'établit pas la réunion des conditions de l'exclusion et que cette clause ne répond pas aux exigences de l'article L. 113-1 du code des assurances ; que les sociétés intimées concluent au rejet de cette demande, les conditions de l'assurance en cause excluant formellement l'indemnisation d'un tel préjudice indirect et la société Cybele Rent ayant également l'obligation contractuelle de prendre toutes mesures conservatoires pour éviter l'aggravation du sinistre, ce qu'elle n'a pas fait en favorisant au contraire l'immobilisation du voilier ; qu'elles rappellent que le préjudice commercial d'une entreprise qui a des charges ne peut se confondre avec la perte de recettes ; qu'il est exact que l'article 6a des conditions conventionnelles applicables, prévoit expressément que "sont exclus de l'assurance les pertes et dommages indirects (par exemple diminution de l'aptitude à la course, moins-value, dépréciation)" ; que cette clause suffisamment explicite s'entend comme excluant tout préjudice qui ne découle pas directement du fait générateur telle précisément la perte de revenus tirée de l'arrêt de l'exploitation ; qu'aussi, peu important les conditions alléguées du déroulement de l'activité touristique de la société Cybele Rent, il n'y a pas lieu de considérer cette clause comme vidant la garantie de sa substance et c'est à raison que la réparation du préjudice commercial réclamée par cette dernière a été écartée par le premier juge ; que contrairement à ce qui a été soutenu par la société Cybele Rent, le jugement querellé est parfaitement motivé et il a été considéré, sans contradiction de motifs, que la résiliation dont s'est prévalu – certes à tort – l'assureur, étant intervenue en août 2012, soit avant la réalisation du sinistre, elle n'a pu conduire à une inexécution fautive de celui-ci, combattue par la présente procédure ; ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE s'agissant du préjudice commercial, il ressort des conclusions de la société Cybele Rent qu'elle fonde sa demande sur l'article 1147 du code civil en arguant que l'assureur a commis une faute en refusant sa garantie alors que sa résiliation était irrégulière ce qui l'a empêchée de faire réparer son navire et lui a causé un préjudice qui ne cessera qu'avec la réparation du navire ; que toutefois, le refus d'indemnisation de l'assureur, qui s'est prévalu de la résiliation du contrat en août 2012, soit avant la réalisation du sinistre, et bien que cette résiliation n'est pas été considérée comme valable en raison du prélèvement de prime intervenu dans le délai de l'article R. 113-10 du code des assurances, ne constitue pas une inexécution fautive au sens de l'article 1147 du code civil ; que par conséquent, la société Cybele Rent ne peut demander réparation de son préjudice commercial sur ce fondement ; que par ailleurs, il apparait que le préjudice commercial allégué est un dommage indirect exclu de la garantie contractuelle en application de l'article 6 des Conditions Multirisques Plaisance Pantaenius 16.11001/EU/0111 ; que la demande tendant à la réparation d'un préjudice commercial sera donc rejetée, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les arguments des parties concernant la régularité de l'activité commerciale de la société Cybele Rent ; 1°) ALORS QUE les notions légales ou jurisprudentielles visées par les clauses d'exclusion de garantie doivent appliquées de façon stricte selon le sens qui leur est donné par la jurisprudence ; qu'en retenant que les pertes d'exploitation subies par la société Cybele Rent en raison de l'immobilisation de son navire constituaient un préjudice indirect au sens de la clause d'exclusion de garantie en cause, quand, selon le sens donné par la jurisprudence à cette notion, elles constituaient un préjudice direct, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, les clauses d'exclusion doivent être formelles et limitées, et doivent se référer à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées qui excluent toute interprétation, de façon à permettre à l'assuré de connaître exactement l'étendue de la garantie ; qu'en jugeant que la clause selon laquelle « sont exclus de l'assurance les pertes et dommages indirects (par exemple diminution de l'aptitude à la course, moinsvalue, dépréciation) » était formelle et limitée, bien qu'elle ait donné à la notion de de dommage indirect ainsi visée un sens qui n'est pas celui admis par la jurisprudence, la cour d'appel, qui a ainsi interprété cette notion visée par la clause, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances.
Il résulte de l'article L. 113-1 du code des assurances que les clauses d'exclusion de garantie ne peuvent être tenues pour formelles et limitées dès lors qu'elle doivent être interprétées. Une clause excluant de la garantie "les pertes et dommages indirects (par exemple diminution de l'aptitude à la course, moins-value, dépréciation)", en ce qu'elle ne se réfère pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées, n'est pas formelle et limitée et ne peut recevoir application en raison de son imprécision, rendant nécessaire son interprétation
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1276 F-P+B+I Pourvoi n° Y 18-10.190 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 1°/ M. N... R..., 2°/ Mme G... I..., tous deux domiciliés [...] , ont formé le pourvoi n° Y 18-10.190 contre l'arrêt rendu le 5 juillet 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 5), dans le litige les opposant à la société Euromaf assurance des ingénieurs et architectes européens, société anonyme, dont le siège est 189 boulevard Malesherbes, 75017 Paris, défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. R... et Mme I..., de la SCP Boulloche, avocat de la société Euromaf assurance des ingénieurs et architectes européens, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 juillet 2017), par contrat du 20 janvier 2008, Mme I... et M. R... ont confié la maîtrise d'oeuvre de travaux d'aménagement de leur appartement à la société Archidécoconseil-Adconseil (la société Adconseil), assurée auprès de la société Euromaf (l'assureur). 2. Le chantier n'ayant pas été mené à son terme, Mme I... et M. R..., après avoir obtenu en référé la désignation d'un expert et l'allocation d'une provision, ont assigné notamment la société Adconseil et l'assureur en indemnisation de leurs préjudices. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses première et cinquième branches, qui est recevable Enoncé du moyen 3. Mme I... et M. R... font grief à l'arrêt de dire que la société Euromaf, en sa qualité d'assureur de la société Adconseil, est fondée à opposer une non-garantie totale à la suite de la réduction de l'indemnité résultant de l'absence de toute déclaration de chantier et de tout paiement de prime, de rejeter leurs demandes dirigées contre la société Euromaf et de rappeler que l'arrêt vaut titre de restitution de la provision de 262 622,57 euros versée au titre de l'achèvement du chantier en exécution de l'ordonnance de référé du 26 mars 2010, alors : « 1°/ que si la police d'assurance prévoit, conformément à l'article L. 113-10 du code des assurances, qu'en cas d'inexactitude ou d'omission de déclaration par l'assuré, ce dernier sera sanctionné par une augmentation du montant de la prime, dans la limite de 50 %, cette sanction ne peut être cumulée avec celle prévue à l'article L. 113-9 du code des assurances ; qu'en l'espèce, les consorts R... I... faisaient valoir qu'il résultait des articles 5.12 et 8.21 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par la société Adconseil auprès de la société Euromaf que la sanction de l'absence de déclaration d'activité par l'assuré dans les délais prévus au contrat était l'application d'une prime majorée de 50%, ce qui excluait que l'assureur puisse se prévaloir de la règle de la réduction proportionnelle d'indemnité prévue à l'article L. 113-9 du code des assurances ; qu'en se bornant à retenir, pour dire que seules les sanctions de l'article L. 113-9 du code des assurances étaient applicables, que le contrat d'assurance visait ces dispositions à l'article 5.222 des conditions générales mais qu'en revanche, l'article L. 113-10 du code des assurances « n'[était] nullement visé par la police », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le contrat d'assurance, sans faire expressément référence à l'article L. 113-10 du code des assurances, ne prévoyait pas une sanction reprenant en substance le mécanisme prévu par ce texte, ce qui excluait que l'assureur puisse se prévaloir par ailleurs de la règle de la réduction proportionnelle d'indemnité, quand bien même celle-ci aurait été stipulée dans le contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-9 et L. 113-10 du code des assurances, ensemble l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction applicable en la cause, avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; nouvel article 1103 du code civil) ; 5°/ que pour mettre hors de cause la compagnie Euromaf, la cour d'appel a retenu que la société Adconseil n'avait pas déclaré le chantier litigieux et que la société EUROMAF « s'[était] engagée à garantir toutes les missions accomplies par son assurée sur les chantiers qu'elle dirigera en subordonnant sa garantie à une exigence, la déclaration par son assurée de tous ses chantiers relevant de la police au plus tard avant le 31 mars de l'année suivante (cf son article 5.12 et 8.115) », ce dont elle a déduit que c'était « en raison d'un défaut total de déclaration de chantier ne pouvant à ce titre justifier aucune prime que la société Euromaf a[vait] procédé à la résiliation de la police » ; qu'en statuant de la sorte, quand les articles 5.12 et 8.115 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par la société Adconseil se bornaient à imposer à l'assuré de déclarer son activité professionnelle dans certains délais, à défaut de quoi l'assureur pouvait, si l'absence de déclaration était constatée après un sinistre, réduire l'indemnité en proportion des primes payées par rapport aux primes qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés (article 5.222), et exiger le versement d'une prime majorée (article 8.115), la cour d'appel, qui n'a pas constaté l'existence dans le contrat d'assurance d'une clause prévoyant que la société Euromaf ne devait sa garantie qu'à la condition que la déclaration d'activité prévue à l'article 5.12 des conditions générales soit effectuée dans les délais fixés par la police, a méconnu les articles L. 113-8 et L. 113-9 du code des assurances, ensemble l'article 1134 du code civil (nouvel article 1103 du code civil). » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 4. La société Euromaf conteste la recevabilité de la première branche comme nouvelle et de la cinquième branche comme contraire à l'argumentation soutenue devant les juges du fond. 5. Au regard des conclusions d'appel, le moyen, pris en sa première branche, n'est pas nouveau et n'est pas contraire, en sa cinquième branche, à la thèse soutenue en appel. 6. Ces griefs sont donc recevables. Bien-fondé du moyen Vu les articles L. 113-9 et L. 113-10 du code des assurances et l'article 1134, devenu 1103, du code civil : 7. Il résulte des deux premiers de ces textes que lorsque l'application du second est stipulée dans un contrat d'assurance, elle est exclusive de l'application du premier. Aux termes du dernier, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. 8. Pour dire que l'assureur est fondé à opposer une non-garantie totale à la suite de la réduction de l'indemnité résultant de l'absence de toute déclaration de chantier et de tout paiement de prime, et débouter Mme I... et M. R... de leurs demandes dirigées contre lui, l'arrêt énonce que pour être applicables, les sanctions de l'article L. 113-9 du code des assurances ne doivent pas coexister dans la même police avec celles de l'article L. 113-10 du même code, ce qui est le cas en l'espèce puisque la police ne vise nullement ce dernier texte et fait expressément référence à l'article L. 113-9, lequel est, par conséquent, seul applicable. 9. L'arrêt ajoute que l'assureur s'est engagé à garantir toutes les missions accomplies par son assurée sur les chantiers qu'elle dirigerait en subordonnant sa garantie à une exigence : la déclaration par son assurée de tous ses chantiers relevant de la police au plus tard avant le 31 mars de l'année suivante (cf. ses articles 5.12 et 8.115). L'arrêt retient encore que la déclaration de chantier est en effet exigée pour permettre à l'assureur de déterminer l'assiette de la prime et que l'assurée n'ayant en l'espèce procédé à aucune déclaration de chantier ni payé aucune prime, l'indemnité doit être réduite en proportion du taux de la prime annuelle payée par rapport à celui de la prime qui aurait été due si la mission avait été déclarée, ce qui aboutit, par l'effet de la réduction proportionnelle prévue par l'article L. 113-9 du code des assurances, à un taux de garantie réduit à néant, c'est-à-dire à un défaut de garantie. 10. En se déterminant ainsi, sans constater l'existence, dans le contrat d'assurance, d'une clause prévoyant que l'assureur ne devait sa garantie qu'à la condition que la déclaration d'activités professionnelles prévue par l'article 5.12 des conditions générales soit effectuée dans les délais fixés par la police, et sans rechercher, comme elle y était invitée, si le contrat, sans faire expressément référence à l'article L. 113-10 du code des assurances, ne prévoyait pas une sanction reprenant en substance le mécanisme prévu par ce texte, ce qui aurait exclu que l'assureur puisse se prévaloir de la règle de la réduction proportionnelle d'indemnité prévue par l'article L. 113-9 du même code, quand bien même celle-ci était stipulée dans le contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la société Euromaf, en sa qualité d'assureur de la société Archidécoconseil-Adconseil, est fondée à opposer une non-garantie totale à la suite de la réduction de l'indemnité résultant de l'absence de toute déclaration de chantier et de tout paiement de prime, déboute Mme I... et M. R... de toutes leurs demandes dirigées contre la société Euromaf et rappelle que l'arrêt vaut titre de restitution pour la provision de 262 622,57 euros versée au titre de l'achèvement du chantier en exécution de l'ordonnance de référé du 26 mars 2010, l'arrêt rendu le 5 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société Euromaf aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Euromaf et la condamne à payer à Mme I... et M. R... la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard- Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour M. R... et Mme I... Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que la société EUROMAF, en sa qualité d'assureur de la société ARCHIDECOCONSEILADCONSEIL, était fondée à opposer une non garantie totale suite à la réduction de l'indemnité résultant de l'absence de toute déclaration de chantier et de tout paiement de prime, D'AVOIR rejeté les demandes des consorts R... I... dirigées contre la société EUROMAF, et D'AVOIR rappelé que l'arrêt valait titre de restitution pour la provision de 262.622,57 € versée au titre de l'achèvement du chantier en exécution de l'ordonnance de référé du 26 mars 2010 ; AUX MOTIFS QUE « II) Sur Les demandes formées par les consorts R... I... à l'encontre de la société EUROMAF recherchée en sa qualité d'assureur de la société ARCHIDECOCONSEIL-ADCONSEIL que pour exercer leur action directe à l'encontre de l'assureur de celle-ci, il incombe aux consorts R... I... d'établir la responsabilité de la société ARCHIDECOCONSEIL-ADCONSEIL ; que les consorts R... I... recherchent sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1147 du code civil ; qu'en effet, il ressort du rapport d'expertise que lors de la première réunion d'expertise du 30 octobre 2008, le chantier était manifestement abandonné avec des matériaux stockés sur place ; qu'aucune réception des travaux n'est intervenue suite à cet abandon du chantier de sorte que le litige ne relève effectivement pas de la garantie décennale de cette société ; que le rapport d'expertise tel qu'analysé par le jugement met clairement en évidence le comportement fautif de la société ARCHIDECOCONSEIL-ADCONSEIL, générateur des désordres ; que le jugement a ainsi déclaré celle-ci responsable de leur préjudice en vertu de l'article 1147 du code civil ; Qu'ils demandent en conséquence la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la garantie de la société EUROMAF en sa qualité d'assureur de la société ARCHIDECOCONSEIL-ADCONSEIL ; qu'à titre principal , la compagnie EUROMAF conteste devoir toute garantie à la société ADCONSEIL aux motifs : - que la société ARCHI DECO CONSEIL (ADCONSEIL), missionnée par contrat du 20 janvier 2008, ne lui a déclaré aucune activité professionnelle au titre de l'année 2007, ce qui l'a conduite pour ce motif à résilier sa police à effet au 28 juillet 2008 et qu'a fortiori, la société ne lui déclaré aucun chantier ou mission au titre de l'année 2008 , - que celle-ci ne lui a par conséquent payé aucune prime, si bien que la police a été résiliée à effet du 28 juillet 2008 , - que le chantier litigieux ne lui ayant pas été déclaré dans les formes prévues par le contrat d'assurance, elle est en droit d'opposer une position de non-garantie pour absence de déclaration du risque ; Que subsidiairement, la compagnie EU.ROMAF invoque la réduction proportionnelle prévue par l'article L113-9 du Code des assurances ; qu'elle conteste toute responsabilité au titre de l'article 1382 du code civil pour avoir délivré une attestation d'assurance à son assurée ; Qu'en réplique, les époux R... soutiennent au contraire : - A titre principal : - que la compagnie EUROMAF ne rapporte ni la preuve de cette absence de déclaration de chantier, ni le défaut de paiement de prime, - et qu'en tout état de cause, s'agissant d'une police à risques et primes variables, la déclaration périodique des chantiers n'est pas une condition de la garantie et que l'omission de déclaration est sanctionnée par l'article L113-10 du code des assurances et par la majoration de la prime de 50% ; - A titre subsidiaire, si la Cour retenait l'application de l'article L. 113-9 du code des assurances , la Cour de Cassation a jugé que "l'indemnité devait être réduite en proportion du taux de la prime annuelle payée par rapport à celui de la prime qui aurait été due si la mission avait été déclarée » en se référant aux arrêts suivants Cass, 2ème civ. 17 avril 2008, N° 07-13053 et Cass. Civ. Ière 24juin 2003, N° 98-1:3334 ; - Sur le défaut de déclaration de chantiers et le non-paiement de primes invoqué par la société EUROMAF que la société EUROMAF affirme que son assurée n'a effectué aucune déclaration de chantier en 2007 et que c'est pour cette raison qu'elle a résilié la police à effet du 28 juillet 2008 ; qu'elle ajoute que la société ADCONSEIL n'a pas fait davantage de déclaration de chantier en 2008 ; Qu'en réplique les consorts R... I... font valoir que par lettre du 5 juin 2008, la société EUROMAF a demandé à la société ADCONSEIL le règlement du "Solde de la prime correspondant à la déclaration précitée ou, faute de nous fournir cette déclaration, une prime forfaitaire de 6.193,61 € » ; que s'appuyant sur la formulation de cette lettre, ils affirment que la société AD CONSEIL s'est acquittée, au moins pour partie, du règlement de sa prime ; qu'ils en déduisent que la société EUROMAF ne rapporte donc ni la preuve de ce que la société AD CONSEIL n'aurait pas déclaré d'activité professionnelle au titre de l'année 2007, ni de ce que cette dernière n'aurait payé aucune prime ; Mais considérant que cette lettre, datée du 5 juin 2008 commence par "Vous n'avez toujours pas adressé votre déclaration d'activité professionnelle de l'année 2007. Or ce document aurait dû nous parvenir au plus tard pour le 31 mars 2008...."; Que la société EUROMAF y met ensuite son assurée en demeure : 1) d'adresser sa déclaration d'activité professionnelle de l'année 2007 dans les 10 jours suivant l'envoi de cette lettre 2) puis de lui régler dans les 30 jours suivant ce délai de 10 jours c'est à dire dans les 40 jours suivant l'envoi de la lettre le "solde de la prime correspondant à la déclaration précitée vu, faute de nous fournir cette déclaration, une prime forfaitaire de 6.193,61 €" ; qu'il résulte de la lecture de cette lettre qu'en réalité, dans la mesure où dès le début de ce courrier, la société EUROMAF y reproche clairement à son assurée de n'avoir effectué aucune déclaration d'activité professionnelle pour l'année 2007, ce "solde" de la prime évoqué ne pourrait se calculer que sur la déclaration de chantier de "rattrapage" que la société EUROMAF demande de lui faire parvenir dans les 10 jours suivants l'envoi de cette lettre du 5 juin 2008 ; Que cependant, au vu des 4 correspondances adressées par la société EUROMAF à la société ADCONSEIL entre juin et septembre 2008 la mettant en demeure de lui adresser sa déclaration d'activité professionnelle puis l'informant de la suspension et enfin de la résiliation de son contrat d'assurance en raison de la non-transmission de cette déclaration et du non-paiement des primes s'y rapportant, il apparaît que la société ADCONSEIL n'a déclaré de chantier ni pour l'année 2007 ni pour l'année 2008 de sorte qu'elle n'a pas déclaré le chantier litigieux ; Que dans ces conditions, la seule mention d'un "solde" de prime dans ce courrier du 5 juin 2008 ne peut suffire à rapporter la preuve d'une souscription d'une garantie pour ce chantier ; - Sur l'application de l'article L113-9 du code des assurances et non de l'article L11310 du même code que la société EUROMAF invoque sa non garantie et subsidiairement, la réduction proportionnelle prévue par l'article L113-9 alinéa 3 du code des assurances qui dispose que "Dans le cas où la constatation n'a lieu qu'après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés" ; Que pour leur part, les consorts R... I... invoquent l'article L113-10 du code des assurances ; Mais que la police souscrite par la société ADCONSEIL ne vise nulle part l'article L113-10 du code des assurances alors qu'elle fait expressément référence à l'article L.113-9 du même code ; Que pour être applicables, les sanctions de l'article L113-9 du code des assurances invoquées subsidiairement par la société EUROMAF ne doivent pas coexister dans la même police avec celles de l'article L113-10 du même code ce qui est le cas en l'espèce puisque ce dernier texte n'est nullement visé par la police ; Que par conséquent, dès lors que l'article L113-10 n'est pas du tout visé par la police qui ne fait expressément référence qu'à l'article L.113-9 de ce code en son article 5.222 des conditions générales de la police, seul l'article L113-9 du code des assurances est applicable ; que la police rappelle ainsi expressément les termes de ce dernier texte, à savoir que "Dans le cas où la constatation n'a lieu qu'après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés " ; que la société EUROMAF s'est engagée à garantir toutes les missions accomplies par son assurée sur les chantiers qu'elle dirigera en subordonnant sa garantie à une exigence, la déclaration par son assurée de tous ses chantiers relevant de la police au plus tard avant le 31 mars de l'année suivante (cf son article 5.12 et 8.115) ; que la déclaration de chantier est en effet exigée pour permettre à l'assureur de déterminer l'assiette de la prime ; que l'assurée n'ayant en l'espèce procédé à aucune déclaration de chantier ni payé aucune prime, l'indemnité doit être réduite en proportion du taux de la prime annuelle payée par rapport à celui de la prime qui aurait été due si la mission avait été déclarée, ce qui aboutit par l'effet de la réduction proportionnelle prévue par l'article L113-9 du code des assurances à un taux de garantie réduit à néant ce qui aboutit à un défaut de garantie (cf Cass civ 3° 05-05-2015 n°1411.758) ; Que c'est d'ailleurs en raison d'un défaut total de déclaration de chantier ne pouvant à ce titre justifier aucune prime que la société EUROMAF a procédé à la résiliation de la police - Sur l'attestation d'assurance délivrée par la société EUROMAF que les consorts R... I... produisent aux débats une attestation d'assurance non datée délivrée par la compagnie EUROMAF à la SARL ARCHI DECO CONSEIL ADCONSEIL (cf leur pièce n°39) ; que cependant, cette attestation stipule expressément qu'elle "ne peut engager la société d'assurance au-delà des conditions et limites du contrat auquel elle se réfère"; en définitive que les consorts R... I... seront déboutés comme mal fondés de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société EUROMAF recherchée en sa qualité d'assureur de la SARL ARCHI DECO CONSEIL ADCONSEIL ; Que le jugement sera infirmé en ce sens » ; 1°) ALORS QUE si la police d'assurance prévoit, conformément à l'article L. 113-10 du code des assurances, qu'en cas d'inexactitude ou d'omission de déclaration par l'assuré, ce dernier sera sanctionné par une augmentation du montant de la prime, dans la limite de 50%, cette sanction ne peut être cumulée avec celle prévue à l'article L. 113-9 du code des assurances ; qu'en l'espèce, les consorts R... I... faisaient valoir (leurs conclusions d'appel, p. 18-19) qu'il résultait des articles 5.12 et 8.21 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par la société AD CONSEIL auprès de la société EUROMAF que la sanction de l'absence de déclaration d'activité par l'assuré dans les délais prévus au contrat était l'application d'une prime majorée de 50%, ce qui excluait que l'assureur puisse se prévaloir de la règle de la réduction proportionnelle d'indemnité prévue à l'article L. 113-9 du code des assurances ; qu'en se bornant à retenir, pour dire que seules les sanctions de l'article L. 113-9 du code des assurances étaient applicables, que le contrat d'assurance visait ces dispositions à l'article 5.222 des conditions générales mais qu'en revanche, l'article L. 113-10 du code des assurances « n'[était] nullement visé par la police », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le contrat d'assurance, sans faire expressément référence à l'article L. 113-10 du code des assurances, ne prévoyait pas une sanction reprenant en substance le mécanisme prévu par ce texte, ce qui excluait que l'assureur puisse se prévaloir par ailleurs de la règle de la réduction proportionnelle d'indemnité, quand bien même celle-ci aurait été stipulée dans le contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-9 et L. 113-10 du code des assurances, ensemble l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction applicable en la cause, avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ; nouvel article 1103 du code civil) ; 2°) ALORS QUE l'application de la règle de la réduction proportionnelle d'indemnité ne peut aboutir à une absence de garantie que s'il est établi que l'assuré n'a versé aucune prime au titre de la période considérée ; qu'il résulte des propres énonciations de la cour d'appel que par courrier adressé à son assurée la société AD CONSEIL le 5 juin 2008, la société EUROMAF a mis cette dernière en demeure « 1) d'adresser sa déclaration d'activité professionnelle de l'année 2007 dans les 10 jours suivant l'envoi de cette lettre 2) puis de lui régler dans les 30 jours suivant ce délai de 10 jours c'est à dire dans les 40 jours suivant l'envoi de la lettre le solde de la prime correspondant à la déclaration précitée vu, faute de nous fournir cette déclaration, une prime forfaitaire de 6.193,61 €" »1 ; qu'en jugeant toutefois, après avoir retenu que la société AD CONSEIL n'avait pas déclaré de chantier au titre de l'année 2007, que la seule mention d'un « solde » 1 Soulignement ajouté. de prime dans ce courrier du 5 juin 2008 ne pouvait suffire à rapporter la preuve d'une souscription d'une garantie pour le chantier litigieux, et en déduire que la société AD CONSEIL n'avait réglé aucune prime au titre de l'année 2007 de sorte que l'application de la règle de la réduction proportionnelle de l'indemnité aboutissait à une non-garantie, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 113-9 du code des assurances ; 3°) ALORS QU'aux termes de la lettre qu'elle a adressée à la société AD CONSEIL le 5 juin 2008, la société EUROMAF écrivait à son assuré : « Vous n'avez toujours pas adressé votre déclaration d'activité professionnelle de l'année 2007. Or, ce document aurait dû nous parvenir, au plus tard, pour le 31 mars 2008. En conséquence, conformément aux stipulations de votre (vos) contrat(s) d'assurance, nous sommes contraints de vous mettre en demeure : 1 – d'adresser votre déclaration d'activité professionnelle de l'année 2007 dans les 10 jours suivant l'envoi de la présente lettre recommandée ; 2 – de régler dans les 30 jours suivant les 10 jours indiqués ci-dessus, le solde de la (des primes) correspondant à la déclaration précitée2 ou, faute de nous fournir cette déclaration, une prime forfaitaire de 6.193,61 € » ; qu'en jugeant qu'en dépit de la mention d'un « solde » de prime, la société AD CONSEIL n'avait réglé aucune prime au titre de l'année 2007 de sorte que l'application de la règle de la réduction proportionnelle de l'indemnité aboutissait à une non-garantie, la cour d'appel a dénaturé le courrier du 5 juin 2008, en violation de l'article 1134 du code civil (nouvel article 1292 du code civil), ensemble le principe selon lequel les juges du fond ne doivent pas dénaturer les documents de la cause ; 4°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la preuve de ce que l'assuré n'a versé aucune prime d'assurance et qu'en conséquence, l'application de la règle de réduction proportionnelle de l'indemnité aboutit à une non-garantie incombe à l'assureur qui se prévaut de cette règle ; qu'en se bornant à énoncer que « la seule mention d'un "solde" de prime dans ce courrier du 5 juin 2008 ne peut suffire à rapporter la preuve d'une souscription d'une garantie pour ce chantier », la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à établir que la société AD CONSEIL n'avait payé aucune prime à la société EUROMAF au titre de la période considérée, ce qu'il appartenait à cette dernière de prouver, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-9 du code des assurances, ensemble l'article 1315 du code civil (nouvel article 1353 du code civil) ; 2 Soulignement ajouté. 5°) ALORS, ENFIN, QUE pour mettre hors de cause la compagnie EUROMAF, la cour d'appel a retenu que la société AD CONSEIL n'avait pas déclaré le chantier litigieux (p. 9, 3ème et 4ème §), et que la société EUROMAF « s'[était] engagée à garantir toutes les missions accomplies par son assurée sur les chantiers qu'elle dirigera en subordonnant sa garantie à une exigence, la déclaration par son assurée de tous ses chantiers relevant de la police au plus tard avant le 31 mars de l'année suivante (cf son article 5.12 et 8.115) », ce dont elle a déduit que c'était « en raison d'un défaut total de déclaration de chantier ne pouvant à ce titre justifier aucune prime que la société EUROMAF a[vait] procédé à la résiliation de la police » ; qu'en statuant de la sorte, quand les article 5.12 et 8.115 des conditions générales de la police d'assurance souscrite par la société AD CONSEIL se bornaient à imposer à l'assuré de déclarer son activité professionnelle dans certains délais, à défaut de quoi l'assureur pouvait, si l'absence de déclaration était constatée après un sinistre, réduire l'indemnité en proportion des primes payées par rapport aux primes qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés (article 5.222), et exiger le versement d'une prime majorée (article 8.115), la cour d'appel, qui n'a pas constaté l'existence dans le contrat d'assurance d'une clause prévoyant que la société EUROMAF ne devait sa garantie qu'à la condition que la déclaration d'activité prévue à l'article 5.12 des conditions générales soit effectuée dans les délais fixés par la police, a méconnu les articles L. 113-8 et L. 113-9 du code des assurances, ensemble l'article 1134 du code civil (nouvel article 1103 du code civil).
Lorsque un contrat d'assurance prévoit de faire application des dispositions de l'article L. 113-10 du code des assurances, celle-ci exclut l'application de l'article L. 113-9 de ce même code, quand bien même cette dernière serait également prévue par le contrat. Dès lors, prive sa décision de base légale la cour d'appel qui retient qu'en l'absence de toute déclaration de chantier et de tout paiement de prime, l'assureur est fondé à opposer à son assuré une non-garantie totale par application de la réduction proportionnelle de l'indemnité prévue par l'article L. 113-9 du code des assurances et mentionnée au contrat, sans constater l'existence d'une clause prévoyant que l'assureur devait sa garantie à la condition que la déclaration de chantier soit effectuée dans les délais fixés par la police et sans rechercher, comme elle y était invitée, si le contrat, sans faire expressément référence à l'article L. 113-10 du code des assurances, ne prévoyait pas une sanction reprenant en substance le mécanisme prévu par ce texte, de nature à exclure que l'assureur puisse se prévaloir de la règle de réduction proportionnelle d'indemnité prévue par l'article L. 113-9 du même code
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1278 F-P+B+I Pourvoi n° X 18-22.563 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 1°/ M. S... Y..., domicilié [...] , 2°/ Mme F... Y..., épouse K..., domiciliée [...] , ont formé le pourvoi n° X 18-22.563 contre l'arrêt rendu le 22 mai 2018 par la cour d'appel de Nancy (1re chambre civile), dans le litige les opposant : 1°/ à Mme D... Y..., domiciliée [...] , (Italie), 2°/ à Mme G... Y..., domiciliée [...] , (Italie), 3°/ à Mme C... Y..., domiciliée [...] , (Italie), 4°/ à Mme O... Y..., domiciliée [...] , (Italie), défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. S... Y... et Mme F... Y..., de la SCP Ortscheidt, avocat de Mmes D..., G..., C... et O... Y..., et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 22 mai 2018), par avenant du 27 novembre 2008, A... Y..., qui avait souscrit auprès de la banque CIC Est trois contrats d'assurance-vie, a désigné comme bénéficiaires ses quatre soeurs, Mmes D..., G..., C... et O... Y.... 2. Il est décédé le 30 janvier 2011. 3. Le 29 avril 2011, un notaire a établi un procès-verbal de description et de dépôt d'un testament olographe de A... Y..., daté du 30 novembre 2010, dans lequel il était stipulé que son auteur instituait légataires universels ses deux enfants, M. S... Y... et Mme F... K... née Y..., et qu'il leur léguait tous ses biens, notamment le produit de ses contrats d'assurance-vie. 4. Après le dépôt d'un rapport d'expertise médicale se prononçant, tel qu'ordonné par le juge des référés, sur l'état de santé mentale du testateur à l'époque de la rédaction du document, Mmes D..., G..., C... et O... Y... ont assigné M. S... Y... et Mme F... Y..., aux fins de voir prononcer l'annulation du testament et de les voir condamner solidairement à leur payer une somme correspondant à celle perçue par eux en vertu de ce testament. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 6. M. S... Y... et Mme F... Y... font grief à l'arrêt de les condamner à payer à Mmes D..., G..., C... et O... Y... la somme de 305 561,84 euros, chacun à concurrence du capital perçu en vertu du testament annulé, avec intérêts au taux légal, alors « que le changement dé bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie n'est subordonné à aucune condition de forme ; qu'en retenant, pour juger que A... Y... n'avait pas manifesté la volonté de désigner comme bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie ses deux enfants au lieu et place de ses quatre soeurs et condamner en conséquence les premiers à payer aux secondes la somme de 305 561,84 euros perçue en vertu du testament annulé, que les lettres adressées aux différents établissements bancaires le 21 janvier 2011 pour modifier la clause bénéficiaire desdits contrats en faveur de M. S... Y... et Mme F... Y..., épouse K... étaient des lettres-types et n'étaient pas revêtues de la signature de l'intéressé, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi et a violé l'article L. 132-8 du code des assurances. » Réponse de la Cour 7. Après avoir retenu que le testament olographe du 30 novembre 2010 devait être annulé faute d'avoir été écrit en entier de la main du testateur, et relevé que M. S... Y... et Mme F... Y... faisaient également valoir qu'en tout état de cause, leur père avait écrit aux assureurs, le 21 janvier 2011, pour modifier en leur faveur la clause bénéficiaire de ses contrats d'assurance-vie, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a estimé, sans ajouter à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas, que les six courriers à en-tête de A... Y... adressés à différents établissements bancaires étaient des lettres-types non revêtues de la signature de l'intéressé et ne pouvaient être considérés comme la manifestation de la volonté du souscripteur de désigner comme bénéficiaires ses deux enfants aux lieu et place de ses quatre soeurs. 8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme F... Y... et M. S... Y... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme F... Y... et M. S... Y... et les condamne à payer à Mmes D..., G..., C... et O... Y... la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour M. S... Y..., Mme F... Y... M. S... Y... et Mme F... Y... épouse K... font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés à payer à Mme D... Y..., Mme G... Y..., Mme C... Y... et Mme O... Y... la somme de 305.561,84 euros, chacun à concurrence du capital perçu en vertu du testament annulé, avec intérêts au taux légal ; AUX MOTIFS QUE les appelants font encore valoir qu'en tout état de cause, leur père a écrit aux assureurs, le 21 janvier 2011, pour modifier en leur faveur la clause bénéficiaire de ses contrats d'assurance-vie ; que toutefois, les six courriers à en-tête de M. A... Y..., et adressés à cette date, à différents établissements bancaires, sont des lettres-types non revêtues de la signature de l'intéressé ; qu'ils ne peuvent donc être considérés comme la manifestation de la volonté du souscripteur des contrats de désigner comme bénéficiaires ses deux enfants aux lieu et place de ses quatre soeurs ; que le jugement sera encore confirmé en ce qu'il a condamné M. S... Y... et Mme F... K..., née Y..., à payer à Mme D... Y..., Mme G... Y..., Mme C... Y... et Mme O... Y... la somme de 305.561,84€, chacun à concurrence du capital perçu en vertu du testament annulé, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de sa date, soit le 2 mars 2017 ; 1°) ALORS QUE le changement de bénéficiaire d'un contrat d'assurancevie n'est subordonné à aucune condition de forme ; qu'en retenant, pour juger que A... Y... n'avait pas manifesté la volonté de désigner comme bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie ses deux enfants au lieu et place de ses quatre soeurs et condamner en conséquence les premiers à payer aux secondes la somme de 305.561,84 euros perçue en vertu du testament annulé, que les lettres adressées aux différents établissements bancaires le 21 janvier 2011 pour modifier la clause bénéficiaire desdits contrats en faveur de M. S... Y... et Mme F... Y... épouse K... étaient des lettres-types et n'étaient pas revêtues de la signature de l'intéressé, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi et a violé l'article L. 132-8 du code des assurances ; 2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner, fût-ce sommairement, les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; que dès lors, en énonçant, pour juger que A... Y... n'avait pas manifesté la volonté de désigner comme bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie ses deux enfants au lieu et place de ses quatre soeurs et condamner en conséquence les premiers à payer aux secondes la somme de 305.561,84 euros perçue en vertu du testament annulé, que les lettres adressées aux différents établissements bancaires le 21 janvier 2011 pour modifier la clause bénéficiaire desdits contrats en faveur de M. S... Y... et Mme F... Y... épouse K... étaient des lettres-types et n'étaient pas revêtues de la signature de l'intéressé, sans même examiner, fût-ce sommairement, les différentes attestations versées aux débats par ces derniers et de nature à établir la volonté de leur père de les rendre bénéficiaires des contrats d'assurance vie qu'il avait souscrits, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui sont soumis qu'une cour d'appel estime, sans ajouter à l'article L. 132-8 du code des assurances une condition qu'il ne prévoit pas, que des lettres-type portant l'en-tête du souscripteur d'une police d'assurance-vie et non revêtues de sa signature, adressées à des établissements bancaires, ne peuvent être considérées comme la manifestation de sa volonté de modifier la désignation des bénéficiaires du contrat
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1281 F-P+B+I Pourvoi n° U 19-11.501 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La société Mecelec composites, société anonyme, dont le siège est 3 rue des Condamines, 07300 Mauves, a formé le pourvoi n° U 19-11.501 contre l'arrêt rendu le 25 octobre 2018 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige l'opposant à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est 313 terrasses de l'Arche, 92727 Nanterre cedex, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Mecelec composites, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 25 octobre 2018), le 1er janvier 1994, la société Mecelec composites (la société Mecelec) a souscrit auprès de la société Axa France IARD (l'assureur) un contrat d'assurance de responsabilité civile d'une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction, couvrant notamment la faute inexcusable de l'employeur et garantissant à ce titre le remboursement des sommes dont ce dernier serait redevable à l'assurance maladie. 2. En novembre 2006, F... E..., salarié de la société Mecelec depuis 1972 et atteint d'un cancer du poumon qu'il imputait à son exposition à l'amiante, a été déclaré en maladie professionnelle. Il est décédé le 27 juin 2007. 3. Ses ayants droit ont saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale, lequel a, par jugement du 12 mars 2009, confirmé le 29 avril 2010, reconnu la faute inexcusable de l'employeur. 4. La caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme a adressé à la société Mecelec une réclamation au titre du recouvrement de sa créance constituée des rentes et indemnités versées à F... E... et à ses ayants droit. 5. L'assureur a refusé sa garantie à la société Mecelec en raison d'une clause introduite dans le contrat lors du renouvellement intervenu le 1er janvier 1998 et excluant de la garantie « les responsabilités découlant de la fabrication, de la commercialisation, de la mise en oeuvre de produits comportant de l'amiante », cette clause ayant été réécrite par un avenant du 1er juin 2003 excluant désormais les « dommages de toute nature causés par l'amiante ». 6. La société Mecelec a assigné l'assureur en garantie. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 7. La société Mecelec fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes dirigées contre l'assureur et de la condamner à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ; que la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ne contient aucune disposition quant à son éventuelle rétroactivité et ne saurait régir les effets passés d'un contrat en cours lors de son entrée en vigueur ; qu'il en résulte que, pour ces contrats, la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ne s'applique qu'aux sinistres, c'est-à-dire aux faits dommageables, postérieurs à son entrée en vigueur, et que, pour les sinistres antérieurs, la garantie de l'assureur est nécessairement déterminée par la date du fait dommageable ; que, dès lors, en estimant que devait s'appliquer, quelle que soit la date du fait générateur, le contrat souscrit auprès de la compagnie Axa France IARD dans la version de ses conditions générales et particulières en vigueur au jour de la réclamation des consorts E... fondée sur la faute inexcusable de la société Mecelec, c'est-à-dire de la reprise d'instance du 9 avril 2008, la cour d'appel a violé l'article 80 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, ainsi que l'article 2 du code civil et les articles 1131 et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. » Réponse de la Cour Vu l'article 2 du code civil et l'article 80, IV, de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 : 8. Selon le premier de ces textes, la loi ne produit effet que pour l'avenir. Il en résulte qu'en l'absence de disposition transitoire contraire prévue par le second, lorsque le sinistre en cause, caractérisé par le fait dommageable en raison duquel la responsabilité de l'assuré est recherchée, est survenu avant l'entrée en vigueur, le 3 novembre 2003, de la loi susvisée, les dispositions de son article 80, qui prévoient notamment que la garantie peut, à certaines conditions, être déclenchée par la réclamation, ne s'appliquent pas et la garantie est déclenchée par le fait dommageable. 9. Pour débouter la société Mecelec de ses demandes, l'arrêt, après avoir relevé que le contrat souscrit en 1994 était en base réclamation, retient que s'il était jugé antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 que le versement de primes durant la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait générateur survenu pendant cette période, toute clause contraire étant réputée non écrite, la loi nouvelle s'applique aux garanties prenant effet postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, du fait de la souscription d'un nouveau contrat ou de la reconduction de garanties des contrats en cours, de sorte que tous les contrats souscrits ou renouvelés postérieurement à cette date peuvent être en base réclamation dans les conditions nouvelles prescrites par les articles L. 124-5 et suivants du code des assurances. 10. L'arrêt ajoute que le contrat du 1er janvier 2003, complété par son avenant du 1er juin 2003 ayant exclu de la garantie « les dommages de toute nature causés par l'amiante », s'est trouvé renouvelé par tacite reconduction au 1er janvier 2004 et était à compter de cette date conforme aux dispositions légales en ce qu'il était en base réclamation, de même que tous les renouvellements ou avenants ultérieurs, et il en déduit que la société Mecelec n'est pas fondée à soutenir qu'il y aurait application rétroactive d'une exclusion de garantie alors que celle-ci est devenue, avec le consentement des deux parties, applicable à tout sinistre déclaré postérieurement à cette date quelle que soit la date du fait générateur. 11. L'arrêt retient enfin que selon les stipulations des conditions générales dans leur version applicable au 1er janvier 2004, la garantie s'applique aux dommages survenus postérieurement à la date de prise d'effet du contrat, le dommage s'entendant, s'agissant de la faute inexcusable de l'employeur, de l'engagement de la responsabilité de ce dernier au titre de cette faute, soit en l'espèce le 9 avril 2008, date de la reprise de l'instance par les ayants droit du salarié devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, et qu'en conséquence, c'est le contrat dans sa version en vigueur à cette dernière date qui fait la loi des parties. 12. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que la garantie « faute inexcusable de l'employeur » avait couvert les dommages causés par l'amiante jusqu'à l'introduction d'une clause excluant ceux-ci lors du renouvellement du contrat le 1er janvier 1998, ce dont il résultait que le fait dommageable, constitué par l'exposition du salarié à l'amiante, était susceptible de déclencher cette garantie s'il était survenu avant cette dernière date, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Condamne la société Axa France IARD aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Axa France IARD et la condamne à payer à la société Mecelec composites la somme de 3 000 euros ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dépositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Mecelec composites Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement déféré et, statuant à nouveau, d'AVOIR débouté la société Mécelec Composites de ses demandes dirigées contre la société Axa France Iard et d'AVOIR condamné celle-ci à verser à celle-là une somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS QU'il est constant que le contrat souscrit en 1994 est en base réclamation comme ses renouvellements et avenants successifs ; que s'il était jugé antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi 2003-706 du 1er août 2003 que le versement de primes durant la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait générateur survenu pendant cette période, toute clause contraire étant réputée non écrite, il sera relevé en tout état de cause que la loi nouvelle s'applique aux garanties prenant effet postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, du fait de la souscription d'un nouveau contrat ou de la reconduction de garantie des contrats en cours, soit après le 1er novembre 2003 (article 80 de la loi) ; qu'il en résulte que tous les contrats souscrits ou renouvelés postérieurement à cette date peuvent être en base réclamation dans les conditions nouvelles imposées par les articles L 124-5 et suivants du code des assurances, de sorte que le contrat du 1er janvier 2003, ensemble son avenant du 1er juin 2003, lequel excluait de la garantie « les dommages de toute nature causés par l'amiante », qui s'est trouvé renouvelé par tacite reconduction au 1er janvier 2004, était à compter de cette date conforme aux dispositions légales en ce qu'il était en base réclamation ; qu'il en est de même de tous les renouvellements ou avenants ultérieurs ; que les stipulations des conditions générales, qui figurent dans le Titre IV « Modalités d'application de la garantie » (paragraphe « Durée des garanties ») dans leur version applicable au 1er janvier 2004, précisent que la garantie s'applique aux dommages survenus postérieurement à la date de prise d'effet du contrat, le dommage s'entendant, s'agissant de la garantie faute inexcusable de l'employeur, de l'engagement de la responsabilité de ce dernier au titre de la faute inexcusable, soit en l'espèce comme cela résulte des énonciations du jugement du TASS, le 9 avril 2008, date de reprise de l'instance par les ayants droit du salarié en cause, faute de toute indication sur la date de l'assignation initiale point sur lequel au demeurant les parties ne sont pas contraires ; que c'est donc le contrat dans la version de ses conditions générales et particulières en vigueur à cette dernière date qui fait la loi des parties, soit la version 460 462 A (en pièce n°8 de l'assureur), laquelle précise en point 6.2 que la garantie est déclenchée par la réclamation et vise dans un chapitre consacré aux « Exclusions générales » en point 4.9 « les dommages de toute nature causés par l'amiante et par le plomb » ; que la société Mécelec fait cependant valoir que cette exclusion de garantie ne serait pas applicable à la garantie en litige, propre à la faute inexcusable de l'employeur, laquelle serait autonome, ce que paraît avoir retenu le premier juge ; que le chapitre II des conditions générales relatif aux dispositions particulières au titre desquelles figure la garantie pour faute inexcusable, définie ainsi qu'il suit « lorsque la garantie de l'assuré est engagée en qualité d'employeur en raison d'un accident du travail ou d'une maladie atteignant un de ses préposés et résultant de la faute inexcusable de l'assuré [...] l'assureur garantit le remboursement des sommes dont il est redevable à l'égard de la CPAM [..] » est précédé d'un paragraphe introductif, commun à l'ensemble des dispositions particulières, en caractères gras ainsi rédigé « Sous réserve de l'application des termes, limites et exclusions des présentes conditions générales auxquelles il n'est pas expressément dérogé, les dispositions particulières qui suivent font partie intégrante de la garantie », d'où il ressort clairement, que sauf dérogation expresse figurant aux dispositions particulières, les limites et exclusions de garanties qui font l'objet d'un chapitre distinct (chapitre IV) avaient vocation à s'appliquer ; que le point 4.9 des exclusions générales visent précisément « les dommages de toute nature causés par l'amiante » ; que la garantie « faute inexcusable » n'énonçant aucune dérogation expresse à cette exclusion de garantie générale, le moyen pris de l'autonomie de la garantie « faute inexcusable » qui la ferait échapper à l'exclusion de garantie sera rejeté ; que la société Mécelec soutient subsidiairement, dans cette hypothèse, que cette exclusion n'aurait pas vocation à s'appliquer dans la mesure où le dommage à raison duquel elle sollicite sa garantie n'a pas été causé par l'amiante mais par l'engagement de sa responsabilité au titre de la faute inexcusable ; qu'il résulte des décisions de justice produites que la responsabilité de la société Mécelec a bien été retenue pour faute inexcusable à raison de l'exposition de son salarié à l'amiante ; qu'il en ressort que le dommage personnel qu'elle invoque a bien été causé par l'amiante au sens du contrat, qu'il s'agisse du recours de la CPAM à son encontre du chef des rentes et indemnités servies de ce chef par la CPAM au salarié et à ses ayants-droit ou de la prise en charge des majorations de cotisations qui a résulté pour elle de la qualification de faute inexcusable qu'a caractérisé l'exposition de M. E... à l'amiante ; que la ociété Mécelec soutient encore qu'ayant versé des primes à son assureur à raison de la période au cours de laquelle son salarié s'est trouvé exposé à l'amiante, Axa France Iard ne saurait lui opposer cette clause d'exclusion de garantie, laquelle doit être regardée comme non écrite ; qu'il résulte des motifs initiaux de cette décision, qu'à compter du renouvellement du contrat intervenu postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 1er août 2003, il était loisible à l'assureur de proposer un contrat en base réclamation, que tel a été le cas des contrats renouvelés à compter du 1er janvier 2004, qui ont été acceptés par la société Mécelec, étant observé que depuis l'avenant aux conditions particulières du contrat, signé par elle, du 1er juin 2003, les dommages de toute nature causés par l'amiante étaient exclus, cette exclusion n'ayant jamais été remise en cause ultérieurement, et ayant même été consacrée dans les conditions générales de l'assureur à compter du 1er janvier 2008, de sorte qu'en l'état d'un contrat renouvelé qui constitue la loi des parties, le moyen tendant à faire regarder que ladite clause d'exclusion comme non écrite sera rejeté ; que la société Mécelec soutient enfin que la clause litigieuse est illicite au regard des exigences de l'article L 113-1 du code des assurances suivant lequel il ne peut avoir d'exclusion que formelle et limitée ; que le premier juge a surabondamment fait droit à ce moyen que la cour cependant écartera ; qu'il résulte en effet des pièces au débat que les conditions générales de la police de 2008 sont très claires, et exclusives d'interprétation, qu'il est précisé, s'agissant de la garantie particulière « faute inexcusable » que, sauf dérogation expresse, en l'espèce inexistante, les clauses d'exclusions générales lui sont applicables, que la clause d'exclusion litigieuse en point 4.9 du chapitre IV vise certes « les dommages de toute nature causés par l'amiante et le plomb » mais qu'elle est formelle en ce qu'elle est explicite et univoque (« les dommages de toute nature ») et limitée en ce qu'elle ne vise que l'amiante et le plomb ; qu'il ne sera relevé que surabondamment que la société Mécelec avait accepté depuis l'avenant signé le 1er juin 2003 l'exclusion de garantie dans de mêmes termes (« sont exclus de la garantie les dommages de toute nature causés par l'amiante ») alors portés en caractères majuscules et en gras en point 1 de l'avenant, ne pouvant à cette date et depuis lors ignorer que cette clause d'exclusion avait précisément pour objet de délivrer les assureurs, compte tenu de l'état des connaissances sur la dangerosité de l'amiante, de la couverture d'un risque alors identifié mais dont les effets peuvent se révéler à très long terme, lié aux conséquences d'une exposition, notamment des salariés, à l'amiante ; et que dès lors que le contrat a été renouvelé à compter du 1er janvier 2004 dans ces termes et en base réclamation, la société Mécelec n'est pas fondée à soutenir qu'il y aurait application rétroactive d'une exclusion de garantie, alors que celle-ci devenait, du consentement des deux parties, applicable à tout sinistre déclaré postérieurement à cette date quelle que soit la date du fait générateur ; qu'à ces motifs le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions et la société Mécelec déboutée de ses demandes ; 1°) ALORS QUE la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ; que la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ne contient aucune disposition quant à son éventuelle rétroactivité et ne saurait régir les garanties des contrats d'assurance de responsabilité expirées avant son entrée en vigueur, lesquels couvrent, par conséquence, tous les dommages qui trouvent leur origine dans un fait générateur survenu pendant la période d'effet de la garantie, cette garantie étant la contrepartie nécessaire du versement des primes ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté tout d'abord que M. F... E..., salarié de la société Mécelec depuis 1972 atteint d'un cancer du poumon imputé à l'exposition à l'amiante, avait été déclaré en maladie professionnelle en novembre 2006, ensuite, que la société Mécelec avait souscrit le 1er janvier 1994 auprès de la société Axa France Iard un contrat d'assurance de responsabilité civile d'une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction, couvrant notamment la faute inexcusable de l'employeur, et, enfin, qu'une clause excluant de la garantie « les responsabilités découlant de la fabrication, de la commercialisation, de la mise en oeuvre de produits comportant de l'amiante » avait été introduite lors du renouvellement intervenu le 1er janvier 1998 et réécrite par un avenant du 1er juin 2003, afin d'exclure de la garantie « les dommages de toute nature causé par l'amiante », ce dont il résultait que la garantie initiale des dommages causés par l'amiante était expirée avant l'entrée en vigueur de la loi du 1er août 2003 ; que dès lors, en estimant que devait s'appliquer, quelle que soit la date du fait générateur, le contrat souscrit auprès la compagnie Axa France Iard dans la version de ses conditions générales et particulières en vigueur au jour de la réclamation des consorts E... fondée sur la faute inexcusable de la société Mécelec, c'est-à-dire de la reprise d'instance du 9 avril 2008, et non le contrat dans sa version initiale de 1994, la cour d'appel a violé l'article 80 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, ainsi que l'article 2 du code civil et les articles 1131 et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ; que la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ne contient aucune disposition quant à son éventuelle rétroactivité et ne saurait régir les effets passés d'un contrat en cours lors de son entrée en vigueur ; qu'il en résulte que, pour ces contrats, la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ne s'applique qu'aux sinistres, c'est-à-dire aux faits dommageables, postérieurs à son entrée en vigueur, et que, pour les sinistres antérieurs, la garantie de l'assureur est nécessairement déterminée par la date du fait dommageable ; que, dès lors, en estimant que devait s'appliquer, quelle que soit la date du fait générateur, le contrat souscrit auprès la compagnie Axa France Iard dans la version de ses conditions générales et particulières en vigueur au jour de la réclamation des consorts E... fondée sur la faute inexcusable de la société Mécelec, c'est-à-dire de la reprise d'instance du 9 avril 2008, la cour d'appel a violé l'article 80 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, ainsi que l'article 2 du code civil et les articles 1131 et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 3°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, les exclusions de garantie, qui doivent être formelles et limitées, ne peuvent vider le contrat de l'essentiel de son objet ; que les juges du fond amenés à se prononcer sur le caractère formel et limité d'une clause d'exclusion, doivent préciser l'étendue de la garantie subsistant après application de l'ensemble des clauses d'exclusion contenues dans le contrat ; que, dès lors, en se bornant à relever que la clause excluant de la garantie de la faute inexcusable « les dommages de toute nature causés par l'amiante et le plomb » était formelle en ce qu'elle était explicite et univoque et limitée en ce qu'elle ne visait que l'amiante et le plomb, sans déterminer l'étendue de la garantie subsistant après application de l'exclusion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances.
Selon l'article 2 du code civil, la loi ne produit effet que pour l'avenir. Il en résulte qu'en l'absence de disposition transitoire contraire prévue par l'article 80, IV, de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, lorsque le sinistre en cause, caractérisé par le fait dommageable en raison duquel la responsabilité de l'assuré est recherchée, est survenu avant l'entrée en vigueur, le 3 novembre 2003, de la loi précitée, les dispositions de son article 80, qui prévoient notamment que la garantie peut, à certaines conditions, être déclenchée par la réclamation, ne s'appliquent pas et la garantie est déclenchée par le fait dommageable
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1283 F-P+B+I sur les 1er et 3ème moyens Pourvoi n° B 19-16.016 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 Mme O... R..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° B 19-16.016 contre l'arrêt rendu le 19 février 2019 par la cour d'appel de Grenoble (2e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Mutuelle assurances des instituteurs de France (Maif), dont le siège est 200 avenue Salvadore Allende, 79018 Niort cedex 9, 2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, dont le siège est 2 rue des Alliés, service contentieux, 38045 Grenoble cedex 09, défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme R..., de Me Le Prado, avocat de la société Mutuelle assurances des instituteurs de France, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1.Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 19 février 2019), le 4 mai 2012, Mme R..., qui marchait sur un trottoir, a été heurtée par un véhicule assuré auprès de la société Mutuelle assurances des instituteurs de France (l'assureur). 2.L'assureur a mandaté un expert, M. U..., lequel a déposé son rapport le 11 juillet 2013. 3.Par ordonnance du 28 mai 2014, le juge des référés a ordonné une expertise médicale, confiée à M. E... qui a déposé son rapport le 6 août 2015. 4.Les 25 et 30 mai 2016, Mme R... a assigné l'assureur en indemnisation de ses préjudices, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère (la caisse). Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 6. Mme R... fait grief à l'arrêt de chiffrer le préjudice subi au titre de ses pertes de gains professionnels et de l'incidence professionnelle à la seule somme de 124 527,39 euros et de juger qu'après déduction de la créance de l'organisme social il lui revient la seule somme de 50 051,67 euros et de la débouter du surplus de ses demandes, alors que « pour déterminer le capital représentatif de la rente servie par la CPAM à la victime, pour en déduire le montant de son préjudice, les juges du fond doivent faire application du barème figurant en annexe 1 de l'arrêté du 11 février 2015 modifiant l'arrêté du 27 décembre 2011 modifié relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en refusant de faire application de ce barème, la cour d'appel a violé les textes précités » ; Réponse de la Cour 7. Si l'article R. 376-1 du code de la sécurité sociale prévoit que les dépenses à rembourser aux caisses de sécurité sociale en application de l'article L. 376-1 peuvent faire l'objet d'une évaluation forfaitaire dans les conditions prévues par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, les modalités fixées par cet arrêté ne s'imposent pas au juge, qui reste libre de se référer au barème qu'il estime le plus adéquat. 8. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel, pour déterminer le capital représentatif des arrérages à échoir de la pension d'invalidité servie à la victime, qui devait être imputé sur l'indemnisation allouée, a fait application du même barème que celui qu'elle retenait pour capitaliser les pertes de gains professionnels futurs. 9. Le moyen n'est dès lors pas fondé. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 10. Mme R... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à l'évaluation du préjudice subi au titre de son déficit fonctionnel temporaire à la somme de 616 euros, alors qu' « une partie est recevable à formuler pour la première fois en cause d'appel une demande qui tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge et peut ajouter à celles-ci toutes les demande qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ; qu'en l'espèce, Mme R... expliquait qu'elle demandait l'augmentation du montant de l'indemnisation qui lui avait été accordée en première instance au titre du déficit fonctionnel temporaire, car elle y incluait désormais une demande de réparation de son « préjudice d'agrément temporaire » dont elle n'avait pas demandé réparation devant le tribunal ; qu'en déclarant cette demande, qui constituait le complément de ses demandes de première instance tendant à la réparation de ses préjudices poursuivait la même fin, irrecevable la cour d'appel a violé les articles 565 et 566 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 546, 564 et 565 du code de procédure civile : 11. Il résulte du premier de ces textes qu'une partie qui n'a pas obtenu totalement satisfaction en première instance est recevable à former appel. Il résulte des deuxième et troisième que sont recevables, comme n'étant pas nouvelles, les prétentions qui tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge. 12. Pour déclarer Mme R... recevable en son appel mais irrecevable à contester le poste de préjudice de déficit fonctionnel temporaire pour lequel elle avait entièrement obtenu gain de cause en première instance, et confirmer le jugement sur la somme de 506 euros allouée à ce titre, l'arrêt retient que devant le tribunal de grande instance, Mme R... sollicitait l'allocation d'une somme qui lui a été intégralement allouée par le jugement, qu'elle n'invoque ni erreur de calcul ni aggravation de ce chef de préjudice et qu'elle est dès lors dépourvue d'intérêt à demander la réformation du jugement. 13. En statuant ainsi, alors que la demande présentée en cause d'appel, qui tendait à la même fin d'indemnisation du préjudice résultant de l'accident que celle soumise au premier juge, et était dès lors recevable, la cour d'appel, qui a confondu les règles relatives à la recevabilité de l'appel et celles relatives à la recevabilité de la demande, a violé les textes susvisés. Et sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 14. Mme R... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de doublement des intérêts au taux légal, alors « que l'assureur est tenu de faire une offre définitive d'indemnisation à la victime dans les cinq mois qui suivent la date à laquelle il a été informé de la date de consolidation de son état ; que la contestation, par la victime, des conclusions de l'expertise qui a fixé la date de consolidation ne dispense pas l'assureur de son obligation ; qu'en se fondant sur la circonstance que Mme R... avait contesté les conclusions de l'expertise du Dr U... datée du 11 juillet 2013, qui avait fixé la date de consolidation de ses blessures au 4 mai 2013, pour juger que la date à laquelle l'assureur en avait eu connaissance n'avait pas fait courir le délai de 5 mois dont il disposait pour formuler une offre d'indemnisation définitive à la victime, la cour d'appel a violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances : 15. Il résulte de ces textes que lorsque l'offre définitive, qui doit comprendre tous les éléments indemnisables du préjudice, n'a pas été faite dans le délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de la consolidation, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit, au double du taux de l'intérêt légal, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. 16. Pour rejeter la demande de Mme R... de doublement du taux de l'intérêt légal, l'arrêt retient que si la consolidation avait été fixée au 4 mai 2013 par l'expert U... mandaté par l'assureur dans son rapport du 11 juillet 2013, Mme R... a contesté les éléments de ce rapport par lettre du 26 août 2013 adressée à l'assureur qui lui a proposé, à sa demande, de faire réaliser une seconde expertise amiable, ce à quoi la victime n'a pas donné suite et qui a conduit à la mise en oeuvre, en référé, d'une expertise judiciaire confiée à M. E..., lequel a déposé un rapport définitif le 6 août 2015, en fixant une date de consolidation de l'état de la victime différente de celle retenue par M. U.... 17. L'arrêt ajoute que dans ces conditions, le délai de cinq mois prévu par l'article L. 211-9 n'a commencé à courir que du jour où l'assureur a eu connaissance du rapport de M. E... et que l'offre définitive adressée par l'assureur le 28 septembre 2015 l'a été dans ce délai et n'était pas manifestement insuffisante ni dérisoire. 18. En statuant ainsi, alors que la circonstance que la victime avait contesté la date de consolidation retenue par l'expert ne dispensait pas l'assureur de faire une offre d'indemnisation, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare Mme R... recevable en son appel mais irrecevable à contester, devant la cour, le poste de préjudice de déficit fonctionnel temporaire pour lequel elle a entièrement obtenu gain de cause en première instance, en ce qu'il confirme le jugement qui a fixé à 506 euros le préjudice de Mme R... au titre du déficit fonctionnel temporaire, en ce qu'il déboute Mme R... de sa demande au titre du doublement des intérêts au taux légal et en ce qu'il condamne la société Maif à payer à Mme R... la somme totale de 64 157,67 euros en réparation de ses préjudices sous déduction, le cas échéant, des provisions déjà versées, l'arrêt rendu le 19 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ; Condamne la société Maif aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Maif et la condamne à payer à Mme R... une somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire empêché, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme R... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR chiffré le préjudice subi par Mme R... au titre de ses pertes de gains professionnels et de l'incidence professionnelle, à la seule somme de 124 527,39 euros et d'AVOIR jugé qu'après déduction de la créance de l'organisme social il lui revenait à ce titre la seule somme de 50 051,67 euros et de l'AVOIR déboutée du surplus de ses demandes ; AUX MOTIFS QUE sur les postes de préjudices patrimoniaux permanents ; Mme O... R... réclame à ce titre l'allocation d'une somme totale de 166 911,72 euros se décomposant comme suit : Perte totale de gains professionnels futurs de 33% de ses revenus moyens durant ses dernières années d'exercice professionnel, dont avant son licenciement : 18 229 euros annuels capitalisés à titre viager outre les arrérages échus = 171 221,17 euros somme arrondie à 180 000 euros pour tenir compte de l'incidence professionnelle (dévalorisation sur le marché de l'emploi) ce qui correspond à une demande de 8 777,83 euros au titre de la seule incidence professionnelle, sous déduction du différentiel annuel de la pension d'invalidité capitalisé à hauteur de 13 088,28 euros ; [ ] Qu'au vu des éléments du dossier, en particulier des éléments d'analyse contenus dans le rapport d'expertise médicale, aux termes desquelles « l'accident a eu un rôle majorant des phénomènes douloureux qui préexistaient » et fixant un taux de DFP de 4% au titre de « l'accentuation des troubles psychologiques qui sont intriqués avec l'amplification des phénomènes douloureux » nonobstant les conclusions de ce rapport sur l'absence d'incidence professionnelle certain, c'est par des motifs pertinents que le tribunal a retenu que l'accident avait causé à la victime un préjudice professionnel illustré par son placement par la CPAM en invalidité de catégorie 2 ; Compte tenu de l'âge de la victime soit 57 ans à la date de l'accident, du fait qu'elle était licenciée économique depuis 2 ans, et qu'elle était alors en invalidité catégorie 1 ce qui réduisait déjà sa capacité de travail, il sera considéré que l'accident lui a fait perdre une chance de retrouver un emploi dans la proportion de 33% qu'elle invoque à ce titre ; Cela conduit à indemniser ce préjudice de la façon suivante : 13 671,50 euros (moyenne des gains des 4 dernières années avant l'accident au vu de sa pièce n°90 – relevé de carrière de l'assurance retraite en date du 10/12/2015-) x 33% = 4 511,60 euros annuels. - perte déjà subie à la date du présent arrêt : 4 511,60 euros x 6,80 années = 30 678,88 euros, - capitalisation de la perte à compter du présent arrêt : 4 511,60 euros x 19,915 (prix de l'euro de rente viagère pour une femme de 64 ans selon le barème de la Gazette du Palais 2016) = 89 849,52 euros Soit un total de 120 527,39 euros Outre cette somme, peut être ajoutée une indemnité de 4 000 euros au titre de l'incidence professionnelle tenant compte de la dévalorisation consécutive à cette perte de chance, le jugement étant donc confirmé sur ce point ; Sur ces indemnités doit s'imputer le différentiel entre la pension d'invalidité perçue avant l'accident et celle perçue à partir d'octobre 2013 après le passage de la victime en catégorie 2 suit à l'accident, selon le principe énoncé par le tribunal dans ses motifs et admis par les deux parties ; Les parties s'accordent sur un différentiel annuel de 2 809,85 euros à prendre en compte entre les deux montants de pension au vu des pièces justificatives produites. Les sommes à imputer doivent donc être calculées ainsi qu'il suit : - arrérages échus à la date du présent arrêt soit à compter du 1er décembre 2013 (cf. notification de pension d'invalidité avec révision du 7/10/2016 notifiant le changement de catégorie à compter du 01/12)= 2 809,85 euros x 5 ans et 2 mois = 14 517,56 euros, - arrérages à échoir capitalisés selon le même euro de rente que celui retenu pour la capitalisation des pertes ci-dessus soit 19,915 x 2 809,85 euros = 55 958,16 euros, D'où un solde à revenir à la victime de 50 051,67 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs ; 1°) ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en jugeant que la « moyenne des gains des 4 dernières années avant l'accident au vu de sa pièce n°90 – relevé de carrière de l'assurance retraite en date du 10/12/2015 » s'élève à 13 671,50 euros (arrêt p. 8, al. 1er), tandis que, selon ce document, la moyenne des gains des 4 dernières années avant l'accident s'élève à 17 318 euros, la cour d'appel dénaturé la pièce n°90 - relevé de carrière de l'assurance retraite en date du 10 décembre 2015- produite par Mme R... sur laquelle elle énonçait expressément se fonder et a violé le principe susvisé ; 2°) ALORS QUE pour déterminer le capital représentatif de la rente servie par la CPAM à la victime, pour en déduire le montant de son préjudice, les juges du fond doivent faire application du barème figurant en annexe 1 de l'arrêté du 11 février 2015 modifiant l'arrêté du 27 décembre 2011 modifié relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en refusant de faire application de ce barème, la cour d'appel a violé les textes précités ; 3°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que les juges du fond ne peuvent ainsi accorder à une victime une indemnisation inférieure à celle offerte par la personne tenue à réparation ; que la MAIF faisait valoir qu'il convenait de déduire du préjudice de la victime, au titre du « différentiel entre la rente perçue avant l'accident et la rente perçue après [la somme de] 13 655,87 euros » (conclusions récapitulatives de la MAIF, p. 14, al. 4 et 5) ; qu'en jugeant qu'il convenait de déduire au titre de ce différentiel la somme de 55 958,16 euros, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme R... de sa demande tendant à l'évaluation du préjudice qu'elle a subi au titre de son déficit fonctionnel temporaire à la somme de 616 euros ; AUX MOTIFS QUE sur le déficit fonctionnel temporaire ; devant le tribunal de grande instance, Mme O... R... sollicitait l'allocation à ce titre d'une somme de 506 euros qu'elle s'est vue intégralement allouer par le jugement déféré. Dès lors, elle est dépourvue d'intérêt à demander la réformation du jugement concernant ce chef de préjudice alors même qu'elle n'invoque ni erreur de calcul de la somme initialement réclamée, ni aggravation de ce chef de préjudice depuis le jugement frappé d'appel. Sa demande de réformation et d'augmentation de la somme allouée de ce chef serait donc déclarée irrecevable ; 1°) ALORS QUE les parties peuvent ajouter aux demandes soumises au premier juge toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément si ces prétentions ne tendent pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ; qu'en jugeant Mme R... irrecevable à augmenter en cause d'appel le montant de l'indemnisation qu'elle sollicitait au titre du déficit fonctionnel temporaire au motif qu'elle aurait obtenu gain de cause en première instance et serait, dès lors, dépourvue « d'intérêt à demander la réformation du jugement concernant ce chef de préjudice alors même qu'elle n'invoque ni erreur de calcul de la somme initialement réclamée, ni aggravation de ce chef de préjudice depuis le jugement frappé d'appel » (arrêt, p.8, pénultième al.), la cour d'appel a violé les articles 561, 565 et 566 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'une partie est à recevable à formuler pour la première fois en cause d'appel une demande qui tend aux fins que celles soumises au premier juge et peut ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ; qu'en l'espèce, Mme R... expliquait qu'elle demandait l'augmentation du montant de l'indemnisation qui lui avait été accordée en première instance au titre du déficit fonctionnel temporaire, car elle y incluait désormais une demande de réparation de son « préjudice d'agrément temporaire » dont elle n'avait pas demandé réparation devant le tribunal (conclusions de Mme R..., p. 10, al. 5) ; qu'en déclarant cette demande, qui constituait le complément de ses demandes de première instance tendant à la réparation de ses préjudices poursuivait la même fin, irrecevable la cour d'appel a violé les articles 565 et 566 du code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme R... de sa demande de doublement des intérêts au taux légal ; AUX MOTIFS QU'en application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur a l'obligation d'adresser une offre d'indemnisation à la victime dans les huit mois suivant l'accident, cette offre pouvant avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de la victime ; que dans ce cas, l'offre d'indemnisation définitive doit être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation ; En l'espèce, si la consolidation avait été fixée au 4 mai 2013 par l'expert U... mandaté par la MAIF dans son rapport du 11 juillet 2013, le tribunal a justement relevé que Mme R... avait contesté les éléments de ce rapport par lettre du 26 août 2013 adressée à l'assureur qui lui avait proposé, à sa demande, de mettre en oeuvre une seconde expertise amiable avec un médecin arbitre, ce à quoi la victime n'avait pas donné suite, ce qui avait conduit à la mise en oeuvre, en référé, d'une expertise judiciaire confiée au docteur E... qui a déposé un rapport définitif le 6 août 2015, en fixant la consolidation de l'état de la victime a une autre date que le Dr U... ; C'est donc à bon droit que le tribunal a considéré, dans ses conditions, que le délai de cinq mois de l'article L. 211-9 in fine n'avait commencé à courir que du jour où l'assureur avait eu connaissance du rapport du docteur E.... Dès lors, l'offre définitive d'indemnisation adressée par la MAIF le 28 septembre 2015 l'a été dans ce délai et qu'elle n'était pas manifestement insuffisante ou dérisoire en l'état des éléments que possédait alors l'assureur, en particulier le rapport d'expertise judiciaire dans lequel l'expert concluait notamment à une incidence professionnelle non établie ou à défaut minime. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande au titre du double du taux d'intérêt ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE dès lors que par courrier du 26 août 2013, Mme R... a contesté les conclusions du rapport du Dr U... déposé le 11 juillet 2013 et qu'à cette date, la MAIF avait déjà versé deux provisions pour un total de 4 000 euros en l'état des éléments médicaux dont elle disposait, l'assureur n'a pas méconnu l'obligation fixée par l'article L. 211-9 du code des assurances, étant observé qu'une offre indemnitaire définitive a, ensuite, été faite dans le délai de cinq mois suivant le dépôt du rapport d'expertise judiciaire qui fixe une autre date de consolidation que celle retenue par l'expert amiable ; 1°) ALORS QUE le fait, pour l'assureur, de verser une provision à la victime ne le dispense pas de lui faire une offre d'indemnisation envisageant tous les éléments indemnisables du préjudice ; qu'en se fondant sur la circonstance que l'assureur « avait [ ] versé deux provisions pour un total de 4 000 euros en l'état des éléments médicaux dont elle disposait » (jugement p. 6, pénultième al.), pour débouter Mme R... de sa demande tendant à la condamnation de l'assureur à lui verser des intérêts au double du taux de l'intérêt légal, la cour d'appel a violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances ; 2°) ALORS QUE l'assureur est tenu de faire une offre définitive d'indemnisation à la victime dans les cinq mois qui suivent la date à laquelle il a été informé de la date de consolidation de son état ; que la contestation, par la victime, des conclusions de l'expertise qui a fixé la date de consolidation ne dispense pas l'assureur de son obligation ; qu'en se fondant sur la circonstance que Mme R... avait contesté les conclusions de l'expertise du Dr U... datée du 11 juillet 2013, qui avait fixé la date de consolidation de ses blessures au 4 mai 2013, pour juger que la date à laquelle l'assureur en avait eu connaissance n'avait pas fait courir le délai de 5 mois dont il disposait pour formuler une offre d'indemnisation définitive à la victime, la cour d'appel a violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances.
Si l'article R. 376-1 du code de la sécurité sociale prévoit que les dépenses à rembourser aux caisses de sécurité sociale en application de l'article L. 376-1 peuvent faire l'objet d'une évaluation forfaitaire dans les conditions prévues par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, les modalités fixées par cet arrêté ne s'imposent pas au juge, qui reste libre de se référer au barème qu'il estime le plus adéquat
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CIV. 2 FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1286 F-P+B+I Pourvoi n° E 19-19.676 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 1°/ la société Prudence créole, société anonyme, dont le siège est 32 rue Alexis de Villeneuve, 97400 Saint-Denis, 2°/ M. S... U..., 3°/ Mme K... O..., épouse U..., domiciliés [...] , ont formé le pourvoi n° E 19-19.676 contre l'arrêt rendu le 26 avril 2019 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre civile TGI), dans le litige les opposant à M. M... X..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guého, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Prudence créole et de M. et Mme U..., de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. X..., et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Guého, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 26 avril 2019), le 20 décembre 2007, M. X..., alors âgé de onze ans, a rendu visite, avec sa mère, à M. et Mme U..., au domicile desquels il a trouvé un pistolet gomme-cogne et en le manipulant, s'est blessé grièvement à l'oeil gauche. 2. Après avoir obtenu en référé une expertise, Mme E..., agissant en qualité de représentante légale de son fils M... X..., a assigné M. et Mme U... et leur assureur, la société Prudence créole, en indemnisation des préjudices subis. M. X..., devenu majeur, a relevé appel du jugement rendu. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. M. et Mme U... et la société Prudence créole font grief à l'arrêt de déclarer les deux premiers responsables de l'entier dommage subi par M. X... et de les condamner in solidum avec la troisième à payer à celui-ci les sommes de 700 euros et 1 067,50 euros en réparation du préjudice résultant du déficit fonctionnel temporaire, 9 000 euros au titre des souffrances endurées, 50 000 euros en réparation du préjudice résultant du déficit fonctionnel permanent, 3 000 euros en réparation du préjudice d'agrément et 5 000 euros en réparation du préjudice esthétique, alors « que la responsabilité du fait des choses prévue par l'article 1384 alinéa 1er du code civil incombe à celui qui en était le gardien au moment où le dommage a été causé ; que le gardien de la chose est celui qui, d'un point de vue strictement matériel, exerçait sur celle-ci les pouvoirs d'usage de direction et de contrôle au moment où le dommage s'est réalisé ; que pour juger que les époux U..., propriétaires de l'arme manipulé par le jeune M... X..., étaient responsables du dommage subi par cet enfant sur le fondement de la responsabilité du fait des choses, la cour d'appel a retenu que les époux U... avaient conservé la garde de l'arme avec laquelle l'enfant s'était blessé et qu'aucun transfert de garde n'était intervenu au profit de M. X... ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de ses propres constatations que M. X... s'était introduit sans autorisation dans le sous-sol des époux U..., qu'il s'y était rendu seul, qu'il s'était emparé à leur insu de l'arme et des munitions qui y étaient entreposées, qu'il en avait acquis l'usage, et qu'il s'était blessé lui-même sous l'effet de ses manipulations, ce dont il résultait nécessairement que M. X... avait acquis l'usage, la direction et le contrôle de l'arme à l'origine du dommage et qu'il en était l'unique gardien au moment où le dommage avait été causé, la cour d'appel a violé l'article 1384 alinéa 1er du code civil dans sa rédaction applicable à l'époque des faits. » Réponse de la Cour 5. Après avoir relevé que M... X... s'était rendu dans le sous-sol du domicile des époux U... et s'était blessé accidentellement en manipulant l'arme s'y trouvant, l'arrêt retient que les conditions dans lesquelles l'arme était entreposée ont permis son appréhension matérielle par l'enfant, quand bien même ce dernier n'aurait pas reçu l'autorisation de se rendre en ce lieu, et alors qu'il n'est pas soutenu qu'il lui avait été interdit d'y aller. L'arrêt ajoute qu'à supposer que l'enfant ait procédé lui-même au chargement de l'arme, cela implique nécessairement la présence d'une munition à proximité. 6. De ses constatations et énonciations, faisant ressortir que l'enfant, âgé de onze ans, ne pouvait être considéré comme ayant acquis les pouvoirs de direction et de contrôle sur l'arme dont il avait fait usage, la cour d'appel a pu déduire que la preuve du transfert de garde invoqué par M. et Mme U... n'était pas rapportée. 7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme U... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme U... et les condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Prudence créole et M. et Mme U.... Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré Monsieur S... U... et Madame K... U... responsables de l'entier dommage subi par Monsieur M... X... et de les AVOIR condamnés in solidum avec leur assureur la SA Prudence Créole à payer à celui-ci les sommes de 700 euros et 1.067,50 euros en réparation du préjudice résultant du déficit fonctionnel temporaire, 9.000 euros au titre des souffrances endurées, 50.000 euros en réparation du préjudice résultant du déficit fonctionnel permanent, 3.000 euros en réparation du préjudice d'agrément et 5.000 euros en réparation du préjudice esthétique. AUX MOTIFS QUE : « Le 20 décembre 2007, M... X... alors âgé de 11 ans, se trouvait en visite avec sa mère B... E..., au domicile des consorts U..., où il trouvait un pistolet gomme-cogne et en le manipulant, se blessait grièvement à l'oeil gauche. Il devait perdre la vision de cet oeil » ; ET QUE : « M... X... fonde sa demande de condamnation sur l'article 1242 du code civil (ancien article 1384 alinéa 1er) qui pose le principe de la responsabilité du dommage causé par le fait des choses que l'on a sous sa garde. En premier lieu, la mise en oeuvre de cette responsabilité suppose rapportée la preuve que la chose a été l'instrument du dommage, et en l'espèce, il ne peut être sérieusement contesté que le dommage a été causé par le gomme cogne appartenant aux époux U..., quand bien même celui-ci a été manipulé, la loi ne distinguant pas suivant que la chose a été ou non mise en mouvement par la main de l'homme. En second lieu, la responsabilité du dommage causé par une chose est liée à l'usage qui en est fait, ainsi qu'aux pouvoirs de surveillance et de contrôle exercés sur elle, qui en caractérisent la garde, de sorte que s'il existe une présomption de garde pesant sur le propriétaire, il est admis qu'un transfert de garde peut intervenir. En l'espèce, c'est en manipulant l'arme se trouvant dans le sous-sol du domicile des époux U..., où le jeune M... X... s'est rendu, qu'il s'est blessé accidentellement. Ainsi d'une part, les conditions dans lesquelles l'arme était entreposée ont permis son appréhension matérielle par l'enfant, quand bien même l'enfant n'aurait pas reçu l'autorisation de se rendre au sous-sol, alors de surcroît qu'il n'est pas soutenu qu'il lui avait été interdit d'y aller. D'autre part et sans que cela soit établi, il est indiqué que l'enfant a procédé lui-même au chargement de l'arme, ce qui implique nécessairement la présence d'une munition à proximité. Au vu de ces constatations, il ne peut être retenu que le transfert de la garde de l'arme est intervenu, les époux U... ayant conservé sur celle-ci un pouvoir de surveillance et de contrôle, le seul usage étant insuffisant et ne valant pas transfert de garde. Les époux U... invoquent un transfert de garde qui n'est pas intervenu, à l'exclusion de toute faute de la victime ayant contribué au dommage, susceptible de les exonérer au moins pour partie de leur responsabilité. Ils seront dans ces conditions déclarés responsables de l'entier dommage subi et condamnés in solidum, avec la garantie de leur assureur La Prudence Créole, à le réparer. Le jugement sera en conséquence infirmé » ; 1°) ALORS QUE la responsabilité du fait des chose prévue par l'article 1384 alinéa 1er du code civil incombe à celui qui en était le gardien au moment où le dommage a été causé ; que le gardien de la chose est celui qui, d'un point de vue strictement matériel, exerçait sur celle-ci les pouvoirs d'usage de direction et de contrôle au moment où le dommage s'est réalisé (Cass. ch. réunies, 2 déc. 1941, bull. 292, p. 523) ; que pour juger que les époux U..., propriétaires de l'arme manipulé par le jeune M... X..., étaient responsables du dommage subi par cet enfant sur le fondement de la responsabilité du fait des choses, la Cour d'appel a retenu que les époux U... avaient conservé la garde de l'arme avec laquelle l'enfant s'était blessé et qu'aucun transfert de garde n'était intervenu au profit de M... X... ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de ses propres constatations que M... X... s'était introduit sans autorisation dans le sous-sol des époux U..., qu'il s'y était rendu seul, qu'il s'était emparé à leur insu de l'arme et des munitions qui y étaient entreposées, qu'il en avait acquis l'usage, et qu'il s'était blessé lui-même sous l'effet de ses manipulations (arrêt, p.2, §1, 4, §1, p. 4, §3), ce dont il résultait nécessairement que Monsieur M... X... avait acquis l'usage, la direction et le contrôle de l'arme à l'origine du dommage et qu'il en était l'unique gardien au moment où le dommage avait été causé, la Cour d'appel a violé l'article 1384 alinéa 1er du code civil dans sa rédaction applicable à l'époque des faits ; 2°) ALORS en toute hypothèse QUE les co-gardiens d'une chose sont coresponsables des dommages causés par celle-ci ; qu'en s'abstenant de rechercher si, du fait de son appréhension matérielle de l'arme et de ses munitions à l'insu des époux U..., M... X... n'était pas à tout le moins devenu le cogardien de cette arme et si, dans ces conditions, un partage de responsabilité ne devait pas s'opérer, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 1er du code civil ; 3°) ALORS enfin et tout état de cause QUE la faute de la victime qui a concouru au dommage exonère totalement ou partiellement la personne désignée responsable sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du code civil ; qu'en jugeant qu'aucune faute de la victime ayant concouru au dommage et justifiant un partage de responsabilité n'était établie alors qu'elle constatait que M... X... s'était introduit seul et sans autorisation dans le sous-sol des époux U..., qu'il s'était emparé à leur insu de l'arme et des munitions qui y étaient entreposées, et qu'il s'était blessé lui-même en manipulant cette arme, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 1384 alinéa 1er du même code.
Ayant relevé qu'un enfant s'étant rendu au sous-sol du domicile des personnes auxquelles, accompagné de sa mère, il rendait visite, s'était blessé accidentellement en manipulant un pistolet gomme-cogne, qui s'y trouvait entreposé, une cour d'appel a pu déduire de ses constatations et énonciations, faisant ressortir que l'enfant, âgé de onze ans, ne pouvait être considéré comme ayant acquis les pouvoirs de direction et de contrôle sur l'arme dont il avait fait usage, que la preuve du transfert de garde invoqué par les propriétaires de cette arme n'était pas rapportée
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1327 FS-P+B+I Pourvoi n° U 19-21.207 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La Caisse autonome de retraite des médecins de France, dont le siège est 46 rue Saint-Ferdinand, 75841 Paris cedex 17, a formé le pourvoi n° U 19-21.207 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2019 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre sécurité sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. G... P..., domicilié [...] , 2°/ au Défenseur des droits, domicilié 3 place de Fontenoy, TSA 80715, 75334 Paris cedex 07, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Fischer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Caisse autonome de retraite des médecins de France, de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. P..., et l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Le Fischer, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Taillandier-Thomas, Coutou, Renault-Malignac, M. Rovinski, Mme Cassignard, conseillers, M. Gauthier, Mmes Vigneras, Dudit, M. Pradel, conseillers référendaires, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 juin 2019) et les productions, affilié à la Caisse autonome de retraite des médecins de France (la Caisse) du 1er avril 1973 au 30 septembre 2007 en qualité de médecin ophtalmologue, M. P... (l'assuré) a fait l'objet, le 3 mai 2007, d'une procédure de redressement judiciaire, ultérieurement convertie en liquidation judiciaire. Après la clôture de cette procédure pour insuffisance d'actif, le 15 février 2008, l'assuré a repris son activité à compter du 1er juillet 2008. Il a sollicité, le 17 juin 2015, la liquidation de ses droits à la retraite à compter du 1er janvier 2016. 2. Par deux décisions du 1er mars 2016 et du 28 novembre 2017, la Caisse a refusé de tenir compte des cotisations versées par l'assuré, entre 1993 et 2007, pour la liquidation de ses droits au titre du régime d'assurance vieillesse complémentaire des médecins et du régime des allocations supplémentaires de vieillesse des médecins conventionnés, en raison d'un arriéré de cotisations sur cette période. 3. L'assuré a saisi de recours une juridiction de sécurité sociale. Examen des moyens Sur le premier moyen, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le second moyen Enoncé du moyen 5. La Caisse fait grief à l'arrêt d'accueillir les recours de l'assuré, alors : « 1°/ que les pouvoirs publics ont délégué au conseil d'administration de la caisse, sous le contrôle des ministres compétents, le soin d'arrêter les statuts du régime complémentaire de retraite dans la mesure où, le régime étant un régime de répartition, et la caisse étant responsable de son équilibre, il lui appartient d'édicter les règles définissant le droit à prestation ; que les statuts ne peuvent être écartés, à titre exceptionnel, qu'en vertu d'une disposition légale ou réglementaire, laquelle doit être strictement interprétée ; que si en cas de procédure collective, le non-paiement des cotisations ne prive pas en soi l'assuré de ses droits à retraite complémentaire, seules les périodes, pour lesquelles la cotisation annuelle unique a été acquittée, peuvent être pris en compte ; que certes certaines dispositions des statuts prévoient une proratisation mais seulement dans l'hypothèse, étrangère à l'espèce, où les revenus du médecin ont été inférieurs à un plafond ; qu'en décidant néanmoins que si même la cotisation annuelle unique, n'a pas été payée, l'année concernée doit être prise en compte, pour la liquidation des droits à retraite, au prorata des paiements partiels qui ont pu intervenir, quand la combinaison des règles ci-dessus rappelée condamnait cette solution, les juges du fond ont violé l'article L. 644-1 du code de la sécurité sociale, les articles 2 et 5 du décret n° 49-579 du 22 avril 1949 et les articles 4 et 19 des statuts du régime complémentaire de la Caisse, ensemble l'article L. 643-11 du code de commerce ; 2°/ que les pouvoirs publics ont délégué au conseil d'administration de la Caisse, sous le contrôle des ministres compétents, le soin d'arrêter les statuts du régime allocation supplémentaire de vieillesse dans la mesure où, le régime étant un régime de répartition, et la Caisse étant responsable de son équilibre, il lui appartient d'édicter les règles définissant le droit à prestation ; que les statuts ne peuvent être écartés, à titre exceptionnel, qu'en vertu d'une disposition légale ou réglementaire, laquelle doit être strictement interprétée ; que si en cas de procédure collective, le non-paiement des cotisations ne prive pas en soi l'assuré de ses droits à retraite complémentaire, seules les périodes, pour lesquelles la cotisation annuelle, unique et forfaitaire a été acquittée, peuvent être pris en compte ; que certes certaines dispositions des statuts prévoient une proratisation mais seulement dans l'hypothèse, étrangère à l'espèce, où l'activité n'a couvert qu'une fraction de l'année ; qu'en décidant néanmoins que si même la cotisation annuelle, unique et forfaitaire n'a pas été payée, l'année concernée doit être prise en compte, pour la liquidation des droits à retraite, au prorata des paiements partiels qui ont pu intervenir, quand la combinaison des règles ci-dessus rappelée condamnait cette solution, les juges du fond ont violé les articles L. 645-1 et L. 645-2 du code de la sécurité sociale, l'article 2 du décret n° 72-968 du 27 octobre 1972 et l'article 10 des statuts du régime allocation supplémentaire de vieillesse de la Caisse, ensemble l'article L. 643-11 du code de commerce. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 644-1 et L. 645-2 du code de la sécurité sociale, 2 du décret n° 49-579 du 22 avril 1949 modifié relatif au régime d'assurance vieillesse complémentaire des médecins, et 2 du décret n° 72-968 du 27 octobre 1972 modifié tendant à rendre obligatoire le régime des prestations supplémentaires de vieillesse des médecins conventionnés : 6. Il résulte de la combinaison, d'une part, des premier et troisième, d'autre part, des deuxième et quatrième de ces textes, interprétés à la lumière de l'article 1er du Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'en dehors des cas qu'ils visent, le report, chaque année, au compte de l'assuré, des points de retraite au titre du régime d'assurance vieillesse complémentaire des médecins et du régime des prestations supplémentaires de vieillesse des médecins conventionnés procède exclusivement du versement, pour l'intégralité de son montant, de la cotisation annuelle prévue pour chacun de ces régimes, et ne peut donc faire l'objet d'une proratisation en fonction de la fraction de la cotisation annuelle effectivement versée par l'assuré. 7. Pour dire que la Caisse devra calculer les points de retraite de l'assuré en intégrant les cotisations versées entre 1993 et 2007, l'arrêt relève qu'il n'est pas discuté que sur cette période, l'intéressé s'est acquitté partiellement des cotisations annuelles dues au titre du régime d'assurance vieillesse complémentaire et du régime des allocations supplémentaires de vieillesse, que ces années ne peuvent être exclues du calcul du montant des prestations et qu'elles doivent être prises en compte dans le calcul de l'attribution de points au prorata de chaque montant annuellement versé. 8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a : - ordonné la jonction des instances enrôlées sous les n° 17/05147 et 19/00581, - confirmé le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Quimper du 10 décembre 2008 en ce qu'il a déclaré le recours de M. P... recevable et en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande en remboursement de la somme de 1 944,96 euros, l'arrêt rendu le 26 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ; Condamne M. P... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la Caisse autonome de retraite des médecins de France PREMIER MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué encourt la censure ; EN CE QU' il a, confirmant le jugement du 11 mai 2017, annulé la décision de la CARMF du 1er mars 2016 et la décision de la commission de recours amiable du 22 avril 2016 et ordonné à la CARMF de procéder à la liquidation de la retraite de Monsieur P..., au titre du régime complémentaire et du régime allocations supplémentaire de vieillesse, au prorata des cotisations effectivement versées par M. P... au cours de son affiliation, puis confirmant le jugement du 10 décembre 2018, ordonné à la CARMF de recalculer les points de retraite de M. P... dans chaque régime en intégrant les cotisations versées par le cotisant entre 1993 et 2007 ; AUX MOTIFS QUE « le Défenseur des droits, intimé, a présenté par écrit ses observations par application de l'article 33 de la loi organique n° 2011-22 du 29 mars 2011, faisant valoir pour l'essentiel que - le traitement que la Caisse entend donner aux contributions versées par l'intéressé au titre des années 1993 à 2007 est incompatible avec la protection du droit de propriété institué par l'article 1° du premier Protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce traitement résulte d'une interprétation pour le moins extensive des textes réglementaires et des statuts de la CARMF ; - ce dispositif, qui revient à priver un affilié de l'intégralité de la prestation de vieillesse concernée dès lors que subsiste un arriéré de cotisations, fût-il minime, voire des majorations de retard, pose problème en droit comme en équité ; - il est désormais établi, tant par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme que paria jurisprudence nationale, que les prestations sociales même non contributives, engendrent un intérêt patrimonial bénéficiant de la protection de l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'il en va ainsi naturellement des prestations de retraite ; - par un arrêt en date du 10 octobre 2013, la Cour de cassation a réaffirmé le principe suivant lequel "l'absence de règlement intégral des cotisations n pas pour conséquence de priver l'assuré de tout droit à pension" ; - en l'espèce, il n'est guère contestable que l'absence d'attribution des droits qui sont normalement attachés au versement des cotisations d'assurance vieillesse porte atteinte au droit de propriété de l'assuré ; - les modalités suivant lesquelles la Carmf a déterminé l'étendue des avantages vieillesse, à la suite du jugement du Tribunal de Nantes l'ayant condamnée à procéder à leur liquidation "au prorata des cotisations effectivement versées", mettent en échec l'objectif poursuivi d'un juste équilibre entre la contribution versée et les droits constitués puisqu'elles conduisent à l'absence totale de prise en compte des cotisations versées au titre des années 1993 à 2007, cotisations dont la caisse refuse par ailleurs le remboursement ; que pareil procédé parait confiscatoire ; que les dispositions réglementaires et statutaires, qui selon la Carmf fonderaient cette solution, ne sont pas compatibles avec l'article 1er du premier Protocole additionnel annexé à la Convention européenne, en ce qu'elles portent au droit de propriété une atteinte excessive, alors que l'objectif de préservation de l'équilibre budgétaire du régime de retraite des médecins libéraux semble pouvoir être préservé par un calcul des droits au prorata des versements effectués ; - la règle selon laquelle seul le versement de l'intégralité de la cotisation annuelle permet l'attribution de points, à l'exclusion d'un versement qui n'aurait été que partiel, soutenue par la caisse, n'est opposable que si elle résulte nécessairement d'une disposition expresse du décret instituant le régime ou des statuts de la section professionnelle l'organisant ; qu'outre qu'une telle disposition est inexistante, celles sur lesquelles s'appuie l'organisme ne paraissent pas avoir pour objet ni même pour effet de conditionner l'attribution de points au règlement intégral de la cotisation annuelle ; qu'aucune exclusion d'attribution de points n'est instituée par les textes régissant le régime vieillesse complémentaire en cas de règlement partiel de la cotisation annuelle, et qu'au contraire, la prévision d'une proratisation du calcul des points en cas de cotisation d'un montant inférieur à celle donnant lieu à l'attribution du maximum de points, et de diverses hypothèses d'attribution forfaitaire de points, laisse à penser qu'un adhérent placé dans l'impossibilité de payer l'intégralité de sa cotisation annuelle, se verra néanmoins attribuer des points au prorata des sommes versées ; - dès lors qu'aucune disposition n'institue leur absence de prise en compte, et que la proratisation attribution des points est prévue - par conséquence techniquement possible - les sommes versées au titre des cotisations dues sur les années 1993 à 2007 doivent être incluses dans le calcul des droits de M. P... au titre des régimes de l'assurance vieillesse complémentaire et de l'ASV » ; ALORS QUE, le juge est tenu de s'assurer d'office du respect du principe du contradictoire et si celui-ci est en cause, il doit rendre compte dans sa décision que le principe du contradictoire a été respecté ; qu'en l'espèce, l'arrêt fait état des observations du défenseur des droits, sans constater que les observations ont été communiquées à la CARMF en temps utile et dans des conditions permettant à la CARMF de réagir et d'exercer ses droits ; que l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 16 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué encourt la censure ; EN CE QU'il a, confirmant le jugement du 11 mai 2017, annulé la décision de la CARMF du 1er mars 2016 et la décision de la commission de recours amiable du 22 avril 2016 et ordonné à la CARMF de procéder à la liquidation de la retraite de Monsieur P..., au titre du régime complémentaire et du régime allocations supplémentaire de vieillesse, au prorata des cotisations effectivement versées par M. P... au cours de son affiliation, puis confirmant le jugement du 10 décembre 2018, ordonné à la CARMF de recalculer les points de retraite de M. P... dans chaque régime en intégrant les cotisations versées par le cotisant entre 1993 et 2007 ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'absence de règlement intégral des cotisations antérieures a seulement pour effet d'exclure du calcul du montant des prestations RCV et ASV la période durant laquelle des cotisations n'ont pas été payées ; que pour retenir que seul le versement de l'intégralité de la cotisation annuelle permet l'acquisition de droits à retraite à hauteur d'un certain nombre de points, la caisse se prévaut des textes suivants qui disposent : Au titre du RCV ; - article 2 alinéa 5 du décret n° 49-579 du 22 avril 1949 : « Le versement de la cotisation annuelle correspondant au plafond mentionné au premier alinéa du présent article donne droit à attribution de 10 points de retraite ; que le nombre de points est calculé au prorata lorsque la cotisation est d'un montant inférieur. » - article 4 des statuts ; « La cotisation est exigible annuellement et d'avance ( ) » - article 27 des statuts : « Le montant de la retraite d'un médecin s'obtient en multipliant le nombre de points acquis, alloués ou rachetés, par la valeur du point ( ) » - article 19 des statuts : « Le versement de la cotisation annuelle correspondant au plafond de revenu fixé au 1er alinéa de l'article 2 du décret n° 49-579 du 22 avril 1949 modifié donne droit à attribution de 10 points de retraite. Le nombre de points est calculé au prorata, arrondi au centième de point le plus proche, lorsque la cotisation est d'un montant inférieur ( ) » ; qu'au titre de l'ASV : - article L. 645-2 du Code de la sécurité sociale : « Le financement des régimes prévus au premier alinéa de l'article L. 645-1 est assuré par une cotisation forfaitaire annuelle obligatoire, distincte selon les régimes, dont le montant est fixé par décret ( ) Le versement de cette cotisation annuelle ouvre droit, pour chacun des régimes, à l'acquisition d'un nombre de points dans des conditions déterminées par décret » - article 2 du décret n° 72-968 du 27 octobre 1972 : « La prestation supplémentaire de vieillesse acquise par chaque médecin est exprimée en points de retraite. La cotisation forfaitaire annuellement versée par les organismes d'assurance maladie et par les médecins donne à ces derniers chaque année un total de (X) points de retraite ( ). Lorsque la période de cotisation est inférieure à une année, les points sont attribués au prorata du nombre de trimestres cotisés ( ) » - article 10 des statuts : « ( ) La cotisation annuellement versée par les organismes d'assurance maladie et par les médecins donne à ces derniers chaque année un nombre de points de retraite fixé par décret. Lorsque la période de cotisation est inférieure à une année, les points sont attribués au prorata du nombre de trimestres cotisés ( ) ; que si ces dispositions prévoient, comme l'a retenu à juste titre le tribunal de Quimper, que les cotisations sont appelées annuellement, ces dispositions n'excluent cependant pas une proratisation du nombre de points en fonction des cotisations versées au titre de chaque année, les statuts prévoyant d'ailleurs des mécanismes de proratisation techniquement possible ; que par ailleurs, il n'est pas discuté que M. P... s'est, sur la période 1993 à 2007 restant en débats, acquitté partiellement de cotisations annuelles RCV et ASV, et ce au moins pour certaines années entre 1993 et 2007 ; qu'il a ainsi payé des cotisations au titre de chacune des années au coures desquelles est intervenu un paiement, années qui ne peuvent donc pas être exclues du calcul du montant des prestations et qui doivent au contraire être prises en compte dans le calcul de l'attribution de points au prorata de chaque montant annuellement versé ; qu'enfin, aucune rupture d'égalité ne résulte du fait que les cotisations annuelles partiellement versées engendrent l'attribution de points au prorata de leur montant, dès lors que tout cotisant placé dans la même situation objective que le Dr P..., dont la dette n'est pas éteinte par le jugement de clôture pour insuffisance d'actif peut prétendre, tout comme l'intimé, au droit à prestations au regard des périodes durant lesquelles des cotisations ont été payées ; que dans ces conditions, il y a lieu de confirmer les jugements déférés, et ce notamment en ce qui concerne le premier en ce qu'il a ordonné à la caisse de procéder à la liquidation de la retraite de M. P... dans les régimes de retraites complémentaires et allocation supplémentaire de vieillesse au prorata des cotisations effectivement versées, et en ce qui concerne le second en ce qu'il a ordonné à la caisse de calculer les points de retraite du Dr P... en intégrant les cotisations versées par le cotisant entre 1993 et 2007 » ; AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DU PREMIER JUGEMENT DU 11 MAI 2017 QU' « Aux termes de l'article 15 des statuts du régime complémentaire d'assurance vieillesse de la CARMF, « Pour bénéficier de l'ouverture des droits à la retraite complémentaire, le médecin doit simultanément : ( ) 2. avoir acquitté ou avoir été exonéré de toutes les cotisations exigibles depuis l'affiliation jusqu'à la date de la retraite ( ) ». Aux termes de l'article 16 bis des statuts du régime des ASV de la CARMF, « Les prestations supplémentaires prévues par les présents statuts ne peuvent être attribuées qu'à la condition que le médecin ne soit pas redevable de plus des deux dernières années de cotisations aux régimes obligatoires gérés par la CARMF » Cet article 16 bis fait référence au fait d'être « redevable », cette notion n'étant pas définie juridiquement, il convient de l'assimiler à la notion d'exigibilité. Il ressort de ces articles que pour pouvoir prétendre aux prestations de retraite complémentaire ou ASV, l'assuré doit avoir acquitté toutes les cotisations exigibles de ces régimes ou en avoir été exonéré. En l'espèce, Monsieur P... a été affilié à la CARMF du 1er avril 1973 au 30 septembre 2007 et du 1er juillet 2008 au 31 décembre 2016. Dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de Monsieur P... le 3 mai 2007, la CARMF a déclaré une créance de 339.949,20 euros au titre des sommes dues par cet assuré pour les exercices 1991, et de 1993 à 2007. Le Tribunal de Grande Instance du Mans a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif à l'encontre de Monsieur P... par jugement en date du 15 février 2008. Le jugement de clôture pour insuffisance d'actif n'entraîne pas l'extinction des dettes, il interdit aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur. Ainsi, la faculté de recouvrement ayant disparu, les cotisations non versées ne sont plus exigibles, bien que l'existence de la dette ne soit pas remise en cause. Tel est le cas de la créance déclarée par la CARMF. A compter de sa réaffiliation à la CARME le 1er juillet 2008, Monsieur P... s'est acquitté de l'ensemble de ses cotisations. Il ressort de ces constatations que la créance de la CARMF, déclarée au cours de la procédure de liquidation judiciaire qui avait été ouverte à l'encontre de Monsieur P..., n'est pas éteinte du fait de la clôture de cette procédure. Cependant, la CARMF ne peut plus agir contre Monsieur P... pour récupérer cette créance. Ainsi, la dette de cotisations de Monsieur P..., bien qu'existante n'est plus. Il en résulte que la CARME a procédé à une mauvaise interprétation de ses statuts en refusant le versement des retraites complémentaire et ASV à Monsieur P... au motif que son compte assuré n'est pas à jour. La dette de Monsieur P... 'n'étant plus exigible, les conditions fixées par les articles 15 et 16 bis précités sont remplies. Monsieur P... peut donc prétendre à la liquidation de ses droits au titre des régimes RCV et ASV. Par ailleurs, au regard des éléments du dossier, il apparaît que Monsieur P... connaît actuellement des difficultés financières. Il indique ne pas avoir d'épargne, être locataire de son logement et vivre avec sa femme qui n'a pas de revenu et son fils malade qui a demandé le versement de l'allocation adulte handicapé. Les justificatifs fournis montrent que Monsieur P... a des charges supérieures à ses revenus. Monsieur P... indique par ailleurs être dans l'impossibilité de s'acquitter du paiement des cotisations non versées, représentant avec les majorations de retard, une somme de 325.427,21 euros selon l'état de compte établit par la CARME en date du 23 novembre 2015. Il ressort de ces constatations que l'absence de règlement intégral des cotisations ne peut pas priver Monsieur P... de tout droit à pension puisque sa dette de cotisations n'est plus exigible. En conséquence, cette absence de règlement ne peut avoir pour effet que d'exclure la période pendant laquelle des cotisations n'ont pas été payées, du calcul du montant de sa pension. Monsieur P... étant dans l'impossibilité manifeste de s'acquitter du paiement des cotisations non versées, il appartient à la CARMF de liquider ses retraites complémentaires (RCV) et AVS au prorata des cotisations qu'il a effectivement versées au cours de son affiliation. Par conséquent, la décision de la CARMF du 1er mars 2016 et celle de la Commission de Recours Amiable du 22 avril 2016 doivent être annulées, ainsi que tous les actes pris en conséquence de ces décisions » ; Et AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DU SECOND JUGEMENT DU 10 DECEMBRE 2018 QUE « la Cour de cassation s'est, à plusieurs reprises, prononcée en faveur de la retraite complémentaire, malgré le non paiement intégral des cotisations et n'a pas entendu réserver cette position aux seuls artisans, ainsi que le soutient la caisse, en réaffirmant le principe suivant lequel « l'absence de règlement intégral des cotisations n'a pas pour conséquence de priver l'assuré de tout droit à pension » ; (arrêt de la deuxième chambre civile pourvoi n° 12-22096) ; Par ailleurs, la cour de cassation a défini l'hypothèse dans laquelle la règle soumettant le droit au service d'une retraite complémentaire au paiement de l'intégralité des cotisations était contraire à ce principe et à l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans l'hypothèse ou l'absence de paiement est opposée à un cotisant se trouvant désormais dans l'impossibilité de s'acquitter des cotisations manquantes ; Que, par décision exécutoire du 11 mai 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes a ordonné à la CARMF de « procéder à la liquidation de la retraite de monsieur G... P... dans les régimes de retraites complémentaires et allocation supplémentaire de vieillesse au prorata des cotisations effectivement versées par monsieur G... P... au cours de son affiliation à la CARMF » ; Que, toutefois, la CARMF s'oppose à la liquidation des droits de Monsieur P... sur la période de 1993 à 2007 au motif que, selon ses dispositions statutaires, c'est la cotisation annuelle qui donne droit à attribution des points de retraite et, qu'en conséquence, les cotisations acquittées partiellement sur cette période ne peuvent être attributives de points ; Que, toutefois, un tel principe ne ressort pas de ces dispositions statutaires ainsi que la CARMF le prétend ; que si, effectivement, les articles 4, 7 et 19 du régime complémentaire de vieillesse et 7 et 10 du régime des allocations supplémentaires de vieillesse prévoient que les cotisations soient appelées annuellement, ces dispositions n'excluent pas une proratisation du nombre de points en fonction des cotisations versées ; que, d'ailleurs, l'article 19 prévoit un mécanisme de proratisation lorsque la cotisation annuelle versée est d'un montant inférieure à un certain plafond et l'article 10 une proratisation des points lorsque la période de cotisation est inférieure à une année ; Que c'est donc vainement, que la CARMF s'oppose à l'exécution de la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes par une nouvelle interprétation de ses statuts ; Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que, sur la période 1993 à 2007, monsieur P... a versé à la CARMF la somme de 26.257,51 euros de cotisations ; que, dans sa note additionnelle en date du 5 septembre 2018, la CARMF explique, d'ailleurs, que cette somme représentent environ deux années de cotisations ; Qu'il devra donc être attribué à monsieur P... le nombre de points calculés à partir des cotisations qu'il a effectivement versées sur la période entre 1993 et 2007 » ; ALORS QUE, premièrement, les pouvoirs publics ont délégué au conseil d'administration de la CARMF, sous le contrôle des ministres compétents, le soin d'arrêter les statuts du régime complémentaire de retraite dans la mesure où, le régime étant un régime de répartition, et la caisse étant responsable de son équilibre, il lui appartient d'édicter les règles définissant le droit à prestation ; que les statuts ne peuvent être écartés, à titre exceptionnel, qu'en vertu d'une disposition légale ou réglementaire, laquelle doit être strictement interprétée ; que si en cas de procédure collective, le non-paiement des cotisations ne prive pas en soi l'assuré de ses droits à retraite complémentaire, seules les périodes, pour lesquelles la cotisation annuelle unique a été acquittée, peuvent être pris en compte ; que certes certaines dispositions des statuts prévoient une proratisation mais seulement dans l'hypothèse, étrangère à l'espèce, où les revenus du médecin ont été inférieurs à un plafond ; qu'en décidant néanmoins que si même la cotisation annuelle unique, n'a pas été payée, l'année concernée doit être prise en compte, pour la liquidation des droits à retraite, au prorata des paiements partiels qui ont pu intervenir, quand la combinaison des règles ci-dessus rappelée condamnait cette solution, les juges du fond ont violé l'article L. 644-1 du code de la sécurité sociale, les articles 2 et 5 du décret n° 49-579 du 22 avril 1949 et les articles 4 et 19 des statuts du régime complémentaire de la CARMF, ensemble l'article L. 643-11 du code de commerce ; ALORS QUE, deuxièmement, les pouvoirs publics ont délégué au conseil d'administration de la CARMF, sous le contrôle des ministres compétents, le soin d'arrêter les statuts du régime allocation supplémentaire de vieillesse dans la mesure où, le régime étant un régime de répartition, et la caisse étant responsable de son équilibre, il lui appartient d'édicter les règles définissant le droit à prestation ; que les statuts ne peuvent être écartés, à titre exceptionnel, qu'en vertu d'une disposition légale ou réglementaire, laquelle doit être strictement interprétée ; que si en cas de procédure collective, le non-paiement des cotisations ne prive pas en soi l'assuré de ses droits à retraite complémentaire, seules les périodes, pour lesquelles la cotisation annuelle, unique et forfaitaire a été acquittée, peuvent être pris en compte ; que certes certaines dispositions des statuts prévoient une proratisation mais seulement dans l'hypothèse, étrangère à l'espèce, où l'activité n'a couvert qu'une fraction de l'année ; qu'en décidant néanmoins que si même la cotisation annuelle, unique et forfaitaire n'a pas été payée, l'année concernée doit être prise en compte, pour la liquidation des droits à retraite, au prorata des paiements partiels qui ont pu intervenir, quand la combinaison des règles ci-dessus rappelée condamnait cette solution, les juges du fond ont violé les articles L. 645-1 et L. 645-2 du code de la sécurité sociale, l'article 2 du décret n° 72-968 du 27 octobre 1972 et l'article 10 des statuts du régime allocation supplémentaire de vieillesse de la CARMF, ensemble l'article L. 643-11 du code de commerce.
Il résulte de la combinaison, d'une part, des articles L. 644-1 du code de la sécurité sociale et 2 du décret n° 49-579 du 22 avril 1949 modifié relatif au régime d'assurance vieillesse complémentaire des médecins, d'autre part, des articles L. 645-2 du code de la sécurité sociale et 2 du décret n° 72-968 du 27 octobre 1972 modifié tendant à rendre obligatoire le régime des prestations supplémentaires de vieillesse des médecins conventionnés, interprétés à la lumière de l'article 1er du protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'en dehors des cas qu'ils visent, le report, chaque année, au compte de l'assuré, des points de retraite au titre du régime d'assurance vieillesse complémentaire des médecins et du régime des prestations supplémentaires de vieillesse des médecins conventionnés procède exclusivement du versement, pour l'intégralité de son montant, de la cotisation annuelle prévue pour chacun de ces régimes, et ne peut donc faire l'objet d'une proratisation en fonction de la fraction de la cotisation annuelle effectivement versée par l'assuré. Viole ces textes la cour d'appel qui, pour accueillir le recours d'un assuré, relève qu'il n'est pas discuté que sur une certaine période, l'intéressé s'est acquitté partiellement des cotisations annuelles dues au titre du régime des allocations supplémentaires de vieillesse, que ces années ne peuvent être exclues du calcul du montant des prestations et qu'elles doivent être prises en compte dans le calcul de l'attribution de points au prorata de chaque montant annuellement versé
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1328 FS-P+B+I Pourvoi n° Q 19-19.018 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 L'établissement Roannais agglomération, établissement public de coopération intercommunale, dont le siège est 63 rue Jean Jaurès, CS 70005, 42311 Roanne cedex, a formé le pourvoi n° Q 19-19.018 contre l'arrêt rendu le 21 mai 2019 par la cour d'appel de Lyon (protection sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Rhône-Alpes, dont le siège est TSA 90001, 01016 Bourg-en-Bresse cedex, 2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié 14 avenue Duquesne, 75350 Paris 07 SP, défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Fischer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Melka-Prigent, avocat de l'établissement public Roannais agglomération, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF Rhône-Alpes, et l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Le Fischer, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Taillandier-Thomas, Coutou, Renault-Malignac, M. Rovinski, Mme Cassignard, conseillers, M. Gauthier, Mmes Vigneras, Dudit, M. Pradel, conseillers référendaires, M. Gaillardot, premier avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 21 mai 2019), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2013 et 2014, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Rhône-Alpes (l'URSSAF) a notifié, le 16 septembre 2015, à l'établissement public Roannais agglomération (l'EPCI) un redressement résultant de la réintégration, dans l'assiette des cotisations sociales, de la contribution de cet établissement aux régimes de retraite par rente auxquels ont adhéré ses élus qui perçoivent une indemnité de fonction. 2. L'EPCI a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. L'EPCI fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors : « 1°/ que l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale détermine l'assiette de la contribution à la cotisation sociale généralisée des revenus d'activité et de remplacement ; qu'en se fondant sur cette disposition pour justifier le redressement litigieux, dont elle relevait pourtant qu'il portait sur l'intégration des contributions de l'EPCI aux retraites Fonpel et Carel des élus locaux dans l'assiette de calcul des cotisations de sécurité sociale, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale ; 2°/ qu'en application de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, seuls les revenus d'activité professionnelle sont assujettis aux cotisations de sécurité sociale ; que ces dispositions ne sont pas applicables aux élus locaux, qui n'exercent pas d'activité professionnelle au sens de ce texte ; que l'article L. 382-31 du même code prévoit l'assujettissement aux cotisations de sécurité sociale des seules « indemnités de fonction » versées aux élus ; qu'en jugeant que cet article avait pour effet d'assimiler les élus locaux à des travailleurs en ce qui concernait la détermination du régime sociale de leurs revenus et avantages en nature et en argent, pour en déduire que les contributions des collectivités et établissements publics aux fonds Fonpel et Carel étaient assujetties aux cotisations de sécurité sociale, la cour d'appel a violé, par fausse interprétation, les dispositions des articles L. 242-1 et L. 382-31 du code de la sécurité sociale ; 3°/ que les contributions versées par les collectivités aux retraites Fonpel et Carel des élus locaux ne constituent pas des "indemnités de fonction" au sens de l'article L. 382-31 du code de la sécurité sociale ; qu'en fondant toutefois le redressement litigieux sur ces dispositions, la cour d'appel a violé, par fausse interprétation, les dispositions de l'article L. 382-31 du même code. » Réponse de la Cour 4. Selon l'article L. 242-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, sont considérées comme rémunérations, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail. 5. En application des cinquième et sixième alinéas de ce texte, sont toutefois exclues de l'assiette des cotisations sociales, d'une part, les contributions mises à la charge des employeurs en application d'une disposition législative ou réglementaire ou d'un accord national interprofessionnel mentionné à l'article L. 921-4, destinées au financement des régimes de retraite complémentaire mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre IX ou versées en couverture d'engagements de retraite complémentaire souscrits antérieurement à l'adhésion des employeurs aux institutions mettant en oeuvre les régimes institués en application de l'article L. 921-4 et dues au titre de la part patronale en application des textes régissant ces couvertures d'engagements de retraite complémentaire, d'autre part, les contributions des employeurs au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance, lorsqu'elles revêtent un caractère obligatoire et bénéficient à titre collectif à l'ensemble des salariés ou à une partie d'entre eux, sous réserve qu'ils appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs déterminés par décret en Conseil d'Etat. 6. Selon l'article L. 382-31, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, les élus des collectivités territoriales mentionnées à l'article 72 de la Constitution dans lesquelles s'applique le régime général de sécurité sociale, ainsi que les délégués de ces collectivités territoriales membres d'un établissement public de coopération intercommunale, sont affiliés au régime général de sécurité sociale pour l'ensemble des risques. 7. Selon l'article L. 2123-27 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, applicable au litige, les élus qui perçoivent une indemnité de fonction en application des dispositions de ce code ou de toute autre disposition régissant l'indemnisation de leurs fonctions peuvent constituer une retraite par rente à la gestion de laquelle doivent participer les élus affiliés. La constitution de cette rente incombe pour moitié à l'élu et pour moitié à la commune. 8. Il résulte de la combinaison de ces textes que les contributions qu'un établissement public de coopération intercommunale verse pour le financement de garanties de retraite supplémentaire et de prévoyance souscrites par un élu entrent dans l'assiette des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, à moins qu'elles ne répondent, pour tout ou partie de leur montant, aux conditions d'exonération fixées par le sixième alinéa de l'article L. 242-1. 9. L'arrêt retient que les élus locaux, qui sont affiliés au régime général de la sécurité sociale en leur qualité de personnes rattachées à ce régime, bénéficient d'un choix d'adhésion à une retraite complémentaire par rente Fonpel ou Carel. Il relève que ce régime de retraite est facultatif, que la contribution de l'EPCI ne découle pas d'une obligation législative ou réglementaire, ni d'un accord interprofessionnel imposant de financer un régime de retraite complémentaire obligatoire pour ses élus, et que la contribution en cause dépend exclusivement du choix de l'élu d'adhérer ou non à ce régime. 10. De ces constatations, faisant ressortir l'absence de caractère obligatoire, pour leurs bénéficiaires, des prestations de retraite supplémentaire litigieuses, la cour d'appel a exactement déduit, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la première branche du moyen, que les contributions versées pour leur financement n'entraient pas dans le champ d'application du sixième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, de sorte qu'elles devaient être réintégrées dans l'assiette des cotisations dues par l'EPCI. 11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne l'établissement public Roannais agglomération aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'établissement public Roannais agglomération et le condamne à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Melka-Prigent, avocat aux Conseils, pour l'établissement public Roannais agglomération Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le redressement établi par l'URSSAF Rhône-Alpes était bien fondé, et d'AVOIR, en conséquence, rejeté l'ensemble des demandes de la communauté Roannais Agglomération ; AUX MOTIFS QU' « Il convient de déterminer si d'une part, l'article L242-1 du code de sécurité sociale s'applique aux élus locaux et d'autre part, si les contributions versées par la collectivité au titre de leur retraite complémentaire sont assujetties à cotisations sociales. L'article L. 382-31 du code, figurant à la section 3 du chapitre 2 du titre 8 (dispositions relatives à diverses catégories de personnes rattachées au régime général) du livre 3 de la sécurité sociale, que les élus des collectivités territoriales mentionnées à l'article 72 de la Constitution dans lesquelles s'applique le régime général de sécurité sociale, ainsi que les délégués de ces collectivités territoriales membres d'un établissement public de coopération intercommunale, sont affiliés au régime général de sécurité sociale pour l'ensemble des risques. Leurs indemnités de fonctions sont assujetties aux cotisations de sécurité sociale lorsque leur montant total est supérieur à une fraction, fixée par décret, de la valeur du plafond défini à l'article L. 241-3. L'article L136-2, II du même code dispose dans sa rédaction applicable au litige, que la contribution sociale est assise sur «les indemnités versées par les collectivités locales, leurs groupements ou leurs établissements publics aux élus municipaux, cantonaux et régionaux ». Elles sont également assises sur « les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance, à l'exception de celle visées au 5ème alinéa de l'article L242-1 du même code... », disposition édictée au 4° de ce même article. En effet, le cinquième alinéa de l'article L242-1 du même code pris dans sa rédaction applicable au litige, exonère de la contribution sociale « les contributions mises à la charge des employeurs en application d'une disposition législative ou réglementaire ou d'un accord national interprofessionnel ». Son sixième alinéa exclut des cotisations sociales, les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires revêtant un caractère obligatoire et collectif. Il convient de rappeler que si l'article L242-1 concerne les cotisations assises sur les revenus d'activité des travailleurs salariés et assimilés, il ressort de la combinaison des articles L382-31 et D382-34 du même code relatifs aux titulaires des mandats locaux que les élus des collectivités territoriales mentionnées à l'article 72 de la Constitution dans lesquelles s'applique le régime général de sécurité sociale ... sont affiliés au régime général de sécurité sociale pour l'ensemble des risques. Leurs indemnités de fonction sont assujetties aux cotisations de sécurité sociale ...' Il ressort des éléments versés au débat que le redressement opéré par l'URSSAF porte sur l'intégration dans l'assiette de calcul des cotisations de la sécurité sociale, des contributions patronales à la retraite complémentaire Fonpel et Carel des élus locaux, sur le fondement de l'article L242-1 précité. Les élus locaux sont affiliés au régime général de la sécurité sociale, en leur qualité de personnes rattachés à ce régime. Les indemnités de fonction perçues au titre de leur mandat sont assujetties à cotisations sociales, au sens des articles L136-2-II d), L382-31 et D384-34 précités. Or, c'est en raison de ce rattachement au régime général que les dispositions communes de l'article L136-2 du code de la sécurité sociale, relative à l'assiette de la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement leur sont applicables, ce texte faisant également référence aux dispositions de l'article L242-1 du même code. Il en résulte que les élus locaux sont assimilés à des travailleurs en ce qui concerne la détermination du régime social de leurs revenus et avantages en nature et en argent, en application de l'article L136-2-I du code de la sécurité sociale. Par ailleurs, il n'est pas contesté que les élus locaux bénéficient d'un choix d'adhésion à une retraite complémentaire par rente Fonpel ou Carel, ce régime de retraite étant facultatif. Or, la contribution de la communauté Roannais Agglomération au financement de ces prestations complémentaires ne découle pas d'une obligation législative ou réglementaire ou d'un accord interprofessionnel de financer un régime de retraite complémentaire obligatoire pour ces élus. Il en résulte qu'elle ne peut être exclue de l'assiette des cotisations au sens du cinquième alinéa de l'article L136-2-II 4° précité. Au surplus, cette contribution au financement par la communauté Roannais Agglomération à ces retraites complémentaires FONPEL/CAREL dépend exclusivement du choix de l'élu d'y adhérer ou pas, de sorte qu'elle ne peut bénéficier de l'exonération des cotisations au sens du sixième alinéa de l'article L242-1 précité ; le caractère facultatif de ces retraites suffi[t] pour l'en exclure. Il en résulte que la contribution de Roannais Agglomération à la retraite complémentaire de ses élus locaux doit être réintégrée à l'assiette de calcul des cotisations sociales. Dès lors, le redressement établi par l'URSSAF à l'encontre de Roannais Agglomération est justifié. » ; 1°) ALORS QUE l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale détermine l'assiette de la contribution à la cotisation sociale généralisée des revenus d'activité et de remplacement ; qu'en se fondant sur cette disposition pour justifier le redressement litigieux, dont elle relevait pourtant qu'il portait sur l'intégration des contributions de Roannais Agglomération aux retraites FONPEL et CAREL des élus locaux dans l'assiette de calcul des cotisations de sécurité sociale, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale ; 2°) ALORS QU'en application de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, seuls les revenus d'activité professionnelle sont assujettis aux cotisations de sécurité sociales ; que ces dispositions ne sont pas applicables aux élus locaux, qui n'exercent pas d'activité professionnelle au sens de ce texte ; que l'article L. 382-31 du même code prévoit l'assujettissement aux cotisations de sécurité sociale des seules « indemnités de fonction » versées aux élus ; qu'en jugeant que cet article avait pour effet d'assimiler les élus locaux à des travailleurs en ce qui concernait la détermination du régime social de leurs revenus et avantages en nature et en argent, pour en déduire que les contributions des collectivités et établissements publics aux fonds FONPEL et CAREL étaient assujetties aux cotisations de sécurité sociale, la cour a violé, par fausse interprétation, les dispositions des articles L. 242-1 et L. 382-31 du code de la sécurité sociale ; 3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE les contributions versées par les collectivités aux retraites FONPEL et CAREL des élus locaux ne constituent pas des « indemnités de fonction » au sens de l'article L. 382-31 du code de la sécurité sociale ; qu'en fondant toutefois le redressement litigieux sur ces dispositions, la cour d'appel a violé, par fausse interprétation, les dispositions de l'article L. 382-31 du même code.
Les contributions qu'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) verse pour le financement de garanties de retraite supplémentaire et de prévoyance souscrites par un élu entrent dans l'assiette des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, à moins qu'elles ne répondent, pour tout ou partie de leur montant, aux conditions d'exonération fixées par le sixième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Ayant relevé que les élus locaux étaient affiliés au régime général de la sécurité sociale en leur qualité de personnes rattachées à ce régime et fait ressortir l'absence de caractère obligatoire, pour ces derniers, des prestations de retraite supplémentaire litigieuses, l'arrêt en a exactement déduit que les contributions versées pour leur financement n'entraient pas dans le champ d'application du sixième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, de sorte qu'elles devaient être réintégrées dans l'assiette des cotisations dues par l'EPCI
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1329 FS-P+B+I Pourvoi n° T 19-18.584 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 M. X... K..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° T 19-18.584 contre l'arrêt rendu le 27 mars 2019 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe Seine-Maritime, dont le siège est 50 avenue de Bretagne, 76039 Rouen cedex 1, 2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié 14 avenue Duquesne, 75350 Paris 07 SP, défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. K..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe Seine-Maritime, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Taillandier-Thomas, Renault-Malignac, M. Rovinski, Mme Cassignard, conseillers, Mme Le Fischer, M. Gauthier, Mmes Vigneras, Dudit, M. Pradel, conseillers référendaires, M. de Monteynard, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 27 mars 2019), M. K... (la victime) a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe Seine-Maritime (la caisse), le 2 février 2016, une déclaration de maladie professionnelle, accompagnée d'un certificat médical initial du 26 janvier 2016 faisant état d'une "exposition à l'amiante de plus de 30 ans. Dyspnée d'effort avec au scanner thoracique un nodule sous-pleural" et visant le tableau n° 30 des maladies professionnelles. 2. La caisse ayant refusé de prendre en charge cette affection au titre de la législation professionnelle, au motif que les nodules et l'adénopathie n'étaient pas inscrits au tableau n° 30, M. K... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Examen des moyens Sur les deux moyens réunis Enoncé du moyen 3. La victime fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors : « 1°/ que l'organisme social doit instruire la demande de prise en charge d'une maladie professionnelle sans être tenu par le tableau visé par la déclaration ; que, si l'enquête fait apparaître que la maladie médicalement constatée n'est pas désignée dans le tableau visé par la déclaration, la caisse ne peut décider de son origine professionnelle qu'après l'avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et l'évaluation de l'incapacité permanente de la victime ; que, le tribunal des affaires de sécurité sociale avait justement retenu « que le médecin conseil a indiqué, à juste titre, que la pathologie déclarée ne ressortait pas du tableau 30 mais qu'il n'en demeure pas moins qu'il existe une déclaration de maladie professionnelle que la caisse se devait d'instruire et qu'en l'absence d'inscription de cette pathologie à un tableau la caisse doit d'instruire le dossier au regard des alinéas quatre et cinq de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, qu'il appartenait donc à la caisse de saisir un comité de régional de reconnaissance des maladies professionnelles dans le délai de trois mois de la déclaration sauf à notifier la nécessité d'un délai complémentaire ce qu'elle n'a pas fait » ; que, pour infirmer ce jugement, la cour d'appel retient que la victime « n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale - il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP, la maladie déclarée par la victime ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge » ; qu'en estimant que la caisse devait instruire la demande de prise en charge de la maladie professionnelle uniquement au regard du tableau visé par la déclaration, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ; 2°/ que dans ses conclusions, l'assuré social faisait valoir « qu'à tout le moins, la victime est bien fondée à solliciter de la juridiction qu'elle enjoigne à la CPAM la saisine d'un CRRMP afin qu'il se prononce sur le lien essentiel et direct entre la maladie et le travail » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des écritures, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 4. Dès lors que la demande de la victime se réfère à un tableau de maladies professionnelles, l'organisme social n'est pas tenu, en cas de refus de prise en charge, d'instruire cette demande selon les règles applicables à la reconnaissance du caractère professionnel des maladies non désignées dans un tableau. 5. L'arrêt relève que la maladie déclarée par la victime ne figurait pas au tableau n° 30, dont elle invoquait exclusivement le bénéfice. 6. De ces constatations, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à un moyen que celles-ci rendaient inopérant, a exactement déduit que la caisse n'était pas tenue de saisir un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. 7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. K... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. K... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur K... de ses demandes, notamment celle visant à faire reconnaître que la maladie devait être prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels ; AUX MOTIFS QUE : « « En application de l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, la reconnaissance implicite du caractère professionnel d'une maladie sanctionne le seul non-respect par la caisse des délais qui lui sont impartis pour statuer, soit trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial. Ainsi, l'absence de saisine par la caisse d'un CRRMP ne saurait avoir pour effet une reconnaissance implicite du caractère professionnel de la maladie déclarée. En l'espèce, la caisse a reçu ces pièces le 3 février 2016 et a notifié son refus de prise en charge le 31 mars 2016. Ayant respecté le délai de trois mois pour rendre sa décision, c'est à tort que le tribunal des affaires de sécurité sociale a retenu l'existence d'une décision implicite de prise en charge. En vertu de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 25 %, déterminé conformément aux dispositions de l'article L. 434-2. Dans ces deux derniers cas la caisse reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. En l'espèce, M. K... n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP. La maladie déclarée par M. K... ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge ». » ALORS QUE l'organisme social doit instruire la demande de prise en charge d'une maladie professionnelle sans être tenu par le tableau visé par la déclaration ; que, si l'enquête fait apparaître que la maladie médicalement constatée n'est pas désignée dans le tableau visé par la déclaration, la caisse ne peut décider de son origine professionnelle qu'après l'avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et l'évaluation de l'incapacité permanente de la victime ; que, le tribunal des affaires de sécurité sociale avait justement retenu « que le médecin conseil a indiqué, à juste titre, que la pathologie déclarée ne ressortait pas du tableau 30 mais qu'il n'en demeure pas moins qu'il existe une déclaration de maladie professionnelle que la caisse se devait d'instruire et qu'en l'absence d'inscription de cette pathologie à un tableau la caisse doit d'instruire le dossier au regard des alinéas quatre et cinq de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, qu'il appartenait donc à la caisse de saisir un comité de régional de reconnaissance des maladies professionnelles dans le délai de trois mois de la déclaration sauf à notifier la nécessité d'un délai complémentaire ce qu'elle n'a pas fait » ; que, pour infirmer ce jugement, la cour d'appel retient que « M. K... n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale - il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP, la maladie déclarée par M. K... ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge » ; qu'en estimant que la caisse devait instruire la demande de prise en charge de la maladie professionnelle uniquement au regard du tableau visé par la déclaration, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur K... de ses demandes, notamment celle visant à enjoindre à la CPAM de désigner un CRRMP conformément aux dispositions de l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale ; AUX MOTIFS QUE : « « En application de l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, la reconnaissance implicite du caractère professionnel d'une maladie sanctionne le seul non-respect par la caisse des délais qui lui sont impartis pour statuer, soit trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial. Ainsi, l'absence de saisine par la caisse d'un CRRMP ne saurait avoir pour effet une reconnaissance implicite du caractère professionnel de la maladie déclarée. En l'espèce, la caisse a reçu ces pièces le 3 février 2016 et a notifié son refus de prise en charge le 31 mars 2016. Ayant respecté le délai de trois mois pour rendre sa décision, c'est à tort que le tribunal des affaires de sécurité sociale a retenu l'existence d'une décision implicite de prise en charge. En vertu de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 25 %, déterminé conformément aux dispositions de l'article L. 434-2. Dans ces deux derniers cas la caisse reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. En l'espèce, M. K... n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP. La maladie déclarée par M. K... ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge ». » ALORS QUE, dans ses conclusions, l'assuré social faisait valoir « qu'à tout le moins, Monsieur K... est bien fondé à solliciter de la juridiction qu'elle enjoigne à la CPAM la saisine d'un CRRMP afin qu'il se prononce sur le lien essentiel et direct entre la maladie et le travail » ; qu'en s'abstenant de répondre ce moyen des écritures, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Dès lors que la demande de la victime se réfère à un tableau de maladies professionnelles, l'organisme social n'est pas tenu, en cas de refus de prise en charge, d'instruire cette demande selon les règles applicables à la reconnaissance du caractère professionnel des maladies non désignées dans un tableau. Par suite, doit être approuvé l'arrêt qui, après avoir relevé que la maladie déclarée par la victime ne figurait pas au tableau n° 30, dont elle invoquait exclusivement le bénéfice, en déduit exactement que la caisse n'était pas tenue de saisir un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1343 F-P+B+I Pourvoi n° K 19-19.520 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est, dont le siège est 35 rue George, 13386 Marseille cedex 20, a formé le pourvoi n° K 19-19.520 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-8), dans le litige l'opposant à Mme U... W..., domiciliée [...], UK (Royaume-Uni), défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Renault-Malignac, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de Mme W..., et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Renault-Malignac, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 mai 2019), bénéficiaire d'une pension de retraite personnelle qui lui était versée par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est (la carsat), I... W... est décédé le 30 décembre 1998. La carsat, soutenant avoir été tenue dans l'ignorance de ce décès jusqu'au 31 mai 2012, a notifié à sa veuve, Mme W..., le 20 septembre 2013, une pénalité financière de 9 093 euros et lui a réclamé, le 4 octobre 2013, le remboursement d'un indu correspondant aux arrérages de pension versés sur le compte du bénéficiaire du 1er janvier 1999 au 30 avril 2012, d'un montant de 84 774, 22 euros. 2. Après avoir obtenu de la commission de recours amiable que la pénalité financière soit ramenée à 3 000 euros, Mme W... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. La carsat a formé à l'encontre de cette dernière une demande reconventionnelle en paiement de ces sommes. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 4. La carsat fait grief à l'arrêt, après avoir dit que la prescription quinquennale de l'action en répétition de l'indu engagée par elle envers Mme W... commençait à courir à compter du 1er juin 2012, de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'action en répétition de l'indu engagée par la carsat envers Mme W... est atteinte par la prescription quinquennale prévue par l'article 2224 du code civil, et renvoyé les parties devant les services administratifs et comptables de la carsat afin de déterminer le montant précis des sommes pouvant être répétées auprès de Mme W... par la caisse, et de la débouter du surplus de ses demandes alors « que l'action en répétition des arrérages d'une pension de vieillesse versés postérieurement au décès du bénéficiaire est soumise à la prescription de droit commun ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a admis que l'action de la carsat du Sud-Est en répétition d'arrérages de pension de vieillesse versés postérieurement au décès de son mari était soumise à la prescription quinquennale, laquelle n'avait commencé à courir qu'à compter du 1er juin 2012 ; qu'en jugeant que son action en répétition de l'indu était atteinte par la prescription quinquennale et en renvoyant les parties à déterminer le montant des sommes pouvant être répétées eu regard de la prescription, sans préciser pourquoi l'action de la carsat du Sud-Est serait atteinte par la prescription quinquennale ni quels arrérages de pension seraient concernés par cette prescription, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le raisonnement qu'elle a adopté, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 nouveau du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 2224 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, applicable au litige : 5. Selon ce texte, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. 6. L'action en répétition des arrérages d'une pension de vieillesse perçus par un tiers postérieurement au décès de l'assuré revêt le caractère d'une action personnelle ou mobilière au sens de ce texte. 7. Pour dire atteinte par la prescription l'action en répétition de l'indu engagée par la carsat à l'encontre de Mme W..., l'arrêt se borne à énoncer que les parties s'accordent pour dire que la prescription applicable est celle de cinq ans prévue par l'article 2224 du code civil, que cette prescription ne commence à courir qu'à compter de la date à laquelle la carsat a eu ou aurait pu avoir connaissance du caractère injustifié du versement des arrérages de pension de vieillesse au profit de I... W..., que Mme W... ne rapportant pas la preuve qu'elle a informé la carsat du décès de son époux, il convient de se référer à la date du 1er juin 2012 et que la prescription a commencé à courir à compter de cette date. 8. En se déterminant ainsi, sans préciser en quoi l'action exercée par la carsat était prescrite, ni quels arrérages de pension réclamés par celle-ci étaient susceptibles d'être concernés par la prescription qu'elle retenait, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale. Sur le premier moyen, pris en sa sixième branche Enoncé du moyen 9. La carsat fait le même grief à l'arrêt, alors « que le juge doit trancher lui-même les contestations dont il est saisi sans pouvoir déléguer ses pouvoirs à autrui ; qu'en jugeant que faute pour la Carsat du Sud-Est de chiffrer la somme restant due au regard de la prescription au titre de son action en répétition de l'indu, elle n'avait pas vocation à remplir l'office de comptable ni à suppléer la carence des parties, puis en renvoyant les parties devant les services administratifs et comptables de la Carsat du Sud-Est afin de déterminer le montant précis des sommes non atteintes par la prescription pouvant être répétées auprès de Mme W... par la caisse, la cour d'appel, qui devait fixer elle-même le montant des sommes pouvant être répétées, a méconnu son office et violé l'article 4 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 4 du code civil : 10. Le juge ne peut refuser de statuer, en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties. 11. Pour renvoyer les parties devant les services administratifs et comptables de la carsat afin de déterminer entre elles les sommes pouvant être répétées auprès de Mme W..., l'arrêt relève que la carsat ne chiffre pas la somme restant due par Mme W... au regard de l'application de la prescription commençant à courir le 1er juin 2012 et que la cour n'a pas vocation, ni à remplir l'office de comptable, ni à suppléer la carence des parties. 12. En se dessaisissant ainsi et en déléguant ses pouvoirs à l'une des parties, alors qu'il lui incombait de trancher elle-même la contestation dont elle était saisie, la cour d'appel a méconnu son office et violé le texte susvisé ; Et sur le second moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 13. La carsat fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de la pénalité financière, alors « que le montant de la pénalité prévue à l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale doit être fixée proportionnellement à la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés ; qu'en l'espèce, Mme W... a fait l'objet d'une pénalité financière de 9 093 euros en raison de son omission de déclaration du décès de son époux, qui a été ramenée à 3 000 euros en phase non contentieuse ; qu'en se fondant, pour réduire à néant cette pénalité, sur de considérations inopérantes tirées de son âge et de l'invocation par la carsat d'un règlement intérieur qui ne lui serait pas applicable, lorsque le montant de la pénalité devait être fixé en fonction de la seule gravité des faits constatés, de leur caractère intentionnel et répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés, la cour d'appel a violé les article L. 114-17 et R. 114-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 14. Mme W... conteste la recevabilité du moyen en faisant valoir que la carsat n'avait pas soutenu que le montant de la pénalité prévue à l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale devait être fixé proportionnellement à la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés, de sorte que le moyen serait nouveau, mélangé de fait et de droit. 15. Cependant, Mme W... ayant saisi la juridiction de sécurité sociale d'une contestation de la pénalité financière prononcée à son encontre et la carsat étant appelante du jugement qui avait accueilli cette contestation en réduisant à néant la pénalité, le moyen tiré des conditions dans lesquelles la juridiction pouvait en réduire le montant était nécessairement dans le débat. 16. Le moyen est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu les articles L. 114-17 et R.114-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige : 17. Selon ces textes, le montant de la pénalité qu'ils prévoient est fixé, dans la limite d'un plafond, en fonction de la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés. 18. Pour annuler la pénalité prononcée à l'encontre de Mme W..., l'arrêt retient que, compte tenu de l'âge de cette dernière (85 ans) et de l'invocation par la carsat d'un règlement intérieur qui ne lui est pas applicable, il convient de modérer la pénalité à sa plus simple expression. 19. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser tant la nature et la gravité des faits reprochés que l'étendue de la responsabilité de l'intéressée, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ; Condamne Mme W... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué, après avoir dit que la prescription quinquennale de l'action en répétition de l'indu engagée par la Carsat Sud Est envers Mme W... commençait à courir à compter du 1er juin 2012 et d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit que l'action en répétition de l'indu engagée par la Carsat Sud Est envers U... W... est atteinte par la prescription quinquennale prévue par l'article 2224 du code civil, et renvoyé les parties devant les services administratifs et comptables de la Carsat afin de déterminer le montant précis des sommes pouvant être répétées auprès de Mme W... par la caisse, et d'AVOIR débouté la Carsat Sud Est du surplus de ses demandes. AUX MOTIFS PROPRES QUE I... W... était titulaire d'une pension vieillesse depuis le 1er novembre 1989 et les arrérages mensuels de 592, 96 euros étaient versés sur un compte ouvert à la société Générale La Canebière de Marseille ; que, dans le cadre d'un contrôle d'existence des titulaires de prestations vieillesse, la CARSAT DU SUD-EST a sollicité la CPAM des Bouches du Rhône afin d'obtenir des informations relatives à la consommation de soins de I... W... et il lui a été répondu qu'il n'avait consommé aucun soin depuis 24 mois à compter de sa demande du 26 mars 2012 ; que, parallèlement et le 12 avril 2012, la CARSAT DU SUD EST a consulté le Système Nationale de Gestion des Identités (SNGI) alimenté par le Répertoire National d'Identification des Personnes Physiques (RNIPP) géré par l'INSEE lequel n'a pas fait apparaître de déclaration de décès ; qu'en conséquence, la CARSAT DU SUD EST a présenté une demande de justificatifs à la dernière adresse connue de I... W..., soit au [...] ; que, ce courrier a été renvoyé et réceptionné par la CARSAT DU SUD EST le 31 mai 2012 avec la mention : « Monsieur I... W... est décédé le [...] 1998 » ; que la CARSAT DU SUD EST a, à compter du 30 avril 2012, cessé le versement par virement des arrérages retraite et initié un contrôle lequel a permis de confirmer le décès de I... W... le 30 décembre 1998 et de constater que le compte bancaire sur lequel était versé la pension de vieillesse était un compte joint avec son épouse U... W... en ce que le décès de I... W... n'avait pas plus été déclaré auprès de l'organisme bancaire ; que le 1er juin 2012, la CARSAT DU SUD-EST a procédé à l'enregistrement du décès de I... W... entraînant la suspension définitive du service des prestations à lui servi et a calculé l'indu correspondant aux arrérages versés du 1er janvier 1999 au 30 avril 2012 à la somme totale de 84.774, 22 euros ; que par un courrier du 13 novembre 2012, U... W... a écrit à la CARSAT DU SUD EST en indiquant l'avoir informée du décès de son mari par un courrier du 31 mars 1999, dont elle ne produit aucune copie, et avoir pensé que les sommes versées sur le compte bancaire joint l'avaient été au titre de sa pension de reversion, tout en indiquant ne pas avoir les moyens financiers de rembourser la somme susvisée et en lui demandant de déduire le montant total de sa pension de reversion non versée depuis 1999 ; que, par courrier du 7 mai 2013, le directeur de la CARSAT DU SUD EST a rappelé le montant de l'indu versé et indiqué envisager de prononcer envers U... W... une pénalité de 9.093 euros pour omission de déclaration du décès de l'assuré I... W... ; que le 12 juin 2013, R... V... le beau-frère de U... W... a adressé un courrier indiquant avoir déclaré par erreur s'agissant d'une « confusion », le décès de I... W... à la CPAM au lieu de la CARSAT DU SUD EST et qu'il avait pensé que les sommes versées par cette dernière l'avaient été au titre de la pension de reversion versée au profit de U... W... compte tenu du montant inférieur des sommes mensuelles versées par rapport à sa propre pension de vieillesse ; que par décision du 20 septembre 2013, la CARSAT DU SUD EST a décidé d'appliquer la pénalité financière susvisée ; que le 4 octobre 2013, la CARSAT DU SUD EST a notifié à U... W... un excédent de versement à rembourser d'un total de 84.774, 22 euros ; Sur la prescription de l'action en répétition de l'indu ; que les parties s'accordent pour dire que la prescription applicable est celle de cinq ans telle que prévue par l'article L. 2224 du code civil ; qu'au soutien de son appel, la CARSAT DU SUD EST expose que le point de départ de son action en recouvrement a été fixé au 4 octobre 2013 par la juridiction de première instance, soit à la date de déclaration du décès de I... W... effectuée auprès de la Mairie de Neuilly-sur-Seine en ce qu'elle ne correspondait à la date à laquelle elle aurait dû avoir connaissance dudit décès ; que cependant, elle indique qu'elle n'a pu matériellement avoir connaissance de ce décès avant le 31 mai 2012 et elle demande la fixation du point de départ de la prescription quinquennale à cette date ; qu'à titre infiniment subsidiaire, la CARSAT DU SUD EST demande à la cour de dire que la prescription quinquennale a été interrompue le 13 novembre 2012, soit à la date du courrier écrit par U... W... par laquelle elle reconnaissait sa dette en demandant des délais de paiement ; qu'en réplique, U... W... se contente d'indiquer que la CARSAT du SUD EST ne démontre pas, ni quand, ni comment, elle a eu connaissance du décès de I... W... ; qu'en outre, elle stigmatise les erreurs, négligences et dysfonctionnements de la caisse pendant environ 14 ans ; qu'à titre subsidiaire, elle indique que, le 1er juin 2012, lui semble être la date à laquelle la CARSAT SUD EST a eu connaissance du décès de I... W... par le rapport de son inspecteur enquêteur ; mais attendu qu'il convient d'indiquer aux parties que le jugement déféré a fixé le point de départ de la prescription quinquennale au 4 octobre 2013, soit à la date de notification par la CARSAT DU SUD EST à U... W... de l'excédent de versement des arrérages vieillesse versés au profit de I... W... ; qu'en effet, ladite prescription ne commence à courir qu'à compter de la date où la CARSAT DU SUD EST a eu ou aurait pu avoir connaissance du caractère injustifié du versement des arrérages vieillesse au profit de I... W... ; que U... W... ne rapportant pas la preuve d'avoir informé la CARSAT DU SUD-EST du décès de son mari dans les mois qui ont suivi, il convient donc de se référer à la date du 1er juin 2012 ; que ladite prescription a commencé à courir à compter de cette date et n'a pas été interrompue par le simple courrier de U... W... du 13 novembre 2012 ; que le jugement déféré sera infirmé en ce chef de disposition ; qu'à défaut par la CARSAT DU SUD-EST de chiffrer la somme restant due par U... W... au titre de son action en répétition de l'indu commençant a courir le 1er juin 2012, la présente cour n'ayant pas vocation, ni à remplir l'office de comptable, ni à suppléer la carence des parties, il convient de constater que la CARSAT DU SUD EST ne chiffre pas la somme restant due au regard de l'application de ladite prescription ; que le jugement déféré sera confirmé en ce chef de disposition, en ce qu'il convient de renvoyer les parties à déterminer entre elles les sommes pouvant être répétées par la CARSAT DU SUD EST auprès de U... W... ( ) qu'il convient de condamner la CARSAT SUD EST aux dépens d'appel postérieurs au 1er janvier 2019 conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile. ET AUX MOTIFS SUPPOSES ADOPTES QU'en vertu des dispositions des articles 1302 et 1302-1 du code civil, tout paiement indu est sujet à répétition ; que Mme U... W... ne conteste par la poursuite du versement des arrérages de la pension de vieillesse attribuée à son époux depuis le 1er novembre 1989, à compter de son décès survenu le 30 décembre 1998 ; que toutefois, en vertu des dispositions de l'article 2224 du code civil issue de la loi n°°2008-561 du 17 juin 2008 « les actions personnes ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer » ; que l'état civil est un bien précieux qui a traversé les régimes sur notre territoire ; que Mme U... W... justifie d'une déclaration effectuée auprès de la mairie de Neuilly-sur-Seine et retranscrite sur le registre dédié de ladite commune actant du décès de I... W... le 30 décembre 1998, avant de faire l'objet de deux rectifications sur décision du procureur de la République de Nanterre les 25 janvier et 8 février 1999 ; que la période contemporaine de la publicité erga omnes de l'acte de décès de I... W... correspond à celle où la Carsat Sud-Est aurait dû connaître les faits permettant d'exercer les actions personnes ou mobilières au sens de l'article 2224 du code civil applicable au litige né au plus tôt selon l'organisme de protection sociale le 1er juin 2012, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale saisie relève l'acquisition de la prescription pour agir de la part de la Carsat du Sud-Est depuis plus de cinq années lors de l'instruction de la situation ayant donné lieu à la décision querellée notifiée le 4 octobre 2013. 1° - ALORS QUE l'action en répétition des arrérages d'une pension de vieillesse versés postérieurement au décès du bénéficiaire est soumise à la prescription de droit commun ; que si cette prescription n'est pas acquise à la date d'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 (soit le 19 juin 2008), un nouveau délai de cinq ans court à compter de cette date ; que le point de départ de cette prescription est cependant reporté à compter du jour où le titulaire du droit a connaissance des faits lui permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce, il est constant que la Carsat du Sud Est demandait à Mme W... la répétition d'arrérages de pension de vieillesse versés postérieurement au décès de son mari sur la période du 1er janvier 1999 au 30 avril 2012 ; que la cour d'appel a admis que cette action était soumise à la prescription quinquennale de l'article L. 2224 du code civil, laquelle n'avait commencé à courir qu'à compter du 1er juin 2012, date à laquelle la Carsat du Sud Est avait eu connaissance du décès de l'intéressé ; que la Carsat du Sud Est avait donc jusqu'au 1er juin 2017 pour agir en remboursement de la totalité des sommes dues, ce qu'elle avait fait en notifiant son indu de 84.774, 22 euros à Mme W... le 4 octobre 2013 puis en lui demandant reconventionnellement cette somme devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhônes saisi le 5 décembre 2013; qu'en jugeant que l'action en répétition de l'indu engagée par la Carsat du Sud-Est était atteinte par la prescription quinquennale et en renvoyant les parties à déterminer le montant des sommes pouvant être répétées eu regard de la prescription, la cour d'appel a violé les articles 2262 ancien et 2224, 2232 et 2241 nouveau du code civil et l'article 26 II de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 2° - ALORS QUE l'action en répétition des arrérages d'une pension de vieillesse versés postérieurement au décès du bénéficiaire est soumise à la prescription de droit commun ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a admis que l'action de la Carsat du Sud Est en répétition d'arrérages de pension de vieillesse versés postérieurement au décès de son mari était soumise à la prescription quinquennale, laquelle n'avait commencé à courir qu'à compter du 1er juin 2012 ; qu'en jugeant que son action en répétition de l'indu était atteinte par la prescription quinquennale et en renvoyant les parties à déterminer le montant des sommes pouvant être répétées eu regard de la prescription, sans préciser pourquoi l'action de la Carsat du Sud Est serait atteinte par la prescription quinquennale ni quels arrérages de pension seraient concernés par cette prescription, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le raisonnement qu'elle a adopté, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 nouveau du code civil. 3° - ALORS en tout état de cause QUE la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit interrompt la prescription ; que dans ses conclusions d'appel, la Carsat Sud Est faisait valoir que la prescription avait été interrompue par un courrier de Mme W... du 13 novembre 2012 dans lequel elle reconnaissait sa dette puisqu'elle demandait une compensation de celle-ci avec sa pension de reversion (ses concl. p. 7, § 4 et s); qu'en se bornant à affirmer que le courrier de Mme W... du 13 novembre 2012 n'avait pas interrompue la prescription sans préciser en quoi cette lettre ne valait pas reconnaissance claire et non équivoque de sa dette par l'intéressée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2240 du code civil. 4° - ALORS QUE les jugements doivent être motivées ; que dans ses conclusions d'appel, la Carsat Sud Est faisait valoir que la prescription avait été interrompue par un courrier de Mme W... du 13 novembre 2012 dans lequel elle reconnaissait sa dette puisqu'elle demandait une compensation de celle-ci avec sa pension de reversion (ses concl. p. 7, § 4 et s.) ; qu'en se bornant à affirmer que le courrier de Mme W... du 13 novembre 2012 n'avait pas interrompu la prescription sans justifier autrement sa position, la cour d'appel a privé sa décision de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile. 5° - ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents qui lui sont soumis ; que dans son courrier du 13 novembre 2012, Mme W... indiquait qu'elle n'avait pas la possibilité de rembourser le montant de 84.774, 22 euros qui lui était réclamé mais proposait une compensation de cette dette avec la pension de reversion qui lui était due depuis 1999, et pour la différence restante, que le solde soit réglé par compensation avec sa pension de reversion qui cesserait de lui être versée jusqu'à extinction dudit montant ; que ce courrier contenait donc une reconnaissance claire et non équivoque de sa dette par Mme W... et valait interruption de la prescription ; qu'en jugeant que ce simple courrier n'avait pas interrompu la prescription, la cour d'appel l'a dénaturé, en violation du principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause. 6° - ALORS en toute état de cause QUE le juge doit trancher lui-même les contestations dont il est saisi sans pouvoir déléguer ses pouvoirs à autrui ; qu'en jugeant que faute pour la Carsat du Sud Est de chiffrer la somme restant due au regard de la prescription au titre de son action en répétition de l'indu, elle n'avait pas vocation à remplir l'office de comptable ni à suppléer la carence des parties, puis en renvoyant les parties devant les services administratifs et comptables de la Carsat du Sud Est afin de déterminer le montant précis des sommes non atteintes par la prescription pouvant être répétées auprès de Mme W... par la Caisse, la cour d'appel, qui devait fixer elle-même le montant des sommes pouvant être répétées, a méconnu son office et violé l'article 4 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la pénalité prévue par l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale ; qu'au soutien de son appel, la CARSAT DU SUD-EST expose que la pénalité financière de 3.000 euros est justifiée par l'omission de déclaration du décès de I... W... ; que cependant, compte tenu de l'âge de U... W... (85 ans) et de l'invocation par la CARSAT DU SUD EST d'un règlement intérieur lequel ne lui étant pas applicable, il convient, comme l'a fait à juste titre la juridiction de première instance, de modérer la pénalité prévue par l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale a sa plus simple expression ; qu'en conséquence le jugement sera confirmé en ce chef de disposition ET AUX MOTIFS SUPPOSES ADOPTES QUE sur la pénalité prévue à l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, déjà ramenée à 9.093 à 3.000 euros en phase non contentieuse du litige, la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale saisie dispose d'éléments suffisants pour décider de la modérer jusqu'à sa plus simple expression, dans le cadre de la présente contestation connexe au sort du litige principal 1° - ALORS QUE le montant de la pénalité prévue à l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale doit être fixée proportionnellement à la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés ; qu'en l'espèce, Mme W... a fait l'objet d'une pénalité financière de 9.093 euros en raison de son omission de déclaration du décès de son époux, qui a été ramenée à 3.000 euros en phase non contentieuse; qu'en se fondant, pour réduire à néant cette pénalité, sur de considérations inopérantes tirées de son âge et de l'invocation par la CARSAT d'un règlement intérieur qui ne lui serait pas applicable, lorsque le montant de la pénalité devait être fixé en fonction de la seule gravité des faits constatés, de leur caractère intentionnel et répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés, la cour d'appel a violé les article L. 114-17 et R. 114-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige. 2° - ALORS QUE les juges du fond doivent préciser l'origine des renseignements qui ont servi à motiver leur décision ; qu'en adoptant les motifs des premiers juges s'étant bornés à affirmer qu'ils disposaient « d'éléments suffisants » pour décider de réduire à néant la pénalité, sans préciser quels étaient ces éléments de preuve, la cour d'appel a privé sa décision de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
L'action en répétition des arrérages d'une pension de vieillesse perçus par un tiers postérieurement au décès de l'assuré revêt le caractère d'une action personnelle ou mobilière au sens de l'article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008. Comme telle, elle se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer
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CIV. 2 CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1349 F-P+B+I Pourvoi n° Q 19-22.583 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 M. T... K..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Q 19-22.583 contre l'arrêt rendu le 3 juillet 2019 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, dont le siège est 9 boulevard Joffre, 54047 Nancy cedex, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Fischer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. K..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Le Fischer, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 3 juillet 2019), à la suite d'un contrôle administratif portant sur la facturation des actes dispensés par M. K... (le professionnel de santé), infirmier d'exercice libéral, la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle (la caisse) lui a notifié, le 18 janvier 2013, un indu sur le fondement de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale. 2. Le professionnel de santé a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. Le professionnel de santé fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « que la limitation du remboursement des frais de déplacement aux frais qui auraient été exposés par un praticien de la même spécialité se trouvant plus proche du patient, ne concerne pas les déplacements chez les patients déjà pris en charge avant l'arrivée d'un autre praticien plus proche ; qu'en retenant que la nomenclature générale des actes professionnels ne distinguait pas entre les actes « en cours » et les soins nouveaux de sorte que ces dispositions trouvaient à s'appliquer envers tous les actes facturés, la cour d'appel a violé l'article 13 de la nomenclature générale des actes professionnels annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 modifié. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 162-12-1 du code de la sécurité sociale, R. 4312-30 du code de la santé publique et 13, C, 2° de la nomenclature générale des actes professionnels annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 modifié, le deuxième dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-1605 du 25 novembre 2016, applicable à la date des soins litigieux : 4. Selon le premier de ces textes, les infirmiers sont tenus d'effectuer leurs actes dans le respect des dispositions prises pour l'application du titre Ier du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique et en observant la plus stricte économie compatible avec l'exécution des prescriptions. 5. Selon le deuxième, dès qu'il a accepté d'effectuer des soins, l'infirmier ou l'infirmière est tenu d'en assurer la continuité, sous réserve des dispositions de l'article R. 4312-41. 6. Selon le dernier, le remboursement accordé par la caisse pour le déplacement d'un professionnel de santé ne peut excéder le montant de l'indemnité calculé par rapport au professionnel de santé de la même discipline, se trouvant dans la même situation à l'égard de la convention, dont le domicile professionnel est le plus proche de la résidence du malade. 7. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que pour l'application de l'article 13, C, 2°, de la nomenclature générale des actes professionnels, la détermination du domicile professionnel de l'infirmier ou de l'infirmière le plus proche de la résidence du malade s'effectue à la date de la prescription médicale, et pour la durée de l'exécution de celle-ci. 8. Pour condamner le professionnel de santé à payer une certaine somme à la caisse au titre de l'indu, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que l'article 13 de la nomenclature ne distingue pas entre les actes en cours et les soins nouveaux, de sorte qu'il trouve à s'appliquer envers tous les actes médicaux facturés. Il constate qu'il résulte des pièces produites par la caisse que si l'intéressé a facturé des indemnités kilométriques de son cabinet de Boismont jusqu'au domicile des patients à Mercy-le-Bas et à Doncourt-lès-Longuyon, il existait des praticiens plus proches des patients résidant dans ces communes. Il précise qu'en effet, en premier lieu, le professionnel de santé disposait d'un cabinet secondaire dans la commune de Mercy-le-Bas et qu'en second lieu, une infirmière disposait d'un cabinet à Beuveille, commune plus proche de Doncourt-lès-Longuyon. 9. En se déterminant ainsi, sans rechercher si, pour les malades domiciliés à Doncourt-lès-Longuyon, le professionnel de santé n'était pas, à la date de chaque prescription médicale, l'infirmier dont le domicile professionnel était le plus proche de leur résidence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Longwy en ce qu'il a donné acte à M. K... de ce qu'il reconnaît devoir la somme de 576,95 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, l'arrêt rendu le 3 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ; Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour M. K.... PREMIER MOYEN DE CASSATION M. T... K... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle la somme de 242 844,36 euros dont une somme de 3 552,15 euros au titre des indemnités kilométriques ; AUX MOTIFS QUE M. T... K... reproche à la CPAM de retenir un indu relatif à des frais kilométriques dans la mesure où, pour certains patients, un autre infirmier s'était installé de façon plus proche de leur domicile, et soutient que la position de la CPAM selon laquelle le remboursement accordé pour le déplacement d'un professionnel de santé ne peut excéder le montant de l'indemnité calculé par rapport au professionnel de santé de la même discipline est plus proche de la résidence du malade induit des ruptures de soins est préjudiciable au patient ; qu'il fait valoir de plus qu'il appartenait à la CPAM de l'informer de l'installation d'un autre infirmier dans sa zone d'exercice ; que toutefois, les premiers juges ont exactement retenu que l'alinéa 2 de l'article 13 de la Nomenclature générale des actes professionnels ne distingue pas entre les actes "en cours" et les soins nouveaux de sorte que ces dispositions trouvent à s'appliquer envers tous les actes facturés ; que par ailleurs, les premiers juges ont exactement retenu que la CPAM n'avait aucune obligation d'informer M. K... de l'installation d'un autre infirmier ; que la demande sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE selon l'article L. 162-1-7 du Code de la sécurité sociale, la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé, dans le cadre d'un exercice libéral ou d'un exercice salarié auprès d'un autre professionnel de santé libéral, ou en centre de santé ou dans un établissement ou un service médico-social, ainsi que, à compter du 1er janvier 2005, d'un exercice salarié dans un établissement de santé, à l'exception des prestations mentionnées à l'article L. 165-1, est subordonné à leur inscription sur une liste établie dans les conditions fixées au présent article ; que l'inscription sur la liste peut elle-même être subordonnée au respect d'indications thérapeutiques ou diagnostiques, à l'état du patient ; ainsi qu'à des conditions particulières de prescription, d'utilisation ou de réalisation de l'acte ou de la prestation ; qu'en application de l'article 13 de la Nomenclature Générale des Actes professionnels, l'indemnité due au professionnel de santé est calculée pour chaque déplacement à partir de son domicile professionnel et en fonction de la distance parcourue sous déduction d'un nombre de kilomètres fixé à 2 sur le trajet tant aller que retour ; que le remboursement accordé par la caisse pour le déplacement d'un professionnel de santé ne peut excéder le montant de l'indemnité calculé par rapport au professionnel de santé de la même discipline, se trouvant dans la même situation à l'égard de la convention, dont le domicile professionnel est le plus proche de la résidence du malade ; qu'il doit être précisé que l'article 13 de la Nomenclature Générale des Actes professionnels ne distingue pas entre les actes « en cours » et les soins nouveaux de sorte qu'il trouve à s'appliquer envers tous les actes médicaux facturés ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces produites par la CPAM de Meurthe-et-Moselle que Monsieur K... a facturé des indemnités kilométriques de son cabinet de Boismont jusqu'au domicile de patients à Mercy le Bas et à Doncourt les Longuyon ; qu'il existait des praticiens plus proches des patients résidant dans ces communes ; qu'en effet, en premier lieu, Monsieur K... disposait d'un cabinet secondaire dans la commune de Mercy le Bas ; qu'en second lieu, Madame L... Y..., infirmière, disposait d'un cabinet à Beuveille, commune plus proche de Doncourt Les Longuyon ; qu'en outre, la CPAM de Meurthe-et-Moselle n'avait aucune obligation d'informer Monsieur T... K... de l'installation de Madame Y... ; qu'en tout état de cause, c'est à bon droit que la CPAM a réclamé le remboursement des indemnités kilométriques versées en méconnaissance de l'article 13 de la Nomenclature Générale des Actes professionnels ; que la décision de la commission de recours amiable du 17 septembre 2014 sera confirmée sur ce point ; 1°) ALORS QUE la limitation du remboursement des frais de déplacement aux frais qui auraient été exposés par un praticien de la même spécialité se trouvant plus proche du patient, ne concerne pas les déplacements chez les patients déjà pris en charge avant l'arrivée d'un autre praticien plus proche ; qu'en retenant que la nomenclature générale des actes professionnels ne distinguait pas entre les actes « en cours » et les soins nouveaux de sorte que ces dispositions trouvaient à s'appliquer envers tous les actes facturés (arrêt, p. 6), la cour d'appel a violé l'article 13 de la nomenclature générale des actes professionnels annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 modifié ; 2°) ALORS QUE le juge doit répondre aux conclusions des parties ; qu'en se bornant à retenir, pour faire droit à la demande en remboursement d'indemnités kilométriques de la CPAM, que M. K... avait facturé des indemnités kilométriques de son cabinet jusqu'au domicile de patients à Doncourt cependant qu'une infirmière disposait d'un cabinet à Beuveille, commune plus proche de Doncourt (jugement, p. 9), sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette infirmière avait des disponibilités et acceptait d'intervenir pour ses patients sur la commune de Doncourt, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION M. T... K... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle la somme de 242 844,36 euros ; AUX MOTIFS QUE M. T... K... expose, d'une part, que la pratique qu'il a utilisée durant plusieurs années n'a pas donné lieu à observations de la part de la CPAM et qu'en conséquence celle-ci a de fait consenti à cette pratique, d'autre part, que la Caisse n'a pas mis en place la procédure prévue par la convention de 2007 ; que sur le premier point, les premiers juges ont exactement rappelé que l'article 5 de la Nomenclature générale des actes professionnels prévoit, en son paragraphe c), que seuls peuvent être pris en charge les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical sous réserve d'une prescription médicale, et qu'en conséquence M. K... ne peut se prévaloir de l'absence de contrôle et de sanction de la part de la CPAM, qui n'a par ailleurs pas compétence pour modifier les règles de facturation réglementairement établies ; que sur le second point, il ressort des termes de l'article 7.4.1 de la convention nationale destinée à régir les rapports entre les infirmières et les infirmiers libéraux et les organismes d'assurance maladie approuvée par l'arrêté du 18 juillet 2007 que la procédure applicable en cas de non-respect par le professionnel des dispositions de cette convention n'a pas un caractère obligatoire pour la Caisse sauf si celle-ci envisage à l'encontre du professionnel les mesures prévues par ce texte, mesures au rang desquelles ne figure pas la répétition de l'indu ; que la demande sera donc rejetée, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point ; sur la protection des droits patrimoniaux et l'enrichissement indu de la caisse que M. T... K... expose que les sommes qui ont été versées par la Caisse correspondent à des soins effectivement prodigués et qu'en conséquence elle n'a subi aucun préjudice, et qu'en tout état de cause la somme sollicitée constitue une atteinte disproportionnée à son droit de propriété ; qu'il ressort des dispositions de l'article L 133-4 du code de la sécurité sociale qu'en cas d'inobservation par un professionnel de santé des dispositions relatives à la facturation des soins, l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement ; que ces dispositions spéciales excluent les règles de droit commun en matière de répétition de l'indu, et que le remboursement des prestations est dû du seul fait que ces prestations n'ont pas été accomplies selon les règles de facturation, peu important leur caractère effectif et leur paiement au juste prix ; que par ailleurs, si l'action en répétition de l'indu constitue une atteinte aux biens de M. K..., cette atteinte trouve son origine dans une réglementation prise pour assurer l'intérêt général tel que défini par les dispositions de l'article premier du premier protocole annexe à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; qu'en conséquence, la demande sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article L. 161-33 du Code de la sécurité sociale énonce : l'ouverture du droit aux prestations de l'assurance maladie est subordonnée à la production de documents dont le contenu, le support ainsi que les conditions et délais de transmission à la caisse du bénéficiaire sont fixés par décret en Conseil ; que si le bénéficiaire, ayant reçu du professionnel, de l'organisme ou de l'établissement dispensant des actes ou prestations remboursables par l'assurance maladie, les documents nécessaires à la constatation des soins ou d'une incapacité de travail les transmet à la caisse hors du délai prévu, il encourt une sanction fixée par voie réglementaire, pouvant aller jusqu'à la déchéance du droit aux prestations pour la période pendant laquelle le contrôle de celles-ci aurait été rendu impossible ; qu'en cas de transmission électronique, si le professionnel, l'organisme ou l'établissement dispensant des actes ou prestations remboursables par l'assurance maladie est responsable d'un défaut de transmission à la caisse du bénéficiaire de documents mentionnés à l'alinéa précédent ou s'il les a transmis hors du délai prévu, et sans préjudice d'éventuelles sanctions prévues par les conventions nationales mentionnées au chapitre 2 du présent titre, la caisse peut exiger du professionnel ou de l'organisme concerné la restitution de tout ou partie des prestations servies à l'assuré. Pour son recouvrement, cette restitution est assimilée à une cotisation de sécurité sociale ; que l'article 5 de la Nomenclature Générale des Actes professionnels précise : « Seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d'Assurance Maladie, sous réserve que les personnes qui les exécutent soient en règle vis-à-vis des dispositions législatives, réglementaires et disciplinaires concernant l'exercice de leur profession : a) les actes effectués personnellement par un médecin ; b) les actes effectués personnellement par un chirurgien-dentiste ou une sage-femme, sous réserve qu'ils soient de leur compétence ; c) les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical, sous réserve qu'ils aient fait l'objet d'une prescription médicale écrite qualitative et quantitative et qu'ils soient de sa compétence » ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que Monsieur T... K... a réalisé et facturé des actes sans adresser les prescriptions médicales applicables à la date de l'acte ; qu'il importe peu que Monsieur K... ait transmis des bordereaux d'envoi sur lesquels figurerait la mention « ordonnance déjà en votre possession » dès lors qu'il reconnaît ne pas avoir envoyé la prescription applicable à la CPAM de Meurthe-et-Moselle ; qu'en outre, c'est à tort que Monsieur T... K... allègue une acceptation de la part de la CPAM de la pratique consistant à ne pas envoyer la prescription médicale ; qu'en effet, d'une part, la CPAM n'a pas compétence pour modifier les règles de facturation réglementairement établies ; que d'autre part, la seule absence de contrôle et de sanction par la CPAM ne peut être interprétée comme une manifestation de volonté de sa part d'accepter la facturation d'un infirmier d'actes réalisés sans prescription médicale ; que de même, la pratique alléguée par Monsieur K..., qui n'est au demeurant pas démontrée, ne saurait valoir acceptation de la CPAM et instauration de règles dérogatoires à celles fixées par les textes légaux, réglementaires et conventionnels ; que Monsieur T... K... ne peut ainsi se prévaloir de ses propres manquements pour justifier une modification des règles applicables ; qu'en conséquence, la décision de la commission de recours amiable du 17 septembre 2014 sera confirmée sur ce point ; sur le droit au respect des biens, que Monsieur T... K... sollicite l'annulation de la décision de la Commission de recours amiable du 17 septembre 2014 au motif qu'elle constituerait une atteinte injustifiée à ses biens, méconnaissant ainsi le droit au respect des biens énoncé à l'article 1 du premier protocole de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que toutefois, il y a lieu de dire que si l'action en répétition de l'indu et la décision de la Commission de recours amiable prévoyant le remboursement des actes facturés sans respect des règles de facturation constitue évidemment une atteinte aux biens en ce qu'elle entraînerait une dépossession de Monsieur K..., il s'agit d'une atteinte justifiée par la seule application des dispositions du Code de la sécurité sociale et du Code civil ; que la décision de la Commission de recours amiable ne peut donc être annulée sur ce fondement ; 1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties et méconnaître les termes du litige ; qu'en retenant, pour condamner M. K... au paiement de la somme de 242 844,36 euros, qu'il n'était pas contesté que ce dernier avait réalisé et facturé des actes sans adresser les prescriptions médicales applicables à la date de l'acte et qu'il reconnaissait ne pas avoir envoyé la prescription applicable à la CPAM de Meurthe et Moselle (jugement, p. 10), quand M. K... soutenait qu'il n'avait « jamais reconnu que cela était valable pour la totalité de la somme réclamée, ce pourquoi il demande la production de pièces », notamment des ordonnances échues et les bordereaux d'envoi sur lesquelles la CPAM fondait ses poursuites (ses conclusions, p. 15), la cour d'appel a dénaturé les conclusions des parties et violé l'article 4 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE toute personne physique a droit au respect de ses biens pour lesquels toute atteinte doit être justifiée par un but d'intérêt général et proportionnée à ce but ; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner M. K... au paiement de la somme de 242 844,36 euros, que l'atteinte portée à ses biens trouvait son origine dans une règlementation prise pour assurer l'intérêt général (arrêt, p. 7, al. 6), sans rechercher concrètement si M. K... n'avait pas, dans l'exercice de sa profession, effectué des actes médicaux conforme aux données acquises de la science et indispensables à la survie de ses patients de sorte qu'au cas d'espèce, il convenait d'écarter l'application de la législation nationale laquelle revenait à le priver de manière disproportionnée de toute rémunération pour des actes certes irréguliers mais justifiés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du 1er Protocole additionnel à la Convention Européenne des droits de Sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.
Selon l'article L. 162-12-1 du code de la sécurité sociale, les infirmiers sont tenus d'effectuer leurs actes dans le respect des dispositions prises pour l'application du titre Ier du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique et en observant la plus stricte économie compatible avec l'exécution des prescriptions. Selon l'article R. 4312-30 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-1605 du 25 novembre 2016 , dès qu'il a accepté d'effectuer des soins, l'infirmier ou l'infirmière est tenu d'en assurer la continuité, sous réserve des dispositions de l'article R. 4312-41. Selon l'article 13, C, 2°, de la nomenclature générale des actes professionnels annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 modifié, le remboursement accordé par la caisse pour le déplacement d'un professionnel de santé ne peut excéder le montant de l'indemnité calculé par rapport au professionnel de santé de la même discipline, se trouvant dans la même situation à l'égard de la convention, dont le domicile professionnel est le plus proche de la résidence du malade. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que pour l'application de l'article 13, C, 2°, de la nomenclature générale des actes professionnels, la détermination du domicile professionnel de l'infirmier ou de l'infirmière le plus proche de la résidence du malade s'effectue à la date de la prescription médicale, et pour la durée de l'exécution de celle-ci
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CIV. 2 CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1350 F-P+B+I Pourvoi n° P 19-22.260 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La société Alliance Perf, société à responsabilité limitée, dont le siège est 2 allée Joachim du Bellay, 54600 Villers-lès-Nancy, a formé le pourvoi n° P 19-22.260 contre l'arrêt n° RG : 16/03276 rendu le 10 mai 2019 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges, dont le siège est 14 rue de la Clé d'Or, CS 30584, 88015 Épinal, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vigneras, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Alliance Perf, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Vigneras, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 10 mai 2019, RG n° 16/03276), la SARL Alliance Perf (la société), fournisseur de dispositifs médicaux d'hospitalisation à domicile, a fait l'objet d'un contrôle du service national du contrôle médical Nord-Est portant sur la période du 1er octobre 2010 au 4 octobre 2012, à l'issue duquel la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges (la caisse) lui a notifié un indu le 2 octobre 2013. 2. La société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Examen des moyens Sur le second moyen, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. La société fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes et de la condamner au paiement de l'indu, alors « que les praticiens-conseils du service du contrôle médical, qui sont des agents de la caisse nationale d'assurance maladie, laquelle est un organisme assurant la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale, doivent, pour effectuer régulièrement leur mission de contrôle, être agréés et assermentés conformément aux prévisions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ; que dès lors, en affirmant qu'en l'espèce « les dispositions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ne s'appliquent pas », aux motifs inopérants que « le contrôle de l'activité de distribution de dispositifs médicaux par la société Alliance Perf n'a pas été mené dans le cadre de la lutte contre la fraude par des agents dressant des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire », après avoir pourtant constaté que l'analyse de l'activité de la société Allianz Perf avait été réalisée par le service du contrôle médical Nord-Est, la cour d'appel a violé l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale. » Réponse de la Cour 5. Il résulte des articles L. 114-10 et L. 315-1, III bis, du code de la sécurité sociale, que l'obligation d'agrément et d'assermentation énoncée par le premier de ces textes ne s'applique pas aux praticiens conseils du service national du contrôle médical qui procèdent, sur le fondement du second, au contrôle de facturation des dispositifs médicaux pris en charge par l'assurance maladie. 6. L'arrêt retient que le contrôle de l'activité de distribution de dispositifs médicaux par la société n'a pas été mené dans le cadre de la lutte contre la fraude par des agents dressant des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire, de sorte que les dispositions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ne s'appliquent pas. 7. De ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit que la procédure de contrôle n'était entachée d'aucune irrégularité. 8. Le moyen n'est, dés lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Alliance Perf aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Alliance Perf et la condamne à payer à caisse primaire d'assurance maladie des Vosges la somme de 1 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la société Alliance Perf. PREMIER MOYEN DE CASSATION Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société Alliance'Perf de l'ensemble de ses demandes, confirmé le bien-fondé de l'action en répétition d'indu engagée par la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges, et par-là de la notification d'indu du 2 octobre 2013, ainsi que de la décision prise par la commission de recours amiable en date du 6 mai 2014, et d'AVOIR condamné la société Alliance'Perf à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges la somme de 20 811,97 euros à titre de répétition d'indu, AUX MOTIFS PROPRES QUE la société Alliance'Perf demande à la cour d'annuler la procédure de contrôle ; qu'elle fait valoir à l'appui 4 motifs d'irrégularité, tous contestés par la CPAM des Vosges, qu'il convient d'examiner successivement ; 1) L'article L. 315-1 -IV du code de la sécurité sociale qui sert de fondement à la procédure de contrôle est inapplicable en l'espèce ; que la société Alliance'Perf soutient que plusieurs courriers mentionnent directement ou indirectement une analyse sur le plan médical diligentée sur le fondement de cet article alors que l'activité de distribution de dispositifs médicaux ne constitue pas une profession de santé ; qu'il résulte toutefois des pièces versées aux débats que la procédure de contrôle a bien été menée sur les activités de distribution de dispositifs médicaux de la société Alliance'Perf et non sur les dispositions susvisées applicables aux professions de santé, dont elle ne fait effectivement pas partie ; que la lettre d'information préalable adressée à la société Alliance'Perf le 3 décembre 2012 par le service du contrôle médical Nord-Est précise bien que l'analyse de son activité est menée en application de l'article L. 315-1-III bis du code de la sécurité sociale ; que les autres dispositions visées par erreur dans les courriers évoqués par la société Alliance'Perf font référence à des règles formelles non obligatoires pour le contrôle en question et ne lui portent pas préjudice ; 2) La procédure de contrôle d'activité a été mal diligentée à l'encontre de Mme N... D... alors que c'est la société Alliance'Perf qui a été destinataire de la notification d'indu ; que contrairement à ce que soutient la société Alliance'Perf, toute la procédure de contrôle a bien été dirigée à son encontre ; que si Mme N... D... est également visée dans certains courriers, c'est toujours en ajout de la société Alliance'Perf elle-même ; que la CPAM des Vosges justifie par la production d'un extrait du BODACC que Mme N... D... était co-gérante de la société Alliance'Perf au moment des faits ; que c'est en cette qualité qu'elle est mentionnée dans la procédure aux côtés de la société Alliance'Perf, et non pas en sa qualité d'infirmière ; 3) Violation de l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale sur les droits de la défense ; que les droits invoqués par la société Alliance'Perf concernent la procédure de contrôle de l'article L. 315-1-IV du code de la sécurité sociale et ne sont pas transposables à la procédure de contrôle de l'article L. 315-1-III bis du code de la sécurité sociale, applicable en l'espèce ; que quand bien même la CPAM des Vosges aurait visé dans des courriers des articles non applicables, le non-respect de règles de forme qui ne s'appliquent qu'aux professionnels de santé, dont ne fait pas partie la société Alliance'Perf, est sans effet sur la régularité de la procédure en cause ; 4) Les agents de la CPAM et du service du contrôle médical ne justifient pas avoir été agréés et assermentés conformément à l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ; qu'en l'espèce, le contrôle de l'activité de distribution de dispositifs médicaux par la société Alliance'Perf n'a pas été mené dans le cadre de la lutte contre la fraude par des agents dressant des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire, de sorte que les dispositions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ne s'appliquent pas ; qu'il se déduit de ces éléments que les motifs d'irrégularité de la procédure de contrôle invoqués par la société Alliance'Perf ne sont pas fondés et qu'il n'y a pas lieu d'annuler la procédure de contrôle ; que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la Sarl Alliance'Perf soutient que la procédure a été suivie sur un fondement juridique erroné et qu'elle a été mal dirigée en la personne de Madame D... N... ; que sur le premier argument soulevé, il convient de relever que dans la lettre avisant de la mise en place d'une procédure d'analyse, le médecin-conseil vise les dispositions de l'article L. 315-III bis du Code de la Sécurité Sociale, qui sont bien les dispositions applicables en l'espèce. Dès lors, ce moyen ne saurait prospérer ; que concernant le second argument, il convient de relever que la procédure a été diligentée contre « Madame D...-Alliance-Perf » ; qu'il n'est pas contestable que c'est l'activité de la Sarl qui est soumise à « analyse » et Madame D... n'est visée qu'en sa qualité de gérante de cette société, ce qui est légitime et régulier ; ALORS QUE les praticiens-conseils du service du contrôle médical, qui sont des agents de la caisse nationale d'assurance maladie, laquelle est un organisme assurant la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale, doivent, pour effectuer régulièrement leur mission de contrôle, être agréés et assermentés conformément aux prévisions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ; que dès lors, en affirmant qu'en l'espèce « les dispositions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ne s'appliquent pas », aux motifs inopérants que « le contrôle de l'activité de distribution de dispositifs médicaux par la société Alliance Perf n'a pas été mené dans le cadre de la lutte contre la fraude par des agents dressant des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire » (arrêt, p. 4), après avoir pourtant constaté que l'analyse de l'activité de la société Allianz Perf avait été réalisée par le service du contrôle médical Nord-Est (arrêt, p. 2), la cour d'appel a violé l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale. SECOND MOYEN DE CASSATION Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société Alliance'Perf de l'ensemble de ses demandes, confirmé le bien-fondé de l'action en répétition d'indu engagée par la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges, et par là de la notification d'indu du 2 octobre 2013, ainsi que de la décision prise par la commission de recours amiable en date du 6 mai 2014, et d'AVOIR condamné la société Alliance'Perf à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges la somme de 20 811,97 euros à titre de répétition d'indu, AUX MOTIFS PROPRES QUE la charge de la preuve du paiement indu incombe au demandeur en restitution ; que selon les articles L. 165-1 et R. 165-1 et suivants du code de la sécurité sociale, le remboursement par l'assurance maladie des dispositifs médicaux à usage individuel, des tissus et cellules issus du corps humain quel qu'en soit le degré de transformation et de leurs dérivés, des produits de santé autres que les médicaments visés à l'article L. 162-17 et des prestations de services et d'adaptation associées est subordonné à leur inscription sur une liste ; que l'inscription sur la liste peut elle-même être subordonnée au respect de spécifications techniques, d'indications thérapeutiques ou diagnostiques et de conditions particulières de prescription et d'utilisation ; que les dispositions relatives à la liste des produits et prestations remboursables sont d'application stricte ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces produites que la société Alliance'Perf n'a pas respecté les dispositions suivantes relatives à la liste des produits et prestations remboursables : - facturation d'accessoires servant à la dépose de perfusions : alors que seule la pose est prise en charge, il est établi que la société Alliance'Perf facturait systématiquement le double des accessoires nécessaires à la pose ; que cette facturation ne pouvait s'expliquer que par la volonté de fournir des accessoires pour assurer également la dépose, et ainsi contourner la liste des produits et prestations remboursables ; les dispositions nouvelles invoquées par la société Alliance'Perf ne s'appliquaient pas pour la période du contrôle et sont sans effet sur les facturations en cause ; - facturation d'un code inapproprié pour la pose de Picc M... : un code spécifique est prévu dans la liste des produits et prestations pour la pose de Picc M... ; lorsqu'il n'a pas été utilisé par la société Alliance'Perf, la CPAM des Vosges est tenue à une stricte application de la nomenclature et se trouve fondée à ne pas prendre en charge les accessoires en cause ; - facturation des accessoires pour chambre à cathéter ou cathéter central pour l'entretien du Picc M... : la facturation de ces accessoires n'est pas prévue dans la liste des produits et prestations remboursables ; l'explication donnée par la société Alliance'Perf relative à un changement d'aiguille n'est pas étayée par les prescriptions médicales produites et ne permet pas de justifier ces facturations ; - facturation injustifiée de forfaits de mise à disposition de diffuseurs ou de pompes : la modification du traitement ou l'existence d'une prescription supplémentaire ne donne pas droit à la facturation d'un nouveau forfait ; la prise en charge est limitée à un forfait couvrant quatre semaines à compter du premier jour de la cure et aucune autre indication de prise en charge n'est prévue ; - sutures : la société Alliance'Perf reconnaît les erreurs de facturation sur ce point ; - facturation aux infirmières en sus en cas de défaillance ou de casse du matériel : le fournisseur ne peut pas facturer au-delà de la prescription médicale ; que c'est à juste titre que la CPAM des Vosges soutient que la défaillance du matériel n'est pas imputable à l'assurance maladie mais relève de la responsabilité du fournisseur ; - facturation de location de pompe au-delà de la durée prescrite de la cure de médicament : la liste des produits et prestations fixe expressément la prise en charge de la location à la durée prescrite de la cure et non à la durée de mise à disposition par le fournisseur ; les arguments économiques contraires avancés par la société Alliance'Perf sont dès lors inopérants ; l'analyse des prescriptions permet de connaître les durées des cures, de sorte que les sommes facturées en plus sont identifiables et indues ; - facturation de sondes naso-gastriques inappropriées pour les enfants de moins de 16 ans : le non-respect de la liste des produits et prestations est établi par la prescription de sondes polyuréthane/silicone non prévue pour les enfants de moins de 16 ans et par le dépassement du nombre de sondes prises en charge pour une période déterminée ; - facturation d'accessoires pour les dispositifs de saignée non prévus par la liste des produits et prestations : la société Alliance'Perf fait valoir la nécessité des sets d'asepsie pour les saignées réalisées à domicile et le fait que ces sets étaient prescrits, tout en reconnaissant qu'ils n'étaient pas pris en charge dans la liste ; l'interprétation stricte des dispositions relatives à la liste des produits et prestations remboursables ne permet pas la prise en charge de ces accessoires ; - facturation non conforme pour les cures de chimiothérapie : conformément aux dispositions relatives à la liste des produits et prestations remboursables, la CPAM des Vosges a ramené à l'unité ou à la cure les aiguilles et accessoires pour chambre à cathéter ou cathéter central multiples, sauf s'ils avaient été réalisés lors de la dernière délivrance, et a refusé les prises en charges pour les débranchements ; qu'il résulte de ces éléments que la société Alliance'Perf a facturé des dispositifs non pris en charge par la CPAM des Vosges à concurrence de la somme de 20 811,97 euros ; qu'en sa qualité de fournisseur de dispositifs médicaux, la société Alliance'Perf ne pouvait pas se contenter d'exécuter les prescriptions médicales sans vérifier la conformité à la règlementation applicable ; que les griefs établis caractérisent le non-respect par la société Alliance'Perf dans l'élaboration de sa facturation des conditions de prise en charge mentionnées dans la liste des produits et prestations ; que dès lors, l'argument tiré de l'exonération de sa propre responsabilité du fait de la responsabilité des auteurs des prescriptions n'est pas pertinent ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont condamné la société Alliance'Perf à payer à la CPAM des Vosges la somme de 20 811,97 euros à titre de répétition d'indu pour la période du 1er octobre 2010 au 4 octobre 2012 ; que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions et la société Alliance'Perf déboutée de l'ensemble de ses demandes ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur la responsabilité des prescripteurs, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie a diligenté une action en remboursement de l'indu sur le fondement de l'article L. 133-4 du Code de la Sécurité Sociale ; qu'il ne s'agit pas de vérifier si la prescription était médicalement fondée, si la prescription a été correctement exécutée, ou si il y a un enrichissement sans cause, il s'agit de rechercher si les conditions de prise en charge des dispositifs médicaux inscrits à la liste des Produits et Prestations (LPP) sont établies ; que la prise en charge par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie ne peut intervenir qu'à la condition du respect par le fournisseur, dans sa facturation, des conditions figurant à la LPP ; que dès lors, seul celui qui a facturé doit rendre compte des sommes perçues, et les manquements éventuels des médecins sont indifférents ; que sur l'application de la liste des Produits et Prestations Remboursables, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la LPPR est d'application stricte et ne peut faire l'objet d'aucune interprétation, son évolution dans le sens d'une meilleure prise en charge des patients et réalisation de soins infirmiers relève du pouvoir réglementaire et législatif et non de la juridiction du contentieux de la Sécurité Sociale ; que, sur la pose/dépose, il est effectivement reproché à la SARL ALLIANCE PERF d'avoir facturé des accessoires servant à la dépose, or la LPP prévoit clairement, aux codes 1185668 et 1182078, que les accessoires ne sont utilisables que pour la seule pose de la perfusion ; qu'ils sont pris en charge uniquement pour la pose de la perfusion et en aucun cas pour la dépose ; que le fait que la prescription médicale de soins infirmiers mentionne « branchement et débranchement » de la perfusion, n'est pas de nature à justifier la facturation d'accessoires pour la dépose, dans la mesure où la LPPR ne prévoit pas cette facturation ; qu'il s'ensuit que les facturations d'accessoires inscrits aux codes 1185668 ou 1182078 pour le débranchement de la perfusion ne respectent donc pas la nomenclature ; que sur la pose du Picc M... au bras du malade, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie reproche à la SARL ALLIANCE PERF d'avoir facturé le code 1182078 « Accessoires à usage unique pour la pose de la perfusion au bras du malade » pour la pose de Picc M..., alors que s'agissant d'une voie veineuse centrale, la Nomenclature prévoit l'utilisation du code 185668 « Accessoires pour chambre à cathéter implantable ou cathéter central » ; que la Nomenclature étant d'application stricte, dès lors qu'un code de la LPP existe pour une situation donnée, c'est ce code qui doit s'appliquer et non un autre au motif que ce second code n'exclut pas ladite situation ; que sur l 'entretien du Picc Line, il est reproché à la SARL ALLIANCE PERF d'avoir facturé des accessoires pour chambre à cathéter ou cathéter central pour l'entretien du PICC M... alors qu'ils n'étaient pas facturables ; que le service médical a accepté à la place la facturation d'accessoires pour héparinisation ; que la Société indique que « ce n'est pas proprement dit un entretien qui est réalisé mais bien un changement de l'aiguille et d'une nouvelle pose » ; mais que les prescriptions médicales ne font pas état de prescriptions d'aiguilles, en conséquence de quoi il ne peut pas être facturé d'accessoires en lien avec celles-ci ; que l'argumentation avancée par la SARL ALLIANCE PERF sera rejetée ; que sur le forfait de mise à disposition de diffuseur ou de pompe, il est reproché à la SARL ALLIANCE PERF la facturation de forfaits de mise à disposition de diffuseur (code 1161024) et de pompe (code 1185020), qui ne sont facturables que par période de quatre semaines à compter du premier jour de la cure ; qu'ainsi, la modification du traitement ou l'existence d'une prescription supplémentaire, ne donne pas droit à la facturation d'un nouveau forfait de mise à disposition, cela n'étant pas expressément prévu dans les indications de prise en charge mentionnées à la LPP ; que sur la facturation aux infirmières en cas de défaillance ou de casse, la SARL ALLIANCE PERF conteste le grief concernant la facturation de matériel demandé par l'infirmière en sus ; que la Société indique que cela ne pourrait être accepté par les infirmières et sollicite une « tolérance dans une mesure raisonnable considérant qu'il peut arriver qu'une aiguille casse, qu'un dispositif soit défaillant... » ; que toutefois, le fournisseur de dispositifs médicaux ne peut facturer que dans la limite de la prescription médicale, sans pouvoir facturer en sus ; que dans l'hypothèse où le matériel serait défaillant, cela ne peut être imputable à l'assurance maladie mais uniquement au fournisseur du produit défaillant ; qu'en conséquence, la facturation de dispositifs au-delà du nombre prescrit ne peut être prise en charge par l'assurance maladie, et l'argument de la société sera rejeté ; que sur la location de pompe, il est reproché à la SARL ALLIANCE PERF la facturation de jours de location de pompe programmable (code 1183333), qui ne sont facturables que pour les seuls jours de cure et donc d'utilisation du matériel ; qu'en effet, les dispositions de la LPP sont extrêmement claires sur ce point et indiquent que « la location de l'appareil est accordée uniquement pour la durée prescrite de la cure de médicament et non pour la durée de mise à disposition du matériel par le fournisseur » ; que sur les sondes naso-gastriques pour les enfants, la SARL ALLIANCE PERF a facturé pour des enfants une sonde polyuréthane/silicone nasogastriques (code 1193780) sur prescription « set de soins pour nutrition entérale » soit en sus de sondes en PVC (code 1130578), soit en sus de sondes polyuréthane/silicone ; que la Caisse a uniquement accepté les sondes en PVC et non celles en silicone, et a refusé la facturation de sonde en lieu et place d'un set non inscrit à la LPP ; que les dispositions de la LPPR sont d'ordre public et s'imposent aux caisses, aux fournisseurs, aux assurés sociaux et elles sont d'application stricte ; que l'indu correspondant sera donc bien confirmé ; que sur les dispositifs de saignée, la SARL ALLIANCE PERF a facturé des accessoires pour pose de perfusion pour les dispositifs de saignée ; que cependant, la LPP indique que « le tarif couvre une poche ou un flacon de recueil et une tubulure avec aiguille », de sorte qu'aucun autre accessoire pour pose de la perfusion ne peut être accepté ; que l'indu sera confirmé ; ALORS QUE 1°), en cas d'inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement ; qu'en retenant, pour dire la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges fondée à recouvrer un indu auprès de la Sarl Alliance'Perf, qu'en sa qualité de fournisseur de dispositifs médicaux, elle ne pouvait pas se contenter d'exécuter les prescriptions médicales sans vérifier la conformité à la règlementation applicable, et que l'argument tiré de l'exonération de sa propre responsabilité du fait de la responsabilité des auteurs des prescriptions n'est pas pertinent (arrêt, p. 6), sans toutefois rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions de la société Alliance Perf, pp. 19-26), si le respect des prescriptions médicales s'imposait à la société Alliance Perf qui, ne pouvant les remettre en cause, se contentait de délivrer puis facturer les dispositifs médicaux à usage individuel conformément aux prescriptions établies par l'équipe médicale en charge de la personne malade et n'était dès lors pas à l'origine du non-respect des règles de facturation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, ALORS QUE 2°), en cas d'inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement ; qu'en retenant, pour dire la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges fondée à recouvrer un indu auprès de la Sarl Alliance'Perf, que seul celui qui a facturé doit rendre compte des sommes perçues et que les manquements éventuels des médecins sont indifférents (jugement du 16 novembre 2016, p. 3), cependant que seul celui qui est à l'origine du non-respect des règles de tarification, de distribution ou de facturation peut faire l'objet d'une procédure de recouvrement de l'indu, la cour d'appel a violé l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, ALORS QUE 3°), en affirmant que la facturation du double des accessoires nécessaires à la pose ne pouvait s'expliquer que par la volonté de fournir des accessoires pour assurer également la dépose, et ainsi contourner la liste des produits et prestations remboursables (arrêt, p. 5), la cour d'appel a statué par un motif hypothétique, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
Il résulte des articles L. 114-10 et L. 315-1, III bis, du code de la sécurité sociale, que l'obligation d'agrément et d'assermentation énoncée par le premier de ces textes ne s'applique pas aux praticiens conseils du service national du contrôle médical qui procèdent, sur le fondement du second, au contrôle de facturation des dispositifs médicaux pris en charge par l'assurance maladie
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CIV. 2 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1355 F-P+B+I Pourvoi n° K 19-15.449 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 M. A... K..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° K 19-15.449 contre l'arrêt rendu le 21 février 2019 par la cour d'appel d'Angers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la caisse de mutualité sociale agricole Mayenne-Orne-Sarthe, dont le siège est 30 rue Paul Ligneul, 72032 Le Mans cedex 9, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Renault-Malignac, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. K..., de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la caisse de mutualité sociale agricole Mayenne-Orne-Sarthe, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Renault-Malignac, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 21 février 2019), M. K... (l'assuré), alors salarié agricole, affilié en cette qualité, au titre des accidents du travail, au régime de protection sociale des salariés agricoles, a été victime, le 4 mars 2006, d'un accident du travail pour lequel la caisse de mutualité sociale agricole Mayenne-Orne-Sarthe (la caisse) lui a attribué une rente de 25 % pour un taux d'incapacité permanente partielle de 50 %. Ayant quitté son emploi salarié pour exercer une activité d'exploitant agricole relevant de l'assurance accident du travail des exploitants agricoles (ATEXA), il a été victime d'un second accident du travail, le 13 septembre 2014, pour lequel la caisse lui a attribué une rente de 22,5 % pour un taux d'incapacité permanente partielle de 45 %. 2. Après rejet de son recours amiable, l'assuré a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale en sollicitant la prise en compte du taux d'incapacité permanente du premier accident du travail pour le calcul du taux utile afférent à la rente du dernier accident. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. L'assuré fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande, alors : « 1°/ que pour déterminer la partie du taux de l'accident considérée inférieure ou supérieure à 50 %, en cas d'accidents successifs, le calcul du taux utile afférent à la rente du dernier accident du travail prend en compte la somme de tous les taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré ; qu'en refusant ce cumul à la victime d'un premier accident du travail alors qu'il était salarié agricole et d'un second alors qu'il était non-salarié agricole, la cour d'appel a violé, par ajout d'une condition d'unicité de régime qu'il ne prévoit pas, l'article D. 752-26, alinéa 4, du code rural et de la pêche maritime ; 2°/ qu'une différence de traitement doit être justifiée par des raisons d'intérêt général en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; qu'en ne recherchant pas si la distinction entre les assurés mono ou multi-régimes s'expliquait par un motif légitime voulu par la loi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité devant la loi, tel qu'il résulte de l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. » Réponse de la Cour 4. Il résulte du quatrième alinéa de l'article D. 752-26 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-1123 du 19 juillet 2007, applicable au litige, qu'en cas d'accidents successifs, le calcul du taux utile afférent à la rente du dernier accident prend en compte la somme de tous les taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré relevant de l'article L. 752-1 du même code, c'est-à-dire à l'assuré relevant du régime ATEXA, de sorte que seules les incapacités permanentes résultant d'accidents du travail pris en charge au titre de ce régime peuvent être considérées, au sens de ce texte, comme résultant d'accidents successifs et prises en compte pour le calcul du taux utile. 5. Ayant constaté que l'accident dont l'assuré avait été victime le 4 mars 2006 avait été pris en charge au titre du régime des salariés agricoles, la cour d'appel, qui a rappelé que la distinction entre les régimes des salariés agricoles et des non-salariés agricoles procédait de la loi, a à bon droit retenu que le taux d'incapacité permanente partielle qui a été attribué à l'assuré au titre de l'accident du 4 mars 2006 ne pouvait être pris en compte pour le calcul du taux utile applicable à la rente concernant l'accident survenu le 13 septembre 2014. 6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. K... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. K... et le condamne à payer à la caisse de mutualité sociale agricole de Mayenne-Orne-Sarthe la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. K... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. K... de sa demande de fixation à 67,5 % de son taux d'incapacité permanente partielle ; aux motifs propres que l'article D. 752-26 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé : « La rente prévue à l'article L. 752-6 est attribuée au chef d'exploitation ou d'entreprise agricole dès lors qu'il présente un taux d'incapacité permanente d'au moins 30 % et aux assurés mentionnés au II de l'article L. 752-1 en cas d'incapacité permanente totale. La rente a laquelle a droit la victime en application du sixième alinéa de l'article L. 752-6 est égale au gain forfaitaire mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 752-5 multiplié par le taux d'incapacité préalablement réduit de moitié pour la partie de ce taux qui ne dépasse pas 50 % et augmenté de la moitié pour la partie qui excède 50 %. L'arrêté prévu à l'article L. 752-6, fixant le pourcentage du gain forfaitaire annuel à retenir dans le calcul de la rente due à la victime mentionnée au II de l'article L. 752-1 en cas d'incapacité permanente totale suite à un accident du travail, est pris par le ministère de l'Agriculture. En cas d'accidents successifs, le calcul du taux utile afférent à la rente du dernier accident prend en compte la somme de tous les taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré relevant de l'article L. 752-1 du présent code, qu'ils aient donné lieu ou non au versement d'une rente pour déterminer, en application du deuxième alinéa du présent article, la partie du taux de l'accident considérée inférieure ou supérieure à 50 %. Lorsque l'un des taux d'incapacité se trouve modifié, en cas d'amélioration ou d'aggravation de l'état de santé de l'assuré, il est procédé au nouveau calcul du taux utile de la rente concernée en ne retenant que la somme des taux d'incapacité permanente antérieurement reconnus lors de l'accident initial donnant lieu à la modification du taux d'incapacité » ; qu'il résulte du quatrième alinéa de cet article que le calcul du taux utile afférent à la rente du dernier accident du travail prend en compte la somme de tous les taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré relevant de l'article L. 752-1, c'est-à-dire aux personnes relevant du régime de l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés agricoles ; que seules les incapacités permanentes résultant d'accident du travail pris en charge au titre de ce régime peuvent donc être considérées, au sens de ce texte, comme résultant d'accidents successifs et sont prises en compte pour le calcul du taux utile ; qu'en l'espèce, l'accident du 4 mars 2006 dont M. K... a été victime a été pris en charge au titre du régime des salariés agricoles et le taux d'incapacité permanente partielle qui lui a été attribué au titre de cet accident ne peut être pris en compte, en application de l'alinéa 4 de l'article D. 752-26 pour le calcul du taux utile applicable à l'accident du travail survenu le 13 septembre 2014 ; que s'agissant du moyen tiré de la violation du principe d'égalité, tel qu'il résulte de l'article 1er de la Constitution et l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ce principe ne s'oppose ni à ce que le législateur ou le pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; que l'existence de régimes de sécurité sociale distincts en fonction de la profession exercée par les assurés ne constitue pas une inégalité de traitement dans la jouissance des droits sociaux dès lors que toutes les personnes exerçant une activité professionnelle déterminée dans les mêmes conditions sont affiliées au même régime ; que le régime des non-salariés agricoles obéit à des règles spécifiques qui touchent notamment son mode de financement, lequel repose essentiellement sur les cotisations sociales des personnes bénéficiaires de ce régime, et non sur celles des employeurs comme c'est le cas dans le régime des salariés agricoles, ainsi que ses prestations, lesquelles sont assises sur une base forfaitaire et non sur les rémunérations des cotisants ; que contrairement à ce que soutient M. K..., un salarié victime d'accidents successifs pris en charge par un même régime ne se trouve pas dans la même situation qu'un salarié victime de plusieurs accidents du travail relevant de régimes différents puisque le second n'aura pas été soumis pour chacun des accidents qu'il aura subis aux mêmes règles en matière de cotisations et d'attribution des prestations ; qu'il en résulte que le refus opposé par la caisse de faire application de la règle posée par le quatrième alinéa de l'article D. 752-26 du code rural et de la pêche maritime applicable en matière d'accidents successifs, au motif que la première incapacité permanente n'a pas été indemnisée au titre du régime des non-salariés agricoles, ne porte pas atteinte au principe d'égalité devant la loi ; que c'est donc à bon droit que la caisse, puis la commission de recours amiable ont fait application du deuxième alinéa de l'article D. 752-26 et ont retenu, pour la liquidation de la rente attribuée au titre de l'accident du travail du 13 septembre 2014, un taux utile de 22,5 %, compte tenu d'une incapacité permanente partielle de 45 % ; qu'il y a lieu de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ; et aux motifs réputés adoptés qu'il convient de noter d'une part que les salariés agricoles relèvent de dispositions distinctes et d'un régime différent financé suivant des modalités qui lui sont propres, en sorte que les deux régimes sont parfaitement étanches, d'autre part que le texte se réfère aux dispositions de l'article L. 752-1 du code rural et de la pêche maritime pour le calcul utile du dernier accident ; que ce dernier texte se rapporte aux seuls non-salariés agricoles ; que de fait, en exigeant de prendre en compte dans le calcul la somme de tous les taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré relevant de l'article L. 752-1, il a été implicitement exclu la prise en compte des taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré relevant des salariés agricoles pour effectuer ledit calcul ; 1) alors que pour déterminer la partie du taux de l'accident considérée inférieure ou supérieure à 50 %, en cas d'accidents successifs, le calcul du taux utile afférent à la rente du dernier accident du travail prend en compte la somme de tous les taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré ; qu'en refusant ce cumul à la victime d'un premier accident du travail alors qu'il était salarié agricole et d'un second alors qu'il était non-salarié agricole, la cour d'appel a violé, par ajout d'une condition d'unicité de régime qu'il ne prévoit pas, l'article D. 752-26, alinéa 4, du code rural et de la pêche maritime ; 2) alors subsidiairement qu'une différence de traitement doit être justifiée par des raisons d'intérêt général en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; qu'en ne recherchant pas si la distinction entre les assurés mono ou multi régimes s'expliquait par un motif légitime voulu par la loi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité devant la loi, tel qu'il résulte de l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme de 1789.
Il résulte de l'article D. 752-26, alinea 4, du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-1123 du 19 juillet 2007, qu'en cas d'accidents successifs, le calcul du taux utile afférent à la rente du dernier accident prend en compte la somme de tous les taux d'incapacité permanente reconnus à l'assuré relevant de l'article L. 752-1 du même code, c'est-à-dire à l'assuré relevant du régime de l'assurance obligatoire des non salariés agricoles, de sorte que seules les incapacités permanentes résultant d'accidents du travail pris en charge au titre de ce régime peuvent être considérées, au sens de ce texte, comme résultant d'accidents successifs et prises en compte pour le calcul du taux utile
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CIV. 2 FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle sans renvoi M. PIREYRE, président Arrêt n° 1358 F-P+B+I Pourvoi n° M 19-19.406 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 L'URSSAF de Bourgogne, agissant pour l'Agence pour la sécurité sociale des indépendants, (anciennement RSI), dont le siège est 12 boulevard du docteur Jean Veillet, CS 97803, 21078 Dijon cedex, a formé le pourvoi n° M 19-19.406 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2019 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. C... F..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Gauthier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de l'URSSAF de Bourgogne, agissant pour l'Agence pour la sécurité sociale des indépendants, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Gauthier, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 16 mai 2019), la caisse du régime social des indépendants de Bourgogne (la caisse), aux droits de laquelle vient l'Agence pour la sécurité sociale des indépendants, représentée par l'URSSAF de Bourgogne, a informé M. F..., par lettre du 11 décembre 2008, de ce qu'elle lui était redevable d'un trop perçu correspondant à des cotisations qu'il avait versées pour l'année 2008. M. F... a demandé le versement de ces sommes en novembre 2013. La caisse lui a opposé un rejet implicite. M. F... a saisi la commission de recours amiable de la caisse, qui a rejeté sa contestation, par avis du 13 avril 2015. 2. La caisse, après contrôle des cotisations dues par M. F... pour les années 2009 à 2012, lui a adressé trois mises en demeure, les 19 octobre et 12 décembre 2012, puis une contrainte, le 14 mai 2013. 3. M. F... a saisi une juridiction de sécurité sociale de recours concernant le rejet de sa demande en paiement et l'opposition à la contrainte qui lui a été décernée. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. La caisse fait grief à l'arrêt d'accueillir l'opposition à contrainte formée par M. F..., alors : « 1°/ qu'en application des articles L. 133-6, L. 133-6-1, R. 133-26 I et D. 632-1 du code de la sécurité sociale, toute personne affiliée au régime social des indépendants (Rsi) en tant que travailleur indépendant est redevable personnellement des diverses cotisations et contributions sociales réclamées par ce régime pour cette période d'affiliation ; qu'en outre, il résulte de l'article L 244-2 alinéa 1er du même code que la mise en demeure doit seulement préciser la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ; qu'en reprochant au Rsi de n'avoir mentionné dans les mises en demeure adressées à M. F... que le numéro d'identifiant sans préciser en quelle qualité, à savoir en qualité de gérant de quelle société celui-ci était débiteur des cotisations, la cour d'appel a ajouté au dernier des textes susvisés une obligation qu'il ne comporte pas, et l'a ainsi violés par fausse application ; 2°/ qu'il résulte de l'article L. 244-2 alinéa 1er du même code que la mise en demeure doit seulement préciser la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ; qu'elle peut ainsi ne faire référence qu'au numéro de compte de travailleur indépendant de l'intéressé ; qu'en prononçant la nullité des mises en demeure litigieuses en ce qu'elles ne lui permettraient pas à M. F... de connaître la cause de son obligation, tout en constatant que ces mises en demeure comportaient le numéro de travailleur indépendant de ce dernier, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences nécessaires de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc à nouveau violé par fausse application. » Réponse de la Cour 5. Selon l'article R. 244-1, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent. 6. Après avoir constaté que les trois mises en demeure visées par la contrainte litigieuse comportaient la mention du montant des cotisations réclamées et la période pour laquelle elles étaient dues, l'arrêt relève qu'elles n'indiquaient que le numéro de travailleur indépendant, tandis que celui-ci était gérant de plusieurs sociétés. Il en déduit que les mises en demeure ne permettaient pas à M. F... de connaître la cause de son obligation. 7. De ces énonciations et constatations, la cour d'appel a pu déduire que, les mises en demeure étant irrégulières, la contrainte devait être annulée. 8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. Mais sur le second moyen Enoncé du moyen 9. La caisse fait grief à l'arrêt de la condamner à rembourser à M. F... la somme qu'il demandait, alors : « 1°/ qu'en application de l'article L. 243-6 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées ; que lorsque l'indu de cotisations sociales résulte d'une décision administrative ou juridictionnelle, ce délai de prescription de trois ans reste applicable, mais ne peut commencer à courir avant la naissance de l'obligation de remboursement découlant de cette décision ; qu'en retenant que, dès lors que le RSI a reconnu par courrier devoir une somme d'argent, à savoir un excédent de cotisations encaissées, la demande de M. F... ne peut s'analyser en une demande de remboursement des cotisations indûment versées et soumise à la prescription triennale mais en une demande de paiement d'une dette reconnue par le débiteur et soumise à la prescription quinquennale de droit commun, en l'occurrence non acquise, la cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé ; 2°/ qu'en application de l'article L. 243-6 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées ; que lorsque l'indu de cotisations sociales résulte d'une décision administrative, ce délai de prescription court de la date de cette décision reconnaissant l'obligation de remboursement ; qu'en disant la demande de remboursement de M. F... non prescrite, tout en constatant que le Rsi a reconnu lui devoir les cotisations en cause par courrier du 11 décembre 2008 et que M. F... n'a sollicité leur remboursement qu'en novembre 2013, soit plus de trois ans après que ces cotisations aient été acquittées et l'indu de cotisations reconnu par la caisse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc violé à nouveau par fausse application. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige : 10. Il résulte de ce texte que la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées ou, lorsque l'indu de cotisations sociales résulte d'une décision administrative ou juridictionnelle, à compter de la date à laquelle est née l'obligation de remboursement découlant de cette décision. 11. Pour déclarer l'action de M. F... non prescrite, l'arrêt constate que, dans sa lettre du 11 décembre 2008, la caisse a reconnu devoir un indu de cotisations et retient que la demande du cotisant, intervenue en novembre 2013, ne peut s'analyser en une demande de remboursement des cotisations indûment versées et soumise à la prescription triennale mais en une demande en paiement d'une dette reconnue par le débiteur soumise à la prescription quinquennale de droit commun. 12. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation le cas échéant 13. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 14. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'URSSAF de Bourgogne, venant aux droits de l'Agence pour la sécurité sociale des indépendants, à rembourser à M. F... la somme de 24 529 euros, outre intérêts au taux légal à compter du mois de décembre 2008, l'arrêt rendu le 16 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Déclare irrecevable la demande de M. F... visant à la condamnation du RSI à lui rembourser la somme de 24 529 euros, outre les intérêts au taux légale à compter du mois de décembre 2008 ; Condamne l'URSSAF de Bourgogne à supporter les dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Dijon ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'URSSAF de Bourgogne devant la Cour de cassation et rejette les demandes formées tant par l'URSSAF de Bourgogne que par M. C... F... devant la cour d'appel de Dijon ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé par M. Prétot, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF de Bourgogne, agissant pour l'Agence pour la sécurité sociale des indépendants. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé l'annulation de la contrainte du 14 mai 2013 signifiée à M. C... F... le 31 mai 2013, et débouté l'Urssaf - Agence pour la sécurité sociale des indépendants de sa demande de condamnation de M. C... F... au paiement de ladite contrainte, AUX MOTIFS QUE Sur la contrainte du 14 mai 2013 ; M. F... soulève à titre subsidiaire, la nullité de la contrainte du 14 mai 2013 signifiée le 31 mai 2013 en raison de l'absence de mention de la qualité du débiteur ; Qu'il résulte de l'alinéa 1 de l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au présent litige, que l'envoi par l'organisme de recouvrement ou par le service mentionné à l'article R. 155-1 de l'avertissement ou de la mise en demeure prévus à l'article L. 244-2, est effectué par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que l'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ; Que l'appelant a reçu les mises en demeure suivantes : - n°773303 datée du 19 octobre 2012 concernant le deuxième et le troisième trimestre 2012 pour un montant total de 1 102 euros, - n°773302 datée du 19 octobre 2012 concernant les années 2009,2010 et 2011 pour un montant total de 20 061 euros, - n°783133 datée du 12 décembre 2012 concernant le quatrième trimestre 2012 pour un montant de 552 euros ; Que la contrainte émise le 14 mai 2013 vise l'ensemble de ces mises en demeure ; Que ces mises en demeure ne comportent que le numéro de travailleur indépendant de M. F... et sont toutes adressées à « M. F... C... J... - F... Consulting Management » ; Qu'il n'est pas contesté que l'appelant était gérant de plusieurs sociétés ; Que dès lors, les mises en demeure litigieuses ne comportant que des numéros d'identifiant et ne précisant pas en quelle qualité M. F... était débiteur de cotisations, elles ne lui permettaient pas de connaître la cause de son obligation ; Qu'il y a, donc, lieu de prononcer la nullité des mises en demeure datées des 19 octobre 2012 et du 12 décembre 2012 et de la contrainte visant ces mises en demeure ; Qu'en conséquence, il y a lieu de débouter l'URSSAF de sa demande de condamnation de M. F... au paiement de la contrainte du 14 mai 2013 pour un montant de 20 626 euros ; Que le jugement déféré doit être infirmé ; 1° ALORS QU'en application des articles L 133-6, L 133-6-1, R 133-26 I et D 632-1 du code de la sécurité sociale, toute personne affiliée au régime social des indépendants (Rsi) en tant que travailleur indépendant est redevable personnellement des diverses cotisations et contributions sociales réclamées par ce régime pour cette période d'affiliation ; qu'en outre, il résulte de l'article L 244-2 alinéa 1er du même code que la mise en demeure doit seulement préciser la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ; qu'en reprochant au Rsi de n'avoir mentionné dans les mises en demeure adressées à M. F... que le numéro d'identifiant sans préciser en quelle qualité, à savoir en qualité de gérant de quelle société celui-ci était débiteur des cotisations, la cour d'appel a ajouté au dernier des textes susvisés une obligation qu'il ne comporte pas, et l'a ainsi violés par fausse application, 2° ALORS QU'il résulte de l'article L 244-2 alinéa 1er du même code que la mise en demeure doit seulement préciser la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ; qu'elle peut ainsi ne faire référence qu'au numéro de compte de travailleur indépendant de l'intéressé ; qu'en prononçant la nullité des mises en demeure litigieuses en ce qu'elles ne lui permettraient pas à M. F... de connaître la cause de son obligation, tout en constatant que ces mises en demeure comportaient le numéro de travailleur indépendant de ce dernier, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences nécessaires de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc à nouveau violé par fausse application. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné l'Urssaf - Agence pour la sécurité sociale des indépendants à rembourser à M. C... F... la somme de 24.529 €, outre les intérêts au taux légal à compter du mois de décembre 2008, AUX MOTIFS QUE Sur la créance de M. F... ; Aux termes de l'article 1315 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; Que le RSI a indiqué à M. F..., par courrier du 11 décembre 2008, procédé au remboursement de l'excédent de cotisations encaissées pour un montant de 24 529 euros, que M. F..., précisant ne pas avoir perçu cette somme, sollicite la condamnation de l'URSSAF à lui rembourser ; Que l'URSSAF indique que la demande de remboursement de l'assuré était soumise à la prescription triennale prévue par l'article L. 243-6 du code de la sécurité sociale ; qu'en conséquence, sa demande intervenue pour la première fois en novembre 2013, soit plus de quatre ans et onze mois après la réception du courrier du 11 décembre 2008, est prescrite; Que toutefois, dans son courrier du 11 décembre 2008, le RSI a reconnu devoir une somme d'argent à rassuré ; que dès lors. la demande de M. F... ne peut s'analyser en une demande de remboursement des cotisations indûment versées et soumise à la prescription triennale mais en une demande de paiement d'une dette reconnue par le débiteur et soumise à la prescription quinquennale de droit commun ; qu'en conséquence, la demande de l'appelant n'est pas prescrite ; Que dans son courrier du 11 décembre 2008, le RSI a indiqué que le remboursement sera effectué sur le compte suivant : [...]101360 ; que par courrier du 13 novembre 2013 il a précisé à M. F... avoir procédé, le 15 décembre 2008, au remboursement « sur le compte bancaire [...]101360 société AEER Centre Est. Ce remboursement n'a pas été rejeté par la banque » ; Que, toutefois, l'organisme reconnaît avoir reçu le 16 décembre 2008 un courrier de M. F... indiquant « je vous transmets ci-dessous le nouveau relevé d'identité bancaire (RIB) à prendre en compte pour le virement de l'excédent. En effet, après vérification, le RIB enregistré est erroné » ; Que l'URSSAF ne communique aucun document comptable ou bancaire justifiant de la bonne exécution du virement de la somme de 24 529 euros effectué à l'assuré ; Qu'en conséquence, faute pour l'organisme débiteur de justifier du paiement, il y a lieu de le condamner à rembourser la somme de 24 529 euros à M. F..., outre les intérêts au taux légal à compter du mois de décembre 2008 ; Que le jugement déféré doit être infirmé ; 1° ALORS QU'en application de l'article L 243-6 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées ; que lorsque l'indu de cotisations sociales résulte d'une décision administrative ou juridictionnelle, ce délai de prescription de trois ans reste applicable, mais ne peut commencer à courir avant la naissance de l'obligation de remboursement découlant de cette décision ; qu'en retenant que, dès lors que le Rsi a reconnu par courrier devoir une somme d'argent, à savoir un excédent de cotisations encaissées, la demande de M. F... ne peut s'analyser en une demande de remboursement des cotisations indûment versées et soumise à la prescription triennale mais en une demande de paiement d'une dette reconnue par le débiteur et soumise à la prescription quinquennale de droit commun, en l'occurrence non acquise, la cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé, 2° ALORS QU'en application de l'article L 243-6 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, la demande de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées ; que lorsque l'indu de cotisations sociales résulte d'une décision administrative, ce délai de prescription court de la date de cette décision reconnaissant l'obligation de remboursement ; qu'en disant la demande de remboursement de M. F... non prescrite, tout en constatant que le Rsi a reconnu lui devoir les cotisations en cause par courrier du 11 décembre 2008 et que M. F... n'a sollicité leur remboursement qu'en novembre 2013, soit plus de trois ans après que ces cotisations aient été acquittées et l'indu de cotisations reconnu par la caisse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc violé à nouveau par fausse application.
En application des articles L. 224-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure doit préciser la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent. Ayant constaté que les mises en demeures litigieuses, bien que mentionnant le montant des cotisations réclamées et la période pour laquelle elles étaient dues, n'indiquaient que le numéro de travailleur indépendant du cotisant, tandis que celui-ci était gérant de plusieurs sociétés, la cour d'appel a pu en déduire que, ces mises en demeure ne permettant pas au cotisant de connaître la cause de son obligation, elles étaient irrégulières
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CIV. 2 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1360 F-P+B+I Pourvoi n° Y 19-18.244 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-18.244 contre l'arrêt rendu le 24 avril 2019 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre, sécurité sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Alstom Shipworks, dont le siège est [...] , anciennement dénommée société Chantiers de l'Atlantique, 2°/ à M. T... G..., domicilié [...] , 3°/ au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Alstom Shipworks, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 24 avril 2019), M. G... (la victime), ancien salarié de la société des Chantiers de l'Atlantique devenue la société Alstom Shipswork (l'employeur), a déclaré, le 24 août 2011, une pathologie prise en charge sur le fondement du tableau 30 bis des maladies professionnelles, après avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, par la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique (la caisse), qui lui a attribué une rente calculée sur un taux d'incapacité permanente partielle de 67 %. 2. La victime a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur. Examen du moyen Sur le premier moyen Enoncé du moyen 3. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer inopposable à l'employeur la décision en date du 16 avril 2012 portant prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la pathologie déclarée par la victime, puis de la débouter de sa demande de condamnation de l'employeur à lui rembourser l'ensemble des sommes dont elle serait amenée à faire l'avance au titre de la faute inexcusable, alors « que si l'employeur peut soutenir, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l'accident, la maladie ou la rechute n'a pas d'origine professionnelle, il n'est pas recevable à contester la décision de prise en charge de l'accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation sur les risques professionnels ; qu'en déclarant inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie déclarée par M. G..., quand ils n'étaient saisis que de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable intentée par ce dernier, les juges du fond ont violé l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, ensemble les articles L. 452-1 à L. 452-3 du même code ». Réponse de la Cour Vu l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige : 4. Ce texte régit exclusivement la procédure applicable à la prise en charge au titre de la législation professionnelle d'un accident du travail, d'une maladie professionnelle ou d'une rechute. 5. Il en résulte que si l'employeur peut soutenir, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l'accident, la maladie ou la rechute n'a pas d'origine professionnelle, il n'est pas recevable à contester la décision de prise en charge de l'accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation professionnelle. 6. Pour déclarer inopposable à l'employeur la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie et débouter la caisse de son action récursoire, l'arrêt retient qu'en l'absence de caractérisation par la caisse de la pathologie du tableau n°30 bis, et alors que la caisse ne soutient pas dans ses écritures que la décision de prise en charge du 16 avril 2012 avait acquis un caractère définitif à l'égard de l'employeur, il y a lieu de déclarer inopposable à celui-ci la décision de prise en charge de la pathologie déclarée par la victime au titre de la législation professionnelle. Il ajoute que l'inopposabilité à l'employeur découlant de cette irrégularité de fond prive la caisse de tout recours récursoire en récupération sur l'employeur des compléments de rente et indemnités versés. 7. En statuant ainsi, alors qu'elle était saisie exclusivement d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré inopposable à la société Alstom Shipworks la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la maladie déclarée le 24 août 2011 par M. G..., et débouté la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique de sa demande tendant à voir condamner l'employeur à lui rembourser les sommes avancées par elle, l'arrêt rendu le 24 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ; Condamne la société Alstom Shipworks aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Alstom Shipworks et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique. PREMIER MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué encourt la censure ; EN CE QU' il a déclaré inopposable à la société ALSTOM SHIPWORKS, anciennement dénommée CHANTIERS DE L'ATLANTIQUE, la décision de la Caisse en date du 16 avril 2012 portant prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la pathologie déclarée le 24 août 2011 par M. G..., puis débouté la Caisse de sa demande de condamnation de ladite société à lui rembourser l'ensemble des sommes dont elle serait amenée à faire l'avance au titre de la faute inexcusable ; AUX MOTIFS QUE « la société fait valoir que la décision de prise en charge de la maladie déclarée lui est inopposable faute d'investigations et d'enquête menée auprès d'elle par la caisse afin de connaître notamment les conditions de travail de M, G..., la caisse ne pouvant donc pas invoquer la présomption d'imputabilité ; Que la caisse réplique qu'il importe peu qu'elle ne prouve pas la réalisation d'une enquête auprès de la société appelante, dès lors que l'inopposabilité de la décision de prise en charge ne saurait la priver de son action récursoire ; Que la maladie professionnelle a été déclarée le 24 août 2011 ; Que la décision prise par une caisse dans les conditions prévues par l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable le 1er janvier 2010, ayant pour objet exclusif la prise en charge ou le refus de prise en charge au titre de la législation professionnelle, de l'accident, de la maladie ou de la rechute, l'irrégularité de la procédure conduisant à la prise en charge, par une caisse, au titre de la législation professionnelle, d'un accident, d'une maladie ou d'une rechute, est sans incidence sur l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ce dont il découle, que l'irrégularité de la procédure ne prive pas la caisse du droit de récupérer sur l'employeur, après reconnaissance de cette faute, les compléments de rente et indemnités versés par elle et que l'inopposabilité à la société de la décision de prise en charge en découlant ne fait pas obstacle à l'action récursoire de la caisse ; Que dans ces conditions l'irrégularité de procédure commise par la caisse, non contestée par cette dernière qui n'a pas instruit la maladie au contradictoire de la société Chantiers de l'Atlantique, ne lui adressant pas de questionnaire et ne l'interrogeant pas sur les conditions du tableau, si elle conduit à devoir déclarer inopposable pour cette raison ladite prise en charge à l'égard de la société, ne prive pas la caisse du droit de récupérer sur l'employeur, les compléments de rente et indemnités versés par elle ; Que cependant, la société Chantiers de l'Atlantique se prévaut également, à l'effet de priver la caisse de toute action récursoire, d'une inopposabilité « de fond » à son égard de la décision de prise en charge tenant à l'absence d'établissement du caractère professionnel de la pathologie prise en charge (conditions du tableau) ; Qu'elle articule à cet effet que la caisse n'a pas justifié médicalement que la pathologie diagnostiquée et visée au certificat médical initial est un cancer broncho-pulmonaire primitif ; Que la caisse réplique qu'elle n'est pas liée par l'intitulé du certificat médical initial et que le caractère professionnel de la pathologie affectant M. G..., vérifié à deux reprises par son médecin-conseil au vu de l'entier dossier médical, est établi ; Qu'en l'espèce la caisse n'établit pas par ses productions que M. G... était atteint d'un « cancer broncho pulmonaire primitif »; qu'en effet, alors que le certificat médical initial vise un « carcinome épidermoïde », les seuls avis du médecin-conseil de la caisse des 14 novembre et 08 décembre 2011 )qui ne sont pas opposables à l'employeur (visant un code syndrome « 030 BAC 34X » au titre d'un « Cancer broncho-pulmonaire » et un « scanner ») pièces n°3 et 4 de la caisse(, de même que l'avis du CRRMP faisant état comme motif de la saisine d'un « cancer broncho-pulmonaire primitif » avec « travaux non mentionnés dans la liste nominative ») pièce n° 5 de la caisse (, sont insuffisants à caractériser avec certitude la réalisation de la condition médicale du tableau 30 bis, et notamment le caractère primitif de la pathologie retenue par la caisse au titre de la prise en charge ; Que dès lors, en l'absence de caractérisation par la caisse de la pathologie du tableau n°30 bis, et alors que la caisse ne soutient pas à ses écritures que la décision de prise en charge du 16 avril 2012 avait acquis un caractère définitif à l'égard de l'employeur, il y a lieu de déclarer inopposable à la société la décision de prise en charge de la pathologie déclarée par M. G... au titre de la législation professionnelle, l'inopposabilité à la société découlant de cette irrégularité de fond privant la société de tout recours récursoire en récupération sur l'employeur des compléments de rente et indemnités versés par la caisse » ; ALORS QUE, si l'employeur peut soutenir, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l'accident, la maladie ou la rechute n'a pas d'origine professionnelle, il n'est pas recevable à contester la décision de prise en charge de l'accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation sur les risques professionnels ; qu'en déclarant inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie déclarée par M. G..., quand ils n'étaient saisis que de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable intentée par ce dernier, les juges du fond ont violé l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, ensemble les articles L. 452-1 à L. 452-3 du même code. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) L'arrêt attaqué encourt la censure ; EN CE QU' il a déclaré inopposable à la société ALSTOM SHIPWORKS, anciennement dénommée CHANTIERS DE L'ATLANTIQUE, la décision de la Caisse en date du 16 avril 2012 portant prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la pathologie déclarée le 24 août 2011 par M. G..., puis débouté la Caisse de sa demande de condamnation de ladite société à lui rembourser l'ensemble des sommes dont elle serait amenée à faire l'avance au titre de la faute inexcusable ; AUX MOTIFS QUE « la société fait valoir que la décision de prise en charge de la maladie déclarée lui est inopposable faute d'investigations et d'enquête menée auprès d'elle par la caisse afin de connaître notamment les conditions de travail de M, G..., la caisse ne pouvant donc pas invoquer la présomption d'imputabilité ; Que la caisse réplique qu'il importe peu qu'elle ne prouve pas la réalisation d'une enquête auprès de la société appelante, dès lors que l'inopposabilité de la décision de prise en charge ne saurait la priver de son action récursoire ; Que la maladie professionnelle a été déclarée le 24 août 2011 ; Que la décision prise par une caisse dans les conditions prévues par l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable le 1er janvier 2010, ayant pour objet exclusif la prise en charge ou le refus de prise en charge au titre de la législation professionnelle, de l'accident, de la maladie ou de la rechute, l'irrégularité de la procédure conduisant à la prise en charge, par une caisse, au titre de la législation professionnelle, d'un accident, d'une maladie ou d'une rechute, est sans incidence sur l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ce dont il découle, que l'irrégularité de la procédure ne prive pas la caisse du droit de récupérer sur l'employeur, après reconnaissance de cette faute, les compléments de rente et indemnités versés par elle et que l'inopposabilité à la société de la décision de prise en charge en découlant ne fait pas obstacle à l'action récursoire de la caisse ; Que dans ces conditions l'irrégularité de procédure commise par la caisse, non contestée par cette dernière qui n'a pas instruit la maladie au contradictoire de la société Chantiers de l'Atlantique, ne lui adressant pas de questionnaire et ne l'interrogeant pas sur les conditions du tableau, si elle conduit à devoir déclarer inopposable pour cette raison ladite prise en charge à l'égard de la société, ne prive pas la caisse du droit de récupérer sur l'employeur, les compléments de rente et indemnités versés par elle ; Que cependant, la société Chantiers de l'Atlantique se prévaut également, à l'effet de priver la caisse de toute action récursoire, d'une inopposabilité « de fond » à son égard de la décision de prise en charge tenant à l'absence d'établissement du caractère professionnel de la pathologie prise en charge (conditions du tableau) ; Qu'elle articule à cet effet que la caisse n'a pas justifié médicalement que la pathologie diagnostiquée et visée au certificat médical initial est un cancer broncho-pulmonaire primitif ; Que la caisse réplique qu'elle n'est pas liée par l'intitulé du certificat médical initial et que le caractère professionnel de la pathologie affectant M. G..., vérifié à deux reprises par son médecin-conseil au vu de l'entier dossier médical, est établi ; Qu'en l'espèce la caisse n'établit pas par ses productions que M. G... était atteint d'un « cancer broncho pulmonaire primitif »; qu'en effet, alors que le certificat médical initial vise un « carcinome épidermoïde », les seuls avis du médecin-conseil de la caisse des 14 novembre et 08 décembre 2011 )qui ne sont pas opposables à l'employeur (visant un code syndrome « 030 BAC 34X » au titre d'un « Cancer broncho-pulmonaire » et un « scanner ») pièces n°3 et 4 de la caisse(, de même que l'avis du CRRMP faisant état comme motif de la saisine d'un « cancer broncho-pulmonaire primitif » avec « travaux non mentionnés dans la liste nominative ») pièce n° 5 de la caisse (, sont insuffisants à caractériser avec certitude la réalisation de la condition médicale du tableau 30 bis, et notamment le caractère primitif de la pathologie retenue par la caisse au titre de la prise en charge ; Que dès lors, en l'absence de caractérisation par la caisse de la pathologie du tableau n°30 bis, et alors que la caisse ne soutient pas à ses écritures que la décision de prise en charge du 16 avril 2012 avait acquis un caractère définitif à l'égard de l'employeur, il y a lieu de déclarer inopposable à la société la décision de prise en charge de la pathologie déclarée par M. G... au titre de la législation professionnelle, l'inopposabilité à la société découlant de cette irrégularité de fond privant la société de tout recours récursoire en récupération sur l'employeur des compléments de rente et indemnités versés par la caisse » ; ALORS QUE, la preuve de l'existence d'une affection figurant au tableau n° 30 bis peut être rapportée par la production d'éléments médicaux ; que lorsque le médecin-conseil estime, dans son avis, que l'assuré est bien atteint de la pathologie décrite au tableau des maladies professionnelles, la caisse, qui n'a pas accès aux pièces médicales sur la base desquelles le médecin-conseil a émis cet avis, établit que la pathologie de l'assuré était bien celle visée au tableau n° 30 bis ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, ensemble le tableau n° 30 bis des maladies professionnelles.
L'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige, régit exclusivement la procédure applicable à la prise en charge au titre de la législation professionnelle d'un accident du travail, d'une maladie professionnelle ou d'une rechute. Il en résulte que si l'employeur peut soutenir, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l'accident, la maladie ou la rechute n'a pas d'origine professionnelle, il n'est pas recevable à contester la décision de prise en charge de l'accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation professionnelle
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle sans renvoi M. PIREYRE, président Arrêt n° 1361 F-P+B+I Pourvoi n° V 19-20.058 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La société Adecco, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est 2 rue Henri Legay, 69100 Villeurbanne, venant aux droits de la société Adia, a formé le pourvoi n° V 19-20.058 contre l'arrêt rendu le 22 mai 2019 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres, dont le siège est 1 rue de l'Angélique, Bessines parc d'activité de l'Ebaupin, 79041 Niort cedex 9, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Adecco, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 22 mai 2019), la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres (la caisse) a pris en charge au titre de la législation professionnelle un accident survenu le 9 janvier 2012 déclaré avec réserves par la société Adia, aux droits de laquelle vient la société Adecco (l'employeur). 2. L'employeur a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale, aux fins d'inopposabilité de cette décision. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 3. L'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de son recours, alors : « 1°/ que constituent des réserves motivées de la part de l'employeur, au sens des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, toute contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'en validant et déclarant opposable à la société Adecco la décision de prise en charge d'emblée par la caisse de l'accident, tout en constatant que cet employeur contestait l'existence d'un accident du travail en invoquant l'absence de témoin oculaire, l'improbabilité que personne n'ait vu M. C... se blesser alors qu'il travaillait en atelier à proximité de nombreux salariés, et le fait que celui-ci avait pu terminer sa journée de travail normalement, sans en informer quiconque au sein de l'entreprise utilisatrice, pour conclure que ledit accident avait pu se produire dans le cadre de la vie privée, ce qui constituait des réserves portant sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc violé par fausse application ; 2°/ que constituent des réserves motivées de la part de l'employeur, au sens des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, toute contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; que l'exigence de réserves motivées ne saurait être interprétée comme imposant à l'employeur de rapporter, à ce stade de la procédure, la preuve de faits de nature à démontrer que l'accident n'a pu se produire au temps et au lieu du travail ; qu'en affirmant, pour valider et déclarer opposable à la société Adecco la décision de prise en charge d'emblée par la caisse de l'accident, que les réserves ne peuvent pas être prises en compte lorsque l'employeur n'apporte pas la preuve d'une cause totalement étrangère au travail, pour retenir qu'il n'y a pas lieu de suspecter la véracité de la déclaration du salarié dès lors que l'employeur se limite à instiller un doute sur la véracité des déclarations dudit salarié au prétexte de l'absence de témoin oculaire, de l'improbabilité que personne n'ait vu M. C... se blesser dès lors que celui-ci travaille en atelier à proximité de nombreux salariés et qu'il a pu terminer sa journée de travail normalement, ces éléments ne constituant pas des indices laissant supposer légitimement que l'accident ne serait pas intervenu aux temps et lieu de travail ou serait lié à une cause étrangère au travail, la cour d'appel qui a fait peser sur la société Adia la preuve de faits de nature à démontrer que l'accident n'avait pu se produire aux temps et lieu de travail, a violé derechef pour fausse application le texte susvisé. » Réponse de la Cour Vu l'article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige : 4. Selon ce texte, en cas de réserves motivées de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie, avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie, ou procède à une enquête auprès des intéressés. 5. Pour rejeter le recours, ayant constaté que dans son courrier de réserves l'employeur relevait notamment qu'il n'y avait pas de témoin de l'accident, alors que la victime travaillait en atelier, et que celle-ci a fini normalement sa journée de travail sans que personne de l'entreprise n'ait été mise au courant de l'incident, l'arrêt retient que les faits relatés sur la déclaration d'accident du travail sont crédibles, le certificat médical établi le jour des faits faisant état d'un lumbago aigu confirmé par un certificat médical ultérieur, en sorte qu'il n'y avait pas lieu de suspecter la véracité de la déclaration et de procéder à une enquête. Il ajoute que les réserves ne peuvent pas être prises en compte lorsque l'employeur n'apporte pas la preuve d'une cause totalement étrangère au travail mais se limite à instiller un doute sur la véracité des déclarations du salarié. Il précise que la circonstance de l'absence de témoin est insuffisante à constituer une réserve motivée et qu'il est indifférent que la victime ait achevé sa journée de travail normalement, la lésion pouvant ne pas entraîner un arrêt immédiat du travail. L'arrêt en déduit que les réserves exprimées par l'employeur n'étant pas suffisamment motivées, la caisse était dispensée de la nécessité d'organiser une enquête sur les circonstances de l'accident. 6. En statuant ainsi alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'employeur, qui, au stade de la recevabilité des réserves, n'était pas tenu d'apporter la preuve de leur bien-fondé, avait formulé, en temps utile, des réserves quant aux circonstances de temps et de lieu de l'accident ainsi que sur la matérialité du fait accidentel, de sorte que la caisse ne pouvait prendre sa décision sans procéder à une instruction préalable, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 7. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application des articles L. 411-3 alinéa 2 du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 8. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue sur le fond. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour: CASSE ET ANNULE, sauf en qu'il déclare le recours recevable, l'arrêt rendu le 22 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Déclare inopposable à la société Adecco la décision de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres au titre de la législation professionnelle de l'accident survenu à M. C... le 9 janvier 2012 ; Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres aux dépens, en ce compris les dépens exposés devant la cour d'appel de Poitiers ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres à payer à la société Adecco la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour la société Adecco Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir admis la prise en charge de l'accident du travail de M. C... au titre de la législation professionnelle et l'opposabilité de la décision de la Cpam de prise en charge avec toutes ses conséquences de droit au regard de la tarification des cotisations, à apprécier par la caisse régionale d'assurance maladie, AUX MOTIFS PROPRES QU' Aux termes de l'article R441-10 du code de la sécurité sociale : La caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie. Il en est de même lorsque, sans préjudice de l'application des dispositions du chapitre Ier du titre IV du livre Ier et de l'article L432-6, il est fait état pour la première fois d'une lésion ou maladie présentée comme se rattachant à un accident du travail ou maladie professionnelle. Sous réserve des dispositions de l'article R. 441-14, en l'absence de décision de la caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu. Qu'aux termes de l'article R441-11 du code de la sécurité sociale : I La déclaration d'accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l'employeur. Lorsque la déclaration de l'accident en application du deuxième alinéa de l'article L441-2 n'émane pas de l'employeur, la victime adresse à la caisse la déclaration de l'accident. Un double est envoyé par la caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail. En cas de rechute d'un accident du travail, le double de la demande de reconnaissance de la rechute de l'accident du travail déposé par la victime est envoyé par la caisse primaire à l'employeur qui a déclaré l'accident dont rechute est la conséquence par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut alors émettre des réserves motivées. II. La victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle. Un double est envoyé par la caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail. III En cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès ; Que pour décider que la CPAM des Deux Sèvres avait justement considéré que les réserves émises par la société ADIA n'étaient pas suffisamment motivées pour être prises en compte au sens de l'article R441-11 du code de la sécurité sociale et rejeter les demandes de la société ADECCO et confirmer la décision de la Commission de recours amiable du 5 avril 2012 et déclarer opposable à l'employeur la décision de prise en charge de l'accident de M. C..., le premier juge a relevé au visa des articles R441-10 et R441-11 du code de la sécurité sociale : - que la société ADIA, dans son courrier du I1 janvier 2012 adressé à la CPAM émettait "les plus strictes réserves sur le caractère professionnel de la lésion invoquée par M C... qui aurait eu lieu le 9 janvier 2012 lors d'une mission au sein de l'entreprise Pampr'oeuf distribution " ; que la survenance de cet accident nous paraît douteuse ; que selon les dires de notre salarié intérimaire, il aurait ressenti une forte douleur au dos dès sa première heure d'embauche " hors, aucun témoin oculaire n'est à même de corroborer ses dires. Il est improbable que personne ne l'ai vu se blesser car il travaille dans un atelier en proximité de nombreux salariés. Il a terminé sa journée de travail normalement. Ce n'est que plus tard qu'il nous a informés des faits et personne au sein de l'entreprise utilisatrice n'était au courant. Tout porte à croire que le prétendu accident dont il a fait état, aurait tout aussi bien pu se produire dans le cadre de sa vie privée. " ; - qu'il n'est pas contesté que M. C... a commencé sa mission en qualité de manutentionnaire au sein de l'entreprise Pampr'oeuf distribution le 9 janvier 2012 et qu'il a indiqué au sujet de l'accident : "en me penchant pour prendre une caisse d'oeufs, j'ai ressenti une forte douleur au dos." ; - qu'il ressort de la procédure que M. C... a consulté son médecin le jour même de l'accident et que ce dernier a constaté un lumbago aigu et a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 28 janvier 2012 ; - que M. C... a prévenu son employeur le lendemain ; - qu'à la lecture des réserves émises par la société ADIA, il convient de considérer qu'elles instillent un doute sur la véracité des propos du salarié, évoquant l'absence de témoin de l'accident et la poursuite de sa mission par le salarié, sans toutefois faire part des éléments mettant en cause la réalité de celui-ci au temps et lieu de travail ou faisant état de l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; - qu'au regard de la nature de la lésion de M. C..., des circonstances de l'accident décrites par lui et de sa mission de manutentionnaire, l'absence de témoin et le fait que le salarié ait poursuivi sa journée de travail ne sont pas des éléments suffisants pour être considérés comme une contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci et ne sont pas, en tout état de cause, des éléments obligatoires dans la prise en charge de l'accident du travail ; Que dans son courrier du 11 janvier 2012, la société ADIA écrit à la CPAM : "Nous émettons les plus strictes réserves sur le caractère professionnel de la lésion invoquée par M C... F.... .. qui aurait eu lieu le 9 janvier 2012 lors d'une mission au sein de l'entreprise Pampr'oeuf distribution. En effet, la survenue de cet accident nous apparaît douteuse. Selon les dires de notre salarié intérimaire, il aurait ressenti une forte douleur au dos dès sa première heure d'embauche, hors aucun témoin oculaire n'est à même de corroborer ses dires. Il est improbable que personne ne l'ai vu se blesser car il travaille dans un atelier en proximité de nombreux salariés. Il a terminé sa journée de travail normalement. Ce n'est que plus tard qu'il nous a informé des faits et personne au sein de l'entreprise utilisatrice n'est au courant. Tout porte à croire que le prétendu accident dont il fait état, aurait tout aussi bien pu se produire dans le cadre de sa vie privée. " ; Que les réserves émises au sens de l'article R441-l1 du code de la sécurité sociale s'entendant de la contestation du caractère professionnel de l'accident, ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; Que la société ADIA relevait : - qu'il n'y avait pas de témoin de l'accident - que M. C... a achevé sa journée de travail, après qu'il ait ressenti une douleur au dos dès sa première heure d'embauche, sans que personne ne l'ait vu se blesser, ce qui est étonnant dès lors qu'il travaille en atelier et à proximité d'autres salariés - que ce n'est que plus tard que M. C... a informé des faits sans que personne au sein de l'entreprise n'ait été au courant ; Que les faits du 9 janvier 2012 relatés sur la déclaration d'accident du travail du 11 janvier 2012 sont crédibles ("En me penchant pour prendre une caisse d'oeufs, j'ai ressenti une forte douleur au dos"), le certificat médical ayant été établi le jour des faits et faisant état d'un lumbago aigu confirmé par certificat du 16 janvier suivant, en sorte qu'il n'y avait pas lieu de suspecter la véracité de la déclaration et de procéder à une enquête ; que les réserves ne peuvent pas être prises en compte lorsque l'employeur n'apporte pas la preuve d'une cause totalement étrangère au travail mais se limite à instiller un doute sur la véracité des déclarations du salarié, ce qui est le cas ici, la société ADIA écrivant : "Tout porte à croire que le prétendu accident dont il fait état aurait tout aussi bien pu se produire dans le cadre de sa vie privée", au prétexte de l'absence de témoin oculaire, de l'improbabilité que personne n'ait vu M. C... se blesser dès lors que celui-ci travaille en atelier à proximité de nombreux salariés et qu'il a pu terminer sa journée de travail normalement, ces éléments ne constituant pas des indices laissant supposer légitimement que l'accident ne serait pas intervenu aux temps et lieu de travail ou serait lié à une cause étrangère au travail ; que la circonstance de l'absence de témoin est insuffisante à constituer une réserve motivée et il est indifférent que M. C... ait achevé sa journée de travail normalement, la lésion pouvant ne pas entraîner un arrêt immédiat du travail ; qu'on doit donc admettre, les réserves exprimées par la société ADIA n'étant pas suffisamment motivées, que la CPAM était dispensée de la nécessité d'organiser une enquête sur les circonstances de l'accident ; Qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement et de rejeter les demandes de la société ADIA, ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE Sur le respect du principe du contradictoire Aux termes de l'Article R441-10 du Code de la sécurité sociale : « La caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration de la maladie professionnelle et le certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie. Il en est de même lorsque, sans préjudice de l'application des dispositions du chapitre 1er du titre IV du livre 1er et de l'Article L. 432-6, il est fait état pour la première fois d'une lésion ou maladie présentée comme se rattachant à un accident du travail ou maladie professionnelle. Sous réserve des dispositions de l'Article R. 441-14, en l'absence de décision de la Caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu » ; Qu'aux termes de l'Article R441·11 du Code de la sécurité sociale : « I. - La déclaration d'accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l'employeur. Lorsque la déclaration de l'accident en application du deuxième alinéa de l'Article L. 441-2 n'émane pas de l'employeur, la victime adresse à la Caisse la déclaration de l'accident. Un double est envoyé par la Caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La Caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail. En cas de rechute d'un accident du travail, le double de la demande de reconnaissance de la rechute de l'accident du travail déposé par la victime est envoyé par la Caisse primaire à l'employeur qui a déclaré l'accident dont la rechute est la conséquence par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut alors émettre des réserves motivées. II. - La victime adresse à la Caisse la déclaration de maladie professionnelle. Un double est envoyé par la Caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La Caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail. III. - En cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la Caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès. » ; Que la Société ADIA expose avoir émis des réserves motivées portant sur le caractère professionnel de la lésion invoquée par Monsieur F... C... dans le cadre de l'accident du travail déclaré le 9 janvier 2012 et soutient qu'en application de l'Article R 441-11 du Code de la sécurité sociale, un questionnaire aurait dû lui être envoyé ou une enquête réalisée ; Qu'il ressort du courrier du 11 janvier 2012 adressé par la Société ADIA à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie que l'employeur émet « les plus strictes réserves sur le caractère professionnel de la lésion invoquée par Mr C... F... qui aurait eu lieu le 9 janvier 2012 lors d'une mission au sein de l'entreprise PAMPR'OEUF DISTRIBUTION. En effet, la survenue de cet accident nous apparaît: douteuse. Selon les dires de notre salarié intérimaire, il aurait ressenti une forte douleur au dos dès sa première heure d'embauche, hors aucun témoin oculaire n'est à même de corroborer ses dires. Il est improbable que personne ne l'ai vu se blesser car il travaille dans un atelier en proximité de nombreux salariés. Il a terminé sa journée de travail normalement. Ce n'est que plus tard qu'il nous a informés des faits et personne au sein de l'entreprise utilisatrice n'était au courant. Tout porte à croire que le prétendu accident dont il fait état, aurait tout aussi bien pu se produire dans le cadre de sa vie privée » ; Que la Société ADIA fait valoir que le contenu de ce courrier constitue une réserve motivée en ce qu'il s'agit d'une contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail comme le définit la jurisprudence ; Que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Deux-Sèvres expose qu'au regard du contexte de l'accident et des démarches réalisées par le salarié, les réserves de l'employeur n'étaient pas suffisamment motivées en ce qu'elles se bornent à évoquer une absence de témoin et le fait que le salarié ait terminé sa journée normalement ; Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que Monsieur F... C... a commencé sa mission en qualité de manutentionnaire au sein de l'entreprise PAMPR'OEUF DISTRIBUTION le 9 janvier 2012 et qu'il a indiqué au sujet de l'accident: « en me penchant pour prendre une caisse d'oeufs, j'ai ressenti une forte douleur au dos » ; Qu'il ressort également de la procédure que Monsieur F... C... a été consulté son médecin le jour même de l'accident et que ce dernier a constaté un lumbago aigu et a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 28 janvier 2012 ; Qu'il apparaît également que Monsieur F... C... a prévenu son employeur le lendemain ; Qu'à la lecture des réserves émises par la Société ADIA, il convient de considérer qu'elles instillent un doute sur la véracité des propos du salarié évoquant l'absence de témoin de l'accident et la poursuite de sa mission par le salarié sans toutefois faire part des éléments mettant en cause la réalité de celui-ci au temps et lieu du travail ou faisant état de l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; Qu'en effet, au regard de la nature de la lésion de Monsieur F... C..., des circonstances de l'accident décrites par lui et de sa mission de manutentionnaire, l'absence de témoin et le fait que le salarié ait poursuivi sa journée de travail ne sont pas des éléments suffisants pour être considérés comme une contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci et ne sont pas, en tout état de cause, des éléments obligatoires dans la prise en charge de l'accident du travail ; Qu'ainsi il convient de considérer que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Deux-Sèvres a justement considéré que les réserves émises par la Société ADIA n'étaient pas suffisamment motivées pour être prises en compte au sens de l'Article R 441-11 du Code de la sécurité sociale ; QU'en conséquence, la Société ADIA sera déboutée de l'ensemble de ses demandes, la décision de la Commission de recours amiable du 5 avril 2012 sera confirmée, et la décision de prise en charge de l'accident du travail de Monsieur F... C... sera donc déclarée opposable à l'employeur au titre de la législation professionnelle ? 1° ALORS QUE constituent des réserves motivées de la part de l'employeur, au sens des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, toute contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'en validant et déclarant opposable à la société Adecco la décision de prise en charge d'emblée par la caisse de l'accident, tout en constatant que cet employeur contestait l'existence d'un accident du travail en invoquant l'absence de témoin oculaire, l'improbabilité que personne n'ait vu M. C... se blesser alors qu'il travaillait en atelier à proximité de nombreux salariés, et le fait que celui-ci avait pu terminer sa journée de travail normalement, sans en informer quiconque au sein de l'entreprise utilisatrice, pour conclure que ledit accident avait pu se produire dans le cadre de la vie privée, ce qui constituait des réserves portant sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard du texte susvisé, qu'elle a donc violé par fausse application, 2° ALORS QUE constituent des réserves motivées de la part de l'employeur, au sens des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, toute contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; que l'exigence de réserves motivées ne saurait être interprétée comme imposant à l'employeur de rapporter, à ce stade de la procédure, la preuve de faits de nature à démontrer que l'accident n'a pu se produire au temps et au lieu du travail ; qu'en affirmant, pour valider et déclarer opposable à la société Adecco la décision de prise en charge d'emblée par la caisse de l'accident, que les réserves ne peuvent pas être prises en compte lorsque l'employeur n'apporte pas la preuve d'une cause totalement étrangère au travail, pour retenir qu'il n'y a pas lieu de suspecter la véracité de la déclaration du salarié dès lors que l'employeur se limite à instiller un doute sur la véracité des déclarations dudit salarié au prétexte de l'absence de témoin oculaire, de l'improbabilité que personne n'ait vu M. C... se blesser dès lors que celui-ci travaille en atelier à proximité de nombreux salariés et qu'il a pu terminer sa journée de travail normalement, ces éléments ne constituant pas des indices laissant supposer légitimement que l'accident ne serait pas intervenu aux temps et lieu de travail ou serait lié à une cause étrangère au travail, la cour d'appel qui a fait peser sur la société Adia la preuve de faits de nature à démontrer que l'accident n'avait pu se produire aux temps et lieu de travail, a violé derechef pour fausse application le texte susvisé, 3° ALORS QUE la preuve de la survenance d'un accident au temps et au lieu du travail doit être rapportée par l'assuré autrement que par ses seules affirmations ; que la société Adecco faisait non seulement valoir qu'aucun témoin oculaire n'avait assisté à l'accident déclaré, mais avait ajouté que cette circonstance était d'autant plus improbable que M. C... travaillait en atelier à proximité d'autres salariés, et encore que ce dernier n'avait curieusement prévenu personne au sein de l'entreprise utilisatrice avant de n'informer que le lendemain la société Adecco de l'accident, ce qui constituait autant de doutes sur la survenance de ce dernier aux temps et lieu du travail et rendait d'autant plus nécessaire la preuve de cette dernière par cet assuré ; qu'en rejetant ce moyen aux motifs qu'il n'y a pas lieu de suspecter la véracité de la déclaration du salarié qui est crédible ainsi que le certificat médical établi le jour des faits sur ses propres déclarations, lesquelles ne permettaient pourtant pas de rapporter la preuve de leur survenance aux temps et lieu de travail, la cour d'appel a violé pour fausse application l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale.
Selon l'article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige, en cas de réserves motivées de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie, avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie, ou procède à une enquête auprès des intéressés. Viole ce texte la cour d'appel, qui déclare opposable à l'employeur une décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur, qui, au stade de la recevabilité des réserves, n'était pas tenu d'apporter la preuve de leur bien fondé, avait formulé, en temps utile, des réserves quant aux circonstances de temps et de lieu de l'accident ainsi que sur la matérialité du fait accidentel, de sorte que la caisse ne pouvait prendre sa décision sans procéder à une instruction préalable
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1365 F-P+B+I Pourvoi n° P 19-21.731 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 M. H... U..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° P 19-21.731 contre l'arrêt rendu le 3 juillet 2019 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Haute-Normandie, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. U..., de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Haute-Normandie, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, M. de Monteynard, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 3 juillet 2019), à la suite du calcul des cotisations et contributions sociales définitives dues par M. U... (le cotisant) au titre de l'année 2015 et compte tenu des sommes versées à titre provisionnel, l'URSSAF de Haute-Normandie (l'URSSAF) a procédé à son profit au remboursement d'une certaine somme. 2. Ayant constaté que la somme remboursée était supérieure à la somme due, l'URSSAF a notifié au cotisant une mise en demeure puis a délivré à son encontre, le 30 janvier 2017, une contrainte d'un montant de 3 388 euros, afférente à la régularisation des cotisations et contributions sociales de l'année 2015. 3.Le cotisant a formé opposition à cette contrainte devant une juridiction de sécurité sociale. Examen des moyens Sur le moyen relevé d'office 4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale : 5. La contrainte délivrée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale sur le fondement de ce texte a pour objet exclusif le recouvrement des cotisations et contributions sociales et des majorations de retard. 6. Pour débouter le cotisant de son opposition, ayant constaté que la contrainte, qui se réfère expressément à la mise en demeure du 21 novembre 2016, indique au titre du motif du recouvrement, une insuffisance de versement et au titre de la période concernée, une régularisation 2015, l'arrêt précise que la contrainte mentionne le montant des cotisations dues et des majorations, aucun nouveau versement n'étant intervenu depuis la mise en demeure. Il retient que le cotisant ne peut soutenir que la somme réclamée a changé de nature et de montant, dès lors que l'URSSAF ne réclame pas le remboursement d'une somme qu'elle a versée par erreur mais explique le raisonnement qui a conduit au montant restant dû au titre de l'année 2015, mentionné dans la mise en demeure et la contrainte, qui correspond bien à un solde impayé de cotisations. 7. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que le cotisant avait acquitté les sommes dont il était redevable, de sorte que la contrainte avait pour objet, non le recouvrement des cotisations sociales définitives de l'année 2015, mais le remboursement d'un indu correspondant aux sommes versées par erreur par l'URSSAF, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ; Condamne l'URSSAF de Haute-Normandie aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'URSSAF de Haute-Normandie et la condamne à payer à M. U... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. U... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. U... de son opposition à contrainte, validé la contrainte établie le 30 janvier 2017 et signifiée le 4 février 2017 pour la somme de 2 608,98 € se détaillant en 2 435,98 € à titre de cotisations et 173 € à titre de majorations de retard, débouté M. U... de ses demandes en restitution de prélèvements indus, de dommages et intérêts et d'indemnité pour frais irrépétibles ; AUX MOTIFS sur la demande en annulation de la contrainte QU' " En vertu de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale la contrainte doit obligatoirement être précédée d'une mise en demeure qui selon l'article R. 244-1 constitue une invitation impérative du débiteur à régulariser sa situation dans le délai imparti et doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin il importe qu'elle précise, à peine de nullité outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte. La motivation de la mise en demeure adressée au cotisant ne dispense pas l'organisme social de motiver la contrainte décernée ensuite pour le recouvrement des cotisations mentionnées dans la mise en demeure. QUE contrairement à ce que M. U... soutient, la somme de 173 euros n'a pas changé de qualification dès lors que dans la mise en demeure elle apparaît sous la rubrique « majorations pénalités » et que dans la contrainte, qui distingue les majorations des pénalités, elle apparaît en tant que majorations. En outre, la contrainte qui se réfère expressément à la mise en demeure du 21 novembre 2016 indique comme celle-ci au titre du motif du recouvrement, une insuffisance de versement et au titre de la période concernée, une régularisation 2015. La contrainte mentionne le montant des cotisations dues et des majorations, aucun nouveau versement n'étant intervenu depuis la mise en demeure. M. U... ne peut soutenir que la somme réclamée a changé de nature et de montant dans les conclusions de l'URSSAF, dès lors que celle-ci ne réclame pas le remboursement d'une somme qu'elle a versée par erreur mais explique le raisonnement qui a conduit au montant restant dû au titre de 2015, mentionné dans la mise en demeure et la contrainte, qui correspond bien à un solde impayé de cotisations. La circonstance que le montant réclamé par l'URSSAF dans le cadre de la procédure de contestation de la contrainte soit inférieur au montant figurant dans la mise en demeure et dans la contrainte n'est pas de nature à invalider cette dernière dès lors que la somme de 2 435,98 euros réclamée au titre des cotisations restant dues, suivant décompte arrêté au 13 octobre 2017, est obtenue en récapitulant l'ensemble des cotisations, majorations et frais des années 2012 à 2015, ainsi que l'ensemble des versements et qu'au titre de l'année 2015 c'est bien la somme de 3 404 euros qui y figure laquelle correspond au montant définitif des cotisations au titre de cette année. Le titre émis par l'organisme de recouvrement est donc bien en rapport avec la créance réclamée. Enfin, le fait que la somme réclamée dans la mise en demeure et la contrainte soit le résultat d'opérations comptables effectuées en 2016 n'a pas pour conséquence de modifier la période de référence qui reste la régularisation des cotisations au titre de l'année 2015. La contrainte répond dès lors aux exigences rappelées ci-dessus, de sorte qu'il y a lieu de rejeter la demande d'annulation" ; ET AUX MOTIFS sur le bien fondé de la contrainte QUE " par jugement du 10 juillet 2015 le tribunal des affaires de sécurité sociale a constaté que les causes de la contrainte émise le 16 décembre 2013 portant sur un montant de 4 009 euros, correspondant au quatrième trimestre 2012 (cotisations : 3 351 euros et majorations de retard : 518 euros) et au premier trimestre 2013 (majorations de retard : 140 euros), étaient éteintes et que M. U... n'était redevable d'aucune cotisation et majoration au titre de ces trimestres. Il ne saurait être déduit de ce jugement que le tribunal a annulé la contrainte. Il s'est seulement limité à constater qu'aucune somme ne restait due au titre des trimestres litigieux. Devant les premiers juges M. U... s'était prévalu d'un courrier de l'URSSAF du 14 février 2013 constatant un crédit de 3 833 euros sur son compte, expliqué selon lui par le fait qu'il avait payé deux fois cette somme au titre des premier et deuxième trimestres 2012, et d'un accord avec l'organisme pour imputer ce crédit sur les sommes dues au titre du quatrième trimestre 2012 et du premier trimestre 2013, en réglant la différence par un chèque de 207 euros émis le 27 janvier 2013. Toutefois, dans sa note en délibéré adressée au tribunal, l'URSSAF n'avait pas indiqué que les causes de la contrainte de décembre 2013 étaient éteintes du fait des 3 833 euros et du paiement de 207 euros mais précisé qu'elles avaient été apurées le 21 mai 2014 au moyen de la somme de 5 732 euros qu'elle devait au cotisant à la suite de la régularisation des cotisations 2013. Cette somme trop versée étant affectée à concurrence de 140 euros sur les majorations de premier trimestre 2013, de 3 941,89 euros sur les débits antérieurs et faisant l'objet d'un remboursement pour le solde à hauteur de 1 650,11 euros. L'URSSAF explique dans sa note en délibéré devant la cour que la somme de 3 941,89 euros a été ventilée comme suit : 3 351 euros au titre des cotisations du quatrième trimestre 2012, 518 euros au titre des majorations et 72,89 euros au titre des frais de signification de la contrainte. Il résulte de ces éléments que les causes de la contrainte ont été éteintes après la signification de celle-ci, M. U... ne démontrant pas le contraire, et que les frais de signification de celle-ci étaient justifiés. Il en résulte en outre qu'il n'y a pas lieu de considérer que la somme de 2 749 euros remboursée par l'URSSAF l'a été en application du jugement du 10 juillet 2015, de sorte qu'il est établi que c'est par erreur qu'elle a été remboursée. Après avoir procédé au calcul définitif des cotisations et contributions dues au titre de l'année 2015, l'URSSAF a, le 22 septembre 2016, indiqué qu'elle devait à M U... la somme de 384 euros puisqu'il avait déjà payé 3 788 euros au titre des cotisations provisionnelles et que les cotisations définitives étaient de 3 404 euros. Toutefois, du fait du paiement à tort de la somme de 2 749 euros et de l'imputation de 850 euros initialement sur le troisième trimestre 2015 (soit un total de 3 599 euros), à déduire de la somme versée par M. U... de 3 788 euros, c'est à juste titre que l'URSSAF indique qu'en réalité le solde des cotisations acquittées s'élève à 189 euros (3 788 - 3 599). Ainsi, M. U... restait donc devoir la somme de 3 215 euros réclamée dans la contrainte litigieuse, les indications figurant dans le courrier de l'URSSAF du 22 septembre 2016 suivant lesquelles il était dû à M. U... une somme de 384 euros (3 788 € de cotisations acquittées - 3 404 € de cotisations dues) n'ayant plus lieu d'être. Les versements effectués et les remboursements adressés par l'URSSAF (dont 2 749 € et 1 650,11 €) apparaissent dans le décompte du 13 octobre 2017 et l'organisme a expliqué dans sa note en délibéré que l'affectation des 850 euros a été modifiée en 2017, du fait de la régularisation de ses cotisations 2015, en étant affectée à hauteur de 779,02 euros sur la régularisation 2015 (le cotisant ayant cessé son activité le 30 juin 2015) et pour le solde de 70,98 euros sur les frais de signification de la contrainte. M. U... ne justifie pas avoir effectué d'autres versements et il ne peut dans le cadre de la contestation de la contrainte portant sur la régularisation 2015 contester les montants dus au titre des autres années. Le solde de sa dette s'établit ainsi à 2 435,98 euros en principal et 173 euros en majorations de retard. C'est à juste titre que le tribunal a validé la contrainte pour la somme totale restant due de 2 608,98 euros qui comprend les frais de signification de la contrainte ; ET AUX MOTIFS sur les demandes de M. U... QUE : compte tenu de ce qui a été jugé précédemment il sera débouté de ses demandes : - tendant à voir dire qu'il ne doit pas la majoration de retard de 173 euros figurant dans la contrainte validée, ni les frais de recouvrement et d'acte du huissier, - de remboursement des sommes de 1 716,89 euros, de 207 euros (cette somme ayant été imputée sur les sommes dues dans le décompte du 13 octobre 2017) et de 3 012,13 euros. S'agissant de la demande de restitution à titre subsidiaire de la somme de 3 833 euros qui n'a pas été imputée, comme le pensait M. U... sur les quatrième trimestre 2012 et premier trimestre 2013, il convient de l'inviter à se rapprocher de l'URSSAF île de France à laquelle la somme avait été versée, en vue d'obtenir une explication et le cas échéant un remboursement. Il ne peut être fait droit à la demande de l'appelant tendant à retenir qu'il a été empêché d'exercer son droit d'appel au motif qu'il aurait interprété le jugement d'une manière différente de ce qu'a retenu la cour, dès lors que cette circonstance ne constitue pas une cause de suspension ou d'interruption du délai d'appel. S'agissant de la demande de dommages-intérêts, il a été précédemment jugé que les deux contraintes avaient une cause lorsqu'elles ont été signifiées. Si la situation de M. U... n'a été clarifiée qu'à l'issue de nombreuses explications, celui-ci n'établit pas pour autant l'existence d'une faute permettant la réparation d'un préjudice" ; 1°) ALORS QUE la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin, il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; qu'en validant à hauteur de 2 435,98 € en principal la mise en demeure du 21 novembre 2016 et la contrainte signifiée le 4 février 2017 pour un montant en principal de 3 388 € avec pour motif "insuffisance de versement", nature des cotisations : "allocations familiales et contributions travailleurs indépendants", et période : "régul 15" aux termes de motifs selon lesquels "la somme réclamée au titre des cotisations restant dues, suivant décompte arrêté au 13 octobre 2017, est obtenue en récapitulant l'ensemble des cotisations, majorations et frais des années 2012 à 2015, ainsi que l'ensemble des versements et qu'au titre de l'année 2015 c'est bien la somme de 3 404 euros qui y figure laquelle correspond au montant définitif des cotisations au titre de cette année", et, sur le fond, de motifs dont résultent à la fois l'existence de trop versés par le travailleur indépendant au titre de cette même année 2015 (3 788 € versés contre 3 404 € dus : arrêt p.4 alinéa 1er), de remboursements opérés par l'urssaf en 2016 (2 749 €) d'imputations d'étiologie inconnue (850 €), toutes opérations résultant d'erreurs et revirements de l'organisme de recouvrement, mais également de prélèvements excédentaires opérés au titre des années 2013 et 2014 (5 732 €) et partiellement remboursés (1 650,11 €) en exécution d'une précédente contrainte contestée, tous éléments dont il résultait que ni les mentions de la mise en demeure, ni celles de la contrainte ne permettaient à M. U... d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.244-2 et L.244-9 du code de la sécurité sociale rendus applicables au recouvrement des cotisations par le régime social des indépendants par les articles L. 133-6-4, I et L.612-12 du même code dans leur version applicable au litige ; 2°) ALORS QUE la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin, il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; que la motivation de la mise en demeure adressée au cotisant ne dispense pas l'organisme social de motiver la contrainte qu'il décerne ensuite pour le recouvrement des cotisations mentionnées dans la mise en demeure ; qu'en déboutant M. U... de sa demande d'annulation de la contrainte aux motifs que " la contrainte qui se réfère expressément à la mise en demeure du 21 novembre 2016 indique comme celle-ci au titre du motif du recouvrement, une insuffisance de versement et au titre de la période concernée, une régularisation 2015. La contrainte mentionne le montant des cotisations dues et des majorations" quand il ressortait de ses propres constatations que la contrainte et la mise en demeure différaient quant aux montants réclamés et qu'en toute hypothèse, les montants mentionnés par l'une et l'autre ne correspondaient pas aux sommes effectivement dues, la cour d'appel a violé derechef les textes susvisés. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. U... de son opposition à contrainte et validé la contrainte établie le 30 janvier 2017 et signifiée le 4 février 2017 pour la somme de 2 608,98 € se détaillant en 2 435,98 € à titre de cotisations et 173 € à titre de majorations de retard, débouté M. U... de ses demandes en restitution de prélèvements indus, de dommages et intérêts, d'indemnité pour frais irrépétibles ; AUX MOTIFS sur le bien fondé de la contrainte QUE " par jugement du 10 juillet 2015 le tribunal des affaires de sécurité sociale a constaté que les causes de la contrainte émise le 16 décembre 2013 portant sur un montant de 4 009 euros, correspondant au quatrième trimestre 2012 (cotisations : 3 351 euros et majorations de retard : 518 euros) et au premier trimestre 2013 (majorations de retard : 140 euros), étaient éteintes et que M. U... n'était redevable d'aucune cotisation et majoration au titre de ces trimestres. Il ne saurait être déduit de ce jugement que le tribunal a annulé la contrainte. Il s'est seulement limité à constater qu'aucune somme ne restait due au titre des trimestres litigieux. Devant les premiers juges M. U... s'était prévalu d'un courrier de l'URSSAF du 14 février 2013 constatant un crédit de 3 833 euros sur son compte, expliqué selon lui par le fait qu'il avait payé deux fois cette somme au titre des premier et deuxième trimestres 2012, et d'un accord avec l'organisme pour imputer ce crédit sur les sommes dues au titre du quatrième trimestre 2012 et du premier trimestre 2013, en réglant la différence par un chèque de 207 euros émis le 27 janvier 2013. Toutefois, dans sa note en délibéré adressée au tribunal, l'URSSAF n'avait pas indiqué que les causes de la contrainte de décembre 2013 étaient éteintes du fait des 3 833 euros et du paiement de 207 euros mais précisé qu'elles avaient été apurées le 21 mai 2014 au moyen de la somme de 5 732 euros qu'elle devait au cotisant à la suite de la régularisation des cotisations 2013. Cette somme trop versée étant affectée à concurrence de 140 euros sur les majorations de premier trimestre 2013, de 3 941,89 euros sur les débits antérieurs et faisant l'objet d'un remboursement pour le solde à hauteur de 1 650,11 euros. L'URSSAF explique dans sa note en délibéré devant la cour que la somme de 3 941,89 euros a été ventilée comme suit : 3 351 euros au titre des cotisations du quatrième trimestre 2012, 518 euros au titre des majorations et 72,89 euros au titre des frais de signification de la contrainte. Il résulte de ces éléments que les causes de la contrainte ont été éteintes après la signification de celle-ci, M. U... ne démontrant pas le contraire, et que les frais de signification de celle-ci étaient justifiés. Il en résulte en outre qu'il n'y a pas lieu de considérer que la somme de 2 749 euros remboursée par l'URSSAF l'a été en application du jugement du 10 juillet 2015, de sorte qu'il est établi que c'est par erreur qu'elle a été remboursée. Après avoir procédé au calcul définitif des cotisations et contributions dues au titre de l'année 2015, l'URSSAF a, le 22 septembre 2016, indiqué qu'elle devait à M U... la somme de 384 euros puisqu'il avait déjà payé 3 788 euros au titre des cotisations provisionnelles et que les cotisations définitives étaient de 3 404 euros. Toutefois, du fait du paiement à tort de la somme de 2 749 euros et de l'imputation de 850 euros initialement sur le troisième trimestre 2015 (soit un total de 3 599 euros), à déduire de la somme versée par M. U... de 3 788 euros, c'est à juste titre que l'URSSAF indique qu'en réalité le solde des cotisations acquittées s'élève à 189 euros (3 788 - 3 599). Ainsi, M. U... restait donc devoir la somme de 3 215 euros réclamée dans la contrainte litigieuse, les indications figurant dans le courrier de l'URSSAF du 22 septembre 2016 suivant lesquelles il était dû à M. U... une somme de 384 euros (3 788 € de cotisations acquittées - 3 404 € de cotisations dues) n'ayant plus lieu d'être. Les versements effectués et les remboursements adressés par l'URSSAF (dont 2 749 € et 1 650,11 €) apparaissent dans le décompte du 13 octobre 2017 et l'organisme a expliqué dans sa note en délibéré que l'affectation des 850 euros a été modifiée en 2017, du fait de la régularisation de ses cotisations 2015, en étant affectée à hauteur de 779,02 euros sur la régularisation 2015 (le cotisant ayant cessé son activité le 30 juin 2015) et pour le solde de 70,98 euros sur les frais de signification de la contrainte. M. U... ne justifie pas avoir effectué d'autres versements et il ne peut dans le cadre de la contestation de la contrainte portant sur la régularisation 2015 contester les montants dus au titre des autres années. Le solde de sa dette s'établit ainsi à 2 435,98 euros en principal et 173 euros en majorations de retard. C'est à juste titre que le tribunal a validé la contrainte pour la somme totale restant due de 2 608,98 euros qui comprend les frais de signification de la contrainte. ET AUX MOTIFS sur les demandes de M. U... QUE : compte tenu de ce qui a été jugé précédemment il sera débouté de ses demandes : - tendant à voir dire qu'il ne doit pas la majoration de retard de 173 euros figurant dans la contrainte validée, ni les frais de recouvrement et d'acte du huissier, - de remboursement des sommes de 1 716,89 euros, de 207 euros (cette somme ayant été imputée sur les sommes dues dans le décompte du 13 octobre 2017) et de 3 012,13 euros. S'agissant de la demande de restitution à titre subsidiaire de la somme de 3 833 euros qui n'a pas été imputée, comme le pensait M. U... sur les quatrième trimestre 2012 et premier trimestre 2013, il convient de l'inviter à se rapprocher de l'URSSAF île de France à laquelle la somme avait été versée, en vue d'obtenir une explication et le cas échéant un remboursement. Il ne peut être fait droit à la demande de l'appelant tendant à retenir qu'il a été empêché d'exercer son droit d'appel au motif qu'il aurait interprété le jugement d'une manière différente de ce qu'a retenu la cour, dès lors que cette circonstance ne constitue pas une cause de suspension ou d'interruption du délai d'appel. S'agissant de la demande de dommages-intérêts, il a été précédemment jugé que les deux contraintes avaient une cause lorsqu'elles ont été signifiées. Si la situation de M. U... n'a été clarifiée qu'à l'issue de nombreuses explications, celui-ci n'établit pas pour autant l'existence d'une faute permettant la réparation d'un préjudice" ; 1°) ALORS QUE le jugement du 10 juillet 2015, rappelant la teneur des débats sur l'opposition du 31 décembre 2013, énonçait : " M. U... soutient que l'acte de signification de la contrainte est nul pour vice de forme et que les cotisations ont été acquittées. Par courrier du 29 avril 2015, l'urssaf indique que la situation est régularisée et qu'il ne subsiste aucun débit sur le compte. A l'audience, M. U... fait valoir qu'il n'est donc redevable d'aucune somme, ce qui était le cas lors de la délivrance de la contrainte. L'urssaf a indiqué elle-même, en février 2013, que son compte était créditeur de 3 833 €. À l'audience l'urssaf confirme, par sa représentante, que les causes de la contrainte sont éteintes" ; que ce jugement retenait, dans son dispositif "que les causes de la contrainte sont éteintes et que M. U... n'est redevable d'aucune cotisation et de majoration au titre des 4ème trimestre 2012 et du 1er trimestre 2013" ; qu'en se fondant, pour considérer que "les causes de la contrainte ont été éteintes après la signification de celle-ci" et " qu'il n'y a pas lieu de considérer que la somme de 2 749 € remboursée par l'urssaf l'a été en application du jugement du 10 juillet 2015 de sorte qu'il est établi que c'est par erreur qu'elle a été remboursée", sur les indications d'une "note en délibéré adressée au tribunal [par] l'urssaf", quand le jugement du 10 juillet 2015 ne mentionnait nullement qu'une telle note aurait été sollicitée, ni prise en compte, la cour d'appel a dénaturé le jugement du 10 juillet 2015. 2°) ALORS subsidiairement QUE méconnaît le droit d'accès au juge l'organisme de recouvrement qui, sans attendre que le tribunal saisi ait statué sur l'opposition à contrainte formée par le cotisant, opère d'office une compensation entre les causes de la contrainte et sa propre dette antérieure à son égard ; que la compensation ainsi opérée en violation d'un droit fondamental du cotisant est nulle, sans qu'il importe que l'extinctino de l'obligation en résultant ait été constatée par un jugement qui n'a pas tranché, au fond, le contentieux qui lui était soumis sur cette opposition ; qu'en retenant à l'appui de sa décision, pour valider la contrainte décernée par l'urssaf 76 le 30 janvier 2017, que les causes de la contrainte émises le 16 décembre 2013, frappée d'opposition par M. U..., avaient été apurées par l'urssaf au cours de cette procédure, le 21 mai 2014, " au moyen de la somme de 5 732 euros qu'elle devait au cotisant à la suite de la régularisation des cotisations 2013", de sorte que le jugement du 10 juillet 2015 n'avait pas annulé la contrainte, mais s'était "limité à constater qu'aucune somme ne restait due au titre des trimestres litigieux" la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 6 §.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 3°) ALORS QU'en déduisant des seules allégations formulées par l'urssaf dans une note en délibéré adressée au tribunal des affaires de sécurité sociale dans la procédure d'opposition " que les causes de la contrainte [du 16 décembre 2013] ont été éteintes après la signification de celle-ci, M. U... ne démontrant pas le contraire, et que les frais de signification de celle-ci étaient justifiés" quand il appartenait à l'urssaf de démontrer, en l'absence de jugement ayant statué sur l'opposition du cotisant, que les causes de cette contrainte étaient justifiées la cour d'appel, qui a renversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353 du code civil ; 4°) ALORS en outre QUE des motifs inintelligibles équivalent à un défaut de motifs ; qu'en retenant à l'appui de sa décision qu' " après avoir procédé au calcul définitif des cotisations et contributions dues au titre de l'année 2015, l'URSSAF a, le 22 septembre 2016, indiqué qu'elle devait à M U... la somme de 384 euros puisqu'il avait déjà payé 3 788 euros au titre des cotisations provisionnelles et que les cotisations définitives étaient de 3 404 euros", que "toutefois, du fait du paiement à tort de la somme de 2 749 euros et de l'imputation de 850 euros initialement sur le troisième trimestre 2015 (soit un total de 3 599 euros), à déduire de la somme versée par M. U... de 3 788 euros, c'est à juste titre que l'URSSAF indique qu'en réalité le solde des cotisations acquittées s'élève à 189 euros (3 788 - 3 599). ( ) Les versements effectués et les remboursements adressés par l'URSSAF (dont 2 749 € et 1 650,11 €) apparaissent dans le décompte du 13 octobre 2017 et l'organisme a expliqué dans sa note en délibéré que l'affectation des 850 euros a été modifiée en 2017, du fait de la régularisation de ses cotisations 2015, en étant affectée à hauteur de 779,02 euros sur la régularisation 2015 (le cotisant ayant cessé son activité le 30 juin 2015) et pour le solde de 70,98 euros sur les frais de signification de la contrainte. M. U... ne justifie pas avoir effectué d'autres versements et il ne peut dans le cadre de la contestation de la contrainte portant sur la régularisation 2015 contester les montants dus au titre des autres années", la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs inintelligibles, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 5°) ALORS enfin QU'en retenant à l'appui de sa décision que "M. U... ne peut dans le cadre de la contestation de la contrainte portant sur la régularisation 2015 contester les montants dus au titre des autres années", après avoir constaté " que la somme de 2 435,98 euros réclamée au titre des cotisations restant dues, suivant décompte arrêté au 13 octobre 2017, est obtenue en récapitulant l'ensemble des cotisations, majorations et frais des années 2012 à 2015, ainsi que l'ensemble des versements", ce dont résultait le droit, pour M. U..., de contester à l'occasion de son opposition l'ensemble des cotisations, majorations et frais au titre des années 2012 à 2015 invoqués par l'urssaf pour justifier sa demande, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 4 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 §.1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La contrainte délivrée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale sur le fondement de l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale a pour objet exclusif le recouvrement des cotisations et contributions sociales et des majorations de retard. Viole ce texte la cour d'appel qui valide la contrainte décernée par l'URSSAF, alors qu'il ressortait de ses constatations que le cotisant avait acquitté les sommes dont il était redevable, de sorte que la contrainte avait pour objet, non le recouvrement des cotisations sociales définitives, mais le remboursement d'un indu correspondant aux sommes versées par erreur par l'organisme de sécurité sociale
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CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Cassation partielle sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 886 FS-P+B+I Pourvoi n° S 19-17.824 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 La société GAN assurances, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° S 19-17.824 contre l'arrêt rendu le 27 mars 2019 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme S... M..., épouse J..., 2°/ à M. X... J..., tous deux domiciliés [...] , 3°/ à la société Aixia France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Aixia Méditerranée, 4°/ à M. E... U..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Aixia France, 5°/ à la société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Sofemo financement, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Bech, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société GAN assurances, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bech, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, M. Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, M. Zedda, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Désistement partiel 1. Il est donné acte à la société GAN assurances (la société GAN) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Aixia France, M. U..., pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, et la société Cofidis. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 27 mars 2019), M. et Mme J... ont commandé à la société Aixia Méditerranée, absorbée depuis par la société Aixia France, assurée par la société GAN, la fourniture et l'installation dans leur maison d'une pompe à chaleur et d'un ballon thermodynamique. Pour financer ces opérations, ils ont souscrit un emprunt auprès de la société Sofemo financement, devenue Cofidis. 3. Se plaignant de pannes survenues durant les mois de février et mars 2012, ils ont assigné la société Aixia Méditerranée, le liquidateur de la société Aixia France et les sociétés Sofemo financement et GAN en indemnisation des préjudices ou en remboursement du prix payé et du coût du financement. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 5. La société GAN fait grief à l'arrêt de dire que la prestation commandée à la société Aixia Méditerranée est impropre à l'usage auquel elle était destinée et de dire qu'elle se substituera à la société Aixia Méditerranée pour le paiement des sommes dues à M. et Mme J..., alors « que les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, ne relèvent de la responsabilité décennale que s'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble ; que la performance insuffisante d'un élément d'équipement dissociable n'est pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble ; qu'en l'espèce, pour retenir la responsabilité décennale de la société Aixia France et la garantie de la société GAN assurances, la cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que le nouveau système de chauffage installé par la société Aixia Méditerranée était inadapté au volume d'air à chauffer, que l'installateur aurait dû conseiller à ses clients de prévoir un chauffage d'appoint, et que le mode de chauffage existant ne nécessitait pas l'installation d'une pompe à chaleur dont le coût en électricité était plus important ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que l'absence des performances attendues de la pompe à chaleur et l'inadaptation de cette dernière à l'habitation de M. et Mme J... n'était pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1792 du code civil. » Réponse de la Cour 6. Ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que M. et Mme J... s'étaient plaints de plusieurs pannes de la pompe à chaleur survenues durant les mois de février et mars 2012 et retenu que le volume d'air à chauffer était trop important par rapport à la capacité de la pompe à chaleur, que le système de chauffage était incompatible avec les radiateurs équipant l'immeuble et qu'il était inévitable que la pompe à chaleur connût des problèmes durant les périodes de grand froid, la cour d'appel en a souverainement déduit que les désordres atteignant celle-ci rendaient l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination et relevaient de la garantie décennale. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le second moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 8. La société GAN fait grief à l'arrêt de dire qu'elle se substituera à la société Aixia Méditerranée pour le paiement des sommes dues à M. et Mme J..., alors « que si la fusion-absorption transmet à la société absorbante l'actif et le passif de la société absorbée, elle ne saurait étendre le bénéfice de l'assurance de responsabilité souscrite par la société absorbante aux faits commis par la société absorbée avant la fusion et modifier ainsi le risque garanti ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que, « du fait de l'absorption par Aixia France d'Aixia Méditerranée, le contrat d'assurance [souscrit par Aixia France] trouve bien application au cas d'espèce », privant ainsi la société Gan Assurances de la possibilité d'« exciper de la clause selon laquelle le contrat a pour objet de garantir Aixia France en dehors de toutes autres sociétés filiales ou concessionnaires, quel que soit le statut juridique » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses propres constatations que le contrat d'assurance souscrit par la société Aixia France ne couvrait pas la responsabilité de ses filiales, de sorte que, peu important l'absorption de la société Aixia Méditerranée, la société GAN assurances n'avait pas à couvrir la responsabilité éventuellement encourue par cette société au titre de faits antérieurs à la fusion-absorption, au surplus au titre d'une activité qui n'était pas couverte par l'assurance souscrite par la société Aixia France, la cour d'appel a violé les articles 1134, devenu l'article 1103, du code civil et L. 236-1 et L. 236-3 du code de commerce. » Réponse de la Cour Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et l'article L. 236-3 du code de commerce : 9. Selon le premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. 10. Il résulte du second, dans sa version applicable à la cause, que, en cas de fusion entre deux sociétés par absorption de l'une par l'autre, la dette de responsabilité de la société absorbée est transmise de plein droit à la société absorbante. 11. Toutefois, l'assurance de responsabilité de la société absorbante, souscrite avant la fusion, n'a pas vocation à garantir le paiement d'une telle dette, dès lors que le contrat d'assurance couvre, sauf stipulation contraire, la responsabilité de la seule société assurée, unique bénéficiaire, à l'exclusion de toute autre, même absorbée ensuite par l'assurée, de la garantie accordée par l‘assureur en fonction de son appréciation du risque. 12. Pour dire que la société GAN se substituera à la société Aixia Méditerranée pour le paiement des sommes dues aux maîtres de l'ouvrage, l'arrêt retient que ceux-ci ont produit une attestation d'assurance concernant la société Aixia France à effet du 1er janvier 2012, que les désordres sont survenus en février et mars 2012, à une période normalement couverte par le contrat d'assurance, et que, même si la société GAN entend se prévaloir de la clause de la police selon laquelle le contrat a pour objet de garantir la société Aixia France en dehors de toutes autres sociétés filiales ou concessionnaires, le contrat d'assurance trouve à s'appliquer, du fait de l'absorption de la société Aixia Méditerranée par la société Aixia France. 13. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés . Portée et conséquences de la cassation 14. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 15. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la société GAN se substituera à la société Aixia Méditerranée pour le paiement des sommes dues à M. et Mme J..., l'arrêt rendu le 27 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Rejette la demande de M. et Mme J... contre la société GAN ; Dit n'y avoir lieu de modifier les dépens exposés devant les juges du fond ; Condamne M. et Mme J... aux dépens exposés devant la Cour de cassation ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Maunand, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société GAN assurances PREMIER MOYEN DE CASSATION : IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prestation de fourniture et pose d'une pompe à chaleur et d'un ballon thermodynamique, objet du bon de commande signé par M. et Mme J... le 6 avril 2009 avec la société Aixia Méditerranée, était impropre à l'usage auquel elle était destinée en application de l'article 1792 du code civil, et d'avoir dit que la société Gan Assurances se substituerait à la société Aixia Méditerranée pour le paiement de la somme de 32.411,38 €, montant de la créance de M. et Mme J... fixée au passif de la société Aixia France, en liquidation judiciaire ; AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur les demandes formées à l'encontre de la société Aixia, retenant le moyen principal invoqué par les époux J... à l'appui de leur demande, le premier juge a considéré que la pompe à chaleur vendue par la société Aixia constituait un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ; qu'il s'est fondé sur le rapport contradictoire de M. T... H..., lequel a relevé : - que l'installateur aurait dû conseiller aux clients de prévoir un chauffage d'appoint ; - que le volume d'air à chauffer est trop important par rapport à la capacité de la pompe ;- que le système est incompatible avec des radiateurs en fonte, existant dans la maison des époux J... ; - que le mode de chauffage existant ne nécessitait pas l'installation d'une pompe à chaleur et qu'en fin de compte la consommation en électricité était nettement plus faible avant l'installation de ladite pompe ; que l'expert en conclut que l'installation de la pompe à chaleur n'était pas justifiée dans le cas d'espèce et que les performances énergétiques calorifiques de l'installation sont mauvaises ; que les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur l'existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ; que c'est donc à tort que le Gan soutient que l'article 1792 du code civil serait inapplicable à l'espèce (arrêt, p. 4) ; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE l'article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, mêmes résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère ; que l'article 1792-2 du même code dispose que la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou l'enlèvement de matière de cet ouvrage ; que les demandeurs produisent un contrat sous forme de bon de commande souscrit par M. X... J... le 06,04.2009 portant sur «310008. total HT 22 559,24 €» et sur «un ballon thermo offert «soit un total TTC 23 800 E» ; que les époux J... ont signé un contrat d'entretien avec la société Aixia Tech en juillet 2011 ; que la mise en oeuvre d'un nouveau système de chauffage par la fourniture et l'installation d'une pompe à chaleur air-eau destinée à devenir le moyen de chauffage principal de la maison, la chaudière au fioul existante ne devant plus que constituer un chauffage d'appoint en cas de températures extérieures rigoureuses, est un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil précité ; que M. T... H... indique dans un rapport réalisé après convocation des parties par lettre recommandée et accédit le 12.07.2012 que les pompes à chaleur aérothermiques doivent être munies d'un système de chauffage d'appoint pour compenser leur rendement trop faible dans le cas de température extérieure basse, que le volume d'air chauffé est trop important par rapport à la capacité de la pompe alors que l'installation est incompatible avec les radiateurs en fonte dont est équipée la maison ; qu'il est dans ces conditions inévitable que la pompe rencontre des problèmes dans les périodes de grand froid alors que le système de chauffage préexistant performant ne nécessitait pas l'installation d'une pompe à chaleur ; qu'il en résulte que le matériel acquis est impropre à l'usage auquel il était destiné, chauffer le logement des demandeurs avec de meilleurs performances que l'installation existante en raison de son défaut d'adaptation au volume de chauffage et de son incompatibilité avec l'installation existante ; que dès lors, les demandeurs sont bien fondés à solliciter le remboursement du matériel et de l'installation acquise soir 28 300€ ; qu'au vu des conclusions de l'expert, la demande de dommages intérêts au titre des désagréments et du préjudice moral occasionnés par les pratiques commerciales de la société Aixia est justifiée à concurrence de concurrence de 1500 E ; qu'au total, la demande principale des époux J... est bien fondée à concurrence de 29800 E (jugement, p. 3 et 4) ; 1°) ALORS QUE la qualification d'ouvrage suppose l'emploi de techniques de construction et de génie civil ; qu'elle ne s'applique pas aux éléments d'équipement, lesquels sont affectés au fonctionnement de l'ouvrage, lorsqu'ils en sont dissociables ; qu'en l'espèce, le tribunal a considéré que « la mise en oeuvre d'un nouveau système de chauffage par la fourniture et l'installation d'une pompe à chaleur air-eau destinée à devenir le moyen de chauffage principal de la maison, la chaudière au fioul existante ne devant plus que constituer un chauffage d'appoint en cas de températures extérieures rigoureuses, est un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil » (jugt, p. 4 § 3) ; qu'en se prononçant ainsi, par des motifs réputés adoptés, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., p. 5 in fine), si la pompe à chaleur litigieuse constituait un élément d'équipement dissociable de l'ouvrage, puisqu'elle pouvait être déposée, démontée ou remplacée sans détérioration ou enlèvement de matière de l'ouvrage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ; 2°) ALORS QUE les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, ne relèvent de la responsabilité décennale que s'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble ; que la performance insuffisante d'un élément d'équipement dissociable n'est pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble ; qu'en l'espèce, pour retenir la responsabilité décennale de la société Aixia France et la garantie de la société Gan Assurances, la cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que le nouveau système de chauffage installé par la société Aixia Méditerranée était inadapté au volume d'air à chauffer, que l'installateur aurait dû conseiller à ses clients de prévoir un chauffage d'appoint, et que le mode de chauffage existant ne nécessitait pas l'installation d'une pompe à chaleur dont le coût en électricité était plus important (arrêt, p. 4 ; jugt, p. 4) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que l'absence des performances attendues de la pompe à chaleur et l'inadaptation de cette dernière à l'habitation de M. et Mme J... n'était pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1792 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE) : IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir dit que la société Gan Assurances se substituerait à la société Aixia Méditerranée pour le paiement de la somme de 32.411,38 €, montant de la créance de M. et Mme J... fixée au passif de la société Aixia France, en liquidation judiciaire ; AUX MOTIFS QUE la société Aixia Tech, titulaire du contrat d'entretien, est aux termes d'une attestation du 5 janvier 2011 assurée auprès du Gan au titre de sa responsabilité civile décennale pour les chantiers objet d'une déclaration d'ouverture de chantier entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2011 ; qu'or il n'est pas justifié d'une déclaration d'ouverture de chantier, effectuée par cette société pour cette période ; que les époux J... produisent en outre une attestation d'assurance concernant Aixia France à effet du 1er janvier 2012 ; que le matériel a été commandé, livré et installé en 2009, et les désordres sont survenus en février et mars 2012, à une période normalement couverte par le contrat ; que le Gan entend exciper de la clause selon laquelle le contrat a pour objet de garantir Aixia France en dehors de toutes autres sociétés filiales ou concessionnaires quel que soit le statut juridique, mais du fait de l'absorption par Aixia France d'Aixia Méditerranée, le contrat d'assurance trouve bien application au cas d'espèce ; que les époux J... disposent bien d'un intérêt à agir contre le GAN, et contrairement à ce qu'a dit le premier juge cette société doit donc bien sa garantie pour le paiement des sommes dues aux époux J... (arrêt, p. 4 et 5) ; 1°) ALORS QUE si la fusion-absorption transmet à la société absorbante l'actif et le passif de la société absorbée, elle ne saurait étendre le bénéfice de l'assurance de responsabilité souscrite par la société absorbante aux faits commis par la société absorbée avant la fusion et modifier ainsi le risque garanti ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que, « du fait de l'absorption par Aixia France d'Aixia Méditerranée, le contrat d'assurance [souscrit par Aixia France] trouve bien application au cas d'espèce », privant ainsi la société Gan Assurances de la possibilité d'« exciper de la clause selon laquelle le contrat a pour objet de garantir Aixia France en dehors de toutes autres sociétés filiales ou concessionnaires, quel que soit le statut juridique » (arrêt, p. 5 § 1) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses propres constatations que le contrat d'assurance souscrit par la société Aixia France ne couvrait pas la responsabilité de ses filiales, de sorte que, peu important l'absorption de la société Aixia Méditerranée, la société Gan Assurances n'avait pas à couvrir la responsabilité éventuellement encourue par cette société au titre de faits antérieurs à la fusion-absorption, au surplus au titre d'une activité qui n'était pas couverte par l'assurance souscrite par la société Aixia France, la cour d'appel a violé les articles 1134, devenu l'article 1103, du code civil et L. 236-1 et L. 236-3 du code de commerce ; 2°) ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHÈSE le juge doit respecter et faire respecter le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, si M. et Mme J... soutenaient dans leurs écritures qu'il convenait d'assimiler les sociétés Aixia France et Aixia Méditerranée, car « en réalité il s'agit d'une seule et même entreprise, agissant sous une dizaine d'autres noms commerciaux » (concl. adv., p. 4 dernier §), ils ne prétendaient pas que l'absorption par la société Aixia France de la société Aixia Méditerranée impliquait la garantie de la société Gan Assurances, en tant qu'assureur de la société Aixia France, de la responsabilité de la société Aixia Méditerranée ; que la cour d'appel a pourtant considéré que « du fait de l'absorption par Aixia France d'Aixia Méditerranée, le contrat d'assurance trouve bien application au cas d'espèce » et que la société Gan Assurances ne pouvait « exciper de la clause selon laquelle le contrat a pour objet de garantir Aixia France en dehors de toutes autres sociétés filiales ou concessionnaires, quel que soit le statut juridique » (arrêt, p. 5 § 1) ; qu'en soulevant ainsi un moyen d'office, tiré des effets juridiques attachés à la fusion-absorption par la société Aixia France de la société Aixia Méditerranée, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile et le principe de la contradiction ; 3°) ALORS QUE le contrat d'assurance de responsabilité décennale couvre, pour la durée de la responsabilité pesant sur l'assuré en vertu des articles 1792 et suivants du code civil, les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité fixée aux conditions particulières ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que la société Gan Assurances devait garantir la responsabilité décennale de la société Aixia France envers M. et Mme J... pour les désordres affectant un matériel « commandé, livré et installé en 2009 », au titre d'une police de responsabilité civile entrée en vigueur le 1er janvier 2012, dès lors que « les désordres sont survenus en février et mars 2012, à une période normalement couverte par le contrat » (arrêt, p. 5 § 1) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'il résultait de ses propres constatations que le contrat d'assurance de responsabilité décennale souscrit par la société Aixia France n'était pas en vigueur lors de l'ouverture du chantier, peu important la date à laquelle les désordres sont survenus, la cour d'appel a violé les articles L. 241-1 et A. 243-1 annexe 1 du code des assurances ; 4°) ALORS QUE la société Gan Assurances faisait valoir que les contrats souscrits par la société Aixia France la couvraient uniquement, d'une part, pour l'activité d'électricien, d'autre part, pour l'activité d'importation, de négoce et de distribution de chauffe-eau, chauffages solaires, panneaux solaires et petits matériels éoliens et accessoires, et non pour celle de chauffagiste installateur de pompe à chaleur, de sorte que la garantie ne pouvait être mobilisée au titre de l'installation d'une pompe à chaleur ; que pour retenir néanmoins la garantie de la société Gan Assurances, la cour d'appel s'est bornée à relever que M. et Mme J... produisaient « une attestation d'assurance concernant Aixia France à effet du 1er janvier 2012 » (arrêt, p. 5 § 1), qui correspondait à la police garantissant l'activité d'importation et de négoce de la société Aixia France ; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions faisant valoir qu'aucun des contrats souscrits par la société Aixia France auprès de la société Gan Assurances ne couvrait l'activité d'installation de pompes à chaleur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
L'assurance de responsabilité souscrite avant une fusion-absorption par la société absorbante n'a pas vocation à garantir le paiement de la dette de responsabilité de la société absorbée, dès lors que le contrat d'assurance couvre, sauf stipulation contraire, la responsabilité de la seule société assurée, unique bénéficiaire, à l'exclusion de toute autre, même absorbée ensuite par l'assurée, de la garantie accordée par l'assureur en fonction de son appréciation du risque
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CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 887 FS-P+B+I Pourvoi n° G 19-20.024 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 M. G... E..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° G 19-20.024 contre l'arrêt rendu le 4 avril 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre des expropriations), dans le litige l'opposant : 1°/ à la commune de Mallemoisson, représentée par son maire en exercice, domicilié Hôtel de Ville, 04510 Mallemoisson, 2°/ au commissaire du gouvernement, domicilié Direction des finances publiques du Vaucluse, cité administrative, avenue du 7e Génie CS 90043, 84098 Avignon cedex 9, défenderesses à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. E..., de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la commune de Mallemoisson, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Bech, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Zedda, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. L'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 avril 2019) fixe le montant des indemnités revenant à M. E... au titre de l'expropriation partielle, au profit de la commune de Mallemoisson, de plusieurs parcelles lui appartenant. Examen des moyens Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 3. M. E... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'appel principal qu'il a formé le 27 septembre 2018, alors : « 1°/ qu'en application des articles R. 311-24 et R. 311-26 du code de l'expropriation, la partie intimée, qui désire poursuivre la réformation ou l'annulation du jugement, n'est pas tenue de former un appel incident ; qu'elle peut également interjeter un appel principal à la seule condition de le faire dans le délai requis, courant à compter de la signification du jugement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé que la circonstance que le jugement entrepris n'ait pas été signifié à M. E... était sans incidence sur l'irrecevabilité de son appel, dès lors que M. E... n'avait pas formé appel incident dans le délai de trois mois suivant la notification du mémoire de la commune de Mallemoisson ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles R. 311-24, R. 311-26, R. 311-29 et R. 311-30 du code de l'expropriation ; 2°/ qu'en application de l'article R. 311-29 du code de l'expropriation, les articles 899 et suivants du code de procédure civile ne régissent la procédure d'appel en matière d'expropriation que si les dispositions des articles R. 311-24 et suivants du code de l'expropriation n'y font pas obstacle ; que la procédure d'appel d'un jugement d'expropriation est exclusivement régie par les dispositions des articles R. 311-24 à R. 311-30 du code de l'expropriation, selon lesquelles le délai d'appel d'un mois court à compter de la notification du jugement par signification ; que ne concerne que les procédures régies exclusivement par les articles 550, 909 et 910 du code de procédure civile le principe selon lequel du fait de son abstention à former appel incident dans les conditions prévues par l'article 909 du code de procédure civile, alors que cette voie de recours lui est ouverte dans les conditions prévues par l'article 550 du code de procédure civile, l'intimé n'est pas recevable à relever ensuite appel principal du jugement précédemment attaqué, la date de la signification de ce dernier étant indifférente ; qu'en considérant en application des articles 550 et 909 du code de procédure civile, que l'appel principal de M. E... n'était pas recevable, du fait de son abstention de former appel incident et quand cette voie de recours lui était ouverte, peu important que le jugement qu'il critique ne lui ait pas été signifié, la cour d'appel a violé les articles R. 311-24, R. 311-26, R. 311-29 et R. 311-30 du code de l'expropriation. » Réponse de la Cour 4. La cour d'appel a relevé que la commune de Mallemoisson avait interjeté appel le 7 février 2018 et que son mémoire, déposé le 3 mai 2018, avait été notifié le 15 mai 2018 à M. E..., qui n'avait ni conclu ni formé appel incident dans les trois mois suivant cette date, mais avait formé un appel à titre principal le 27 septembre 2018. 5. Elle en a déduit à bon droit que M. E..., qui s'était abstenu de former appel incident dans le délai de trois mois ouvert à l'intimé par l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, n'était pas recevable à relever appel principal du jugement précédemment attaqué, l'absence de signification de celui-ci étant indifférente. 6. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. E... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour M. E... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel principal formé par G... E... le 27 septembre 2018, AUX MOTIFS QUE : « Sur l'irrecevabilité de l'appel de G... E... : Selon l'article R311-26 du code de l'expropriation, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction. En l'espèce, la commune de Mallemoisson a interjeté appel le 7 février 2018 et son mémoire déposé le 3 mai 2018 a été notifié à l'intimé le 15 mai 2018.G... E... n'a ni conclu ni formé appel incident dans les trois mois suivant cette date. Mais il a formé appel principal le 27 septembre 2018.L'expropriante en déduit que ce deuxième appel principal est irrecevable faute d'appel incident formé dans le délai précité et, se référant à la jurisprudence de la 2eme chambre civile de la cour de cassation, elle souligne que l'absence de signification du jugement attaqué est indifférente. G... E... répond qu'à défaut de signification de la décision entreprise, l'appel reste possible. II considère que la thèse de la commune porte atteinte au droit d'accès au juge et cite une rupture d'égalité entre les justiciables puisque la cour de cassation admet qu'en l'absence de signification du jugement, le premier appelant peut former un nouvel appel principal alors même que sa première déclaration d'appel a été jugée caduque pour ne pas avoir respecté le délai imposé par l'article 908 du code de procédure civile. II ajoute qu'en tout état de cause, la jurisprudence invoquée par l'expropriante, qui vise l'article 550 du code de procédure civile, lequel trouve application sous réserve des articles 905-2,909 et 910 du code de procédure civile, est consacrée par le nouvel article 911-1 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret du 6 mai 2017, et n'est pas transposable à la procédure d'expropriation, dérogatoire du droit commun et soumise à ses règles propres. Cependant, l'article R. 311-29 du code de l'expropriation précise, sous réserve de certaines dispositions qui ne concernent pas le présent litige, que la procédure devant la cour d'appel statuant en matière d'expropriation est régie par les dispositions du titre VI du livre II du code de procédure civile, et par conséquent par les articles 899 à 972 du code de procédure civile. A cet égard, le nouvel article 911-1 du code de procédure civile applicable avant la saisine de la cour, dispose que n'est plus recevable à former appel incident l'intimé auquel ont été régulièrement notifiées les conclusions de l'appel et qui n'a pas formé appel incident ou provoqué contre le jugement attaqué dans les délais impartis aux articles 905-2 et 909 ou dont l'appel incident ou provoqué a été déclaré irrecevable. Le délai imparti par l'article R. 311-26 du code de l'expropriation est identique à celui de l'article 909 du code de procédure civile. II I en résulte que n'ayant pas formé appel incident dans le délai de trois mois suivant la notification du mémoire de la commune de Mallemoisson, G... E... n'est pas recevable à relever appel principal, peu important que le jugement qu'il critique ne lui ait pas été signifié. Cette sanction ne le prive pas de son droit d'accès au juge et à un procès équitable ou à un recours effectif dans la mesure où ce n'est que du fait de son abstention à exercer un appel incident qui lui était ouvert, que son appel principal est irrecevable. Elle ne crée pas non plus de rupture d'égalité entre les justiciables au motif qu'un appelant ayant vu sa déclaration d'appel déclarée caduque, peut former un nouvel appel tant que le délai d'appel n'est pas expiré » ; 1. ALORS QU'en application des articles R. 311-24 et R. 311-26 du code de l'expropriation, la partie intimée, qui désire poursuivre la réformation ou l'annulation du jugement, n'est pas tenue de former un appel incident ; qu'elle peut également interjeter un appel principal à la seule condition de le faire dans le délai requis, courant à compter de la signification du jugement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé que la circonstance que le jugement entrepris n'ait pas été signifié à Monsieur E... était sans incidence sur l'irrecevabilité de son appel, dès lors que Monsieur E... n'avait pas formé appel incident dans le délai de trois mois suivant la notification du mémoire de la commune de Mallemoisson ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles R. 311-24, R. 311-26, R. 311-29 et R. 311-30 du code de l'expropriation ; 2. ALORS QU'en application de l'article R. 311-29 du code de l'expropriation, les articles 899 et suivants du code de procédure civile ne régissent la procédure d'appel en matière d'expropriation que si les dispositions des articles R. 311-24 et suivants du code de l'expropriation n'y font pas obstacle ; que la procédure d'appel d'un jugement d'expropriation est exclusivement régie par les dispositions des articles R. 311-24 à R. 311-30 du code de l'expropriation, selon lesquelles le délai d'appel d'un mois court à compter de la notification du jugement par signification ; que ne concerne que les procédures régies exclusivement par les articles 550, 909 et 910 du code de procédure civile le principe selon lequel du fait de son abstention à former appel incident dans les conditions prévues par l'article 909 du code de procédure civile, alors que cette voie de recours lui est ouverte dans les conditions prévues par l'article 550 du code de procédure civile, l'intimé n'est pas recevable à relever ensuite appel principal du jugement précédemment attaqué, la date de la signification de ce dernier étant indifférente ; qu'en considérant en application des articles 550 et 909 du code de procédure civile, que l'appel principal de Monsieur E... n'était pas recevable, du fait de son abstention de former appel incident et quand cette voie de recours lui était ouverte, peu important que le jugement qu'il critique ne lui ait pas été signifié, la cour d'appel a violé les articles R. 311-24, R. 311-26, R. 311-29 et R. 311-30 du code de l'expropriation. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur E... de ses demandes indemnitaires au titre de la dépréciation du surplus pour le déplacement du hangar sur valeur de reconstruction à neuf et de la perte d'exploitation due à la disparition et la reconstruction du hangar ; AUX MOTIFS QUE : « Seul le préjudice lié à la dépréciation du surplus est en litige. G... E... est propriétaire d'un hangar agricole édifié sur un talus. Une plate-forme constituée de remblai est située à l'ouest de ce bâtiment et jouxte les parcelles [...] expropriées. L'intimé a soutenu en première instance que du fait de l'emprise, il perd une partie de son aire de manouvres rendant ainsi son hangar inaccessible aux engins agricoles et de ce fait impropre à sa destination, justifiant en conséquence sa démolition et sa reconstruction.Il a précisé que le terrassement de sa plate-forme était intervenu en 2003 de sorte que la présomption de l'article L13-14 du code de l'expropriation doit être écartée. La commune de Mallemoisson a répondu que des travaux d'exhaussement ont été réalisés de manière illicite après l'ouverture de l'enquête conjointe, qu'ils ont élargi la zone de stockage et repoussé la crête du talus et entrainé par conséquent une limite d'emprise qui n'affectait initialement ni la plate-forme ni le hangar, à l'intérieur de la zone de stockage. Par jugement du 26 février 2014, le premier juge a ordonné une expertise afin de vérifier :- l'implantation exacte de l'ouvrage et de son extension autorisée, ainsi que la date d'extension et de rehaussement de la plate-forme de manoeuvres,- les atteintes apportées par l'emprise aux possibilités de manoeuvres des engins agricoles et des semi-remorques de transport de matière agricole,- les conséquences matérielles de l'emprise en termes d'atteinte à la destination du hangar agricole. Après dépôt du rapport le 20 juillet 2015, le tribunal a retenu que l'expertise démontre l'impact massif constant et indiscutable de l'emprise sur l'accès et l'emploi et l'usage des travées 1 et 2, soit 1/3 du hangar. Il a écarté la présomption de L. 13-14 du code de l'expropriation en estimant qu'il n'y a pas de caractère spéculatif dans la réalisation de la plate-forme agricole en 2003 et portant un ouvrage d'utilité économique. Il a enfin considéré que les remèdes préconisés sont trop contraignants et génèrent des incommodités flagrantes de sorte que le hangar agricole, devenu impropre à sa destination, doit être démoli et reconstruit. La commune de Mallemoisson conteste l'existence de la dépréciation du surplus en soutenant que le juge a dénaturé le rapport de l'expert qui n'admet un impact dans les conditions d'exploitation définies par G... E... que sur l'accès à la travée 1 et ne conclut pas à l'impropriété de l'ouvrage à sa destination. Elle ajoute que la présomption de l'article L. 13-14 doit être retenue puisque les travaux d'extension ont été réalisés après l'enquête publique, le premier juge s'étant fondé sur les travaux de la plate-forme originelle mais pas sur son extension. Elle précise que le tribunal n'a pas non plus répondu sur la situation doublement irrégulière des installations (plate-forme et hangar) au regard des règles d'urbanisme. Elle estime enfin que l'indemnité a été fixée sans explication ni justification pour la démolition et la reconstruction du hangar et qu'il est difficile de comprendre le préjudice d'exploitation de G... E... retenu par le juge qui constitue une double indemnisation. Le commissaire du gouvernement considère également que pour l'expert, une réorganisation de l'utilisation intérieure du hangar agricole permet de sécuriser les manoeuvres y compris avec l'emprise de sorte qu'il ne conclut ni à l'impropriété du hangar à sa destination ni à la nécessité de le démolir et le reconstruire. Il en déduit qu'il n'existe pas de dépréciation du surplus, ni de trouble d'exploitation mais une perte d'exploitation concernant les emprises en nature dont G... E... est privé. Le rapport de M. N..., qui pour les besoins de son expertise a divisé le hangar en 6 travées numérotées de 1 à 6 allant du sud au nord, établit que :- la plate-forme située devant le hangar présente en surface une zone où le remblai apparait directement correspondant à une partie « circulée » et une zone enherbée où la circulation est de fait moins fréquente,- la zone de manoeuvres courantes des engins marquée par l'absence de végétation se situe nettement hors de l'emprise expropriée,- des engins sont stockés en bord de la plate-forme entre les travées 3 à 6 indiquant que la plate-forme n'est pas réservée aux manoeuvres sur toute cette zone, Ia paille est stockée actuellement essentiellement dans les trois travées sud au droit desquelles la plate-forme actuelle présente le moins de dégagement,- les manoeuvres effectuées au droit de la travée 1 avec le tracteur ou le manitou ne présentent pas aujourd'hui toutes les conditions et garanties de sécurité. Les engins évoluent en effet en ordonnance d'une plate-forme de qualité médiocre se traduisant par un poinçonnement conséquent, l'exploitation de la plate-forme ouest au hangar au droit de ces travées Sud 1 et 2 est aujourd'hui exiguë au regard des scenarios d'usage proposés par G... E... (l'expert précise néanmoins qu'il convient de constater que les scenarios proposés par M. E... conduisent à un chevauchement de la zone enherbée où la circulation est peu fréquente, ce qui petit conduire à s'interroger sur leur pertinence, leur fréquence et leur vraisemblance),L'exécution de ces scenarios a montré que : . certaines manoeuvres peuvent aujourd'hui présenter des risques compte tenu de la portance médiocre en bord de la plate-forme,. l'entrée d'attelages longs (semi-remorques, camions remorques) en travée 2 demandaient entre 15 et 20 manoeuvres, . ces manoeuvres peu rationnelles et risquées au regard de la géométrie et de la qualité de la plate-forme au droit des travées Sud 1 et 2 ne sont pas envisageables après réduction de la largeur de la plate-forme de l'ordre de 1,50 in au droit de ces deux travées. L'expert a précisé que la sécurisation du bord de la plate-forme actuelle, notamment au droit des trois travées (1 à 3) où elle est le moins large, et ou le poinçonnement est constatable sous les engins, peut être obtenue par substitution du remblai actuel sur 0,50 m de profondeur, 3 m de large et 20 ml (30 m2) par un matériau granulaire insensible à l'eau et que ces travaux peuvent être estimes à 1.500 € HT. II a proposé sur la base des scenarios de G... E... analysés sur site, la translation de l'usage actuel d'une travée vers le Nord (usage travée 1 vers travée 2, ..., voire permutation du stockage de matériel de la travée 6 à la travée 1) qui permettrait de sécuriser les manoeuvres, y compris avec l'emprise de l'expropriation prévue actuellement. II a souligné que suivant ces éléments, la modification de l'emprise et de la surface de la plate-forme actuelle n'est pas nécessaire. Il ressort ainsi de ce rapport expertal qu'en l'état actuel, avant toute expropriation, la plate-forme supporte déjà mal la circulation de poids-lourds, qu'il n'y a pas de trace véritable de circulation sur la moitié de l'emprise, que les scenarios de l'exproprié sont peu probants dans la mesure où nonobstant le fait que le chargement et le déchargement des ballots de paille nécessitent des remorques plateaux vides, les camions bétaillères s'embourbent dans la partie de la zone beaucoup plus enherbée que celle du reste de l'aire de manoeuvres, et que faire pénétrer entièrement des semi-remorques dans la travée 2 nécessite entre 15 et 20 manoeuvres pour aboutir, Les chauffeurs signalant que la manoeuvre de recul en virant dans le sens voulu par l'intimé est difficile et non usuelle. Les attestations produites par la commune de Mallemoisson et émanant de Mme F..., M. S..., riverains du chemin des Pinèdes, confirment au demeurant l'absence de fréquentation de camion ou de semi-remorque à cet endroit, un seul camion remorque ayant été aperçu s'engageant sur ce terrain. En tout état de cause, selon l'expert, l'impact de l'emprise de l'expropriation n'existe que sur la travée 1 dans les conditions d'exploitations définies par G... E..., compte tenu des risques liés à la manoeuvre d'un engin de levage mobile en bord d'une plate-forme de portée médiocre en tête d'un talus de l'ordre de 3 m de haut. M. N... a d'ailleurs souligné qu'une réorganisation de l'utilisation intérieure du hangar agricole (stockage du matériel au sud, et rangement des ballots de paille au nord) permet de sécuriser les manoeuvres, y compris avec l'emprise de l'expropriation. Ainsi, contrairement à ce qu'en a déduit le tribunal, l'expertise n'a pas caractérisé la survenue de difficultés insurmontables de manoeuvres sur la plate-forme actuelle et des conséquences préjudicielles à intervenir de l'emprise sur le hangar et son exploitation. Le premier juge a dès lors retenu à tort que les remèdes préconisés comme la translation d'usage des travées constituent à l'évidence des bricolages préjudiciels ou une sorte de serrage d'usage contraignant l'exploitant et génèrent des incommodités flagrantes et par suite des solutions inadaptées et insuffisantes pour la rationalisation d'une activité agricole qui a besoin de l'intégralité économique de ses hangars agricoles et de sa libre disposition pour stocker au sec ses récoltes et assurer les opérations de livraison et réception de pondéreux. Il en résulte que l'emprise ne rend pas impropre le hangar à un usage normal et donc à sa destination et n'oblige pas à le démolir pour le reconstruire » ; 1°/ ALORS QUE les juges doivent se prononcer, même sommairement, sur tous les éléments de preuve versés aux débats par les parties au soutien de leur prétention ; qu'à défaut de s'être prononcée au regard des éléments produits par Monsieur E... (le constat d'huissier du 6 novembre 2013 de Maître X... et les 59 factures attestant qu'il vend son foin pour des tonnages d'environ 13 à 18 tonnes, impliquant l'intervention de poids-lourds au niveau du hangar) établissant que l'emprise de l'expropriation affectant la plate-forme rendait le hangar agricole impropre à sa destination, dès lors que l'amputation d'une partie de la plate-forme rendait les travées n° 1 et 2 du hangar inaccessibles et pour exclure ainsi toute indemnisation du préjudice de dépréciation du surplus, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ ALORS QU'il ressortait du rapport d'expertise que l'emprise de l'expropriation affectant la plate-forme rendait directement le hangar agricole impropre à sa destination, dès lors que l'amputation d'une partie de la plate-forme rend les travées n° 1 et 2 du hangar inaccessibles ; qu'en retenant qu'il ressortait de ce rapport que l'emprise ne rendait pas le hangar impropre à un usage normal ni donc à sa destination pour exclure toute indemnisation du préjudice de dépréciation pour le surplus, la cour a dénaturé le rapport d'expertise du 15 juillet 2015, en violation de l'article 1192 du code civil. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur E... de ses demandes indemnitaires au titre de la dépréciation du surplus pour le déplacement du hangar sur valeur de reconstruction à neuf et de la perte d'exploitation due à la disparition et la reconstruction du hangar ; AUX MOTIFS QUE « Par ailleurs, aux termes de l'article L13-14 devenu L322-1 du code de l'expropriation, les améliorations de toute nature, telles que constructions, plantations, installations diverses, acquisitions de marchandises, qui auraient été faites à l'immeuble, à l'industrie ou au fonds de commerce, même antérieurement à l'ordonnance d'expropriation, ne donnent lieu à aucune indemnité, si, en raison de l'époque à laquelle ces améliorations ont eu lieu, ou de toutes autres circonstances, il apparaît qu'elles ont été faites dans le but d'obtenir une indemnité plus élevée. Sont présumées faites dans ce but, sauf preuve contraire, les améliorations postérieures à l'ouverture de l'enquête publique. En l'espèce, après analyse de l'agrandissement de la photographie aérienne prise le 22 juillet 2004 par l'ONIC, l'expert a relevé que le hangar et ses abords ont connu un premier aménagement en 2004 non définitif puisqu'il n'existait que 4 des 6 travées d'aujourd'hui et que la plate-forme a connu des mouvements de terre depuis 2004 en recevant des matériaux qui ont été stockés de façon traçable entre juin 2007 et septembre 2009.Sur la base du plan dressé en juin 2007 par le géomètre expert J... à la demande de la commune de Mallemoisson et des photographies aériennes de Mappy, de Géoportail et de Google Earth de 2009 et de 2012, M. N... a ainsi observé que le tas de terre qui longeait la crête du talus en 2007 n'existe plus et que depuis 2012 la plate-forme s'est élargie jusqu'à plus de 2 m au pied de ce même tas disparu, comme le confirme l'évolution de la végétation sur le talus, laquelle était rare en 2012, traduisant un remaniement récent du talus. Ces conclusions sont corroborées par les témoignages de MM. S... et K..., ce dernier affirmant que la modification de l'élévation du niveau de terrain a été réalisée le 25 juillet 2012 et produisant à l'appui de ses dires des photographies et les métadonnées issus de leurs fichiers informatiques signalant qu'elles ont été prises ce jour-là, ainsi que par le procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme dressé le 17 mai 2013 et constatant, en violation de l'article NC1 du plan d'occupation des sols, un important exhaussement de sol à proximité du hangar existant et non de celui édifié à proximité en vertu d'un permis de construire délivré le 25 Mai 2012.Par conséquent, la présomption de l'ancien article. L 13-14 devenue L 322-1 du code de l'expropriation doit être retenue d'autant que l'enquête publique s'est déroulée du 2 au 21 avril 2012 » ; ALORS QUE les juges doivent se prononcer, même sommairement, sur tous les éléments de preuve versés aux débats par les parties au soutien de leur prétention ; qu'en déboutant Monsieur E... de sa demande indemnitaire au titre de la dépréciation du surplus, sans examiner les éléments produits par Monsieur E... (la vue aérienne prise le 22 juillet 2004 communiquée par l'Office national interprofessionnel des céréales dépendant du ministre de l'agriculture, ainsi que la facture et l'attestation de la société Cosepi laquelle a réalisé les travaux d'extension de la plate-forme en 2003) établissant que la plate-forme, dans l'état où elle se trouvait au jour de l'ouverture de l'enquête publique, avait été réalisée en 2003, bien avant l'ouverture de l'enquête publique en 2012, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
L'intimé qui s'est abstenu de former appel incident dans le délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant, tel que prévu par l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, n'est pas recevable à relever appel principal du jugement, l'absence de signification de celui-ci étant indifférente
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CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 890 FS-P+B+I Pourvoi n° P 19-14.601 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 1°/ M. Y... Q..., 2°/ Mme D... W..., épouse Q..., domiciliés tous deux [...], ont formé le pourvoi n° P 19-14.601 contre l'arrêt rendu le 7 février 2019 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige les opposant à M. K... F..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. et Mme Q..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. F..., et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Bech, Boyer, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, M. Zedda, conseillers référendaires, et Mme Berdeaux, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 7 février 2019 ), par acte sous seing privé du 10 mai 2013, M. F... a donné à bail à M. et Mme Q... un appartement pour une durée de trois ans. 2. Par un protocole devant être annexé au contrat de bail, les parties étaient convenues de la vente de l'appartement, selon certaines modalités et conditions, dans un délai maximum de vingt-quatre mois. Par acte du 23 mai 2015, elles ont prorogé les effets du protocole jusqu'au 15 mai 2016. 3. Par acte du 3 novembre 2016, M. F... a, après commandement de payer les loyers, assigné M. et Mme Q... en résiliation du bail, expulsion et paiement de diverses sommes. 4. M. et Mme Q... ont sollicité reconventionnellement la nullité du protocole. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. M. et Mme Q... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'annulation du protocole, de constater la résiliation du bail, de les condamner solidairement à payer diverses sommes au titre des arriérés de loyers et des indemnités d'occupation et d'ordonner leur expulsion, alors : « 1°/ que la promesse de vente, unilatérale ou synallagmatique, qui a pour objet la cession, par une personne physique, d'un immeuble, et dont la validité est supérieure à dix-huit mois, est nulle et de nul effet si elle n'est pas constatée par un acte authentique ; qu'une telle promesse de vente constitue donc un acte solennel ; que la nullité de l'acte qui a été établi sans observer la solennité à laquelle il est assujetti, est absolue, de sorte qu'elle peut être demandée par toute personne intéressée ; qu'en décidant le contraire quand elle constate que la promesse synallagmatique de vente de l'espèce qui a été souscrite par M. K... F... et par M. et Mme Y... Q... W... pour une durée supérieure à vingt-quatre mois, a donné lieu à l'établissement d'un simple acte sous seing privé, et non pas, comme la solennité résultant de l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation l'exigeait, à l'établissement d'unacte authentique, la cour d'appel a violé les articles 1304 ancien et 1180 actuel du code civil, ensemble l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation ; 2°/ que la promesse de vente, unilatérale ou synallagmatique, qui a pour objet la cession, par une personne physique, d'un immeuble, et dont la validité est supérieure à dix-huit mois, est nulle et de nul effet si elle n'est pas constatée par un acte authentique ; que la formalité de l'acte authentique, qui comporte la soumission du contrat à l'enregistrement, est destinée à protéger les intérêts du fisc et par conséquent, l'intérêt public ; qu'il s'ensuit que la nullité prévue par l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation est absolue, de sorte qu'elle peut être demandée par toute personne intéressée ; qu'en décidant le contraire quand elle constate que la promesse synallagmatique de vente de l'espèce qui a été souscrite par M. K... F... et par M. et Mme Y... Q... W... pour une durée supérieure à vingt-quatre mois, a donné lieu à l'établissement d'un simple acte sous seing privé, et non pas, comme la solennité résultant de l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation l'exigeait, à un acte authentique, la cour d'appel a violé les articles 1304 ancien, 1179 actuel et 1180 actuel du code civil, ensemble l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation. » Réponse de la Cour 6. La cour d'appel a retenu que le protocole s'analysait en une promesse synallagmatique de vente d'une durée supérieure à dix-huit mois et qu'il était soumis à l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation. 7. Elle a énoncé à bon droit que, dès lors que les dispositions de ce texte ont pour objet la seule protection du promettant qui immobilise son bien pendant une longue durée, la nullité encourue en raison de leur non-respect est relative. 8. Elle en a exactement déduit que seul M. F... pouvait invoquer la nullité du protocole et que la demande de M. et Mme Q... devait être rejetée. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme Q... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme Q... et les condamne à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Q.... Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif pour l'essentiel, D'AVOIR : . débouté M. et Mme Y... Q... W... de l'action qu'ils formaient contre M. K... F... pour voir annuler le protocole d'accord du 10 mai 2013, lequel a été prorogé jusqu'au 10 mai 2016 ; . constaté la résiliation, à la date du 24 mars 2016 à minuit, du bail que M. K... F... a consenti le 10 mai 2013, à M. et Mme Y... Q... W... ; . condamné solidairement M. et Mme Y... Q... W... à payer à M. K... F... une somme de 11 630 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter de son prononcé ; . condamné solidairement M. et Mme Y... Q... W... à payer à M. K... F..., à compter du 1er janvier 2018, une indemnité d'occupation de 770 € par mois jusqu'à la libération des lieux donnés à bail ; . condamné M. et Mme Y... Q... W... à déguerpir de ces lieux ; AUX MOTIFS QUE, « le protocole d'accord [du 10 mai 2013] s'analysant en une promesse synallagmatique de vente d'une durée de validité supérieure à dix-huit mois, simplement adjointe à un contrat de bail, est soumis aux dispositions de l'article L. .290-1, alinéa 1er, du code de la construction et de l'habitation » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 3e alinéa) ; « que le premier juge ne pouvait refuser d'examiner la demande de nullité de cet acte au motif que celui-ci serait devenu caduc alors, d'une part, que la caducité d'un acte n'interdit pas à un contractant qui justifie d'un intérêt d'en demander la nullité, et, d'autre part, que M. F..., qui agit en constatation de la résiliation du bail, entend se prévaloir de la dernière clause du protocole pour ne pas restituer l'acompte » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 4e alinéa) ; que, « s'agissant de la nature de la nullité encourue, les dispositions légales, applicables à toutes les promesses de vente immobilière, unilatérales ou synallagmatiques, ont été édictées dans le seul but de protéger le promettant qui s'oblige à immobiliser son bien au profit d'une partie pendant une longue durée » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 5e alinéa) ; que « la sanction encourue est donc une nullité relative que seul le promettant propriétaire peut invoquer » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 6e alinéa) ; 1. ALORS QUE la promesse de vente, unilatérale ou synallagmatique, qui a pour objet la cession, par une personne physique, d'un immeuble, et dont la validité est supérieure à dix-huit mois, est nulle et de nul effet si elle n'est pas constatée par un acte authentique ; qu'une telle promesse de vente constitue donc un acte solennel ; que la nullité de l'acte qui a été établi sans observer la solennité à laquelle il est assujetti, est absolue, de sorte qu'elle peut être demandée par toute personne intéressée ; qu'en décidant le contraire quand elle constate que la promesse synallagmatique de vente de l'espèce qui a été souscrite par M. K... F... et par M. et Mme Y... Q... W... pour une durée supérieure à vingt-quatre mois, a donné lieu à l'établissement d'un simple acte sous seing privé (arrêt attaqué, p. 3, 1er alinéa), et non pas, comme la solennité résultant de l'article L 290-1 du code de la construction et de l'habitation l'exigeait, à l'établissement d'un acte authentique, la cour d'appel a violé 1304 ancien et 1180 actuel du code civil, ensemble l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation ; 2. ALORS QUE la promesse de vente, unilatérale ou synallagmatique, qui a pour objet la cession, par une personne physique, d'un immeuble, et dont la validité est supérieure à dix-huit mois, est nulle et de nul effet si elle n'est pas constatée par un acte authentique ; que la formalité de l'acte authentique, qui comporte la soumission du contrat à l'enregistrement, est destinée à protéger les intérêts du fisc et par conséquent, l'intérêt public ; qu'il s'ensuit que la nullité prévue par l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation est absolue, de sorte qu'elle peut être demandée par toute personne intéressée ; qu'en décidant le contraire quand elle constate que la promesse synallagmatique de vente de l'espèce qui a été souscrite par M. K... F... et par M. et Mme Y... Q... W... pour une durée supérieure à vingt-quatre mois, a donné lieu à l'établissement d'un simple acte sous seing privé (arrêt attaqué, p. 3, 1er alinéa), et non pas, comme la solennité résultant de l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation l'exigeait, à un acte authentique, la cour d'appel a violé 1304 ancien, 1179 actuel et 1180 actuel du code civil, ensemble l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation.
Les dispositions de l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation ayant pour objet la seule protection du promettant qui immobilise son bien pendant une longue durée, la nullité encourue en raison de leur non-respect est relative
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CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 26 novembre 2020 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 891 FS-P+B+I Pourvoi n° W 18-17.617 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020 1°/ M. Y... I... B... , 2°/ Mme L... H... O..., épouse I... B..., tous deux domiciliés [...] , ont formé le pourvoi n° W 18-17.617 contre l'arrêt rendu le 4 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 6), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Lyf, dont le siège est [...] , anciennement dénommée Fivory, elle-même anciennement dénommée Banque du crédit mutuel d'Ile-de-France (BCMI), société anonyme, 2°/ au syndicat des copropriétaires [...] , dont le siège est [...] , représenté par son syndic le cabinet Sogi, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Georget, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme I... B... , de Me Le Prado, avocat de la société Lyf, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Georget, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Bech, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Renard, Djikpa, M. Zedda, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 mai 2018), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 15 septembre 2016, pourvoi n° 15-21.772 et 15-22.041), la société civile immobilière Victoria (la SCI) a vendu en l'état futur d'achèvement à M. et Mme I... B... des lots de copropriété comprenant, notamment, un appartement et la jouissance privative de deux jardins. 2. La SCI, défaillante, a conclu avec la Banque de crédit mutuel d'Ile-de-France (la BCMI), devenue la société Lyf, qui avait consenti une garantie extrinsèque, un protocole sur les travaux à financer pour l'achèvement de l'immeuble. 3. Les travaux d'aménagement du talus situé en fond de parcelle, financés par le garant, s'étant révélés insuffisants, le talus s'est effondré à trois reprises, rendant impossible l'accès aux jardins. 4. M. et Mme I... B... ont, après expertise, assigné le syndicat des copropriétaires et la société Lyf, qui a réclamé, reconventionnellement, le paiement du solde du prix. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 5. M. et Mme I... B... font grief à l'arrêt de juger recevable la demande de la société Lyf tendant à leur condamnation à lui payer le solde du prix de vente augmenté des intérêts conventionnels et en conséquence de les condamner solidairement à payer à la société Lyf la somme de 125 768,60 euros, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 1er août 2017 en ordonnant leur capitalisation, alors : « 1°/ que les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'avocat de chacune des parties à celui de l'autre partie ; qu'en se fondant, pour dire la société Lyf recevable en sa demande en paiement du solde du prix et des intérêts contractuels, sur la communication à la cour de l'original de la pièce n° 38 le jour de l'audience tenue le 8 mars 2018, quand les époux I... B... avaient soutenu dans leurs dernières conclusions d'appel notifiées le 7 février 2018 que le biffage de mentions essentielles de la pièce communiquée seulement en copie ne permettait pas d'établir la réalité du paiement du coût des travaux d'achèvement de l'immeuble, allégué par la société Lyf au soutien de sa demande en paiement du solde du prix, de sorte que la communication de l'original non biffé, intervenue seulement le jour de l'audience, était nécessairement tardive pour ne pas permettre son examen en temps utile, la cour d'appel a violé l'article 906 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, qu'il ne peut retenir dans sa décision les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement et que la partie qui fait état d'une pièce s'oblige à la communiquer à toute autre partie à l'instance ; qu'en retenant, pour dire la société Lyf recevable en sa demande en paiement du solde du prix et des intérêts contractuels, qu'il était justifié qu'elle s'était acquittée du coût des travaux de reprise par la production de la pièce n° 38 « virement de compte CARPA de la société Lyf, contestée par les époux I... en raison du biffage de deux numéros mais présentée en original lors de l'audience ainsi que cela a été noté au plumitif d'audience », quand le plumitif d'audience énonce que « l'avocat de la société Lyf communique la pièce 38 à la cour (sans rature et en original) qui en prend connaissance et lui restitue », ce dont il résulte que seuls les magistrats tenant l'audience ont eu connaissance de la pièce litigieuse et qu'elle n'a pas été communiquée en original aux époux I... B... ou à leur représentant qui n'ont pu en débattre, la cour d'appel a violé les articles 16 et 132 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour 6. Le moyen critique des motifs relatifs à la recevabilité de l'action de la société Lyf. Or, le dispositif de l'arrêt ne contient aucun chef déclarant cette action recevable. De plus, ces motifs ne sont pas le soutien nécessaire du chef du dispositif relatif à la condamnation de M. et Mme I... B... au paiement du prix de vente. 7. Le moyen est donc irrecevable. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 8. M. et Mme I... B... font grief à l'arrêt de les condamner à verser à la société Lyf la somme de 125 768,60 euros, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 1er août 2017 en ordonnant leur capitalisation, de rejeter leur demande tendant à la désignation d'un expert judiciaire afin de constater l'achèvement du lot n° 2 et de limiter à la somme de 14 000 euros et à la période d'octobre 2015 à novembre 2016 la condamnation prononcée à l'encontre du syndicat des copropriétaires et de la société Lyf à réparer leur préjudice de jouissance, alors : 1°/ que l'arrêt du 20 mai 2015 qui a constaté l'inachèvement de l'immeuble a condamné le syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux nécessaires à la stabilisation du talus et à la pose des garde-corps et mains courantes pour l'escalier d'accès à la terrasse et la protection de la terrasse supérieure décrits au point 4.1.1. du rapport d'expertise du 21 décembre 2006 de M. V... et a condamné la BCMI à en supporter le coût en relevant le syndicat des copropriétaires indemne des condamnations prononcées à son encontre au titre de ces travaux en lui versant le montant des factures sur leur présentation ; qu'en retenant, pour condamner les époux I... B... à payer à la société Lyf venant aux droits de la BCMI, garant d'achèvement, le solde du prix déduction faite de la retenue de garantie, que l'achèvement de l'immeuble résulte de l'exécution des travaux décidés par l'assemblée générale du syndicat des copropriétaires le 22 mars 2016 pour un montant de 125 808,87 TTC euros constatée par le procès-verbal de réception établi le 19 septembre 2016, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée par les conclusions d'appel des époux I... B... , si les travaux que le syndicat des copropriétaires avait fait exécuter n'étaient pas différents de ceux décrits par l'expert V... dans les passages de son rapport auxquels s'est référé le dispositif de l'arrêt du 20 mai 2015, différence tenant notamment au fait que l'expert les avait évalués à la somme de 204 416 euros HT en 2006, tandis que ceux réalisés, en 2016, l'avaient été pour un montant de 125 808,87 euros TTC, de telle sorte que les travaux exécutés ne pouvaient satisfaire à la condition mise par l'arrêt du 20 mai 2015 à l'achèvement de l'immeuble, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1351, devenu 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ; 2°/ que l'arrêt du 20 mai 2015 qui a constaté l'inachèvement de l'immeuble a condamné le syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux nécessaires à la stabilisation du talus et à la pose des garde-corps et mains courantes pour l'escalier d'accès à la terrasse et la protection de la terrasse supérieure décrits au point 4.1.1. du rapport d'expertise du 21 décembre 2006 de M. V... et a condamné la BCMI à en supporter le coût en relevant le syndicat des copropriétaires indemne des condamnations prononcées à son encontre au titre de ces travaux en lui versant le montant des factures sur leur présentation ; qu'en retenant, pour condamner les époux I... B... à payer à la société Lyf venant aux droits de la BCMI, garant d'achèvement, le solde du prix déduction faite de la retenue de garantie, que l'achèvement de l'immeuble résulte de l'exécution des travaux décidés par l'assemblée générale du syndicat des copropriétaires le 22 mars 2016 qui n'a pas fait l'objet de contestation, quand l'assemblée générale de la copropriété ne détenait pas le pouvoir de modifier les travaux ordonnés par le dispositif de l'arrêt du 20 mai 2015 décrivant précisément, par renvoi au rapport d'expertise, les travaux devant être exécutés, la cour d'appel a méconnu la chose jugée par le chef de dispositif irrévocable de cette décision et violé l'article 1351, devenu 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ; 3°/ qu'en toute hypothèse, l'acte de vente en l'état futur d'achèvement conclu le 28 octobre 2003 entre la société Victoria et les époux I... B... stipule, au paragraphe « constatation de l'achèvement des ouvrages et prise de possession », que « l'exécution de l'obligation d'achever ci-dessus contractée sera constatée dans les conditions ci-après précisées : le vendeur notifiera à l'acquéreur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le certificat de l'architecte ou du maître d'oeuvre attestant l'achèvement tel qu'il est défini à l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation. Par la même lettre, le vendeur invitera l'acquéreur à constater la réalité de cet achèvement aux jour et heure fixés. Audit jour, il sera procédé contradictoirement à cette constatation et à l'établissement du procès-verbal » ; qu'en retenant, pour dire l'immeuble achevé après les travaux réalisés par le syndicat des copropriétaires, que ceux-ci avaient fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 notifié le 21 novembre 2016 aux époux I... B... , sans rechercher comme elle y était invitée par les conclusions d'appel, si le constat l'achèvement de l'immeuble, dont les époux I... B... contestaient qu'il puisse résulter des travaux décidés par le syndicat des copropriétaires, respectait les exigences contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; 4°/ qu'en toute hypothèse, l'article R. 261-24 du code de la construction et de l'habitation dispose, dans sa version issue du décret n° 2016-357 du 25 mars 2016, dont l'article 8 prévoit qu'il entre en vigueur le 1er juillet 2016, que « l'achèvement de l'immeuble résulte de la constatation qui en est faite soit par une personne désignée dans les conditions prévues à l'article R. 261-2, soit par un organisme de contrôle indépendant ou un homme de l'art » et que « la personne qui constate l'achèvement remet au vendeur une attestation d'achèvement, en trois exemplaires originaux, établie conformément à un modèle défini par arrêté du ministre chargé du logement. Le vendeur remet l'un des trois exemplaires de cette attestation à l'organisme garant mentionné à l'article R. 261-17 et un autre au notaire chargé de la vente » ; que l'article R. 261-2 du code de la construction et de l'habitation dispose que « la constatation est faite par une personne qualifiée lorsque l'acte de vente l'a prévu ou lorsqu'il n'y a pas accord des parties » et que « cette personne est désignée par ordonnance sur requête, non susceptible de recours, du président du tribunal de grande instance du lieu de l'immeuble » ; que les époux I... B... se prévalaient de ce que le procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 ne valait pas constatation de l'achèvement, dès lors que le syndic, la société Sogi, n'était ni un homme de l'art ni un organisme de contrôle indépendant, que le procès-verbal ne correspondait pas au modèle défini par l'arrêté et qu'il n'avait pas été communiqué au notaire ; qu'en se fondant sur la rédaction de l'article R. 261-24 du code de la construction et de l'habitation dans sa version issue du décret n° 2011-550 du 19 mai 2011 pour retenir que l'achèvement de l'immeuble était établi par le procès-verbal de réception du septembre 2016 notifié le 21 novembre 2016 aux époux I... B... , la cour d'appel a violé les articles R. 261-24, dans sa version issue du décret n° 2016-357 du 25 mars 2016, et R. 261-2 du code de la construction et de l'habitation ; 5°/ qu'en toute hypothèse, le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que le procès-verbal de réception des travaux établi le 19 septembre 2016 et notifié aux époux I... B... le 21 novembre 2016 n'est signé que par la société EIBTF en qualité de locateur d'ouvrage chargé des travaux de confortement du talus et la société Sogi en sa qualité de syndic représentant le syndicat des copropriétaires, maître de l'ouvrage, et le compte rendu de la réunion de chantier qui y est annexé ne comporte aucune signature ; qu'en retenant, pour dire l'immeuble achevé après les travaux réalisés par le syndicat des copropriétaires, que ceux-ci avaient « fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 (pièce n°5 du syndicat des copropriétaires) signé par le syndic et l'entreprise EIBTF et autres et portant notamment sur les travaux de confortement de talus, avec quelques réserves de finition, en présence du maître d'oeuvre (Alter Ego) et du maître d'oeuvre d'exécution (Accotec), le compte rendu de la réunion de réception étant signé par un homme de l'art le maître d'oeuvre Atelier d'architecture Alter Ego (même pièce) », la cour d'appel a dénaturé le procès verbal de réception et son annexe en méconnaissance du principe susvisé. » Réponse de la Cour 9. En premier lieu, la cour d'appel a relevé qu'une assemblée générale des copropriétaires du 30 juin 2015 avait voté le principe des travaux demandés par l'arrêt du 20 mai 2015, puis qu'une assemblée générale du 22 mars 2016 avait voté les travaux ordonnés par cet arrêt, dont la consolidation du talus après étude du sol, et que ceux-ci avaient fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 19 septembre 2016. 10. En l'état de ses constatations, la cour d'appel, qui n'a pas retenu que l'assemblée générale avait modifié les travaux ordonnés par le dispositif de l'arrêt du 20 mai 2015, n'était pas tenue de procéder à une recherche sur la différence entre l'évaluation du coût des travaux par l'expert et le coût des travaux exécutés. 11. En deuxième lieu, elle n'était pas plus tenue de vérifier si le constat d'achèvement de l'immeuble respectait les exigences contractuelles, cette recherche n'étant pas demandée. 12. En troisième lieu, en cas de désaccord des parties, il appartient au juge du fond, saisi par le garant d'une demande en paiement du prix de vente représentant la fraction de 95 % du prix à l'achèvement de l'immeuble, d'apprécier si celui-ci est achevé au sens de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation. 13. La cour d'appel, qui a souverainement retenu que l'immeuble était achevé, a ainsi légalement justifié sa décision. 14. Les motifs relatifs au respect de la procédure de constatation de l'achèvement prévue par l'article R. 261-24 du code de la construction et de l'habitation sont donc surabondants. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 15. M. et Mme I... B... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables leurs demandes tendant à la condamnation de la société Lyf à lui payer une somme au titre de la pénalité contractuelle et au paiement de la somme de 50 547 euros, au titre du surcoût généré par le remboursement anticipé d'un prêt, alors : « 1°/ qu'est recevable même présentée pour la première fois en cause d'appel la prétention qui est l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de celle présentée en première instance ; qu'en jugeant irrecevable comme nouvelle la demande des époux I... B... tendant à la condamnation de la société Lyf au paiement d'une somme de 157 117 euros au titre des pénalités contractuelles pour retard d'achèvement préalable à la livraison, motif pris que cette demande était nouvelle, aucune demande n'ayant été formulée devant les premiers juges, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée par les conclusions d'appel, si la demande de réduction du prix formulée en première instance à l'encontre du vendeur ne comprenait pas une somme de 80 025 euros au titre de la clause pénale pour 2 401 jours de retard, de sorte que la demande au titre des pénalités de retard formulée à l'encontre du garant d'achèvement après qu'il eût été condamné à financer l'achèvement de l'immeuble était la conséquence de celle formulée en première instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ; 2°/ qu'est recevable la demande de dommages et intérêts qu'une partie formule pour la première fois en appel en réparation du préjudice qu'elle prétend avoir subi depuis le jugement ; qu'en jugeant irrecevable, pour être nouvelle et ne se rattacher par aucun lien à la disposition objet de la cassation partielle, la demande, formulée par les époux I... B... , tendant à la condamnation de la société Lyf à leur payer la somme de 50 547 euros au titre du surcoût généré par le remboursement anticipé, le 19 septembre 2015, de leurs prêts sans intérêts consécutif à la mise en demeure de la BCMI du 17 septembre 2015, avec prise unilatérale d'hypothèque définitive sur leurs lots, en application du chef du dispositif cassé de l'arrêt du 20 mai 2015, sans rechercher si elle ne trouvait pas sa cause dans la faute commise par la société Lyf lorsqu'elle avait choisi de procéder à une mesure d'exécution forcée sur le fondement d'un chef de dispositif de l'arrêt ultérieurement censuré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 16. La cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches inopérantes ou qui ne lui étaient pas demandées, a pu retenir que les demandes au titre des pénalités de retard à la livraison et de remboursement anticipé du prêt, n'ayant pas été formulées devant les premiers juges, étaient irrecevables comme nouvelles. 17. Elle a ainsi légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme I... B... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme I... B... et les condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Lyf. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. et Mme I... B... PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé recevable la demande de la société Lyf tendant à la condamnation des époux I... B... à lui payer le solde du prix de vente augmenté des intérêts conventionnels et d'AVOIR en conséquence condamné solidairement les époux I... B... à payer à la société Lyf la somme de 125 768,60 euros avec intérêts au taux conventionnel à compter du 1er août 2017 en ordonnant leur capitalisation ; AUX MOTIFS QUE « pour parvenir aux deux dispositions du dispositif susvisées, la cour d'appel, non cassée sur ces deux points, a en effet décidé ainsi que cela résulte de la motivation de l'arrêt que la banque (BCMI à l'époque) connaissait la pente du terrain avant la modification du garant, et que surtout la banque a signé en toute connaissance de cause le protocole du 7 avril 2005 après l'obtention du permis de construire modificatif et après avoir demandé à la SCI la liste de travaux restant à effectuer au nombre desquels figuraient les travaux sur les talus qu'elle avaient accepté de financer pour un montant de 12 000 euros ; que l'article R 261-1 du code de la construction et de l'habitation dispose : "L'immeuble vendu à terme ou en l'état futur d'achèvement est réputé achevé au sens de l'article 1601-2 du code civil, reproduit à l'article L 261-2 du présent code et de l'article L 261-11 du présent code lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d'équipement qui sont indispensables à l'utilisation, conformément à sa destination, de l'immeuble faisant l'objet du contrat. Pour l'appréciation de cet achèvement, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu'ils n'ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments ci-dessus précisés impropres à leur utilisation" ; qu'aux termes de l'article R 261-2 du même code, "l'achèvement de l'immeuble vendu à terme est constaté soit par les parties, soit par une personne qualifiée. La constatation par les parties fait l'objet d'un acte du notaire qui a reçu la vente à terme ; cet accord vaut livraison de l'immeuble. La constatation est faite par une personne qualifiée lorsque l'acte de vente l'a prévu ou lorsqu'il n'y a pas accord des parties. Cette personne est désignée par ordonnance sur requête, non susceptible de recours, du président du tribunal de grande instance du lieu de l'immeuble, soit parmi celles que le tribunal commet habituellement, soit parmi celles figurant sur une liste établie par arrêté du ministre de la justice et du ministre chargé de la construction et de l'habitation. La constatation de l'achèvement fait l'objet par la personne qualifiée ainsi désignée d'une déclaration devant le notaire qui a reçu la vente. La constatation de l'achèvement est parfaite par la déclaration ainsi faite. Elle est notifiée par la partie la plus diligente à l'autre par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification vaut livraison de l'immeuble à la date de cette réception" ; que les époux I... B... ont acquis leurs lots "en leur état futur d'achèvement" ainsi que cela résulte de l'acte de vente du 28 octobre 2003 (pièce n°13 des époux I...) ; que l'article R 261-14 du même code prévoit que les paiements ou dépôts ne peuvent excéder au total : "35% du prix de l'achèvement des fondations, 70% à la mise hors d'eau, 95% à l'achèvement de l'immeuble, le solde est payable lors de la mise à la disposition de l'acquéreur. Toutefois il peut être consigné en cas de contestation sur la conformité" ; qu'or, le garant d'achèvement d'une construction vendue en l'état futur d'achèvement prévu par l'article R 261-21 du code de la construction et de l'habitation qui achève ou fait achever en les payant les travaux, est seul fondé à exiger des acquéreurs le solde du paiement du prix de vente encore dû par ces derniers ; qu'il est également fondé à bénéficier des intérêts conventionnels convenus entre le vendeur et les acheteurs ; qu'il est justifié (pièce n°38 de la société LYF : virement de compte CARPA de la société LYF, contestée par les époux I... en raison du biffage de deux numéros mais présentée en original lors de l'audience ainsi que cela a été noté au plumitif d'audience) que le garant s'est acquitté auprès du syndicat des copropriétaires du coût des travaux de reprise notamment du talus (213 188,29 euros). La société LYF est donc bien recevable en sa demande ; que les époux I... soutiennent que la constatation de l'achèvement n'a pas été faite et ils sollicitent une mesure d'expertise pour ce faire tandis que la société LYF soutient qu'il y a achèvement bien que soit retenue à tort comme il a été dit précédemment la date du 17 octobre 2005 date de la note aux parties de l'expert M. K... concluant à l'habitabilité de l'appartement I... ; que la notion d'achèvement au sens de l'article R 261-1 précité seul applicable en l'espèce comme précédemment évoqué exige simplement que l'immeuble puisse être utilisé conformément à sa destination ; qu'il suffit que soient exécutés les ouvrages et soient installés les éléments d'équipement indispensables à son utilisation ; que l'article R 261-24 du même code dans sa version issue du décret n°2011-550 du 19 mai 2011 applicable aux contrats en cours, précise que la garantie d'achèvement ou de remboursement prend fin à l'achèvement de l'immeuble tel que défini à l'article R 261-1 ; que cet achèvement résulte de la constatation qui en est faite soit par une personne désignée dans les conditions prévues à l'article R 261-2, soit par un organisme de contrôle indépendant ou un homme de l'art ; que, dans son rapport (pièce n°13 du syndicat des copropriétaires), M. V... conclut que les lots n°2, 24 et 47 ne présentent que quelques défauts de conformité avec les prévisions du contrat mais qu'une partie du lot n°2 (l'abri de jardin et la jouissance privative du jardin) n'est pas utilisable du fait d'un glissement de terrain dans le talus constituant le jardin pleine terre : "l'appartement étant, à notre avis, techniquement habitable sans la jouissance du jardin (comme le sont tous les autres appartements de l'immeuble qui eux sont habités) et de l'abri de jardin" ; que répondant à la question suivante : "chiffrer l'ensemble des travaux nécessaires à l'achèvement de l'immeuble au sens de l'article R 261-1 du code de la construction et de l'habitation et ceux nécessaires au parfait achèvement et à la mise en conformité des parties communes", dans son rapport page 45 ( pièce n°13 de la société LYF), M. K... écrit : "Hormis les travaux sur le talus qui peuvent être considérés comme nécessaires à l'achèvement de l'immeuble au sens de l'article R 261-1 du code de la construction et de l'habitation (dans le sens où le cellier situé au pied est impropre à sa destination car il ne peut être utilisé). Il s'agit uniquement des travaux nécessaires au parfait achèvement et à la mise en conformité des parties communes. Tous les travaux sont chiffrés dans le point F" ; que la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 20 mai 2015, non cassé sur ce point, a cependant souverainement apprécié que les éboulements du talus empêchaient les époux I... d'utiliser une partie importante de leur lot conformément à sa destination soit l'abri de jardin et les jardins de sorte que selon elle, l'immeuble n'était pas achevé au sens de l'article R précité ; que ce même arrêt a "condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] ) à faire exécuter les travaux décrits nécessaires à la stabilisation du talus et décrits dans le rapport d'expertise déposé par Monsieur V... le 21 décembre 2006, point 4.1.1" ; qu'il est justifié par le syndicat des copropriétaires qu'une assemblée générale des copropriétaires en date du 30 juin 2015 a voté le principe des travaux demandés par la Cour, qu'une assemblée générale des copropriétaires en date du 22 mars 2016 (pièce n°10 du syndicat des copropriétaires) qui n'a pas fait l'objet d'une contestation (pièce n°11 du syndicat des copropriétaires) a voté les travaux ordonnés par la cour et notamment la consolidation du talus après étude sol pour 125.808,87 euros TTC, que ces travaux ont fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 (pièce n°5 du syndicat des copropriétaires) signé par le syndic et l'entreprise EIBTF et autres et portant notamment sur les travaux de confortement de talus, avec quelques réserves de finition, en présence du maître d'oeuvre (ALTER EGO) et du maître d'oeuvre d'exécution (ACCOTEC), le compte rendu de la réunion de réception étant signé par un homme de l'art le maître d'oeuvre ATELIER d'ARCHITECTURE ALTER EGO (même pièce), que ce procès-verbal a été notifié le 21 novembre 2016 à M. et Mme I... en l'étude de l'huissier, l'huissier ayant laissé au domicile la lettre prévue par les dispositions de l'article 658 du code de procédure civile ; qu'il résulte donc de ce qui précède que l'immeuble doit être considéré comme achevé, comme le demande la société LYF, depuis le 19 septembre 2016, achèvement résultant des constatations des experts judiciaires sus rappelées et de celles postérieures d'un homme de l'art ; que cependant, la société LYF ne justifie pas du parachèvement de l'immeuble de sorte que les époux I... sont en droit de conserver à titre de retenue de garantie les 5% du prix de vente soit 19 056 euros ; qu'il y a donc lieu de condamner solidairement M. et Mme I... à verser à la société LYF la somme de 125 768,60 euros (144 825,60 -19 056) avec intérêts au taux conventionnel à compter du 1er août 2017 date de la première demande, postérieure à l'achèvement, de la société LYF par conclusions et ce, avec capitalisation des intérêts dans les termes et conditions de l'article 1154 ancien du code civil ; que le jugement doit être infirmé de ce chef » ; 1°) ALORS QUE les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'avocat de chacune des parties à celui de l'autre partie ; qu'en se fondant, pour dire la société Lyf recevable en sa demande en paiement du solde du prix et des intérêts contractuels, sur la communication à la cour de l'original de la pièce n° 38 le jour de l'audience tenue le 8 mars 2018, quand les époux I... B... avaient soutenu dans leurs dernières conclusions d'appel notifiées le 7 février 2018 (p. 32 et s.) que le biffage de mentions essentielles de la pièce communiquée seulement en copie ne permettait pas d'établir la réalité du paiement du coût des travaux d'achèvement de l'immeuble, allégué par la société Lyf au soutien de sa demande en paiement du solde du prix, de sorte que la communication de l'original non biffé, intervenue seulement le jour de l'audience, était nécessairement tardive pour ne pas permettre son examen en temps utile, la cour d'appel a violé l'article 906 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, qu'il ne peut retenir dans sa décision les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement et que la partie qui fait état d'une pièce s'oblige à la communiquer à toute autre partie à l'instance ; qu'en retenant, pour dire la société Lyf recevable en sa demande en paiement du solde du prix et des intérêts contractuels, qu'il était justifié qu'elle s'était acquittée du coût des travaux de reprise par la production de la pièce n° 38 « virement de compte CARPA de la société Lyf, contestée par les époux I... en raison du biffage de deux numéros mais présentée en original lors de l'audience ainsi que cela a été noté au plumitif d'audience », quand le plumitif d'audience énonce que « l'avocat de la société Lyf communique la pièce 38 à la cour (sans rature et en original) qui en prend connaissance et lui restitue », ce dont il résulte que seuls les magistrats tenant l'audience ont eu connaissance de la pièce litigieuse et qu'elle n'a pas été communiquée en original aux époux I... B... ou à leur représentant qui n'ont pu en débattre, la cour d'appel a violé les articles 16 et 132 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement les époux I... B... à verser à la société Lyf la somme de 125 768,60 euros avec intérêts au taux conventionnel à compter du 1er août 2017 en ordonnant leur capitalisation, d'AVOIR rejeté la demande des époux I... B... tendant à la désignation d'un expert judiciaire afin de constater l'achèvement du lot n° 2 et d'AVOIR limité à la somme de 14 000 euros et à la période d'octobre 2015 à novembre 2016 la condamnation prononcée à l'encontre du syndicat des copropriétaires et de la société Lyf à réparer leur préjudice de jouissance ; AUX MOTIFS QUE « pour parvenir aux deux dispositions du dispositif susvisées, la cour d'appel, non cassée sur ces deux points, a en effet décidé ainsi que cela résulte de la motivation de l'arrêt que la banque (BCMI à l'époque) connaissait la pente du terrain avant la modification du garant, et que surtout la banque a signé en toute connaissance de cause le protocole du 7 avril 2005 après l'obtention du permis de construire modificatif et après avoir demandé à la SCI la liste de travaux restant à effectuer au nombre desquels figuraient les travaux sur les talus qu'elle avait accepté de financer pour un montant de 12 000 euros ; que l'article R 261-1 du code de la construction et de l'habitation dispose : "L'immeuble vendu à terme ou en l'état futur d'achèvement est réputé achevé au sens de l'article 1601-2 du code civil, reproduit à l'article L 261-2 du présent code et de l'article L 261-11 du présent code lorsque sont exécutés les ouvrages et son installés les éléments d'équipement qui sont indispensables à l'utilisation, conformément à sa destination, de l'immeuble faisant l'objet du contrat. Pour l'appréciation de cet achèvement, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu'ils n'ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments ci-dessus précisés impropres à leur utilisation" ; qu'aux termes de l'article R 261-2 du même code, "l'achèvement de l'immeuble vendu à terme est constaté soit par les parties, soit par une personne qualifiée. La constatation par les parties fait l'objet d'un acte du notaire qui a reçu la vente à terme ; cet accord vaut livraison de l'immeuble. La constatation est faite par une personne qualifiée lorsque l'acte de vente l'a prévu ou lorsqu'il n'y a pas accord des parties. Cette personne est désignée par ordonnance sur requête, non susceptible de recours, du président du tribunal de grande instance du lieu de l'immeuble, soit parmi celles que le tribunal commet habituellement, soit parmi celles figurant sur une liste établie par arrêté du ministre de la justice et du ministre chargé de la construction et de l'habitation. La constatation de l'achèvement fait l'objet par la personne qualifiée ainsi désignée d'une déclaration devant le notaire qui a reçu la vente. La constatation de l'achèvement est parfaite par la déclaration ainsi faite. Elle est notifiée par la partie la plus diligente à l'autre par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification vaut livraison de l'immeuble à la date de cette réception" ; que les époux I... B... ont acquis leurs lots "en leur état futur d'achèvement" ainsi que cela résulte de l'acte de vente du 28 octobre 2003 (pièce n°13 des époux I...) ; que l'article R 261-14 du même code prévoit que les paiements ou dépôts ne peuvent excéder au total : "35% du prix de l'achèvement des fondations, 70% à la mise hors d'eau, 95% à l'achèvement de l'immeuble, le solde est payable lors de la mise à la disposition de l'acquéreur. Toutefois il peut être consigné en cas de contestation sur la conformité" ; qu'or, le garant d'achèvement d'une construction vendue en l'état futur d'achèvement prévu par l'article R 261-21 du code de la construction et de l'habitation qui achève ou fait achever en les payant les travaux, est seul fondé à exiger des acquéreurs le solde du paiement du prix de vente encore dû par ces derniers ; qu'il est également fondé à bénéficier des intérêts conventionnels convenus entre le vendeur et les acheteurs ; qu'il est justifié (pièce n°38 de la société LYF : virement de compte CARPA de la société LYF, contestée par les époux I... en raison du biffage de deux numéros mais présentée en original lors de l'audience ainsi que cela a été noté au plumitif d'audience) que le garant s'est acquitté auprès du syndicat des copropriétaires du coût des travaux de reprise notamment du talus (213 188,29 euros). La société LYF est donc bien recevable en sa demande ; que les époux I... soutiennent que la constatation de l'achèvement n'a pas été faite et ils sollicitent une mesure d'expertise pour ce faire tandis que la société LYF soutient qu'il y a achèvement bien que soit retenue à tort comme il a été dit précédemment la date du 17 octobre 2005 date de la note aux parties de l'expert M. K... concluant à l'habitabilité de l'appartement I... ; que la notion d'achèvement au sens de l'article R 261-1 précité seul applicable en l'espèce comme précédemment évoqué exige simplement que l'immeuble puisse être utilisé conformément à sa destination ; qu'il suffit que soient exécutés les ouvrages et soient installés les éléments d'équipement indispensables à son utilisation ; que l'article R 261-24 du même code dans sa version issue du décret n°2011-550 du 19 mai 2011 applicable aux contrats en cours, précise que la garantie d'achèvement ou de remboursement prend fin à l'achèvement de l'immeuble tel que défini à l'article R 261-1 ; que cet achèvement résulte de la constatation qui en est faite soit par une personne désignée dans les conditions prévues à l'article R 261-2, soit par un organisme de contrôle indépendant ou un homme de l'art ; que, dans son rapport (pièce n°13 du syndicat des copropriétaires), M. V... conclut que les lots n°2, 24 et 47 ne présentent que quelques défauts de conformité avec les prévisions du contrat mais qu'une partie du lot n°2 (l'abri de jardin et la jouissance privative du jardin) n'est pas utilisable du fait d'un glissement de terrain dans le talus constituant le jardin pleine terre : "l'appartement étant, à notre avis, techniquement habitable sans la jouissance du jardin (comme le sont tous les autres appartements de l'immeuble qui eux sont habités) et de l'abri de jardin" ; que répondant à la question suivante : "chiffrer l'ensemble des travaux nécessaires à l'achèvement de l'immeuble au sens de l'article R 261-1 du code de la construction et de l'habitation et ceux nécessaires au parfait achèvement et à la mise en conformité des parties communes", dans son rapport page 45 ( pièce n°13 de la société LYF), M. K... écrit : "Hormis les travaux sur le talus qui peuvent être considérés comme nécessaires à l'achèvement de l'immeuble au sens de l'article R 261-1 du code de la construction et de l'habitation (dans le sens où le cellier situé au pied est impropre à sa destination car il ne peut être utilisé). Il s'agit uniquement des travaux nécessaires au parfait achèvement et à la mise en conformité des parties communes. Tous les travaux sont chiffrés dans le point F" ; que la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 20 mai 2015, non cassé sur ce point, a cependant souverainement apprécié que les éboulements du talus empêchaient les époux I... d'utiliser une partie importante de leur lot conformément à sa destination soit l'abri de jardin et les jardins de sorte que selon elle, l'immeuble n'était pas achevé au sens de l'article R 261-1 précité ; que ce même arrêt a "condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] ) à faire exécuter les travaux décrits nécessaires à la stabilisation du talus et décrits dans le rapport d'expertise déposé par Monsieur V... le 21 décembre 2006, point 4.1.1" ; qu'il est justifié par le syndicat des copropriétaires qu'une assemblée générale des copropriétaires en date du 30 juin 2015 a voté le principe des travaux demandés par la Cour, qu'une assemblée générale des copropriétaires en date du 22 mars 2016 (pièce n°10 du syndicat des copropriétaires) qui n'a pas fait l'objet d'une contestation (pièce n°11 du syndicat des copropriétaires) a voté les travaux ordonnés par la cour et notamment la consolidation du talus après étude sol pour 125.808,87 euros TTC, que ces travaux ont fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 (pièce n°5 du syndicat des copropriétaires) signé par le syndic et l'entreprise EIBTF et autres et portant notamment sur les travaux de confortement de talus, avec quelques réserves de finition, en présence du maître d'oeuvre (ALTER EGO) et du maître d'oeuvre d'exécution (ACCOTEC), le compte rendu de la réunion de réception étant signé par un homme de l'art le maître d'oeuvre « ATELIER d'ARCHITECTURE ALTER EGO (même pièce), que ce procès-verbal a été notifié le 21 novembre 2016 à M. et Mme I... en l'étude de l'huissier, l'huissier ayant laissé au domicile la lettre prévue par les dispositions de l'article 658 du code de procédure civile ; qu'il résulte donc de ce qui précède que l'immeuble doit être considéré comme achevé, comme le demande la société LYF, depuis le 19 septembre 2016, achèvement résultant des constatations des experts judiciaires sus rappelées et de celles postérieures d'un homme de l'art ; que cependant, la société LYF ne justifie du parachèvement de l'immeuble de sorte que les époux I... sont en droit de conserver à titre de retenue de garantie les 5% du prix de vente soit 19.056 euros ; qu'il y a donc lieu de condamner solidairement M. et Mme I... à verser à la société LYF la somme de 125.768,60 euros (144 825,60 -19 056) avec intérêts au taux conventionnel à compter du 1er août 2017 date de la première demande, postérieure à l'achèvement, de la société LYF par conclusions et ce, avec capitalisation des intérêts dans les termes et conditions de l'article 1154 ancien du code de procédure civile ; que le jugement doit être infirmé de ce chef ; que la demande des époux I... tendant à voir désigner un expert pour effectuer la déclaration d'achèvement de l'immeuble doit donc être rejetée de même que les demandes suivantes : "II... que si la constatation de l'achèvement se révèle impossible dans l'état du lot n°2, le Syndicat des copropriétaires du [...] est condamné, sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter du dépôt du rapport de l'expert, à faire le nécessaire pour constater l'achèvement de l'immeuble au sens de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, et de notifier ladite constatation aux époux I..., faite conformément à l'article R. 261- 2 du CCH, par-devant les notaires W... et F... qui ont reçu la vente ; que cette constatation d'achèvement est une condition contractuelle préalable au paiement de l'appel de fonds d'achèvement, à la livraison des lots des époux I..., et au paiement par ceux-ci des charges de copropriété ; qu'en application des articles 1622 et 1642-1 du code civil, comme le vendeur a disparu et ne peut pas assurer la réparation des vices apparents de parfait achèvement décrits et chiffrés par l'expert V... dans les points 4.1.2 et 4.2.2 de son rapport déposé le 22 décembre 2006, et que la SA LYF ne garantit pas non plus la réparation de ces vices de parfait achèvement, les époux I..., qui n'ont toujours pas pris possession de leurs lots, peuvent retenir sur le solde du prix l'appel de fonds de remise des clés, au titre d'indemnisation de ces vices de parfait achèvement" » ; ET QUE « s'agissant de leur préjudice de jouissance, leurs demandes (327 800 euros à actualiser et 35 000 euros à actualiser) ont le même fondement : ils ont obtenu par l'arrêt du 20 mai 2015 non cassé sur ce point, la somme de 120 000 euros pour une période de dix années (soit la somme mensuelle de 1 000 euros), la cour ayant notamment souligné l'exonération de toutes charges de copropriété ; qu'il y a donc lieu de leur allouer, au titre de ces deux demandes, pour la période d'octobre 2015, point de départ de leur demande à novembre 2016, date à laquelle il leur a été notifié que l'immeuble était achevé, la somme de 14 000 euros à laquelle doivent être condamnés in solidum le syndicat des copropriétaires et la société LYF » ; 1°) ALORS QUE l'arrêt du 20 mai 2015 qui a constaté l'inachèvement de l'immeuble a condamné le syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux nécessaires à la stabilisation du talus et à la pose des garde-corps et mains courantes pour l'escalier d'accès à la terrasse et la protection de la terrasse supérieure décrits au point 4.1.1. du rapport d'expertise du 21 décembre 2006 de M. V... et a condamné la BCMI à en supporter le coût en relevant le syndicat des copropriétaires indemne des condamnations prononcées à son encontre au titre de ces travaux en lui versant le montant des factures sur leur présentation ; qu'en retenant, pour condamner les époux I... B... à payer à la société Lyf venant aux droits de la BCMI, garant d'achèvement, le solde du prix déduction faite de la retenue de garantie, que l'achèvement de l'immeuble résulte de l'exécution des travaux décidés par l'assemblée générale du syndicat des copropriétaires le 22 mars 2016 pour un montant de 125 808,87 TTC euros constatée par le procès-verbal de réception établi le 19 septembre 2016, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée par les conclusions d'appel des époux I... B... (p. 12, § 4 et s.), si les travaux que le syndicat des copropriétaires avait fait exécuter n'étaient pas différents de ceux décrits par l'expert V... dans les passages de son rapport auxquels s'est référé le dispositif de l'arrêt du 20 mai 2015, différence tenant notamment au fait que l'expert les avait évalués à la somme de 204 416 euros HT en 2006, tandis que ceux réalisés, en 2016, l'avaient été pour un montant de 125 808,87 euros TTC, de telle sorte que les travaux exécutés ne pouvaient satisfaire à la condition mise par l'arrêt du 20 mai 2015 à l'achèvement de l'immeuble, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1351, devenu 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE l'arrêt du 20 mai 2015 qui a constaté l'inachèvement de l'immeuble a condamné le syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux nécessaires à la stabilisation du talus et à la pose des garde-corps et mains courantes pour l'escalier d'accès à la terrasse et la protection de la terrasse supérieure décrits au point 4.1.1. du rapport d'expertise du 21 décembre 2006 de M. V... et a condamné la BCMI à en supporter le coût en relevant le syndicat des copropriétaires indemne des condamnations prononcées à son encontre au titre de ces travaux en lui versant le montant des factures sur leur présentation ;qu'en retenant, pour condamner les époux I... B... à payer à la société Lyf venant aux droits de la BCMI, garant d'achèvement, le solde du prix déduction faite de la retenue de garantie, que l'achèvement de l'immeuble résulte de l'exécution des travaux décidés par l'assemblée générale du syndicat des copropriétaires le 22 mars 2016 qui n'a pas fait l'objet de contestation, quand l'assemblée générale de la copropriété ne détenait pas le pouvoir de modifier les travaux ordonnés par le dispositif de l'arrêt du 20 mai 2015 décrivant précisément, par renvoi au rapport d'expertise, les travaux devant être exécutés, la cour d'appel a méconnu la chose jugée par le chef de dispositif irrévocable de cette décision et violé l'article 1351, devenu 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'acte de vente en l'état futur d'achèvement conclu le 28 octobre 2003 entre la société Victoria et les époux I... B... stipule, au paragraphe « constatation de l'achèvement des ouvrages et prise de possession » (p. 26), que « l'exécution de l'obligation d'achever ci-dessus contractée sera constatée dans les conditions ci-après précisées : le vendeur notifiera à l'acquéreur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le certificat de l'architecte ou du maître d'oeuvre attestant l'achèvement tel qu'il est défini à l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation. Par la même lettre, le vendeur invitera l'acquéreur à constater la réalité de cet achèvement aux jour et heure fixés. Audit jour, il sera procédé contradictoirement à cette constatation et à l'établissement du procès-verbal » ; qu'en retenant, pour dire l'immeuble achevé après les travaux réalisés par le syndicat des copropriétaires, que ceux-ci avaient fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 notifié le 21 novembre 2016 aux époux I... B... , sans rechercher comme elle y était invitée par les conclusions d'appel (p.12, § 9, p. 35 dernier § et p. 37, § 4), si le constat l'achèvement de l'immeuble, dont les époux I... B... contestaient qu'il puisse résulter des travaux décidés par le syndicat des copropriétaires, respectait les exigences contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; 4°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'article R. 261-24 du code de la construction et de l'habitation dispose, dans sa version issue du décret n° 2016-357 du 25 mars 2016, dont l'article 8 prévoit qu'il entre en vigueur le 1er juillet 2016, que « l'achèvement de l'immeuble résulte de la constatation qui en est faite soit par une personne désignée dans les conditions prévues à l'article R. 261-2, soit par un organisme de contrôle indépendant ou un homme de l'art » et que « la personne qui constate l'achèvement remet au vendeur une attestation d'achèvement, en trois exemplaires originaux, établie conformément à un modèle défini par arrêté du ministre chargé du logement. Le vendeur remet l'un des trois exemplaires de cette attestation à l'organisme garant mentionné à l'article R. 261-17 et un autre au notaire chargé de la vente » ; que l'article R. 261-2 du code de la construction et de l'habitation dispose que « la constatation est faite par une personne qualifiée lorsque l'acte de vente l'a prévu ou lorsqu'il n'y a pas accord des parties » et que « cette personne est désignée par ordonnance sur requête, non susceptible de recours, du président du tribunal de grande instance du lieu de l'immeuble » ; que les époux I... B... se prévalaient de ce que le procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 ne valait pas constatation de l'achèvement, dès lors que le syndic, la société Sogi, n'était ni un homme de l'art ni un organisme de contrôle indépendant, que le procès-verbal ne correspondait pas au modèle défini par l'arrêté et qu'il n'avait pas été communiqué au notaire ; qu'en se fondant sur la rédaction de l'article R. 261-24 du code de la construction et de l'habitation dans sa version issue du décret n° 2011-550 du 19 mai 2011 pour retenir que l'achèvement de l'immeuble était établi par le procès-verbal de réception du septembre 2016 notifié le 21 novembre 2016 aux époux I... B... , la cour d'appel a violé les articles R. 261-24, dans sa version issue du décret n° 2016-357 du 25 mars 2016, et R. 261-2 du code de la construction et de l'habitation ; 5°) ALORS QU'en toute hypothèse, le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que le procès-verbal de réception des travaux établi le 19 septembre 2016 et notifié aux époux I... B... le 21 novembre 2016 n'est signé que par la société EIBTF en qualité de locateur d'ouvrage chargé des travaux de confortement du talus et la société Sogi en sa qualité de syndic représentant le syndicat des copropriétaires, maître de l'ouvrage, et le compte rendu de la réunion de chantier qui y est annexé ne comporte aucune signature ; qu'en retenant, pour dire l'immeuble achevé après les travaux réalisés par le syndicat des copropriétaires, que ceux-ci avaient « fait l'objet d'un procès-verbal de réception du 19 septembre 2016 (pièce n°5 du syndicat des copropriétaires) signé par le syndic et l'entreprise EIBTF et autres et portant notamment sur les travaux de confortement de talus, avec quelques réserves de finition, en présence du maître d'oeuvre (Alter Ego) et du maître d'oeuvre d'exécution (Accotec), le compte rendu de la réunion de réception étant signé par un homme de l'art le maître d'oeuvre Atelier d'architecture Alter Ego (même pièce) », la cour d'appel a dénaturé le procèsverbal de réception et son annexe en méconnaissance du principe susvisé. TROISIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit irrecevable la demande des époux I... B... tendant à la condamnation de la société Lyf à lui payer la somme de 157 euros au titre de la pénalité contractuelle et d'AVOIR dit irrecevable la demande tendant au paiement de la somme de 50 547 euros, au titre du surcoût généré par le remboursement anticipé par les époux I... de leurs prêts sans intérêts le 19 septembre 2015, consécutif à la mise en demeure par la Banque BCMI du 17 septembre 2015, avec prise unilatérale d'hypothèque définitive sur leurs lots, en application du chef du dispositif cassé de l'arrêt du 20 mai 2015 ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « pour la demande au titre des pénalités de retard de livraison prévues au contrat de vente (page 22 de l'acte de vente / 33,33 euros par jour de retard), les époux I... B... soutiennent que la BCMI devenue la société Lyf est délibérément coupable du retard de livraison puisqu'elle a décidé en 2005 de ne pas régler les travaux de confortement du talus, qu'elle est donc solidairement tenue en application de l'article 2241 du code civil, de payer la clause pénale de l'acte de vente à compter du 11 avril 2005 jusqu'à la notification qui leur sera faite de la constatation d'achèvement de l'immeuble ; que pour la demande relative au remboursement anticipé du prêt, les époux I... B... font valoir qu'ils ont dû, suite à la mise en demeure de la BCMI de lui régler la somme de 321 000 euros, rembourser leurs 3 prêts (prêt principal et deux prêts à taux zéro) et contracter un nouveau prêt entraînant un surcoût financier de 50 547 euros ; que s'agissant des deux premières demandes, 1 et 2, au titre des pénalités de retard à la livraison et de remboursement anticipé de leur prêt, ces demandes sont irrecevables d'une part parce qu'elles sont nouvelles (articles 564 et 633 du code de procédure civile) aucune demande de ces chefs n'ayant été formulée devant les premiers juges et d'autre part parce qu'elles ne se rattachent nullement à la disposition faisant l'objet de la cassation partielle » ; 1°) ALORS QU'est recevable même présentée pour la première fois en cause d'appel la prétention qui est l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de celle présentée en première instance ; qu'en jugeant irrecevable comme nouvelle la demande des époux I... B... tendant à la condamnation de la société Lyf au paiement d'une somme de 157 117 euros au titre des pénalités contractuelles pour retard d'achèvement préalable à la livraison, motif pris que cette demande était nouvelle, aucune demande n'ayant été formulée devant les premiers juges, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée par les conclusions d'appel (p. 17, § 7 et 8), si la demande de réduction du prix formulée en première instance à l'encontre du vendeur ne comprenait pas une somme de 80 025 euros au titre de la clause pénale pour 2 401 jours de retard, de sorte que la demande au titre des pénalités de retard formulée à l'encontre du garant d'achèvement après qu'il eût été condamné à financer l'achèvement de l'immeuble était la conséquence de celle formulée en première instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'est recevable la demande de dommages et intérêts qu'une partie formule pour la première fois en appel en réparation du préjudice qu'elle prétend avoir subi depuis le jugement ; qu'en jugeant irrecevable, pour être nouvelle et ne se rattacher par aucun lien à la disposition objet de la cassation partielle, la demande, formulée par les époux I... B... , tendant à la condamnation de la société Lyf à leur payer la somme de 50 547 euros au titre du surcoût généré par le remboursement anticipé, le 19 septembre 2015, de leurs prêts sans intérêts consécutif à la mise en demeure de la BCMI du 17 septembre 2015, avec prise unilatérale d'hypothèque définitive sur leurs lots, en application du chef du dispositif cassé de l'arrêt du 20 mai 2015, sans rechercher si elle ne trouvait pas sa cause dans la faute commise par la société Lyf lorsqu'elle avait choisi de procéder à une mesure d'exécution forcée sur le fondement d'un chef de dispositif de l'arrêt ultérieurement censuré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile.
En cas de désaccord des parties, il appartient au juge du fond, saisi par le garant d'achèvement d'une demande en paiement du prix de vente représentant la fraction de 95 % du prix à l'achèvement de l'immeuble, d'apprécier si celui-ci est achevé au sens de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation
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COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Rejet Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 688 F-P+B Pourvoi n° H 19-14.250 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020 M. B... I..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° H 19-14.250 contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2018 par la cour d'appel de Papeete (chambre commerciale), dans le litige l'opposant : 1°/ au payeur de la Polynésie française, domicilié [...] , 2°/ à M. A... H..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire judiciaire représentant des créanciers de M. B... I..., 3°/ à M. S... N..., domicilié [...] , défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. I..., de la SCP Foussard et Froger, avocat du payeur de la Polynésie française, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Papeete, 6 décembre 2018), par une requête du 12 avril 2017, la paierie de la Polynésie française a saisi le tribunal mixte de commerce de Papeete d'une demande d'ouverture du redressement judiciaire de M. I..., entrepreneur, à la suite de l'échec de tentatives de recouvrement de la somme de 27 317 032 FCP due au titre de diverses impositions. La requête a été déposée au nom de M. F..., payeur de la Polynésie française, et signée « par procuration » par M. V..., inspecteur des finances publiques. Par un jugement du 26 mars 2018, le tribunal a ouvert le redressement judiciaire de M. I... et désigné M. H... représentant des créanciers. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Et sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches Enoncé du moyen 3. M. I... fait grief à l'arrêt de constater son état de cessation des paiements et d'ouvrir son redressement judiciaire, alors : « 2°/ que le payeur de la Polynésie Française n'est pas habilité à engager, de sa propre initiative, une action en redressement judiciaire contre un contribuable, action qui n'est pas directement liée à sa fonction de recouvrement de l'impôt et à son obligation de conservation des créances de la Polynésie française ; que l'action en redressement judiciaire à l'encontre du redevable d'impôts, qui ne remet pas en cause le principe de séparation des ordonnateurs et des comptables publics, ne peut être engagée par le payeur de la Polynésie française sans une autorisation du conseil des ministres de la Polynésie française, seul habilité à décider d'intenter des actions ou de défendre devant les juridictions au nom de la Polynésie française ; qu'en considérant que le payeur de la Polynésie française était régulièrement investi en sa qualité de comptable public, responsable de la paierie de la Polynésie française, des pouvoirs d'agir pour assurer la conservation des créances de la Polynésie française, que ses pouvoirs ne pouvaient pas être subordonnés à une autorisation du conseil des ministres, et que le tribunal avait exactement jugé que l'action en redressement judiciaire engagée par le payeur de la Polynésie française visait bien à garantir la conservation de la créance fiscale de celle-ci, bien que les pouvoirs de conservation des créances fiscales dudit payeur ne lui confèrent nullement celui d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'encontre d'un contribuable, la cour d'appel a violé les articles LP 711-1 et LP 716-1 du code des impôts de la Polynésie française, 76 de la délibération n° 95-205 AT du 23 novembre 1995 et 91-25° de la loi organique du 27 février 2004 ; 3°/ que le payeur de la Polynésie française n'ayant pas le pouvoir d'agir en redressement judiciaire contre un contribuable, ne peut déléguer ce pouvoir ; qu'en l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué que M. V... a signé par procuration du payeur de la Polynésie française la requête en ouverture d'une procédure de redressement judiciaire contre M. I... ; qu'en considérant que les trois arrêtés n° 2-2013 PPF du 1er septembre 2013, n° 1-2015 PPF du 1er août 2015 et n° 1-2017 PPF du 1er avril 2017, par lesquels M. F..., payeur de la Polynésie française, avait donné délégation générale et permanente notamment à M. V... pour "agir en justice en lieu et place du payeur", suffisaient à établir la qualité pour agir du requérant et la recevabilité de la requête, bien que M. F... n'ait pas eu lui-même le pouvoir d'agir en redressement judiciaire contre l'exposant et par suite celui de déléguer ce pouvoir à M. V..., de sorte que ni l'action engagée ni la requête devant le tribunal mixte de commerce signée par procuration du payeur n'étaient recevables, la cour d'appel a violé les articles LP 711-1 et LP 716-1 du code des impôts de la Polynésie française, 76 de la délibération n° 95-205 AT du 23 novembre 1995 et 91-25° de la loi organique du 27 février 2004. » Réponse de la Cour 4. L'arrêt énonce exactement que l'article 76 de la délibération n° 95-205 AT du 23 novembre 2005 relative à la réglementation budgétaire, comptable et financière de la Polynésie française et de ses établissements publics n'est pas contraire à l'article 91 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie, qui prévoit que, dans la limite des compétences de cette collectivité, le conseil des ministres décide d'intenter des actions ou de défendre devant les juridictions au nom de la Polynésie française, le principe de la séparation entre ordonnateur et comptable trouvant à s'y appliquer, et les pouvoirs du payeur ne pouvant être subordonnés à une autorisation du conseil des ministres, et que cette délibération confère au comptable public le pouvoir de saisir le tribunal à l'effet de préserver les droits de la Polynésie française en matière d'impôts. L'arrêt en déduit à bon droit que l'action engagée par le payeur de la Polynésie française visait bien à garantir la créance de cette collectivité, et qu'il avait qualité pour demander l'ouverture du redressement judiciaire de M. I... et donner procuration à M. V..., inspecteur des finances publiques, pour signer la requête. 5. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. I... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. I.... Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir constaté l'état de cessation de paiement de M. B... I... et d'avoir en conséquence déclaré ouverte la procédure de redressement judiciaire selon le régime simplifié à l'égard de M. I..., AUX MOTIFS QU'« en application de l'article 16 du décret n°62-1587 du 29 décembre 1962, « les comptables publics sont nommés par le ministre des finances ou avec son agrément » ; que par arrêté du 3 décembre 2012 du ministre délégué chargé du budget, M. D... F... a été nommé payeur de Polynésie française ; qu'il n'avait donc pas à recevoir délégation de pouvoir du directeur des finances publiques en Polynésie française puisqu'en application de la délibération n°95-205 AT du 23 novembre 1995 portant adoption de la règlementation budgétaire, comptable et financière du territoire et de ses établissements publics, le payeur de la Polynésie est comptable principal pour la collectivité ; qu'en application de l'article 70 de la délibération n°95-205 AT précitée, les comptables publics sont seuls chargés, notamment, de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui lui sont remis par les ordonnateurs des créances, ainsi que de l'encaissement des droits et des recettes de toute nature que le territoire et ses établissements publics sont habilités à recevoir ; que cette disposition n'est pas contraire à l'article 91 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie qui dispose que, dans la limite des compétences de la Polynésie Française, le conseil des ministres décide d'intenter des actions ou de défendre devant les juridictions au nom de la Polynésie Française ; qu'en effet, le principe de la séparation entre ordonnateur et comptable s'applique en Polynésie française, et les pouvoirs du payeur ne peuvent être subordonnés à une autorisation du conseil des ministres ; que le tribunal a exactement jugé que l'action en redressement judiciaire engagée par le payeur de la Polynésie française visait bien à garantir la conservation de la créance fiscale de celle-ci ; ( ) que la requête en ouverture d'une procédure de redressement judiciaire déposée le 12 avril 2017 par M. D... F... agissant en qualité de Payeur de la Polynésie française est signée, « par procuration », par M. J... V..., inspecteur des finances publiques ; qu'il est versé aux débats trois arrêtés (n°2-2013 PPF du 1er septembre 2013, n°1-2015 PPF en date du 1er août 2015 et n°1-2017 PPF du 1er avril 2017) par lesquels M. D... F... donne délégation général et permanente notamment à M. J... V... pour « exercer toute poursuite », « agir en justice en lieu et place du payeur » et « effectuer les déclarations de créances en matière de procédure collective d'apurement du passif » ; que ces trois textes, identiques sur ce point, suffisent à établir la qualité pour agir du requérant et la recevabilité de la requête ; que M. I... se contredit en invoquant la procuration spéciale en matière de procédure de redressement et de liquidation judiciaire des entreprises donnée notamment à M. Q... E... par l'arrêté précité du 1er août 2015, qui aurait pour effet d'écarter la compétence de M. J... V..., alors qu'il résulte du jugement du 24 avril 2017 qu'il verse aux débats, qu'il a soutenu la position exactement inverse à l'occasion d'une précédente requête devant le tribunal mixte de commerce ; que par ce jugement non frappé d'appel, cette juridiction avait précisément écarté la qualité pour agir de M. Q... E..., au motif que cette délégation spéciale ne lui permettait pas d'agir en lieu et place du payeur de la Polynésie Française ; qu'enfin, l'irrecevabilité de la requête tirée d'une instance déjà pendante devant la même juridiction, ayant les mêmes parties, le même objet et les mêmes causes, instance clôturée par le jugement du 24 avril 2017 est rejetée en ce qu'il résulte de la lecture comparée de ce jugement et de la requête du 12 avril 2016, qu'elles ne portent pas sur des sommes identiques et qu'en toute hypothèse, le jugement du 24 avril 2017 a statué sur la validité de la requête du 12 août 2016 qui a introduit l'action de la paierie, et non sur le fond » ; ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT « qu'en droit, l'article 76 de la délibération 95-205 du 23 novembre 2005 portant adoption de la réglementation budgétaire, comptable et financière de la Polynésie Française et de ses établissements publics dispose que « Les comptables publics sont seuls chargés de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui leur sont remis par les ordonnateurs des créances, constatées par un contrat, un titre de propriété ou autre titre dont ils assurent la conservation ainsi que de l'encaissement des droits au comptant et des recettes de toute nature que sont habilités à recevoir la Polynésie française et ses établissements publics » ; que cette disposition confère le droit au Payeur d'actionner le tribunal mixte de commerce à l'effet de préserver les droits de la Polynésie française en matière d'impôts ; qu'en l'espèce, l'action en redressement judiciaire à l'égard de Monsieur B... I... vise bien à garantir la créance de la Polynésie française ; que sur la qualité et la capacité pour agir de Monsieur D... F..., il a été nommé comptable de la Paierie de la Polynésie française par arrêté du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget le 3 décembre 2012, après avis du conseil des ministres de la Polynésie française conformément à l'article 97 de la loi organique du 27 février 2014 précité, que cet arrêté a été publié dans le bulletin officiel du 24 octobre 2014 ; que régulièrement nommé, M. D... F... est également régulièrement investi en sa qualité de comptable public, responsable de la Paierie de la Polynésie Française, des pouvoirs d'agir pour assurer la conservation des créances de la Polynésie française ; qu'il n'a nul besoin de délégation de pouvoir ou de signature autre, ni d'autorisation du conseil des ministres spéciale pour engager une action à l'égard de M. B... I... ; 1°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, M. I... a contesté la légalité des arrêtés n° 1-2017 du 1er avril 2017 et n° 2-2017 du 1er septembre 2017 portant l'un et l'autre désignation de mandataires et délégation de signatures à la paierie de la Polynésie Française, et a sollicité un renvoi préjudiciel à la juridiction administrative afin qu'il soit statué sur la légalité de ces arrêtés ; qu'en considérant que les arrêtés n°2-2013 PPF du 1er septembre 2013, n°1-2015 PPF du 1er août 2015 et n°1-2017 du 1er avril 2017 suffisaient à établir la qualité pour agir du payeur de la Polynésie Française et la recevabilité de sa requête, sans répondre au moyen de l'exposant qui contestait la légalité de ce dernier arrêté, la cour d'appel a violé l'article 268 du code de procédure civile de Polynésie Française ; 2°) ALORS QUE le payeur de la Polynésie Française n'est pas habilité à engager, de sa propre initiative, une action en redressement judiciaire contre un contribuable, action qui n'est pas directement liée à sa fonction de recouvrement de l'impôt et à son obligation de conservation des créances de la Polynésie française ; que l'action en redressement judiciaire à l'encontre du redevable d'impôts, qui ne remet pas en cause le principe de séparation des ordonnateurs et des comptables publics, ne peut être engagée par le payeur de la Polynésie française sans une autorisation du conseil des ministres de la Polynésie française, seul habilité à décider d'intenter des actions ou de défendre devant les juridictions au nom de la Polynésie Française ; qu'en considérant que le payeur de la Polynésie Française était régulièrement investi en sa qualité de comptable public, responsable de la Paierie de la Polynésie Française, des pouvoirs d'agir pour assurer la conservation des créances de la Polynésie Française, que ses pouvoirs ne pouvaient pas être subordonnés à une autorisation du conseil des ministres, et que le tribunal avait exactement jugé que l'action en redressement judiciaire engagée par le payeur de la Polynésie française visait bien à garantir la conservation de la créance fiscale de celle-ci, bien que les pouvoirs de conservation des créances fiscales dudit payeur ne lui confèrent nullement celui d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'encontre d'un contribuable, la cour d'appel a violé les articles LP 711-1 et LP 716-1 du code des impôts de Polynésie Française, 76 de la délibération n°95-205 AT du 23 novembre 1995 et 91-25° de la loi organique du 27 février 2004 ; 3°) ALORS QUE le payeur de Polynésie française n'ayant pas le pouvoir d'agir en redressement judiciaire contre un contribuable, ne peut déléguer ce pouvoir ; qu'en l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué que M. J... V... a signé par procuration du payeur de Polynésie française la requête en ouverture d'une procédure de redressement judiciaire contre l'exposant ; qu'en considérant que les trois arrêtés n°2-2013 PPF du 1er septembre 2013, n°1-2015 PPF du 1er août 2015 et n°1-2017 PPF du 1er avril 2017, par lesquels M. D... F..., payeur de Polynésie française, avait donné délégation générale et permanente notamment à M. J... V... pour « agir en justice en lieu et place du payeur », suffisaient à établir la qualité pour agir du requérant et la recevabilité de la requête, bien que M. F... n'ait pas eu lui-même le pouvoir d'agir en redressement judiciaire contre l'exposant et par suite celui de déléguer ce pouvoir à M. V..., de sorte que ni l'action engagée ni la requête devant le tribunal mixte de commerce signée par procuration du payeur n'étaient recevables, la cour d'appel a violé les articles LP 711-1 et LP 716-1 du code des impôts de Polynésie Française, 76 de la délibération n°95-205 AT du 23 novembre 1995 et 91-25° de la loi organique du 27 février 2004.
Il résulte de l'article 76 de la délibération n° 95-205 AT du 23 novembre 2005 relative à la réglementation budgétaire, comptable et financière de la Polynésie française et de ses établissements publics que le payeur de la Polynésie française a qualité pour demander l'ouverture d'une procédure collective à l'égard d'un redevable
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COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 700 F-P Pourvoi n° V 19-14.768 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020 M. I... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 19-14.768 contre l'arrêt rendu le 16 janvier 2019 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse, dont le siège est [...] , 2°/ à M. Y... Q..., domicilié [...] , 3°/ à M. F... E..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur de la société Q..., dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Guerlot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. T..., de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Guerlot, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 16 janvier 2019), par un acte du 1er décembre 2003, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse (la banque) a consenti à la société I..., devenue la société Q... (la société), un concours de 150 000 euros, garanti par l'engagement de caution solidaire et personnel souscrit le même jour par M. T.... 2. Le concours ayant été dénoncé par la banque, M. T... et la société l'ont assignée en décharge de l'engagement de la caution. Puis, la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque l'a assignée ainsi que la caution en exécution de leurs engagements respectifs. Les instances ont été jointes. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. M. T... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la banque la somme principale de 150 000 euros, alors « que la caution n'est tenue envers le créancier que de satisfaire à l'obligation qu'elle a garantie par le contrat de cautionnement ; que son engagement ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles elle a contracté ; qu'en condamnant M. T... à garantir à hauteur de 150 000 euros la dette de la société à l'égard de la banque résultant du solde débiteur de son compte courant après avoir pourtant constaté que M. T... s'était porté caution du seul prêt souscrit par la société le 1er décembre 2003, obligation distincte de celle née d'un solde débiteur de son compte courant, la cour d'appel a violé les articles 2288 et 2292 du code civil ; Réponse de la Cour 4. Il est constant que le concours bancaire garanti par M. T... était une ouverture de crédit en compte courant, soit une autorisation de découvert, le titulaire du compte étant ainsi autorisé à rendre, quand il le souhaitait, celui-ci débiteur dans la limite du montant et aux conditions contractuellement prévus. La cour d'appel n'a donc pas méconnu les limites de l'engagement de M. T... en retenant que la créance garantie était le solde débiteur du compte de la société. 5. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 6. M. T... fait le même grief à l'arrêt, alors « que le cautionnement ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ; qu'en jugeant que M. T... était tenu de garantir le paiement du solde débiteur du compte courant de la société, lequel s'élevait à la somme de 181 720,87 euros, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'engagement de cautionnement de M. T... ne portait pas sur l'éventuel solde débiteur dudit compte qui excéderait le montant du solde arrêté au jour de la souscription de son engagement, le 1er décembre 2003, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2292 du code civil. » Réponse de la Cour 7. Vu l'article 2292 du code civil : Aux termes de ce texte, le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès et on ne peut l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. 8. Pour condamner M. T... à payer à la banque la somme de 150 000 euros après avoir constaté qu'il s'était porté caution à hauteur de cette somme, majorée des frais et intérêts, du prêt du même montant consenti à la société le 1er décembre 2003, l'arrêt relève que le solde débiteur du compte de la société, tel qu'il résulte des relevés de compte et tel qu'il a été admis au passif de celle-ci, s'élève à 181 720,17 euros et retient que M. T... n'a pas été condamné au-delà de son engagement ou pour le découvert antérieur et qu'il ne peut se plaindre du fait que l'ouverture de crédit a été utilisée et qu'elle a creusé la dette principale, d'autant que la dette est telle qu'elle est sans influence sur le montant de son engagement de caution. 9. En se déterminant ainsi, alors que M. T... contestait sa condamnation au paiement du solde débiteur réclamé en soutenant qu'il s'était porté caution le 1er décembre 2003 d'un concours intitulé « contrat de prêt applicable aux fins de la trésorerie des professionnels », consenti le même jour par la banque pour permettre à la société de faire face à un besoin de trésorerie exceptionnel que ses lignes de crédit existantes ne lui permettaient pas de financer et qu'il faisait valoir à cet égard que le solde débiteur du compte, qui s'élevait à 246 094,62 euros lors de la souscription du prêt, ce qui établissait l'existence d'une autorisation de découvert préexistante de 250 000 euros, avait été porté, après l'octroi du nouveau concours bancaire, à 411 000 euros dès le 12 janvier 2004, qu'il était resté débiteur d'environ 380 000 euros jusqu'à début mai 2004 mais qu'ensuite la société n'avait plus tiré sur cette ligne de crédit supplémentaire, le solde du compte repassant durablement à une position débitrice inférieure à ce qu'elle était avant le 1er décembre 2003 et devenant même plusieurs fois créditeur de sorte que, lorsque la banque a dénoncé le concours, ce solde débiteur s'établissait à 150 665,62 euros, soit un montant inférieur à l'autorisation de découvert préexistante, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si les circonstances invoquées ne révélaient pas que le concours garanti était une autorisation de découvert supplémentaire, venant s'ajouter à un découvert déjà consenti, a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, la Cour, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que confirmant le jugement, il rejette les demandes de M. T..., le condamne à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse la somme de 150 000 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2013, capitalisés, le déboute de ses demandes de décharge et de dommages-intérêts et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile à son égard, l'arrêt rendu, entre les parties, le 16 janvier 2019, par la cour d'appel de Bastia ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence. Condamne la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse et la condamne à payer à M. T... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. T.... Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur I... T... à payer à la Caisse régionale du Crédit agricole mutuel de la Corse la somme de 150.000 euros outre les intérêts à taux légal à compter du 24 juillet 2013 et dit que ces intérêts porteront eux-mêmes intérêts en application de l'article 1154 du code civil ; Aux motifs propres que « En l'espèce, nonobstant la confusion de ses écritures, M. T... s'est porté caution personnelle et solidaire à hauteur de 150 000 euros majorés des frais et intérêts du prêt du même montant souscrit par la SAS I... le 1er décembre 2003 et il n'a pas été condamné au-delà de cet engagement ou pour le découvert antérieur. Le cautionnement à durée indéterminée d'un crédit en compte courant est valable, les cautions ayant la faculté de résilier l'engagement par lettre recommandée avec accusé de réception à tout moment moyennant un préavis de trois mois « dans ce cas les cautions seront tenues du solde débiteur existant à l'échéance du préavis de trois mois sous réserve de la liquidation des opérations en cours ». Autrement dit, M. T... ne peut se plaindre du fait que l'ouverture de crédit a été utilisée, qu'elle a creusé la dette principale, d'autant que la dette est telle qu'elle est sans influence sur le montant de son engagement de caution » ; Et aux motifs éventuellement adoptés qu' « Attendu que monsieur Y... Q... et monsieur I... T..., associé dans la société SYRACUSE INVESTISSEMENTS, société de travaux en bâtiment, ont décidé de se séparer ; Que cette scission fut opérée dans le cadre d'un protocole d'accord du 20 mars 2008 régularisé par des avenants du 13 et 16 février 2009 ; Qu'outre la répartition des actions entre les parties, ce protocole prévoyait, en son article 11, que les associés « seraient relevés de tout cautionnement personnel consenti dans les sociétés dans lesquelles ils ne seraient plus actionnaires ou associés, la partie restant actionnaire ou associé reprenant à sa charge ces cautionnements » ; Qu'au nombre de ces engagements figurait la caution portant sur une autorisation, en date du 12 décembre 2003, de découvert bancaire à hauteur de 150.000 euros et signé ès qualités par monsieur I... T... ; Attendu que le tribunal de commerce d'Ajaccio, après avoir prononcé le redressement judiciaire de la société SYRACUSE INVESTISSEMENTS, rendait une décision de liquidation judiciaire le 15 décembre 2014 ; Qu'antérieurement, la CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE mettait en demeure, par dénonciation du découvert, de régulariser les sommes avant poursuite ; Que les procédures amiables échouèrent ; Que monsieur I... T... était poursuivi en sa qualité de caution personnelle de ce découvert ; Attendu qu'il est reproché à ce titre à la CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE de ne pas avoir fait le nécessaire pour dégager monsieur I... T... de son engagement de caution suivant protocole du 20 mars 2008 avenants du 13 et 16 février 2009 ; Attendu qu'il est demandé à ce tribunal de contraindre la CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE à verser aux débats une attestation de non-dénonciation de l'acte de caution ; Que dans l'hypothèse où il ne pourrait pas la produire, la CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE devra verser copie des lettres d'information annuelles qu'il devait adresser à monsieur I... T... dans le cadre de son engagement ; Attendu qu'en tout état de cause, si le tribunal considérait l'acte de cautionnement toujours valable pour ces raisons, il devra tenir compte de ce que les remises bancaires faites par la SAS Q... dans le cadre du fonctionnement de la convention du découvert postérieurement au protocole d'accord signé entre les parties, rendent caduque l'acte de cautionnement ; Attendu que la CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE estime que le protocole d'accord le liant à monsieur Y... Q... lui est inopposable ; Attendu que de ce fait, le cautionnement de monsieur I... T... reste valable en l'état ; Attendu que le protocole d'accord signé entre les parties est la loi qui régit leur relation ; Attendu que la limite est l'opposabilité aux tiers ; Attendu que la CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE est un tiers à ce contrat ; Attendu que monsieur I... T... aurait dû dénoncer lui-même l'acte de cautionnement selon les conditions prévues à ce même acte ; Que tel n'a pas été le cas en l'espèce, conduisant ce tribunal à déclarer la caution valable ; Attendu que le tribunal ne peut s'immiscer dans la loi des parties que lorsqu'il constate un déséquilibre notoire profitant à l'une et désavantageant l'autre ; Attendu que tel n'est pas le cas en l'espèce, le tribunal ne peut ordonner la substitution de la caution de monsieur Y... Q... à celle de monsieur I... T... ; Attendu qu'il résulte de tout ce qui précède que cette juridiction fixera la créance de la CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE au passif de la SAS Q... à la somme de 181.720,14 euros à titre chirographaire et échu ; Attendu qu'en conséquence de la reconnaissance de l'existence, de la nature et du montant de la créance de la CAISSE RÉGIONALE DU CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA CORSE au passif de l'entité cautionnée, le tribunal condamnera monsieur I... T... à honorer la sûreté personnelle qu'il a consentie et dont la mainlevée ne saurait être ordonnée par cette juridiction et ce, à hauteur de 150.000 euros ; Attendu qu'en conséquence, il sera dit et jugé que la société Q... SAS et monsieur Y... Q... seront déboutés de leurs prétentions aux fins de constat de la décharge de caution de monsieur T... et de condamnation de l'établissement bancaire à des dommages-intérêts ; » 1°) Alors que la caution n'est tenue envers le créancier que de satisfaire à l'obligation qu'elle a garantie par le contrat de cautionnement ; que son engagement ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles elle a contracté ; qu'en condamnant M. T... à garantir à hauteur de 150.000 euros la dette de la société Q... à l'égard de la Caisse régionale du Crédit agricole mutuel de la Corse résultant du solde débiteur de son compte courant après avoir pourtant constaté que M. T... s'était porté caution du seul prêt souscrit par la société Q... le 1er décembre 2003, obligation distincte de celle née d'un solde débiteur de son compte courant, la cour d'appel a violé les articles 2288 et 2292 du code civil ; 2°) Alors que le paiement de la dette principale objet d'un contrat de cautionnement entraine l'extinction de l'obligation de la caution ; que l'inscription d'une dette en compte courant équivaut à un paiement ; qu'en condamnant M. T... au paiement envers la Caisse régionale du Crédit agricole mutuel de la Corse de la somme de 150.000 euros outre intérêts en exécution de son engagement de cautionnement portant sur le prêt souscrit par la société I... le 1er décembre 2003, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions T..., pp. 9 à 11), si les différentes remises effectuées sur le compte courant de la société n'avaient pas emporté paiement de la dette garantie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2288 du code civil ; 3°) Alors que, subsidiairement, le cautionnement ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ; qu'en jugeant que M. T... était tenu de garantir le paiement du solde débiteur du compte courant de la société Q..., lequel s'élevait à la somme de 181.720,87 euros, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions T..., pp. 9 à 11), si l'engagement de cautionnement de M. T... ne portait pas sur l'éventuel solde débiteur dudit compte qui excèderait le montant du solde arrêté au jour de la souscription de son engagement, le 1er décembre 2003, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2292 du code civil.
Selon l'article 2292 du code civil, le cautionnement ne se présume pas, il doit être exprès et on ne peut pas l'étendre au delà des limites pour lequel il a été contracté. En conséquence, prive sa décision de base légale la cour d'appel qui condamne une caution à garantir le remboursement du solde d'un compte courant sans rechercher, au regard des circonstances invoquées par la caution, si celle-ci n'avait pas garanti qu'une autorisation de découvert supplémentaire, venant s'ajouter à un découvert déjà consenti, de sorte qu'elle n'aurait été tenu qu'au paiement du solde débiteur excédant le montant de l'autorisation préexistante
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COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 703 F-P+B Pourvoi n° S 19-11.430 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020 1°/ la société Ace European Group Limited, dont le siège est [...] ), 2°/ la société Zurich Versicherung AG, dont le siège est [...] ), 3°/ M. D... E..., domicilié [...] , ont formé le pourvoi n° S 19-11.430 contre l'arrêt rendu le 20 novembre 2018 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige les opposant : 1°/ au Comité départemental de voile de la Charente-Maritime, dont le siège est [...] , 2°/ à M. C... M..., domicilié [...] , 3°/ à la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), dont le siège est [...] , 4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Garonne, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. M. M... et la Mutuelle assurance des instituteurs de France ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ; Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de la société Ace European Group Limited, de la société Zurich Versicherung AG et de M. E..., de Me Le Prado, avocat du Comité départemental de voile de la Charente-Maritime, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. M... et de la Mutuelle assurance des instituteurs de France, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 20 novembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 8 mars 2017, pourvoi n° 15-23.220), le 8 juin 2008, au cours d'une traversée de l'Atlantique organisée par le Comité départemental de voile de la Charente-Maritime (le CDV), M. M... a été victime d'une chute alors qu'il se trouvait à bord du navire de plaisance [...] ayant pour chef de bord M. E..., assuré au titre de sa responsabilité civile auprès des sociétés Ace European Group Limited et Zurich Versicherung AG (les sociétés Ace et Zurich). M. M... et son assureur, la Mutuelle assurance des instituteurs de France (la MAIF), ont recherché la responsabilité du CDV et de M. E..., lequel a été judiciairement autorisé à constituer un fonds de limitation de responsabilité. Examen des moyens Sur le premier moyen du pourvoi principal et le premier moyen du pourvoi incident 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le deuxième moyen du pourvoi principal Enoncé du moyen 3. M. E... et les sociétés Ace et Zurich font grief à l'arrêt de juger que le CDV n'a commis aucun manquement à son obligation de conseil en matière d'assurance et, en conséquence, de rejeter leurs demandes formées à son encontre, alors « que l'organisateur d'une manifestation sportive est tenu à une obligation générale d'information quant à l'existence, l'étendue et l'efficacité de la garantie souscrite par les participants ; que M. E... soutenait que le CDV avait commis à son égard un manquement à son obligation de conseil, en lui préconisant de souscrire une assurance aux tiers pour un million d'euros", ce qui l'avait conduit à souscrire une assurance responsabilité civile à concurrence de 1 023 000 euros, bien que le CDV ait eu connaissance qu'une telle garantie était manifestement insuffisante à garantir le fonds de limitation à hauteur de 1,5 million DTS, soit 1 704 945 euros ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 4. Si l'organisateur d'une manifestation nautique maritime est tenu d'informer les participants sur l'existence, l'étendue et l'efficacité des assurances qu'il a souscrites afin qu'ils puissent, le cas échéant, souscrire des garanties individuelles couvrant leurs propres dommages ou leur responsabilité, son obligation d'information ne porte pas sur l'étendue et l'efficacité de l'assurance individuelle de responsabilité souscrite par le chef de bord, lequel, ne pouvant légitimement ignorer le régime de responsabilité personnelle auquel il est soumis et, notamment, le montant maximum des indemnités qui peuvent être mises à sa charge, doit lui-même se renseigner sur ce point, afin de souscrire l'assurance adéquate, sans pouvoir reprocher à l'organisateur l'erreur que celui-ci aurait pu commettre sur ce montant. 5. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé. Et sur le troisième moyen du pourvoi principal Enoncé du moyen 6. M. E... et les sociétés Ace et Zurich font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à voir juger que le CDV a commis un manquement à son obligation de sécurité dans les conditions de prise en charge médicale de M. M..., à la suite de son accident, et à le voir en conséquence jugé responsable de l'aggravation du dommage corporel subi par ce dernier, alors « qu'il appartient à l'organisateur d'une manifestation sportive, tenu d'une obligation de sécurité à l'égard des participants, de faire preuve de diligence dans l'organisation des secours en cas d'accident ; qu'en se bornant à affirmer qu'il n'était pas établi que l'état santé de M. M... aurait été aggravé par un éventuel retard dans sa prise en charge médicale, de sorte que rien ne permettait de mettre en cause les conditions de préparation et d'encadrement de la traversée par le CDV, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait de la note technique du Dr J..., versée aux débats par M. E... et ses assureurs, que l'intervention chirurgicale pratiquée au-delà de 6 heures après l'accident avait aggravé le préjudice subi par M. M..., de sorte que le CDV avait commis une faute engageant sa responsabilité en ne rendant possible l'intervention d'une équipe médicale que le lendemain de l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. » Réponse de la Cour 7. En application de l'article 3, alinéa 1, de l'arrêté du 3 mai 1995 relatif aux manifestations nautiques en mer et des articles 4 et 6 du décret du 2 mai 1988, devenus R. 742-4 et R. 742-6 du code de la sécurité intérieure, si l'organisateur d'une manifestation nautique maritime est tenu de mettre en place une structure opérationnelle du début de l'épreuve à l'arrivée du dernier participant, cette structure étant le correspondant permanent du centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) géographiquement compétent, qu'elle doit informer de tout événement de nature à nécessiter une opération de recherche et de sauvetage, la responsabilité d'une telle opération appartient, en métropole, au préfet maritime dont le CROSS, centre de coordination maritime, est le représentant permanent. Il en résulte qu'en cas d'accident, l'organisateur de la manifestation nautique maritime n'est pas tenu de l'organisation matérielle des secours. 8. Le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé. Mais sur le second moyen du pourvoi incident Enoncé du moyen 9. M. M... et la MAIF font grief à l'arrêt de dire que le fonds de limitation de responsabilité du voilier [...] leur est opposable pour un montant de 284 157,50 euros, alors « que pour être opposable aux créanciers maritimes, le plafond du fonds de limitation doit être constitué à concurrence du montant calculé selon les stipulations des articles 6 et 7 de la Convention de Londres du 19 novembre 1976 tel que modifiée par le Protocole du 2 mai 1996 ; qu'en disant que le fonds de limitation de responsabilité du voilier [...] est opposable pour un montant de 284 157,70 euros au créancier maritime, M. M..., et son assureur, la MAIF, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations selon lesquelles le choix de Mme E..., de M. E... et de ses assureurs de fixer le montant du fonds de limitation à hauteur de l'ancien plafond légal de 250 000 DTS, soit 284 157,50 euros, ne pouvait pas être opposé à la victime qui était fondée à invoquer les plafonds de limitation de responsabilité du skipper ou propriétaire du navire jusqu'à concurrence de leur montant légal soit 1 000 000 DTS pour le fonds de créances corporelles et 500 000 DTS pour les autres créances, violant ainsi les articles 6 et 7 de la Convention de Londres du 19 novembre 1976 modifiée par le Protocole du 2 mai 1996 et les articles 58, 61 et 69 de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967. » Réponse de la Cour Vu les articles 61 et 62 de la loi du 3 janvier 1967 relative au statut des navires et autres bâtiments de mer et les articles 61, 64 et 80 du décret du 27 octobre 1967 relatif au statut des navires et autres bâtiments de mer, devenus L. 5121-5, L. 5121-6, R. 5121-3, R. 5121-6 et R. 5121-22 du code des transports : 10. Il résulte de ces textes qu'est opposable au propriétaire ou capitaine du navire tout jugement statuant sur le montant des plafonds de limitation de responsabilité, rendu postérieurement à l'ordonnance du président du tribunal de commerce constatant la constitution du fonds de limitation. 11. Pour dire que le fonds de limitation de responsabilité, constitué pour une somme de 284 157,50 euros, est opposable pour ce montant à M. M... et à la MAIF, l'arrêt retient que le fonds de limitation a été valablement constitué par une ordonnance du président du tribunal de commerce du 27 avril 2009, à la requête de M. E..., pour un montant initial de 166 500 DTS porté à 250 000 DTS, en vertu des textes applicables aux plafonds de limitation de la responsabilité du propriétaire du bateau. 12. En statuant ainsi, alors qu'elle avait elle-même arrêté, conformément aux textes applicables, le montant global de la limitation de la responsabilité de M. E... à la contre-valeur en euros de 1 500 000 DTS, la cour d'appel, dont la décision sur ce point était opposable à tous, a, en jugeant que le montant moindre du fonds de limitation constituait néanmoins le montant maximum d'indemnités pouvant en l'état être réclamé par la victime, son assureur ou la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne, violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation Vu l'article 624 du code de procédure civile : 13. La cassation prononcée sur le second moyen du pourvoi incident du chef de dispositif disant que le fonds de limitation de responsabilité du voilier [...] a été constitué pour une somme de 284 157,50 euros et qu'il est opposable pour ce montant à M. M..., la MAIF et la CPAM entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs de dispositif disant que M. E... et ses assureurs auraient dû constituer le fonds à hauteur du plafond de limitation de sa responsabilité du propriétaire du navire à hauteur de 1 500 000 DTS et ordonnant la révocation de l'ordonnance de clôture et la réouverture des débats, pour permettre à M. E... et ses assureurs de s'expliquer sur la possibilité de revaloriser le fonds de limitation constitué par ordonnance du président du tribunal de commerce de La Rochelle et justifier éventuellement y avoir procédé, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le fonds de limitation de responsabilité du voilier [...] a été constitué pour une somme de 284 157,50 euros et qu'il est opposable pour ce montant à M. M..., la MAIF et la CPAM, dit que M. E... et ses assureurs, les sociétés Ace European Group Limited et Zurich Versicherung AG, auraient dû constituer le fonds à hauteur du plafond de limitation de sa responsabilité du propriétaire du navire à hauteur de 1 500 000 DTS et ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture et la réouverture des débats, pour permettre à M. E... et ses assureurs de s'expliquer sur la possibilité de revaloriser le fonds de limitation constitué par ordonnance du président du tribunal de commerce de La Rochelle et justifier éventuellement y avoir procédé, l'arrêt rendu le 20 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ; Condamne M. E... et les sociétés Ace European Group Limited et Zurich Versicherung AG aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. E... et les sociétés Ace European Group Limited et Zurich Versicherung AG et les condamne à payer à M. M... et la MAIF la somme globale de 3 000 euros et au Comité départemental de voile de la Charente-Maritime la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. E... et les sociétés Ace European Group Limited et Zurich Versicherung AG. PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que le plafond de limitation de la responsabilité, bénéficiant à Monsieur E... et à ses assureurs, la Société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED et la Société ZURICH VERSICHERUNG AG, s'élève à la somme de 1.000.000 DTS pour le fond de créances corporelles et 500.000 DTS pour le fond des autres créances, de sorte que Monsieur E... et ses assureurs auraient dû constituer un fonds de limitation de responsabilité à hauteur de 1.500.000 DTS, soit 1.800.000 euros ; AUX MOTIFS QUE, sur la limitation de responsabilité de M. E..., l'accident s'est produit sur un bateau le 8 juin 2008, avant l'entrée en vigueur du Code des transports, et il n'est pas contesté qu'il est soumis à la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 « portant statut des navires et autres bâtiments de mer », dans sa version issue de la loi du 22 décembre 1984 qui a intégré en droit français, le régime de responsabilité prévu à la Convention de Londres du 19 novembre 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes ; que c'est le chapitre VII de ladite loi qui régit la responsabilité du propriétaire de navire ; que l'article 58 de ladite loi prévoit que, sauf si une faute prouvée lui est personnellement imputable, le propriétaire d'un bateau peut limiter sa responsabilité envers des tiers si les dommages invoqués se sont produits à bord de son navire ; que le principe de responsabilité du capitaine du navire consiste en réalité en une limitation de l'indemnité qui peut être mise à sa charge, limitation qui va dépendre de la taille et de la puissance du navire, puisqu'elle est fixée en fonction de son tonnage ; que le [...] est un navire de 9,09 tonneaux bruts ; que pour la fixation du montant des plafonds de responsabilité, l'article 61 renvoie directement à la Convention internationale du 10 octobre 1957 modifiée par la Convention de Londres du 19 novembre 1976 qui, en son article 6, est ainsi libellé : « Art. 6 Limites générales 1. Les limites de la responsabilité à l'égard des créances autres que celles mentionnées à l'art.7, nées d'un même événement, sont fixées comme suit : a) s'agissant des créances pour morts ou lésions corporelles, i) à 333.000 unités de compte pour un navire dont la jauge ne dépasse pas 500 tonneaux ; (...) b) s'agissant de toutes les autres créances, i) à 167.000 unités de compte pour un navire dont la jauge ne dépasse pas 500 tonneaux ( ) ; que l'article explique qu'une unité de compte correspond à un droit de tirage spécial (DTS) tel que défini par le FMI ; qu'usant de la faculté offerte par l'article 15-2 de la Convention aux Etats adhérents, de modifier ces plafonds pour les navires d'une jauge inférieure à 300 tonneaux, le législateur français a complété l'article 61 précité d'un second alinéa qui prévoyait que : « Toutefois, en ce qui concerne les navires d'une jauge inférieure à 300 tonneaux, les limites générales de la responsabilité sont égales à la moitié de celles fixées à l'article 6 de la convention de Londres du 19 novembre 1976 précitée pour les navires dont la jauge ne dépasse pas 500 tonneaux » ; que, pour ces navires de moins de 300 tonneaux, la limite était donc de 166.500 DTS pour les créances de dommages corporels (333000/2) et pour les autres créances incorporelles de 83.500 DTS indemnisée dans la limite globale de 250.000 DTS lorsqu'elle n'a pas de créance autre que pour lésions corporelles : que ces plafonds ont été revus à la hausse par le texte dénommé « PROTOCOLE MODIFIANT LA CONVENTION DE 1976 SUR LA LIMITATION DE LA RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE DE CRÉANCES MARITIMES » du 2 mai 1996, qui, en son article 3, stipule que le paragraphe 1 de l'article 6 de la Convention est remplacé par les dispositions ci-après : « a) s'agissant des créances pour mort ou lésions corporelles, i) à 2 millions d'unités de compte pour un navire dont la jauge ne dépasse pas 2 000 tonneaux ... », « b) s'agissant de toutes les autres créances, i) à 1 million d'unités de compte pour un navire dont la jauge ne dépasse pas 2 000 tonneaux ... » ; l'article 9 1° précisant que : « La Convention et le présent Protocole sont, entre les Parties au présent protocole, considérés et interprétés comme formant un seul instrument (...) » qu'il en résulte que pour les navires de moins de 300 tonneaux, la limite de responsabilité est portée à 1 million DTS pour les créances pour lésions corporelles et 500.000 DTS pour les autres créances, soit un cumul de 1.500.000 DTS ; que le tribunal puis la Cour d'appel ont estimé que ces nouveaux plafonds n'étaient pas applicables à l'accident du 8 juin 2008 dont Monsieur M... a été victime et que les dispositions modifiant les plafonds de limitation de responsabilité n'étaient entrées en vigueur que lors de la publication du Code des transports en 2010 spécialement en son article L. 5121-5 ; qu'ils ont ainsi écarté l'argumentation de Monsieur M... et la MAIF qui affirment que les plafonds de limitation de garantie avaient été majorés en droit interne français, antérieurement à l'accident survenu le 8 juin 2008, et que la limitation de la responsabilité de Monsieur E... était portée à 1 million pour les créances maritimes à caractère corporel ; que, dans son arrêt de cassation partielle, la Cour de cassation a, au contraire, accueilli le second moyen du pourvoi incident de Monsieur M... et la MAIF en énonçant : « Attendu que pour fixer à 250.000 droits de tirage spéciaux du fonds monétaire international (DTS) le montant de limitation de responsabilité opposable à M. M..., l'arrêt retient que ce n'est qu'à compter de la date d'entrée en vigueur du code des transports que la modification des plafonds de responsabilité a été intégrée en droit interne ; Qu'en statuant ainsi, alors que le Protocole du 2 mai 1996 qui a modifié les plafonds fixés à l'article 6 de la Convention et auquel renvoie l'article 61 de la loi du 3 janvier 1967 relative au statut des navires, est entré en vigueur le 23 juillet 2007, la cour d'appel a violé les textes susvisés » ; qu'en effet, l'article 9.3° du Protocole de 1976 prévoit que la Convention telle qu'il la modifie, ne s'applique qu'aux créances nées d'événements postérieurs à l'entrée en vigueur, pour chaque Etat, du présent Protocole ; que, pour sa date d'entrée en vigueur, l'article 11 précise : « 1. Le présent Protocole entre en vigueur quatre-vingt-dix jours après la date à laquelle dix Etats ont exprimé leur consentement à être liés par lui. 2. Pour tout Etat qui exprime son consentement à être lié par le présent Protocole après que les conditions d'entrée en vigueur prévues au paragraphe 1 ont été remplies, le présent Protocole entre en vigueur quatre-vingt-dix jours après la date à laquelle ce consentement a été exprimé » ; que ce Protocole modificatif a été ratifié par la France le 5 juillet 2006 et a été publié par le décret n° 2007-1379 du 22 septembre 2007 paru au Journal Officiel du 25 septembre 2007 intitulé « entrée en vigueur pour la France du protocole du 2 mai 1996, la publication spécifiant que le protocole était entré en vigueur le 23 juillet 2007 ; que la date d'entrée en vigueur, antérieure à la date de publication du Protocole, s'explique au regard de l'article 55 de la Constitution qui édicte que : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie » ; qu'un traité international, une fois régulièrement publié, produit ses effets en toutes ses dispositions, y compris celles relatives à son entrée en vigueur de sorte qu'il est admis qu'il puisse avoir un effet rétroactif par rapport à sa date de publication ; qu'ainsi comme l'a dit la Cour de cassation, le premier juge a statué sans tenir compte des nouveaux plafonds d'indemnisation qui, issus d'une Convention internationale étaient applicables directement en droit français, au litige survenu le 8 juin 2008 ; que, dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que le montant opposable s'élève à la somme revalorisée de 250.000 DTS soit 284.157,50 €, et statuant à nouveau, ce montant sera porté à 1.000.000 DTS pour les créances corporelles et 500.000 DTS pour les autres créances soit, la contre-valeur du DTS étant actuellement de 1,20 €, 1.200.000 € pour le premier fonds et 600.000 € pour le second fonds ; que, toutefois, il est constant que la victime de lésions corporelles provoquées par un navire doit être indemnisée à concurrence du montant cumulé du plafond des deux fonds ; que ; dès lors la limitation de responsabilité de Monsieur E... s'élevant à 1.800.000 € est supérieure au montant du préjudice qui a été définitivement fixé à 1.206.603,87 € créances sociales incluses ; ALORS QU'aux termes de l'article 61 de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967, portant statut des navires et autres bâtiments de mer, « en ce qui concerne les navires d'une jauge inférieure à 300 tonneaux, les limites générales de la responsabilité sont égales à la moitié de celles fixées à l'article 6 de la convention de Londres du 19 novembre 1976 ( ) pour les navires dont la jauge ne dépasse pas 500 tonneaux » ; que si le Protocole du 2 mai 1996, modifiant la Convention de Londres du 19 novembre 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes, était, dès le 23 juillet 2007, date de son entrée en vigueur en droit interne, d'application directe, il n'a pas pour autant modifié l'article 61 de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967, dès lors qu'il se réfère aux navires « dont la jauge ne dépasse pas 2000 tonneaux », tandis que l'article 61 susvisé vise les navires « dont la jauge ne dépasse pas 500 tonneaux » ; qu'en décidant néanmoins que le Protocole du 2 mai 1996 avait eu pour effet de porter à 1,5 million DTS le plafond de limitation de la responsabilité de Monsieur E..., pour en déduire que ce dernier aurait dû constituer un fonds de limitation à hauteur d'un tel montant, la Cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention de Londres du 19 novembre 1976, dans sa rédaction initiale, l'article 3 et 15-2 b) du Protocole du 2 mai 1996, modifiant la Convention et le décret n° 2007-1379 du 22 septembre 2007 portant publication du Protocole, ensemble l'article 61 de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que le Comité départemental de voile de Charente-Maritime n'avait commis aucun manquement à son obligation de conseil en matière d'assurance et d'avoir en conséquence débouté Monsieur D... E... et ses assureurs, la Société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED et la Société ZURICH VERSICHERUNG AG, de leurs demandes à son encontre ; AUX MOTIFS QUE, dans son arrêt confirmatif, la Cour d'appel avait adopté les motifs du tribunal ayant retenu un manquement à l'obligation d'information en matière d'assurance, au regard du montant du plafond de limitation de la responsabilité du skipper qui avait été appliqué, soit 284.157,50 € (250.000 DTS) ; qu'aucune autre faute n'avait été retenue à l'égard du Comité Départemental de Voile ; que les dispositions relatives à la responsabilité du Comité Départemental de Voile ont été censurées par la Haute Cour ; que Monsieur E... et ses assureurs, Monsieur M... et la MAIF reprennent devant la Cour de céans les moyens qu'ils ont déjà fait valoir devant le premier juge puis devant la Cour d'appel de Bordeaux mais ne développent aucun élément pertinent et non soumis à l'appréciation du tribunal, pour caractériser les manquements reprochés au Comité Départemental de Voile ; que, s'agissant du manquement lié au défaut d'information et de conseil en matière d'assurance, la Cour de cassation a rappelé qu'il devait être caractérisé au regard des assurances dont dispose déjà le créancier de l'information ; que, compte tenu des plafonds applicables à la limitation de responsabilité de Monsieur E... garanti par ses assureurs, soit au total 1.500.000 DTS (actuellement 1.800.000 €), pour les deux fonds cumulés, et d'autre part, du quantum définitif du préjudice, soit 1.206.603,87 €, il est manifeste qu'en dehors de toute information donnée par le Comité Départemental de Voile qui a cependant imposé aux propriétaires des bateaux participant à la traversée de se couvrir à la fois pour son bateau et pour lui-même, d'une assurance responsabilité civile au tiers d'un minimum d'un million d'euros, le préjudice de la victime et les organismes sociaux peuvent être intégralement couverts par le skipper et ses assureurs de responsabilité ; que, de surcroît, les parties invoquant la responsabilité du Comité Départemental de Voile ne précisent pas quels types de contrats d'assurance complémentaire, cette instance aurait pu recommander à Monsieur M..., étant observé qu'en tout état de cause de telles polices d'assurance de personne couvrant les dommages corporels fixent habituellement à l'avance un montant de garantie forfaitaire et ne proposent donc pas l'indemnisation intégrale de la victime ; que, par ailleurs, si l'article L.321-4 du Code du sport édicte une obligation pour un groupement sportif organisateur d'une course d'informer ses adhérents de leur intérêt à souscrire une assurance, il n'existe aucun texte similaire s'appliquant au cas des participants non adhérents ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement ayant retenu un manquement du Comité Départemental de Voile à l'égard de Monsieur M... au titre de l'obligation de conseil en matière d'assurance ; ALORS QUE l'organisateur d'une manifestation sportive est tenu à une obligation générale d'information quant à l'existence, l'étendue et l'efficacité de la garantie souscrite par les participants ; que Monsieur E... soutenait que le Comité départemental de voile de Charente-Maritime avait commis à son égard un manquement à son obligation de conseil, en lui préconisant de souscrire une « assurance aux tiers pour un million d'euros », ce qui l'avait conduire à souscrire une assurance responsabilité civile à concurrence de 1.023.000 euros, bien que le Comité départemental de voile ait eu connaissance qu'une telle garantie était manifestement insuffisante à garantir le fonds de limitation à hauteur de 1,5 million DTS, soit 1.704.945 euros ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur D... E... et ses assureurs, la Société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED et la Société ZURICH VERSICHERUNG AG, de leur demande tendant à voir juger que le Comité départemental de voile de la Charente-Maritime a commis un manquement à son obligation de sécurité dans les conditions de prise en charge médicale de Monsieur M..., à la suite de son accident, et de le voir en conséquence jugé responsable de l'aggravation du dommage corporel subi par ce dernier à hauteur de 80 %, ou telle autre proportion que la Cour estimera ; AUX MOTIFS QUE, s'agissant des autres manquements reprochés au Comité Départemental de Voile, à l'obligation de sécurité, les usages et les règles applicables en matière de course en mer confèrent au seul "skipper" le commandement du voilier dont il dirige et contrôle les manoeuvres et la marche, chacun des coéquipiers effectuant sa tâche à la place qui lui a été affectée dans l'équipe, sous le contrôle et la direction du "skipper", lequel exerce seul sur le navire les pouvoirs de contrôle et de direction qui caractérisent la garde de la chose ; que le skipper a donc également l'obligation d'assurer son bateau, ce qu'il a fait en l'espèce, mais aussi d'informer ses équipiers de la nécessité de se couvrir au mieux des aléas liés à une course en mer ; qu'il y a lieu de rappeler qu'il résulte des rapports d'expertise qui sont corroborés par les explications des parties et les autres pièces versées aux débats et en tout état de cause, non critiqués par les parties à l'aide d'éléments objectifs, que, d'une part, M. T... L..., expert chargé d'établir les causes du sinistre, a indiqué que l'accident était le résultat de la seule prise de risque traditionnel et connu, inhérent à la navigation à la voile dans des conditions météorologiques difficiles, voire extrêmes, mais il a tout de même fait observer que le manque de préparation de l'équipage et d'harmonie entre les équipiers (relevant de la responsabilité du skipper) était indéniable, et que le manque de rigueur dans les manoeuvres associé à un mouvement de plate-forme et à une erreur de barre, même minime, ont conduit à l'accident ; que, -d'autre part, qu'aucun des deux médecins expert, le Dr X... puis le Dr F..., n'indiquent que l'état de santé de Monsieur M... qui souffre d'une tétraplégie importante à la suite d'une contusion médullaire consécutive à un choc survenu à bord du navire, a été aggravé par un éventuel retard dans sa prise en charge médicale, de sorte que rien ne permet de mettre en cause les conditions de préparation et d'encadrement de la traversée par le Comité Départemental de Voile ; que, dès lors, la cour adoptera les motifs du tribunal en ce qu'il a rejeté toute autre faute du Comité Départemental de Voile ; ALORS QU'il appartient à l'organisateur d'une manifestation sportive, tenu d'une obligation de sécurité à l'égard des participants, de faire preuve de diligence dans l'organisation des secours en cas d'accident ; qu'en se bornant à affirmer qu'il n'était pas établi que l'état santé de Monsieur M... aurait été aggravé par un éventuel retard dans sa prise en charge médicale, de sorte que rien ne permettait de mettre en cause les conditions de préparation et d'encadrement de la traversée par le Comité départemental de voile, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait de la note technique du Docteur J..., versée aux débats par Monsieur E... et ses assureurs, que l'intervention chirurgicale pratiquée au-delà de 6 heures après l'accident avait aggravé le préjudice subi par Monsieur M..., de sorte que le Comité départemental de voile avait commis une faute engageant sa responsabilité en ne rendant possible l'intervention d'une équipe médicale que le lendemain de l'accident, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. M... et la Mutuelle assurance des instituteurs de France. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le comité départemental de voile de Charente-Maritime n'a pas commis de faute engageant sa responsabilité à l'égard de M. C... M... et d'AVOIR en conséquence débouté celui-ci ainsi que la Maif de leurs fins et moyens à l'encontre du comité départemental de voile de Charente-Maritime ; AUX MOTIFS QUE s'agissant des autres manquements reprochés au Comité Départemental de Voile, à l'obligation de sécurité, les usages et les règles applicables en matière de course en mer confèrent au seul "skipper" le commandement du voilier dont il dirige et contrôle les manoeuvres et la marche, chacun des coéquipiers effectuant sa tâche à la place qui lui a été affectée dans l'équipe, sous le contrôle et la direction du "skipper", lequel exerce seul sur le navire les pouvoirs de contrôle et de direction qui caractérisent la garde de la chose ; que le skipper a donc également l'obligation d'assurer son bateau, ce qu'il a fait en l'espèce, mais aussi d'informer ses équipiers de la nécessité de se couvrir au mieux des aléas liés à une course en mer ; qu'il y a lieu de rappeler qu'il résulte des rapports d'expertise qui sont corroborés par les explications des parties et les autres pièces versées aux débats et en tout état de cause, non critiqués par les parties à l'aide d'éléments objectifs, - d'une part, que M. T... L..., expert chargé d'établir les causes du sinistre, a indiqué que l'accident était le résultat de la seule prise de risque traditionnel et connu, inhérent à la navigation à la voile dans des conditions météorologiques difficiles, voire extrêmes, mais il a tout de même fait observer que le manque de préparation de l'équipage et d'harmonie entre les équipiers (relevant de la responsabilité du skipper) était indéniable, et que le manque de rigueur dans les manoeuvres associé à un mouvement de plate-forme et à une erreur de barre, même minime, ont conduit à l'accident. - d'autre part, qu'aucun des deux médecins expert, le Dr X... puis le Dr F..., n'indiquent que l'état de santé de M. M... qui souffre d'une tétraplégie importante à la suite d'une contusion médullaire consécutive à un choc survenu à bord du navire, a été aggravé par un éventuel retard dans sa prise en charge médicale, de sorte que rien ne permet de mettre en cause les conditions de préparation et d'encadrement de la traversée par le Comité Départemental de Voile ; que dès lors, la cour adoptera les motifs du tribunal en ce qu'il a rejeté toute autre faute du Comité Départemental de Voile ; ALORS QU'il appartient à l'organisateur d'une manifestation sportive, tenu d'une obligation de sécurité à l'égard des participants, de faire preuve de diligence dans l'organisation des secours en cas d'accident ; qu'en se bornant à affirmer qu'il n'était pas établi que l'état de santé de M. M... aurait été aggravé par un éventuel retard dans sa prise en charge médicale, de sorte que rien ne permettait de mettre en cause les conditions de préparation et d'encadrement de la traversée par le comité départemental de voile de Charente-Maritime, sans rechercher s'il résultait de la note technique du Docteur J..., régulièrement versée aux débats, que l'intervention chirurgicale pratiquée au-delà de 6 heures après l'accident avait aggravé le préjudice subi par M. M..., de sorte que le comité départemental de voile de Charente-Maritime avait commis une faute engageant sa responsabilité en ne rendant possible l'intervention d'une équipe médicale que le lendemain de l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le fonds de limitation de responsabilité du voilier [...] est opposable pour un montant de 284 157,50 euros à M. M... et à la Maif ; AUX MOTIFS QUE M. E... et ses assureurs tentent de proposer une argumentation permettant d'ignorer la décision de la Cour de cassation, en expliquant qu'en réalité, les dispositions concernant la majoration des plafonds de limitation de la responsabilité du skipper, ne concernent pas la constitution du fonds de limitation qui est visée par des dispositions autonomes à savoir les articles 14 et 15.2.b de la Convention de 1976 qui sont demeurés régis par le droit interne de chaque Etat en vertu de leur souveraineté et qui n'ont donc pas été modifiés par la Convention de Londres ; que les concluants affirment ainsi que la Cour de cassation n'a pas évoqué ces textes régissant la constitution du fonds car les moyens des pourvois qui lui étaient soumis ne concernaient que la limitation du plafond de la responsabilité du capitaine du bateau, mais il résulte des textes applicables - Convention de Londres instaurant le régime et les mécanismes de responsabilité applicables en matière de créances maritimes, et le Protocole de 1996 modifiant à la hausse les plafonds de responsabilité mais sans amender le dispositif général - que la limitation de responsabilité est acquise de plein droit pour chaque événement dommageable de mer et n'est pas subordonnée à la constitution par le propriétaire responsable du fond de limitation prévu par l'article 62 de la loi de 1967 ; que la constitution de fonds de limitation est, pour le skipper souhaitant invoquer la limitation de sa responsabilité, une possibilité d'éviter d'être poursuivi sur ses autres biens, mais en tout état de cause, ce fonds doit être constitué à concurrence des plafonds fixés par les articles 6 et 7 de la Convention ; sur le montant du fonds : le chapitre III de la Convention de 1976 fixant les conditions de constitution du fonds de limitation explique en son article 11 que toute personne dont la responsabilité peut être mise en cause peut constituer un fonds auprès du tribunal compétent pour les créances soumises à limitation et que le fonds est constitué à concurrence du montant tel qu'il est calculé selon les dispositions des articles 6 et 7 applicables aux créances dont cette personne peut être responsable ; que le fonds est donc valablement constitué et donc opposable, quand son plafond est fixé selon les modalités précitées ; que l'article 13 du même chapitre édicte une fin de non-recevoir interdisant au créancier d'intenter toute autre action sur les biens de la personne qui a constitué le fonds, mais avec cette précision que le fonds doit être constitué conformément à l'article 11 ; que le 22 avril 2009, Mmes E..., M. E... et les assureurs ont présenté une requête au président du tribunal de grande instance de La Rochelle aux fins de constituer le fonds de limitation à hauteur de 166.500 DTS en fondant leur demande, en particulier, sur l'article 61 de la loi du 3 janvier 1967 tel que modifié par la loi du 21 décembre 1984 et la loi du 15 décembre 1946, en ce qu'il renvoie à l'article 6 de la Convention de Londres de 1976 ; qu'ils ont obtenu l'autorisation de constituer le fonds à hauteur du plafond proposé par ordonnance du 27 avril 2009, puis prenant acte d'une décision de la chambre commerciale de la Cour de cassation rendue le 16 novembre 2010 ayant notamment décidé que la victime de lésions corporelles provoquées par un navire doit l'être dans la limite des deux plafonds d'indemnisation établis, l'un pour créances corporelles l'autre pour créances matérielles, ils ont accepté de porter le montant du fonds à 250.000 DTS, sur la base de la version ancienne des textes applicables aux plafonds de limitation de la responsabilité du propriétaire du bateau avant sa modification par le Protocole entré en vigueur en juillet 2007 ; que c'est donc de leur propre chef qu'ils ont fixé le montant du fonds à hauteur de l'ancien plafond légal, mais ce choix ne peut être opposé à la victime qui est fondée à invoquer les plafonds de limitation de responsabilité du skipper ou propriétaire du navire sur lequel elle a été accidentée, jusqu'à concurrence de leur montant légal soit 1.000.000 DTS pour le fonds des créances corporelles et 500.000 DTS pour les autres créances ; qu'en effet, la limitation de responsabilité en matière de créances maritimes porte atteinte au droit, reconnu aux victimes, d'obtenir la réparation intégrale de leur préjudice ; cette atteinte n'est tolérable qu'à la condition que les plafonds d'indemnisation soient régulièrement réévalués ; qu'aussi, l'application du barème en vigueur à la date de la décision créant le fonds d'indemnisation, constitue une solution équilibrée qui préserve la situation des victimes tout en permettant au propriétaire du navire de conserver le bénéfice d'une dérogation instituée dans son seul intérêt ; que dès lors si le fonds de 250.000 DTS peut être opposé jusqu'à concurrence de sa contre-valeur pécuniaire s'élevant à 284.157,50 € à toute action des créanciers sur ses autres biens mais au-delà jusqu'à la contre-valeur de 1.500.000 DTS, il doit néanmoins permettre le paiement de l'intégralité de la dette contractée par le propriétaire du navire à l'égard de la victime d'un accident survenu sur son navire et des organismes sociaux ; ALORS QUE pour être opposable aux créanciers maritimes, le plafond du fonds de limitation doit être constitué à concurrence du montant calculé selon les stipulations des articles 6 et 7 de la Convention de Londres du 19 novembre 1976 tel que modifiée par le Protocole du 2 mai 1996 ; qu'en disant que le fonds de limitation de responsabilité du voilier [...] est opposable pour un montant de 284 157,70 euros au créancier maritime, M. M..., et son assureur, la Maif, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations selon lesquelles le choix de Mme E..., de M. E... et de ses assureurs de fixer le montant du fonds de limitation à hauteur de l'ancien plafond légal de 250 000 DTS, soit 284 157,50 euros, ne pouvait pas être opposé à la victime qui était fondée à invoquer les plafonds de limitation de responsabilité du skipper ou propriétaire du navire jusqu'à concurrence de leur montant légal soit 1 000 000 DTS pour le fonds de créances corporelles et 500 000 DTS pour les autres créances, violant ainsi les articles 6 et 7 de la Convention de Londres du 19 novembre 1976 modifiée par le Protocole du 2 mai 1996 et les articles 58, 61 et 69 de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967.
Si l'organisateur d'une manifestation nautique maritime est tenu d'informer les participants sur l'existence, l'étendue et l'efficacité des assurances qu'il a souscrites afin qu'ils puissent, le cas échéant, souscrire des garanties individuelles couvrant leurs propres dommages ou leur responsabilité, son obligation d'information ne porte pas sur l'étendue et l'efficacité de l'assurance individuelle de responsabilité souscrite par le chef de bord, lequel, ne pouvant légitimement ignorer le régime de responsabilité personnelle auquel il est soumis et, notamment, le montant maximum des indemnités qui peuvent être mises à sa charge, doit lui-même se renseigner sur ce point, afin de souscrire l'assurance adéquate, sans pouvoir reprocher à l'organisateur l'erreur que celui-ci aurait pu commettre sur ce montant
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COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 772 FS-P+R Pourvoi n° F 18-25.768 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société GR, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° F 18-25.768 contre l'arrêt rendu le 12 septembre 2018 par la cour d'appel de Riom (3e chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à la société Groupe Dupessey, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. La société Groupe Dupessey a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société GR, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Groupe Dupessey, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fontaine, Fevre, conseillers, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, M. Blanc, Mme Bessaud, M. Boutié, Mmes Tostain, Bellino, conseillers référendaires, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 12 septembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 13 septembre 2017, pourvoi n° 16-12.093), à partir de 2008, la société GR (l'expéditeur) a confié à la société Groupe Dupessey (le transporteur) l'acheminement régulier de déchets de bois à destination de la société italienne Gruppo Trombini (le destinataire). Cette dernière, qui devait s'acquitter des factures du transporteur, a cessé de les payer à compter du mois de septembre 2011. L'expéditeur, dont la garantie a été sollicitée par le transporteur le 14 mars 2012, a payé les prestations des mois d'avril à octobre 2012. Après avoir mis en demeure le destinataire, le transporteur l'a assigné en paiement des prestations des mois de septembre 2011 à mars 2012, puis il a assigné l'expéditeur sur le fondement de l'article L. 132-8 du code de commerce. Invoquant une faute du transporteur, l'expéditeur a reconventionnellement demandé des dommages-intérêts et leur compensation avec la créance du transporteur. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi incident, pris en ses première et deuxième branches Enoncé du moyen 2. Le transporteur fait grief à l'arrêt de retenir sa faute et le principe de la compensation entre sa dette indemnitaire et la dette de l'expéditeur au titre de la garantie due au transporteur et de le condamner à payer à l'expéditeur une indemnité de 58 250 euros, alors : 1°/ « que ne constitue pas une faute le fait pour le transporteur de ne pas avertir l'expéditeur du défaut de paiement du destinataire avant d'exercer l'action en garantie du paiement du prix du transport prévue à l'article L. 132-8 du code de commerce ; que, pour retenir la responsabilité du transporteur à l'égard de l'expéditeur, la cour d'appel a relevé que le transporteur n'avait informé l'expéditeur qu'en mars 2012 du cumul d'impayés ; qu'en statuant ainsi, elle a violé les articles L. 132-8 du code de commerce et 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce ; 2°/ que le paiement du prix de transport réclamé par le voiturier à l'expéditeur sur le fondement de l'article L. 132-8 du code de commerce, qui n'est que l'exécution d'une obligation légale de garantie, ne peut constituer un préjudice indemnisable ; qu'en indemnisant l'expéditeur du préjudice résultant de ce que le transporteur aurait poursuivi les livraisons au destinataire malgré les difficultés de trésorerie avérées de ce dernier et sans avertir l'expéditeur, la cour d'appel a violé le texte précité et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 132-8 du code de commerce : 3. Aux termes de ce texte, la lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations contre l'expéditeur et le destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. 4. Ces dispositions excluent toute action de l'expéditeur ou du destinataire en responsabilité du transporteur pour avoir poursuivi des relations avec son donneur d'ordre en dépit des difficultés de paiement rencontrées ou sans les avoir informés de celles-ci. 5. Pour condamner le transporteur à payer à l'expéditeur une indemnité, l'arrêt retient qu'il doit lui être reproché, alors qu'il connaissait les difficultés avérées de paiement du destinataire dès le 23 décembre 2011, de ne pas avoir averti l'expéditeur et d'avoir, au contraire, au détriment de ce dernier, choisi d'exercer la garantie conférée par le contrat de transport le 14 mars 2012, et ce avant même d'avoir mis en demeure le destinataire le 11 avril suivant. 6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare la société GR irrecevable en sa demande tendant à ce qu'il soit statué sur le taux des intérêts mis à sa charge au titre de la condamnation au paiement prononcée au bénéfice de la société Groupe Dupessey, l'arrêt rendu le 12 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ; Condamne la société GR aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société GR et la condamne à payer à la société Groupe Dupessey la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société GR. Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Groupe Dupessey à payer à la SAS GR une indemnité de 58 250 € ; Aux motifs que « les contrats de transports routiers internationaux de marchandises sont régis par la Convention relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite « CMR », en date du 19 mai 1956, et le contrat litigieux relève de cette convention dès lors que le lieu de la prise en charge des marchandises et celui de leur livraison étaient situés dans deux pays différents, la France et l'Italie qui, tous les deux, ont adhéré à la CMR. Toutefois, dans la mesure où cette convention internationale, qui exclut l'application du droit national sauf pour les points qu'elle ne règle pas, n'a pas prévu cette action en garantie, les dispositions de l'article L. 132-8 du code de commerce, qui ouvrent au voiturier une action en garantie du paiement du prix du transport, qu'il peut exercer non seulement à l'encontre de l'expéditeur mais aussi du destinataire, ont vocation à s'appliquer au litige. Au regard de ces dispositions, il y a lieu de rechercher si le transporteur a commis un abus à l'occasion de l'exercice de sa garantie à l'encontre de l'expéditeur, pour l'avoir avisé tardivement de la défaillance du débiteur du prix de cette prestation, ou encore pour avoir fait preuve de négligence et de légèreté dans le recouvrement de sa créance aggravant ainsi la situation du garant. Les factures adressées par la société Groupe Dupessey à la société Gruppo Trombini Spa mentionnaient toutes qu'elles étaient payables à 30 jours et, c'est en vain que le transporteur vient, pour justifier un délai plus important, indiquer qu'une pratique différente, contraire à sa facturation, se serait instituée entre les parties avec des délais de paiement de 80 jours. La chronologie des faits et des échanges entre les parties montre que dans les relations entre le transporteur et la société Gruppo Trombini, les factures impayées se sont étalées sur la période du 16 septembre 2011 au 29 février 2012. Par une télécopie du 23 décembre 2011, intitulé « relance amiable pour retard de paiement », et lui rappelant les pénalités de retard prévues par l'article L. 441-6 du code de commerce, la société Groupe Dupessey a rappelé au destinataire des marchandises qu'il n'avait pas reçu le règlement des factures des 16 et 30 septembre 2011, pour un montant total de 50 370 € et lui a demandé de procéder à leur paiement dans un délai de huit jours. Par une lettre recommandée du 11 avril 2012, qui mentionnait de « nombreuses relances téléphoniques concernant le règlement de nos factures transport » et énonçait les références et les montants de sept factures représentant un montant total de 266 600 € et évoquait la visite, le 26 mars 2012, de l'un des représentants du transporteur dans les locaux du destinataire, qui se serait traduite par un engagement de transmission d'une proposition de règlement avec un échéancier, la société Groupe Dupessey a mis en demeure la société Gruppo Trombini Spa de la régler sous 72 heures à peine d'une saisine du tribunal de commerce de Lyon. Dans les relations du transporteur et de la société GR, et par une lettre recommandée en date du 14 mars 2012, la société Groupe Dupessey, invoquant des transports réalisés entre le 31 août 2011 et le 29 février 2012, ses factures et leur absence de règlement par la société Gruppo Trombini, a sollicité le bénéfice de la garantie et le paiement sous quinzaine d'une somme de 210 140 €. S'il ne peut utilement être reproché au transporteur, en raison de la nature des cargaisons constituées de déchets de bois en vrac, marchandise de faible valeur, de ne pas avoir exercé son droit de rétention qui aurait généré des frais importants, disproportionnés au regard du rapport entre la valeur de la cargaison et le prix unitaire de chacun des transports, lequel variait entre 580 et 630 € HT, il y a néanmoins lieu de s'interroger sur les conditions dans lesquelles il a engagé la garantie de la société GR. Compte tenu de l'ancienneté des relations des parties, initiées en 2008, et du volume des transports effectués, sa relance écrite, adressée par télécopie du 23 décembre 2011 à la société Gruppo Trombini alors même que l'arriéré déterminé en fonction des dates d'échéances portées sur les factures atteignait la somme de 103 790 €, ne peut être considérée comme tardivement fautive. En revanche, il doit être reproché au transporteur, qui connaissait les difficultés avérées de paiement de la société Gruppo Trombini dès cette époque, de ne pas en avoir averti la société GR et d'avoir, au contraire, au détriment de la société GR, choisi d'exercer la garantie conférée par le contrat de transport le 14 mars 2012, et ce avant même d'avoir mise en demeure la société Gruppo Trombini le 11 avril suivant. Cette négligence fautive a privé la société GR de la faculté de reconsidérer ses relations avec la société Gruppo Trombini et d'éviter l'augmentation des impayés à raison des prestations de transport qui ont été exécutées, passé le 23 décembre 2011, et dont le montant s'est établi : - décembre 2011 : 1 790 €, - janvier 2012 : 47 610 € ; - février 2012 : 8 850 €, soit au total la somme de : 58 250 €. Il en résulte que la décision du tribunal de commerce - qui n'a pas pris en considération le temps de latence qui devait nécessairement, en raison du délai d'échéance des factures, s'écouler entre l'information dispensée par la société GR et la faculté de modifier sa relation avec la société Gruppo Trombini, et qui se traduit par un impayé équivalent à un mois des prestations de transport exécutées dans ce même temps par la société Groupe Dupessey - doit être infirmée et que le transporteur sera condamné au paiement d'une indemnité de 58 250 €, venant par compensation, en déduction de sa propre créance » ; Alors, premièrement, que le transporteur qui, connaissant les difficultés du trésorerie du donneur d'ordre, poursuit ses prestations pendant plusieurs mois et laisse s'accroître le montant des impayés sans aviser en temps utile l'expéditeur de ces difficultés comme une faute en privant ce dernier de la possibilité de suspendre ses expéditions et d'éviter une augmentation des impayés ; que le préjudice réparable correspond à l'aggravation des impayés que cette faute a contribué à créer ; qu'après avoir relevé que la société Dupessey, qui connaissait « les difficultés avérées de paiement de la société Gruppo Trombini » dont l'arriéré atteignait la somme de 103 790 euros au 23 décembre 2011, avait commis une faute en s'abstenant d'en avertir la société GR et en choisissant « d'exercer la garantie conférée par le contrat de transport le 14 mars 2012, et ce avant même d'avoir mise en demeure la société Gruppo Trombini le 11 avril suivant », l'arrêt attaqué retient que cette faute avait seulement « privé la société GR de la faculté de reconsidérer ses relations avec la société Gruppo Trombini et d'éviter l'augmentation des impayés à raison des prestations de transport qui ont été exécutées passé le 23 décembre 2011 » ; qu'en limitant ainsi le préjudice subi par la société GR à l'aggravation des impayés depuis le 23 décembre 2011, date de la première relance écrite adressée par le voiturier à la société Gruppo Trombini, quand il résultait de ses propres constatations que les factures étaient à échéance de 30 jours et que le premier impayé était caractérisé depuis le 17 octobre 2011, la cour d'appel, qui n'en a pas tiré les conséquences légales, a violé les articles 1134, alinéa 3 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; Alors, deuxièmement, que la motivation d'un jugement doit être intelligible et faire apparaître clairement ou, à tout le moins, suivant une interprétation raisonnable, les faits et les règles de droit qui le justifient ; que pour réduire l'indemnité allouée en première instance à la société GR, l'arrêt attaqué retient qu'en raison « du délai d'échéance des factures », un « temps de latence » devait « nécessairement ( ) s'écouler entre l'information dispensée par la société GR et la faculté de modifier sa relation avec la société Gruppo Trombini, et qui se traduit par un impayé équivalent à un mois des prestations de transport exécutées dans ce même temps par la société Groupe Dupessey » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inintelligibles quant au lien de causalité et au préjudice allégué, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; Alors, enfin, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que pour infirmer le jugement et réduire à 58 250 € l'indemnité allouée à la société GR, l'arrêt attaqué retient que la négligence fautive de la société Groupe Dupessey l'avait privée « de la faculté de reconsidérer ses relations avec la société Gruppo Trombini et d'éviter l'augmentation des impayés à raison des prestations de transport qui ont été exécutées, passé le 23 décembre 2011, et dont le montant s'est établi : - décembre 2011 : 1 790 €, - janvier 2012 : 47 610 € ; - février 2012 : 8 850 €, soit au total la somme de : 58 250 € » ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de la facture du 31 décembre 2011 versée aux débats par la société Dupessey (pièce n° 6) que ses prestations réalisées entre le 23 décembre et le 31 décembre 2011 s'élevait à plus de 12 000 €, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé. Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Groupe Dupessey. IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir retenu la faute de la société Groupe Dupessey et le principe de la compensation entre la dette de la société GR au titre de la garantie due au transporteur et la dette indemnitaire de la société Groupe Dupessey ainsi que d'avoir condamné cette dernière à payer à la société GR une indemnité de 58 250 € ; AUX MOTIFS QUE « Toutefois, dans la mesure où cette convention internationale, qui exclut l'application du droit national sauf pour les points qu'elle ne règle pas, n'a pas prévu cette action en garantie, les dispositions de l'article L. 132-8 du code de commerce, qui ouvrent au voiturier une action en garantie du paiement du prix de transport, qu'il peut exercer non seulement à l'encontre de l'expéditeur mais aussi du destinataire, ont vocation à s'appliquer au litige. Au regard de ces dispositions, il y a lieu de rechercher si le transporteur a commis un abus à l'occasion de l'exercice de sa garantie à l'encontre de l'expéditeur, pour l'avoir avisé tardivement de la défaillance du débiteur du prix de cette prestation, ou encore pour avoir fait preuve de négligence et de légèreté dans le recouvrement de sa créance aggravant ainsi la situation du garant. Les factures adressées par la société GROUPE DUPESSY à la société GRUPPO TROMBINI mentionnaient toutes qu'elles étaient payables à 30 jours et, c'est en vain que le transporteur vient, pour justifier d'un délai plus important, indiquer qu'une pratique différente, contraire à sa facturation, se serait instituée entre les parties avec des délais de paiements de 80 jours [ ] S'il ne peut être utilement reproché au transporteur, en raison de la nature des cargaisons constituées de déchets de bois en vrac, marchandise de faible valeur, de ne pas avoir exercé son droit de rétention qui aurait généré des frais importants, disproportionnés au regard du rapport entre la valeur de la cargaison et le prix unitaire de chacun des transports, lequel variait entre 580 et 630 euros HT, il y a néanmoins lieu de s'interroger sur les conditions dans lesquelles il a engagé la garantie de la société GR. Compte tenu de l'ancienneté des relations des parties, initiées en 2008, et du volume des transports effectués, sa relance écrite, adressée par télécopie du 23 décembre 2011 à la société GRUPPO TROMBINI alors même que l'arriéré déterminé en fonction des dates d'échéances portées sur les factures atteignait la somme de 103 790 euros, ne peut être considérée comme tardivement fautive. En revanche, il doit être reproché au transporteur, qui connaissait les difficultés avérées de paiement de la société GRUPPO TROMBINI dès cette époque, de ne pas en avoir averti la société GR et d'avoir, au contraire, au détriment de la société GR, choisi d'exercer la garantie conférée par le contrat de transport le 14 mars 2012, et ce avant même d'avoir mis en demeure la société GRUPPO TROMBINI le 11 avril suivant. Cette négligence fautive a privé la société GR de la faculté de reconsidérer ses relations avec la société Gruppo Trombini et d'éviter l'augmentation des impayés à raison des prestations de transport qui ont été exécutées, passé le 23 décembre 2011, et dont le montant s'est établi : - décembre 2011 : 1 790 €, - janvier 2012 : 47 610 €, - février 2012 : 8 850 €, soit au total la somme de : 58 250 € » (arrêt attaqué, p. 7 avant-dernier § à p. 8 § 1 et p. 8 § 5 à dernier §) ; 1°) ALORS QUE ne constitue pas une faute le fait pour le transporteur de ne pas avertir l'expéditeur du défaut de paiement du destinataire avant d'exercer l'action en garantie du paiement du prix du transport prévue à l'article L. 132-8 du Code de commerce ; que, pour retenir la responsabilité de la société Groupe Dupessey à l'égard de la société GR, la cour d'appel a relevé que le transporteur n'avait informé l'expéditeur qu'en mars 2012 du cumul d'impayés ; qu'en statuant ainsi, elle a violé les articles L. 132-8 du Code de commerce et 1147 du Code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce ; 2°) ALORS QUE le paiement du prix de transport réclamé par le voiturier à l'expéditeur sur le fondement de l'article L. 132-8 du Code de commerce, qui n'est que l'exécution d'une obligation légale de garantie, ne peut constituer un préjudice indemnisable ; qu'en indemnisant l'expéditeur du préjudice résultant de ce que le transporteur aurait poursuivi les livraisons au destinataire malgré les difficultés de trésorerie avérées de ce dernier et sans avertir l'expéditeur, la Cour d'appel a violé le texte précité et l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce ; 3°) ALORS QU'en tout état de cause, la faute consistant pour le transporteur à ne pas avertir l'expéditeur des retards de paiement du destinataire suppose un retard de paiement par rapport au délai de paiement habituel entre les parties ; qu'en considérant que la date à laquelle le transporteur devait avertir l'expéditeur des retards de paiement du destinataire devait être fixée en fonction du délai de paiement de trente jours figurant sur les factures sans s'expliquer sur la circonstance que le destinataire payait habituellement à quatre-vingt jours depuis plusieurs années, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 132-8 du Code de commerce et 1147 du Code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce ; 4°) ALORS QU'en tout état de cause, la société Groupe Dupessey faisait valoir (conclusions p. 14) qu'entre avril et octobre 2012, la société GR avait poursuivi ses transports à destination de la société Gruppo Trombini en prenant à sa charge le paiement du coût du transport, ce dont il résultait qu'il n'existait pas de lien de causalité entre les fautes reprochées à la société Groupe Dupessey et le préjudice de la société GR, consistant dans l'obligation de régler les factures impayées par la société Gruppo Trombini, l'expéditeur souhaitant, malgré le défaut de paiement du destinataire, poursuivre les transports et en assumer le règlement ; qu'en retenant cependant la responsabilité de la société Groupe Dupessey, sans s'expliquer sur cette circonstance, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 132-8 du Code de commerce et 1147 du Code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce ; 5°) ALORS QU'en tout état de cause, l'absence d'information du transporteur vis-à-vis de l'expéditeur quant au défaut de règlement du prix du transport par le destinataire ne peut créer, en toute hypothèse, qu'une perte de chance de limiter le nombre de transports impayés, l'expéditeur pouvant choisir de poursuivre les transports malgré le défaut de paiement du destinataire ; que, de même, l'absence de tentative de recouvrement des factures impayées auprès du destinataire ne peut créer qu'une perte de chance d'obtenir le règlement des sommes dues ; qu'en condamnant cependant le transporteur à indemniser l'expéditeur de l'intégralité du prix du transport, à compter de la date à laquelle le comportement du transporteur a été estimé fautif, la cour d'appel a violé les articles L. 132-8 du Code de commerce et 1147 du Code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce.
Aux termes de l'article L. 132-8 du code de commerce, la lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations contre l'expéditeur et le destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. Ces dispositions excluent toute action de l'expéditeur ou du destinataire en responsabilité du transporteur pour avoir poursuivi des relations avec son donneur d'ordre en dépit des difficultés de paiement rencontrées ou sans les avoir informés de celles-ci
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COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 774 FS-P Pourvoi n° V 19-11.525 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société Banque de Polynésie, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° V 19-11.525 contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2017 par la cour d'appel de Papeete (chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Faukura, société civile professionnelle, dont le siège est [...] , 2°/ à M. T... L..., domicilié [...] , pris en qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la société Faukura, 3°/ à la Société de développement de Moorea (SDM), dont le siège est [...] , 4°/ à la société Banque de Tahiti, dont le siège est [...] , 5°/ à la société Verohia, société civile immobilière, dont le siège est chez M. G... C..., [...] , 6°/ à M. Q... X..., domicilié [...] ), 7°/ à Mme E... I..., épouse X..., domiciliée [...] ), 8°/ à M. T... L..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la Société de développement de Moorea, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Banque de Polynésie, de la SCP Colin-Stoclet, avocat de la société Faukura, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fontaine, Fevre, conseillers, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, M. Blanc, Mmes Kass-Danno, Bessaud, M. Boutié, Mmes Tostain, Bellino, conseillers référendaires, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Papeete, 23 novembre 2017), par trois actes authentiques du 2 février 2007, la société Faukura a constitué, sous la forme d'un « cautionnement hypothécaire », une sûreté réelle sur un terrain, au bénéfice de la Banque de Polynésie (la banque), en garantie de trois emprunts contractés auprès de celle-ci par la Société de développement de Moorea (la SDM). 2. La SDM a été mise en liquidation judiciaire le 28 novembre 2011. 3. Le 9 décembre 2013, la banque a fait délivrer à la société Faukura un commandement de payer le solde des emprunts ou de délaisser l'immeuble, puis, le 19 février 2014, une sommation de prendre connaissance du cahier des charges en vue de la vente forcée de l'immeuble. 4. Le 13 octobre 2014, la société Faukura a elle-même été mise en redressement judiciaire, M. L... étant désigné en qualité de représentant des créanciers. 5. La société Faukura a demandé que soit constaté l'arrêt de la procédure de saisie immobilière en raison de l'ouverture de la procédure collective. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 6. La banque fait grief à l'arrêt de constater l'arrêt de la procédure de saisie immobilière qu'elle a engagée contre la société Faukura, alors « que la règle de l'arrêt des voies d'exécution prévue par l'article L. 621-40 du code de commerce dans sa version applicable à la Polynésie française, ne s'applique qu'aux voies d'exécution engagées par les créanciers du débiteur en difficulté dont les créances ont une origine antérieure au jugement d'ouverture ; qu'une sûreté réelle consentie pour garantir la dette d'autrui n'impliquant aucun engagement personnel à satisfaire l'obligation d'autrui, le créancier qui poursuit la réalisation d'une telle sûreté ne peut se voir opposer la règle de l'arrêt des voies d'exécution en cas de placement du constituant sous l'empire d'une procédure collective faute de pouvoir être considéré comme un « créancier » du débiteur en difficulté ; qu'en décidant au contraire que la procédure de saisie immobilière engagée par la banque à l'encontre de la société Faukura, qui avait hypothéqué son immeuble en garantie de la dette d'un tiers, était soumise à la règle de l'arrêt des voies d'exécution au motif que la banque était créancière de la société Faukura et que sa « créance » était antérieure à l'ouverture de la procédure de cette société, la cour d'appel a violé l'article susvisé. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 621-40 et L. 621-42 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 et l'article 2169 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 23 mars 2006 : 7. Une sûreté réelle, consentie pour garantir la dette d'un tiers, n'impliquant aucun engagement personnel du constituant de cette sûreté à satisfaire à l'obligation d'autrui, le bénéficiaire d'une telle sûreté ne peut agir en paiement contre le constituant, qui n'est pas son débiteur, et, n'ayant pas acquis la qualité de créancier, il n'est pas soumis à l'arrêt ou l'interdiction des voies d'exécution qui, en application du premier des textes susvisés, résultent de l'ouverture de la procédure collective du constituant. Par conséquent, il peut poursuivre ou engager une procédure de saisie immobilière contre le constituant, après avoir mis en cause l'administrateur et le représentant des créanciers. 8. Pour constater l'arrêt de la procédure de saisie immobilière diligentée par la banque, l'arrêt retient que celle-ci a fait délivrer une sommation de payer à la société Faukura et que l'action ainsi exercée contre cette société tendait au paiement d'une somme d'argent même si la banque n'avait d'action que sur l'immeuble affecté en garantie des emprunts contractés par la SDM. Il retient encore qu'il est de l'essence de la procédure de redressement judiciaire de soumettre l'ensemble des créanciers antérieurs à un régime unique en garantissant que les actifs de l'entreprise ne seront pas « préemptés » tant que la faisabilité d'un plan n'a pas été examinée. 9. En statuant ainsi, alors que, la banque, n'ayant pas la qualité de créancier de la société Faukura mise en redressement judiciaire, n'était pas soumise à la règle de l'arrêt des voies d'exécution résultant de l'ouverture de cette procédure collective, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il constate l'arrêt de la procédure de saisie immobilière dirigée par la Banque de Polynésie contre la société Faukura et rejette les demandes de la Banque de Polynésie tendant à la validation de la surenchère et à la poursuite de la procédure, l'arrêt rendu le 23 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée ; Condamne la société Faukura aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Banque de Polynésie. Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR constaté l'arrêt de la procédure de saisie immobilière diligentée par la Banque de Polynésie contre la SCP Faukura, placée en redressement judiciaire par le tribunal de première instance le 13 octobre 2014. AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Aux termes des dispositions des articles L. 621-40 à L. 621-42 du code de commerce telles qu'applicables en Polynésie française : Le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire suspend ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent. Il arrête ou interdit également toute voie d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles. Les instances en cours sont suspendues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le représentant des créanciers et, le cas échéant, l'administrateur dûment appelé, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant. Les actions en justice et les voies d'exécution autres que celles précitées sont poursuivies au cours de la période d'observation à l'encontre du débiteur, après mise en cause de l'administrateur et du représentant des créanciers ou après une reprise d'instance à leur initiative. Les dispositions des articles L. 621-43 et suivants imposent, à peine de forclusion, la déclaration des créances qui ont leur origine antérieurement au jugement d'ouverture. Les créanciers titulaires d'une sûreté ayant fait l'objet d'une publication ou d'un contrat de crédit-bail publié sont avertis personnellement et, s'il y a lieu, à domicile élu. La déclaration porte le montant de la créance due au jour du jugement d'ouverture avec indication des sommes à échoir et de la date de leurs échéances. Elle précise la nature du privilège ou de la sûreté dont la créance est éventuellement assortie. Le créancier, porteur d'engagements souscrits, endossés ou garantis solidairement par deux ou plusieurs coobligés soumis à une procédure de redressement judiciaire, peut déclarer sa créance pour la valeur nominale de son titre, dans chaque procédure (art. L 621-51). Par exploit signifié le 13 décembre 2013, la BANQUE DE POLYNÉSIE a fait sommation à la SCP Faukura de lui payer dans les trente jours la somme totale de 38 195 962 F CFP représentant les sommes dues par la S.A.R.L. SDM en liquidation judiciaire au titre de trois prêts, ou de délaisser l'immeuble affecté à titre de caution réelle à la sûreté de cette créance. L'action ainsi exercée par la BANQUE DE POLYNÉSIE à l'égard de la SCP Faukura tendait par conséquent au paiement d'une somme d'argent, même si la banque n'avait d'action que sur l'immeuble affecté par la SCP FAUKURA en garantie des emprunts souscrits par la société SDM. Cette demande a pour objet une créance dont l'origine est antérieure au jugement d'ouverture de la procédure du redressement judiciaire de la SCP Faukura, qui est en date du 13 octobre 2013. Le débiteur principal, la société SDM, était en effet en liquidation judiciaire depuis le 28 novembre 2011. La BANQUE DE POLYNÉSIE, qui avait déclaré sa créance, lui a fait signifier un commandement préalable à saisie immobilière contre cautions solidaires in bonis. Le jugement dont appel a exactement retenu que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la SCP FAUKURA était exécutoire immédiatement après son prononcé et s'imposait à tous sans qu'il soit nécessaire de le signifier. Ce jugement a ordonné les notifications et mesures de publicité prévues par la loi. La BANQUE DE POLYNÉSIE a ensuite déclaré ses créances au redressement judiciaire. Le redressement judiciaire de la SCP Faukura a produit ses effets de droit nonobstant les dispositions du jugement rendu antérieurement le 4 juin 2014 par le tribunal civil de première instance en matière de saisie immobilière. Le jugement dont appel a à bon droit retenu qu'en cet état, la procédure de saisie immobilière engagée par la BANQUE DE POLYNÉSIE à l'encontre de la SCP Faukura a été arrêtée par l'effet du jugement du 13 octobre 2014 ayant placé cette dernière en redressement judiciaire. Le premier juge a pertinemment constaté que les dispositions de l'article L. 621-40 du code de commerce sont d'ordre public et qu'elles ne prévoient aucune exception. En effet, il est de l'essence de la procédure de redressement judiciaire de soumettre l'ensemble des créanciers antérieurs à un régime unique de poursuites, tout en garantissant que les actifs de l'entreprise ne seront pas préemptés tant que la faisabilité d'un plan de redressement ou de cession n'a pas été examinée. C'est ainsi qu'il est jugé que lorsqu'une procédure de saisie immobilière était en cours au moment du jugement d'ouverture de la procédure, et qu'au mépris de celle-ci, l'adjudication est néanmoins intervenue, celle-ci est nulle et la procédure doit être reprise conformément aux dispositions spéciales prévues par le droit des procédures collectives (Com. 24 oct. 1995 B IV n° 247). Et même lorsque, comme en l'espèce, l'adjudication a été prononcée, mais qu'une surenchère est intervenue, en l'absence d'adjudication définitive de l'immeuble avant le jugement d'ouverture du redressement judiciaire du saisi, la procédure de saisie immobilière en cours à son encontre est arrêtée (Com. 4 mars 2014 B IV n° 43). Le jugement sera par conséquent confirmé. La BANQUE DE POLYNÉSIE conclut néanmoins à bon droit que le premier juge n'a pas été saisi des moyens d'annulation de ses sûretés que présentent devant la cour le débiteur et le représentant des créanciers intimés, et qu'il n'y a pas lieu de statuer dans la présente instance, en matière de procédure de saisie immobilière, sur les créances du saisissant, qui font d'ailleurs l'objet d'un autre appel suite à une décision du juge-commissaire. La solution du présent appel motive qu'il soit dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer dans l'attente du jugement de ce recours L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française » ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Aux termes de l'article L. 621-40-11 le jugement d'ouverture arrête ou interdit également toute voie d'exécution de la part des créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles. Cet article, dont les dispositions sont d'ordre public et qui ne prévoit aucune exception au principe d'arrêt du droit de poursuite individuel des créanciers au moment de l'ouverture d'une procédure collective en faveur de leur débiteur, doit recevoir application en l'espèce puisque l'instance de saisie immobilière était en cours au moment de l'ouverture du redressement judiciaire. Par voie de conséquence, la procédure de saisie immobilière ne peut être momentanément poursuivie à l'encontre de la SCP FAUKURA. Aucun des moyens avancés par la BANQUE DE POLYNESIE ne résistant à l'analyse il y a lieu de constater l'arrêt de la procédure de saisie immobilière diligentée par la BANQUE DE POLYNESIE contre la SCP Faukura, étant précisé que les poursuites pourront éventuellement être reprises, dans leurs derniers errements, dans les conditions prévues par l'article L. 622-16 alinéa 2 du Code de commerce en cas de conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ». 1°) ALORS QUE la règle de l'arrêt des voies d'exécution prévue par l'article L. 621-40 du code de commerce dans sa version applicable à la Polynésie Française, ne s'applique qu'aux voies d'exécution engagées par les créanciers du débiteur en difficulté dont les créances ont une origine antérieure au jugement d'ouverture ; qu'une sûreté réelle consentie pour garantir la dette d'autrui n'impliquant aucun engagement personnel à satisfaire l'obligation d'autrui, le créancier qui poursuit la réalisation d'une telle sûreté ne peut se voir opposer la règle de l'arrêt des voies d'exécution en cas de placement du constituant sous l'empire d'une procédure collective faute de pouvoir être considéré comme un « créancier » du débiteur en difficulté ; qu'en décidant au contraire que la procédure de saisie immobilière engagée par la Banque de Polynésie à l'encontre de la SCP Faukura, qui avait hypothéqué son immeuble en garantie de la dette d'un tiers, était soumise à la règle de l'arrêt des voies d'exécution au motif que la Banque de Polynésie était créancière de la SCP Faukura et que sa « créance » était antérieure à l'ouverture de la procédure de la SCP Faukura, la Cour d'appel a violé l'article L. 621-40 du code de commerce dans sa version applicable en Polynésie Française ; 2°) ALORS QUE si le créancier titulaire d'une sûreté réelle pour autrui est tenu, en application du droit en vigueur en Polynésie Française, de faire délivrer au constituant un commandement de payer ou de délaisser le bien avant d'engager une procédure de saisie, le désintéressement du créancier ne constitue qu'une faculté offerte au constituant et ne saurait investir le créancier poursuivant de la qualité de créancier, a fortiori lorsque le constituant a refusé d'exercer cette faculté ; qu'en se fondant sur la circonstance que la Banque de Polynésie avait adressé à la SCP Faukura un commandement de payer ou de délaisser le bien pour retenir que la règle de l'arrêt des voies d'exécution était applicable à la procédure de saisie immobilière engagée par la Banque de Polynésie après l'échec de ce commandement, la Cour d'appel a violé les articles L. 621-40 du code de commerce et 2169 du code civil dans leur version applicable en Polynésie Française ; 3°) ALORS enfin QUE le champ d'application de la règle de l'arrêt des voies d'exécution est exclusivement défini par les dispositions pertinentes du code de commerce, qui sont d'ordre public ; qu'en opposant dès lors à la Banque de Polynésie la règle de l'arrêt des voies d'exécution au motif inopérant qu'il existerait un intérêt à soumettre l'ensemble des « créanciers » à un régime unique et de garantir que les actifs de l'entreprise ne soient pas préemptés tant que la faisabilité d'un plan de redressement ou de cession n'est pas examinée, la Cour d'appel a violé l'article L. 621-40 du code de commerce dans sa version applicable en Polynésie Française.
Une sûreté réelle, consentie pour garantir la dette d'un tiers, n'impliquant aucun engagement personnel du constituant de cette sûreté à satisfaire à l'obligation d'autrui, le bénéficiaire d'une telle sûreté ne peut agir en paiement contre le constituant, qui n'est pas son débiteur, et, n'ayant pas acquis la qualité de créancier, il n'est pas soumis à l'arrêt ou l'interdiction des voies d'exécution qui, en application du premier des textes susvisés, résultent de l'ouverture de la procédure collective du constituant. Par conséquent, pour réaliser l'immeuble objet de la sûreté, il peut poursuivre ou engager une procédure de saisie immobilière contre le constituant, après avoir mis en cause l'administrateur et le représentant des créanciers
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SOC. IK COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle M. SCHAMBER, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1106 F-D Pourvois n° W 19-11.526 X 19-11.527 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société Côté jardin, société anonyme à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé les pourvois n° W 19-11.526 et X 19-11.527 contre deux arrêts rendus le 28 novembre 2018 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale A) dans les litiges l'opposant respectivement à : 1°/ M. B... S..., domicilié [...] , 2°/ M. N... T..., domicilié [...] , défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de ses pourvois, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Munier-Apaire, avocat de la société Côté jardin, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de MM. S... et T..., après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller rapporteur référendaire, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° W 19-11.526 et X 19-11.527 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Lyon, 28 novembre 2018), MM. S... et T... ont été engagés par la société Côté jardin en qualité d'ouvriers paysagistes. 3. Ils ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes. Examen des moyens, communs aux pourvois Sur le second moyen, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable. Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 5. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner au paiement de rappels de salaires outre congés payés afférents au titre du temps de trajet alors : « 1°/ que le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; que le temps de trajet entre le siège et le chantier et entre le chantier et le siège ne constitue du temps de travail effectif rémunéré comme tel que si le salarié est contraint par l'employeur à se rendre au siège de l'entreprise avant d'être transporté sur le chantier ainsi qu'après sa journée de travail ; que pour condamner en l'espèce l'employeur à un rappel de salaires correspondant au temps de trajet effectué par le salarié, la cour d'appel a affirmé que le salarié avait l'obligation de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier puis après avoir quitté celui-ci, de sorte qu'il se trouvait à la disposition de l'employeur et que le temps de trajet siège-chantier et chantier-siège devait être rémunéré comme du temps de travail effectif, en retenant une note de service en date du 24 novembre 2015, des attestations de cinq collègues du salarié et de témoignages de clients mais sans rechercher ni vérifier, comme elle y était pourtant invitée par l'employeur, si précisément le salarié avait, dans son contrat de travail, choisi l'option ''de se rendre au siège de l'entreprise ou dans ses dépôts pour être transporté ensuite sur les chantiers par des moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise'', ce dont il se déduisait qu'il avait lui-même choisi de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier, ce qui ce qui excluait qu'il y ait été contraint par une décision unilatérale de la société; qu'ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1 et L. 3121-4 du code du travail et L. 713-5 du code rural ainsi que de l'article 6 de l'accord interprofessionnel du 23 décembre 1981, des dispositions du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 et de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ; 2°/ que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que pour condamner la société à un rappel de salaires correspondant au temps de trajet effectué par le salarié, la cour d'appel a relevé que dans une note de service de l'employeur en date du 24 novembre 2015, l'employeur indiquait ''que lors de votre passage après votre journée de travail, vous devez imprimer votre fiche de chantier de la journée et la déposer sur le bureau du conducteur de travaux [et] selon le chantier, les instructions seront données par celui-ci ou le chef d'entreprise pour l'organisation du lendemain ( )'' ; qu'en déduisant de cette note que les salariés avaient l'obligation de passer au dépôt le matin pour recevoir les instructions et le soir pour déposer la fiche de chantier de la journée, quand ce document prévoyait le passage du salarié au dépôt seulement après sa journée de travail et non le matin avant de se rendre sur le chantier, la cour d'appel a dénaturé ce document en violation des articles 4 et 16 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 6. Abstraction faite des motifs critiqués par la deuxième branche, le moyen ne tend qu'à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond de la valeur et de la portée des éléments produits et qui, procédant à la recherche prétendument omise, en ont déduit, sans se fonder sur la seule note de service du 24 novembre 2015, que les salariés avaient l'obligation de se rendre au siège de l'entreprise avant leur départ sur le chantier et à leur retour du chantier en sorte que ces temps de trajet devaient être considérés comme du temps de travail effectif. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 8. L'employeur fait grief aux arrêts de le débouter de sa demande de remboursement d'indemnités de trajet, alors « que dans l'hypothèse où le temps de trajet est qualifié de temps de travail effectif, la rémunération perçue par le salarié à ce titre ne peut se cumuler avec les indemnités de petits déplacements prévues par l'article 6 du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 ; qu'en rejetant la demande de la société en remboursement des indemnités de petits déplacements au prétexte erroné que l'indemnité prévue par la convention collective nationale des entreprises du paysage, qui a un caractère forfaitaire, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-1 et L. 3121-4 du code du travail, l'article L. 713-5 du code rural, l'article 6 de l'accord interprofessionnel du 23 décembre 1981 et les dispositions du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 3121-1, L. 3121-4 du code du travail, L. 713-5 du code rural et de la pêche maritime dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, le chapitre III des dispositions particulières propres aux ouvriers et aux employés de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008, dans sa version antérieure à celle issue de l'avenant n° 27 du 29 novembre 2019 : 9. Le chapitre III des dispositions particulières propres aux ouvriers et aux employés de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 prévoit que le temps normal de trajet pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail, soit le chantier, n'est pas un temps de travail effectif. 10. L'article 6 de ce chapitre, qui se rapporte à l'indemnisation pour petits déplacements, dispose qu'est réputé constituer un temps normal de trajet celui qui éloigne les salariés de moins de 50 km du siège, de l'agence ou du dépôt. Il ajoute que le salarié, qui se rend sur les chantiers par les moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise au siège ou dans l'un de ses dépôts, est indemnisé, dans la limite du temps de trajet normal, de manière globale de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement déterminée en fonction de l'éloignement et qu'au-delà du temps normal de trajet, il est en outre rémunéré pour le trajet restant comme s'il s'agissait d'un temps de travail. 11. Il en résulte que, lorsque le temps de trajet est considéré comme du temps de travail effectif en raison de l'obligation faite au salarié de se rendre au siège de l'entreprise à l'aller puis au retour du chantier, le salarié ne peut percevoir, en sus de sa rémunération, l'indemnité conventionnelle globale de petit déplacement versée uniquement lorsque le temps de trajet n'est pas considéré comme du temps de travail effectif. 12. Pour débouter l'employeur de sa demande de remboursement de l'indemnité de petits déplacements, dénommée indemnité de trajet par l'employeur, les arrêts retiennent que l'indemnité de trajet prévue par la convention collective, qui a un caractère forfaitaire, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé. 13. En statuant ainsi, alors qu'elle avait considéré que le temps de trajet était un temps de travail effectif, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils déboutent la société Côté jardin de sa demande de remboursement d'indemnités de trajet, les arrêts rendus le 28 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; Remet, sur ce point, les affaires et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ; Condamne MM. S... et T... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits, au pourvoi n° W 19-11.526, par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Côté jardin PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Côté Jardin à payer au salarié diverses sommes à titre de rappel de salaire correspondant au temps de trajet non rémunéré au cours des années 2010 à 2015 et de l'AVOIR déboutée de sa demande subsidiaire en remboursement des indemnités de trajet ; AUX MOTIFS QUE « sur la demande de rappel de salaire au titre des temps de trajet : aux termes des dispositions de l'article L.3121-1 du code du travail, ‘la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles' ; en application des articles L.713-5 du code rural et L.3121-4 du code du travail, ‘le temps de déplacement professionnel pour sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif. Toutefois, Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière déterminée par convention ou accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'ils existent. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail ne doit pas entraîner de perte de salaire.' ; en vertu de l'article 6.2 de l'accord national du 23 décembre 1981 concernant la durée du travail dans les exploitations et entreprises agricoles et rattaché à la convention collective nationale des entreprises agricoles, ‘Même lorsqu'ils font l'objet d'une rémunération en application de stipulations conventionnelles ou contractuelles ou conformément aux usages, ne sont pas considérés comme travail effectif le temps nécessaire à la restauration et les temps consacrés aux pauses, ainsi qu'aux trajets entre le siège de l'entreprise ou de l'établissement et le lieu de travail lorsque les critères définis à l'alinéa 2 de l'article 6.1 ci –dessus ne sont pas réunis' ; l'article 6 de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 étendue le 16 mars 2009 prévoit également pour les ouvriers de chantier exécutant un travail non sédentaire qui ne se rattache pas à un lieu de travail unique et définitif que le temps normal de trajet pour se rendre sur le lieu d'exécution du travail, soit le chantier, n'est pas un temps de travail effectif et que l'indemnisation pour les petits déplacements (moins de 50 km du siège) est fixée à un montant variable en fonction de la distance ; ainsi, l'article 6 énonce qu'a) est réputé constituer un temps normal de trajet celui qui éloigne les salariés de moins de 50 km du siège, de l'agence ou du dépôt. b) Le salarié qui se rend par ses propres moyens sur le chantier assigné par son employeur perçoit pour ses frais de repas, s'il ne déjeune ni à l'entreprise ni à son domicile, une indemnité de panier, d'un montant égal à la valeur de 2,5 MG en vigueur au 1er janvier de l'année en cours. c) Le salarié qui se rend sur les chantiers par les moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise au siège ou dans l'un de ses dépôts est indemnisé dans les conditions suivantes : - Dans la limite du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est globalement indemnisé de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement fixée comme suit : - dans un rayon de 0 à 5 km du siège ou du dépôt jusqu'au chantier 3 MG - dans un rayon de plus de 5 km jusqu'à 20 km 4 MG - dans un rayon de plus de 20 km jusqu'à 30 km 5 MG - dans un rayon de 30 km jusqu'à 50 km 6 MG ( ) Au-delà du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est, en outre, rémunéré pour le trajet restant comme s'il s'agissait d'un temps de travail. L'appréciation, en durée, du temps normal de trajet de petit déplacement est déterminée par accord collectif d'entreprise ou à défaut par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel s'ils existent.' ( )' ; En revanche, lorsque l'employeur oblige les salariés à se présenter au dépôt avant de partir sur le chantier, le temps de travail effectif doit être décompté à partir de son arrivée au dépôt et le temps de trajet pour se rendre sur le chantier et en revenir, notamment pour charger du matériel, doit être décompté comme du temps de travail effectif ; le document de décompte du temps de travail du salarié doit en conséquence indiquer l'heure d'arrivée au dépôt comme étant l'heure de début de la journée de travail ; en ce cas, l'obligation conventionnelle d'indemniser les trajets réalisés par les salariés se cumule avec l'obligation légale de rémunérer le temps de trajet lorsque ce dernier constitue un temps de travail effectif ; en l'espèce, l'employeur a pris une note de service en date du 24 novembre 2015 rédigée en ces termes : ‘nous vous rappelons que lors de votre passage au dépôt après votre journée de travail, vous devez imprimer votre fiche de chantier de la journée et la déposer sur le bureau du conducteur de travaux. Selon le chantier, les instructions seront données par celui-ci ou le chef d'entreprise pour l'organisation du lendemain ( )' ; ainsi, il est établi que les salariés avaient bien l'obligation de passer au dépôt le matin pour recevoir les instructions et le soir pour déposer la fiche de chantier de la journée ; cinq collègues de travail de Monsieur S... ont attesté, dans des témoignages datés de février 2017, qu'ils avaient l'obligation de se rendre au dépôt le matin afin de récupérer le planning de la journée, préparer les pièces nécessaires et y repasser le soir après le chantier pour effectuer un bilan de la journée ; Monsieur C... atteste en ces termes : ‘lors de la signature de mon premier contrat en CDD le 18/03/13, Monsieur W... L... m'a demandé de signer une feuille qui proposait deux cas de figure. Soit d'aller au chantier par mes propres moyens, soit d'aller à l'entreprise avec mon véhicule personnel puis d'aller au chantier avec le camion e l'entreprise. Je n'ai pas eu le choix, j'ai signé le cas n°2. Cependant lorsque le chantier était proche de chez moi, j'ai demandé l'autorisation de prendre mon véhicule personnel pour aller de l'entreprise au chantier. Je devais dans tous les cas passer par l'entreprise le matin afin de charge le camion pour aider mes collègues à charger le camion avec le matériel. Cette configuration a continué une fois que j'ai signé mon CDI'. ; Monsieur Q... K..., salarié de la société COTE JARDIN du 30 janvier 2009 au 15 mars 2013, atteste également que ‘ ( ) l'organisation mise en place par Monsieur L... obligeait Monsieur S... B... à se rendre au dépôt le matin pour amener le matériel, les engins et le personnel sur le chantier et à les ramener le soir au dépôt' ; des clients de la société indiquent que Monsieur S..., conducteur d'un véhicule avec benne amovible, était chargé d'apporter le matériel ainsi que les outils sur les chantiers et de transporter ses collègues ; par courrier du 10 février 2017, le contrôleur du travail a indiqué à Monsieur F..., l'un des salariés de la société, que lorsque les conducteurs ainsi que les salariés sont obligés de passer par le dépôt avant de se rendre sur le chantier, il convient d'une part de rémunérer leur temps de trajet comme du temps de travail effectif, d'autre part, de leur appliquer le barème d'indemnisation prévu par l'article 6 de la convention collective nationale des entreprises du paysage pour les petits déplacements ; l'employeur, qui invoque le questionnaire qu'il a remis aux salariés leur demandant d'opérer le choix suivant : se rendre directement sur les chantiers ou décider de se rendre au siège, auquel cas ils bénéficieront d'indemnités de petit déplacement, et le fait que les auteurs des attestations ont choisi la deuxième option, ne démontre pas que le salarié avait d'autre choix que celui qui lui était ainsi offert reprenant l'article 6 de la convention collective ; il résulte de l'ensemble de ces éléments que Monsieur S... avait bien l'obligation de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier puis après avoir quitté celui-ci, de sorte qu'il se trouvait la disposition de l'employeur et que le temps de trajet siège-chantier et chantier-siège devait être rémunéré comme du temps de travail effectif ; or, l'indemnité de trajet prévue par la convention collective nationale des entreprises du paysage, qui a un caractère forfaitaire, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé ; ainsi, le salarié est bien fondé à solliciter le maintien du bénéfice des dispositions relatives à l'indemnisation conventionnelle des petits déplacements et le rappel de salaire, conformément aux calculs présentés dans ses conclusions ; il y a donc lieu de condamner la société COTE JARDIN à payer au salarié les sommes suivantes : - 549 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2010, outre 54,90 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.025,72 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2011, outre 102,57 euros à titre de congés payés afférents ; - 695,64 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2012, outre 69,56 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.163,83 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2013, outre 116,38 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.128,359 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2014, outre 112,83 euros à titre de congés payés afférents ; - 320,12 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2015, outre 32,01 euros à titre de congés payés afférents ; Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes ; la demande subsidiaire en remboursement des indemnités de trajet sera par voie de conséquence rejetée » ; 1°) ALORS QUE le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; que le temps de trajet entre le siège et le chantier et entre le chantier et le siège ne constitue du temps de travail effectif rémunéré comme tel que si le salarié est contraint par l'employeur à se rendre au siège de l'entreprise avant d'être transporté sur le chantier ainsi qu'après sa journée de travail ; que pour condamner en l'espèce l'employeur à un rappel de salaires correspondant au temps de trajet effectué par le salarié, la cour d'appel a affirmé que M. S... avait l'obligation de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier puis après avoir quitté celui-ci, de sorte qu'il se trouvait à la disposition de l'employeur et que le temps de trajet siège-chantier et chantier-siège devait être rémunéré comme du temps de travail effectif, en retenant une note de service en date du 24 novembre 2015, des attestations de cinq collègues du salarié et de témoignages de clients mais sans rechercher ni vérifier, comme elle y était pourtant invitée par l'employeur, si précisément le salarié avait, dans son contrat de travail, choisi l'option « de se rendre au siège de l'entreprise ou dans ses dépôts pour être transporté ensuite sur les chantiers par des moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise », ce dont il se déduisait qu'il avait lui-même choisi de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier, ce qui ce qui excluait qu'il y ait été contraint par une décision unilatérale de la société Côté Jardin ; qu'ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.3121-1 et L.3121-4 du code du travail et L.713-5 du code rural ainsi que de l'article 6 de l'accord interprofessionnel du 23 décembre 1981, des dispositions du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 et de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ; 2°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que pour condamner la société Côté Jardin à un rappel de salaires correspondant au temps de trajet effectué par le salarié, la cour d'appel a relevé que dans une note de service de l'employeur en date du 24 novembre 2015, l'employeur indiquait « que lors de votre passage après votre journée de travail, vous devez imprimer votre fiche de chantier de la journée et la déposer sur le bureau du conducteur de travaux [et] selon le chantier, les instructions seront données par celui-ci ou le chef d'entreprise pour l'organisation du lendemain ( ) » ; qu'en déduisant de cette note que les salariés avaient l'obligation de passer au dépôt le matin pour recevoir les instructions et le soir pour déposer la fiche de chantier de la journée, quand ce document prévoyait le passage du salarié au dépôt seulement après sa journée de travail et non le matin avant de se rendre sur le chantier, la cour d'appel a dénaturé ce document en violation des articles 4 et 16 du Code de procédure civile ; 3°) ALORS, A TITRE SUBSIDIAIRE, QUE dans l'hypothèse où le temps de trajet est qualifié de temps de travail effectif, la rémunération perçue par le salarié à ce titre ne peut se cumuler avec les indemnités de petits déplacements prévues par l'article 6 du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 ; qu'en rejetant la demande de la société Côté Jardin en remboursement des indemnités de petits déplacements au prétexte erroné que l'indemnité prévue par la convention collective nationale des entreprises du paysage, qui a un caractère forfaitaire, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé, la cour d'appel a violé les articles L.3121-1 et L.3121-4 du code du travail, l'article L.713-5 du code rural, l'article 6 de l'accord interprofessionnel du 23 décembre 1981 et les dispositions du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré inopposable au salarié l'avenant n°9 du 24 janvier 1997 à l'accord national du 23 décembre 1981 sur la durée du travail dans les exploitations et les entreprises agricoles et d'AVOIR condamné en conséquence la société Côté Jardin à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire de 2010 à 2015 pour les heures de compensation et pour les heures de modulation ; AUX MOTIFS QUE « sur l'annualisation du temps de travail : l'article 20 de la loi du 20 août 2008 modifiant l'ensemble des dispositions relatives à l'organisation du temps de travail sur un cycle supérieur à la semaine, prévoit que ‘les accords conclus en application des articles L.3122-3, L.3122-9, L.3122-19 et L.3123-25 du code du travail ou des articles L.713-8 et L.713-14 du code rural dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi restent en vigueur' ; l'article L.3122-9 du code du travail, abrogé au 22 août 2008, énonçait qu''une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoit que la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de l'année à condition que, sur un an, cette durée n'excède pas un plafond de 1 607 heures. La convention ou l'accord peut fixer un plafond inférieur. La convention ou l'accord précise les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation. La convention ou l'accord doit respecter les durées maximales quotidiennes et hebdomadaire de travail définies au chapitre Ier.' ; ainsi, toutes les clauses de ces accords relatifs au cycle de travail, à la modulation ou aux jours de réduction du temps de travail sur l'année continuent à s'appliquer dans les conditions prévues par ces accords et par la législation antérieure applicable aux accords d'aménagement du temps de travail au moment de leur signature ; l'employeur s'appuie sur les dispositions de l'article L.121-2-1 ancien du code du travail, applicable du 21 décembre 1993 au 1er février 2000, selon lesquelles les conventions et accords définis par le présent doivent respecter les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires du travail prévues par les articles L.212-1, deuxième alinéa, et L.2127, deuxième et quatrième alinéas, et doivent fixer notamment le programme indicatif de cette répartition et le délai dans lequel les salariés doivent être prévenus des changements d'horaires, ainsi que les conditions de recours au chômage partiel ; or, à la date de la signature de l'avenant n°9, soit le 24 janvier 1997, les articles L.212-8 et L.212-8-4 ancien du code du travail étaient également en vigueur et prévoyaient : - qu'une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de l'année à condition que sur un an cette durée n'excède pas en moyenne trente-neuf heures par semaine travaillée. Ces conventions ou accords entraînent l'application des dispositions de l'article L.212-8-1. ( ), - que la convention ou l'accord collectif étendu ou la convention et l'accord d'entreprise ou d'établissement mentionné à l'article L.212-8 devait préciser les données économiques et sociales qui justifiaient le recours à la modulation des horaires et comporter obligatoirement des dispositions concernant : ‘1° Le droit à la rémunération et au repos compensateur des salariés n'ayant pas travaillé pendant la totalité de la période annuelle de modulation de la durée du travail et des salariés dont le contrat a été rompu au cours de cette période annuelle ; 2° Les conditions du recours au chômage partiel pour heures qui ne sont pas prises en compte dans la modulation ; 3° Le délai dans lequel les salariés doivent être prévenus des changements d'horaire ; 4° Le programme indicatif concernant la mise en oeuvre de la modulation ; 5° Les mesures applicables au personnel d'encadrement. ( )' ; Ainsi, lorsque l'accord de modulation n'est pas conforme aux textes applicables, l'employeur ne peut s'en prévaloir et à défaut d'accord collectif valable, les entreprises n'ont donc accès qu'à un dispositif permettant d'aménager le temps de travail sur une période pluri-hebdomadaire limitée à quatre semaines ; en l'espèce, l'accord national sur la durée du travail dans les exploitations et entreprises agricoles, allégué par la société COTE JARDIN, a été conclu par les partenaires sociaux le 23 décembre 1981 et amendé par l'avenant n°9 du 24 janvier 1997 ; l'employeur affirme que l'accord est valable puisque l'article 10 de l'avenant n°9 renvoie à l'entreprise le soin d'établir sa propre programmation de la durée du travail, fixé à l'alinéa 7 les conditions de recours au chômage partiel et prévoit un délai de prévenance en cas de changement d'horaires ; or, en renvoyant à l'entreprise le soin d'établir sa propre programmation de la répartition de la durée du travail, l'avenant ne fixe pas de programme indicatif de la répartition, de sorte qu'il ne respecte pas les prescriptions de l'article L.212-2-1 ancien du code du travail ; en outre, contrairement aux dispositions de l'article L.212-8-4 ancien du code du travail, l'accord collectif applicable à la société COTE JARDIN ne précise pas les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation ; il s'en déduit que l'accord de modulation du temps de travail, résultant de l'avenant n°9 en date du 24 janvier 1997, est privé d'effet et est inopposable à Monsieur S... en raison de sa non-conformité aux dispositions légales applicables ; Monsieur S... est donc fondé à solliciter des rappels de salaire correspondant aux rémunérations qu'il aurait perçues par l'application des dispositions de droit commun ; le jugement déféré sera infirmé sur ce point ; en application de l'article L.3121-22 du code du travail, dans sa version application au litige, ‘Les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %. Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %' ; il résulte des pièces versées aux débats que durant les cycles de 32 heures hebdomadaires, les heures non travaillées par Monsieur S... se situant en deçà de la 35ème heure ont été portées sur un compte dit des ‘heures de compensation' et ont été considérées par la société comme des heures dont le salarié était redevable à son égard ; en parallèle, la société a mis en place, durant les cycles de 38 heures hebdomadaires, un compte dit des ‘heures de modulation' sur lequel figuraient les heures réalisées par le salarié comprises entre 35 heures et 38 heures et qui ne lui ont pas été rémunérées ; en fin de cycle, la société soldait les deux comptes et versait au salarié un reliquat d'heures supplémentaires lorsque le crédit du compte des ‘heures de modulation' était supérieur à celui du compte des ‘heures de compensation' ; il résulte des tableaux récapitulatifs hebdomadaires des comptes de compensation versés aux débats, pour les années 2009 à 2015 que Monsieur S... a accompli, certaines semaines, moins de 35 heures, et sur certaines semaines, entre 35 heures et 38 heures ; étant donné que la société COTE JARDIN avait l'obligation de fournir du travail à Monsieur S... afin de l'occuper 35 heures par semaine conformément aux règles de droit commun, il y a lieu de condamner la société COTE JARDIN à verser à ce dernier, au titre de l'ensemble des heures figurant au compte ‘heures de compensation' au taux normal, les sommes suivantes : - 366 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2010, outre 36.60 euros à titre de congés payés afférents ; - 161,04 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2011, outre 16,10 euros à titre de congés payés afférents ; - 876,60 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2012, outre 87,66 euros à titre de congés payés afférents ; - 910,90 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2013, outre 91,09 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.175,96 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2014, outre 117,60 euros à titre de congés payés afférents ; - 589,845 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2015, outre 58,984 euros à titre de congés payés afférents ; Ainsi qu'au titre de l'ensemble des heures de travail effectuées par lui comprises entre la 35ème et la 38ème heure au taux horaire majoré de 25%, les sommes suivantes : - 905,85 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2010, outre 90,85 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.665,30 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2011, outre 166,53 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.605,28 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2012, outre 160,53 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.003,30 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2013, outre 100,33 euros à titre de congés payés afférents ; - 942,63 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2014, outre 94,26 euros à titre de congés payés afférents ; - 863,302 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2015, outre 86,33 euros à titre de congés payés afférents » ; 1°) ALORS QUE l'article L.212-2-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 1993 et antérieure à la loi du 19 janvier 2000, seul applicable aux accords d'annualisation conclus avant cette date, ne prévoit pas l'obligation de préciser dans ledit accord les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation ; que cette obligation ne s'applique qu'aux accords de modulation conclus en vertu des articles L.212-8 et L.212-8-4 dans leur rédaction applicable entre le 21 décembre 1993 et le 19 janvier 2000 ; que pour déclarer inopposable au salarié l'accord d'annualisation du temps de travail résultant de l'avenant n°9 à l'accord du 23 décembre 1981, conclu le 24 janvier 1997, la cour d'appel a considéré que contrairement aux dispositions de l'article L.212-8-4 ancien du code du travail, l'accord collectif applicable à la société Côté Jardin ne précise pas les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation, quand précisément cet article L.212-8-4 ancien du code du travail n'était pas applicable aux accords d'annualisation, exclusivement régis par l'article L.212-2-1 ancien du même code, la cour d'appel a violé le premier des textes susvisés par fausse application et le second par refus d'application ; 2°) ALORS QUE l'accord d'annualisation doit fixer le programme indicatif de la répartition de la durée du travail ; que l'accord qui prévoit que la programmation indicative sera déterminée annuellement par l'entreprise et donnera lieu à consultation des représentants du personnel répond aux exigences légales ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait déclarer l'accord d'annualisation inopposable au salarié au prétexte qu'en renvoyant à l'entreprise le soin d'établir sa programmation de la répartition de la durée du travail, l'avenant ne fixe pas de programme indicatif de répartition, de sorte qu'il ne respecte pas les prescriptions de l'article L212-2-1 ancien du code du travail ; qu'en statuant ainsi, quand l'accord était valable en ce qu'il renvoyait à la société Côté Jardin le soin d'établir annuellement sa propre programmation, laquelle devait être soumise au comité d'entreprise, la cour d'appel a violé l'article L.212-2-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige. Moyens produits, au pourvoi n° X 19-11.527, par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Côté jardin PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Côté Jardin à payer au salarié diverses sommes à titre de rappel de salaire correspondant au temps de trajet non rémunéré et de l'AVOIR déboutée de sa demande subsidiaire en remboursement des indemnités de trajet ; AUX MOTIFS QUE « sur la demande de rappel de salaire au titre des temps de trajet : aux termes des dispositions de l'article L.3121-1 du code du travail, ‘la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles' ; en application des articles L.713-5 du code rural et L.3121-4 du code du travail, ‘le temps de déplacement professionnel pour sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif. Toutefois, Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière déterminée par convention ou accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'ils existent. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail ne doit pas entraîner de perte de salaire.' ; en vertu de l'article 6.2 de l'accord national du 23 décembre 1981 concernant la durée du travail dans les exploitations et entreprises agricoles et rattaché à la convention collective nationale des entreprises agricoles, ‘Même lorsqu'ils font l'objet d'une rémunération en application de stipulations conventionnelles ou contractuelles ou conformément aux usages, ne sont pas considérés comme travail effectif le temps nécessaire à la restauration et les temps consacrés aux pauses, ainsi qu'aux trajets entre le siège de l'entreprise ou de l'établissement et le lieu de travail lorsque les critères définis à l'alinéa 2 de l'article 6.1 ci –dessus ne sont pas réunis' ; l'article 6 de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 étendue le 16 mars 2009 prévoit également pour les ouvriers de chantier exécutant un travail non sédentaire qui ne se rattache pas à un lieu de travail unique et définitif que le temps normal de trajet pour se rendre sur le lieu d'exécution du travail, soit le chantier, n'est pas un temps de travail effectif et que l'indemnisation pour les petits déplacements (moins de 50 km du siège) est fixée à un montant variable en fonction de la distance ; ainsi, l'article 6 énonce qu'a) est réputé constituer un temps normal de trajet celui qui éloigne les salariés de moins de 50 km du siège, de l'agence ou du dépôt. b) Le salarié qui se rend par ses propres moyens sur le chantier assigné par son employeur perçoit pour ses frais de repas, s'il ne déjeune ni à l'entreprise ni à son domicile, une indemnité de panier, d'un montant égal à la valeur de 2,5 MG en vigueur au 1er janvier de l'année en cours. c) Le salarié qui se rend sur les chantiers par les moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise au siège ou dans l'un de ses dépôts est indemnisé dans les conditions suivantes : - Dans la limite du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est globalement indemnisé de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement fixée comme suit : - dans un rayon de 0 à 5 km du siège ou du dépôt jusqu'au chantier 3 MG - dans un rayon de plus de 5 km jusqu'à 20 km 4 MG - dans un rayon de plus de 20 km jusqu'à 30 km 5 MG - dans un rayon de 30 km jusqu'à 50 km 6 MG ( ) Au-delà du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est, en outre, rémunéré pour le trajet restant comme s'il s'agissait d'un temps de travail. L'appréciation, en durée, du temps normal de trajet de petit déplacement est déterminée par accord collectif d'entreprise ou à défaut par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel s'ils existent.' ( )' ; En revanche, lorsque l'employeur oblige les salariés à se présenter au dépôt avant de partir sur le chantier, le temps de travail effectif doit être décompté à partir de son arrivée au dépôt et le temps de trajet pour se rendre sur le chantier et en revenir, notamment pour charger du matériel, doit être décompté comme du temps de travail effectif ; le document de décompte du temps de travail du salarié doit en conséquence indiquer l'heure d'arrivée au dépôt comme étant l'heure de début de la journée de travail ; en ce cas, l'obligation conventionnelle d'indemniser les trajets réalisés par les salariés se cumule avec l'obligation légale de rémunérer le temps de trajet lorsque ce dernier constitue un temps de travail effectif ; en l'espèce, l'employeur a pris une note de service en date du 24 novembre 2015 rédigée en ces termes : ‘nous vous rappelons que lors de votre passage au dépôt après votre journée de travail, vous devez imprimer votre fiche de chantier de la journée et la déposer sur le bureau du conducteur de travaux. Selon le chantier, les instructions seront données par celui-ci ou le chef d'entreprise pour l'organisation du lendemain ( )' ; ainsi, il est établi que les salariés avaient bien l'obligation de passer au dépôt le matin pour recevoir les instructions et le soir pour déposer la fiche de chantier de la journée ; cinq collègues de travail de Monsieur T... ont attesté, dans des témoignages datés de février 2017, qu'ils avaient l'obligation de se rendre au dépôt le matin afin de récupérer le planning de la journée, préparer les pièces nécessaires et y repasser le soir après le chantier pour effectuer un bilan de la journée ; Monsieur F... précise ainsi qu''une fiche journalière est alors effectuée par le biais d'un ordinateur relié à une balise GPS intégrée au véhicule ( ) Ce point ne peut être effectué le lendemain car le rendu de la journée par le biais du système informatique doit être fait au jour le jour, le système ne permettant pas une impression le jour suivant. C'est uniquement après ce debriefing que je peux rentrer à mon domicile' ; Monsieur C... atteste en ces termes : ‘lors de la signature de mon premier contrat en CDD le 18/03/13, Monsieur W... L... m'a demandé de signer une feuille qui proposait deux cas de figure. Soit d'aller au chantier par mes propres moyens, soit d'aller à l'entreprise avec mon véhicule personnel puis d'aller au chantier avec le camion e l'entreprise. Je n'ai pas eu le choix, j'ai signé le cas n°2. Cependant lorsque le chantier était proche de chez moi, j'ai demandé l'autorisation de prendre mon véhicule personnel pour aller de l'entreprise au chantier. Je devais dans tous les cas passer par l'entreprise le matin afin de charge le camion pour aider mes collègues à charger le camion avec le matériel. Cette configuration a continué une fois que j'ai signé mon CDI'. ; Monsieur S... atteste également qu'une fois arrivé au dépôt, il avait l'obligation de compléter la fiche de géolocalisation en notant les tâches réalisées sur le chantier pour l'ensemble de son équipe et devait avoir un échange oral soit avec Monsieur L... soit avec Monsieur U..., le conducteur de travaux de la société ; ensuite, il rentrait à son domicile avec le véhicule mis à sa disposition par la société ; par courrier du 6 mars 2017, la DIRRECTE de Haute Savoie a indiqué que lorsque les conducteurs ainsi que les salariés sont obligés de passer par le dépôt avant de se rendre sur le chantier, il convient d'une part de rémunérer leur temps de trajet comme du temps de travail effectif, d'autre part, de leur appliquer le barème d'indemnisation prévu par l'article 6 de la convention collective nationale des entreprises du paysage pour les petits déplacements ; l'employeur, qui invoque le questionnaire qu'il a remis aux salariés leur demandant d'opérer le choix suivant : se rendre directement sur les chantiers ou décider de se rendre au siège, auquel cas ils bénéficieront d'indemnités de petit déplacement, et le fait que les auteurs des attestations ont choisi la deuxième option, ne démontre pas que le salarié avait d'autre choix que celui qui lui était ainsi offert reprenant l'article 6 de la convention collective ; il résulte de l'ensemble de ces éléments que Monsieur T... avait bien l'obligation de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier puis après avoir quitté celui-ci, de sorte qu'il se trouvait la disposition de l'employeur et que le temps de trajet siège-chantier et chantier-siège devait être rémunéré comme du temps de travail effectif ; or, l'indemnité de trajet prévue par la convention collective nationale des entreprises du paysage, qui a un caractère forfaitaire, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé ; ainsi, le salarié est bien fondé à solliciter le maintien du bénéfice des dispositions relatives à l'indemnisation conventionnelle des petits déplacements et le rappel de salaire, conformément aux calculs présentés dans ses conclusions ; il y a donc lieu de condamner la société COTE JARDIN à payer au salarié les sommes suivantes : - 280,37 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2011, outre 28.04 euros à titre de congés payés afférents ; - 515,11 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2012, outre 51.51 euros à titre de congés payés afférents ; - 573,30 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2013, outre 57,33 euros à titre de congés payés afférents ; - 365,66 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2014, outre 36,57 euros à titre de congés payés afférents ; - 137,81 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2015, outre 13,78 euros à titre de congés payés afférents ; Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes ; la demande subsidiaire en remboursement des indemnités de trajet sera par voie de conséquence rejetée » ; 1°) ALORS QUE le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; que le temps de trajet entre le siège et le chantier et entre le chantier et le siège ne constitue du temps de travail effectif rémunéré comme tel que si le salarié est contraint par l'employeur à se rendre au siège de l'entreprise avant d'être transporté sur le chantier ainsi qu'après sa journée de travail ; que pour condamner en l'espèce l'employeur à un rappel de salaires correspondant au temps de trajet effectué par le salarié, la cour d'appel a affirmé que M. T... avait l'obligation de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier puis après avoir quitté celui-ci, de sorte qu'il se trouvait à la disposition de l'employeur et que le temps de trajet siège-chantier et chantier-siège devait être rémunéré comme du temps de travail effectif, en retenant une note de service en date du 24 novembre 2015, des attestations de cinq collègues du salarié et de témoignages de clients mais sans rechercher ni vérifier, comme elle y était pourtant invitée par l'employeur, si précisément le salarié avait, dans son contrat de travail, choisi l'option « de se rendre au siège de l'entreprise ou dans ses dépôts pour être transporté ensuite sur les chantiers par des moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise », ce dont il se déduisait qu'il avait lui-même choisi de se rendre au dépôt avant d'aller sur le chantier, ce qui ce qui excluait qu'il y ait été contraint par une décision unilatérale de la société Côté Jardin ; qu'ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.3121-1 et L.3121-4 du code du travail et L.713-5 du code rural ainsi que de l'article 6 de l'accord interprofessionnel du 23 décembre 1981, des dispositions du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 et de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ; 2°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que pour condamner la société Côté Jardin à un rappel de salaires correspondant au temps de trajet effectué par le salarié, la cour d'appel a relevé que dans une note de service de l'employeur en date du 24 novembre 2015, l'employeur indiquait « que lors de votre passage après votre journée de travail, vous devez imprimer votre fiche de chantier de la journée et la déposer sur le bureau du conducteur de travaux [et] selon le chantier, les instructions seront données par celui-ci ou le chef d'entreprise pour l'organisation du lendemain ( ) » ; qu'en déduisant de cette note que les salariés avaient l'obligation de passer au dépôt le matin pour recevoir les instructions et le soir pour déposer la fiche de chantier de la journée, quand ce document prévoyait le passage du salarié au dépôt seulement après sa journée de travail et non le matin avant de se rendre sur le chantier, la cour d'appel a dénaturé ce document en violation des articles 4 et 16 du Code de procédure civile ; 3°) ALORS, A TITRE SUBSIDIAIRE, QUE dans l'hypothèse où le temps de trajet est qualifié de temps de travail effectif, la rémunération perçue par le salarié à ce titre ne peut se cumuler avec les indemnités de petits déplacements prévues par l'article 6 du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008 ; qu'en rejetant la demande de la société Côté Jardin en remboursement des indemnités de petits déplacements au prétexte erroné que l'indemnité prévue par la convention collective nationale des entreprises du paysage, qui a un caractère forfaitaire, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé, la cour d'appel a violé les articles L.3121-1 et L.3121-4 du code du travail, l'article L.713-5 du code rural, l'article 6 de l'accord interprofessionnel du 23 décembre 1981 et les dispositions du chapitre III de la convention collective des entreprises du paysage du 10 octobre 2008. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré inopposable au salarié l'avenant n°9 du 24 janvier 1997 à l'accord national du 23 décembre 1981 sur la durée du travail dans les exploitations et les entreprises agricoles et d'AVOIR condamné en conséquence la société Côté Jardin à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire pour les heures de compensation et pour les heures de modulation ; AUX MOTIFS QUE « sur l'annualisation du temps de travail : l'article 20 de la loi du 20 août 2008 modifiant l'ensemble des dispositions relatives à l'organisation du temps de travail sur un cycle supérieur à la semaine, prévoit que ‘les accords conclus en application des articles L.3122-3, L.3122-9, L.3122-19 et L.3123-25 du code du travail ou des articles L.713-8 et L.713-14 du code rural dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi restent en vigueur' ; l'article L.3122-9 du code du travail, abrogé au 22 août 2008, énonçait qu''une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoit que la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de l'année à condition que, sur un an, cette durée n'excède pas un plafond de 1 607 heures. La convention ou l'accord peut fixer un plafond inférieur. La convention ou l'accord précise les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation. La convention ou l'accord doit respecter les durées maximales quotidiennes et hebdomadaire de travail définies au chapitre Ier.' ; ainsi, toutes les clauses de ces accords relatifs au cycle de travail, à la modulation ou aux jours de réduction du temps de travail sur l'année continuent à s'appliquer dans les conditions prévues par ces accords et par la législation antérieure applicable aux accords d'aménagement du temps de travail au moment de leur signature ; l'employeur s'appuie sur les dispositions de l'article L.121-2-1 ancien du code du travail, applicable du 21 décembre 1993 au 1er février 2000, selon lesquelles les conventions et accords définis par le présent doivent respecter les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires du travail prévues par les articles L.212-1, deuxième alinéa, et L.2127, deuxième et quatrième alinéas, et doivent fixer notamment le programme indicatif de cette répartition et le délai dans lequel les salariés doivent être prévenus des changements d'horaires, ainsi que les conditions de recours au chômage partiel ; or, à la date de la signature de l'avenant n°9, soit le 24 janvier 1997, les articles L.212-8 et L.212-8-4 ancien du code du travail étaient également en vigueur et prévoyaient : - qu'une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire du travail peut varier sur tout ou partie de l'année à condition que sur un an cette durée n'excède pas en moyenne trente-neuf heures par semaine travaillée. Ces conventions ou accords entraînent l'application des dispositions de l'article L.212-8-1. ( ), - que la convention ou l'accord collectif étendu ou la convention et l'accord d'entreprise ou d'établissement mentionné à l'article L.212-8 devait préciser les données économiques et sociales qui justifiaient le recours à la modulation des horaires et comporter obligatoirement des dispositions concernant : ‘1° Le droit à la rémunération et au repos compensateur des salariés n'ayant pas travaillé pendant la totalité de la période annuelle de modulation de la durée du travail et des salariés dont le contrat a été rompu au cours de cette période annuelle ; 2° Les conditions du recours au chômage partiel pour heures qui ne sont pas prises en compte dans la modulation ; 3° Le délai dans lequel les salariés doivent être prévenus des changements d'horaire ; 4° Le programme indicatif concernant la mise en oeuvre de la modulation ; 5° Les mesures applicables au personnel d'encadrement. ( )' ; Ainsi, lorsque l'accord de modulation n'est pas conforme aux textes applicables, l'employeur ne peut s'en prévaloir et à défaut d'accord collectif valable, les entreprises n'ont donc accès qu'à un dispositif permettant d'aménager le temps de travail sur une période pluri-hebdomadaire limitée à quatre semaines ; en l'espèce, l'accord national sur la durée du travail dans les exploitations et entreprises agricoles, allégué par la société COTE JARDIN, a été conclu par les partenaires sociaux le 23 décembre 1981 et amendé par l'avenant n°9 du 24 janvier 1997 ; l'employeur affirme que l'accord est valable puisque l'article 10 de l'avenant n°9 renvoie à l'entreprise le soin d'établir sa propre programmation de la durée du travail, fixé à l'alinéa 7 les conditions de recours au chômage partiel et prévoit un délai de prévenance en cas de changement d'horaires ; or, en renvoyant à l'entreprise le soin d'établir sa propre programmation de la répartition de la durée du travail, l'avenant ne fixe pas de programme indicatif de la répartition, de sorte qu'il ne respecte pas les prescriptions de l'article L.212-2-1 ancien du code du travail ; en outre, contrairement aux dispositions de l'article L.212-8-4 ancien du code du travail, l'accord collectif applicable à la société COTE JARDIN ne précise pas les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation ; il s'en déduit que l'accord de modulation du temps de travail, résultant de l'avenant n°9 en date du 24 janvier 1997, est privé d'effet et est inopposable à Monsieur T... en raison de sa non-conformité aux dispositions légales applicables ; Monsieur T... est donc fondé à solliciter des rappels de salaire correspondant aux rémunérations qu'il aurait perçues par l'application des dispositions de droit commun ; le jugement déféré sera infirmé sur ce point ; en application de l'article L.3121-22 du code du travail, dans sa version application au litige, ‘Les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %. Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %' ; il résulte des pièces versées aux débats que durant les cycles de 32 heures hebdomadaires, les heures non travaillées par Monsieur T... se situant en deçà de la 35ème heure ont été portées sur un compte dit des ‘heures de compensation' et ont été considérées par la société comme des heures dont le salarié était redevable à son égard ; en parallèle, la société a mis en place, durant les cycles de 38 heures hebdomadaires, un compte dit des ‘heures de modulation' sur lequel figuraient les heures réalisées par le salarié comprises entre 35 heures et 38 heures et qui ne lui ont pas été rémunérées ; en fin de cycle, la société soldait les deux comptes et versait au salarié un reliquat d'heures supplémentaires lorsque le crédit du compte des ‘heures de modulation' était supérieur à celui du compte des ‘heures de compensation' ; il résulte des tableaux récapitulatifs hebdomadaires des comptes de compensation versés aux débats, pour les années 2009 à 2015 que Monsieur T... a accompli, certaines semaines, moins de 35 heures, et sur certaines semaines, entre 35 heures et 38 heures ; étant donné que la société COTE JARDIN avait l'obligation de fournir du travail à Monsieur T... afin de l'occuper 35 heures par semaine conformément aux règles de droit commun, il y a lieu de condamner la société COTE JARDIN à verser à ce dernier, au titre de l'ensemble des heures figurant au compte ‘heures de compensation' au taux normal, les sommes suivantes : - 418,95 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2012, outre 41.89 euros à titre de congés payés afférents ; - 499,80 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2013, outre 49,98 euros à titre de congés payés afférents ; - 335,65 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2014, outre 33,56 euros à titre de congés payés afférents ; Et qu'au titre de l'ensemble des heures de travail effectuées par lui comprises entre la 35ème et la 38ème heure au taux horaire majoré de 25%, les sommes suivantes : - 386,86 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2011, outre 38,69 euros à titre de congés payés afférents ; - 1.123,94 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2012, outre 112,39 euros à titre de congés payés afférents ; - 793,19 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2013, outre 79,32 euros à titre de congés payés afférents ; - 603,31 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2014, outre 60,33 euros à titre de congés payés afférents » ; 1°) ALORS QUE l'article L.212-2-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 1993 et antérieure à la loi du 19 janvier 2000, seul applicable aux accords d'annualisation conclus avant cette date, ne prévoit pas l'obligation de préciser dans ledit accord les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation ; que cette obligation ne s'applique qu'aux accords de modulation conclus en vertu des articles L.212-8 et L.212-8-4 dans leur rédaction applicable entre le 21 décembre 1993 et le 19 janvier 2000 ; que pour déclarer inopposable au salarié l'accord d'annualisation du temps de travail résultant de l'avenant n°9 à l'accord du 23 décembre 1981, conclu le 24 janvier 1997, la cour d'appel a considéré que contrairement aux dispositions de l'article L.212-8-4 ancien du code du travail, l'accord collectif applicable à la société Côté Jardin ne précise pas les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation, quand précisément cet article L.212-8-4 ancien du code du travail n'était pas applicable aux accords d'annualisation, exclusivement régis par l'article L.212-2-1 ancien du même code, la cour d'appel a violé le premier des textes susvisés par fausse application et le second par refus d'application ; 2°) ALORS QUE l'accord d'annualisation doit fixer le programme indicatif de la répartition de la durée du travail ; que l'accord qui prévoit que la programmation indicative sera déterminée annuellement par l'entreprise et donnera lieu à consultation des représentants du personnel répond aux exigences légales ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait déclarer l'accord d'annualisation inopposable au salarié au prétexte qu'en renvoyant à l'entreprise le soin d'établir sa programmation de la répartition de la durée du travail, l'avenant ne fixe pas de programme indicatif de répartition, de sorte qu'il ne respecte pas les prescriptions de l'article L212-2-1 ancien du code du travail ; qu'en statuant ainsi, quand l'accord était valable en ce qu'il renvoyait à la société Côté Jardin le soin d'établir annuellement sa propre programmation, laquelle devait être soumise au comité d'entreprise, la cour d'appel a violé l'article L.212-2-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige.
Le chapitre III des dispositions particulières propres aux ouvriers et aux employés de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008, dans sa version antérieure à celle issue de l'avenant n° 27 du 29 novembre 2019, prévoit que le temps normal de trajet pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail, soit le chantier, n'est pas un temps de travail effectif. L'article 6 de ce chapitre, qui se rapporte à l'indemnisation pour petits déplacements, dispose qu'est réputé constituer un temps normal de trajet celui qui éloigne les salariés de moins de 50 km du siège, de l'agence ou du dépôt. Il ajoute que le salarié, qui se rend sur les chantiers par les moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise au siège ou dans l'un de ses dépôts, est indemnisé dans la limite du temps de trajet normal, de manière globale de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement déterminée en fonction de l'éloignement et qu'au-delà du temps normal de trajet, il est en outre rémunéré pour le trajet restant comme s'il s'agissait d'un temps de travail. Il en résulte que, lorsque le temps de trajet est considéré comme du temps de travail effectif en raison de l'obligation faite au salarié de se rendre au siège de l'entreprise à l'aller puis au retour du chantier, le salarié ne peut percevoir, en sus de sa rémunération, l'indemnité conventionnelle globale de petits déplacements versée uniquement lorsque le temps de trajet n'est pas considéré comme du temps de travail effectif
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SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle M. SCHAMBER, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1115 F-P+B Pourvoi n° J 19-12.665 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société Engie Solar, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 19-12.665 contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant à Mme J... W..., anciennement M..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation. Mme W... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Engie Solar, de Me Haas, avocat de Mme W..., après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 décembre 2018), Mme W... a été engagée par la société Solaire direct, devenue la société Engie Solar, en qualité de contrôleur de gestion, cadre position 2.2, coefficient 130, à compter du 25 octobre 2010. La convention collective applicable est la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite Syntec. 2. Le 3 juin 2013, les parties ont conclu une convention de rupture, avec effet au 31 août 2013. 3. La salariée a saisi la juridiction prud'homale, le 4 août 2014, de diverses demandes en paiement. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi principal et le second moyen du pourvoi incident 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le premier moyen du pourvoi incident Enoncé du moyen 5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande au titre de la prime de l'année 2013, alors « que, selon l'article 44 de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil du 15 décembre 1987, les collaboratrices ayant plus d'un an d'ancienneté dans l'entreprise à la date de leur arrêt de travail pour maternité conserveront le maintien intégral de leurs appointements mensuels pendant la durée du congé légal sous déduction des indemnités versées par la sécurité sociale et les régimes de prévoyance ; qu'en considérant que ce texte n'ouvrait pas droit au maintien de la part variable de la rémunération, la cour d'appel l'a violé. » Réponse de la Cour Vu l'article 44 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : 6. Selon le premier de ces textes, les salariées ayant plus d'un an d'ancienneté dans l'entreprise à la date de leur arrêt de travail pour maternité conservent le maintien intégral de leurs appointements mensuels pendant la durée du congé légal sous déduction des indemnités versées par la sécurité sociale et les régimes de prévoyance. 7. Il en résulte que ce texte n'exclut pas la prise en compte de la partie variable de la rémunération des salariées lorsqu'elles en perçoivent une. 8. Pour débouter la salariée de sa demande au titre de la prime de l'année 2013, l'arrêt retient que le maintien de la rémunération étant limité aux seuls appointements mensuels, la salariée ne peut prétendre au maintien de sa rémunération variable pendant son congé maternité. 9. En statuant ainsi, en se fondant sur la seule partie fixe de la rémunération de la salariée, alors qu'elle avait constaté qu'il lui était également attribué une partie variable liée à l'atteinte d'objectifs annuels fixés dans le cadre d'un plan de performance individuelle et collectif, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la salariée de sa demande de prime au titre de l'année 2013, l'arrêt rendu le 6 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société Engie solar aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Engie Solar et la condamne à payer à Mme W... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Engie Solar, demanderesse au pourvoi principal Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Engie Solar à payer à Mme W... les sommes de 30 677,80 € à titre d'heures supplémentaires, de 13 575,93 € à titre d'indemnité de repos compensateur, les congés payés y afférents, de 1 967,94 € à titre de complément d'indemnité de rupture conventionnelle, de 1 500 € au titre de la prime 2012, outre 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ; Aux motifs qu'aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties, et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que Mme W... verse aux débats : un décompte par semaine depuis 2011 du nombre d'heures travaillées, du nombre d'heures supplémentaires à 25 % et du nombre d'heures supplémentaires à 50 %, un tableau mentionnant jour par jour, depuis 2011, l'heure d'arrivée, l'heure de départ, le temps de déjeuner de 45 minutes, le nombre d'heures effectuées, le nombre d'heures supplémentaires, l'heure du premier et du dernier courriel envoyés de son poste de travail chaque jour, ses observations, des dizaines de courriels, tous de nature professionnelle, envoyés sur la période et correspondant au relevé des horaires dans le tableau précité, une attestation de Mme I..., qui a travaillé de janvier 2011 à janvier 2012 au sein de la société Solairedirect, témoignant de la présence de Mme W... à son poste de travail quasiment tous les jours avant son arrivée à 9h45 et tard le soir, souvent après 21 heures et fréquemment plus tard après 22 heures voire 23 heures, et de pause-déjeuner que Mme W... limitait à 45 minutes, une attestation de M. S..., employé de novembre 2011 à septembre 2012 confirmant que Mme W... arrivait régulièrement entre 9h00 et 9h30, lui-même arrivant vers 8h30, et qu'elle était encore présente lorsqu'il quittait les locaux entre 19h30 et 20h, une attestation de M. X..., employé de janvier 2011 à mai 2012 confirmant que Mme W... arrivait régulièrement entre 9h et 9h30, lui-même arrivant entre 8h30 et 9 heures, et qu'elle était toujours présente lorsqu'il quittait les locaux même lorsqu'il partait à 20h ; que Mme W... étaie ainsi ses demandes par la production de tableaux extrêmement précis, eux-mêmes documentés par les courriels versés aux débats ; que le temps de travail au-delà de la durée hebdomadaire de 38h30 est corroboré par les mails adressés par la salariée, le matin à partir d'un créneau compris entre 9h et 9h30 et le soir, en général entre 19h et 19h30 mais aussi parfois 20h, voire des courriels très tardifs après 21h30 (19 octobre 2011), ou encore 23h (par exemple, 12 et 13 avril 2011, 11 octobre 2011) ; que la société Engie Solar ne produit aucune pièce relative aux horaires effectifs de travail de la salariée et ne justifie notamment pas d'éléments extraits du système d'auto-contrôle validé par le supérieur hiérarchique de Mme W... prévu par le contrat de travail ; qu'elle se prévaut de ce que l'appelante ne lui a jamais fourni de relevés d'heures ; qu'elle ne justifie pas lui avoir fait la moindre remarque sur ce comportement en contradiction avec le contrat de travail ; qu'au regard des pièces communiquées, en prenant en compte la pause méridienne, Mme W... peut prétendre à la somme de 30 677,80 € à titre d'heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents ; que le volume d'heures supplémentaires réalisé dépassant le contingent annuel de 220 heures, Mme W... aurait dû obtenir une contrepartie obligatoire en repos de 100 % compte tenu de l'effectif de l'entreprise supérieur à 20 salariés, dont n'elle n'a pu bénéficier du fait de son employeur ; qu'elle peut prétendre à une indemnisation au titre du préjudice ainsi subi, qui comporte à la fois l'indemnité de repos et l'indemnité de congés payés afférents, de 13 575,93 € outre les congés payés y afférents ; que la société est redevable d'un complément d'indemnité de rupture conventionnelle de 1 961,94 € compte tenu de sa rémunération brute intégrant les heures supplémentaires, repos compensateurs et congés payés y afférents ; Alors que seules constituent des heures supplémentaires les heures de travail consacrées par le salarié, au-delà de la durée légale du travail, à l'exécution de sa prestation de travail sur lesquelles l'employeur peut exercer son contrôle, accomplies à la demande ou avec l'accord de l'employeur ou inhérentes à ses fonctions et rendues nécessaires par les tâches confiées ; qu'en l'espèce, l'employeur avait soutenu que « la salariée ne pouvait obtenir le paiement d'heures supplémentaires qui n'avaient pas été accomplies avec [son] accord », que « le silence ne pouvait, à lui seul, valoir acceptation » et qu'il « n'avait jamais demandé à Madame W... d'effectuer des heures supplémentaires » (conclusions d'appel p. 14) ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si les heures supplémentaires dont Mme W... demandait le paiement, avaient été réalisées selon les instructions de l'employeur ou avec son accord, et en ne caractérisant pas davantage en quoi elles étaient nécessaires à la réalisation des tâches confiées à la salariée, recherche qui s'imposait d'autant plus que la salariée avait attendu le 4 août 2014 pour demander le paiement d'heures effectuées en 2011 et 2012 et n'avait jamais fourni de relevé des heures de travail réalisés contrairement à ce que lui imposait son contrat de travail stipulant que « Compte tenu de la nature de ses fonctions, de son statut, de ses responsabilités et de l'autonomie dont il dispose dans l'organisation de son emploi du temps, le salarié appartient à la catégorie « réalisation de missions » au sens de l'accord national du 22 juin 1999 sur la durée du travail ; le salarié travaille 220 jours par année de référence ( ) ; la durée hebdomadaire de travail du salarié est de 38 heures 30 minutes. Un document déclaratif mensuel devra être établi à la journée par le salarié et visé par la Direction Générale de Solairedirect ou toute autre personne à laquelle elle rendra compte de son activité », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail. Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme W..., demanderesse au pourvoi incident PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme W... de sa demande au titre de la prime de l'année 2013 ; AUX MOTIFS QUE la convention collective prévit en son article 4 que les collaboratrices ayant plus d'un an d'ancienneté dans l'entreprise à la date de leur arrêt de travail pour maternité conservent le maintien intégral de leurs appointements mensuels pendant la durée du congé légal sous déduction des indemnités versées par la sécurité sociale et les régimes de prévoyance ; que le maintien de la rémunération étant ainsi limité aux seuls appointements mensuels, Mme W... ne peut prétendre au maintien de sa rémunération variable pendant son congé maternité ; ALORS QUE, selon l'article 44 de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil du 15 décembre 1987, les collaboratrices ayant plus d'un an d'ancienneté dans l'entreprise à la date de leur arrêt de travail pour maternité conserveront le maintien intégral de leurs appointements mensuels pendant la durée du congé légal sous déduction des indemnités versées par la sécurité sociale et les régimes de prévoyance ; qu'en considérant que ce texte n'ouvrait pas droit au maintien de la part variable de la rémunération, la cour d'appel l'a violé. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme W... de sa demande de nullité de la convention de forfait et de sa demande en paiement des heures supplémentaires effectuées entre 35 h et 38 h 30 par semaine et, en conséquence, D'AVOIR limité le montant de la condamnation prononcée au titre des heures supplémentaires à 30 677,80 euros ; AUX MOTIFS QUE Mme W... a conclu une convention de forfait en heures sur la semaine de 38 h 30 ; que, dès lors, aucune des dispositions conventionnelles ou légales qu'elle invoque concernant les conventions de forfait annuel en heures ou en jours ne lui est applicable ; que l'article 3 (1) de l'accord du 22 juin 1999, applicable au contrat de travail de Mme W... limite le nombre de jours à 219, la journée de solidarité n'étant pas incluse dans cette limite contrairement à ce que prévoit expressément le même accord pour le forfait annuel en jours ; que la clause de forfait incluse dans le contrat de travail de Mme W... est conforme à l'accord du 22 juin 1999 dès lors que la durée du travail hebdomadaire est fixée à 38 h 30 et que le nombre de jours est fixé à 220 jours constitués du plafond conventionnel de 219 jours et de la journée de solidarité ; ALORS QU'une convention de forfait, qu'elle soit en heures ou en jours, ne peut prévoir un nombre de jours travaillés dans l'année supérieur à 218 jours ; qu'en considérant que la convention de forfait était valable après avoir pourtant constaté qu'elle prévoyait un nombre de 220 jours travaillés dans l'année, journée de solidarité incluse, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-44 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause.
Selon l'article 44 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, les salariées ayant plus d'un an d'ancienneté dans l'entreprise à la date de leur arrêt de travail pour maternité conservent le maintien intégral de leurs appointements mensuels pendant la durée du congé légal sous déduction des indemnités versées par la sécurité sociale et les régimes de prévoyance. Il en résulte que ce texte n'exclut pas la prise en compte de la partie variable de la rémunération des salariées lorsqu'elles en perçoivent une
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SOC. IK COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle M. CATHALA, président Arrêt n° 1119 FP-P+B+R+I Pourvoi n° X 17-19.523 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 M. P... O..., domicilié au Cabinet de M. Y..., [...] , a formé le pourvoi n° X 17-19.523 contre l'arrêt rendu le 16 mars 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant à l'Agence France Presse, organisme autonome, dont le siège est 11 à 13 place de la Bourse, 75002 Paris, défenderesse à la cassation. L'Agence France presse a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation également annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Richard, conseiller, les observations écrites de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. O..., de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de l'Agence France Presse, les plaidoiries de de Me Grévy et celles de Me J..., l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Richard, conseiller rapporteur, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Ricour, Pietton, Mmes Capitaine, Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, conseillers, Mmes Duvallet, Ala, Chamley-Coulet, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt : Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 mars 2017), M. O..., engagé par l'Agence France Presse (AFP) le 9 septembre 1991, a saisi la juridiction prud'homale le 17 février 2012 de diverses demandes en paiement. Il a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire le 27 février 2015 et a été licencié pour faute grave le 23 mars 2015, au motif d'une usurpation de données informatiques. Examen des moyens Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié et les trois moyens du pourvoi incident de l'employeur, ci-après annexés 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. Le salarié fait grief à l'arrêt de juger son licenciement justifié par une faute grave et de le débouter de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « qu'aux termes de l'article 32 du règlement intérieur de l'AFP, aucune sanction autre qu'un simple avertissement ne sera notifiée sans qu'aient été préalablement avisés les délégués du personnel de la catégorie de l'intéressé ; que le caractère préalable de l'information a pour finalité d'offrir au salarié une protection supplémentaire par l'assistance ou l'intervention des représentants du personnel, laquelle ne peut avoir d'effet utile que si l'information est effectuée dans un délai suffisant rendant l'assistance effective ; que la cour d'appel a relevé que les délégués du personnel avaient été avisés le 23 mars 2015 à 19 heures 38 d'un licenciement par lettre datée du 23 mars 2015 et notifiée au plus tôt le 24 mars, dans un délai lui permettant de modifier sa position ; qu'en statuant de la sorte, quand il n'était pas contesté par l'AFP que la lettre de licenciement avait été envoyée le 23 mars 2015, pour une première présentation le 24 mars 2015, de sorte que l'information des représentants du personnel effectuée postérieurement à l'envoi de la lettre de licenciement ne permettait pas au salarié de se faire assister utilement pour permettre le cas échéant à l'employeur de revenir sur sa décision, la cour d'appel a violé l'article 32 du règlement intérieur de l'AFP, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail. » Réponse de la Cour 4. La cour d'appel qui a, d'une part, relevé que l'article 32 du règlement intérieur de la société prévoit qu'aucune sanction autre qu'un simple avertissement ne sera notifiée sans qu'aient été préalablement avisés les délégués du personnel de la catégorie de l'intéressé et, d'autre part, constaté que l'avis aux délégués du personnel avait été effectué le 23 mars 2015 et que la notification du licenciement, au sens des dispositions conventionnelles applicables, était intervenue le 24 mars 2015, en a déduit à bon droit que l'employeur avait respecté l'article 32 précité. 5. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 6. Le salarié fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors « qu'aux termes de l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, les conflits individuels seront soumis à la commission paritaire amiable ; qu'il en résulte que ce texte institue une procédure particulière obligatoire permettant de rechercher une solution amiable ; qu'en jugeant qu'en cas de licenciement, sa saisine préalable par l'employeur ne constituait pas une obligation, mais qu'il appartenait seulement à la partie la plus diligente de la saisir, la cour d'appel a violé l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail. » Réponse de la Cour 7. Selon l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, les conflits individuels seront soumis à une commission paritaire amiable, ayant uniquement une mission conciliatrice. Si l'une des parties récuse cette commission, ou si la tentative de conciliation échoue, les intéressés pourront toujours porter le différend devant toute juridiction française compétente en la matière. Le recours à la commission paritaire amiable est notifié par la partie la plus diligente à l'autre partie par lettre exposant le ou les points sur lesquels porte le litige. 8. La cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur n'avait pas l'obligation de saisir la commission paritaire amiable préalablement au licenciement. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le second moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa quatrième branche Enoncé du moyen 10. Le salarié fait grief à l'arrêt de juger son licenciement justifié par une faute grave et de le débouter de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que le licenciement pour faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, ne peut être justifié par des éléments de preuve obtenus de façon illicite et dont la production est de ce fait irrecevable ; que constituent un moyen de preuve illicite les informations collectées, avant toute déclaration à la CNIL, par un système de traitement automatisé de données personnelles comme la collecte des adresses IP, permettant d'identifier indirectement une personne physique ou encore le traçage des fichiers de journalisation ; que la cour d'appel a retenu que les logs, fichiers de journalisation et adresses IP, qui constituaient un traçage informatique, n'étaient pas soumis à une déclaration de la CNIL, ni à une information du salarié, dès lors qu'ils n'avaient pas pour vocation première le contrôle des utilisateurs ; qu'en statuant de la sorte, par un motif inopérant, quand seule la condition de la possible identification d'une personne physique était déterminante, la cour d'appel a violé les articles 2 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ensemble les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, l'article 9 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Vu les articles 2 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données, les articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales : 11. Les adresses IP, qui permettent d'identifier indirectement une personne physique, sont des données à caractère personnel, au sens de l'article 2 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, de sorte que leur collecte par l'exploitation du fichier de journalisation constitue un traitement de données à caractère personnel et doit faire l'objet d'une déclaration préalable auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en application de l'article 23 de la loi précitée. 12. Toutefois, ainsi que la Cour l'a déjà jugé (Soc., 9 novembre 2016, pourvoi n° 15-10.203, Bull. 2016, V, n° 209), le droit à la preuve peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié à la condition que cette production soit nécessaire à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit proportionnée au but poursuivi. De même, elle a déjà jugé (Soc., 31 mars 2015, pourvoi n° 13-24.410, Bull. 2015, V, n° 68), qu'un salarié ne peut s'approprier des documents appartenant à l'entreprise que s'ils sont strictement nécessaires à l'exercice des droits de sa défense dans un litige l'opposant à son employeur, ce qu'il lui appartient de démontrer. 13. Il résulte par ailleurs de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, s'agissant plus particulièrement de la surveillance des employés sur le lieu de travail, qu'elle a estimé que l'article 8 de la Convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales laissait à l'appréciation des États le choix d'adopter ou non une législation spécifique concernant la surveillance de la correspondance et des communications non professionnelles des employés (CEDH, K..., 5 sept. 2017, n° 61496/08, § 119). Elle a rappelé que, quelle que soit la latitude dont jouissent les États dans le choix des moyens propres à protéger les droits en cause, les juridictions internes doivent s'assurer que la mise en place par un employeur de mesures de surveillance portant atteinte au droit au respect de la vie privée ou de la correspondance des employés est proportionnée et s'accompagne de garanties adéquates et suffisantes contre les abus (K..., précité, § 120). 14. La Cour européenne des droits de l'homme a jugé également que, pour déterminer si l'utilisation comme preuves d'informations obtenues au mépris de l'article 8 ou en violation du droit interne a privé le procès du caractère équitable voulu par l'article 6, il faut prendre en compte toutes les circonstances de la cause et se demander en particulier si les droits de la défense ont été respectés et quelles sont la qualité et l'importance des éléments en question (CEDH, 17 oct. 2019, Lopez Ribalda, n° 1874/13 et 8567/13, § 151). 15. Enfin, aux termes de l'article 13. 1 g) de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, applicable à l'époque des faits, les États membres peuvent prendre des mesures législatives visant à limiter la portée des obligations et des droits prévus à l'article 6 paragraphe 1, à l'article 10, à l'article 11 paragraphe 1 et aux articles 12 et 21, lorsqu'une telle limitation constitue une mesure nécessaire pour sauvegarder la protection de la personne concernée ou des droits et libertés d'autrui. 16. Il y a donc lieu de juger désormais que l'illicéité d'un moyen de preuve, au regard des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données, n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l'utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. 17. Pour juger le licenciement fondé sur une faute grave et débouter le salarié de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que selon un procès-verbal de constat d'huissier, le recoupement des informations de fichiers de journalisation extraites de données du gestionnaire centralisé de logs de l'AFP sur la journée du 30 janvier 2015 et la plage horaire de 12 heures 02 à 16 heures 02 et de l'adresse utilisée pour l'envoi des messages incriminés, a permis de constater que l'adresse IP utilisée est celle de M. O.... Il énonce également que les logs, fichiers de journalisation et adresses IP, qui constituent un traçage informatique que ne peut ignorer le salarié compte tenu de ses fonctions, ne sont pas soumis à une déclaration à la CNIL, ni ne doivent faire l'objet d'une information du salarié en sa qualité de correspondant informatique et libertés, lorsqu'ils n'ont pas pour vocation première le contrôle des utilisateurs. Il ajoute que seule la mise en oeuvre d'un logiciel d'analyse des différents journaux (applicatifs et systèmes) permettant de collecter des informations individuelles poste par poste pour contrôler l'activité des utilisateurs doit être déclarée à la CNIL en ce qu'il s'agit d'un traitement automatisé d'informations nominatives. L'arrêt en conclut que s'agissant non pas de la mise en oeuvre d'un tel logiciel, mais d'un simple traçage issu des fichiers de journalisation, pour lesquels la charte des ressources informatiques et internet en vigueur à l'AFP précise qu'ils sont conservés par l'administrateur pour une durée pouvant atteindre six mois, la preuve opposée au salarié est légale et ne procède pas d'une exécution déloyale du contrat. 18. En statuant ainsi, alors que l'exploitation des fichiers de journalisation, qui permettent d'identifier indirectement une personne physique, constitue un traitement de données à caractère personnel au sens de l'article 2 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, et était ainsi soumise aux formalités préalables à la mise en oeuvre de tels traitements prévues au chapitre IV de ladite loi, ce dont il résultait que la preuve était illicite et, dès lors, les prescriptions énoncées au paragraphe 16 du présent arrêt invocables, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : REJETTE le pourvoi incident formé par l'Agence France Presse ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il juge le licenciement de M. O... fondé sur une faute grave et le déboute en conséquence de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 16 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne l'Agence France Presse aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'Agence France Presse à payer à M. O... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. O... PREMIER MOYEN DE CASSATION (congés d'ancienneté) Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande tendant au paiement d'un rappel d'indemnité de congés d'ancienneté de 2007 à 2015 ; AUX MOTIFS QUE l'AFP applique au présent salarié l'article 31 de la convention collective des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne du 1er avril 1987, qui fixe un congé annuel de 44 jours ouvrables ; que le salarié prétend en sus de ces 44 jours au bénéfice du congé d'ancienneté de l'article 28 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse du 1er janvier 1996 en soutenant qu'il faut comparer les accords avantage par avantage, que seule cette convention prévoit un congé d'ancienneté, qu'aucune comparaison ne peut être faite avec les autres dispositions conventionnelles qui ne prévoient pas un congé d'ancienneté et qui n'ont ni le même objet ni la même cause pour déterminer la durée du congé annuel à raison du statut de cadre des salariés et que donc ce congé d'ancienneté doit se cumuler avec les autres congés ; que pour l'infirmation du jugement et le débouté du salarié, l'AFP fait valoir que les avantages prévus par la convention collective du personnel d'encadrement des agences de presse, par l'accord d'entreprise et par la convention collective des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne ont le même objet ou la même cause et que la convention des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne, qu'elle applique volontairement dans l'entreprise, est largement plus favorable et doit seule recevoir application ; qu'en droit, en cas de concours d'accords collectifs, les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulation contraire, se cumuler, seul le plus favorable d'entre eux devant s'appliquer ; que l'article 27 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse prévoit un congé principal d'été de 24 jours ouvrables en une seule fois, des jours supplémentaires en cas de fractionnement du congé principal à l'initiative de l'employeur, et un congé d'hiver de 6 jours ; qu'aux termes de l'article 28 de cette convention intitulé "congés d'ancienneté", "Le cadre bénéficie d'un congé d'ancienneté de : 2 jours ouvrables après 5 ans de présence dans l'entreprise ; portés à 4 jours ouvrables après 10 ans de présence dans l'entreprise ; portés à 6 jours ouvrables après 15 ans de présence dans l'entreprise. Ces congés supplémentaires pourront être pris à tout moment de l'année en accord avec le chef d'entreprise, et suivant les nécessités du travail"; soit un total maximum de 36 jours ; que l'accord collectif d'entreprise AFP du 1er avril 1983 stipule en son chapitre IV " congés payés vacances''' prévoit : - article 25 : " Après une année de travail effectif, la durée du congé est de... 26 jours ouvrables ; - article 27 : " Les collaborateurs qui comptent un an de travail effectif à l'AFP au 1er juin ont droit à un "congé cadre" égal à 6 jours ouvrables". Ceux qui n'ont pas une année de travail effectif bénéficient d'un congé réduit proportionnellement à leur temps de présence, soit une demi-journée par mois de travail effectif " ; - article 28 " Les collaborateurs qui comptent un an de travail effectif à l'AFP au 1er juin ont droit à un congé d'hiver égal à six jours ouvrables à prendre entre le 1er novembre et le 1er avril. Ceux qui n'ont pas une année de travail effectif bénéficient d'un congé réduit proportionnellement à leur temps de présence, soit une demi-journée par mois de travail effectif ". Soit un total maximum de 38 jours ; que la convention collective des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne, intégrée à l'accord d'entreprise pour les cadres administratifs de AFP prévoit dans sa mise à jour du 1er octobre 1979 appliquée par l'employeur, au chapitre "vacances - article 28 "Un congé annuel de 44 jours ouvrables est accordé aux cadres... Ce congé est fixé comme suit : pendant la première année : 3 jours de congés par mois de référence. après un an de présence : 44 jours ouvrables dont 26 au titre des vacances d'été, 12 au titre des vacances d'hiver, 6 au titre des congés cadres". Soit un total maximum de 44 jours ; que les dispositions de ces trois accords collectifs portent donc sur les mêmes avantages ; que la convention des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne fixe une durée de congé de base plus favorable que les deux autres accords collectifs et une condition d'ancienneté d'un an pour l'octroi de 6 jours congés supplémentaires aux cadres, semblable à celle de l'accord collectif d'entreprise, mais plus favorable que la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse qui ne prévoit ce congé supplémentaire de 6 jours au bénéfice du cadre qu'au bout de 15 ans de présence dans l'entreprise ; que l'AFP est donc fondée à appliquer les avantages plus favorables de la convention des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne, sans cumul avec le congé d'ancienneté tel que prévu par l'article 28 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse ; que le salarié est donc débouté de sa demande de rappel de congé de 2007 à 2012 et le jugement doit donc être infirmé de ce chef; que M. O... est aussi débouté de sa demande nouvelle à ce titre pour les années 2013 à 2015. ALORS QU'en cas de concours de conventions collectives, seuls les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler, le plus favorable d'entre eux pouvant seul être accordé ; que l'article 28 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse octroie aux cadres des congés supplémentaires pour ancienneté, tandis que l'accord d'entreprise des cadres administratifs de l'AFP subordonne, en ses articles 25, 27 et 28, le bénéfice global de 44 jours ouvrables de congés pour les cadres, à la condition qu'ils aient un an d'ancienneté dans l'entreprise ; que la convention collective des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne prévoit en son article 28 un congé annuel de 44 jours avec un supplément de 6 jours pour les cadres ; qu'il en résulte que les congés supplémentaires, octroyés pour ancienneté dans le premier cas et en considération du statut de cadre dans les deuxième et troisième cas, n'ont ni la même cause, ni le même objet, de sorte que le congé d'ancienneté peut se cumuler avec les congés payés conventionnels ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 28 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse, des articles 25, 27 et 28 de l'accord d'entreprise des cadres administratifs de l'AFP et de l'article 28 de la convention collective des cadres administratifs de la presse quotidienne parisienne pour fausse application, ensemble l'article 1103 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION (licenciement) Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de Monsieur O... était justifié par une faute grave et de l'avoir en conséquence débouté de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; AUX MOTIFS QUE, sur la procédure, ( ), l'article 32 du règlement intérieur de l'AFP dispose : « En outre, en application du protocole du 22 septembre 1969, aucune sanction autre qu'un simple avertissement ne sera notifiée sans qu'aient été préalablement avisés les délégués du personnel de la catégorie de l'intéressé » ; que si la notification du licenciement s'entend en principe du jour de l'envoi de la lettre de rupture, l'article 22 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse du 1er janvier 1996 dispose toutefois que la date de première présentation de la lettre recommandée avec accusé de réception constitue la date de notification de la rupture du contrat ; que l'AFP est donc tenue d'informer préalablement les délégués du personnel de sa décision avant de notifier le licenciement, et non de recueillir leur avis préalable seul de nature à conduire l'employeur à modifier la sanction envisagée ; qu'en avisant les délégués du personnel le 23 mars 19h38 du licenciement notifié à M O... au plus tôt le 24 mars, dans un délai lui permettant de modifier sa position, l'AFP a respecté les textes en vigueur et n'a violé aucune garantie de fond, à supposer même qu'elle n'a pas respecté le délai d'information ; que l'article 1er de la Convention d'Entreprise AFP du 29 octobre 1976 dispose : « Elle a pour objet d'adapter aux conditions particulières de l'AFP les dispositions de la convention collective de travail des cadres administratifs de la Presse Quotidienne Parisienne ... » ; « Cette convention collective est applicable aux cadres de l'AFP dont les emplois figurent à l'annexe 11 de la présente convention d'entreprise, à l'exception des dispositions traitées par la présente convention d'entreprise au titre II ci-après sous la dénomination « Dispositions particulières », de sorte que la convention collective du travail de cadres administratifs de la Presse Quotidienne Parisienne ne s'applique donc pas de plein droit à l'AFP et à ses cadres ; que l'article 51 de la Convention d'Entreprise AFP du 29 octobre 1976 dispose : « Tout litige sera réglé au mieux des intérêts réciproques de l'AFP et des cadres administratifs. Les confits individuels seront soumis à une convention paritaire amiable, ayant uniquement mission conciliatrice ... Si l'une des parties récuse cette commission, ou si la tentative de conciliation échoue, les intéressés pourront toujours porter le différend devant toute juridiction compétente en la matière » ; que l'article 40 de la convention collective d'entreprise des cadres administratifs de la presse du 1er avril 1983 prévoit le même dispositif, en précisant que la commission se réunira à la demande de l'une ou l'autre des parties ; que l'article 7 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse du 1er janvier 1996 prévoit la possibilité de saisir une commission paritaire de conciliation à l'initiative de l'une ou l'autre des parties ; qu'aucune disposition conventionnelle n'oblige l'AFP, plutôt que le salarié, à saisir obligatoirement et préalablement à toute sanction la commission paritaire amiable afin de tenter une conciliation, ni à informer le salarié concerné de cette possibilité. En l'absence de précision apportée par l'article 51 applicable, il appartient seulement à la partie qui y a intérêt de saisir cette commission ; qu'au demeurant, M O... qui a su saisir le 12 mai 2015 la commission paritaire nationale de conciliation prévue à l'article 7 de la convention collective nationale du personnel d'encadrement des agences de presse, laquelle s'est déclarée incompétente, était informé par la mention sur ses bulletins: de paie de l'application de la Convention d'Entreprise AFP du 29 octobre 1976 et avait donc la possibilité de saisir la commission paritaire amiable interne prévue par l'article 51, ce qu'il n'a pas fait ; qu'aucune violation d'une garantie de fond, ni d'une règle de procédure conventionnelle de licenciement n'est donc imputable à l'AFP. M O... doit être débouté de ce chef ; qu'au fond, la lettre de licenciement, à laquelle il est expressément fait référence, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce, est ainsi motivée : "Monsieur, Le vendredi 30 janvier 2015, une salariée du service commercial France de l'ÀFP reçoit un appel de son client, l'Européenne de Donnée (EDD), pour lui faire part d'incidents répétés sur son serveur. Face à la gravité des faits, la salariée transfère cet appel au Directeur Marketing de l'AFP. M. B... H... (PDG de l'EDD) et M Q... C... R... (Directeur général de l'EDD) lui indiquent avoir reçu via le formulaire de contact de leur site de fausses demandes de renseignements. Ces demandes ont été émises au nom de sociétés dont certaines sont clientes de l'EDD et d'autres qui ne le sont pas. Chacune de ces demandes comporte le nom et les coordonnées (mail) des personnes qui les envoient. Or, toutes ces demandes comportaient le même message : « consultation de dépêches AFP et alerte par mail ». L'EDD décide donc de faire intervenir son service commercial et interroge une des clientes qui aurait fait une de ces demandes. Cette dernière leur répond qu'aucune demande n'a été émise. Après enquête interne, effectivement, l'EDD découvre en consultant les logs de connexion sur son serveur que toutes ces demandes sont en fait des requêtes provenant d'un serveur dont le numéro d'IP est une adresse AFP. L'EDD envoie au Directeur Marketing de l'AFP le détail de ces 5 demandes. L'AFP découvre que ces demandes ont été émises à des noms et coordonnées de personnes qui sont ses propres clients. L'AFP procède alors à sa propre enquête interne grâce aux documents techniques fournis par l'EDD pour vérifier si quelqu'un de l'AFP s'est connecté à l'EDD via le serveur dont l'adresse IP lui a été fournie par l'EDD. Le résultat de ces recherches démontre que ces connexions proviennent de votre ordinateur. Ces faits vous ont été exposés le 10 mars 2015 lors de l'entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu'à un licenciement auquel nous vous avions convoqué et auquel vous vous êtes présenté accompagné de M. Q... W... A.... Malgré l'évidence des faits, vous avez nié être à l'origine de cette usurpation de données informatiques et, par conséquent, de l'usurpation de l'identité de clients de l'AFP pour faire des demandes auprès d'un service partenaire. Nous vous avons précisé que le rapport établi par un expert informatique sous contrôle d'huissier démontrait que les messages de réclamation adressés à l'EDD émanaient bien de votre ordinateur. Or, compte tenu des heures de connexion, réparties tout au long de la journée, et de leur durée, jusqu'à 11 minutes, il n'était pas possible qu'une autre personne que vous ait pu utiliser votre ordinateur à votre insu pendant cette journée du 30 janvier 2015. Vous nous avez dit ne pas comprendre ce qui avait pu se passer et avez contesté une nouvelle fois être à l'origine de cette usurpation de données informatiques. Au-delà du caractère intrinsèquement grave des faits commis, qui constituent une violation de multiples règles fondamentales, parmi lesquelles, l'obligation de loyauté contractuelle, l'obligation de secret et de discrétion, et l'obligation d'utilisation conforme des moyens informatiques de l'entreprise, nous vous avons précisé que ce type de manipulation avait pour conséquence : - Une détérioration de la relation de confiance entre l'AFP et son partenaire de distribution ; - Une détérioration potentielle de la relation client de l'AFP et une possible perte de chiffre d'affaires : les clients de l'AFP pouvant se détourner des services de l'ÀFP au profit de tiers. De surcroît, l'usurpation d'identité à travers des manipulations informatiques auprès de sociétés extérieures à l'AFP peut entraîner des contentieux juridiques avec nos clients ainsi que nos partenaires. Enfin des informations confidentielles (nom des sociétés clientes de l'AFP non client de l'EDD) ont été divulguées à notre partenaire, ce qui constitue un acte grave. Suite à cet entretien et sur l'insistance de M. Q... W... A..., nous avons revalidé avec la Direction des Systèmes d'information que les logs n'avaient pas pu être modifiés, confirmant ainsi que les messages envoyés à l'EDD émanaient de façon certaine de votre ordinateur. Aussi, compte tenu de l'évidence des faits constatés, malgré vos dénégations, et de leur gravité, nous vous notifions votre licenciement pour faute grave, sans préavis ni indemnités. Votre mise à pied à titre conservatoire vous sera néanmoins payée... » ; que selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié ; qu'il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement ; que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis ; l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ( ) ; que les faits relatés dans la lettre de licenciement ont été révélés par un mail du directeur général délégué d'EDD du 30 janvier 2015, produit au débat, alertant l'AFP de cinq fausses demandes de renseignement sur leur service de rediffusion des dépêches AFP, reçues le jour même par EDD, émises à partir de la même adresse IP 158.50.204.15 entre 12h14 et 15h34 au nom de diverses personnes appartenant à cinq sociétés différentes ; qu'à ce mail est jointe la capture d'écran qui confirme l'alerte donnée par EDD ; que selon le procès-verbal de constat d'huissier dressé le 20 février 2015, en présence d'un expert informatique et de M. S... responsable sécurité des systèmes d'information de l'AFP, le recoupement des informations des fichiers de journalisation extraites de données du gestionnaire centralisé de logs de l'AFP (stockage) sur la plage horaire de 12h02 à 16h02 et de l'adresse IP utilisée pour l'envoi des messages incriminés à EDD , a permis de constater que l'adresse IP utilisée est celle de M P... O... ; qu'en sa qualité de responsable de la valorisation et du contrôle des usages numériques qui sont faits des produits de l'AFP, M O... travaillait à la direction commerciale et marketing de sorte qu'il pouvait accéder aux fichiers clients de l'entreprise ; que les faits reprochés au salarié dans la lettre de licenciement sont donc prouvés, M O... n'expliquant en rien comment son adresse aurait pu être piratée par un tiers ou les logs altérés ; que par ailleurs les logs, fichiers de journalisation et adresses IP, qui constituent un traçage informatique que ne peut ignorer M O... compte tenu de ses fonctions, ne sont pas soumis aune déclaration à la CNIL, ni à faire l'objet d'une information du salarié, lorsqu'ils n'ont pas pour vocation première le contrôle des utilisateurs ; que seule la mise en oeuvre d'un logiciel d'analyse des différents journaux (applicatifs et systèmes) permettant de collecter des informations individuelles poste par poste pour contrôler l'activité des utilisateurs doit être déclarée à la CNIL en ce qu'il s'agit d'un traitement automatisé d'informations nominatives ; que s'agissant dans le cas présent, non pas de la mise en oeuvre d'un tel logiciel, mais d'un simple traçage issu des fichiers de journalisation, pour lesquels la charte des ressources informatiques et internet en vigueur à de l'AFP précise qu'ils sont conservés par l'administrateur pour une durée pouvant atteindre six mois, la preuve opposée à M O... est légale et ne procède pas d'une exécution déloyale du contrat ; que la faute de M O... qui procède d'une exécution parfaitement déloyale de son contrat le chargeant du contrôle et de la valorisation des usages numériques de l'AFP, en ce qu'elle consiste à envoyer cinq faux messages de tiers à un partenaire de distribution important de l'entreprise, de nature à altérer les liens avec ce partenaire, est d'une gravité telle qu'elle empêche la poursuite de la relation de travail, y compris pendant la durée du préavis ; que le licenciement pour faute grave est donc fondé et M. O... est débouté de ses demandes au titre de la rupture de son contrat ; 1° ALORS QU'aux termes de l'article 32 du règlement intérieur de l'AFP, aucune sanction autre qu'un simple avertissement ne sera notifiée sans qu'aient été préalablement avisés les délégués du personnel de la catégorie de l'intéressé ; que le caractère préalable de d'information a pour finalité d'offrir au salarié une protection supplémentaire par l'assistance ou l'intervention des représentants du personnel, laquelle ne peut être avoir d'effet utile que si l'information est effectuée dans un délai suffisant rendant l'assistance effective ; que la cour d'appel a relevé que les délégués du personnel avaient été avisés le 23 mars 2015 à 19h38 d'un licenciement par lettre datée du 23 mars 2015 et notifiée au plus tôt le 24 mars, dans un délai lui permettant de modifier sa position ; qu'en statuant de la sorte, quand il n'était pas contesté par l'AFP que la lettre de licenciement avait été envoyée le 23 mars 2015, pour une première présentation le 24 mars 2015, de sorte que l'information des représentants du personnel effectuée postérieurement à l'envoi de la lettre de licenciement ne permettait pas au salarié de sa faire assister utilement pour permettre le cas échéant à l'employeur de revenir sur sa décision, la cour d'appel a violé l'article 32 du règlement intérieur de l'AFP, ensemble l'article L.1232-1 du code du travail ; 2° ALORS ensuite QU'aux termes de l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, les conflits individuels seront soumis à la commission paritaire amiable ; qu'il en résulte que ce texte institue une procédure particulière obligatoire permettant de rechercher une solution amiable ; qu'en jugeant qu'en cas de licenciement, sa saisine préalable par l'employeur ne constituait pas une obligation, mais qu'il appartenait seulement à la partie la plus diligente de la saisir, la cour d'appel a violé l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, ensemble l'article L.1232-1 du code du travail ; 3° ALORS encore QU'un comportement fautif ne peut résulter que d'un fait imputable au salarié ; que, s'agissant du dysfonctionnement imputé à Monsieur O..., celui-ci avait fait valoir que les informations collectées par l'employeur contenues dans le procès-verbal de constat de l'huissier dressé le 20 février 2015 en présence d'un expert informatique ne permettaient pas d'établir que les faits lui étaient imputables, dès lors que l'entreprise ne s'était pas assurée du fait qu'aucune intervention n'avait pu se produire sur les fichiers logs entre la date des connexions litigieuse et celle de la réalisation du constat informatique ; qu'en omettant d'examiner ce point, alors même qu'elle y était invitée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1 et L.1331-1 du code du travail ; 4° ALORS par ailleurs QUE le licenciement pour faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, ne peut pas être justifié par des éléments de preuve obtenus de façon illicite et dont la production est de ce fait irrecevable ; que constituent un moyen de preuve illicite les informations collectées, avant toute déclaration à la CNIL, par un système de traitement automatisé de données personnelles comme la collecte des adresses IP, permettant d'identifier indirectement une personne physique ou encore le traçage des fichiers de journalisation ; que la cour d'appel a retenu que les logs, fichiers de journalisation et adresses IP, qui constituaient un traçage informatique, n'étaient pas soumis à une déclaration de la CNIL, ni à une information du salarié, dès lors qu'ils n'avaient pas pour vocation première le contrôle des utilisateurs ; qu'en statuant de la sorte, par un motif inopérant, quand seule la condition de la possible identification d'une personne physique était déterminante, la cour d'appel a violé les articles 2 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ensemble les articles L.1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 du code du travail, l'article 9 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 5° ALORS enfin QU'en considérant qu'un simple traçage issu des fichiers de journalisation constituait une preuve légale ne procédant pas d'une exécution déloyale du contrat de travail, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si lesdits fichiers contenaient des informations individuelles, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 2 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ensemble les articles L.1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 du code du travail, l'article 9 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Moyens produits, au pourvoi incident, par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Agence France Presse PREMIER MOYEN DE CASSATION Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Agence France Presse à payer à M. O... les sommes de 293,76 euros et de 291,66 euros au titre du 13e mois, respectivement de l'année 2007 et de l'année 2008 ; AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article 1 de la Convention collective du personnel d'encadrement des agences de presse « les dispositions de la présente convention remplacent les clauses des contrats ou accords existants, dès lors que ceux-ci sont moins avantageux pour les cadres des agences de presse. Cette convention ne pourra, en aucun cas, être l'occasion de restrictions aux avantages acquis à titre individuel ou collectif » ; que l'article 12 de la Convention collective du personnel d'encadrement des agences de presse du 1er janvier 1996, applicable en l'espèce, précise : « Après un an de présence dans l'entreprise, les cadres perçoivent en fin d'année un 13ème mois égal aux appointements du mois de décembre et prenant en compte les seuls éléments ayant un caractère de fixité. Pour les salariés percevant leur salaire en partie sous la forme d'un fixe et en partie sous la forme de commission, le mois est calculé sur la moyenne des 12 derniers mois de l'ensemble de ces rémunérations » ; que selon les pièces produites et les débats, le système de rémunération variable en vigueur à l'AFP est composé de : - une prime mensuelle de vente brute constituée d'un pourcentage du chiffre d'affaires réalisé par le salarié individuellement, - d'une prime basée sur l'atteinte d'objectifs par l'équipe à laquelle est intégré le salarié prédéfinis par l'AFP, ce qui est le cas de M. O... ; - d'une prime mensuelle de suivi des dossiers liée à l'atteinte d'objectifs qualitatifs précis fixés par la direction commerciale et plafonnée par commercial et par mois ; que ces primes se cumulent ou non selon l'équipe concernée ; que le fait que la prime d'objectif récompense un travail, un objectif d'équipe ne peut justifier d'exclure cette rémunération variable versée à M. O... du bénéficie de l'article 12 de la convention collective applicable, dans la mesure où il participe par son travail à l'atteinte de cet objectif ; que cette rémunération entre donc dans le calcul du 13e mois ; que selon les bulletins de salaire M. O... a perdu en 2007 un 13e mois de 5 444,56 € qui exclut de son assiette une prime de résultats de 3 525,15 € et en 2008 un 13e mois de 5 562,15 € qui exclut de son assiette une prime de résultats de 3 500 € ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le demandeur bénéficie d'une rémunération constituée d'une partie fixe et d'une partie variable ; que l'AFP exclut du calcul les primes d'objectifs subordonnées à un objectif individuel ou collectif, mais l'article 12 de la convention collective prévoit que pour les salariés qui perçoivent un salaire constitué d'un fixe et d'une commission, le 13e mois est articulé sur la moyenne des 12 derniers mois perçus ; que ce texte n'indique pas que seules les commissions correspondant à un pourcentage sur le chiffre d'affaires réalisé par le salarié doivent être prises en compte comme le plaide l'AFP ; que la prime d'objectif récompense un travail que l'objectif soit individuel ou d'équipe ; que ces primes doivent donc être prises en compte pour le calcul du 13e mois ; qu'en tout état de cause, c'est l'ensemble de la part variable de la rémunération qui doit être prise en compte ; ALORS QU'aux termes de l'article 12 de la convention collective du personnel d'encadrement des agences de presse, « les salaires fixés par avenant à la présente convention correspondent à la somme minimum que chaque salarié doit percevoir pour la durée légale du travail. Après un an de présence dans l'entreprise, les cadres perçoivent en fin d'année un 13e mois, égal aux appointements du mois de décembre et prenant en compte les seuls éléments ayant un caractère de fixité. Pour les salariés percevant leur salaire en partie sous la forme d'un "fixe" et, en partie, sous la forme de "commissions", le 13ème mois est calculé sur la moyenne des 12 derniers mois de l'ensemble de ces rémunérations. Le personnel entré en cours d'année perçoit ce 13e mois au prorata du temps passé dans l'entreprise ( ) » ; que ces stipulations distinguent clairement la partie fixe des commissions ; que ces dernières désignent exclusivement une rémunération fixée par un pourcentage déterminé sur un élément variable représentant l'apport du salarié à l'entreprise, permettant d'intéresser le salarié, sur son chiffre d'affaires, à la réalisation de sa propre prestation de travail ; que ces commissions ne s'identifient donc pas et n'intègrent pas des primes qui, elles, ne sont pas fondées sur le seul chiffre d'affaires mais sur des performances réalisées ; qu'en jugeant dès lors, pour faire droit à la demande du salarié, qu'il y avait lieu d'intégrer dans le 13e mois les primes qu'il invoquait, la cour a violé l'article 12 susvisé, ensemble les articles L. 3141-22 du code du travail et 1134 ancien (aujourd'hui 11103) du code civil. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Agence France Presse à payer à M. O... les sommes de 176,25 euros et de 175 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de RTT, respectivement pour les années 2007 et 2008 ; AUX MOTIFS PROPRES QUE si les jours de RTT ne constituent pas des congés payés au sens de l'article L. 3141-3 du code du travail, il n'en reste pas moins que le droit à ces JRTT ne peut résulter, comme les congés payés, que d'un travail effectif et plus spécialement d'un travail en-deçà des 39 heures dans le cadre de la réduction du temps de travail ; qu'en l'absence de dispositions légales ou conventionnelles, le régime de l'indemnité des congés payés, fondé sur la rémunération brute totale du salarié, peut donc inspirer le régime applicable pour l'indemnité compensatrice de jours de congés liés à la réduction du temps de travail ; qu'en effet, un salarié en congé ou en RTT ne peut participer à la réalisation de l'objectif qui lui est assigné quelle que soit sa nature [individuelle ou collective] ou sa fréquence [mensuelle, trimestrielle ou annuelle], et voit donc sa rémunération variable affectée par la prise de RTT ; que la prime d'objectifs versée par l'AFP se trouvant liée à l'activité de M. O... et à ses performances est donc affectée par la prise de JRTT ; qu'en conséquence, la prime sur objectifs de 3 525,15 € en 2007 et de 3 500 € en 2008 versé à M. O... doit être intégrée dans l'assiette de calcul de l'indemnité compensatrice de JRTT, laquelle ne peut ouvrir droit à une indemnité compensatrice de congés payés du 1/10, puisque les JRTT ne produisent pas des jours de congés ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'AFP maintient la rémunération lors de la prise de jours RTT mais n'inclut pas les éléments variables dans le calcul de l'indemnité de RTT au motif qu'il n'y a pas de texte régissant le maintien du salaire pendant la prise de jours RTT et que les éléments variables ne sont pas affectés par la prise de ces congés ; que cependant l'ensemble des primes constituant la rémunération variable est étroitement lié à l'activité du salarié et à ses performances, il est donc forcément affecté par la prise de jour RTT ; que l'AFP doit donc inclure les éléments variables dans le calcul de l'indemnité de jour RTT ; qu'en conséquence, il y a lieu de faire droit au rappel d'indemnité de RTT formulée par le demandeur ; 1° ALORS QUE la réduction du temps de travail s'accompagne, en principe, d'une réduction proportionnelle de l'ensemble de la rémunération ; que l'employeur qui procède à la réduction du temps de travail n'est tenu par aucun texte, à défaut de tout accord collectif sur ce point, de maintenir la rémunération antérieure, qu'elle soit fixe ou variable ; qu'à l'inverse, celui qui entend la maintenir, en dehors de toute obligation légale ou conventionnelle, peut librement choisir de ne maintenir que la part fixe à l'exclusion de la part variable ; qu'il s'ensuit que cette dernière, non maintenue, n'a pas alors à entrer dans l'assiette de l'indemnisation des jours de RTT ; qu'en jugeant le contraire, la cour a violé les articles L. 3121-10 du code du travail et 1134 ancien (aujourd'hui 1103) du code civil ; 2° ALORS QUE, tout en concédant la différence spécifique entre congés payés et jours de RTT, la cour a considéré qu'en l'absence de dispositions légales ou conventionnelles, une application analogique était possible entre eux, au motif que le droit à ces jours de RTT, comme le droit aux congés payés, ne peut résulter que d'un travail effectif en deçà de 39 heures dans le cadre de la réduction du temps de travail et qu'un salarié en congé ou en RTT ne peut participer à la réalisation de l'objectif qui lui est assigné ; que, cependant, cette analogie est sans fondement ; qu'en effet, les congés payés sont des jours perdus qui diminuent le temps d'activité travaillée, ce pourquoi la loi impose logiquement, pour le calcul de l'indemnité correspondante, en cas de maintien du salaire, le versement d'une rémunération compensatrice identique à celle perçue pendant la période travaillée, part variable comprise (art. L. 3141-22 du c. trav.) ; qu'en revanche, outre que la loi n'impose ni le maintien du salaire pour les jours de RTT, ni cette conséquence alors automatique d'une rémunération intégrale, ces jours ne sont pas des jours perdus mais sont la contrepartie d'heures de travail effectivement réalisées entre 35 et 39 heures et qui, sans ces RTT, seraient considérées comme des heures supplémentaires ; qu'ainsi, il existe entre congés payés et jours de RTT une différence sous tous rapports qui n'autorise aucune analogie entre eux ; qu'en décidant dès lors, en dehors de toute détermination légale ou conventionnelle, que le régime de l'indemnité de congés payés pouvait et, concrètement, devait « inspirer » le régime applicable aux jours de réduction du temps de travail dans la solution à donner au litige, en dépit des différences essentielles qui les séparent, la cour a violé les articles L. 3141-3 et L. 3121-10 du code du travail, ensemble l'article 1134 ancien du code civil ; 3° ALORS, en toute hypothèse, QU'à supposer qu'une analogie soit possible entre les congés payés et les jours de RTT, le choix, libre, de l'AFP de maintenir la rémunération en dépit de la réduction du temps de travail ne lui a été imposé ni par la loi, ni par aucune convention, de sorte qu'elle a pu tout aussi librement décider que ce maintien ne porterait que sur la part fixe de la rémunération, à l'exclusion de la part variable ; qu'il s'ensuit, qu'au contraire de ce qu'impose la loi pour les congés payés dans l'hypothèse du maintien d'une rémunération, où l'indemnité correspondante doit nécessairement intégrer la part variable (art. 3141-22 du c. du trav.), si elle existe, rien n'imposait à l'AFP, décidant librement de maintenir exclusivement la partie fixe de la rémunération dans le cadre de la réduction du temps de travail, d'intégrer la part variable de cette rémunération dans l'assiette de calcul de l'indemnité de jours de RTT ; qu'en décidant le contraire, la cour a violé les articles L. 3141-3 et L. 3121-10 du code du travail, ensemble l'ancien article 1134 du code civil ; 4° ALORS QUE pour décider d'appliquer analogiquement le régime des congés payés aux journées de RTT, de « s'en inspirer », la cour a retenu que le salarié en RTT – c'est-à-dire bénéficiant actuellement de sa journée de réduction du temps de travail – « ne peut participer à la réalisation de l'objectif qui lui est assigné quelle que soit sa nature ( ) ou sa fréquence » ; que, cependant, les jours de RTT correspondent ici à des heures travaillées, entre 35 et 39 heures, pour lesquelles aucune rémunération variable n'a été prévue ; qu'il s'ensuit, au contraire de ce qu'a affirmé la cour, que la « prise de RTT » n'affecte en rien la rémunération variable du salarié puisque l'activité dont ces jours de RTT sont la contrepartie n'est pas susceptible d'être l'objet d'une rémunération variable ; qu'en se déterminant dès lors comme elle l'a fait, par motifs inopérants, la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Agence France Presse à payer à M. O... les sommes de 352,51 € et de 350 € à titre de rappel d'indemnités de congés payés, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2016, respectivement pour les années 2007 et 2008 ; AUX MOTIFS QU'en application de l'article L. 3141-22 du code du travail, le congé annuel ouvre droit à une indemnité égale au 1/10e de la rémunération totale brute perçue par le salarié au cours d »e la période de référence, cette indemnité étant destinée à compenser la perte de rémunération résultant pour le salarié de la prise de congé ; que pour qu'une prime entre dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, il faut donc que son montant soit affecté par la prise de congé (sauf à payer à nouveau en partie cette prime), qu'elle constitue bien un élément de rémunération et un droit pour le salarié et ne corresponde pas à une prime ou gratification discrétionnaire et bénévole ; que lorsqu'une prime est assise uniquement sur les périodes de travail, son intégration dans l'assiette de calcul dans l'indemnité de congés payés n'a pas pour effet de la faire payer une deuxième fois ; qu'à l'inverse, une prime annuelle (d'ancienneté, de rendement, de productivité ou d'assiduité) attribuée au salarié sans distinction entre périodes de travail et de congés payés confondues doit être exclue de l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés ; que la prime fondée sur l'atteinte d'objectifs, prédéfinis par l'AFP, par l'équipe à laquelle est intégré le salarié, versée en 2007 et 2008 à M. O... constitue une rémunération variable au moins pour partie liée à l'activité personnelle de ce salarié pendant les mois travaillés et qui est affectée par la priser de congés annuels ; que cette prime doit donc être inclue dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés ; que l'AFP ne justifie pas du versement de cette indemnité de 1/10e du montant des primes d'objectifs de 3 525,15 € en 2007 et de 3 500 € ; 1° ALORS QUE ne peuvent entrer dans la base de calcul de l'indemnité de congés payés des primes rémunérant indifféremment les périodes de congés et de travail effectif, sauf à faire payer deux fois les mêmes sommes par l'employeur ; que seules peuvent entrer dans cette base les primes liées à l'activité personnelle du salarié, à l'exclusion de celles qui récompensent des résultats globaux, d'un groupe ou de l'entreprise tout entière ; qu'en l'espèce, pour juger que la prime d'objectifs assignés par l'AFP au groupe auquel appartenait M. O... devait être intégrée dans la base de calcul des congés payés de ce dernier, la cour a retenu qu'il avait en partie personnellement participé à l'atteinte de ces objectifs ; que, cependant, l'activité participative de M. O... à l'activité du groupe était nécessairement liée à son appartenance à ce dernier ; qu'il ne s'ensuit pas que les récompenses attachées à l'atteinte d'objectifs assignés au groupe, liées à une performance collective de ce dernier, soient une récompense liée à une activité individuelle de M. O... ; qu'en jugeant le contraire, la cour, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2° ALORS QUE seules peuvent entrer dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés les primes liées à l'activité personnelle du salarié, à l'exclusion de celles qui récompensent des résultats globaux, d'un groupe ou de l'entreprise tout entière ; qu'en l'espèce, la cour a constaté que la prime litigieuse était « basée sur l'atteinte d'objectifs, prédéfinis par l'AFP, par l'équipe à laquelle est intégré » M. O... ; qu'elle a ainsi explicitement constaté que ces objectifs étaient assignés par l'employeur au groupe, et non pas individuellement à M. O... ; qu'il s'ensuit que la récompense de cette atteinte, constituée par la prime, est elle-même récompense du groupe, récompense collective, et non pas une récompense individuelle, peu important, sous ce rapport, que l'atteinte des objectifs ait supposé, comme tout résultat global, un concours d'efforts communs ; qu'en jugeant dès lors que la prime litigieuse devait entrer l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés de M. O..., la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 3141-22 du code du travail ; 3° ALORS, en toute hypothèse, QUE ne peuvent entrer dans la base de calcul de l'indemnité de congés payés des primes rémunérant indifféremment les périodes de congés et de travail effectif, sauf à faire payer deux fois les mêmes sommes par l'employeur ; qu'en l'espèce, pour décider d'intégrer la prime litigieuse dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, la cour s'est bornée à affirmer qu'elle était « affectée par la prise de congés annuels » ; que cette affirmation, cependant, ne repose elle-même sur rien d'autre que l'indication, inopérante, selon laquelle M. O... a participé à l'activité du groupe ; qu'en se déterminant dès lors comme elle l'a fait, sans avoir retenu aucun élément permettant d'établir que la prise des congés de M. O... aurait effectivement affecté pour lui le paiement de la prime, la cour a violé l'article L. 3141-22 du code du travail.
En application des articles 2 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données, les adresses IP, qui permettent d'identifier indirectement une personne physique, sont des données à caractère personnel, au sens de l'article 2 susvisé, de sorte que leur collecte par l'exploitation du fichier de journalisation constitue un traitement de données à caractère personnel et doit faire l'objet d'une déclaration préalable auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en application de l'article 23 de la loi précitée. En application des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'illicéité d'un moyen de preuve, au regard des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données, n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l'utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. Encourt la cassation l'arrêt qui énonce que les logs, fichiers de journalisation et adresses IP ne sont pas soumis à une déclaration à la CNIL, ni ne doivent faire l'objet d'une information du salarié en sa qualité de correspondant informatique et libertés lorsqu'ils n'ont pas pour vocation première le contrôle des utilisateurs, alors que la collecte des adresses IP par l'exploitation du fichier de journalisation constitue un traitement de données à caractère personnel au sens de l'article 2 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 susvisée et est soumise aux formalités préalables à la mise en oeuvre de tels traitements prévues au chapitre IV de ladite loi, ce dont il résulte que la preuve était illicite et les dispositions des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales invocables
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SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 novembre 2020 Cassation partielle M. CATHALA, président Arrêt n° 1120 FP-P+B+R+I Pourvoi n° P 18-13.769 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020 La société AGC France, société par actions simplifiée, dont le siège est 100 rue Léon Gambetta, BP 1, 59168 Boussois, a formé le pourvoi n° P 18-13.769 contre l'arrêt rendu le 19 janvier 2018 par la cour d'appel de Caen (1re chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. I... G..., domicilié [...] , 2°/ à M. P... RY... , domicilié [...] , 3°/ à M. H... T..., domicilié [...] , 4°/ à Mme L... S..., domiciliée [...] , 5°/ à M. R... S..., domicilié [...] , 6°/ à M. N... M..., domicilié [...] , 7°/ à M. U... V..., domicilié [...] , 8°/ à M. X... O..., domicilié [...] , 9°/ à M. JY... A..., domicilié [...] , 10°/ à M. K... E..., domicilié [...] , 11°/ à M. Y... B..., domicilié [...] , 12°/ à M. Q... F..., domicilié [...] , 13°/ à l'ATC tutelle, dont le siège est BP 70222, 14653 Carpiquet cedex, prise en qualité de curatelle renforcée de M. Q... F..., 14°/ à M. W... D..., domicilié [...] , 15°/ à Mme GS... LU..., domiciliée [...] , 16°/ à M. J... C..., domicilié [...] , 17°/ à M. JA... O..., domicilié [...] , 18°/ à M. Q... BB..., domicilié [...] , 19°/ à M. SW... MJ..., domicilié [...] , 20°/ à Mme JM... UN..., domiciliée [...] , prise en qualité de mandataire liquidateur de la société AGC David miroiterie, 21°/ à l'AGS-CGEA de Rouen, dont le siège est 73 rue Martainville, CS 11716, 76108 Rouen cedex, 22°/ à Pôle emploi, dont le siège est 1-5 avenue du docteur Gley, 75987 Paris cedex 20, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société AGC France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. G... et des dix-sept autres salariés et de l'ATC tutelle, ès qualités, les plaidoiries de Me Buk Lament et celles de Me BX..., l'avis écrit de M. Weissmann, avocat général référendaire et l'avis oral de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Ricour, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mmes Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, Richard, conseillers, Mmes Ala, Chamley-Coulet, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 19 janvier 2018), le groupe David, composé de la société David miroiterie et de la société David services, a été repris le 22 septembre 2010 par le groupe verrier japonais AGC (Asahi Glass Compagny Limited). La société AGC France exerçait la présidence de la nouvelle société AGC David miroiterie venue aux droits de la société David miroiterie et ayant absorbé la société David services. Les actions de la société AGC David miroiterie étaient détenues par une autre société du groupe, également présidée par la société AGC France. 2. Les salariés non protégés ont été licenciés pour motif économique le 16 mai 2012, en raison de la cessation d'activité de la société AGC David miroiterie. Celle-ci a été placée le 9 janvier 2013 en liquidation judiciaire avec poursuite d'activité jusqu'au 9 avril 2013, Mme UN... étant désignée en qualité de liquidatrice. 3. Contestant leur licenciement, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages-intérêts à l'encontre de la société AGC David miroiterie et de la société AGC France, invoquant la qualité de coemployeur de celle-ci. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. La société AGC France fait grief à l'arrêt de la déclarer coemployeur avec la société AGC David miroiterie, de dire qu'elle est tenue, in solidum avec cette dernière société, au paiement et au remboursement de diverses sommes, et de la condamner au paiement de ces sommes, alors « qu'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en retenant, pour décider que la société AGC France avait la qualité de coemployeur des salariés à la cause, qu'à compter de février 2012, la société AGC David miroiterie a délégué à cette société la gestion de ses ressources humaines, que cette dernière lui a facturé son intervention, que dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, que cette dernière société a géré sa trésorerie et, qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, elle a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour cette dernière, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David miroiterie, violant ainsi l'article L. 1221-1 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1221-1 du code du travail : 5. La Cour juge de façon constante que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière (Soc., 2 juillet 2014, n° 13-15.209 et s., Bull. 2014, V, n° 159, Molex ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-27.266 et s., Bull. 2016, V, n° 146, Continental ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-26.541, Bull. 2016, V, n° 145, Proma ; Soc., 6 juillet 2016, n° 15-15.481 à 15-15.545, Bull. 2016, V, n° 147, 3 Suisses). 6. Le premier de ces arrêts a ainsi été commenté par la chambre sociale (Site de la Cour, mensuel du droit du travail n° 56, juillet 2014, p. 4) : "L'arrêt confirme l'importance prise par ce critère d'immixtion dans la gestion économique et sociale de sa filiale par la société mère. Seule est susceptible d'être reprochée à une société mère son immixtion globale et permanente dans le fonctionnement de sa filiale, qui doit prendre à la fois une dimension économique et une dimension sociale. (...) Il n'y a immixtion sociale qu'à condition que la direction du personnel et la gestion des ressources humaines soient prises en main par la société mère qui ne permet plus à la filiale de se comporter comme le véritable employeur à l'égard de ses salariés. La situation de coemploi devrait donc rester exceptionnelle." 7. Il apparaît nécessaire eu égard à l'évolution du contentieux de préciser les critères applicables en la matière. 8. Il y a lieu de juger, en application de l'article L. 1221-1 du code du travail précité, que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière. 9. Pour déclarer la société AGC France coemployeur avec la société AGC David miroiterie, dire qu'elle est tenue, in solidum avec cette dernière société, au paiement et au remboursement de diverses sommes et la condamner au paiement de ces sommes, l'arrêt retient que les sociétés AGC David miroiterie, AGC France, les autres filiales ou sous-filiales oeuvraient toutes dans le domaine du verre et en ce qui concerne les filiales -dont AGC David miroiterie- plus particulièrement dans la transformation du verre. 10. L'arrêt relève également que la société AGC France présidait, par l'intermédiaire d'un directeur, M. KR..., qui la représentait, d'une part, la société AGC David miroiterie, d'autre part, la société Isatis, actionnaire de la société AGC David miroiterie. Il constate que M. KR... avait réalisé des rapports et projets sur la situation de la société AGC David miroiterie, géré des litiges commerciaux, signé des contrats de location, de maintenance, des lettres d'embauche, d'avertissement, de rupture, ainsi qu'un accord salarial en février 2011 et accordé des congés payés, sans que soit démontrée l'existence de consignes particulières données par la société AGC David miroiterie à ces diverses occasions. 11. L'arrêt constate encore que si les éléments produits ne permettent pas d'établir que les achats de fournitures et de machines étaient autorisés par la société AGC France ni que celle-ci fixait les prix de vente, il était imposé en revanche à la société AGC David miroiterie de traiter diverses commandes, rarement rentables, pour d'autres sociétés du groupe, qu'elle était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe et bénéficiait également de prêts. 12. L'arrêt retient enfin qu'il existait, entre les sociétés AGC France et AGC David miroiterie, une confusion de direction, d'intérêt et d'activités qui s'est traduite par une immixtion anormale de la société AGC France dans la gestion sociale de la société AGC David miroiterie, la seconde ayant délégué à la première, à compter de février 2012, la gestion de ses ressources humaines et la société AGC France lui ayant facturé son intervention. Il ajoute que cette confusion s'est également traduite par une immixtion anormale dans la gestion économique puisque, dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une autre filiale du groupe, moyennant redevance, et que la trésorerie a été gérée par la société AGC France. L'arrêt observe que, en outre, entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, la société AGC France a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit d'autres filiales dans des conditions désavantageuses pour la société AGC David miroiterie. 13. En se déterminant ainsi, sans caractériser une immixtion permanente de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare la société AGC David miroiterie et la société AGC France coemployeuses des salariés, juge que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à l'égard de la société AGC France, condamne la société AGC France au paiement de ces sommes, juge que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de diverses sommes en application de l'article 700 du code de procédure civile, des dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au remboursement à Pôle Emploi des allocations de chômage versées aux salariés et condamne la société AGC France au paiement de ces sommes, l'arrêt rendu le 19 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ; Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour la société AGC France La société AGC France fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déclarée coemployeur avec la société AGC David Miroiterie des salariés à la cause, d'avoir en conséquence dit qu'elle était tenue, in solidum, avec cette dernière société, au paiement des sommes de 28.650 €, de 27.200 €, de 13. 600 €, de 40.000 €, de 35.000 €, de 28.800 €, de 33.000 €, de 39.000 €, de 46.000 €, de 10.000 €, de 14.000 €, de 16.000 €, 44.000 €, 22.000 €, de 23.000 €, de 43.000 €, de 40.000 € et de 42.000 € allouées respectivement à M. M. MJ..., G..., E..., RY... , B..., T..., F... assisté par sa curatrice l'association ATC tutelle, D..., S..., M..., C..., V..., X... O..., JA... O..., BB..., A... et à Mmes S... et LU... à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'avoir condamnée au paiement de ces sommes et de l'avoir déclarée tenue, in solidum, avec la société AGC David Miroiterie à rembourser à Pôle Emploi les allocations de chômage versées aux salariés du jour de leur licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois par salarié, et condamnée au paiement de cette somme ; AUX MOTIFS QUE ( .) ; sur la réparation ; que compte tenu notamment de l'ancienneté des salariés et de leur âge au moment du licenciement, de leur salaire moyen apprécié, en fonction des bulletins de paie produits, sur l'année 2011 ou sur les quatre premiers mois de 2012, les réparations seront fixées comme indiqué dans le tableau ci-dessous : âge au moment du licenciement ancienneté au moment du licenciement salaire moyen dommages et intérêts I... G... 39 ans 16 ans 8 mois 2 27 200€ K... E... 26 ans 5 ans 7 mois 2 13 600€ P... RY... 50 ans 33 ans 5 mois 2 40 000€ Y... B... 51 ans 30 ans 10 mois 1 35 000€ H... T... 44 ans 24 ans 8 mois 1 28 800€ Q... F... 50 ans 33 ans 9 mois 1 739,64€ 33 000€ W... D... 53 ans 30 ans 7 mois 2 035,62€ 39 000€ L... S... 50 ans 28 ans 7 mois 2 271,75€ 40 000€ R... S... 53 ans 36 ans 6 mois 2 264,33€ 46 000€ GS... LU... 58 ans 38 ans 8 mois 1 995,04€ 42 000€ SW... MJ... 55 ans 39 ans 8 mois 1 807,90€ 28 650€ N... M... 23 ans 4 ans 6 mois 1 618,34€ 10 000€ J... C... 27 ans 8 ans 7 mois 1 71374€ 14 000€ UX... 27 ans 8 ans 4 mois 1 921,80€ 16 000€ X... O... 52 ans 36 ans 7 mois 2 260,63€ 44 000€ JA... O... 56 ans 13 ans 5 mois 1 882,29€ 22 000€ Q... BB... 51 ans 14 ans 1 mois 1 854,34€ 23 000€ JY... A... 51 ans 35 ans 9 mois 2 195,04€ 43 000€ Sur le co-emploi : que les salariés à la cause soutiennent que la société AGC France est coemployeuse parce que, selon eux, elle préside la société AGC David Miroiterie et en est l'unique actionnaire, que le directeur de la société AGC David Miroiterie a été écarté des décisions, que la société AGC France autorise l'achat des fournitures et des machines, fixe les prix de vente et intervient dans l'activité commerciale, dicte les choix stratégiques, contrôle, gère, à la place de la société AGC David Miroiterie et lui facture des frais à ce titre, parce que la décision de restructurer et de fermer le site a été prise par la société AGC France et mise en oeuvre par cette société ; que l'AGS-CGEA de Rouen ajoute qu'en outre, la société AGC France a dépouillé la société AGC David Miroiterie de ses actifs ; que certaines de ces allégations sont confirmées par les éléments produits, d'autres sont inexactes ou ne sont pas démontrées ; que comme indiqué en introduction, la société AGC France préside, par l'intermédiaire d'un directeur, M. KR... qui la représente, d'une part, la société AGC David Miroiterie, d'autre part, la société Isatis, actionnaire de la société AGC David Miroiterie ; qu'elle n'est donc pas directement actionnaire de la société AGC David Miroiterie ; que néanmoins, cette construction démontre l'absence structurelle d'autonomie de la société AGC David Miroiterie ; que le directeur, M. KR..., a réalisé des rapports et projets sur la situation de la société AGC David Miroiterie, géré des litiges commerciaux (avec la société Verre et Bleu), signé des contrats de location, de maintenance, des lettres d'embauche et de rupture, accordé des congés payés, signé des lettres d'avertissement et un accord salarial en février 2011 ; qu'il n'est pas démontré l'existence de consignes particulières données par la société AGC David Miroiterie à ces diverses occasions ; que toutefois, le 22 février 2012, il a donné pouvoir à M. GE..., "HR Country Manager France" de la société AGC France de le représenter « dans le cadre de la procédure de plan social initiée au niveau du pôle architectural France », ce qui impliquait, aux termes de ce mandat, notamment, délégation pour « effectuer toutes les formalités nécessaires aux licenciements économique » (convocation à entretien préalable, lettre de licenciement et toute transaction) ; que l'ensemble de la procédure de licenciement a donc été mené directement par la société AGC France sans intervention du directeur de la société AGC David Miroiterie et a été financée par la société AGC France (paiement des derniers salaires, indemnités de rupture, indemnité supra légale, financement de la cellule de reclassement) ; que cette convention de management a été facturée 90.000 € à la société AGC David Miroiterie par la société AGC France ; qu'en outre a été refacturée à la société AGC David Miroiterie, selon une clé de répartition dont le commissaire aux comptes n'a pas obtenu justification, une partie des frais de restructuration (269.000 €) de l'ensemble des sociétés du groupe ; que dès sa reprise par la société AGC France, la société AGC David Miroiterie a contracté avec une autre filiale du groupe, la société AIV, un contrat d'assistance portant sur la direction, la maintenance, la qualité, la sécurité et environnement et la comptabilité ; que seules les factures relatives à ce contrat sont produites, pour un montant d'environ 11.000 € mensuels (ce qui correspond, sur un exercice, à 124.000 € selon le compte rendu de clôture établi, en 2012, par M. FA..., commissaire aux comptes) ; que le contrat lui-même n'est pas versé aux débats ; que selon M. FA..., il porte sur toute la gestion administrative de la société ; qu'en vertu d'une convention signée le 18 octobre 2010 entre la société AGC David Miroiterie et la société AGC France, David Miroiterie a donné mandat à AGC France de gérer sa trésorerie ; que la société AGC France était chargée de gérer et de coordonner la trésorerie du groupe, elle disposait d'un compte bancaire centralisateur ouvert à son nom destiné à "rationaliser" la trésorerie au niveau du groupe afin que les excédents de trésorerie d'une société puissent combler les besoins d'autres sociétés, les soldes débiteurs étant facturés et les avances rémunérées ; que cette convention prévoit que la société AGC David Miroiterie conserve ses comptes bancaires propres pour ses recettes et dépenses mais instaure un nivellement des comptes "par ou vers le compte centralisateur" ; que même si la société AGC David Miroiterie fonctionnait au quotidien grâce à ses propres comptes bancaires la gestion de sa trésorerie lui échappait ; que les éléments produits ne permettent d'établir ni que les achats de fournitures et de machines étaient autorisés par la société AGC France ni que c'est elle qui fixait les prix de vente ; qu'il est en revanche démontré qu'il était imposé à la société AGC David Miroiterie de traiter diverses commandes pour d'autres sociétés du groupe, commandes rarement rentables, a admis M. KR... le 14 décembre 2011 lors d'une réunion des délégués du personnel ; qu'il a toutefois ajouté que ces commandes "rendaient service" car elles permettaient "de couvrir une partie des charges fixes" ; qu'il est également admis par la société AGC France que la société AGC David Miroiterie était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe qui oeuvraient dans le même domaine qu'elle, la société AGC France indique que la société AGC David Miroiterie a également bénéficié de prêts ; qu'avant le dépôt de bilan de la société AGC David Miroiterie, les locaux de la société AGC David Miroiterie ont été vidés de tous les matériels, vendus en dessous de leur valeur nette comptable, pour l'essentiel à d'autres sociétés du groupe pour un prix correspondant à une valeur décidée par le groupe sans valorisation à dire d'expert. Le coût du démontage et du transport a été pris en charge par la société AGC David Miroiterie ; que les contrats de crédit-bail d'une valeur théorique de 200 à 600 000 € selon le commissaire aux comptes ont été cédés pour 0 € à la société AGC France ; que le commissaire aux comptes n'a pas été en mesure de se prononcer sur le prix de cession du stock qui figurait en 2011 dans les comptes pour 343 000 € et qui ne figurait plus au 31 décembre 2012 ni au bilan ni physiquement dans les locaux de l'entreprise ; qu'il ressort de ces différents points qu'il existait, entre les deux sociétés, une confusion de direction, d'intérêt et d'activités (AGC David Miroiterie, AGC France, ses autres filiales ou sous-filiales oeuvrant dans toutes dans le domaine du verre et en ce qui concerne les filiales - dont David Miroiterie - plus particulièrement dans la transformation du verre) qui s'est traduite par une immixtion anormale de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David Miroiterie : - dans le domaine social, la société AGC David Miroiterie a délégué, à compter de février 2012, à la société AGC France la gestion de ses ressources humaines (entièrement consacrées au licenciement collectif de l'ensemble des salariés) et la société AGC France lui a facturé son intervention, - dans le domaine économique, dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David Miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, et la société AGC France a géré sa trésorerie ; qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, la société AGC France a repris les actifs de la société AGC David Miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour la société AGC David Miroiterie ; que la société AGC France doit donc être reconnue comme co-employeuse et, à ce titre, sera tenue, in solidum avec la société AGC David Miroiterie, au paiement des dommages et intérêts alloués aux salariés ; ( .) ; que sur les points annexes ; ( ) ; qu'à l'égard de la société AGC France, les sommes accordées aux salariés produiront intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt, à l'exception de celle allouée à M. MJ... qui produira intérêts à compter du 10 juillet 2015 date de notification du jugement confirmé sur ce point ; ( ) ; que la société AGC David Miroiterie et la société AGC France seront tenues, in solidum, de rembourser à Pôle Emploi les allocations de chômage versées aux salariés à la cause du jour du licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois par salarié ; ALORS QU'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en retenant, pour décider que la société AGC France avait la qualité de co-employeur des salariés à la cause, qu'à compter de février 2012, la société AGC David Miroiterie a délégué à cette société la gestion de ses ressources humaines, que cette dernière lui a facturé son intervention, que dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David Miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, que cette dernière société a géré sa trésorerie et, qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, elle a repris les actifs de la société AGC David Miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour cette dernière, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David Miroiterie, violant ainsi l'article L. 1221-1 du code du travail.
Hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière
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N° R 19-87.651 FS-P+B+I+L N° 2259 CG10 24 NOVEMBRE 2020 CASSATION M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 24 NOVEMBRE 2020 CASSATION sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence contre l'arrêt de ladite cour, chambre 5-2, en date du 12 novembre 2019, qui a relaxé M. X... G... du chef d'infraction au code de l'environnement et a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires, en demande et en défense, et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de la société Carnival PLC, M. X... G... et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, M. Pers, Mme Schneider, Mme Ingall-Montagnier, M. Lavielle, M. Samuel, Mme Goanvic, conseillers de la chambre, Mme Méano, M. Leblanc, Mme Guerrini, conseillers référendaires, M. Lemoine, avocat général, et Mme Guichard, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 29 mars 2018, le centre de sécurité des navires de Marseille a effectué un contrôle du combustible utilisé par un navire de croisière appartenant à la société britannique Carnival PLC et placé sous le commandement de M. G.... 3. Ce contrôle avait notamment pour objet de vérifier le respect des prescriptions de l'article L. 218-2 du code de l'environnement relatif aux limitations de la teneur en soufre des combustibles. Il s'est avéré que le bon de soutage du combustible utilisé indiquait une teneur en soufre de 1,75 % et l'analyse d'un échantillon a révélé une teneur de 1,68 %, alors qu'elle aurait du être inférieure ou égale à 1,50 %. Un procès-verbal de constatation d'infraction a été établi. 4. M. G... a été cité devant le tribunal correctionnel pour pollution de l'air en raison de l'utilisation, par un navire en mer territoriale, de combustible dont la teneur en soufre est supérieure aux normes autorisées. 5. La société Carnival PLC a été citée, en sa qualité de propriétaire et exploitante du navire, sur le fondement de l'article L. 218-23 du code de l'environnement. 6. Le tribunal a déclaré M. G... coupable, l'a condamné à une amende de 100 000 euros mise à la charge de la société Carnival PLC à hauteur de 80 000 euros, a ordonné la publication de la décision et a prononcé sur les intérêts civils. 7. M. G..., la société Carnival PLC et le ministère public ont relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen est pris de la violation des articles L. 5412-2 du code des transports, L. 218-2, L. 218-15, L. 218-16, L. 218-18, L. 218-23 et L. 173-7 du code de l'environnement et 591 du code de procédure pénale. 9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a a relaxé le prévenu du chef d'utilisation par un navire en mer territoriale de combustible dont la teneur en soufre est supérieure aux normes utilisées - pollution de l'air commis sur la ligne Barcelone-Marseille entre le 28 et le 29 mars 2018 alors : « 1°/ que la cour qui rappelle les dispositions de l'article L. 5412-2 alinéa 2 du code des transports, aux termes duquel le capitaine "répond de toute faute commise dans l'exercice de ses fonctions", se contente d'analyser l'élément intentionnel de la faute pénale reprochée au capitaine de l'Azura alors qu'il lui appartenait de rechercher si les éléments constitutifs de la négligence fautive évoquée par l'arrêt sont réunis ; qu'aux termes de l'article 121-3 du code pénal, repris au paragraphe IV de l'article L. 218-19 du code de l'environnement, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée qui exposait l'environnement à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ; qu'en ne s'assurant pas que le carburant qu'il utilisait était conforme à la réglementation en vigueur dans les eaux françaises alors qu'interrogé par les enquêteurs, M. G... répondait à la question "avez-vous connaissance de l'obligation de brûler un combustible dont le taux de soufre est inférieur à 1,5 %" par "j'étais au courant de ces obligations et de contrôler ces obligations...", ce capitaine doit être regardé comme auteur de la négligence fautive évoquée par l'arrêt attaqué, 2°/ qu'il se déduit des pièces de la procédure qu'en faisant souter un combustible présentant un taux de soufre irrégulier en parfaite connaissance de cause, ce taux de soufre apparaissant sur le bon de livraison et enregistré comme tel dans la base de données du navire, le capitaine du navire Azura, seul chef de l'expédition maritime selon l'ensemble des normes en la matière, engageait sa responsabilité pénale, ce que la cour a omis de rechercher, qu'en conséquence l'arrêt encourt la censure. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 13. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 14. Pour relaxer le prévenu, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte de ses déclarations qu'il n'a jamais admis avoir eu connaissance de l'obligation d'utiliser un combustible dont la teneur en soufre ne devait pas dépasser 1,5 % et qu'il a expliqué ne disposer d'aucune maîtrise sur l'approvisionnement en combustible qui était décidé par un service de la compagnie basé à Hambourg. 15. Les juges ajoutent que les décisions d'approvisionnement en combustible sont prises par ce service spécialisé qui détermine quel navire va s'approvisionner dans tel port avec tel type et telle quantité de fioul, en fonction, notamment, soit des disponibilités dans les futures escales et des prix variables pratiqués d'un port à l'autre, soit des besoins du bateau qui dépendent non seulement du nombre de miles nautiques à parcourir mais également des législations environnementales applicables dans les ports concernés. 16. Ils précisent que, dans ce processus, l'intervention du bord est limitée à la communication à la compagnie par le chef mécanicien ou ses subordonnés des quantités de fioul de différentes qualités restant dans les cuves du bateau et que ce système est basé notamment sur des nécessités juridiques résultant de la diversité des législations, fluctuantes et complexes, applicables dans les eaux traversées. 17. La cour d'appel retient encore M. G... a suivi les instructions de sa compagnie, en pouvant vérifier qu'elles étaient conformes au système International Safety Management (ISM) dont les données, établies par cette compagnie, mentionnaient bien la possibilité d'utiliser sur le trajet Barcelone-Marseille un combustible présentant un taux maximum en soufre de 3,5 % contre un taux de 1,50 % pour rejoindre le port italien de La Spezia. 18. Elle en conclut que, M. G..., qui suivait les instructions de sa compagnie, pouvait légitimement penser qu'elles étaient conformes à la législation qu'il devait respecter. 19. En se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui a relevé que le bon de soutage découvert à bord indiquait une teneur en soufre supérieure à celle autorisée, n'a pas justifié sa décision. 20. En effet, le capitaine, garant de la sécurité du navire et de son équipage, de la protection de l'environnement et de la sûreté, et tenu personnellement à ce titre de connaître et de faire respecter les règles relatives à la pollution par les rejets des navires, devait s'assurer de la conformité à la législation du combustible utilisé. 21. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 12 novembre 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil. ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre novembre deux mille vingt.
Le capitaine d'un navire, garant de la sécurité du navire et de son équipage, de la protection de l'environnement et de la sûreté, et tenu personnellement à ce titre de connaître et de faire respecter les règles relatives à la pollution par les rejets des navires, doit s'assurer de la conformité à la législation du combustible utilisé. Encourt par conséquent la cassation l'arrêt qui relève que le bon de soutage découvert à bord indiquait une teneur en soufre supérieure à celle autorisée, mais qui relaxe le capitaine au motif qu'il suivait les instructions de sa compagnie dont il pouvait légitimement penser qu'elles étaient conformes à la législation qu'il devait respecter
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N° K 19-85.829 F-P+B+I N° 2269 CG10 24 NOVEMBRE 2020 REJET M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 24 NOVEMBRE 2020 REJET du pourvoi formé par la société Centre caravaning de l'Oise « Wattelier père et fils » contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 7 août 2019, qui pour infractions au code de la consommation, l'a condamnée à 15 000 euros d'amende avec sursis. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Leblanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Centre caravaning de l'Oise « Wattelier père et fils », et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Leblanc, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et Mme Guichard, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La société Centre caravaning de l'Oise, ayant pour enseigne « Wattelier père et fils » (société Wattelier) a été poursuivie devant le tribunal correctionnel notamment pour s'être, en sa qualité de vendeur de camping-cars, fait remettre par cinq clients un chèque d'acompte avant que le contrat de crédit servant à l'acquisition n'ait été définitivement conclu. 3. La société Wattelier a été déclarée coupable de ce chef, ainsi que de celui de pratique commerciale trompeuse, et condamnée à la peine de 20 000 euros d'amende. 4. Elle a relevé appel de cette décision, le procureur de la République ayant interjeté appel incident. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen est pris de la violation des articles L. 311-40, devenu L. 312-50 alinéa 1, du code de la consommation, ainsi que les articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale. 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué pour avoir confirmé la condamnation prononcée en première instance en ce qu'il a déclaré la société Centre caravaning De L'Oise « Wattelier père et fils » représentée par son président en la personne de la société financière Y... M..., elle-même représentée par son gérant I... M... coupable d'avoir à Erquery (60600), entre le 1er octobre 2011 et le 14 août 2012, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, commis l'infraction de perception par un vendeur ou prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation, alors « que l'article L. 311-40 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, applicable à l'époque des faits, autorise le vendeur à recevoir paiement au comptant d'une partie du prix de vente sous certaines conditions dont le défaut d'accomplissement n'était pas allégué en l'espèce ; en retenant que l'infraction de perception par un vendeur ou prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation était constituée, dès lors que des chèques étaient inscrits sur les bons de commande considérés et qu'étant libératoires, ils devaient s'analyser comme des acomptes prohibés, quand ces chèques de dépôt n'avaient en réalité vocation qu'à être imputés sur le prix à payer au comptant, que constituait le montant de la reprise des anciens véhicules des acheteurs, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés. » Réponse de la Cour 7. Pour dire établi le délit de perception par un vendeur ou un prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation, l'arrêt attaqué énonce dans un premier temps que sur les bons de commande des cinq clients cités en qualité de victimes, il a été indiqué que la vente était faite au comptant alors que ces clients ont cependant eu recours à un crédit à la consommation afin de financer l'acquisition du camping-car, que ce crédit a été contracté le jour même de la vente auprès d'un organisme prêteur partenaire de la société Wattelier et que s'ils ont bénéficié d'une reprise de leur ancien véhicule par cette dernière, ce qui ne pouvait avoir pour effet de transformer cet achat à crédit en achat au comptant, ces clients ont signé et remis au vendeur un chèque d'un montant compris entre 2 000 et 5 000 euros qui leur a été ensuite restitué. 8. Les juges d'appel relèvent d'autre part que les cinq clients qui ont remis un chèque à la société Wattelier le jour de la conclusion de la vente, ont souscrit ledit crédit pour la totalité du prix d'acquisition du camping-car. 9. En l'état de ces seules énonciations, et dès lors qu'à l'occasion d'un achat à crédit, la remise par l'acheteur d'un chèque, fût-il non encaissé, avant l'expiration du délai de rétractation, constitue un paiement sous quelque forme que ce soit, la cour d'appel a caractérisé le délit de perception par un vendeur ou un prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation. 10. Dès lors, le moyen n'est pas fondé. 11. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme ; PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi. ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre novembre deux mille vingt.
Caractérise le délit de perception par un vendeur ou un prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation la remise par le consommateur d'un chèque, fût-il non encaissé, dès lors que la vente a été réalisée au moyen d'un crédit affecté souscrit pour la totalité du montant de l'acquisition
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N° K 19-86.979 FS-P+B+I V 16-86.240 N° 2298 EB2 25 NOVEMBRE 2020 IRRECEVABILITE REJET REJET M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 25 NOVEMBRE 2020 IRRECEVABILITE et REJETS sur les pourvois formés par M. T... S... A... et M. F... S... A... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Riom, en date du 27 septembre 2016, qui, dans l'information suivie contre eux des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et contrebande, en récidive, a prononcé sur leurs demandes en annulation de pièces de la procédure. Les mêmes et Mme G... U..., partie intervenante, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la ladite cour, chambre correctionnelle, en date du 16 octobre 2019, qui, pour les chefs précités a condamné les deux premiers à douze ans d'emprisonnement et a ordonné des mesures de confiscation. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Barbier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. T... S... A... , M. F... S... A... et Mme G... U..., et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, Mmes de la Lance, Planchon, Zerbib, MM. d'Huy, Wyon, Pauthe, Turbeaux, de Lamy, conseillers de la chambre, M. Ascensi, Mme Fouquet, conseillers référendaires, M. Lemoine, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. A partir du 28 août 2013, le service régional de police judiciaire de Clermont-Ferrand a été destinataire d'informations selon lesquelles MM. T... et F... S... A... étaient impliqués dans un trafic de résine de cannabis en Espagne, le produit étant redistribué ensuite à un réseau de revendeurs habitant en Auvergne. 3. M. F... S... A... a été interpellé sur mandat d'arrêt le 10 juin 2015 et mis en examen le lendemain des chefs notamment d'infractions à la législation sur les stupéfiants, peu après la découverte de 120 kg de résine de cannabis dans un véhicule de retour d'Espagne. M. T... S... A... , frère du précédent, a été interpellé le 11 septembre 2015, dans les mêmes conditions, et mis en examen le lendemain des mêmes chefs. 4. MM. S... A... ont saisi la chambre de l'instruction de nombreuses nullités de procédure aux termes de plusieurs requêtes en dates des 9 décembre 2015 et 3 mars 2016 et de mémoires. 5. Par arrêt du 27 septembre 2016, la chambre de l'instruction a prononcé sur ces requêtes et, tirant les conséquences de l'annulation de certains actes, a ordonné la cancellation d'une partie de la cote D 860, procès verbal du 4 mars 2016 relatant certains échanges par SMS entre l'un des mis en examen et son avocat. Cette pièce est cependant demeurée dans le dossier d'instruction sans avoir été cancellée. 6. Les intéressés ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel par ordonnance du 24 mai 2017, qui mentionne en un endroit la cote D 860 précitée. 7. En raison de nombreux incidents de procédure, M. T... S... A... a été cité par acte d'huissier, déposé à étude le 18 juin 2019, en vue de l'audience du 1er juillet 2019. 8. Par jugement du 16 juillet 2019, le tribunal correctionnel a déclaré les intéressés coupables d'infractions à la législation sur les stupéfiants ainsi que d'infractions douanières et a prononcé des peines, dont la confiscation d'un immeuble appartenant en indivision à M. F... S... A... et à son épouse, Mme U..., partie intervenante non condamnée, ainsi que de créances de loyer. Les prévenus ont interjeté appel de cette décision, ainsi que le ministère public. Examen de la recevabilité des pourvois formés le 17 octobre 2019 par MM. F... et T... S... A... et du pourvoi formé le 21 octobre 2019 par M. F... S... A... contre l'arrêt de la cour d'appel en date du 16 octobre 2019 : 9. Ces demandeurs ayant épuisé par l'exercice qu'ils en ont fait le 16 octobre 2019 le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, étaient irrecevables à se pourvoir à nouveau contre la même décision de sorte que seuls sont recevables les pourvois formés le 16 octobre 2019. Examen des moyens Sur les premier, deuxième et troisième moyens proposés pour M. T... S... A... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de Riom du 27 septembre 2016 Sur les premier, deuxième et troisième moyens proposés pour M. F... S... A... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de Riom du 27 septembre 2016 Sur le cinquième moyen proposé pour M. T... S... A... contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom du 16 octobre 2019 Sur le cinquième moyen proposé pour M. F... S... A... contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom du 16 octobre 2019 Sur le sixième moyen, pris en ses première et troisième branches, proposé pour M. F... S... A... contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom du 16 octobre 2019 Sur le moyen unique, pris en sa première branche, proposé pour Mme G... U... contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom du 16 octobre 2019 10. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le quatrième moyen proposé pour M. T... S... A... contre l'arrêt de la cour d'appel de Clermont-Ferrand du 16 octobre 2019 Enoncé du moyen 11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a refusé d'annuler le jugement rendu en l'absence du prévenu, alors : « 1°/ que l'article 179-1 du code de procédure pénale, qui dispose que l'ordonnance renvoyant la personne mise en examen devant la juridiction de jugement l'informe que toute citation, notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne, en ce qu'il ne permet pas de savoir si la personne a bien été touchée par l'acte et donc effectivement avisée, porte atteinte au principe d'une procédure pénale juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties ainsi qu'aux droits de la défense, garantis notamment par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme ; que consécutivement à la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale ; 2°/ qu'il résulte de l'article 410 du code de procédure pénale qu'un jugement ne peut être rendu contradictoirement que si le prévenu a été régulièrement cité à personne ; que lorsque l'huissier qui délivre une citation à la dernière adresse déclarée par la personne mise en examen renvoyé devant le tribunal correctionnel, conformément à l'article 179-1 du code de procédure pénale, ne l'y trouve pas, il est tenu d'effectuer les diligences prévues par l'article 558, alinéas 2 et 4, dudit code ; qu'à défaut, le tribunal correctionnel n'est pas valablement saisi ; que, dès lors, en refusant d'annuler le jugement déféré rendu en la forme contradictoire à signifier, lorsqu'elle constatait que les mentions de l'acte de signification ne spécifiaient pas si l'avis de passage de l'huissier avait été donné par lettre simple ou par lettre recommandée et si un récépissé avait été renvoyé, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés. » Réponse de la Cour Sur le moyen pris en sa première branche 12. Le moyen est devenu sans objet dès lors que la Cour de cassation a dit, par arrêt du 21 avril 2020, n'y avoir lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité. Sur le moyen pris en sa seconde branche 13. Pour écarter le moyen de nullité de la citation, faute, d'une part, pour le prévenu de l'avoir reçue, d'autre part, pour cet acte d'avoir été signifié à personne, puisqu'il a été signifié à étude, faute enfin, pour l'acte d'huissier de préciser quelle lettre, simple ou recommandée, mentionnée aux alinéas 2 et 4 de l'article 558 du code de procédure pénale, a été envoyée au prévenu, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte de l'acte d'huissier que l'une de ces deux lettres a été envoyée, dans le délai légal, à la dernière adresse déclarée par l'intéressé, qui d'ailleurs reconnaît y être domicilié, en sorte que la signification doit être réputée avoir été faite à personne en application de l'article 179-1 du code de procédure pénale. 14. En prononçant par ces motifs, et dès lors, comme la Cour de cassation est en mesure de s'en assurer par l'examen des pièces de procédure, que l'avocat du prévenu était présent à l'audience et a déposé des conclusions, ce dont il s'évince que son client était informé de la date de l'audience, la cour d'appel a justifié sa décision. 15. En effet, en premier lieu, il n'importe, dans le cas où s'appliquent ensemble les articles 179-1 et 558 du code de procédure pénale, que les lettres mentionnées aux alinéas 2 et 4 de l'article 558 du code de procédure pénale n'aient pas été remises à leur destinataire. 16. En second lieu, dans le cas où les dispositions de l'article 179-1 du code de procédure pénale sont applicables, et sauf à ce que l'ordonnance de renvoi ne soit pas définitive, la citation du prévenu n'a pour seule finalité que de l'informer de la date et de l'heure de l'audience. Il suffit alors que le tribunal, saisi in rem et in personam par l'ordonnance de renvoi, apprécie si le prévenu a eu connaissance de la date de l'audience dans le délai légal. 17. Ainsi, le moyen doit être écarté. Sur le quatrième moyen proposé pour M. F... S... A... contre l'arrêt de la cour d'appel de Clermont-Ferrand du 16 octobre 2019 Enoncé du moyen 18. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté l'exception tirée de la nullité de l'ordonnance de renvoi, alors : « 1°/ que les actes ou pièces de la procédure partiellement annulés doivent être cancellés ; que l'information judiciaire ne peut être valablement clôturée tant que cette formalité n'a pas été respectée ; que, dès lors, en refusant d'annuler l'ordonnance de renvoi après avoir cependant constaté que la cote D860, dont l'annulation partielle avait été prononcée par arrêt définitif de la chambre de l'instruction du 27 septembre 2016, n'avait pas été cancellée, la cour d'appel a violé les articles 174, 175 et 385 du Code de procédure pénale ; 2°/ qu'il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d'actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties ; qu'en retenant, pour dire n'y avoir lieu à annuler l'ordonnance de renvoi qui se réfère à la côte D860 dont l'annulation partielle a été prononcée par arrêt définitif de la chambre de l'instruction du 27 septembre 2016, que l'article 174 du code de procédure pénale n'attache aucune conséquence à l'interdiction qu'il édicte sur la validité de la procédure, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 174 du code de procédure pénale ; 3°/ qu'il se déduit de l'article 174 du Code de procédure pénale que le juge d'instruction ne peut valablement prononcer le renvoi de la personne mise en examen sur le fondement d'actes ou de pièces annulées ; que, dès lors, en disant n'y avoir lieu à annuler l'ordonnance de renvoi, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le renvoi de l'exposant devant la juridiction correctionnelle n'avait pas été ordonné sur le fondement des éléments recueillis à l'occasion des échanges téléphoniques annulés (cote D860), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé et de l'article 385 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 19. Pour écarter le moyen de nullité selon lequel l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel devait être annulée dès lors qu'elle mentionne la cote D 860, pièce dont la cancellation a été ordonnée par la chambre de l'instruction mais n'a pas été mise en oeuvre, en sorte que l'information ne pouvait être regardée comme close et que le tribunal correctionnel n'était pas valablement saisi, l'arrêt énonce notamment que si l'article 174 du code de procédure pénale édicte l'interdiction de tirer des pièces annulées aucun renseignement contre les parties, il ne prévoit pas de conséquence sur la validité de la procédure. 20. En statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision. 21. En effet, le demandeur ne saurait invoquer une irrégularité de l'ordonnance de renvoi, au regard des dispositions de l'article 174 du code de procédure pénale, du fait de la référence à la pièce D 860, dès lors que la dite pièce n'a pas été annulée, mais simplement cancellée, et que le juge d'instruction ne se réfère pas à son contenu. 22. Dès lors, le moyen n'est pas fondé. Sur le sixième moyen, pris en sa deuxième branche, proposé pour M. F... S... A... contre l'arrêt de la cour d'appel de Clermont-Ferrand du 16 octobre 2019 Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, proposé pour Mme G... U... contre l'arrêt de la cour d'appel de Clermont-Ferrand du 16 octobre 2019 Enoncé des moyens 23. Le sixième moyen proposé par M. F... S... A... critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé la confiscation de l'immeuble sis [...] , des loyers et allocations versés au titre de sept des dix logements, alors : « 2°/ qu'en retenant, pour ordonner la confiscation des créances issues des loyers de l'immeuble sis [...] , que M. S... A... en avait la libre disposition, lorsqu'elle constatait « qu'avant la saisie des créances, les loyers perçus pour le [...] pouvaient être affectés au remboursement du prêt du bien propre de Mme », la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 131-21 du code pénal ». 24. Le moyen unique proposé par Mme U..., pris en sa deuxième branche, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté sa requête en restitution, alors : « 2°/ qu'en retenant, pour ordonner la confiscation des créances issues des loyers de l'immeuble sis [...] et en refuser la restitution à l'exposante, que M. S... A... , condamné, en avait la libre disposition, lorsqu'elle constatait « qu'avant la saisie des créances, les loyers perçus pour le [...] pouvaient être affectés au remboursement du prêt du bien propre de Mme », la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 131-21 du code pénal ; Réponse de la Cour 25. Les moyens sont réunis. 26. Pour retenir que M. S... A... avait la libre disposition des créances de loyer, ordonner leur confiscation et écarter la requête de Mme U..., l'arrêt retient que M. S... A... était l'utilisateur de la ligne téléphonique communiquée aux différents locataires pour joindre leurs propriétaires, qu'il se présentait comme assumant le rôle de propriétaire, que deux baux relatifs à la location d'appartements se trouvaient dans un véhicule impliqué dans le trafic de stupéfiants et mentionnaient son nom en qualité de bailleur, que Mme U... avait indiqué que son mari s'occupait de l'immeuble. 27. Les juges ajoutent que Mme U..., qui dispose d'un emploi stable, perçoit chaque mois environ 2 400 euros, outre 800 euros de prestations de la caisse d'allocations familiales qu'elle économise, et qu'elle consacre son salaire au remboursement du prêt du domicile familial de Cendre pour un montant de 824 euros par mois, ainsi que de l'emprunt ayant servi à financer l'immeuble confisqué pour un montant de 2 000 euros par mois. 28. Ils relèvent enfin que M. S... A... et Mme U... perçoivent des loyers afférents à la location des appartements composant l'immeuble confisqué pour un montant total de 2 241 euros par mois. 29. Par ailleurs, les premiers juges ont relevé que les revenus moyens mensuels de M. S... A... et Mme U... s'élèvent à 5 125 euros et que, sur cette somme, le couple rembourse 2 900 euros par mois de crédit, ce qui laisse une somme de 2 100 euros par mois pour faire vivre la famille. 30. Or les juges constatent que cette somme paraît difficilement conciliable avec le train de vie de la famille observé par les enquêteurs, laquelle compte trois enfants, qui voyage régulièrement au Maroc, qui va aux sports d'hiver chaque année, et qui, avec cette seule somme de 2 100 euros par mois, arrive encore à épargner dans des proportions tout à fait étonnantes, les prestations versées par la caisse d'allocations familiales n'étant jamais dépensées mais entièrement thésaurisées, au point que cette épargne permet à chaque enfant d'être titulaire d'un livret approvisionné à hauteur de 10 000 euros, sans même parler d'une somme de 18 000 euros déposée sur une assurance vie. Ils observent de surcroît que de nombreuses dépenses de la vie courante, comme cela ressort de l'examen des comptes bancaires, ainsi que celles relatives aux travaux d'aménagement du domicile familial, ont été réglées en espèces. 31. Les juges en concluent que, même si en apparence Mme U... rembourse les prêts immobiliers à l'aide de revenus légaux, il n'en demeure pas moins que le reste des dépenses est financé par des revenus occultes. 32. Les seconds juges concluent ainsi que M. S... A... avait la libre disposition de l'immeuble ainsi que des loyers afférents. 33. En l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision. 34. En effet, il ressort des motifs propres et adoptés de l'arrêt attaqué qu'outre le fait que M. S... A... assurait seul la gestion locative de l'immeuble confisqué, le prêt afférent à son acquisition n'a pu être remboursé qu'au moyen des revenus occultes de l'intéressé, l'affectation des ressources de Mme U... à ce remboursement, compte tenu du train de vie du couple, parents de trois enfants, de l'importance de l'épargne de l'intéressée, et du remboursement du prêt conclu lors de l'acquisition du domicile familial, devant être retenue comme un montage réalisé dans le seul but de placer l'immeuble confisqué dans un état apparent d'indivision. 35. Il s'en déduit que M. S... A... était le propriétaire économique réel de la totalité de l'immeuble confisqué, nonobstant l'indivision apparente de l'immeuble organisée par le prévenu, de sorte que l'intéressé en avait la libre disposition au sens du sixième alinéa de l'article 131-21 du code pénal. 36. En conséquences, les moyens doivent être écartés. Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, proposé pour Mme G... U... contre l'arrêt de la cour d'appel de Clermont-Ferrand du 16 octobre 2019 Enoncé du moyen 37. Le moyen unique proposé par Mme U... critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté sa requête en restitution, alors : « 3°/ que Mme U... faisait valoir, dans ses conclusions régulièrement déposées, que la confiscation de l'immeuble sis [...] et des créances issues des loyers de cet immeuble portaient une atteinte disproportionnée à son droit de propriété ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 1er du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme et 131-21 du code pénal ». Réponse de la Cour 38. Il résulte de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de I'homme, que le tribunal ne peut, sur le fondement de l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal, ordonner la confiscation d'un bien indivis dans sa totalité, dont le condamné, propriétaire indivis, a la libre disposition, l'autre indivisaire étant de mauvaise foi, qu'après s'être assuré, au besoin d'office, de la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété de chacun des indivisaires au regard de la gravité concrète des faits et de leur situation personnelle. 39. Pour prononcer la confiscation de l'immeuble et des créances de loyer, l'arrêt attaqué, après avoir relevé la gravité des faits résultant de l'atteinte à la santé publique engendrée par la vente de stupéfiants et de la quantité de résine de cannabis objet du trafic poursuivi, relève que Mme U..., qui dispose d'un emploi stable et perçoit de longue date un salaire de 2 400 euros par mois, outre 800 euros de prestations familiales, avait connaissance des activités délictueuses de son conjoint. 40. En outre, les premiers juges, après avoir caractérisé la mauvaise foi de Mme U..., ont jugé, s'agissant de la maison d'habitation familiale, que le principe de proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété commandait de ne pas confisquer ce bien qui appartient officiellement en propre à Mme U..., quand bien même les travaux effectués dans cet immeuble ont été en partie financés par M. S... A... et payés en liquide sans que l'on puisse identifier l'origine des fonds. Ils ont corrélativement considéré que la confiscation des droits de Mme U... sur l'immeuble comme sur les créances de loyer était amplement justifiée. 41. En prononçant par ces motifs, propres et adoptés, dont il résulte que les confiscations prononcées ne portent pas au droit au respect des biens de l'intéressée une atteinte disproportionnée, la cour d'appel a justifié sa décision. 42. Dès lors, le moyen n'est pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : Sur les pourvois formés par T... S... A... et F... S... A... postérieurement au 16 octobre 2019 : LES DÉCLARE IRRECEVABLES ; Sur les pourvois formés contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Riom, en date du 27 septembre 2016 : LES REJETTE ; Sur les pourvois formés contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, en date du 16 octobre 2019 : LES REJETTE. ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq novembre deux mille vingt.
Il n'importe, dans le cas où s'appliquent ensemble les articles 179-1 et 558 du code de procédure pénale, que les lettres mentionnées aux alinéas 2 et 4 de l'article 558 du code de procédure pénale n'aient pas été remises à leur destinataire. Dans le cas où les dispositions de l'article 179-1 du code de procédure pénale sont applicables, et sauf à ce que l'ordonnance de renvoi ne soit pas définitive, la citation du prévenu n'a pour seule finalité que de l'informer de la date et de l'heure de l'audience. Il suffit alors que le tribunal, saisi in rem et in personam par l'ordonnance de renvoi, apprécie si le prévenu a eu connaissance de la date de l¿audience dans le délai légal.
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N° C 19-84.304 FS-P+B+I N° 2299 CK 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION sur le pourvoi formé par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) contre l'ordonnance n° 18/00124 du premier président de la cour d'appel de Chambéry, en date du 22 mars 2019, qui a prononcé sur la régularité des opérations de visite et de saisies effectuées en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Auvergne Rhône-Alpes, et les conclusions de M. Valleix, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mmes de la Lance, Planchon, Zerbib, MM. d'Huy, Wyon, Pauthe, Turcey, de Lamy, conseillers de la chambre, Mme Pichon, M. Ascensi, conseillers référendaires, M. Valleix, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par ordonnance du 4 avril 2018, le juge des libertés et de la détention a autorisé la direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Auvergne Rhône-Alpes (DIRECCTE) à procéder à des opérations de visite et saisies, notamment au sein des locaux de la société Au vieux campeur Paris de Rorthays et Cie. 3. Le 2 mai 2018, la société Au vieux campeur a déposé un recours à l'encontre du déroulement des opérations de visite et de saisies, qui se sont déroulées le 24 avril 2018. Examen des moyens Sur les premier et troisième moyens 4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'ordonnance attaqué en ce qu'il a, statuant sur le recours en annulation de la société Au vieux campeur Paris de Rorthays & Cie, ordonné le retrait de la saisie des courriers électroniques listés dans le tableau récapitulatif joint à l'ordonnance, alors : « 1°/ que seules les correspondances entre l'avocat et son client, relatives à l'exercice du droit de la défense, sont insaisissables ; qu'en s'abstenant de constater que tel était le cas des différentes correspondances ayant fait l'objet du retrait, l'ordonnance attaquée a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 450-4 du code de commerce et 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ; 2°/ que si l'administration ne contestait pas le principe selon lequel certaines correspondances échangées entre l'avocat et son client peuvent être couvertes par le secret, elle soulignait également qu'il fallait encore que le principe s'applique à l'espèce et que le retrait n'était pas automatique ; qu'en s'abstenant de rechercher si, eu égard au contenu des correspondances visées par la demande de retrait, les correspondances en cause pouvaient être regardées comme ayant trait à l'exercice des droits de la défense, et pouvaient dès lors être extraites de la saisie, le premier président a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 450-4 du code de commerce et 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. » Réponse de la Cour Vu les articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 et L. 450-4 du code de commerce : 6. Si, selon les principes rappelés par le premier de ces textes, les correspondances échangées entre le client et son avocat sont, en toutes matières, couvertes par le secret professionnel, il demeure qu'elles peuvent notamment être saisies dans le cadre des opérations de visite prévues par le second dès lors qu'elles ne concernent pas l'exercice des droits de la défense. 7. Il résulte du second de ces textes que le premier président, statuant sur la régularité de ces opérations ne peut ordonner la restitution des correspondances entre l'occupant des lieux visités et un avocat en raison de leur confidentialité que si celles-ci sont en lien avec l'exercice des droits de la défense. 8. Pour faire droit à la demande de la société Au vieux campeur que soient retirées des fichiers saisis les correspondances avec ses avocats, l'ordonnance attaquée retient que la requérante produit un tableau récapitulatif des documents faisant l'objet d'une demande de protection précisant l'ordinateur concerné, la référence des dossiers outlook où sont rangées les correspondances, l'identité de l'avocat et le destinataire du message ainsi que la date de ce message. 9. Le premier président en conclut que ces éléments sont suffisamment précis pour qu'il soit fait droit à la demande. 10. En se déterminant ainsi, le premier président n'a pas justifié sa décision. 11. En effet, il résulte des énonciations de l'ordonnance attaquée que la requérante, qui s'est contentée d'identifier les courriers concernés, n'a pas apporté d'élément de nature à établir que ces courriers étaient en lien avec l'exercice des droits de la défense. 12. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance susvisée du premier président de la cour d'appel de Chambéry, en date du 22 mars 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant le premier président de la cour d'appel de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil. ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq novembre deux mille vingt.
Si, selon les principes rappelés par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, les correspondances échangées entre le client et son avocat sont, en toutes matières, couvertes par le secret professionnel, il demeure qu'elles peuvent notamment être saisies dans le cadre des opérations de visites prévues par le second dès lors qu'elles ne concernent pas l'exercice des droits de la défense. Il résulte de l'article L. 450-4 du code de commerce que le premier président, statuant sur la régularité de ces opérations ne peut ordonner la restitution des correspondances entre l'occupant des lieux visités et un avocat en raison de leur confidentialité que si celles-ci sont en lien avec l'exercice des droits de la défense. Ne justifie pas sa décision le premier président qui ordonne que soient retirées des fichiers saisis les correspondances entre l'occupant des lieux visités et ses avocats, alors qu'il résulte de l¿ordonnance attaquée que la société requérante, qui s'est contentée d'identifier les courriers concernés, n'a pas apporté d'éléments de nature à établir que ces courriers étaient en lien avec l'exercice des droits de la défense.
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N° G 19-85.091 FS-P+B+I N° 2300 CK 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION PARTIELLE M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par la société DJP et M. W... V... contre l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 7 mars 2019, qui a condamné la première, pour recel, à 3 000 euros d'amende et le second, pour banqueroute et recel, à deux ans d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, devenu sursis probatoire, 5 000 euros d'amende, sept ans d'interdiction de gérer et a ordonné une mesure de confiscation. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Un mémoire, commun aux demandeurs, a été produit. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Griel, avocat de la société DJP et M. W... V..., et les conclusions de M. Valleix, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mmes de la Lance, Planchon, Zerbib, MM. d'Huy, Wyon, Pauthe, Turcey, de Lamy, conseillers de la chambre, Mme Pichon, M. Ascensi, conseillers référendaires, M. Valleix, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 18 novembre 2011, un créancier de l'entreprise individuelle de maîtrise d'oeuvre gérée par M. V... a adressé un courrier au procureur de la République pour l'informer d'un litige l'opposant à cette entreprise. 3. L'enquête a révélé que cette entreprise avait été placée en redressement judiciaire le 13 novembre 2002, puis qu'une procédure de liquidation judiciaire avait été ouverte le 27 mars 2009. 4. Les investigations ont notamment mis en évidence que des virements avaient été effectués entre avril 2008 et mars 2009, pour un montant total de 52 300 euros par l'entreprise individuelle M. W... V... au profit de la société DJP, également gérée par M. V... ayant pour activité l'acquisition, construction, administration, location et vente d'immeubles. Cette société dont les parts étaient réparties entre M. V... et ses enfants avait obtenu en 2006 un crédit immobilier de 245 300 euros lui permettant d'acquérir un terrain et d'y faire édifier une maison d'habitation, devenue à la fois le siège social de la société DJP et la résidence principale de M. V... et son épouse. 5. M. V... a été condamné pour ces faits par le tribunal correctionnel du chef de banqueroute et la société DJP du chef de recel. 6. M. V..., la société DJP et le procureur de la République ont formé appel de cette décision. Examen des moyens Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens 7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen est pris de la violation des articles L. 654-2-2°, L. 654-1, L. 654-3, L. 654-5 et L. 654-16 du code de commerce, 321-1, 321-3 et 321-9 du code pénal, 5 et 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 6, 8, 9-1, 388, 427, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale. 9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. W... V... coupable de banqueroute par détournement d'actif au préjudice de son entreprise individuelle V... W..., d'avril 2008 à mars 2009, en transférant la somme de 52 300 euros depuis les comptes de cette entreprise vers les comptes de la SARL DJP dont il est le gérant, sans aucune justification économique ni contrepartie pour son entreprise individuelle, et a déclaré la société DJP coupable de recel de ce délit, alors : « 1°/ que le délai de prescription de l'action publique n'est reporté au jour où l'infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l'exercice de l'action publique qu'à l'égard des infractions occultes ou dissimulées ; qu'est dissimulée l'infraction dont l'auteur accomplit délibérément toute manoeuvre caractérisée tendant à en empêcher la découverte, tandis qu'est occulte l'infraction qui, en raison de ses éléments constitutifs, ne peut être connue ni de la victime ni de l'autorité judiciaire ; qu'en l'espèce, pour estimer que la prescription des faits de banqueroute par détournement d'actif visée à la prévention, concernant des transferts de fonds qui auraient été opérés du mois d'avril 2008 au mois de mars 2009, à hauteur de la somme de 52 300 euros, n'a commencé à courir qu'à compter du 18 novembre 2011, la cour d'appel a relevé que c'était à cette date qu'un créancier de l'entreprise individuelle V... W..., laquelle avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire prononcée le 27 mars 2009, a écrit au procureur de la République afin de dénoncer le comportement de M. W... V... dont le train de vie paraissait disproportionné par rapport à la situation de son entreprise et, partant, que c'était à partir de cette dénonciation que l'infraction pouvait être constatée dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; qu'en statuant ainsi, sans indiquer en quoi les transferts de fonds litigieux auraient été dissimulés, et notamment si toute trace de ces transferts aurait été retirée par le prévenu des documents comptables portés à la connaissance de la juridiction ayant prononcé la liquidation judiciaire de l'entreprise, ni indiquer en quoi les conditions dans lesquelles ces transferts de fonds ont été opérés auraient empêché le juge de la procédure collective d'en constater l'existence au jour du prononcé de la liquidation judiciaire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ; 2°/ que le délai de prescription de l'action publique n'est reporté au jour où l'infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l'exercice de l'action publique qu'à l'égard des infractions occultes ou dissimulées ; qu'est dissimulée l'infraction dont l'auteur accomplit délibérément toute manoeuvre caractérisée tendant à en empêcher la découverte, tandis qu'est occulte l'infraction qui, en raison de ses éléments constitutifs, ne peut être connue ni de la victime ni de l'autorité judiciaire ; qu'en l'espèce, pour estimer que la prescription des faits de banqueroute par détournement d'actif visée à la prévention, concernant des transferts de fonds qui auraient été opérés du mois d'avril 2008 au mois de mars 2009, à hauteur de la somme de 52 300 euros, n'a commencé à courir qu'à compter du 18 novembre 2011, la cour d'appel a relevé que c'était à cette date qu'un créancier de l'entreprise individuelle V... W..., qui avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire prononcée le 27 mars 2009, avait écrit au procureur de la République afin de dénoncer le comportement de M. V... dont le train de vie paraissait disproportionné par rapport à la situation de son entreprise et, partant, que c'était à partir de cette dénonciation que l'infraction pouvait être constatée dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; qu'en statuant ainsi, sans indiquer en quoi le fait, dénoncé par un créancier, que M. V... ait eu un train de vie en apparence disproportionné par rapport à la situation de son entreprise était de nature à révéler l'existence des transferts de fonds litigieux, qui fondent les poursuites du chef de banqueroute par détournement d'actif ou, à tout le moins, sont de nature à démontrer que ceux-ci avaient été dissimulés par le prévenu ou opérés dans des conditions occultes, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 654-2 et L.654-16 du code de commerce et 8 du code de procédure pénale dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 : 10. Selon le premier de ces textes, en cas d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, constitue notamment le délit de banqueroute le fait d'avoir détourné tout ou partie de l'actif du débiteur. Dans cette hypothèse, au regard de ses éléments constitutifs, ce délit ne constitue pas une infraction occulte par nature. 11. Aux termes du deuxième de ces textes, en matière de banqueroute, la prescription de l'action publique ne court que du jour du jugement ouvrant la procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire lorsque les faits incriminés sont apparus avant cette date. 12. Le report du point de départ de la prescription est justifié par le fait que l'exercice de poursuites du chef de banqueroute est subordonné à l'ouverture d'une procédure collective. 13. Il en résulte que lorsque les faits sont apparus entre le jour du jugement ouvrant une procédure de redressement judiciaire et le jour du jugement prononçant la liquidation judiciaire, il n'y a pas lieu de repousser le point de départ du délai de prescription à la date de cette seconde décision. 14. Il se déduit de ce qui précède que lorsque le détournement constitutif du délit de banqueroute a été réalisé postérieurement au jugement ouvrant une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, le délai de prescription court, en application du dernier des textes susvisés, à compter de la date de commission des faits, sauf s'il est établi que l'infraction a été délibérément dissimulée. 15. En l'espèce, pour écarter l'exception de prescription soulevée par le prévenu, poursuivi pour des faits qualifiés de banqueroute, commis entre avril 2008 et mars 2009, l'arrêt attaqué relève que l'entreprise individuelle V... a été placée en redressement judiciaire le 13 novembre 2002, puis que la liquidation judiciaire a été prononcée le 27 mars 2009. 16. Les juges retiennent que le délai de prescription de l'action publique a commencé à courir le 18 novembre 2011, jour de la dénonciation des faits au procureur de la République effectuée par l'un des créanciers de l'entreprise, date à partir de laquelle le ministère public a fait diligenter une enquête. 17. La cour d'appel en conclut que la période de prévention antérieure à cette date ne pouvait être atteinte par les délais de la prescription et que les différents actes d'enquête accomplis à compter de cette date ayant interrompu la prescription jusqu'à la citation renvoyant les prévenus devant le tribunal correctionnel, la prescription n'a donc jamais été acquise. 18. En statuant ainsi, sans mieux caractériser l'existence d'une dissimulation de nature à retarder le point de départ de la prescription, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 19. La cassation est par conséquent encourue PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Poitiers, en date du 7 mars 2019, mais en ses seules dispositions ayant rejeté l'exception de prescription soulevée et ayant déclaré M. V... coupable des faits de banqueroute par détournement d'une somme totale de 52 300 euros, commis entre avril 2008 et mars 2009 au préjudice de l'entreprise individuelle V... et relatives aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Angers, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil. ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq novembre deux mille vingt.
Le délit de banqueroute, lorsqu'il consiste, en application de l'article L. 654-2 2°, du code de commerce, en cas d¿ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, dans le fait d'avoir détourné tout ou partie de l'actif du débiteur, ne constitue pas au regard de ses éléments constitutifs une infraction occulte par nature. Aux termes de l'article L. 654-16 du code de commerce, en matière de banqueroute, la prescription de l'action publique ne court que du jour du jugement ouvrant la procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire lorsque les faits incriminés sont apparus avant cette date. Le report du point de départ de la prescription étant justifié par le fait que l'exercice de poursuites du chef de banqueroute est subordonné à l'ouverture d'une procédure collective, lorsque les faits sont apparus entre le jour du jugement ouvrant une procédure de redressement judiciaire et le jour du jugement prononçant la liquidation judiciaire, il n'y a pas lieu de repousser le point de départ du délai de prescription à la date de cette seconde décision. Lorsque le détournement constitutif du délit de banqueroute a été réalisé postérieurement au jugement ouvrant une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, le délai de prescription court, en application de l'article 8 du code de procédure pénale, à compter de la date de commission des faits, sauf s'il est établi que l¿infraction a été délibérément dissimulée. Encourt en conséquence la cassation l'arrêt qui, sans suffisamment caractériser l'existence d'une dissimulation de nature à retarder le point de départ du délai de prescription de l'action publique du chef de banqueroute, fait courir celui-ci du jour où le procureur de la République a été informé des détournements commis postérieurement au jugement d¿ouverture de la procédure de redressement judiciaire.
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(N° H 19-85.205 F-P+B+I N° 2311 CK 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel de Limoges contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 3 juillet 2019, qui a relaxé MM. A... X... et K... S... du chef de banqueroute. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. A... X... et M. K... S... et les conclusions de M. Valleix, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, M. Valleix, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 30 décembre 2008, la SCI les Hauts de Feytas (la SCI) a acquis un terrain en vu de la réalisation d'un vaste programme immobilier, financé en totalité par un découvert en compte d'un montant de 1 400 000 euros. 3. Le 4 juin 2012, l'un des actionnaires de la SCI, a déposé plainte contre X auprès du procureur de la République pour abus de confiance. Il a reproché aux dirigeants de la S.C.I, MM. X... et S..., d'avoir détourné une partie de la trésorerie au profit du Groupe ATI, dont ils assuraient également la direction. 4. Par jugement du tribunal de grande instance en date du 15 octobre 2013, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte au profit de la SCI, la date de cessation des paiements étant fixée au 13 septembre 2013. 5. L'administrateur provisoire a transmis au procureur de la République le rapport d'expertise comptable établi par le cabinet Exafi, désigné par le tribunal dans le cadre de cette procédure, certaines irrégularités constatées par l'expert lui paraissant relever d'une qualification pénale. 6. A l'issue des investigations, MM. X... et S... ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel, en qualité de dirigeants de fait ou de droit de la SCI, des chefs de banqueroute par emploi de moyens ruineux, tenue irrégulière de comptabilité et absence de comptabilité. 7. Les juges du premier degré ont fixé la date de cessation des paiements au 21 mai 2012 et reconnu les prévenus coupables du délit de banqueroute pour les faits commis à compter de cette date. 8. MM. X... et S..., le procureur de la République et les parties civiles ont formé appel du jugement. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 9. Le moyen est pris de la violation des articles L. 654-2 du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale. 10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé les prévenus du chef de banqueroute alors : 1°/ que c'est par des considérations inopérantes que la cour d'appel a écarté la date de cessation des paiements fixée par le tribunal correctionnel au 21 mai 2012. 2°/ que la cour d'appel, qui a relaxé les prévenus, tout en constatant que la tenue irrégulière de la comptabilité de la société civile ressort clairement du rapport du cabinet comptable Exafi et que l'absence totale de comptabilité en 2012 et 2013 s'inscrit dans un contexte de conflit entre les associés, n'a pas tiré les conséquences de ses énonciations. 3°/ que la cour d'appel, en affirmant que les irrégularités comme le défaut de comptabilité, pour être constitutifs du délit de banqueroute, devaient répondre au but, poursuivi par les prévenus, de retarder la constatation de l'état de cessation des paiements ou d'affecter l'actif de la SCI dans des conditions qui allaient la mettre dans l'impossibilité de faire face au passif exigible, a ajouté à la loi et méconnu les textes susvisés. Réponse de la Cour Sur le moyen pris en sa première branche 11. Le demandeur ne saurait faire grief à la cour d'appel d'avoir retenu la date de cessation des paiements fixée par le jugement d'ouverture de la procédure collective. 12. En effet si la cessation des paiements, constatée par le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, est une condition préalable nécessaire à l'exercice de poursuites des chefs de banqueroute par emploi de moyens ruineux, tenue d'une comptabilité manifestement irrégulière ou absence de comptabilité, sa date est sans incidence sur la caractérisation de ces délits, qui peuvent être retenus indifféremment pour des faits commis antérieurement ou postérieurement à la cessation des paiements. Mais sur le moyen pris en ses deuxième et troisième branches Vu l'article L. 654-2 4° et 5° du code de commerce et l'article 121-3 du code pénal : 13. Il résulte de ces textes que la caractérisation de l'élément intentionnel des délits de banqueroute par absence de comptabilité ou tenue d'une comptabilité manifestement irrégulière suppose la seule conscience de son auteur de se soustraire à ses obligations comptables légales. 14. Elle n'exige pas la preuve que le prévenu a eu la volonté soit d'éviter ou de retarder la constatation de l'état de cessation des paiements, soit d'affecter la consistance de l'actif disponible dans des conditions de nature à placer l'intéressé dans l'impossibilité de faire face au passif exigible. 15. Pour relaxer les prévenus du chef de banqueroute par tenue d'une comptabilité irrégulière et absence de comptabilité, l'arrêt attaqué, après avoir constaté la tenue irrégulière de la comptabilité de la SCI en 2011 et l'absence de comptabilité de la société en 2012 et 2013, énonce que l'absence totale de comptabilité de la société en 2012 et 2013 s'inscrit dans un contexte de conflit entre les associés qui a notamment entraîné la démission de l'expert comptable et que la cour ne dispose d'aucun élément permettant de considérer que les irrégularités comme le défaut de comptabilité auraient eu lieu dans le but poursuivi par les prévenus de retarder la constatation de l'état de cessation des paiements ou d'affecter l'actif de la S.C.I. dans des conditions qui allaient la mettre dans l'impossibilité de faire face au passif exigible. 16. Les juges ajoutent que l'historique de la société, l'implication de MM. X... et S... et de leurs épouses, l'argent qu'ils ont perdu dans cette opération immobilière, leur personnalité, tous deux se présentant avec un casier judiciaire vierge en dépit d'une longue expérience d'associé ou de gérant de société, et la poursuite de l'activité de la SCI, qui a respecté le plan de redressement mis en place, sont autant d'éléments qui se heurtent à la thèse selon laquelle ils auraient eu l'intention de maintenir artificiellement l'activité de celle-ci avant la date de cessation des paiements telle que fixée par le tribunal de grande instance. 17. En prononçant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé. 18. La cassation est par conséquent encourue. Et sur le second moyen Enoncé du moyen 19. Le moyen est pris de la violation des articles 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale. 20. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé les prévenus du chef de banqueroute, alors que la cour d'appel, qui a écarté le rapport d'expertise comptable Exafi au motif que son contenu n'aurait pas été contradictoirement discuté dans le cadre du dossier pénal, a méconnu le principe de la libre administration de la preuve. Réponse de la Cour Vu les articles 463 et 593 du code de procédure pénale : 21. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. 22. Selon le premier de ces textes, il appartient aux juges d'ordonner les mesures d'instruction dont ils reconnaissent eux-mêmes la nécessité. 23. Pour relaxer les prévenus du chef de banqueroute par emploi de moyens ruineux, l'arrêt attaqué retient que la cour d'appel ne dispose d'aucune expertise comptable ordonnée dans le cadre du dossier pénal et qu'il ne peut être déduit des seuls éléments relevés par le cabinet Exafi et des auditions auxquelles il a été procédé dans le cadre de l'enquête pénale que les dirigeants de la société ont eu l'intention, du fait de la souscription de la convention de découvert en compte litigieuse et du non respect de ses conditions initiales, de retarder la date de cessation des paiements. 24. En statuant ainsi, sans procéder à la recherche, au besoin en ordonnant un supplément d'information, des éléments dont elle reconnaissait elle-même la nécessité, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 25. La cassation est par conséquent encourue également de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Limoges, en date du 3 juillet 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Poitiers à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil. ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Limoges et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq novembre deux mille vingt.
Si la cessation des paiements, constatée par le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, est une condition préalable nécessaire à l'exercice de poursuites des chefs de banqueroute par emploi de moyens ruineux, tenue d'une comptabilité manifestement irrégulière ou absence de comptabilité, sa date est sans incidence sur la caractérisation de ces délits, qui peuvent être retenus indifféremment pour des faits commis antérieurement ou postérieurement à la cessation des paiements. Le ministère public ne saurait en conséquence se faire un grief de ce que la cour d'appel, saisie des délits précités, a retenu la date de cessation des paiements fixée par le jugement d'ouverture de la procédure collective
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N° P 18-86.955 FP-P+B+I N° 2333 SM12 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION PARTIELLE M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par la société Iron mountain France SAS contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 26 septembre 2018, qui, dans les procédures suivies contre elle et la société Intradis du chef de destruction involontaire par explosion ou incendie, a ordonné la jonction des procédures, fixé le montant de la consignation mise à la charge des parties civiles et ordonné un supplément d'information. Par ordonnance en date du 26 décembre 2019, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de la société Iron mountain France SAS, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la SA Ebenal, et la SCI Som-Roy, parties civiles, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Kéring SA et les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. V... F... dit F... et M. X... dit Y... P... , et les conclusions de M. Salomon, avocat général, les avocats ayant eu la parole en dernier, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, MM. Pers, Moreau, Mme de la Lance, M. Bonnal, Mmes Planchon, Ingall-Montagnier, M. de Larosière de Champfeu, Mmes Zerbib, Slove, Ménotti, M. Maziau, Mme Goanvic, conseillers de la chambre, M. Barbier, Mmes Méano, Barbé, conseillers référendaires, M. Salomon, avocat général, et M. Bétron, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. A l'issue de l'information judiciaire ouverte après l'incendie, le 28 janvier 2002, de ses entrepôts de stockage d'archives, la société Intradis, par acte du 24 juillet 2017, a été convoquée à l'audience du tribunal correctionnel du 23 novembre 2017, du chef de destruction involontaire de bien appartenant à autrui par l'effet d'un incendie provoqué par manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi. 3. Le 31 mars 2017, la société Recall France et sa filiale Intradis avaient été absorbées par la société Iron Mountain dans le cadre d'une opération de fusion-absorption. 4. La société Ebenal, M. V... F..., M. P... X... et la société Kering, parties civiles, ont fait citer la société Iron Mountain à comparaître à l'audience du 23 novembre 2017. En outre, cette dernière société est intervenue volontairement à la procédure ouverte après information judiciaire. 5. Par jugement en date du 8 février 2018, le tribunal correctionnel a fixé le montant des consignations à verser par les parties civiles en application de l'article 392-1 du code de procédure pénale et ordonné un supplément d'information afin de déterminer les circonstances de l'opération de fusion-absorption, et de rechercher tout élément relatif à la procédure en cours, notamment s'agissant de l'infraction de destruction involontaire initialement poursuivie à l'encontre de la société Intradis. 6. La société Iron Mountain a formé appel de cette décision. 7. Par ordonnance en date 22 février 2018, le président de la chambre des appels correctionnels a ordonné l'examen immédiat de l'appel. Examen des moyens Sur les premier et deuxième moyens Enoncé des moyens 8. Le premier moyen est pris de la violation des articles1844-5, 1844-7 du code civil, 2, 3, 6, 151 à 155, 388, 463, 591 à 593 du code de procédure pénale. 9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a débouté la société Iron Mountain France de sa demande de nullité du supplément d'information ordonné par le tribunal correctionnel d'Amiens visant à entendre M. U... J..., responsable en activité au sein des sociétés concernées par l'opération de fusion-acquisition du 31 mars 2017 et le pénalement responsable de la société Iron Mountain France, alors : « 1°/que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en vertu de l'article 121-1 du code pénal, sont interdites les poursuites pénales à l'encontre de la société absorbante pour des faits commis par la société absorbée avant que cette dernière ait perdu son existence juridique ; qu'en l'espèce, la société Recall France, ayant pour filiale la société Intradis, a fait l'objet d'une fusion-absorption par la société Iron Mountain France ; qu'en confirmant la mesure d'instruction destinée à entendre M. U... J..., responsable en activité au sein des sociétés concernées par l'opération de fusion-acquisition du 31 mars 2017 et le pénalement responsable de la société Iron Mountain France, aux motifs inopérants qu'elle permettrait de déterminer si la fusion-absorption avait été entachée de fraude et ainsi retenir la responsabilité pénale de la société Iron Mountain France dans les faits de destruction involontaire d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'un incendie reprochés à la société absorbée Intradis, bien que l'action publique ne pouvait pas être engagée à son égard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ; 2°/ que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que les tribunaux répressifs ne sont compétents pour connaître de l'action civile en réparation du dommage né d'une infraction accessoirement à l'action publique, que lorsqu'il a été préalablement statué au fond sur l'action publique ; qu'en l'espèce, dès lors qu'aucune décision au fond sur l'action publique n'avait été prononcée, la juridiction correctionnelle ne pouvait connaître de l'action civile à l'encontre de la société Iron Mountain France ; qu'en refusant néanmoins d'annuler le supplément d'information, aux motifs inopérants qu'il permettrait de déterminer si la fusion-absorption avait été entachée de fraude et ainsi retenir la responsabilité pénale de la société Iron Mountain France dans les faits de destruction involontaire d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'un incendie reprochés à la société absorbée Intradis, la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés. » 10. Le deuxième moyen est pris de la violation des articles 463, 512, 538, 591 à 593 du code de procédure pénale. 11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, avant dire droit au fond, ordonné un supplément d'information visant à entendre M. U... J..., responsable en activité au sein des sociétés concernées par l'opération de fusion-acquisition du 31 mars 2017 et le pénalement responsable de la société Iron Mountain France, sur les raisons, les modalités et les conditions de la fusion-acquisition des sociétés Intradis, Recall France et Iron Mountain France, sur l'existence d'une telle opération de reprise dans les autres pays européens où s'exerce l'activité de la société Iron Mountain France, ainsi que sur tout élément relatif à la procédure en cours et notamment l'infraction de destruction involontaire poursuivie initialement à l'encontre de la société Intradis, alors « que le supplément d'information ne doit porter que sur les faits et prévenus objets des poursuites ; qu'en l'espèce, en confirmant le jugement ayant ordonné le supplément d'information visant à rechercher la responsabilité pénale de la société Iron Mountain France, bien qu'il ait relevé qu'il intervenait dans le cadre de la procédure d'instruction visant uniquement la société Intradis, la cour d'appel a violé les textes et principes susvisés ». Réponse de la Cour 12. Les moyens sont réunis. 13. Les moyens posent la question de savoir dans quelles conditions, en cas de fusion-absorption, la société absorbante peut être condamnée pénalement pour des faits commis, avant la fusion, par la société absorbée. 14. Pour répondre à cette question, il importe de déterminer s'il existe un principe général de transfert de la responsabilité pénale en cas de fusion-absorption (paragraphes 15 à 37) et si, le cas échéant, ce principe s'applique immédiatement (paragraphes 38 et 39). Ce n'est qu'en cas de réponse négative à l'une ou l'autre de ces deux sous-questions qu'il sera nécessaire de déterminer si la solution doit être différente en cas de fraude (paragraphes 40 à 42). 15. Aux termes de l'article 121-1 du code pénal, nul n'est responsable pénalement que de son propre fait. 16. Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, ce principe, dont l'interprétation doit respecter l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, s'oppose à ce qu'à la suite d'une opération de fusion-absorption, la société absorbante soit poursuivie et condamnée pour des faits commis antérieurement à ladite opération par la société absorbée, dissoute par l'effet de la fusion (Crim., 20 juin 2000, pourvoi n° 99-86.742, Bull. crim. 2000, n° 237 ; Crim., 14 octobre 2003, pourvoi n° 02-86.376, Bull. crim. 2003, n° 189). 17. La Cour de cassation a maintenu sa jurisprudence même après que la Cour de justice de l'Union européenne eut dit pour droit que les dispositions de l'article 19, § 1, de la directive 78/855/CEE du Conseil du 9 octobre 1978 relative à la fusion des sociétés anonymes, codifiées à l'article 105, § 1, de la directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés, doivent être interprétées en ce sens qu'une fusion par absorption entraîne la transmission à la société absorbante de l'obligation de payer une amende infligée après cette fusion pour des infractions au code du travail commises par la société absorbée avant la fusion (CJUE, arrêt du 5 mars 2015, Modelo Continente Hipermercados SA c/ Autoridade para as Condições de Trabalho, C-343/13). 18. Elle a en effet considéré que, d'une part, l'article 121-1 du code pénal ne pouvait s'interpréter que comme interdisant que des poursuites pénales soient engagées à l'encontre de la société absorbante pour des faits commis par la société absorbée avant que cette dernière ne perde son existence juridique par l'effet d'une fusion-absorption, d'autre part, ledit article ne pouvait être écarté comme contraire à la directive du 9 octobre 1978 puisqu'une directive ne peut pas produire un effet direct à l'encontre d'un particulier (Crim., 25 octobre 2016, pourvoi n° 16-80.366, Bull. crim. 2016, n° 275). 19. Cette interprétation de l'article 121-1 du code pénal se fonde sur la considération que la fusion, qui entraîne la dissolution de la société absorbée, lui fait perdre sa personnalité juridique et entraîne l'extinction de l'action publique en application de l'article 6 du code de procédure pénale. La société absorbante, personne morale distincte, ne saurait en conséquence être poursuivie pour les faits commis par la société absorbée. 20. Elle repose sur l'assimilation de la situation d'une personne morale dissoute à celle d'une personne physique décédée. 21. Or, cette approche anthropomorphique de l'opération de fusion-absorption doit être remise en cause car, d'une part, elle ne tient pas compte de la spécificité de la personne morale, qui peut changer de forme sans pour autant être liquidée, d'autre part, elle est sans rapport avec la réalité économique. 22. En effet, selon l'article L.236-3 du code de commerce, la fusion-absorption, si elle emporte la dissolution de la société absorbée, n'entraîne pas sa liquidation. De même, le patrimoine de la société absorbée est universellement transmis à la société absorbante et les actionnaires de la première deviennent actionnaires de la seconde. En outre, en application de l'article L.1224-1 du code du travail, tous les contrats de travail en cours au jour de l'opération se poursuivent entre la société absorbante et le personnel de l'entreprise. 23. Il en résulte que l'activité économique exercée dans le cadre de la société absorbée, qui constitue la réalisation de son objet social, se poursuit dans le cadre de la société qui a bénéficié de cette opération. 24. La Cour européenne des droits de l'homme, se fondant sur la continuité économique existant entre la société absorbée et la société absorbante, en déduit que « la société absorbée n'est pas véritablement " autrui " à l'égard de la société absorbante » et juge en conséquence que le prononcé d'une amende civile, à laquelle est applicable le volet pénal de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, à l'encontre d'une société absorbante, pour des actes restrictifs de concurrence commis avant la fusion par la société absorbée, ne porte pas atteinte au principe de personnalité des peines (CEDH, décision du 24 octobre 2019, Carrefour France c. France, n°37858/14). 25. Ainsi, la continuité économique et fonctionnelle de la personne morale conduit à ne pas considérer la société absorbante comme étant distincte de la société absorbée, de sorte que l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ne s'oppose pas à ce que l'article 121-1 du code pénal soit désormais interprété comme permettant que la première soit condamnée pénalement pour des faits constitutifs d'une infraction commise par la seconde avant l'opération de fusion-absorption. 26. L'article 6 du code de procédure pénale, qui ne prévoit pas expressément l'extinction de l'action publique lors de l'absorption d'une société, ne s'oppose pas non plus à cette interprétation. 27. Dès lors que la nouvelle interprétation de l'article 121-1 du code pénal est possible, elle devient nécessaire si elle est la seule à même, en l'état du droit interne, de permettre de tirer les conséquences de l'arrêt de la Cour de justice du 5 mars 2015, précité. 28. Il convient en effet de rappeler que les juridictions nationales ont l'obligation d'interpréter le droit interne dans un sens conforme au droit de l'Union, sous la seule réserve que cette interprétation ne les conduise pas à faire produire aux dispositions d'une directive un effet direct à l'encontre d'un particulier (CJCE, arrêt du 26 sept. 1993, Arcaro, C-168/95 ; CJCE, arrêt du 3 mai 2005, Berlusconi e.a., C-387/02, C-391/02 et C-403/02). Cette limite est respectée lorsque le texte national peut être interprété dans le sens de la directive, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de l'écarter pour donner son plein effet à cette dernière. 29. Or, dans l'arrêt précité du 5 mars 2015, la Cour de justice de l'Union relève que l'opération de fusion par absorption entraîne de façon automatique non seulement la transmission universelle de l'ensemble du patrimoine actif et passif de la société absorbée à la société absorbante, mais aussi la cessation de l'existence de la société absorbée. Elle en déduit que sans la transmission à la société absorbante de la responsabilité contraventionnelle, cette responsabilité serait éteinte. 30. Cette juridiction retient qu'une telle extinction serait en contradiction avec la nature même de la fusion par absorption telle que définie à l'article 3 paragraphe 1 de la directive 78/855, dans la mesure où, aux termes de ces dispositions, une telle fusion consiste en un transfert de l'ensemble du patrimoine de la société absorbée à la société absorbante par suite d'une dissolution sans liquidation. 31. Elle ajoute que cette interprétation répond également à l'objectif posé par la directive de protection des tiers, parmi lesquels figurent les entités qui, à la date de la fusion, ne sont pas encore à qualifier de créanciers ou de porteurs d'autres titres, mais qui peuvent être ainsi qualifiées après cette opération en raison de situations nées avant celle-ci. Tel est le cas de l'Etat membre dont les autorités sont susceptibles d'infliger une sanction pour une infraction commise avant la fusion. 32. Elle relève encore que, si la transmission d'une telle responsabilité était exclue, une fusion constituerait un moyen pour une société d'échapper aux conséquences des infractions qu'elle aurait commises, au détriment de l'État membre concerné ou d'autres intéressés éventuels. 33. Selon la Cour de justice de l'Union, cette conclusion n'est pas infirmée par l'argument selon lequel la transmission de la responsabilité contraventionnelle d'une société absorbée moyennant une fusion serait contraire aux intérêts des créanciers et des actionnaires de la société absorbante, dans la mesure où ces derniers ne seraient pas à même d'évaluer les conséquences économiques et patrimoniales de cette fusion. En effet, d'une part, lesdits créanciers doivent, en vertu de l'article 13, paragraphe 2, de la directive 78/855, avoir le droit d'obtenir des garanties adéquates lorsque la situation financière des sociétés qui fusionnent rend cette protection nécessaire, le cas échéant en saisissant l'autorité administrative ou judiciaire compétente pour obtenir de telles garanties. D'autre part les actionnaires de la société absorbante peuvent être protégés, notamment, par l'insertion d'une clause de déclarations et de garanties dans l'accord de fusion. En outre, rien n'empêche la société absorbante de faire effectuer avant la fusion un audit détaillé de la situation économique et juridique de la société à absorber pour obtenir, en plus des documents et des informations disponibles en vertu des dispositions législatives, une vue plus complète des obligations de cette société. 34. En l'état actuel du droit interne, l'interprétation de l'article 121-1 du code pénal autorisant le transfert de responsabilité pénale entre la société absorbée et la société absorbante est la seule voie permettant de sanctionner pécuniairement la société absorbante pour des faits commis avant la fusion par la société absorbée. 35. Il se déduit de ce qui précède qu'en cas de fusion-absorption d'une société par une autre société entrant dans le champ de la directive précitée, la société absorbante peut être condamnée pénalement à une peine d'amende ou de confiscation pour des faits constitutifs d'une infraction commise par la société absorbée avant l'opération. 36. La personne morale absorbée étant continuée par la société absorbante, cette dernière, qui bénéficie des mêmes droits que la société absorbée, peut se prévaloir de tout moyen de défense que celle-ci aurait pu invoquer. 37. En conséquence, le juge qui constate qu'il a été procédé à une opération de fusion-absorption entrant dans le champ de la directive précitée ayant entraîné la dissolution de la société mise en cause, peut, après avoir constaté que les faits objet des poursuites sont caractérisés, déclarer la société absorbante coupable de ces faits et la condamner à une peine d'amende ou de confiscation. 38. Cependant, cette interprétation nouvelle, qui constitue un revirement de jurisprudence, ne peut s'appliquer aux fusions antérieures à la présente décision sans porter atteinte au principe de prévisibilité juridique découlant de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme dont il résulte que tout justiciable doit pouvoir savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente, au besoin à l'aide de l'interprétation qui en est donnée par les tribunaux et le cas échéant après avoir recouru à des conseils éclairés, quels actes et omissions engagent sa responsabilité pénale et quelle peine il encourt de ce chef. 39. Elle ne s'appliquera, en conséquence, qu'aux opérations de fusion conclues postérieurement au prononcé du présent arrêt et sera donc sans effet dans la présente affaire. 40.Cependant, le supplément d'information critiqué par les moyens ayant notamment pour objet de mettre à jour une éventuelle fraude, il apparaît nécessaire de déterminer si un régime particulier s'applique dans une telle hypothèse. 41. A cet égard, il doit être considéré que l'existence d'une fraude à la loi permet au juge de prononcer une sanction pénale à l'encontre de la société absorbante lorsque l'opération de fusion-absorption a eu pour objectif de faire échapper la société absorbée à sa responsabilité pénale. Cette possibilité est indépendante de la mise en œuvre de la directive du 9 octobre 1978, précitée. 42. Si la Cour de cassation n'a pas eu l'occasion de se prononcer sur ce point, sa doctrine, qui ne saurait ainsi constituer un revirement de jurisprudence, n'était pas imprévisible. Elle est donc applicable aux fusions-absorptions conclues avant le présent arrêt. 43. Il en résulte qu'en ordonnant un supplément d'information dans le but, notamment, de déterminer si l'opération avait été entachée de fraude, la cour d'appel n'a pas méconnu le droit applicable au moment où elle a statué. 44. En conséquence, les moyens doivent être écartés. Mais sur le troisième moyen Enoncé du moyen 45. Le moyen est pris de la violation des articles 463, 512, 591 à 593 du code de procédure pénale. 46. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, avant dire droit au fond, ordonné un supplément d'information et désigné le commandant de la compagnie de gendarmerie de Versailles pour y procéder, alors « que la juridiction qui ordonne un supplément d'information doit obligatoirement désigner pour y procéder un des membres qui a prononcé la décision ; qu'en refusant d'annuler le supplément d'information ordonné par le tribunal correctionnel, qui avait désigné le commandant de la compagnie de gendarmerie de Versailles pour y procéder au lieu d'un de ses membres, la cour d'appel a méconnu les règles de compétence d'ordre public et violé les textes susvisés ». Réponse de la Cour Vu les articles 463 et 512 du code de procédure pénale : 47. Selon ces textes, s'il y a lieu de procéder à un supplément d'information, la cour d'appel commet, par arrêt, un de ses membres qui dispose des pouvoirs prévus aux articles 151 à 154-1 du code de procédure pénale. Ce supplément d'information obéit aux règles édictées par les articles 114 et 119 à 121 du même code. 48. La cour d'appel a confirmé le supplément d'information ordonné par les premiers juges, ainsi que les dispositions du jugement désignant le commandant de la compagnie de gendarmerie de Versailles pour y procéder. 49. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de désigner l'un de ses membres pour procéder au supplément d'information qu'elle ordonnait, la cour d'appel a violé les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé. 50. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Amiens en date du 26 septembre 2018, mais en ses seules dispositions ayant désigné le commandant de la compagnie de gendarmerie de Versailles pour procéder au supplément d'information ordonné. Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d' Amiens autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil. ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq novembre deux mille vingt.
Il se déduit de l'article 121-1 du code pénal, interprété à la lumière de la directive 78/855/CEE du Conseil du 9 octobre 1978 relative à la fusion des sociétés anonymes, codifiée en dernier lieu par la directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 et de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, qu'en cas de fusion-absorption d'une société par une autre société entrant dans le champ de la directive précitée, la société absorbante peut être condamnée pénalement à une peine d'amende ou de confiscation pour des faits constitutifs d'une infraction commise par la société absorbée avant l'opération. La personne morale absorbée étant continuée par la société absorbante, cette dernière, qui bénéficie des mêmes droits que la société absorbée, peut se prévaloir de tout moyen de défense que celle-ci aurait pu invoquer. En conséquence, le juge qui constate qu'il a été procédé à une opération de fusion-absorption entrant dans le champ de la directive précitée ayant entraîné la dissolution de la société mise en cause, peut, après avoir constaté que les faits objet des poursuites sont caractérisés, déclarer la société absorbante coupable de ces faits et la condamner à une peine d'amende ou de confiscation. Cette interprétation nouvelle, qui constitue un revirement de jurisprudence, ne s'appliquera qu'aux opérations de fusion conclues postérieurement au 25 novembre 2020, date de prononcé de l'arrêt, afin de ne pas porter atteinte au principe de prévisibilité juridique découlant de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme
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N° T 18-85.947 F-P+B+I N° 2514 EB2 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION PARTIELLE NON-ADMISSION M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION PARTIELLE et NON-ADMISSION sur les pourvois formés par Mme A... H..., la procureure générale près la cour d'appel de Lyon et la CPAM du Rhône, partie civile, contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 12 septembre 2018, qui a condamné, la première, pour escroquerie à six mois d'emprisonnement avec sursis et 3 000 euros d'amende, et a débouté la troisième d'une partie de ses demandes après relaxe partielle. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires, en demande et en défense, et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de Mme Zerbib, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme A... H..., les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la CPAM du Rhône, partie civile, et les conclusions de Mme Moracchini, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, Mme Moracchini, avocat général, et Mme Guichard, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La CPAM de Lyon a porté plainte le 11 septembre 2012 auprès du procureur de la République de Lyon contre Mme H..., infirmière libérale, exposant que celle-ci lui avait notamment facturé des actes fictifs, des frais de déplacements ou des majorations indus l'ayant ainsi déterminée à lui remettre par fraude, en règlement de prestations inexistantes ou surévaluées, la somme de 668 693,68 euros du 1er octobre 2009 au 31 mars 2012. 3. Par lettre du 28 mai 2014 adressée au ministère public, la CPAM de Lyon a complété sa plainte estimant à 400 235, 73 euros le préjudice qu'elle a subi du fait de la même infirmière qui a obtenu d'elle une telle somme à titre de rétribution et qui lui a été versée, du 1er avril 2012 au 21 mai 2014, en paiement d'actes mensongers ou sur-facturés portant à un total de 1 068 929, 41 euros les fonds escroqués. 4. A l'issue de l'information judiciaire, Mme H... a été renvoyée devant le tribunal correctionnel pour avoir, du 2 octobre 2009 au 10 juillet 2014, par emploi de manoeuvres frauduleuses au moyen de surfacturations d'actes et de facturations d'actes fictifs, de soins infirmiers de patients hospitalisés, de frais de déplacement indus, des mêmes soins plusieurs fois à des dates différentes sur les mêmes personnes, trompé la CPAM du Rhône pour la déterminer à lui remettre la somme de 1 068 929,40 euros. 5. Le tribunal correctionnel a notamment déclaré Mme H... coupable de ces faits, lui a confisqué la somme préalablement saisie de 888 804, 06 euros et l'a condamnée à régler à la CPAM du Rhône, dont il a reçu la constitution de partie civile, le montant de 1 068 929, 40 euros en réparation de son préjudice matériel. 6. Mme H... a relevé appel de cette décision de même, après elle, que le ministère public et la CPAM. Sur les trois moyens de cassation proposés pour Mme H..., 7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen proposé pour la CPAM 8. Il est pris de la violation des articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 13. 1 de la NGAP, 313-1 du code pénal, 2, 3, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale. 9. Il critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a partiellement relaxé la prévenue du chef d'escroquerie, s'agissant de la facturation de 1408 indemnités forfaitaires de déplacements non effectués, et limité en conséquence la réparation du préjudice subi par la CPAM à la somme de 2 371,30 euros, alors « que il résulte des propres constatations de la cour d'appel que la facturation d'indemnités forfaitaires de déplacement pour chacun des membres d'un couple qui habite ensemble viole les dispositions de la nomenclature générale des actes professionnels qui excluent plusieurs IFA pour des patients visités en même temps, dans un même logement ; qu'il résultait en l'espèce expressément de la plainte de la CPAM du Rhône à l'origine des poursuites, que la « facturation d'IFA fictifs concerne 32 assurés dont 3 couples » ; qu'en se bornant néanmoins à condamner la prévenue du chef de facturations d'indemnités forfaitaires concernant le seul couple R, la cour d'appel s'est abstenue de tirer de ses propres constatations les conséquences légales qui s'imposaient, privant de ce fait sa décision de toute base légale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 10. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 11. Pour ne retenir la fraude par facturations multiples de frais de déplacement que pour seulement deux malades domiciliés dans le même logement et l'écarter au sujet de trente autres patients visés dans la plainte de l'organisme social en son annexe 8, l'arrêt énonce notamment qu'aucune limitation légale n'interdit la facturation de tels frais lorsque le professionnel de santé est amené, à l'occasion d'un seul déplacement à partir de son local professionnel, à prodiguer ses soins à plusieurs malades habitant dans un immeuble collectif et non pas dans un EPHAD régi par la loi du 30 Juin 1975. 12. En statuant ainsi, alors que l'article 13, 1, C, 1° de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP) dispose que l'indemnité due au professionnel de santé est calculée pour chaque déplacement à partir de son domicile professionnel, ce qui implique le remboursement d'un seul déplacement permettant au professionnel de santé de pratiquer ses soins sur plusieurs patients logés à la même adresse dans une même résidence et non pas des remboursements multipliés par le nombre de malades soignés, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 13. D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; Sur le premier moyen proposé par la procureure générale 14. Le moyen est pris pour défaut et contradiction de motifs. 15. Le moyen critique l'arrêt en ce qu'il a relaxé la prévenue du chef d'escroquerie s'agissant de la facturation de 503 actes médicaux infirmier (AMI 4) pour des pansements de décembre 2009 à novembre 2011 concernant Mme F... B... Sur le deuxième moyen proposé pour la CPAM 16. Il est pris de la violation des articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 313-1 du code pénal, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale. 17. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé la prévenue du chef d'escroquerie s'agissant de la facturation de 503 AMI4 pour des pansements de décembre 2009 à novembre 2011 concernant Mme F... B..., et refusé d'indemniser la CPAM du Rhône de son préjudice, alors « que toute insuffisance de motifs équivaut à leur absence ; que pour écarter les demandes de la partie civile, contestant, s'agissant de Mme F... B..., la facturation de 503 AMI4 pour des pansements de décembre 2009 à novembre 2011, et s'appuyant sur le témoignage de sa fille, la cour d'appel se contente d'affirmer que la prévenue a produit des ordonnances d'avril 2011 et de février 2012 prescrivant chacune des pansements et des soins d'escarres pour une durée de six mois contredisant les déclarations de cette dernière ; qu'en justifiant la relaxe sur le fondement de ces motifs inopérants dès lors que la production d'ordonnances d'avril 2011 et de février 2012 était insusceptible non seulement de justifier de la réalisation des actes litigieux de décembre 2009 à avril 2011, mais encore de remettre en cause les déclarations du témoin, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision de relaxe. » Réponse de la Cour 18. Les moyens sont réunis. Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 19. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 20. Pour écarter la culpabilité de la prévenue s'agissant des 503 soins infirmiers qu'elle aurait prodigués à Mme F... B... souffrante d'escarres de décembre 2009 à novembre 2011, l'arrêt énonce que la fille de la patiente a indiqué que sa mère n'avait suivi de tels soins que deux ou trois fois en deux ans mais que la prévenue a produit des ordonnances d'avril 2011 et de février 2012 prescrivant chacune des pansements et des soins d'escarres pour une durée de six mois, que ces éléments sont susceptibles d'être retenus pour justifier la facturation et que rien ne démontrant que les actes litigieux n'auraient pas été accomplis, il n'est pas établi que la cotation appliquée serait frauduleuse. 21. En statuant ainsi, alors que l'arrêt se réfère, pour écarter la fraude, à des ordonnances médicales datées postérieurement aux soins qui n'ont donc pu être régulièrement prescrits au préalable par un médecin au moins de décembre 2009 à avril 2011, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas justifié sa décision. 22. La cassation est par conséquent de nouveau encourue de ce chef. Sur le deuxième moyen proposé par la procureure générale 23. Le moyen est pris d'une insuffisance et contrariété de motifs. 24. Il critique l'arrêt attaqué en ce que il a relaxé la prévenue du chef d'escroquerie Le moyen critique l'arrêt attaqué pour insuffisance et contrariété de motifs, en ce qu'il a renvoyé la prévenue des fins de la poursuite du chef d'escroquerie pour des faits ainsi qualifiés dans la prévention à concurrence d'une somme de 1 043 581, 42 euros. Sur le troisième moyen proposé pour la CPAM du Rhône 25. Le moyen est pris de violation des articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 11 et 13.1 de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP), 313-1 du code pénal, 2, 3, 388, 427, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ; 26. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé la déclaration de culpabilité de Mme H... du chef d'escroquerie à raison de manoeuvres frauduleuses au préjudice de la CPAM du Rhône pour un montant de 25 347,58 euros, mais l'a renvoyée des fins du surplus de la poursuite, en ce qu'elle vise la remise de fonds à concurrence de la somme de 1 043 581,82 euros, alors : « 1°/ que les juridictions correctionnelles doivent statuer sur l'ensemble des faits dont elles sont saisies par l'ordonnance de renvoi ; qu'ainsi saisie de faits d'escroquerie commis au préjudice de la CPAM du Rhône du 2 octobre 2009 au 10 juillet 2014, pour un montant de 1 068 929,40 euros, la cour d'appel ne pouvait se borner à statuer sur les seuls agissements résultant des investigations effectuées par la caisse portant sur des actes fictifs individualisés, et rejeter purement et simplement l'ensemble des agissements frauduleux s'étant déroulés sur l'ensemble de la période de prévention, dénoncés par la partie civile sur la base d'une analyse statistique portant sur l'activité plausible de la prévenue ; qu'en statuant ainsi sur les seuls faits matériellement constatés sur un échantillon de patients par l'enquête de la CPAM, quand il lui incombait de statuer sur tous les faits d'escroquerie commis sur l'ensemble de la période de prévention dont l'étendue avait pu être révélée par le recours à une analyse statistique des facturations de la prévenue, la cour d'appel a méconnu l'étendue de sa saisine et privé sa décision de toute base légale ; 2°/ que il résulte des dispositions de la nomenclature générale des actes professionnels, dont l'application stricte est exigée par la jurisprudence de la Cour de cassation, telles que rappelées par la partie civile à l'appui de ses conclusions d'appel, que la durée des actes pour assurer des soins de qualité à des patients, est fixée à 30 minutes pour la réalisation de séances de soins infirmiers cotées AIS3, « à raison de 4 au maximum par 24 heures » ; que la Cour des comptes a par ailleurs validé, dans son rapport de 2006, le fait qu'un acte technique AMI de coefficient 1 corresponde bien à 10 minutes de soins ; que la valorisation des déplacements à hauteur de 10 minutes a quant à elle été validée par la jurisprudence dans nombre de dossiers infirmiers ; que pour faire droit néanmoins à l'argumentation de la prévenue selon laquelle une infirmière libérale pouvait parfaitement retenir des temps d'intervention plus courts, et facturer des AIS 3 par deux pour 40 minutes de soins, des AMI pour 2 minutes et des déplacements pour 3 minutes, la cour d'appel affirme que ces durées moyennes n'apparaissent pas en contradiction avec la définition des actes infirmiers ; qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions de la NGAP, du rapport de la Cour des comptes et de la jurisprudence précitée, tels qu'invoqués par la partie civile à l'appui de sa plainte comme de ses conclusions d'appel ; 3°/ que par un arrêt du 17 décembre 2015, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rappelé que la séance de soins infirmiers est effectivement cotée de façon forfaitaire, le forfait recouvrant l'ensemble des actes que l'infirmier doit réaliser durant la période de trente minutes prévue ; qu'il peut être admis que la durée effective de la séance de soins infirmiers n'est pas strictement de trente minutes, le forfait incluant la tenue du dossier de soins et de la fiche de liaison éventuelle, diligences que l'infirmier peut accomplir en différé ; qu'elle ajoute que c'est au praticien concerné d'apprécier, lors de la prescription, la durée des soins nécessités par l'état du patient pour prescrire le nombre de séances nécessaires ; qu'elle en conclut, s'agissant de séances d'une demi-heure, que selon les termes de la nomenclature générale des actes professionnels, il ne saurait être admis que soient facturées deux séances d'une demi-heure dès lors que la trente cinquième minute est atteinte ; que pour écarter toute manoeuvre frauduleuse de la prévenue quant à la facturation des soins cotés AIS 3, la cour d'appel reconnaît expressément comme valide, le calcul de la prévenue basé sur des AIS3 facturés par deux pour 40 minutes ; qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a non seulement méconnu les dispositions de la nomenclature générale des actes professionnels, mais encore la jurisprudence précitée pourtant expressément rappelée par la CPAM à l'appui de ses conclusions d'appel, privant de ce fait sa décision de toute base légale ; 4°/ que à tout le moins, il appartenait à la cour d'appel de vérifier si le temps passé allégué par la prévenue au titre des actes de soins cotés en AIS, et des actes techniques, cotés en AMI, était compatible avec la qualité des soins qui justifie la prise en charge de ces derniers par l'organisme de protection sociale ; qu'en se bornant à relever que les temps de travail allégués par la prévenue -allant jusqu'à 19h15 minutes par jour, 7 jours sur 7, et 365 jours par an-, « bien que très lourds, n'étaient pas incompatibles avec une journée de 24 heures », sans procéder à cette recherche, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ; 5°/ que les juges du fond sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que dans ses conclusions régulièrement déposées, la partie civile avait démontré, en réponse aux allégations mensongères de la prévenue prétendant justifier son activité surhumaine par un emploi du temps à l'amplitude démesurée, et au recours à sa nièce pour la remplacer, le caractère irréaliste et infondé de ces allégations ; qu'elle avait ainsi soutenu que la prévenue n'apportait aucune explication sur le temps nécessaire, en plus de son activité professionnelle, pour effectuer son travail administratif a minima de deux heures par jour, au temps consacré à l'achat de ses appartements ainsi qu'à ses placements bancaires et à sa famille ; qu'elle avait par ailleurs souligné que l'instruction avait établi que sa nièce, V... H... était également salariée avec un temps de travail de 143 heures 54 de nuit, de sorte que les rétrocessions de sa tante, à hauteur de 132 938 euros pour un remplacement de 5 à 8jours entre le 26 octobre 2009 et le 30 mai 2012, constituaient nécessairement une manoeuvre frauduleuse par laquelle l'activité de remplacement dissimulait en fait des actes fictifs ; qu'en se bornant à affirmer que les temps de travail allégués par la prévenu apparaissaient compatibles avec une journée de 24 heures, et que la capacité de travail diffère selon les personnes, sans s'expliquer sur les arguments péremptoires des conclusions de la partie civile de nature à établir que les allégations de la prévenu quant à son temps de travail étaient parfaitement irréalistes et démenties par l'instruction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ; 6°/ que les juges du fond sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que dans ses conclusions régulièrement déposées, la partie civile insistait sur le fait que son calcul de l'étendue de la fraude ne prenait en compte que les actes remboursés par la CPAM du Rhône, ce qui était extrêmement favorable à Mme H... puisque l'ensemble des actes remboursés par les autres organismes sociaux n'étaient pas comptés ; que pour retenir néanmoins les temps de travail allégués par la prévenue dont elle relevait qu'ils divergeaient totalement des temps de travail calculés par la CPAM, la cour d'appel se borne à relever qu'il ne peut être soutenu avec certitude que Mme H... n'ait pu faire face à cette charge ; qu'en prononçant ainsi sans avoir pris en considération, comme elle y était pourtant invitée, le fait que la prévenue avait effectué durant la prévention des facturations auprès d'autres organismes, qui n'étaient nullement intégrées dans ses calculs, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ; 7°/ que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'après avoir expressément reconnu la mauvaise foi de la prévenue quant à la facturation de plusieurs milliers d'actes sur des dizaines de patients, par le recours à des manoeuvres frauduleuses destinées à tromper délibérément la CPAM, la cour d'appel n'a pas hésité à justifier la relaxe du surplus de la prévention sur la foi des seules allégations de la prévenue quant à la description de ses journées de travail, en divergence totale avec les calculs opérés par la partie civile sur le fondement de données objectives ; qu'en se bornant à tenir pour vraisemblables les allégations de la prévenue quant à son temps de travail pour justifier sa relaxe partielle du chef d'escroquerie, après avoir elle-même constaté et sanctionné cette dernière pour sa mauvaise foi et sa volonté avérée de fraude au système social, la cour d'appel s'est prononcée sur le fondement de motifs contradictoires ; 8°/ que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'après avoir elle-même rappelé les termes de la plainte de la partie civile, dont les constatations avaient été confirmées par l'enquête, selon lesquelles le ratio d'activité de Mme H... était de 4,4 fois supérieur au ratio régional en nombre d'actes, et en moyenne de 6 fois supérieur, en montant remboursé par la caisse, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire ou mieux s'en expliquer, affirmer qu'aucun élément de l'enquête et de l'instruction soumises à la cour ne vient corroborer, au-delà des faits matériellement constatés dans les dossiers des patients sus évoqués, l'existence de facturations d'autres actes fictifs ; 9°/ que hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve ; qu'en conséquence une caisse primaire d'assurance maladie est recevable à justifier de l'étendue de la fraude, sur le fondement d'une analyse statistique de l'activité de la prévenue, indiquant le temps journalier prévu par le prestataire de soins en fonction de la durée des actes prévue par la nomenclature générale des actes professionnels ; qu'en écartant péremptoirement ce mode de preuve, pour estimer qu'il ne dénonce aucun fait précis et circonstancié suffisant à démontrer un comportement frauduleux, la cour d'appel a méconnu le principe de la liberté de la preuve en matière pénale, en violation des textes visés au moyen ; 10°/ que si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice résultant d'une infraction, cette appréciation cesse d'être souveraine lorsqu'elle est déduite de motifs insuffisants, contradictoires ou erronés ; que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur les précédentes branches du moyen entraînera nécessairement la censure de l'arrêt attaqué en ses dispositions ayant limité, « en conséquence de l'étendue de l'infraction dont la prévenue a été déclarée coupable », le montant du préjudice subi par la CPAM du Rhône à la somme de 25 347,58 euros. » Réponse de la Cour 27. Les moyens sont réunis. Vu les articles L. 133-4, L. 162-1-7 et L. 321-1 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 5 et 7 de la première partie de la nomenclature générale des actes professionnels, annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 modifié, et l'article 593 du code de procédure pénale. 28. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 29. Il résulte des textes susvisés du code de la sécurité sociale et de la nomenclature générale des actes professionnels que seul le médecin prescripteur fixe la durée des séances de soins cotées AIS 3 lesquelles doivent, pour être prises en charge par les CPAM, se dérouler pendant trente minutes au moins. 30. Pour réformer le jugement en ce qu'il a déclaré la prévenue coupable de faits d'escroquerie tels que chiffrés dans la prévention à un montant de 1 068 929, 40 euros, et limiter la culpabilité de cette dernière à une escroquerie qu'elle a fixée à 25 347, 58 euros correspondant aux seuls faits de fraude concernant des patients déterminés, l'arrêt énonce notamment, s'agissant des autres faits de fraude pris dans leur globalité et dénoncés à partir d'une enquête statistique de la CPAM concluant à l'invraisemblance de l'activité sensée avoir été déployée, bien au delà de quatorze heures de travail journalier, telle qu'elle ressort de la facturation, et à l'inexistence des actes dont le règlement a été sollicité et obtenu, que l'estimation du temps de travail par l'organisme social et par la prévenue sont en totale divergence et que celui évalué par celle-ci, bien que très lourd, est compatible avec une journée de vingt-quatre heures. 31. Les juges, qui relèvent que la comparaison de ratio d'activité est dépourvue de pertinence pour caractériser une infraction pénale, ajoutent que ce temps de travail doit être calculé sur des AIS3 facturés par deux pour quarante minutes de soins, des AMI d'une durée de deux minutes et des déplacements de trois minutes, que si la nomenclature des actes professionnels prévoit que les séances de soins infirmiers durent trente minutes et sont cotées 1 AIS3, la cotation n'est pas précisée lorsque la séance dépasse cette durée, la pratique professionnelle étant, pour toute séance de plus de trente minutes, durée dont l'appréciation relève du rôle propre de l'infirmier ou de l'infirmière, de la coter 2 AIS3, ce dernier étant légitime à être rémunéré d'un travail effectif. 32. En premier lieu, prononçant ainsi alors que la cotation forfaitaire AIS 3 -prévue par la NGAP d'application stricte, incluant l'ensemble des prestations de la compétence de l'infirmier réalisés au cours de la séance, compris la tenue du dossier de soins et de la fiche de liaison individuelle, le forfait recouvrant l'ensemble des diligences que l'infirmier doit réaliser durant une séquence de trente minutes- se rapporte à des séances de soins, qui pour être prises en charge par la CPAM, doivent durer au minimum une demi-heure et que leur nombre ne peut être décidé que par le médecin prescripteur, qu'il ne saurait être admis que soient facturées deux séances d'une demi-heure dès que la trente cinquième minute est atteinte, la cour d'appel qui a méconnu la NGAP et qui n'a pas répondu aux chefs péremptoires des écritures de la partie civile faisant valoir notamment que les actes litigieux ne respectent pas les règles de tarification ou de facturation établies par la NGAP, l'invraisemblance de déplacements d'une durée de trois minutes et l'incompatibilité d'actes médico-infirmiers d'une durée de deux minutes avec la qualité attendue des soins, n'a pas justifié sa décision. 33. En deuxième lieu, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme il le lui était demandé par conclusions de la CPAM demeurées sans réponse, si l'aide que la nièce de la prévenue aurait apportée à cette dernière du 26 octobre 2009 au 30 mai 2012, ne recelait pas une activité fictive destinée à justifier des facturations mensongères, alors que cette personne, qui a bénéficié de la part de sa tante d'une rétrocession d'honoraires de 132 938, 25 euros au cours de cette période soit de 4 500 euros par mois pour un remplacement de cinq à huit jours, était par ailleurs embauchée pour un travail de nuit de 143 h 54 par mois, n'a pas justifié sa décision. 34. En troisième lieu, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, pour évaluer le temps de travail correspondant aux facturations établies en direction de la CPAM du Rhône si ne devait pas être pris en considération sur ce point le fait qu'au temps de la prévention, la prévenue a par ailleurs facturé 11 886 actes en 2010 notamment à deux autres organismes sociaux qui à supposer que chacun ait duré en moyenne une dizaine de minutes implique cinq heures de travail supplémentaire par jour à ajouter à un emploi du temps déjà surchargé tous les jours de l'année, n'a pas justifié sa décision. 35. En quatrième lieu, la cour d'appel, qui ne s'est pas assurée de la pertinence et de la vraisemblance du temps de travail déclaré par la prévenue, se refusant à rechercher l'étendue de la fraude au-delà des actes fictifs individualisés et contrôlés, alors que, d'une part, la CPAM avait produit une analyse quant à l'activité globale alléguée par cette dernière qui impliquait en moyenne cinquante-cinq heures de travail par jour, sept jours sur sept, notamment entre le 1er octobre 2009 et le 31 mars 2012, d'autre part, les infractions étant susceptibles d'être établies par tout mode de preuve, la culpabilité peut résulter d'éléments statistiques mettant en évidence des invraisemblances et des incohérences quant au volume de prestations supposées, irréaliste par rapport à une force de travail même élevée, de l'absence de respect de la durée réglementaire des actes, de l'inobservation de la règle du non cumul des rémunérations s'agissant de certains d'entre eux et de leur nombre anormalement démultiplié en regard de ceux correspondant au montant de la rétribution allouée à d'autres professionnels de santé exerçant la même activité, n'a pas justifié sa décision. 36. En effet, la prévenue ayant perçu une rémunération mensuelle de l'ordre de 29 010 euros pour un montant d'actes remboursés de cinq à sept fois supérieur à celui de ses confrères, la cour d'appel qui ne s'est pas interrogée sur de telles distorsions correspondant à un paiement annuel notamment en 2010 en faveur de cette dernière de plus de 343 240 euros en rétribution de 27 794 actes déclarés alors que les autres infirmiers libéraux ont reçu en moyenne en règlement des soins prodigués pour la même année 2010, 49 433 euros pour 6 256 actes, n'a pas justifié sa décision. 37. D'où il suit que la cassation est encore encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu d'examiner le troisième moyen proposé par la procureure générale et le quatrième moyen proposé pour la CPAM du Rhône, la Cour : Sur le pourvoi formé par Mme A... H... Le DÉCLARE NON ADMIS ; Sur les pourvois de la procureure générale et de la CPAM du Rhône CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 12 septembre 2018, en ses seules dispositions ayant renvoyé Mme H... des fins de la poursuite visant la remise de fonds à concurrence de la somme de 1 043 581,82 euros, en celles relatives aux peines et aux dispositions civiles déboutant la CPAM du Rhône de ses demandes supérieures à la somme de 25 347,59 euros alloués à titre de dommages-intérêts, Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale. ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq novembre deux mille vingt.
L'article 13, 1, C, 1°, de la Nomenclature générale des Actes Professionnels disposant que l'indemnité due au professionnel de santé est calculée pour chaque déplacement à partir de son local professionnel, un seul déplacement doit être remboursé lorsque les soins sont pratiqués sur plusieurs patients logés dans une même résidence à la même adresse. La Nomenclature générale des actes professionnels prévoyant pour l'ensemble des prestations d'une infirmière libérale réalisées au cours d'une séance d'une durée minimale d'une demi-heure une cotation forfaitaire AIS 3, le nombre de ces séances ne peut être décidé que par le médecin prescripteur et il ne saurait être admis que soient facturées deux séances d'une demi-heure dès que la trente cinquième minute est atteinte. La déclaration de culpabilité du chef d'escroquerie au préjudice des organismes sociaux peut résulter d'une part, de l'absence de pertinence et de vraisemblance de l'activité globale alléguée par la prévenue, impliquant, en l'espèce, en moyenne cinquante-cinq heures de travail par jour, sept jours sur sept, d'autre part, les infractions étant susceptibles d'être établies par tout mode de preuve, d'éléments statistiques mettant en évidence des incohérences quant au volume de prestations supposées, irréaliste par rapport à une force de travail même élevée, de l'absence de respect de la durée réglementaire des actes, de l'inobservation de la règle du non cumul des rémunérations s'agissant de certains d'entre eux et de leur nombre anormalement démultiplié en regard de ceux correspondant au montant de la rétribution allouée à d'autres professionnels de santé exerçant la même activité. N'a pas justifié sa décision la cour d'appel qui s'est refusée à rechercher l'étendue de la fraude au-delà des actes fictifs individualisés et contrôlés
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N° G 20-84.819 F-P+B+I N° 2700 RB5 17 NOVEMBRE 2020 REJET M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 17 NOVEMBRE 2020 REJET du pourvoi formé par M. A... E... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 29 juillet 2020, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les armes, usage de fausse plaque d'immatriculation, recel en bande organisée, association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire. Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de Mme Labrousse, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. A... E..., et les conclusions de Mme Caby, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Labrousse, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et M. Bétron, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. M. E..., mis en examen des chefs précités, a été placé en détention provisoire le 8 juillet 2019. 3. Par arrêt en date du 22 juin 2020, la chambre de l'instruction a annulé l'ensemble des actes et procès-verbaux établis au cours de la garde à vue de l'intéressé. 4. Le 6 juillet 2020, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de la détention provisoire de M. E.... 5. La personne mise en examen a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses première et troisième branches 6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu d'ordonner la mise en liberté d'office de M. E... et a au contraire confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant prolongé la détention provisoire de M. E... pour une durée de quatre mois alors : « 2°/ que les pièces annulées par arrêt d'une chambre de l'instruction doivent être retirées du dossier de la procédure dès lors qu'est expiré le délai dont disposaient, pour se pourvoir, les parties qui auraient eu intérêt à solliciter la cassation du chef de l'arrêt annulant ces pièces ; qu'en retenant, pour juger que les pièces relatives à la garde à vue de M. E... , annulées par arrêt du 22 juin 2020, pouvaient se trouver dans le dossier le 6 juillet 2020, qu'à cette date, M. E... pouvait encore se pourvoir contre l'arrêt du 22 juin 2020, quand M. E... était dépourvu d'intérêt à se pourvoir contre le chef de l'arrêt ayant annulé sa garde à vue et qu'il lui appartenait donc de rechercher si ce chef était encore susceptible, le 6 juillet 2020, d'être cassé sur le pourvoi d'une autre partie, la chambre de l'instruction s'est déterminée par des motifs inopérants en violation des articles 174, 568, 462, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 8. Il se déduit de l'article 570, alinéas 2 et 3, du code de procédure pénale que l'arrêt de la chambre de l'instruction distinct de l'arrêt au fond n'est pas exécutoire tant que les délais de pourvoi du ministère public et de toutes les parties à la procédure ne sont pas expirés, peu important que celles-ci aient ou non un intérêt à former un tel recours, dès lors qu'il revient à la seule Cour de cassation, saisie d'un pourvoi, d'en apprécier la recevabilité. 9. Pour écarter l'exception de nullité du débat contradictoire prise de ce qu'au jour de ce débat figuraient toujours en procédure les pièces annulées par l'arrêt du 22 juin 2020 et confirmer l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire, la chambre de l'instruction énonce que le 6 juillet 2020, jour de la tenue de ce débat, l'arrêt prononçant sur les nullités n'avait pas force exécutoire. 10. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision. 11. En effet, l'arrêt du 22 juin 2020 a été notifié à M. E... le 24 juin 2020. 12. Dès lors, et en application des articles 568 et 801 du code de procédure pénale et 4 de l'ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020, applicable jusqu'au 11 août 2020, le délai dont disposait M. E... pour se pourvoir en cassation expirait le 6 juillet 2020, minuit. 13. En conséquence, l'arrêt de la chambre de l'instruction prononçant sur les nullités n'était pas exécutoire au jour du débat contradictoire. 14. Le grief ne peut dès lors être accueilli. 15. L'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi. ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept novembre deux mille vingt.
Il se déduit de l'article 570, alinéas 2 et 3, du code de procédure pénale que l'arrêt de la chambre de l'instruction distinct de l'arrêt au fond n'est pas exécutoire tant que les délais de pourvoi du ministère public et de toutes les parties à la procédure ne sont pas expirés, peu important que celles-ci aient ou non un intérêt à former un tel recours, dès lors qu'il revient à la seule Cour de cassation, saisie d'un pourvoi, d'en apprécier la recevabilité. Justifie dès lors sa décision la chambre de l'instruction, qui, pour écarter l'exception de nullité du débat contradictoire formée par la personne mise en examen prise de ce qu'au jour de ce débat figuraient toujours en procédure des pièces annulées par un arrêt contre lequel elle alléguait qu'elle, ou une autre personne mise en examen, était dépourvue d'intérêt à se pourvoir, énonce qu'au jour de la tenue de ce débat, cet arrêt n'avait pas force exécutoire, le délai pour former un pourvoi contre celui-ci n'ayant pas expiré
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N° F 20-84.886 FS-P+B+I N° 2710 EB2 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 25 NOVEMBRE 2020 CASSATION sur le pourvoi formé par M. H... D... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 août 2020, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de tentative de meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. H... D..., et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, M. Bonnal, Mme Ménotti, M. Maziau, Mme Labrousse, MM. Seys, Dary, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Violeau, conseillers référendaires, M. Aldebert, avocat général, et M. Bétron, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Par ordonnance en date du 27 juillet 2020, le juge des libertés et de la détention a rejeté la demande de mise en liberté de M. D... formée par son avocat le 20 juillet 2020. 3. L'avocat de M. D... a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Sur le moyen pris en sa première branche 4. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pontoise du 27 juillet 2020 ayant rejeté la demande de mise en liberté de M. D..., alors : « 2°/ qu'en tant que gardien de la liberté individuelle, il incombe au juge de veiller à ce que la détention provisoire soit, en toutes circonstances, mise en oeuvre dans des conditions respectant la dignité des personnes et de s'assurer que cette privation de liberté est exempte de tout traitement inhumain et dégradant ; que lorsque la description faite par le demandeur de ses conditions personnelles de détention est suffisamment crédible, précise et actuelle, pour constituer un commencement de preuve de leur caractère indigne, il appartient à la chambre de l'instruction, dans le cas où le ministère public n'aurait pas préalablement fait vérifier ces allégations, et en dehors du pouvoir qu'elle détient d'ordonner la mise en liberté de l'intéressé, de faire procéder à des vérifications complémentaires afin d'en apprécier la réalité ; qu'en affirmant, pour dire n'y avoir lieu à remise en liberté de M. D... ni à investigations complémentaires, qu'il n'est pas démontré que les conditions de détention de celui-ci seraient indignes ou constitueraient un traitement inhumain ou dégradant, quand M. D... faisait valoir qu'il vivait 20 heures par jour dans une cellule infestée de punaises et de cafards, sans assez de chaises pour que les détenus puissent tous s'asseoir, que les douches étaient repoussantes et jonchées de déjections de rats et que la cour de promenade la plus grande était de 40 m² pour 25 à 30 détenus, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision en violation des articles 3 et 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 144, 148-4, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 6. Il résulte de ce texte que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 7. Pour confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, en écartant le moyen pris de ce que M. D... donnait une description de ses conditions personnelles de détention à la maison d'arrêt de Fresnes suffisamment crédible, précise et actuelle pour constituer un commencement de preuve du caractère indigne de sa détention et justifier des vérifications complémentaires, l'arrêt attaqué énonce que sont décrites essentiellement les conditions générales de détention à la maison d'arrêt de Fresnes et que s'agissant des conditions personnelles de détention de l'intéressé, il est mentionné qu'il partage avec un seul co-détenu une cellule destinée à accueillir trois personnes et que les parloirs famille se déroulent actuellement à travers une vitre, ce qui l'empêche de toucher son fils âgé de deux ans. 8. Les juges ajoutent que l'intéressé ne démontre pas en quoi ses conditions personnelles de détention affecteraient sa santé physique ou psychologique, qu'il ne justifie pas de la prise d'anxiolytiques et du suivi psychologique pour dépression dont il fait état et qu'interrogé le 26 novembre 2019 par le juge d'instruction sur le déroulement de sa détention, il a mentionné des insomnies qu'il a attribuées à d'autres causes qu'à des conditions indignes de détention. 9. Les juges énoncent encore que l'obligation imposée à l'intéressé de voir sa famille derrière une vitre résulte de la crise sanitaire et ne saurait être assimilée à un traitement inhumain et dégradant. 10. Ils concluent qu'il n'est pas démontré que les conditions personnelles de détention de M. D... sont indignes et constituent un traitement inhumain et dégradant au sens de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme qui justifierait des vérifications complémentaires ou sa mise en liberté. 11. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision, pour les motifs qui suivent. 12. Saisie d'une description du demandeur qui évoquait une cellule infestée de punaises et de cafards, l'absence de chaise, la saleté repoussante des douches et le sous-dimensionnement de la cour de promenade, la chambre de l'instruction devait en apprécier le caractère précis, crédible et actuel, sans s'arrêter au fait que cette description ne renverrait qu'aux conditions générales de détention à la maison d'arrêt de Fresnes, ni exiger du demandeur qu'il démontre le caractère indigne de ses conditions personnelles de détention. 13. Les juges ne pouvaient non plus exiger de l'intéressé qu'il démontre que ses conditions personnelles de détention affectaient sa santé physique ou psychologique. 14. La cassation est en conséquence encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 août 2020, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi. RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq novembre deux mille vingt.
Le juge saisi pour apprécier la nécessité de placer ou maintenir une personne en détention provisoire a l'obligation de garantir à cette personne placée dans des conditions indignes de détention un recours préventif et effectif permettant d'empêcher la continuation de la violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme. Lorsque la description faite par le demandeur de ses conditions personnelles de détention est suffisamment crédible, précise et actuelle, de sorte qu'elle constitue un commencement de preuve de leur caractère indigne, il appartient à la chambre de l'instruction, dans le cas où le ministère public n'aurait pas préalablement fait vérifier ces allégations, de faire procéder à des vérifications complémentaires afin d'en établir la réalité. Encourt en conséquence la censure l'arrêt qui, en présence d'une description circonstanciée, s'arrête au fait qu'elle ne renverrait qu'aux conditions générales de détention dans l'établissement pénitentiaire en cause et qui exige de l'intéressé qu'il démontre le caractère indigne de ses conditions personnelles de détention ainsi que leurs conséquences sur sa santé physique ou psychologique
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N° P 20-84.893 FS-P+B+I N° 2725 CG10 18 NOVEMBRE 2020 REJET M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 18 NOVEMBRE 2020 REJET du pourvoi formé par M. X... N... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 4 août 2020, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de meurtre, tentative de meurtre, destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes, en bande organisée, infraction à la législation sur les armes, association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté. Des mémoires personnel et ampliatif ont été produits. Sur le rapport de M. Guéry, conseiller, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. X... N..., et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 novembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Guéry, conseiller rapporteur, M. Moreau, Mme Drai, M. de Larosière de Champfeu, Mmes Slove, Sudre, Mme Issenjou, M. Turbeaux, conseillers de la chambre, Mme Carbonaro, Mme Barbé, M. Mallard, conseillers référendaires, M. Aldebert, avocat général, et Mme Guichard, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 22 mars 2019, M. X... N... a été mis en examen des chefs susvisés. 3. Le 17 juillet 2020, il a déposé une demande de mise en liberté qui a été rejetée, le 21 juillet 2020, par ordonnance du juge des libertés et de la détention de Fort-de-France. 4. M. N... a interjeté appel de cette décision. Examen de la recevabilité du mémoire personnel de M. N... 5. Le mémoire, enregistré au greffe de la Cour de cassation le 8 septembre 2020, soit plus d'un mois après la déclaration de pourvoi, faite le 6 août 2020, ne remplit pas les conditions exigées par l'article 584 du code de procédure pénale. 6. Il est dès lors irrecevable et ne saisit pas la Cour de cassation des moyens qu'il pourrait contenir. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du 21 juillet 2020 et d'avoir ordonné le maintien en détention de l'exposant, en rejetant sa demande d'être extrait du box sécurisée lors de l'audience du 4 août 2020 devant la chambre de l'instruction, alors « que, il appartient aux tribunaux de chaque pays de choisir les aménagements de sécurité les plus appropriés à une affaire donnée, en tenant compte de la nécessité de préserver une bonne administration de la justice, l'apparence d'une procédure équitable ainsi que la présomption d'innocence ; qu'ainsi l'utilisation d'un box vitré doit être justifiée par un risque pour la sécurité ou par des problèmes d'ordre dans le prétoire et ne pas relever de la simple routine (Cour EDH, I... T... c. Russie, 4 oct. 2016, nos 2653/13 et 60980/14, § 152) ; que dès lors, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 3, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137, 144, 148 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction qui, pour rejeter la demande du mis en examen tendant à sa comparution hors du box sécurisé, s'est bornée à effectuer une description du box vitré pour en déduire que ce box n'était contraire « ni à la dignité humaine, ni au principe de la présomption d'innocence, ni à la communication confidentielle et aisée du conseil avec le comparant », sans rechercher si, en l'espèce, le recours à ce dispositif était nécessaire quand, au surplus, le comparant était une personne mise en examen et, par principe, présumée innocente et devant comparaître librement. » 8. Pour refuser la demande de comparution du mis en examen hors du box sécurisé, la chambre de l'instruction, après avoir précisément décrit l'installation en cause et indiqué qu'elle répondait aux normes de sécurité prônées par le ministère de la justice, énonce que l'avocat peut s'entretenir efficacement et en toute confidentialité avec son client, le microphone pouvant être coupé par la juridiction sur simple demande. La disposition géographique de ce box dans la salle et le microphone qui y est installé permettent au comparant de s'exprimer de manière tout à fait claire et audible, de suivre les débats, de voir et d'être vu de la juridiction. Ainsi, ce box assure tant la sécurité des personnes se trouvant à l'intérieur que de celles présentes dans la salle d'audience. 9. Les juges ajoutent que l'utilisation du box n'est contraire, ni à la dignité humaine, ni au principe de la présomption d'innocence, ni à la communication confidentielle et aisée du conseil avec le comparant. 10. En se déterminant ainsi, après avoir relevé que M. N... avait déjà été condamné à sept ans d'emprisonnement pour trafic de stupéfiants, et est mis en examen des chefs de meurtre, tentative de meurtre en bande organisée, destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes, en bande organisée, infraction à la législation sur les armes, association de malfaiteurs, à la suite d'une fusillade s'analysant en une véritable exécution de la victime en pleine rue, ce dont il ressort que la comparution derrière un box vitré était nécessaire à la sécurité de l'audience, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans violer les dispositions conventionnelles alléguées. 11. Le moyen doit, en conséquence, être rejeté. Sur le second moyen Enoncé du moyen 12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du 21 juillet 2020 et ordonné le maintien en détention de l'exposant, alors « que lorsque la détention provisoire excède un an en matière criminelle, les décisions ordonnant la prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent comporter les indications particulières qui justifient, en l'espèce, la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure ; que dès lors, la chambre de l'instruction qui, pour confirmer l'ordonnance de refus de mise en liberté du 21 juillet 2020, n'a pas mentionné les indications particulières qui justifiaient, en l'espèce, la poursuite de l'information, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137, 144, 145-3, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 13. Pour confirmer l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention, et répondre aux exigences de l'article 145-3 du code de procédure pénale, l'arrêt attaqué, après avoir énoncé que les investigations se poursuivent pour tenter d'identifier et interpeller les individus susceptibles d'être impliqués dans les faits, indique que le délai de fin d'instruction peut être fixé à six mois. 14. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision. 15. Le moyen doit, en conséquence, être écarté. 16. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit novembre deux mille vingt.
Doit être rejeté le pourvoi formé contre un arrêt de chambre de l'instruction statuant en matière de détention provisoire, ayant refusé la comparution de la personne mise en examen hors d'un box vitré, par une motivation dont il ressort que cette comparution, qui n'est contraire ni à la dignité humaine ni à la présomption d'innocence, était nécessaire à la sécurité de l'audience
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SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Cassation partielle sans renvoi Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1053 F-D Pourvoi n° V 19-11.686 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 NOVEMBRE 2020 Mme D... B..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° V 19-11.686 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. H... S... (SCP BTSG), domicilié [...] , pris en qualité de mandataire liquidateur de la société BG2P, 2°/ à l'AGS-CGEA de Rouen, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de Mme B..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS-CGEA de Rouen, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Mariette, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 20 septembre 2018) et les pièces de la procédure, Mme B... a été engagée le 6 septembre 2010 en qualité de comptable par la société BG2P (la société). Suite au prononcé le 17 octobre 2013 de la liquidation judiciaire de la société, avec maintien de l'activité jusqu'au 24 octobre 2013 et mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi, le liquidateur judiciaire, la société BTSG, en la personne de M. S..., a procédé le 12 novembre 2013 au licenciement pour motif économique de l'intéressée qui se trouvait en congé de maternité depuis le 24 septembre 2013. 2. Invoquant la période de protection allant du 24 septembre 2013 au 27 mai 2014 dont elle bénéficiait, la salariée a saisi la juridiction prud'homale pour voir juger que son licenciement était nul, et indiquant qu'elle ne sollicitait pas sa réintégration, a demandé la fixation de ses créances au passif de la liquidation judiciaire dont celle représentant les salaires qu'elle aurait dû percevoir pendant la période allant du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014. 3. Par jugement du 7 mai 2015, le conseil de prud'hommes a dit que le licenciement de la salariée intervenu pendant la période de protection du fait du congé de maternité était nul, fixé ses créances au passif de la société dont la somme de 12 901 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014, celle de 1 290 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire et dit que le jugement était opposable à l'AGS et au CGEA dans les limites prévues aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail. 4. A la suite du refus du liquidateur de demander à l'AGS d'avancer les sommes correspondant aux rappels de salaires et congés payés au motif qu'elles ne rentraient pas dans la garantie de cet organisme, la salariée a, le 7 octobre 2015, saisi le conseil de prud'hommes en interprétation de cette décision sur les limites de la garantie de l'AGS. 5. Par jugement du 31 mars 2016, le conseil de prud'hommes a dit que les créances de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et celle de congés payés afférents devaient être prises en charge et garanties par l'AGS. Rectification d'erreur matérielle relevée d'office 6. Avis a été donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile. Vu l'article 462 du code de procédure civile : 7. C'est par suite d'une erreur purement matérielle que, dans le dispositif de la décision attaquée, la cour d'appel a dit que la créance de rappel de salaire et de congés payés afférents pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 est garantie par l'AGS dans les termes énoncés à l'article L. 3253-8 d) du code du travail, au lieu de l'article L. 3253-8 5° d) du même code. 8. Il y a lieu, pour la Cour de cassation, de réparer cette erreur, qui affecte un chef de dispositif qui lui est déféré. Examen du moyen Enoncé du moyen 9. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que sa créance au titre de salaires pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et des congés payés afférents, fixée dans le jugement du 7 mai 2015, était garantie par l'AGS dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 5°d) du code du travail, alors « qu'est nul le licenciement d'une salariée en état de grossesse prononcé pendant les périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit et les dix semaines suivant leur expiration, l'employeur devant alors verser le montant du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité ; que ce versement rentre dans le champ d'application de l'article L. 3253-9 du code du travail, qui impose à l'AGS de couvrir les créances résultant du licenciement des salariés bénéficiaires d'une protection particulière relative au licenciement, dès lors que l'administrateur, l'employeur ou le liquidateur, selon le cas, a manifesté, au cours des périodes mentionnées au 2° de l'article L. 3253-8, son intention de rompre le contrat de travail ; qu'en l'espèce, il est acquis aux débats que le licenciement de Mme B..., intervenu pendant le congé de maternité durant lequel elle était protégée, est nul ; qu'il en résulte que les sommes dues à Mme B... pendant la période de protection du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et les congés payés y afférents rentraient dans le cadre de cette garantie ; qu'en ayant dit que le jugement définitif du 7 mai 2015, ayant fixé les créances de Mme B... à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société BG2P et dit qu'il était opposable à l'AGS et au CGEA ''dans les limites prévues aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail'', s'interprétait en ce sens que la créance de rappel de salaires pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et les congés payés y afférents était garantie par l'AGS dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 d) du code du travail, cependant qu'il convenait de dire que la créance, qui résultait du licenciement nul, était couverte par l'AGS et le CGEA de Rouen faute de fonds suffisants de la SAS BG2P à hauteur respectivement de 12 901 euros bruts et 1 290 euros bruts, l'arrêt infirmatif a violé par fausse application l'article L. 3253-8 5°d) du code du travail, l'article L. 3253-9 du même code par refus d'application, ensemble les articles L. 1225-4 et L. 1225-71 du code du travail, et 461 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 10. L'AGS et l'UNEDIC contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent que le moyen est nouveau dès lors qu'il ne résulte pas des conclusions de la salariée qu'elle a sollicité le bénéfice des dispositions de l'article L. 3253-9 du code du travail. 11. Cependant, il ressort des conclusions de la salariée devant la cour d'appel qu'elle invoquait ces dispositions et soutenait que l'AGS devait garantir la créance de salaire, assimilée à des créances de rupture. 12. Le moyen est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu l'article L. 3253-9 du code du travail et l'article L. 1225-71, alinéa 2, du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 : 13. D'une part, selon l'article L. 3253-9 du code du travail, sont couvertes par l'assurance prévue à l'article L. 3253-6 du même code, les créances résultant du licenciement des salariés bénéficiaires d'une protection particulière relative au licenciement dès lors que l'administrateur, l'employeur ou le liquidateur, selon le cas, a manifesté, au cours des périodes mentionnées au 2° de l'article L. 3253-8, son intention de rompre le contrat de travail. 14. D'autre part, l'article L. 1225-71, alinéa 2, du code du travail prévoit qu'une salariée en état de grossesse, bénéficiaire d'une protection spécifique relative au licenciement, dont le licenciement est nul, doit percevoir les salaires qui auraient été perçus pendant la période couverte par la nullité. Cette créance constitue une créance résultant du licenciement, de sorte que l'AGS doit sa garantie en application de l'article L. 3253-9 du code du travail. 15. Pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que les créances dues à un salarié bénéficiant d'une protection particulière relative au licenciement, qui ne résultent pas de la rupture de son contrat de travail mais concernent des salaires dus en application de l'article L. 3253-8 du code du travail, ne sont pas garanties par l'AGS. Il en déduit que les premiers juges ne pouvaient donc interpréter le dispositif de leur jugement en disant que la créance de salaire et de congés payés de la salariée pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 devait être prise en charge par l'AGS, alors que celle-ci n'était tenue à garantie que dans la limite d'un mois et demi de travail en application de l'article L. 3253-8 5° d) du code du travail. 16. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 17. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 18. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. PAR CES MOTIFS, la Cour : ORDONNE la rectification de l'arrêt RG n° 16/02073 rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Rouen et dit que, dans son dispositif, il y a lieu de lire : « Dit que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées par le jugement du 7 mai 2015 est garantie par l'AGS (CGEA de Rouen) dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 5° d) du code du travail » au lieu de « Dit que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées par le jugement du 7 mai 2015 est garantie par l'AGS (CGEA de Rouen) dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 d) du code du travail » ; ORDONNE la mention de cette rectification en marge de la décision rectifiée ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées par le jugement du 7 mai 2015 est garantie par l'AGS dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 5° d) du code du travail et en ses dispositions relatives aux dépens, l'arrêt rendu le 20 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Dit que le jugement du 7 mai 2015 doit être interprété en ce sens que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées aux sommes de 12 901 euros bruts et 1 290 euros bruts sont garanties par l'AGS (CGEA de Rouen) en application de l'article L. 3253-9 du code du travail ; Condamne l'AGS et le CGEA aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'AGS et le CGEA et les condamne à payer à Mme B... la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé et rectifié ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme B... Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la créance de Mme B... à titre de salaires pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014, et les congés payés y afférents, fixée dans le jugement du 7 mai 2015, était garantie par l'AGS (CGEA de Rouen) dans les termes et limites énoncées à l'article L. 3253-8 d) du code du travail ; Aux motifs que dès lors que le conseil de prud'hommes a visé les articles L. 3253-6 et suivants du code du travail, il ne peut être soutenu qu'il entendait nécessairement exclure l'application de l'article L. 3253-9 contenu dans la même sous-section du code intitulée « assurance contre le risque de non-paiement » ; que selon l'article L. 3253-8 d) du code du travail dont se prévalent le CGEA et le liquidateur, l'assurance couvre, dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail, les sommes dues pendant le maintien provisoire de l'activité jusqu'au terme du délai de 21 jours suivant le jugement de liquidation lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi est élaboré ; que l'article L. 3253-9 dont se prévaut la salariée, énonce que sont également couvertes les créances résultant du licenciement des salariés bénéficiaires d'une protection particulière relative au licenciement dès lors que l'administrateur, l'employeur ou le liquidateur, selon le cas, a manifesté, au cours des périodes mentionnées au 2° de l'article L. 3253-8, son intention de rompre le contrat de travail ; qu'or, les créances dues à un salarié bénéficiant d'une protection particulière relative au licenciement, qui ne résultent pas de la rupture de son contrat de travail mais concernent des salaires dus en application de l'article L. 3253-8, ne sont pas garanties par l'AGS ; qu'en l'espèce, les premiers juges ne pouvaient donc interpréter le dispositif de leur jugement en disant que la créance de salaire de Mme B... pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014, ainsi que la créance de congés payés, devaient être prises en charge par l'AGS faute de fonds suffisants de la société à hauteur respectivement de 12 901 € et 1 290 € bruts, alors que celle-ci n'était tenue à garantie que dans la limite d'un mois et demi de travail ; qu'il convient donc d'infirmer le jugement et de dire que la garantie de l'AGS est limitée en application de l'article L. 3253-8 d) du code du travail, à un mois et demi de travail ; Alors qu'est nul le licenciement d'une salariée en état de grossesse prononcé pendant les périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit et les dix semaines suivant leur expiration, l'employeur devant alors verser le montant du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité ; que ce versement rentre dans le champ d'application de l'article L. 3253-9 du code du travail, qui impose à l'AGS de couvrir les créances résultant du licenciement des salariés bénéficiaires d'une protection particulière relative au licenciement, dès lors que l'administrateur, l'employeur ou le liquidateur, selon le cas, a manifesté, au cours des périodes mentionnées au 2° de l'article L. 3253-8, son intention de rompre le contrat de travail ; qu'en l'espèce, il est acquis aux débats que le licenciement de Mme B..., intervenu pendant le congé de maternité durant lequel elle était protégée, est nul ; qu'il en résulte que les sommes dues à Mme B... pendant la période de protection du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et les congés payés y afférents rentraient dans le cadre de cette garantie ; qu'en ayant dit que le jugement définitif du 7 mai 2015, ayant fixé les créances de Mme B... à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société BG2P et dit qu'il était opposable à l'AGS et au CGEA « dans les limites prévues aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail », s'interprétait en ce sens que la créance de rappel de salaires pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et les congés payés y afférents était garantie par l'AGS dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 d) du code du travail, cependant qu'il convenait de dire que la créance, qui résultait du licenciement nul, était couverte par l'AGS et le CGEA de Rouen faute de fonds suffisants de la SAS BG2P à hauteur respectivement de 12 901 € bruts et 1 290 € bruts, l'arrêt infirmatif a violé par fausse application l'article L. 3253-8 d) du code du travail, l'article L. 3253-9 du même code par refus d'application, ensemble les articles L. 1225-4 et L. 1225-71 du code du travail, et 461 du code de procédure civile.
L'article L. 1225-71, alinéa 2, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, prévoit qu'une salariée en état de grossesse dont le licenciement est nul doit percevoir les salaires qui auraient été perçus pendant la période couverte par la nullité. Cette créance d'un salarié bénéficiaire d'une protection spécifique relative au licenciement constitue une créance résultant du licenciement, de sorte que l'AGS en doit garantie en application de l'article L. 3253-9 du code du travail
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Cassation Mme BATUT, président Arrêt n° 691 F-P+B Pourvoi n° A 19-17.924 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020 1°/ la société MAAF assurances, société anonyme, dont le siège est [...] , 2°/ Mme M... Y..., domiciliée [...] , ont formé le pourvoi n° A 19-17.924 contre l'arrêt rendu le 24 janvier 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-2), dans le litige les opposant : 1°/ à M. U... S..., domicilié [...] , 2°/ à la société AWP Health & Life, société anonyme, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Hascher, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de la société MAAF assurances et de Mme Y..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. S..., et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Hascher, conseiller rapporteur, M. Vigneau, conseiller faisant fonction de doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 janvier 2019), M. S..., coureur cycliste professionnel de nationalité australienne résidant à Monaco, a été renversé en Italie, alors qu'il circulait à vélo, par le véhicule conduit par Mme Y..., ressortissante française, assurée auprès de la société d'assurance française MAAF. Il a assigné ces derniers en référé expertise et provision. Examen des moyens Sur le moyen relevé d'office 2. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu l'article 28, alinéa 1, du règlement n° 864/2007 du 11 juillet 2007, dit Rome II, sur la loi applicable aux obligations non contractuelles : 3. Selon ce texte, le règlement n'affecte pas l'application des conventions internationales auxquelles un ou plusieurs Etats membres sont parties lors de son adoption et qui règlent les conflits de lois en matière d'obligations non contractuelles. 4. Pour accueillir la demande de provision de M. S..., l'arrêt retient, sur le fondement de l'alinéa 3 de l'article 4 du règlement Rome II, que la loi française est applicable. 5. En statuant ainsi, alors que la Convention de La Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable aux accidents de la circulation routière a été ratifiée par la France, la cour d'appel qui, même statuant en référé, était tenue d'en faire application pour déterminer la loi applicable au litige, a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne M. S... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société MAAF assurances et Mme Y... PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué; D'AVOIR dit la loi française applicable et, infirmant l'ordonnance entreprise, condamné solidairement Mme Y... et la MAAF à payer à M. S... la somme provisionnelle à valoir sur l'indemnisation de son préjudice définitif de 40 000 euros au titre du préjudice financier et celle de 12 000 euros au titre de son préjudice matériel ; AUX MOTIFS PROPRES QUE, « concernant la loi applicable, c'est par une juste motivation adoptée par la cour que le premier juge, faisant application du paragraphe 3 du règlement de Rome II a considéré que la loi française devait s'appliquer au présent litige » ; ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « l'article 4 du Règlement de Rome II prévoit que la loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d'un fait dommageable est le pays où le dommage survient. Toutefois il est fait exception audit principe (§3) s'il résulte de l'ensemble des circonstances que le fait dommageable présente des liens manifestement plus étroits avec un autre pays que celui visé au paragraphe 1 et 2. Au vu des éléments du dossier, force est de constater que seul le lieu de l'accident rattache le présent litige à l'Italie et que Madame Y... et son assureur sont français et élisent domicile et siège social en France, ce qui apparaît suffisant pour justifier le choix de l'application de la loi française. Dès lors, il convient de rejeter la demande formulée par Madame Y... et son assureur selon laquelle la loi applicable serait la loi italienne et non française conformément à l'article 4 du Règlement Rome II » ; ALORS QUE l'article 4 du Règlement CE n° 864/2007 du 11 juillet 2007, dit Rome II, pose en principe, en son alinéa 1er, que « la loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d'un fait dommageable est celle du pays où le dommage survient, quel que soit le pays où le fait générateur du dommage se produit et quels que soient le ou les pays dans lesquels des conséquences indirectes de ce fait surviennent » ; que ce n'est que par exception que l'alinéa 3 de cet article prévoit que, « s'il résulte de l'ensemble des circonstances que le fait dommageable présente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé aux paragraphes 1 ou 2, la loi de cet autre pays s'applique » ; qu'en l'espèce, les exposantes contestaient l'application de la loi française en rappelant qu'il était constant que les demandes se fondaient sur un accident de la circulation survenu en Italie, que M. S... était australien et domicilié à Monaco et Mme Y... domiciliée en France, ce qui devait conduire à l'application de la loi italienne, aucun élément ne conférant au fait dommageable un lien manifestement plus étroit avec la France qu'avec l'Italie ; qu'en retenant néanmoins l'application de la loi française, au motif adopté de l'ordonnance que « seul le lieu de l'accident rattache le présent litige à l'Italie et que Madame Y... et son assureur sont français », ce qui ne caractérisait pourtant pas un lien manifestement plus étroit du « fait dommageable » avec la France qu'avec l'Italie, pays où tant le fait générateur que le dommage sont localisés, et qui ne permettait donc pas de déroger au principe de l'application de la loi du pays dans lequel le dommage est survenu, la cour d'appel, qui ne s'est d'ailleurs fondée pour faire droit partiellement aux demandes provisionnelles de M. S... que sur le document établi par les carabiniers italiens lequel ne faisait état que d'appréciations fondées sur le code de la route italien, a violé l'article 4 du règlement CE n° 864/2007 du 11 juillet 2007, dit Rome II. SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE) IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué ; D'AVOIR, infirmant l'ordonnance entreprise, condamné solidairement Mme Y... et la MAAF à payer à M. S... la somme provisionnelle à valoir sur l'indemnisation de son préjudice définitif de 40 000 euros au titre du préjudice financier et celle de 12 000 euros au titre de son préjudice matériel ; AUX MOTIFS QUE « la demande de Monsieur S... au titre de son préjudice matériel est justifiée, Monsieur S... exposant avoir supporté les frais de remise en état de son vélo et avoir dû se racheter un casque. Il lui est alloué de ce chef une provision de 12.000 € au paiement de laquelle il y a lieu de condamner solidairement les intimés » ; ALORS QUE le juge des référés ne peut accorder de provisions que lorsque l'obligation n'est pas sérieusement contestable et qu'à concurrence du montant non-sérieusement contestable de celle-ci ; qu'en l'espèce, M. S... sollicitait une provision à valoir sur son préjudice matériel au titre de frais de réparation de vélo et d'achat d'un casque, dont il prétendait avoir assumé la charge ; qu'en faisant droit à la demande à hauteur de 12 000 euros, sans s'expliquer sur les conclusions des exposantes faisant valoir que, la charge de la preuve de l'obligation pesant sur M. S..., ce dernier ne justifiait ni des dommages matériels causés par l'accident, ni d'en avoir assumé personnellement la charge, le vélo, vu son prix, étant nécessairement assuré (concl., p. 5), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile.
Il résulte de l'article 28, alinéa 1, du règlement (CE) n° 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles, dit Rome II, que ce règlement n'affecte pas l'application des conventions internationales auxquelles un ou plusieurs États membres sont parties lors de son adoption et qui règlent les conflits de lois en matière d'obligations non contractuelles. Viole ce texte une cour d'appel qui, pour allouer une provision dans un litige international relatif à un accident de la circulation, retient, sur le fondement de l'alinéa 3 de l'article 4 de ce règlement, que la loi française est applicable, alors que la Convention de La Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable aux accidents de la circulation routière a été ratifiée par la France, de sorte que, même statuant en référé, elle était tenue d'en faire application pour déterminer la loi applicable au litige
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CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Cassation partielle Mme BATUT, président Arrêt n° 703 F-P+B Pourvoi n° M 19-10.965 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020 Mme G... N...-H..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° M 19-10.965 contre l'arrêt rendu le 4 octobre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre 1, section 1), dans le litige l'opposant à la société [...] , société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de Mme N...-H..., de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société [...] , et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 octobre 2018), à la suite du décès de J... S..., la société [...] (la société [...]), mandatée par le notaire chargé de la succession, a identifié Mme N..., parente au cinquième degré du défunt, comme unique héritière. Elle a assigné celle-ci, sur le fondement de la gestion d'affaires, aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement d'une somme correspondant à 20 % hors taxes des actifs nets de la succession perçus ou à percevoir par elle, incluant les éventuels capitaux d'assurance sur la vie, à titre de rémunération et indemnisation de ses frais. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses première et troisième branches Enoncé du moyen 2. Mme N... fait grief à l'arrêt de fixer la rémunération de la société [...] pour l'établissement de la dévolution successorale de J... S... et de son arbre généalogique ayant permis de régulariser l'acte de notoriété dressé le 29 juillet 2014 par M. K..., notaire, à 8 % hors taxes de l'actif net successoral, en ce compris tous éventuels capitaux d'assurance sur la vie, perçu ou à percevoir par elle dans la succession et de la condamner à verser cette somme au généalogiste, alors : « 1°/ que le généalogiste successoral ne peut prétendre à une indemnisation que si son intervention a été utile à l'héritier ; qu'en relevant que le tableau généalogique réalisé par la société [...], visé dans l'acte de notoriété et la déclaration de succession, avait permis de certifier l'absence d'autres héritiers possibles dans la ligne maternelle du défunt, après avoir pourtant constaté que Mme N... savait et était en capacité de justifier qu'elle était seule héritière du côté de la branche maternelle, ce qui excluait toute indemnisation du généalogiste, la cour d'appel a violé l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil ; 3°/ que le généalogiste successoral ne peut prétendre à une indemnisation que si son intervention a été utile à l'héritier ; que le notaire ne peut recourir à un généalogiste avant d'avoir fait lui-même les investigations propres à l'identification et à la localisation des héritiers ; qu'en affirmant qu'il ne pouvait pas être reproché au notaire d'avoir mandaté la société [...], en sa qualité de professionnelle des recherches généalogiques, pour réaliser des vérifications matérielles complexes permettant de sécuriser l'établissement de l'attestation de dévolution successorale, après avoir pourtant relevé que l'intervention du généalogiste mandaté par le notaire moins de vingt jours après le décès n'avait eu aucune utilité sur la révélation du décès du défunt à Mme N..., laquelle n'ignorait pas être la seule héritière dans la ligne maternelle et était en capacité de le justifier, et sans rechercher si le cabinet de généalogiste s'était borné à reconstituer la ligne maternelle du défunt, de sorte que la succession aurait été réglée dans des conditions strictement identiques sans son intervention, ce qui excluait toute indemnisation du généalogiste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil. » Réponse de la Cour 3. Ayant retenu, par motifs adoptés, que seule l'intervention spécialisée du généalogiste avait permis de vérifier l'absence d'héritier jusqu'au sixième degré dans la branche paternelle, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, en a souverainement déduit que l'intervention de la société [...], si elle n'avait pas eu d'utilité quant à la révélation du décès de J... S... à Mme N..., laquelle n'ignorait pas qu'elle était la seule héritière dans la ligne maternelle, avait, en écartant l'existence d'autres héritiers possibles dans les deux lignes, rendu service à Mme N... en permettant de certifier sa qualité d'héritière exclusive. 4. Il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé. Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 5. Mme N... fait grief à l'arrêt de fixer la rémunération de la société [...] pour l'établissement de la dévolution successorale de J... S... et de son arbre généalogique ayant permis de régulariser l'acte de notoriété dressé le 29 juillet 2014 par M. K..., notaire, à 8 % hors taxes de l'actif net successoral, en ce compris tous éventuels capitaux d'assurance sur la vie, perçu ou à percevoir par elle dans la succession et de la condamner à verser cette somme au généalogiste, alors « que le généalogiste successoral ne peut prétendre à une indemnisation que si son intervention a été utile à l'héritier ; qu'en affirmant que seule l'intervention spécialisée du généalogiste avait permis de vérifier l'absence d'héritiers ab intestat jusqu'au sixième degré dans la branche paternelle S..., en s'abstenant de rechercher si le généalogiste s'était borné à communiquer au notaire l'arbre généalogique de la branche maternelle du défunt et à indiquer qu'il n'existait aucun héritier au degré successible dans la branche paternelle, que le notaire avait déjà pu en grande partie reconstituer, sans justifier d'aucune investigation à ce titre, ce qui excluait toute indemnisation du généalogiste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : 6. En cas de gestion d'affaires, ce texte n'accorde au gérant que le remboursement des dépenses utiles ou nécessaires qu'il a faites, mais non le paiement d'une rémunération, quand bien même il aurait agi à l'occasion de sa profession. Il en résulte que le généalogiste qui, par son activité professionnelle, a rendu service à l'héritier, ne peut être indemnisé, en l'absence de tout contrat, qu'à hauteur des dépenses spécifiques, utiles ou nécessaires qu'il a exposées pour la recherche de l'héritier considéré et la détermination de ses droits successoraux. 7. Pour condamner Mme N... à payer à la société [...] une rémunération calculée à hauteur de 8 % hors taxes de l'actif net de la succession, en ce compris les capitaux d'assurance sur la vie, l'arrêt, tant par motifs propres qu'adoptés, relève, d'abord, que l'intervention du généalogiste n'a pas eu d'utilité quant à la révélation du décès de J... S..., Mme N... étant en capacité de justifier par l'établissement de son arbre généalogique qu'elle était seule héritière du côté de la branche maternelle. Il retient, ensuite, qu'en revanche, seule l'intervention du généalogiste a permis de vérifier l'absence d'héritier jusqu'au sixième degré dans la branche paternelle et de sécuriser l'établissement de l'attestation de dévolution successorale et que la réalisation du tableau généalogique ayant permis la rédaction de l'acte de notoriété a nécessité des investigations complexes pour écarter l'existence d'autres héritiers dans les deux lignes, n'étant pas contesté que le défunt vivait une vie isolée et secrète. Il ajoute que si la société [...] n'expose pas, dans sa note analytique de travail, le nombre d'heures, d'investigations et de personnel affecté à la tâche et, plus largement, ne verse aucune pièce aux débats permettant de justifier précisément de ses débours et de son travail, celui-ci a été utile dans la mesure où il a permis d'aboutir à une dévolution successorale certifiée, ce qui justifie le paiement d'honoraires. 8. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la nature des investigations accomplies par la société [...] ni les dépenses spécifiques, utiles ou nécessaires exposées par celle-ci pour établir la qualité certaine d'héritière de Mme N..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe la rémunération de la société [...] pour l'établissement de la dévolution successorale de J... S... et de son arbre généalogique ayant permis de régulariser l'acte de notoriété dressé le 29 juillet 2014 par M. K..., notaire au Perray-en-Yvelines, à 8 % hors taxes de l'actif net successoral, en ce compris tous éventuels capitaux d'assurance-vie, perçu ou à percevoir par Mme N... dans la succession et condamne cette dernière à payer cette somme à la société [...] , l'arrêt rendu le 4 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ; Condamne la société [...] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [...] et la condamne à payer à Mme N... une somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour Mme N...-H.... IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir fixé la rémunération de la société [...] dans le cadre de l'établissement de la dévolution successorale de J... S... et de son arbre généalogique ayant permis de régulariser l'acte de notoriété dressé le 29 juillet 2014 par M. K..., notaire au Perray-en-Yvelines, à 8 % HT de l'actif net successoral, en ce compris tous éventuels capitaux d'assurance-vie, perçu ou à percevoir par Mme N...-H... dans le cadre de la succession, et d'avoir condamné Mme N...-H... à verser cette somme au généalogiste ; AUX MOTIFS PROPRES QU' aux termes de l'article 1370 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige, certains engagements se forment sans qu'il intervienne aucune convention, ni de la part de celui qui s'oblige, ni de la part de celui envers lequel il est obligé ; que les uns résultent de l'autorité seule de la loi; les autres naissent d'un fait personnel à celui qui se trouve obligé ; que les engagements qui naissent d'un fait personnel à celui qui se trouve obligé, résultent ou des quasi-contrats, ou des délits ou quasi-délits ; que l'article 1371 du même code dispose que les quasi-contrats sont les faits purement volontaires de l'homme, dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers, et quelquefois un engagement réciproque des deux parties ; qu'il résulte des dispositions de l'article 1372 du code civil que lorsque volontairement on gère l'affaire d'autrui, soit que le propriétaire connaisse la gestion, soit qu'il l'ignore, celui qui gère contracte l'engagement tacite de continuer la gestion qu'il a commencée, et de l'achever jusqu'à ce que le propriétaire soit en état d'y pourvoir lui-même ; qu'enfin, l'article 1375 dispose que le maître dont l'affaire a été bien administrée doit remplir les engagements que le gérant a contractés en son nom, l'indemniser de tous les engagements personnels qu'il a pris, et lui rembourser toutes les dépenses utiles ou nécessaires qu'il a faites ; que le généalogiste qui est parvenu par son activité professionnelle à découvrir les héritiers d'une succession peut prétendre, en l'absence de tout contrat, à une rémunération de ses travaux sur le fondement de la gestion d'affaires s'il a rendu service à l'héritier ; qu'en l'absence de convention régularisée entre les parties, il appartient à Mme N..., qui conteste l'utilité de l'intervention du généalogiste, de démontrer que, sans son intervention, l'existence de la succession et de ses conséquences devait normalement parvenir à sa connaissance ; que si Mme N... ne conteste pas avoir été informée du décès de son parent au 5e degré, J... S..., par la société [...], par courrier du 3 mars 2014, il résulte des attestations produites aux débats qu'en dépit de la distension des liens familiaux, elle manifestait de l'intérêt pour la situation de celui-ci même si elle n'avait plus de nouvelles de lui qu'indirectement en raison du mode de vie solitaire qu'il avait adopté depuis de nombreuses années ; que M. D... Q..., ami et voisin de J... S..., seul présent aux obsèques avec son épouse, confirme son existence particulièrement isolée et son refus de toute relation sociale, précisant que J... S... ne répondait pas au téléphone ni au courrier alors que Mme N...-H... justifie avoir pris régulièrement de ses nouvelles, ayant été notamment informée de son hospitalisation en octobre 2013 ; que le premier juge a souligné à juste titre que l'intervention particulièrement rapide du cabinet de généalogiste, mandaté par le notaire moins de vingt jours après le décès de J... S... et ayant pris contact avec Mme N... par courrier daté du 3 mars 2014, ne permet pas de vérifier l'utilité ni l'opportunité de celle-ci alors qu'il résulte des attestations produites aux débats ainsi que des documents généalogiques que Mme N..., prenant régulièrement des nouvelles de son cousin, aurait eu connaissance de son décès et n'ignorait pas qu'elle était la seule héritière dans la ligne maternelle ; qu'il en résulte que l'intervention de la société [...] n'a pas eu d'utilité quant à la révélation du décès de J... S... à Mme N..., la décision entreprise étant confirmée sur ce point ; que toutefois, les recherches généalogiques réalisées par la société [...] ont permis l'établissement de l'acte de notoriété, le 29 juillet 2014, auquel est annexé le tableau généalogique, qui précise que Mme N... est "la parente la plus proche dans la ligne maternelle ainsi qu'il résulte du tableau généalogique établi le 25 juin 2014 par Mme A... C..., généalogiste (...). Cette dernière missionnée par Me K..., notaire soussigné, en vue d'établir la dévolution successorale de Monsieur J... S... et de produire ledit tableau généalogique", ainsi que la déclaration de succession en date du 13 octobre 2014, signée par Mme N..., qui précise que sa qualité d'unique héritière "résulte du tableau généalogique établi le 25 juin 2014 par Madame A... C..., généalogiste"; et de l'inventaire établi le 2 octobre 2014 qui rappelle que Mme N... est "la parente la plus proche dans la ligne maternelle ainsi qu'il résulte du tableau généalogique établi le 25 juin 2014 par Mme A... C..., généalogiste (...) ; le dit tableau généalogique étant demeuré joint et annexé à l'acte de notoriété reçu par Maître K..., notaire soussigné, le 29 juillet 2014" ; que si le notaire qui établit un acte de notoriété, a l'obligation d'exercer, dans la mesure du possible, un certain contrôle, de manière à assurer la validité de l'acte qu'il dresse et qu'il doit procéder à toutes les vérifications de nature à en assurer l'efficacité, il ne peut réaliser ce contrôle que dans la mesure de ses moyens de sorte qu'il ne peut être valablement reproché au notaire d'avoir mandaté la société [...], en sa qualité de professionnelle des recherches généalogiques, pour réaliser des vérifications matérielles complexes permettant de sécuriser l'établissement de l'attestation de dévolution successorale, ainsi que l'a justement souligné le premier juge ; qu'en effet, il résulte des éléments du dossier qu'en dépit des affirmations de Mme N... selon lesquelles les seuls livrets de famille retrouvés au domicile de M. S... suffisaient à établir la dévolution successorale dans la ligne maternelle et sa qualité d'héritière unique, la réalisation du tableau généalogique permettant la rédaction de l'acte de notoriété a nécessité des investigations complexes afin d'écarter l'existence d'autres héritiers possibles dans les deux lignes alors même qu'il n'est pas contesté que J... S... vivait une vie isolée et secrète ; que par ailleurs, les démarches personnelles réalisées par Mme N... en vue de la réalisation de son arbre généalogique dans la branche maternelle ne font pas disparaître l'utilité du travail préalable de la société [...] qui a permis d'aboutir à une dévolution successorale certifiée, servant de base au calcul des droits de Mme N..., la déclaration de succession signée le 13 octobre 2014 par Mme N... faisant elle-même référence au tableau généalogique établi par la société [...] ; que dès lors, l'intervention de la société [...] ayant rendu service à Mme N... en permettant de certifier sa qualité d'héritière exclusive, justifie le paiement d'honoraires calculés sur la base d'un pourcentage appliqué à l'actif net de la succession ; que la société [...] sollicite une rémunération fixée à 20 % de l'actif net successoral mais compte tenu du caractère utile mais limité de l'intervention de la société [...], exposé ci-dessus, le tribunal a à bon escient limité la rémunération de cette dernière à 8 % de l'actif successoral, en ce compris les capitaux d'assurance-vie dont la liquidation est subordonnée à l'ouverture de leur souscripteur ; que la décision entreprise sera donc confirmée ; ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE le généalogiste dont les recherches ont été opportunes et utiles à la révélation ou à l'établissement d'une succession a droit à l'indemnisation de ses débours et à la rémunération de son travail ; que les honoraires du généalogiste ne doivent pas être excessifs au regard des diligences entreprises et du service rendu ; sur la révélation de la succession : qu'il résulte des pièces versées aux débats par les parties, notamment des attestations de X... B... épouse X..., D... Q..., L... H..., Y... H..., E... H..., que G... N... avait connaissance de l'existence solitaire de son cousin célibataire et sans descendance, J... S..., cousin au 5e degré, qu'elle avait fréquenté dans son enfance ; que si ce dernier était secret et ne fréquentait plus personne, à l'exception de D... Q... et son épouse qui étaient les seules personnes à assister à ses obsèques et ignoraient tout de l'existence de membres de sa famille, G... N... avait manifesté à plusieurs reprises tant auprès de ses proches que de tiers son souci quant au sort de son cousin en tentant d'obtenir des informations, et pour la dernière fois en janvier 2014 auprès de X... X... ; que le fait que le cabinet de généalogiste ait été missionné moins de 20 jours après le décès et qu'il ait retrouvé l'existence et les coordonnées de G... N... dans le mois du décès en lui proposant très rapidement un contrat de révélation de succession par courrier du 3 mars 2014 ne permet pas de s'assurer que son intervention rapide ait été opportune et utile pour celle-ci dans la mesure où il est établi par les attestations circonstanciées produites aux débats qu'avec certitude G... N... aurait fini par apprendre dans les mois qui suivent, et par ses propres moyens, que son cousin J... S... était décédé sans autre héritier du côté de sa branche maternelle qu'elle-même ; que dans ces conditions, aucune indemnisation et rémunération n'est justifiée au profit de la société [...] au titre de la révélation de la succession ; sur l'établissement des droits de G... N... : que si dans le cadre de ses devoirs d'information, de conseil et de mise en garde, le notaire rédacteur d'un acte de dévolution successorale ou de notoriété est tenu de prendre toutes les initiatives nécessaires pour assurer l'efficacité et la sécurité de ses actes et notamment de procéder à des investigations pour rechercher les héritiers du défunt, il n'est tenu qu'à une obligation de moyen et n'est pas tenu de procéder par lui-même à des investigations matérielles complexes qui relèvent du champ d'intervention d'un autre professionnel ; que si les explications des parties et les pièces versées aux débats ne permettent pas de connaître dans quelles conditions Maître W... K..., notaire à Le Perrey en Yvelines (78), a été chargé de la succession de J... S..., il est évident que les seuls livrets de famille retrouvés au domicile de J... S... ne lui permettait pas de s'assurer de l'absence d'héritiers ab intestat jusqu'au 6e degré inclus sans passer par les services spécialisés d'un généalogiste ; qu'en effet, si G... N... était en capacité de justifier par l'établissement de son arbre généalogique qu'elle était seule héritière du côté de la branche maternelle Z..., en revanche seule l'intervention spécialisée du généalogiste a pu permettre de vérifier l'absence d'héritier jusqu'au 6e degré dans la branche paternelle S... ; que c'est dans ces conditions que Maître K... a pu dresser le 29 juillet 2014 l'attestation de dévolution successorale au profit de G... N... ; qu'au surplus, l'intervention du généalogiste sécurise l'établissement de l'attestation de dévolution successorale et transfère la responsabilité juridique et financière de remise en cause de celle-ci en cas de découverte d'un héritier, notamment d'un descendant, ce qui n'est pas à exclure compte tenu de la vie secrète menée par J... S... ; que l'intervention de la société [...] était donc utile et opportune pour vérifier l'absence d'héritier dans la branche paternelle du défunt et confirmer que G... N... était la seule et unique héritière connue de J... S... ; que l'aléa tenant à la découverte fortuite ou postérieure d'un héritier ab intestat et la responsabilité endossée par le généalogiste justifie le paiement d'honoraires calculés sur la base d'un pourcentage appliqué à l'actif net de succession ; que G... N... ne verse aucune pièce aux débats permettant d'évaluer l'actif net de succession alors qu'elle est légalement tenue d'en faire la déclaration auprès de l'administration fiscale, notamment en présence de biens immobiliers ; qu'elle ne permet donc pas au tribunal de vérifier le caractère excessif de la rémunération sollicitée par la société [...] ; que parallèlement, la société [...] n'expose pas dans sa note analytique de travail le nombre d'heures, d'investigations et de personnel affecté à la tâche et, plus largement, ne verse aucune pièce aux débats permettant de justifier précisément de ses débours et de son travail ; qu'en tout état de cause, en l'absence d'utilité de l'intervention de la société [...] quant à la révélation de la succession, sa rémunération ne peut être fixée à 20 % de l'actif net successoral sauf à être excessive au regard des investigations menées mais dont elle ne justifie pas le détail ; qu'au vu de ces considérations, la rémunération de la société [...] sera justement fixée à 8 % de l'actif net de succession, en ce compris les capitaux d'assurance vie ; 1°) ALORS QUE le généalogiste successoral ne peut prétendre à une indemnisation que si son intervention a été utile à l'héritier ; qu'en relevant que le tableau généalogique réalisé par la société [...], visé dans l'acte de notoriété et la déclaration de succession, avait permis de certifier l'absence d'autres héritiers possibles dans la ligne maternelle du défunt, après avoir pourtant constaté que Mme N... savait et était en capacité de justifier qu'elle était seule héritière du côté de la branche maternelle, ce qui excluait toute indemnisation du généalogiste, la cour d'appel a violé l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil ; 2°) ALORS QUE le généalogiste successoral ne peut prétendre à une indemnisation que si son intervention a été utile à l'héritier ; qu'en affirmant que seule l'intervention spécialisée du généalogiste avait permis de vérifier l'absence d'héritiers ab intestat jusqu'au 6e degré dans la branche paternelle S..., en s'abstenant de rechercher si le généalogiste s'était borné à communiquer au notaire l'arbre généalogique de la branche maternelle du défunt et à indiquer qu'il n'existait aucun héritier au degré successible dans la branche paternelle, que le notaire avait déjà pu en grande partie reconstituer, sans justifier d'aucune investigation à ce titre, ce qui excluait toute indemnisation du généalogiste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil ; 3°) ALORS QUE le généalogiste successoral ne peut prétendre à une indemnisation que si son intervention a été utile à l'héritier ; que le notaire ne peut recourir à un généalogiste avant d'avoir fait lui-même les investigations propres à l'identification et à la localisation des héritiers ; qu'en affirmant qu'il ne pouvait pas être reproché au notaire d'avoir mandaté la société [...], en sa qualité de professionnelle des recherches généalogiques, pour réaliser des vérifications matérielles complexes permettant de sécuriser l'établissement de l'attestation de dévolution successorale, après avoir pourtant relevé que l'intervention du généalogiste mandaté par le notaire moins de vingt jours après le décès n'avait eu aucune utilité sur la révélation du décès du défunt à Mme N..., laquelle n'ignorait pas être la seule héritière dans la ligne maternelle et était en capacité de le justifier, et sans rechercher si le cabinet de généalogiste s'était borné à reconstituer la ligne maternelle du défunt, de sorte que la succession aurait été réglée dans des conditions strictement identiques sans son intervention, ce qui excluait toute indemnisation du généalogiste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil.
En cas de gestion d'affaires, l'article 1375 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, n'accorde au gérant que le remboursement des dépenses utiles ou nécessaires qu'il a faites, mais non le paiement d'une rémunération, quand bien même il aurait agi à l'occasion de sa profession. Il en résulte que le généalogiste qui, par son activité professionnelle, a rendu service à l'héritier, ne peut être indemnisé, en l'absence de tout contrat, qu'à hauteur des dépenses spécifiques, utiles ou nécessaires qu'il a exposées pour la recherche de l'héritier considéré et la détermination de ses droits successoraux
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CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Renvoi devant la Cour de justice de l'Union européenne Mme BATUT, président Arrêt n° 707 FS-P+B+I Pourvoi n° Y 19-15.438 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020 1°/ Mme R... X..., domiciliée [...] , 2°/ M. S... X..., domicilié [...] Shakura (Bahrein), ont formé le pourvoi n° Y 19-15.438 contre l'arrêt rendu le 21 février 2019 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), dans le litige les opposant à Mme D... L..., veuve X..., domiciliée [...] Londres (Royaume-Uni), défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Vigneau, conseiller, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de Mme R... X... et de M. S... X..., de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme L..., et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Vigneau, conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, Mme Bozzi, M. Acquaviva, Mmes Poinseaux, Guihal, conseillers, Mmes Mouty-Tardieu, Le Cotty, Gargoullaud, Azar, M. Buat-Ménard, Mme Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, Mme Marilly, avocat général référendaire, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 21 février 2019), C... X..., de nationalité française, est décédé en France le 3 septembre 2015, laissant pour lui succéder son épouse, Mme L..., et ses trois enfants issus d'une première union, F..., S... et R... (les consorts X...). 2. Les consorts X... ont assigné Mme L... devant le président d'un tribunal de grande instance statuant en la forme des référés afin d'obtenir la désignation d'un mandataire successoral en invoquant la compétence des juridictions françaises sur le fondement de l'article 4 du règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, en soutenant que la résidence habituelle de C... X... au jour de son décès était située en France. 3. F... X... étant décédé le 10 avril 2017, ses frère et soeur ont indiqué agir également en leur qualité d'ayants droit de celui-ci. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses trois premières branches, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa quatrième branche Enoncé du moyen 5. Les consorts X... font grief à l'arrêt de dire que les juridictions françaises ne sont pas compétentes pour statuer sur l'ensemble de la succession de C... X... et la demande de désignation d'un mandataire successoral, alors « que lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n'est pas située dans un Etat membre, les juridictions de l'Etat membre dans lequel sont situés des biens successoraux sont néanmoins compétentes, de manière subsidiaire, pour statuer sur l'ensemble de la succession dans la mesure où le défunt possédait la nationalité de cet Etat membre au moment du décès ; que ces dispositions, issues du règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, sont d'ordre public et doivent être relevées d'office par le juge ; qu'en l'espèce, il est constant que C... X... avait la nationalité française et qu'il possédait des biens situés en France, de sorte que la cour d'appel aurait dû vérifier sa compétence subsidiaire ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour d'appel a violé l'article 10 du règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012. » Réponse de la Cour 6. Selon l'article 10, point 1a), du règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, auquel le Royaume-Uni n'est pas partie, lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n'est pas située dans un Etat membre, les juridictions de l'Etat membre dans lequel sont situés des biens successoraux sont néanmoins compétentes pour statuer sur l'ensemble de la succession dans la mesure où le défunt possédait la nationalité de cet Etat membre au moment du décès. 7. Cette disposition n'a pas été invoquée par les consorts X... devant la cour d'appel de Versailles, laquelle, après avoir estimé que la résidence habituelle du défunt était située au Royaume-Uni, a dit que, conformément à l'article 4 du règlement, la juridiction française était incompétente pour statuer sur sa succession et désigner un mandataire successoral. 8. Il s'agit, donc, de déterminer si la cour d'appel, qui constatait que C... X... était de nationalité française et possédait des biens en France, était tenue de relever d'office sa compétence subsidiaire énoncée à l'article 10 du règlement. 9. Si l'article 15 du règlement prévoit que la juridiction d'un Etat membre saisie d'une affaire de succession pour laquelle elle n'est pas compétente en vertu de ce règlement se déclare d'office incompétente, il ne précise pas s'il lui appartient de vérifier au préalable si les conditions de sa compétence non seulement principale (article 4) mais également subsidiaire (articles 10 et 11) ne sont pas remplies. Le règlement ne précise pas si la compétence subsidiaire présente un caractère facultatif. 10. En faveur de l'obligation pour le juge de rechercher d'office sa compétence sur le fondement de l'article 10 lorsque le défunt n'avait pas sa résidence habituelle dans un Etat membre au moment de son décès, il convient de relever que le règlement (UE) n° 650/2012 met en place un système global qui résout tous les conflits internationaux de juridictions résultant de litiges dont sont saisis les juges des États membres en matière successorale et se substitue donc à l'ensemble des solutions que ceux-ci appliquaient jusqu'alors. Il institue un système de résolutions des conflits de juridiction que les juges des Etats membres doivent appliquer d'office dès lors que le litige relève du domaine matériel couvert par le texte. Or, la compétence subsidiaire, prévue à l'article 10 du règlement a pour objet de fixer des critères de compétence applicables dans l'hypothèse où aucune juridiction d'un Etat membre ne serait compétente au regard de la règle principale énoncée à l'article 4. Il ne serait donc pas logique qu'après avoir relevé d'office la mise en oeuvre du règlement pour trancher un conflit de juridiction, les juges puissent écarter leur compétence au profit d'un Etat tiers, sur le fondement du seul l'article 4, sans avoir à vérifier au préalable leur compétence subsidiaire sur celui de l'article 10. Au contraire, il serait plus cohérent que les juridictions saisies soient tenues de vérifier tous les critères de compétence possibles, dès lors qu'aucun autre Etat membre n'est compétent, y compris d'office. Ainsi, il n'y aurait pas lieu de distinguer l'obligation faite aux juges de rechercher d'office s'ils sont compétents selon que cette compétence résulte de l'article 4 ou de l'article 10. 11. Cependant, la règle de l'article 10, présentée par le règlement comme subsidiaire, a pour effet de déroger au principe d'unité des compétences judiciaire et législative qui innerve le règlement dont le considérant 23 insiste sur la nécessité « d'assurer une bonne administration de la justice au sein de l'Union et de veiller à ce qu'un lien de rattachement réel existe entre la succession et l'Etat membre dans lequel la compétence est exercée » puisque lorsqu'une juridiction de l'Etat dans lequel le défunt n'avait pas sa compétence habituelle se reconnaît compétente sur le fondement de l'article 10, elle sera néanmoins conduite à appliquer la loi de l'Etat de résidence habituelle, sauf s'il résulte de l'ensemble des circonstances de la cause que, au moment de son décès, le défunt présentait des liens manifestement plus étroits avec un autre Etat (article 21 du règlement) ou avait fait le choix exprès de la loi d'un autre Etat (article 22). Il parait dès lors difficile d'admettre qu'une règle de compétence qualifiée comme subsidiaire, qui déroge aux principes généraux qui servent de fondement au règlement, doit être obligatoirement relevée par les juges, même si les parties ne l'invoquent pas. Par ailleurs, si le règlement prévoit expressément, à l'article 15, l'obligation pour le juge incompétent de relever d'office son incompétence, il ne prévoit aucune disposition équivalente en cas de compétence. Rien dans le règlement ne permet de considérer que le juge d'un Etat membre, saisi sur le fondement de l'article 4, doit rechercher d'office si sa compétence est acquise en application d'une autre règle, notamment de l'article 10 qui ne prévoit qu'une compétence subsidiaire. Cette asymétrie s'explique par le fait que l'objectif de la règle de l'article 15 est de faciliter la reconnaissance et l'exécution des décisions prises par une juridiction qui s'est reconnue compétente et d'éviter qu'il ne puisse être objecté ensuite dans un autre Etat membre qu'elle n'était en réalité pas compétente. Enfin, les règles sur les successions relèvent, au sens du règlement, des droits disponibles, puisque cet instrument autorise les parties à convenir de la compétence par une convention d'élection de for (article 5) et retient la possibilité pour une juridiction de se déclarer compétente sur le fondement de la seule comparution (article 9). Il serait dès lors illogique que le juge soit tenu de relever un critère subsidiaire de compétence que les parties n'ont pas envisagé de soulever. 12. Il existe un doute raisonnable sur la réponse qui peut être apportée à cette question, qui est déterminante pour la solution du litige que doit trancher la Cour de cassation. 13. Il s'ensuit qu'il convient d'en saisir la Cour de justice de l'Union européenne en application de l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, jusqu'à ce que celle-ci se soit prononcée, de surseoir à statuer. PAR CES MOTIFS, la Cour : RENVOIE à la Cour de justice de l'Union européenne aux fins de répondre à la question suivante : « Les dispositions de l'article 10, point 1a), du règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen doivent-elles être interprétées en ce sens que, lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n'est pas située dans un Etat membre, la juridiction d'un Etat membre dans lequel la résidence habituelle du défunt n'était pas fixée mais qui constate que celui-ci avait la nationalité de cet Etat et y possédait des biens doit, d'office, relever sa compétence subsidiaire prévue par ce texte? » ; SURSOIT à statuer jusqu'à la décision de la Cour de justice de l'Union européenne ; RENVOIE la cause et les parties à l'audience de formation de section du 6 juillet 2021 ; Réserve les dépens ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour Mme R... et M. S... X.... Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que les juridictions françaises ne sont pas compétentes pour statuer sur l'ensemble de la succession de C... X... et la demande de désignation d'un mandataire successoral ; AUX MOTIFS QUE « Le règlement UE n°650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen est directement applicable dans tous les Etats membres de l'Union européenne à l'exception du Danemark, du Royaume-Uni et de l'Irlande, aux successions à cause de mort et des personnes décédées à partir du 17 août 2015. L'article 4 du règlement édicte une règle de compétence générale en l'absence de désignation de la loi applicable par le défunt : "Sont compétentes pour statuer sur l'ensemble d'une succession les juridictions de l'Etat membre dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès". Des compétences subsidiaires sont prévues à l'article 10 permettant, sous certaines conditions cumulatives, de porter devant les juridictions d'un État membre une succession susceptible d'être traitée hors de l'Union européenne. Une juridiction de l'Union pourra administrer la succession d'une personne décédée ayant sa résidence habituelle au moment de son décès dans un État tiers. Cette compétence suppose au minimum que des biens soient situés dans cet État membre. Selon l'article 10 : " 1. Lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n'est pas située dans un État membre, les juridictions de l'État membre dans lequel sont situés des biens successoraux sont néanmoins compétentes pour statuer sur l'ensemble de la succession dans la mesure où : a) le défunt possédait la nationalité de cet État membre au moment du décès ; ou, à défaut, b) le défunt avait sa résidence habituelle antérieure dans cet État membre, pour autant que, au moment de la saisine de la juridiction, il ne s'est pas écoulé plus de cinq ans depuis le changement de cette résidence habituelle. 2. Lorsqu'aucune juridiction d'un État membre n'est compétente en vertu du paragraphe 1, les juridictions de l'État membre dans lequel sont situés des biens successoraux sont néanmoins compétentes pour statuer sur ces biens." La juridiction de l'État membre dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès est compétente pour statuer sur l'ensemble de sa succession, qu'il s'agisse de meubles ou d'immeubles, et pour se prononcer sur le sort de biens situés à l'étranger dans un autre État membre ou dans un État tiers. Le règlement ne donne pas de définition de la résidence habituelle du défunt et il convient de se référer aux précisions apportées par les considérants 23 et 24 du règlement : "Afin de déterminer la résidence habituelle, l'autorité chargée de la succession devrait procéder à une évaluation d'ensemble des circonstances de la vie du défunt au cours des années précédant son décès et au moment de son décès, prenant en compte tous les éléments de fait pertinents, notamment la durée et la régularité de la présence du défunt dans l'État concerné ainsi que les conditions et les raisons de cette présence. La résidence habituelle ainsi déterminée devrait révéler un lien étroit et stable avec l'État concerné, compte tenu des objectifs spécifiques du présent règlement" (considérant 23)." "Dans certains cas, il peut s'avérer complexe de déterminer la résidence habituelle du défunt. Un tel cas peut se présenter, en particulier, lorsque, pour des raisons professionnelles ou économiques, le défunt était parti vivre dans un autre État pour y travailler, parfois pendant une longue période, tout en ayant conservé un lien étroit et stable avec son État d'origine. Dans un tel cas, le défunt pourrait, en fonction des circonstances de l'espèce, être considéré comme ayant toujours sa résidence habituelle dans son État d'origine, dans lequel se trouvait le centre des intérêts de sa vie familiale et sociale. D'autres cas complexes peuvent se présenter lorsque le défunt vivait de façon alternée dans plusieurs États ou voyageait d'un État à un autre sans s'être installé de façon permanente dans un État. Si le défunt était ressortissant de l'un de ces États ou y avait l'ensemble de ses principaux biens, sa nationalité ou le lieu de situation de ces biens pourrait constituer un critère particulier pour l'appréciation globale de toutes les circonstances de fait" (considérant 24)." En l'espèce, il est constant que C... X..., né le [...] 1922, a quitté la France en 1981, à l'âge de 59 ans, après le décès de sa première épouse, pour s'installer au Royaume-Uni, à Londres ; que ses trois enfants sont restés en France ; qu'il a alors exercé une activité professionnelle dans le secteur immobilier, est resté dans ce pays pour sa retraite, a épousé en 1996 Mme D... L..., de nationalité anglaise, rencontrée en 1984, avec laquelle il a vécu de manière ininterrompue jusqu'à son retour en France au mois d'août 2012, alors qu'il était presque âgé de 90 ans. Il est tout aussi constant que l'essentiel des biens successoraux du défunt se trouve en Angleterre : un appartement à Londres, une maison de campagne dans les environs, un patrimoine mobilier (262 500 livres), des tableaux de valeur, un compte bancaire, le défunt détenant également un compte bancaire en Suisse, tandis qu'en France, le patrimoine de C... X... se limite à 10 % des parts sociales d'une SCI Gretima qui a acquis le 26 juin 2012, au prix de 1 330 000 euros, l'appartement situé à Suresnes (92) dans lequel il s'est installé avec sa fille, et qui a été financé par la vente aux enchères d'un tableau lui appartenant, le reste des parts sociales étant détenu par ses trois enfants. Par ailleurs, l'Angleterre est le pays où C... X... a pris ses dispositions testamentaires. Il a ainsi rédigé un testament en anglais daté du 29 mars 2010, soumis à la loi anglaise, préparé par un "solicitor", désignant son épouse comme exécuteur testamentaire et "trustee" de tous ses biens successoraux et comme bénéficiaire de toute la succession à l'exception des tableaux du peintre U... P... qu'il possédait, légués à ses trois enfants. Il a également signé le 24 avril 2010 un "Lasting Power of Attorney", enregistré le 16 août 2010, acte qui correspond à un mandat de protection future, désignant en qualité de mandataires son avocat, M. H... N... J..., et son épouse pour veiller sur sa personne et ses biens lorsqu'il ne serait plus en capacité de le faire. Ce mandat anglais de tuteur a été mis en oeuvre au mois de décembre 2012 après que le médecin traitant de C... X... en Angleterre, le docteur E... T..., a établi une attestation le 25 octobre 2012 confirmant son diagnostic de 2011 et la détérioration de la santé mentale de son patient, M. J... exécutant ce mandat jusqu'à sa démission le 20 mars 2014, repris par Mme L.... Enfin, si la désignation par testament se suffit à elle-même, l'exécuteur testamentaire doit obtenir un certificat d'homologation pour confirmer ses pouvoirs d'administrateur des biens de la succession à l'égard des tiers en produisant l'original du testament, ce qui a été fait en l'espèce, une ordonnance de la juridiction anglaise ayant été délivrée le 12 octobre 2017 à Mme D... L.... Concernant les circonstances du retour en France de C... X... en 2012, les éléments partiellement contradictoires versés aux débats par les parties ne permettent nullement d'affirmer que l'épouse s'est désintéressée de son mari à compter de l'année 2011 et qu'elle n'entendait plus s'en occuper et que l'intention de C... X..., compte tenu notamment de l'altération de ses facultés mentales en 2012, a été de revenir fixer en France le centre de ses intérêts. En effet, selon les pièces produites par les parties : - Mme L... a entrepris au mois d'octobre 2011 de chercher un établissement spécialisé à Londres, à proximité du domicile conjugal, pour que C... X... soit pris en charge, compte tenu de l'évolution de sa maladie et de son comportement devenu agressif et parfois violent à son égard, cette solution d'accueil ayant été refusée par l'intéressé, - le changement de comportement devenu difficile et opposant de C... X... dès l'année 2011 est notamment attesté par son refus d'accepter que son permis de conduire lui soit retiré, après qu'un médecin psychiatre l'ait examiné en septembre 2011 (courriel 20 septembre 2011, pièce 16 intimés), - les difficultés à poursuivre une vie commune ont été reconnues par les enfants de C... X... qui dans des courriels du mois de mai 2012 écrivaient à Mme L... combien ils avaient conscience de ce que la vie avec leur père pouvait être difficile et épuisante, son comportement "insultant et humiliant" à l'égard de son épouse, proposant une prise en charge alternée entre Paris et Londres, admettant encore que la situation allait devenir de "pire en pire", R... X... invitant l'épouse à se "protéger" (pièce 19 intimés), - le consentement de C... X... pour un retour définitif en France en août 2012, avec la volonté d'y fixer de nouveau le centre de ses intérêts et sa résidence habituelle, ne peut qu'être relativisé compte tenu de l'évolution avancée de sa maladie dégénérative telle que constatée par le docteur W... le 27 septembre 2012, qui décrit l'intéressé comme un "sujet opposant, dépressif, autoritaire et agressif, présentant des troubles mnésiques importants", le début de sa maladie remontant à près de six années, bien que des courriels échangés entre les enfants en 2011 et 2012 font état du souhait de leur père de revenir en France, d'une demande de sa part de lui louer, et non d'acheter, un studio à Paris et d'un certain abandon de Mme L..., - aucun élément du dossier ne permet de démontrer que le départ de C... X... le 8 août 2012 avec sa fille R... venue le chercher à Londres avait été programmé et de surcroît de manière définitive, - les chutes que C... X... a pu faire en Angleterre ne résultent pas nécessairement d'un défaut de soins mais sont inhérentes à sa maladie, dont l'aggravation a été constante à compter de 2011, - la pathologie avancée de C... X... telle que décrite par son médecin traitant anglais le 25 octobre 2012, qui certes ne l'a pas examiné et a permis la mise en place du mandat de protection future, est toutefois amplement confirmée par le certificat médical du docteur W... établi antérieurement le 27 septembre 2012, qui a rencontré l'intéressé, - aucune pièce du dossier ne permet de démontrer que le retour de C... X... en France résulte d'une volonté de Mme L... de se séparer de son mari, alors que son retour en Angleterre était envisagé en 2013 tant par le mandataire anglais, M. J... (pièce 20 appelante), que par son fils F..., pour mettre en place des soins spécialisés, M. J... écrivant le 19 août 2013 que "C..." avec qui il échangeait fréquemment souhaitait venir à Londres le voir. S'il est en revanche établi que Mme L... n'est que rarement venue voir son mari en France au cours des trois années de sa fin de vie, celle-ci explique son comportement par son impossibilité de le rencontre seule, ce qui est expressément énoncé dans ses conclusions déposées dans la procédure de placement sous tutelle de son mari, étant relevé que les rapports entre l'épouse et les enfants de C... X... n'ont cessé de se dégrader pour des raisons d'argent, les mandataires anglais détenant la gestion des comptes de C... X.... La cour souligne à cet égard que Mme L..., dans le questionnaire qu'elle a rempli pour la procédure de placement sous tutelle de C... X... initiée par ses enfants, a coché la case indiquant qu'elle acceptait de s'occuper de son mari. Il est en outre inopérant pour les intimés de soutenir qu'en ne contestant pas la procédure de placement sous tutelle de son mari en France, Mme L... a accepté la compétence du juge français pour sa succession et que son changement de position dans la présente instance constitue un "estoppel", c'est à dire une position contradictoire prise au détriment de son adversaire, quand il s'agit de prendre une mesure de protection d'un majeur se trouvant alors domicilié sur le territoire français, le juge des tutelles ne s'étant nullement prononcé sur la "résidence habituelle" de C... X... au sens du règlement (UE) du 4 juillet 2012, distincte de la notion de domicile de l'article 1211 du code de procédure civile. Au demeurant, Mme K..., désignée comme tutrice aux biens de C... X... situés en France ou hors de France, n'a pas été en mesure de faire reconnaître cette décision au Royaume-Uni, dès lors que M. J... et Mme L... étaient déjà désignés en qualité de tuteurs de la personne et des biens de C... X... en vertu du "Lasting Power of Attorney" que ce dernier avait signé en 2010. Il résulte de ces constatations et énonciations que C... X..., qui a quitté la France en 1981 et a passé plus de 30 ans en Angleterre, a fixé le centre de ses intérêts économiques, familiaux, sociaux et patrimoniaux dans ce pays, ayant le statut de résident anglais, et n'est revenu vivre en France qu'en raison de ses problèmes de santé liés à l'aggravation de la maladie d'Alzheimer, à l'initiative notamment de sa fille R... X... qui avait suivi une formation d'aidante familiale organisée par France Alzheimer, à une époque où ses facultés mentales étaient déjà altérées. La cour relève à cet égard qu'aucun élément du dossier ne démontre que C... X... avait maintenu des liens étroits avec la France après son départ en 1981 ou qu'il y faisait de fréquents séjours pour rencontrer notamment ses enfants, dont deux d'entre eux vivaient à l'étranger en Côte d'ivoire (F...) et au Bahrein (S...), n'étant propriétaire d'aucun bien immobilier à Paris. C'est vainement que les consorts X... soutiennent que leur père a entendu fixer ses intérêts en France et liquider une partie de son patrimoine anglais (vente d'un tableau, versement de sa retraite anglaise en France...) en faisant l'acquisition d'un appartement à Suresnes, alors que ces démarches ont été réalisées par leurs soins compte tenu de son état de santé, qu'ils ne s'expliquent pas sur le montage de cette acquisition à travers la constitution d'une SCI dont leur père ne détenait que 10 % des parts sociales, bien qu'ayant financé l'achat en totalité, la tutrice, Mme K..., écrivant d'ailleurs à Mme L... le 7 avril 2015 qu'elle avait l'intention de restituer toute la propriété de ce bien à son majeur protégé avec l'aide d'un avocat, "comme cela aurait dû être fait au tout début". Ne sont pas plus déterminants les éléments factuels tirés de la nationalité française de C... X..., de sa prétendue résidence fiscale en France, alors qu'il n'a jamais fait de déclaration fiscale en France après son départ au Royaume-Uni et que ce sont ses enfants qui ont procédé en 2017 à une demande de régularisation d'avoirs détenus à l'étranger, ou de l'ouverture d'un compte BNP en France nécessité par l'achat de l'appartement de Suresnes. Ainsi en prenant en considération la durée de vie de C... X... au Royaume-Uni, où s'est situé incontestablement le centre des intérêts de sa vie familiale, sociale et patrimoniale pendant près de trente ans, le lien étroit et stable entretenu depuis 1981 avec cet Etat dans lequel se trouve l'essentiel de ses biens mobiliers et immobiliers et les circonstances particulières de son retour en France en août 2012 durant les trois années qui ont précédé son décès, alors qu'il était atteint de la maladie d'Alzheimer à un stade déjà avancé et que sa fille R... avait proposé de le prendre en charge, provisoirement ou définitivement, il ne peut être considéré que C... X... avait décidé de déplacer sa résidence habituelle en France, contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge. Dès lors, ne sont pas compétentes, au sens du règlement (UE) du 4 juillet 2012, les juridictions françaises pour statuer sur l'ensemble de la succession de C... X... et la demande de désignation en France d'un mandataire successoral sur le fondement de l'article 813-1 du code civil. En conséquence, l'ordonnance déférée doit être infirmée des chefs de décision critiqués et notamment en ce que le premier juge s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande de désignation d'un mandataire successoral. ALORS, DE PREMIERE PART, QUE sont compétents pour statuer sur l'ensemble d'une succession les juridictions de l'Etat membre dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès ; que la résidence habituelle peut s'apprécier de manière objective, en ce qu'elle résulte d'indices factuels tirés des conditions de vie d'une personne âgée ou dépendante ; qu'en l'espèce, les consorts X... faisaient valoir que leur père, C... X..., était venu en France vivre auprès de sa fille R... X..., afin qu'elle puisse lui apporter au quotidien les soins nécessaires compte tenu de sa maladie, ce qu'elle fit durant plus de trois années ; qu'il s'ensuivait, objectivement, un changement de résidence habituelle, la France étant le lieu avéré et non remis en cause des dernières années de sa vie ; qu'en jugeant néanmoins que « le consentement de C... X... pour un retour définitif en France en août 2012, avec la volonté d'y fixer de nouveau le centre de ses intérêts et sa résidence habituelle, ne peut qu'être relativisé compte tenu de l'évolution avancée de sa maladie dégénérative ( ) », la cour d'appel, qui a implicitement mais nécessairement jugé qu'une personne subissant une maladie dégénérative ne pourrait plus changer de résidence habituelle faute de volonté sainement exprimée, a violé l'article 4 du Règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen ; ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE sont compétents pour statuer sur l'ensemble d'une succession les juridictions de l'Etat membre dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès ; qu'en matière de protection juridique des majeurs, le juge des tutelles territorialement compétent est celui de la résidence habituelle de la personne à protéger ; qu'en jugeant que le juge des tutelles, dans son ordonnance du 11 juillet 2014 ayant placé C... X... sous tutelle, ne s'était pas « prononcé sur la résidence habituelle de C... X... au sens du règlement (UE) du 4 juillet 2012, distincte de la notion de domicile de l'article 1211 du code de procédure civile », la cour d'appel, qui a lu de manière erronée que l'article 1211 du code de procédure civile faisait appel à la notion de domicile du majeur, a violé l'article 4 du Règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, ensemble l'article 1211 du code de procédure civile ; ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motif ; qu'en l'espèce, les consorts X... faisaient régulièrement valoir dans leurs écritures d'appel que le placement sous tutelle de C... X... le domiciliait légalement chez son tuteur, de sorte que cet élément était de nature à démontrer que sa résidence habituelle ne pouvait être qu'en France, chez son tuteur (conclusions, p. 30 et 32) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; ALORS, DE QUATRIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n'est pas située dans un Etat membre, les juridictions de l'Etat membre dans lequel sont situés des biens successoraux sont néanmoins compétentes, de manière subsidiaire, pour statuer sur l'ensemble de la succession dans la mesure où le défunt possédait la nationalité de cet Etat membre au moment du décès ; que ces dispositions, issues du Règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, sont d'ordre public et doivent être relevées d'office par le juge ; qu'en l'espèce, il est constant que C... X... avait la nationalité française et qu'il possédait des biens situés en France, de sorte que la cour d'appel aurait dû vérifier sa compétence subsidiaire ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour d'appel a violé l'article 10 du Règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012.
Est renvoyée à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : Les dispositions de l'article 10, point 1, a), du règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen doivent-elles être interprétées en ce sens que, lorsque la résidence habituelle du défunt au moment du décès n'est pas située dans un Etat membre, la juridiction d'un Etat membre dans lequel la résidence habituelle du défunt n'était pas fixée mais qui constate que celui-ci avait la nationalité de cet Etat et y possédait des biens doit, d'office, relever sa compétence subsidiaire prévue par ce texte ?
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Rejet Mme BATUT, président Arrêt n° 708 FS-P+B+I Pourvoi n° Y 19-19.003 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020 M. O... L... , domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-19.003 contre l'arrêt rendu le 12 juin 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 1), dans le litige l'opposant au procureur général près la cour d'appel de Paris, service civil, domicilié en son parquet général, 34 quai des Orfèvres, 75055 Paris cedex 01, défendeur à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. L... , et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, M. Vigneau, Mmes Bozzi, Poinseaux, Guihal, conseillers, Mmes Mouty-Tardieu, Le Cotty, Gargoullaud, Azar, M. Buat-Ménard, Mme Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, Mme Marilly, avocat général référendaire, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 juin 2018), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 17 mai 2017, pourvoi n° 16-18.232), M. X... L..., né en 1962 au Maroc, a souscrit, le 12 avril 2002, une déclaration d'acquisition de nationalité en raison de son mariage, célébré le 7 mars 2001 avec une ressortissante française. Cette déclaration a été enregistrée le 18 mars 2003. 2. Après son divorce, prononcé le 1er juillet 2004 et transcrit en marge des actes de l'état civil le 13 juillet, M. X... L... s'est remarié le 23 octobre 2004 avec sa précédente épouse marocaine dont il avait eu un enfant en décembre 2002. 3. Par bordereau de transmission du 27 décembre 2010, le ministère de l'intérieur a informé le ministère de la justice du refus d'enregistrement, le 17 mars 2010, de la déclaration souscrite par Mme V..., l'épouse marocaine de M. L... en raison de la fraude commise par celui-ci. 4. Le 10 décembre 2012, le ministère public a engagé une action en annulation de l'enregistrement de la déclaration souscrite par M. L... . Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et le second moyen, ci-après annexés 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 6. M. X... L... fait grief à l'arrêt de déclarer l'action du ministère public recevable comme non prescrite et d'annuler, en conséquence, l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 12 avril 2002, alors : « 1°/ que la transcription d'un divorce en marge des actes d'état civil d'un ressortissant ayant obtenu la nationalité française par mariage porte à la connaissance du ministère public la rupture de la vie commune des époux au sens de l'alinéa 3 de l'article 26-4 du code civil ; qu'en l'espèce, M. L... soutenait que le ministère public avait été informé de la rupture de sa vie commune à compter de la transcription de son jugement de divorce en marge des actes d'état civil le 13 juillet 2004 ; qu'en retenant que l'acte de mariage était muet sur la nationalité des époux, qu'il ne résultait d'aucune de ses mentions que M. L... aurait acquis la nationalité française par son mariage avec Mme E... et que le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Bordeaux, compétent pour exercer l'action en annulation, n'aurait pu supposer une fraude au seul vu d'un tel acte, dressé dans son ressort, sans procéder à des investigations complémentaires fondées sur des critères discriminatoires tirés des patronymes et/ou des lieux de naissance respectifs des époux, sans rechercher si le ministère public n'avait pas eu effectivement connaissance du divorce par suite de sa transcription le 13 juillet 2004 en marge des actes d'état civil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26-4 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 16 mars 1998 ; 2°/ qu'aux termes de l'article 26-4 du code civil, l'enregistrement d'une déclaration de nationalité peut être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans de leur découverte ; que le délai biennal d'exercice de l'action court à compter de la date à partir de laquelle le procureur de la République territorialement compétent a été mis en mesure de découvrir la fraude ou le mensonge ; que compte tenu de l'apposition, en marge des actes de naissance dressés ou transcrits, de mentions relatives au lien matrimonial (mariage, divorce, séparation de corps, annulation de mariage) et à la nationalité (naturalisation, réintégration, déclaration d'acquisition, déclaration de réintégration, décisions juridictionnelles, certificat de nationalité française, etc.), la seule lecture d'un acte de naissance est, dans certaines circonstances, de nature à mettre le procureur de la République territorialement compétent à même de découvrir la fraude ou le mensonge ; que dans ses conclusions d'appel, M. L... avait soutenu que l'action du ministère public s'appuyait en grande partie sur son remariage avec Mme V... le 23 octobre 2004 devant l'officier d'état civil de Cenon (33) et que, non seulement ce mariage avait fait l'objet de publicités régulières mais encore que les services d'état civil avaient expressément appelé sur ce mariage l'attention du procureur de la République qui avait déclaré ne pas s'y opposer ; qu'en déclarant que le signalement fait par le service d'état civil concernait uniquement l'absence de titre de séjour de l'épouse et n'était pas, par lui-même, nullement de nature à constituer un indice de fraude aux dispositions de l'article 21-2 du code civil, sans rechercher si, à la suite de ce signalement, la simple consultation des pièces remises à l'officier d'état civil en application de l'article 70 du code civil, parmi lesquelles l'acte de naissance de M. X... L..., ne mettait pas le ministère public en mesure de découvrir la fraude qu'elle invoquait pour demander l'annulation de l'enregistrement de la déclaration de nationalité qu'il avait souscrite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26-4, alinéa 3, du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 16 mars 1998. » Réponse de la Cour 7. Aux termes de l'article 26-4 du code civil, l'enregistrement d'une déclaration de nationalité peut être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans de leur découverte. 8. Le délai biennal d'exercice de l'action court à compter de la date à partir de laquelle le procureur de la République territorialement compétent a été mis en mesure de découvrir la fraude ou le mensonge. 9. La transcription en marge de l'acte de mariage d'un époux étranger ayant souscrit une déclaration en vue d'acquérir la nationalité française en application de l'article 21-2 du code civil, de la mention du jugement de divorce, ayant dissous son mariage avec son épouse française, n'est pas en soi, de nature à mettre le ministère public territorialement compétent en mesure de connaître la fraude ou le mensonge qui l'autorise à exercer, conformément à l'article 26-4 du même code, l'action en annulation de l'enregistrement de cette déclaration. 10. En premier lieu, l'arrêt retient que, si la copie intégrale de l'acte de mariage de M. X... L... avec son épouse française comporte la mention marginale, apposée le 10 septembre 2004, du divorce prononcé le 4 décembre 2003, il ne résulte d'aucune de ses énonciations que l'intéressé ait acquis la nationalité française par son mariage. Il en déduit que le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bordeaux n'aurait pu suspecter de fraude sans procéder à des investigations complémentaires fondées sur des critères discriminatoires tirés des patronymes ou des lieux de naissance respectifs des époux. Il ajoute que l'acte de naissance de M. X... L... n'est pas produit mais qu'en tout état de cause, celui-ci étant né au Maroc, cet acte n'a pu être dressé ou sa transcription faite dans le ressort de la même circonscription judiciaire. 11. En second lieu, l'arrêt relève que si les services de l'état civil ont appelé l'attention du ministère public sur le mariage de M. X... L... avec Mme V..., c'est exclusivement en raison du séjour irrégulier de celle-ci sur le territoire français, lequel pouvait constituer un obstacle à cette célébration. 12. Ayant ainsi mis en évidence, d'une part, que le ministère public territorialement compétent ne pouvait supposer une fraude au seul vu de la transcription du jugement de divorce en marge de l'acte de mariage, d'autre part, que le signalement relatif au remariage n'était pas, par lui-même, constitutif d'un indice de fraude, la cour d'appel, qui a effectué la première recherche prétendument omise et n'avait pas à procéder à la seconde que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. X... L... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. L... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Cass. Civ. I, 17 mai 2017. N° de pourvoi : Y16-18.232), d'avoir déclaré l'action du ministère public recevable comme non prescrite et d'avoir en conséquence annulé l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 12 avril 2002 par Monsieur O... L... ; Aux motifs propres, que suivant l'article 21-2 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, l'étranger ou l'apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai d'un an à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à cette date la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité ; qu'en application de l'article 26-4 alinéa 3 du même code, l'enregistrement d'une déclaration d'acquisition de nationalité par mariage peut être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte et la cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l'enregistrement de la déclaration prévue à l'article 21-2 constitue une présomption de fraude ; toutefois, que cette présomption ne s'applique que dans les instances engagées dans les deux années suivant l'enregistrement de la déclaration ; que, le 7 mars 2001 a été célébré à Cenon (Gironde) le mariage de M. O... L... , né le [...] 1962 à Fès (Maroc), de nationalité marocaine, et de Mme P... E..., née le [...] 1971 à Bordeaux (Gironde), de nationalité française ; qu'aucun enfant n'est issu de cette union ; que le 12 avril 2002, M. L... a souscrit une déclaration aux fins d'acquisition de la nationalité française par mariage qui a été enregistrée le 18 mars 2003 ; que le 1er juillet 2004 a été prononcé le divorce par consentement mutuel des époux avec fixation au 4 décembre 2003 de la date de séparation ; que le 23 octobre 2004, M. X... L... s'est remarié à Cenon avec sa première épouse marocaine Mme T... V..., dont il était divorcé le 20 novembre 2000 et dont il avait eu un troisième enfant le 11 décembre 2002 ; que le 17 mars 2010 a été refusé l'enregistrement de la déclaration acquisitive de nationalité française par mariage de Mme V... ; que le 10 décembre 2012, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bordeaux a assigné M. X... L... devant cette juridiction aux fins d'annulation de l'enregistrement et de constatation de l'extranéité de l'intéressé ; que, sur la recevabilité de l'action du ministère public, le délai imparti par l'article 26-4 précité du code civil court à compter de la date à laquelle le ministère public territorialement compétent a été mis en mesure de découvrir la fraude alléguée ; que M. L... soutient, en premier lieu, que cette date devrait être fixée à celle de l'inscription du divorce en marge des actes d'état civil ; que M. L... produit à cet égard une copie intégrale de son acte de mariage avec Mme E... comportant la mention marginale, apposée le 10 septembre 2004, du divorce prononcé le 4 décembre 2003 ; mais que cet acte est muet sur la nationalité des époux ; qu'il ne résulte d'aucune de ses mentions que M. L... aurait acquis la nationalité française par son mariage avec Mme E...; que le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Bordeaux, compétent pour exercer l'action en annulation, n'aurait pu supposer une fraude au seul vu d'un tel acte, dressé dans son ressort, sans procéder à des investigations complémentaires fondées sur des critères discriminatoires tirés des patronymes et/ou des lieux de naissance respectifs des époux ; que l'acte de naissance de M. L... n'est pas produit mais qu'en toute hypothèse, l'intéressé étant né au Maroc, cet acte n'a pu être dressé ou sa transcription faite dans le ressort du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bordeaux ; que M. L... fait valoir, en deuxième lieu, que la décision en date du 17 mars 2010 de refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite par Mme V... a été transmise pour information au tribunal d'instance de Bordeaux et donc également au parquet près ce tribunal ; mais qu'aucun texte ne prévoit une telle transmission et qu'aucun lien hiérarchique ne permet de la présumer ; que M. L... fait valoir, en troisième lieu, que la connaissance de la fraude résulte d'un renseignement de police du 25 octobre 2010 transmis le même jour au ministère de l'intérieur et au préfet ; mais qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que cet acte de police administrative aurait été directement communiqué au procureur de la République par les fonctionnaires du service départemental de la sécurité publique de Gironde qui l'ont établi ; que M. L... expose, en quatrième lieu, que l'action du ministère public s'appuie en grande partie sur son remariage avec Mme V... le 23 octobre 2004 devant l'officier d'état civil de Cenon (33) et que, non seulement ce mariage a fait l'objet de publicités régulières mais encore que les services d'état civil ont expressément appelé sur ce mariage l'attention du procureur de la République qui a déclaré ne pas s'y opposer ; mais que le signalement fait par le service d'état civil concernait uniquement l'absence de titre de séjour de l'épouse et n'était, par lui-même, nullement de nature à constituer un indice de fraude aux dispositions de l'article 21-2 du code civil ; qu'à la suite du refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité de Mme V..., l'existence d'une fraude éventuelle a été signalée au ministère de la Justice par un bordereau de transmission du ministère de l'Intérieur en date du 27 décembre 2010 ; que si M. L... fait exactement observer qu'en raison du lien de subordination hiérarchique, c'est à cette date que le ministère public territorialement compétent a été mis en mesure de connaître l'existence de la fraude, l'action qui a été engagée par assignation du 10 décembre 2012 l'a été dans le délai de deux ans imparti par l'article 26-4 précité du code civil ; qu'il résulte de ce qui précède que le jugement doit être confirmé en ce qu'il déclare recevable l'action du ministère public ; Et aux motifs adoptés des premiers juges, que M O... L... fait valoir, que l'action du Ministère public est enfermée dans le délai de 2 ans à compter de la découverte de la fraude. Il ajoute que l'enregistrement et la publicité du divorce constituent la révélation de la fraude et font courir le délai de 2 ans pour que le Parquet puisse agir et qu'existaient des éléments d'information permettant d'alerter le Ministère Public, chacun de ces événements, ayant selon lui été le point de départ du délai de 2 ans à savoir : 1°) le jugement de divorce du 1er juillet 2004 enregistré le 13 juillet 2004 ; 2°) le refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité de Madame V... du 17 mars 2010, faisant expressément référence à la prétendue fraude de son époux ; 3°) le renseignement de police du 25 octobre 2010 ; 4°) le remariage avec sa première épouse, Madame V... le 23 octobre 2004 à Cenon, mariage rendu public par les publicités habituelles en matière de mariage et donc opposable au Ministère public ; 5°) avant la célébration de ce mariage, avertissement donné par les services d'état civil de Cenon au Ministère public, qui avait donné pour instruction de ne pas s'y opposer. L'assignation n'ayant été délivrée que le 10 décembre 2012, la prescription est selon lui acquise. Le Ministère Public répond que ce n'est que par bordereau du 27 décembre 2010 que la sous-direction de l'accès à la nationalité française, de la direction de l'accueil, de l'intégration, et de la citoyenneté du Ministère de l'Intérieur a informé le Ministère de la Justice de l'existence d'une possible fraude ; Il a été jugé (notamment cour de cassation première chambre civile 26 septembre 2012 n° 10-28032) que seul le ministère public territorialement compétent pouvant agir en annulation de l'enregistrement pour fraude, c'est à compter de la date à laquelle celui-ci l'a découverte que court le délai biennal d'exercice de cette action ; dès lors le ministère public territorialement compétent n'a pas en l'espèce pu être informé : - par le jugement de divorce du 1er juillet 2004 enregistré le 13 juillet 2004, le ministère public n'ayant pas comme il l'expose pour mission de surveiller tous les prononcés de divorce et leur transcription ; - par le refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité de Mme V... le 17 mars 2010, en raison d'une fraude suspectée par le Ministère de l'Intérieur ; - par l'enquête de police ("note de renseignement") du 25 octobre 2010 suite au refus précité, cette enquête ayant été effectuée à demande de la Préfecture et non du Parquet comme le démontre le bordereau d'envoi au service ; d'autre part est invoquée une alerte donnée au Ministère Public par les services d'état civil de Cenon. Mais sur ce point aucun élément de preuve n'est fourni. Le délai de deux ans imparti au ministère public pour remettre en cause l'enregistrement de la déclaration souscrite par l'intéressé a commencé à courir à compter de la date figurant sur le bordereau que lui a adressé la sous-direction des naturalisations en vue d'engager l'action en contestation de l'enregistrement de la déclaration soit le 27 décembre 2010 ; l'assignation a été délivrée à la demande du ministère public le 10 décembre 2012. Le délai de deux ans prévu par l'article 26-4 alinéa 3 du code civil a été respecté ; l'action en contestation de l'enregistrement de la déclaration en cause est recevable ; Alors que, de première part, la transcription d'un divorce en marge des actes d'état civil d'un ressortissant ayant obtenu la nationalité française par mariage porte à la connaissance du ministère public la rupture de la vie commune des époux au sens de l'alinéa 3 de l'article 26-4 du Code civil ; qu'en l'espèce, Monsieur L... soutenait que le ministère public avait été informé de la rupture de sa vie commune à compter de la transcription de son jugement de divorce en marge des actes d'état civil le 13 juillet 2004 ; qu'en retenant que l'acte de mariage était muet sur la nationalité des époux, qu'il ne résultait d'aucune de ses mentions que M. L... aurait acquis la nationalité française par son mariage avec Mme E... et que le procureur de la République près du tribunal de grande instance de Bordeaux, compétent pour exercer l'action en annulation, n'aurait pu supposer une fraude au seul vu d'un tel acte, dressé dans son ressort, sans procéder à des investigations complémentaires fondées sur des critères discriminatoires tirés des patronymes et/ou des lieux de naissance respectifs des époux, sans rechercher si le Ministère public n'avait pas eu effectivement connaissance du divorce par suite de sa transcription le 13 juillet 2004 en marge des actes d'état civil, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26-4 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi du 16 mars 1998 ; Alors que, de deuxième part, aux termes de l'article 26-4 du code civil, l'enregistrement d'une déclaration de nationalité peut être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans de leur découverte ; que le délai biennal d'exercice de l'action court à compter de la date à partir de laquelle le procureur de la République territorialement compétent a été mis en mesure de découvrir la fraude ou le mensonge ; que compte tenu de l'apposition, en marge des actes de naissance dressés ou transcrits, de mentions relatives au lien matrimonial (Mariage, divorce, séparation de corps, annulation de mariage) et à la nationalité (Naturalisation, réintégration, déclaration d'acquisition, déclaration de réintégration, décisions juridictionnelles, certificat de nationalité française, etc.), la seule lecture d'un acte de naissance est, dans certaines circonstances, de nature à mettre le procureur de la République territorialement compétent à même de découvrir la fraude ou le mensonge ; que dans ses conclusions d'appel, Monsieur L... avait soutenu que l'action du ministère public s'appuyait en grande partie sur son remariage avec Madame V... le 23 octobre 2004 devant l'officier d'état civil de Cenon (33) et que, non seulement ce mariage avait fait l'objet de publicités régulières mais encore que les services d'état civil avaient expressément appelé sur ce mariage l'attention du procureur de la République qui avait déclaré ne pas s'y opposer ; qu'en déclarant que le signalement fait par le service d'état civil concernait uniquement l'absence de titre de séjour de l'épouse et n'était pas, par lui-même, nullement de nature à constituer un indice de fraude aux dispositions de l'article 21-2 du code civil, sans rechercher si, à la suite de ce signalement, la simple consultation des pièces remises à l'officier d'état civil en application de l'article 70 du Code civil, parmi lesquelles l'acte de naissance de Monsieur L... , ne mettait pas le ministère public en mesure de découvrir la fraude qu'elle invoquait pour demander l'annulation de l'enregistrement de la déclaration de nationalité qu'il avait souscrite, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26-4, alinéa 3 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi du 16 mars 1998 ; Alors que, de troisième part, aux termes de l'article 26-4 du code civil, l'enregistrement d'une déclaration de nationalité peut être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans de leur découverte ; que le délai biennal d'exercice de l'action court à compter de la date à partir de laquelle le procureur de la République territorialement compétent a été mis en mesure de découvrir la fraude ou le mensonge ; que dans ses conclusions d'appel, Monsieur L... avait soutenu que la décision en date du 17 mars 2010 de refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite par Mme V... a été transmise pour information au tribunal d'instance de Bordeaux et donc également au parquet près ce tribunal ; qu'en déclarant qu'aucun texte ne prévoit une telle transmission et qu'aucun lien hiérarchique ne permet de la présumer sans rechercher concrètement si le ministère public n'avait pas été informé par le greffier du tribunal d'instance de Bordeaux, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 26-4, alinéa 3 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi du 16 mars 1998. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir annulé l'enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 12 avril 2002 par Monsieur L... ; Aux motifs propres qu'au fond, M. O... L... fait valoir qu'aucune présomption de fraude ne peut lui être opposée et que l'enfant adultérin qu'il a eu avec sa première épouse pendant son second mariage n'est pas une preuve de l'absence de validité de ce second mariage, alors qu'il prouve la réalité de la communauté de vie et de son intention matrimoniale. À l'inverse, le ministère public fait valoir que la chronologie des faits démontre la fraude. Il a été suivi en cela par le premier juge. La cour rappelle que l'espèce est régie par les dispositions de l'article 21-2 du code civil, pris en sa rédaction antérieure à la loi du 27 novembre 2003 mais après loi du 16 mars 1998, précisant que l'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai d'un an à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux et que le conjoint français ait conservé sa nationalité. Il est donc sans intérêt de relever, ainsi que le fait le ministère public, que la notion de communauté de vie sera ultérieurement modifiée par la loi du 27 novembre 2003, non encore applicable. La seule notion devant être prise en compte est celle de "communauté de vie" non précisée par le texte et correspondant en conséquence à celle du mariage selon loi française. Il apparaît important à la cour de reprendre la chronologie des événements : * 3 janvier 1992, mariage de M. O... L... , de nationalité marocaine, avec Mme T... V..., également de nationalité marocaine, dont naîtront deux enfants en 1993 et 1997, * 27 novembre 2000, divorce de ce premier mariage, * 7 mars 2001, mariage de M. O... L... , encore de nationalité algérienne (marocaine), avec Mme P... E..., de nationalité française, * 12 avril 2002, déclaration par M. O... L... d'acquisition de nationalité française, * 11 décembre 2002, naissance du troisième enfant de M. O... L... et Mme T... V..., * 18 mars 2003, enregistrement de la déclaration, * 1er juillet 2004, divorce avec date de séparation au 4 décembre 2003, * 23 octobre 2004, remariage de M. O... L... avec sa première épouse Mme T... V..., * 17 mars 2010, la déclaration d'acquisition de nationalité française par Mme T... V... n'est pas enregistrée, entraînant dénonciation au procureur de la République. M. O... L... présente divers documents démontrant que de nombreuses charges de vie courante étaient mises au nom de lui-même et de Mme P... E.... Il présente également des témoignages de personnes les ayant vus ensemble dans l'appartement de Cenon (33) et avoir vu Mme P... E... aller à l'école de Cenon chercher les enfants de son mari. Lors de l'attestation sur l'honneur datée du 12 avril 2002, ce domicile est précisé : "[...] ". Lors de la reconnaissance prénatale de leur enfant Y..., effectuée de façon conjointe le 3 décembre 2002 à la mairie de Bordeaux, Mme T... V... et M. O... L... ont déclaré cette adresse commune, ainsi que cela a été transcrit sur l'acte de naissance de l'enfant dont le procureur général a communiqué la copie intégrale. Il est donc établi que tous deux ont continué, après leur divorce et alors que le mari s'était remarié, à entretenir une relation suivie, avec naissance d'un enfant commun et déclaration d'une seule adresse pour eux deux. Il ne s'agissait pas seulement d'une relation extra-conjugale passagère mais d'une double vie continuant leur lien conjugal ancien. Par ailleurs, la rapidité de leur remariage, trois mois après divorce, délai incluant l'acquisition du caractère définitif à ce divorce, la publication des bans et l'organisation du mariage, écartant toute improvisation, exige une préparation qui démontre la préméditation. Ce comportement, en totale opposition avec la conception monogame du mariage selon la loi française, interdit de considérer que M. O... L... a vécu en communauté de vie avec Mme P... E..., au sens du code de la nationalité. La décision déférée, qui a annulé l'enregistrement de la déclaration d'acquisition de la nationalité française sera en conséquence confirmée, avec adoption de ses autres motifs non contraires ; Et aux motifs adoptés des premiers juges, que le Tribunal renvoie à la chronologie rappelée au début des motifs du jugement, rappelant que la déclaration de Monsieur L... en vue de l'acquisition de la nationalité française sur le fondement de l'article 21-2 du Code civil a été souscrite le 12 avril 2002. Données chronologiques : - 3 janvier 1992 mariage au Maroc de M. O... L... , de nationalité marocaine, avec Mme T... V..., de nationalité marocaine dont il a eu deux enfants respectivement nés en 1993 et 1997, - 20 novembre 2000 divorce de M. O... L... et de Mme T... V... , - 7 mars 2001 mariage de Monsieur O... L... avec Madame P... E... à Cenon, - 12 avril 2002, déclaration de Monsieur L... en vue de l'acquisition de la nationalité française sur le fondement de l'article 21-2 du Code civil, - 18 mars 2003 enregistrement de la déclaration sous le numéro 2050/03 dossier 2002 DX 011172, - 4 décembre 2003 séparation des époux L... E... (date fixée par eux dans la convention soumise au juge aux affaires familiales et homologuée), - 1er juillet 2004 divorce prononcé entre les époux L... E... , - 23 octobre 2004 remariage de Monsieur L... avec sa première épouse, Madame V... à Cenon, - 17 mars 2010, refus par le Ministère de l'immigration notifié à la nouvelle épouse de Monsieur L... de recevoir sa déclaration de nationalité française estimant que l'acquisition faite par Monsieur L... le 12 mars 2002 était frauduleuse, - 10 décembre 2012 assignation de Monsieur O... L... devant le tribunal de grande instance de Bordeaux sur la fraude et le mensonge reprochés à Monsieur O... L... ; qu'il ressort du dossier que M. O... L..., marié avec P... E..., a continué à entretenir une relation intime avec son ex22 épouse, présente en France et que de cette relation avec l'ex épouse est née le [...] 2002, une troisième fille, Y... L... ; que l'acte de naissance (pièce n° 13) mentionne " est née Y... du sexe féminin, de O... L... et de T... V... ... domiciliés à [...] , qui l'ont reconnue le 3 décembre 2002 à la mairie de Bordeaux " ; que M. O... L... et Mme T... V... , avaient déjà eu ensemble deux enfants nées en 1993 et 1997 ; que M. O... L... s'est le 4 décembre 2003 séparé de Mme E... ; que cette date de séparation est celle indiquée par les époux eux-mêmes dans la convention soumise au juge aux affaires familiales et homologuée ; que la séparation est intervenue moins de neuf mois après l'enregistrement de la déclaration de nationalité ; que le jugement de divorce a été rendu le 1er juillet 2004 et le 23 octobre 2004 M. O... L... s'est remarié avec Mme V... ; que c'est dès lors à juste titre que le Procureur de la République fait valoir que Monsieur L... n'avait pas l'intention de vivre une union durable avec P... E... ; que la fraude peut résulter d'une simple apparence de vie commune ; que Monsieur L... fait valoir qu'il apporte la preuve d'une communauté de vie et d'une véritable intention matrimoniale avec Madame E... ; qu'il produit les documents suivants : - ouverture d'un compte joint à La Poste le 13 avril 2001 ; - une feuille de soins de l'assurance maladie au nom de Madame E... d'octobre 2003 ; -une attestation de droits du 17 décembre 2001 de l'assurance maladie mentionnant Madame E... comme bénéficiaire ainsi que les deux enfants nés en 1993 et 1997 ; - une attestation de La Poste du 4 avril 2002 indiquant que Monsieur ou Madame O... L... appt [...] perçoivent des revenus réguliers (à noter que cette adresse est celle figurant sur l'acte de naissance de l'enfant prénommée Y... comme domicile de ses parents) ; - un contrat de réexpédition de courrier postal du 26 octobre 2001 ; - une attestation de la Poste du 24 mai 2002 confirmant que des incidents sur le compte de Madame L... P... ont été régularisés et une attestation du 29 mai 2002 de La Poste levant une mesure d'interdiction bancaire ; - un certificat d'adhésion à l'assurance " Alliatys " de La Poste au nom de Monsieur ou Madame L... O... chez Monsieur J... ; - un avis de refus du FSL du 27 novembre 20001 adressé à Monsieur et Madame L... ; - un contrat de location du 12 octobre 2001 au nom de Monsieur et Madame portant sur l'appartement [...] ; - des relevés de compte ; - un RIB postal ; - une offre de prêt du 6 novembre 2003 au nom de Madame E... ; que ces pièces toutes purement d'ordre administratif, évoquent des aspects de vie "matérielle" en commun mais nullement un comportement d'époux vivant ensemble au regard d'un entourage familial ou amical ; Alors que, d'une part, que s'il résulte de l'article 26-4 du Code civil que l'enregistrement de la déclaration acquisitive de nationalité souscrite en application de l'article 21-2 du même Code peut être contestée par le ministère public, en cas de mensonge ou de fraude, dans le délai de deux ans à compter de leur découverte, encore faut-il que soit démontrée l'existence d'un mensonge ou d'une fraude ; que la preuve de l'existence d'une fraude est notamment rapportée par l'absence de communauté de vie réelle entre l'époux étranger désirant acquérir la nationalité française et son conjoint français ; qu'en se fondant sur l'existence d'un délai de moins de neuf mois entre l'enregistrement de la déclaration et la séparation des époux et la rapidité du remariage de Monsieur L... après son divorce pour retenir l'absence que la communauté de vie à la date de la souscription de la déclaration effectuée sans rechercher si, en plus de la cohabitation matérielle des époux L... , l'ouverture par ceux-ci de comptes bancaires joints qu'ils faisaient fonctionner conjointement et régulièrement et la souscription par Monsieur L... d'un contrat d'assurance vie au bénéfice de son épouse n'étaient pas de nature à caractériser l'intention de celui-ci de vivre une union durable avec cette dernière, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 21-2 et 26-4 du Code civil ; Alors que, de deuxième part, l'existence d'une relation adultère pendant le mariage, même avec une ex-épouse, ne saurait à lui seul, caractériser l'absence de communauté de vie des époux, ni une fraude ; qu'en déduisant de la seule reconnaissance par Monsieur X... L... d'un enfant né hors mariage de sa relation avec son ancienne épouse la poursuite du lien conjugal et l'existence d'une fraude sans rechercher si, en plus de la cohabitation matérielle des époux L... , l'ouverture par ceux-ci de comptes bancaires joints qu'ils faisaient fonctionner conjointement et régulièrement et la souscription par Monsieur L... d'un contrat d'assurance vie au bénéfice de son épouse n'était pas de nature à caractériser son intention de vivre une union durable avec cette dernière, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 21-2 et 26-4 du Code civil ; Alors que, de troisième part, toute personne pouvant contracter un nouveau mariage dès la dissolution du précédent, la rapidité d'un remariage ne caractérise pas en soi la fraude ou l'absence de communauté de vie des époux au cours du mariage dissous ; qu'en déduisant du remariage de Monsieur L... trois mois après son divorce l'existence d'une fraude relative au mariage dissous, la Cour d'appel a violé les articles 21-2 et 26-4 du Code civil, ensemble l'article 147 du même Code.
La transcription, en marge de l'acte de mariage d'un époux étranger ayant souscrit une déclaration en vue d'acquérir la nationalité française, en application de l'article 21-2 du code civil, de la mention du jugement de divorce ayant dissous son mariage avec son épouse française, n'est pas, en soi, de nature à mettre le ministère public territorialement compétent en mesure de connaître la fraude ou le mensonge qui l'autorise à exercer, conformément à l'article 26-4 du même code, l'action en annulation de l'enregistrement de cette déclaration
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Rejet et cassation partielle sans renvoi Mme BATUT, président Arrêt n° 710 FS-P+B Pourvoi n° N 19-50.043 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020 Le procureur général près la cour d'appel de Rennes, domicilié en son parquet général, place du Parlement de Bretagne, CS 66423, 35064 Rennes, a formé le pourvoi n° N 19-50.043 contre l'arrêt rendu le 13 mai 2019 par la cour d'appel de Rennes (6e chambre A), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. Q... A..., 2°/ à M. F... N..., 3°/ à J... A...-N..., représenté par M. A... et M. N..., pris en leur qualité de représentants légaux, domiciliés tous trois [...], défendeurs à la cassation. MM. A... et N... ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Les demandeurs aux pourvois principal et incident invoquent, chacun, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Cotty, conseiller référendaire, les observations de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de MM. A... et N..., après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Le Cotty, conseiller référendaire rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, Mme Bozzi, M. Acquaviva, Mmes Poinseaux, Guihal, conseillers, Mmes Mouty-Tardieu, Gargoullaud, Azar, M. Buat-Ménard, Mme Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Désistement 1. Le procureur général près la cour d'appel de Rennes a déclaré se désister du pourvoi principal. MM. A... et N..., qui avaient formé un pourvoi incident, n'ont pas accepté le désistement. 2. Il résulte des dispositions de l'article 1024 du code de procédure civile qu'il y a lieu de statuer sur les deux pourvois. Faits et procédure 3. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 mai 2019), aux termes de son acte de naissance étranger, J... A...-N... est né le [...] à Kamloops (Colombie britannique, Canada), ayant pour parents M. A... et M. N..., tous deux de nationalité française. Les deux hommes ont eu recours à une convention de gestation pour autrui au Canada. 4. Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nantes s'étant opposé à leur demande de transcription de l'acte de naissance sur les registres de l'état civil consulaire, MM. A... et N... l'ont assigné à cette fin. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi principal, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen du pourvoi incident, pris en ses première et deuxième branches Enoncé du moyen 6. MM. A... et N... font grief à l'arrêt de rejeter la demande de M. N... tendant à la transcription de l'acte de naissance de J... A...-N..., s'agissant de sa désignation comme parent de l'enfant, alors : « 1°/ que l'article 47 du code civil permet simplement d'écarter les actes d'état civil qui n'ont pas été établis conformément à la loi dont ils relèvent ; que leur régularité formelle doit être examinée au regard des conditions posées par la loi étrangère ; qu'en refusant la transcription de l'acte de naissance de l'enfant J... en ce qui concerne la désignation de M. N... en qualité de parent, au motif que les faits déclarés ne correspondaient pas à la réalité biologique de l'enfant, sans examiner la régularité de l'acte de naissance au regard de la loi canadienne, dont il relevait, la cour d'appel a violé l'article 47 du code civil ; 2°/ qu'il se déduit de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant, la circonstance que la naissance d'un enfant à l'étranger ait pour origine une convention de gestation pour autrui ne peut à elle seule faire obstacle à la transcription de l'acte de naissance du lien de filiation à l'égard du parent d'intention mentionnée dans un acte étranger laquelle doit intervenir au plus tard lorsque ce lien entre l'enfant et le parent d'intention s'est concrétisé ; qu'en énonçant que le refus de transcription de la filiation paternelle d'intention, lorsque l'enfant est né à l'étranger à l'issue d'une convention de gestation pour autrui, résulte de la loi et poursuit un but légitime en ce qu'il tend à la protection de l'enfant et de la mère porteuse et vise à décourager cette pratique prohibée, la cour d'appel a refusé la transcription de l'acte de naissance de l'enfant J... par des motifs fondés sur l'existence d'une convention de gestation pour autrui à l'origine de la naissance de l'enfant, et a violé l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Vu les articles 3, § 1, de la Convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant, 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 47 du code civil : 7. Aux termes de l'article 3, § 1, de la Convention de New-York du 20 novembre 1989, dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. 8. Aux termes de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. 9. Aux termes de l'article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. 10. Il se déduit du deuxième de ces textes, tel qu'interprété par la Cour européenne des droits de l'homme (avis consultatif du 10 avril 2019), qu'au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant, la circonstance que la naissance d'un enfant à l'étranger ait pour origine une convention de gestation pour autrui, prohibée par les articles 16-7 et 16-9 du code civil, ne peut, à elle seule, sans porter une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de l'enfant, faire obstacle à la transcription de l'acte de naissance établi par les autorités de l'Etat étranger, en ce qui concerne le père biologique de l'enfant, ni à la reconnaissance du lien de filiation à l'égard de la mère d'intention mentionnée dans l'acte étranger, laquelle doit intervenir au plus tard lorsque ce lien entre l'enfant et la mère d'intention s'est concrétisé (Ass. plén., 4 octobre 2019, pourvoi n° 10-19.053, publié, paragraphe 6). 11. Le raisonnement n'a pas lieu d'être différent lorsque c'est un homme qui est désigné dans l'acte de naissance étranger comme « parent d'intention ». 12. La jurisprudence de la Cour de cassation (1re Civ., 5 juillet 2017, pourvois n° 15-28.597, Bull. 2017, I, n° 163, n° 16-16.901 et 16-50.025, Bull. 2017, I, n° 164 et n° 16-16.455, Bull. 2017, I, n° 165) qui, en présence d'un vide juridique et dans une recherche d'équilibre entre l'interdit d'ordre public de la gestation pour autrui et l'intérêt supérieur de l'enfant, a refusé, au visa de l'article 47 du code civil, la transcription totale des actes de naissance étrangers des enfants en considération, notamment, de l'absence de disproportion de l'atteinte portée au droit au respect de leur vie privée dès lors que la voie de l'adoption était ouverte à l'époux ou l'épouse du père biologique, ne peut trouver application lorsque l'introduction d'une procédure d'adoption s'avère impossible ou inadaptée à la situation des intéressés. 13. Ainsi, dans l'arrêt précité, l'assemblée plénière de la Cour de cassation a admis, au regard des impératifs susvisés et des circonstances de l'espèce, la transcription d'actes de naissance étrangers d'enfants nés à l'issue d'une convention de gestation pour autrui, qui désignaient le père biologique et la mère d'intention. 14. Les mêmes impératifs et la nécessité d'unifier le traitement des situations ont conduit à une évolution de la jurisprudence en ce sens qu'en présence d'une action aux fins de transcription de l'acte de naissance étranger de l'enfant, qui n'est pas une action en reconnaissance ou en établissement de la filiation, ni la circonstance que l'enfant soit né à l'issue d'une convention de gestation pour autrui ni celle que cet acte désigne le père biologique de l'enfant et un deuxième homme comme père ne constituent des obstacles à la transcription de l'acte sur les registres de l'état civil, lorsque celui-ci est probant au sens de l'article 47 du code civil (1re Civ., 18 décembre 2019, pourvoi n° 18-12.327, publié, et 1re Civ., 18 décembre 2019, pourvoi n° 18-11.815, publié). 15. Pour ordonner la transcription partielle de l'acte de naissance de J... et rejeter la demande en ce que cet acte désigne M. N... en qualité de parent, l'arrêt retient que la désignation de celui-ci ne peut correspondre à la réalité biologique, ce dont il résulte que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité, et que la transcription partielle ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'enfant, au regard du but légitime poursuivi, dès lors que l'accueil de l'enfant au sein du foyer constitué par son père et son compagnon n'est pas remis en cause par les autorités françaises et que ce dernier aura la possibilité de créer un lien de filiation avec l'enfant par un biais autre que la transcription, n'étant pas établi que la voie de l'adoption serait fermée au motif qu'il figure dans l'acte de naissance comme parent. 16. En statuant ainsi, alors que, saisie d'une demande de transcription d'un acte de l'état civil étranger, elle constatait que celui-ci était régulier, exempt de fraude et avait été établi conformément au droit de l'Etat de Colombie Britannique, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 17. Tel que suggéré par le mémoire déposé au soutien du pourvoi incident, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 18. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen du pourvoi incident, la Cour : REJETTE le pourvoi principal ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. N... tendant à la transcription, sur les registres de l'état civil, de l'acte de naissance de J... A...-N..., né le [...] à Kamloops, BC (Colombie Britannique, Canada), s'agissant de sa désignation comme parent de l'enfant, l'arrêt rendu le 13 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Confirme le jugement rendu le 14 décembre 2017 par le tribunal de grande instance de Nantes ; Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. A... et N... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par le procureur général près la cour d'appel de Rennes Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné la transcription partielle sur les registres de l'état civil français, de l'acte de naissance de J... A...-N... est né le [...] à Kamloops,Colombie britannique (Canada) en ce qu'il a retenu la seule identité de Monsieur Q... A... alors qu'aucun élément ne permet d'établir qu'il est le père biologique de cet enfant. Aux motifs que : L'article 47 du code civil énonce que tout acte de l 'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est Irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; L'acte de naissance litigieux n'est pas conforme à la réalité au sens de l'article 47 du code civil, en ce qu'il indique les noms de Messieurs A... et N... comme pères, alors que l'enfant J... ne peut avoir pour père biologique que l'un des deux. Il convient de rappeler qu'aucun jugement canadien ne semble avoir été rendu et qu'aucun autre document n'a été produit permettant de dire,qui de Monsieur A... ou de Monsieur N... est le père biologique,sachant que l'hypothèse d'un tiers donneur est toujours possible. De la même façon, alors que Messieurs A... ct N... ne sont pas mariés, aucune reconnaissance de paternité ne semble avoir été souscrite par l'un ou l'autre. Dans ce contexte, et en l'état actuel de la jurisprudence de la cour de cassation qui à ce jour n'a pas eu à se prononcer sur la gestation pour autrui conclue par un couple de personnes de même sexe, mais qui entend autoriser la transcription des actes d'état civil en retenant la seule identité du parent biologique d'intention, force est de constater qu'au cas particulier, aucun élément ne permet d'identifier le père biologique de l'enfant J.... Cet acte de naissance, bien que régulier en la forme et dûment apostillé, ne peut en conséquence être considéré comme probant au sens de l'article 47 du code civil car il renferme des informations intrinsèquement fausses, en désignant deux hommes comme pères des enfants, sans qu'il soit possible d'identifier celui qui a transmis son patrimoine génétique. La cour d'appel, en infirmant le jugement de première instance lequel avait ordonné la transcription intégrale de l'acte de naissance en raison de l'intérêt supérieur de l'enfant, mais sans considération du juste équilibre recherché par la cour de cassation entre la prohibition de la gestation pour autrui en France et l'intérêt supérieur des enfants, a recherché de tout évidence une voie médiane d'opportunité. En effet, elle croit pourvoir affirmer que Monsieur Q... A... est le père (biologique) de l'enfant J... car il est désigné comme premier parent dans l'acte de naissance, et que le ministère public ne rapporte pas la preuve qu'il n'est pas le père. Fort logiquement, elle en déduit alors que Monsieur F... N... ne peut être le père biologique puisqu'elle a retenu Monsieur Q... A... comme ayant cette qualité. Elle ajoute alors que cet acte n'est pas probant en ce qu'il a désigné à tort comme autre père Monsieur F... N... car cela ne peut correspondre à la réalité. Par ce raisonnement, la cour retient donc que cet acte étranger serait probant dans sa première partie, quand il mentionne l'identité de Monsieur A... comme père,mais non probant dans sa deuxième partie quand il mentionne l'identité de Monsieur N... comme père. S'il est reconnu par la pratique de l'état civil et encouragé par la cour de cassation, de pouvoir transcrire partiellement un acte d'état civil sur les registres français en omettant les énonciations non conformes à la réalité au sens de l'article 47 du code civil, c'est à la condition de pouvoir démontrer lesquelles de ces énonciations sont bien fausses. La cour d'appel en l'espèce a opéré un choix de pure opportunité en décidant sans aucun élément probant que Monsieur A... était le père biologique. Si l'on peut comprendre qu'un refus de transcription totale de l'acte de naissance risque d'exposer la France à une éventuelle censure de la cour européenne des droits de l'homme sur le fondement de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, il convient aussitôt de relever qu'au contraire des différentes affaires soumises à la cour de Strasbourg el concernant des enfants nés cie gestation pour autrui avec au moins un lien de filiation biologique établi avec l'un des parents d'intention, au cas particulier, ce lien de filiation biologique,s'il existe, n'est pas démontré. La cour européenne des droits de l'homme,dans ses décisions ayant condamné la France, ne commande pas de reconnaître en France tous les actes de naissance d'enfants issus d'un processus de gestation pour autrui, mais de permettre aux enfants concernés de voir leur filiation biologique prise en compte indépendamment de l'origine de leur filiation. Dans son avis du 10 avril 2019, elle ne demande pas à la France de transcrire obligatoirement ces actes de naissance sur les registres d'état civil,mais d'offrir en droit interne une solution juridique aux parents d'intention pour rapidement établir leur filiation à l'égard des enfants concernés. Dans son arrêt du 4 octobre 2019 rendu en assemblée plénière dans une affaire emblématique, la cour de cassation a rendu un arrêt d'espèce, qui n'est pas transposable à la situation juridique présentement examinée,car il s'agissait d'un couple hétérosexuel marié et la filiation biologique du mari n'était pas discutée. En l'état actuel du droit positif, sauf intervention du législateur, il semble qu'aucune solution juridique ne permette de reconnaître la double filiation de l'enfant J... à l'égard de Messieurs A... ct N.... Il doit être constaté que les conditions fixées par l'article 47 du code civil et telles qu'appréciées par la cour de cassation rendent légalement impossible la transcription sollicitée. Alors que : Moyen unique de cassation, sur le non respect de l'article 47 du code civil L'article 47 du code civil énonce: tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas la réalité ». En ordonnant la transcription partielle de l'acte de naissance canadien sur les registres d'état civil français de J... A...-N... né le [...] à Kamloops, Colombie britannique (Canada) avec la seule identité de Monsieur Q... A..., alors qu'aucun lien de filiation n'est juridiquement établi à son égard, tout en précisant que cet acte n'est pas probant en ce qu'il mentionnait aussi l'identité de Monsieur F... N..., la cour d'appel de Rennes a méconnu les règles concernant la force probante des actes d'état civil étrangers. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 47 du code civil. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour MM. A... et N... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur F... V... H... N... né le [...] à Villeurbanne (France) de sa demande de transcription de l'acte de naissance de J... A...-N... né le [...] à Kamploops BC Colombie Britannique s'agissant de sa désignation comme parent de l'enfant, Aux motifs que concernant la désignation en second de Monsieur F... N... en qualité de parent, alors que la cour a retenu de Monsieur A... était le père de l'enfant, la désignation de Monsieur N... en tant que parent ne peut pas correspondre à la réalité biologique ce dont il résulte qu'alors qu'il n'est pas prétendu qu'un lien de filiation adoptif aurait été créé avec Monsieur N..., il apparaît qu'il résulte de l'acte lui-même que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité de sorte qu'il n'est pas probant et ne peut, s'agissant de cette désignation, être transcrit sur les registres de l'état civil français ; il n'y a pas violation du droit de respect de la vie privée et familiale de l'enfant garanti par l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que le refus de transcription de la filiation paternelle d'intention, lorsque l'enfant est né à l'étranger à l'issue d'une convention de gestation pour autrui, résulte de la loi et poursuit un but légitime en ce qu'il tend à la protection de l'enfant et de la mère porteuse et vise à décourager cette pratique, prohibée par les articles 16-7 et 16-9 du code civil ; les refus de transcription ne crée pas de discrimination injustifiée en raison de la naissance et ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'enfant au regard du but légitime poursuivi ; en effet l'accueil de l'enfant au sein du foyer constitué par son père et son compagnon n'est pas remis en cause par les autorités françaises, et ce dernier aura la possibilité de créer un lien de filiation avec l'enfant par un biais autre que la transcription, la seule production d'un jugement dont il n'est pas établi qu'il soit définitif étant insuffisante pour démontrer que la voie de l'adoption sera fermée au parent d'intention au motif qu'il figure en qualité de parent sur l'acte de naissance de l'enfant ; le jugement donc appel sera infirmé en ce qu'il a ordonné la transcription de l'acte de naissance de l'enfant, s'agissant de la désignation de Monsieur F... N... en qualité de parent ; 1° Alors que l'article 47 du code civil permet simplement d'écarter les actes d'état civil qui n'ont pas été établis conformément à la loi dont ils relèvent ; que leur régularité formelle doit être examinée au regard des conditions posées par la loi étrangère ; qu'en refusant la transcription de l'acte de naissance de l'enfant J... en ce qui concerne la désignation de Monsieur F... N... en qualité de parent, au motif que les faits déclarés ne correspondaient pas à la réalité biologique de l'enfant, sans examiner la régularité de l'acte de naissance au regard de la loi canadienne, dont il relevait, la Cour d'appel a violé l'article du code civil 2° Alors qu'il se déduit de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant, la circonstance que la naissance d'un enfant à l'étranger ait pour origine une convention de gestation pour autrui ne peut à elle seule faire obstacle à la transcription de l'acte de naissance du lien de filiation à l'égard du parent d'intention mentionnée dans un acte étranger laquelle doit intervenir au plus tard lorsque ce lien entre l'enfant et le parent d'intention s'est concrétisé ; qu'en énonçant que le refus de transcription de la filiation paternelle d'intention, lorsque l'enfant est né à l'étranger à l'issue d'une convention de gestation pour autrui, résulte de la loi et poursuit un but légitime en ce qu'il tend à la protection de l'enfant et de la mère porteuse et vise à décourager cette pratique prohibée, la cour d'appel a refusé la transcription de l'acte de naissance de l'enfant J... par des motifs fondés sur l'existence d'une convention de gestation pour autrui à l'origine de la naissance de l'enfant, et a violé l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales 3° Alors que l'adoption d'un enfant issu d'une gestation pour autrui, ne peut répondre aux exigences de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que si ses modalités permettent une décision rapide de manière à ce que l'enfant ne soit pas longtemps maintenu dans l'incertitude juridique quant à ce lien ; que le juge doit tenir compte de la situation fragilisée des enfants tant que la procédure est pendante et faire un examen concret de la situation de l'enfant ; qu'en énonçant que Monsieur N... aurait la possibilité de créer un lien de filiation avec l'enfant par un autre biais que la transcription, et qu'il n'était pas établi que la voie de l'adoption serait fermée, la Cour d'appel qui n'a pas procédé à un examen précis et concret de la situation de l'enfant , n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En présence d'une action aux fins de transcription de l'acte de naissance étranger de l'enfant, qui n'est pas une action en reconnaissance ou en établissement de la filiation, ni la circonstance que l'enfant soit né à l'issue d'une convention de gestation pour autrui ni celle que cet acte désigne le père biologique de l'enfant et un deuxième homme comme père ne constituent des obstacles à la transcription de l'acte sur les registres de l'état civil, lorsque celui-ci est probant au sens de l'article 47 du code civil
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CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Rejet Mme BATUT, président Arrêt n° 711 FS-P+B Pourvoi n° H 19-19.517 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020 M. M... C..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° H 19-19.517 contre l'arrêt rendu le 30 avril 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1 - 1), dans le litige l'opposant à l'Agent judiciaire de l'État, domicilié [...] , défendeur à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Gargoullaud, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. C..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'Agent judiciaire de l'État, et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Gargoullaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, M. Vigneau, Mme Bozzi, M. Acquaviva, Mmes Poinseaux, Guihal, conseillers, Mmes Mouty-Tardieu, Le Cotty, Azar, M. Buat-Ménard, Mme Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, Mme Marilly, avocat général référendaire, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 avril 2019), à l'occasion d'une information judiciaire, ouverte des chefs de diverses infractions commises au préjudice d'une entreprise de transport maritime de passagers, exploitée en dernier lieu par la Société des armateurs côtiers marseillais (la SACM) dont M. C... était le gérant, le juge d'instruction a, notamment, mis en examen ce dernier et procédé, le 21 mars 2006, à la saisie de navires. Par ordonnance du 18 avril 2006, confirmée en appel, il a refusé la restitution des navires et prescrit leur remise au service du Domaine en vue de leur aliénation. Le pourvoi en cassation formé par M. C... a été rejeté le 23 janvier 2007. Par arrêt partiellement infirmatif du 2 février 2011, la cour d'appel a condamné M. C... pour abus de confiance, abus de biens sociaux, faux, obtention indue de documents administratifs et extorsion de fonds, à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, cinq ans d'interdiction de l'activité de transport maritime, a prononcé la confiscation de navires et, renvoyant le prévenu des fins des poursuites exercées contre lui pour des faits commis à des dates couvertes par la prescription, a ordonné la restitution de cinq navires, dont quatre avaient été vendus entre temps par le service du Domaine. Le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt a été rejeté le 5 décembre 2012. 2. Invoquant un fonctionnement défectueux du service public de la justice résultant de la décision de saisir les navires finalement restitués, du défaut de gardiennage et d'entretien de ceux-ci ayant conduit à leur dépréciation, ainsi que des ventes réalisées à un prix inférieur à la valeur réelle, M. C... a assigné l'Agent judiciaire de l'Etat en réparation de ses préjudices, sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire. Examen des moyens Sur le premier moyen, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le second moyen Enoncé du moyen 4. M. C... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en indemnisation fondée sur le fonctionnement défectueux du service public de la justice, alors : « 1°/ que constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en refusant de constater que les magistrats en charge de l'information judiciaire avaient commis un ensemble de négligences caractérisant la faute lourde, la procédure de saisie des navires et de remise de ceux-ci aux fins d'aliénation ayant été validée par eux comme conforme aux intérêts de M. C..., tandis qu'en définitive, la réalité avait révélé que cette procédure avait, au contraire, fortement nuit à ses intérêts économiques et patrimoniaux, de sorte que ces mêmes magistrats avaient entaché leur décision d'une erreur manifeste d'appréciation, la cour d'appel a violé l'article L. 144-1 du code de l'organisation judiciaire ; 2°/ que constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en refusant de constater que les magistrats en charge de l'information judiciaire avaient commis une faute lourde, tandis qu'il s'est, en définitive, avéré qu'ils avaient commis, cumulativement, et une erreur d'appréciation factuelle sur les conséquences de la saisie et de l'aliénation par eux décidée, et une erreur de droit sur la prescription des infractions susceptibles de justifier une future confiscation des biens saisis, la cour d'appel a violé l'article L. 144-1 du code de l'organisation judiciaire ; 3°/ que l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ne peut être appréciée que dans la mesure où l'exercice des voies de recours n'a pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué ; qu'en l'espèce, en se fondant, cependant, sur la circonstance que M. C... avait engagé ces voies de recours préalables sans succès pour en conclure, paradoxalement, que son action en responsabilité devait donc être rejetée, la cour d'appel, qui s'est ainsi méprise sur la portée et les effets de l'exigence de l'exercice préalable des voies de recours par l'auteur d'une action en responsabilité sur le fondement de l'article L. 144-1 du Code de l'organisation judiciaire, a violé cette disposition ; 4°/ que constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en se fondant sur la considération, inopérante, tirée de ce qu'en l'absence d'utilisation des navires, s'ils restaient saisis sans naviguer, ceux-ci présentaient un risque de dévaluation, pour en conclure que la procédure décidée quant à leur saisie et à leur aliénation ne pouvait être critiquée comme non conforme aux intérêts du propriétaire et, partant, pour refuser de rechercher, comme elle y était invitée, si ces décisions du magistrat instructeur ne procédaient pas d'une grave erreur d'appréciation quant à leurs conséquences économiques et pécuniaires pour M. C..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ; 5°/ que constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en se fondant sur les considérations, inopérantes, tirées de ce que la saisie ordonnée l'avait été conformément aux textes applicables et de ce que la Direction des domaines était compétente au regard, également, des textes applicables, pour en conclure que la procédure décidée et mise en oeuvre par le magistrat instructeur n'était pas fautive, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ses décisions ne procédaient pas d'une grave erreur d'appréciation quant à leurs conséquences économiques et pécuniaires pour M. C..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ; 6°/ que la responsabilité civile s'encourt dès lors que le dommage allégué se trouve lié à la faute établie par un rapport de causalité certain ; qu'en l'espèce, en se fondant sur les circonstances, inopérantes, tirées du rôle qu'avaient pu jouer les capitaines et marins, pour la période du 21 mars au 18 avril 2006, puis la Direction des domaines, pour la période postérieure, pour refuser de constater l'existence du lien de causalité certain qui existait pourtant entre les erreurs d'appréciation qu'avaient commises, en amont, les magistrats en charge de l'instruction à travers leur décision de saisir et de faire aliéner les navires, et les préjudices économiques et pécuniaires qui, en aval, en étaient résulté pour M. C..., la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien, 1240 nouveau, du code civil, ensemble l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire. » Réponse de la Cour 5. La responsabilité de l'Etat en raison d'un dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice ne peut être engagée que sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire, à l'exclusion des dispositions de droit commun prévues par le code civil. 6. Il résulte de ce dernier texte que l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice, que cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice et que constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi. 7. Hors le cas de dommages causés aux particuliers du fait d'une violation manifeste du droit de l'Union européenne par une décision d'une juridiction nationale statuant en dernier ressort, l'action en responsabilité de l'Etat ne saurait avoir pour effet de remettre en cause une décision judiciaire, en dehors de l'exercice des voies de recours. 8. En premier lieu, l'arrêt retient à bon droit que le grief, tiré de ce que les saisies ont été pratiquées à l'occasion d'une procédure qui a donné lieu à une relaxe partielle pour prescription, relève de la critique de décisions rendues par le juge d'instruction le 18 avril 2006, la chambre de l'instruction le 14 juin 2006 et la Cour de cassation le 23 janvier 2007, de sorte qu'un tel moyen, sauf à instaurer une nouvelle voie de recours distincte de celle prévue par les dispositions légales, est inopérant. 9. En second lieu, l'arrêt énonce que la procédure de saisie et de remise des navires aux fins d'aliénation a été validée par les magistrats en charge de l'instruction comme conforme aux intérêts de M. C.... 10. De ces énonciations et appréciations, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les quatrième, cinquième et sixième branches, la cour d'appel a exactement déduit que les décisions juridictionnelles en cause ne pouvaient engager la responsabilité de l'Etat. 11. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. C... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. C.... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré M. M... C... irrecevable en sa demande relative au navire dénommé « Mistral II » ; Aux motifs que : « Sur la qualité à agir de M. C... en ce qui concerne le navire Mistral 2 : [ ] l'appelant fait de ce chef état de ce qu'il est administrateur égalitaire du groupement d'intérêt économique dit GACM et qu'en cette qualité il serait propriétaire à 50 % du navire. Mais [ ] qu'il ne démontre pas sa qualité personnelle de propriétaire du navire et que sa qualité d'administrateur égalitaire qui ne lui confère que le pouvoir de représenter le groupement dans ses rapports avec les tiers en application de l'article 8-3 des statuts, ne lui donne précisément pas cette qualité à concurrence de 50 % ainsi qu'il le prétend. Que l'acte de francisation est établi au nom du groupement, que la restitution du navire avait été demandée devant le juge d'instruction par le seul groupement et qu'elle a également été ordonnée par la cour dans un arrêt désormais définitif au même groupement, le courrier de l'administration fiscale et celui du parquet général du 8 juillet 2013 étant inopérants à mettre à néant ces observations ainsi que l'analyse ainsi faite, étant observé qu'il n'est nullement allégué que le GACM aurait été dissous ou liquidé ; [ ] que M. C... n'est donc pas recevable en la demande formulée pour le navire Mistral 2, étant souligné que dans le dispositif de ses conclusions qui seul lie la cour, il présente ses demandes en paiement, à titre personnel et en son seul nom, pour tous les navires, et qu'il n'y revendique donc nullement l'indemnisation du navire dénommé Mistral 2 en sa qualité de représentant du GACM ; [ ] que le jugement sera de ce chef réformé » ; Alors que le juge ne doit pas dénaturer les éléments de la cause ; qu'en l'espèce, en énonçant qu'il n'était nullement allégué que le GIE GACM aurait été dissous ou liquidé, et ce tandis que le jugement de première instance renseignait que ce même GACM avait été dissous en 2000 et que l'exploitation des lignes maritimes s'était, alors, poursuivie dans le cadre de la société SACM (jugement, p. 3), d'une part, et que, dans ses conclusions, M. M... C... indiquait que cette ladite SACM avait, quant à elle, été dissoute dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire décidée par un jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 22 mai 2006 (conclusions récapitulatives, p. 16), d'autre part, la cour d'appel a violé le principe sus-énoncé. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. M... C... de sa demande en indemnisation fondée sur le fonctionnement défectueux du service public de la justice ; Aux motifs propres que : « Sur la faute lourde de l'Etat : [ ] M. C... prétend avoir subi un ensemble de négligences caractérisant la faute lourde, soulignant que la procédure de saisie et de remise aux fins d'aliénation a été validée comme conforme à ses intérêts et que cependant, la réalité a révélé que la procédure avait été contraire à ses intérêts. [ ] que le premier grief fait par M. C... relativement au fonctionnement défectueux du service public de la justice consiste à affirmer que les saisies réalisées l'ont été malgré la prescription des infractions alors qu'une simple appréciation juridique aurait permis d'éviter ses conséquences préjudiciables ; que la prescription était avérée en ce qui concerne l'infraction poursuivie, fondement des saisies ; qu'il a été à juste titre relaxé par la cour d'appel pour les délits de faux et usage de faux ainsi que d'obtention indue de documents administratifs concernant les navires qui lui ont donc été, à bon droit, restitués ; que la juridiction aurait dû, par précaution, se garder de procéder aux saisies puisque les infractions se sont avérées prescrites ; qu'il n'a pu que prendre acte de la saisie et que l'aliénation sans titre définitif est une mesure de dépossession du droit de propriété, droit constitutionnel. Mais [ ] qu'en l'absence d'utilisation des bateaux, il n'est pas contesté que s'ils restaient saisis sans naviguer, ils présentaient un risque de dévaluation ; qu'en ce sens la procédure décidée quant à la saisie et à l'aliénation ne peut être critiquée comme non conforme aux intérêts du propriétaire ; Que s'agissant, par ailleurs, du grief tiré de ce que les saisies ont été pratiquées dans le cadre d'une procédure qui finalement a donné lieu à une relaxe pour prescription, le moyen n'est pas opérant dès lors qu'il relève de la critique des décisions rendues par le juge d'instruction le 18 avril 2006, confirmées par la chambre de l'instruction le 14 juin 2006 et de la décision de rejet de la Cour de Cassation du 23 janvier 2007, qu'il ne peut être exercé une voie de recours autre contre les décisions ainsi critiquées que celle prévue par les dispositions légales et qu'il n'est, en outre, pas démontré par l'appelant qu'il ait précisément saisi de ce moyen les juridictions qui ont statué à ce sujet ; que les décisions rendues sont particulièrement motivées par rapport aux exigences des articles 99 et suivants du code de procédure pénale, l'ordonnance du juge d'instruction ayant notamment relevé que la restitution pouvait être refusée lorsque la confiscation est prévue par la loi, ce qui est le cas de l'espèce, que les navires étaient exposés à un risque de continuation des malversations et qu'ils étaient nécessaires à la réalisation des infractions visées par l'information ; que la chambre de l'instruction a également retenu que la dépréciation ne manquerait pas de se produire en cas de prolongation vraisemblable de la procédure d'instruction et que l'aliénation des navires apparaissait dans ces conditions conforme à l'intérêt des requérants ; Qu'enfin, il ne peut être considéré qu'il y a une atteinte illégitime au droit de propriété dès lors que les saisies et ventes ont été pratiquées en application des textes susvisés ; [ ] que ces moyens seront donc rejetés. [ ] que le deuxième grief consiste dans le défaut d'entretien et de gardiennage des navires sur la période du 21 mars 2006 au 18 avril 2006. Que l'appelant souligne à cet égard qu'il n'a désigné les capitaines et marins que pour les besoins du transport des navires et pour le représenter dans les formalités judiciaires et non pas en qualité de gardiens ; que la mention portée au procès-verbal de saisie émane seulement de l'officier de police judiciaire ; que de surcroît, la société ayant été liquidée, ses salariés ont été licenciés et qu'ils ne pouvaient plus effectuer aucune activité pour le compte de qui que ce soit ; que son contrôle judiciaire lui interdisait d'exercer toute activité de gestion et qu'il ne pouvait donc garder les navires sous main de justice ; que d'ailleurs, les scellés sous main de justice sont incompatibles avec la désignation d'un gardien privé. Mais [ ] que pour la période de gardiennage expirant à la date de remise au service des domaines en vue de leur aliénation, M. C... a signé, les 17 et 21 mars 2006, un procès-verbal par lequel les marins et capitaines de navires saisis étaient désignés non seulement pour assurer le pilotage des navires et le représenter dans les formalités judiciaires, mais également en qualité de gardiens des scellés, pour s'assurer du maintien à flot des navires et répondre aux demandes de sécurité des autorités portuaires ; que ce procès-verbal était signé tant par M. C... que par les capitaines et marins désignés ; qu'ainsi, M. C... a bien accepté que ce soient les marins et capitaines des navires concernés qui assurent, ainsi qu'il y est spécifiquement mentionné, le maintien à flot des navires et répondent aux demandes de sécurité des autorités portuaires ; que ceux-ci ont par ailleurs également accepté la mission qui leur était confiée ; [ ] que la circonstance de l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société SACM est sans incidence sur les obligations ainsi définies, lesquelles sont indépendantes du lien de travail ayant pu unir les marins à cette société ; que l'interdiction d'exercer une activité de gestion est également inopérante sur l'obligation qui pesait sur M. C..., mis en examen dans le cadre de cette affaire, et sur les personnes qu'il avait désignées pour exécuter cette obligation. Que la survenance des dégradations pendant ce laps de temps n'est enfin pas démontrée vu la date des procès-verbaux dressés à ce sujet et ce même si le commandant du Port a avisé le juge d'instruction le 1er avril 2006 de ce qu'il déplorait l'absence d'un gardien permanent et qu'il faisait toute réserve sur la préservation des vedettes sans au demeurant en imputer le grief au service public de la justice. [ ] que pour la période postérieure, la responsabilité du service public de la justice qui a transféré la garde des navires au service des Domaines en les lui remettant pour aliénation ne peut être recherchée, étant à cet égard observé que le service des Domaines n'exerce nullement sa mission sous le contrôle de l'autorité judiciaire, mais de façon indépendante de celle-ci ; qu'il est donc seul responsable de l'exécution de la mission qui lui a été ainsi confiée, le fait que l'ordonnance le désignant mentionne qu'il doit être rendu compte au juge d'instruction s'entendant, non pas de l'exécution de la mission devant conduire à l'aliénation qui s'exerce sous sa seule responsabilité, mais de son seul résultat, la confiscation judiciaire ayant pour effet de déplacer le gage constitué par la saisie des bateaux sur le prix résultant de leur aliénation ; que le service public de la justice ne peut, dans ces conditions, s'immiscer dans la vente des navires et la garde qui l'a précédée ; qu'enfin, dès lors que le service des Domaines est légalement investi d'une telle mission, par ailleurs donnée en application des textes du code de procédure pénale, aucun grief ne peut, non plus, être fait relativement à la décision de remettre les navires à ce service sans s'assurer qu'il était en capacité de céder les biens pour un prix correspondant à leur valeur telle que prétendue. Que la question de la compétence judiciaire pour apprécier la responsabilité du service des Domaines n'a pas à interférer avec celle de détermination des responsabilités en cas de faute reprochée aux Domaines et commise dans l'exécution d'une mission, même si elle lui a été confiée par une décision du service public de la justice. [ ] par suite, qu'aucun dysfonctionnement ne pouvant être retenu quant aux décisions juridictionnelles et qu'aucune faute ne pouvant être considérée comme susceptible de constituer une faute lourde imputable au fonctionnement défectueux du service de la justice postérieurement à la décision du juge d'instruction confiant les navires pour aliénation au service des Domaines, l'appelant sera débouté des fins de son recours et que le jugement sera confirmé, sauf en ce qui concerne sa recevabilité à agir relativement au bateau dénommé Mistral 2 » ; Et aux motifs éventuellement adoptés que : « Sur les demandes de M... C... : [ ] aux termes de l'article L 141-1 du Code de l'organisation judiciaire, l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice. Sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice ; [ ] que M... C... reproche en premier lieu au service public de la justice d'avoir fait une appréciation juridique erronée de la prescription des infractions en lien avec la saisie des navires, constatée par jugement rendu le 16 novembre 2009 par le tribunal correctionnel de Marseille, confirmé en appel sur ce point le 2 février 2011 ; [ ] néanmoins qu'il est constat qu'une décision juridictionnelle ne peut être critiquée que par le seul exercice des voies de recours prévues par la loi ; qu'en l'espèce, l'ordonnance refusant la restitution des navires rendue par le juge d'instruction le 18 avril 2006, a été confirmée par la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 14 juin 2006 ; que la Cour de cassation a enfin rejeté le pourvoi selon arrêt du 23 janvier 2007 ; Qu'au demeurant la relaxe partielle intervenue par la suite sur le fondement de la prescription de certaines infractions n'emporte pas démonstration que l'ensemble des décisions ayant refusé la restitution des navires ont fait une application erronée de l'article 99-2 du Code de procédure pénale ; qu'au contraire ces décisions sont parfaitement motivées sur le fondement de ce texte au regard de leur lien avec les infractions reprochées mais également du risque de réitération des infractions en cas de restitution ; Qu'il s'ensuit qu'aucun manquement ne saurait être retenu à l'encontre du service public de la justice du fait d'une application erronée de la loi ; [ ] que s'agissant du défaut d'entretien et de gardiennage, il n'est pas contestable que le service des Domaines relève du ministère de l'économie et des finances ; qu'ainsi aucune faute du service public de la justice ne saurait être recherchée du fait de la dégradation des navires à compter de leur aliénation avec remise au service des Domaines par arrêt de la chambre de l'instruction en date du 14 juin 2006 qu'il en est de même de la vente desdits navires à un prix que le demandeur estime très inférieur à leur valeur réelle, la procédure d'aliénation ayant été mise en oeuvre par le service des Domaines et non sous la responsabilité du service public de la justice ; Que pour la période comprise entre la saisie des navires effectuée le 21 mars 2006 et le 14 juin 2006, M... C... soutient que la dégradation des navires est liée à un défaut de surveillance et de gardiennage de ceux-ci par le service de la justice ; que néanmoins c'est à juste titre que l'agent judiciaire de l'Etat fait observer que le procès-verbal de saisie des navires en date du 21 mars 2006 mentionne d'une part que C... prend acte qu'il doit répondre à toutes injonctions qui pourraient lui être faites par les autorités du Port autonome de Marseille et relatives à la sécurité de ses navires, et d'autre part qu'il est notifié aux capitaines U..., Q..., N..., R... et O..., ainsi qu'au marin T..., qu'ils sont nommés gardiens des scellés, mission qu'ils acceptent, et doivent s'assurer du maintien à flot des navires et répondre aux demandes de sécurité des autorités portuaires ; Que M... C... ne convainc pas lorsqu'il soutient que la mission confiée à ces hommes consistait seulement à assurer le pilotage des navires jusqu'au Port de Marseille, les termes du procès-verbal ainsi rappelés étant suffisamment clairs pour considérer qu'il était chargé, avec les capitaines et marins désignés par ses soins, du gardiennage ainsi que de la sécurité des navires saisis ; Que par ailleurs et à titre surabondant, les constats d'huissier constatant les dégradations ont été dressés les 10 et 12 avril 2007 et le 16 juillet 2013, soit dix mois après leur remise au service des Domaines, de sorte qu'aucune dégradation n'est établie avant le 14 juin 2006 ; [ ] qu'il résulte de ce qui précède que si la dégradation des navires ainsi que leur vente à des prix inférieurs à leur valeur réelle sont certes regrettables et ont pu causer un préjudice financier non-négligeable au demandeur, il n'en demeure pas moins que ce préjudice ne peut être considéré comme consécutif à des manquements du service public de la justice susceptibles de recevoir la qualification de faute lourde ; Qu'il y a lieu en conséquence de débouter M... C... de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation » ; 1. Alors que, d'une part, constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en refusant de constater que les magistrats en charge de l'information judiciaire avaient commis un ensemble de négligences caractérisant la faute lourde, la procédure de saisie des navires et de remise de ceux-ci aux fins d'aliénation ayant été validée par eux comme conforme aux intérêts de M. M... C..., tandis qu'en définitive, la réalité avait révélé que cette procédure avait, au contraire, fortement nuit à ses intérêts économiques et patrimoniaux, de sorte que ces mêmes magistrats avaient entaché leur décision d'une erreur manifeste d'appréciation, la cour d'appel a violé l'article L. 144-1 du Code de l'organisation judiciaire ; 2. Alors que, d'autre part, constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en refusant de constater que les magistrats en charge de l'information judiciaire avaient commis une faute lourde, tandis qu'il s'est, en définitive, avéré qu'ils avaient commis, cumulativement, et une erreur d'appréciation factuelle sur les conséquences de la saisie et de l'aliénation par eux décidée, et une erreur de droit sur la prescription des infractions susceptibles de justifier une future confiscation des biens saisis, la cour d'appel a violé l'article L. 144-1 du Code de l'organisation judiciaire ; 3. Alors que, par ailleurs, l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ne peut être appréciée que dans la mesure où l'exercice des voies de recours n'a pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué ; qu'en l'espèce, en se fondant, cependant, sur la circonstance que M. M... C... avait engagé ces voies de recours préalables sans succès pour en conclure, paradoxalement, que son action en responsabilité devait donc être rejetée, la cour d'appel, qui s'est ainsi méprise sur la portée et les effets de l'exigence de l'exercice préalable des voies de recours par l'auteur d'une action en responsabilité sur le fondement de l'article L. 144-1 du Code de l'organisation judiciaire, a violé cette disposition ; 4. Alors qu'en outre, constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en se fondant sur la considération, inopérante, tirée de ce qu'en l'absence d'utilisation des navires, s'ils restaient saisis sans naviguer, ceux-ci présentaient un risque de dévaluation, pour en conclure que la procédure décidée quant à leur saisie et à leur aliénation ne pouvait être critiquée comme non conforme aux intérêts du propriétaire et, partant, pour refuser de rechercher, comme elle y était invitée, si ces décisions du magistrat instructeur ne procédaient pas d'une grave erreur d'appréciation quant à leurs conséquences économiques et pécuniaires pour M. M... C..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire ; 5. Alors que, de plus, constitue une faute lourde qui engage la responsabilité de l'Etat du fait du service public de la justice toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service public à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, en se fondant sur les considérations, inopérantes, tirées de ce que la saisie ordonnée l'avait été conformément aux textes applicables et de ce que la Direction des domaines était compétente au regard, également, des textes applicables, pour en conclure que la procédure décidée et mise en oeuvre par le magistrat instructeur n'était pas fautive, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ses décisions ne procédaient pas d'une grave erreur d'appréciation quant à leurs conséquences économiques et pécuniaires pour M. M... C..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire ; 6. Alors qu'enfin, la responsabilité civile s'encourt dès lors que le dommage allégué se trouve lié à la faute établie par un rapport de causalité certain ; qu'en l'espèce, en se fondant sur les circonstances, inopérantes, tirées du rôle qu'avaient pu jouer les capitaines et marins, pour la période du 21 mars au 18 avril 2006, puis la Direction des domaines, pour la période postérieure, pour refuser de constater l'existence du lien de causalité certain qui existait pourtant entre les erreurs d'appréciation qu'avaient commises, en amont, les magistrats en charge de l'instruction à travers leur décision de saisir et de faire aliéner les navires, et les préjudices économiques et pécuniaires qui, en aval, en étaient résulté pour M. M... C..., la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien, 1240 nouveau, du Code civil, ensemble l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire.
Il résulte de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire que l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice, que cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice et que constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi. Hors le cas de dommages causés aux particuliers du fait d'une violation manifeste du droit de l'Union européenne par une décision d'une juridiction nationale statuant en dernier ressort, l'action en responsabilité de l'Etat ne saurait avoir pour effet de remettre en cause une décision judiciaire, en dehors de l'exercice des voies de recours
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CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Cassation partielle Mme BATUT, président Arrêt n° 712 FS-P+B Pourvoi n° F 19-15.353 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020 M. K... W..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° F 19-15.353 contre l'arrêt rendu le 20 février 2019 par la cour d'appel de Nîmes (3e chambre famille), dans le litige l'opposant à Mme S... M..., épouse W..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation. Mme M... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Les demandeurs aux pourvois principal et incident invoquent, chacun, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent , avocat de M. W..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme M..., et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, M. Vigneau, Mme Bozzi, M. Acquaviva, Mmes Poinseaux, Guihal, conseillers, Mmes Mouty-Tardieu, Le Cotty, Gargoullaud, Azar, Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, Mme Marilly, avocat général référendaire, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 20 février 2019), un jugement a prononcé le divorce de M. W... et de Mme M..., mariés sous le régime de la séparation de biens. Des difficultés sont nées pour le règlement de leurs intérêts patrimoniaux. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche Enoncé du moyen 2. M. W... fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement de la somme de 74 723,19 euros à Mme M... au titre d'une créance entre époux, alors « que le caractère irréfragable de la présomption de contribution aux charges du mariage, au jour le jour, instituée par le contrat de mariage, interdit aux époux de prouver que l'un ou l'autre d'entre eux ne se serait pas acquitté de son obligation ; qu'il en résulte qu'un époux ne peut se prétendre créancier de l'autre au titre du remboursement d'un emprunt bancaire contracté pour la construction du logement familial, lequel participe de l'exécution de l'obligation de contribuer aux charges du mariage ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motifs pris que le caractère irréfragable de cette clause n'interdit pas à un époux de faire la démonstration de ce que sa participation a excédé ses facultés contributives" et que si la sur-contribution est démontrée, elle a pour effet de rendre la clause inefficace", la cour d'appel a violé l'article 214 du code civil, ensemble l'article 1537 du même code. » Réponse de la Cour Vu les articles 214 et 1537 du code civil : 3. Il résulte de ces textes que lorsque les juges du fond ont souverainement estimé irréfragable la présomption résultant de ce que les époux étaient convenus, en adoptant la séparation de biens, qu'ils contribueraient aux charges du mariage à proportion de leurs facultés respectives et que chacun d'eux serait réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu'ils ne seraient assujettis à aucun compte entre eux ni à retirer à ce sujet aucune quittance l'un de l'autre, un époux ne peut, au soutien d'une demande de créance, être admis à prouver l'insuffisance de la participation de son conjoint aux charges du mariage pas plus que l'excès de sa propre contribution. 4. Pour accueillir la demande de Mme M... tendant à se voir reconnaître titulaire d'une créance au titre du financement par des deniers personnels de la construction d'un immeuble ayant constitué par la suite le domicile conjugal, et ce, sur un terrain appartenant à son mari, après avoir relevé que le contrat de mariage des époux prévoit qu'ils contribueront aux charges du mariage à proportion de leurs facultés respectives et que chacun d'eux sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu'ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux ni à retirer à ce sujet aucune quittance l'un de l'autre, l'arrêt retient, d'une part, que le caractère irréfragable de cette clause, dont se prévaut M. W..., n'interdit pas à un époux de faire la démonstration de ce que sa participation a excédé ses facultés contributives, d'autre part, que si la sur-contribution est démontrée, elle a pour effet de rendre la clause inefficace. 5. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Et sur le moyen du pourvoi incident Enoncé du moyen 6. Mme M... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à ce que M. W... soit condamné à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de prestation compensatoire, alors « que la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné M. W... à payer à Mme M... la somme de 74 723,19 euros au titre d'une créance entre époux entraînera nécessairement la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a débouté Mme M... de sa demande de versement d'une prestation compensatoire, dès lors que pour statuer ainsi, la cour d'appel s'est fondée sur la créance de 74 723,19 euros dont M. W... était débiteur envers Mme M..., en application de l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 624 du code de procédure civile : 7. Il résulte de ce texte que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision cassée se trouvant dans un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire. 8. La cassation sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt rejetant la demande de prestation compensatoire de Mme M..., qui se trouve avec elle dans un lien de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. W... au paiement de la somme de 74 723,19 euros à Mme M... au titre d'une créance entre époux et rejette la demande de prestation compensatoire de Mme M..., l'arrêt rendu le 20 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Condamne Mme M... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. W..., demandeur au pourvoi pricipal. Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné Monsieur K... W... au paiement de la somme de 74.723,19 € (soixante-quatorze mille sept cent vingt-trois euros et dix-neuf centimes) à Madame S... M... au titre de la créance entre époux ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la créance entre époux revendiquée par Mme M..., conformément aux dispositions de l'ancien article 267 du code civil applicables à toute demande introductive d'instance antérieure au 1er janvier 2016, le juge du divorce peut statuer sur les désaccords persistants entre les époux, à la demande de l'un ou l'autre, si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement de l'article 255 10° du code civil contient des informations suffisantes ; qu'il n'est pas contesté que le procès-verbal de dires et de difficultés établi le 23 septembre 2014 par Maître V..., notaire, qui avait été désigné par le magistrat conciliateur sur le fondement de l'article 255 10° du code civil, contient les informations suffisantes pour permettre qu'il soit statué sur le désaccord opposant les parties quant à la créance revendiquée par Mme M... à l'encontre de M. W... au titre du financement par des deniers personnels de la construction d'un immeuble à D... ayant constitué par la suite le domicile conjugal, et ce sur un terrain appartenant au mari ; qu'il n'est pas plus discuté que, par le principe de l'accession, l'immeuble construit à. D... est un bien personnel de l'époux ; que la construction de l'immeuble a été réalisée grâce à deux prêts contractés par les époux auprès du Crédit Mutuel, les 31 janvier 2003 et le 29 juin 2006, le second, après rachat du premier, d'un montant en capital de 117.300 euros, sur 180 mois jusqu'au 15 juin 2021 ; que le premier prêt a été remboursé par prélèvements mensuels du 31 janvier 2003 au 31 mai 2006 de 1.094,64 euros, et le second à compter de juillet 2016 par prélèvements mensuels de 819,26 euros ; que le capital restant dû au 3 avril 2013 s'élevait à 63.339,35 euros ; qu'il est en outre constant que ces prêts ont été remboursés par prélèvements sur un compte joint des époux ouvert dans le même établissement bancaire ; que sur la nature des fonds ayant permis le remboursement des prêts immobiliers : en matière de régime séparatiste, les sommes figurant au compte joint ouvert au nom des deux époux sont réputées indivises, conformément aux dispositions de l'article 1538 alinéa 3 du code civil ; que cette présomption peut être combattue par tous moyens ; qu'en l'espèce, Mme M... rapporte la preuve de ce qu'elle a alimenté le compte joint, jusqu'en juin 2013 inclus, en y versant d'une part les loyers provenant d'un bien personnel (maison d'habitation reçue par donation de ses parents le 11 mars 2002) et d'autre part les fonds que lui remettaient ses parents, provenant de loyers d'une maison d'habitation leur appartenant et dont ils lui ont ensuite fait donation le 13 décembre 2011 ; que l'analyse du compte commun est aisée dans la mesure où le relevé établit que ce compte ne comportait au débit que les échéances du prêt et cotisations d'assurance afférentes, et au crédit des versements de montant sensiblement identique en tout cas pour la période comprise entre mars 2015 et juin 2013, ce qui permet une traçabilité des fonds ; que pour la période allant de janvier 2006 à juin 2013, les versements mensuels ont eu lieu par virements de 369,69 euros et 459,80 euros (soit 829,49 euros), alors que le montant de la mensualité du prêt était de 787,12 euros outre 32,14 euros au titre des cotisations d'assurance, soit 819,26 euros ; que pour la période antérieure, de janvier 2003 à janvier 2006, les versements ont été réalisés par chèques de montants variables (sommes de 999,69 euros, 1.100,69 euros, 1.129,49 euros, etc) ; que selon Mme M..., ces chèques correspondaient aux deux loyers de 369,69 et 459,80 euros qu'elle retirait de biens personnels ; qu'au cours de la seconde période, de janvier 2006 à juin 2013, le montant pratiquement égal entre les versements mensuels de fonds personnels à l'épouse sur le compte joint et les échéances du prêt prélevées chaque mois ne laisse aucun doute quant au remboursement du prêt par lesdits fonds ; que pour la période antérieure, comme retenu à juste titre par le tribunal, si de mars à décembre 2005 inclus, les chèques déposés mensuellement pour la somme de 829,49 euros correspondent sans discussion possible au montant des loyers perçus par Mme M... et constituent donc des fonds personnels, en revanche l'absence de concordance entre les montants des loyers par elle perçus et des chèques encaissés sur le compte joint de janvier 2003 à février 2005 ne permet pas de s'opposer au principe selon lequel les sommes portées au compte joint sont présumées indivises ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la somme totale versée par l'épouse sur le compte joint, provenant de ses fonds personnels, et ayant permis le remboursement du crédit immobilier, s'établit au montant de 84.522,96 euros ; que sur la créance alléguée : s'agissant du fondement juridique de la créance, Mme M... fait valoir qu'en remboursant les crédits immobiliers, elle a consenti un prêt à son époux, celui-ci lui étant redevable de la restitution des sommes prêtées ; qu'elle ne rapporte cependant pas la preuve de l'existence du prêt, étant rappelé que cette preuve est soumise aux dispositions de l'article 1359 du code civil qui prévoient que "l'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique", ladite valeur étant fixée à 1.500 euros ; qu'elle ne verse aucun écrit constatant le prêt allégué, ni n'évoque d'impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit ; que c'est donc à juste titre que le tribunal a rejeté l'analyse de Mme M... relative à un prétendu prêt ; que c'est par ailleurs à bon droit que le tribunal a examiné si les paiements effectués par l'épouse pouvaient s'analyser ou non comme constituant une contribution aux charges du mariage excessive de la part de celle-ci ; que de jurisprudence désormais constante, au cas de dépenses d'investissement dans le logement de la famille, qu'elles concernent un bien indivis ou la propriété personnelle d'un époux (cf à cet égard l'arrêt de la Cour de cassation, Civ. 1re, 1er avril 2015, N° 14-13795), l'époux qui entend solliciter une créance au titre de celles-ci doit rapporter la preuve de sa sur-contribution aux charges du mariage, les juges du fond ayant à charge d'apprécier si la clause du contrat de mariage relative à la contribution aux dites charges interdit ou non de prouver une souscontribution du conjoint n'ayant pas honoré sa part des dettes ou une surcontribution du solvens ; qu'en l'espèce, l' article 2 du contrat de mariage des époux prévoit que "Les époux contribueront aux charges du mariage à proportion de leurs facultés respectives. Chacun d'eux sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu'ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux ni à retirer à ce sujet aucune quittance l'un de l'autre." ; que le caractère irréfragable de cette clause, dont se prévaut l'appelant, n'interdit cependant pas à un époux de faire la démonstration de ce que sa participation a excédé ses facultés contributives (Civ. 1re, 3 octobre 2018, N° 17-25.858 ; Civ. 1re, 17 octobre 2018, N° 17-18.748) ; qu'en effet, si la sur-contribution est démontrée, elle a pour effet de rendre la clause inefficace ; que chacun des époux prétend avoir assumé seul les charges courantes de l'ensemble du ménage (taxes et impôts divers, éducation des enfants, charges afférentes à l'entretien de la maison), sans pour autant en justifier ; que déjà les premiers juges avaient relevé qu'aucune des parties ne produisait d'informations précises quant aux dépenses de la vie commune supportées par chacune d'elles ; qu'en conséquence, comme l'a à juste titre décidé le tribunal, il doit être considéré que chacun des époux a assumé, à proportion de ses facultés contributives, les dépenses courantes du ménage ; que le jugement entrepris a également retenu, sans que les parties ne critiquent cette analyse, que, à l'examen des bilans comptables de Mme M... dans le cadre de son activité agricole et des résultats agricoles déclarés par M. W... qui bénéficiait en outre de revenus en tant que gérant associé et de revenus fonciers, les ressources globales mensuelles des époux s' élevaient à 6.791 euros, dont 61 % fournies par le mari et 39 % fournies par l'épouse ; que le tribunal en a justement déduit que : - la prise en charge exclusive par l'épouse des mensualités du crédit immobilier souscrit pour l'édification du domicile conjugal, bien personnel de l'époux, était manifestement excessive dès lors que les revenus mensuels de ce dernier (4.146 euros en moyenne) étaient nettement supérieurs à ceux de l'épouse (1.815 euros en moyenne), et que les charges courantes du ménage étaient assumées par chacun à proportion de ses facultés, - compte tenu de ce que Mme M... avait bénéficié de la jouissance du bien immobilier sur la période de remboursement du prêt immobilier par ses deniers personnels, il y avait lieu de considérer que chacun des époux aurait dû contribuer à hauteur de sa faculté contributive au remboursement du prêt, M. W... à hauteur de 61% et Mme M... à hauteur de 39 %, de sorte que l'époux aurait dû assumer le remboursement de crédit à hauteur de 51.559 euros (61 % de 84.522,96 euros) ; Que les premiers juges ont également à bon droit procédé au calcul de la créance en faisant application des dispositions de l'article 1543 du code civil qui renvoient aux dispositions de l'article 1479, renvoyant elles-mêmes à celles de l'article 1469 alinéa 3, soit selon la règle du profit subsistant, sur la base de l'évaluation de la plus-value réalisée par le GVEN (170.000 euros) ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné M. W... à payer à Mme M... la somme de 74.723,19 euros. » ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « sur la liquidation du régime matrimonial, chacun des époux formule une proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux, afin de satisfaire aux exigences de l'article 257-2 du code civil ; que l'article 268 du code civil précise que les époux peuvent soumettre à l'homologation du juge des conventions réglant tout ou partie des conséquences du divorce ; qu'à défaut d'un règlement conventionnel par les époux, l'article 267 du code civil impose au juge d'ordonner en prononçant le divorce, la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux ; que lors de l'audience de conciliation du 3 avril 2013, les époux ont donné leur accord pour confier à Maître C... V..., notaire à BEAUMES DE VENISE (VAUCLUSE), l'élaboration d'un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager sur le fondement de l'article 255 10° du Code civil ; que Maître C... V... a dressé un procès-verbal de dires et de difficultés en date du 23 septembre 2014 ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'ancien article 267 du Code civil s'appliquant à toute demande introductive d'instance antérieure au 1er janvier 2016, le juge du divorce peut statuer sur les désaccords persistants entre les époux à la demande de l'un ou l'autre des époux si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement du 10° de l'article 255 du Code civil contient des informations suffisantes ; que dans le cadre de la présente instance, Madame S... M... entend se prévaloir d'une créance à l'égard de son époux compte tenu du remboursement par ses fonds propres du crédit souscrit pour l'édification d'une construction sur le terrain propre de Monsieur K... W... ; que ce dernier s'oppose au principe de cette créance aux motifs notamment qu'il serait de jurisprudence constante que les règlements du prêt immobilier par un époux, marié sous un régime séparatiste, pour permettre la construction du domicile conjugal participent de l'exécution de son obligation aux charges du mariage ; qu'au regard des désaccords persistants sur ce point ente les époux et des informations suffisantes qui figurent dans le procès verbal de difficultés, il y a lieu de se prononcer sur le sort de la créance sollicitée par Madame S... M... au titre du financement par des deniers propres de l'immeuble propre de son époux ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que Monsieur K... W... a reçu par donation un terrain situé à D... parcelles [...] et [...] et que la maison d'habitation édifiée sur ce terrain constitue par le principe de l'accession un bien propre de l'époux ; qu'au cours du mariage, afin d'édifier une construction sur le terrain appartenant en propre à Monsieur K... W..., les époux ont souscrit un premier contrat de prêt du 31 janvier 2003 au 31 mai 2006 et un nouveau contrat de prêt au 23 juin 2006 auprès du CREDIT MUTUEL d'un montant de 117.300 euros ; que les échéances mensuelles du prêt ont été prélevées sur un compte joint des époux ouvert au CREDIT MUTUEL ; qu'à la date de l'ordonnance de non conciliation, le capital restant dû sur ledit prêt était de 63.339,35 euros ; qu'à l'analyse du relevé du compte joint des époux, le notaire a constaté que, sur la période de janvier 2006 à juin 2013, des virements à hauteur de 76.228,06 euros ont été identifiés comme provenant directement de biens appartenant en propres à Madame S... M... (issus pour partie de loyers provenant d'une maison d'habitation donnée à l'épouse par ses parents suivant actes reçus par Maître O... le 11 mars 2002 et les 8 et 12 janvier 2004, et pour l'autre partie, de fonds donnés par ses parents à l'épouse, comme provenant d'un loyer d'une maison d'habitation leur appartenant, puis donnée à elle par acte reçu par Maître O... le 13 décembre 2011) ; que même si par principe les sommes déposées sur un compte joint sont présumées indivises conformément à l'article 1538 alinéa 3 du Code civil, il résulte des constatations observées par le notaire que les virements déposés sur le compte joint des époux par Madame S... M... constituaient des fonds propres compte tenu notamment de leur traçabilité et de l'utilisation rapide pour rembourser les mensualités du prêt immobilier ; que pour ce qui concerne les remises de chèques intervenues entre le 10 janvier 2003 et le 11 janvier 2006 ainsi que le 14 août 2006, le notaire a considéré que ces sommes étaient présumées indivises, Madame S... M... n'apportant pas la preuve de leur provenance en ne communiquant pas des bordereaux de remises de chèques ou d'autres éléments permettant de « recoller les sommes déposées à l'affirmation par l'épouse que celles-ci lui appartenaient en propre » ; que dans le cadre de la présente instance, Madame S... M... soutient que des pièces complémentaires ont été communiquées au notaire par dire du 18 septembre 2014 mais qu'il n'aurait pas intégré ces montants dans le calcul de sa créance ; qu'au regard des pièces communiquées, il apparaît que la concluante communique, d'une part, une attestation du 9 juillet 2014 établi par le locataire de la maison située à CAROMB, Monsieur T..., selon laquelle il règle un loyer de 369,69 euros à Madame S... M... depuis le 1er janvier 2001, et d'autre part, un contrat de bail en date du 30 septembre 2003 pour un autre immeuble propre de l'épouse louée pour la somme de 459,80 euros ; que ces revenus locatifs s'élevant globalement à la somme de 829,49 euros ont fait l'objet à compter du mois de janvier 2006 de virement automatique sur le compte joint ; qu'à la lecture du relevé de compte commun des époux, il apparaît que des chèques ont été déposés pour la somme de 829,49 euros sur la période de mars à décembre 2005 inclus ; que dès lors, cette identité de montant entre les loyers perçus au titre des biens propres de l'épouse et les chèques encaissés sur le compte commun sur cette période permet de qualifier ces deniers de fonds propres. Cependant, tel n'est pas le cas pour les chèques encaissés entre le mois de janvier 2003 et le mois de février 2005 pour lesquels l'absence de concordance entre les montants des loyers perçus par l'épouse et les chèques encaissés ne permet pas de s'opposer au principe selon lequel les sommes encaissées sur le compte joint sont présumées indivises ; que dès lors, il convient de rajouter, aux virements automatiques sur le compte commun estimés par le notaire à 76.228,06 euros, 10 mois de chèques encaissés provenant directement des loyers perçus par Madame S... M..., correspondant à la somme de 8.294,90 euros (829,49 euros pendant 10 mois) ; qu'en conséquence, l'épouse a mis à disposition de son époux des fonds lui appartenant en propres à hauteur de 84.522,96 euros (76.228,06 € + 8.294,90 €) à l'effet de financer un bien appartenant exclusivement à Monsieur K... W... ; que celles-ci ne peuvent s'analyser comme étant des libéralités au regard des déclarations des parties, ni comme un contrat de prêt entre époux en l'absence de convention entre les parties ; que la question se pose de savoir si tels paiements peuvent s'analyser comme constituant une contribution de Madame S... M... excessives ou non aux charges du mariage ; qu'il est de jurisprudence constante de considérer que, pour un couple ayant opté pour le régime de la séparation de biens, chacun des époux doit contribuer aux charges du mariage en proportion de sa faculté contributive et qu'aucun compte ne peut valablement être fait entre eux ; qu'il en résulte notamment que, même si un immeuble indivis a été intégralement financé par un des époux, il ne peut être alloué une indemnité compensatrice pour un excès de contribution aux charges du mariage ; qu'il convient, cependant, de constater que cette neutralisation sur le fondement de la contribution aux charges du mariages des demandes de créances entre époux relatives à l'acquisition d'un bien s'applique lors de l'acquisition d'un bien indivis, dès lors que l'époux qui paie l'emprunt a pour contrepartie de son investissement une quote-part de propriété dans le bien immobilier indivis ; que toujours dans le cas des époux mariés sous un régime séparatiste, tel n'est pas le cas d'un époux qui procède à des paiements destinés à l'acquisition d'un bien personnel à l'autre époux, pour lequel il apparaît nécessaire d'analyser si ces versements ont excédé la contribution aux charges du mariage due par chacun des époux et peuvent ainsi ouvrir droit à une créance contre son conjoint, nonobstant le contrat de mariage stipulant que les époux sont réputés avoir contribué au jour le jour aux charges du mariage ; que pour ce qui concerne les dépenses ordinaires supportées pendant la vie commune, Madame S... M... déclare avoir consacré les revenus tirés de son activité professionnelle à la vie de sa famille, sans pour autant fournir de justificatifs à l'appui de ses déclarations ; que dans le même temps, Monsieur K... W... qui s'oppose à ce que soit recherché tout excès de contribution aux charges du mariage par son épouse, soutient qu'il a évidemment contribué lui aussi aux dépenses de la vie commune, sans pour autant identifier et justifier des montants qu'il aurait réglé personnellement à ce titre ; que compte tenu de l'absence d'informations précises communiquées par les parties concernant les dépenses de la vie commune supportées par chacun des époux, durant l'union, et notamment sur la période de remboursement du crédit immobilier, il y a lieu de considérer que celles-ci ont été assumées par chacune des parties en proportion de sa faculté contributive et qu'aucun compte ne peut valablement être fait entre eux au titre des dépenses ordinaires ; que pour ce qui concerne le crédit immobilier souscrit par les époux pour la construction du domicile familial, il a été clairement démontré précédemment que Madame S... M... a remboursé à l'aide de fonds propres la somme de 84.522,96 euros au titre du crédit immobilier, soit une dépense mensuelle moyenne de 845,23 euros ; que durant cette période, il ressort des bilans comptables que les résultats nets mensuels de Madame S... M... dans le cadre de son activité agricole étaient compris entre 1.000 euros et 3.940 euros, soit en moyenne une rémunération mensuelle de 1.816 euros (sur la base des 9 années d'exercice comptable communiquées entre 2003 et 2013) ; qu'en intégrant les revenus locatifs issus de ses biens propres aux revenus agricoles perçus en moyenne, il y a lieu de constater que la prise en charge complète par l'épouse du crédit immobilier souscrit pour l'édification du domicile conjugal, bien propre de l'époux, correspondait à près de 33 % de ses ressources globales, estimées à 2,645 euros ; que dans le même temps, il convient de retenir que Monsieur K... W... bénéficiait sur la même période de ressources mensuelles moyennes estimées à 4.146 euros, se décomposant en 2.405 euros au titre des revenus agricoles (en prenant les résultats agricoles imposables déclarés par Monsieur K... W... en moyenne entre 2010 et 2015, soit 28.862 euros), 1.500 euros en moyenne en qualité de gérant associé (1.500 euros en 2014 et 2.000 euros en 2015) et 241 euros de revenus fonciers issu de fermage (données déclarées par l'époux en 2016) ; que dès lors, il y a lieu de considérer que les ressources du foyer M... / W... s'élevait à 6.791 euros, l'époux disposant de 61 % des ressources familiales et l'épouse 39 % (à titre de comparaison, au regard des ressources pour chacune des parties dans le cadre de l'examen de la demande de prestation compensatoire de l'épouse, il apparaît qu'actuellement les revenus cumulés des époux s'élèvent à 7.274 euros, l'époux bénéficiant de 63,9 % des ressources familiales et l'épouse de 36,1 %) ; qu'en conséquence, il résulte de l'analyse de ces données que la prise en charge exclusive par Madame S... M... des mensualités du crédit immobilier souscrit pour l'édification du domicile conjugal, bien propre par accessoire de son époux, est manifestement excessive ; qu'en effet, la contribution aux charges du mariage n'avait pas pour objet de permettre à Monsieur K... W... de se constituer un patrimoine immobilier aux frais de son épouse, même s'il doit être tenu compte dans le calcul de la créance dont bénéficiera de l'épouse du fait que cette dernière a bénéficié de la jouissance de ce bien sur la période de remboursement du prêt immobilier à l'aide de ses deniers propres ; que dès lors, il convient de considérer que chacun des époux aurait dû contribuer à hauteur de sa faculté contributive au remboursement du prêt immobilier souscrit pour l'édification du domicile conjugal ; qu'en prenant en compte les facultés contributives résultant de l'analyse des ressources de chacun des époux, il doit être retenu que Monsieur K... W... aurait dû assumer 61 % du montant total des remboursements du crédit immobilier qui ont été assumés exclusivement par Madame S... M... à hauteur de 84.522,96 euros, soit une dépense globale de 51.559 euros, que Madame S... M... doit ainsi bénéficier d'une créance sur son conjoint, qui obéit aux dispositions de l'article 1543 du Code civil, qui renvoie à l'article 1479 alinéa 2, lequel renvoie à son tour à l'article 1469 alinéa 3 du Code civil ; qu'il en résulte que, par dérogation au principe du nominalisme monétaire, la créance entre époux doit être réévaluée en fonction de la valeur actuelle du bien et ne peut être moindre que le profit subsistant ; que pour déterminer la créance de Madame S... M..., il convient dès lors de prendre en compte le montant du coût de la construction correspondant au capital emprunté, soit 117.300 euros, ainsi que la plus-value actuelle apportée au terrain par la construction évaluée par le GVEN à 170.000 euros, et de procéder au calcul suivant : (51.559 x 170.000 €) / 117.300 € = 74.723,19 € ; qu'il sera ainsi fait droit à la demande de Madame S... M... de sa demande de condamnation de Monsieur K... W... au paiement d'une créance au titre des fonds propres investis dans la construction du bien immobilier appartenant en propre à son épouse, cette créance étant fixée à la somme de 74.723,19 euros ; qu'il convient, par ailleurs, d'ordonner pour le restant la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux M... / W... et de désigner Maître C... V..., notaire à BEAUMES DE VENISE, pour y procéder » ; 1°) ALORS QUE le caractère irréfragable de la présomption de contribution aux charges du mariage, au jour le jour, instituée par le contrat de mariage, interdit aux époux de prouver que l'un ou l'autre d'entre eux ne se serait pas acquitté de son obligation ; qu'il en résulte qu'un époux ne peut se prétendre créancier de l'autre au titre du remboursement d'un emprunt bancaire contracté pour la construction du logement familial, lequel participe de l'exécution de l'obligation de contribuer aux charges du mariage ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motifs pris que « le caractère irréfragable de cette clause n'interdit pas à un époux de faire la démonstration de ce que sa participation a excédé ses facultés contributives » et que « si la sur-contribution est démontrée, elle a pour effet de rendre la clause inefficace », la cour d'appel a violé l'article 214 du Code civil, ensemble l'article 1537 du même Code ; 2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la sur-contribution aux charges du mariage s'apprécie au regard de l'ensemble des charges acquittées par les époux et de leurs facultés respectives au cours du mariage ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motifs pris de ce que « la prise en charge exclusive par l'épouse des mensualités du crédit immobilier souscrit pour l'édification du domicile conjugal, bien personnel de l'époux, était manifestement excessive dès lors que les revenus mensuels de ce dernier étaient nettement supérieurs à ceux de l'épouse, et que les charges courantes étaient assumées par chacun à proportion de ses facultés », après avoir pourtant constaté qu' « aucune des parties ne produisait d'informations précises quant aux dépenses de la vie commune supportées par chacune d'elles », ce dont il résultait que l'épouse n'avait pas démontré que sa participation globale à l'ensemble des charges du mariage avait excédé ses facultés contributives, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé l'article 214 du Code civil, ensemble l'article 1537 du même Code ; 3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la contribution aux charges du mariage peut s'exécuter en argent, en nature ou en industrie ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motifs pris de ce que « les ressources globales mensuelles des époux s'élevaient à 6.791 euros, dont 61 % fournies par le mari et 39 % fournies par l'épouse » et que « chacun des époux aurait dû contribuer à hauteur de sa faculté contributive au remboursement du prêt, M. W... à hauteur de 61 % et Mme M... à hauteur de 39 %, de sorte que l'époux aurait dû assumer le remboursement de crédit à hauteur de 51.559 euros (61 % de 84.522,96 euros) », après avoir pourtant constaté que « l'immeuble construit à D... est un bien personnel de l'époux », qu'il avait « constitué le domicile conjugal », et que « Mme M... avait bénéficié de la jouissance du bien immobilier sur la période de remboursement du prêt immobilier par ses deniers personnels », la cour d'appel a condamné l'époux à hauteur de ses ressources financières, sans tenir compte, pour fixer le montant de sa participation pécuniaire, de sa contribution en nature consistant à avoir affecté son bien personnel au logement de la famille ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 214 du Code civil, ensemble l'article 1537 du même Code. Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme M..., demanderesse au pourvoi incident. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme M... de sa demande tendant à ce que M. W... soit condamné à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de prestation compensatoire ; AUX MOTIFS QUE s'agissant enfin de la liquidation du régime matrimonial, le tribunal a retenu à juste titre, faisant application des dispositions de l'article 271 du code civil qui précisent que, pour statuer sur la prestation compensatoire, le juge prend notamment en considération « le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial », qu'il y a lieu de tenir compte de la créance entre époux de 74 723,19 euros au profit de Mme M... ; qu'au vu des éléments qui précèdent, étant rappelé que la prestation compensatoire ne peut avoir pour objet ni de contourner les règles du régime matrimonial librement choisi par les parties, ni d'égaliser les fortunes, il n'apparaît pas de disparité dans les conditions de vie respectives des époux créée par la rupture du mariage ; ALORS QUE la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné M. W... à payer à Mme M... la somme de 74 723,19 euros au titre d'une créance entre époux entraînera nécessairement la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a débouté Mme M... de sa demande de versement d'une prestation compensatoire, dès lors que pour statuer ainsi, la cour d'appel s'est fondée sur la créance de 74 723,19 euros dont M. W... était débiteur envers Mme M..., en application de l'article 624 du code de procédure civile.
Il résulte des articles 214 et 1537 du code civil que lorsque les juges du fond ont souverainement estimé irréfragable la présomption résultant de ce que les époux étaient convenus, en adoptant la séparation de biens, qu'ils contribueraient aux charges du mariage à proportion de leurs facultés respectives et que chacun d'eux serait réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu'ils ne seraient assujettis à aucun compte entre eux ni à retirer à ce sujet aucune quittance l'un de l'autre, un époux ne peut, au soutien d'une demande de créance, être admis à prouver l'insuffisance de la participation de son conjoint aux charges du mariage pas plus que l'excès de sa propre contribution
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1232 FS-P+B+I Pourvoi n° A 19-25.100 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 [...] K..., domicilié [...] Principauté de Monaco, 98000 Monaco (Monaco), a formé le pourvoi n° A 19-25.100 contre l'arrêt rendu le 11 septembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme P... M..., veuve U..., domiciliée [...], 75116 Paris, 2°/ à M. F... L..., domicilié [...], 98000 Principauté de Monaco, (Monaco), 3°/ à M. G... I..., domicilié [...], 98000 Monaco, 4°/ à M. J... N..., domicilié [...], 98000 Monaco, 5°/ à M. G... Y..., domicilié [...], 98000 Monaco, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de [...] K..., de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme M..., veuve U..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. N..., et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mmes Kermina, Durin-Karsenty, Maunand, Leroy-Gissinger, M. Fulchiron, conseillers, Mmes Lemoine, Jollec, Bohnert, M. Cardini, Mme Dumas, conseillers référendaires, M. Grignon Dumoulin avocat général, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 septembre 2019), X... U..., résidant monégasque, qui était placé sous un régime de protection pour lequel M. Y... avait été désigné en qualité d'administrateur judiciaire de ses biens, est décédé le 18 novembre 2011. 2. X... U... ayant déposé, le 23 juin 2005, en l'étude de M. N..., notaire dans la principauté de Monaco, un testament par lequel il instituait pour légataire universel K..., le tribunal de première instance de Monaco a envoyé ce dernier en possession, par une ordonnance du 10 février 2012, puis a désigné M. I... administrateur provisoire de la succession. 3. Mme M..., veuve T... X... U... , a assigné, par acte du 16 novembre 2012, K..., M. L..., administrateur des biens du K..., M. N..., M. I... et M. Y... devant le tribunal de grande instance de Paris qui, par un jugement du 10 septembre 2015, revêtu de l'exécution provisoire, a dit que le legs à des institutions de bienfaisance à Monaco ou ailleurs était caduc et que l'intégralité de la succession tant immobilière que mobilière de X... U... était transmise à Mme M..., a désigné un notaire pour régler la succession s'agissant d'un bien immobilier situé à Paris, a enjoint à M. N... de communiquer à Mme M... l'inventaire complet et définitif relatif à la succession, ainsi que le compte définitif de gestion du patrimoine et a condamné in solidum K..., M. L... et M. I... à payer à Mme M... une somme de 100 000 euros au titre du manque à gagner du fait de la perte de loyers du bien immobilier situé à Paris. 4. K... et M. L... ayant relevé appel de ce jugement le 8 octobre 2015, l'affaire a été radiée, à la demande de Mme M..., par une ordonnance du 6 septembre 2016, faute d'exécution du jugement du 10 septembre 2015. 5. Le 4 septembre 2018, K... et M. L... ont effectué un virement bancaire ayant pour objet de régler la condamnation au paiement de la somme de 100 000 euros prononcée à leur encontre et ont sollicité la réinscription de l'affaire au rôle. Mme M... s'est opposée au rétablissement de l'affaire, a soulevé un incident de péremption. Par une ordonnance du 18 décembre 2018, le conseiller de la mise en état a constaté que l'instance d'appel n'était pas périmée et a dit n'y avoir lieu à rétablissement de l'affaire au rôle, faute d'exécution du jugement frappé d'appel respectant l'ordonnance de radiation. 6. Mme M... a déféré cette ordonnance à la cour d'appel. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses quatrième et septième branches Enoncé du moyen 7. K... fait grief à l'arrêt, après avoir confirmé l'ordonnance déférée ayant rejeté la demande de rétablissement au rôle, de l'infirmer en ce qu'elle a constaté que l'instance d'appel n'était pas périmée et, statuant à nouveau et y ajoutant, de constater que la péremption de l'instance d'appel enregistrée sous le numéro 15/19918 (intégrant l'instance jointe n° 15/21467) était acquise à la date du 6 septembre 2018, de dire en conséquence que le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris était définitif et avait force de chose jugée, de le condamner in solidum avec M. L..., ès qualités, et M. I..., es qualités, à payer à Mme M... une somme de 12 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et de le condamner, avec M. L..., es qualités, et M. I..., ès qualités, à payer à Mme M... une somme de 15 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, alors : « 4°/ que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que constitue une diligence interruptive du délai de péremption tout acte de nature à faire progresser l'instance ou, à tout le moins, manifestant la volonté non équivoque de l'appelant d'exécuter le jugement ; que pour juger qu'aucun acte accompli par les appelants avant l'expiration du délai de péremption n'avait pu valablement interrompre celui-ci, de sorte que la péremption de l'instance d'appel était acquise au 6 septembre 2018, la cour d'appel s'est fondée sur « l'absence de toute diligence effectuée par K... ou ses mandataires, que ce soit si nécessaire auprès de la juridiction ayant rendu l'ordonnance d'envoi en possession ou auprès du notaire ayant établi l'acte de notoriété au profit du K..., afin de réaliser concrètement la transmission du patrimoine successoral situé à Monaco à Mme M..., veuve U... », dont elle a estimé que celle-ci « démontr[ait] suffisamment le défaut de volonté réelle d'exécuter de façon effective, c'est-à-dire significative, le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris » ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs inopérants, impropres à caractériser l'absence de volonté des appelants d'exécuter le jugement et à faire obstacle à ce que les diligences accomplies par ceux-ci le 4 septembre 2018 puissent se voir reconnaître un effet interruptif de péremption, constituées par le dépôt de conclusions au fond, par la formulation d'une demande de réinscription de l'affaire au rôle et par le règlement de la somme de 100 000 euros en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 10 septembre 2015, la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile ; 7°/ que le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche ; que dans le dispositif du jugement rendu le 10 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a « Rejet[é] la fin de non-recevoir ; Débout[é] Mme M... de sa demande en annulation du testament du 23 juin 2005 ; Dit que le testament du 29 août 2005 révoque le testament du 23 juin 2005 ; Dit que le legs à des institutions de bienfaisance à Monaco ou ailleurs est caduc ; Dit que l'intégralité de la succession tant immobilière que mobilière de X... U... est transmise à son épouse, Mme P... M... ; Désign[é] le président de la chambre interdépartementale des notaires de Paris, avec faculté de délégation pour régler la succession de X... U... s'agissant du bien immobilier sis à Paris 16ème ; Enjoint Maître N... notaire à communiquer à Mme M... l'inventaire complet et définitif relatif à la succession de M. U... ainsi que le compte définitif de gestion du patrimoine ; Dit n'y avoir lieu de prononcer une astreinte ; Débout[é] Mme M... de sa demande de dommages-intérêts pour rétention d'information ; Débout[é] Mme M... de sa demande d'inopposabilité des frais de succession ; Condamn[é] in solidum le K..., M. L... et M. I... à payer à Mme M... la somme de 100 000 euros au titre du manque à gagner du fait de la perte de loyers de l'appartement parisien ; Débout[é] Mme M... du surplus de ses demandes ; Débout[é] les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; Ordonn[é] l'emploi des dépens en frais généraux de partage ; Ordonn[é] l'exécution provisoire » ; qu'en considérant qu'en exécution de cette décision, il incombait au K... de « réaliser concrètement la transmission du patrimoine successoral situé à Monaco à Mme M..., veuve U... », la cour d'appel, statuant sur déféré, a ajouté au dispositif susvisé et a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris, en violation de l'article 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 386 du même code. » Réponse de la Cour Vu les articles 386, 480 et 526 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 : 8. Aux termes du premier de ces textes, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. 9. Lorsqu'en application du troisième de ces textes, l'appel fait l'objet d'une radiation du rôle faute pour l'appelant de justifier avoir exécuté la décision frappée d'appel, tout acte d'exécution significative de cette décision manifeste la volonté non équivoque de l'exécuter et constitue, par conséquent, une diligence interrompant le délai de péremption de l'instance d'appel. 10. Il résulte du deuxième de ces textes que l'appréciation du caractère significatif de l'exécution de la décision frappée d'appel est faite en considération de ce qui a été décidé par le premier juge dans le dispositif de sa décision. 11. Pour constater la péremption de l'instance d'appel, l'arrêt retient que le patrimoine successoral sis à Monaco étant en possession du légataire universel, dont les droits ont été écartés par le jugement rendu le 10 septembre 2015 au profit de Mme M..., il appartient à ce légataire universel et à ses administrateurs de justifier qu'ils ont permis à Mme M... d'entrer, à son tour, en possession de la partie monégasque de ce patrimoine, que ceux-ci ne justifient d'aucune diligence qui aurait permis à Mme M... d'entrer en possession du bien immobilier sis à Monaco et d'obtenir la maîtrise des avoirs financiers du défunt, qu'il s'agisse des comptes bancaires, ou des titres américains, alors qu'en leur qualité de possesseurs actuels du patrimoine successoral en litige, c'est bien à eux seuls qu'il incombait de permettre sa transmission au profit de la requérante au déféré, en sollicitant, s'il y a lieu, la rétractation de l'ordonnance d'envoi en possession du 10 février 2012 et en donnant les instructions nécessaires à M. N..., notaire. 12. L'arrêt ajoute que l'absence, dans ces circonstances, de toute diligence effectuée par K... ou ses mandataires, que ce soit, si nécessaire, auprès de la juridiction ayant rendu l'ordonnance d'envoi en possession, ou auprès du notaire ayant établi l'acte de notoriété au profit du K..., afin de réaliser concrètement la transmission du patrimoine successoral situé à Monaco à Mme M..., démontre suffisamment le défaut de volonté réelle d'exécuter de façon effective, c'est-à-dire significative, le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris. 13. En statuant ainsi, tout en constatant, d'une part, que le jugement frappé d'appel s'était borné à dire que l'intégralité de la succession tant immobilière que mobilière de X... U... était transmise à Mme M..., sans impartir de diligence au K... à l'effet de permettre à Mme M... d'entrer en possession des biens dépendant de cette succession, et, d'autre part, que la condamnation en principal des appelants au paiement de dommages-intérêts avait été exécutée, à l'exclusion des intérêts y afférents, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Mise hors de cause 14. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause M. N..., dont la présence apparaît nécessaire devant la cour d'appel de renvoi. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; DIT n'y avoir lieu de mettre hors de cause M. N... ; Condamne Mme M... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme M... et la condamne à payer au K... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour [...] K... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué, après avoir confirmé l'ordonnance déférée ayant rejeté la demande de rétablissement au rôle, de l'avoir infirmée en ce qu'elle a constaté que l'instance d'appel n'était pas périmée et, statuant à nouveau et y ajoutant, d'avoir constaté que la péremption de l'instance d'appel enregistrée sous le numéro 15/19918 (intégrant l'instance jointe n° 15/21467) était acquise à la date du 6 septembre 2018, d'avoir dit en conséquence que le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris était définitif et avait force de chose jugée, d'avoir condamné in solidum [...] K..., Monsieur L..., ès qualités, et Monsieur I..., ès qualités, à payer à Madame M... une somme de 12 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et d'avoir condamné [...] K..., Monsieur L..., ès qualités, et Monsieur I..., ès qualités, à payer à Madame M... une somme de 15 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ; Aux motifs que : « Sur l'acquisition de la péremption ; que par ordonnance en date du 6 septembre 2016, le conseiller de la mise en état a fait droit à l'incident de radiation formé par Madame M... veuve U... au visa de l'article 526 du code de procédure civile, parce qu'il a constaté que le jugement rendu le 10 septembre 2015 n'avait pas été exécuté, sauf pour l'immeuble situé en France et estimé que l'exécution de ce jugement n'était pas susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives pour les débiteurs des obligations énoncées par le jugement ; que par application de l'article 386 du code de procédure civile "l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans" ; que si tout acte de procédure est de nature à interrompre le délai de péremption et s'il est tout à fait possible d'accomplir des actes interruptifs de péremption en situation de radiation, car la radiation ne fait que suspendre l'instance, encore faut-il que la diligence accomplie puisse être de nature à faire progresser l'affaire ; qu'il n'est donc pas possible de retenir a priori que, dans tous les cas, le délai de péremption est totalement indépendant de la radiation prévue par l'article 526 du code de procédure civile (dans sa version antérieure au 1er septembre 2017), parce que l'appréciation de l'utilité d'un acte de procédure, effectué en situation de radiation, est liée aux causes de la radiation ; que l'absence d'exécution raisonnable d'une décision rendue en première instance est ainsi susceptible d'affecter la portée du ou des actes de procédure accomplis pendant la radiation, parce que ces actes ne sont pas susceptibles de faire progresser l'instance ; qu'il en est ainsi lorsque l'affaire ne peut pas être rétablie parce que le jugement n'est pas exécuté ou parce que l'exécution partielle entreprise ne révèle pas une volonté manifeste d'exécuter la décision de première instance, lorsque la radiation a été prononcée pour défaut d'exécution du jugement ; que le refus de rétablissement d'une instance radiée consacre la persistance du "défaut de diligences" ayant présidé à la décision de radiation, laquelle constitue une sanction, qui doit être levée pour pouvoir reprendre la procédure ; qu'ainsi qu'il est souligné dans les conclusions de [...] K... et de Monsieur L... (page 8) "la péremption n'est pas encourue si les parties manifestent leur volonté de voir aboutir l'instance" ; qu'or, le maintien d'une mesure de radiation est susceptible d'hypothéquer, par nature, la possibilité même d'un aboutissement de l'instance ; qu'il importe donc d'apprécier, en l'espèce, si les appelants ont, dans les deux jours ayant précédé l'acquisition éventuelle de la péremption (6 septembre 2018), accompli des diligences de nature à faire avancer l'instance, étant souligné que le principe même d'avancement de l'affaire est compromis si l'instance n'est pas rétablie ; qu'à cet égard, Madame M... veuve U... peut effectivement prétendre qu'il n'y a pas eu de diligences permettant de faire progresser l'affaire de façon utile, puisque l'instance n'a pas été réenrôlée, faute de justification d'une exécution du jugement "conforme aux exigences de l'ordonnance de radiation" ; qu'elle souligne, par ailleurs, que la persistance de la radiation, sans péremption, aboutirait à faire durer la procédure de façon inconsidérée et serait donc contraire à son droit d'obtenir une décision dans un délai raisonnable ; qu'en retenant que le jugement n'avait été exécuté que pour le bien immobilier situé en France et que l'exécution du jugement n'entraînait pas de conséquences manifestement excessives, l'ordonnance de radiation en date du 6 septembre 2016 n'a pas défini les modalités d'exécution du jugement dont appel ; que si, d'autre part, le dispositif du jugement a "dit que l'intégralité de la succession tant immobilière que mobilière de Monsieur X... U... est transmise à son épouse, Madame P... M...", il est exact qu'il n'a pas fixé les modalités de cette transmission ; qu'il a seulement enjoint, de façon accessoire, à Maître N..., notaire à MONACO, de communiquer à Madame M... l'inventaire complet et définitif relatif à la succession de Monsieur U..., ainsi que le compte définitif de gestion du patrimoine ; que Madame M... veuve U... soutient que le jugement n'a pas été exécuté, parce que le patrimoine ne lui a pas été transmis, ce qui signifie concrètement qu'elle n'a pas pu entrer en possession du patrimoine successoral sis à MONACO, parce que ce patrimoine est en possession de [...] K..., depuis l'ordonnance d'envoi en possession rendue le 10 février 2012 par le tribunal de première instance de MONACO (pièce 19 [...] K...) ; que le patrimoine successoral sis à MONACO étant en possession du légataire universel, dont les droits ont été écartés par le jugement rendu le 10 septembre 2015 au profit de Madame M... veuve U..., il appartient à ce légataire universel et ses administrateurs de justifier qu'ils ont permis à Madame M... veuve U... d'entrer, à son tour, en possession de la partie monégasque de ce patrimoine ; que force est de constater à cet égard qu'ils ne justifient d'aucune diligence qui aurait permis à Madame M... veuve U... d'entrer en possession du bien immobilier sis à MONACO et d'obtenir la maîtrise des avoirs financiers du défunt, qu'il s'agisse des comptes bancaires, ou des titres américains ; qu'or, en leur qualité de possesseurs actuels du patrimoine successoral en litige, c'est bien à eux seuls qu'il incombe de permettre sa transmission au profit de la requérante au déféré, en sollicitant s'il y a lieu la rétractation de l'ordonnance d'envoi en possession du 10 février 2012 et en donnant les instructions nécessaires à Maître N... ; que la formalité de l'exequatur, qui est invoquée par les défendeurs au déféré, a pour effet principal de rendre exécutoire dans la principauté de MONACO un jugement rendu en territoire étranger, en l'occurrence sur le territoire français ; que cette formalité est effectivement nécessaire pour la mise en oeuvre d'une exécution forcée et elle est prévue par l'article 18 du titre V de la convention relative à l'aide mutuelle judiciaire conclue le 21 septembre 1949 entre la FRANCE et la PRINCIPAUTE DE MONACO ; que cette disposition prévoit que les jugements exécutoires dans l'un des deux pays doivent être déclarés exécutoires par le tribunal de première instance "du lieu où l'exécution doit être poursuivie" ; qu'il s'en déduit que cette procédure n'est pas requise pour une exécution spontanée du jugement, en l'absence de toutes poursuites ou voies d'exécution, ce qui explique que [...] K... et Monsieur L... ont estimé nécessaire de solliciter l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement dont appel, en saisissant le premier président de la Cour d'appel de PARIS, par assignation en date du 26 novembre 2015 (pièce 6 Mme M...) ; qu'au soutien de leur demande, ils ont fait valoir que "l'exécution immédiate de la décision entraîne une transmission de l'intégralité de la succession de Monsieur U... au bénéfice de Madame M... U... et le versement à son profit de la somme de 100 000€....", ce qui risquait d'entraîner des conséquences manifestement excessives en créant une situation irrémédiable ; qu'ils n'ont procédé à aucune distinction entre les biens se trouvant à MONACO, ceux se trouvant en FRANCE et la condamnation au paiement de la somme de 100 000€ ; que s'ils ont, par ailleurs, soutenu que l'exécution immédiate du jugement était incompatible avec l'ordonnance d'envoi en possession du 10 février 2012 (pièce 19 [...] K...), il est établi que, sur sa requête en date du 10 mai 2016, Monsieur I..., ès qualités d'administrateur ad hoc chargé d'assurer les intérêts de [...] K..., a été autorisé, par ordonnance en date du 12 mai 2016, rendue par la présidente du tribunal de première instance de MONACO, à procéder à la remise des clefs des biens immobiliers sis [...] à PARIS 16ème, inclus dans l'actif successoral de X... U... entre les mains de Madame M... veuve U... "aux fins d'exécution du jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de PARIS" (pièce 18 [...] K...) ; que ni [...] K... et Monsieur L..., ni Monsieur I... n'expliquent ce qui justifierait une distinction entre l'exécution réalisée en FRANCE et l'exécution restant à mettre en oeuvre dans la principauté de MONACO, étant rappelé que, si le jugement a désigné un notaire pour régler la dévolution successorale des biens situés en France, il existe également un notaire à MONACO chargé du règlement de la succession en la personne de Maître N..., lequel a dressé le 18 janvier 2012 un acte de notoriété, aux termes duquel le legs universel consenti par X... U... à [...] K... par le testament du 23 juin 2005 pouvait recevoir sa pleine et entière exécution (pièce 19 [...] K...) ; que s'il est vrai que le jugement a effectivement été exécuté pour le bien immobilier sis à PARIS, il importe, toutefois, de rappeler, qu'après établissement d'une attestation notariée en date du 3 mai 2016, consacrant son droit de propriété (pièce 10 Mme M...), Madame M... veuve U... n'a pas pu obtenir la remise des clefs de l'appartement par la gardienne de l'immeuble, car Monsieur I... s'y est formellement opposé en précisant, à compter du 9 mai 2016, qu'il attendait une décision de MONACO, étant rappelé que le juge de MONACO n'a été saisi que le 10 mai 2016 (pièces 14 et 16 Mme M...) ; que Madame M... veuve U... a dû recourir à un serrurier pour procéder à l'ouverture de l'appartement et établir un constat des lieux, selon procès-verbal du 17 mai 2016 (pièce 17 Mme M...) ; qu'à cette date, la gardienne de l'immeuble a persisté à refuser de remettre les clefs à Madame M... veuve U... et Monsieur I... n'a produit aucune pièce justifiant qu'il aurait donné une instruction contraire à la gardienne, dès le 12 mai 2016, date de l'ordonnance l'autorisant à mettre Madame M... veuve U... en possession du bien immobilier parisien ; que s'il est vrai que la condamnation au paiement d'une somme de 100 000€ à titre de dommages intérêts a effectivement été réglée au début du mois de septembre 2018, force est de constater que ce règlement est intervenu en extrême limite de l'acquisition de la péremption (pour l'ordre de virement) et que les intérêts courus depuis le jugement n'ont pas été apurés, même partiellement, à cette occasion ; que l'absence, dans ces circonstances, de toute diligence effectuée par [...] K... ou ses mandataires, que ce soit, si nécessaire, auprès de la juridiction ayant rendu l'ordonnance d'envoi en possession, ou auprès du notaire ayant établi l'acte de notoriété au profit de [...] K..., afin de réaliser concrètement la transmission du patrimoine successoral situé à MONACO à Madame M... veuve U... démontre suffisamment le défaut de volonté réelle d'exécuter de façon effective, c'est à dire significative, le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de PARIS ; qu'outre le fait qu'une simple constitution d'avocat consacrant un changement d'avocat, une simple demande de rétablissement d'instance sans justification de l'exécution des causes de la radiation et la régularisation de conclusions se bornant à réitérer des conclusions précédentes, avec un bordereau de pièces identique (pièces 19 et 30 Mme M...) ne sont pas des diligences démontrant une volonté de faire avancer l'instance, la portée de ces actes de procédure ne peut, en l'espèce, être pleinement appréciée que par rapport au contexte de procédure dans lequel ils s'inscrivent ; que ni ces actes de procédure, ni le règlement de 100 000€ ne peuvent, au regard du contexte ci-dessus rappelé, caractériser une diligence utile permettant de faire avancer l'affaire ; qu'en l'absence d'exécution significative du jugement depuis son prononcé, l'affaire ne peut donc pas être rétablie au rôle, car aucun acte utile n'a été effectué permettant de faire progresser l'affaire depuis l'ordonnance de radiation du 6 septembre 2016 ; que la péremption était donc acquise le 6 septembre 2018 et l'ordonnance déférée doit être réformée sur ce point ; qu'ainsi qu'il est sollicité par Madame M... veuve U..., le jugement du 10 septembre 2015, régulièrement signifié aux défendeurs le 30 septembre 2015, revêt un caractère définitif du fait de la péremption de l'instance d'appel ; que Madame M... veuve U... est fondée à soutenir que le défaut d'exécution du jugement par [...] K... et Monsieur L..., ès qualités, ainsi que par Monsieur I..., ès qualités, est abusive en soulignant que le paiement de la somme de 100 000€ n'a été proposé qu'en limite de péremption et sans intérêts et qu'elle s'est heurtée à des difficultés répétées pour obtenir l'exécution du jugement qu'il s'agisse du bien immobilier parisien dont elle a finalement pris possession ou de tous les biens situés à MONACO dont elle n'est toujours pas en possession en raison de la persistance de la possession des défendeurs au déféré ; que cette situation lui cause un préjudice matériel direct, puisqu'elle n'a pas la maîtrise des biens en litige ; que [...] K..., Monsieur L..., ès qualités, et Monsieur I..., ès qualités, doivent donc être condamnés in solidum à lui payer une somme de 12 000€ à titre de dommages intérêts pour résistance abusive ; qu'il doit être noté qu'aucune faute n'a été caractérisée à l'encontre de Messieurs L... et I..., qui pourrait leur être imputée, à titre personnel, en dehors des missions spécifiques qui leur ont été confiées ; que Maître J... N..., notaire à MONACO, intervenant à la succession de X... U..., demande qu'il soit jugé qu'il a intégralement exécuté la part du jugement le concernant lui ayant enjoint de communiquer à Madame M... veuve U... l'inventaire complet et définitif de la succession ainsi que le compte définitif de gestion du patrimoine successoral ; que cette demande est irrecevable comme dépourvue de lien suffisant avec la situation de procédure en litige puisque les diligences ou l'insuffisance des diligences effectuées par Maître N... ne sont pas à l'origine de la radiation qui a été prononcée le 6 septembre 2016 et de la situation de péremption qui s'en est ensuivie, étant rappelé que Maître N..., ès qualités, n'a pas interjeté appel du jugement rendu le 10 septembre 2015 ; que d'autre part, le jugement étant définitif pour toutes les parties du fait de la péremption de l'instance d'appel, l'appréciation du caractère parfait ou non des diligences accomplies par Maître N... constitue une difficulté d'exécution, qui ne relève pas des attributions de la juridiction de droit commun ; que la prétention énoncée par Maître N... doit donc être déclarée irrecevable ainsi qu'il est soutenu par Madame M... veuve U... ; qu'il est équitable de condamner in solidum [...] K..., Monsieur L... ès qualités et Monsieur I... ès qualités à payer à Madame M... veuve U... une somme de 15 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile » (arrêt, p. 8 à 11) ; Et aux motifs éventuellement adoptés que : « les appelants font valoir que le jugement dont appel a été exécuté car seule la condamnation au paiement de dommages-intérêts est exigible alors que Madame M... U... prétend que les appelants n'ont pas exécuté l'intégralité du jugement assorti de l'exécution provisoire ; qu'elle fait valoir que dans sa décision en date du 10 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a « dit que l'intégralité de la succession tant immobilière que mobilière de Monsieur X... U... est transmise à son épouse, Madame P... M... » et elle évalue unilatéralement les sommes qui lui seraient dues à ce titre à la somme de 2 514 753,05 € sauf à déduire le versement de 100 000 € ; que l'ordonnance de radiation du 6 septembre 2016 avait jugé que « attendu qu'il n'est pas contesté que le jugement pour l'immeuble situé en France a été exécuté mais que le surplus de la décision ne l'a pas été » ; que Madame M... U... fait aussi justement remarquer que dans leurs conclusions devant le Premier président pour voir arrêter l'exécution provisoire, K... et F... L... ont reconnu « l'exécution immédiate de la décision entraîne une transmission de l'intégralité de la succession de Monsieur U... au bénéfice de Madame M... U... et le versement à son profit de la somme de 100 000 € à laquelle ont été condamnés in solidum [...] K..., Monsieur L... et Monsieur I... » ; qu'en outre ils ne peuvent valablement invoquer leur défaut de pouvoir pour exécuter la transmission de la succession puisqu'ils ne justifient d'aucune démarche en ce sens auprès des juridictions monégasques ni invoquer la nécessité d'un exequatur alors qu'il ne s'agit pas d'une exécution forcée de l'obligation engagée par la créancière mais d'une exécution volontaire qui leur est réclamée ; qu'enfin ils ne peuvent critiquer l'évaluation de la succession puisque l'exécution doit avoir lieu en nature ; qu''il leur appartient d'établir leur volonté réelle d'exécuter le jugement dont ils ont fait appel ce qui n'est pas le cas en l'espèce, puisque Madame M... veuve U..., qui avait obtenu la restitution de l'appartement de l'[...] à Paris 16e arrondissement, n'a, depuis l'ordonnance de radiation, obtenu qu'un virement de 100 000 € et très récemment ; que ce paiement ne représente que la condamnation en dommages et intérêts en principal mais sans les intérêts ; que dans ces conditions les appelants ne justifient pas d'une exécution conforme aux exigences de l'ordonnance de radiation seule susceptible de permettre un rétablissement l'affaire au rôle » (ordonnance, p. 4) ; 1° Alors en premier lieu que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; qu'à défaut de disposition particulière trouvant à s'appliquer, le point de départ du délai de péremption court à compter de la dernière diligence accomplie par une partie ; qu'en faisant courir le délai de péremption à compter du 6 septembre 2016, date de l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état avait fait droit à l'incident de radiation formé par Madame M..., veuve U..., quand les dispositions de l'article 526 du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret du 6 mai 2017, n'étaient pas applicables à la présente instance dès lors que la demande de radiation avait été formée avant le 1er septembre 2017 et quand, en l'absence de disposition spéciale, le point de départ du délai de péremption se situait à la date des dernières diligences accomplies par les appelants, la cour d'appel, statuant sur déféré, a violé l'article 386 du code de procédure civile, ensemble l'article 526 du même code (dans sa rédaction antérieure au décret du 6 mai 2017) ; 2° Alors en deuxième lieu que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que constitue une diligence interruptive du délai de péremption tout acte de nature à faire progresser l'instance ou, à tout le moins, dans le cas d'une instance radiée pour non-exécution de la décision frappée d'appel, manifestant la volonté non équivoque de l'appelant d'exécuter le jugement ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt que le 4 septembre 2018, soit avant l'expiration du délai de péremption, les appelants ont effectué un virement d'un montant de 100 000 euros sur le compte CARPA du conseil de Madame M... en règlement de la condamnation pécuniaire prononcée à leur encontre par le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 10 septembre 2015, ont adressé aux autres parties des conclusions au fond et ont écrit en outre au conseiller de la mise en état pour obtenir le rétablissement de l'affaire ; qu'en constatant néanmoins à la date du 6 septembre 2018 la péremption de l'instance d'appel enregistrée sous le numéro 15/19918 (intégrant l'instance jointe n° 15/21467), la cour d'appel, statuant sur déféré, a violé l'article 386 du code de procédure civile ; 3° Alors en troisième lieu que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que dans l'hypothèse où l'instance devant la cour d'appel a donné lieu à une mesure de radiation en l'absence d'exécution de la décision frappée d'appel, l'interruption du délai de péremption ne peut être subordonnée à la réinscription de l'affaire au rôle et peut résulter de toute diligence manifestant la volonté des appelants de faire progresser l'instance ou, à tout le moins, d'exécuter le jugement ; qu'en énonçant que « le refus de rétablissement d'une instance radiée consacre la persistance du "défaut de diligences" ayant présidé à la décision de radiation laquelle constitue une sanction qui doit être levée pour pouvoir reprendre la procédure » (arrêt, p. 8, § 4, lignes 7 à 10) pour en déduire que « ni [l]es actes de procédure [accomplis par les appelants], ni le règlement de 100 000 € ne p[ouvaient] [ ] caractériser une diligence utile permettant de faire avancer l'affaire » (arrêt, p. 10 in fine et p. 11, § 1) en l'absence de réenrôlement de celle-ci, la cour d'appel, statuant sur déféré, a violé l'article 386 du code de procédure civile, ensemble l'article 383 du même code ; 4° Alors en quatrième lieu que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que constitue une diligence interruptive du délai de péremption tout acte de nature à faire progresser l'instance ou, à tout le moins, manifestant la volonté non équivoque de l'appelant d'exécuter le jugement ; que pour juger qu'aucun acte accompli par les appelants avant l'expiration du délai de péremption n'avait pu valablement interrompre celui-ci, de sorte que la péremption de l'instance d'appel était acquise au 6 septembre 2018, la cour d'appel s'est fondée sur « l'absence de toute diligence effectuée par [...] K... ou ses mandataires, que ce soit si nécessaire auprès de la juridiction ayant rendu l'ordonnance d'envoi en possession ou auprès du notaire ayant établi l'acte de notoriété au profit de [...] K..., afin de réaliser concrètement la transmission du patrimoine successoral situé à Monaco à Madame M..., veuve U... » (arrêt, p. 10, § 5), dont elle a estimé que celle-ci « démontr[ait] suffisamment le défaut de volonté réelle d'exécuter de façon effective, c'est-à-dire significative, le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris » ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs inopérants, impropres à caractériser l'absence de volonté des appelants d'exécuter le jugement et à faire obstacle à ce que les diligences accomplies par ceux-ci le 4 septembre 2018 puissent se voir reconnaître un effet interruptif de péremption, constituées par le dépôt de conclusions au fond, par la formulation d'une demande de réinscription de l'affaire au rôle et par le règlement de la somme de 100 000 euros en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 10 septembre 2015, la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile ; 5° Alors en cinquième lieu qu'un jugement étranger produit en France des effets, en tant que fait juridique, indépendamment d'une vérification de sa régularité internationale par une procédure de reconnaissance ou d'exequatur ; que la décision étrangère qui autorise une partie s'étant vue reconnaître la qualité de légataire universel à appréhender le patrimoine successoral produit ses effets en France indépendamment de toute décision d'exequatur du moment qu'elle ne doit pas donner lieu à des actes d'exécution forcée dans ce pays et que n'est pas en cause son efficacité substantielle ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt que le patrimoine successoral sis à Monaco « est en possession de [...] K... depuis l'ordonnance d'envoi en possession rendue le 10 février 2012 par le tribunal de première instance de Monaco (pièce 19 [...] K...) » (arrêt p. 9, § 4) ; qu'en énonçant, pour écarter toute diligence de nature à interrompre le délai de péremption, que « le patrimoine successoral sis à Monaco étant en possession du légataire universel, dont les droits ont été écartés par le jugement rendu le 10 septembre 2015 au profit de Madame M..., veuve U..., il appartient à ce légataire universel et ses administrateurs de justifier qu'ils ont permis à Madame M..., veuve U..., d'entrer à son tour en possession de la partie monégasque de ce patrimoine » et que « force est de constater à cet égard qu'ils ne justifient d'aucune diligence qui aurait permis à Madame M..., veuve U..., d'entrer en possession du bien immobilier sis à Monaco et d'obtenir la maîtrise des avoirs financiers du défunt, qu'il s'agisse des comptes bancaires ou des titres américains » puis en ajoutant « qu'en leur qualité de possesseurs actuels du patrimoine successoral en litige, c'est bien à eux seuls qu'il incombe de permettre sa transmission au profit de la requérante au déféré, en sollicitant s'il y a lieu la rétractation de l'ordonnance d'envoi en possession du 10 février 2012 et en donnant les instructions nécessaires à Maître N... » (arrêt p. 9, § 5), quand l'ordonnance d'envoi en possession rendue le 10 février 2012 par le tribunal de première instance de Monaco, devenue définitive, produisait ses effets en France en tant que fait juridique et qu'il ne pouvait être mis à la charge de [...] K... l'obligation de solliciter du juge monégasque la rétractation de sa décision, la cour d'appel, statuant sur déféré, a violé l'article 386 du code de procédure civile, ensemble l'article 509 du même code et les principes généraux du droit international privé ; 6° Alors en sixième lieu que dans ses conclusions sur déféré, [...] K... faisait valoir qu'il avait manifesté sa volonté réelle d'exécuter le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris dès lors, d'une part, que cette décision avait été exécutée pour le bien immobilier sis à Paris, et, d'autre part, que la condamnation au paiement d'une somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts avait été effectivement réglée au début du mois de septembre 2018 ; qu'il était soutenu qu'il ne pouvait donc lui être opposé une « absence de volonté réelle » d'exécuter le jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris dès lors que, parallèlement, était régulièrement versée aux débats, s'agissant du patrimoine successoral sis à Monaco, l'ordonnance d'envoi en possession rendue le 10 février 2012 par le tribunal de première instance de Monaco ; qu'il était ajouté qu'au regard des dispositions de l'article 891 du code civil Monégasque il était demandé à la cour d'appel saisie du fond de dire et juger que le testament du 23 juin 2005 n'était pas révoqué par la lettre du 29 août 2005 de sorte que Madame M... U... devait être déboutée de sa demande de transmission de l'intégralité de la succession mobilière et immobilière de Monsieur X... U... ; qu'il en était déduit que l'exécution du jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris, s'agissant du patrimoine successoral mobilier et immobilier sis à Monaco, se heurtait à des contestations sérieuses ainsi qu'il était exposé dans les conclusions réitératives au fond, régularisées le 4 septembre 2018, soit avant l'expiration du délai de péremption, et qui devaient se voir reconnaître un effet interruptif du délai de péremption d'instance ; qu'en ne répondant pas à ce moyen la cour d'appel, statuant sur déféré, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 7° Alors en septième lieu que le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche ; que dans le dispositif du jugement rendu le 10 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a « Rejet[é] la fin de non-recevoir ; Débout[é] Madame M... de sa demande en annulation du testament du 23 juin 2005 ; Dit que le testament du 29 août 2005 révoque le testament du 23 juin 2005 ; Dit que le legs à des institutions de bienfaisance à Monaco ou ailleurs est caduc ; Dit que l'intégralité de la succession tant immobilière que mobilière de Monsieur X... U... est transmise à son épouse, Madame P... M... ; Désign[é] Monsieur le Président de la chambre interdépartementale des Notaires de Paris, avec faculté de délégation pour régler la succession de Monsieur X... U... s'agissant du bien immobilier sis à Paris 16ème ; Enjoint Maître N... Notaire à communiquer à Madame M... l'inventaire complet et définitif relatif à la succession de Monsieur U... ainsi que le compte définitif de gestion du patrimoine ; Dit n'y avoir lieu de prononcer une astreinte ; Débout[é] Madame M... de sa demande de dommages et intérêts pour rétention d'information ; Débout[é] Madame M... de sa demande d'inopposabilité des frais de succession ; Condamn[é] in solidum le K..., Monsieur L... et Monsieur I... à payer à Madame M... la somme de 100.000€ au titre du manque à gagner du fait de la perte de loyers de l'appartement parisien ; Débout[é] Madame M... du surplus de ses demandes ; Débout[é] Madame M... du surplus de ses demandes ; Débout[é] les parties de leur demande au titre de l'article 700 du CPC ; Ordonn[é] l'emploi des dépens en frais généraux de partage ; Ordonn[é] l'exécution provisoire » ; qu'en considérant qu'en exécution de cette décision, il incombait à [...] K... de « réaliser concrètement la transmission du patrimoine successoral situé à Monaco à Madame M... veuve U... » (arrêt, p. 10, § 5), la cour d'appel, statuant sur déféré, a ajouté au dispositif susvisé et a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris, en violation de l'article 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 386 du même code ; 8° Alors en huitième et dernier lieu que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, pour démontrer qu'il ne lui appartenait nullement et qu'il n'avait pas le pouvoir de mettre concrètement en oeuvre le transfert de propriété de la partie monégasque du patrimoine successoral au profit de Madame M..., l'exposant produisait aux débats l'ordonnance du tribunal de première instance de Monaco du 10 février 2012 l'ayant envoyé en possession des biens dépendant de la succession de Monsieur X... U... et soulignait qu'à la différence de la partie « française » de la succession, aucune modalité de transmission des biens situés à Monaco n'avait été prévue par le jugement, ni aucune personne désignée pour permettre ce transfert, et que le jugement s'était contenté d'enjoindre au notaire monégasque de communiquer l'inventaire complet des biens à Madame M..., de sorte qu' « on ne [voyait] pas quelle démarche [...] [...] K... aurait dû entreprendre auprès des juridictions Monégasques » pour permettre un tel transfert (conclusions sur déféré de [...] K..., p. 11) ; qu'en affirmant néanmoins que « ni [...] K... et Monsieur L..., ni Monsieur I... n'expliqu[aient] ce qui justifierait une distinction entre l'exécution réalisée en FRANCE et l'exécution restant à mettre en oeuvre dans la principauté de MONACO » (arrêt, p. 10, § 2), pour considérer qu'était caractérisé le défaut de volonté réelle des appelants d'exécuter le jugement dès lors que Mme M... n'avait pas été mise en possession de la partie monégasque du patrimoine successoral en exécution du chef de dispositif du jugement ayant « dit que l'intégralité de la succession tant immobilière que mobilière de Monsieur X... U... est transmise à son épouse, Madame P... M... », ce qui excluait que les diligences accomplies par les appelants avant l'expiration du délai de péremption ne puissent se voir reconnaître un caractère interruptif de péremption, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de [...] K... et violé l'article 4 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmant l'ordonnance déférée sur ce point, d'avoir condamné in solidum [...] K..., Monsieur L..., ès qualités, et Monsieur I..., ès qualités, à payer à Madame M... une somme de 12 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive ; Aux motifs que : « Madame M... veuve U... est fondée à soutenir que le défaut d'exécution du jugement par [...] K... et Monsieur L..., ès qualités, ainsi que par Monsieur I..., ès qualités, est abusive en soulignant que le paiement de la somme de 100 000€ n'a été proposé qu'en limite de péremption et sans intérêts et qu'elle s'est heurtée à des difficultés répétées pour obtenir l'exécution du jugement qu'il s'agisse du bien immobilier parisien dont elle a finalement pris possession ou de tous les biens situés à MONACO dont elle n'est toujours pas en possession en raison de la persistance de la possession des défendeurs au déféré ; que cette situation lui cause un préjudice matériel direct, puisqu'elle n'a pas la maîtrise des biens en litige ; que [...] K..., Monsieur L..., ès qualités, et Monsieur I..., ès qualités, doivent donc être condamnés in solidum à lui payer une somme de 12 000€ à titre de dommages intérêts pour résistance abusive » (arrêt p. 11) ; 1° Alors que les ordonnances du conseiller de la mise en état ne sont susceptibles d'aucun recours indépendamment de l'arrêt sur le fond ; que, par exception à ce principe, elles peuvent être déférées par simple requête à la cour dans les quinze jours de leur date lorsqu'elles statuent sur une exception de procédure, un incident mettant fin à l'instance, la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ou la caducité de celui-ci ou lorsqu'elles prononcent l'irrecevabilité des conclusions en application des articles 909 et 910 du code de procédure civile ; que lorsque le déféré est formé dans l'une des hypothèses précitées, la cour d'appel n'est investie que de la connaissance du seul chef de dispositif de l'ordonnance qui a statué sur l'exception de procédure, sur l'incident mettant fin à l'instance, sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ou la caducité de celui-ci, ou sur l'irrecevabilité des conclusions prononcée en application des articles 909 et 910 du code de procédure civile, à l'exclusion de tous les autres et ce, quelles que soient les demandes formulées par le demandeur au déféré ; qu'en infirmant l'ordonnance en ce qu'elle avait rejeté la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive formulée par Madame M... et, statuant à nouveau sur cette demande, en condamnant [...] K..., Monsieur L... ès qualités, et Monsieur I..., ès qualités, à payer à Madame M... une somme de 12 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive, cependant qu'elle n'avait pas pouvoir pour connaître de ce chef de dispositif de l'ordonnance, n'étant saisie par l'effet du déféré que de la connaissance du chef de dispositif par lequel cette ordonnance avait refusé d'accueillir l'incident de péremption soulevé par Madame M... et constaté que « l'instance d'appel n'[était] pas périmée », la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 916 du code de procédure civile ; 2° Alors, subsidiairement, que même à supposer qu'une cour d'appel saisie, par la voie du déféré, d'un incident de péremption ait le pouvoir d'allouer des dommages et intérêts au demandeur au déféré pour résistance abusive, ce n'est que pour autant que l'abus invoqué trouve sa cause dans l'inertie procédurale manifestement volontaire et dilatoire de l'appelant et ne suppose aucune appréciation touchant au fond du litige ; qu'au cas présent, pour condamner [...] K..., Monsieur L... ès qualités, et Monsieur I..., ès qualités, à payer à Madame M... une somme de 12 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive, la Cour d'appel a considéré que la « persistance de la possession des défendeurs au déféré » (arrêt p. 11, § 3) causait un préjudice à Madame M... puisque celle-ci n'avait pu entrer en possession des biens situés à Monaco ; qu'en statuant de la sorte, cependant que, n'étant saisie que par la voie du déféré et dans les limites de celui-ci, elle n'avait pas pouvoir pour se prononcer sur le motif de l'inexécution du jugement du 10 septembre 2015, dont l'appréciation supposait un examen des circonstances de fond du litige, la Cour d'appel a violé l'article 916 du code de procédure civile. Le greffier de chambre
Aux termes de l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligence pendant deux ans. Lorsqu'en application de l'article 526 du même code, l'appel fait l'objet d'une radiation du rôle faute pour l'appelant de justifier avoir exécuté la décision frappée d'appel, tout acte d'exécution significative de cette décision manifeste la volonté non équivoque de l'exécuter et constitue par conséquent une diligence interrompant le délai de péremption de l'instance d'appel. Tel est le cas lorsque l'appelant, condamné par le premier juge à des dommages-intérêts a acquitté le principal de sa condamnation, à l'exclusion des intérêts y afférents
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1236 F-P+B+I Pourvoi n° U 19-16.055 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 1°/ Mme A... D..., domiciliée [...] , 2°/ l'Union départementale des syndicats Force ouvrière d'Indre-et-Loire (UD FO 37), dont le siège est 18 rue de l'Oiselet, 37550 Saint-Avertin, ont formé le pourvoi n° U 19-16.055 contre l'arrêt n° RG : 17/01821 rendu le 18 décembre 2017 par la cour d'appel d'Orléans (chambre des référés) et l'arrêt n° RG : 16/03050 rendu le 24 janvier 2019 par la même cour d'appel (chambre sociale), dans le litige les opposant à la société Les Lavandières, société par actions simplifiée, dont le siège est ZI Les Carrières, 85440 Avrillé, défenderesse à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Maunand, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de Mme D... et de l'Union départementale des syndicats Force ouvrière d'Indre-et-Loire (UD FO 37), de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Les Lavandières, et l'avis de M. Girard, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Maunand, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon les arrêts attaqués (Orléans, 18 décembre 2017 et 24 janvier 2019), par jugement du 2 septembre 2016, un conseil des prud'hommes a condamné la société Les Lavandières (la société) à payer diverses indemnités à Mme D... au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. 2. Mme D... a interjeté appel de la décision, le 27 septembre 2016. La procédure a été enregistrée sous le n° 16/03050. 3. La société a relevé aussi appel du jugement le 28 septembre 2016. La procédure a été enregistrée sous le n° 2016/03066. 4. Par ordonnance du 7 juin 2017, saisi d'un incident tendant à l'irrecevabilité des conclusions d'intimée et de l'appel incident dans le dossier 16/03050 et de caducité de l'appel principal de la société dans le dossier 16/03066 ainsi qu'à l'obtention d‘une provision, le conseiller de la mise en état, après avoir joint les deux procédures, a débouté Mme D... de toutes ses demandes. 5. Mme D... et l'Union départementale des syndicats Force ouvrière d'Indre-et-Loire (UD FO 37), intervenante volontaire à l'instance d'appel, ont déféré l'ordonnance à la cour d'appel. 6. Par un arrêt du 18 décembre 2017, la cour d'appel a dit n'y avoir lieu à déféré sur la caducité de l'appel et l'irrecevabilité des conclusions d'intimé et a rejeté la demande de provision. 7. La cour d'appel a, ensuite, statué sur le fond par arrêt du 24 janvier 2019. Examen des moyens Sur les deux moyens réunis Enoncé des moyens 8. Mme D... et l'UD FO 37 font grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas lieu à déféré quant aux dispositions de l'ordonnance entreprise en ce qu'il porte sur la caducité de l'appel et sur l'irrecevabilité des conclusions d'intimée de la société Les Lavandières et la mise à l'écart de pièces produites et conséquemment de l'appel incident, alors : « 1°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, telles qu'elles sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; que, le 14 février 2017, Mme D... et l'UD FO 37 ont, dans le cadre de l'instance d'appel enregistrée sous le RG n° 16/03066, saisi le conseiller de la mise en état de conclusions d'incident dans le dispositif desquelles il lui était expressément demandé de « prononcer la caducité de la déclaration d'appel de la SAS Les Lavandières en date du 28 septembre 2016 » ; qu'en considérant que le conseiller de la mise en état n'avait pas été saisi d'un incident de caducité pour en déduire qu'il n'y avait pas lieu à déféré sur ce point, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 916 du code de procédure civile ; 2°/ que les ordonnances du conseiller de la mise en état peuvent être déférées à la cour d'appel lorsqu'elles statuent sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ; que l'objet du déféré s'apprécie au regard des demandes soumises à la cour d'appel et non des moyens qui les fondent ; qu'en considérant qu'il n'y avait pas lieu à déféré sur la fin de non-recevoir opposée à l'appel incident de la société Les Lavandières dès lors que cette irrecevabilité était présentée par l'appelant comme la conséquence de l'irrecevabilité des conclusions de l'intimé dans le cadre duquel cet appel avait été formé, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé l'article 916 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable en la cause. » Réponse de la Cour Vu les articles 4, 462 et 916 du code de procédure civile : 9. Il résulte de ces textes que lorsqu'elle est saisie d'un déféré contre une ordonnance du conseiller de la mise en état, ayant statué dans les cas prévus aux alinéas 2 et 3 de l'article 916, la cour d'appel examine, si la demande lui en est faite, les autres demandes soumises au conseiller de la mise en état que celui-ci n'aurait pas tranchées, y compris en raison d'une omission de statuer, dès lors qu'elles étaient formulées dans les conclusions examinées par le conseiller de la mise en état et que celui-ci n'a pas réservé sa décision sur ces demandes. 10. Pour dire qu'il n'y a pas lieu à déféré, l'arrêt retient d'une part, sur la caducité de l'appel principal de la société, que le dispositif de l'ordonnance ne statue pas sur ce point, les conclusions déposées ne tendant qu'à l'irrecevabilité des conclusions d'intimée et de l'appel incident dans l'instance enregistrée sous le n° 16/03050 et d'autre part, sur l'irrecevabilité de l'appel incident de la société Les Lavandières, que l'irrecevabilité de cet appel a été rejeté du fait qu'il était présenté comme la conséquence de l'irrecevabilité des conclusions d'intimée par lesquelles il était formé. 11. En statuant ainsi alors d'une part, que le conseiller de la mise en état, qui avait joint les procédures enregistrées sous les n° 16/03050 et 16/03066, avait été saisi de conclusions d'incident tendant à la caducité de l'appel de la société intimée dans la procédure n° 16/03066 et d'autre part, que le dispositif des conclusions déposées par Mme D... dans la procédure enregistrée sous le n° 16/03050 lui demandait de déclarer les conclusions de cette intimée irrecevables ainsi que son appel incident, la cour d'appel, qui disposait du pouvoir de réparer l'omission de statuer de l'ordonnance du conseiller de la mise en état qui lui était déférée, a, modifiant l'objet du litige et méconnaissant son office, violé les textes susvisés. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 12. Mme D... et l'UD FO 37 font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande de rejet de pièces, de débouter Mme D... de ses demandes au titre des salaires, du harcèlement moral et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'UD FO 37 de toutes ses demandes, alors « que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation de l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 18 décembre 2017, qui avait notamment dit n'y avoir lieu à déféré sur les demandes tendant au prononcé de la caducité de l'appel principal de la société Les Lavandières et de l'irrecevabilité de l'appel incident de cette même société, entraînera l'annulation, par voie de conséquence, en application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile de l'arrêt sur le fond rendu le 24 janvier 2019, qui en est la suite directe et s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire. » Réponse de la Cour Vu l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile : 13. La cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire. 14. La cassation, par arrêt de ce jour, de l'arrêt du 18 décembre 2017 entraîne l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 24 janvier 2019. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à déféré quant aux dispositions de l'ordonnance entreprise en ce qu'elle porte sur la caducité de l'appel interjeté à titre principal par la société Les Lavandières (RG 16/03066), sur l'irrecevabilité des conclusions d'intimée de la société Les Lavandières ainsi que la mise à l'écart des pièces produites (RG 16/03050) et conséquemment de son appel incident, l'arrêt rendu le 18 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ; CONSTATE l'annulation de l'arrêt rendu le 24 janvier 2019 par la cour d'appel d'Orléans ; Condamne la société Les Lavandières aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Les Lavandières et la condamne à payer à Mme D... et l'Union départementale des syndicats Force ouvrière d'Indre-et-Loire (UD FO 37) la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme D... et l'Union départementale des syndicats Force ouvrière d'Indre-et-Loire (UD FO 37) PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 18 décembre 2017 D'AVOIR dit n'y avoir lieu à déféré quant aux dispositions de l'ordonnance entreprise en ce qu'il porte sur la caducité de l'appel interjeté à titre principal par la société Les Lavandières (RG n° 16/03066) ; AUX MOTIFS QUE le conseiller de la mise en état, déboutant Mme D... de ses demandes hormis celle portant sur la jonction des deux procédures, n'a pas statué, dans le dispositif de sa décision sur la caducité de l'appel principal de la société Les Lavandières (RG n° 16/03066) dans la mesure où il n'était saisi, dans le dispositif des conclusions d'incident du 14 février 2017 de Mme D... et de l'UD FO 37, que d'une demande tendant à voir « déclarer irrecevables les conclusions d'intimée et l'appel incident de la SAS Les Lavandières dans l'instance d'appel enregistrée sous le numéro de RG 16/03050 » (page 3/7 de l'ordonnance entreprise) et que l'appréciation portée sur l'appel principal de cette société - pour dire que le dépôt au greffe hors délai entraîne la caducité de l'appel – ne figure que dans sa motivation (page 5/7) ; qu'il n'y a donc pas lieu à déféré sur ce point ; ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, telles qu'elles sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; que, le 14 février 2017, Mme D... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre et Loire ont, dans le cadre de l'instance d'appel enregistrée sous le RG n° 16/03066, saisi le conseiller de la mise en état de conclusions d'incident dans le dispositif desquelles il lui était expressément demandé de « prononcer la caducité de la déclaration d'appel de la SAS Les Lavandières en date du 28 septembre 2016 » ; qu'en considérant que le conseiller de la mise en état n'avait pas été saisi d'un incident de caducité pour en déduire qu'il n'y avait pas lieu à référé sur ce point, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 916 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 18 décembre 2017 D'AVOIR dit n'y avoir lieu à déféré quant aux dispositions de l'ordonnance entreprise en ce qu'il porte sur l'irrecevabilité des conclusions d'intimée de la société Les Lavandières ainsi que la mise à l'écart des pièces produites et, conséquemment, de son appel incident (RG n° 16/03050) ; AUX MOTIFS QUE le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'appel incident ayant été rejeté du fait qu'il était présenté comme la conséquence de l'irrecevabilité des conclusions d'intimée par lesquelles il était formé, il n'y a pas lieu non plus à déféré sur cet autre point ; ALORS QUE les ordonnances du conseiller de la mise en état peuvent être déférées à la cour d'appel lorsqu'elles statuent sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ; que l'objet du déféré s'apprécie au regard des demandes soumises à la cour d'appel et non des moyens qui les fondent ; qu'en considérant qu'il n'y avait pas lieu à déféré sur la fin de non-recevoir opposée à l'appel incident de la société Les Lavandières dès lors que cette irrecevabilité était présentée par l'appelant comme la conséquence de l'irrecevabilité des conclusions de l'intimé dans le cadre duquel cet appel avait été formé, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé l'article 916 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable en la cause. TROISIEME MOYEN D'ANNULATION Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 24 janvier 2019 D'AVOIR débouté Mme D... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre et Loire de leur demande de rejet des pièces produites par la société Les Lavandières, D'AVOIR débouté Mme D... des demandes au titre de ses salaires, du harcèlement moral et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et D'AVOIR débouté l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre et Loire de toutes ses demandes ; ALORS QUE la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation de l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 18 décembre 2017, qui avait notamment dit n'y avoir lieu à déféré sur les demandes tendant au prononcé de la caducité de l'appel principal de la société Les Lavandières et de l'irrecevabilité de l'appel incident de cette même société, entraînera l'annulation, par voie de conséquence, en application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile de l'arrêt sur le fond rendu le 24 janvier 2019, qui en est la suite directe et s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
La cour d'appel, saisie d'un déféré contre une ordonnance du conseiller de la mise en état ayant statué dans les cas prévus aux alinéas 2 et 3 de l'article 916 du code de procédure civile, examine, si la demande lui en est faite, les autres demandes soumises au conseiller de la mise en état que celui-ci n'aurait pas tranchées, y compris en raison d'une omission de statuer, dès lors qu'elles ont été formulées dans les conclusions soumises au conseiller de la mise en état et que celui-ci n'a pas réservé sa décision sur celles-ci
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1239 F-P+B+I Pourvoi n° R 19-20.238 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 La société Semefer, société par actions simplifiée, dont le siège est 250 rue des Carrières Morillons, ZAC Voeux Saint Georges, 94290 Villeneuve-le-Roi, a formé le pourvoi n° R 19-20.238 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 6), dans le litige l'opposant au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Hortensias, représenté par son syndic, le Cabinet T... M... (CHV), dont le siège est [...], 94210 La Varenne-Saint-Hilaire, défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Leroy-Gissinger, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Semefer, de la SCP Le Griel, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Hortensias, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Leroy-Gissinger, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2019), le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Hortensias situé [...] à La Varenne Saint-Hilaire (le SDC) a confié des travaux à la société Semefer (la société). 2. Le 20 février 2015, la société a présenté une requête en injonction de payer pour avoir paiement de factures des 29 septembre et 31 décembre 2010, devant un tribunal de grande instance qui a accueilli partiellement sa demande, par ordonnance du 8 juin 2015. 3. Le 29 juin 2015, le SDC a formé opposition à l'ordonnance devant un tribunal de grande instance et, par une décision du 1er février 2016, le juge de la mise en état de ce tribunal a constaté l'extinction de l'instance. 4. Par acte d'huissier en date du 17 février 2016, la société a assigné le SDC en paiement des factures devant un tribunal de grande instance qui, par jugement du 28 avril 2017, a dit recevables les demandes et a condamné le SDC à verser à la société une certaine somme. 5. Le SDC a interjeté appel de ce jugement. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 6. La société fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite sa demande, alors « que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer constitue une citation en justice au sens de l'article 2241 du code civil, interruptive de prescription, peu important que l'ordonnance d'injonction de payer soit ultérieurement déclarée non avenue en l'absence de constitution d'avocat par le créancier à la suite de l'opposition formée à l'encontre de l'ordonnance par le débiteur ; qu'en retenant que le créancier n'ayant pas constitué avocat dans le délai prévu à l'article 1418 du code de procédure civile, l'ordonnance portant injonction de payer était non avenue en application de l'article 1419 du code de procédure civile, ce qui ne privait pourtant pas la signification de l'ordonnance de son caractère interruptif de prescription, la cour d'appel a violé les articles 1419 du code de procédure civile et 2241 du code civil. » Réponse de la Cour 7. Aux termes de l'article 2243 du code civil, l'interruption de la prescription est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance ou si sa demande est définitivement rejetée. 8. Il en résulte que lorsque l'instance sur opposition à une ordonnance portant injonction de payer est déclarée éteinte en application de l'article 1419 du code de procédure civile, faute pour le créancier d'avoir constitué avocat dans le délai requis, l'interruption de la prescription résultant de la signification de l'ordonnance portant injonction de payer est non avenue. 9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, qui a constaté que l'instance sur opposition avait été déclarée éteinte par application de l'article 1419 de ce code, et en a déduit que l'action en paiement engagée le 17 février 2016 était prescrite, se trouve légalement justifié. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Semefer aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Semefer Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré prescrite la demande de la société Semefer ; Aux motifs que les parties ne produisent que les deux premières pages, celle d'entête et une de motifs de l'ordonnance du juge de la mise en état « d'extinction de l'instance ». Celle-ci est motivée par le fait que le créancier n'a pas constitué avocat dans le délai prévu à l'article 1418 du code de procédure civile, ce qui rend l'ordonnance portant injonction de payer non avenue, conformément aux dispositions de l'article 1419 du code de procédure civile ; qu'en tout état de cause, seule la signification de l'ordonnance produit un effet interruptif de prescription au profit du créancier ; que tel n'est pas le cas de la requête en injonction de payer ni de l'ordonnance elle-même ; que la société Semefer ne produit pas aux débats la signification de l'ordonnance d'injonction de payer et ne précise même pas sa date ; que dans ces conditions, la cour n'est pas en mesure de constater l'interruption de la prescription qui doit être établie par le créancier ; que dès lors, à défaut d'interruption de la prescription, l'action en paiement de la facture du 29 septembre 2010 d'un montant de 16 591,77 € devait être intentée dans les 5 ans à compter de cette date, soit avant le 30 septembre 2015 et celle en paiement de la facture d'un montant de 4 147,94 € dans les 5 ans à compter du 30 septembre 2010, soit avant le 1er janvier 2016 par application des articles 640 et 641 du code de procédure civile ; que l'assignation en paiement des factures n'a été délivrée que le 17 février 2016, de sorte que la demande de la Semefer est irrecevable car prescrite ; qu'au surplus, la société Semefer, au dispositif de ses conclusions, si elle demande la confirmation du jugement, réclame cependant à la cour de condamner « le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] » qui n'est pas dans la cause ; Alors 1°) que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer constitue une citation en justice au sens de l'article 2241 du code civil, interruptive de prescription, peu important que l'ordonnance d'injonction de payer soit ultérieurement déclarée non avenue en l'absence de constitution d'avocat par le créancier à la suite de l'opposition formée à l'encontre de l'ordonnance par le débiteur ; qu'en retenant que le créancier n'ayant pas constitué avocat dans le délai prévu à l'article 1418 du code de procédure civile, l'ordonnance portant injonction de payer était non avenue en application de l'article 1419 du code de procédure civile, ce qui ne privait pourtant pas la signification de l'ordonnance de son caractère interruptif de prescription, la cour d'appel a violé les articles 1419 du code de procédure civile et 2241 du code civil ; Alors 2°) que le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction, qui lui interdit de fonder sa décision sur des moyens relevés d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs explications ; qu'en ayant soulevé d'office le moyen tiré de ce que l'ordonnance d'injonction de payer du 8 juin 2015 n'aurait pas été signifiée au débiteur et de ce que la société Semefer n'avait pas produit la signification de l'ordonnance d'injonction de payer ni n'avait précisé sa date, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur ce moyen relatif à la signification de l'ordonnance, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; Alors 3°) que les juges ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; qu'en reprochant à la société Semefer de n'avoir pas produit la signification de l'ordonnance d'injonction de payer et de n'avoir pas précisé sa date, cependant que la société Semefer avait soutenu que « la SCP X... a procédé à la signification de l'ordonnance obtenue le 8 juin 2015 » et que le syndicat des copropriétaires ayant le 29 juin 2015 formé opposition à l'ordonnance, n'avait pas contesté que la signification de l'ordonnance avait été effectuée, la cour d'appel a méconnu les termes du litige dont elle était saisie, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; Alors 4°) que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en reprochant à la société Semefer de n'avoir pas produit la signification de l'ordonnance d'injonction de payer et de n'avoir pas précisé sa date, sans avoir analysé le procès-verbal de réception d'opposition dressé par le greffier en chef du tribunal de grande instance de Créteil mentionnant expressément que le syndicat des copropriétaires avait, par lettre datée 26 juin 2016 formé opposition à l'ordonnance d'« injonction de payer qui lui a été signifiée par la SCP X..., huissiers de justice ( ) par acte en date du 10 juin 2015 comme suite à l'ordonnance prononcée le 08 juin 2015 » (pièce communiquée n° 12), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; Alors 5°) que la cour d'appel statue sur les prétentions énoncées dans le dispositif ; que la cour d'appel a constaté qu'au surplus, la société Semefer, au dispositif de ses conclusions, demande la confirmation du jugement mais réclame cependant à la cour de condamner « le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] » qui n'est pas dans la cause ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations dont il résultait que, nonobstant l'erreur matérielle relative à la désignation du syndicat des copropriétaires, la société Semefer demandait, dans le dispositif de ses conclusions, de « confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Créteil le 28 avril 2017 entrepris en toutes ses dispositions » et ne demandait contre « le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] » que des intérêts de retard, dommages et intérêts pour résistance abusive ainsi que des frais irrépétibles, de sorte que la cour d'appel, qui était bien régulièrement saisie par la société Semefer d'une demande de confirmation du jugement entrepris en ce qu'il avait condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Hortensias à lui payer des sommes de 20 739,71 euros et de 2 000 euros, a violé l'article 954 du code de procédure civile.
Il résulte de l'article 2243 du code civil que, lorsque l'instance sur opposition à une ordonnance portant injonction de payer est déclarée éteinte en application de l'article 1419 du code de procédure civile, faute pour le créancier d'avoir constitué avocat dans le délai requis, l'interruption de la prescription résultant de la signification de l'ordonnance portant injonction de payer est non avenue
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1240 F-P+B+I Pourvoi n° M 19-17.934 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 M. L... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° M 19-17.934 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2018, rectifié par arrêt du 27 mai 2019, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la caisse d'allocations familiales de La Réunion, dont le siège est 412 rue Fleur de la Jade, CS 61038, 97833 Sainte-Marie cedex, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Fulchiron, conseiller, les observations de la SCP Colin-Stoclet, avocat de M. T..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Fulchiron, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon les arrêts attaqués (Saint-Denis de la Réunion, 30 novembre 2018 et 27 mai 2019), la caisse d'allocations familiales de La Réunion (la caisse) a informé M. T..., au cours de l'année 2014, que ses droits étaient suspendus. 2. Par une lettre de mise en demeure en date du 6 mars 2015, la caisse lui a demandé de payer une certaine somme à titre de trop-perçu, tandis que M. T... a sollicité le paiement d'un rappel de prestations. 3. Par jugement en date du 31 août 2016, un tribunal des affaires de sécurité sociale a annulé la mise en demeure et rejeté les autres demandes de M. T.... 4. M. T... a interjeté appel, le 12 octobre 2016, de ce jugement, qui lui a été notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 31 août 2016. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. M. T... fait grief à l'arrêt en date du 30 novembre 2018, rectifié par l'arrêt en date du 27 mai 2019, de déclarer irrecevable son appel comme tardif, alors « que la date de réception d'une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire ; qu'en l'espèce, M. T... avait fait valoir qu'il n'avait retiré le pli recommandé lui notifiant le jugement du 31 août 2016 que le 13 septembre 2006, soit moins d'un mois avant d'interjeter appel dudit jugement ; qu'en retenant qu'en cas de notification à domicile, la date de notification du jugement est celle à laquelle la lettre de notification a été déposée et non celle à laquelle elle a été retirée, pour en déduire que le jugement avait été notifié à M. T... le 6 septembre 2016, date à laquelle lui a été distribué l'avis selon lequel un courrier était tenu à sa disposition au bureau de poste, et que l'appel formé le 12 octobre était irrecevable car tardif, tandis que le délai d'appel n'avait couru qu'à compter du 13 septembre 2016, date à laquelle M. T... avait retiré le courrier lui notifiant ce jugement, la cour d'appel a violé l'article 669, alinéa 3, du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 528, 668 et 669 du code de procédure civile : 6. Il résulte de ces textes que le délai d'appel, à l'égard du destinataire de la lettre de notification du jugement, court à compter de la date à laquelle la lettre lui est remise. 7. Pour déclarer l'appel irrecevable comme tardif, l'arrêt retient qu'il résulte des dispositions de l'article R. 142-28 du code de la sécurité sociale que le délai d'appel est d'un mois à compter de la notification du jugement, qu'en cas de notification à domicile, le délai court à compter du dépôt de la lettre recommandée et non pas de son retrait et qu'en conséquence, l'appel formé le 12 octobre 2016, alors que l'accusé de réception de la notification du jugement était en date du 6 septembre 2016, est manifestement hors délais. 8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 2018, rectifié par arrêt du 27 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée. Condamne la caisse d'allocations familiales de La Réunion aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la caisse d'allocations familiales de La Réunion à payer à M. T... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Colin-Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. T... IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt en date du 30 novembre 2018, rectifié par l'arrêt en date du 27 mai 2019, d'avoir déclaré irrecevable l'appel interjeté par M. T... ; AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions de l'article R. 142-28 du code de la sécurité sociale que le délai d'appel est d'un mois ; qu'en application de l'article 528 du code de procédure civile, ce délai court à compter de la notification du jugement ; qu'en cas de notification à domicile, le délai d'appel court à compter du dépôt de la lettre recommandée et non pas de son retrait ; qu'ainsi l'avis selon lequel un courrier était tenu à la disposition de M. T... au bureau de poste ayant été distribué le 6 septembre 2016, c'est à cette date que lui avait été notifié le jugement ; qu'en conséquence l'appel formé le 12 octobre 2016 était hors délai ; ALORS QUE la date de réception d'une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire ; qu'en l'espèce, M. T... avait fait valoir qu'il n'avait retiré le pli recommandé lui notifiant le jugement du 31 août 2016 que le 13 septembre 2006, soit moins d'un mois avant d'interjeter appel dudit jugement ; qu'en retenant qu'en cas de notification à domicile, la date de notification du jugement est celle à laquelle la lettre de notification a été déposée et non celle à laquelle elle a été retirée, pour en déduire que le jugement avait été notifié à M. T... le 6 septembre 2016, date à laquelle lui a été distribué l'avis selon lequel un courrier était tenu à sa disposition au bureau de poste, et que l'appel formé le 12 octobre était irrecevable car tardif, tandis que le délai d'appel n'avait couru qu'à compter du 13 septembre 2016, date à laquelle M. T... avait retiré le courrier lui notifiant ce jugement, la cour d'appel a violé l'article 669 alinéa 3 du code de procédure civile.
Il résulte des articles 528, 668 et 669 du code de procédure civile qu'en cas de notification à domicile, le délai pour faire appel court, à l'égard du destinataire de la lettre de notification, à compter de la date à laquelle cette lettre lui a été remise, c'est-à-dire à compter de son retrait
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1242 F-P+B+I Pourvoi n° D 19-19.514 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 La société Bureau de contrôle fédéral, dont le siège est 21 rue du père JB Salles, 34300 Agde, a formé le pourvoi n° D 19-19.514 contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2018 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme M... V..., domiciliée [...] , 2°/ à Pôle emploi de Castelginest, dont le siège est 12 rue du Pont Vieil, 31780 Castelginest, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Fulchiron, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Bureau de contrôle fédéral, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Fulchiron, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 décembre 2018) et les productions, Mme V... a été licenciée le 16 mars 2015 par la société Bureau de contrôle fédéral. 2. La société Bureau de contrôle fédéral a interjeté appel du jugement la condamnant à payer à Mme V... diverses sommes. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. La société Bureau de contrôle fédéral fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, puis de le condamner à payer au salarié diverses sommes à l'exception de l'indemnité de travail dissimulé, alors : « 1°/ que le Bureau de contrôle fédéral a déposé des conclusions assorties de pièces nouvelles le 9 octobre 2018 ; qu'ayant été déposées antérieurement à l'ordonnance de clôture, intervenue le 10 octobre 2018, ces conclusions étaient en principe recevables ; qu'en s'abstenant de viser les conclusions du 9 octobre 2018, et de statuer au vu de ces conclusions, les juges du fond ont violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ; 2°/ qu'en tout cas, pour avoir ignoré les conclusions déposées le 9 octobre 2018, sans se prononcer sur leur mise à l'écart, les juges du fond ont à tout le moins violé les articles 12, 782, 783 et 907 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 2, du code de procédure civile : 4. Il résulte de ces textes que s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date. 5. Pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, puis le condamner à payer au salarié diverses sommes à l'exception de l'indemnité de travail dissimulé, l'arrêt se prononce au visa des conclusions notifiées par la société Bureau de contrôle fédéral le 11 juillet 2017. 6. En statuant ainsi, alors qu'il ressort des productions que la société Bureau de contrôle fédéral avait déposé le 9 octobre 2018 des conclusions développant une argumentation complémentaire portant sur l'examen des fiches horaires établies par Mme V..., la cour d'appel, qui n'a pas visé ces dernières conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ; Condamne Mme V... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Bureau de contrôle fédéral L'arrêt attaqué encourt la censure ; EN CE QU' il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, puis condamné l'employeur à payer au salarié diverses sommes à l'exception de l'indemnité de travail dissimulé ; AUX MOTIFS QUE « le BUREAU DE CONTROLE FEDERAL demande à la Cour d'appel d'infirmer le jugement et de rejeter les demandes de la salariée par des conclusions du 11 juillet 2017 et que par conclusions du 14 septembre 2017, la salariée demande le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur et l'octroi de diverses sommes » ; ALORS QUE, premièrement, le BUREAU DE CONTROLE FEDERAL a déposé des conclusions assorties de pièces nouvelles le 9 octobre 2018 ; qu'ayant été déposées antérieurement à l'ordonnance de clôture, intervenue le 10 octobre 2018, ces conclusions étaient en principe recevables ; qu'en s'abstenant de viser les conclusions du 9 octobre 2018, et de statuer au vu de ces conclusions, les juges du fond ont violé les articles 455 et 954 du Code de procédure civile ; ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, pour avoir ignoré les conclusions déposées le 9 octobre 2018, sans se prononcer sur leur mise à l'écart, les juges du fond ont à tout le moins violé les articles 12, 782, 783 et 907 du Code de procédure civile.
Il résulte des articles 455, alinéa 1, et 954, alinéa 2, du code de procédure civile que s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date. Doit donc être cassé l'arrêt d'une cour d'appel, qui n'a pas visé les dernières conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, alors qu'il résulte des productions que ces conclusions développaient une argumentation complémentaire
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1243 F-P+B+I Pourvoi n° Z 19-20.039 Aide juridictionnelle partielle en demande au profit de M. G.... Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 6 juin 2019. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 M. M... G..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Z 19-20.039 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2018 par la cour d'appel de Nîmes (1re chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. B... L..., domicilié [...] , 2°/ à la société le Moulin de Velten, société civile immobilière, dont le siège est centre affaires AACA, Les bureaux de l'Arche, 5 rue des Alumettes, 13086 Aix-en-Provence cedex 2, 3°/ à M. I... Y..., domicilié [...] , défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. G..., de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société le Moulin de Velten, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. L..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. Y..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 novembre 2018), M. G... a fait assigner la SCI Le Moulin de Velten (la SCI), ainsi que MM. Y... et L..., devant un juge de l'exécution, en vue de l'annulation d'un nantissement de parts sociales, d'un commandement de payer et de saisies-attributions, pratiqués à son encontre, et de la condamnation des défendeurs au paiement de dommages-intérêts. 2. M. G... a relevé appel du jugement par lequel le juge de l'exécution a déclaré irrecevable ses demandes d'annulation et l'a condamné à payer à à M. Y... des dommages-intérêts pour procédure abusive et à chacun des défendeurs une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 3. M. G... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes en annulation des voies d'exécution forcée pratiquées à son encontre, alors « que le débiteur est recevable à contester devant le juge la saisie de ses rémunérations postérieurement à son prononcé et tant qu'elle n'a pas produit tous ses effets ; qu'en considérant que M. G... ne pouvait contester la saisie sur rémunérations, faute de l'avoir contestée dans le délai d'un mois prévu par l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, la cour d'appel a violé les articles R. 3252-15 et R. 3252-19 du code du travail, ensemble l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution ainsi que l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution par fausse application. » Réponse de la Cour 4. En confirmant le jugement du juge de l'exécution, qui n'avait pas statué sur la contestation d'une saisie des rémunérations, la cour d'appel n'a pas déclaré irrecevable une demande de M. G... tendant à l'annulation de cette saisie, de sorte que les critiques dirigées contre les motifs de l'arrêt relatifs à cette saisie des rémunérations sont inopérants. 5. Le moyen ne peut donc pas être accueilli. Mais sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 6. M. G... fait le même grief à l'arrêt, alors « que la mainlevée de la mesure de nantissement peut être demandée à tout moment pendant la durée de la mesure ; que la cour d'appel a relevé que M. G... contestait le nantissement des parts sociales de la SCI Le Moulin de Velten du 5 février 2013 ; qu'en énonçant, pour dire que M. G... était irrecevable à contester ce nantissement par assignation du 8 janvier 2016, que la contestation n'avait pas été formée dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie, conformément à l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, la cour d'appel a violé l'article R. 512-1 du code des procédures civiles d'exécution et l'article R. 211-11 du même code par fausse application, ensemble l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution. » Réponse de la Cour Vu les articles R. 211-11 et R. 512-1 du code des procédures civiles d'exécution : 7. Il résulte du second de ces textes que si les conditions prévues pour pratiquer une mesure conservatoire ne sont pas réunies, le juge peut en ordonner la mainlevée à tout moment. 8. Pour confirmer le jugement ayant déclaré irrecevable l'exception de nullité d'un nantissement de parts sociales de la SCI pratiqué à l'encontre de M. G... le 5 février 2013, l'arrêt retient, par motifs propres, que les contestations relatives aux saisies sont, conformément aux dispositions de l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie et que M. G... est par voie de conséquence irrecevable à contester par assignation du 8 janvier 2016, des actes signifiés en 2013. Il retient, en outre, par motifs adoptés, qu'en l'absence de toute contestation utile quant à la signification de ces actes, ces derniers sont aujourd'hui définitifs, faute d'avoir été contestés dans le délai légal devant la juridiction compétente, et que, si l'exception de nullité est perpétuelle, le demandeur au procès ne peut utilement se prévaloir de la nullité d'un acte de procédure qu'à l'occasion de contestations recevables, qu'ainsi le caractère perpétuel de l'exception de nullité n'a ni pour objet, ni pour effet de réduire à néant le principe de sécurité juridique en permettant de contester à tout moment la validité d'un acte juridique devenu définitif, pour en déduire qu'il y avait lieu de faire droit, s'agissant des demandes dirigées contre les actes susvisés, aux fins de non-recevoir opposées en défense tenant à la tardiveté de l'action, faute de respect d'un délai préfix. 9. En statuant ainsi, alors que la contestation d'un nantissement de parts sociales n'est pas soumise au délai fixé par l'article R. 211-11 susmentionné, régissant la contestation d'une saisie-attribution, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 10. La critique formulée par la première branche du moyen ne concernant que la recevabilité de la contestation d'un nantissement de parts sociales de la SCI pratiqué à l'encontre de M. G... le 5 février 2013, la portée de la cassation est limitée au chef critiqué confirmant le jugement en tant que celui-ci a déclaré irrecevable cette contestation, ainsi qu'aux chefs accessoires du jugement confirmé et de l'arrêt attaqué ayant condamné M. G... au profit de la SCI au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens. Mise hors de cause 11. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause M. L... et M. Y..., dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, l'arrêt rendu le 8 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes, mais seulement en ce qu'il a, d'une part, en confirmant le jugement déféré, déclaré irrecevable l'exception de nullité d'un nantissement de parts sociales du 5 février 2013 formée par M. G... et a condamné ce dernier à payer à la SCI Le Moulin de Velten la somme de 1 200 euros, ainsi que les dépens exposés par cette dernière, et, d'autre part, condamné M. G... à payer la somme de 2 000 euros à la SCI Le Moulin de Velten à titre complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens exposés par la SCI Le Moulin de Velten ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Met hors de cause M. L... et M. Y... ; Condamne la SCI Le Moulin de Velten aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur référendaire empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. G... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes de M. G... en annulation des voies d'exécution forcée pratiquées à son encontre ; AUX MOTIFS QUE le nantissement des parts sociales de la SCI le Moulin de Velten du 5 février 2013 et la saisie-attribution du 1er mars 2013 sont des actes pris en exécution d'un arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix en Provence le 31 mai 2006 déclarant M. G... coupable des faits de faux commis courant janvier 1997, usage de faux commis courant décembre 1998 et détournement de fonds de la SCI Moulin de Velten pour un montant de 25 000,41 euros au préjudice de la SCI, et de ses trois associés : Mmes P... et A... D... ; qu'il a été condamné à une peine d'emprisonnement de 8 mois dont 4 mois avec sursis outre 10 000 euros d'amende et sur l'action civile à la somme de 25 000,41 euros outre la somme de 800 euros et 2 000 euros complémentaire au titre de l'article 475-1 du CPP ; que les contestations relatives aux saisies sont conformément aux dispositions de l'article R 211-11 du code des procédures d'exécution, formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie ; que M. G... est par voie de conséquence irrecevable à contester par assignation du 8 janvier 2016, des actes signifiés en 2013 ; que pour la saisie des rémunérations, elle sera prise en exécution de l'arrêt de la cour d'appel du 31 mai 2006 ; que les mêmes règles que celles rappelées ci-dessus s'appliquent donc et M. G... ne peut venir quelle que soit la motivation qu'il retient, contester une saisie deux ans plus tard ; ET AUX MOTIFS ENVENTUELLEMENT ADOPTES QU' il résulte des pièces de la procédure, en l'absence notamment de toute contestation utile quant à la signification de ces actes, que ces derniers sont aujourd'hui définitifs faute d'avoir été contestés dans le délai légal devant la juridiction compétente ; qu'à cet égard, il convient de rappeler à M. G... que si l'exception de nullité est perpétuelle de sorte que ce moyen peut être soulevé par le défendeur dans l'instance, le demandeur au procès ne peut utilement se prévaloir de la nullité d'un acte de procédure qu'à l'occasion de contestations recevables ; qu'ainsi contrairement à ce que considère M. G..., le caractère perpétuel de l'exception de nullité n'a ni pour objet, ni pour effet de réduire à néant le principe de sécurité juridique en permettant de contester à tout moment la validité d'un acte juridique devenu définitif ; qu'il y a donc lieu de faire droit, s'agissant des demandes dirigées contre les actes susvisés, aux fins de non-recevoir opposées en défense tenant à la tardiveté de l'action faute de respect d'un délai préfix ; qu'aux termes de l'article R.211-11 du code des procédures civiles d'exécution : « à peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur ; que sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie » ; 1) ALORS QUE la mainlevée de la mesure de nantissement peut être demandée à tout moment pendant la durée de la mesure; que la cour d'appel a relevé que M. G... contestait le nantissement des parts sociales de la SCI le Moulin de Velten du 5 février 2013 ; qu'en énonçant, pour dire que M. G... était irrecevable à contester ce nantissement par assignation du 8 janvier 2016, que la contestation n'avait pas été formée dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie, conformément à l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, la cour d'appel a violé l'article R. 512-1 du code des procédures civiles d'exécution et l'article R. 211-11 du même code par fausse application, ensemble l'article L.121-2 du code des procédures civiles d'exécution ; 2) ALORS QUE le débiteur est recevable à contester devant le juge la saisie de ses rémunérations postérieurement à son prononcé et tant qu'elle n'a pas produit tous ses effets; qu'en considérant que M. G... ne pouvait contester la saisie sur rémunérations, faute de l'avoir contestée dans le délai d'un mois prévu par l'article R.211-11 du code des procédures civiles d'exécution, la cour d'appel a violé les articles R. 3252-15 et R. 3252-19 du code du travail, ensemble l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution ainsi que l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution par fausse application.
Il résulte de l'article R. 512-1 du code des procédures civiles d'exécution que si les conditions prévues pour pratiquer une mesure conservatoire ne sont pas réunies, le juge peut en ordonner la mainlevée à tout moment. Encourt par conséquent la censure, l'arrêt d'une cour d'appel qui déclare irrecevable la contestation d'un nantissement de parts sociales, au motif qu'elle serait soumise au délai fixé par l'article R 211-11 du même code, alors que ce texte est relatif à la saisie-attribution
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1245 F-P+B+I Pourvoi n° W 19-13.642 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 M. O... N... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° W 19-13.642 contre l'arrêt n° RG : 18/02875 rendu le 14 janvier 2019 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme Q... F..., domiciliée [...] , 2°/ à M. P... S..., domicilié [...], CH-1009 Pully (Suisse), 3°/ à M. R... V..., domicilié [...], CH-8008 Zurich (Suisse), défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lemoine, conseiller référendaire, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. N... T..., de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. S..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Lemoine, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 14 janvier 2019 ), Mme F... a été licenciée suite à une lettre signée par M. N... T... (M. N... ), agissant en qualité de mandataire de L... B... T... y H..., décédée quelques mois plus tard. Postérieurement, la formation des référés d'un conseil de prud'hommes a, par une ordonnance du 7 mars 2018, condamné M. N... à remettre sous astreinte à Mme F... une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte et s'est réservé le pouvoir de liquider l'astreinte. 2. Par la suite, tandis que Mme F... a saisi la formation des référés en liquidation de l'astreinte, M. N... l'a également saisie afin de voir ordonner le rapport de l'ordonnance du 7 mars 2018. Par ordonnance du 14 août 2018, le juge des référés a ordonné la jonction des deux procédures et a notamment rapporté l'ordonnance du 7 mars 2018 et rejeté les demandes de Mme F... en liquidation de l'astreinte. 3. Mme F... a interjeté appel de cette ordonnance par deux déclarations d'appel du même jour, visant chacune une partie des chefs de dispositif de la décision entreprise. La cour d'appel a rendu deux arrêts le 14 janvier 2019 (numéros RG 18/02873 et 18/02875) contre lesquels M. N... a formé deux pourvois. 4. L'arrêt attaqué par le présent pourvoi est l'arrêt numéro RG 18/02875. Examen des moyens Sur le second moyen, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 6. M. N... fait grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance prononcée le 14 août 2018 et de dire n'y avoir lieu de rapporter l'ordonnance prononcée le 7 mars 2018 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Bayonne et que cette ordonnance était pleinement exécutoire, alors : « 1°/ qu'une même et unique décision ne peut faire l'objet que d'un seul appel de la part d'une même partie, quand bien même elle aurait été rendue à la suite de la jonction de deux instances ; qu'en jugeant au contraire que la jonction d'instance avait conservé l'autonomie des deux procédures jointes, notamment en ce qui concernait l'exercice des voies de recours, de sorte que le second appel formé par Mme F... à l'encontre de la décision concernée était recevable, au même titre que le premier, cependant qu'il était constant que les deux appels étaient relatifs à la même et unique décision rendue à la suite de la jonction d'instance, la cour d'appel a violé les articles 367 et 901 du code de procédure civile ; 2°/ que la déclaration d'appel énonce les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité de sorte que, sauf indivisibilité de l'objet du litige, la déclaration d'appel vaut acquiescement de l'appelant aux chefs du jugement attaqué non expressément visés par la déclaration ; qu'en jugeant pourtant qu'il ne pouvait être déduit de la déclaration d'appel formée par l'appelante à l'encontre de l'ordonnance du 14 août 2018, enregistrée en premier et limitée à la liquidation de l'astreinte, un quelconque acquiescement de celle-ci aux chefs de dispositif de ladite ordonnance non expressément visés par cette déclaration et en accueillant ainsi le second appel formé par l'appelante des chefs non critiqués par la première déclaration, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile ; 3°/ que si la rectification, dans le délai d'appel, d'une première déclaration erronée ou incomplète reste possible, la déclaration d'appel rectificative se substitue nécessairement à la déclaration initiale, de sorte que la cour d'appel, qui n'est saisie que des chefs de dispositif critiqués par la déclaration rectificative, ne peut statuer à la fois sur les chefs critiqués par la première déclaration et ceux critiqués par la seconde ; qu'en statuant à la fois sur les demandes formées par Mme F... par sa première et sa seconde déclaration d'appel, cependant qu'à supposer même que la seconde déclaration d'appel ait rectifié la première, la juridiction du second degré ne pouvait être saisie cumulativement des chefs critiqués par les deux déclarations, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 7. Il résulte de l'article 901 du code de procédure civile que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. 8. La déclaration d'appel, nulle, erronée ou incomplète, peut néanmoins être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai pour conclure. 9. Dès lors, une seconde déclaration d'appel peut venir étendre la critique du jugement à d'autres chefs non critiqués dans la première déclaration, sans qu'un acquiescement aux chefs du jugement non critiqués dans un premier temps ne puisse être déduit de cette omission. 10. En outre, la cour d'appel ayant été valablement saisie dès la première déclaration d'appel, la seconde déclaration s'incorpore à la première, de sorte que si sont critiqués, dans la seconde déclaration d'appel, de nouveaux chefs du jugement, la cour d'appel reste saisie de la critique des chefs du jugement mentionnés dans la première déclaration d'appel. 11. Par ce motif de pur droit, substitué d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués par le moyen, l'arrêt, qui a constaté que Mme F... avait formé successivement le même jour deux déclarations d'appel critiquant chacune des chefs distincts de l'ordonnance déférée, se trouve légalement justifié. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. N... T... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. N... T... et le condamne à payer à M. S... la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. N... T... PREMIER MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR infirmé l'ordonnance prononcée le 14 août 2018 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Bayonne en ce qu'elle avait rapporté l'ordonnance de référé du 7 mars 2018 prononcée par la même formation, dit que monsieur N... ne pouvait être juridiquement soumis à l'exécution des condamnations prononcées à son encontre par ordonnance du 7 mars 2018 et condamné madame F... aux dépens de l'instance et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau des chefs infirmés, D'AVOIR dit n'y avoir lieu de rapporter l'ordonnance prononcée le 7 mars 2018 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Bayonne et dit que cette ordonnance était pleinement exécutoire ; AUX MOTIFS QUE sur l'irrecevabilité de l'appel, monsieur N... soutenait qu'en limitant son appel, dans la déclaration d'appel enregistrée le même jour sous le numéro 18-2873, aux dispositions de l'ordonnance du 14 août 2018 ayant pour objet la liquidation de l'astreinte, l'appelante avait implicitement mais nécessairement acquiescé pour le surplus au "jugement" – respectivement l'ordonnance – du 14 août 2018 et en avait déduit que l'appel, interjeté quelques minutes plus tard à l'encontre des dispositions de cette ordonnance ayant trait au rapport de l'ordonnance de référé du 7 mars 2018, était irrecevable ; que madame F... avait en effet formé deux appels distincts à l'encontre de l'ordonnance du 14 août 2018 pour en obtenir l'infirmation : l'un en ce qu'elle avait rejeté sa demande de liquidation de l'astreinte ; l'autre en ce qu'elle avait rapporté l'ordonnance de référé du 7 mars 2018 ; qu'il importait toutefois de rappeler que ces deux actions distinctes (liquidation d'astreinte et rapport de l'ordonnance du 7 mars 2018) avaient été engagées par deux demandeurs différents madame F..., pour la première, monsieur N... pour la seconde et avaient fait l'objet, lors de l'audience de plaidoirie, d'une décision de jonction ; que cependant les jonctions d'instance qui sont de simples mesures d'administration judiciaire, ne créent pas une instance unique et n'entraînent pas de modifications dans les rapports juridiques d'instance propres à chacune des procédures jointes qui conservent leur autonomie notamment en ce qui concerne l'exercice des voies de recours ; qu'il ne peut dès lors être déduit de la déclaration d'appel enregistrée en premier, relative à la liquidation de l'astreinte, un quelconque acquiescement de madame F... aux dispositions de l'ordonnance attaquée ayant statué sur le rapport de l'ordonnance du 7 mars 2018 et donc une renonciation à en faire appel ; que le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'appel est en conséquence rejeté ; qu'il en découle toutefois que les conclusions de monsieur S... qui tendent à faire prononcer provisoirement par la cour la liquidation de l'astreinte et de celle-ci à 300 euros par jour de retard et par document sont irrecevables et sans objet dans le cadre de la présente instance (étant observé que monsieur S... avait déposé un même jeu de conclusions dans les deux procédures d'appel dans lesquelles il avait été intimé) (arrêt, p. 6 et 7) ; ALORS, D'UNE PART, QU'une même et unique décision ne peut faire l'objet que d'un seul appel de la part d'une même partie, quand bien même elle aurait été rendue à la suite de la jonction de deux instances ; qu'en jugeant au contraire que la jonction d'instance avait conservé l'autonomie des deux procédures jointes, notamment en ce qui concernait l'exercice des voies de recours, de sorte que le second appel formé par madame F... à l'encontre de la décision concernée était recevable, au même titre que le premier, cependant qu'il était constant que les deux appels étaient relatifs à la même et unique décision rendue à la suite de la jonction d'instance, la cour d'appel a violé les articles 367 et 901 du code de procédure civile ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE la déclaration d'appel énonce les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité de sorte que, sauf indivisibilité de l'objet du litige, la déclaration d'appel vaut acquiescement de l'appelant aux chefs du jugement attaqué non expressément visés par la déclaration ; qu'en jugeant pourtant qu'il ne pouvait être déduit de la déclaration d'appel formée par l'appelante à l'encontre de l'ordonnance du 14 août 2018, enregistrée en premier et limitée à la liquidation de l'astreinte, un quelconque acquiescement de celle-ci aux chefs de dispositif de ladite ordonnance non expressément visés par cette déclaration et en accueillant ainsi le second appel formé par l'appelante des chefs non critiqués par la première déclaration, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile ; ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE si la rectification, dans le délai d'appel, d'une première déclaration erronée ou incomplète reste possible, la déclaration d'appel rectificative se substitue nécessairement à la déclaration initiale, de sorte que la cour d'appel, qui n'est saisie que des chefs de dispositif critiqués par la déclaration rectificative, ne peut statuer à la fois sur les chefs critiqués par la première déclaration et ceux critiqués par la seconde ; qu'en statuant à la fois sur les demandes formées par madame F... par sa première et sa seconde déclaration d'appel, cependant qu'à supposer même que la seconde déclaration d'appel ait rectifié la première, la juridiction du second degré ne pouvait être saisie cumulativement des chefs critiqués par les deux déclarations, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR infirmé l'ordonnance prononcée le 14 août 2018 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Bayonne en ce qu'elle avait rapporté l'ordonnance de référé du 7 mars 2018 prononcée par la même formation, dit que monsieur N... ne pouvait être juridiquement soumis à l'exécution des condamnations prononcées à son encontre par ordonnance du 7 mars 2018, et condamné madame F... aux dépens de l'instance et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau des chefs infirmés, D'AVOIR dit n'y avoir lieu de rapporter l'ordonnance prononcée le 7 mars 2018 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Bayonne et dit que cette ordonnance était pleinement exécutoire ; AUX MOTIFS QUE sur le rapport de l'ordonnance de référé du 7 mars 2018, par cette décision le conseil de prud'hommes de Bayonne avait ordonné à monsieur N... de remettre à madame F... l'attestation Pôle emploi, le certificat de travail et le reçu pour solde de tout compte, sous astreinte et s'est réservé la faculté de la liquider ; que par ordonnance du 14 août 2018, le premier juge avait considéré au visa des articles 488 du code de procédure civile d'une part, 1991, 1992 et 2003 du code civil d'autre part que le décès de madame L... T... avait mis fin au mandat en vertu duquel monsieur N... avait licencié madame F..., qu'il en résultait une "impossibilité juridique d'exécution" qui n'avait pu apparaître qu'après le prononcé de l'ordonnance de référé du 7 mars 2018, qu'une action en contestation de la validité de ce mandat également ignorée à cette date avait été introduite devant le tribunal de grande instance de Bayonne par monsieur S... à l'encontre de monsieur N... , que les qualités héréditaires des ayants droit de madame T... étaient indéterminées ce qu'avait révélé maître I..., notaire en charge du règlement de la succession de la défunte par lettre du 28 mars 2018 ; que le premier juge avait considéré que ces éléments étaient "nouveaux" justifiant le rapport de l'ordonnance de référé du 7 mars 2018 par application des dispositions de l'article 488 du code de procédure civile : que selon l'article 488 du code de procédure civile en effet, l'ordonnance de référé peut être modifiée ou rapportée en référé en cas de circonstances nouvelles, mais seulement en ce cas ; qu'or le décès de madame L... B... T... y H... survenu le 27 novembre 2017, et les difficultés juridiques auxquelles le règlement de sa succession avait donné lieu ne constituaient une circonstance nouvelle ni pour les parties appelées à la succession ni même pour madame Q... F... puisque c'était précisément à la suite de l'annonce de ce décès que madame Q... F... avait dirigé sa demande en délivrance des documents de rupture sous astreinte à la fois contre maître R... . V..., pris en sa qualité d'exécuteur testamentaire de madame L... B... T... et contre sa succession représentée par monsieur O... N... et par monsieur P... S..., ces deux derniers pris en leur qualité "d'ayants droit" de madame B... T... , ce qui suffisait à démontrer que "l'indétermination des qualité héréditaires des parties" étaient un fait acquis ; qu'en tout état de cause, la lettre du 29 mars 2018 de maître I... notaire mandaté par monsieur O... N... pour procéder au règlement de la succession de madame B... T... , qui se limitait à énoncer que l'acte de notoriété établi ne permettait pas de déterminer les qualités héréditaires des personnes appelées à la succession, exposer que ces qualités héréditaires demeureraient indéterminées jusqu'à ce que la loi applicable au règlement de la succession soit fixée, émettre un avis juridique, de portée au demeurant limitée, sur la capacité de monsieur O... N... à délivrer en sa qualité d'héritier, les documents de rupture réclamés par madame Q... F... n'énonçait aucun fait nouveau par rapport à la situation au 28 février 2018 (date à laquelle les débats ayant donné lieu à l'ordonnance du 7 mars 2018 avaient été clôturés), qu'il en allait de même de la lettre du 9 avril 2018 qui n'était que la confirmation des énonciations de la lettre du 29 mars 2018, la portée de ces lettres au regard de l'objet du litige étant en tout état de cause fortement limitée faute pour monsieur O... N... de produire les lettres de son conseil (celle du 20 mars 2018 pour ce qui concernait la réponse du 29 mars 2018 ; celle du 29 mars 2018 pour la lettre en réponse du 9 avril 2018) auxquelles maître I... répondait ; qu'or, non seulement les difficultés juridiques liées au règlement de la succession de madame B... T... n'étaient pas nouvelles, quatre mois après le décès de cette dernière, au regard du conflit majeur qui opposait déjà monsieur O... N... à monsieur P... S..., avant ce décès quant à la validité du mandat détenu par monsieur O... N..., à l'opportunité des mesures de protection à mettre en oeuvre au profit de madame B... T... et à la contestation de la validité de l'adoption de monsieur O... N..., mais surtout ces difficultés étaient sans incidence sur la décision rendue le 7 mars 2018 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Bayonne qui était fondée non pas sur les qualités héréditaires de monsieur O... N... mais sur le mandat en vertu duquel celui-ci avait "signé" les lettres de convocation à l'entretien préalable et de licenciement de madame Q... F... ; que l'ordonnance énonçait en effet : "c'est monsieur O... N... T... y H... qui a entamé la procédure de licenciement ; qu'il aurait dû finaliser la procédure en remettant les documents de fin de contrat ; que la remise en état s'imposait pour faire cesser ce trouble manifestement illicite" ; que si monsieur O... N... entendait contester cette décision et sa motivation – en particulier quant au fait qu'assigné en tant qu'ayant droit il avait été condamné en tant que mandataire – il lui appartenait d'exercer les voies de recours appropriées ce qu'il n'avait pas fait ; qu'en tout état de cause, il ne pouvait se prévaloir d'un fait prétendument nouveau – "l'indétermination des qualités héréditaires" – qui n'était pas susceptible de remettre en cause l'ordonnance rendue, pour en obtenir le rapport ; que s'agissant de la qualité – contestée – de mandataire de monsieur O... N..., de la fin du mandat par l'effet du décès de la mandante et de l'application des dispositions de l'article 1991 du code civil il s'agissait là encore d'un débat qui n'aurait pu avoir lieu que dans le cadre d'un recours formé à l'encontre de l'ordonnance du 7 mars 2018 ; qu'en tout état de cause, le décès de madame B... T... y H... ayant prétendument mis fin au mandat de monsieur O... N... T... y H... était acquis et connu lorsque le conseil de prud'hommes avait statué ; que l'action engagée par assignation du 22 mai 2018, par monsieur P... S... devant le tribunal de grande instance de Bayonne pour contester les dispositions testamentaires de madame B... T... , les qualités héréditaires de monsieur O... N... et la validité du mandat confié à ce dernier, pouvait d'autant moins constituer "un fait nouveau" quant la validité du mandat qu'il ressortait de la pièce n° 5 produite par monsieur O... N... lui-même : que dès le 27 juillet 2017, monsieur P... S... avait saisi les autorités suisses de protection de l'adulte et de l'enfant d'une demande en nullité du mandat ; qu'aux termes d'une première ordonnance du 28 juillet 2017, le tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève avait institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de madame B... T... , et révoqué toute procuration établie au bénéfice de tiers ; qu'aux termes d'une seconde ordonnance du 11 août 2017, le même tribunal avait constaté la nullité de ce mandat pour cause d'inaptitude, décision à l'encontre de laquelle monsieur O... N... avait interjeté appel en vain, la cour de justice du canton de Genève ayant déclaré ce recours irrecevable (arrêt, pp. 7, 8 et 9) ; ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE doit être regardée comme nouvelle, au sens de l'article 488 du code de procédure civile, l'information déterminante de l'issue du litige, portée à la connaissance d'une partie postérieurement à l'ordonnance dont le rapport est sollicité ; qu'en refusant de regarder comme nouvelle pour monsieur N... l'information, reçue de son notaire postérieurement à l'ordonnance du 7 mars 2018, selon laquelle l'acte de notoriété ne permettant pas de déterminer sa qualité héréditaire et encore moins d'établir sa qualité d'héritier acceptant de la succession de madame T... , monsieur N... n'avait pas qualité pour établir et délivrer les documents litigieux à madame F..., la cour d'appel a violé l'article 488 du code de procédure civile ; ALORS, A TOUT LE MOINS, QU'en se bornant à affirmer que "l'indétermination héréditaire des parties" était un fait acquis au jour de l'ordonnance du 7 mars 2018 et ne pouvait donc être regardée comme une circonstance nouvelle permettant le rapport de ladite ordonnance, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée par monsieur N... (conclusions, p. 12, alinéas 4 et suivants), si la circonstance que ce dernier n'avait reçu que postérieurement à l'ordonnance du 7 mars 2018 l'information selon laquelle l'indétermination de sa qualité héréditaire ainsi que l'absence de qualité d'héritier acceptant de la succession de sa mère le privaient de toute qualité pour établir et délivrer les documents de rupture litigieux, ne constituait pas une circonstance nouvelle justifiant le rapport de ladite ordonnance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 488 du code de procédure civile ; ALORS, EN SECOND LIEU, QUE le juge saisi d'une demande de condamnation dirigée contre une partie prise en qualité d'ayant droit d'un défunt, ne peut la condamner en une autre qualité, telle que celle de mandataire du défunt ; qu'en jugeant pourtant que les difficultés liées à l'indétermination des qualités héréditaires de monsieur N... n'étaient pas de nature à justifier le rapport de l'ordonnance du 7 mars 2018 qui l'avait condamné, non pas en qualité d'ayant droit, mais en qualité de mandataire, la cour d'appel a violé l'article 5 du code de procédure civile ; ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE le mandat prend fin au décès du mandant, de sorte que le mandataire qui a signé une lettre de licenciement pour le compte de l'employeur décédé avant la remise des documents consécutifs à ce licenciement, ne peut être condamné, en sa qualité de mandataire, à délivrer lesdits documents après la mort de son mandant ; qu'en jugeant pourtant que les difficultés liées à l'indétermination des qualités héréditaires de monsieur N... n'étaient pas de nature à justifier le rapport de l'ordonnance du 7 mars 2018 qui l'avait condamné, non pas en qualité d'ayant droit, mais en qualité de mandataire, la cour d'appel a violé l'article 2003 du code de procédure civile ; ALORS, A TOUT LE MOINS, QUE le mandataire ne peut être condamné sans qu'il ait été constaté que la remise des documents litigieux avait commencé au décès du mandant et qu'il y avait péril en la demeure ; qu'en jugeant pourtant que les difficultés liées à l'indétermination des qualités héréditaires de monsieur N... n'étaient pas de nature à justifier le rapport de l'ordonnance du 7 mars 2018 qui l'avait condamné, non pas en qualité d'ayant droit, mais en qualité de mandataire, sans rechercher, comme elle y était invitée par monsieur N... (conclusions, p. 10, alinéa 5), s'il avait été établi par ladite décision que la remise des documents litigieux avait déjà commencé au décès du mandant et s'il y avait péril en la demeure pour madame F..., la cour d'appel a privé sa décision de base l'égale au regard des articles 1991 et 2003 du code civil.
Il résulte de l'article 901 du code de procédure civile que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, à peine de nullité, les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. La déclaration d'appel, nulle, erronée ou incomplète pouvant néanmoins être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel dans le délai pour conclure, une seconde déclaration d'appel peut venir étendre la critique du jugement à d'autres chefs non critiqués dans la première déclaration, sans qu'un acquiescement aux chefs non critiqués dans un premier temps ne puisse être déduit de cette omission. En outre, la cour d'appel ayant été saisie dès la première déclaration d'appel, la seconde déclaration s'incorpore à la première de sorte que si sont critiqués, dans la seconde déclaration d'appel, de nouveaux chefs de jugement, la cour d'appel reste saisie de la critique des chefs de jugement mentionnés dans la première déclaration d'appel
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1246 F-P+B+I Pourvoi n° W 18-21.550 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 M. C... Z..., domicilié [...], 49100 Angers, a formé le pourvoi n° W 18-21.550 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2018 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre, section B), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme K... Z..., épouse R..., 2°/ à Mme A... Z..., toutes deux domiciliées chez M. L... N..., [...], 49100 Angers, défenderesses à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lemoine, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. Z..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de Mmes R... et Z..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Lemoine, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un arrêt du 3 juin 2002 a prononcé le divorce de M. Z... et de P... E... ; qu'un arrêt du 17 juin 2009 a mis à la charge de M. Z... le paiement d'une indemnité d'occupation de leur immeuble indivis à hauteur de 560 euros par mois à compter du 29 juin 1999 ; que le pourvoi formé contre cet arrêt a été déclaré non admis le 9 mars 2011 ; que P... E... est décédée le 18 août 2015, laissant pour lui succéder ses deux filles, Mmes R... et Z... ; que, par acte du 3 juin 2016, celles-ci ont assigné leur père en la forme des référés devant le président d'un tribunal de grande instance, lequel les a autorisées à vendre cet immeuble et condamné M. Z... à leur payer une somme de 14 556 euros au titre de l'indemnité d'occupation ; que celui-ci a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle avait autorisé ses filles à vendre seules le bien indivis ; que Mmes R... et Z... en ont aussi interjeté appel en ce qu'elle avait limité le montant de l'indemnité d'occupation ; que le conseiller de la mise en état ayant radié l'appel principal formé par M. Z... sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile, celui-ci a formé appel incident dans l'instance d'appel ouverte par l'appel principal de Mmes R... et Z... ; Sur le deuxième moyen, ci-après annexé : Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation, après débats à l'audience publique du 5 novembre 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Vigneau, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre; Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Sur le premier moyen : Vu l'article 550, alinéa 1, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 ; Attendu selon ce texte, que sous réserve des articles 909 et 910 du code de procédure civile, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal ; que dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable ; Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel incident de M. Z..., l'arrêt retient qu'en l'absence de motif sérieux pour ne pas payer l'indemnité d'occupation mise à sa charge par la décision du 18 août 2016 assortie de l'exécution provisoire, le conseiller de la mise en état a, faisant application de l'article 526 du code de procédure civile, radié son appel principal ; Qu'en statuant ainsi, alors que M. Z... était recevable à former appel incident sur l'appel principal recevable de Mmes R... et Z... quand bien même l'instance ouverte par son propre appel principal avait été radiée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et sur le troisième moyen, qui est recevable étant de pur droit : Délibéré par la première chambre civile dans les mêmes conditions que le deuxième moyen ; Vu les articles 500, 501, 504 et 579 du code de procédure civile, ensemble l'article 2224 du code civil ; Attendu que pour écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale des échéances échues cinq ans avant la délivrance de l'assignation du 3 juin 2016 et condamner M. Z... au paiement de la somme de 93 964 euros au titre des indemnités d'occupation, l'arrêt retient que celui du 17 juin 2009, qui a posé le principe d'une indemnité d'occupation due par M. Z... depuis le 29 juin 1999, ayant acquis force exécutoire le 9 mars 2011, date du rejet du pourvoi par la Cour de cassation, la prescription quinquennale ne s'applique que pour les échéances à échoir postérieurement à cette date, de sorte que l'indemnité d'occupation est due pour les périodes du 29 juin 1999 au 9 mars 2011 puis du 3 juin 2011 au 25 juillet 2013, date de l'expulsion de M. Z... ; Qu'en statuant ainsi, alors que, le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif, l'arrêt mettant à la charge de M. Z... une indemnité d'occupation était exécutoire dès son prononcé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ; Condamne Mmes R... et Z... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. Z... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel incident formé par M. C... Z... et l'avoir en conséquence confirmé l'ordonnance entreprise en ses dispositions « ayant autorisé Mme R... et Mme Z... à procéder seules et sans la signature de M. Z... à la mise en vente, le compromis de vente et l'acte de vente des lots de l'immeuble de la rue Bressigny », ainsi qu'à à la vente à M. X... de leurs parts détenues dans l'immeuble situé à Saint Jean de Monts pour un montant de 15.000 € net vendeur, et ayant condamné M. Z... au paiement de la somme de 20.000 € à titre d'indemnité ; aux motifs qu' « il résulte de l'ordonnance du magistrat chargé de la mise en état du 5 janvier 2017 que, en l'absence de motif sérieux avancé par M. C... Z... pour ne pas payer a minima l'indemnité d'occupation mise à sa charge par la décision du 18 août 2016 assortie de l'exécution provisoire et faute pour lui d'avoir, au jour de l'examen de l'incident, versé aucune somme à laquelle le juge l'a condamné, par application de l'article 526 du code de procédure civile, il a été dit que l'appel formé par lui à l'encontre de l'ordonnance de la présidente du tribunal de grande instance d'Angers en date du 18 août 2016 donnait lieu à radiation ; que cette radiation d'appel pour défaut d'exécution conduit à déclarer irrecevable l'appel incident formé par Monsieur C... Z... » ; alors que l'appel incident, provoqué par l'appel principal de la partie adverse, peut être formé en tout état de cause par l'intimé, alors même que celui-ci serait forclos pour agir à titre principal ; qu'un appelant, dont l'appel principal est radié pour défaut d'exécution de la décision frappée d'appel, peut former appel incident dans une autre instance d'appel principal formé par une autre partie ; qu'en l'espèce, en déclarant irrecevable l'appel incident formé par M. C... Z... dans l'instance ouverte par l'appel principal interjeté par Mmes K... R... et A... Z..., motif pris de la radiation pour défaut d'exécution de l'appel qu'il avait lui-même formé à titre principal à l'encontre de l'ordonnance entreprise, la cour d'appel a violé les articles 548 du code de procédure civile et 550 et 909 du même code dans leur version applicable à la cause, antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ensemble le principe du respect des droits de la défense. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. C... Z... à verser à Mme K... R... et à Mme A... Z... la somme de 93.964 € au titre de l'indemnité d'occupation de l'immeuble situé [...] à Angers et ce avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, soit le 3 juin 2016 ; aux motifs que « dans l'ordonnance entreprise du 18 août 2016, le premier juge a considéré que si M. Z... était bien tenu au paiement d'une indemnité d'occupation pour la période du 29 juin 1999 au 25 juillet 2013, la prescription de l'article 2277 du code civil qui s'étend aux actions en paiement de l'indemnité d'occupation, imposait de se reporter à la date de la demande présentée soit, en l'espèce, à l'assignation délivrée le 3 juin 2016 de sorte que l'action était prescrite pour toutes les indemnités d'occupation dont les termes étaient échus avant le 3 juin 2011 ; que ces motifs ne sauraient être adoptés ; qu'en effet, suivant l'arrêt du 10 juillet 2013 de la Cour de cassation « seuls les arriérés échus postérieurement à une décision judiciaire ayant force exécutoire, qui a reconnu une créance d'indemnité d'occupation, échappent, en raison de la nature de la créance, à l'interversion de prescription résultant de la décision ; que ce n'est que pour la période postérieure à la décision ayant acquis force de chose jugée que s'applique la prescription quinquennale » ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 17 juin 2009 ayant acquis force exécutoire le 9 mars 2011, a posé le principe d'une indemnité d'occupation due par M. Z..., depuis la période écoulée du 29 juin 1999 jusqu'au prononcé de l'arrêt et pour les termes à échoir, de sorte que, conformément à la jurisprudence, la prescription quinquennale ne s'applique que pour les échéances à échoir postérieurement au 9 mars 2011 ; qu'il s'ensuit que l'indemnité d'occupation est due pour la période du 29 juin 1999 au 9 mars 2011 et pour la période du 3 juin 2011 au 25 juillet 2013 pour laquelle s'applique la prescription quinquennale, le procès-verbal d'expulsion de l'immeuble situé [...] à Angers ayant été dressé le 25 juillet 2013 ; que l'indemnité d'occupation ayant, suivant arrêt du 17 juin 2009, été fixée à 556 € par mois, sont dues les sommes de [556 € x 143 mois]+ 14 456 € = 93 964 € ; qu'il convient donc de condamner M. C... Z... à payer la somme de 93 964 € à Mme K... R... et à Mme A... Z..., avec intérêt au taux légal à compter de la date de l'assignation ; que les dispositions de l'ordonnance qui ont condamné M. C... Z... à payer à Mme K... R... et à Mme A... Z... la somme de 14.456 € au titre de l'indemnité d'occupation de l'immeuble situé [...] à Angers seront donc infirmées en ce sens » ; alors que les fruits et revenus d'un bien indivis accroissent à l'indivision ; que l'indemnité d'occupation mise à la charge d'un coïndivisaire qui use privativement de la chose indivise doit revenir à l'indivision ; qu'en l'espèce, un arrêt de la cour d'appel d'Angers du 17 juin 2009, ayant force de chose jugée, a fixé à la charge de M. C... Z... une indemnité d'occupation, au titre de l'immeuble situé [...] à Angers, à hauteur de 556 € par mois, ce, à compter du 29 juin 1999 et jusqu'au jour du partage ; que la cour d'appel a fixé le montant des arriérés échus dus par M. C... Z... au titre de ladite indemnité d'occupation à la somme de 93.964 € ; qu'en condamnant ce dernier à verser à Mme K... R... et à Mme A... Z... la totalité de cette somme de 93.964 € quand l'indemnité était due à l'indivision et devait entrer pour son montant total dans la masse active partageable, la cour d'appel a violé les articles 815-9 et 815-10 du code civil. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. C... Z... au paiement de la somme de 93.964 € au titre de l'indemnité d'occupation de l'immeuble situé [...] à Angers et ce avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, soit le 3 juin 2016 ; aux motifs que « dans l'ordonnance entreprise du 18 août 2016, le premier juge a considéré que si M. Z... était bien tenu au paiement d'une indemnité d'occupation pour la période du 29 juin 1999 au 25 juillet 2013, la prescription de l'article 2277 du code civil qui s'étend aux actions en paiement de l'indemnité d'occupation, imposait de se reporter à la date de la demande présentée soit, en l'espèce, à l'assignation délivrée le 3 juin 2016 de sorte que l'action était prescrite pour toutes les indemnités d'occupation dont les termes étaient échus avant le 3 juin 2011 ; que ces motifs ne sauraient être adoptés ; qu'en effet, suivant l'arrêt du 10 juillet 2013 de la Cour de cassation « seuls les arriérés échus postérieurement à une décision judiciaire ayant force exécutoire, qui a reconnu une créance d'indemnité d'occupation, échappent, en raison de la nature de la créance, à l'interversion de prescription résultant de la décision ; que ce n'est que pour la période postérieure à la décision ayant acquis force de chose jugée que s'applique la prescription quinquennale » ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 17 juin 2009 ayant acquis force exécutoire le 9 mars 2011, a posé le principe d'une indemnité d'occupation due par M. Z..., depuis la période écoulée du 29 juin 1999 jusqu'au prononcé de l'arrêt et pour les termes à échoir, de sorte que, conformément à la jurisprudence, la prescription quinquennale ne s'applique que pour les échéances à échoir postérieurement au 9 mars 2011 ; qu'il s'ensuit que l'indemnité d'occupation est due pour la période du 29 juin 1999 au 9 mars 2011 et pour la période du 3 juin 2011 au 25 juillet 2013 pour laquelle s'applique la prescription quinquennale, le procès-verbal d'expulsion de l'immeuble situé [...] à Angers ayant été dressé le 25 juillet 2013 ; que l'indemnité d'occupation ayant, suivant arrêt du 17 juin 2009, été fixée à 556 € par mois, sont dues les sommes de [556 € x 143 mois]+ 14 456 € = 93 964 € ; qu'il convient donc de condamner M. C... Z... à payer la somme de 93 964 € à Mme K... R... et à Mme A... Z..., avec intérêt au taux légal à compter de la date de l'assignation ; que les dispositions de l'ordonnance qui ont condamné M. C... Z... à payer à Mme K... R... et à Mme A... Z... la somme de 14.456 € au titre de l'indemnité d'occupation de l'immeuble situé [...] à Angers seront donc infirmées en ce sens » ; alors que, sauf exceptions, un arrêt d'appel est exécutoire dès son prononcé ; que les arriérés échus postérieurement à une décision judiciaire ayant force exécutoire, qui a reconnu une créance d'indemnité d'occupation, échappent, en raison de la nature de la créance, à l'interversion de prescription résultant de cette décision ; que, pour la période postérieure à la date de cette décision, la prescription quinquennale s'applique, de sorte que l'indivision ne peut prétendre au recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de la demande ; qu'en l'espèce, un arrêt de la cour d'appel d'Angers du 17 juin 2009, ayant force de chose jugée, a fixé à la charge de M. C... Z... une indemnité d'occupation, au titre de l'immeuble situé [...] à Angers, à hauteur de 556 € par mois, ce, à compter du 29 juin 1999 et jusqu'au jour du partage ; qu'en n'appliquant la prescription quinquennale que pour les échéances à échoir postérieurement au 9 mars 2011, date à laquelle le pourvoi en cassation formé à l'encontre de cette décision avait été déclaré non admis, au motif erroné que l'arrêt du 17 juin 2009 n'aurait acquis force exécutoire qu'à cette date et non pas à compter de son prononcé, la cour d'appel a violé les articles 2224 et 815-10 du code civil, ensemble les articles 500, 501, 504 et 579 du code de procédure civile.
Selon l'article 550, alinéa 1, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, sous réserve des articles 909 et 910 du code de procédure civile, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable. Par conséquent, est recevable l'appel incident formé sur un appel principal recevable de la partie adverse, quand bien même l'appelant incident aurait précédemment formé un appel principal ayant fait l'objet d'une mesure de radiation en application de l'article 526 du code de procédure civile
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1247 F-P+B+I Pourvoi n° U 19-16.009 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 La Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-Les-Bains, société anonyme, dont le siège est 6 place des Thermes, 03310 Néris-les-Bains, a formé le pourvoi n° U 19-16.009 contre l'arrêt rendu le 6 mars 2019 par la cour d'appel de Riom (3e chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M... E..., ayant été domicilié [...] , décédé le 13 février 2020, 2°/ à Mme K... E..., domiciliée [...] , 3°/ à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF, dont le siège est 17 avenue du général Leclerc, 13347 Marseille cedex, 4°/ à M. Q... E..., domicilié [...] , 5°/ à M. O... E..., domicilié [...] , défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lemoine, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-Les-Bains, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF, de Me Le Prado, avocat de Mme E... et de M.M. Q... et O... E..., et l'avis de M. Aparisi, avocat référendaire général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Lemoine, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Reprise d'instance 1. Il est donné acte à Mme K... E... et à MM. Q... et O... E... de ce qu'en tant qu'héritiers de M... E..., qui est décédé le 13 février 2020, ils reprennent l'instance contre lui introduite. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 6 mars 2019), un jugement a déclaré la Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-les-Bains (la SEMETT) responsable de la légionellose dont M... E... était atteint et l'a condamnée à lui payer, ainsi qu'à son épouse, Mme K... E..., certaines sommes en réparation de leurs préjudices. La SEMETT a en outre été condamnée à payer une certaine somme à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (la caisse de prévoyance). 3. La SEMETT a interjeté appel de ce jugement par deux déclarations d'appel distinctes, la première reçue au greffe de la cour le 31 mars 2017, dirigée contre M. et Mme E..., la seconde reçue le 11 avril 2017, dirigée contre la caisse de prévoyance. Les deux instances ont été jointes par ordonnance du 19 septembre 2017. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 5. La SEMETT fait grief à l'arrêt, en confirmant le jugement entrepris pour le surplus, de la condamner à verser à la caisse de prévoyance la somme de 62 298,96 euros, alors « qu'une jonction d'instance ne créant pas une procédure unique, les demandes des parties sont déterminées, pour chaque instance, par les conclusions déposées dans celle-ci ; qu'en l'espèce, la SEMETT, avant l'ordonnance de jonction, avait déposé deux jeux de conclusions le 7 septembre 2017, à la fois dans l'instance l'opposant à M. et Mme E..., et à la fois dans l'instance l'opposant à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF ; qu'en statuant exclusivement au visa des conclusions du 7 septembre 2017 déposées par la SEMETT dans l'instance l'opposant à M. et Mme E... bien que la SEMETT avait aussi déposé des conclusions le même jour dans l'instance l'opposant à la caisse de prévoyance, demandant l'annulation du jugement et la constatation du caractère injustifié des sommes allouées à la caisse de prévoyance, la cour d'appel a violé les articles 368 et 954 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 6. Il résulte des articles 552 et 553 du code de procédure civile, qu'en cas d'indivisibilité du litige, d'une part, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance, et d'autre part, l'appel formé contre l'une des parties n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance. 7. Dès lors, la seconde déclaration d'appel formée par l'appelant pour appeler à la cause les parties omises dans la première déclaration d'appel régularise l'appel, sans créer une nouvelle instance, laquelle demeure unique. 8. Ayant retenu, par des motifs non critiqués, que l'objet du litige était indivisible, ce dont il résultait que la procédure était unique, peu important que la SEMETT ait formé successivement deux appels et qu'une jonction d'instances ait postérieurement été prononcée, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui a relevé qu'elle statuait au regard des dernières conclusions notifiées le 7 septembre 2017 par la SEMETT, ne s'est pas référée à un autre jeu de conclusions. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-les-Bains aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par Mme K... E... et MM. Q... et O... E... et par la Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-les-Bains et condamne la Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-les-Bains à payer à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et par Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-Les-Bains Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR, en confirmant le jugement entrepris pour le surplus, condamné la SEMETT à verser à la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF la somme de 62 298,96 euros ; AUX COMMÉMORATIFS QUE « suivant déclaration électronique reçue au greffe de la cour le 31 mars 2017, la SEMETT a interjeté appel général de cette décision, en intimant les époux E... ; que par une seconde déclaration du 11 avril 2017, la SEMETT a interjeté appel général de cette décision en intimant également la Caisse de prévoyance ; que par une ordonnance rendue 19 septembre 2017, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures d'appel ; qu'aux termes de ses dernières écritures notifiées le 7 septembre 2017, au moyen de la communication électronique, la société SEMETT demande à la cour, au visa de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, de : - annuler le jugement dont appel ; - constater l'irrecevabilité et en tout cas le mal fondé du moyen selon lequel l'appel à l'encontre de la Caisse de prévoyance serait irrecevable ; - rejeter l'appel incident des époux E... en ce qu'il est irrecevable et en tout cas mal fondé ; - constater qu'il n'existe pas de lien de causalité démontré entre l'affectation nosocomiale et le séjour de M. E... au sein de l'établissement thermal de Néris-les-Bains ; Subsidiairement de : - constater le caractère pour partie injustifié et en tout cas excessif des sommes allouées par le tribunal aux époux E... ; - condamner les époux E... au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'elle prétend que la Caisse de Prévoyance n'est pas partie à l'instance d'appel, le recours formé à son encontre ayant fait l'objet d'une procédure distincte et, que nul ne plaidant pas procureur, les époux E... n'ont pas qualité pour conclure à l'irrecevabilité de l'appel concernant une autre partie ; et qu'elle ajoute que la signification du jugement faite par les époux E... n'a pas eu pour effet de faire courir le délai d'appel vis-à-vis de la caisse ; que sur le fond, la SEMETT prétend que la preuve d'un lien de causalité entre le séjour de M. E... au sein des thermes qu'elle exploite et la pathologie dont il a souffert n'est pas rapportée ; qu'elle se prévaut d'un suivi sanitaire consciencieux de ses installations, des travaux dont elles ont fait l'objet et d'un plan d'action institué à compter du 24 octobre 2013 ; qu'elle indique que les caractéristiques des souches de légionelles prélevées au sein de de l'établissement sont différentes de celles dont était porteur M. E... et que l'ARS n'a pas conclu à une contamination à l'occasion des soins dispensés au sein des thermes ; et qu'elle ajoute que le seul autre cas de légionellose détecté en 2011 à Néris-les-Bains, n'avait pas été imputé à l'établissement thermal ce qui démontre qu'il existe une autre source de contamination sur la commune » (arrêt attaqué, pp. 3-4) ; AUX MOTIFS QUE « sur la créance de la Caisse de prévoyance : la Caisse de prévoyance indique avoir dû verser à son assuré des prestations à hauteur de 61 261,96 euros selon un relevé définitif ; et qu'elle en réclame paiement à la SEMETT, outre une indemnité pour frais de gestion de 1 037 euros ; que dans le dispositif de ses écritures qui, conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, a seul pour effet de saisir la cour, laquelle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion, la SEMETT, qui a contesté le montant des indemnités allouées aux époux E..., n'a pas demandé l'infirmation ou la réformation du jugement en ce qu'il a accordé une indemnité globale de 62 298,96 euros (61 261,96 + 1 037) à la caisse de prévoyance et en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts légaux ; qu'en conséquence, ces dispositions du jugement ne peuvent qu'être confirmées » (arrêt attaqué, p. 10) ; AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF justifie, au titre des prestations versées, d'une créance principale de 61 261,96 euros outre les frais de gestion applicables en vertu du décret n° 98-255 du 31 mars 1998, soit un montant total de 62 298,96 euros » (jugement entrepris, p. 6) ; ALORS QUE 1°) le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées ; qu'en se prononçant seulement au visa des conclusions déposées par la SEMETT le 7 septembre 2017 dans l'instance l'opposant à M. et Mme E... et en retenant que la SEMETT n'avait pas demandé l'infirmation ou la réformation du jugement en ce qu'il avait accordé une indemnité globale de 62 298,96 euros à la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF, cependant que la SEMETT avait aussi régulièrement déposé le 7 septembre 2017 un jeu de conclusions dans l'instance dirigée contre la caisse de prévoyance aux termes duquel elle sollicitait l'annulation du jugement et la constatation du caractère injustifié des sommes allouées à la caisse de prévoyance, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ; ALORS QUE 2°) une jonction d'instance ne créant pas une procédure unique, les demandes des parties sont déterminées, pour chaque instance, par les conclusions déposées dans celle-ci ; qu'en l'espèce, la SEMETT, avant l'ordonnance de jonction, avait déposé deux jeux de conclusions le 7 septembre 2017, à la fois dans l'instance l'opposant à M. et Mme E..., et à la fois dans l'instance l'opposant à la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF ; qu'en statuant exclusivement au visa des conclusions du 7 septembre 2017 déposées par la SEMETT dans l'instance l'opposant à M. et Mme E... bien que la SEMETT avait aussi déposé des conclusions le même jour dans l'instance l'opposant à la caisse de prévoyance, demandant l'annulation du jugement et la constatation du caractère injustifié des sommes allouées à la caisse de prévoyance, la cour d'appel a violé les articles 368 et 954 du code de procédure civile.
Il résulte des articles 552 et 553 du code de procédure civile qu'en cas d'indivisibilité du litige, d'une part, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance et, d'autre part, l'appel formé contre l'une des parties n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance. Dès lors, la seconde déclaration d'appel, formée par l'appelant pour appeler à la cause les parties omises dans la première déclaration d'appel, régularise l'appel sans créer une nouvelle instance, laquelle demeure unique. En conséquence, dans un litige où l'objet est indivisible, c'est à bon droit qu'une cour d'appel statue au regard des dernières conclusions, sans se référer à d'autres conclusions, quand bien même l'appelant aurait formé successivement deux appels et qu'une jonction d'instances aurait été prononcée
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1248 F-P+B+I Pourvoi n° V 19-16.792 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 M. S... R... , domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 19-16.792 contre l'arrêt rendu le 12 juillet 2018 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre D), dans le litige l'opposant à la société Hogan, société civile immobilière, dont le siège est 1125 chemin de Cabestany, 66000 Perpignan, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lemoine, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. R... , de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Hogan, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Lemoine, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 12 juillet 2018), M. R... a sollicité, le 20 octobre 2017, le bénéfice de l'aide juridictionnelle, puis a relevé appel, le 7 novembre 2017, d'une ordonnance de référé ayant notamment constaté la résiliation du bail qu'il avait conclu avec la société Hogan. 2. L'aide juridictionnelle a été accordée à M. R... le 13 décembre 2017. 3. Il a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant prononcé la caducité de sa déclaration d'appel en application de l'article 905-1 du code de procédure civile, à défaut de l'avoir signifiée dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai qui lui a été adressé par le greffe le 17 novembre 2017. Examen du moyen 4. M. R... fait grief à l'arrêt, statuant sur déféré, de constater qu'il n'a pas procédé à la signification de sa déclaration d'appel avant l'expiration du délai imparti de dix jours, survenue le 18 janvier 2018 après obtention de l'aide juridictionnelle et la désignation consécutive d'un huissier de justice le 8 janvier 2018 et en conséquence de confirmer l'ordonnance de caducité rendue le 21 décembre 2017 par le président de la première chambre D de la cour d'appel de Montpellier alors : « 1° / que le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; qu'en l'espèce, l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état prononce à tort la caducité d'une déclaration d'appel sur le fondement de l'article 905-1 du code de procédure civile interrompt le délai de dix jours imparti à l'appelant pour faire signifier sa déclaration d'appel à l'intimé qui n'a pas constitué avocat ; que pour confirmer la déclaration d'appel du 7 novembre 2017, la cour d'appel par un arrêt postérieur à la date à laquelle le délai de dix jours devait expirer, a retenu que M. R... aurait dû faire procéder à la signification de sa déclaration d'appel avant la date d'expiration du délai de 10 jours fixée au 18 janvier 2018, la SCP X..., huissier de justice ayant été désignée au titre de l'aide judiciaire, le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; qu'en se déterminant ainsi, quand le délai pour faire signifier la déclaration d'appel avait été interrompu par l'ordonnance de caducité du 21 décembre 2017 et ne pouvait recommencer à courir qu'au jour où elle rendait son arrêt, la cour d'appel, qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. R... à un recours effectif au juge, a violé l'article 905-1 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ; 2°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat, et spécialement, sur le résultat d'investigations personnelles ; qu'au cas présent ni M. R... ni la SCI Hogan n'avaient soutenu qu'un huissier de justice en la personne de la SCP X... avait été désignée le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; que cette pièce ne figurait pas dans les éléments du débats et n'avait été produite par aucune des parties ; qu'en retenant ainsi, des éléments qui n'étaient pas dans le débat et qu'elle n'a donc pu se procurer que par des investigations personnelles hors la présence des parties, la cour d'appel a violé l'article 7 du code de procédure civile ; 3°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, M. R... avait fait valoir dans ses dernières conclusions du 24 mai 2018 qu'aucun huissier n'avait encore été désigné et il produisait l'attestation de dépôt du bureau d'aide juridictionnelle ainsi que la décision d'aide juridictionnelle du 13 décembre 2017 d'où il ressortait qu'aucun huissier n'avait été désigné ; que la SCI Hogan, qui sollicitait la confirmation de l'ordonnance de caducité, se bornait dans ses conclusions à soutenir que l'appel était caduc compte tenu de l'avis du 17 novembre 2017 ou des différents avis de fixation du déféré des 1er février et 28 avril 2018 qu'elle produisait : qu'il ne résulte ainsi ni des pièces de la procédure ni des énonciations de l'arrêt que la désignation de la SCP X..., huissier de justice pour apporter son concours datée du 8 janvier 2018 et à laquelle aucune des parties ne s'étaient pas référées qui n'était pas mentionnée dans leurs écritures, leur ait été communiquée, qu'en fondant sa décision sur cette pièce sans inviter les parties à s'expliquer sur cet élément, la cour a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 4°/ que le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; qu'en l'espèce, l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état prononce à tort la caducité d'une déclaration d'appel sur le fondement de l'article 905-1 du code de procédure civile interrompt le délai de dix jours imparti à l'appelant pour faire signifier sa déclaration d'appel à l'intimé qui n'a pas constitué avocat ; que pour confirmer la caducité de la déclaration d'appel du 7 novembre 2017, la cour d'appel par un arrêt postérieur à la date à laquelle le délai de dix jours devait expirer, a retenu que M. R... aurait dû faire procéder à la signification de sa déclaration d'appel avant la date d'expiration du délai de 10 jours fixée au 18 janvier 2018, la SCP X..., huissier de justice ayant été désignée au titre de l'aide judiciaire, le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; qu'en se déterminant ainsi, quand le délai pour faire signifier la déclaration d'appel avait été interrompu par l'ordonnance de caducité du 21 décembre 2017 et ne pouvait recommencer à courir qu'au jour où elle rendait son arrêt, la cour d'appel, qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. R... à un recours effectif au juge, a violé les articles 905-1 du code de procédure civile et 38 du décret du 19 décembre 1991, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. » Réponse de la Cour 5. Il résulte de l'article 38 du décret n°91-1266 du 19 décembre 1991, dans sa rédaction issue du décret n°2017-891 du 6 mai 2017, que le point de départ d'un délai de recours est reporté, au profit de celui qui demande le bénéfice de l'aide juridictionnelle avant l'expiration de ce délai, au jour de la notification de la décision statuant définitivement sur cette demande ou, en cas d'admission, à la date, si elle est plus tardive, du jour de la désignation d'un auxiliaire de justice en vue d'assister ou de représenter le bénéficiaire de cette aide pour l'exercice de ce recours. Le point de départ des délais impartis pour conclure ou former appel incident est reporté de manière identique au profit des parties à une instance d'appel sollicitant le bénéfice de l'aide juridictionnelle au cours des délais mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile. 6. Ces règles, qui se bornent à prévoir, au profit de l'appelant, un report du délai de recours au plus tard jusqu'au jour de la désignation d'un auxiliaire de justice, ne permettent pas un nouveau report du point de départ du délai pour signifier la déclaration d'appel, en application de l'article 905-1 du code de procédure civile, même si la demande d'aide juridictionnelle a été formée antérieurement à la déclaration d'appel et un huissier de justice désigné postérieurement. 7. Elles poursuivent néanmoins un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice. Elles sont, en outre, accessibles et prévisibles, et ne portent par une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé. 8. L'arrêt constate que par un avis de fixation de l'affaire à bref délai du 17 novembre 2017, M. R... avait été invité à signifier sa déclaration d'appel dans un délai de 10 jours à compter de sa réception et qu' il n'y avait pas procédé dans le délai imparti. 9. Il en résulte que la déclaration d'appel encourait la caducité. 10. Par ce motif de pur droit , substitué d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués par le moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. R... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. R... et le condamne à payer à la société Hogan la somme de 1 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. R... IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué, statuant sur déféré, d'avoir constaté qu'il n'a pas été procédé par Monsieur S... R... à la signification de sa déclaration d'appel avant l'expiration du délai imparti de dix jours, survenue le 18 janvier 2018 après obtention de l'aide juridictionnelle et la désignation consécutive d'un huissier le 8 janvier 2018 et d'avoir en conséquence confirmé l'ordonnance de caducité rendue le 21 décembre 2017 par le président de la première chambre D de la cour d'appel de Montpellier ; AU MOTIF QUE L'article 905-1 du Code de Procédure Civile dispose en son premier alinéa : "lorsque l'affaire est fixée à bref délai par le Président de la Chambre, l'appelant signifie la déclaration d'appel dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office par le Président de la Chambre ou le magistrat désigné par le Premier Président. Cependant, si entre-temps l'intimé a constitué avocat avant signification de la déclaration d'appel, il est procédé par voie de notification à son avocat." Monsieur S... R... qui n'a pas signifié sa déclaration d'appel, invoque les dispositions de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 qui prévoit que : "lorsque une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter : ( ) d) ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. Vérification faite, l'appelant sur la base d'une demande formulée le 20 octobre 2017, soit antérieurement à son acte d'appel, a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à la suite d'une décision rendue le 13 décembre 2017. A la suite de celle-ci, la SCP X..., huissier de justice, a été désignée le 8 janvier 2018 pour apporter son concours. Dès lors, en application des textes ci-dessus rappelés, Monsieur S... R... aurait dû faire procéder à la signification de sa déclaration d'appel avant la date d'expiration du délai de 10 jours fixée au 18 janvier 2018. Faute de quoi, il y a lieu de prononcer la caducité de l'appel. L'ordonnance déférée sera donc confirmée. ALORS QUE D'UNE PART le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; qu'en l'espèce, l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état prononce à tort la caducité d'une déclaration d'appel sur le fondement de l'article 905-1 du code de procédure civile interrompt le délai de dix jours imparti à l'appelant pour faire signifier sa déclaration d'appel à l'intimé qui n'a pas constitué avocat ; que pour confirmer la déclaration d'appel du 7 novembre 2017, la cour d'appel par un arrêt postérieur à la date à laquelle le délai de dix jours devait expirer, a retenu que M. R... aurait dû faire procéder à la signification de sa déclaration d'appel avant la date d'expiration du délai de 10 jours fixée au 18 janvier 2018, la SCP X..., huissier de justice ayant été désignée au titre de l'aide judiciaire, le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; qu'en se déterminant ainsi, quand le délai pour faire signifier la déclaration d'appel avait été interrompu par l'ordonnance de caducité du 21 décembre 2017 et ne pouvait recommencer à courir qu'au jour où elle rendait son arrêt, la cour d'appel, qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. R... à un recours effectif au juge, a violé l'article 905-1 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ; ALORS QUE D'UNE PART le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat, et spécialement, sur le résultat d'investigations personnelles ; qu'au cas présent ni M. R... ni la SCI Hogan n'avaient soutenu qu'un huissier de justice en la personne de la SCP X... avait été désignée le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; que cette pièce ne figurait pas dans les éléments du débats et n'avait été produite par aucune des parties ; qu'en retenant ainsi, des éléments qui n'étaient pas dans le débat et qu'elle n'a donc pu se procurer que par des investigations personnelles hors la présence des parties, la cour d'appel a violé l'article 7 du code de procédure civile ; ALORS QUE D'AUTRE PART le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, M. R... avait fait valoir dans ses dernières conclusions du 24 mai 2018 (p 3) qu'aucun huissier n'avait encore été désigné et il produisait l'attestation de dépôt du bureau d'aide juridictionnelle ainsi que la décision d'aide juridictionnelle du 13 décembre 2017 d'où il ressortait qu'aucun huissier n'avait été désigné ; que la SCI Hogan, qui sollicitait la confirmation de l'ordonnance de caducité, se bornait dans ses conclusions à soutenir que l'appel était caduc compte tenu de l'avis du 17 novembre 2017 ou des différents avis de fixation du déféré des 1er février et 28 avril 2018 qu'elle produisait : qu'il ne résulte ainsi ni des pièces de la procédure ni des énonciations de l'arrêt que la désignation de la SCP X..., huissier de justice pour apporter son concours datée du 8 janvier 2018 et à laquelle aucune des parties ne s'étaient pas référées qui n'était pas mentionnée dans leurs écritures, leur ait été communiquée, qu'en fondant sa décision sur cette pièce sans inviter les parties à s'expliquer sur cet élément, la cour a violé l'article 16 du code de procédure civile ; ALORS QUE DE TROISIEME PART le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; qu'en l'espèce, l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état prononce à tort la caducité d'une déclaration d'appel sur le fondement de l'article 905-1 du code de procédure civile interrompt le délai de dix jours imparti à l'appelant pour faire signifier sa déclaration d'appel à l'intimé qui n'a pas constitué avocat ; que pour confirmer la caducité de la déclaration d'appel du 7 novembre 2017, la cour d'appel par un arrêt postérieur à la date à laquelle le délai de dix jours devait expirer, a retenu que M. R... aurait dû faire procéder à la signification de sa déclaration d'appel avant la date d'expiration du délai de 10 jours fixée au 18 janvier 2018, la SCP X..., huissier de justice ayant été désignée au titre de l'aide judiciaire, le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; qu'en se déterminant ainsi, quand le délai pour faire signifier la déclaration d'appel avait été interrompu par l'ordonnance de caducité du 21 décembre 2017 et ne pouvait recommencer à courir qu'au jour où elle rendait son arrêt, la cour d'appel, qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. R... à un recours effectif au juge, a violé les articles 905-1 du code de procédure civile et 38 du décret du 19 décembre 1991, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. Le greffier de chambre
Il résulte de l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que le point de départ d'un délai de recours est reporté, au profit de celui qui demande le bénéfice de l'aide juridictionnelle avant l'expiration de ce délai, au jour de la notification de la décision statuant définitivement sur cette demande ou, en cas d'admission, à la date, si elle est plus tardive, du jour de la désignation d'un auxiliaire de justice en vue d'assister ou de représenter le bénéficiaire de cette aide pour l'exercice de ce recours. Le point de départ des délais impartis pour conclure ou former appel incident est reporté de manière identique au profit des parties à une instance d'appel sollicitant le bénéfice de l'aide juridictionnelle au cours des délais mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile. Ces règles, qui se bornent à prévoir au profit de l'appelant, un report du délai de recours, au plus tard jusqu'au jour de la désignation d'un auxiliaire de justice, ne permettent pas un nouveau report du point de départ du délai pour signifier la déclaration d'appel, en application de l'article 905-1 du code de procédure civile, même si la demande d'aide juridictionnelle a été formée antérieurement à la déclaration d'appel et qu'un huissier de justice a été désigné postérieurement. Elles n'en poursuivent pas moins un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice. Elles sont, en outre, accessibles et prévisibles, et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel, un rapport raisonnable existant entre les moyens employés et le but visé. En conséquence, encourt la caducité la déclaration d'appel qui n'est pas signifiée dans le délai de 10 jours à compter de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai, quand bien même le bénéfice de l'aide juridictionnelle, sollicité avant de relever appel, aurait été accordé à l'appelant postérieurement
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation sans renvoi M. PIREYRE, président Arrêt n° 1251 F-P+B+I Pourvoi n° Y 19-14.242 Aide juridictionnelle partielle en défense au profit de Mme N.... Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 28 octobre 2020. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 Le trésorier de Paris amendes 1re division, domicilié 15 rue Maryse Hilsz, 75979 Paris cedex 20, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, domicilié 139 rue de Bercy, 75012 Paris, a formé le pourvoi n° Y 19-14.242 contre le jugement rendu le 25 janvier 2019 par le tribunal d'instance de Paris, dans le litige l'opposant à Mme Y... N..., épouse W..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du trésorier de Paris amendes 1re division, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, de la SARL Cabinet Briard, avocat de Mme N..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort (tribunal d'instance de Paris, 25 janvier 2019), Mme N... a été déclarée coupable de la contravention de stationnement gênant sur une voie publique spécialement aménagée et condamnée à payer une amende, par un jugement irrévocable du 17 avril 2015 rendu par une juridiction de proximité statuant sur opposition à une ordonnance pénale. 2. Le 23 février 2017, la Trésorerie de Paris amendes 1re division, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques (la Trésorerie de Paris amendes), a formé une opposition administrative entre les mains de la caisse de retraite de Mme N.... 3. Affirmant avoir payé cette amende le 24 avril 2015, Mme N... a assigné la Trésorerie de Paris amendes devant le tribunal d'instance en restitution des sommes saisies et en paiement de dommages-intérêts. 4. La Trésorerie de Paris amendes n'a pas comparu. Examen du moyen Sur le moyen relevé d'office 5. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu l'article 710, alinéa 1er, du code de procédure pénale et l'article 76, alinéa 2, du code de procédure civile : 6. Il résulte du premier de ces textes qu'une demande en restitution des sommes saisies au titre d'une condamnation pénale relève de la compétence de la juridiction qui a prononcé la condamnation. 7. Le tribunal d'instance s'est prononcé sur une demande en restitution de sommes saisies indûment au titre d'une condamnation pénale. 8. En statuant ainsi, le tribunal a excédé sa compétence. Portée et conséquences de la cassation 9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. 11. Il résulte de ce qui a été dit aux paragraphes 6, 7 et 8 que le tribunal d'instance n'est pas compétent pour statuer sur les demandes de Mme N... dirigées contre la Trésorerie de Paris amendes et qu'il convient de renvoyer les parties à mieux se pourvoir conformément à l'article 96 du code de procédure civile. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 25 janvier 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; DÉCLARE le tribunal d'instance incompétent pour statuer sur les demandes de Mme N... ; Renvoie les parties à mieux se pourvoir ; Condamne Mme N... aux dépens, en ce compris ceux exposés devant le tribunal d'instance ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme N... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le trésorier de Paris amendes 1re division, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques Le jugement attaqué encourt la censure ; EN CE QU' il a condamné la trésorerie Paris Amendes à payer à Mme Y... N... épouse W... les sommes suivantes : - 282 euros au titre du remboursement de la somme indûment prélevée ; - 200 euros à titre de dommages-intérêts ; - 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure pénale ; condamné la trésorerie Paris Amendes aux entiers dépens ; AUX MOTIFS QU' « aux termes de l'article 1315 du code civil, il appartient à celui qui demande l'exécution d'une obligation de l'établir, et à celui qui s'en prétend libéré d'en justifier; qu'en l'espèce, Mme W... verse au débat les pièces suivantes : l'avis d'opposition administrative du 23 février 2017 visant le jugement du 17 avril 2015 ; le jugement du 17 avril 2015 à l'encontre de Mme W... ; le justificatif du règlement de l'amende due au titre de ce jugement ; l'avis avant poursuites du 17 novembre 2016 ; la lettre de contestation du 9 avril 2018, reçue par la Trésorerie le 11 avril 2018 ; le relevé des retenues effectuées auprès de la CNAV pour un montant total de 282 euros ; que dès lors, Mme W... sera déclarée fondée en sa demande de remboursement de la somme de 282 euros prélevée sur sa retraite ; que la Trésorerie Paris Amendes sera donc condamnée à payer à Mme W... la somme de 282 euros ; que la Trésorerie Paris Amendes en ne se présentant pas, n'apporte pas la preuve contraire qui lui incombe ; que Mme W... justifie bien d'une résistance abusive de la défenderesse dès lors qu'à plusieurs reprises Mme W... est intervenue auprès d'elle pour justifier de l'erreur commise, qu'il sera donc fait droit à sa demande de dommages intérêts à hauteur de la somme justifiée de 200 euros » ; ALORS QUE le tribunal d'instance était incompétent, au regard de l'article 710 du code de procédure pénale (C.P.P), pour statuer sur une contestation portant sur l'exécution et le recouvrement d'une amende, laquelle relève de la compétence exclusive du tribunal qui a prononcé la sentence, au cas d'espèce le Tribunal de police ; qu'en statuant de la sorte le tribunal a violé l'article 710 du code de procédure pénale.
Une demande en restitution des sommes saisies au titre d'une condamnation pénale relève de la compétence de la juridiction qui a prononcé la condamnation
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1260 F-P+B+I Pourvoi n° G 19-17.931 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 1°/ M. S... F..., domicilié [...] , 2°/ M. A... F..., domicilié chez Mme D... F..., [...] , 3°/ Mme E... F..., domiciliée [...] , 4°/ Mme D... O..., épouse F..., domiciliée [...] , ont formé le pourvoi n° G 19-17.931 contre l'arrêt rendu le 25 avril 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-9), dans le litige les opposant : 1°/ à M. U... L..., domicilié [...] , 2°/ à M. P... I..., domicilié [...] , 3°/ à M. Q... R..., domicilié [...] , 4°/ à Mme B... R... veuve J..., domiciliée [...] , 5°/ à Mme Y... L..., épouse M..., domiciliée [...] , 6°/ à la société Dubois Fontaine, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , 7°/ à la société AB Home investissement, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. S... F..., M. A... F..., Mme E... F... et Mme D... O..., épouse F..., de Me Le Prado, avocat de la société Dubois Fontaine, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 avril 2019) et les productions, un arrêt d'une cour d'appel du 4 avril 2008 a condamné M. G... F... et Mme D... F... à payer diverses sommes à Mme R..., veuve J..., M. Q... R..., M. C... R..., Mme M..., M. I... et M. L.... 2. Mme R... a fait pratiquer plusieurs saisies de droits d'associé et de valeurs mobilières, dont une portant sur les parts sociales détenues par M. et Mme F... dans la SCI de la Vernède (la SCI). 3. G... F... est décédé en 2013, laissant pour lui succéder son épouse et ses trois enfants, E..., A... et S... F.... 4. Le 16 décembre 2016, Mme R... a fait signifier le cahier des charges pour la vente des parts sociales de la SCI. 5. Par jugement du 4 avril 2017, un juge de l'exécution a débouté Mme D... F..., Mme E... F..., M. S... F... et M. A... F... (les consorts F...) de la demande de délai dont ils l'avaient saisi. 6. Le 6 avril 2017, les consorts F... ont interjeté appel de ce jugement et saisi, par acte du 13 avril 2017, le premier président d'une cour d'appel d'une demande de sursis à l'exécution sur le fondement de l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution, qui a été rejetée par ordonnance du 16 juin 2017. 7. Selon procès-verbal de vente du 21 avril 2017, dressé par la Selarl Dubois Fontaine, huissiers de justice, les parts sociales de la SCI ont été adjugées à la société AB Home investissement. 8. Les consorts F... ont saisi un juge de l'exécution d'une demande de nullité de l'adjudication. Examen du moyen Enoncé du moyen 9. Les consorts F... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à voir prononcer la nullité de l'adjudication faite le 21 avril 2017 par devant la Selarl Dubois Fontaine, huissiers de justice à Villepinte, alors « qu'en cas d'appel, un sursis à l'exécution des décisions prises par le juge de l'exécution peut être demandé au premier président de la cour d'appel ; que jusqu'au jour du prononcé de l'ordonnance par le premier président, la demande de sursis à exécution suspend les poursuites si la décision attaquée n'a pas remis en cause leur continuation ; qu'en refusant d'annuler l'adjudication en date du 21 avril 2017, après avoir cependant constaté, d'une part, que les consorts F... avaient saisi le premier président de la cour d'appel en date du 13 avril 2017 d'une demande tendant à la suspension de l'exécution du jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan rejetant qu'il leur soit accordé un délai de grâce et, d'autre part, que le sursis à exécution de ce jugement a été rejeté par une ordonnance du premier président de la cour d'appel en date du 16 juin 2017, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution. » Réponse de la Cour 10. Il résulte de l'article R. 121-22, alinéas 1 à 3, du code des procédures civiles d'exécution que le premier président de la cour d'appel peut ordonner le sursis à l'exécution de toutes les décisions du juge de l'exécution, à l'exception de celles qui, dans les rapports entre créanciers et débiteurs, statuent sur des demandes dépourvues d'effet suspensif à moins qu'elles n'ordonnent la mainlevée d'une mesure. 11. Ayant retenu à bon droit que la saisine du juge de l'exécution d'une demande de délai de grâce est dépourvue d'effet suspensif, la cour d'appel en a exactement déduit que l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux jugements du juge de l'exécution déboutant l'appelant d'une demande de délais de grâce. C'est donc sans encourir les griefs du moyen qu'elle a statué comme elle l'a fait. 12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. S... F..., M. A... F..., Mme E... F... et Mme D... O..., épouse F..., aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. S... F..., M. A... F..., Mme E... F... et Mme D... O..., épouse F..., et les condamne à payer à la société Dubois Fontaine la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. S... F..., M. A... F..., Mme E... F... et Mme D... O..., épouse F... IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté leur demande tendant à voir prononcée la nullité de l'adjudication faite le 21 avril 2017 par devant la SELARL Dubois Fontaine huissiers de justice à Villepinte ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « les consorts F... ne contestent pas la saisie des parts sociales, de sorte que le moyen tiré du certificat de non contestation du 18 novembre 2016 est inopérant, mais concluent à la nullité de l'adjudication faute de respect de la suspension des poursuites prévue à l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution ; que la saisine du juge de l'exécution d'une demande de délai de grâce n'a aucun effet suspensif des poursuites et la demande de sursis à exécution au sens de l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution ayant pour objet de voir statuer sur ce qui constitue, en fait, le fond du litige dont la Cour est saisie par l'appel puisqu'il tend à la réformation du jugement rejetant la demande de délai de sorte que surseoir à son exécution reviendrait à accorder ce délai, l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux jugements du juge de l'exécution déboutant l'appelant de demandes de délais de grâce ou de suspension des poursuites ; que dans son ordonnance de référé du 16 juin 2017, le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence rappelle d'ailleurs expressément que la demande de délai de paiement dont est saisi le juge de l'exécution étant dépourvue d'effet suspensif, les consorts F... ne sont pas fondés à solliciter un sursis à exécution de la décision rejetant cette demande ; Que les consorts F... ne peuvent en conséquence se prévaloir du non-respect d'un texte inapplicable en la matière ; Que leur demande tendant à voir prononcer la nullité de l'adjudication est en conséquence dénuée de tout fondement » ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' « en application de l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution, le Premier Président de la cour d'appel peut ordonner le sursis à exécution de toutes les décisions rendues par le juge de l'exécution à l'exception de celles qui, dans les rapports entre créanciers et débiteurs, statuent sur des demandes dépourvues d'effet suspensif. Il est constant qu'une demande de délais de paiement présentée devant le juge de l'exécution est dépourvue d'effet suspensif. Il est également acquis que la décision par laquelle le juge de l'exécution rejette une telle demande est tout autant dépourvue d'effet suspensif, raison pour laquelle le Premier Président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a retenu, dans son ordonnance du 16 juin 2017, que les consorts F... n'étaient pas fondés à solliciter un sursis à exécution du jugement rendu par le juge de l'exécution de ce siège le 04 avril 2017. Dès lors, ce moyen sera également écarté et les consorts F... seront déboutés de leur demande » ALORS QU'en cas d'appel, un sursis à l'exécution des décisions prises par le juge de l'exécution peut être demandé au premier président de la cour d'appel ; que jusqu'au jour du prononcé de l'ordonnance par le premier président, la demande de sursis à exécution suspend les poursuites si la décision attaquée n'a pas remis en cause leur continuation ; qu'en refusant d'annuler l'adjudication en date du 21 avril 2017, après avoir cependant constaté d'une part, que les consorts F... avaient saisi le premier Président de la cour d'appel en date du 13 avril 2017 d'une demande tendant à la suspension de l'exécution du jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan rejetant qu'il leur soit accordé un délai de grâce et, d'autre part que le sursis à exécution de ce jugement a été rejeté par une ordonnance du premier Président de la cour d'appel en date du 16 juin 2017, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution.
Il résulte de l'article R.121-22, alinéas 1 à 3, du code des procédures civiles d'exécution que le premier président de la cour d'appel peut ordonner le sursis à l'exécution de toutes les décisions du juge de l'exécution, à l'exception de celles qui, dans les rapports entre créanciers et débiteurs, statuent sur des demandes dépourvues d'effet suspensif à moins qu'elles n'ordonnent la mainlevée de la mesure. Ayant retenu à bon droit que la saisine du juge de l'exécution d'une demande de délai de grâce est dépourvue d'effet suspensif, une cour d'appel en a exactement déduit que l'article R. 121-22 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux jugements du juge de l'exécution déboutant l'appelant d'une demande de délais de grâce
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation partielle sans renvoi M. PIREYRE, président Arrêt n° 1262 F-P+B+I Pourvoi n° T 19-20.700 Aide juridictionnelle partielle en demande au profit de M. et Mme S.... Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 6 juin 2019. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 1°/ M. V... S..., 2°/ Mme M... O..., épouse S..., domiciliés [...] , ont formé le pourvoi n° T 19-20.700 contre l'arrêt rendu le 15 novembre 2018 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile - 1re chambre), dans le litige les opposant à la société Hoist Finance Aktiebolag (Hoist Finance AB), dont le siège est immeuble Crystal, 38 allée Vauban, CS 90054, 59110 La Madeleine, anciennement dénommée Hoist Kredit Aktiebolag (Hoist Kredit AB), venant aux droits de la société suédoise Banque Covefi, défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, avocat de M. et Mme S..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 15 novembre 2018), sur le fondement d'une ordonnance d'injonction de payer du 7 mars 2006, la société Hoist Kredit Aktiebolag (la société Hoist Kredit AB), devenue la société Hoist Finance Aktielobag (la société Hoist Finance AB), a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes de M. et Mme S.... 2. Le 4 mai 2017, M. et Mme S... ont fait assigner la société Hoist Kredit AB devant un juge de l'exécution à fin d'annulation de l'ordonnance d'injonction de payer et de mainlevée de la saisie-attribution. 3. Par jugement du 28 mars 2018, le juge de l'exécution a déclaré caduque l'assignation. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deux dernières branches, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief, qui est irrecevable. Mais sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 5. M. et Mme S... font grief à l'arrêt de déclarer recevable comme non prescrite l'action intentée par la société Hoist Kredit AB à l'encontre de M. et Mme S... et de les condamner en conséquence à payer à la société Hoist Kredit AB la somme totale de 15 753,41 euros, alors : « 1°/ que si le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, il n'a pas compétence pour prononcer une condamnation au paiement ; qu'en condamnant les époux S... au paiement de la somme de 15 753,41 euros, la cour d'appel, saisie d'un appel d'une décision du juge de l'exécution, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ; 2°/ à titre subsidiaire, que le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit ; qu'il entre donc dans ses pouvoirs de calculer le montant des intérêts dus en exécution de la condamnation ; qu'en refusant de rechercher le montant des intérêts dus en exécution de l'ordonnance d'injonction de payer en considération du cours du délai de prescription invoqué au prétexte inopérant qu'elle était saisie d'une demande d'exécution d'un titre exécutoire et non de fixation de créance, la cour d'appel a méconnu ses pouvoirs et violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ; 3°/ que le délai d'exécution d'un titre exécutoire, prévu à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, n'est pas applicable aux créances périodiques nées en application de ce titre ; que les créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur sont soumises au délai de prescription prévu à l'article L. 218-2 du code de la consommation, applicable au regard de la nature de la créance ; qu'en jugeant pourtant inopérante l'argumentation des emprunteurs tirée de la prescription biennale des actions des professionnels à l'encontre des consommateurs pour condamner les emprunteurs à payer la somme de 10 158,48 euros au titre des intérêts courus sur la condamnation prononcée par l'ordonnance d'injonction de payer, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire : 6. Le juge de l'exécution, saisi de la contestation d'une mesure d'exécution, n'étant tenu de statuer au fond que sur la validité et les difficultés d'exécution des titres exécutoires qui sont directement en relation avec la mesure d'exécution contestée, il n'entre pas dans les attributions de ce juge de prononcer une condamnation à paiement hors les cas prévus par la loi. 7. L'arrêt, après avoir écarté le moyen tiré de la prescription de la créance de la société Hoist Kredit AB soulevée par M. et Mme S..., les a condamnés à payer à celle-ci une certaine somme due en vertu de l'ordonnance d'injonction de payer du 7 mars 2006. 8. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui statuait sur un recours contre une décision du juge de l'exécution, dans les limites des pouvoirs de ce dernier, ne pouvait pas prononcer de condamnation au paiement de la créance fondant les poursuites, mais seulement statuer sur les contestations de la mesure d'exécution soulevées devant elle, a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 10. La cassation prononcée par voie de retranchement n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il condamne solidairement M. et Mme S... à payer à la société Hoist Kredit AB la somme totale de 15 753,41 euros, l'arrêt rendu le 15 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; DIT n'y avoir lieu à renvoi. Condamne la société Hoist Finance AB aux dépens de l'instance devant la Cour de cassation et condamne in solidum M. et Mme S... aux dépens de première instance et d'appel ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme S... au titre de l'instance devant la Cour de cassation ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour M. et Mme S... IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré recevable comme non prescrite l'action intentée par la société Hoist Kredit AB à l'encontre de M. et Mme S... et de les avoir condamnés en conséquence à payer à la société Hoist Kredit AB la somme totale de 15 753,41 euros ; AUX MOTIFS QUE M. V... S... et Mme M... S... font par ailleurs valoir que, conformément aux dispositions de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, l'exécution des titres exécutoires mentionnés aux 1° à 3° de l'article L. 111-3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long et qu'ainsi, l'action de la Société Hoist Kredit AB est prescrite, pour ne pas avoir été intentée avant le 7 mars 2016 ; que, néanmoins, les dispositions de ce texte sont applicables depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, à savoir le 19 juin 2008 ; qu'en vertu l'article 26 de cette loi, la Société Hoist Kredit AB disposait d'un délai de 10 ans à compter du 19 juin 2008 pour agir, soit jusqu'au 19 juin 2018 ; que le premier acte d'exécution entrepris par la Société Hoist Kredit AB, à savoir la signification de l'ordonnance du 7 mars 2006 avec commandement de payer aux fins de saisie-vente du 15 février 2017, n'est, dans ces conditions, nullement prescrit ; que l'argumentation des appelants sur la forclusion de la créance au vise de l'article L. 218-2 du code de la consommation est au surplus inopérante, la Société Hoist Kredit AB agissant dans le cadre de l'exécution d'un titre exécutoire et non en fixation d'une créance ( ) ; que, sur le quantum de la créance, aux termes des dispositions de l'article R. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, l'acte d'huissier de justice signifié au tiers par lequel le créancier procède à la saisie contient à peine de nullité le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, majorées d'une provision pour les intérêts à échoir dans le délai d'un mois prévu pour élever une contestation ; que, le procès-verbal de saisie du 15 février 2017 fait apparaître qu'il est délivré pour obtenir paiement de la somme de 5 295,07 euros en principal, 8,66 euros au titre des dépens, 63,64 euros de frais de signification de l'ordonnance d'injonction de payer, 10 158,48 euros d'intérêts, 18,32 euros de prestation de recouvrement et 209,04 euros correspondant au coût du présent acte ; que, ce faisant, il est satisfait aux exigences de l'article R. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution et M. V... S... et Mme M... S... seront condamnés à payer à la Société Hoist Kredit AB la somme totale de 15 753,41 euros ; 1°) ALORS QUE si le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, il n'a pas compétence pour prononcer une condamnation au paiement ; qu'en condamnant les époux S... au paiement de la somme de 15 753,41 euros, la cour d'appel, saisie d'un appel d'une décision du juge de l'exécution, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ; 2°) ALORS, à titre subsidiaire, QUE le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit ; qu'il entre donc dans ses pouvoirs de calculer le montant des intérêts dus en exécution de la condamnation ; qu'en refusant de rechercher le montant des intérêts dus en exécution de l'ordonnance d'injonction de payer en considération du cours du délai de prescription invoqué au prétexte inopérant qu'elle était saisie d'une demande d'exécution d'un titre exécutoire et non de fixation de créance, la cour d'appel a méconnu ses pouvoirs et violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ; 3°) ALORS QUE le délai d'exécution d'un titre exécutoire, prévu à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, n'est pas applicable aux créances périodiques nées en application de ce titre ; que les créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur sont soumises au délai de prescription prévu à l'article L. 218-2 du code de la consommation, applicable au regard de la nature de la créance ; qu'en jugeant pourtant inopérante l'argumentation des emprunteurs tirée de la prescription biennale des actions des professionnels à l'encontre des consommateurs pour condamner les emprunteurs à payer la somme de 10 158,48 euros au titre des intérêts courus sur la condamnation prononcée par l'ordonnance d'injonction de payer, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées.
En application de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution, saisi de la contestation d'une mesure d'exécution, n'étant tenu de statuer au fond que sur la validité et les difficultés d'exécution des titres exécutoires qui sont directement en relation avec la mesure d'exécution contestée, il n'entre pas dans les attributions de ce juge de prononcer une condamnation à paiement hors les cas prévus par la loi
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1264 F-P+B+I Pourvois n° C 19-18.800 D 19-18.801 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 I. 1°/ M. Q... I..., 2°/ Mme B... A..., épouse I..., domiciliés [...] , ont formé le pourvoi n° C 19-18.800 contre l'arrêt n° RG : 18/24266 rendu le 4 avril 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le litige les opposant : 1°/ au comptable public chargé du recouvrement du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne, domicilié 20 quai Hippolyte Rossignol, 77000 Melun, agissant sous l'autorité du directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne et du directeur général des finances publiques, 2°/ à la société Flaure, société à responsabilité limitée, dont le siège est 144-146 avenue Eugène Varlin, 77270 Villeparisis, 3°/ à la société Foulques 3, société à responsabilité limitée, dont le siège est 28 ter avenue de Versailles, 93220 Gagny, 4°/ à la société du Comptoir français, société civile immobilière, dont le siège est 30 rue Pierre Brasseur, 77100 Meaux, défendeurs à la cassation. II. 1°/ M. Q... I..., 2°/ Mme B... A..., épouse I..., ont formé le pourvoi n° D 19-18.801 contre l'arrêt n° RG : 18/24260 rendu le 4 avril 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le litige les opposant : 1°/ à Mme R... P..., domiciliée [...] , 2°/ au comptable public responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne, 3°/ à la société civile immobilière du Comptoir français, défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de chacun de leurs pourvois, un moyen de cassation annexé au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Leroy-Gissinger, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. I... et Mme A..., de la SCP Foussard et Froger, avocat du comptable public chargé du recouvrement du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne, agissant sous l'autorité du directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne et du directeur général des finances publiques, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Leroy-Gissinger, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° C 19-18.800 et D 19-18.801 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 4 avril 2019, RG 18/24266 et 18/24260), un jugement du 30 septembre 2016 a ordonné, à la demande de la comptable publique, responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne (le comptable public), le partage judiciaire de l'indivision existant entre M. I... et Mme A... portant sur divers biens immobiliers et la licitation de ceux-ci en deux lots. 3. Par jugements du 18 janvier 2018, un tribunal de grande instance a adjugé le lot n° 1 aux sociétés Flaure et Foulques et le lot n° 2 à Mme P.... Après déclaration de surenchère formée pour chacune de ces ventes, deux jugements du 5 avril 2018, rendus en dernier ressort, ont rejeté les contestations formées par Mme A... comportant, notamment, une demande d'annulation rétroactive de la procédure de surenchère, et adjugé chacun des lots à la société civile immobilière du Comptoir français. 4. La cour d'appel a déclaré irrecevables les appels formés par M. I... et Mme A... à l'encontre de chacun des jugements. Recevabilité des pourvois contestée par la défense 4. Le comptable public fait valoir que M. I... et Mme A... sont dépourvus d'intérêt à former pourvoi au motif que leur avocat a accepté le projet de distribution élaboré à la suite des adjudications et a sollicité le paiement des sommes revenant à M. I.... 5. Cependant, dès lors que la contestation formée par M. I... et Mme A... tendait à l'anéantissement rétroactif de la procédure de surenchère, qui aurait pour effet l'anéantissement de la répartition du produit de la vente, ils justifient d'un intérêt à former un pourvoi contre les arrêts qui ont déclaré leur appel irrecevable. 6. D'où il suit que les pourvois sont recevables. Examen des moyens des pourvois, qui sont identiques Enoncé des moyens 7. M. I... et Mme A... font grief aux arrêts de déclarer l'appel irrecevable, alors : « 1°/ qu'aux termes de l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, tout jugement d'adjudication statuant sur une contestation est susceptible d'appel ; que la cour d'appel a constaté que le jugement du 5 avril 2018 était un jugement sur incident et d'adjudication et qu'il avait tranché une contestation ; qu'en jugeant cependant ce jugement insusceptible d'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article R. 322-60 du code de procédures civiles d'exécution ; 2°/ qu'une partie ne peut, en l'absence d'une disposition spéciale, être privée du bénéfice de la règle du double degré de juridiction ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne dispose que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable au jugement sur incident et d'adjudication qui suit une licitation partage ; qu'en énonçant, pour déclarer l'appel irrecevable, que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux ventes sur licitation des immeubles, en application des dispositions des articles 1377 et 1278 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 1377 et 1278 du code de procédure civile et, par refus d'application, l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 527 et 543 du code de procédure civile ; 3°/ qu'à supposer même inapplicable l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement sur incident et d'adjudication intervenant à la suite d'un jugement de licitation rendu à la demande d'un créancier personnel d'un indivisaire est susceptible d'appel, aucune disposition n'excluant le droit d'appel à l'encontre d'un tel jugement ; qu'en jugeant l'appel irrecevable, la cour d'appel a privé M. et Mme I... de leur droit d'appel et a violé les articles 527 et 543 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 543 du code de procédure civile et R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution : 8. Aux termes du premier de ces textes, la voie de l'appel est ouverte en toutes matières, même gracieuses, contre les jugements de première instance s'il n'en est autrement disposé. Selon le second, en matière de saisie immobilière, les jugements d'adjudication qui statuent sur une contestation sont susceptibles d'appel dans un délai de quinze jours à compter de leur notification. 9. S'il résulte de la combinaison des articles 1377 et 1271 à 1281 du code de procédure civile que de nombreuses règles régissant la procédure de saisie immobilière sont applicables, par renvoi de texte, à la procédure de vente judiciaire d'immeubles après partage, ces dispositions ne lui rendent pas applicable l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution. Toutefois il ne peut en être déduit que les auteurs de la réforme du droit des successions, par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2016, et de la procédure de saisie immobilière, par l'ordonnance n° 2006-461 du 21 avril 2006 et le décret 2006-236 du 27 juillet 2006, ont entendu apporter une dérogation au principe général de l'ouverture de l'appel contre les jugements, posé par l'article 543 du code de procédure civile, dès lors qu'aucun motif tenant à la nature propre de la procédure de licitation ne permettrait de justifier l'absence d'ouverture de cette voie de recours lorsque le jugement d'adjudication a statué sur une contestation. 10. Pour déclarer l'appel irrecevable, l'arrêt retient que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution n'est pas applicable en matière de licitation. 11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts (RG 18/24266 et 18/24260) rendus le 4 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne le comptable public chargé du recouvrement du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne le comptable public chargé du recouvrement du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne à payer à M. I... et Mme A... la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi n° C 19-18.800 par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. I... et Mme A..., épouse I... Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré l'appel irrecevable ; AUX MOTIFS QUE Mme A... et M. I..., mariés sous le régime de la séparation de biens, étaient propriétaires indivis de plusieurs biens immobiliers situés à [...] ) ; que sur requête du comptable public, exerçant l'action oblique en sa qualité de créancier de Mme A..., le tribunal de grande instance de Meaux a, par jugement du 30 septembre 2016, exécutoire ordonné le partage judiciaire de l'indivision entre les époux A... I... sur divers biens immobiliers et la licitation de ceux-ci en deux lots ; qu'en exécution du jugement, le comptable public a mis en oeuvre la vente sur licitation du lot n° 1 ; que par jugement du 18 janvier 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Meaux a adjugé ce lot aux sociétés Flaure et Foulques ; qu'à la suite d'une déclaration de surenchère, ce lot a été adjugé, par jugement du 5 avril 2018 rendu en dernier ressort, à la société civile immobilière du Comptoir Français laquelle en a payé le prix ; que cette même décision avait, notamment, débouté Mme A... de sa demande d'annulation rétroactive de la procédure, de sa demande d'annulation de la procédure de surenchère, rejeté sa demande de report de l'audience sur surenchère et de sa demande de paiement partiel ; que c'est le jugement attaqué ; qu'l'appui de leur demande tendant à faire juger leur appel recevable, les époux A... I... soutiennent que celui-ci est recevable en application de l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution et que, contrairement au 1er alinéa de celui-ci, le jugement d'adjudication du 5 avril 2018, ne leur a pas été notifié ; que cependant, comme le relève à bon droit l'adjudicataire intimée, il résulte des dispositions des articles 1377 et 1278 du code de procédure civile que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux ventes sur licitation des immeubles ; que le jugement, rendu en dernier ressort, n'est pas susceptible d'appel, même s'il tranche une contestation ; 1/ ALORS QU'aux termes de l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, tout jugement d'adjudication statuant sur une contestation est susceptible d'appel ; que la cour d'appel a constaté que le jugement du 5 avril 2018 était un jugement sur incident et d'adjudication et qu'il avait tranché une contestation ; qu'en jugeant cependant ce jugement insusceptible d'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article R. 322-60 du code de procédures civiles d'exécution ; 2/ ALORS QU'une partie ne peut, en l'absence d'une disposition spéciale, être privée du bénéfice de la règle du double degré de juridiction ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne dispose que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable au jugement sur incident et d'adjudication qui suit une licitation partage ; qu'en énonçant, pour déclarer l'appel irrecevable, que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux ventes sur licitation des immeubles, en application des dispositions des articles 1377 et 1278 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 1377 et 1278 du code de procédure civile et, par refus d'application, l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 527 et 543 du code de procédure civile ; 3/ ALORS QU'à supposer même inapplicable l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement sur incident et d'adjudication intervenant à la suite d'un jugement de licitation rendu à la demande d'un créancier personnel d'un indivisaire est susceptible d'appel, aucune disposition n'excluant le droit d'appel à l'encontre d'un tel jugement ; qu'en jugeant l'appel irrecevable, la cour d'appel a privé M. et Mme I... de leur droit d'appel et a violé les articles 527 et 543 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° D 19-18.801 par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. I... et Mme A..., épouse I... Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré l'appel irrecevable ; AUX MOTIFS QUE Mme A... et M. I..., mariés sous le régime de la séparation de biens, étaient propriétaires indivis de plusieurs biens immobiliers situés à [...] ) ; que sur requête du comptable public, exerçant l'action oblique en sa qualité de créancier de Mme A..., le tribunal de grande instance de Meaux a, par jugement du 30 septembre 2016, exécutoire ordonné le partage judiciaire de l'indivision entre les époux A... I... sur divers biens immobiliers et la licitation de ceux-ci en deux lots ; qu'en exécution du jugement, le comptable public a mis en oeuvre la vente sur licitation du lot n° 2 ; que par jugement du 18 janvier 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Meaux a adjugé ce lot à Mme P... ; qu'à la suite d'une déclaration de surenchère, ce lot a été adjugé, par jugement du 5 avril 2018 rendu en dernier ressort, à la société civile immobilière du Comptoir Français laquelle en a payé le prix ; que cette même décision avait, notamment, débouté Mme A... de sa demande d'annulation rétroactive de la procédure, de sa demande d'annulation de la procédure de surenchère, rejeté sa demande de report de l'audience sur surenchère et de sa demande de paiement partiel ; que c'est le jugement attaqué ; qu'l'appui de leur demande tendant à faire juger leur appel recevable, les époux A... I... soutiennent que celui-ci est recevable en application de l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution et que, contrairement au 1er alinéa de celui-ci, le jugement d'adjudication du 5 avril 2018, ne leur a pas été notifié ; que cependant, comme le relève à bon droit l'adjudicataire intimée, il résulte des dispositions des articles 1377 et 1278 du code de procédure civile que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux ventes sur licitation des immeubles ; que le jugement, rendu en dernier ressort, n'est pas susceptible d'appel, même s'il tranche une contestation ; 1/ ALORS QU'aux termes de l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, tout jugement d'adjudication statuant sur une contestation est susceptible d'appel ; que la cour d'appel a constaté que le jugement du 5 avril 2018 était un jugement sur incident et d'adjudication et qu'il avait tranché une contestation ; qu'en jugeant cependant ce jugement insusceptible d'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article R. 322-60 du code de procédures civiles d'exécution ; 2/ ALORS QU'une partie ne peut, en l'absence d'une disposition spéciale, être privée du bénéfice de la règle du double degré de juridiction ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne dispose que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable au jugement sur incident et d'adjudication qui suit une licitation partage ; qu'en énonçant, pour déclarer l'appel irrecevable, que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux ventes sur licitation des immeubles, en application des dispositions des articles 1377 et 1278 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 1377 et 1278 du code de procédure civile et, par refus d'application, l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 527 et 543 du code de procédure civile ; 3/ ALORS QU'à supposer même inapplicable l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement sur incident et d'adjudication intervenant à la suite d'un jugement de licitation rendu à la demande d'un créancier personnel d'un indivisaire est susceptible d'appel, aucune disposition n'excluant le droit d'appel à l'encontre d'un tel jugement ; qu'en jugeant l'appel irrecevable, la cour d'appel a privé M. et Mme I... de leur droit d'appel et a violé les articles 527 et 543 du code de procédure civile.
Il résulte de l'article 543 du code de procédure civile que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est applicable au jugement d'adjudication sur licitation. Ce jugement est donc susceptible d'appel lorsqu'il statue sur une contestation
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CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 880 FS-P+B+I Pourvoi n° X 19-20.405 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 La société Caravelle, société civile immobilière, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° X 19-20.405 contre l'arrêt rendu le 19 décembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 3), dans le litige l'opposant à la société K... Y..., société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] prise en la personne de Mme A... K..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Cap Aud, Paris, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Aldigé, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la société Caravelle, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société K... Y..., ès qualités, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Aldigé, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Andrich, MM. Barbieri, Jessel, David, conseillers, Mme Collomp, MM. Béghin, Jariel, Mme Schmitt, conseillers référendaires, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 décembre 2018), la société Haussmann-Italiens a donné à bail à M. X... des locaux commerciaux à compter du 1er avril 1998 pour une durée de neuf années. 2. Le 30 mars 2007, la société civile immobilière Caravelle (la SCI), devenue propriétaire des lieux loués, a donné congé à M. X... avec offre de renouvellement du bail à compter du 1er octobre 2007, moyennant un loyer annuel en principal de 86 000 euros. Le loyer du bail renouvelé a été fixé judiciairement à la somme annuelle de 57 970 euros en principal. 3. Le 4 octobre 2013, M. X... a cédé son fonds de commerce à la société Cap Aud. 4. Le 5 août 2014, la SCI a délivré à la société Cap Aud un commandement de payer la somme de 19 589,13 euros au titre des loyers et charges dus au 28 juillet 2014, puis l'a assignée en référé en acquisition de la clause résolutoire. Un arrêt du 19 novembre 2015, qui a déclaré acquise la clause résolutoire au 5 octobre 2014, a été cassé (3e Civ., 27 avril 2017, pourvoi n° 16-12.179). 5. Le 13 janvier 2016, la société Cap Aud a assigné à jour fixe la SCI aux fins de voir déclarer réputée non écrite la clause de révision du loyer stipulée au bail, annuler le commandement de payer et, subsidiairement, se voir accorder des délais de paiement rétroactifs et la suspension des effets de la clause résolutoire. La SCI a soulevé l'irrecevabilité des demandes et conclu au rejet de la demande de délais. 6. Un jugement du 23 mars 2017 a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société Cap Aud et désigné la société K... Y... en qualité de liquidateur judiciaire. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée du non-respect par la société Cap Aud du principe de cohérence et déclaré celle-ci recevable en ses demandes, alors « que le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui peut s'appliquer à deux instances dès lors que celles-ci ont le même objet ; qu'en l'espèce, après avoir relevé que la SCI Caravelle soutenait que la société Cap Aud s'était contredite en sollicitant d'abord la suspension des effets de la clause résolutoire lors de la procédure de référé, reconnaissant ainsi la validité du commandement de payer, puis la nullité de ce commandement lors de la procédure au fond, la cour d'appel a affirmé que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui au cours d'une même procédure et que, par conséquent, ce principe était inapplicable aux deux procédures litigieuses, en référé et au fond, avant pourtant de constater que la société Cap Aud avait poursuivi, dans ces deux procédures, le même but, à savoir, la conservation de son titre locatif ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui et l'article 122 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 8. La cour d'appel ayant rejeté la demande d'annulation du commandement formée par la société Cap Aud, la SCI est sans intérêt à critiquer la disposition de l'arrêt déclarant cette demande recevable. 9. Le moyen est donc irrecevable. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 10. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la société Cap Aud en contestation des clauses du bail, de déclarer la société Cap Aud recevable en ses demandes et, en conséquence, de déclarer que la clause de révision stipulée aux termes de l'article XIV du bail commercial du 20 mars 1998 est réputée non écrite, alors : « 1°/ qu'en l'absence de disposition transitoire expresse contraire de la loi nouvelle et à défaut de considérations d'ordre public particulièrement impératives, les contrats demeurent soumis à la loi ancienne en vigueur à la date de leur conclusion ; qu'en l'espèce, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la société Cap Aud en contestation des clauses du bail, la cour d'appel a considéré que la loi du 18 juin 2014, qui a modifié la rédaction de l'article L. 145-15 du code de commerce, s'applique aux baux en cours lors de son entrée en vigueur et a relevé que l'action de la société Cap Aud, formalisée par un acte d'huissier de justice du 13 janvier 2016, avait été introduite postérieurement à l'entrée en vigueur de l'article L. 145-15 du code de commerce, pris dans sa nouvelle rédaction, quand la modification apportée à l'article L. 145-15 du code de commerce par cette loi, qui ne comporte pas de disposition transitoire expresse contraire et qui n'a pas été prise pour des considérations d'ordre public particulièrement impératives, ne pouvait s'appliquer au bail commercial litigieux conclu le 20 mars 1998 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 145-15 du code de commerce, pris dans sa rédaction antérieure à la loi du 18 juin 2014, ensemble le principe de survie de la loi ancienne ; 2°/ que l'action tendant à faire déclarer non écrite une clause ayant pour effet de faire échec au droit de renouvellement d'un bail commercial se prescrit par deux ans ; qu'en l'espèce, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la société Cap Aud en contestation des clauses du bail, la cour d'appel a considéré que l'action en reconnaissance du caractère non écrit d'une clause n'est pas soumise à la prescription et que, par conséquent, l'action de la société Cap Aud tendant à voir déclarer non écrite la clause du bail relative à la « révision » est imprescriptible et n'est pas soumise au délai de l'article L. 145-60 du code de commerce ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, ensemble l'article L. 145-60 du code de commerce. » Réponse de la Cour 11. La cour d'appel a relevé que la loi du 18 juin 2014, en ce qu'elle a modifié l'article L. 145-15 du code de commerce, a substitué, à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions des articles L. 145-37 à L. 145-41 du code de commerce, leur caractère réputé non écrit. 12. Elle a retenu à bon droit que ce texte est applicable aux baux en cours et que l'action tendant à voir réputer non écrite une clause du bail n'est pas soumise à prescription. 13. Elle en a exactement déduit que l'action tendant à voir réputer non écrite la clause du bail relative à la révision du loyer, formée le 13 janvier 2016, soit après l'entrée en vigueur de la loi précitée, était recevable. 14. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 15. La SCI fait grief à l'arrêt de dire que les causes du commandement de payer délivré le 5 août 2014 étaient partiellement fondées et que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies, mais que, par l'effet des délais rétroactifs accordés jusqu'au 9 juin 2015 à la société Cap Aud pour apurer les causes du commandement, celle-ci est réputée n'avoir jamais joué, alors : « 1°/ que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée ; qu'en l'espèce, après avoir considéré que les causes du commandement du 5 août 2014 étaient pour partie infondées, que la société Cap Aud avait versé au 9 juin 2015, entre les mains de l'huissier de justice, la totalité des causes du commandement, à savoir les loyers et indemnités d'occupation échus jusqu'en juin 2015, ainsi que le coût de l'ensemble des actes de procédure engagés par la SCI Caravelle pour parvenir à son expulsion, et qu'il y avait lieu de tenir compte des efforts fournis par la société locataire pour s'en acquitter, de la situation de la débitrice et des besoins de la créancière, la cour d'appel a accordé à la société Cap Aud des délais rétroactifs au 9 juin 2015 et a dit qu'en conséquence la clause résolutoire n'avait pu produire ses effets, quand les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce ne confèrent pas aux juges du fond la faculté d'accorder des délais de paiement de manière rétroactive ; qu'en se statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 145-41 du code de commerce ; 2°/ que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée ; qu'en l'espèce, pour accorder à la société Cap Aud des délais rétroactifs au 9 juin 2015 et dire, en conséquence, que la clause résolutoire n'avait pu produire ses effets, la cour d'appel, après avoir considéré que les causes du commandement du 5 août 2014 étaient pour partie infondées, a constaté que cette société avait versé au 9 juin 2015, entre les mains de l'huissier de justice, la totalité des causes du commandement, à savoir les loyers et indemnités d'occupation échus jusqu'en juin 2015, ainsi que le coût de l'ensemble des actes de procédure engagés par la SCI Caravelle pour parvenir à son expulsion, et a tenu compte des efforts fournis par la société locataire pour s'en acquitter, de la situation de la débitrice et des besoins de la créancière, sans rechercher, comme cela lui était pourtant demandé, si, au moment où la société Cap Aud avait sollicité un délai de paiement, la résiliation n'avait pas déjà été prononcée par une décision de justice ayant acquis autorité de chose jugée ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 145-41 du code de commerce. » Réponse de la Cour 16. La cour d'appel a relevé que, si les causes du commandement de payer étaient partiellement fondées et si les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies, la société locataire avait réglé, le 9 juin 2015, toutes les sommes dues entre les mains de l'huissier de justice poursuivant. 17. Elle a souverainement retenu, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que, compte tenu des efforts de la société locataire pour apurer la dette locative, il y avait lieu de lui accorder des délais rétroactifs au 9 juin 2015 en application de l'article L. 145-41 du code de commerce et en a exactement déduit que la clause résolutoire n'avait pas produit ses effets. 18. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le quatrième moyen Enoncé du moyen 19. La SCI fait grief à l'arrêt de dire que les causes du commandement de payer délivré le 5 août 2014 n'étaient pas partiellement fondées et que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies mais que, par l'effet des délais rétroactifs accordés jusqu'au 9 juin 2015 à la société Cap Aud pour apurer les causes du commandement, celle-ci est réputée n'avoir jamais joué, qu'en conséquence, l'expulsion de la société Cap Aud des locaux donnés à bail, réalisée en exécution d'un titre devenu inexistant ouvre droit pour la société locataire à un rétablissement de ses droits par équivalent, égal au moins à la valeur du fonds de commerce, de condamner la SCI Caravelle à rembourser à la société Cap Aud le coût des actes engagés à l'occasion de l'exécution forcée de la décision d'expulsion obtenue en référé devenus sans cause, de dire qu'un compte serait fait entre les parties, après le dépôt du rapport d'expertise, de débouter la SCI Caravelle de sa demande en paiement des loyers, charges, accessoires et indemnitésd'occupation arrêtées au 4ème trimestre 2014 , de débouter la SCI Caravelle de sa demande en fixation d'une indemnité mensuelle d'occupation, de rejeter la demande de la SCI Caravelle en paiement de la somme de 79 609,92 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 11 juin 2015 et le 11 février 2016, et de rejeter sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive, alors : « 1°/ que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision censurée qui présentent un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire entre elles ; qu'en l'espèce, la cassation à intervenir sur le premier ou le deuxième moyen du pourvoi relatifs à la recevabilité de l'action de la société Cap Aud entraînera l'annulation, par voie de conséquence, de tous les chefs de dispositif de l'arrêt attaqué visés par ce quatrième moyen, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; 2°/ que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision censurée qui présentent un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire entre elles ; qu'en l'espèce, la cassation à intervenir sur le troisième moyen du pourvoi relatif à la validité du commandement de payer et aux délais de paiement accordés jusqu'au 9 juin 2015 à la société Cap Aud pour apurer les causes du commandement entraînera l'annulation, par voie de conséquence, des chefs du dispositif de l'arrêt attaqué ayant dit que l'expulsion de la société Cap Aud des locaux donnés à bail, réalisée en exécution d'un titre devenu inexistant ouvre droit pour la société locataire à un rétablissement de ses droits par équivalent, égal au moins à la valeur du fonds de commerce, d'avoir condamné la SCI Caravelle à rembourser à la société Cap Aud le coût des actes engagés à l'occasion de l'exécution forcée de la décision d'expulsion obtenue en référé devenus sans cause, d'avoir dit qu'un compte serait fait entre les parties, après le dépôt du rapport d'expertise, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en paiement des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arrêtées au 4e trimestre 2014, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en fixation d'une indemnité mensuelle d'occupation, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en paiement de la somme de 79 609,92 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 11 juin 2015 et le 11 février 2016, et d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive, en application de l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 20. La cassation n'étant pas prononcée sur les premier et deuxième moyens, le grief tiré d'une annulation par voie de conséquence est devenu sans portée. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Caravelle aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Caravelle et la condamne à payer à la société K... Y... en qualité de liquidateur de la société Cap Aud la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Caravelle. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée du non-respect par la SARL Cap Aud du principe de cohérence et déclaré la SARL Cap Aud recevable en ses demandes ; Aux motifs que « La SCI Caravelle a principalement soutenu que la locataire en se bornant à solliciter la suspension des effets de la clause résolutoire devant la cour d'appel saisie d'un recours interjeté à l'encontre de l'ordonnance de référé, reconnaissait ainsi la validité du commandement de payer, et ne pouvait dans le cadre de la présente procédure poursuivre sa nullité ; que ces deux procédures opposent les mêmes parties, ont le même objet, soit le commandement de payer du 5 avril 2014 et ont la même fin : l'acquisition ou la suspension des effets de la clause résolutoire ; que de surcroît, la société locataire n'a pas contesté le montant des sommes objet du commandement de payer et s'est acquittée de l'intégralité de l'arriéré locatif réclamé auprès de l'huissier poursuivant, sans formuler aucune réserve lors du paiement ; qu'il s'agit d'un aveu judiciaire sur lequel la société locataire ne peut revenir. Les intimées s'opposent à cette fin de non-recevoir et font valoir que la théorie de l'estoppel n'est pas applicable quand, comme au cas d'espèce, les actions engagées sont de nature et de fondement distinct. La cour relève que, s'il nul ne peut se contredire au détriment d'autrui au cours d'une même procédure, il en va différemment, lorsqu'il s'agit comme en l'espèce, d'une part de moyen soulevé en défense dans le cadre d'une procédure de référé, introduite par la bailleresse et d'autre part, d'une action au fond introduite par la société locataire. De plus, il n'y a eu en l'espèce, aucun changement d'attitude de la locataire de nature à induire la bailleresse en erreur sur ses intentions, la société locataire en sollicitant la suspension à titre rétroactif des effets de la clause résolutoire du bail ou en poursuivant la nullité du commandement, reproduisant ladite clause, poursuivant dans les deux cas le même but, à savoir, la conservation de son titre locatif. Il ne peut être soutenu que la société locataire a renoncé à la contestation du montant de la dette, au motif qu'elle a payé les sommes réclamées par l'huissier, alors qu'elle n'y a procédé que dans le cadre de la contrainte afin d'éviter son expulsion, laquelle est cependant intervenue, malgré l'apurement de la dette » ; Et aux motifs éventuellement adoptés que « La SCI Caravelle soutient, en premier lieu, que la SARL Cap Aud est irrecevable en ses demandes, sur le fondement de l'article 122 du code de procédure civile, aux motifs qu'elle n'a pas respecté le principe de cohérence et de loyauté dans les débats en ce qu'elle se prévaut, dans le cadre de la présente instance, de la nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire qui lui a été délivré le 5 août 2014 alors qu'elle n'avait contesté sa dette locative ni devant le juge des référés ni devant la cour d'appel. La SARL Cap Aud considère ses demandes recevables, faisant valoir que les paiements opérés entre les mains de l'huissier de justice et ses écritures devant la cour d'appel, ne peuvent suffire à considérer qu'elle a expressément reconnu sa dette locative, dans sa nature ou dans son quantum. L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, telle défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Si, en application de cet article, est sanctionné le comportement déloyal d'une partie dans le pouvoir d'agir en justice, la seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement fin de non-recevoir. En l'espèce, il n'est pas contesté que, par arrêt du 19 novembre 2015, la cour d'appel de Paris a confirmé l'ordonnance du 29 janvier 2015 ayant constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée dans le bail liant la SCI Caravelle et la SARL Cap Aud et débouté la société locataire de sa demande en délais de paiement. Cependant, l'action en opposition à commandement de payer engagée par la SARL Cap Aud devant le tribunal de grande instance est distincte de celle engagée en référé par la SCI Caravelle en ce qu'elle tend, à titre principal, au prononcé de la nullité du commandement du 5 août 2014 et non en la seule suspension des effets de la clause résolutoire. Dès lors, la SCI Caravelle apparaît mal fondée à se prévaloir du principe selon lequel une partie ne peut se contredire au détriment d'autrui et la SARL Cap Aud sera déclarée recevable en ses demandes » ; Alors que le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui peut s'appliquer à deux instances dès lors que celles-ci ont le même objet ; qu'en l'espèce, après avoir relevé que la SCI Caravelle soutenait que la SARL Cap Aud s'était contredite en sollicitant d'abord la suspension des effets de la clause résolutoire lors de la procédure de référé, reconnaissant ainsi la validité du commandement de payer, puis la nullité de ce commandement lors de la procédure au fond, la cour d'appel a affirmé que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui au cours d'une même procédure et que, par conséquent, ce principe était inapplicable aux deux procédures litigieuses, en référé et au fond, avant pourtant de constater que la SARL Cap Aud avait poursuivi, dans ces deux procédures, le même but, à savoir, la conservation de son titre locatif ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, ensemble l'article 122 du code de procédure civile. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la SARL Cap Aud en contestation des clauses du bail, déclaré la SARL Cap Aud recevable en ses demandes et, en conséquence, en ce qu'il a dit que la clause de révision stipulée aux termes de l'article XIV du contrat de bail commercial du 20 mars 1998 liant la SCI Caravelle à la SARL Cap Aud est réputée non écrite ; Aux motifs propres que « La SCI Caravelle soulève en outre la prescription de la demande de la société locataire tendant à obtenir le prononcé de la nullité de la clause du bail relative à la révision du loyer en application de l'article L. 145-60 du code de commerce. Elle soutient que la loi du 18 juin 2014, ne contient aucune disposition transitoire quant à la date d'entrée en vigueur de la modification de la rédaction de l'article L. 145-15 du code de commerce, que dès lors, la convention demeure régie par le droit existant au moment de sa conclusion, que quand bien même la loi nouvelle s'appliquerait aux baux en cours lors de son entrée en vigueur, il n'en demeure pas moins que la prescription biennale de l'article L. 145-60 dudit code est toujours en vigueur, de sorte la demande de nullité du commandement et des actes subséquents devient sans objet et donc irrecevable. Ce à quoi s'oppose la société locataire qui fait remarquer qu'elle poursuit le prononcé du caractère non écrit de ladite clause, en application de l'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa rédaction donnée par la loi du 18 juin 2014, lequel est imprescriptible. Elle soutient en outre que la présente procédure ayant été introduite après l'entrée en vigueur de cette loi, celle-ci intervenant en matière statutaire et sur une question d'ordre public est d'application immédiate ; que de surcroît, la révision triennale trouvant sa source dans la loi, elle constitue un effet légal du contrat, alors que le principe de non-rétroactivité des lois ne trouve pas à s'appliquer aux "effets légaux" d'un contrat qui sont régis par la loi en vigueur au moment où ils se produisent. La cour relève que la loi du 18 juin 2014, en ce qu'elle a modifié la rédaction de l'article L. 145-15 du code de commerce, substituant le terme "nullité" en "non écrit" si elle ne s'applique pas aux procédures en cours, s'applique aux baux en cours. En l'espèce, l'action a été introduite par la société Cap Aud par un acte d'huissier de justice en date du 13 janvier 2016, postérieurement à l'entrée en application de l'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa nouvelle version. L'action en reconnaissance du caractère non écrit d'une clause n'est pas soumise à la prescription. En conséquence, l'action de la locataire tendant à voir déclarée non écrite la clause du bail relative à la "révision" étant imprescriptible, n'est pas soumise au délai de l'article L. 145-60 du code de commerce. Dès lors, il convient de rejeter la demande d'irrecevabilité de ce chef présentée par la bailleresse. [ ] Sur le caractère non écrit de la clause du bail intitulée "révision". Pour conclure à la nullité du commandement, la société locataire soutient tout d'abord que des sommes dont le paiement était réclamé dans cet acte étaient dépourvues de fondement dans la mesure où elles résultaient de l'application d'une clause du bail, qui devait être déclarée non écrite. La SCI Caravelle, fait valoir qu'en tout état de cause quand bien même la clause litigieuse ne pourrait s'appliquer, la révision légale demeure possible, or celle-ci est intervenue par lettre du 19 septembre 2013 adressée à M. X... à effet au 1er octobre 2013 ; puis réitérée par une lettre officielle du conseil de la SCI en date du 27 septembre 2013 ; que M. X... s'est acquitté du nouveau loyer, qu'il en a été de même de la société Cap Aud, d'autant que le montant du loyer révisé au 1er octobre 2013 était indiqué dans l'acte de cession du fonds de commerce. L'intimée soutient que compte tenu du sa rédaction, la clause litigieuse n'est pas une clause d'échelle mobile, car elle n'a pas de caractère automatique ; que la révision dont se prévaut la société bailleresse est irrégulière car, le courrier du 19 septembre 2013 n'a pas été envoyé sous forme recommandée, que de surcroît cette révision est intervenue un an seulement après la précédente modification du loyer alors, que l'article L. 145-38 du code de commerce impose un délai de trois ans entre chaque révision légale. La clause litigieuse est rédigée de la manière suivante : "XIV révision du loyer : Le loyer sera révisé, légalement en plus ou en moins, à l'initiative du bailleur tous les ans à la date anniversaire de la date de prise d'effet du bail, telle que définie ci-dessus et pour la première fois le 1er avril 1999, par application des dispositions des articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953 ou de tout texte qui fixerait d'autres modalités pour les révisions légales". La cour relève que la clause litigieuse, en ce qu'elle stipule une "révision" annuelle du loyer, à la demande du bailleur et vise des dispositions relatives aux révisions légales du loyer, doit être réputée non écrite, en ce qu'elle ne correspond pas à une clause d'échelle mobile au fonctionnement automatique. Certes, le caractère non écrit de cette clause ne peut pas priver la société bailleresse du bénéfice des dispositions de l'article L. 145-38 du code de commerce relatives à la révision triennale, ainsi que cette dernière le souligne. Cependant, une telle révision légale doit intervenir dans les conditions prévues par les textes. En l'espèce, c'est à juste titre que la société locataire fait valoir que la notification d'une telle révision qui serait intervenue par lettre simple le 19 septembre 2013 est irrégulière dans la mesure où elle celle-ci ne peut intervenir que tous les trois ans à compter du jour où le nouveau prix sera applicable. En effet, le montant du loyer du bail renouvelé le 1er octobre 2007, entre la SCI Caravelle et M. P... X... pour les locaux litigieux a été fixé par jugement du juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris le 20 décembre 2012 à la somme annuelle de 57.970 euros. Le courrier du 13 septembre 2013, précisait qu'à compter du 1er octobre 2013, le loyer "passera de la somme de 16.920,13 euros à celle de 17.223,58 euros" compte tenu de la variation de l'"indice de base du premier trimestre 2012 : 1617" et de l'indice "révisé du 1er trimestre 2013 : 1646". Dans ces conditions, la révision légale n'est pas intervenue dans les conditions de l'article L. 145-38 du code de commerce et n'a pu produire effet, puisqu'elle a été effectuée par rapport au montant du loyer fixé l'année précédente. Le fait que ces montants aient été mentionnés dans l'acte de cession du fonds de commerce intervenu le 4 octobre 2013, que M. X...ait accepté de payer un rappel de loyer à ce titre et que la société Cap Aud ait accepté de payer par la suite le montant du loyer ainsi révisé, ne peut suffire à régulariser la révision irrégulièrement intervenue, ces paiements étant équivoques » ; Et aux motifs éventuellement adoptés que « La SCI Caravelle soutient, ensuite, que l'action en nullité de la clause relative à la révision des loyers est soumise à la prescription biennale de l'article L. 145-60 du code de commerce, commençant à courir à compter de la signature du bail, soit le 20 mars 1998, ou, à défaut, de la date d'entrée dans les lieux de la SARL Cap Aud, soit le 4 octobre 2013. Elle en déduit qu'en tout état de cause, les demandes de la SARL Cap Aud sont irrecevables pour être prescrites. En réponse, la SARL Cap Aud fait valoir qu'elle fonde son opposition à commandement de payer non sur la nullité de la clause de révision, mais sur son caractère non écrit, action qu'elle considère imprescriptible en application des articles L. 145-15 et L. 145-16 du code de commerce tel qu'issus de la loi du 18 juin 2014, qu'elle soutient être d'application immédiate. Conformément à l'article L. 145-60 du code de commerce, les actions exercées en application des articles L. 145-1 et suivants du code de commerce se prescrivent par deux ans. L'article L. 145-15 du code de commerce dispose que sont réputés non écrits, qu'elle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui ont pour effet de faire échec au droit de renouvellement institué par le présent chapitre ou aux dispositions des articles L. 145-4, L. 145-37 à L. 145-41, du premier alinéa de l'article L. 145-42 et des articles L. 145-47 à L. 145-54. Cet article confère, notamment, un caractère d'ordre public aux dispositions relatives à la révision des loyers. En application de cet article, une clause sanctionnée en étant déclarée réputée non écrite est inexistante. Il en résulte que la prescription biennale des actions fondées sur les dispositions statutaires est inapplicable. Dès lors, la demande en nullité du commandement formée par la SARL Cap Aud, sur le fondement du caractère non écrit de la clause du bail intitulée "Révision" en application de l'article L. 145-15 du code de commerce, sera déclarée recevable. [ ] Sur le caractère non écrit de la clause de révision insérée dans le bail du 20 mars 1998 : La SARL Cap Aud soutient, en premier lieu, que la clause XIV du contrat de bail, intitulée "révision du loyer", doit être réputée non écrite en ce qu'elle contrevient, en permettant une révision annuelle du loyer, aux dispositions d'ordre public des articles L. 145-15, L. 145-37 et L. 145-38 du code de commerce. Elle déduit du caractère non écrit de cette clause que, faute pour la société bailleresse d'avoir demandé la révision judiciaire du loyer, celui-ci demeurait équivalent au montant judiciairement fixé par jugement du 20 décembre 2012 à la somme annuelle de 57.970 euros, hors taxes et hors charges et, qu'en conséquence, le commandement de payer visant un loyer trimestriel de 17.2236,58 euros, hors taxes et hors charges, soit 68.894,32 euros, est nul. Elle évalue les trop-versés de loyers entre le 5 octobre 2013 et le 11 juin 2015 à la somme de 18.377,02 euros, hors taxes. En réponse, la SCI Caravelle fait valoir que la clause visée par la SARL Cap Aud organise une révision triennale du loyer conformément à l'article L. 145-38 du code de commerce et poursuit en soutenant que la SARL Cap Aud a accepté le montant des loyers révisés, tels que proposés par elle, au 1er octobre 2010 et au 1er octobre 2013. Il est constant que la SCI Caravelle a procédé à une révision du loyer les 1er octobre 2010 et 1er octobre 2013. L'article L. 145-15 du code de commerce dispose que sont réputés non écrits, qu'elle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui ont pour effet de faire échec au droit de renouvellement institué par le présent chapitre ou aux dispositions des articles L. 145-4, L. 145-37 à L. 145-41, du premier alinéa de l'article L. 145-42 et des articles L. 145-47 à L. 145-54. Conformément à l'article L. 145-38 alinéa 1er du code de commerce, la demande en révision ne peut être formée que trois ans au moins après la date d'entrée en jouissance du locataire ou après le point de départ du bail renouvelé. La révision du loyer prend effet à compter de la date de la demande de révision. L'article XIV du contrat de bail, intitulé "Révision du loyer" stipule que "le loyer sera révisé, légalement en plus ou en moins, à l'initiative du bailleur tous les ans à la date anniversaire de la date de prise d'effet du bail, telle que définie ci-dessus et pour la première fois le 1er avril 1999, par application des dispositions des articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953 ou de tout texte qui fixerait d'autres modalités pour les révisions légales". Cette clause, en ce qu'elle stipule une révision du loyer "à l'initiative du bailleur" et qu'elle se réfère aux dispositions des articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953, c'est-à-dire aux articles L. 145-37 et L. 145-38 du code de commerce, ne peut être qualifiée de clause d'indexation dès lors qu'elle instaure une révision du loyer subordonnée à une demande du bailleur et dépourvue de toute automaticité. De plus, l'article L. 145-38 du code de commerce encadrant une révision triennale du loyer, une clause organisant la révision du loyer dans un délai inférieur soit, comme en l'espèce, dans le délai d'un an, ne peut qu'être réputée non écrite en application de l'article L. 145-15 du même code. Par ailleurs, l'article XV du contrat de bail, intitulé "Indice de référence" stipule que "l'indice de référence est l'indice du coût de la construction, publié par l'INSEE du 3ème trimestre 1997 s'élevant à 1067. Pour les renouvellements ultérieurs, l'indice de référence sera l'indice du coût de la construction du 3ème trimestre de l'année précédant celle du renouvellement". Or, il ressort des pièces produites que, par courrier daté du 19 septembre 2013, l'administrateur de biens de la SCI Caravelle a informé M. X..., alors locataire des locaux, objets du litige, de l'augmentation du loyer "de la somme de 16 920,13 € à celle de 17 223,58 €" en référence eux indices publiés les 1er trimestres 2012 et 2013, en contravention aux stipulations du bail qui se réfèrent à l'indice du coût de la construction du 3ème trimestre 1997 et du 3ème trimestre de l'année précédant celle du renouvellement. Dès lors, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les révisions de loyers effectuées par la SCI Caravelle les 1er octobre 2010 et 1er octobre 2013 sont mal fondées et, à la date du commandement de payer du 5 août 2014, la SARL Cap Aud était redevable d'un loyer annuel de 57.970 euros, hors taxes et hors charges, en application du jugement du juge des loyers commerciaux en date du 20 décembre 2012. Les décomptes de sommes dues produits ne permettent pas au tribunal de déterminer les sommes dont la SARL Cap Aud était débitrice à la date du commandement de payer sur la base d'un loyer annuel de 57.970 euros » ; Alors qu'en l'absence de disposition transitoire expresse contraire de la loi nouvelle et à défaut de considérations d'ordre public particulièrement impératives, les contrats demeurent soumis à la loi ancienne en vigueur à la date de leur conclusion ; qu'en l'espèce, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la SARL Cap Aud en contestation des clauses du bail, la cour d'appel a considéré que la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, qui a modifié la rédaction de l'article L. 145-15 du code de commerce, s'applique aux baux en cours lors de son entrée en vigueur et a relevé que l'action de la SARL Cap Aud, formalisée par un acte d'huissier de justice du 13 janvier 2016, avait été introduite postérieurement à l'entrée en vigueur de l'article L. 145-15 du code de commerce, pris dans sa nouvelle rédaction, quand la modification apportée à l'article L. 145-15 du code de commerce par cette loi, qui ne comporte pas de disposition transitoire expresse contraire et qui n'a pas été prise pour des considérations d'ordre public particulièrement impératives, ne pouvait s'appliquer au bail commercial litigieux conclu le 20 mars 1998 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 145-15 du code de commerce, pris dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, ensemble le principe de survie de la loi ancienne ; Alors, subsidiairement, que l'action tendant à faire déclarer non écrite une clause ayant pour effet de faire échec au droit de renouvellement d'un bail commercial se prescrit par deux ans ; qu'en l'espèce, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la SARL Cap Aud en contestation des clauses du bail, la cour d'appel a considéré que l'action en reconnaissance du caractère non écrit d'une clause n'est pas soumise à la prescription et que, par conséquent, l'action de la SARL Cap Aud tendant à voir déclarer non écrite la clause du bail relative à la « révision » est imprescriptible et n'est pas soumise au délai de l'article L. 145-60 du code de commerce ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, ensemble l'article L. 145-60 du code de commerce. TROISIÈME MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir dit que les causes du commandement de payer délivré le 5 août 2014 étaient partiellement infondées et que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies mais que, par l'effet des délais rétroactifs accordés jusqu'au 9 juin 2015 à la SARL Cap Aud pour apurer les causes du commandement, celle-ci est réputée n'avoir jamais joué ; Aux motifs que « la société bailleresse fait valoir, à juste titre, qu'un commandement ne peut être déclaré nul au motif que le montant de son principal a été déclaré partiellement infondé, ce commandement restant valable à hauteur de ses causes justifiées. La cour relève qu'en l'espèce, depuis l'entrée dans les lieux de la société Cap Aud le loyer aurait dû être appelé sur la base du loyer fixé au 1er octobre 2007 soit la somme annuelle de 57.970 euros, faute de justification des révisons légales, or il a été appelé à hauteur de la somme principale annuelle de 68.894,32 euros, soit un différentiel non justifié de 10.924,32 euros ; par ailleurs, la provision pour charges de 1.000 euros par trimestre et la régularisation des charges 2013 pour 709,64 euros ne sont pas justifiées. Entre janvier 2014 et juillet 2014, la société locataire a réglé la somme de 38.662,45 euros (18.223,58 euros x 2 + 215,29 euros + 1000 euros x2 ), alors qu'elle aurait dû régler la somme de 44.123,37 euros (14.492,50 euros x 3 + 215,29 x 3); que dès lors, les causes du commandement ne s'élevaient qu'à la somme de 5.460,92 euros au titre des loyers et CRL demeurés impayés à la date de la délivrance. En conséquence, il n'y a pas lieu d'annuler ledit commandement ses causes étant partiellement fondées. Les conditions d'acquisition de la clause résolutoire sont réunies. Cependant, à titre subsidiaire la société locataire, demande l'octroi de paiement à titre rétroactif au 9 juin 2015. En l'espèce, la société locataire a versé au 9 juin 2015 entre les mains de l'huissier, la totalité des causes du commandement, les loyers et indemnités d'occupation échues jusqu'en juin 2015, ainsi que le coût de l'ensemble des actes de procédure engagés par le bailleur pour parvenir à son expulsion. Les causes du commandement étant pour partie infondées, compte tenu des efforts fournis par la société locataire pour s'en acquitter, de la situation de la débitrice et des besoins de la créancière, il convient d'accorder à la société Cap Aud des délais rétroactifs au 9 juin 2015 en application de l'arric1e 1145-41 du code de commerce, et en conséquence, de dire que la clause résolutoire n'a pu produire ses effets ». Alors, d'une part, que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée ; qu'en l'espèce, après avoir considéré que les causes du commandement du 5 août 2014 étaient pour partie infondées, que la SARL Cap Aud avait versé au 9 juin 2015, entre les mains de l'huissier de justice, la totalité des causes du commandement, à savoir les loyers et indemnités d'occupation échus jusqu'en juin 2015, ainsi que le coût de l'ensemble des actes de procédure engagés par la SCI Caravelle pour parvenir à son expulsion, et qu'il y avait lieu de tenir compte des efforts fournis par la société locataire pour s'en acquitter, de la situation de la débitrice et des besoins de la créancière, la cour d'appel a accordé à la SARL Cap Aud des délais rétroactifs au 9 juin 2015 et a dit qu'en conséquence la clause résolutoire n'avait pu produire ses effets, quand les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce ne confèrent pas aux juges du fond la faculté d'accorder des délais de paiement de manière rétroactive ; qu'en se statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 145-41 du code de commerce ; Alors, d'autre part, que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée ; qu'en l'espèce, pour accorder à la SARL Cap Aud des délais rétroactifs au 9 juin 2015 et dire, en conséquence, que la clause résolutoire n'avait pu produire ses effets, la cour d'appel, après avoir considéré que les causes du commandement du 5 août 2014 étaient pour partie infondées, a constaté que cette société avait versé au 9 juin 2015, entre les mains de l'huissier de justice, la totalité des causes du commandement, à savoir les loyers et indemnités d'occupation échus jusqu'en juin 2015, ainsi que le coût de l'ensemble des actes de procédure engagés par la SCI Caravelle pour parvenir à son expulsion, et a tenu compte des efforts fournis par la société locataire pour s'en acquitter, de la situation de la débitrice et des besoins de la créancière, sans rechercher, comme cela lui était pourtant demandé (conclusions d'appel, p. 27 à 37), si, au moment où la SARL Cap Aud avait sollicité un délai de paiement, la résiliation n'avait pas déjà été prononcée par une décision de justice ayant acquis autorité de chose jugée ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 145-41 du code de commerce. QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'avoir dit que les causes du commandement de payer délivré le 5 août 2014 étaient partiellement infondées et que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies mais que, par l'effet des délais rétroactifs accordés jusqu'au 9 juin 2015 à la SARL Cap Aud pour apurer les causes du commandement, celle-ci est réputée n'avoir jamais joué, qu'en conséquence, l'expulsion de la SARL Cap Aud des locaux donnés à bail, réalisée en exécution d'un titre devenu inexistant ouvre droit pour la société locataire à un rétablissement de ses droits par équivalent, égal au moins à la valeur du fonds de commerce, d'avoir condamné la SCI Caravelle à rembourser à la SARL Cap Aud le coût des actes engagés à l'occasion de l'exécution forcée de la décision d'expulsion obtenue en référé devenus sans cause, d'avoir dit qu'un compte serait fait entre les parties, après le dépôt du rapport d'expertise, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en paiement des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arrêtées au 4e trimestre 2014, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en fixation d'une indemnité mensuelle d'occupation, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en paiement de la somme de 79 609,92 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 11 juin 2015 et le 11 février 2016, et d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive ; Aux motifs propres que « Sur la validité du commandement en date du 5 août 2014. La société Caravelle rappelant les termes de l'article 1338 du code civil, soutient que la société locataire s'étant volontairement et sans réserve, acquittée des causes du commandement, elle a ainsi renoncé à toute contestation de la validité de l'acte. L'intimée réplique que les conditions d'application de l'article 1338 ne sont pas réunies. La cour rappelle que l'application de l'article 1338 du code civil est subordonnée à la réunion de deux conditions cumulatives, la connaissance du vice affectant l'acte et la volonté de réparer ce vice. En l'espèce, la société bailleresse n'établit pas que la société locataire qui a payé à la demande de l'huissier poursuivant les causes du commandement, avait la volonté de réparer le vice qu'elle allègue à présent en ce qui concerne le bien-fondé des causes de cet acte. Sur les causes du commandement. Le commandement dont s'agit a été délivré pour la somme principale de 19.589,13 euros "loyers dus au 28 juillet 2014" "détail des loyers dus en annexe aux présentes". Le relevé de compte en date du 28 juillet 2014, figurant en annexe de l'acte, se présentait comme suit : "-1er avril 2014 du 1/04/2014 au 30/06/2014 17.223,58 euros provision sur charges : 1.000 euros total de l'échéance : 18.223,58 euros -22 mai 2014 du 1er avril 2014 au 30 juin 2014 1/2 CRL : 215,29 euros 28 mai 2014 : votre chèque : 18.223,58 euros -23 juin 2014 du 1/1/2013 au 31/12/2013 solde charges 709,64 euros -1er juillet 2014 du 1/7/2014 au 30/09/2014 loyer 17.223,58 euros 1/[...] 5,29 euros provisions pour charges : 1.000 euros frais de procédure 225,33 euros solde 19.589,13 euros" [ ] Sur les provisions pour charges. La société locataire émet une contestation en ce qui concerne le montant des provisions pour charges appelé à compter du 1er octobre 2013 à hauteur de 1 000 euros. La société bailleresse rappelle que le montant de la provision pour charges a été expressément accepté par la société locataire dans le cadre de la cession du fonds de commerce intervenue à son profit. La cour relève ainsi que l'ont justement noté les premiers juges, que les termes de l'acte de cession du fonds de commerce entre M. X...et la société Cap Aud, ne peuvent servir à fixer les obligations du preneur envers le bailleur. Les relations entre ces deux parties sont en effet fixées par les termes du bail les liant. En l'espèce, le bail qui liait M. X... à la société bailleresse, en date du 20 mars 1998 a été renouvelé à compter du 1er octobre 2007, par jugement en date du 20 décembre 2012. Le jugement mixte en date du 26 mai 2011 du tribunal de grande instance de Paris, intervenu entre M. X... et la SCI Caravelle a condamné cette dernière à rembourser à M. X... certaines charges au titre de leur augmentation injustifiée pour les années 2006, 2007 et l'a déboutée de sa demande en paiement des charges pour l'année 2008, faute de justificatifs. Le jugement consécutif au fond du 20 décembre 2012, n'a pas statué à nouveau au sujet des charges et s'est contenté d'ordonner au besoin une compensation entre les sommes dues. Il résulte du relevé de compte en date du 3 octobre 2013, établi par le cabinet Archet, à l'ordre de M. X... que la provision pour charges qui était de 800 euros lors de l'appel du 1er avri1 2013 est passée à 1.000 euros lors de l'appel du 1er juillet 2013. La clause du bail liant les parties est rédigée de la façon suivante : "IX charges En sus du loyer, la locataire s'engage à rembourser trimestriellement au bailleur sa quote-part de charges correspondant aux charges dites "récupérables". La provision pour charges pour la première année est évaluée à 9600 francs par an." La cour relève que si la commune intention des parties a été de réviser le montant de la provision fixée chaque année, le bail précisant que le montant de celle-ci était déterminé "pour la première année", il n'en reste pas moins que la fixation annuelle du montant de ladite provision, était subordonnée à l'apurement annuel des charges. Or, en l'espèce, il n'est justifié d'aucun apurement annuel régulier, d'autant que le jugement en date du 26 septembre 2011, souligne bien au contraire que la SCI Caravelle, ne produisait aucune pièce, aucun décompte ni aucun justificatif des charges alors appelées. Dans le cadre du présent litige, la bailleresse ne produit pas davantage de justificatifs des charges. Dès lors, la société bailleresse ne pouvait fonder son commandement de payer sur une provision pour charges dont le montant était injustifié. Sur la contribution sur les revenus locatifs. En ce qui concerne la contribution sur les revenus locatifs, c'est à juste titre que la société bailleresse, qui y est assujettie a, en application de l'article 12 J I de la loi de finances rectificative pour 1998 et de l'article 12 P de la loi de finances 2000 qui prévoient que cette taxe est récupérable de plein droit, sauf convention contraire, à raison de la moitié sur les locataires des locaux à usage commercial situés dans des immeubles comportant à concurrence de la moitié au moins de leur superficie totale des locaux à usage d'habitation, a demandé à la société locataire le paiement de la somme de 215,29 euros à ce titre, aucune clause contraire n'existant au bail et la superficie totale de l'immeuble étant affectée pour la moitié au moins à usage d'habitation. Sur le solde des charges 2013. La société locataire conteste aussi les sommes réclamées dans le commandement de payer litigieux, au titre du "solde de charge 2013 ; 709,64 euros." La cour relève que la bailleresse ne produit aucune pièce de nature à justifier cette demande en paiement, alors qu'il lui incombe de le faire. Sur les frais de procédure. La société locataire conteste également la somme de 225,33 euros réclamée au titre des frais de procédure. La cour relève que les frais de procédure ne peuvent entraîner le jeu de l'acquisition de la clause résolutoire. Dans ces conditions, cette somme ne pouvait figurer au principal des sommes réclamées. Sur la validité du commandement et l'octroi de délai rétroactif suspendant les effets de la clause résolutoire. La société bailleresse fait valoir, à juste titre, qu'un commandement ne peut être déclaré nul au motif que le montant de son principal a été déclaré partiellement infondé, ce commandement restant valable à hauteur de ses causes justifiées. La cour relève qu'en l'espèce, depuis l'entrée dans les lieux de la société Cap Aud le loyer aurait dû être appelé sur la base du loyer fixé au 1er octobre 2007 soit la somme annuelle de 57.970 euros, faute de justification des révisons légales, or il a été appelé à hauteur de la somme principale annuelle de 68.894,32 euros, soit un différentiel non justifié de 10.924,32 euros ; par ailleurs, la provision pour charges de 1.000 euros par trimestre et la régularisation des charges 2013 pour 709,64 euros ne sont pas justifiées. Entre janvier 2014 et juillet 2014, la société locataire a réglé la somme de 38.662,45 euros (18.223,58 euros x 2 + 215,29 euros + 1000 euros x2 ), alors qu'elle aurait dû régler la somme de 44.123,37 euros (14.492,50 euros x 3 + 215,29 x 3); que dès lors, les causes du commandement ne s'élevaient qu'à la somme de 5.460,92 euros au titre des loyers et CRL demeurés impayés à la date de la délivrance. En conséquence, il n'y a pas lieu d'annuler ledit commandement ses causes étant partiellement fondées. Les conditions d'acquisition de la clause résolutoire sont réunies. Cependant, à titre subsidiaire la société locataire, demande l'octroi de paiement à titre rétroactif au 9 juin 2015. En l'espèce, la société locataire a versé au 9 juin 2015 entre les mains de l'huissier, la totalité des causes du commandement, les loyers et indemnités d'occupation échues jusqu'en juin 2015, ainsi que le coût de l'ensemble des actes de procédure engagés par le bailleur pour parvenir à son expulsion. Les causes du commandement étant pour partie infondées, compte tenu des efforts fournis par la société locataire pour s'en acquitter, de la situation de la débitrice et des besoins de la créancière, il convient d'accorder à la société Cap Aud des délais rétroactifs au 9 juin 2015 en application de l'article L. 145-41 du code de commerce, et en conséquence, de dire que la clause résolutoire n'a pu produire ses effets. Sur la condamnation de la société bailleresse à rembourser les sommes indûment perçues. La société locataire demande à ce titre la condamnation de la bailleresse à lui rembourser la somme de 25.109,45 euros TVA en sus indûment versée. Les différents actes d'huissier de justice établis en exécution de l'ordonnance de référé et de l'arrêt consécutif de la cour d'appel, étant désormais dépourvus de cause, la société Cap Aud qui en a réglé le coût est bien fondée à en demander le remboursement. Un compte sera à faire entre les parties, à la suite du dépôt de l'expertise judiciaire ordonnée par les premiers juges. Sur la demande en réintégration ou en indemnisation. La société locataire présente sa demande en application de l'article L. 110-10 du code des procédures civiles d'exécution. La société bailleresse soutient que cette réintégration est impossible les biens objets du bail dont s'agit ayant depuis été reloués suivant acte sous seing privé en date du 1er juillet 2017 à la société Merci Jérôme Développement. Elle s'oppose à toute réparation par équivalent et mesure d'expertise. La cour relève que le titre fondant l'exécution forcée de l'expulsion de la société locataire n'était délivré qu'à titre provisoire. Ce titre n'existe plus, l'arrêt de la cour statuant sur l'appel de la décision prise en référé ayant été cassé par la Cour de cassation. Par ailleurs, la présente décision statuant au fond, accorde des délais rétroactifs au preneur pour s'acquitter des causes du commandement, en ce qu'elles ont été reconnues partiellement fondées, et constate qu'en raison du respect de ces délais la clause résolutoire n'a pas pu jouer. C'est donc à ses risques et périls que la société bailleresse a poursuivi l'exécution forcée de l'expulsion de la société locataire et faute de pouvoir être réintégrée dans les lieux loués, ceux-ci étant actuellement occupés par un autre preneur, la société locataire est bien fondée à solliciter une mesure d'expertise afin de chiffrer son dommage lié à la perte de son fonds. Sur la demande en paiement des loyers et charges formée par la SCI Caravelle. La société bailleresse sollicite la fixation au passif de la société locataire de la somme de 26.523,06 euros au titre du solde des loyers, charges et accessoires et indemnités d'occupation arriérés au 4e trimestre 2014 inclus, outre les intérêts de retard. Compte tenu des éléments développés ci-dessus, la société locataire au 4e trimestre 2014, inclus, restait redevable des sommes suivantes : loyers du 1er au 4e trimestre 2014 : 14.492,50 euros x 4 1/2 CRL : 215,29 euros x 4 total : 58.831,16 euros Il n'a pas été justifié des charges. sommes versées : (janvier 2014) : 18.223,58 euros 28 mai 2014 : 18.223,58 euros 25 mars 2015 : 1.550 euros 8 avril 2015 : 7.530 euros 13 avril 2015 : 2.800 euros 11 mai 2015 : 6.598,07 euros 22 mai 2015 : 8.000 euros 9 juin 2015 : 20.925,92 euros total : 83.671,15 euros En conséquence, la société locataire n'est redevable d'aucune somme au titre des loyers, CRL et charges arrêtée au 4e trimestre 2014, inclus. Sur la demande en paiement des indemnités d'occupation entre le 11 juin 2015 et le 11 février 2016. La cour relève que le bail n'étant pas résilié, la clause résolutoire n'ayant pas produit ses effets, aucune indemnité d'occupation n'est due en l'espèce. La SCI Caravelle a fait établir deux procès-verbaux d'expulsion, le premier en date du 11 juin 2015 en exécution de l'ordonnance de référé rendue le 29 janvier 2015, le second le 16 février 2016, en exécution du jugement du juge de l'exécution du 8 septembre 2015, de l'ordonnance de référés du 29 janvier 2015 et de l'arrêt du 14 décembre 2015, ce deuxième acte portant plus spécifiquement sur l'entresol donné à bail. La cour relève que ce deuxième acte ne mentionne pas la nécessité où se serait trouvé l'huissier poursuivant de procéder à nouveau à l'expulsion des locaux de la société Cap Aud, alors qu'il avait déjà procédé à cette mesure le 11 juin 2015. Il résulte du bail liant les parties, qu'avaient été donnés en location : au rez-de-chaussée un local commercial de 66 m2, à l'entresol un local à usage commercial communiquant par un escalier intérieur avec le rez-de-chaussée d'une surface d'environ 59m2 et au sous-sol une cave d'une surface d'environ 5 m2. Aucune preuve n'est établie d'une quelconque manoeuvre de la société locataire qui aurait empêché l'huissier de procéder en juin 2015, à l'expulsion et à la reprise de la totalité des lieux donnés à bail, en ce compris l'entresol accessible selon le bail par un escalier intérieur. Si bien, que les lieux sont vis à vis du preneur, réputés avoir été repris en leur ensemble à la date du premier procès-verbal d'expulsion et aucune somme n'est due au bailleur par la société locataire pour la période écoulée entre le premier procès-verbal et le second, quand bien même l'huissier poursuivant aurait négligé la reprise de certains locaux donnés à bail. [ ] Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive La société Cap Aud triomphant dans ses prétentions, son action ne revêt aucun caractère abusif et ne peut ouvrir droit à dommagesintérêts et la bailleresse doit être déboutée de ce chef de prétention » ; Et aux motifs éventuellement adoptés que « Sur le montant des provisions sur charges visé au commandement de payer : La SARL Cap Aud prétend ensuite que le commandement de payer est nul en ce qu'il vise des provisions trimestrielles sur charges de 1.000 euros alors que le bail prévoit une provision sur charges de 1.463,51 euros par an, soit 365,88 euros par trimestre, sans qu'elle ne justifie de cette différence. La SCI Caravelle soutient que la fixation de la provision sur charges à la somme trimestrielle de 1.000 euros a été acceptée par la SARL Cap Aud dans le cadre de la cession du fonds de commerce. L'article IX du contrat de bail, intitulé "Charges", stipule qu'"en sus du loyer, le locataire s'engage à rembourser trimestriellement au bailleur sa quote-part de charges correspondant aux charges dites récupérables. La provision sur charges pour la première année est évaluée à neuf mille six cents francs (9.600 Frs) par an". Si l'acte de cession de fonds de commerce stipule, aux termes d'un article intitulé "Loyer et dépôt de garantie actualisés", qu'"une provision sur charges de 1.000 € et la moitié de la CRL sont appelées en même temps que le loyer", la SCI Caravelle n'est pas partie à cette opération. Le contrat de bail liant la SCI Caravelle à la SARL Cap Aud mentionnant des provisions sur charges de 9.600 francs, la bailleresse apparaît mal fondée à solliciter, aux termes du commandement de payer, une provision sur charges de 1.000 euros, montant qui devra être déduit des sommes imputables à la SARL Cap Aud. Sur la contribution sur les revenus locatifs : La SARL Cap AuD prétend encore que le commandement de payer du 5 août 2014 est nul en ce qu'il vise le non-paiement de la somme de 215,29 euros au titre de la contribution sur les revenus locatifs, que le contrat de bail n'impute pas à la société locataire. La SCI Caravelle soutient, pour sa part, que les contributions sur les revenus locatifs sont à la charge du locataire pour moitié, en application des dispositions des articles 234 nonies à 234 quindecies du code général des impôts. L'article 234 du code général des impôts auquel se réfère la société bailleresse est afférent à l'instauration d'une taxe annuelle due par les bailleurs à raison des loyers perçus au titre de logement. Par ailleurs, si l'article intitulé "Loyer et dépôt de garantie actualisés" de la cession de fonds de commerce stipule qu'"une provision sur charges de 1.000 € et la moitié de la CRL sont appelées en même temps que le loyer", la SCI Caravelle n'est pas partie à la cession de fonds et le contrat de bail n'impute pas une telle taxe à la société locataire. Dès lors, la SCI Caravelle était mal fondée à solliciter le paiement de la somme de 215,29 euros au titre de la contribution sur les revenus locatifs aux termes du commandement de payer du 5 août 2014 et cette somme devra être déduite des sommes imputables à la SARL Cap Aud. Sur les frais de procédure et la reddition de charges : La SARL Cap Aud conteste enfin être débitrice de la somme de 225,33 euros correspondant au coût du commandement de payer du 5 août 2014 dès lors que ce commandement sera déclaré nul dans le cadre de la présente instance. Selon la SCI Caravelle, la somme de 225,33 euros correspond au coût du commandement de payer, imputable à la SARL Cap Aud. Le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire étant inclus dans les dépens d'une procédure constatant l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail, la SARL Cap Aud est mal fondée à se prévaloir de la nullité du commandement de payer du 5 août 2014 sur ce chef de prétention. Compte tenu du caractère non écrit de la clause de révision stipulée au bail en date du 20 mars 1998, du mal fondé des demandes en paiement sollicitées par la SCI Caravelle par acte extrajudiciaire du 5 août 2014 au titre des loyers révisés, des provisions sur charges et de la contribution sur les revenus locatifs, le tribunal ne pourra que constater la nullité dudit commandement qui, par suite, sera déclaré sans effet. [ ] Sur les demandes reconventionnelles en paiement formées par la SCI Caravelle : Sur la demande en paiement des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arrêtés au 4e trimestre 2014 : La SCI Caravelle demande, en premier lieu, la condamnation de la SARL Cap Aud au paiement de la somme de 26.523,06 euros au titre du solde des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation, suivant décompte arrêté au 4e trimestre 2014. Cependant, le relevé de compte produit par la SCI Caravelle au soutien de sa demande en paiement commence à courir le 1er avril 2014, et non à la date d'entrée de la SARL Cap Aud dans les locaux litigieux. En outre, le montant des loyers et provisions sur charges appelées par la bailleresse ne sont pas conformes au contrat de bail. Dès lors, compte tenu de ces éléments et en l'absence de pièce comptable plus précise communiquée au tribunal, la SCI Caravelle ne justifie pas du bien-fondé de sa demande en paiement des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation suivant décompte arrêté au 4e trimestre 2014. Cette demande sera rejetée. Sur la demande en fixation d'une indemnité mensuelle d'occupation : La SCI Caravelle demande au tribunal de fixer l'indemnité d'occupation due par la SARL Cap Aud au montant du loyer conventionnel, soit à la somme de 6.153,36 euros. Le commandement de payer du 5 août 2014 ayant servi de fondement à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire stipulée au bail ayant été déclaré nul et de nul effet par la présente décision, cette demande apparaît sans objet. Sur la demande en paiement de la somme de 79.609,92 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 11 juin 2015 et le 11 février 2016 : Outre qu'en l'absence de constatation de l'acquisition de la clause résolutoire stipulée au bail, la SARL Cap Aud ne peut être tenue au paiement d'une indemnité d'occupation, il ressort des pièces produites par la société bailleresse que deux procès-verbaux d'expulsion ont été établis par huissier de justice à la demande de la SCI Caravelle les 11 juin 2015 et 11 février 2016. Il apparaît ainsi que la SARL Cap Aud a été expulsée des locaux litigieux le 11 juin 2015 et que, conformément à un jugement du juge de l'exécution en date du 8 septembre 2015, les biens mobiliers laissés dans les lieux ont été déclarés abandonnés. Dès lors, la SCI Caravelle apparaît mal fondée à solliciter la condamnation, par la SARL Cap Aud, d'une indemnité d'occupation après qu'ait été exécutée son expulsion le 11 juin 2015. Cette demande sera donc rejetée. Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour procédure abusive : La SCI Caravelle sollicite, enfln, la condamnation de la SARL Cap Aud au paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommagesintérêts pour procédure abusive. Cette demande, fondée sur l'article 1382 du code civil et non sur l'article 32-1 du code de procédure civile, sera rejetée, la présente décision faisant, en outre, partiellement droit aux demandes de la SARL Cap Aud dont les demandes ne peuvent, dès lors, être qualifiées d'abusives » ; Alors, d'une part, que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision censurée qui présentent un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire entre elles ; qu'en l'espèce, la cassation à intervenir sur le premier ou le deuxième moyen du pourvoi relatifs à la recevabilité de l'action de la SARL Cap Aud entraînera l'annulation, par voie de conséquence, de tous les chefs de dispositif de l'arrêt attaqué visés par ce quatrième moyen, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; Alors, d'autre part que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision censurée qui présentent un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire entre elles ; qu'en l'espèce, la cassation à intervenir sur le troisième moyen du pourvoi relatif à la validité du commandement de payer et aux délais de paiement accordés jusqu'au 9 juin 2015 à la SARL Cap Aud pour apurer les causes du commandement entraînera l'annulation, par voie de conséquence, des chefs du dispositif de l'arrêt attaqué ayant dit que l'expulsion de la SARL Cap Aud des locaux donnés à bail, réalisée en exécution d'un titre devenu inexistant ouvre droit pour la société locataire à un rétablissement de ses droits par équivalent, égal au moins à la valeur du fonds de commerce, d'avoir condamné la SCI Caravelle à rembourser à la SARL Cap Aud le coût des actes engagés à l'occasion de l'exécution forcée de la décision d'expulsion obtenue en référé devenus sans cause, d'avoir dit qu'un compte serait fait entre les parties, après le dépôt du rapport d'expertise, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en paiement des loyers, charges, accessoires et indemnités d'occupation arrêtées au 4e trimestre 2014, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en fixation d'une indemnité mensuelle d'occupation, d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en paiement de la somme de 79 609,92 euros au titre des indemnités d'occupation échues entre le 11 juin 2015 et le 11 février 2016, et d'avoir débouté la SCI Caravelle de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
L'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, qui a substitué à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions des articles L. 145-37 à L. 145-41 du code de commerce leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours lors de l'entrée en vigueur de cette loi. L'action tendant à voir réputer non écrite une clause du bail commercial n'est pas soumise à prescription
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CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 882 FS-P+B+I Pourvoi n° D 19-21.469 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 La société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) Provence-Alpes-Côte d'Azur, société anonyme, dont le siège est route de la Durance, 04100 Manosque, a formé le pourvoi n° D 19-21.469 contre l'arrêt rendu le 20 juin 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. C... A..., 2°/ à Mme G... J..., épouse A..., domiciliés [...] , 3°/ à M. D... S..., domicilié [...] , 4°/ à Mme P... F..., épouse S..., domiciliée [...] , 5°/ à M. C... F..., domicilié [...] , 6°/ à Mme R... F..., domiciliée [...] , défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Barbieri, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la SAFER Provence-Alpes-Côte d'Azur, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme A..., de M. et Mme S... et de M. et Mme F..., et l'avis de Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Barbieri, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Andrich, MM. Jessel, David, conseillers, Mme Collomp, MM. Béghin, Jariel, Mmes Schmitt, Aldigé, conseillers référendaires, Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 juin 2019), par acte du 17 avril 2015, M. et Mme A..., propriétaires de trois parcelles de terre, ont promis de les vendre à M. et Mme S..., d'une part, à M. et Mme F..., d'autre part, en se réservant un usage de trois ans. 2. Par lettre du 24 août 2015, la SAFER Provence Alpes Côte d'Azur (la SAFER), informée par le notaire instrumentaire de cette intention d'aliéner, a exercé son droit de préemption en proposant une réduction du prix. 3. Par acte du 10 décembre 2015, M. et Mme S..., M. et Mme F..., ainsi que M. et Mme A..., ont assigné la SAFER en annulation de la préemption et en indemnisation. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. La SAFER fait grief à l'arrêt d'annuler la procédure de préemption et de rejeter ses demandes, alors « que le défaut d'envoi par la Safer au maire de la commune sur laquelle se situent les biens préemptés, de l'analyse de la décision de préemption en vue de son affichage en mairie pendant quinze jours, ne remet pas en cause la validité de cette décision ; qu'en reprochant à la Safer Provence-Alpes-Côte d'Azur de ne pas avoir adressé au maire de la commune concernée, l'analyse de la décision de préemption du 24 août 2015 en vue de son affichage en mairie pendant un délai de quinze jours, pour en déduire qu'il y avait lieu d'annuler cette décision, la cour d'appel a violé les articles L. 143-3 et R. 143-6 du code rural et de la pêche maritime.» Réponse de la Cour Vu les articles L. 143-3 et R. 143-6 du code rural et de la pêche maritime, celui-ci dans sa rédaction applicable au litige : 5. Selon le premier de ces textes, la Safer doit, à peine de nullité, justifier sa décision de préemption et la porter à la connaissance des intéressés. 6. Selon le second, la décision de préemption motivée est notifiée au notaire et à l'acquéreur évincé, et une analyse de cette décision est adressée au maire de la commune intéressée en vue de son affichage en mairie pendant quinze jours. 7. Pour déclarer nulle la procédure de préemption, l'arrêt retient que, si la préemption a été effectivement notifiée tant aux acquéreurs qu'aux vendeurs, la SAFER n'a pas envoyé d'analyse de sa décision au maire de la commune intéressée et que, disposant d'un droit exorbitant par rapport au droit de propriété, elle n'a pas accompli la totalité de ses obligations de publication, une telle irrégularité devant être sanctionnée par la nullité de la procédure. 8. En statuant ainsi, alors que l'affichage en mairie a pour effet de faire courir le délai de recours contentieux contre la décision de préemption et que l'omission de cette seule formalité est sans incidence sur la validité de la décision elle-même, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ; Condamne M. et Mme S..., M. et Mme F..., ainsi que M. et Mme A..., aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la SAFER Provence-Alpes-Côte d'Azur. Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit nulle la procédure de préemption de la Safer Alpes Côte d'Azur engagée à l'occasion du projet de vente par M. C... A... et Mme G... J... épouse A... à M. D... S..., Mme P... F... épouse S..., Mme R... F... et M. C... F... des parcelles cadastrées [...] , [...] et [...] , située sur la commune du Castellet, 83330, lieudit [...], et d'AVOIR débouté la Safer Alpes Côte d'Azur de toutes ses demandes ; AUX MOTIFS QUE préalablement, il convient de préciser que sont applicables au présent litige les dispositions du code rural et de la pêche maritime en vigueur à la date de la promesse de vente et de la décision de préemption de la SAFER Alpes Côte d'Azur, soit en 2015 ; sur la procédure de préemption ; ( ) ; [que la Safer] justifie avoir notifié cette lettre [du 24 août 2015] par courrier avec accusé de réception à M. C... F..., à Mme P... F..., à Mme R... F... et à M. D... S.... Elle ne justifie pas avoir notifié sa décision à M. et Mme A.... Toutefois, ceux-ci ne discutent pas avoir reçu cette notification. L'article R. 143-6 du même code complète les dits article L. 143-2 et L. 143-3 et précise « La société d'aménagement foncier et d'établissement rural qui exerce le droit de préemption notifie au notaire chargé d'instrumenter par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1316-1 et 1316-4 du code civil sa décision signée par le président de son conseil d'administration ou par toute personne régulièrement habilitée à cet effet. La décision de préemption indique l'identification cadastrale des biens concernés et leur prix d'acquisition. Elle précise en outre en quoi la préemption répond à l'un ou à plusieurs des objectifs prévus par les dispositions de l'article L. 143-2 ; que cette décision ainsi motivée est notifiée également à l'acquéreur évincé, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de la notification faite au notaire ; qu'une analyse de cette décision est adressée dans le même délai au maire de la commune intéressée en vue de son affichage en mairie pendant quinze jours. » ; que la Safer reconnaît qu'elle n'a pas satisfait à cette dernière obligation d'envoyer une analyse au maire de la commune intéressée en soutenant que ce n'est que lorsqu'il y aura décision définitive sur sa préemption qu'elle satisfera à cette obligation ; que cependant les termes de cet article sont précis : la Safer a l'obligation d'envoyer une analyse de la décision de préemption au maire de la commune intéressée dans le délai de 15 jours de la date de réception de la notification faite au notaire de ce qu'elle exerce son droit de préemption ; que dès lors, la procédure de préemption de la Safer Alpes Côte d'Azur est irrégulière pour ne pas avoir satisfait à toutes ses obligations de publication ; qu'eu égard au droit exorbitant que constitue le droit de préemption de la Safer par rapport au droit de propriété, nonobstant les objectifs poursuivis par le législateur, cette irrégularité entraîne la nullité de la procédure de préemption ; qu'en conséquence, la procédure de préemption sera déclarée nulle et le jugement déféré sera infirmé, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens développés par les parties ; ALORS QUE le défaut d'envoi par la Safer au maire de la commune sur laquelle se situent les biens préemptés, de l'analyse de la décision de préemption en vue de son affichage en mairie pendant quinze jours, ne remet pas en cause la validité de cette décision ; qu'en reprochant à la Safer Provence Alpes Côte d'Azur de ne pas avoir adressé au maire de la commune concernée, l'analyse de la décision de préemption du 24 août 2015 en vue de son affichage en mairie pendant un délai de quinze jours, pour en déduire qu'il y avait lieu d'annuler cette décision, la cour d'appel a violé les articles L. 143-3 et R. 143-6 du code rural et de la pêche maritime.
L'affichage en mairie d'une analyse de la décision de préemption de la SAFER, prévu par l'article R. 143-6 du code rural et de la pêche maritime, a pour effet de faire courir le délai de recours contentieux contre cette décision, de sorte que l'omission de cette formalité est sans incidence sur la validité de la décision elle-même
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CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 novembre 2020 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 883 FS-P+B+I Pourvoi n° B 19-18.845 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020 1°/ Mme Y... H..., épouse M..., 2°/ Mme U... Q... H..., domiciliées [...], Tahiti, (Polynésie-Française), ont formé le pourvoi n° B 19-18.845 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2018 par la cour d'appel de Papeete (chambre des Terres), dans le litige les opposant à M. C... I..., domicilié [...], Tahiti, (Polynésie-Française), défendeur à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Béghin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farg et Hazan, avocat de Mmes Y... et U... H..., de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. I..., après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Béghin, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Andrich, MM. Barbieri, Jessel, David, conseillers, Mme Collomp, Mmes Schmitt, Aldigé, conseillers référendaires, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Papeete, 8 novembre 2018), Mmes Y... et U... H... ont formé tierce opposition à un jugement du tribunal civil de première instance de Papeete du 12 avril 2006, ayant déclaré M. C... I... propriétaire de la terre P... à Vairao. 2. Mme Y... H... a contesté la transcription, le 27 juillet 1927, sur le registre de la conservation des hypothèques de Papeete, d'un échange transactionnel dont M. I... s'est prévalu et qui avait été conclu entre leurs ascendants respectifs par acte sous seing privé du 30 juin 1927. Recevabilité du pourvoi de Mme U... H..., contestée par la défense 3. Le moyen unique du pourvoi ne porte pas sur le chef du dispositif de l'arrêt ayant déclaré Mme U... H... irrecevable en son action. 4. Le pourvoi formé par celle-ci est dès lors irrecevable. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Mme Y... H... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors : « 1°/ que la copie d'un acte sous seing privé, même résultant de sa transcription sur un registre public, n'a par elle-même aucune valeur juridique et ne peut suppléer à l'absence de production de l'original dont l'existence est déniée ; qu'en se fondant, pour débouter Mme H... de sa demande tendant à se voir reconnaître propriétaire indivise de la terre P..., sur la seule transcription hypothécaire d'un acte dont l'existence était déniée par Mme H... et qui aurait transféré les droits de propriété de son auteur à celui de M. I..., la cour d'appel a violé l'article 1334 du code civil, ensemble l'article 1336 de ce code, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 2°/ qu'une copie ne peut suppléer l'absence de l'original que si elle en est la reproduction fidèle et durable ; qu'en se fondant, pour débouter Mme H... de sa demande tendant à se voir reconnaître propriétaire indivise de la terre P..., sur la seule transcription hypothécaire de l'acte sous seing privé du 30 juin 1927, sans caractériser en quoi cette transcription dont elle a constaté qu'elle était celle de la traduction de l'acte original, au surplus non écrite ni signée par les parties à ce prétendu acte original, en serait la reproduction fidèle et durable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 3°/ qu'il incombe à la partie qui, ne pouvant produire l'original, se prévaut d'une copie d'un acte d'établir qu'elle en est la reproduction fidèle et durable ; qu'en faisant peser sur la partie qui dénie l'existence de l'original la charge d'établir l'absence de force probante de la copie, en démontrant la falsification de la traduction ou de la transcription, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles 1336 et 1348 du même code, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 4°/ que la preuve testimoniale ne peut être admise que si la partie qui se prévaut d'un acte démontre qu'elle a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure ; qu'en jugeant probante du transfert des droits de propriété de l'auteur de Mme H... à celui de M. I... la transcription hypothécaire litigieuse, par des motifs d'ordre général tirés des conditions climatiques, de la présence d'insectes en Polynésie française et de la tradition orale, sans constater si M. I... rapportait la preuve, qui lui incombait, de la perte du titre original par cas fortuit ou force majeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 5°/ que la transcription d'un acte sur les registres publics ne peut servir de commencement de preuve par écrit que, cumulativement, s'il est constant que toutes les minutes du notaire, de l'année dans laquelle l'acte paraît avoir été fait, soient perdues ou que l'on prouve que la perte de la minute de cet acte a été faite par un accident particulier, et qu'il existe un répertoire en règle du notaire qui constate que l'acte a été fait à la même date ; qu'en qualifiant de commencement de preuve par écrit la transcription d'un acte sous seing privé, après avoir elle-même constaté que les conditions de l'article 1336 du code civil n'étaient pas réunies, la cour d'appel a violé ce texte, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 6°/ qu'un écrit ne peut valoir commencement de preuve que s'il émane de la personne à laquelle il est opposé ; qu'en qualifiant la transcription de l'acte sous seing privé du 30 juin 1927 de commencement de preuve, sans relever aucun élément établissant que cette transcription émanait de Q... E... à l'héritière de laquelle on l'opposait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1347 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 7°/ qu'un commencement de preuve par écrit ne peut être complété que par des éléments extérieurs à l'acte lui-même ; qu'en se fondant sur la circonstance que la traduction de l'acte original a été effectuée par un interprète assermenté, laquelle résulte de la transcription elle-même, la cour d'appel a violé l'article 1347 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 8°/ que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que dans la transcription hypothécaire litigieuse, il est indiqué que le litige à l'origine de la transaction constatée dans l'acte du 30 juin 1927 ainsi transcrit est né au sujet d'une action en recherche de maternité de dame N... a B... par rapport à la dame L... a B..., qu' « il fut formé opposition contre un jugement par défaut rendu par le tribunal civil de Papeete le dix octobre mil neuf cent vingt-deux » et que « par le présent acte, il est mis fin à l'instance d'opposition formée par Mme J... a K... suivant requête du trois décembre mil neuf cent vingt-trois contre jugement par défaut du dix octobre mil neuf cent vingt-deux » ; qu'il résulte des termes clairs et précis de cet acte que le jugement de reconnaissance, contre lequel il a été formé une tierce opposition ayant abouti à la transaction transcrite dans l'acte querellé, date du 10 octobre 1922 et qu'il concerne la reconnaissance de Tetaroa a B... par L... a B... ; qu'en énonçant, pour retenir que l'échange contesté est corroboré et rejeter les demandes de l'exposante, qu'il est fait mention « en marge de l'acte de naissance de Q... B... d'une reconnaissance par N... B... aselon jugement du 27 septembre 1921, jugement à l'encontre duquel a été formée la tierce opposition ayant abouti à la transaction transcrite dans l'acte querellé », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet acte et méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ; 9°/ qu'en retenant, pour débouter Mme H... de sa demande, que le commencement de preuve que constitue la transcription de l'acte sous seing privé du 30 juin 1927 est corroboré par l'exécution qu'en a faite Q... B..., puisqu'elle a disposé du bien donné en échange des droits indivis auxquels elle prétendait du fait de sa filiation en le vendant à la Paroisse protestante de Vairao par acte transcrit le 14 décembre 1925, soit plus d'un an avant l'échange allégué par M. I... dont cette cession ne pouvait ainsi pas constituer l'exécution, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 1347 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française. » Réponse de la Cour 6. Ayant retenu que la tradition orale avait pu conduire les parties à l'échange contesté à ne pas conserver l'acte sous signature privée original et que la transcription hypothécaire de celui-ci, qui avait été conservée dans des conditions adéquates, en reproduisait littéralement la traduction, effectuée par un interprète assermenté, la cour d'appel, qui a pu en déduire que cette transcription du titre original en constituait une copie, dont elle a souverainement apprécié le caractère fidèle et durable, au sens de l'article 1348, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi de Mme U... H... ; REJETTE le pourvoi de Mme Y... H... ; Condamne Mmes H... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mmes H... et les condamne à payer à M. I... la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mmes Y... et U... H.... IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, chambre des terres, en date du 2 novembre 2016 en ce qu'il a débouté Mme Y... H... épouse M... de sa tierce opposition à l'encontre du jugement du Tribunal de première instance de Papeete en date du 12 avril 2006 qui déclare M. C... I... propriétaire de la terre P... ; Aux motifs propres que Mme Y... H... épouse M... a qualité et intérêt à agir pour revendiquer les biens qui pouvaient être dans le patrimoine de Q... E.... L'exception de nullité en cas de fraude étant perpétuelle, elle est recevable à contester la transaction intervenue entre G... a I... et Q... a E... par acte sous seing privé en date du 30 juin 1927, transcrit à la conservation des hypothèques de Papeete le 27 juillet 1927, vol 248, n° 107. Aux termes de cet acte de transaction, Q... E... s'est désistée, en contre échange, de tous droits et prétentions sur la propriété des biens pouvant dépendre des successions de Madame L... a B..., de Monsieur B... et de Madame F... a D... sur plusieurs terres énumérées dont la terre P... et elle a acquis la propriété de la terre Teavaava sur laquelle était édifiée sa maison d'habitation. Devant la Cour, Mme Y... H... épouse M... conteste seulement la force probante de la transcription de la transaction, sans en contester l'équilibre, et affirme que la terre P... est restée dans le patrimoine de Q... E.... La transcription hypothécaire a pour but d'assurer la sécurité juridique. En Polynésie française, elle est la copie de l'acte traduit. Ne plus accorder aucune force probante aux assertions des transcriptions hypothécaires reviendrait à annihiler toute sécurité juridique. Alors qu'en particulier en Polynésie française, les conditions climatiques et la présence d'insectes conduit à une destruction certaine des archives papiers qui ne sont pas conservées dans des conditions adéquates et que la tradition orale a pu conduire les parties aux actes à ne pas percevoir la nécessité de conserver précieusement les actes originaux, il y a lieu de ne pas annihiler la force probante des transcriptions hypothécaires dont il n'est pas démontré la falsification de la traduction ou de la transcription. D'autant plus qu'en l'espèce, comme l'a justement démontré le premier juge, l'échange est corroboré par plusieurs éléments. Ainsi, il y a lieu de retenir que les droits de propriété de Q... E..., auteur de Mme Y... H... épouse M... ont été transférés à G... a I... aux termes de l'acte sous seing privé en date du 20 juin 1927. Il en résulte que Mme Y... H... épouse M... est sans droit ni titre sur la terre P... ; Et aux motifs adoptés des premiers juges que la terre P... sise à Tahiti d'une superficie de 1ha [...] telle que cadastrée procès-verbal de bornage [...] a été attribuée par déclaration de propriété en date du 27 décembre 1888 à L... a B... et X... a V.... Par son acte de naissance ainsi que celui de son père, Y... H... justifie qu'elle vient aux droits de Q... a E.... Madame Q... a B... épouse H... tiendrait, selon l'opposante, ses droits dans la terre pour les avoir recuillis dans la succession de sa mère Madame N... a B... dont la filiation maternelle avait été établie par décision du Tribunal civil de première instance de Papeete du 27 septembre 1921. Cependant, cette décision a fait l'objet de la procédure d'opposition ayant abouti à la transaction aujourd'hui contestée par Madame Y... H... et consignée dans l'acte d'échange transcrit le 27 juillet 1827. Il appartient donc au tribunal de se pencher sur la valeur probante de cet acte. Aux termes de l'article 1336 du code civil, dans sa version antérieure au 1er octobre 2016 dont se prévaut l'exposante, « la transcription d'un acte sur les registres publics ne pourra servir que de commencement de preuve par écrit ; il faudra même pour cela : 1° qu'il soit constant que toutes les minutes du notaire, de l'année dans laquelle l'acte paraît avoir été fait, soient perdues, ou que l'on prouve que la perte de la minute de cet acte a été faite par un accident particulier ; 2° qu'il existe un répertoire en règle du notaire qui constate que l'acte a été fait à la même date. Lorsqu'au moyen du concours de ces deux circonstances, la preuve par témoins sera admise, il sera nécessaire que ceux qui ont été témoins de l'acte, s'il existent encore, soient entendus ». En l'espèce, s'agissant de la transcription d'un acte sous seing privé, ces conditions ne peuvent être réalisées en l'espèce, en l'absence d'intervention d'un notaire. Cependant, il s'agit d'une transcription, qui est la copie littérale de l'acte sur les registres. En outre, la Cour de cassation depuis une jurisprudence du 30 avril 1817 considère que les juges du fond apprécient souverainement ce qui constitue un commencement de preuve. L'échange est corroboré en l'espèce par plusieurs éléments : - il résulte de cette transcription que la traduction de l'acte original a été effectuée par un interprète assermenté ; - il est fait mention en marge de l'acte de naissance de Q... B... d'une reconnaissance par N... a B... selon jugement du 27 septembre 1921, jugement à l'encontre duquel a été formée la tierce opposition ayant abouti à la transaction transcrite dans l'acte querellé ; - Q... B... ou a E... a exécuté cet échange, puisqu'elle a disposé du bien donné en échange des droits indivis auxquels elle prétendait du fait de sa filiation en le vendant à la Paroisse protestante de Vairao par acte transcrit le 14 décembre 1925. En conséquence, c'est à bon droit que le Tribunal de première instance de Papeete, dans son jugement du 12 avril 2006, a considéré comme valable l'acte d'échange transcrit le 27 juillet 1927 volume 248 n° 107, de sorte que Mme Y... H... épouse M... sera déboutée de sa tierce opposition à l'encontre de ce jugement qui déclare Monsieur C... I... propriétaire de la terre P... cadastrée [...] ; 1. ALORS QUE la copie d'un acte sous seing privé, même résultant de sa transcription sur un registre public, n'a par elle-même aucune valeur juridique et ne peut suppléer à l'absence de production de l'original dont l'existence est déniée ; qu'en se fondant, pour débouter Mme H... de sa demande tendant à se voir reconnaître propriétaire indivise de la terre P..., sur la seule transcription hypothécaire d'un acte dont l'existence était déniée par Mme H... et qui aurait transféré les droits de propriété de son auteur à celui de M. I..., la cour d'appel a violé l'article 1334 du code civil, ensemble l'article 1336 de ce code, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 2. ALORS QU'une copie ne peut suppléer l'absence de l'original que si elle en est la reproduction fidèle et durable ; qu'en se fondant, pour débouter Mme H... de sa demande tendant à se voir reconnaître propriétaire indivise de la terre P..., sur la seule transcription hypothécaire de l'acte sous seing privé du 30 juin 1927, sans caractériser en quoi cette transcription dont elle a constaté qu'elle était celle de la traduction de l'acte original, au surplus non écrite ni signée par les parties à ce prétendu acte original, en serait la reproduction fidèle et durable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 3. ALORS QU'il incombe à la partie qui, ne pouvant produire l'original, se prévaut d'une copie d'un acte d'établir qu'elle en est la reproduction fidèle et durable ; qu'en faisant peser sur la partie qui dénie l'existence de l'original la charge d'établir l'absence de force probante de la copie, en démontrant la falsification de la traduction ou de la transcription, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles 1336 et 1348 du même code, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 4. ALORS QUE la preuve testimoniale ne peut être admise que si la partie qui se prévaut d'un acte démontre qu'elle a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure ; qu'en jugeant probante du transfert des droits de propriété de l'auteur de Mme H... à celui de M. I... la transcription hypothécaire litigieuse, par des motifs d'ordre général tirés des conditions climatiques, de la présence d'insectes en Polynésie française et de la tradition orale, sans constater si M. I... rapportait la preuve, qui lui incombait, de la perte du titre original par cas fortuit ou force majeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 5. ALORS QUE la transcription d'un acte sur les registres publics ne peut servir de commencement de preuve par écrit que, cumulativement, s'il est constant que toutes les minutes du notaire, de l'année dans laquelle l'acte paraît avoir été fait, soient perdues ou que l'on prouve que la perte de la minute de cet acte a été faite par un accident particulier, et qu'il existe un répertoire en règle du notaire qui constate que l'acte a été fait à la même date ; qu'en qualifiant de commencement de preuve par écrit la transcription d'un acte sous seing privé, après avoir elle-même constaté que les conditions de l'article 1336 du code civil n'étaient pas réunies, la cour d'appel a violé ce texte, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 6. ALORS QU'un écrit ne peut valoir commencement de preuve que s'il émane de la personne à laquelle il est opposé ; qu'en qualifiant la transcription de l'acte sous seing privé du 30 juin 1927 de commencement de preuve, sans relever aucun élément établissant que cette transcription émanait de Q... E... à l'héritière de laquelle on l'opposait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1347 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 7. ALORS QU'un commencement de preuve par écrit ne peut être complété que par des éléments extérieurs à l'acte lui-même ; qu'en se fondant sur la circonstance que la traduction de l'acte original a été effectuée par un interprète assermenté, laquelle résulte de la transcription elle-même, la cour d'appel a violé l'article 1347 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française ; 8. ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que dans la transcription hypothécaire litigieuse, il est indiqué que le litige à l'origine de la transaction constatée dans l'acte du 30 juin 1927 ainsi transcrit est né au sujet d'une action en recherche de maternité de dame N... a B... par rapport à la dame L... a B..., qu' « il fut formé opposition contre un jugement par défaut rendu par le tribunal civil de Papeete le dix octobre mil neuf cent vingt-deux » et que « par le présent acte, il est mis fin à l'instance d'opposition formée par Mme J... a K... suivant requête du trois décembre mil neuf cent vingt-trois contre jugement par défaut du dix octobre mil neuf cent vingt-deux » ; qu'il résulte des termes clairs et précis de cet acte que le jugement de reconnaissance, contre lequel il a été formé une tierce opposition ayant abouti à la transaction transcrite dans l'acte querellé, date du 10 octobre 1922 et qu'il concerne la reconnaissance de Tetaroa a B... par L... a B... ; qu'en énonçant, pour retenir que l'échange contesté est corroboré et rejeter les demandes de l'exposante, qu'il est fait mention « en marge de l'acte de naissance de Q... B... d'une reconnaissance par N... B... aselon jugement du 27 septembre 1921, jugement à l'encontre duquel a été formée la tierce opposition ayant abouti à la transaction transcrite dans l'acte querellé », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet acte et méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ; 9. ALORS QU'en retenant, pour débouter Mme H... de sa demande, que le commencement de preuve que constitue la transcription de l'acte sous seing privé du 30 juin 1927 est corroboré par l'exécution qu'en a faite Q... B..., puisqu'elle a disposé du bien donné en échange des droits indivis auxquels elle prétendait du fait de sa filiation en le vendant à la Paroisse protestante de Vairao par acte transcrit le 14 décembre 1925, soit plus d'un an avant l'échange allégué par M. I... dont cette cession ne pouvait ainsi pas constituer l'exécution, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 1347 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française.
Ayant retenu que la tradition orale en Polynésie française avait pu conduire les parties à un échange, à ne pas conserver l'acte sous signature privée original et que la transcription hypothécaire de celui-ci, qui avait été conservée dans des conditions adéquates, en reproduisait littéralement la traduction, effectuée par un interprète assermenté, une cour d'appel a pu en déduire que cette transcription du titre original en constituait une copie, dont elle a souverainement apprécié le caractère fidèle et durable, au sens de l'article 1348, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et applicable en Polynésie française
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COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Cassation M. GUÉRIN, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 673 F-P+B Pourvoi n° C 18-14.242 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 NOVEMBRE 2020 Le directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, domicilié [...] , a formé le pourvoi n° C 18-14.242 contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2018 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant à M. C... G..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. G..., et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 janvier 2018), W... I..., résidente américaine, a, par acte du 10 décembre 1964, constitué un trust révocable dans lequel elle a placé des avoirs financiers, remis à un « trustee » aux fins de gestion. Cet acte prévoyait qu'à son décès, seuls les revenus du trust reviendraient à ses trois enfants et qu'au décès de sa fille, U... G..., les biens placés dans le trust devraient être répartis entre les enfants de cette dernière, à condition qu'ils aient atteint l'âge de 35 ans. 2. W... I... est décédée aux Etats-Unis d'Amérique le [...] sans avoir révoqué le trust. U... G... est ensuite décédée en France le [...], laissant pour lui succéder ses trois enfants, tous âgés de plus de 35 ans, dont M. C... G.... 3. Par une réclamation du 2 janvier 2012, M. G..., estimant non imposables les avoirs placés dans le trust dès lors qu'U... G... n'en avait détenu que l'usufruit, la nue-propriété appartenant à ses héritiers dès le décès de W... I..., a demandé à l'administration fiscale le remboursement des droits de succession afférents à ces avoirs. Cette réclamation ayant été rejetée, M. G... a assigné la direction générale des finances publiques en annulation de la décision de rejet et restitution des droits. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 4. L'administration fiscale fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant déclaré bien-fondé le recours de M. G... contre la décision de rejet du 16 février 2012 et annulé cette décision, alors « que, conformément aux dispositions de l'article 750 ter ancien du code général des impôts, sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B ; qu'il en est de même pour les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France reçus par l'héritier, le donataire ou le légataire qui a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B ; qu'en décidant que le trust constitue un démembrement de propriété, qu'U... G... est usufruitière des biens placés dans le trust constitué par sa mère, W... I..., et que son fils, M. C... G..., est nu-propriétaire des biens et qu'en conséquence, au décès d'U... G..., l'usufruit et la nue-propriété ont été réunis sans donner lieu à taxation, alors que son décès a entraîné une mutation à titre gratuit des biens placés dans le trust au profit de M. C... G..., la cour d'appel a violé l'article 750 ter du code général des impôts. » Réponse de la Cour Vu l'article 750 ter du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 : 5. Selon ce texte, sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B et ceux reçus par l'héritier, le donataire ou le légataire qui a son domicile fiscal en France au sens de cet article. 6. En application de ce texte, le fait générateur des droits de mutation à titre gratuit est constitué par le transfert de propriété, qui, s'agissant de biens placés dans un trust, s'opère par l'effet de la distribution de l'actif du trust au bénéficiaire final, au jour de sa clôture, laquelle peut être postérieure au décès du constituant. 7. Pour juger que les droits de succession portant sur les actifs placés dans le trust avaient été indûment payés, l'arrêt, après avoir relevé qu'il résultait des statuts du trust que M. G... disposait, sous condition, d'une part de ces actifs dès lors que cette disposition ne pouvait être révoquée après le décès de W... I..., en déduit que le droit de M. G... sur ces actifs était certain, qu'il est donc devenu nu-propriétaire de cette part au décès de W... I... et que le décès subséquent d'U... G... n'a pas entraîné un nouveau transfert de propriété des actifs mais seulement l'extinction de l'usufruit sur ces actifs, opération non taxée en France. 8. En statuant ainsi, alors que l'acte de trust prévoyait une clôture du trust au décès d'U... G..., et non à celui de sa constituante, qui l'a seulement rendu irrévocable, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris. Condamne M. G... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. G... et le condamne à payer au directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le directeur départemental des finances publiques des Hauts de Seine, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques. L'arrêt attaqué encourt la censure ; EN CE QU' il a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de NANTERRE du 7 janvier 2016 ayant déclaré bien-fondé le recours de M. G... contre la décision de rejet de l'administration fiscale du 16 février 2012 et annulé cette décision de rejet ; AUX MOTIFS TOUT D'ABORD QUE « le litige est soumis à l'article 750 ter du CGI dans sa version applicable entre le 31 mars 1999 et le 31 juillet 2011 qui dispose que : "Sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit : 1° Les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France, et notamment les fonds publics, parts d'intérêts, créances et généralement toutes les valeurs mobilières françaises ou étrangères de quelque nature qu'elles soient, lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B ; 2° Les biens meubles et immeubles, que ces derniers soient possédés directement ou indirectement, situés en France, et notamment les fonds publics français, parts d'intérêts, créances et valeurs mobilières françaises, lorsque le donateur ou le défunt n'a pas son domicile fiscal en France au sens de l'article précité"; que doivent donc, pour l'application de ce texte, être examinés les droits dont a hérité, au titre du trust, M. G... ; que Mme W... I... était domiciliée aux États-Unis lors de son décès ; que sa succession a été soumise au droit américain ; que Mme G... a hérité après le décès de Mme W... I... de droits résultant de l'application de l'acte de trust ; qu'en l'espèce, il ressort de son article 3 que le trust est intergénérationnel, les biens continuant à être gérés par le «trustee» au décès du constituant et étant répartis entre les enfants et petits enfants de celui-ci au décès du premier de ses enfants ; que le constituant a donc, comme il en avait la faculté, décidé que ses enfants percevraient les revenus de la fiducie mais que l'actif de celle-ci serait réparti - sous condition - entre ses petits enfants ; que, comme le relève l'appelante, Mme G... n'a possédé de son vivant aucun droit de disposition sur les avoirs gérés par le «trustee» ; qu'elle ne pouvait pas gérer ces avoirs ; qu'elle n'en percevait que les revenus ; qu'elle disposait donc de droits - la perception de revenus - mais pas de la faculté de disposer de ces avoirs ; que le droit aux revenus produits par la chose est assimilable au droit d'un usufruitier de celle-ci ; qu'en l'absence d'autre droit, Mme G... ne bénéficiait pas de la nue-propriété des avoirs ; que la nature du trust ne s'oppose pas à un tel démembrement ; que les dispositions prises par le constituant caractérisent précisément ce démembrement ; que Mme G... bénéficiait donc de l'usufruit sur ces avoirs financiers ; que son décès a entraîné l'extinction de l'usufruit ; que M. G... n'a donc pas hérité d'un droit de propriété de sa mère mais de l'extinction de son usufruit ; que cette extinction n'est pas taxable ; qu'il résulte également des statuts du trust que M. G... disposait, sous condition, d'une part des actifs ; que cette disposition ne pouvait être révoquée après le décès de Mme I..., sa constituante ; qu'à compter de celui-ci, il disposait donc d'un des attributs de la propriété des actifs soit de leur nue-propriété ; que ce droit était certain ; que seule la remise de celle-ci était subordonnée à diverses conditions ; que M. G... est ainsi devenu nu-propriétaire d'une part des actifs du trust au décès de Mme I... ; qu'il était donc nu-propriétaire de cette part avant le décès de sa mère ; que ce décès n'a pas entraîné la transmission de cette nue propriété mais seulement l'extinction de l'usufruit dont sa mère disposait ; que par conséquent, comme l'a exactement jugé le tribunal, le seul décès de Mme G... n'a pas généré de transfert de la pleine propriété des actifs placés en trust mais seulement l'extinction de l'usufruit sur ces actifs, opération non taxée en France ; qu'il ressort des pièces produites, non contestées, que les droits de succession portant sur le trust ont été payés au décès de Mme I... ; que M. G... est donc fondé à faire valoir qu'il a indûment réglé des droits de succession portant sur ces actifs ; que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.» ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « le droit français s'applique à la succession de Mme G..., domiciliée en France, décédée le [...] ; que les parties s'accordent sur l'inapplicabilité des dispositions de l'article 792-0 bis du code général des impôts, régissant les droits de mutation applicables au trust, issues de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 applicable aux donations consenties et pour des décès intervenus à compter du 19 juillet 2011 ; que la Direction générale des finances publiques a ainsi fondé sa décision de rejet sur les dispositions de l'article 750 ter, dans sa version applicable entre le 31 mars 1999 et le 31 juillet 2011, lequel dispose que : "Sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit : 1° Les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France, et notamment les fonds publics, parts d'intérêts, créances et généralement toutes les valeurs mobilières françaises ou étrangères de quelque nature qu'elles soient, lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B ; 2° Les biens meubles et immeubles, que ces derniers soient possédés directement ou indirectement, situés en France, et notamment les fonds publics français, parts d'intérêts, créances et valeurs mobilières françaises, lorsque le donateur ou le défunt n'a pas son domicile fiscal en France au sens de l'article précité." ; que le trust n'étant pas reconnu en France au moment du décès de Mme G..., il convient de déterminer de quelle catégorie juridique de droit interne français il relève pour établir si des droits de succession devaient être taxés en France ; que la succession de Mme W... I..., la donatrice, domiciliée aux Etats-Unis au moment de son décès a été soumise au droit américain. Les droits dont Mme G... a hérité de sa mère dépendent donc de l'application de l'acte de trust, institution juridique de droit américain ; que le différend entre les parties nécessite en conséquence de rechercher au vu des dispositions de cet acte, quelle a été la volonté de la donatrice, Mme W... I..., pour déterminer si à son décès, comme le prétend l'administration fiscale, Mme G... doit être considérée comme ayant hérité de la pleine propriété de sa part du trust, étant observé que les parties s'accordent ensemble pour ne pas faire porter le débat sur un éventuel droit de propriété appartenant au trustee, l'administration fiscale indiquant dans ses écritures que le pouvoir de gestion confié au fiduciaire ou trustee n'est pas assimilable à un droit de propriété ; qu'or, selon les dispositions de l'article 3 du contrat de trust qui ont été rappelées ci-avant, le fiduciaire gère les avoirs financiers américains et verse les revenus aux enfants (sic) possèdent le droit de disposition sur ses (sic) avoirs. L'administration fiscale le reconnaît d'ailleurs expressément dans ses écritures. Or, la seule perception de revenus provenant d'un trust ne suffit pas à faire peser sur le bénéficiaire français des fruits des avoirs placés en trust une quelconque présomption de propriété sur lesdits avoirs ; qu'en outre, il résulte de l'ensemble des dispositions qui ont été rappelées ci-avant et notamment celles de l'article 3 que la constituante a entendu transmettre la propriété de l'actif du trust constitué à son décès à ses petits-enfants, tout en prévoyant que ses enfants percevraient les revenus de cet actif leur vie durant mais sans pouvoir de disposition, c'est-à-dire en droit français avec une réserve d'usufruit à leur profit, que dès le décès de la constituante, ses petits-enfants disposaient ainsi d'un droit certain à la nue-propriété dont seule la gestion était entre les mains du fiduciaire, qu'au décès des enfants, le fiduciaire avait mission de poursuivre la gestion de la part de fiducie revenant à chacun des petits-enfants qui n'avait pas encore atteint l'âge de 35 ans ; que le décès de Mme G... a donc mis fin à son usufruit qui grevait l'actif dont M. G... était bénéficiaire en nue-propriété. En conséquence, le seul décès de Mme G... n'a pas généré de transfert de la pleine propriété des actifs placés en trust mais seulement l'extinction de l'usufruit sur ces actifs, opération non taxée en France ; que M G... ayant tout comme ses frères atteint l'âge de 35 ans avant le décès de sa mère, il a pu librement disposer de la pleine propriété de ces actifs au décès de sa mère en vertu des dispositions du trust ; que M. G... est par conséquent bien fondé à faire valoir qu'il a indûment réglé des droits de succession ». ALORS QUE, PREMIEREMENT, conformément aux dispositions de l'article 578 du code civil, l'usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance ; qu'en application de l'article 582 du code civil, l'usufruitier a le droit de jouir de toute espèce de fruits, soit naturels, soit industriels, soit civils, que peut produire l'objet dont il a l'usufruit ; que les droits de nue-propriété et d'usufruit sont des droits "réels", c'est-à-dire qu'ils peuvent être cédés ou vendus en tant que tels ; que les droits que possèdent un nu-propriétaire et un usufruitier ne sont pas assimilables à ceux que possède le constituant ou le bénéficiaire d'un trust qui est un mécanisme reposant sur un dédoublement du titre de propriété : la propriété légale (legal ownership) du trustee et la propriété virtuelle (equitable ownership) du ou des bénéficiaires ; que le concept de démembrement de propriété ne peut exister en matière de trust dès lors que le constituant et le bénéficiaire sont privés des prérogatives confiées au trustee, qui administre et dispose des biens placés dans le trust selon les conditions fixées par le constituant ; qu'en décidant que le trust constitue un démembrement de propriété, que Mme U... G... est usufruitière des biens placés dans le trust constitué par sa mère, Mme W... I..., et que son fils, C... G..., est nu-propriétaire des biens et qu'en conséquence, au décès de Mme G..., l'usufruit et la nue-propriété ont été réunis sans donner lieu à taxation, la cour d'appel a violé les articles 578 et 582 du code civil ; ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, conformément aux dispositions de l'article 750 ter ancien du code général des impôts, sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B ; qu'il en est de même pour les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France reçus par l'héritier, le donataire ou le légataire qui a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B ; qu'en décidant que le trust constitue un démembrement de propriété, que Mme U... G... est usufruitière des biens placés dans le trust constitué par sa mère, Mme W... I..., et que son fils, C... G..., est nu-propriétaire des biens et qu'en conséquence, au décès de Mme G..., l'usufruit et la nue-propriété ont été réunis sans donner lieu à taxation, alors que le décès de Mme G... a entraîné une mutation à titre gratuit des biens placés dans le trust au profit de M. G..., la cour d'appel a violé l'article 750 ter du code général des impôts.
Il résulte de l'article 750 ter du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998, que le fait générateur des droits de mutation à titre gratuit est constitué par le transfert de propriété, qui, s'agissant de biens placés dans un trust, s'opère par l'effet de la distribution de l'actif du trust au bénéficiaire final, au jour de sa clôture, laquelle peut être postérieure au décès du constituant
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COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Rejet Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 739 FS-P+B+R Pourvoi n° Q 18-21.797 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 NOVEMBRE 2020 Mme Q... W..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° Q 18-21.797 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2018 par la cour d'appel de Limoges (chambre famille), dans le litige l'opposant à M. H... F..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de Mme W..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. F..., et l'avis de Mme Penichon, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, Mmes Darbois, Poillot-Peruzzetto, Champalaune, Daubigney, Michel-Amsellem, Boisselet, M. Mollard, conseillers, Mmes Le Bras, de Cabarrus, Lion, Lefeuvre, Tostain, Bessaud, M. Boutié, Mme Bellino, conseillers référendaires, Mme Beaudonnet, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 26 juin 2018), Mme W... et M. F... se sont mariés sans contrat de mariage préalable le [...] avant d'adopter, le 20 mars 1992, le régime de la communauté universelle. 2. Pendant le mariage, les époux ont constitué plusieurs sociétés et notamment la société en nom collectif Brûlerie corrézienne, dont 50 % des parts étaient détenues dans le dernier état par M. K.... 3. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 22 décembre 2007, Mme W... a notifié à la société Brûlerie corrézienne son intention d'être personnellement associée à hauteur de la moitié des parts détenues par son époux, associé en nom, sur le fondement de l'article 1832-2 du code civil, puis elle a assigné M. F... et cette société aux fins, notamment, de se voir reconnaître la qualité d'associée. Examen des moyens Sur le troisième moyen, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 5. Mme W... fait grief à l'arrêt de dire qu'elle n'a pas la qualité d'associée et de cogérante de la société Brûlerie corrézienne, alors « que de l'impossibilité absolue d'exécuter à la fois les dispositions définitives du jugement déféré et l'arrêt d'appel à intervenir résulte une indivisibilité du litige qui contraint l'appelant, à peine d'irrecevabilité, à mettre en cause tous les intimés ; qu'en affirmant, pour juger recevable l'appel de M. F..., que la circonstance que les sociétés parties en première instance n'aient pas interjeté appel ne saurait le priver de la faculté de relever appel de la décision, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le jugement déféré, en ce qu'il avait reconnu à Mme W... la qualité d'associée et de cogérante de la SNC Brûlerie corrézienne, n'était pas définitif à l'égard de la société, partie en première instance, ce dont il résultait que l'arrêt d'appel, infirmatif à l'égard de Mme W..., était incompatible avec le jugement définitif à l'égard de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 324 et 553 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 6. Selon l'article 553 du code de procédure civile, en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne sont pas jointes à l'instance. 7. Le tribunal ayant fait droit à la demande de Mme W... et celle-ci ne pouvant tout à la fois être déclarée associée vis-à-vis de la SNC Brûlerie corrézienne, et non associée de M. F..., il s'ensuit que le litige entre ces différentes parties est indivisible et que l'appel formé par M. F... contre la seule Mme W... a, en application du texte susvisé, produit ses effets à l'égard de la société Brûlerie corrézienne, partie en première instance, bien qu'elle n'ait pas été intimée. 8. Le moyen n'est donc pas fondé. Et sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 9. Mme W... fait le même grief à l'arrêt, alors : « 1°/ que, comme elle le soutenait, il résulte des dispositions de l'article 1832-2 du code civil, auxquelles ne peuvent être opposées celles de l'article L. 221-13 du code de commerce, qu'en l'absence de clause spécifique d'agrément, la société à qui est notifiée l'intention du conjoint d'être personnellement associé, ne peut s'y opposer ; que, dès lors, en subordonnant la reconnaissance de la qualité d'associé de Mme W... "au consentement unanime des associés, à l'exception de son conjoint", la cour d'appel a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article 1832-2 du code civil, et, par fausse application, celles de l'article L. 221-13 du code de commerce ; 2°/ que, subsidiairement, lorsqu'une société en nom collectif est constituée de deux associés, l'accord d'un associé à l'agrément en qualité d'associé du conjoint de l'autre, lequel a notifié son intention d'être personnellement associé, suffit à donner au conjoint cette qualité ; qu'en déboutant Mme W... de sa demande tendant à se voir reconnaître la qualité d'associée de la SNC Brûlerie corrézienne après avoir constaté que dans un courrier officiel du 17 février 2016 le conseil de M. K..., unique associé de M. F..., conjoint de Mme W..., avait indiqué ne pas s'opposer à la demande de celle-ci d'être associée, mais que ce courrier ne pouvait être considéré comme un consentement car intervenu, sans délibération, huit ans après la demande de Mme W..., la cour d'appel a refusé par un motif inopérant de tirer les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 1832-2 du code civil et L. 221-13 du code de commerce. » Réponse de la Cour 10. Il résulte de la combinaison des articles 1832-2, alinéa 3, du code civil et L. 221-13 du code de commerce que la revendication de la qualité d'associé par le conjoint d'un associé en nom, bien que ne constituant pas une cession, est subordonnée au consentement unanime des autres associés, qui répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales. Lorsque le consentement d'un seul associé est requis, ce consentement est, à défaut de délibération, adressé à la société et annexé au procès-verbal prévu par l'article R. 221-2 du code de commerce. 11. C'est donc à bon droit que la cour d'appel a énoncé que, malgré l'absence de clause insérée à cet effet dans les statuts, les dispositions de l'article L. 221-13 du code de commerce s'imposent, et qu'après avoir constaté que M. K..., associé de M. F... au sein de la société Brûlerie corrézienne, n'avait jamais été informé de la revendication faite par Mme W... et n'avait été convoqué à aucune assemblée générale portant sur cette demande, elle a retenu que la lettre officielle du conseil de M. K... adressé au conseil de Mme W... ne pouvait être considérée comme un consentement satisfaisant aux exigences de l'article L. 221-13 susvisé et a, en conséquence, rejeté la demande de Mme W... tendant à se voir reconnaître la qualité d'associée de la société. 12. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme W... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme W... et la condamne à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour Mme W.... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir dit et jugé que Mme Q... W... n'a pas la qualité d'associée et de cogérante de la SNC Brûlerie Corrézienne ; AUX MOTIFS QUE si les trois autres sociétés parties en première instance n'ont pas interjeté appel, cette circonstance ne saurait priver M. F..., partie en 1ère instance, de relever appel de la décision déférée ; par ailleurs, M. F... étant associé de la SNC Brûlerie Corrézienne, a un intérêt personnel à contester une décision reconnaissant à Mme W... la qualité d'associée et de gérante dans la mesure où il est tenu indéfiniment et solidairement des dettes de la société (cf. arrêt, p. 6, sur les demandes relatives à la SNC Brûlerie Corrézienne, § 2 & 3) ; ALORS QUE de l'impossibilité absolue d'exécuter à la fois les dispositions définitives du jugement déféré et l'arrêt d'appel à intervenir résulte une indivisibilité du litige qui contraint l'appelant, à peine d'irrecevabilité, à mettre en cause tous les intimés; qu'en affirmant, pour juger recevable l'appel de M. F..., que la circonstance que les sociétés parties en première instance n'aient pas interjeté appel ne saurait le priver de la faculté de relever appel de la décision, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le jugement déféré, en ce qu'il avait reconnu à Mme W... la qualité d'associée et de cogérante de la SNC Brûlerie Corrézienne, n'était pas définitif à l'égard de la société, partie en première instance, ce dont il résultait que l'arrêt d'appel, infirmatif à l'égard de Mme W..., était incompatible avec le jugement définitif à l'égard de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 324 et 553 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit et jugé que Mme Q... W... n'a pas la qualité d'associée et de cogérante de la SNC Brûlerie Corrézienne ; AUX MOTIFS QU' il est constant que M. F... détient 632 parts de la SNC Brûlerie Corrézienne acquises dans les conditions suivantes : - 500 parts suivant acte sous seing privé en date du 1er août 1986, - 131 parts suivant acte sous seing privé en date du 29 septembre 1988, une part suivant acte sous seing privé en date du 1er octobre 2008 ; que l'article 1832-2 du code civil, résultant de la loi du 10 juillet 1982, dispose que la qualité d'associé est reconnue, pour la moitié des parts sociales souscrites ou acquises, au conjoint qui a notifié à la société son intention d'être personnellement associé, et que si cette notification est postérieure à l'apport ou à l'acquisition, les clauses d'agrément prévues à cet effet sont opposables au conjoint, étant précisé que lors de la délibération sur l'agrément, l'époux associé ne participe pas au vote, ses parts n'étant pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité ; que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 décembre 2007, Mme W... a demandé aux cogérants, Messieurs A... K... et H... F..., la qualité d'associée de la SNC Brûlerie Corrézienne pour les parts de M. F... correspondant à sa quote-part dans le montant de l'acquisition ; que l'article 10 des statuts de la SNC Brûlerie Corrézienne prévoit trois cas de transmission de parts sociales : - la cession entre vifs, - la dissolution de communauté pour un associé, - la transmission par décès, étant précisé que la faillite ou l'incapacité d'un associé fait l'objet de l'article 11 ; que si la mise à jour des statuts intervenue les 17 décembre 1999 n'a pas introduit de clause particulière relative à l'entrée en vigueur de l'article 1832-2 du code civil, les dispositions relatives à l'article L. 221-13 du code de commerce s'imposent en tout état de cause à la SNC Brûlerie Corrézienne ; en effet, ce texte dispose que les parts sociales d'une société en nom collectif ne peuvent être cédées qu'avec le consentement de tous les associés et que toute clause contraire est réputée non écrite ; qu'il s'ensuit que les dispositions de l'article L 221-13 du code de commerce sont opposables à Mme W... et que la reconnaissance de sa qualité d'associée était subordonnée au consentement unanime des associés, à l'exception de son conjoint ; qu'en l'espèce, à la date du 22 décembre 2007, la SNC Brûlerie Corrézienne comptait deux associés, M. F... et M. K... ; que par courrier officiel du 17 février 2016, le conseil de M. K... a indiqué que son client n'avait jamais été informé de la revendication faite en 2007 par Mme W... et n'avait été convoqué à aucune assemblée générale portant sur une telle demande, en précisant que sur le principe son client ne voyait pas d'opposition particulière ; que ce courrier, postérieur de plus de 8 ans à la demande de Mme W..., ne peut être considéré comme un consentement de M. K... étant précisé qu'aucune délibération des associés n'est intervenue ; qu'il ressort de ces éléments que Mme W... ne peut se voir reconnaître la qualité d'associée de la SNC Brûlerie Corrézienne, que dès lors que cette qualité ne lui est pas reconnue, la qualité de gérante ne peut également lui être reconnue (cf. arrêt, p. 6, sur les demandes relatives à la SNC Brûlerie Corrézienne, § 5 – p. 7, § 9) ; 1) ALORS QUE, comme le soutenait Mme W..., il résulte des dispositions de l'article 1832-2 du code civil, auxquelles ne peuvent être opposées celles de l'article L. 221-13 du code de commerce, qu'en l'absence de clause spécifique d'agrément, la société à qui est notifiée l'intention du conjoint d'être personnellement associé, ne peut s'y opposer ; que, dès lors, en subordonnant la reconnaissance de la qualité d'associé de Mme W... « au consentement unanime des associés, à l'exception de son conjoint », la cour d'appel a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article 1832-2 du code civil, et, par fausse application, celles de l'article L. 221-13 du code de commerce. 2) ALORS, subsidiairement, QUE, lorsqu'une société en nom collectif est constituée de deux associés, l'accord d'un associé à l'agrément en qualité d'associé du conjoint de l'autre, lequel a notifié son intention d'être personnellement associé, suffit à donner au conjoint cette qualité ; qu'en déboutant Mme W... de sa demande tendant à se voir reconnaître la qualité d'associée de la SNC Brûlerie Corrézienne après avoir constaté que dans un courrier officiel du 17 février 2016 le conseil de M. K..., unique associé de M. F..., conjoint de Mme W..., avait indiqué ne pas s'opposer à la demande de celle-ci d'être associée, mais que ce courrier ne pouvait être considéré comme un consentement car intervenu, sans délibération, huit ans après la demande de l'exposante, la cour d'appel a refusé par un motif inopérant de tirer les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 1832-2 du code civil et L. 221-13 du code de commerce. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit et jugé que les parts sociales des SCI FAR et Hugrim attribuées à M. H... F... sont des biens propres de celui-ci ; AUX MOTIFS QUE, la SCI Far a été constituée par acte authentique du 12 septembre 2003, le capital social étant fixé à la somme de 1000 € et étant divisé en 100 parts de 10 € chacune, 98 parts étant attribuées à M. H... F... et 2 parts à son fils U... F... ; que la SCI Hugrim a été constituée par acte authentique du 12 septembre 2003, le capital social étant fixé à la somme de 1000 € et étant divisé en 50 parts de 10 € chacune, 50 parts étant attribuées à M. H... F... et 50 parts à M. A... K... ; que M H... F... produit une lettre manuscrite de ses parents datée du 8 août 2003 et dans laquelle ceux-ci déclarent donner en numéraire la somme de 1480 € à leur fils pour la constitution des SCI FAR et Hugrim ; que le jugement déféré a considéré que les déclarations faites par M. H... F... devant notaire ne suffisent pas à établir le caractère propre des fonds employés pour l'apport du capital des SCI FAR et Hugrim, d'autant que selon la lettre de ses parents des fonds lui ont été donnés en espèces alors que selon le courrier de son expert-comptable ces fonds lui ont été prêtés par chèques et qu'aucune preuve de la déclaration fiscale de dons manuels n'est produite ; cependant la déclaration d'un don manuel à l'administration fiscale ne constitue pas une condition de validité de la donation ; au surplus dans une lettre en date du 8 août 2003, les parents déclarent clairement donner la somme de 1 480 € à leur fils H... pour la constitution des SCI FAR et Hugrim ; par ailleurs, un expert-comptable n'a pas qualité pour apprécier le caractère gratuit ou onéreux d'une remise de fonds, que Mme W... n'est donc pas fondée à invoquer la teneur de l'attestation de M. G..., expert-comptable de M. F... ; qu'il ressort de ces éléments que les apports de M. F... lors de la constitution des SCI FAR et Hugrim provenaient de fonds propres, qu'il convient dès lors de dire et juger que les parts desdites sociétés attribuées à M. F... sont des biens propres de celui-ci (cf. arrêt p. 8, sur la demande de réintégration des SCI FAR et Hugrim dans le patrimoine commun – p. 9, § 4) ; ALORS QUE, dans ses conclusions délaissées, Mme W... faisait valoir que l'article 4 des statuts des sociétés FAR et Hugrim relatif à la provenance des fonds indiquait expressément que les apports de M. F... provenaient de dons de ses parents effectués par chèques, quand la lettre du 8 août 2003, sensée confirmer cette remise, indiquait que le don aurait été effectué « sous forme de liquidité », et que ces donations avaient « fait l'objet d'une déclaration de don manuel à la recette des impôts » qui n'était pas intervenue (cf. conclusions p. 18) ; que pour juger que les apports de M. F..., lors de la constitution des SCI FAR et Hugrim provenaient de fonds propres donnés par ses parents, la cour d'appel a énoncé que la déclaration de don manuel à l'administration fiscale ne constituait pas une condition de validité de la donation et que dans le courrier du 8 août 2003, les parents de M. F... déclaraient clairement lui donner la somme de 1 480 € pour la constitution des SCI ; qu'en statuant ainsi sans répondre au moyen susvisé des conclusions de Mme W... par lequel celle-ci démontrait la contradiction entre les termes du courrier des parents de M. F... et les statuts des sociétés, ôtant ainsi toute force probante au courrier du 8 août 2003, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Il résulte de la combinaison des articles 1832-2, alinéa 3, du code civil et L. 221-13 du code de commerce que la revendication de la qualité d'associé par le conjoint d'un associé en nom, bien que ne constituant pas une cession, est subordonnée au consentement unanime des autres associés, qui répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales
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COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Rejet Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 740 FS-P+B Pourvoi n° Y 19-19.463 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 NOVEMBRE 2020 1°/ la société Uber France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , 2°/ M. O... IIS..., domicilié [...] (Pays-Bas), 3°/ M. J... Y..., domicilié [...] , ont formé le pourvoi n° Y 19-19.463 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 9), dans le litige les opposant : 1°/ au syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne, dont le siège est [...] , 2°/ à M. M... G..., domicilié [...] , 3°/ à M. B... U..., domicilié [...] , 4°/ à M. E... GQA..., domicilié [...] , 5°/ à M. X... GQA..., domicilié [...] , 6°/ à M. D... GQA..., domicilié [...] , 7°/ à M. X... R..., domicilié [...] , 8°/ à M. V... L..., domicilié [...] , 9°/ à M. I... W..., domicilié [...] , 10°/ à M. I... S..., domicilié [...] , 11°/ à M. Q... QSD... , domicilié [...] , 12°/ à M. A... C..., domicilié [...] , 13°/ à M. O... N..., domicilié [...] , 14°/ à M. F... P..., domicilié [...] , 15°/ à M. VIW... H..., domicilié [...] , 16°/ à M. K... T..., domicilié [...] , 17°/ à M. OA... EZ..., domicilié [...] , 18°/ à M. YH... JO..., domicilié [...] , 19°/ à M. KO... EZ..., domicilié [...] , 20°/ à M. X... LI..., domicilié [...] , 21°/ à M. MO... AE..., domicilié [...] , 22°/ à M. YH... RO..., domicilié [...] , 23°/ à M. KH... AI..., domicilié [...] , 24°/ à M. CU... TX..., domicilié [...] , 25°/ à M. MO... TA..., domicilié [...] , 26°/ à M. LB... WXO..., domicilié [...] , 27°/ à Mme PE... NM..., domiciliée [...] , 28°/ à M. KR... RM..., domicilié [...] , 29°/ à M. BU... NA..., domicilié [...] , 30°/ à M. E... MPJ..., domicilié [...] , 31°/ à M. IL... NA..., domicilié [...] , 32°/ à M. JR... PF..., domicilié [...] , 33°/ à M. GO... DTU..., domicilié [...] , 34°/ à M. IS... QK..., domicilié [...] , 35°/ à M. DH... LU..., domicilié [...] , 36°/ à M. LQ... XL... , domicilié [...] , 37°/ à M. D... WF..., domicilié [...] , 38°/ à M. QN... GC... , domicilié [...] , 39°/ à M. DN... FEV..., domicilié [...] , 40°/ à M. ATC... LC... , domicilié [...] , 41°/ à M. D... LGB..., domicilié [...] , 42°/ à M. MC... NSC..., domicilié [...] , 43°/ à M. EJ... PV..., domicilié [...] , 44°/ à M. PK... QXH..., domicilié [...] , 45°/ à M. KW... GF..., domicilié [...] , 46°/ à M. UE... UCT... , domicilié [...] , 47°/ à M. HM... XG..., domicilié [...] , 48°/ à M. AD... OXN..., domicilié [...] , 49°/ à M. JC... VE..., domicilié [...] , 50°/ à M. AB... RJJ..., domicilié [...] , 51°/ à M. TC... WWE..., domicilié [...] , 52°/ à M. YQ... CE..., domicilié [...] , 53°/ à M. QV... NUI..., domicilié [...] , 54°/ à M. NF... LK... , domicilié [...] , 55°/ à M. KH... VA... , domicilié [...] , 56°/ à M. KH... FD..., domicilié [...] , 57°/ à M. OZ... OJ..., domicilié [...] , 58°/ à M. IL... CE..., domicilié [...] , 59°/ à M. RS... UG..., domicilié [...] , 60°/ à M. RG... CE..., domicilié [...] , 61°/ à M. TU... OT..., domicilié [...] , 62°/ à M. LA... LK..., domicilié [...] , 63°/ à M. QW... CE..., domicilié [...] , 64°/ à M. JS... CE..., domicilié [...] , 65°/ à M. RG... LK..., domicilié [...] , 66°/ à M. RS... FL..., domicilié [...] , 67°/ à M. KH... LC..., domicilié [...] , 68°/ à M. IL... CM..., domicilié [...] , 69°/ à M. MP... LC..., domicilié [...] , 70°/ à M. X... TXS..., domicilié [...] , 71°/ à M. TT... HBM..., domicilié [...] , 72°/ à M. KW... LK..., domicilié [...] , 73°/ à M. SX... DX..., domicilié [...] , 74°/ à M. LQ... ZEX..., domicilié [...] , 75°/ à M. EA... OJ..., domicilié [...] , 76°/ à M. AY... BO..., domicilié [...] , 77°/ à M. QE... LK..., domicilié [...] , 78°/ à M. OZ... NK..., domicilié [...] , 79°/ à M. FV... MR..., domicilié [...] , 80°/ à M. XVE... LN..., domicilié [...] , 81°/ à M. GO... EV..., domicilié [...] , 82°/ à M. B... GI..., domicilié [...] , 83°/ à M. KH... CE..., domicilié [...] , 84°/ à M. JM... QJ..., domicilié [...] , 85°/ à M. KO... VZ..., domicilié [...] , 86°/ à M. MA... VZ..., domicilié [...] , 87°/ à M. IL... UGI..., domicilié [...] , 88°/ à M. BWA... PS..., domicilié [...] , 89°/ à M. RS... IS..., domicilié [...] , 90°/ à M. QE... HD..., domicilié [...] , 91°/ à M. D... XB..., domicilié [...] , 92°/ à M. JC... BN..., domicilié [...] , 93°/ à M. KA... WXY..., domicilié [...] , 94°/ à M. TU... IS..., domicilié [...] , 95°/ à M. BB... EP..., domicilié [...] , 96°/ à M. OQ... MTA..., domicilié [...] , 97°/ à M. KH... NCV..., domicilié [...] , 98°/ à M. BI... IS..., domicilié [...] , 99°/ à M. HU... IM..., domicilié [...] , 100°/ à M. JS... NL..., domicilié [...] , 101°/ à M. MC... WJ..., domicilié [...] , 102°/ à M. QC... DB..., domicilié [...] , 103°/ à M. KH... GC..., domicilié [...] , 104°/ à M. HI... WJ..., domicilié [...] , 105°/ à M. BB... LG..., domicilié [...] , 106°/ à M. KSL... II..., domicilié [...] , 107°/ à M. IL... GQ..., domicilié [...] , 108°/ à M. KH... GA..., domicilié [...] , 109°/ à M. VV... WB... DX..., domicilié [...] , 110°/ à M. PH... QQO..., domicilié [...] , 111°/ à M. FK... GC..., domicilié [...] , 112°/ à M. MC... NL..., domicilié [...] , 113°/ à M. NF... DJ..., domicilié [...] , 114°/ à M. BI... EZ..., domicilié [...] , 115°/ à M. SE... EX..., domicilié [...] , 116°/ à M. KO... RK..., domicilié [...] , 117°/ à M. NF... UB..., domicilié [...] , 118°/ à M. HG... YL..., domicilié [...] , 119°/ à M. KH... XL..., domicilié [...] , 120°/ à M. CU... WM..., domicilié [...] , 121°/ à M. BV... UZ..., domicilié [...] , 122°/ à M. RG... LK..., domicilié [...] , 123°/ à M. ED... WM... MG..., domicilié [...] , 124°/ à M. XW... UZ..., domicilié [...] , 125°/ à M. MC... KB..., domicilié [...] , 126°/ à M. TY... DK..., domicilié [...] , 127°/ à M. KO... SG..., domicilié [...] , 128°/ à M. NW... SAQ..., domicilié [...] , 129°/ à M. JQ... VA..., domicilié [...] , 130°/ à M. UYU... BJ..., domicilié [...] , 131°/ à M. KH... ET..., domicilié [...] , 132°/ à M. UM... LK..., domicilié [...] , 133°/ à M. Z... QI..., domicilié [...] , 134°/ à M. GO... UH..., domicilié [...] , 135°/ à M. JZ... IH..., domicilié [...] , 136°/ à M. I... ATW..., domicilié [...] , 137°/ à M. UK... HA..., domicilié [...] , 138°/ à M. KO... RX..., domicilié [...] , 139°/ à M. PN... TFI..., domicilié [...] , 140°/ à M. O... NE..., domicilié [...] , 141°/ à M. JK... LK..., domicilié [...] , 142°/ à M. RC... NZ..., domicilié [...] , 143°/ à M. GVM... CG..., domicilié [...] , 144°/ à M. FK... B..., domicilié [...] , 145°/ à M. OR... LK..., domicilié [...] , 146°/ à M. QC... B..., domicilié [...] , 147°/ à M. XC... KTB..., domicilié [...] , 148°/ à M. RS... SZ..., domicilié [...] , 149°/ à M. QF... LTR..., domicilié [...] , 150°/ à M. OK... PR..., domicilié [...] , 151°/ à M. RMZ... IBL..., domicilié [...] , 152°/ à M. B... OOL..., domicilié [...] , 153°/ à M. WB... RLY..., domicilié [...] , 154°/ à M. ID... DY..., domicilié [...] , 155°/ à M. X... YUD..., domicilié [...] , 156°/ à M. RC... NCH..., domicilié [...] , 157°/ à M. IC... YBC..., domicilié [...] , 158°/ à M. RG... UPC... , domicilié [...] , 159°/ à M. Z... CL..., domicilié [...] , 160°/ à M. HN... LIM..., domicilié [...] , 161°/ à M. SCY... GIH..., domicilié [...] , 162°/ à M. X... XRC..., domicilié [...] , 163°/ à M. KH... GVN... , domicilié [...] , 164°/ à M. MA... WPO..., domicilié [...] , 165°/ à M. D... JSF..., domicilié [...] , 166°/ à M. HM... CL..., domicilié [...] , 167°/ à M. MV... DE..., domicilié [...] , 168°/ à M. LE... PEE..., domicilié [...] , 169°/ à M. YK... YI..., domicilié [...] , 170°/ à M. CF... GH..., domicilié [...] , 171°/ à M. KH... 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ZUG..., domicilié [...] , 241°/ à M. EA... EO..., domicilié [...] , 242°/ à M. JS... EI..., domicilié [...] , 243°/ à M. X... CC..., domicilié [...] , 244°/ à M. LQ... EI..., domicilié [...] , 245°/ à M. KZ... BH..., domicilié [...] , 246°/ à M. FQ... CW..., domicilié [...] , 247°/ à M. UM... KI..., domicilié [...] , 248°/ à M. OV... WQ..., domicilié [...] , 249°/ à M. FK... YE..., domicilié [...] , 250°/ à M. OR... VRA..., domicilié [...] , 251°/ à M. NF... VTZ..., domicilié [...] , 252°/ à M. OF... XN..., domicilié [...] , 253°/ à M. URK... MFF..., domicilié [...] , 254°/ à M. Z... KNL..., domicilié [...] , 255°/ à M. WH... JE..., domicilié [...] , 256°/ à M. KH... KU..., domicilié [...] , 257°/ à M. VV... GG..., domicilié [...] , 258°/ à M. AJ... GMM..., domicilié [...] , 259°/ à M. BK... RH..., domicilié [...] , 260°/ à M. X... GU..., domicilié [...] , 261°/ à M. MC... RP..., domicilié [...] , 262°/ à M. MO... JV..., domicilié [...] , 263°/ à M. IL... BC... CT..., domicilié [...] , 264°/ à M. CU... WGO..., domicilié [...] , 265°/ à M. AY... DF..., domicilié [...] , 266°/ à M. OA... OM..., domicilié [...] , 267°/ à M. WK... SUX..., domicilié [...] , 268°/ à M. EA... GR..., domicilié [...] , 269°/ à M. MC... AN..., domicilié [...] , 270°/ à M. OH... UR..., domicilié [...] , 271°/ à M. TK... BQ..., domicilié [...] , 272°/ à M. OR... MHI..., domicilié [...] , 273°/ à M. LK... GR..., domicilié [...] , 274°/ à M. OO... PG..., domicilié [...] , 275°/ à M. YG... BZ..., domicilié [...] , 276°/ à M. GY... VW..., domicilié [...] , 277°/ à M. TW... OS..., domicilié [...] , 278°/ à M. JC... MUR..., domicilié [...] , 279°/ à M. BI... GR..., domicilié [...] , 280°/ à M. OH... AF..., domicilié [...] , 281°/ à M. QC... ST..., domicilié [...] , 282°/ à M. X... DVR..., domicilié [...] , 283°/ à M. K... HP..., domicilié [...] , 284°/ à M. KZ... CV..., domicilié [...] , 285°/ à M. CB... IA..., domicilié [...] , 286°/ à M. CQ... BD..., domicilié [...] , 287°/ à M. KE... FX..., domicilié [...] , 288°/ à M. EE... KC..., domicilié [...] , 289°/ à M. HM... WY..., domicilié [...] , 290°/ à M. CD... EG..., domicilié [...] , 291°/ à M. STD... IF..., domicilié [...] , 292°/ à M. NF... DR..., domicilié [...] , 293°/ à M. VH... MB..., domicilié [...] , 294°/ à M. KH... SQ..., domicilié [...] , 295°/ à M. JW... YGH..., domicilié [...] , 296°/ à M. CQ... OI..., domicilié [...] , 297°/ à M. HM... GR..., domicilié [...] , 298°/ à M. MC... SQ..., domicilié [...] , 299°/ à M. X... PJ..., domicilié [...] , 300°/ à M. ZKI... SD..., domicilié [...] , 301°/ à M. Q... EX..., domicilié [...] , 302°/ à M. AM... FI..., domicilié [...] , 303°/ à M. KH... CL..., domicilié [...] , 304°/ à M. XO... PI..., domicilié [...] , 305°/ à M. AV... QD..., domicilié [...] , 306°/ à M. KH... KF..., domicilié [...] , 307°/ à M. KH... QD..., domicilié [...] , 308°/ à M. MA... CL..., domicilié [...] , 309°/ à M. PO... BM..., domicilié [...] , 310°/ à M. QF... YNV..., domicilié [...] , 311°/ à M. IL... KK..., domicilié [...] , 312°/ à M. FZE... ER..., domicilié [...] , 313°/ à M. OA... XQ..., domicilié [...] , 314°/ à M. NJ... BR..., domicilié [...] , 315°/ à M. OQ... OU..., domicilié [...] , 316°/ à M. TT... YN..., domicilié [...] , 317°/ à M. X... RFC..., domicilié [...] , 318°/ à M. RU... QM..., domicilié [...] , 319°/ à M. LB... YN..., domicilié [...] , 320°/ à M. E... KKJ..., domicilié [...] , 321°/ à M. TM... SH..., domicilié [...] , 322°/ à M. AL... MT..., domicilié [...] , 323°/ à M. D... TB..., domicilié [...] , 324°/ à M. X... AIY..., domicilié [...] , 325°/ à M. UM... WR..., domicilié [...] , 326°/ à M. NF... NT..., domicilié [...] , 327°/ à M. NF... KBR..., domicilié [...] , 328°/ à M. HY... XHQ..., domicilié [...] , 329°/ à M. DH... NT..., domicilié [...] , 330°/ à M. CD... WX..., domicilié [...] , 331°/ à M. OH... PM..., domicilié [...] , 332°/ à M. LO... 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MC... BB..., domicilié [...] , 472°/ à M. WW... EF..., domicilié [...] , 473°/ à M. KH... UV..., domicilié [...] , 474°/ à M. KD... QX..., domicilié [...] , 475°/ à M. UE... OE..., domicilié [...] , 476°/ à M. XKF... JGA..., domicilié [...] , 477°/ à Mme NS... HR..., domiciliée [...] , 478°/ à M. GJ... KOY..., domicilié [...] , 479°/ à M. OF... LF..., domicilié [...] , 480°/ à M. SO... BB..., domicilié [...] , 481°/ à M. LK... BX..., domicilié [...] , 482°/ à M. YH... AZW..., domicilié [...] , 483°/ à M. CD... PU..., domicilié [...] , 484°/ à M. BB... MH..., domicilié [...] , 485°/ à M. CQ... RD..., domicilié [...] , 486°/ à M. LB... SRX..., domicilié [...] , 487°/ à M. MK... SY..., domicilié [...] , 488°/ à M. VI... MH..., domicilié [...] , 489°/ à M. X... QFP..., domicilié [...] , 490°/ à M. TU... YS..., domicilié [...] , 491°/ à Mme NN... IT..., domiciliée [...] , 492°/ à M. LGV... DBZ..., domicilié [...] , 493°/ à M. JJ... AA..., domicilié [...] , 494°/ à M. TT... WT..., domicilié [...] , 495°/ à M. QB... RB..., domicilié [...] , 496°/ à M. SN... XXB..., domicilié [...] , 497°/ à M. MA... FS..., domicilié [...] , 498°/ à M. KH... YGA..., domicilié [...] , 499°/ à Mme VB... PU... , domiciliée [...] , 500°/ à M. TT... VD..., domicilié [...] , 501°/ à M. RS... UX..., domicilié [...] , 502°/ à M. KO... PU..., domicilié [...] , 503°/ à M. X... PQ..., domicilié [...] , 504°/ à Mme TL... FC..., domiciliée [...] , 505°/ à M. ID... NQ..., domicilié [...] , 506°/ à M. OV... YB..., domicilié [...] , 507°/ à Mme MJ... KM..., domiciliée [...] , 508°/ à M. OL... HH..., domicilié [...] , 509°/ à M. SE... UW..., domicilié [...] , 510°/ à M. OH... LV..., domicilié [...] , 511°/ à M. Z... TO..., domicilié [...] , 512°/ à M. KX... DM..., domicilié [...] , 513°/ à M. X... SE..., domicilié [...] , 514°/ à M. LM... NEL..., domicilié [...] , 515°/ à M. GO... BX..., domicilié [...] , 516°/ à M. TT... XZ..., domicilié [...] , 517°/ à M. AW... IU..., domicilié [...] , 518°/ à M. MH... DO..., domicilié [...] , 519°/ à M. DW... PZ..., domicilié [...] , 520°/ à M. UZ... EI..., domicilié [...] , 521°/ à M. JG... AX..., domicilié [...] , 522°/ à M. TT... DVU..., domicilié [...] , 523°/ à M. CL... CE..., domicilié [...] , 524°/ à M. QG... HL..., domicilié [...] , 525°/ à M. KH... QE..., domicilié [...] , 526°/ à M. MP... YI..., domicilié [...] , 527°/ à M. NF... FJ..., domicilié [...] , 528°/ à M. NF... SE..., domicilié [...] , 529°/ à M. AJ... HK..., domicilié [...] , 530°/ à M. OZ... SE..., domicilié [...] , 531°/ à M. RI... YI..., domicilié [...] , 532°/ à M. I... PD..., domicilié [...] , 533°/ à M. HC... YI..., domicilié [...] , 534°/ à M. KG... VC..., domicilié [...] , 535°/ à M. X... DT..., domicilié [...] , 536°/ à M. UYU... DQ..., domicilié [...] , 537°/ à M. MO... PP..., domicilié [...] , 538°/ à M. UF... PP..., domicilié [...] , 539°/ à M. JH... CS..., domicilié [...] , 540°/ à M. OQ... XW..., domicilié [...] , 541°/ à M. MC... RV..., domicilié [...] , 542°/ à M. A... RV..., domicilié [...] , 543°/ à M. UT... HV..., domicilié [...] , 544°/ à M. M... FU..., domicilié [...] , 545°/ à M. YH... UD..., domicilié [...] , 546°/ à M. TP... NX..., domicilié [...] , 547°/ à M. MF... MO..., domicilié [...] , 548°/ à M. M... QT..., domicilié [...] , 549°/ à M. VH... NU..., domicilié [...] , 550°/ à M. LS... AB..., domicilié [...] , 551°/ à M. NF... FT..., domicilié [...] , 552°/ à M. IL... WL..., domicilié [...] , 553°/ à M. US... SU..., domicilié [...] , 554°/ à M. OV... NR..., domicilié [...] , 555°/ à M. VI... AB..., domicilié [...] , 556°/ à M. TT... RF..., domicilié [...] , 557°/ à M. LO... TT..., domicilié [...] , 558°/ à M. RU... PT..., domicilié [...] , 559°/ à M. LWL... OD... , domicilié [...] , 560°/ à M. ID... UH... , domicilié [...] , 561°/ à M. CQ... BSQ..., domicilié [...] , 562°/ à M. GO... HJO..., domicilié [...] , 563°/ à M. SF... DG... , domicilié [...] , 564°/ à M. FRM... HT..., domicilié [...] , 565°/ à M. X... VP..., domicilié [...] , 566°/ à M. KH... VP..., domicilié [...] , 567°/ à M. OH... OX..., domicilié [...] , 568°/ à M. RQ... ML..., domicilié [...] , 569°/ à M. EA... DG... , domicilié [...] , 570°/ à M. ZFU... DI..., domicilié [...] , 571°/ à M. X... MS..., domicilié [...] , 572°/ à M. NF... JU..., domicilié [...] , 573°/ à M. LK... KS..., domicilié [...] , 574°/ à M. DH... VR..., domicilié [...] , 575°/ à M. UM... CK..., domicilié [...] , 576°/ à M. LO... LK..., domicilié [...] , 577°/ à M. OV... SJ..., domicilié [...] , 578°/ à M. CN... CI..., domicilié [...] , 579°/ à M. K... WZ..., domicilié [...] , 580°/ à M. NF... CO..., domicilié [...] , 581°/ à M. CN... CO..., domicilié [...] , 582°/ à M. E... CO..., domicilié [...] , 583°/ à M. EJ... SMI..., domicilié [...] , 584°/ à M. XO... DL..., domicilié [...] , 585°/ à M. GJ... TT..., domicilié [...] , 586°/ à M. KH... ND..., domicilié [...] , 587°/ à M. OZ... ZMV..., domicilié [...] , 588°/ à M. HM... CH..., domicilié [...] , 589°/ à Mme AP... AU..., 590°/ à M. JT... AU..., domiciliés tous deux [...], 591°/ à M. BB... KL..., domicilié [...] , 592°/ à M. RT... XY..., domicilié [...] , 593°/ à M. NJ... XY..., domicilié [...] , 594°/ à M. NF... OW..., domicilié [...] , 595°/ à M. QL... OF..., domicilié [...] , 596°/ à M. KH... OF..., domicilié [...] , 597°/ à M. KH... IB..., domicilié [...] , 598°/ à M. TU... B..., domicilié [...] , 599°/ à M. XS... XY..., domicilié [...] , 600°/ à M. JC... IX..., domicilié [...] , 601°/ à M. GO... KQ..., domicilié [...] , 602°/ à M. KW... RZ..., domicilié [...] , 603°/ à M. SW... UWB..., domicilié [...] , 604°/ à M. X... X..., domicilié [...] , 605°/ à M. LWL... X..., domicilié [...] , 606°/ à M. ZFU... PF..., domicilié [...] , 607°/ à M. I... SE..., domicilié [...] , 608°/ à M. LO... SE..., domicilié [...] , 609°/ à M. K... TZ..., domicilié [...] , 610°/ à M. PL... TZ..., domicilié [...] , 611°/ à M. KN... SXW..., domicilié [...] , 612°/ à Mme CR... CL..., domiciliée [...] , 613°/ à M. CQ... CL..., domicilié [...] , 614°/ à M. BWA... IK..., domicilié [...] , 615°/ à M. TU... SC..., domicilié [...] , 616°/ à M. SE... LO..., domicilié [...] , 617°/ à M. MV... YF..., 618°/ à M. MK... YF..., domiciliés tous deux [...], 619°/ à M. VA... XW..., domicilié [...] , 620°/ à M. OA... XW..., domicilié [...] , 621°/ à M. RS... SI..., domicilié [...] , 622°/ à M. NC... KY..., domicilié [...] , 623°/ à M. YQ... NB..., domicilié [...] , 624°/ à M. RT... XA..., domicilié [...] , 625°/ à Mme AN... VN..., domiciliée [...] , 626°/ à M. MK... FB..., domicilié [...] , 627°/ à Mme BS... SA..., domiciliée [...] , 628°/ à M. KH... IE..., domicilié [...] , 629°/ à M. CF... WV..., domicilié [...] , 630°/ à M. TF... VX..., domicilié [...] , 631°/ à M. LB... YG... JAF..., domicilié [...] , 632°/ à M. P... UG..., domicilié [...] , 633°/ à M. CE... VN..., domicilié [...] , 634°/ à M. XE... YD..., domicilié [...] , 635°/ à M. NO... DG..., domicilié [...] , 636°/ à M. QV... GK..., domicilié [...] , 637°/ à M. XE... LX..., domicilié [...] , 638°/ à M. LJ... FH..., domicilié [...] , 639°/ à M. XHN... BNG..., domicilié [...] , 640°/ à M. TR... NY..., domicilié [...] , 641°/ à M. CQ... DY..., domicilié [...] , 642°/ à M. MC... AR..., domicilié [...] , 643°/ à M. KO... AR..., domicilié [...] , 644°/ à M. M... MU..., domicilié [...] , 645°/ à M. BB... AR..., domicilié [...] , 646°/ à M. WE... XM..., domicilié [...] , 647°/ à M. XV... X..., domicilié [...] , 648°/ à M. CF... X..., domicilié [...] , 649°/ à M. UL... UKM..., domicilié [...] , 650°/ à M. X... JR..., domicilié [...] , 651°/ à M. Q... XF..., domicilié [...] , 652°/ à M. CQ... VS..., 653°/ à M. OH... VS..., domiciliés tous deux [...], 654°/ à M. CL... XY..., domicilié [...] , 655°/ à M. JS... KT..., domicilié [...] , 656°/ à Mme KV... HHS..., domiciliée [...] , 657°/ à M. LK... NH..., domicilié [...] , 658°/ à M. SS... KH... LO..., domicilié [...] , 659°/ à M. MP... HS..., domicilié [...] , 660°/ à M. MA... RW..., domicilié [...] , 661°/ à M. WC... RW..., domicilié [...] , 662°/ à M. I... MN..., domicilié [...] , 663°/ à M. LO... GX..., domicilié [...] , 664°/ à M. GE... GX..., domicilié [...] , 665°/ à M. RU... GK..., domicilié [...] , 666°/ à M. JM... GK..., domicilié [...] , 667°/ à M. UYU... GK..., domicilié [...] , 668°/ à M. NF... SB..., domicilié [...] , 669°/ à M. VI... UQ..., domicilié [...] , 670°/ à M. X... IZ..., domicilié [...] , 671°/ à M. KW... MA..., domicilié [...] , 672°/ à M. NN... UQ..., domicilié [...] , 673°/ à M. KH... AN..., domicilié [...] , 674°/ à M. MW... RA..., domicilié [...] , 675°/ à M. LM... XU..., domicilié [...] , 676°/ à M. KH... TI..., domicilié [...] , 677°/ à M. LB... LP..., domicilié [...] , 678°/ à M. GV... EB..., domicilié [...] , 679°/ à M. AZ... LZ..., domicilié [...] , 680°/ à M. VI... BI..., domicilié [...] , 681°/ à M. GN... YOZ..., domicilié [...] , 682°/ à M. BA... QA..., domicilié [...] , 683°/ à M. VU... YC..., domicilié [...] , 684°/ à M. LK... GVF..., domicilié [...] , 685°/ à M. RW... VM..., domicilié [...] , 686°/ à M. KH... BG..., domicilié [...] , 687°/ à M. UI... TH..., domicilié [...] , 688°/ à M. LGV... DC..., domicilié [...] , 689°/ à M. EDY... FN..., domicilié [...] , 690°/ à M. OA... BB..., domicilié [...] , 691°/ à M. X... JD..., domicilié [...] , 692°/ à M. QE... XF..., domicilié [...] , 693°/ à M. GO... LK..., domicilié [...] , 694°/ à M. IN... HX..., domicilié [...] , 695°/ à M. TQ... LH..., domicilié [...] , 696°/ à M. TT... HZ..., domicilié [...] , 697°/ à Mme OR... MM..., domiciliée [...] , 698°/ à M. EM... OTW..., domicilié [...] , 699°/ à M. YH... IR..., domicilié [...] , 700°/ à M. WH... UJF..., domicilié [...] , 701°/ à M. GE... TKR..., domicilié [...] , 702°/ à M. LAO... UJF..., domicilié [...] , 703°/ à M. NR... FCX..., domicilié [...] , 704°/ à M. NZX... WUG..., domicilié [...] , 705°/ à M. B... PWJ..., domicilié [...] , 706°/ à M. BH... PG..., domicilié [...] , 707°/ à M. MC... FTR..., domicilié [...] , 708°/ à M. EY... GRD..., domicilié [...] , 709°/ à M. OO... EMY..., domicilié [...] , 710°/ à M. KH... M..., domicilié [...] , 711°/ à M. MO... WUG..., domicilié [...] , 712°/ à M. AK... KH... MOH..., domicilié [...] , 713°/ à M. FSN... NQQ..., domicilié [...] , 714°/ à M. TF... EPQ..., domicilié [...] , 715°/ à M. WH... CUS..., domicilié [...] , 716°/ à M. AXP... MNG..., domicilié [...] , 717°/ à M. JM... MA..., domicilié [...] , 718°/ à M. OZ... DEF..., domicilié [...] , 719°/ à M. NF... IVN..., domicilié [...] , 720°/ à M. YH... DEM..., domicilié [...] , 721°/ à M. NNO... RMM..., domicilié [...] , 722°/ à M. VUP... XGL..., domicilié [...] , 723°/ à M. YH... LVO..., domicilié [...] , 724°/ à M. CS... LU..., domicilié [...] , 725°/ à M. OH... GLC..., domicilié [...] , 726°/ à M. DAV... FIK..., domicilié [...] , 727°/ à M. OIM... BDU..., domicilié [...] , 728°/ à M. LO... QGF..., domicilié [...] , 729°/ à M. I... NFI..., domicilié [...] , 730°/ à M. LB... SWE..., domicilié [...] , 731°/ à M. TT... BUE..., domicilié [...] , 732°/ à M. OZ... SPB..., domicilié [...] , 733°/ à M. KN... CKS..., domicilié [...] , 734°/ à M. YM... CUN..., domicilié [...] , 735°/ à M. KW... CHF..., domicilié [...] , 736°/ à M. X... EMB..., domicilié [...] , 737°/ à M. UM... EFY..., domicilié [...] , 738°/ à M. QBI... GYS..., domicilié [...] , 739°/ à M. SAC... JSL..., domicilié [...] , 740°/ à M. YH... DPC..., domicilié [...] , 741°/ à M. OZ... JSL..., domicilié [...] , 742°/ à M. SOZ... COT..., domicilié [...] , 743°/ à Mme OXI... XUD..., domiciliée [...] , 744°/ à M. D... X... FDH..., domicilié [...] , 745°/ à M. DZN... CU... AOD..., domicilié [...] , 746°/ à M. AJ... PLW..., domicilié [...] , 747°/ à M. OH... ITH..., domicilié [...] , 748°/ à M. X... MDK..., domicilié [...] , 749°/ à M. FZR... LAZ..., domicilié [...] , 750°/ à M. CD... ZI..., domicilié [...] , 751°/ à M. PZF... WSN..., domicilié [...] , 752°/ à M. PL... FCX..., domicilié [...] , 753°/ à M. RGM... MDK..., domicilié [...] , 754°/ à M. CQ... MDK..., domicilié [...] , 755°/ à M. MCB... NIU..., domicilié [...] , 756°/ à M. HIG... OZZ..., 757°/ à M. K... TTQ..., tous deux domiciliés [...] , 758°/ à M. NF... PZL..., domicilié [...] , 759°/ à M. OZ... DSN..., domicilié [...] , 760°/ à M. RGM... SVB..., domicilié [...] , 761°/ à M. BB... YAU..., domicilié [...] , 762°/ à M. TY... Q..., domicilié [...] , 763°/ à M. EJ... YKO..., domicilié [...] , 764°/ à M. OF... UCX..., domicilié [...] , 765°/ à M. MP... ELY..., domicilié [...] , 766°/ à M. YM... QEL..., domicilié [...] , 767°/ à M. GUK... QEV..., domicilié [...] , 768°/ à M. OXI... VLM..., domicilié [...] , 769°/ à M. ENX... SPV..., domicilié [...] , 770°/ à M. OO... EY..., domicilié [...] , 771°/ à M. LB... I..., domicilié [...] , 772°/ à M. KPG... HQB..., domicilié [...] , 773°/ à M. MZ... XZB..., domicilié [...] , 774°/ à M. OQ... VFZ..., domicilié [...] , 775°/ à M. QF... VFZ..., domicilié [...] , 776°/ à M. ZFU... TQD..., domicilié [...] , 777°/ à M. EI... QRB..., domicilié [...] , 778°/ à M. KH... EI..., domicilié [...] , 779°/ à M. JC... HPW..., domicilié [...] , 780°/ à M. BVZ... YWO..., domicilié [...] , 781°/ à M. JC... UPC..., domicilié [...] , 782°/ à M. PZF... LRY..., domicilié [...] , 783°/ à M. LB... GJ... HGF..., domicilié [...] , 784°/ à M. D... X... IPL..., domicilié [...] , 785°/ à M. RS... FXB..., domicilié [...] , 786°/ à M. DH... IMK..., domicilié [...] , 787°/ à M. ZFU... RQ..., domicilié [...] , 788°/ à M. FV... JOB..., domicilié [...] , 789°/ à M. SXD... QRB..., domicilié [...] , 790°/ à M. Z... RQ..., domicilié [...] , 791°/ à M. AK... GUS..., domicilié [...] , 792°/ à M. GE... RQ..., domicilié [...] , 793°/ à M. YPW... TDA..., domicilié [...] , 794°/ à M. MA... QC..., domicilié [...] , 795°/ à M. YH... J..., domicilié [...] , 796°/ à M. OR... XPN..., domicilié [...] , 797°/ à M. UQH... RG..., domicilié [...] , 798°/ à M. AJ... OK..., domicilié [...] , 799°/ à M. AJ... BN..., domicilié [...] , 800°/ à M. LO... RG..., domicilié [...] , 801°/ à M. QF... ESH..., domicilié [...] , 802°/ à M. NF... TGM..., domicilié [...] , 803°/ à M. JWR... HRU..., domicilié [...] , 804°/ à M. JC... WRD..., domicilié [...] , 805°/ à M. YM... RLK..., domicilié [...] , 806°/ à M. QG... MAC..., domicilié [...] , 807°/ à M. EA... LYE..., domicilié [...] , 808°/ à M. NF... HZ..., domicilié [...] , 809°/ à M. RU... QZ..., domicilié [...] , 810°/ à M. CQ... PJX..., domicilié [...] , 811°/ à M. NF... CZW..., domicilié [...] , 812°/ à M. AJ... HZ..., domicilié [...] , 813°/ à M. GK... CET..., domicilié [...] , 814°/ à M. TU... BMB..., domicilié [...] , 815°/ à M. KO... AN..., domicilié [...] , 816°/ à M. LWL... YXI..., domicilié [...] , 817°/ à M. K... LK..., domicilié [...] , 818°/ à M. GJ... NZE..., domicilié [...] , 819°/ à M. OH... YG..., domicilié [...] , 820°/ à M. ORD... QQV... FFT..., domicilié [...] , 821°/ à M. RU... DPI..., domicilié [...] , 822°/ à M. UM... EYT..., domicilié [...] , 823°/ à M. X... KMY..., domicilié [...] , 824°/ à M. TIV... YJM..., domicilié [...] , 825°/ à M. UBL... EFX..., domicilié [...] , 826°/ à M. NAS... DMD..., domicilié [...] , 827°/ à M. WH... OWG..., domicilié [...] , 828°/ à M. LII... YJM..., domicilié [...] , 829°/ à M. BP... WDZ..., domicilié [...] , 830°/ à M. HM... RBZ..., domicilié [...] , 831°/ à M. BXS... MQ..., domicilié [...] , 832°/ à M. KBQ... EAE..., domicilié [...] , 833°/ à M. UZ... OOX..., domicilié [...] , 834°/ à M. TT... IQE..., domicilié [...] , 835°/ à M. NF... SE..., domicilié [...] , 836°/ à M. X... SE..., domicilié [...] , 837°/ à M. SE... EBB..., domicilié [...] , 838°/ à M. SS... WR..., domicilié [...] , 839°/ à M. UK... SGH..., domicilié [...] , 840°/ à M. HG... ECN..., domicilié [...] , 841°/ à M. MWI... ADI..., domicilié [...] , 842°/ à M. XUZ... RAF..., domicilié [...] , 843°/ à M. AJT... GJR..., domicilié [...] , 844°/ à M. DCV... HJN..., domicilié [...] , 845°/ à M. AB... XMS..., domicilié [...] , 846°/ à M. RDS... HMV..., domicilié [...] , 847°/ à M. Z... QJF..., domicilié [...] , 848°/ à M. RVW... WBD..., domicilié [...] , 849°/ à M. AZD... KI... WJ..., domicilié [...] , 850°/ à M. GK... IZS..., domicilié [...] , 851°/ à M. QI... COL..., domicilié [...] , 852°/ à M. MC... DE..., domicilié [...] , 853°/ à M. LM... ULN..., domicilié [...] , 854°/ à M. MC... BKZ... DE..., domicilié [...] , 855°/ à M. VB... RQS..., domicilié [...] , 856°/ à M. MVV... WFW... USE..., domicilié [...] , 857°/ à M. LK... LMO..., domicilié [...] , 858°/ à M. CN... BI..., domicilié [...] , 859°/ à M. HO... VCG..., domicilié [...] , 860°/ à M. AJ... SL..., domicilié [...] , 861°/ à M. UCN... HHD..., domicilié [...] , 862°/ à M. E... PND..., domicilié [...] , 863°/ à M. K... DE..., domicilié [...] , 864°/ à M. SE... TUR..., domicilié [...] , 865°/ à M. MP... NVL..., domicilié [...] , 866°/ à M. KO... DE..., domicilié [...] , 867°/ à M. VEH... VHO..., domicilié [...] , 868°/ à M. AGF... NVL..., domicilié [...] , 869°/ à M. X... PND..., domicilié [...] , 870°/ à M. EA... ILE..., domicilié [...] , 871°/ à M. UM... NME..., domicilié [...] , 872°/ à Mme GO... YVP..., domiciliée [...] , 873°/ à M. BFA... HHN..., domicilié [...] , 874°/ à M. LK... PLW..., domicilié [...] , 875°/ à M. JJT... SIL..., domicilié [...] , 876°/ à M. WM... K..., domicilié [...] , 877°/ à M. JC... KA..., domicilié [...] , 878°/ à M. OV... VMC..., domicilié [...] , 879°/ à M. DXR... AYP... TJX..., domicilié [...] , 880°/ à M. ZFU... EY..., domicilié [...] , 881°/ à M. RIM... HHD..., domicilié [...] , 882°/ à M. KH... CL..., domicilié [...] , 883°/ à M. DH... GNK..., domicilié [...] , 884°/ à M. KZ... SYV..., domicilié [...] , 885°/ à M. Z... WEX..., domicilié [...] , 886°/ à M. MA... NEB..., domicilié [...] , 887°/ à M. AJ... CL..., domicilié [...] , 888°/ à M. YQ... YHL..., domicilié [...] , 889°/ à M. SS... YI..., domicilié [...] , 890°/ à M. KH... JSW..., domicilié [...] , 891°/ à M. EY... BS..., domicilié [...] , 892°/ à M. QY... SLZ..., domicilié [...] , 893°/ à M. I... EAE..., domicilié [...] , 894°/ à M. OA... XA..., domicilié [...] , 895°/ à M. QZ... GK..., domicilié [...] , 896°/ à M. TBB... VNM..., domicilié [...] , 897°/ à M. A... WC..., domicilié [...] , 898°/ à M. KH... MP... BRK..., domicilié [...] , 899°/ à M. QB... PCL..., domicilié [...] , 900°/ à M. JT... LK..., domicilié [...] , 901°/ à M. VH... PCL..., domicilié [...] , 902°/ à M. X... STA..., domicilié [...] , 903°/ à M. HM... XA..., domicilié [...] , 904°/ à M. YQ... BZJ..., domicilié [...] , 905°/ à M. LK... NBA..., domicilié [...] , 906°/ à M. QC... XY..., domicilié [...] , 907°/ à M. OZ... UFZ..., domicilié [...] , 908°/ à M. SFS... SCV..., domicilié [...] , 909°/ à M. NF... QCL..., domicilié [...] , 910°/ à M. MC... BOA..., domicilié [...] , 911°/ à M. X... WVU..., domicilié [...] , défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Uber France, de M. IIS... et de M. Y..., de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat du syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et des neuf cent dix autres défendeurs, et l'avis de Mme Penichon, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, Mmes Darbois, Poillot-Peruzzetto, Champalaune, Daubigney, Michel-Amsellem, Boisselet, M. Mollard, conseillers, Mmes Le Bras, de Cabarrus, Lion, Lefeuvre, Tostain, Bessaud, M. Boutié, Mme Bellino, conseillers référendaires, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt sur compétence attaqué (Paris, 16 mai 2019), la société Uber France a lancé sous le nom de « UberPop » un service consistant, grâce à une application mobile, à mettre en relation des particuliers entre eux, les uns conducteurs détenant un véhicule et les autres souhaitant être transportés. 2. S'estimant victimes d'actes de concurrence déloyale, le syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne ainsi que neuf cent onze chauffeurs de taxi professionnels ont assigné devant le tribunal d'instance la société Uber France ainsi que MM. Y... et IIS..., respectivement « General manager » et « Regional general manager » de la société Uber France, salariés n'exerçant aucun mandat social, afin d'obtenir leur condamnation in solidum au versement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts. 3. Les défendeurs ayant soulevé l'incompétence du tribunal d'instance, celui-ci a retenu que le litige relevait de la compétence exclusive du tribunal de commerce. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. La société Uber France et MM. Y... et IIS... font grief à l'arrêt de dire que le tribunal d'instance est compétent pour connaître du litige, alors « que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue de façon équitable et par un juge impartial ; que la motivation par laquelle la cour d'appel a infirmé le jugement entrepris consiste, sur près de deux pages et sous réserve de rares adaptations de style, en la reproduction littérale des conclusions du syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et des chauffeurs de taxi demandeurs ; qu'en statuant ainsi, par une apparence de motivation faisant peser un doute légitime sur son impartialité, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. Il résulte de la motivation de la décision attaquée que la cour d'appel ne s'est pas bornée à reproduire les conclusions du syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et des chauffeurs de taxi demandeurs mais y a ajouté des appréciations personnelles. 6. Le moyen n'est donc pas fondé. Et sur le second moyen Enoncé du moyen 7. La société Uber France et MM. Y... et IIS... font grief à l'arrêt de dire que le tribunal d'instance est compétent pour connaître du litige, alors « que la compétence d'attribution dont l'article L. 721-3, 2° du code de commerce investit la juridiction consulaire revêt le caractère d'une compétence exclusive à laquelle il ne saurait être fait échec par l'invocation, par le demandeur, de sa qualité de non-commerçant ; que ce chef de compétence englobe les actions émanant de tiers tendant à voir reconnaître la qualité de dirigeants de fait à de simples salariés d'une société commerciale et à mettre en jeu leur responsabilité personnelle, in solidum avec celle de la société, pour des faits présentant un lien direct avec la gestion de cette dernière ; qu'en l'espèce, il résultait des termes mêmes de l'assignation délivrée par le syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et les chauffeurs de taxi demandeurs contre la SAS Uber France, M. IIS..., et M. Y..., qu'il était demandé au tribunal saisi de se prononcer sur la qualité de dirigeant de fait de MM. IIS... et Y... puis sur la mise en jeu de leur responsabilité pour des faits de concurrence déloyale qu'ils auraient commis avec les moyens de la société Uber France ; qu'en jugeant néanmoins que la compétence que l'article L. 721-3, 2° du code de commerce attribue aux tribunaux de commerce pour connaître d'actes qui sont en lien direct avec la gestion de la société défenderesse devait en l'espèce être écartée dès lors que les demandeurs non-commerçants disposaient d'une option de compétence leur permettant de saisir la juridiction civile, la cour d'appel a violé l'article L. 721-3, 2° du code de commerce, ensemble l'article L. 221-4 du code de l'organisation judiciaire. » Réponse de la Cour 8. Après avoir rappelé que la compétence des juridictions consulaires peut être retenue lorsque les défendeurs sont des personnes qui n'ont ni la qualité de commerçant ni celle de dirigeant de droit d'une société commerciale dès lors que les faits qui leur sont reprochés sont en lien direct avec la gestion de cette société, c'est à bon droit que l'arrêt énonce que, toutefois, lorsque le demandeur est un non-commerçant, il dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce et qu'ayant constaté que les demandeurs n'avaient pas la qualité de commerçant, il en déduit qu'ils disposaient d'une option de compétence leur permettant de saisir valablement le juge civil d'une action en concurrence déloyale dirigée contre une société commerciale et deux de ses salariés. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Uber France et MM. Y... et IIS... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Uber France et MM. Y... et IIS... et les condamne à payer au syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et aux neuf cent dix défendeurs au pourvoi la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Uber France et MM. IIS... et Y.... PREMIER MOYEN DE CASSATION - sur la reproduction littérale des conclusions adverses - Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, d'AVOIR dit que le tribunal d'instance de Paris était compétent pour connaître du litige opposant les parties à la présence instance qui se poursuivra à la diligence du juge désigné, et d'AVOIR condamné la société Uber à payer au syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne une somme de 3.000 € et celle de 10 € à chacun des chauffeurs de taxi appelants au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE : « Il apparaît que le Syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi, appelant, est un syndicat professionnel dans le secteur du taxi. Les 911 chauffeurs de taxi coopérateurs, également appelants, sont des personnes physiques exerçant leur activité dans le secteur du transport particulier de personnes à titre onéreux dit « secteur du taxi » qui ont la qualité d'artisan. Ainsi, les appelants n'ont pas la qualité de commerçant, qu'il s'agisse du syndicat ou des chauffeurs de taxi de l'une des trois coopératives, qui, en application de la loi n° 2014-1104 du 1 octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, sont tous titulaires d'un contrat de location d'un véhicule équipé taxi. L'article L. 721-3 du code de commerce dispose : « Les tribunaux de commerce connaissent 1° Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ; 2° De celles relatives aux sociétés commerciales ; 3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes. Toutefois, les parties peuvent, au moment où elles contractent, convenir de soumettre à l'arbitrage les contestations ci-dessus énumérées. » Par application du 2° de l'article L. 721-3 du code de commerce relatif aux « contestations relatives aux sociétés commerciales », la jurisprudence a précisé que la compétence des juridictions consulaires peut être retenue lorsque les défendeurs sont des personnes qui n'ont ni la qualité de commerçant ni celle de dirigeant de droit d'une société commerciale, dès lors que les faits qui leur sont reprochés sont en lien direct avec la gestion de leur société. Il a en effet été admis que les faits reprochés à un non-commerçant qui découleraient d'actes en lien direct avec la gestion de sa société, peuvent ressortir de la compétence du tribunal de commerce. En revanche, ce texte et la jurisprudence visée par les intimés ne sauraient concerner les litiges pour lesquels le demandeur est un non-commerçant, puisque cette qualité lui confère le choix entre le tribunal civil et le tribunal de commerce. Le juge consulaire ne peut dès lors être considéré comme seul compétent dans un litige opposant un demandeur non-commerçant à un défendeur commerçant au seul motif que les faits qui lui sont reprochés se rattacheraient par un lien direct à la gestion de sa société, dès lors qu'une telle position reviendrait à supprimer le principe de l'option de compétence dont bénéficie en principe le demandeur non-commerçant entre le tribunal civil et le tribunal de commerce et ainsi de remettre en cause le principe fondamental, en vertu duquel le demandeur civil dispose toujours du choix de saisir, à sa convenance, les juridictions civiles ou commerciales, sauf clause attributive de compétence inexistante en l'espèce. Par 2464241.1 conséquent, en retenant que le critère du lien direct avec la gestion de la société emporte la compétence des tribunaux de commerce, en ce sens que le demandeur non-commerçant serait « privé de son droit d'actionner à son choix la partie commerçante devant le tribunal civil ou devant le tribunal commercial », le tribunal a commis une erreur de droit par violation de l'article L. 721-3 du code de commerce et une appréciation inexacte de la jurisprudence citée dans son jugement. Les appelants n'ayant pas la qualité de commerçant, qu'il s'agisse du syndicat ou des chauffeurs de taxi de l'une des trois coopératives, qui, en application de la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, sont tous titulaires d'un contrat de location d'un véhicule équipé taxi, et n'étant pas liés par un contrat commercial avec les intimés, ceux-ci bénéficient tous de l'option de compétence entre les juridictions civiles et consulaires. Il convient d'ajouter que si les actes de concurrence déloyale sont, de par leur nature, des agissements qui se rattachent à la gestion directe de la société UBER, toutefois l'action en concurrence déloyale ne relève pas exclusivement des juridictions commerciales. L'action est, en l'espèce, exclusivement fondée sur le préjudice qui pourrait résulter du délit retenu par la juridiction pénale devant laquelle aucune demande indemnitaire n'a été formulée. Cependant, le fait que les intimés relevant normalement du juge commercial aient commis des fautes en lien direct avec la gestion de la société ne saurait donner une qualité commerciale aux appelants lesquels disposent, face à un adversaire commerçant pouvant relever de la juridiction consulaire, d'une option de compétence. Le syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et les 911 chauffeurs membres des sociétés coopératives pouvaient donc opter pour la juridiction civile, et en l'espèce le tribunal d'instance de Paris. Le jugement sera par conséquent infirmé ». ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue de façon équitable et par un juge impartial ; que la motivation par laquelle la Cour d'appel a infirmé le jugement entrepris consiste, sur près de deux pages et sous réserve de rares adaptations de style, en la reproduction littérale des conclusions du syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et des chauffeurs de taxi demandeurs ; qu'en statuant ainsi, par une apparence de motivation faisant peser un doute légitime sur son impartialité, la Cour d'appel a violé l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'Homme, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ; SECOND MOYEN DE CASSATION - sur la compétence - Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, d'AVOIR dit que le tribunal d'instance de Paris était compétent pour connaître du litige opposant les parties à la présence instance qui se poursuivra à la diligence du juge désigné, et d'AVOIR condamné la société Uber à payer au syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne une somme de 3.000 € et celle de 10 € à chacun des chauffeurs de taxi appelants au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE : « Il apparaît que le Syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi, appelant, est un syndicat professionnel dans le secteur du taxi. Les 911 chauffeurs de taxi coopérateurs, également appelants, sont des personnes physiques exerçant leur activité dans le secteur du transport particulier de personnes à titre onéreux dit « secteur du taxi » qui ont la qualité d'artisan. Ainsi, les appelants n'ont pas la qualité de commerçant, qu'il s'agisse du syndicat ou des chauffeurs de taxi de l'une des trois coopératives, qui, en application de la loi n° 2014-1104 du 1 octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, sont tous titulaires d'un contrat de location d'un véhicule équipé taxi. L'article L. 721-3 du code de commerce dispose : « Les tribunaux de commerce connaissent 1° Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ; 2° De celles relatives aux sociétés commerciales ; 3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes. Toutefois, les parties peuvent, au moment où elles contractent, convenir de soumettre à l'arbitrage les contestations ci-dessus énumérées. » Par application du 2° de l'article L. 721-3 du code de commerce relatif aux « contestations relatives aux sociétés commerciales », la jurisprudence a précisé que la compétence des juridictions consulaires peut être retenue lorsque les défendeurs sont des personnes qui n'ont ni la qualité de commerçant ni celle de dirigeant de droit d'une société commerciale, dès lors que les faits qui leur sont reprochés sont en lien direct avec la gestion de leur société. Il a en effet été admis que les faits reprochés à un non-commerçant qui découleraient d'actes en lien direct avec la gestion de sa société, peuvent ressortir de la compétence du tribunal de commerce. En revanche, ce texte et la jurisprudence visée par les intimés ne sauraient concerner les litiges pour lesquels le demandeur est un non-commerçant, puisque cette qualité lui confère le choix entre le tribunal civil et le tribunal de commerce. Le juge consulaire ne peut dès lors être considéré comme seul compétent dans un litige opposant un demandeur non-commerçant à un défendeur commerçant au seul motif que les faits qui lui sont reprochés se rattacheraient par un lien direct à la gestion de sa société, dès lors qu'une telle position reviendrait à supprimer le principe de l'option de compétence dont bénéficie en principe le demandeur non-commerçant entre le tribunal civil et le tribunal de commerce et ainsi de remettre en cause le principe fondamental, en vertu duquel le demandeur civil dispose toujours du choix de saisir, à sa convenance, les juridictions civiles ou commerciales, sauf clause attributive de compétence inexistante en l'espèce. Par conséquent, en retenant que le critère du lien direct avec la gestion de la société emporte la compétence des tribunaux de commerce, en ce sens que le demandeur 2464241.1 non-commerçant serait « privé de son droit d'actionner à son choix la partie commerçante devant le tribunal civil ou devant le tribunal commercial », le tribunal a commis une erreur de droit par violation de l'article L. 721-3 du code de commerce et une appréciation inexacte de la jurisprudence citée dans son jugement. Les appelants n'ayant pas la qualité de commerçant, qu'il s'agisse du syndicat ou des chauffeurs de taxi de l'une des trois coopératives, qui, en application de la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, sont tous titulaires d'un contrat de location d'un véhicule équipé taxi, et n'étant pas liés par un contrat commercial avec les intimés, ceux-ci bénéficient tous de l'option de compétence entre les juridictions civiles et consulaires. Il convient d'ajouter que si les actes de concurrence déloyale sont, de par leur nature, des agissements qui se rattachent à la gestion directe de la société UBER, toutefois l'action en concurrence déloyale ne relève pas exclusivement des juridictions commerciales. L'action est, en l'espèce, exclusivement fondée sur le préjudice qui pourrait résulter du délit retenu par la juridiction pénale devant laquelle aucune demande indemnitaire n'a été formulée. Cependant, le fait que les intimés relevant normalement du juge commercial aient commis des fautes en lien direct avec la gestion de la société ne saurait donner une qualité commerciale aux appelants lesquels disposent, face à un adversaire commerçant pouvant relever de la juridiction consulaire, d'une option de compétence. Le syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et les 911 chauffeurs membres des sociétés coopératives pouvaient donc opter pour la juridiction civile, et en l'espèce le tribunal d'instance de Paris. Le jugement sera par conséquent infirmé ». ALORS QUE la compétence d'attribution dont l'article L.721-3, 2° du code de commerce investit la juridiction consulaire revêt le caractère d'une compétence exclusive à laquelle il ne saurait être fait échec par l'invocation, par le demandeur, de sa qualité de non-commerçant ; que ce chef de compétence englobe les actions émanant de tiers tendant à voir reconnaître la qualité de dirigeants de fait à de simples salariés d'une société commerciale et à mettre en jeu leur responsabilité personnelle, in solidum avec celle de la société, pour des faits présentant un lien direct avec la gestion de cette dernière ; qu'en l'espèce, il résultait des termes mêmes de l'assignation délivrée par le syndicat des sociétés coopératives de chauffeurs de taxi de la région parisienne et les chauffeurs de taxi demandeurs contre la SAS Uber France, Monsieur IIS..., et Monsieur Y... qu'il était demandé au tribunal saisi de se prononcer sur la qualité de dirigeant de fait de Messieurs IIS... et Y... puis sur la mise en jeu de leur responsabilité pour des faits de concurrence déloyale qu'ils auraient commis avec les moyens de la société Uber France ; qu'en jugeant néanmoins que la compétence que l'article L.721-3, 2° du code de commerce attribue aux tribunaux de commerce pour connaître d'actes qui sont en lien direct avec la gestion de la société défenderesse devait en l'espèce être écartée dès lors que les demandeurs non-commerçants disposaient d'une option de compétence leur permettant de saisir la juridiction civile, la Cour d'appel a violé l'article L.721-3, 2° du code de commerce, ensemble l'article L.221-4 du code de l'organisation judiciaire.
Si la compétence des juridictions consulaires peut être retenue lorsque les défendeurs sont des personnes qui n'ont ni la qualité de commerçant ni celle de dirigeant de droit d'une société commerciale dès lors que les faits qui leur sont reprochés sont en lien direct avec la gestion de cette société, le demandeur non-commerçant dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce
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COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Cassation Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 741 FS-P+B Pourvoi n° K 19-13.402 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 NOVEMBRE 2020 1°/ M. C... G..., domicilié [...] , 2°/ M. O... L..., domicilié [...] , 3°/ M. R... D..., domicilié [...] , 4°/ M. B... H..., domicilié [...] , 5°/ M. I... N..., domicilié [...] , 6°/ Mme S... A..., domiciliée [...] , 7°/ M. X... K..., domicilié [...] , 8°/ M. W... M..., domicilié [...] , 9°/ M. U... E..., domicilié [...] , 10°/ M. O... P..., domicilié [...] , ont formé le pourvoi n° K 19-13.402 contre l'arrêt rendu le 6 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige les opposant à la Société civile des Mousquetaires, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de MM. G..., L..., D..., H..., N..., K..., M..., E..., P... et de Mme A..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la Société civile des Mousquetaires, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, Mmes Darbois, Poillot-Peruzzetto, Champalaune, Daubigney, Michel-Amsellem, M. Ponsot, Mme Boisselet, M. Mollard, conseillers, Mmes Le Bras, Lion, Lefeuvre, Tostain, Bessaud, M. Boutié, Mme Bellino, conseillers référendaires, Mme Beaudonnet, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 février 2019), MM. G..., L..., D..., H..., N..., K..., M..., E..., P... et Mme A... (les consorts G...), devenus associés de la Société civile des Mousquetaires (la SCM) entre 1987 et 1999, en ont été exclus par des assemblées générales entre 1998 et 2009, lesquelles ont fixé la valeur unitaire de leurs parts sociales ainsi que les conditions de leur remboursement. 2. Contestant cette évaluation, les consorts G... ont, par des ordonnances des 7 mars 2007 et 1er février 2010, obtenu la désignation en justice d'un expert aux fins de fixation de la valeur de leurs droits sociaux. L'expert désigné ayant déposé son rapport le 25 février 2011, les consorts G... ont assigné la SCM en remboursement de leurs parts sur la base de la valeur déterminée par l'expert. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. Les consorts G... font grief à l'arrêt d'annuler les rapports de l'expert et de rejeter leurs demandes, alors « que l'article 1843-4 du code civil, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, n'est applicable qu'aux expertises ordonnées postérieurement à la date de son entrée en vigueur, soit le 3 août 2014 ; que pour dire que la nouvelle rédaction de ce texte était applicable à la situation des exposants, la cour d'appel a retenu que les rapports déposés par le tiers évaluateur, même s'ils étaient antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 2014, avaient toujours été contestés par la SCM et n'avaient pas encore produit d'effet définitif en l'absence de décision les concernant ; qu'en statuant de la sorte, quand il résultait de ses constatations que l'expert avait été désigné par ordonnance intervenue antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 31 juillet 2014, et qu'il avait de surcroît achevé sa mission avant cette date, la cour d'appel a violé l'article 1843-4 du code civil, par refus d'application s'agissant de la version antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014, et par fausse application pour la version postérieure à cette disposition, ensemble l'article 2 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 2 du code civil et l'article 1843-4 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 31 juillet 2014 : 5. Selon le premier de ces textes, la loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif. Les effets légaux d'un contrat étant régis par la loi en vigueur à la date où ils se produisent, l'article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, est applicable aux expertises ordonnées à compter du 3 août 2014, date de son entrée en vigueur. 6. Pour annuler les rapports d'expertise du 25 février 2011 et rejeter les demandes formées par les consorts G..., l'arrêt relève qu'il résulte des termes du rapport au Président de la République présentant les dispositions de l'ordonnance du 31 juillet 2014 que le législateur a entendu revenir sur l'interprétation extensive qui était faite par la Cour de cassation des dispositions de l'article 1843-4 pour faire prévaloir les dispositions statutaires quand celles-ci permettent de déterminer le prix des parts, notamment dans le cas d'exclusion d'un associé de société civile tel que l'associé de la SCM. Il ajoute que le législateur a entendu répondre à un impérieux motif d'intérêt général de sécurité juridique et rendre ainsi le nouveau texte applicable aux instances en cours même en cause d'appel, dans le but de corriger sans délai une interprétation juridictionnelle extensive de l'ancienne rédaction, sujette à controverse et de nature à générer un important contentieux. Il en déduit que la nouvelle rédaction est applicable à la situation des consorts G... dès lors que le rapport déposé par le tiers évaluateur, même s'il est antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 2014, a toujours été contesté par la SCM et n'a pas encore produit d'effet définitif en l'absence de décision les concernant. 7. En statuant ainsi, après avoir constaté que l'expert avait été désigné le 7 mars 2007 et le 1er février 2010, de sorte que l'article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 31 juillet 2014, était applicable, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 8. Les consorts G... font grief à l'arrêt d'annuler les rapports de M. F... en date du 25 février 2011 et de rejeter l'ensemble de leurs demandes, alors « que l'expert désigné en application de l'article 1843-4 du code civil a toute latitude pour déterminer la valeur des actions selon les critères qu'il juge opportuns ; qu'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés des premiers juges, que la contestation des consorts G... sur le prix des parts offert par la SCM en application des dispositions du règlement intérieur et des statuts de la société "ne peut donc donner lieu, y compris sous l'empire de l'article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014, qu'à une évaluation conforme aux dispositions contractuelles librement consenties", la cour d'appel a violé l'article 1843-4 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014. » Réponse de la Cour 9. Vu l'article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 31 juillet 2014 : 10. Il résulte de ce texte qu'il appartient à l'expert de déterminer lui-même, selon les critères qu'il juge appropriés à l'espèce, sans être lié par la convention ou les directives des parties, la valeur des droits sociaux litigieux. 11. Pour statuer comme il fait, l'arrêt retient qu'en devenant associés de la SCM, les consorts G... ont souscrit aux règles des statuts et du règlement intérieur qui stipule, en son article 7, le remboursement de la valeur des parts au prix déterminable selon les modalités qu'il prévoit. Il en déduit que la contestation par les consorts G... du prix des parts offert par la SCM en application de ces stipulations ne peut donner lieu, y compris sous l'empire de l'article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014, qu'à une évaluation conforme aux dispositions contractuelles librement consenties. 12. En statuant ainsi, alors que l'article 1843-4 du code civil est applicable aux cessions de droits sociaux imposées par les statuts ou le règlement intérieur de la société, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne la Société civile des Mousquetaires aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société civile des Mousquetaires et la condamne à payer à MM. G..., L..., D..., H..., N..., K..., M..., E..., P... et Mme A... la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour MM. G..., L..., D..., H..., N..., K..., M..., E..., P... et de Mme A.... Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir annulé les rapports de M. F... en date du 25 février 2011, d'avoir rejeté l'ensemble des demandes formées par les exposants, et d'avoir condamné les exposants aux dépens et frais d'expertise ; Aux motifs propres qu'« il convient de s'interroger en premier lieu sur l'applicabilité de la nouvelle version de l'article 1843-4 du code civil ; que les raisons ayant conduit à modifier la rédaction de l'article 1843-4 du code civil sont rappelées dans le rapport au Président de la République ayant précédé l'ordonnance du 31 juillet 2014 dans les termes suivants : "Chapitre IX : Dispositions relatives à la valorisation des droits sociaux en cas de cession : La présente ordonnance prévoit de renforcer la sécurité juridique des cessions de droits sociaux en cantonnant le rôle de l'expert de l'article 1843-4 du code civil (article 37). En effet, les dispositions de l'article 1843-4 du code civil ont pour finalité de permettre à un processus de cession ou de rachat impose d'aller à son terme en dépit d'une contestation entre le cédant et le cessionnaire ; Sur la-valeur des droits sociaux : le champ d'application de ce texte, à l'origine dédié aux hypothèses de cessions prévues par la loi, a été progressivement étendu aux hypothèses de cessions prévues par les statuts. Dès lors, lorsque les modalités de valorisation des droits sociaux sont clairement définies par les parties à ces contrats, l'intervention d'un expert, notamment tenu d'une obligation d'impartialité et d'objectivité, se heurte à la liberté contractuelle des parties. Le fait que la valorisation proposée par l'expert prime sur celle envisagée par les parties crée pour ces derniers une insécurité juridique. Ces difficultés réelles que rencontrent les rédacteurs d'actes génèrent un contentieux important ainsi qu'en témoignent les nombreux arrêts rendus par la Cour de cassation ces dernières années, arrêts qui donnent lieu à des interprétations divergentes, ce qui in fine nuit à l'attractivité du droit français. Pour remédier à ces obstacles juridiques, il a été prévu, d'une part, de cantonner ce texte à son rôle d'origine qui était de prévoir une règle de procédure de désignation d'un expert en cas de contestation du prix de cession ou de rachat de droits sociaux et, d'autre part, de définir des règles de fond en vue de la valorisation de ces droits. Dans un premier temps, le nouveau texte prévoit les conditions et modalités de désignation d'un expert applicables aux cas expressément prévus par la loi (I. Cas légaux), puis, dans un second temps, il définit celles qui sont applicables aux opérations de cession et de rachat prévues dans les statuts sans que la clause prévoyant ces opérations ne stipule valablement de modalités de calcul du prix (II. Cas statutaires non légaux en cas d'inexistence de clause de prix ou en présence d'une clause invalide). Afin de renforcer la sécurité juridique, il est prévu de laisser la pleine mesure à la liberté contractuelle. Ainsi, dans le premier cas, s'il existe des modalités de valorisation statutaires ou extra-statutaires, selon le cas, l'expert désigné est tenu d'appliquer les modalités de détermination du prix prévues par les parties, aussi bien dans les statuts que dans des pactes d'associés. Dans le second cas, il est prévu de faire application, lorsqu'elles existent, des règles de valorisation figurant dans des conventions extra-statutaires, comme c'est déjà le cas depuis un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 11 mars 2014, lorsque les règles de valorisation figurent dans un pacte d'associés. Une telle mesure constitue un juste équilibre entre la nécessaire protection des associés ou actionnaires auxquels la cession ou le rachat sont imposés et le respect des conventions librement consenties, que ce soit dans les statuts ou dans un pacte extra-statutaire" ; qu'il résulte de ce qui précède que le législateur a entendu revenir sur l'interprétation extensive qui était faite par la cour suprême des dispositions de l'article 1843-4 pour faire prévaloir les dispositions statutaires quand celles-ci permettent de déterminer le prix des parts, notamment dans le cas d'exclusion d'un associé de société civile comme l'était M. Q... [lire : comme l'étaient les demandeurs], associé[s] de la SCM ; que le législateur a entendu répondre à un impérieux motif d'intérêt général de sécurité juridique et rendre ainsi le nouveau texte applicable aux instances en cours même en cause d'appel, dans le but de corriger sans délai une interprétation juridictionnelle extensive de 1'ancienne rédaction, sujette à controverse et de nature à générer un important contentieux ; que la nouvelle rédaction est ainsi applicable à la situation de M. Q... [lire : des exposants] dès lors que le rapport déposé par le tiers évaluateur, même s'il est antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 2014, a toujours été contesté par la SCM et n'a pas encore produit d'effet définitif en l'absence de décision le concernant ; qu'aux termes de l'article 16.4 des statuts, intitulé "Remboursement des parts des associes retrayants ou exclus", il est prévu que l'associé qui se retire ou est exclu est remboursé, conformément à l'article 48 de la loi du 24 juillet 1867 de la fraction libérée et non amortie de son apport et, s'il y a lieu, de sa quote-part dans les bénéfices de la société mis en réserves, telles que ces réserves figurent sur le dernier bilan régulièrement approuvé ; que l'assemblée générale extraordinaire pourra toutefois décider que le montant du remboursement dû à l'associé qui se retire ou est exclu sera fixé a la valeur de souscription des parts, déterminée par application des dispositions de l'article 6 du règlement intérieur, dans la mesure où cette valeur est supérieure au montant résultant de l'application de l'alinéa qui précède ; que l'assemblée qui constate la démission ou prononce l'exclusion fixe alors les modalités et délais de remboursement, à moins que ces modalités aient été fixées dans le règlement intérieur ; que, compte tenu de la clause de variabilité du capital, le délai de remboursement peut parfaitement être fixé à cinq années ; qu'en cas de contestation survenant avant que la valeur de remboursement des parts soit entérinée par le paiement, partiel ou total, des sommes dues à l'associé démissionnaire ou exclu, ce dernier pourra convenir avec la société de la désignation d'un expert ou, à défaut d'accord sur le choix de l'expert, solliciter cette désignation auprès du président du tribunal de grande instance du siège social conformément aux modalités prévues par l'article 1843-4 du code civil ; qu'en tout état de cause, l'expert désigné déterminera la valeur de remboursement dans le respect des statuts et du règlement intérieur ; que l'article 7 du règlement intérieur, auquel les appelants ont nécessairement souscrit en adhérant au groupement et en devenant associé de la SCM, dispose que "le présent règlement intérieur a été établi de bonne foi par les fondateurs. Il est clair que tous les associés qui sont venus se joindre à eux ont adhéré en toute sincérité, non seulement aux clauses statutaires, mais également aux clauses dudit règlement ; que, par conséquent, pour toutes transactions concernant les parts qui viendraient à intervenir entre associé et entre associes et la société, la valeur retenue sera celle fixée comme indiqué ci-dessus ainsi que chaque associé s'y engage définitivement" ; qu'il existe une logique d'ensemble dans le fonctionnement du groupe Intermarché et le mode d'évaluation statutaire des parts de la société holding SCM, consistant, dans leur intérêt, à faire bénéficier les associés entrant d'un prix de souscription des parts beaucoup plus intéressant que le prix résultant d'une appréciation strictement économique ; que cette approche a pour corollaire nécessaire, afin de préserver l'équilibre du système, un prix de sortie statutaire valorisant substantiellement les parts acquises mais se situant à un niveau également moins élevé que leur valeur économique à ce moment ; que dans ces conditions les appelants, venant contester le prix versé pour leurs parts, ne peuvent prétendre toucher, contrairement à [leurs] engagements, le prix qui a été déterminé par le tiers évaluateur sans que soit tenu aucun compte des clauses statutaires en violation des dispositions de l'article 1843-4 du code civil ; que leur demande en homologation des rapports du tiers évaluateur ne peut dès lors être accueillie ; qu'ils doivent être déboutés de leurs prétentions et le jugement entrepris confirmé » ; Et aux motifs, supposément adoptés des premiers juges, que « sur la demande principale de paiement des parts sociales : Sur la nullité des rapports du 25 février 2011 du tiers évaluateur Dans sa version applicable entre le 1er juillet 1978 et le 03 août 2014, l'article 1843-4 du code civil dispose : « Dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible. » Dans sa version applicable depuis le 03 août 2014, issue de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, prise en application de l'article 3 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, l'article 1843-4 du code civil dispose désormais que : « I. - Dans les cas où la loi renvoie au présent article pour fixer les conditions de prix d'une cession des droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible. L'expert ainsi désigné est tenu d'appliquer, lorsqu'elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts de la société ou par toute convention liant les parties. II- Dans les cas où les statuts prévoient la cession des droits sociaux d'un associé ou le rachat de ces droits par la société sans que leur valeur soit ni déterminée ni déterminable, celle-ci est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné dans les conditions du premier alinéa. L'expert ainsi désigné est tenu d'appliquer, lorsqu'elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par toute convention liant les parties. » Concernant la loi applicable au présent litige, l'article 1er du code civil dispose que les lois entrent en vigueur à la date qu'elles fixent ou à défaut le lendemain de leur publication. L'article 2 du même code précise que la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif. M. F... a été désigné en application de l'article 1843-4 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014 et a déposé ses deux rapports le 25 février 2011, soit plus de trois ans avant l'entrée en vigueur des dispositions de l'ordonnance précitée modifiant le texte de l'article 1843-4 qui est d'ordre public. La désignation du tiers évaluateur et l'établissement de ses deux rapports sont donc intervenus sous l'empire de l'ancienne rédaction de l'article 1843-4 du code civil et en application des règles alors en vigueur, qui ne subordonne pas le recours au tiers évaluateur en cas de contestation de la valeur de rachat des parts d'une société civile à capital variable, telle la SCM, en cas d'exclusion d'un associé, à ce qu'il soit prévu par la loi. De même, dans sa version en vigueur lors de la désignation de M. F... le 1er février 2010 et le 17 mai 2010, le texte n'impose au tiers évaluateur aucune méthode d'évaluation des droits sociaux. La validité des rapports d'expertise de M. F... ne saurait donc être remise en cause du seul fait de la modification par la loi nouvelle du champ d'application de l'article 1843-4 du code civil, qui a été restreint, et du caractère impératif donné par le législateur à la méthode d'évaluation prévue par les statuts ou par les conventions liant les parties qui s'impose désormais, lorsqu'elle existe, au tiers évaluateur. Par ailleurs, il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation rendue sous l'empire de l'ancien article 1843-4 du code civil, dont la lettre se limitait à permettre la désignation, par le président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible, d'un tiers évaluateur auquel les parties s'en remettent pour déterminer la valeur de droits sociaux -contestée, à défaut pour elles de s'être accordées sur une telle désignation, que : il appartient au seul tiers désigné de procéder à l'évaluation des droits sociaux, la juridiction ne pouvant y procéder elle-même, seul le tiers évaluateur détermine les critères qu'il juge les plus appropriés pour fixer la valeur des droits, le choix de la méthode ne pouvant lui être imposé, l'évaluation fixée par le tiers évaluateur s'impose aux parties à moins qu'il ne soit établi dans le rapport une erreur grossière d'appréciation. Cependant, il doit être rappelé que rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, prise en application de l'article 3 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises que les modifications apportées à l'article 1843-4 du code civil procèdent d'une volonté affirmée de contrer l'interprétation extensive donnée à la rédaction antérieure de ce texte par la jurisprudence, tant sur son champ d'application que sur les pouvoirs conférés au tiers évaluateur dans sa mission de valorisation des droits sociaux et ce, dans un objectif de renforcer la sécurité juridique en laissant sa pleine mesure à la liberté contractuelle. Le législateur a ainsi entendu clairement cantonner ce texte à ce qu'il a estimé être son rôle d'origine, à savoir « une règle de procédure de désignation d'un expert en cas de contestation du prix de cession ou de rachat de droits sociaux » et définir des règles de fond en vue de la valorisation de ces droits de sorte que la valorisation proposée par le tiers évaluateur ne puisse primer sur celle envisagée par les parties. Or, les dispositions d'ordre public de l'article 1843-4 ancien du code civil n'écartent pas l'application par le tiers évaluateur des méthodes d'évaluation arrêtées conventionnellement par les parties et ne confèrent pas à celui-ci, lorsqu'il est désigné par le juge, une mission différente de celle résultant du mandat qui lui aurait été confié par les parties elles-mêmes si elles étaient parvenues à s'accorder sur son nom. Enfin, il est indifférent, pour apprécier l'existence d'une erreur grossière d'évaluation, que le tiers évaluateur ait accompli sa mission avant l'entrée en vigueur du nouvel article 1843-4 du code civil. A ce titre, y compris sous l'empire de l'article 1843-4 ancien du code civil, ni la date des statuts ou du règlement intérieur, ni l'ordonnance désignant le tiers, ni le dépôt de son rapport déterminant la valeur des parts, ne sont constitutifs de droits acquis sur le prix de remboursement à dire d'expert, dès lors que l'évaluation faite par celui-ci ne s'impose aux parties que si elle n'est pas arguée d'erreur grossière et si l'existence d'une telle erreur est écartée par le juge. En l'espèce, la SCM est une société civile à capital variable régie par les dispositions des articles L. 231-1 et suivants du code de commerce, codifiant les dispositions des articles 48 et suivants relatifs aux sociétés à capital variable de la loi du 24 juillet 1867 sur les sociétés commerciales. Aux termes de ces textes, il peut être Stipulé dans ses statuts que le capital social est susceptible d'augmentation par des versements successifs des associés ou l'admission d'associés nouveaux et de diminution par la reprise totale ou partielle des apports. En outre, dans une société à capital variable, chaque associé peut se retirer de la société lorsqu'il le juge convenable et il peut également être stipulé que l'assemblée générale a le droit de décider, à la majorité fixée pour la modification des statuts, que l'un ou plusieurs des associés cessent de faire partie de la société. L'associé qui cesse de faire partie de la société, soit par l'effet de sa volonté, soit par suite de décision de l'assemblée générale, reste tenu, pendant cinq ans, envers les associés et envers les tiers, de toutes les obligations existant au moment de sa retraite. En l'espèce, l'article 17 des statuts de la SCM mis à jour en 1997 prévoit le recours à un tiers évaluateur en cas de cession de parts par un associé donnant lieu à contestation sur la valeur d'achat proposée ainsi qu'en cas de démission de l'associé et achat des parts par la société par diminution du capital effectif et des réserves. Les statuts précisent que la valeur retenue est celle déterminée par le règlement intérieur et à défaut celle fixée par l'assemblée des associés qui statue sur la démission, avec en cas de contestation une détermination de la valeur des parts à dire d'expert en cas de contestation, comme indiquée en matière de cession. L'article 6 du règlement intérieur dans sa version du 15 juin 1993 prévoit ainsi une méthode de valorisation des parts proposée chaque année par la gérance en s'en tenant aux critères suivants : la valeur indicative de la part sera celle de l'année d'avant, majorée d'un pourcentage représentant une plus-value de dix pour cent plus l'inflation mais toutefois cette majoration n'interviendra seulement que dans la mesure où le résultat cumulé et/ou consolidé d'ITM Entreprises et de ses filiales sera au moins égal, en valeur absolue, à l'augmentation des parts née de l'application de la formule ci-dessus, l'assemblée générale extraordinaire pourra toujours modifier cette disposition et choisir d'autres modalités. Son article 7 stipule que les associés qui sont venus se joindre aux membres fondateurs ont adhéré en toute sincérité aux clauses statutaires mais également aux clauses dudit règlement et que « Par conséquent pour toutes transactions concernant les parts qui viendraient à intervenir entre associés ou entre associés et la société, la valeur-retenue sera celle fixée comme indiquée ci-dessus ainsi que chaque associé s'y engage définitivement ». Dès lors, il ressort des statuts et du règlement intérieur de la SCM dans leur version en vigueur lors de l'exclusion en 1998 et 1999 des consorts H..., E..., N... et G..., auxquels ils ne contestent pas avoir adhéré, que ceux-ci prévoient une méthode Permettant de déterminer la valeur des droits sociaux en cas de rachat de ceux-ci par la société, s'imposant aux associés, et qui s'applique en cas d'exclusion de l'associé de la SCM lorsqu'il ne remplit plus les conditions pour conserver cette qualité et ce, conformément au régime légal des sociétés à capital variable. De même, les statuts et le règlement intérieur ultérieurement mis à jour auxquels les consorts A..., P..., D..., M..., K... et L... ont adhéré et qui étaient en vigueur lors de leur exclusion contiennent une méthode de valorisation des parts en cas d'exclusion d'un associé. L'article 16-4 des statuts mis à jour au 26 novembre 2002, relatif au remboursement des parts des associés retrayants ou exclus, prévoit que : « L'associé qui se retire ou est exclu est remboursé, conformément à l'article 48 de la loi du 24 juillet 1867 : de la fi-action libérée et non amortie de son apport, et s'il y a lieu, de sa quote-part clans les bénéfices de la société mis en réserves, telles que ces réserves figurent sur le dernier bilan régulièrement approuvé. L'assemblée générale extraordinaire pourra toutefois décider que le montant du remboursement dû à l'associé qui se retire ou est exclus sera fixé à la valeur de souscription des parts, déterminée par application des dispositions de l'article 6 du règlement intérieur, dans la mesure où cette valeur est supérieure au montant résultant de l'application de l'alinéa qui précède. L'assemblée qui constate la démission ou prononce l'exclusion fixe alors les modalités et délais de remboursement, à moins que ces modalités aient été fixées dans le règlement intérieur. Compte-tenu de la clause de variabilité du capital, le délai de remboursement peut parfaitement être fixé à cinq années. En cas de contestation, survenant avant que la valeur de remboursement des parts soit entérinée par le paiement, partiel ou total, des sommes dues à l'associé démissionnaire ou exclu, ce dernier pourra convenir avec la société de la désignation d'un expert ou, à défaut d'accord sur le choix de l'expert, solliciter cette désignation auprès du Président du Tribunal de Grande Instance du siège social conformément aux modalités prévues par l'article 1843-4 du Code civil. En tout état de cause, l'expert désigné déterminera la valeur de remboursement dans le respect des Statuts et du Règlement Intérieur. » L'article 6 du règlement intérieur mis à jour précise en outre que la gérance propose chaque année à l'assemblée générale une valeur de souscription des parts qui pourra être également retenue par l'assemblée générale, conformément à l'article 16-4 des statuts, comme valeur de remboursement des parts des associés démissionnaires ou exclus. L'article 7 dudit règlement intérieur prévoit toujours que, pour toutes transactions concernant les parts qui viendraient à intervenir entre associés ou entre associés et la société, « la valeur retenue sera celle fixée comme indiquée ci-dessus ainsi que chaque associé s'y engage définitivement. » Ainsi, en devenant associés de la SCM, les consorts G..., A..., H..., P..., E..., N..., D..., M..., K... et L... ont souscrit à ces règles qui constituent la loi des parties et ont expressément accepté, qu'en cas d'exclusion, conformément à l'article 7 dudit règlement, le remboursement de la valeur de leurs parts se ferait au prix déterminable selon les modalités fixées dans ces éléments à valeur contractuelle. Leur contestation sur le prix des parts offert par la SCM en application de ces dispositions ne peut donc donner lieu, y compris sous l'empire de l'article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014, qu'à une évaluation conforme aux dispositions contractuelles librement consenties. En outre, cette méthode est expressément imposée par les statuts de la SCM au tiers évaluateur à compter de 2002, étant rappelé que l'article 7 du règlement intérieur a toujours prévu un mode de calcul de la valeur des droits en cas de rachat par la société. Or, il n'est pas contesté que M. F... dans ses rapports du 25 février 2011 a écarté la méthode d'évaluation statutaire pour chercher à établir la valeur économique réelle des parts sociales de la SCM en retenant une méthode combinant la valeur mathématique ou patrimoniale des parts sociales (coefficient 2), une approche par la valeur du marché boursier (coefficient 1) et la méthode « Price 10 Book » (coefficient 1) où la valorisation se fait par comparaison entre la valeur des capitaux propres comptables avec la valeur de capitalisation boursière. L'évaluation proposée par M. F... a toujours été contestée par la SCM et le constat de ce que le tiers évaluateur a retenu une valeur autre que celle fixée par les statuts et convenue entre les parties, suffit à caractériser une erreur grossière d'appréciation. L'erreur grossière prive de tout effet l'évaluation des parts réalisée par M. F... dont les rapports sont annulés sans que le tribunal ne puisse se substituer au tiers évaluateur pour fixer la valeur de remboursement ces parts. Par conséquent, les rapports du 25 février 2011 sont annulés et les consorts G..., A..., H..., P..., E..., N..., D..., M..., K... et L... sont déboutés de l'ensemble de leurs demandes ; sur les demandes accessoires : en application de l'article 696 du code de procédure civile, les consorts G..., A..., H..., P..., E..., N..., D..., M..., K... et L..., qui succombent à l'instance, sont condamnés aux dépens, les frais de l'expertise ordonnée au regard des dispositions statutaires en raison du désaccord entre les parties sur la valeur des parts sociales étant supportés par moitié par les anciens associés d'une part et la SCM d'autre part ( ) » ; Alors 1°) que l'article 1843-4 du code civil, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, n'est applicable qu'aux expertises ordonnées postérieurement à la date de son entrée en vigueur, soit le 3 août 2014 ; que pour dire que la nouvelle rédaction de ce texte était applicable à la situation des exposants, la cour d'appel a retenu que les rapports déposés par le tiers évaluateur, même s'ils étaient antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 2014, avaient toujours été contestés par la SCM et n'avaient pas encore produit d'effet définitif en l'absence de décision les concernant ; qu'en statuant de la sorte, quand il résultait de ses constatations (p. 4) que l'expert avait été désigné par ordonnance intervenue antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 31 juillet 2014, et qu'il avait de surcroît achevé sa mission avant cette date, la cour d'appel a violé l'article 1843-4 du code civil, par refus d'application s'agissant de la version antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014, et par fausse application pour la version postérieure à cette disposition, ensemble l'article 2 du code civil ; Alors 2°) que l'expert désigné en application de l'article 1843-4 du code civil a toute latitude pour déterminer la valeur des actions selon les critères qu'il juge opportuns ; qu'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés des premiers juges, que la contestation des exposants sur le prix des parts offert par la SCM en application des dispositions du règlement intérieur et des statuts de la société « ne peut donc donner lieu, y compris sous l'empire de l'article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014, qu'à une évaluation conforme aux dispositions contractuelles librement consenties », la cour d'appel a violé l'article 1843-4 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 31 juillet 2014 ; Alors 3°) que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que pour rejeter les demandes des exposants, la cour d'appel a retenu que ces derniers, qui avaient contesté le prix versé pour leurs parts après versement d'un acompte, ne pouvaient prétendre percevoir, contrairement à leurs engagements, le prix qui a été déterminé par le tiers évaluateur sans qu'il soit tenu compte des clauses statutaires, en violation des dispositions de l'article 1843-4 du code civil ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser la renonciation des exposants à contester les modalités de détermination du prix de leurs parts par la société civile des Mousquetaires, la cour d'appel a violé l'article 1134 (devenu 1103) du code civil, ensemble le principe selon lequel la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer.
Selon l'article 2 du code civil, la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif. Les effets légaux d'un contrat étant régis par la loi en vigueur à la date où ils se produisent, l'article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, est applicable aux expertises ordonnées à compter du 3 août 2014, date de son entrée en vigueur
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SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Rejet Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1049 F-P+B Pourvoi n° M 19-15.795 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 NOVEMBRE 2020 M. E... A..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° M 19-15.795 contre l'arrêt rendu le 20 novembre 2018 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Hirou, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Comptoir automobile réunionnais, 2°/ à l'UNEDIC, délégation régionale AGS-Centre-Ouest, département de La Réunion, dont le siège est [...] , défenderesses à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. A..., de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Hirou, ès qualités, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Mariette, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 20 novembre 2018), par protocole d'accord du 4 décembre 2003, la majorité des actions constituant le capital de la société Comptoir automobile réunionnais (la société CAR), créée en 1994, dont M. A... était l'un des fondateurs et dirigeant, a été cédée à la société Groupe Caillé. M. A... qui cessait ses fonctions de dirigeant, a conclu avec la société CAR un contrat de travail à effet au 1er janvier 2004 pour exercer des fonctions de responsable commercial. 2. Suite à la liquidation judiciaire de la société CAR, le liquidateur a notifié le 9 novembre 2010 à M. A... son licenciement pour motif économique et ses indemnités de rupture ont été liquidées sur la base d'une ancienneté acquise au 1er janvier 2004. 3. Se prévalant d'une ancienneté depuis le 1er avril 1994 comme directeur général salarié de la société CAR, M. A... a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la condamnation de l'AGS à lui payer une certaine somme au titre du solde de l'indemnité légale de licenciement. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 5. M. A... fait grief à l'arrêt de dire ses demandes irrecevables, alors : « 1°/ que le juge doit d'office, lorsqu'un salarié dont l'employeur fait l'objet d'une procédure collective formule une demande de condamnation directement à l'encontre de l'AGS, traiter cette prétention comme une demande de fixation au passif de la procédure collective avec demande de mise en oeuvre de la garantie AGS ; qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable la demande du salarié tendant à la condamnation de l'AGS à lui payer une somme de 43 089,60 euros à titre de complément d'indemnité légale, la cour d'appel s'est bornée à relever que celui-ci n'avait pas jugé utile, même à l'audience, de réclamer l'inscription de cette somme au passif de la liquidation avec le bénéfice de la garantie AGS ; qu'en statuant ainsi, lorsque cette circonstance ne dispensait pas le juge de son office de requalifier la demande du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 625-4 du code de commerce et L. 3253-15 du code du travail ; 2°/ qu'il incombe au juge de définir l'objet du litige et de restituer aux conclusions des parties leur véritable portée juridique ; qu'en déclarant irrecevable la demande du salarié tendant à la condamnation de l'AGS à lui payer une somme de 43 089,60 euros à titre de complément d'indemnité légale, quand il lui appartenait de restituer à la prétention du salarié sa véritable portée juridique en la requalifiant en demande de fixation de cette somme au passif de la liquidation avec bénéfice de la garantie AGS, même sans sollicitation expresse de celui-ci à l'audience, la cour d'appel a violé les articles 4, 5 et 12 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 6. Selon les articles L. 3253-20 et L. 3253-21 du code du travail, si les créances ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l'expiration des délais prévus par l'article L. 3253-19, le mandataire judiciaire demande, sur présentation des relevés, l'avance des fonds nécessaires aux institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14, lesquelles lui versent les sommes restées impayées à charge pour lui de les reverser à chaque salarié créancier. 7. Ces textes excluent pour le salarié le droit d'agir directement contre les institutions intéressées et lui permettent seulement de demander que les créances litigieuses soient inscrites sur le relevé dressé par le mandataire judiciaire afin d'entraîner l'obligation pour lesdites institutions de verser, selon la procédure légale, les sommes litigieuses entre les mains de celui-ci. 8. Ayant constaté que le salarié n'avait pas sollicité une fixation de sa créance au passif de la procédure collective, c'est à bon droit que la cour d'appel a, sans encourir les griefs du moyen, accueilli la fin de non-recevoir opposée par l'AGS à la demande en paiement de l'intéressé dirigée contre elle. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. A... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour M. A... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement sur les frais et dépens, d'AVOIR dit les demandes de M. A... irrecevables, d'AVOIR condamné celui-ci à payer à la Selarl Hirou, mandataire de la liquidation judiciaire de la société CAR, la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700-1º du code de procédure civile et d'AVOIR condamné M. A... aux dépens d'appel ; AUX MOTIFS QUE « l'AGS soutient au principal l'irrecevabilité de la demande de M. A... tendant à sa condamnation au paiement de la somme de 43 089,60 euros, alors que le mandataire produit en pièce 10 l'arrêt rendu le 30 novembre 2015 par cette même cour dans l'affaire l'ayant opposé de la même façon à M. P... en présence de l'AGS aux termes duquel la demande de condamnation de l'AGS au paiement du solde de l'indemnité de licenciement a été déclarée irrecevable, M. A... n'a pas estimé utile de solliciter, même oralement à l'audience des plaidoiries, une fixation de créance au passif de la procédure collective avec le bénéfice de la garantie de l'AGS. Consécutivement, l'AGS qui n'est pas débitrice des dettes sociales de l'employeur mais seulement d'une obligation de garantie de ces créances inscrites au passif est fondée à soutenir que la demande de condamnation à son encontre est irrecevable. Le jugement ayant statué au fond est alors infirmé à l'exception des frais et dépens. Le mandataire de la liquidation judiciaire de la société CAR doit être indemnisé de ses frais irrépétibles à concurrence de la somme de 1 000 euros. Les dépens sont à la charge de M. A... qui succombe » ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « sur l'article 700 du code de procédure civile : Que M. E... A... succombe à l'instance ; Qu'il ne paraît pas équitable de laisser à la charge du défendeur les dépenses liées à l'article 700 du code de procédure civile ; Le conseil condamne donc M. E... A... à verser 750 € (sept cent cinquante euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile » ; 1°) ALORS QUE le juge doit d'office, lorsqu'un salarié dont l'employeur fait l'objet d'une procédure collective formule une demande de condamnation directement à l'encontre de l'AGS, traiter cette prétention comme une demande de fixation au passif de la procédure collective avec demande de mise en oeuvre de la garantie AGS ; qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable la demande du salarié tendant à la condamnation de l'AGS à lui payer une somme de 43 089,60 euros à titre de complément d'indemnité légale, la cour d'appel s'est bornée à relever que celui-ci n'avait pas jugé utile, même à l'audience, de réclamer l'inscription de cette somme au passif de la liquidation avec le bénéfice de la garantie AGS ; qu'en statuant ainsi, lorsque cette circonstance ne dispensait pas le juge de son office de requalifier la demande du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 625-4 du code de commerce et L. 3253-15 du code du travail ; 2°) ALORS en tout état de cause QU'il incombe au juge de définir l'objet du litige et de restituer aux conclusions des parties leur véritable portée juridique ; qu'en déclarant irrecevable la demande du salarié tendant à la condamnation de l'AGS à lui payer une somme de 43 089,60 euros à titre de complément d'indemnité légale, quand il lui appartenait de restituer à la prétention du salarié sa véritable portée juridique en la requalifiant en demande de fixation de cette somme au passif de la liquidation avec bénéfice de la garantie AGS, même sans sollicitation expresse de celui-ci à l'audience, la cour d'appel a violé les articles 4, 5 et 12 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE pour motiver sa décision, le juge doit se déterminer d'après les circonstances du procès et non par voie de référence à des causes déjà jugées ; qu'en l'espèce, pour débouter le salarié, la cour d'appel s'est fondée sur un arrêt de « cette même cour », rendu le 30 novembre 2015, dans une affaire ayant opposé « de la même façon » « le mandataire [liquidateur de la société Comptoir Automobile Réunionnais] » à M. P..., « en présence de l'AGS aux termes duquel la demande de condamnation de l'AGS au paiement du solde de l'indemnité de l'indemnité a[vit] été déclarée irrecevable » ; qu'en statuant ainsi, par référence à une cause déjà jugée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Les articles L. 3253-20 et L. 3253-21 du code du travail excluent pour le salarié le droit d'agir directement contre les institutions de garantie et lui permettent seulement de demander que les créances litigieuses soient inscrites sur le relevé dressé par le mandataire judiciaire afin d'entraîner l'obligation pour lesdites institutions de verser, selon la procédure légale, les sommes litigieuses entre les mains de celui-ci
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SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 novembre 2020 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1070 F-P+B Pourvoi n° Y 19-10.286 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 NOVEMBRE 2020 La société SP3 nettoyage, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-10.286 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige l'opposant à Mme V... F..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société SP3 nettoyage, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de Mme F..., après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Joly, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 novembre 2018), statuant en référé, Mme F... a été engagée le 9 novembre 1999 par la société SP3 nettoyage en qualité de secrétaire commerciale. Le 3 décembre 2013, la salariée a été élue déléguée du personnel et membre du comité d'entreprise. En dernier lieu, elle exerçait les fonctions d'assistante sociale. 2. La salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 19 juin 2017. 3. Le 26 juin 2017, l'employeur a notifié à la salariée l'annulation de son licenciement et a adressé à l'inspection du travail une demande d'autorisation préalable de licenciement pour inaptitude. 4. Par lettre du 27 juillet 2017, l'inspection du travail a déclaré cette demande irrecevable. Cette décision a été confirmée par le ministre du travail le 8 juin 2018. 5. Le 1er décembre 2017, la salariée a saisi la formation de référé de la juridiction prud'homale de demandes au titre de la nullité de son licenciement intervenu en violation de la procédure administrative d'autorisation préalable et en paiement de diverses indemnités. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée à titre provisionnel des sommes à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité spécifique et de dommages-intérêts pour licenciement nul, et de lui ordonner de délivrer une attestation Pôle emploi, un bulletin de salaire récapitulatif, un solde de tout compte et un certificat de travail, alors : « 1° / que le trouble manifestement illicite résulte d'une violation évidente de la règle de droit ; que ne constitue pas un tel trouble le licenciement d'un salarié protégé prononcé sans autorisation de l'inspection du travail dès lors que le salarié a accepté de manière claire et non équivoque la rétraction par son employeur du licenciement ; qu'en l'espèce, la société SP3 nettoyage a fait valoir qu'ayant procédé par erreur au licenciement de Mme F... pour inaptitude et impossibilité de reclassement sans autorisation de l'inspecteur du travail, elle avait avisé la salariée de l'annulation de ce licenciement par courrier du 26 juin 2017, ce que Mme F... avait accepté en continuant à lui adresser des arrêts de travail postérieurement à cette date, reconnaissant ainsi la poursuite du contrat de travail ; qu'en jugeant cependant que le licenciement de Mme F... prononcé le 19 juin 2017 est effectif et qu'il a été prononcé en violation du statut protecteur de délégué du personnel et membre du comité d'entreprise sans rechercher, comme elle était invitée à le faire, si Mme F... n'avait pas accepté de manière claire et non équivoque la rétractation par son employeur du licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 1455-6, R. 1455-7 ensemble les articles L. 2411-5, L. 2411-8 du code du travail ; 2°/ en outre qu'en l'absence de demande de réintégration au sein de l'entreprise, le licenciement du salarié protégé sans autorisation administrative de licenciement, rétracté par l'employeur qui continue de verser la rémunération, ne constitue pas un trouble manifestement illicite qu'il appartient à la formation de référé de faire cesser ; qu'en jugeant le contraire alors qu'il est constant que Mme F... n'a pas sollicité sa réintégration au sein de la société SP3 nettoyage, et que la cour constate que l'employeur n'a pas cessé de lui servir sa rémunération, la cour d'appel qui a excédé ses compétences a violé l'article R. 1455-6 du code du travail ; 3°/ que la formation de référé ne peut allouer une provision au créancier que lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'occurrence, la société SP3 nettoyage a contesté non seulement la nullité du licenciement du fait de l'acceptation expresse par la salariée de la révocation du licenciement mais aussi la décision d'irrecevabilité de l'inspection du travail portant sur sa demande d'autorisation de licenciement en ayant formé un recours devant le tribunal administratif ; qu'en accordant néanmoins à Mme F... des provisions à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité spécifique et de dommages et intérêts pour licenciement nul quand ces créances étaient sérieusement contestables, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-7 du code du travail. » Réponse de la Cour 7. La cour d'appel, qui a constaté que par décision du 27 juillet 2017, confirmée par décision du ministre du travail du 8 juin 2018, l'inspecteur du travail avait refusé d'examiner la demande d'autorisation de licenciement aux motifs que dès l'instant où il a été notifié, le licenciement ne peut être annulé unilatéralement, sans l'accord du salarié, et qui a retenu à bon droit que ces décisions s'imposaient au juge judiciaire en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, peu important l'existence d'un recours devant le tribunal administratif dépourvu d'effet suspensif, de sorte que le licenciement de la salariée était effectif et avait été prononcé en violation du statut protecteur de délégué du personnel et membre du comité d'entreprise, a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l'obligation de l'employeur au paiement des provisions sollicitées n'était pas sérieusement contestable. 8. La cour d'appel ayant justifié sa décision par ces seuls motifs, le moyen ne peut être accueilli. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société SP3 nettoyage aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société SP3 nettoyage IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société SP3 Nettoyage à payer à Mme F... à titre provisionnel des sommes à titre d'indemnité de licenciement , d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité spécifique, de dommages et intérêts pour licenciement nul, outre les frais irrépétibles ainsi que d'AVOIR ordonné à la société SP3 Nettoyage de délivrer une attestation Pôle Emploi, un bulletin de salaire récapitulatif, un solde de tout compte et un certificat de travail ; AUX MOTIFS QUE la salariée soutient que le licenciement est nul pour avoir été diligenté sans autorisation de l'inspecteur du travail malgré son statut de salarié protégé, alors que la rétractation du licenciement notifiée par l'employeur par lettre du 26 juin 2017 est sans effet, faute de renonciation claire et non équivoque de Mme V... F... ; que la société soutient que la formation de référé n'est pas compétente en présence d'une contestation sérieuse et en l'absence de trouble manifestement illicite ; qu'en effet, elle prétend que l'intéressée fait toujours partie de ses effectifs, en l'état de la rétractation du licenciement et de l'acceptation de celle-ci par Mme V... F... en ce qu'elle a communiqué un arrêt maladie après la notification de la rupture, que la décision d'irrecevabilité de l'inspection du travail et celle du ministre du travail ont fait l'objet d'un recours devant le tribunal administratif, que le bulletin de paie de mai 2018 a été émis avec la mention « absence autorisée non payée » et celle de juin la mention « absence rémunérée autorisée » ; qu'en application de l'article R. 1455-5 du code du travail dans tous les cas d'urgence, la formation des référés peut dans la limite de sa compétence ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; que selon l'article R. 1455-6, même en cas de contestation sérieuse, la formation des référés peut prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en vertu de l'article R. 1455-7, dans tous les cas où la demande formée n'est pas sérieusement contestable la formation des référés peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; que le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et que le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit ; que la nullité du licenciement à raison de l'absence d'autorisation préalable de licenciement suppose que la rétractation par l'employeur de la rupture soit sans effet ; que les recours contre la décision de l'inspecteur du travail comme contre celle du ministre du travail n'ont pas d'effet suspensif et s'imposent au juge judiciaire en vertu du principe de la séparation des pouvoirs ; qu'il n'est donc pas sérieusement contestable, en l'absence de décision du tribunal administratif contraire, que le licenciement est bien effectif en l'état et qu'il a été prononcé en violation du statut protecteur de délégué du personnel et membre du comité d'entreprise ; que dans ces conditions, il n'y a pas de contestation sérieuse sur la nullité du licenciement et il y aurait un trouble manifestement illicite à laisser la salariée dans l'incertitude sur sa situation au regard de son contrat de travail, alors qu'elle est en droit d'exiger qu'il soit tiré les conséquences d'un licenciement en violation de son statut de salariée protégée ; 1°- ALORS QUE le trouble manifestement illicite résulte d'une violation évidente de la règle de droit ; que ne constitue pas un tel trouble le licenciement d'un salarié protégé prononcé sans autorisation de l'inspection du travail dès lors que le salarié a accepté de manière claire et non équivoque la rétraction par son employeur du licenciement ; qu'en l'espèce, la société SP3 Nettoyage a fait valoir qu'ayant procédé par erreur au licenciement de Mme F... pour inaptitude et impossibilité de reclassement sans autorisation de l'inspecteur du travail, elle avait avisé la salariée de l'annulation de ce licenciement par courrier du 26 juin 2017, ce que Mme F... avait accepté en continuant à lui adresser des arrêts de travail postérieurement à cette date, reconnaissant ainsi la poursuite du contrat de travail ; qu'en jugeant cependant que le licenciement de Mme F... prononcé le 19 juin 2017 est effectif et qu'il a été prononcé en violation du statut protecteur de délégué du personnel et membre du comité d'entreprise sans rechercher, comme elle était invitée à le faire, si Mme F... n'avait pas accepté de manière claire et non équivoque la rétractation par son employeur du licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 1455-6, R. 1455-7 ensemble les articles L. 2411-5, L. 2411-8 du code du travail ; 2°- ALORS en outre QU'en l'absence de demande de réintégration au sein de l'entreprise, le licenciement du salarié protégé sans autorisation administrative de licenciement, rétracté par l'employeur qui continue de verser la rémunération, ne constitue pas un trouble manifestement illicite qu'il appartient à la formation de référé de faire cesser ; qu'en jugeant le contraire alors qu'il est constant que Mme F... n'a pas sollicité sa réintégration au sein de la société SP3 Nettoyage, et que la Cour constate que l'employeur n'a pas cessé de lui servir sa rémunération, la cour d'appel qui a excédé ses compétences a violé l'article R. 1455-6 du code du travail ; 3°- ALORS QUE la formation de référé ne peut allouer une provision au créancier que lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'occurrence, la société SP3 Nettoyage a contesté non seulement la nullité du licenciement du fait de l'acceptation expresse par la salariée de la révocation du licenciement mais aussi la décision d'irrecevabilité de l'inspection du travail portant sur sa demande d'autorisation de licenciement en ayant formé un recours devant le tribunal administratif ; qu'en accordant néanmoins à Mme F... des provisions à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité spécifique et de dommages et intérêts pour licenciement nul quand ces créances étaient sérieusement contestables, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-7 du code du travail.
Le refus de l'inspecteur du travail d'examiner la demande d'autorisation de licenciement aux motifs que dès l'instant où il a été notifié, le licenciement ne peut être annulé unilatéralement sans l'accord du salarié, constitue une décision administrative qui s'impose au juge judiciaire
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SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Rejet M. CATHALA, président Arrêt n° 1028 FS-P+B+I Pourvoi n° M 19-11.402 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 NOVEMBRE 2020 La société Terminal des Flandres, société par actions simplifiée, dont le siège est Port Dunkerque Ouest, quai de Flandre, BP 53, 59279 Loon-Plage, a formé le pourvoi n° M 19-11.402 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. V... D..., domicilié [...] , 2°/ à Pôle emploi Ile-de-France, dont le siège est 1 avenue du docteur Gley, 75020 Paris, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Terminal des Flandres, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. D..., et l'avis de Mme Rémery, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 septembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, conseillers, Mmes Prieur, Thomas-Davost, conseillers référendaires, Mme Rémery, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué ( Douai, 30 novembre 2018), M. D... a été engagé à compter du mois de février 2006, en qualité d'ouvrier docker occasionnel, par plusieurs entreprises de travail temporaire qui l'ont mis à disposition de la société Terminal des Flandres, l'une des sociétés de manutention portuaire sur le port de Dunkerque, au moyen de deux cent un contrats de mission. 2. A compter du 1er janvier 2013, il a été recruté directement par la société Terminal des Flandres dans le cadre de contrats à durée déterminée d'usage. 3. La relation de travail ayant pris fin le 16 juillet 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats de mission temporaire ainsi que des contrats à durée déterminée, avec toutes les conséquences attachées à la rupture injustifiée d'un contrat à durée indéterminée. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en ses autres branches Enoncé du moyen 5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la relation de travail doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006, de dire que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de sommes en conséquence, alors : « 2° / que constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, par principe, les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante ; que pourtant, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires peuvent constituer des raisons objectives justifiant la conclusion de contrats à durée déterminée successifs ; qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'ensemble des textes susvisés ; 3°/ qu'en affirmant que les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût elle fluctuante et que les pièces produites par la société ne permettait pas d'établir l'existence de raisons objectives justifiant le recours à des contrats à durée déterminée successifs, quand elle constatait elle-même que le trafic maritime avait un caractère par essence fluctuant et que l'activité continue de la société était variable en fonction de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'ensemble des articles L. 12421 et L.12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ; 4°/ qu'en affirmant que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire ne saurait constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné car à suivre la société c'est du même coup l'existence des dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie, et que la société avait la possibilité d'adapter le travail des salariés à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur la durée du travail (modulation, temps partiel), la cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des contrats à durée déterminée successifs, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000. » Réponse de la Cour 6. Aux termes de l'article L. 124-2, alinéa 1, devenu l'article L. 1251-5 du code du travail, le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice. 7. Selon les articles L. 124-2, alinéa 2, L. 124-2-1 et D. 124-2 devenus les articles L. 1251-6 et D. 1251-1 du même code, dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il peut être fait appel à un salarié temporaire pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée « mission » pour certains des emplois en relevant lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats de mission successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié. 8. Il résulte de l'application combinée de ces textes, que le recours à l'utilisation de contrats de missions successifs impose de vérifier qu'il est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi. 9. Ayant relevé que les contrats de mission conclus en 2006 et 2007 mentionnaient comme motif de recours « emploi pour lequel il n'est pas d'usage de recourir au contrat à durée indéterminée » et que l'entreprise utilisatrice, avec laquelle la relation de travail s'était poursuivie de manière continue au moyen de contrats à durée déterminée d'usage, se contentait d'affirmer que, compte tenu du caractère fluctuant et imprévisible de l'activité de la manutention portuaire, le recours aux ouvriers dockers occasionnels se justifiait nécessairement par une tâche précise et temporaire indissociablement liée au secteur d'activité de la manutention portuaire sans qu'elle ne verse, aucun élément permettant au juge, de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi occupé par le salarié, la cour d'appel a pu, par ces seuls motifs, en déduire que la relation de travail devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat de mission irrégulier. 10. Le moyen, n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Terminal des Flandres aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Terminal des Flandres et la condamne à payer à M. D... la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Terminal des Flandres Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la relation de travail du salarié devait être requalifiée contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société à verser au salarié les sommes de 1 480,65 euros à titre d'indemnité de requalification, de 2 961,30 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 296,13 à titre de congés payés afférents, de 2 541,03 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, de 10 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens et au remboursement des indemnités éventuellement versées par Pôle Emploi dans la limite de six mois ; AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « Sur la demande de requalification des contrats de mission et des contrats à durée déterminée d'usage en un contrat à durée indéterminée : M. D... soutient qu'il a conclu 201 contrats de mission temporaire entre 2006 et 2012 avec des motifs et des précisions différentes selon la période (2006 et 2007, d'une part, et 2008 à 2012, d'autre part) et que l'emploi qu'il a occupé pendant 7 ans était lié durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise puisqu'il a toujours été affecté aux mêmes tâches (chargement, déchargement de bateaux et manutentions diverses). Si la société Terminal des Flandres produit aux débats les 201 contrats de mise à disposition, en revanche, elle n'apporte pas la preuve pour chacune de ces mises à disposition qu'elle se trouvait confrontée à un accroissement temporaire d'activité. Les contrats de mission étant illégaux, M. D... est fondé à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée de toute la relation de travail auprès de l'entreprise utilisatrice, ainsi qu'une indemnité de requalification. M. D... fait valoir que cette requalification s'impose également pour les contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec la société Terminal des Flandres de janvier 2013 à juillet 2014, dès lors que l'écrit n'est pas régulier et que M. D... a occupé un emploi lié durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise, l'existence d'une convention collective permettant de conclure de tels contrats d'usage n'étant pas suffisante. La société Terminal des Flandres soutient au contraire que les dispositions du code du travail, notamment relatives au contrat à durée déterminée, ne sont pas applicables au statut des dockers, celui-ci relevant uniquement et exclusivement des dispositions du code des transports, dérogatoires au droit commun, et que les dockers occasionnels occupent un emploi par nature temporaire. La société Terminal des Flandres montre qu'elle a respecté les conditions inhérentes au statut d'ouvrier docker occasionnel et les conditions permettant le recours à cette force d'appoint, telles qu'elles sont précisées dans les textes légaux et conventionnels applicables. La société ajoute que l'usage des contrats à durée déterminée est en l'espèce nécessairement justifié par des conditions objectives matérielles, à savoir le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires. L'article L. 511-2 du code des ports maritimes, tel qu'il résulte de la loi n° 492-96 du 9 juin 1992 dispose que « -Dans les ports désignés par l'arrêté ministériel mentionné à l'article L. 511-1, les ouvriers dockers sont rangés en: - ouvriers dockers professionnels ; - ouvriers dockers occasionnels. Les ouvriers dockers professionnels sont soit mensualisés, soit intermittents. Il. - Relèvent de la catégorie des dockers professionnels mensualisés les ouvriers qui concluent avec un employeur un contrat de travail à durée indéterminée. Les entreprises de manutention portuaire ou leurs groupements ont l'obligation de recruter les ouvriers dockers professionnels mensualisés en priorité et dans l'ordre parmi les ouvriers dockers professionnels intermittents puis parmi les ouvriers dockers occasionnels qui ont régulièrement travaillé sur le port au cours des douze mois précédents( ...). « Une convention collective nationale de la manutention devra être négociée et signée par les partenaires sociaux au plus tard au 31 décembre 1993, qui concernera toutes les catégories de dockers mentionnées au présent article». III. -(...)Pour les travaux de manutention définis par décret, les employeurs, lorsqu'ils n'utilisent pas uniquement des dockers professionnels mensualisés, ont recours en priorité aux dockers professionnels intermittents puis, à défaut, aux dockers occasionnels ». Ces dispositions du code des ports maritimes ont été abrogées par l'ordonnance n° 2010- 1307 du 28 octobre 2010 et ont été intégrées dans le code des transports aux articles L. 5343-2 jusqu'à L. 5343-7. Ainsi, l'article L. 5343-6 précise que« Les ouvriers dockers occasionnels constituent une main-d'oeuvre d'appoint à laquelle il n'estfait appel qu'en cas d'insuffisance du nombre des dockers professionnels intermittents. Les ouvriers dockers occasionnels ne sont pas tenus de se présenter à l'embauche et peuvent travailler ailleurs que sur le port sans autorisation spéciale». Enfin, l'article L. 5343-7 dispose que « Pour les travaux de manutention définis par voie réglementaire, les employeurs, lorsqu'ils n'utilisent pas uniquement des dockers professionnels mensualisés, ont recours en priorité aux dockers professionnels intermittents puis, à défaut, aux dockers occasionnels». Conformément à la loi, une Convention collective nationale de la manutention portuaire a été conclue en date du 31 décembre 1993 et étendue par arrêté du 29 septembre 1994. Cette convention collective comprend à son article 9 un B intitulé « emplois à caractère occasionnels » qui dispose que « Conformément à l'article L. 122-1 du code de travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Sous réserve de l'alinéa précédent, les signataires de la présente convention collective conviennent que l'activité de manutention portuaire, telle que définie à l'article 1er relatif au champ d'application, constitue un secteur d'activité ou il est d'usage constant, au sens de l'article L. 122-1-1, 3e du code du travail de recourir au contrat de travail à durée déterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de certains emplois. Les emplois pour lesquels des contrats à durée déterminée correspondant à ce cas de recours pourront être conclus, sont ceux relevant de la filière "exploitation portuaire" telle que définie par la présente convention collective. La notification par l'employeur à l'ANPE, en application de l'article L. 312-2 du code du travail, des emplois vacants dans l'entreprise devra faire ressortir ceux de dockers occasionnels. Dans le cadre des dispositions législatives en vigueur, le chef d'entreprise devra informer le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel du nombre de salariés sous contrat à durée déterminée en faisant ressortir le nombre de dockers occasionnels ». En outre, un avenant à cette convention nationale a été conclu en date du 18 avril 2006 qui est relatif aux conditions d'emploi et de rémunération particulières des personnels dockers des entreprises de manutention dans les ports maritimes du nord. Cet avenant a pour objet « d'intégrer dans le cadre de la convention collective nationale de la manutention portuaire les différents accords et avenants conclus depuis 1992 entre les organisations syndicales des personnels dockers et les entreprises de manutention du port de Dunkerque, ainsi que les accords conclus entre les entreprises de manutention qui ont une incidence sur l'emploi ». Cet avenant comprend un Titre VIII intitulé « Sauvegarde de l'emploi » et qui précise en un 8.1.1. que « En cas de nécessité, les entreprises de manutention s 'efforcent de sous-traiter entre elles la réalisation de tout ou partie de chantiers pour lesquels la main-d'oeuvre dont elles disposent est ponctuellement insuffisante, en effectifs et/ou en compétences. Ce dispositif de sous-traitance de chantiers, qui a pour effet de réguler la charge de travail entre les entreprises, a également pour finalité de stabiliser l'emploi de la main-d'oeuvre mensualisée ». Un 8.1.2. ajoute que « Lorsque la sous-traitance ne permet pas à une entreprise d'assurer la réalisation de tout ou partie d'un chantier, elle est autorisée à avoir recours à du personnel intérimaire, aux conditions fixées au titre IX ci-après ». Le titre IX intitulé « conditions du recours à l'intérim » dispose que « (...) Depuis 1992, la main-d'oeuvre indispensable au bon fonctionnement des entreprises de manutention (maîtrise, spécialistes, dockers historiques détenteurs du savoir-faire propre au port de Dunkerque) a été mensualisée au sein des entreprises de manutention. Afin de se donner les moyens de mieux répondre à la demande, les entreprises de manutention ont passé un accord qui leur permet, en cas de nécessité, de sous-traiter entre elles la réalisation de tout ou parties de chantiers pour lesquels la main-d'oeuvre dont elles disposent est ponctuellement insuffisante, en effectifs et/ou en compétences. .../... Cet accord de sous-traitance de chantiers (cf titre VIII ci-dessus), qui a pour effet de réguler la charge de travail entre les entreprises, a également pour effet de stabiliser l'emploi de la main-d'oeuvre mensualisée. Cet accord prévoit également que, lorsque la sous-traitance ne permet pas à une entreprise d'assurer la réalisation de tout ou partie d'un chantier, elle peut avoir recours à du personnel intérimaire. Considérant les risques inhérents au métier d'ouvrier docker, il a toutefois été convenu que les entreprises ne peuvent avoir recours qu 'à des intérimaires habilités, ayant reçu un minimum de formation au métier d'ouvrier docker et en particulier une formation spécifique à la sécurité. Ainsi, il a été convenu de constituer un pool d'ouvriers dockers intérimaires au sein des effectifs d'une ou plusieurs entreprises de travail temporaire, et que les entreprises de manutention, en cas de besoin, et lorsque les possibilités de sous-traitance ont été épuisées, feraient appel aux services des seuls membres de ce pool d'ouvriers dockers intérimaires ». Ensuite, une Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011 a été conclue qui a repris ces dispositions précitées de la convention collective nationale de 1993 à son B « Emplois à caractère occasionnel » de son article 6 « Contrat de travail », lequel dispose donc pareillement que : « Conformément à l'article L. 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Le recours à des CDD d'usage constant est toutefois rendu nécessaire dans certaines entreprises relevant du champ d'application de la présente convention collective compte tenu : - du caractère irrégulier de leur activité lié aux fluctuations du trafic portuaire et des débarquements de produits de la pêche ; -de la nécessité de disposer d'une main-d'oeuvre d'appoint, au sens des articles L. 511-2 et L. 511-5 du code des ports maritimes, disposant des formations requises, et de la fidéliser. Sous réserve des alinéas précédents, les signataires de la présente convention collective conviennent que l'activité de manutention portuaire et celle de débarquement des produits de la pêche au sein des ports de pêche, telles que définies à l'article 1er relatif au champ d'application, constituent un secteur d'activité où il est d'usage constant, au sens de l'article L. 1242-7 du code du travail, de recourir au contrat de travail à durée déterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de certains emplois. Les emplois concernés sont ceux correspondant aux ouvriers dockers occasionnels tels que définis au point 2 du champ d'application et au point 1 des bénéficiaires de la présente convention collective (...) ». Cet article 6 B comprend aussi des « Dispositions particulières applicables dans les ports comportant des dockers professionnels intermittents » et dispose notamment que « Dans les ports comportant des dockers professionnels intermittents, il ne pourra être procédé à l'embauchage par contrat à durée déterminée de dockers occasionnels pour effectuer les travaux réservés à la maind'oeuvre des dockers telle que définie par le code des ports maritimes qu'à défaut de dockers professionnels intermittents disponibles remplissant les conditions d'aptitude requises correspondant aux postes à pourvoir (...) ». Enfin, un Accord du 16 novembre 2012 relatif au recours à l'emploi d'ouvriers dockers occasionnels spécifique au port de Dunkerque a été conclu qui reprend, en substance, les dispositions de l'accord du 18 avril 2006 sur le recours à la sous-traitance et à la possibilité, en cas d'insuffisance, de recourir non plus à l'intérim, mais directement à des ouvriers dockers occasionnels, en l'occurrence par le recours à des contrats déterminée d'usage. De l'articulation de l'ensemble de ces textes, il ressort d'abord que contrairement à ce que soutient la société Terminal des Flandres, ni le code des ports maritimes, ni ensuite celui des transports n'ont entendu prévoir un régime spécifique de contrat à durée déterminée ou d'intérim des Ouvriers Dockers occasionnels dérogatoire à celui prévu par le code du travail puisque les dispositions légales renvoient elles-mêmes à des textes conventionnels qui précisent bien, au sujet des « emplois à caractère occasionnels », que «Conformément à l'article L. 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise» et même que les contrats à durée déterminée d'usage qui ont vocation à être conclus avec les ouvriers dockers occasionnels sont conclus « sous réserve » du respect de ces dispositions du code du travail. Il ressort aussi de l'ensemble de ces dispositions et de leur combinaison temporelle que les avenants spécifiques aux ports de Dunkerque, en particulier celui de 2006 précité, relatif à la possibilité de recourir à l'intérim pour pallier l'insuffisance de sous-traitance n'ont en rien soustrait les contrats de mission qui ont été conclus avec les dockers occasionnels des exigences du code du travail dès lors qu'ils ne constituent que des avenants à des accords nationaux qui s'inscrivent eux-mêmes dans le respect du code du travail et qu'ils concernent des contrats de mission dont le régime est aligné, à de très rares exceptions près qui ne sont pas concernées en l'espèce, sur celui des contrats à durée déterminée. Cela est d'autant plus flagrant que ce recours à l'intérim a été supprimé en 2012 pour laisser précisément la place, en cas d'insuffisance de sous-traitance, à des contrats à durée déterminée d'usage directement conclus avec les entreprises de manutention, donc à des contrats qui sont incontestablement soumis, en application de ce qui précède, aux exigences du code du travail. Ainsi, s'il ressort de l'ensemble de ces textes qu'ils distinguent nettement les dockers professionnels (mensualisés ou intermittents) des dockers occasionnels, notamment en ce sens que les dockers professionnels mensualisés sont embauchés par contrat à durée indéterminée et les dockers occasionnels par contrats précaires (contrats à durée déterminée ou d'intérim selon un usage constant), ils invitent à distinguer ce qui relève du statut de ce qui relève du contrat. Autrement dit, les dispositions spécifiques du code des ports maritimes, ensuite celui des transports, précisent les différences statutaires entre un docker professionnel et un docker occasionnel et, en substance, les conditions auxquelles un docker occasionnel doit satisfaire pour relever de cette qualification statutaire. Moyennant quoi, dès lors que ces conditions sont respectées, un docker occasionnel employé en contrat à durée déterminée ne peut prétendre être requalifié en un docker professionnel employé en contrat à durée indéterminée. Pour autant, un docker occasionnel au sens statutaire, et qui est donc engagé par contrat à durée déterminée, peut faire valoir que les conditions légales de recours aux contrats à durée déterminée (le plus souvent d'usage) et/ou de leur succession n'ont pas été respectées, soit pour obtenir une indemnité de précarité dans le cadre de son contrat à durée déterminée (qui reste alors à durée déterminée, sans pouvoir relever de l'usage constant), soit même pour obtenir la requalification de son contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée (avec les conséquences qui en résultent). Mais retenir alors que le contrat à durée déterminée du docker occasionnel n'est pas valable, qu'il doit être requalifié (requalification sanction) en contrat à durée indéterminée ne signifie pas pour autant que le docker aurait dû être embauché comme docker professionnel (mensualisé) au sens statutaire. Les dispositions spécifiques du code des transports sur les dockers, qui doivent être respectées, ne font donc pas obstacle à ce qu'un docker occasionnel du point de vue statutaire, et engagé par contrats à durée déterminée successifs (en particulier d'usage), puisse solliciter la requalification de ses contrats précaires en un contrat à durée indéterminée sur le fondement du code du travail. Cela s'impose d'autant plus que toute disposition nationale qui autorise le recours au contrat à durée déterminée doit être lue à la lumière de la directive 1999/70 sur les contrats à durée déterminée, laquelle exige en particulier du juge national qu'il opère un contrôle de l'abus en cas de succession de contrats précaires avec le même salarié. Ainsi, si dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, - comme c'est le cas dans la manutention portuaire-, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, -comme c'est le cas pour les contrats des dockers occasionnels - , et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi. En outre, la détermination par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminée d'usage -comme pour le docker occasionnel- ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné. Et ce qui vaut pour les contrats à durée déterminée d'usage vaut pour les contrats de mission d'usage conclus dans le cadre du travail temporaire puisque les articles L. 1251-5 et L. 1251-6 du code du travail applicables aux contrats de travail temporaire sont rédigés dans les mêmes termes que les articles relatifs aux contrats à durée déterminée d'usage. En l'espèce, la société Terminal des Flandres se contente dans un premier temps de soutenir que les dispositions légales particulières, en l'occurrence du code des ports maritimes et du code des transports, applicables au statut des dockers occasionnels ont été respectées pour M. D.... En effet, selon la société Terminal des Flandres, M. D... n'était pas titulaire de la carte professionnelle, ne bénéficiait d'aucune priorité d'embauche, il pouvait travailler ailleurs que sur le port de Dunkerque, de telle sorte que M. D... faisait bien partie des dockers occasionnels. La cour relève d'abord que la société Terminal des Flandres n'apporte aucun élément à l'appui de ses dires, mais se contente de procéder par simple affirmation. La société ajoute également, par rapport à une autre condition posée par le code des transports, qu'elle ne faisait appel à M. D... ainsi qu'à d'autres dockers occasionnels que dans les situations dans lesquelles l'ensemble des dockers professionnels étaient occupés et qu'une charge supplémentaire et ponctuelle se présentait. .../... Sur ce point, la société intimée verse aux débats de nombreux tableaux destinés à montrer qu'elle ne fait appel à des ODO que lorsque l'ensemble des dockers mensualisés étaient soit occupés sur les différents chantiers, soit en congés, soit en RTT. La cour relève toutefois que ces tableaux et plannings portent sur la période de mai et juin 2015, c'est à dire une période qui n'est pas concernée par la demande de M. D..., puisque la relation de travail a été rompue en 2014. Ensuite et en tout état de cause, la cour relève qu'à supposer même que les conditions spécifiques posées par le code des ports maritimes et du code des transports aient été respectées dans le cas de M. D..., ce qui n'est pas établi, cela montrerait seulement qu'il ne peut pas revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé, mais nullement que ses contrats de mission ou ses contrats de travail à durée déterminée successifs soient nécessairement valables au sens du code du travail, lequel reste applicable, contrairement à ce que soutient la société. Il convient donc de vérifier si les dispositions du code du travail ont été respectées. *Sur les contrats de mission conclus par M. D... de février 2006 à décembre 2012 : M. D... a été mis à disposition de la société NTFI, ancien nom de la société Terminal des Flandres par la société de travail temporaire Manpower entre 2006 et 2007 et par la société Adecco de 2008 à 2012 dans le cadre de 201 contrats de mission d'une durée d'un seul jour le plus souvent. Les contrats de mission et les contrats de mise à disposition correspondant qui ont été conclus avec la société Manpower en 2006 et 2007 mentionnent pour motif « emploi pour lequel il n'est pas d'usage de recourir au CDI » ainsi que, au titre de la « justification précise du recours » : « ATA lié à une intervention Quai Flandre », « ATA lié à une intervention sur le navire Flensburg Quai de Flandre » et, encore et surtout pour la plupart des contrats,« ATA lié au site de NFTI ». La cour relève que la société Terminal des Flandres ne produit aucune autre pièce que les contrats de mise à disposition et se contente d'affirmer que compte tenu du caractère fluctuant et imprévisible de l'activité même de la manutention portuaire, le recours aux ouvriers dockers occasionnels se justifie nécessairement par une tâche précise et temporaire indissociablement liée au secteur d'activité de la manutention portuaire, à savoir les escales des navires. Ce faisant, la cour constate que la société intimée ne verse aucun éléments permettant au juge de vérifier concrètement, comme cela lui incombe, l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné de M. D.... Au contraire, la cour déduit des seules mentions de la plupart des contrats de mission et de mise à disposition de M. D..., à savoir « ATA lié au site NFTI », que M. D... occupait un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, peu important que cette activité soit elle-même fluctuante. La cour en conclut que, faute pour la société Terminal des Flandres d'apporter, conformément au demeurant à son postulat de base excluant, mais à tort, l'application du code du travail, des éléments concrets autres que les contrats, ces contrats de missions que M. D... a conclus avec la société Manpower doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée, en l'occurrence avec la société Terminal des Flandres, entreprise utilisatrice, comme le demande le salarié. La cour précise que ces seuls motifs suffisent alors à faire droit à la demande de M. D... sur toute la période qu'il vise puisque sous couvert d'autres contrats de mission qu'il a conclus ensuite avec la société Adecco et, à partir du 2012, de contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec la société Terminal de Flandes, il n'a en fait cessé de travailler pour le compte de celle-ci dans le cadre de ce seul contrat à durée indéterminée. De façon surabondante, la cour ajoute toutefois que les contrats de mission que M. D... a conclus de juillet 2008 à décembre 2012 avec la société Adecco, avec toujours une mise à disposition pour la société Terminal des Flandres, l'ont tous été au motif non pas d'un usage constant, mais d'un « accroissement temporaire d'activité ». Il ressorts des contrats versés aux débats qu'ils comportent aussi, au titre des justifications précises » la mention, pour les premiers d'entre-eux, de « déchargement du bateau fort St Louis à honorer dans les délais » et pour la très grande majorité d'entre-eux ensuite « lié au déchargement de bateaux à honorer dans les délais ». Or, si un contrat de mission peut être conclu en cas d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, le recours à des salariés intérimaires ne peut être autorisé que pour les besoins d'une ou plusieurs tâches résultant du seul accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, notamment en cas de variations cycliques de production, sans qu'il soit nécessaire ni que cet accroissement présente un caractère exceptionnel, ni que le salarié recruté soit affecté à la réalisation même de ces tâches. Et il appartient à l'entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de l'accroissement d'activité justifiant le recours à l'intérim. En l'espèce, en se contentant de justifier les contrats de mission par le fait qu'il soit lié « au déchargement de bateaux à honorer dans les délais », ce qui correspond à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante, la société n'apporte ni la preuve de l'existence de pics dans cette activité et encore moins la corrélation entre le volume de l'activité et celui de l'emploi de travailleurs temporaires. La cour en conclut que les contrats de mission qui ont été conclus par la société Adecco avec M. D... pour le mettre à disposition de la société Terminal des Flandres de 2008 à 2012 ont eu pour effet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de cette entreprise utilisatrice, ce qui justifie la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée. La cour précise que ces seuls motifs suffisent alors à faire droit à la demande de M. D... sur toute la période qu'il invoque, puisque sous couvert de contrats à durée déterminée d'usage qu'il a conclus directement avec celle-ci à partir de 2012, il a en fait continué à travailler pour le compte de la société Terminal des Flandres dans le cadre de son contrat à durée indéterminée. *Sur les contrats à durée déterminée successifs d'usage que M. D... a conclus de 2012 à 2014 directement avec la société Terminal des Flandres : De façon à nouveau surabondante, il ressort des contrats à durée déterminée dits « d'usage constant » qui sont versés aux débats qu'ils précisent à l'article 1er intitulé « Engagement-Emploi » que « le salarié est engagé en qualité d'Ouvrier Docker Occasionnel (ODO), emploi temporaire par nature(...) » et à l'article 2 intitulé « Objet du contrat » qu'il est conclu« en raison de l'insuffisance d'ouvriers dockers professionnel mensualisé disponibles, et de l'absence d'ouvriers dockers professionnels intermittents sur le Port de Dunkerque, pour le chantier suivant : l'opération Navire du (...) au (....) », en sachant que ces contrats étaient tous conclus pour la durée d'un jour. Pour expliquer et justifier le recours aux dockers occasionnels, dont M. D..., et donc au contrat à durée déterminée à usage constant, la société Terminal des Flandres invoque les importantes variations d'activité au cours d'une même semaine et verse aux débats plusieurs tableaux destinés à illustrer cette variation d'activité pour la semaine du 18 au 24 mars 2013 et à montrer que l'embauche de M. D... était liée à une surcharge temporaire de travail. La cour relève d'abord que seuls les contrats qui sont versés aux débats par les parties doivent en l'espèce être pris en compte, à l'exclusion d'autres contrats qui correspondraient à des périodes auxquelles M. D... aurait également travaillé, sans que cela soit toutefois établi. La cour relève ensuite que les tableaux versés aux débats, en plus des contrats, par la société Terminal des Flandres prouvent que celle-ci n'a eu recours, pour la semaine du 18 au 24 mars 2013, au travail de M. D... par contrat à durée déterminée d'usage que pour les périodes pendant lesquelles les dockers professionnels mensualisés étaient en nombre insuffisants, soit en raison de l'activité importante sur le port, soit en raison de leur absence pour différents motifs. Ces éléments prouvent que M. D... ne peut revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé. En outre, si les éléments produits par la société Terminal des Flandres permettent à la rigueur de justifier la conclusion avec M. D... de plusieurs contrats à durée déterminée successifs d'une journée sur la semaine du 18 au 24 mars 2013, le fait que la conclusion de tels contrats à durée déterminée successifs d'une journée ait été, comme l'attestent les contrats produits, répétée en 2013 et 2014, et en fait depuis 2006, à intervalle aussi réguliers pendant de nombreuses semaines de chaque mois, montre que ce recours aux contrats à durée déterminée successifs d'un jour a eu pour effet de pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. La cour ajoute en effet que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire que la société Terminal des Flandres invoque ne saurait, dans de telles conditions, constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné de M. D..., car à suivre la société c'est du même coup l'existence de dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie. Au-delà même de l'ancienneté de M. D..., qui n'est pas en soi déterminante, c'est donc la régularité avec laquelle il a été recouru, de très nombreuses semaines de chaque mois, à son travail dans le cadre de contrats à durée déterminée successifs d'une seule journée qui révèle que M. D... venait pallier le déficit non pas seulement conjoncturel (lié aux congés, au respect du temps de travail), mais bien structurel de main d'oeuvre de dockers professionnels. La cour ajoute que la société Terminal des Frandres avait la possibilité d'adapter le travail de M. D... à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur sa durée du travail (modulation, temps partiel) plutôt que sur la durée de son contrat. La cour en conclut que, du fait des conditions de recours au contrats à durée déterminés successifs, M. D... a occupé un emploi lié à l'activité normale et permanente , -fut-elle fluctuante-, de la société Terminal des Flandres, de telle sorte que ses contrats à durée déterminée doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée, sans que M. D... puisse pour autant prétendre au statut de docker professionnel mensualisé. Le jugement sera donc infirmé. Sur les conséquences de la requalification en contrat à durée indéterminée La cour considère d'abord que la relation de travail de M. D... pour le compte de la société Terminal des Flandres doit être requalifiée en un contrat à durée indéterminée depuis 2006 et que sa rupture en 2014 n'étant pas contestée par les parties, elle équivaut à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il y a d'abord lieu de condamner la société Terminal des Flandres à verser à M. D... une indemnité de requalification du montant qu'il réclame, dont le montant est exact et non contesté, de 1 480,65 euros, une indemnité compensatrice de préavis du montant qu'il réclame de 2 961,30 euros, dont le quantum est exact et non contesté, et 296,12 euros de congés payés afférents, ainsi qu'une indemnité légale de licenciement du montant qu'il réclame de 2 541,03 euros, dont le quantum n'est pas davantage surévalué, ni contesté. S'agissant de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse Il convient d'abord de préciser que M. D..., par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée ou de mission irrégulier, de telle sorte que son ancienneté remonte au contrat de mission du 16 février 2006, le fait qu'il ait pu ne pas se tenir à la disposition de la société Terminal des Flandres entre les différents contrats précaires requalifiés est donc indifférent pour le décompte de son ancienneté et est seulement déterminant pour des rappels de salaire pour les périodes interstitielles entre les contrats, rappels de salaires dont M. D... ne fait de toute façon pas la demande. Ainsi, compte tenu du salaire moyen des six derniers mois de M. D... (1 390 euros), de son ancienneté (8 ans) et des circonstances de la rupture, mais compte tenu également de l'absence de justificatifs produits par M. D... sur sa situation depuis la rupture du contrat de travail, il est justifié de condamner la Société Terminal des Flandres à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. l235-3 du code du travail, dans sa version alors en vigueur. En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu, en outre, d'ordonner le remboursement par la société Terminal des Flanddres des indemnités chômage éventuellement versées par Pôle Emploi à M. D... postérieurement à son licenciement, dans la limite de six mois ; Sur les documents sociaux Il y a lieu d'ordonner à la société Terminal des Flandres de délivrer à M. D... un bulletin de paie pour les indemnités diverses, ainsi qu'une nouvelle attestation destinée à Pôle emploi conforme au présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cet ordre d'une astreinte. Sur les intérêts Il y a lieu de rappeler que les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce, en l'occurrence donc du présent arrêt. Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens : Le jugement sera infirmé de ces deux chefs et compte tenu de l'issue du litige, la société Terminal des Flandres sera en outre condamnée à payer à M. D... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu'il a engagés en première instance et en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel » ; ALORS, en premier lieu, QUE constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir, non seulement que les dispositions du code des transports, des ports maritimes et les stipulations conventionnelles étaient dérogatoires aux dispositions du code du travail, mais également qu'en tout état de cause le caractère fluctuant de l'activité de transport maritime constituait une raison objective établissant le caractère par nature temporaire des emplois ; que pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, même à considérer que les dispositions du code des transports, des ports maritimes et les stipulations conventionnelles avaient été respectées, cela démontrait seulement que le salarié ne pouvait revendiquer le statut de docker professionnel mensualisé mais nullement que les contrats de missions ou à durée déterminée étaient nécessairement valables au sens du code du travail ; qu'en statuant par de tels motifs, qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des CDD successifs, la Cour d'appel a priveì sa décision de toute base légale au regard de l'ensemble des articles L. 5343-2 à -7 du code des transports, ensemble de la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 31 décembre 1993, étendue par arrêté du 29 septembre 1994, ensemble de l'ensemble des articles L. 5343-2 à -7 du code des transports, ensemble de la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 31 décembre 1993, étendue par arrêté du 29 septembre 1994, ensemble de l'avenant à la Convention collective nationale de la manutention portuaire du 18 avril 2006 relatif aux conditions d'emploi et de rémunérations particulières des personnels dockers des entreprises de manutention dans les ports maritimes du nord, ensemble de la Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011, ensemble de l'accord collectif du 16 novembre 2012 relatif au recours aÌ l'emploi d'ouvrier dockers occasionnels spécifique au port de Dunkerque, ainsi que les articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ; ALORS, en deuxième lieu, et en tout état de cause, QUE constituent des éléments objectifs établissant la nature temporaire de l'emploi, au sens des articles L. 1242-1 et L. 1242-2 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires, de sorte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs est justifiée par des raisons objectives ; qu'en l'espèce, pour dire que la relation de travail du salarié devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 16 février 2006 et que la rupture du dernier contrat devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a considéré que, par principe, les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante ; que pourtant, le caractère fluctuant du trafic maritime et la variation continue de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires peuvent constituer des raisons objectives justifiant la conclusion de contrats à durée déterminée successifs ; Qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'ensemble des textes susvisés ; ALORS, en troisième lieu, QU'en affirmant que les contrats de missions et à durée déterminée étaient liés à l'activité normale et permanente de la société, fût-elle fluctuante et que les pièces produites par la société ne permettait pas d'établir l'existence de raisons objectives justifiant le recours à de CDD successifs, quand elle constatait elle-même que le trafic maritime avait un caractère par essence fluctuant et que l'activité continue de la société était variable en fonction de la charge d'activité de chargement et déchargement des navires (arrêt p. 11 § 5 et 6), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'ensemble des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000 ; ALORS, en quatrième lieu, QU'en affirmant que le caractère par essence fluctuant de l'activité de manutention portuaire ne saurait constituer concrètement une raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné car à suivre la société c'est du même coup l'existence des dockers mensualisés embauchés à durée indéterminée qui serait une anomalie, et que la société avait la possibilité d'adapter le travail des salariés à l'activité par essence fluctuante de l'entreprise en agissant sur la durée du travail (modulation, temps partiel), la cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui n'étaient en rien de nature à exclure l'existence d'une raison objective justifiant le recours à des CDD successifs, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L. 12421 et L. 12422 du code du travail, interprétés à la lumière de la clause 5, point 1, a) de l'accord-cadre européen sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 2000.
Aux termes de l'article L. 124-2, alinéa 1, devenu l'article L. 1251-5 du code du travail, le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice. Selon les articles L. 124-2, alinéa 2, L. 124-2-1 et D. 124-2 devenus les articles L. 1251-6 et D. 1251-1 du même code, dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il peut être fait appel à un salarié temporaire pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée « mission » pour certains des emplois en relevant lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats de mission successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié. Il résulte de l'application combinée de ces textes, que le recours à l'utilisation de contrats de missions successifs impose de vérifier qu'il est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi. Doit être approuvé, l'arrêt qui requalifie la relation de travail en contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat de mission irrégulier au motif que l'entreprise utilisatrice, qui avait ensuite directement recruté le salarié au moyen de contrats à durée déterminée d'usage successifs, ne produisait aucun élément permettant au juge de contrôler de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi
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N° G 20-81.162 F-P+B+I N° 2179 CK 18 NOVEMBRE 2020 CASSATION SANS RENVOI M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 18 NOVEMBRE 2020 CASSATION SANS RENVOI sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel de Rouen contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de ladite cour d'appel, en date du 27 janvier 2020, qui a rejeté la requête en aménagement de peine présentée par M. I... D.... Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. de Larosière de Champfeu, conseiller, et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre, et M. Bétron, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. I... D... a été condamné, par jugement du tribunal correctionnel d'Evreux, en date du 13 février 2019, à un an d'emprisonnement pour conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique, sans assurance, sans permis de conduire, en récidive, violences et menaces, un mandat d'arrêt étant décerné à son encontre. 3. Cette peine a été ramenée à exécution, le 22 février 2019. 4. Le 28 février 2019, M. D... a présenté une requête afin d'être admis au bénéfice de la semi-liberté ou du placement sous surveillance électronique. 5. Par jugement du 17 juillet 2019, le juge de l'application des peines, relevant que la requête était recevable car l'exécution de la peine se poursuivait jusqu'au 22 novembre 2019, l'a rejetée, en l'absence de gages suffisants de réinsertion présentés par le condamné. 6. M. D... a relevé appel de ce jugement, le 18 juillet 2019. 7. Le 22 juillet 2019, deux condamnations à des peines d'emprisonnement, de deux et quatre mois, prononcées contradictoirement à l'encontre de M. D... par le tribunal correctionnel de Nantes, le 21 décembre 2018, ont été mises à exécution, reportant sa date de libération au 9 avril 2020. 8. Cette date a été reportée au 9 janvier 2021, à la suite de la mise à exécution d'une peine d'un an d'emprisonnement, prononcée contre l'intéressé par arrêt de la cour d'appel de Rouen, le 14 novembre 2019. Examen du moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré que l'appel n'était pas devenu sans objet et confirmé le jugement du juge de l'application des peines, alors que, d'une part, il résulte de l'article 509 du code de procédure pénale, applicable à la chambre de l'application des peines en vertu de l'article D. 49-44-1 du même code, que l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans les limites fixées par l'acte d'appel, que, le jugement entrepris n'ayant statué que sur l'aménagement de la seule peine prononcée le 13 février 2019 à l'encontre de l'appelant, la chambre de l'application des peines ne pouvait s'estimer saisie de la situation de l'appelant, telle qu'elle résultait des peines mises à exécution depuis ce jugement, et, d'autre part, il résulte des dispositions de articles 712-11 et 712-13 du code de procédure pénale que les décisions du juge de l'application des peines peuvent être contestées par la voie de l'appel du condamné, devant la chambre de l'application des peines, et que l'arrêt attaqué, ayant statué sur l'aménagement des peines prononcées par le tribunal correctionnel de Nantes contre M. D..., en l'absence de décision du juge de l'application des peines, le condamné a été privé du double degré de juridiction. Réponse de la Cour Vu les articles 509 et D.49-44-1 du code de procédure pénale : 8. Il résulte du premier de ces textes, applicable à la chambre de l'application des peines en vertu du second, que l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans les limites fixées par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant. 9. Lors des débats devant la chambre de l'application des peines, à l'audience du 19 décembre 2019, le procureur général a soutenu que l'appel de M. D... était devenu sans objet, car il était dirigé contre un jugement du 17 juillet 2019, qui refusait l'aménagement d'une seule peine, prononcée le 13 février 2019, dont l'exécution était terminée, depuis le 22 novembre 2019. 10. Pour statuer sur l'appel, dire qu'il n'est pas sans objet, et confirmer le jugement critiqué, la chambre de l'application des peines énonce que les dispositions relatives à l'application des peines s'appliquent en considération de la situation globale du condamné. Elle ajoute qu'il en résulte qu'en cas de recours, la chambre de l'application des peines se trouve saisie, par l'effet dévolutif de l'appel, de toutes les condamnations qui ont été prononcées contre le condamné, appelant d'un jugement du juge de l'application des peines, même si certaines de ces condamnations sont intervenues après le jugement frappé d'appel. 11. En prononçant ainsi, alors que, par l'effet dévolutif de l'appel, elle n'était saisie que dans la limite du jugement du juge de l'application des peines, qui n'avait statué que sur l'aménagement de la seule peine prononcée contre l'appelant, le 13 février 2019, laquelle avait été exécutée, la chambre de l'application des peines a méconnu les textes susvisés. 12. Il en résulte que la cassation est encourue. Elle interviendra sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure de faire application de la règle de droit appropriée. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Rouen, en date du 27 janvier 2020 ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; CONSTATE que l'appel formé par M. D... contre le jugement du juge de l'application des peines d'Evreux en date du 17 juillet 2019, est sans objet. ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rouen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit novembre deux mille vingt.
Il résulte de l'article 509 du code de procédure pénale, applicable à la chambre de l'application des peines, que l'affaire est dévolue à cette juridiction dans les limites fixées par la date de l'appel et la qualité de l'appelant. Ainsi, saisie de l'appel d'une décision du juge de l'application des peines refusant d'aménager une peine, la chambre de l'application des peines ne peut statuer sur l'aménagement d'autres peines, mises à exécution contre le même condamné, qui n'ont pas fait l'objet du jugement du juge de l'application des peines qui lui est déféré
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N° F 20-84.817 F-P+B+I N° 2698 RB5 17 NOVEMBRE 2020 REJET M. SOULARD président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 17 NOVEMBRE 2020 REJET du pourvoi formé par M. D... F... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 29 juillet 2020, qui, dans la procédure suivie notamment contre lui, des chefs de récidive d'association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime, recel en bande organisée, usage de fausse plaque d'immatriculation et infractions à la législation sur les armes, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire. Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. D... F..., et les conclusions de Mme Caby, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et M. Bétron, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. M. F... a été mis en examen le 8 juillet 2019 des chefs susvisés et placé en détention provisoire le même jour. 3. Sa détention provisoire a été prolongée par ordonnances successives du juge des libertés et de la détention des 6 novembre 2019, 26 février et 6 juillet 2020. 4. Lors du débat de prolongation de la détention qui s'est tenu le 6 juillet 2020, le dossier de la procédure remis au juge des libertés et de la détention a comporté un certain nombre de pièces, en particulier relatives à la garde à vue de l'intéressé, et les actes subséquents, qui ont été annulés par arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 22 juin 2020. 5. M. F... a relevé appel de l'ordonnance prolongeant sa détention provisoire. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu d'ordonner la mise en liberté d'office de M. F... et d'avoir au contraire confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant prolongé la détention provisoire de M. F... pour une durée de quatre mois alors « que les pièces annulées par arrêt d'une chambre de l'instruction doivent être retirées du dossier de la procédure dès lors qu'est expiré le délai dont disposaient, pour se pourvoir, les parties qui auraient eu intérêt à solliciter la cassation du chef de l'arrêt annulant ces pièces ; qu'en retenant, pour juger que les pièces relatives à la garde à vue de MM. F..., M... et K..., annulées par trois arrêts du 22 juin 2020, pouvaient se trouver dans le dossier le 6 juillet 2020, qu'à cette date, M. K... pouvait encore se pourvoir contre l'arrêt du 22 juin 2020, et que MM. F... et M... s'étaient effectivement pourvus contre cet arrêt, quand MM. F..., K... et M... étaient dépourvus d'intérêt à se pourvoir contre le chef de l'arrêt ayant annulé leurs garde à vue et les pièces subséquentes, et qu'il lui appartenait donc de rechercher si ces chefs de dispositif étaient encore susceptibles, le 6 juillet 2020, d'être cassés sur le pourvoi d'une autre partie, la chambre de l'instruction s'est déterminée par des motifs inopérants en violation des articles 174, 568, 591 et 593 du code de procédure pénale.» Réponse de la Cour 7. Il se déduit de l'article 570, alinéas 2 et 3, du code de procédure pénale que l'arrêt de la chambre de l'instruction distinct de l'arrêt au fond n'est pas exécutoire tant que les délais de pourvoi du ministère public et de toutes les parties à la procédure ne sont pas expirés, peu important que celles-ci aient ou non un intérêt à former un tel recours, dès lors qu'il revient à la seule Cour de cassation, saisie d'un pourvoi, d'en apprécier la recevabilité 8. Pour rejeter l'exception de nullité prise de l'irrégularité alléguée du débat contradictoire en vue de la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant la détention provisoire de l'intéressé, la chambre de l'instruction énonce, notamment, que le fait que l'ordonnance rendue le 6 juillet 2020 par le juge des libertés et de la détention à l'encontre de l'intéressé ait pu contenir des éléments tirés des auditions en garde à vue de M. K..., autre partie à la procédure, annulées par arrêt de la chambre de l'instruction du 22 juin précédent, n'apparaît pas emporter d'irrégularité qui justifierait d'en prononcer l'annulation. 9. Les juges précisent que M. K... a reçu le 24 juin 2020 notification de l'arrêt du 22 juin 2020 portant annulation de sa garde à vue et en tirant les conséquences. 10. Ils relèvent qu'il résulte du premier alinéa de l'article 4 de l'ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020 que les délais fixés par les dispositions du code de procédure pénale pour l'exercice d'une voie de recours sont doublés sans pouvoir être inférieurs à dix jours, de sorte que le délai de droit commun de cinq jours francs pour se pourvoir en cassation en application de l'article 568 du code de procédure pénale a été doublé et, s'agissant de M. K..., a couru à partir du 25 juin 2020, jusqu'au samedi 4 juillet suivant. 11. Ils constatent que le délai prévu par une disposition de procédure pénale pour l'accomplissement d'un acte ou d'une formalité qui expirerait normalement un samedi ou un dimanche ou un jour férié ou chômé étant prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant, conformément à l'article 801 du code de procédure pénale, M. K... était recevable à se pourvoir en cassation contre l'arrêt du 22 juin 2020 jusqu'au lundi 6 juillet 2020 inclus. 12. Ils en déduisent que le 6 juillet 2020, lorsqu'a été rendue l'ordonnance portant prolongation de la détention provisoire de M. F..., l'arrêt du 22 juin 2020 n'avait pas force exécutoire de sorte que, ni la présence à cette date dans le dossier d'actes et de mentions dont la chambre de l'instruction avait prononcé quelques jours auparavant l'annulation ou la cancellation, ni une référence faite à ces éléments n'est de nature à entacher d'irrégularité l'ordonnance prise par le juge des libertés et de la détention. 13. Ils ajoutent que ni M. K..., ni sa défense ne s'étant pourvus contre l'arrêt le concernant rendu par la chambre de l'instruction le 22 juin 2020, l'arrêt est devenu définitif et la consultation de la procédure permet de constater que n'y figurent plus aucune des pièces ni aucune des mentions dont la cour a ordonné l'annulation ou la cancellation. 14. Les juges concluent qu'en cet état, il n'apparaît exister aucun motif d'ordonner d'office la remise en liberté de M. F... dans le cadre de cette procédure. 15. En l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen. 16. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale. PAR CES MOTIFS, la Cour, REJETTE le pourvoi. ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept novembre deux mille vingt.
Il se déduit de l'article 570, alinéas 2 et 3, du code de procédure pénale que l'arrêt de la chambre de l'instruction distinct de l'arrêt au fond n'est pas exécutoire tant que les délais de pourvoi du ministère public et de toutes les parties à la procédure ne sont pas expirés, peu important que celles-ci aient ou non un intérêt à former un tel recours, dès lors qu'il revient à la seule Cour de cassation, saisie d'un pourvoi, d'en apprécier la recevabilité. Justifie dès lors sa décision la chambre de l'instruction, qui, pour écarter l'exception de nullité du débat contradictoire formée par la personne mise en examen prise de ce qu'au jour de ce débat figuraient toujours en procédure des pièces annulées par un arrêt contre lequel elle alléguait qu'elle, ou une autre personne mise en examen, était dépourvue d'intérêt à se pourvoir, énonce qu'au jour de la tenue de ce débat, cet arrêt n'avait pas force exécutoire, le délai pour former un pourvoi contre celui-ci n'ayant pas expiré
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SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Rejet M. CATHALA, président Arrêt n° 1031 FS-P+B Pourvois n° F 19-14.985 à W 19-14.999 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 NOVEMBRE 2020 1°/ Mme A... Q..., épouse F..., domiciliée [...] , 2°/ Mme K... E..., domiciliée [...] , 3°/ Mme C... B..., épouse XD..., domiciliée [...] , 4°/ M. U... D..., domicilié [...] , 5°/ Mme G... VA... , domiciliée [...] , 6°/ Mme S... O..., domiciliée [...] , 7°/ Mme I... P..., domiciliée [...] , 8°/ M. Y... V..., domicilié [...] , 9°/ Mme M... TV..., épouse H..., domiciliée [...] , 10°/ Mme K... L..., domiciliée [...] , 11°/ Mme W... J..., épouse X..., domiciliée [...] , 12°/ Mme R... TA..., épouse T..., domiciliée [...] , 13°/ M. XW... QH..., domicilié [...] , 14°/ Mme RB... YL..., domiciliée [...] , 15°/ Mme WI... N..., épouse JX..., domiciliée [...] , ont formé respectivement les pourvois n° F 19-14.985, H 19-14.986, G 19-14.987, J 19-14.988, K 19-14.989, M 19-14.990, N 19-14.991, P 19-14.992, Q 19-14.993, R 19-14.994, S 19-14.995, T 19-14.996, U 19-14.997, V 19-14.998 et W 19-14.999 contre quinze arrêts rendus le 22 février 2019 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans les litiges les opposant à la caisse d'allocations familiales (CAF) du Rhône, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation commun annexé au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme Q... et des quatorze autres salariés, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la caisse d'allocations familiales du Rhône, et l'avis de Mme Courcol-Bouchard, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 23 septembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, M. Rouchayrole, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, conseillers référendaires, Mme Courcol-Bouchard, premier avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° F 19-14.985 à W 19-14.999 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Lyon, 22 février 2019), Mme Q... et quatorze autres salariés de la caisse d'allocations familiales du Rhône (la caisse) exercent leurs fonctions en qualité d'agents techniques de l'agence comptable au sein des pôles « Trésorerie comptabilité » et « Recouvrement amiable ». 3. Les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappels de prime de responsabilité dite prime de contrôle et de dommages-intérêts. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes, alors : « 1°/ que l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la Convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale stipule que "Les agents techniques délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs perçoivent une prime mensuelle de responsabilité correspondant à 5 % du salaire de leur coefficient de qualification " ; qu'en excluant du bénéfice de cette prime les agents des pôles "Trésorerie et comptabilité" et "Recouvrement amiable" de la caisse d'allocations familiales du Rhône aux motifs que le contrôle susceptible de donner lieu au versement de la prime serait celui opéré sur les opérations de liquidation des droits, non pas le contrôle des comptes comptables de la caisse, la cour d'appel a violé le texte susvisé en y ajoutant une condition restrictive qu'il ne prévoit pas ; 2°/ qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que les agents du pôle qualité des comptes, comprenant le pôle trésorerie et le pôle recouvrement amiable, disposent d'une délégation de l'agent comptable et contrôlent les opérations de liquidation avant qu'elles ne donnent lieu à paiement, de sorte que même au sens restrictif du terme décomptes retenu par la cour d'appel, ils sont éligibles à la prime de responsabilité ; qu'en ne tirant pas les conséquences de sa propre qualification au regard des faits constants du litige, elle a violé l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la Convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale ; 3°/ que le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables sur lequel la cour d'appel s'est fondée ne justifie pas la qualification retenue, dès lors que dans les deux cas, il existe une fonction de contrôle des décomptes ; qu'il en résulte que la cour d'appel a violé, par fausse qualification, l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la Convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale. » Réponse de la Cour 5. Selon l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la Convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale, dans sa version issue du protocole d'accord du 30 novembre 2004, les agents techniques délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs perçoivent une prime mensuelle de responsabilité correspondant à 5 % du salaire de leur coefficient de qualification. 6. La cour d'appel a retenu à bon droit que le contrôle susceptible de donner lieu au versement de la prime de responsabilité prévue par le texte précité est le contrôle opéré sur l'opération de liquidation des droits proprement dits -et donc sur les décomptes- et non pas le contrôle des comptes comptables de la caisse. 7. Analysant les fonctions de contrôle exercées par les agents des pôles « trésorerie qualité des comptes recouvrement amiables », « maîtrise des risques et démarche qualité intégrée (DQI) hors allocataires » et « maîtrise des risques et DQI allocataires », elle a notamment constaté que la différence de nature des contrôles opérés par les agents des différents pôles était confirmée par la lecture et la comparaison des référentiels d'emploi et de compétences de ces agents, dont il résulte que seules les fonctions de gestionnaire maîtrise des risques hors allocataires, de technicien maîtrise des risques hors allocataires, de gestionnaire maîtrise des risques action sociale, de gestionnaire maîtrise des risques allocataires et de technicien maîtrise des risques allocataires ont pour objet de contribuer à la maîtrise des risques financiers chacun dans son domaine de compétence, à la lutte contre la fraude interne et à la mise en oeuvre du plan de contrôle de l'agent comptable national décliné localement et des procédures associées, en sorte que seuls ces derniers agents contrôlent « la qualité de la liquidation » liée au processus dont ils sont en charge, « en avant ou après paiement » c'est à dire de la qualité de la saisie des informations, du respect des procédures et de la bonne application de la réglementation. 8. Elle a enfin retenu que les pièces produites par les agents des pôles « Trésorerie et Comptabilité » et « Recouvrement amiable », pour établir la nature de leurs missions de contrôle, confirmaient qu'ils n'opéraient pas un contrôle des décomptes de prestations mais uniquement un contrôle de la cohérence et de la régularité des comptes, conformément à leurs fonctions de comptable. 9. La cour d'appel en a exactement déduit que les agents des pôles « Trésorerie et Comptabilité » et « Recouvrement amiable » de l'agence comptable de la caisse n'exerçaient pas une fonction de contrôle des décomptes et ne pouvaient, de ce fait, prétendre à la prime mensuelle de responsabilité prévue à l'avenant du 25 janvier 1978. 10. Le moyen qui, en sa deuxième branche manque par le fait qui lui sert de base et en sa troisième, critique des motifs surabondants, n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Condamne Mmes Q..., E..., B..., VA... , O..., P..., TV..., L..., J..., TA..., YL... et N... et MM. D..., V... et QH... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen commun produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme Q... et les quatorze autres salariés, demandeurs aux pourvois n° F 19-14.985 à W 19-14.999 Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir infirmé les jugements déférés en toutes leurs dispositions ; d'avoir débouté les salariés de leurs demandes tendant 1) à voir juger que la prime dite de responsabilité doit être versée à l'ensemble des agents techniques délégués de l'agent comptable et qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs, sans restriction ; 2) à voir juger que les salariés remplissent les conditions fixées par les dispositions conventionnelles pour bénéficier de l'intégralité de la prime dite de responsabilité représentant 5 % de leur salaire mensuel ; 3) à voir juger que la Caisse d'allocations familiales du Rhône est dans l'obligation de régler rétroactivement depuis 2011 et pour l'avenir aux salariés la prime dite de responsabilité prévue à l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 de ladite convention ; 4) à voir juger que la Caisse d'allocations familiales du Rhône a résisté de manière abusive aux demandes légitimes formées aimablement par les salariés et qu'elle a généré un préjudice aux salariés ; et 5) à la condamnation de la Caisse d'allocations familiales du Rhône à payer à chaque salarié une somme au titre de la prime de responsabilité, congés payés inclus, et la somme de 500 € de dommages et intérêts ; d'avoir rejeté les demandes de remise des bulletins de salaire rectifiés sur la base des arrêts ; et d'avoir débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ; aux motifs que, selon l'avenant du 25 janvier 1978 à la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale, « les agents techniques délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs perçoivent une prime mensuelle de responsabilité correspondant à 5 % du salaire de leur coefficient de qualification ( ) » ; qu'en l'espèce et à ce stade de la procédure, il n'est pas contesté par les parties, - que les agents des pôles « Trésorerie Comptabilité » et « Recouvrement amiable » demandeurs à la présente procédure sont des agents techniques délégués de l'agent comptable au sens de l'avenant du 25 janvier 1978, - que la notion de « comptes employeurs » ne trouve pas à s'appliquer s'agissant des CAF ; que le seul point en litige porte donc sur l'interprétation de la notion de contrôle des décomptes dont la Direction du développement et de l'accompagnement des ressources humaines de l'UNCASS dans sa réponse du 10 septembre 2013 (pièce 4 de l'appelante) reconnaît, s'agissant du « contrôle » qu'« aucun texte ne donne véritablement de définition précise de cette notion » ; que la Caisse d'allocations familiales du Rhône estime que la prime de responsabilité a pour objet de rémunérer la fonction spécifique et permanente de contrôle de l'opération de liquidation réalisée par un agent de service de l'ordonnateur se concrétisant par un paiement ou un indu notifié à un allocataire, un tiers ou à un salarié ; qu'elle considère que tel n'est pas le cas des agents des pôles « Trésorerie Comptabilité » et « Recouvrement amiable » dans la mesure où : - ces agents sont en charge des seules opérations de liquidation d'un droit se concrétisant par un paiement ou par un indu du « décompte » au sens de l'avenant du 25 janvier 1978, et non pas du contrôle des paiements aux allocataires, ni d'une activité de maîtrise des risques, - la fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs s'inscrit dans le cadre du principe de séparation des fonctions d'ordonnateur et de comptable qui impose de distinguer les opérations de liquidation-décomptes réalisées par les agents des pôles « Trésorerie Comptabilité » et « Recouvrement amiable » et les opérations des contrôle de ces opérations, lesquelles sont réservées aux seuls techniciens des pôles « Maîtrise des risques (MDR) gestion et tiers », MDR AFC », « MDR Métier » et « MDR Données entrantes » ; - l'activité de contrôle des décomptes rémunérées par la prime de responsabilité instaurée par l'article premier de l'avenant du 25 janvier 1978 est un contrôle de conformité et de qualité des opérations incombant aux techniciens des pôles « Trésorerie comptabilité » et « Recouvrement amiable », dans le but de sécuriser les risques financiers induits par les paiements des prestations ; que de son côté, le salarié, qui ne précise pas à quel pôle « Trésorerie comptabilité » ou « Recouvrement amiable » il est rattaché, ne conteste pas que les comptables de ces deux pôles assument des fonctions de liquidation ni que les « décomptes » sont la matérialisation des opérations de liquidation des prestations ; que cependant, la partie intimée estime que, dans leurs fonctions de liquidateurs, les comptables « Trésorerie comptabilité » et « Recouvrement amiable » ont nécessairement des fonctions de contrôle des décomptes et comptes employeurs, ce qui découle notamment : - du libellé du responsable auxquels ils sont rattachés (le « Responsable Trésorerie Qualité des comptes recouvrement amiable ») et de l'ancien libellé du pôle trésorerie (le pôle « contrôle des dépenses budgétaires et financières »), – de la définition des métiers financiers et comptables qui impose, de tout temps, un contrôle de la régularité des comptes, - des référentiels métiers qui font référence à la notion de contrôle des comptes, et des référentiels métiers locaux, qui évoquent le contrôle des comptes et la supervision des comptes comptables, - des exigences de formation et de la définition des postes des agents dépendant de ces deux pôles ; - des tâches effectivement accomplies dans la mesure où : • le pôle trésorerie vérifie systématiquement la bonne imputation comptable du paiement, procède au contrôle des comptes fournisseurs et donc des services ordonnateurs, a une action de contrôle de cohérence et assure, de façon plus générale, la tenue pleine et entière de la comptabilité, garantissant ainsi la régularité ainsi que la fiabilité des opérations financières et comptables de la CAF, • le pôle vérifie, à la demande de la Caisse d'allocations familiales du Rhône, la bonne comptabilisation de tous les mouvements sur toutes les créances des dossiers des allocataires et des tiers, • tous les comptes sont ajustés après contrôle de ces deux pôles nécessairement en bout de chaîne, - du fait que chaque agent du pôle trésorerie dispose d'un accès personnel et d'un code confidentiel permettant un accès aux deux banques de la CAF du Rhône permettant, lorsqu'un agent détecte une anomalie, de demander une régularisation à la banque, - du fait que chacun des agents dispose d'un certain nombre d'habilitations qui le conduit à contrôler les dossiers des allocataires ou à traiter des opérations comptables, permettant la régularisation et le versement de prestations ; que l'avenant du 25 janvier 1978 s'est substitué à compter du 1er janvier 1978 à l'avenant du 27 mai 1964 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques hautement qualifiés, délégués de l'agent comptable, exerçant ou ayant exercé une fonction de contrôle des décomptes et des comptes employeurs ; que les conditions d'application de cet avenant du 27 mai 1964 ont été précisées par une circulaire U.N.C.A.F. du 17 décembre 1964 qui a notamment indiqué : - que les agents hautement qualifiés visés étaient autrefois classifiés sous la définition « contrôleur des décomptes ou des comptes employeurs ( ) », - que l'avenant ne fait aucune réserve au sujet des « décomptes » à considérer et que la définition englobe, de ce fait, les décomptes de toutes les prestations donnant lieu à un contrôle financier : assurances sociales, accidents du travail, invalidité, vieillesse, allocations familiales (pièce 13 de l'appelante) ; que le contrôle susceptible de donner lieu au versement de la prime de responsabilité prévue à l'article premier de l'avenant du 25 janvier 1978 est donc bien le contrôle opéré sur l'opération de liquidation des droits proprement dits – et donc sur les décomptes – et non pas le contrôle des comptes comptables de la Caisse d'allocations familiales du Rhône ; que de plus et ainsi que le fait justement valoir la Caisse d'allocations familiales du Rhône, la séparation des tâches de liquidation des droits et de contrôle des décomptes matérialisant cette liquidation résulte, non pas de l'application proprement dite, mais de la déclinaison au sein du service de l'agent comptable de la Caisse d'allocations familiales du Rhône, du principe de la séparation des fonctions d'ordonnateurs et de comptables, sur lequel repose les règles relatives à la gestion financière des organismes de sécurité sociale du régime général énoncées aux articles D. 253-1 et suivants du code de la sécurité sociale ; que de ce fait, et sauf à priver le contrôle au sein de l'agence comptable de la Caisse d'allocations familiales du Rhône de toute efficacité, les agents liquidateurs et payeurs que sont les comptables des pôles « Trésorerie comptabilité » et « Recouvrement amiable » ne peuvent se voir également confier la tâche de contrôler leurs propres décomptes, contrôle qui est ainsi confié aux agents des pôles « Maîtrise des risques (MDR) gestion et tiers », « MDR AFC », « MDR Métier » et « MDR Données entrantes », lesquelles ne sont d'ailleurs pas des comptables, ainsi que le souligne le salarié ; que par ailleurs, la différence de nature des contrôles opérés par les agents des différents pôles est confirmée par la lecture et la comparaison des référentiels d'emploi et de compétences des ces agents (pièces 15 à 22 de l'appelante et pièce 16 de l'intimé) dont il résulte : - que les fonctions de comptable chargé du recouvrement et de gestionnaire comptable chargé du recouvrement (Pôle Recouvrement amiable) portent sur le recouvrement des créances d'indus et de prêts et des oppositions et ne comportent, en principe, aucune activité de contrôle, même si, pour des raisons historiques, ces agents de la Caisse d'allocations familiales du Rhône se voient, dans les faits, confier la mission d'ajustement des comptes du recouvrement, - que les fonctions de comptable et de gestionnaire en comptabilité (Pôle trésorerie comptabilité), ont pour finalité de contribuer à « la régularité et à la fiabilité des opérations financières et comptables de la CAF ( ) au travers notamment du contrôle de la cohérence des documents issus des applicatifs de production avec les informations générales dans les logiciels de trésorerie et de comptabilité », - que seules les fonctions de gestionnaire maîtrise des risques hors allocataires, de technicien maîtrise des risques hors allocataires, de gestionnaire maîtrise des risques action sociale, de gestionnaire maîtrise des risques allocataires et de technicien maîtrise des risques allocataires ont pour objet de contribuer à la maîtrise des risques financiers chacun dans leur domaine de compétence, à la lutte contre la fraude et à la mise en oeuvre du plan de contrôle de l'agent comptable national décliné localement et des procédures associées, - que seuls ces derniers agents contrôlent « la qualité de la liquidation » liée au processus dont ils sont en charge, « en avant ou après paiement », c'est-à-dire de la qualité de la saisie des informations, du respect des procédures et la bonne application de la réglementation ; qu'enfin toutes les pièces produites par le salarié pour établir la nature de ses missions de contrôle confirment que ce dernier n'opère pas un contrôle des décomptes de prestations, mais uniquement un contrôle de cohérence et de la régularité des comptes, conformément à ses fonctions de comptable ; qu'il reconnaît d'ailleurs dans ses conclusions que les agents du pôle « Trésorerie Comptabilité » travaillent sur la base de fichiers de paiement reçus des différents ordonnateurs de la CAF dont ils contrôlent la cohérence ; qu'il résulte de tout ce qui précède que les agents des pôles « Trésorerie et Comptabilité et « Recouvrement amiable » de l'agence comptable de la Caisse d'allocations familiales du Rhône n'exercent pas une fonction de contrôle des décomptes et qu'ils ne peuvent donc, de ce fait, prétendre à la prime mensuelle de responsabilité prévue à l'avenant du 25 janvier 1978 ; que cette analyse ne peut être contredite par le fait que l'un des anciens salariés comptables de la CAF de Villefranche-sur-Saône a perçu à compter du 1er juillet 1998 et pour une durée indéterminée, une demi-prime de « vérification » avant que celle-ci ne soit transformée en points de compétence mensuels suite à la nouvelle classification de 2005, dès lors que les fonctions concrètement occupées par ce salarié ne sont pas détaillées ni justifiées ; que dans ces conditions, le salarié ne peut prétendre ni à un rappel de prime de responsabilité et de congés payés y afférents ni à la condamnation de la Caisse d'allocations familiales du Rhône à lui payer cette prime pour l'avenir ; que, sur l'inégalité de traitement, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'un ou l'autre sexe, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ; qu'une différence de traitement entre des salariés placés dans la même situation doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'une différence de traitement établie par engagement ne peut être pratiquée entre des salariés relevant d'établissements différents et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'il appartient au salarié qui se prétend lésé de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve des éléments étrangers à toute discrimination justifiant l'inégalité de traitement dont se plaint le salarié ; qu'en l'espèce, le salarié fait valoir qu'au sein de l'agence comptable de la Caisse d'allocations familiales du Rhône, une partie des agents bénéficie de la prime de responsabilité tandis qu'une autre partie n'en bénéficie pas, alors que tous sont dans une situation comparable en termes de formation et de travail ; qu'il résulte des motifs développés ci-dessus que les salariés des différents pôles de l'agence comptable de la Caisse d'allocations familiales du Rhône ne sont pas placés dans une situation identique et qu'au surplus, la différence de rémunération découle de l'application de l'avenant du 25 janvier 1978 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques exerçant une fonction de contrôle ou des comptes employeurs à laquelle tous ne sont pas éligibles ; que dans ces conditions, le second moyen développé par le salarié au soutien de sa demande de paiement de la prime de responsabilité est infondé et les demandes à ce titre doivent être rejetées ; 1) alors d'une part que l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la Convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale stipule que « Les agents techniques délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs perçoivent une prime mensuelle de responsabilité correspondant à 5 % du salaire de leur coefficient de qualification » ; qu'en excluant du bénéfice de cette prime les agents des pôles « Trésorerie et comptabilité » et « Recouvrement amiable » de la Caisse d'allocations familiales du Rhône aux motifs que le contrôle susceptible de donner lieu au versement de la prime serait celui opéré sur les opérations de liquidation des droits, non pas le contrôle des comptes comptables de la caisse, la cour d'appel a violé le texte susvisé en y ajoutant une condition restrictive qu'il ne prévoit pas ; 2) alors au demeurant qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que les agents du pôle qualité des comptes, comprenant le pôle trésorerie et le pôle recouvrement amiable, disposent d'une délégation de l'agent comptable et contrôlent les opérations de liquidation avant qu'elles ne donnent lieu à paiement, de sorte que même au sens restrictif du terme décomptes retenu par la cour d'appel, ils sont éligibles à la prime de responsabilité ; qu'en ne tirant pas les conséquences de sa propre qualification au regard des faits constants du litige, elle a violé l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la Convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale ; 3) et alors enfin que le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables sur lequel la cour d'appel s'est fondée ne justifie pas la qualification retenue, dès lors que dans les deux cas, il existe une fonction de contrôle des décomptes ; qu'il en résulte que la cour d'appel a violé, par fausse qualification, l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la Convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale.
Selon l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 à la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale, dans sa version issue du protocole d'accord du 30 novembre 2004, les agents techniques délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs perçoivent une prime mensuelle de responsabilité correspondant à 5 % du salaire de leur coefficient de qualification. Doit être approuvée une cour d'appel qui retient que le contrôle susceptible de donner lieu au versement de la prime de responsabilité prévue par ce texte est le contrôle opéré sur l'opération de liquidation des droits proprement dits - et donc sur les décomptes - et non pas le contrôle des comptes comptables d'une caisse d'allocations familiales
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Rejet Mme BATUT, président Arrêt n° 667 FS-P+B Pourvois n° N 19-14.025 H 19-14.112 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 I - M. S... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° N 19-14.025 contre un arrêt rendu le 18 décembre 2018 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Confort transactions, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , 2°/ à la société Le Clos de l'Aubépin, société civile immobilière, dont le siège est [...] , défenderesses à la cassation. II - La société Confort transactions, société à responsabilité limitée, a formé le pourvoi n° H 19-14.112 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Le Clos de l'Aubépin, société civile immobilière, 2°/ à M. S... T..., défendeurs à la cassation. Le demandeur au pourvoi n° N 19-14.025 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi n° H 19-14.112 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. T..., de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Confort transactions, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Le Clos de l'Aubépin, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Kloda, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° N 19-14.025 et H 19-14.112 sont joints. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 18 décembre 2018), par acte du 20 mars 2013, la SCI Le Clos de l'Aubépin (la SCI), promoteur immobilier, a confié à la société Confort transactions, par l'intermédiaire de M. T..., agent commercial habilité par cette dernière, un mandat non exclusif pour la commercialisation sous le régime de la vente en l'état futur d'achèvement de vingt-quatre lots du programme immobilier « Le Clos du moulin ». 3. Le 21 octobre 2014, la société Confort transactions a mis en demeure la SCI de lui verser la somme de 206 480 euros au titre de sa commission, puis l'a assignée en paiement. M. T... est intervenu volontairement à l'instance. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi n° H 19-14.112, pris en sa seconde branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen du pourvoi n° N 19-14.025 et le moyen du pourvoi n° H 19-14.112, pris en sa première branche, réunis Enoncé des moyens 5. Par son moyen, M. T... fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du mandat de vente et de rejeter ses demandes, alors : « 1°/ que le titulaire d'une carte professionnelle d'agent immobilier peut habiliter une personne à négocier, s'entremettre ou s'engager pour son compte, la personne ainsi habilitée devant justifier de la qualité et de l'étendue de ses pouvoirs par la production de l'attestation visée par l'article 9 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ; que si, en vertu de cette disposition, les nom et qualité du titulaire de l'attestation doivent être mentionnés sur le mandat de vente qu'il conclut avec un tiers au nom et pour le compte du titulaire de la carte professionnelle, cette mention n'est pas prescrite à peine de nullité dudit mandat ; que, pour prononcer l'annulation du mandat du 20 mars 2013, conclu entre la société Confort transactions, titulaire de la carte professionnelle, et la SCI, par l'intermédiaire de M. T..., titulaire de l'attestation, la cour d'appel a retenu que le nom et la qualité de ce dernier n'étaient pas mentionnés sur le mandat au mépris des exigences de l'article 9 du décret du 20 juillet 1972, disposition d'ordre public ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble l'article 4 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 dans leur rédaction applicable à l'espèce ; 2°/ que l'annulation du contrat de mandat d'un agent immobilier à raison de l'omission, sur l'acte, de la mention du nom et de la qualité de la personne habilitée qui l'a négocié, constitue une sanction disproportionnée ; qu'en prononçant une telle annulation, nonobstant la circonstance, acquise aux débats, que grâce à ce mandat, les vingt-quatre lots composant le programme immobilier avaient été vendus à un bailleur social, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et l'article 9 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 dans leur rédaction applicable en l'espèce, ensemble l'article 1er du 1er protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » 6. Par son moyen pris en sa première branche, la société Confort transactions fait le même grief à l'arrêt, alors « que le titulaire d'une carte professionnelle d'agent immobilier peut habiliter une personne physique, tel qu'un agent commercial, à conclure un mandat en son nom et pour son compte ; que cette personne justifie alors de la qualité et de l'étendue de ses pouvoirs par la production d'une attestation délivrée par l'agent immobilier ; que, si le mandat conclu par cette personne physique doit mentionner le nom et la qualité de cette dernière, cette mention n'est pas requise à peine de nullité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que le mandat conclu le 20 mars 2013 entre la société Confort transactions et la SCI avait été signé par M. T..., agent commercial lié à la société Confort transactions, sans que le mandat ne mentionne le nom et la qualité du signataire, et qu'il en résultait la violation d'une disposition d'ordre public, justifiant la nullité du mandat ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que ces indications ne sont pas prescrites à peine de nullité du mandat de vente, la cour d'appel a violé les articles 4 et 6 de loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 9 du décret du 20 juillet 1972. » Réponse de la Cour 7. En premier lieu, selon l'article 4, alinéa 1er, de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, toute personne habilitée par un titulaire de la carte professionnelle à négocier, s'entremettre ou s'engager pour le compte de ce dernier justifie de sa qualité et de l'étendue de ses pouvoirs dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. L'article 9, dernier alinéa, du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 dispose que les nom et qualité du titulaire de l'attestation doivent être mentionnés dans les conventions visées à l'article 6 de la loi précitée lorsqu'il intervient dans leur conclusion, ainsi que sur les reçus de versements ou remises lorsqu'il en délivre. 8. Il résulte de ces dispositions d'ordre public, qu'à défaut de mention, dans le mandat, du nom et de la qualité de la personne habilitée par un titulaire de la carte professionnelle à négocier, s'entremettre ou s'engager pour le compte de ce dernier, cette convention est nulle. 9. Dès lors, la cour d'appel a fait l'exacte application de ces textes en annulant le mandat de vente du 20 mars 2013, après avoir constaté que la carte professionnelle d'agent immobilier était détenue par la société Confort transactions et que, si M. T... était le signataire de ce mandat, celui-ci ne faisait pas mention de son nom et de sa qualité. 10. En second lieu, si l'annulation du mandat de vente prive l'agent immobilier et l'intermédiaire de la rémunération prévue au mandat, qui constitue une créance entrant dans le champ d'application de l'article 1er du premier Protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette mesure est proportionnée à l'objectif poursuivi par les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 et du décret du 20 juillet 1972 d'organiser l'accès à la profession d'agent immobilier, d'assurer la compétence et la moralité des agents immobiliers et de protéger le mandant qui doit pouvoir s'assurer que la personne à qui il confie le mandat est habilitée par l'agent immobilier, est titulaire de l'attestation légale et dispose des pouvoirs nécessaires. 11. Les moyens ne sont donc pas fondés. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Condamne M. T... et la société Confort transactions aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi n° N 19-14.025 par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. T... Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'avoir prononcé la nullité du mandat de vente sans exclusivité en date du 20 mars 2013, conclu entre la société Le Clos de l'Aubépin, mandante, et la société Confort Transactions, mandataire, d'avoir débouté la société Confort Transactions de ses demandes et d'avoir débouté M. T... de ses demandes ; aux motifs que « la contestation de l'appelante concernant la validité du mandat ne peut être considérée comme tardive ayant déjà été formulée dans le cadre de l'instance au fond ; qu'il ne résulte du mail du 3 décembre 2013, émanant de M. L... et adressé à M. T..., aucun commencement d'exécution du mandat litigieux de la part de la SCI Le Clos de l'Aubépin ; qu'il est exposé par l'appelante que le signataire du mandat, M. T... n'aurait pas la carte professionnelle d'agent immobilier ; que la société Confort Transaction réplique, et rapporte la preuve qu'il bénéficie d'une attestation délivrée par elle-même, détenteur de la carte professionnelle, visée par le préfet, qui lui permet d'exercer pour le compte d'un agent immobilier ; que l'appelante soutient en réponse qu'en application de l'article 9, disposition d'ordre public, le nom et la qualité du titulaire de l'attestation doivent être mentionnés dans les conventions visées à l'article 6 de la loi du 2 juillet 70 ; qu'en effet, il résulte de l'article 9 du décret du 20 juillet 1972 fixant les conditions d'application de la loi nº 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et fonds de commerce, disposition d'ordre public, que "les nom et qualité du titulaire de l'attestation doivent être mentionnés dans les conventions visées à l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 susvisée (à savoir les mandats de vente) lorsqu'il intervient dans leur conclusion, ainsi que sur les reçus de versements ou remises lorsqu'il en délivre" ; que le nom et la qualité de M. T... n'étant pas mentionnés dans le mandat de vente sans exclusivité en date du 20 mars 2013, il résulte de la violation de cette disposition d'ordre public la nullité du mandat de vente, le fait qu'il ait été antérieurement connu du mandant, ce dont la preuve n'est de plus pas rapportée, important peu ; que par conséquent la société Confort Transaction est déboutée de l'ensemble de ses demandes ; attendu que la société Confort Transaction étant déboutée de sa demande, la demande accessoire de M. T... en paiement de dommages et intérêts suite à la privation de sa commission relative au mandat de vente annulé doit être rejetée ; qu'il en est de même de sa demande fondée sur l'article 1240 du code civil en l'absence de preuve d'un préjudice en lien de causalité avec la faute alléguée » ; alors 1/ que le titulaire d'une carte professionnelle d'agent immobilier peut habiliter une personne à négocier, s'entremettre ou s'engager pour son compte, la personne ainsi habilitée devant justifier de la qualité et de l'étendue de ses pouvoirs par la production de l'attestation visée par l'article 9 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ; que si, en vertu de cette disposition, les nom et qualité du titulaire de l'attestation doivent être mentionnés sur le mandat de vente qu'il conclut avec un tiers au nom et pour le compte du titulaire de la carte professionnelle, cette mention n'est pas prescrite à peine de nullité dudit mandat ; que pour prononcer l'annulation du mandat du 20 mars 2013, conclu entre la société Confort Transactions, titulaire de la carte professionnelle, et la société Le Clos de l'Aubépin, par l'intermédiaire de M. T..., titulaire de l'attestation, la cour d'appel a retenu que le nom et la qualité de ce dernier n'étaient pas mentionnés sur le mandat au mépris des exigences de l'article 9 du décret du 20 juillet 1972, disposition d'ordre public ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble l'article 4 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 dans leur rédaction applicable à l'espèce ; alors 2/ que l'annulation du contrat de mandat d'un agent immobilier à raison de l'omission, sur l'acte, de la mention du nom et de la qualité de la personne habilitée qui l'a négocié, constitue une sanction disproportionnée ; qu'en prononçant une telle annulation, nonobstant la circonstance, acquise aux débats, que grâce à ce mandat, les 24 lots composant le programme immobilier avaient été vendus à un bailleur social, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et l'article 9 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 dans leur rédaction applicable en l'espèce, ensemble l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Moyen produit au pourvoi n° H 19-14.112 par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Confort transactions Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la nullité du mandat de vente sans exclusivité en date du 20 mars 2013, conclu entre la SCI Le Clos de l'Aubépin, mandante et la société Confort Transactions, mandataire, et d'avoir débouté la société Confort Transactions de l'ensemble de ses demandes ; Aux motifs que « la contestation de l'appelante concernant la validité du mandat ne peut être considérée comme tardive ayant déjà été formulée dans le cadre de l'instance au fond ; qu'il ne résulte du mail du 3 décembre 2013, émanant de M. L... et adressé à M. T..., aucun commencement d'exécution du mandat litigieux de la part de la SCI Le Clos de l'Aubépin ; qu'il est exposé par l'appelante que le signataire du mandat, M. T... n'aurait pas la carte professionnelle d'agent immobilier ; que la société Confort Transaction réplique, et rapporte la preuve qu'il bénéficie d'une attestation délivrée par elle-même, détenteur de la carte professionnelle, visée par le préfet, qui lui permet d'exercer pour le compte d'un agent immobilier ; que l'appelante soutient en réponse qu'en application de l'article 9, disposition d'ordre public, le nom et la qualité du titulaire de l'attestation doivent être mentionnés dans les conventions visées à l'article 6 de la loi du 2 juillet 70 ; qu'en effet, il résulte de l'article 9 du décret du 20 juillet 1972 fixant les conditions d'application de la loi nº 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et fonds de commerce, disposition d'ordre public, que "les nom et qualité du titulaire de l'attestation doivent être mentionnés dans les conventions visées à l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 susvisée (à savoir les mandats de vente) lorsqu'il intervient dans leur conclusion, ainsi que sur les reçus de versements ou remises lorsqu'il en délivre" ; que le nom et la qualité de M. T... n'étant pas mentionnés dans le mandat de vente sans exclusivité en date du 20 mars 2013, il résulte de la violation de cette disposition d'ordre public la nullité du mandat de vente, le fait qu'il ait été antérieurement connu du mandant, ce dont la preuve n'est de plus pas rapportée, important peu ; que par conséquent la société Confort Transaction est déboutée de l'ensemble de ses demandes » (arrêt, p. 7 et 8) ; Alors 1°) que le titulaire d'une carte professionnelle d'agent immobilier peut habiliter une personne physique, tel qu'un agent commercial, à conclure un mandat en son nom et pour son compte ; que cette personne justifie alors de la qualité et de l'étendue de ses pouvoirs par la production d'une attestation délivrée par l'agent immobilier ; que, si le mandat conclu par cette personne physique doit mentionner le nom et la qualité de cette dernière, cette mention n'est pas requise à peine de nullité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que le mandat conclu le 20 mars 2013 entre la société Confort Transactions et la SCI Le Clos de l'Aubépin avait été signé par M. T..., agent commercial lié à la société Confort Transactions, sans que le mandat ne mentionne le nom et la qualité du signataire, et qu'il en résultait la violation d'une disposition d'ordre public, justifiant la nullité du mandat (arrêt, p. 8) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que ces indications ne sont pas prescrites à peine de nullité du mandat de vente, la cour d'appel a violé les articles 4 et 6 de loi n°70-9 du 2 janvier 1970 et 9 du décret du 20 juillet 1972 ; Alors 2°) que, en tout état de cause, l'exception de nullité ne peut être invoquée lorsque l'acte argué de nullité a connu un commencement d'exécution, indépendamment de la personne qui l'effectue ; qu'en l'espèce, la société Confort Transactions faisait valoir (concl., p. 11 dernier §) que le mandat conclu avec la SCI Le Clos de l'Aubépin avait reçu un début d'exécution, de sorte qu'il n'était plus possible d'exciper de sa prétendue nullité ; qu'elle se prévalait notamment d'une lettre émanant d'un acheteur potentiel, la société Semcoda, qui formulait une offre d'acquisition (concl., p. 2) ; qu'elle se prévalait également d'un courriel du 3 décembre 2013 émanant de M. L..., agissant pour la SCI Le Clos de l'Aubépin, et adressé à M. T... d'où il résultait la reconnaissance du rôle d'ores et déjà joué par ce dernier dans la commercialisation du programme immobilier ; que la cour d'appel a pourtant accueilli l'exception de nullité invoquée par la SCI Le Clos de l'Aubépin en retenant qu'il ne résultait pas du courrier du 3 décembre 2013 un commencement d'exécution du mandat litigieux de la part de la SCI Le Clos de l'Aubépin (arrêt, p. 7 § 14) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas du courrier du 21 mai 2013 et du courriel du 3 décembre 2013 que le mandat avait reçu un début d'exécution de la part de la société Confort Transactions, ce qui privait la SCI de la possibilité de se prévaloir d'une prétendue nullité du mandat de vente, le commencement d'exécution n'ayant pas à émaner d'une partie en particulier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
Il résulte des articles 4, alinéa 1, de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 9, alinéa 7, du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, dispositions d'ordre public, qu'à défaut de mention, dans le mandat, du nom et de la qualité de la personne habilitée par un titulaire de la carte professionnelle à négocier, s'entremettre ou s'engager pour le compte de ce dernier, cette convention est nulle. Si l'annulation du mandat de vente prive l'agent immobilier et l'intermédiaire de la rémunération prévue au mandat, qui constitue une créance entrant dans le champ d'application de l'article 1er du premier Protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette mesure est proportionnée à l'objectif poursuivi par les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 et du décret du 20 juillet 1972 d'organiser l'accès à la profession d'agent immobilier, d'assurer la compétence et la moralité des agents immobiliers et de protéger le mandant qui doit pouvoir s'assurer que la personne à qui il confie le mandat est habilitée par l'agent immobilier, est titulaire de l'attestation légale et dispose des pouvoirs nécessaires
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation partielle Mme BATUT, président Arrêt n° 668 FS-P+B Pourvoi n° T 19-19.481 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 Mme J... S..., épouse A... , domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° T 19-19.481 contre l'arrêt rendu le 30 avril 2019 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. N... I..., domicilié [...] , 2°/ à Mme H... P..., épouse V..., domiciliée [...] , 3°/ à Mme R... P..., épouse Y..., domiciliée [...] , 4°/ à Mme T... V..., épouse K..., domiciliée [...] , défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme S..., de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. I..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mmes V..., Y... et K..., l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Kloda, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 30 avril 2019), les 2 mars et 19 juin 2009, M. I... et la société Créations immobilier conseils ont chacun confié à Mme A... , agent immobilier, un mandat de recherche en vue d'acquérir un terrain sur la commune de Cadaujac, moyennant une commission de 12 000 euros à la charge de l'acquéreur. Le 24 juin 2009, Mmes V..., Y... et K... (les vendeurs), propriétaires indivises de deux terrains situés sur cette commune, ont donné mandat à Mme A... de les vendre. Par acte sous seing privé du 29 juin 2009, les vendeurs ont consenti deux promesses de vente de leurs terrains à la société Créations immobilier conseils et à M. I... qui s'est ensuite substitué à cette société. Après l'établissement d'un procès-verbal de carence, le 15 mars 2010, en raison de la défaillance des vendeurs, la vente des deux terrains a été réitérée, le 8 octobre 2010, par un acte authentique unique au profit de M. I.... 2. Le 24 avril 2014, Mme A... a assigné M. I... en paiement de la somme de 24 000 euros au titre de ses commissions dues en exécution des mandats de recherche. Le 13 octobre suivant, celui-ci a appelé les vendeurs en la cause. M. I... et les vendeurs ont opposé la nullité des mandats de recherche. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. Mme A... fait grief à l'arrêt de déclarer mal fondée la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de nullité des mandats et de rejeter ses demandes formées contre M. I... et contre les vendeurs, alors « que, pour l'application de la règle, selon laquelle l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui n'a pas encore été exécuté, le commencement d'exécution de l'acte s'apprécie indépendamment de la personne qui l'effectue et à l'égard de toute obligation contractée en vertu de l'acte argué de nullité ; qu'en disant mal-fondée la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de nullité des mandats au motif qu'il ne pouvait être soutenu que M. I... avait exécuté tout ou partie de ses obligations dès lors que précisément Mme A... l'avait assignée en paiement de la totalité des commissions envisagées, quand l'exécution des mandats de recherche et de vente argués de nullité pouvait tout aussi bien émaner de Mme A... pour ce qui concernait ses propres obligations, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. » Réponse de la Cour Vu l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : 4. Il résulte de ce texte qu'à compter de l'expiration du délai de prescription de l'action en nullité, l'exception de nullité n'est plus recevable si l'acte a reçu un commencement d'exécution par l'une des parties. 5. Pour déclarer mal fondée la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'exception de nullité des mandats et rejeter les demandes en paiement de Mme A... , l'arrêt énonce qu'il ne peut être retenu que M. I... a exécuté tout ou partie des obligations tirées des mandats de recherche, dès lors que Mme A... l'assigne en exécution forcée et pour le paiement de la totalité des commissions envisagées. 6. En statuant ainsi, alors que le commencement d'exécution du mandat devait être apprécié indépendamment de la partie qui l'avait effectué, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Mise hors de cause 7. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause Mmes V..., Y... et K..., dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevables les conclusions de Mme A... transmises le jour de l'ordonnance de clôture, l'arrêt rendu le 30 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause Mmes V..., Y... et K... ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ; Condamne M. I... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour Mme S..., épouse A... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré mal fondée la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de nullités des mandats, et partant, d'avoir débouté Mme A... de ses demandes contre M. I... et contre Mmes V..., Y... et K... ; AUX MOTIFS QUE sur la prescription de la demande en nullité des mandats, « Madame A... argue de ce que le moyen soulevé par Monsieur I... et par les dames Y..., V... et K... tendant à voir prononcer la nullité des mandats n'est pas recevable en raison de la prescription. S'il résulte de l'article 2224 du Code civil que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent pas cinq ans à compter du jour où le titulaire a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, la prescription d'une action en nullité ne prive pas la partie intéressée du droit d'opposer celle-ci comme exception en défense à une action principale, étant rappelé que les contrats ont été conclu avant l'ordonnance du 10 février 2016 d'où est issu l'actuel article 1185 du Code civil. De même il est constant que l'exception de nullité peut être invoquée alors même que l'action en nullité n'était pas prescrite lors de l'introduction de l'action en exécution (civ 1ère 12/11/2015 n° 14-21.525). Il ne peut être non plus retenu que M. I... a exécuté tout ou partie de ses obligations tirées des mandats de recherche dès lors que précisément Madame A... l'assigne en exécution forcée et pour le paiement de la totalité des commissions envisagées. La fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes en nullité est mal fondée » ; 1°) ALORS QUE pour l'application de la règle, selon laquelle l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui n'a pas encore été exécuté, le commencement d'exécution de l'acte s'apprécie indépendamment de la personne qui l'effectue et à l'égard de toute obligation contractée en vertu de l'acte argué de nullité ; qu'en disant mal-fondée la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de nullité des mandats au motif qu'il ne pouvait être soutenu que M. I... avait exécuté tout ou partie de ses obligations dès lors que précisément Mme A... l'avait assignée en paiement de la totalité des commissions envisagées, quand l'exécution des mandats de recherche et de vente argués de nullité pouvait tout aussi bien émaner de Mme A... pour ce qui concernait ses propres obligations, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QUE pour l'application de la règle, selon laquelle l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui n'a pas encore été exécuté, le commencement d'exécution de l'acte s'apprécie indépendamment de la personne qui l'effectue et à l'égard de toute obligation contractée en vertu de l'acte argué de nullité ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si Mme A... n'avait pas réalisé sa mission en mettant en relation M. N... I..., la SARL Création immobilier et Mmes H... V..., R... Y... et T... K..., et si, par son entremise, l'opération n'avait pas été effectivement conclue, de sorte que les mandats de recherche et de vente argués de nullité avait reçu un commencement d'exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si, tant M. I... que Mmes V..., Y... et K..., n'avaient pas invoqué le moyen tiré de la nullité des mandats de recherche et de vente postérieurement à l'expiration de prescription de cinq ans, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ; 4°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE tant M. I... (conclusions, pp. 3-4) que Mmes V..., Y... et K... (p. 9, alinéa 5) admettaient avoir invoqué la nullité des mandats postérieurement à l'expiration du délai de prescription, de sorte qu'à supposer que la cour d'appel ne l'ait pas elle-même admis, elle a modifié les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION subsidiaire Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme A... de sa demande en paiement de la somme en principal de 24.000 euros contre M. I... au titre des commissions stipulées dans les mandats de recherche ; AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la régularité des mandats, « Mme A... argue de l'arrêt rendu en chambre mixte de la Cour de cassation le 24 février 2017 pour avancer qu'il met fin à la jurisprudence selon laquelle la nullité tenant au non-respect des formes prescrites par la loi Hoguet pouvait être absolue et soulevée par toute partie qui avait un intérêt et qu'il n'y a lieu désormais de ne retenir qu'une nullité relative. De ce chef, il doit être relevé d'une part que l'ordonnance n° 2007-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations est entrée en vigueur le 1er octobre 2016, que les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne. D'autre part, dans cette espèce distincte, la nullité du mandant de l'agent immobilier était arguée par le locataire pour faire échec au congé pour vendre délivré par l'agent immobilier mandaté par la SCI propriétaire aux fins de vente du bien. En l'espèce, la nullité du mandat est arguée tant par M. I... que par les intimées, ayant chacun signé un mandat avec Madame A... de sorte qu'il s'agit d'une hypothèse distincte. Le droit à commission de l'agent immobilier dépend de l'existence et de la régularité des mandats dont il se prévaut, au regard des mentions impératives prescrites par les articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 73 du décret du 20 juillet 1972. Il en résulte que le mandat doit comporter un numéro d'ordre qui doit figurer sur l'exemplaire du mandant. Il doit également mentionner le nom et l'adresse du mandataire, le numéro et le lieu de délivrance de la carte professionnelle. L'exemplaire du mandat conféré à un agent immobilier reste en la possession du mandant doit, à peine de nullité, mentionner le numéro d'inscription au registre des mandats. Or, il résulte des pièces versées que les deux mandats de vente souscrits le 26 juin 2009 par les dames V..., Y... et K... (consorts P...) pour des prix de vente de 157.000 € et 147.000 € et prévoyant chacun une rémunération d'un montant de 12.000 € pour l'agence Leader Immobilier et à la charge de l'acquéreur ne comportent aucun numéro de mandat sur les originaux détenus par les consorts P... comme sur les copies produites par M. J... A... . Ils sont irréguliers, cette absence affectant leur validité. Les intimées sont fondées à se prévaloir de cette nullité dès lors qu'elles ont été attraites en la cause et ont conclu à cette fin. Par ailleurs, les mandats de recherche dont la copie est produite par madame A... , signé l'un le 2 mars 2009 par monsieur N... I..., l'autre le 19 juin 2009 par la société Créations Immobilier Conseils comportent une incohérence dès lors que celui du 2 mars 2009 porte le numéro 920 et celui du 19 juin 2009 porte le numéro 918. Or ces mandats doivent être répertoriés dans un registre unique par ordre chronologique ; l'incohérence de la chronologie ci-dessus exposée (confortée par l'écart seulement de deux numéros alors qu'un délai de plus de trois mois sépare les mandats) constitue une irrégularité affectant la validité des mandats. Chacun des compromis de vente du 19 juin 2009 signés exclusivement entre les défenderesses Mesdames V..., Y... et K... et les acquéreurs pour l'un M. I..., pour l'autre la Selarl Créations Immobilier Conseils, porte en page 5 sous la rubrique commission la mention : «les parties déclarent avoir été mises en relation par Leader Immobilier à Villenave D'ornon à laquelle sera due une commission d'un montant toutes taxe comprises de 12 000 € par l'acquéreur. » Cette mention n'a d'effet relatif qu'entre les parties, qui peuvent encore en modifier les termes dans l'acte définitif, et n'emporte par aucune d'elles renonciation à tous moyens de droit à l'égard de Leader Immobilier. En revanche, l'acte définitif de vente signé entre les parties le 8 octobre 2010 porte en page 23 la mention suivante : « les parties confirment qu'un accord transactionnel a été passé entre elles au prix de 325 000 € pour l'ensemble des terrains objets des deux promesses synallagmatiques de vente. Au terme dudit accord les vendeurs ont déclaré faire leur affaire personnelle de la commission d'agence et entendent se prévaloir du non-respect par l'agence ou d'éventuels dommages et intérêts dus à LEADER IMMOBILIER. Les vendeurs réitèrent leur volonté de faire leur affaire personnelle de la commission d'agence et entendent se prévaloir du non-respect par l'agence immobilière LEADER IMMOBILIER des dispositions de la loi numéro 70-9 du 2 janvier 1970 dite loi HOGUET et de son décret d'application du 20 juillet 1972 et déclarent considérer le mandat comme nul. Les vendeurs déchargent tant Me C... que Me W... de toute responsabilité à ce sujet. Il en est de même pour l'acquéreur, l'accord transactionnel sus-relaté ayant été négocié en considération du coût d'un éventuel litige. » C'est ainsi à juste titre que le premier juge a relevé l'irrégularité de chacun des quatre mandats et les a déclarés nuls, nullité privant Madame A... de tout droit à commission. » ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « De l'existence et de la régularité des actes dépend la rémunération du professionnel agent immobilier. Le droit à commission existe pour chacun des mandats dès lors que sont satisfaites les exigences prescrites par les articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et l'article 73 du décret du 20 juillet 1972. Le mandat doit comporter un numéro d'ordre qui doit figurer que l'exemplaire du mandant. Il doit aussi mentionner le nom et l'adresse du mandataire, le numéro et le lieu de délivrance de la carte professionnelle. Il résulte des articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 72 du décret du 20 juillet 1972 que l'exemplaire du mandat conféré à un agent immobilier qui reste en la possession du mandant doit, à peine de nullité, mentionner le numéro d'inscription au registre des mandats. Il convient de relever que les deux mandats de vente souscrits le 26 juin 2009 par mesdames V..., Y... et K... (consorts P...) pour des prix de vente de 157.000 € et 147.000 € et prévoyant une rémunération pour Leader Immobilier de 12.000 € pour chaque acte à la charge de l'acquéreur, ne comportent aucun numéro de mandat sur les originaux détenus par les consorts P... comme sur les copies produites par madame J... A... . Par ailleurs, les mandats de recherche dont la copie est produite par madame A... , signés l'un le 2 mars 2009 par monsieur N... I..., l'autre le 19 juin 2009 par la société Créations Immobilier Conseils comportent une incohérence dès lors que celui du 2 mars 2009 comporte le numéro 920 et celui du 19 juin 2019 comporte le numéro 918. Or, ces mandats doivent être répertoriés dans un registre unique par ordre chronologique et l'incohérence de la chronologie outre la différence seulement de deux numéros alors qu'il existe plus de trois mois d'écart entre les mandats, constituent des irrégularités de nature à entacher la validité des mandats. La loi n'a pas prévu une régularisation a postériori. Aussi, la reconnaissance par les parties aux compris de vente du 29 juin 2009 du droit à commission de madame A... ne peut occulter les irrégularités qui de surcroît n'avaient pas encore été relevées, ce droit à commission avait été alors reconnu dans l'ignorance de la nullité encourue. En revanche, l'acte définitif de vente signé entre les parties par acte du 8 octobre 2010 fait bien état de la nullité encourue des mandats, les vendeurs déclarant en faire leur affaire personnelle. Aucun des quatre mandats n'étant régulier, ils doivent ainsi tous être déclarés nuls, privant ainsi madame A... de tout droit à rémunération. Le préjudice invoqué par l'agent immobilier ne peut en principe être réparé s'il trouve sa cause dans l'irrégularité du mandat qui lui est imputable » ; ALORS QUE l'agent immobilier doit, à peine de nullité, mentionner tous les mandats par ordre chronologique sur un registre des mandats à l'avance coté sans discontinuité et relié, et reporter le numéro d'inscription sur l'exemplaire du mandat qui reste en la possession du mandant ; que les mandats peuvent être enregistrés selon l'ordre chronologique de leur réception par l'agent immobilier ; qu'en retenant que les mandats de recherche dont la copie était produite par madame A... , signés l'un le 2 mars 2009 par monsieur N... I..., l'autre le 19 juin 2009 par la société Créations Immobilier Conseils, comportaient une incohérence dès lors que celui du 2 mars 2009 comportait le numéro 920 et celui du 19 juin 2019 comportait le numéro 918, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le mandat de recherche signé le 2 mars 2009 par M. I... portait le numéro 920 tout simplement parce qu'il avait été reçu par l'agent immobilier après le mandat de recherche signé le 19 juin 2009 par la société Créations Immobilier Conseils, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 72 du décret du 20 juillet 1972, dans leur rédaction applicable en la cause.
Il résulte de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, qu'à compter de l'expiration du délai de prescription de l'action en nullité, l'exception de nullité n'est plus recevable si l'acte a reçu un commencement d'exécution par l'une des parties. Ainsi le commencement d'exécution du contrat s'apprécie indépendamment de la partie qui l'effectue
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Rejet Mme BATUT, président Arrêt n° 669 FS-P+B Pourvoi n° H 19-16.964 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 1°/ M. D... L..., 2°/ Mme I... R..., épouse L..., domiciliés tous [...], ont formé le pourvoi n° H 19-16.964 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2019 par la cour d'appel de Dijon (2e chambre civile), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Crédit logement, société anonyme, dont le siège est [...] , 2°/ à la société Le Crédit lyonnais, société anonyme, dont le siège est [...] , ayant sa direction des affaires juridiques Est Rhône-Alpes-Auvergne-Ouest-Sud-Ouest, immeuble Plaza, [...] , défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. et Mme L..., de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat des sociétés Crédit logement et Le Crédit lyonnais, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 21 mars 2019), suivant acte authentique du 6 juin 2007, la société Le Crédit lyonnais (la banque) a consenti à M. L... et Mme R... (les emprunteurs) deux prêts destinés à financer l'acquisition d'un bien immobilier. A la suite du placement de M. L... en longue maladie, d'échéances demeurées impayées et d'un refus de garantie opposé par l'assureur couvrant les risques décès, invalidité, incapacité, la société Crédit logement, agissant en qualité de mandataire de la banque (le mandataire), s'est prévalue de la déchéance du terme par acte du 10 juin 2013. 2. Par acte du 28 août 2013, la banque a fait pratiquer une saisie-attribution contestée par les emprunteurs devant le juge de l'exécution. Par actes des 27 et 28 août 2013, les emprunteurs ont assigné la banque et le mandataire aux fins de voir constater la forclusion de l'action et ont sollicité l'allocation de dommages-intérêts pour manquement de la banque à son devoir de mise en garde. Celle-ci a sollicité reconventionnellement le remboursement du solde des prêts par conclusions du 18 août 2014. 3. Le 4 octobre 2013, l'assureur a finalement accepté de prendre en charge les échéances des prêts pour la période du 26 avril 2009 au 1er septembre 2012. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription, à l'exception des échéances impayées du 1er décembre 2010 au 1er août 2011 afférentes à un des deux prêts et de les condamner à payer diverses sommes à la banque, alors : « 1°/ que l'action des professionnels, pour les biens et services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; qu'en présence d'une dette payable par termes successifs, lorsque l'emprunteur a agi en justice avant le 11 février 2016 aux fins de voir constater la forclusion du prêteur et que le prêteur a lui-même formulé une demande reconventionnelle en paiement avant cette date, le principe de sécurité juridique et le droit à un procès équitable exigent que l'emprunteur puisse se prévaloir de la jurisprudence de la Cour de cassation antérieure à son revirement du 11 février 2016, en ce qu'elle décidait, sur le fondement de l'article L. 137-2 du code de la consommation, que la prescription de l'action en paiement du capital restant dû courait à compter du premier incident de paiement non régularisé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que pour les deux prêts concernés, les premiers impayés non régularisés étaient antérieurs au revirement de jurisprudence du 11 février 2016, de même que l'action des emprunteurs visant à voir constater la forclusion de la banque ainsi que la demande reconventionnelle en paiement de la banque ; qu'en outre, s'agissant du prêt de 18 000 euros, il résulte des constatations de l'arrêt que selon la solution jusqu'alors consacrée par la haute juridiction, l'action de la banque en paiement du capital restant dû était déjà prescrite lors du revirement de jurisprudence précité ; que dès lors, en appliquant le revirement de jurisprudence du 11 février 2016 à la présente instance, en cours au moment de son prononcé, la cour d'appel a violé l'article L. 137-2 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2°/ que, dans leurs conclusions d'appel, les emprunteurs faisaient valoir, éléments de preuve à l'appui, que s'agissant du prêt de 104 765 euros, le premier impayé non régularisé remontait en réalité à l'année 2009 et non au 1er septembre 2011 comme le soutenait la banque ; que dès lors, en jugeant qu'il ressortait des pièces versées aux débats par la banque que le premier impayé non régularisé relatif au prêt de 104 765 euros remontait au 1er septembre 2011, sans répondre au moyen précité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. En premier lieu, la cour d'appel a exactement énoncé que la sécurité juridique, invoquée sur le fondement du droit à un procès équitable pour contester l'application immédiate d'une solution nouvelle résultant d'une évolution de la jurisprudence ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence figée. Cette évolution relève de l'office du juge dans l'application du droit. 6. En second lieu, sous le couvert d'un grief non fondé de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre, en discussion devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui a estimé que la date du premier impayé non régularisé concernant l'un des prêts devait être fixée le 1er septembre 2011. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 8. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer diverses sommes à la banque au titre des prêts, alors « que le règlement par l'assureur, en vertu du contrat d'assurance adossé à un prêt immobilier, des échéances impayées par l'emprunteur ayant conduit la banque à prononcer la déchéance du terme, rend caduque la déchéance du terme ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'assureur avait dans un premier temps refusé de prendre en charge les mensualités impayées par les emprunteurs, que la banque avait prononcé la déchéance du terme des deux prêts immobiliers le 10 juin 2013 en raison de ces impayés, et que l'assureur avait finalement reconsidéré sa position en acceptant la mise en jeu de sa garantie le 4 octobre 2013 ; qu'il résultait de ces constatations que la déchéance du terme était caduque ; que dès lors, en jugeant que « les versements effectués ultérieurement par la compagnie d'assurance [n'avaient] pas pu avoir pour effet de remettre en cause l'exigibilité résultant de la déchéance du terme prononcée le 10 juin 2013 », la cour d'appel a violé l'article 1186 du code civil dans sa rédaction applicable au litige. » Réponse de la Cour 9. Le règlement des sommes correspondant au montant des échéances impayées d'un prêt ayant conduit la banque à prononcer la déchéance du terme, effectué postérieurement à celle-ci par l'assureur de l'emprunteur, ne peut, sauf stipulations contractuelles expresses, entraîner la caducité de cette déchéance. 10. Ayant relevé que l'article 5 des conditions générales des prêts prévoyait que les régularisations postérieures à la déchéance du terme ne faisaient pas obstacle à l'exigibilité résultant de cette dernière, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que les versements effectués par l'assureur sur le compte des emprunteurs n'avaient pu avoir pour effet de remettre en cause l'exigibilité résultant de la déchéance du terme. 11. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 12. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de dommages-intérêts, alors : « 1°/ que, dans leurs conclusions d'appel, les emprunteurs soutenaient que la banque avait manqué à son devoir de mise en garde à leur égard, à raison de leurs capacités financières et des risques de l'endettement né de l'octroi des deux prêts immobiliers ; qu'à cet égard, ils faisaient valoir que « concomitamment aux prêts immobiliers, le Crédit Lyonnais [avait] consenti aux consorts L... deux crédits à la consommation », et que la banque « n'apport[ait] aucune explication sur ces crédits (...) lesquels augmentent pourtant le passif des emprunteurs » ; que dès lors, en écartant toute responsabilité de la banque au titre du devoir de mise en garde, sans répondre au moyen précité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ que les juges ont l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'acte authentique du 6 juin 2007 portant sur l'acquisition de l'immeuble par les emprunteurs et le financement de l'achat par deux prêts consentis par la banque, partie à l'acte, stipulait expressément, pour le prêt de 104 765 euros, que la « première échéance » interviendrait « le : 1er juillet 2009 » ; que dès lors, en jugeant que « la cour d'appel ignore cependant à quoi correspond la date [du 1er juillet 2009] invoquée par les époux L... alors que l'examen de l'acte de prêt ne fait à aucun moment apparaître la stipulation d'un différé d'amortissement », pour en déduire que la banque n'avait pas commis de faute en prélevant immédiatement des échéances mensuelles au titre du prêt de 104 765 euros, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du contrat précité en violation du principe susvisé ; 3°/ que, dans leurs conclusions d'appel, les emprunteurs faisaient valoir que la poursuite du recouvrement forcé par la banque et le mandataire était fautif, dans la mesure où il était établi que l'assurance devait prendre en charge les mensualités des prêts à compter de juillet 2009 ; qu'ils soulignaient avoir informé le mandataire, par un courrier du 13 juin 2013 produit aux débats, de leur démarche auprès de l'assureur pour contester le refus de prise en charge initialement opposé, et demandé au mandataire de la banque de suspendre toute poursuite dans l'attente de connaître la position de l'assureur ; qu'ils ajoutaient que, par un courrier du 13 juillet 2013 également produit aux débats, ils avaient transmis au mandataire la réponse de l'assureur qui acceptait de mandater leur médecin-expert pour un examen médical de M. L... ; que dès lors, en ne recherchant pas si la banque et son mandataire n'avaient pas commis une faute en diligentant une saisie à l'encontre des emprunteurs le 28 août 2013, malgré le recours et l'examen médical à venir de M. L... dont ils étaient informés, et qui étaient de nature à modifier la position de l'assureur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige. » Réponse de la Cour 13. En premier lieu, l'arrêt relève que dans la perspective de l'octroi des prêts litigieux, la banque avait établi une fiche de renseignements certifiés exacts par les emprunteurs le 21 avril 2007, sur le montant de leurs revenus, qu'à cette fiche ont été joints divers justificatifs, que la fixation des échéances de remboursement des prêts litigieux a pris en compte un crédit antérieur, que la charge de remboursement mensuel global restait sensiblement constante et, en tout état de cause, toujours inférieure au taux d'endettement de 33 % communément admis comme permettant un remboursement sans risque particulier et que les mensualités des prêts ont été régulièrement honorées jusqu'à ce que M. L... soit confronté à des problèmes de santé. 14. Sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, la cour d'appel a ainsi fait ressortir qu'en l'absence d'un risque d'endettement excessif, la banque n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde à l'égard des emprunteurs. 15. En deuxième lieu, c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, de l'acte authentique, rendue nécessaire par l'ambiguïté de ses clauses, qu'elle a estimé que la banque avait pu prélever la première échéance le 11 juin 2007. 16. En troisième lieu, se fondant sur le fait que l'assureur avait commencé par refuser sa garantie aux emprunteurs et n'avait modifié sa position qu'en octobre 2013, soit postérieurement à la date à laquelle les sommes étaient devenues exigibles à la suite du prononcé de la déchéance du terme, aux mises en demeure du mandataire et à la mesure de saisie-attribution, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que la banque n'avait pas commis de faute en poursuivant le recouvrement forcé des sommes dues malgré le changement de position de l'assureur. 17. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. L... et Mme R... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme L... PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté la fin de nonrecevoir tirée de la prescription, à l'exception de la prescription des échéances impayées du 1er décembre 2010 au 1er août 2011 afférentes au prêt de 18 000 €, et D'AVOIR en conséquence condamné les époux L... à payer diverses sommes à la société Le Crédit Lyonnais ; AUX MOTIFS QUE « l'article L. 137-2 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que l'action des professionnels, pour les biens et services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; que le 11 février 2016, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en décidant qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même, et court à compter de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéances successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ; qu'il convient d'emblée d'approuver le jugement déféré en ce qu'il a écarté l'argument tiré par les époux L... de la jurisprudence antérieure, selon laquelle la prescription courait à compter du premier impayé non régularisé, les intimés ne pouvant en effet se prévaloir, sur le fondement de l'article 5 du code civil et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, d'un droit acquis au bénéfice d'une jurisprudence obsolète ; qu'il ressort des pièces versées aux débats par le Crédit Lyonnais que le premier impayé non régularisé relatif au prêt de 18 000 € remonte au 1er décembre 2010, et que celui relatif au prêt de 104 765 € remonte au 1er septembre 2011 ; que la déchéance du terme a quant à elle été prononcée pour les deux prêts le 10 juin 2013 ; que les époux L... contestent cependant à cette déchéance du terme tout effet interruptif, en raison de son irrégularité, en se prévalant du fait que la déchéance n'a pas été prononcée par le prêteur, à savoir la société le Crédit Lyonnais, mais par la société Crédit Logement ; que toutefois, il résulte explicitement des mises en demeures adressées aux intéressés à partir du 13 février 2013 que la société Crédit Logement avait été mandatée par le Crédit Lyonnais afin de procéder au recouvrement, par toutes voies de droit du montant de ses créances ; qu'au demeurant il ressort du dispositif des propres écritures des intimés qu'ils ne se sont pas mépris sur la qualité de la société Crédit Logement, qu'ils qualifient eux mêmes de mandataire de la société le Crédit Lyonnais ; qu'au regard de ces éléments, il sera retenu que la déchéance du terme a été valablement prononcée par la société Crédit Logement pour le compte de la société le Crédit Lyonnais ; que le premier acte interruptif de prescription est constitué par le procès-verbal de saisie-attribution du 28 août 2013; que contrairement à ce que soutiennent les époux L... la mainlevée que le juge de l'exécution a donnée de cette saisie n'a pas fait disparaitre l'effet interruptif de prescription qui y était attaché ; qu'étant observé que la demande en paiement du solde des prêts a été formulée à titre reconventionnel par le Crédit Lyonnais dans le cadre de la procédure initiée par les époux L... aux termes de conclusions du 18 août 2014, postérieures de moins de deux ans à l'interruption résultant de la saisie-attribution du 28 août 2013, il en résulte qu'aucune prescription n'est encourue pour les échéances impayées et le capital restant dû au titre du prêt de 104 765 €, mais que s'agissant du prêt de 18 000 €, la prescription s'applique aux mensualités impayées du 1er décembre 2010 au 1er août 2011 ; que le jugement déféré, qui a écarté toute prescription en ne prenant en considération que la seule date de déchéance du terme, sera infirmé en ce sens » ; 1 °) ALORS. d'une part. QUE l'action des professionnels, pour les biens et services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; qu'en présence d'une dette payable par termes successifs, lorsque l'emprunteur a agi en justice avant le 11 février 2016 aux fins de voir constater la forclusion du prêteur et que le prêteur a lui-même formulé une demande reconventionnelle en paiement avant cette date, le principe de sécurité juridique et le droit à un procès équitable exigent que l'emprunteur puisse se prévaloir de la jurisprudence de la Cour de cassation antérieure à son revirement du 11 février 2016, en ce qu'elle décidait, sur le fondement de l'article L. 137-2 du code de la consommation, que la prescription de l'action en paiement du capital restant dû courait à compter du premier incident de paiement non régularisé; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que pour les deux prêts concernés, les premiers impayés non régularisés étaient antérieurs au revirement de jurisprudence du 11 février 2016, de même que l'action des époux L... visant à voir constater la forclusion de la banque ainsi que la demande reconventionnelle en paiement du Crédit Lyonnais ; qu'en outre, s'agissant du prêt de 18 000 €, il résulte des constatations de l'arrêt que selon la solution jusqu'alors consacrée par la Haute juridiction, l'action du Crédit Lyonnais en paiement du capital restant dû était déjà prescrite lors du revirement de jurisprudence précité; que dès lors, en appliquant le revirement de jurisprudence du 11 février 2016 à la présente instance, en cours au moment de son prononcé, la cour d'appel a violé l'article L. 137-2 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2°) ALORS. d'autre part. QUE dans leurs conclusions d'appel, les époux L... faisaient valoir, éléments de preuve à l'appui, que s'agissant du prêt de 104 765 €, le premier impayé non régularisé remontait en réalité à l'année 2009 et non au 1er septembre 2011 comme le soutenait la banque (conclusions d'appel, p. 11 à 13) ; que dès lors, en jugeant qu'il ressortait des pièces versées aux débats par le Crédit Lyonnais que le premier impayé non régularisé relatif au prêt de 104 765 € remontait au 1er septembre 2011, sans répondre au moyen précité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION. subsidiaire IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné solidairement M. D... L... et son épouse née I... R... à payer à la société Le Crédit Lyonnais, au titre du prêt de 18 000 €, les sommes de 12 488,92 € en principal et 1 011,50 € au titre de l'indemnité de 7 %, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, et au titre du prêt de 104 765 €, les sommes de 124 903,97 € en principal, avec intérêts au taux de 4,10% à compter du 18 mars 2016, et de 7 667,52 € au titre de l'indemnité de 7 %, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt; AUX MOTIFS QUE « sur le bien-fondé des créances, les époux L... contestent l'exigibilité des prêts au motif que la déchéance du terme a été prononcée de manière irrégulière; qu'à cet égard, ils reprennent en premier lieu le moyen déjà évoqué au soutien de leur fin de non-recevoir, consistant à soutenir que la déchéance du terme n'aurait pas été prononcée par le prêteur; qu'il sera renvoyé sur ce point aux développements antérieurs ayant d'ores et déjà écarté cette argumentation ; qu'ils font valoir ensuite que la déchéance du terme n'a pu être valablement prononcée en l'absence de défaillance des emprunteurs, considérant sur ce point que les versements réalisés par la société d'assurance en suite de la prise en charge accordée au titre de la maladie de M. L... ne constituent pas des versements venant en déduction des sommes dues après déchéance du terme, mais le règlement rétroactif des mensualités antérieures, qui ne peuvent plus être considérées comme ayant été impayées à leurs échéances respectives; qu'il sera cependant rappelé que la prise en charge avait dans un premier temps été refusée par l'assureur, qui n'a finalement accepté la mise en jeu de sa garantie que le 4 octobre 2013, soit près de quatre mois après que la déchéance du terme a été prononcée ; qu'étant rappelé qu'aucun grief ne peut être émis à l'encontre du Crédit Lyonnais du fait du caractère tardif de cette prise en charge, dès lors que c'est au seul assuré, et non à l'organisme bancaire, qu'il incombe d'effectuer les diligences nécessaires à la mise en oeuvre de la garantie, et que l'article 5 des conditions générales des prêts, telles qu'annexées à l'acte authentique versé aux débats, stipulent expressément que les régularisations postérieures à la déchéance du terme ne font pas obstacle à l'exigibilité résultant de cette dernière, il doit nécessairement être considéré que les versements effectués ultérieurement par la compagnie d'assurance n'ont pas pu avoir pour effet de remettre en cause l'exigibilité résultant de la déchéance du terme prononcée le 10 juin 2013 ; que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a retenu le contraire; qu'au vu des pièces contractuelles ainsi que des décomptes versés aux débats, les sommes dues à la banque s'établissent de la manière suivante: (. .. ) [au titre du prêt de 18 000 €, les sommes de 12 488,92 € en principal et 1 011,50 € au titre de l'indemnité de 7 %, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, et au titre du prêt de 104 765 €, les sommes de 124 903,97 € en principal, avec intérêts au taux de 4,10 % à compter du 18 mars 2016, et de 7 667,52 € au titre de l'indemnité de 7 %, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt] » ; ALORS QUE le règlement par l'assureur, en vertu du contrat d'assurance adossé à un prêt immobilier, des échéances impayées par l'empruntE~.Ur ayant conduit la banque à prononcer la déchéance du terme, rend caduque la déchéance du terme; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'assureur avait dans un premier temps refusé de prendre en charge les mensualités impayées par les époux L..., que la banque avait prononcé la déchéance du terme des deux prêts immobiliers le 10 juin 2013 en raison de ces impayés, et que l'assureur avait finalement reconsidéré sa position en acceptant la mise en jeu de sa garantie le 4 octobre 2013 (arrêt attaqué, en partie. p. 7-8); qu'il résultait de ces constatations que la déchéance du terme était caduque ; que dès lors, en jugeant que « les versements effectués ultérieurement par la compagnie d'assurance [n'avaient] pas pu avoir pour effet de remettre en cause J'exigibilité résultant de la déchéance du terme prononcée le 10 juin 2013 » (arrêt attaqué, p. 8 § 2), la cour d'appel a violé l'article 1186 du code civil dans sa rédaction applicable au litige. TROISIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté la demande de dommages-intérêts formée par les époux L...; AUX MOTIFS QUE « les époux L... sollicitent la condamnation solidaire du Crédit Lyonnais et de la société Crédit Logement à leur payer la somme de 150 000 € à titre de dommages-intérêts, en raison des fautes commises par elles à leur égard ; qu'il est en premier lieu invoqué le manquement du Crédit Lyonnais à son obligation de conseil et de mise en garde ; qu'à cet égard, il sera d'abord rappelé qu'une banque n'est pas tenue envers ses clients d'une obligation de conseil ; qu'elle est en revanche tenue d'une obligation de mise en garde à l'égard des emprunteurs non avertis, lorsque l'opération envisagée présente un risque particulier d'endettement au regard des capacités financières des intéressés; que dans la perspective de l'octroi des prêts litigieux, la banque a établi une fiche de renseignements dont les époux L... ont certifié l'exactitude en y apposant leurs signatures le 21 avril 2007, et dont il ressort que M. L... bénéficiait de ressources annuelles s'élevant à 18 058 €, que Mme L... percevait 15 924 € par an, et que sy ajoutaient des allocations familiales à hauteur annuelle de 5 820 € ; qu'il a été joint à cette fiche divers justificatifs concernant les revenus, ainsi que la copie d'un contrat de prêt souscrit en août 2006 auprès du Crédit Municipal pour un montant de 24 000 € ; qu'il est par ailleurs établi par les pièces produites que la fixation des échéances de remboursement des prêts litigieux a pris en compte l'existence de ce crédit antérieur, en fixant des mensualités progressives en considération des remboursements restant à effectuer au profit du Crédit Municipal, la charge de remboursement mensuel global restant sensiblement constante, et en tout état de cause toujours inférieure au taux d'endettement de 33 % communément admis comme permettant un remboursement sans risque particulier ; qu'ainsi, et étant au surplus rappelé que les mensualités des prêts ont été régulièrement honorées jusqu'à ce que M. L... soit confronté à des problèmes de santé, ce qui confirme que l'opération était parfaitement viable, il n'est pas fait la preuve d'un manquement de la banque à son devoir de mise en garde ; que les intimés excipent ensuite d'une immixtion de la banque dans la gestion de leur compte en procédant au prélèvement des échéances des prêts immobiliers alors que le compte était débiteur; que toutefois, ils ne produisent pas aux débats la convention d'ouverture de compte, ce qui, en l'absence notamment de précision quant aux modalités convenues pour son fonctionnement à découvert, ne permet pas de vérifier l'irrégularité invoquée, alors en outre qu'il n'est même pas précisé en quoi ce prélèvement aurait causé aux époux L... un préjudice particulier ; que là encore, la faute de la banque n'est pas caractérisée; qu'il est également fait état d'une faute de la banque dans le prélèvement des échéances mensuelles du prêt de 104 765 €, dont les intimés affirment qu'il est intervenu immédiatement, alors que le prêt stipulait une première échéance au 1er juillet 2009; que la cour ignore cependant à quoi correspond la date ainsi invoquée par les époux L..., alors que l'examen de l'acte de prêt ne fait à aucun moment apparaftre la stipulation d'un différé d'amortissement, le tableau d'amortissement confirmant quant à lui que la première échéance du prêt de 104 765 € a été fixée au 11 juin 2007 ; que c'est également de manière vaine que les époux L... font grief au Crédit Logement de les avoir menacés d'un recouvrement judiciaire, et au Crédit Lyonnais d'avoir diligenté une mesure d'exécution en août 2013, alors que la compagnie d'assurance a pris rétroactivement en charge le paiement des mensualités des emprunts; qu'il doit être rappelé en effet que ce n'est pas à l'organisme financier ou à son mandataire d'effectuer les démarches nécessaires à la prise en charge d'un sinistre par l'assureur, et qu'en tout état de cause, l'assureur avait en l'espèce commencé par refuser sa garantie aux époux L..., et que ce n'est qu'en octobre 2013 qu'elle a finalement modifié sa position, soit postérieurement à la date à laquelle les sommes étaient devenues exigibles en suite du prononcé de la déchéance du terme, et postérieurement tant aux mises en demeure de la société Crédit Logement qu'à la mesure de saisie-attribution, les appelantes n'ayant pu, à ces dates respectives, présumer de l'intervention d'une décision de pris en charge qui n'allait être formalisée par l'assureur qu'ultérieurement ; qu'enfin les époux L... soutiennent que le Crédit Lyonnais n'a pas affecté au remboursement des prêts l'ensemble des sommes versées par la compagnie d'assurance; qu'il résulte certes des décomptes établis par la banque qu'un montant total de 15 152,67 € a été imputé au titre des versements d'assurance, alors que le détail des règlements tels qu'ils ressortent des relevés de situation de la compagnie CBP révèlent le paiement de prestations à hauteur totale de 16 673,03 € (les époux L... faisant eux-mêmes état d'un total de 16 558,35 €}, soit une différence de 1 520,36 € ; que toutefois, les relevés CBP établissent que les versements ont été effectués non pas directement au profit du Crédit Lyonnais, mais sur le compte bancaire ouvert au nom des époux L..., et en plusieurs fois, le dernier versement ayant été opéré postérieurement à la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée sur ce compte le 28 juin 2013 ; qu'or, force est de constater que les époux L..., auxquels incombe sur ce point la charge de la preuve, ne démontrent pas que les sommes réglées sur leur compte par l'assureur ont, dans leur intégralité, été reversées ou prélevées par la banque, de sorte que la preuve d'une faute dans l'imputation des versements n'est pas établie; qu'il y a en définitive lieu de rejeter l'ensemble des griefs formés contre les appelantes, et, partant, de débouter les époux L... de leur demande indemnitaire » ; 1°) ALORS, de première part. QUE dans leurs conclusions d'appel, les époux L... soutenaient que le Crédit Lyonnais avait manqué à son devoir de mise en garde à leur égard, à raison de leurs capacités financières et des risques de l'endettement né de l'octroi des deux prêts immobiliers ; qu'à cet égard, ils faisaient valoir que « concomitamment aux prêts immobiliers, le Crédit Lyonnais [avait) consenti aux consorts L... deux crédits à la consommation », et que la banque « n'apport{ait) aucune explication sur ces crédits ( ... ) lesquels augmentent pourtant le passif des emprunteurs » (conclusions d'appel, p. 22 in fine); que dès lors, en écartant toute responsabilité de la banque au titre du devoir de mise en garde, sans répondre au moyen précité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile; 2°) ALORS, de deuxième part. QUE les juges ont l'interdiction de dénaturer les documents de la cause; qu'en l'espèce, l'acte authentique du 6 juin 2007 portant sur l'acquisition de l'immeuble par les époux L... et le financement de l'achat par deux prêts consentis par le Crédit Lyonnais, partie à l'acte, stipulait expressément, pour le prêt de 104 765 €, que la« première échéance» interviendrait « le : 1er juillet 2009 » (p. 6, 2/) ; que dès lors, en jugeant que « la cour ignore cependant à quoi correspond la date [du 1er juillet 2009) invoquée par les époux L..., alors que l'examen de l'acte de prêt ne fait à aucun moment apparaître la stipulation d'un différé d'amortissement », pour en déduire que la banque n'avait pas commis de faute en prélevant immédiatement des échéances mensuelles au titre du prêt de 104 765 € (arrêt attaqué, p. 9 § 6), la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du contrat précité en violation du principe susvisé ; 3°) ALORS, de dernière part. QUE dans leurs conclusions d'appel, les époux L... faisaient valoir que la poursuite du recouvrement forcé par les sociétés Crédit Lyonnais et Crédit Logement était fautif, dans la mesure où il était établi que l'assurance devait prendre en charge les mensualités des prêts à compter de juillet 2009 (conclusions d'appel, p. 24-25) ; qu'ils soulignaient avoir informé la société Crédit Logement, par un courrier du 13 juin 2013 produit aux débats, de leur démarche auprès de l'assureur pour contester le refus de prise en charge initialement opposé, et demandé au mandataire du Crédit Lyonnais de suspendre toute poursuite dans l'attente de connaître la position de l'assureur ; qu'ils ajoutaient que, par un courrier du 13 juillet 2013 également produit aux débats, ils avaient transmis au Crédit Logement la réponse de l'assureur qui acceptait de mandater leur médecin expert pour un examen médical de M. L... (conclusions d'appel, p. 4) ; que dès lors, en ne recherchant pas si le Crédit Lyonnais et son mandataire n'avaient pas commis une faute en diligentant une saisie à l'encontre des époux L... le 28 août 2013, malgré le recours et l'examen médical à venir de M. L... dont ils étaient informés, et qui étaient de nature à modifier la position de l'assureur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.
La sécurité juridique, invoquée sur le fondement du droit à un procès équitable pour contester l'application immédiate d'une solution nouvelle résultant d'une évolution de la jurisprudence ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence figée. Cette évolution relève de l'office du juge dans l'application du droit
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CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Déchéance partielle et cassation Mme BATUT, président Arrêt n° 687 F-P+B Pourvoi n° M 19-14.599 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 Le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de la Seine-Saint-Denis, domicilié [...] , a formé le pourvoi n° M 19-14.599 contre deux arrêts rendus les 25 juin 2015 et 24 janvier 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1 - audience solennelle), dans le litige l'opposant à M. L... K..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. M. K... a formé un pourvoi incident éventuel contre les mêmes arrêts. Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de la Seine-Saint-Denis, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de M. K..., l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 septembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Déchéance partielle du pourvoi principal 1. Le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de la Seine-Saint-Denis n'a produit aucun moyen au soutien de son pourvoi contre l'arrêt du 25 juin 2015. 2. Il y a donc lieu, par application de l'article 978 du code de procédure civile, de constater la déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre cette décision. Faits et procédure 3. Selon les arrêts attaqués (Paris, 25 juin 2015 et 24 janvier 2019), le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de la Seine-Saint-Denis (le bâtonnier), agissant en qualité d'autorité de poursuite, a saisi le conseil régional de discipline d'une procédure contre M. K..., avocat. 4. M. W..., ancien bâtonnier désigné en qualité de rapporteur, a déposé son rapport le 17 mars 2014. Le 14 avril 2014, M. K... a été cité à comparaître à l'audience du conseil régional de discipline du 7 mai 2014. 5. A cette date, en raison d'une audience particulièrement houleuse, le conseil de discipline n'a pas pu statuer sur les poursuites dont il était saisi. 6. Par lettre recommandée du 6 juin 2014, le bâtonnier a saisi la cour d'appel de Paris, sur le fondement de l'article 195 du décret du 27 novembre 1991, des faits visés dans la citation du 14 avril 2014. 7. L'arrêt du 25 juin 2015 a annulé le rapport de l'avocat instructeur. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi principal, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 24 janvier 2019 Enoncé du moyen 8. Le bâtonnier fait grief à l'arrêt de déclarer irrégulière la procédure disciplinaire suivie contre M. K... et de dire qu'il ne peut être prononcé de sanction disciplinaire contre celui-ci, alors « que si, selon l'article 188 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, le conseil de l'ordre désigne un rapporteur, qui a pour mission de procéder à une instruction objective et contradictoire de l'affaire et d'établir un rapport avant la comparution de l'avocat poursuivi devant le conseil de discipline, cette exigence n'est pas requise lorsque l'autorité poursuivante, constatant que le conseil de discipline n'a pas statué dans le délai imparti, saisit la cour d'appel d'un recours contre la décision implicite de rejet, dans les conditions édictées par l'article 195 du même décret ; qu'en jugeant irrégulière la procédure disciplinaire suivie à l'encontre de M. K..., en ce qu'il n'avait pas été remédié à l'annulation du rapport d'instruction, quand, saisie par le bâtonnier d'un recours contre la décision implicite de rejet du conseil de discipline, elle avait le pouvoir de se prononcer sur les poursuites disciplinaires, malgré l'absence d'un tel rapport, en se fondant sur les éléments d'investigation versés aux débats, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 195 du décret du 27 novembre 1991 par refus d'application. » Réponse de la Cour Vu l'article 195 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 : 9. Il résulte de ce texte que, si le rapport d'instruction est obligatoire devant le conseil de discipline, la cour d'appel peut se prononcer sur les poursuites disciplinaires malgré l'absence de ce rapport, en tenant compte des éléments de fait et de preuve contradictoirement débattus. 10. Pour déclarer irrégulière la procédure suivie contre M. K... et dire qu'il ne peut être prononcé de sanction contre celui-ci, l'arrêt retient qu'une procédure disciplinaire ne peut être régulière sans comporter un rapport valablement établi, que le rapport de l'avocat instructeur a été annulé par arrêt du 25 juin 2015 et qu'il n'a pas été remédié à cette nullité. 11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident éventuel, la Cour : CONSTATE la déchéance du pourvoi principal en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 25 juin 2015 ; CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ; Condamne M. K... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de la Seine-Saint-Denis Il est fait grief à l'arrêt du 24 janvier 2019 attaqué d'AVOIR déclaré irrégulière la procédure disciplinaire suivie contre M. K... et d'AVOIR dit qu'il ne pouvait, en conséquence, être prononcé une sanction disciplinaire à son encontre ; AUX MOTIFS QU'il ressort des articles 188 et suivants du décret du 27 novembre 1991 qu'en cas de poursuites disciplinaires, un rapporteur est désigné, lequel procède à toute mesure d'instruction nécessaire, dresse procès-verbal de toute audition, transmet son rapport dans les quatre mois au président du conseil de discipline, sauf prorogation de deux mois par ledit président ; que ce rapport fait partie du dossier disciplinaire et constitue un élément d'appréciation essentiel pour le président du conseil de discipline et les membres de la formation disciplinaire ; qu'une procédure disciplinaire ne peut être régulière sans comporter un rapport valablement établi ; que le rapport de l'avocat instructeur désigné dans la procédure disciplinaire suivie contre M. K... a été annulé par arrêt du 25 juin 2015 ; qu'il n'a pas été remédié à cette nullité, de sorte que la procédure disciplinaire est irrégulière ; dès lors, sans qu'il soit nécessaire de répondre aux autres demandes et moyens de M. K..., il apparaît que la procédure disciplinaire suivie contre lui étant irrégulière, il ne peut être fait application à l'intéressé d'une quelconque sanction (arrêt du 24 janvier 2019, p. 7) ; ALORS QUE si, selon l'article 188 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, le conseil de l'ordre désigne un rapporteur, qui a pour mission de procéder à une instruction objective et contradictoire de l'affaire et d'établir un rapport avant la comparution de l'avocat poursuivi devant le conseil de discipline, cette exigence n'est pas requise lorsque l'autorité poursuivante, constatant que le conseil de discipline n'a pas statué dans le délai imparti, saisit la cour d'appel d'un recours contre la décision implicite de rejet, dans les conditions édictées par l'article 195 du même décret ; qu'en jugeant irrégulière la procédure disciplinaire suivie à l'encontre de M. K..., en ce qu'il n'avait pas été remédié à l'annulation du rapport d'instruction, quand, saisie par le bâtonnier d'un recours contre la décision implicite de rejet du conseil de discipline, elle avait le pouvoir de se prononcer sur les poursuites disciplinaires, malgré l'absence d'un tel rapport, en se fondant sur les éléments d'investigation versés aux débats, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 195 du décret du 27 novembre 1991 par refus d'application.
Il résulte de l'article 195 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 que, si le rapport d'instruction est obligatoire devant le conseil de discipline, la cour d'appel peut se prononcer sur les poursuites disciplinaires malgré l'absence de ce rapport, en tenant compte des éléments de fait et de preuve contradictoirement débattus
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1180 FS-P+B+R+I Pourvoi n° B 19-20.478 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 L'association tutélaire du Pas-de-Calais, dont le siège est 641 boulevard Jean Moulin, BP 121, 62403 Béthune cedex, agissant en qualité de tutrice de Mme M... P..., veuve H..., a formé le pourvoi n° B 19-20.478 contre l'arrêt n° RG : 19/00780 rendu le 3 juin 2019 par la cour d'appel d'Amiens (2e chambre, protection sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ au conseil départemental du Pas-de-Calais, dont le siège est rue Ferdinand Buisson, 62018 Arras cedex 9, 2°/ au procureur général près la cour d'appel d'Amiens, domicilié en son parquet général, palais de justice, 14 rue Robert de Luzarches, BP 2722, 80027 Amiens cedex 1, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de l'association tutélaire du Pas-de-Calais, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat du conseil départemental du Pas-de-Calais, et l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Taillandier-Thomas, Coutou, Renault-Malignac, M. Rovinski, Mme Cassignard, conseillers, Mme Le Fischer, M. Gauthier, Mme Vigneras, M. Pradel, conseillers référendaires, Mme Ceccaldi, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Désistement partiel 1. Il est donné acte à l'association tutélaire du Pas-de-Calais, agissant en qualité de tutrice de Mme H..., du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le procureur général près la cour d'appel d'Amiens. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 3 juin 2019), Mme H... (la bénéficiaire) a été admise, le 1er janvier 2015, par le département du Pas-de-Calais (le département) au bénéfice de l'aide sociale pour la prise en charge de ses frais d'hébergement en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. 3. Informé que la bénéficiaire avait décidé de vendre un bien immobilier lui appartenant en indivision, le département a, le 9 juin 2017, notifié à l'association tutélaire du Pas-de-Calais (l'association tutélaire) sa décision de récupérer sa créance de prestations d'aide sociale en application des dispositions de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles. 4. L'association tutélaire a saisi d'un recours la commission départementale d'aide sociale du Pas-de-Calais. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 5. L'association tutélaire fait grief à l'arrêt de la débouter de son recours, alors « que la vente par le bénéficiaire de prestations d'aide sociale d'un immeuble lui appartenant, dont la propriété par ce bénéficiaire était connue du département lorsque cette aide sociale lui a été accordée, ne constitue pas un retour à meilleure fortune du bénéficiaire au sens des dispositions de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles, dès lors qu'elle n'augmente pas la valeur du patrimoine de l'intéressé ; qu'en retenant, dès lors, que Mme M... P..., veuve H..., était revenue à meilleure fortune à l'issue de la vente de son ancien domicile principal, quand elle relevait que le département du Pas-de-Calais avait connaissance, lorsque l'aide sociale a été accordée à Mme M... P..., veuve H..., de ce que cette dernière était copropriétaire de cet immeuble et que cette vente n'avait pas modifié la valeur globale du patrimoine de Mme M... P..., veuve H..., la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 132-1, L. 132-8, 1°, et R. 132-1 du code de l'action sociale et des familles : 6. Selon le premier de ces textes, il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources du postulant à l'aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. 7. Selon le troisième, les biens non productifs de revenu, à l'exclusion de ceux constituant l'habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s'il s'agit d'immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s'il s'agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux. 8. Selon le deuxième, des recours aux fins de récupération des prestations d'aide sociale sont exercés, selon le cas, par l'État ou le département, contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession. 9. Pour l'application de ce dernier texte, le retour à meilleure fortune s'entend, à l'exclusion de la seule augmentation des revenus, prise en compte lors de la révision périodique des conditions d'ouverture des droits du bénéficiaire, de tout événement, survenu postérieurement à la date à laquelle les ressources du bénéficiaire ont été appréciées pour l'ouverture de ses droits à prestations, ayant pour effet, indépendamment de toute modification de la consistance du patrimoine, d'augmenter substantiellement la valeur globale de celui-ci, dans des proportions telles qu'elles le mettent en mesure de rembourser les prestations récupérables, perçues jusqu'alors. 10. Pour débouter l'association tutélaire de son recours, ayant constaté que la bénéficiaire était propriétaire indivis d'un bien immobilier, pris en compte dans l'évaluation de ses ressources par le département, l'arrêt considère que si la vente de l'immeuble n'a pas modifié la valeur globale de son patrimoine, elle a cependant eu pour objet et pour effet d'en modifier substantiellement la composition. Il indique que le capital immobilisé de la bénéficiaire a été réduit, mais que la trésorerie disponible a en revanche augmenté de façon concomitante et inversement proportionnelle, et que la conversion de l'immeuble, bien non productif de revenus, en liquidités immédiatement disponibles a donc radicalement accru son pouvoir d'achat. L'arrêt ajoute qu'au regard de la valeur de la transaction, qui s'élève a minima à 40 700 euros, la trésorerie et la capacité financière de la bénéficiaire, qui disposait jusqu'alors de revenus suffisamment faibles pour être recevable au bénéfice de l'aide sociale, sont directement affectées et améliorées par cet événement nouveau. Il précise que la vente d'un immeuble entraîne pour le cédant la suppression d'un certain nombre de charges liées telles que les charges de copropriété et la taxe foncière ce qui conduit à une amélioration du niveau de vie de l'intéressée. L'arrêt en déduit que la vente a généré un changement substantiel dans la situation de la bénéficiaire comparativement à celle dans laquelle elle se trouvait lorsqu'elle a obtenu l'aide sociale, et doit être regardée comme constitutive d'un retour à meilleure fortune, de sorte que le moyen tiré de ce que la bénéficiaire se trouverait en état de besoin ne peut qu'être écarté comme étant inopérant. 11. En statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'il ressortait de ses constatations que la vente de l'immeuble n'avait pas eu pour effet d'augmenter substantiellement la valeur globale du patrimoine de la bénéficiaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée. ; Condamne le département du Pas-de-Calais aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le département du Pas-de-Calais et le condamne à payer à l'association tutélaire du Pas-de-Calais, agissant en qualité de tutrice de Mme H..., la somme de 1 500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour l'association tutélaire du Pas-de-Calais, agissant en qualité de tutrice de Mme P..., veuve H... Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé la décision prise par la commission départementale d'aide sociale du Pas-de-Calais lors de sa séance du 6 octobre 2017 en ce qu'elle avait jugé que Mme M... P..., veuve H..., était revenue à meilleure fortune à l'issue de la vente de son ancien domicile principal, D'AVOIR fixé la créance de Mme M... P..., veuve H..., au titre des frais d'hébergement pris en charge par le département du Pas-de-Calais entre le 1er janvier 2015 et le 31 mars 2017 à hauteur du revenu tiré de la vente de son immeuble, situé [...], 62100 Calais, intervenue le 1er février 2018 et D'AVOIR débouté l'association tutélaire du Pas-de-Calais, prise en sa qualité de tuteur de Mme M... P..., veuve H..., de toutes ses demandes ; AUX MOTIFS QU'« en application des articles L. 111-4 et L. 132-1 du code de l'action sociale et des familles, l'admission au bénéfice de l'aide sociale est subordonnée à une condition de ressources, évaluées compte tenu des revenus perçus et de la valeur en capital des biens non productifs de revenus. Pour l'appréciation des ressources des postulants, les biens non productifs de revenus sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à un pourcentage de leur valeur défini à l'article R. 132-1, à l'exclusion de ceux constituant l'habitation principale du demandeur. / L'aide sociale a pour caractéristique de constituer un droit subsidiaire, honoré par la collectivité débitrice en cas de seul défaut de ressources suffisantes du bénéficiaire ou de droits de ce dernier à tout autre type de solidarité. En conséquence, l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles prévoit le droit, pour le département ou l'État, de récupérer les prestations versées, ce recours pouvant être formé " 1° contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ". / Le retour à meilleure fortune doit résulter d'un événement nouveau, matériel ou non, qui améliore la situation de l'intéressé. Il s'entend donc du bénéfice par l'assisté d'un capital ou de revenus de provenance extérieure à la suite d'un transfert d'origine extérieure ou d'un changement notable de la situation de l'assisté caractérisé par un accroissement de ses ressources. / En l'espèce, Mme M... H... a habité un immeuble dont elle était copropriétaire jusqu'au 1er février 2014, date à laquelle elle a été accueillie en Ehpad. / Il ressort des pièces produites par les parties que le département avait connaissance de cette possession à la date à laquelle il a accordé la prise en charge des frais de placement de l'appelante. Ce patrimoine avait donc été pris en compte dans l'évaluation des ressources de Madame M... H.... / Dans ces conditions, la vente de l'immeuble n'a pas modifié la valeur globale de son patrimoine. / Cette cession a cependant eu pour objet et pour effet de modifier substantiellement la composition du patrimoine de l'appelante, le capital immobilisé de Mme M... H... ayant été réduit et la trésorerie disponible de celle-ci augmentée de façon concomitante et inversement proportionnelle, la conversion de l'immeuble de Mme H..., bien non productif de revenus, en liquidités immédiatement disponibles ayant radicalement accru le pouvoir d'achat de l'hébergée. / Étant constaté que la valeur de la transaction s'élève a minima à 40 700 euros, la trésorerie et la capacité financière de Madame M... H..., qui disposait jusqu'alors de revenus suffisamment faibles pour être recevable au bénéfice de l'aide sociale, sont directement affectées et améliorées par cet événement nouveau. / Au surplus, la vente d'un immeuble entraîne pour le cédant la suppression d'un certain nombre de charges liées (charges de copropriété, taxe foncière, travaux sur parties communes ). Cette diminution non négligeable de charges emporte ainsi, en elle-même et à elle seule, amélioration du niveau de vie de l'intéressée. / La vente sus-évoquée a dès lors généré un changement substantiel dans la situation de l'allocataire comparativement à celle dans laquelle elle se trouvait lorsqu'elle a obtenu l'aide sociale, et doit être regardée comme constitutive d'un retour à meilleure fortune au sens des dispositions précitées de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles. / Le retour à meilleure fortune étant ainsi établi, le moyen tiré de ce que Mme M... H... se trouverait en état de besoin ne peut qu'être écarté comme étant inopérant. / Il convient par ailleurs de relever que Mme M... H... ne précisant pas le montant exact de la vente, Mme M... H... ne saurait soutenir que le retour à meilleure fortune sus-évoqué demeure marginal. Il convient en toute hypothèse de rappeler que la récupération ne peut être exigée pour un montant supérieur au revenu de la vente litigieuse » (cf., arrêt attaqué, p. 3 et 4). ALORS QUE, de première part, la vente par le bénéficiaire de prestations d'aide sociale d'un immeuble lui appartenant, dont la propriété par ce bénéficiaire était connue du département lorsque cette aide sociale lui a été accordée, ne constitue pas un retour à meilleure fortune du bénéficiaire au sens des dispositions de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles, dès lors qu'elle n'augmente pas la valeur du patrimoine de l'intéressé ; qu'en retenant, dès lors, que Mme M... P..., veuve H..., était revenue à meilleure fortune à l'issue de la vente de son ancien domicile principal, quand elle relevait que le département du Pas-de-Calais avait connaissance, lorsque l'aide sociale a été accordée à Mme M... P..., veuve H..., de ce que cette dernière était copropriétaire de cet immeuble et que cette vente n'avait pas modifié la valeur globale du patrimoine de Mme M... P..., veuve H..., la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles ; ALORS QUE, de seconde part, le département ne peut subordonner la mainlevée de l'inscription hypothécaire légale portant sur un immeuble du bénéficiaire de prestations d'aide sociale au reversement au département par ce dernier d'une créance que lorsque celle-ci revêt un caractère exigible, susceptible de fonder légalement l'exercice de l'un des recours en récupération ouverts au département par les dispositions de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles ; qu'il en résulte que la cassation de l'arrêt attaqué, en ses dispositions relatives au bien-fondé du recours en récupération exercé par le département du Pas-de-Calais, sur le premier élément du moyen de cassation, entraînera la cassation par voie de conséquence, en application des dispositions des articles L. 132-8, L. 132-9 et R. 132-16 du code de l'action sociale et des familles et de l'article 624 du code de procédure civile, de l'arrêt attaqué en ses dispositions relatives à la mainlevée de l'inscription hypothécaire légale portant sur l'immeuble ayant appartenu à Mme M... P..., veuve H....
Selon l'article L. 132-1 du code de l'action sociale et des familles, il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources du postulant à l'aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. Selon l'article R. 132-1 du même code, les biens non productifs de revenu, à l'exclusion de ceux constituant l'habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s'il s'agit d'immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s'il s'agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux. Selon l'article L. 132-8, 1°, du même code, des recours aux fins de récupération des prestations d'aide sociale sont exercés, selon le cas, par l'Etat ou le département, contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession. Pour l'application de ce dernier texte, le retour à meilleure fortune s'entend, à l'exclusion de la seule augmentation des revenus, prise en compte lors de la révision périodique des conditions d'ouverture des droits du bénéficiaire, de tout événement, survenu postérieurement à la date à laquelle les ressources du bénéficiaire ont été appréciées pour l'ouverture de ses droits à prestations, ayant pour effet, indépendamment de toute modification de la consistance du patrimoine, d'augmenter substantiellement la valeur globale de celui-ci, dans des proportions telles qu'elles le mettent en mesure de rembourser les prestations récupérables, perçues jusqu'alors. Viole ces textes la cour d'appel qui retient que la bénéficiaire de l'aide sociale est revenue à meilleure fortune à la suite de la vente d'un immeuble, alors qu'il ressortait de ses constatations que cette vente n'avait pas eu pour effet d'augmenter substantiellement la valeur globale de son patrimoine
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CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation sans renvoi M. PIREYRE, président Arrêt n° 1186 F-P+B+I Pourvoi n° B 19-21.812 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Languedoc-Roussillon, dont le siège est 29 cours Gambetta, CS 49001, 34068 Montpellier cedex 2, a formé le pourvoi n° B 19-21.812 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e B chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme M... D..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Taillandier-Thomas, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Languedoc-Roussillon, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme D..., et l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Taillandier-Thomas, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 26 juin 2019), Mme D..., qui a épousé K... D..., décédé le 24 février 2013, à titre posthume, le 18 février 2017, a sollicité le 21 février 2017 auprès de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Languedoc-Roussillon (la caisse), l'attribution d'une pension de réversion du chef de ce dernier. La caisse ayant fixé la date d'entrée en jouissance de la pension au 1er mars 2017, elle a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 2. La caisse fait grief à l'arrêt de dire que Mme D... doit bénéficier de la pension de réversion du chef de son époux décédé à compter du 1er mars 2013, alors « qu'en cas de demande d'une pension de réversion, l'entrée en jouissance de cette pension ne peut être fixée à une date antérieure à celle du dépôt de la demande de liquidation ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que Mme D... avait formulé sa demande de pension de réversion le 21 février 2017, la CARSAT ayant en conséquence accordé la pension de réversion à compter du 1er mars 2017 ; qu'en jugeant néanmoins que Mme D... devait bénéficier de la pension de réversion du chef de son époux décédé le 24 février 2013 à compter du 1er mars 2013, la cour d'appel a violé les articles L. 353-1 et R. 353-7 du code de la sécurité sociale. » Réponse de la Cour Vu l'article R. 353-7 du code de la sécurité sociale : 3. Selon ce texte, la date d'entrée en jouissance de la pension de réversion ne peut pas être antérieure au dépôt de la demande ; toutefois, lorsque la demande est déposée dans le délai d'un an qui suit le décès, elle peut être fixée au plus tôt au premier jour du mois qui suit le décès de l'assuré. 4. Pour accueillir la demande de Mme D..., l'arrêt retient que cette dernière ne pouvait être veuve et solliciter une pension de réversion avant d'être épouse. Il ajoute que dans la mesure où les effets du mariage remontent à la date du jour précédant celui du décès de l'époux, soit le 23 février 2013, que la date du mariage du 18 février 2017 se substitue à celle du décès pour l'application des dispositions de l'article R. 353-7 du code de la sécurité sociale et que la demande de pension de réversion a été présentée le 6 avril 2017, soit moins d'une année après le mariage, la date d'entrée en jouissance de la pension doit être fixée, par confirmation de la décision déférée, au 1er mars 2013 et non au 1er mars 2017. 5. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la demande de pension de réversion avait été formulée plus d'un an après le décès de l'assuré, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 6. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 7. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. 8. Il convient de débouter Mme D... de sa demande tendant à bénéficier de la pension de réversion du chef de son époux K... D... à compter du 1er mars 2013. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; DÉBOUTE Mme D... de sa demande tendant à bénéficier de la pension de réversion du chef de son époux K... D... à compter du 1er mars 2013. Condamne Mme D... aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Montpellier ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées tant devant la Cour de cassation que devant la cour d'appel de Montpellier ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Languedoc-Roussillon Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du 15 octobre 2018 du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de l'Hérault et, ce faisant, d'AVOIR dit que Mme D... doit bénéficier de la pension de réversion du chef de son époux K... D... décédé le 24/02/2013 à compter du 01/03/2013, AUX MOTIFS QUE : « Vu les dispositions des articles R. 353-7 du code de la sécurité sociale et 171 du code civil ; le décès de M. K... D... intervient le 24 février 2013, le mariage posthume le 18 février 2017 et Mme M... D... née Q..., sous réserve des effets rétroactifs de ce type de mariage, ne pouvait être veuve et solliciter une pension de réversion avant d'être épouse. Dans la mesure où les effets du mariage remontent à la date du jour précédant celui du décès de l'époux (23 février 2013), que la date du mariage du 18 février 2017 se substitue à celle du décès pour l'application des dispositions de l'article R. 353-7 du code de la sécurité sociale et que la demande de pension de réversion a été présentée le 06 avril 2017 (soit moins d'une année après le mariage), la date d'entrée en jouissance de la pension doit être fixée, par confirmation de la décision déférée, au 1er mars 2013 et non au 1er mars 2017. » ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « Sur ce : la réglementation : Aux termes des dispositions de l'article R. 353-7 du code de la sécurité sociale, le conjoint survivant indique la date à compter de laquelle il désire entrer en jouissance de la pension de réversion, sous réserve des conditions suivantes : 1° Cette date est nécessairement le premier jour d'un mois ; 2° Elle ne peut pas être antérieure au premier jour du mois suivant lequel il remplit la condition d'âge prévue à l'article L. 353-1 (en cas de décès de l'assuré le conjoint survivant a droit à une pension de réversion à partir d'un âge et dans des conditions déterminées par décret dont des conditions de ressources); 3° Elle ne peut pas être antérieure au dépôt de la demande. Toutefois : a) Lorsque la demande est déposée dans le délai d'un an qui suit le décès, la date d'entrée en jouissance peut être fixée au plus tôt au premier jour du mois qui suit le décès ; b) Lorsque la demande est déposée dans le délai d'un an suivant la période de douze mois écoulée depuis la disparition, la date d'entrée en jouissance peut être fixée au plus tôt au premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'assuré a disparu. La caisse chargée de la liquidation de la pension de réversion informe le demandeur de son droit à fixer une date d'entrée en jouissance de sa pension et s'il satisfait aux conditions mentionnées aux a ou b du 3°.A défaut d'exercice de ce droit, la date d'entrée en jouissance est fixée au premier jour du mois suivant la date de réception de la demande sous réserve de la condition mentionnée au 2° ; Au cas d'espèce, il apparaît qu'après plus de 32 ans de concubinage avec Madame Q..., Monsieur D... a décidé de régulariser la situation, après avoir obtenu le divorce d'avec son épouse Madame E..., par un jugement intervenu le 02/07/2012 mais frappé d'appel par cette dernière ; Monsieur D... est décédé le 24/02/2013 ; Madame Q... a formé une requête devant le Président de la République aux fins d'être autorisée à contracter un mariage posthume, une décision de rejet ayant été prise le 27/05/2014 au motif que Monsieur D... était toujours dans les liens de son mariage avec Madame E... au jour de son décès ce qui rendait impossible le mariage posthume ; par jugement du 08/10/2015, le Tribunal de Grande Instance de Montpellier, constatant qu'un arrêt du 26/02/2013 de la cour d'appel de Montpellier avait déclaré l'appel de Madame E... irrecevable pour défaut d'intérêt à agir sur le principe du divorce, a reçu le recours de Madame M... Q... à solliciter une autorisation de mariage posthume avec Monsieur K... D..., la cérémonie s'étant finalement déroulée le 18/02/2017 ; Madame Q... D... a déposé une demande de pension de réversion le délivrée le 21/02/2017 ; la Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé au Travail du Languedoc-Roussillon a estimé devoir fixer au 1 mars 2017 la date d'entrée en jouissance de la prestation en indiquant qu'aucun élément du dossier n'autorisait un examen de droit à pension de réversion pour une date antérieure dans la mesure où l'intéressée ne s'était jamais manifestée auprès de ses services en vue d'obtenir le bénéfice de cette prestation avant le 21/02/2017 ; Madame Q... D... prétend qu'en raison du principe de rétroactivité de la date du mariage à la veille de la mort du prédécédé (article 171 du code civil) la prise d'effet de la pension de réversion du chef du prédécédé doit être fixée à cette date ; Elle fait valoir que la position de la Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé au Travail méconnait la loi applicable dans la mesure en effet où, si on la suit, elle aurait dû présenter sa demande la veille du décès de Monsieur O... D... alors qu'elle ne sera autorisée à célébrer le mariage posthume que bien plus tard ; le Tribunal observe que la pension de réversion n'est ouverte que sous certaines conditions notamment de ressources lesquelles semblent au cas d'espèce parfaitement remplies, la Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé au Travail invoquant une disposition du Code de la sécurité sociale lui imposant de prendre en compte, pour fixer une date d'entrée en jouissance de la prestation la date du dépôt de la demande. Or, on se trouve ici dans la situation d'un mariage posthume dont les effets remontent à la date du jour précédant celui du décès de l'époux (article 171 du code civil), la Cour de cassation ayant été amenée notamment à considérer que « la date du mariage posthume se substituait à celle du décès pour le calcul de la durée de versement de l'allocation de veuvage » (Cass. Soc. 15/02/2001) ; Dans le cas d'espèce, comme elle le fait observer à bon droit, Madame D... était dans l'incapacité de déposer une demande de pension de réversion avant que son autorisation de mariage posthume avec Monsieur D... soit reconnue par le Tribunal de Grande Instance de Montpellier, après le refus du Président de la République, le mariage s'étant finalement déroulé le 18/02/2017 et Madame D... ayant sollicité la caisse pour présenter une demande de pension de réversion dès le 21/02/2017, demande déposée deux mois plus tard ; Il s'ensuit que c'est à bon droit qu'elle sollicite aujourd'hui que les effets de la pension de réversion du chef de son époux, décédé le 23/02/2013, prenne effet à compter du 01/03/2013 » 1/ ALORS QU'en cas de demande d'une pension de réversion, l'entrée en jouissance de cette pension ne peut être fixée à une date antérieure à celle du dépôt de demande de liquidation ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que Mme D... avait formulé sa demande de pension de réversion le 21 février 2017, la CARSAT ayant en conséquence accordé la pension de réversion à compter du 1er mars 2017 ; qu'en jugeant néanmoins que Mme D... devait bénéficier de la pension de réversion du chef de son époux décédé le 24 février 2013 à compter du 1er mars 2013, la cour d'appel a violé les articles L. 353-1 et R. 353-7 du code de la sécurité sociale, 2/ ALORS QUE, en tout état de cause, en cas de mariage posthume, sa date se substitue à celle du décès pour la détermination de l'entrée en jouissance de la pension de réversion ; qu'en jugeant que les effets d'un mariage posthume remontant à la date du jour précédant celui du décès de l'époux, il en résulte que la pension de réversion de Mme D... du chef de son époux décédé le 23 février 2013 devait prendre effet à compter du 1er mars 2013, et non du 18 février 2017 date du mariage posthume, la cour d'appel a violé les articles L. 353-1 et R. 353-7 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 171 du code civil. 3/ ALORS QU'en toute hypothèse, la force majeure qui empêche la prescription de courir suppose un évènement extérieur, irrésistible et imprévisible mettant les créanciers dans l'impossibilité d'agir ; qu'en ne constatant pas en fait que les conditions de la force majeure étaient réunies et que Mme D... était dans l'impossibilité de demander au moins à titre conservatoire le versement de sa pension de réversion dans le délai d'un an du décès de son mari, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du Code Civil.
Selon l'article R. 353-7 du code de la sécurité sociale, la date d'entrée en jouissance de la pension de réversion ne peut être antérieure au dépôt de la demande; toutefois, lorsque la demande est déposée dans le délai d'un an qui suit le décès, elle peut être fixée au plus tôt le premier jour du mois qui suit le décès de l'assuré. Viole ce texte, la cour d'appel qui fixe la date d'entrée en jouissance de la pension de réversion au premier jour du mois suivant le décès de l'assuré, alors qu'elle constate que la demande de pension de réversion a été formulée plus d'un an après ce décès
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1191 F-P+B+I Pourvoi n° B 19-19.167 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées, dont le siège est 166 rue Pierre et Marie Curie, Labège Innopole, 31061 Toulouse, a formé le pourvoi n° B 19-19.167 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2019 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale, section 3), dans le litige l'opposant à la société Blanc transports véhicules (BTV), société par actions simplifiée, dont le siège est 1 avenue de l'Europe, Eurocentre, 31621 Castelnau-d'Estretefonds, défenderesse à la cassation. La société Blanc transports véhicule a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen de cassation annexé au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen de cassation également annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF Midi-Pyrénées, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Blanc transports véhicules, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 mai 2019), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2013 à 2015, l'URSSAF Midi-Pyrénées (l'URSSAF) a adressé à la société Blanc transports véhicules (la société) une lettre d'observations portant plusieurs chefs de redressement. Après observations de la société et réponse de l'inspecteur du recouvrement, l'URSSAF a ensuite notifié à la société une mise en demeure, puis lui a décerné une contrainte le 3 février 2017. 2. La société a formé opposition à cette contrainte. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi incident, qui est préalable Enoncé du moyen 3. La société fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande d'annulation de la mise en demeure délivrée par l'URSSAF le 27 décembre 2016, alors « que toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée à peine de nullité de l'envoi d'une mise en demeure adressée au redevable ; que cette mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et qu'à cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée à l'employeur débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; que la mise en demeure doit être adressée à l'attention du représentant légal de la personne morale débitrice et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou, le cas échéant, à celle de son établissement principal ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que « la notification de la mise en demeure qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir » ; qu'en déboutant cependant la société de sa demande de nullité de cette mise en demeure, motif pris que l'irrégularité purement formelle ainsi caractérisée ne lui aurait causé aucun préjudice, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige : 4. Selon ce texte, toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée, à peine de nullité, d'une mise en demeure adressée au redevable. 5. La mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée au débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. 6. Pour rejeter la demande de nullité de la mise en demeure litigieuse, l'arrêt retient que si la mise en demeure, qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient, est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir, pour autant il s'agit d'une irrégularité de forme, qui n'est susceptible d'affecter la validité de la mise en demeure qu'en cas de grief. 7. En statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 8. La nullité de la mise en demeure privant de fondement l'obligation au paiement des sommes qui en font l'objet, la cassation de l'arrêt, en ce qu'il déboute la société de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la mise en demeure, entraîne par voie de conséquence la cassation de l'arrêt en ce qu'il statue sur le bien-fondé des chefs de redressement litigieux. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi principal, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Condamne l'URSSAF Midi-Pyrénées aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'URSSAF Midi-Pyrénées et la condamne à payer à la société Blanc transports véhicules la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF Midi-Pyrénées Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé le chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations patronales, d'AVOIR condamné la société Blanc Transports Véhicules à payer à l'URSSAF Midi Pyrénées la somme de 8 243 euros seulement, hors majorations de retard et d'AVOIR débouté l'URSSAF de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile. AUX MOTIFS PROPRES QUE « La lettre d'observations en date du 17 novembre 2016 liste cinq chefs de redressement pour un montant total de 110 570 euros ; à la suite des observations de la société Blanc transports véhicules portant uniquement sur les redressements numéros 4 (frais de déplacement) et 5 (réduction générale des cotisations), l'inspecteur du recouvrement a répondu le 23 décembre 2016, ramener le chef de redressement n° 4 à 1 630 euros (au lieu de 1 639 euros), maintenir le chef de redressement n° 5 et ramener en conséquence le redressement total à 110 461 euros ; la mise en demeure comme la contrainte ont été établies pour ce montant de cotisations, outre les majorations de retard ; en cause d'appel, la société Blanc transports véhicules indique s'en remettre sur le chef de redressement des frais de déplacement, qui n'est donc pas contesté pour son montant de cotisations ramené à 1 630 euros ; ainsi, le seul chef de redressement litigieux est le chef de redressement n° 5 : 'réductions générales des cotisations' (réductions des cotisations dites Fillon), d'un montant total de 102 318 euros portant sur les années 2013 (42 777 euros), 2014 (39 904 euros) et 2015 (19 637 euros) ; il résulte de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, dans ses versions applicables, que les cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales qui sont assises sur les gains et rémunérations inférieurs au salaire minimum de croissance majoré de 60 % font l'objet d'une réduction dégressive ; le montant de la réduction est calculé par année civile, pour chaque salarié, selon les modalités fixées par décret ; il est égal au produit de la rémunération annuelle, telle que définie par l'article L. 242-1 par un coefficient déterminé par application d'une formule fixée par décret et qui est fonction du rapport entre la rémunération annuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1, (hors rémunération des temps de pause, d'habillage, et de déshabillage versés en application d'un accord d'entreprise ou collectif, étant précisé que cette exclusion a été supprimée pour l'année 2015) et le salaire minimum de croissance calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail augmentée, le cas échéant, du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires, sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu ; lorsque le salarié est soumis à un régime d'heures d'équivalences payées à un taux majoré, en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1re janvier 2010, la majoration salariale correspondante est également déduite de la rémunération annuelle du salarié dans la limite d'un taux de 25 % (étant précisé qu'en ce qui concerne l'année 2015, cette condition relative aux heures d'équivalence a été supprimée) ; pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l'année, le salaire minimum de croissance pris en compte est celui qui correspond à la durée de travail prévue au contrat (avec la précision en 2015 'au titre de la période pendant laquelle ils sont présents dans l'entreprise') ; lorsque les salariés sont soumis à un régime d'heures d'équivalences payées à un taux majoré, le rapport ou le coefficient est corrigé dans les conditions fixées par l'article D. 241-10 du code de la sécurité sociale ; à partir du 1er janvier 2015, la formule arithmétique du coefficient fixé par cet article D. 241-10 a été modifiée, et en ce qui concerne les entreprises de transport routier de marchandises, lorsque la rémunération versée, hors heures supplémentaires, n'est pas établie sur la base de la durée équivalente à la durée légale, le rapport applicable est ajusté dans la même proportion ; il résulte des dispositions de l'article D. 241-7 du code de la sécurité sociale applicables, qu'en cas de suspension du contrat de travail avec paiement intégral de la rémunération brute du salarié, la fraction du montant du salaire minimum de croissance correspondant au mois où le contrat est suspendu est corrigée à proportion de la durée de travail ou de la durée équivalente, hors heures supplémentaires et complémentaires, inscrite à leur contrat de travail au titre de la période où ils sont présents dans l'entreprise et rapportée à celle correspondant à la durée légale du travail ; pour les salariés qui ne sont pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail est suspendu sans paiement de la rémunération ou avec paiement partiel de celle-ci, la fraction du montant du salaire minimum de croissance correspondant au mois où a eu lieu l'absence est corrigée selon le rapport entre la rémunération versée et celle qui aurait été versée si le salarié avait été présent tout le mois, hors éléments de rémunération qui ne sont pas affectés par l'absence ; la formule arithmétique applicable pour le calcul du coefficient varie selon l'effectif (plus ou moins salariés) ; la société Blanc transports véhicules soutient employer des chauffeurs routiers à la fois en courte et longue distance, avec un horaire contractuel de 169 heures mensuelles dont 17 heures d'équivalence, et que le conducteur en longue distance est celui dont le service lui fait obligation de prendre au moins six repos journaliers par mois hors de son domicile, alors que le chef de redressement ne tient nullement compte de cette situation, l'inspecteur du recouvrement n'ayant pas procédé à l'examen des contrats de travail qui lui aurait permis de le constater ; elle affirme employer régulièrement des chauffeurs 'longue distance' dont la durée de travail est de 186 heures, soit 408 heures d'équivalences annuelles et conteste en outre l'exclusion faite par l'inspecteur du recouvrement lors de la prise en compte du SMIC brut de référence de primes affectées par l'absence du salarié (prime de résultat, indemnités de frais de déplacement, majorations pour heures de travail de nuit, solde d'heures de modulation, heures complémentaires, majorations heures supplémentaires) ; l'URSSAF réplique que l'inspecteur du recouvrement a constaté un calcul erroné de la proratisation en raison de la comptabilisation d'un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de heures pour le calcul de la réduction correspondant à une durée contractuelle mensuelle de 186 heures, alors que les chauffeurs sont employés pour une durée mensuelle de 169 heures, de sorte que le nombre d'heures d'équivalence aurait dû être de 204 heures, la société ne rapportant pas la preuve contraire à ces constatations ; elle soutient que la société Blanc transports véhicules a en outre intégré dans la valeur du SMIC, lors du calcul de la réduction, des primes affectées par l'absence du salarié ainsi que des primes octroyées indépendamment du temps de travail, qui ne sont pas affectées par l'absence (prime de résultat) ou liées au lieu de travail (indemnité de repas et de découcher), ou liées aux horaires particulier de travail (majorations pour heures de nuit), ou enfin le solde des heures de modulations, heures complémentaires, heures supplémentaires qui doivent être considérés comme des éléments non affectés par l'absence lors des mois concernés par celle-ci ; en l'espèce, l'inspecteur du recouvrement après avoir rappelé, de manière détaillée, les dispositions légales et réglementaires applicables aux réductions générales des cotisations, ainsi que les coefficients et rapports applicables en distinguant les années 2013 et 2014 de l'année 2015, précise : * que la société contrôlée emploie des conducteurs routiers qui entrent dans la catégorie 'courte distance' avec un horaire contractuel de 169 heures par mois dont 17 heures d'équivalence, qu'elle est affiliée à une caisse de congés payés pour l'ensemble de ses salariés et que pour le calcul de la variable SMIC de la réduction générale des cotisations, elle a utilisé la méthode de proratisation par rémunération, * avoir procédé à l'examen des bulletins de paie, des états récapitulatifs fournis par l'entreprise, et constaté deux sortes d'anomalies : - 'pour certains chauffeurs la comptabilisation d'un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de 408 heures, soit une durée contractuelle de 186 heures, pour le calcul de la fraction neutralisée de la rémunération en 2013 et 2014, alors que la société emploie uniquement des conducteurs pour une durée de travail mensuelle de 169 heures soit un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de 204 heures', - 'pour les salariés qui ne sont pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail est suspendu avec maintien partiel du salaire ou sans maintien de salaire, la fraction du montant du SMIC a été corrigée par le rapport entre la rémunération versée et celle qui aurait été versée si le salarié avait été présent tout le mois ; la société a considéré tous les éléments de rémunération comme des éléments affectés par l'absence' ; or ce faisant, l'inspecteur du recouvrement en se référant uniquement à la durée légale du travail, n'a pas tenu compte du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires effectivement réalisées par les salariés pour lesquels il dit avoir relevé des anomalies de calcul ; il n'a pas davantage constaté que les salariés concernés auraient été soumis à un régime d'heures d'équivalence payées à un taux majoré, dont l'existence ne pouvait résulter effectivement que de leurs contrats de travail dont il n'a pas sollicité la communication ou de dispositions conventionnelles ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1er janvier 2010 qu'il ne vise pas, et il ne résulte pas davantage de la lettre d'observations qu'il aurait constaté que les bulletins de paye de 'certains' chauffeurs feraient état d'heures d'équivalence payées à un taux majoré ; l'examen des contrats de travail de messieurs M... et K..., qui sont les seuls versés aux débats, et qui sont anciens (1994 pour M. M... et 2006 pour M. K...) auquel la cour a procédé, confirme un horaire contractuel de travail mensuel est de 169 heures, avec pour M. M... la précision qu'il exercera les fonctions de chauffeur PL 'sur toutes distances ou destinations nécessitées par le service', élément qui établit que ce salarié était contractuellement tenu, si son employeur le lui demandait, d'effectuer des transports sur de longues distances ; la lettre d'observations ne mentionne pas les noms des chauffeurs routiers pour lesquels le redressement est effectué, alors que le nom de M. M... figure sur l'un des tableaux 'réduction générale des cotisations transport jusqu'à 2014" versé par l'URSSAF aux débats ; dans sa réponse aux observations de la société Blanc transports véhicules, l'inspecteur du recouvrement indique avoir vérifié 'aléatoirement des contrats de travail de chauffeurs' qui mentionnaient une durée de 169 heures, et que celui de M. Y... prévoit 'en son article IV une rémunération pour un travail effectif de 39 heures par semaine, soit 169 heures par mois', tout en s'étonnant que la société ait attendu la période contradictoire pour l'informer de l'emploi de chauffeurs longue distance ; compte tenu de l'absence de constatations de l'inspecteur du recouvrement au regard des critères légaux et réglementaires applicables sur la période concernée par le redressement, qui seules font foi jusqu'à la preuve contraire, il ne peut être considéré que motif du redressement est justifié pour ce qu'il a estimé constituer la première anomalie ; concernant les salariés qui ne sont pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail est suspendu sans paiement de la rémunération ou avec paiement partiel de celle-ci, la lettre d'observations mentionne que pendant le contrôle, chaque rubrique de paie a été explicitée par l'employeur pour comprendre les modalités de versements et calculs de chaque élément ; l'inspecteur du recouvrement indique avoir, pour les années 2013 et 2014, chiffré la régularisation à partir des calculs réalisés par le cabinet d'optimisation sociale mandaté par la société et que pour 2015, ces états détaillés n'ayant pas été communiqués, le chiffrage a été effectué à partir des bulletins de salaire ; pour le calcul du SMIC théorique les dispositions de l'article D. 241-7 faisant référence au mois concerné par la suspension du contrat de travail, la correction de la fraction du montant du salaire minimum de croissance correspondant à ce mois ne peut être corrigée que par les primes dont le montant a été affecté ce mois-là par l'absence du salarié ; si les parties s'accordent sur le fait que la prime de résultat versée semestriellement est fonction du temps de présence avec une franchise de 15 jours d'absence, pour autant il ne résulte pas de la lettre d'observations que l'inspecteur du recouvrement a constaté que, pour les salariés dont les cotisations patronales ont été concernées par le redressement, les bulletins de paye faisaient ressortir que le montant de cette prime a été affecté par son absence ; les indemnités forfaitaires liées aux frais professionnels, les majorations dues pour travail en heures de nuit, le solde des heures de modulation, et les heures complémentaires et heures complémentaires conducteur, sont intrinsèquement liées au travail du salarié. Elles constituent donc bien un élément de la rémunération affecté par l'absence du salarié ; c'est donc à tort que l'inspecteur du recouvrement a considéré que ces primes constituaient des éléments non affectés par l'absence du salarié ; par conséquent, il n'est établi : - ni l'anomalie alléguée liée à la comptabilisation pour les 'certains' chauffeurs d'un nombre théorique d'heures d'équivalence erroné, alors que la société contrôlée justifie employer des chauffeurs en longue distance, - ni l'anomalie de calcul du SMIC théorique liée à des absences ; par conséquent l'intégralité du chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations n'est pas justifiée et il doit être annulé ; la contrainte délivrée est donc partiellement justifiée en ce qui concerne : * le chef de redressement n° 1 'forfait social' d'un montant total de 1 894 euros, * le chef de redressement n° 2 'primes de médaille du travail' d'un montant total de 2 708 euros, * le chef de redressement n° 3 'titres de restaurant' d'un montant total de 2 011 euros, * le chef de redressement n° 4 'frais de déplacement' pour un montant total ramené à 1 630 euros, soit pour un montant total de 8 243 euros en cotisations ; la condamnation de la société Blanc transports véhicules doit en conséquence être prononcée pour un montant 8 243 euros en cotisations » ; 1. ALORS QUE pour les années 2013 et 2014, le montant de la rémunération annuelle à prendre en considération pour le calcul du coefficient de réduction des cotisations est calculé sur la base de la durée effective du travail, en déduisant lorsque le salarié est soumis à un régime d'heures d'équivalences payées à un taux majoré en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1er janvier 2010, la majoration salariale correspondant aux heures effectuées par équivalence dans la limite d'un taux de 25 % ; qu'en l'espèce, lors de son contrôle, l'inspecteur du recouvrement a constaté que, pour certains chauffeurs, en 2013 et 2014, la société cotisante avait comptabilisé un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de 408 heures correspondant à une durée mensuelle de travail de 186 heures pour le calcul de la fraction neutralisée de la rémunération ; que dans sa réponse faite au cotisant le 23 décembre 2016, ce dernier précisait qu'au terme de ses constatations le salaire était calculé pour tous les chauffeurs sur une durée de 169 heures et aucune heure d'équivalence effectuée au-delà de 169 heures n'apparaissait sur les bulletins de salaire ; qu'en se fondant, pour juger que le redressement n'était pas justifié sur ce point, sur la circonstance que le contrat de travail d'un salarié mentionnait la possibilité d'effectuer des transports longue distance et donc d'être soumis à une durée du travail dérogatoire de heures quand seul le nombre d'heures effectuées par équivalence pouvait être neutralisé, la cour d'appel a violé les articles L. 461-13 et D. 461-10 du code de la sécurité sociale dans leurs versions applicables au litige ; 2. ALORS QUE c'est au débiteur prétendant bénéficier d'une réduction des cotisations sociales dont il est redevable qu'il appartient de démontrer qu'il remplit les conditions de cette réduction ; que s'agissant des réductions Fillon sur les bas salaires, c'est à l'employeur de démontrer qu'il a correctement tenu compte des heures d'équivalence payées aux taux majoré et que ses chauffeurs sont bien des chauffeurs longue distance pouvant bénéficier du mode de calcul spécifique de leur temps de travail ; qu'en reprochant à l'inspecteur du recouvrement de ne pas désigner expressément les contrats de travail ayant donné lieu à des heures d'équivalence payées au taux majoré et de ne pas avoir précisé le nom des chauffeurs routiers éventuellement soumis aux obligations de transport longue distance, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 devenu 1353 du code civil, L. 461-13 et D. 461-10 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige ; 3. ALORS QUE pour les salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu avec maintien partiel ou sans maintien de salaire, la fraction du SMIC retenue pour les mois au cours desquels a lieu l'absence est corrigée du rapport entre la rémunération versée et celle qui aurait été versée si le salarié n'avait pas été absent, hors éléments qui ne sont pas affectés par l'absence ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions l'URSSAF soutenait que, pour cette catégorie de salariés, la société cotisante avait, à tort, considéré que la prime de résultat constituait un élément de rémunération affecté par l'absence et intégré le montant de cette prime dans le calcul du SMIC corrigé (conclusions p. 4) ; que la cour d'appel a constaté qu'il ne ressortait pas des constatations de l'inspecteur du recouvrement que pour les salariés concernés par le redressement le montant de la prime de résultat avait été affectée par l'absence des salariés ; qu'en jugeant cependant que l'intégralité du chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations n'était pas justifiée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé l'article D. 241-7 du code de la sécurité sociale ; 4. ALORS QUE les juges doivent répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions développées oralement à la barre, l'URSSAF expliquait que, lors du contrôle, l'inspecteur du recouvrement avait constaté que pour le calcul du salaire minimum de croissance des salariés qui n'étaient pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail avait été suspendu avec maintien partiel ou sans maintien de salaire, la société cotisante avait, à tort, considéré tous les éléments de rémunération comme des éléments affectés par l'absence puisque les primes de « qualité sécurité » (3165), « spécifique d'objectif » (3170), « polyvalence » (3205), « spécifique conducteur » (3460) et « qualité sécurité » (3570) étaient octroyées indépendamment du temps de travail (conclusions p. 5) ; qu'en jugeant que l'intégralité du chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations n'était pas justifiée sans répondre au moyen de l'URSSAF tiré des conditions d'attribution des primes litigieuses, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 5. ALORS QUE constitue un élément affecté par l'absence du salarié l'élément de rémunération dont le versement dépend exclusivement de sa présence ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions l'URSSAF Midi Pyrénées, soutenait que les indemnités forfaitaires liées aux frais professionnels, les majorations dues pour le travail aux heures de nuits, les heures complémentaires et heures complémentaires conducteur ne pouvaient être affectées par l'absence du salarié puisque leur versement ne dépendait pas uniquement de la présence du salarié mais de l'existence de sujétions particulières subies, par le salarié, du fait de l'exercice de son activité ; qu'en jugeant, pour annuler le chef de redressement n° 5, que dès lors qu'elles étaient intrinsèquement liées au travail du salarié, les sommes litigieuses était affectées par l'absence des salariés, la cour d'appel a violé l'article D. 241-7 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige ; Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Blanc transports véhicules (BTV) Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la SAS Blanc transports véhicules de sa demande d'annulation de la mise en demeure délivrée par l'urssaf Midi Pyrénées le 27 décembre 2016 ; AUX MOTIFS QUE « Par applications combinées des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale, dans leurs versions applicables au présent litige, la mise en demeure doit permettre à la personne à laquelle elle est notifiée de régulariser impérativement la situation en procédant au paiement des sommes mentionnées, et doit à peine de nullité être motivée, préciser la cause, la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que la période à laquelle elle se rapporte. Il résulte de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable (issue du décret n° 2016-1567 du 21 novembre 2016) que, sauf dans le cas de recherche d'infractions pour travail dissimulé, tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur, l'informant du droit à se faire assister du conseil de son choix pendant ce contrôle. Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l'avis de contrôle doit être adressé à l'attention de son représentant légal et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou le cas échéant de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées. Ainsi cet avis, comme la lettre d'observations, la mise en demeure et la contrainte subséquentes doivent être adressés exclusivement à la personne qui est tenue, en sa qualité d'employeur, aux obligations afférentes au paiement des cotisations et contributions qui font l'objet du contrôle. QUE La société Blanc transports véhicules soutient que la mise en demeure est irrégulière pour avoir été adressée à l'adresse du siège du groupe Charles André transports à Montélimar (26), alors que le siège de sa société est à Castelnau d'Estretefonds (31), adresse à laquelle avaient été précédemment adressés l'avis de contrôle, la lettre d'observations ainsi que la réponse de l'inspecteur du recouvrement à ses observations, et que cette irrégularité affecte la validité de la mise en demeure, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. L'URSSAF lui oppose que si l'adresse postale mentionnée sur la mise en demeure est à Montélimar, celle-ci a bien été réceptionnée par la société Blanc transports véhicules qui a d'ailleurs saisi la commission de recours amiable de sa contestation. Elle soutient que l'intimée n'ayant pas été privée de voie de recours, il n'y a pas eu atteinte au principe du contradictoire et partant aucun grief. QU'en l'espèce, alors que la société contrôlée, la société Blanc transports véhicules a son siège social à Castelnau d'Estretefonds (31620) où l'URSSAF Midi-Pyrénées lui a adressé par lettre recommandée avec avis de réception en date du 15 avril 2016 un avis de contrôle, puis une lettre d'observations en date du 17 novembre 2016, à laquelle la société Blanc transports véhicules a répondu par lettre recommandée avec avis de réception en date du 20 décembre 2016, dont l'entête rappelle l'adresse de son siège social à Castelnau d'Estretefonds, et alors que l'inspecteur du recouvrement a également répondu par lettre recommandée avec avis de réception en date du 23 décembre 2016, à cette même adresse, force est de constater que la mise en demeure qui a suivi, en date du 27 décembre 2016, a été adressée à la société Blanc transports véhicules à « GCATRANS, ZI de Gourmier, BP 109 26216 Montélimar Cedex ». Il n'est pas contesté que cette adresse est celle du groupe Charles André transports dont fait partie la société Blanc transports véhicules, qui est une entité juridique et une personne morale distincte, et l'URSSAF ne justifie nullement d'une désignation, par la société contrôlée, du directeur des ressources humaines du groupe auquel elle appartient pour le suivi de la procédure de contrôle. La cour constate d'ailleurs que la contrainte en date du 3 février 2017, bien que mentionnant la même adresse (soit celle du siège social du groupe à Montélimar) a été signifiée par acte d'huissier en date du 8 février 2017 à l'adresse du siège social de la société Blanc transports véhicules à Castelnau d'Estretefonds. QUE si la notification de la mise en demeure qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir, pour autant il s'agit d'une irrégularité de forme, qui n'est susceptible d'affecter la validité de la mise en demeure qu'en cas de grief. Or effectivement, aucun grief n'est allégué par l'intimée, et il est exact qu'elle a pu exercer ses droits de la défense en saisissant la commission de recours amiable de sa contestation. Le jugement entrepris qui a jugé, en raison de l'irrégularité affectant la notification de la mise en demeure, irrégulière l'ensemble de la procédure de recouvrement et a annulé la mise en demeure ainsi que la contrainte subséquente, doit donc être intégralement infirmé. » ALORS QUE toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée à peine de nullité de l'envoi d'une mise en demeure adressée au redevable ; que cette mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et qu' à cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée à l'employeur débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; que la mise en demeure doit être adressée à l'attention du représentant légal de la personne morale débitrice et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou, le cas échéant, à celle de son établissement principal ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que « la notification de la mise en demeure qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir » ; qu'en déboutant cependant la SAS Transports Blanc véhicules de sa demande de nullité de cette mise en demeure, motif pris que l'irrégularité purement formelle ainsi caractérisée ne lui aurait causé aucun préjudice la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale.
Aux termes de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée, à peine de nullité, d'une mise en demeure adressée au redevable. Celle-ci, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée au débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1192 F-P+B+I Pourvoi n° M 19-11.149 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 La Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, dont le siège est 9 rue de Vienne, 75403 Paris cedex 08, a formé le pourvoi n° M 19-11.149 contre l'arrêt n° RG : 16/15078 rendu le 30 novembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant à M. D... M..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Renault-Malignac, conseiller, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. M..., et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Renault-Malignac, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2018), M. M... (l'assuré), qui a été affilié à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (CIPAV) du 1er juillet 2004 au 31 décembre 2013 pour une activité libérale de formateur, a sollicité la liquidation de ses pensions de retraite de base et de retraite complémentaire, de manière anticipée, pour inaptitude, à effet du 1er avril 2014, qui lui a été refusée au motif qu'il n'était pas à jour de ses cotisations. 2. L'assuré a saisi une juridiction de sécurité sociale d'un recours contre cette décision en prétendant qu'il avait envoyé à l'organisme social un chèque du montant des cotisations manquantes qui avait été détourné et falsifié et a sollicité, outre la liquidation de sa pension de retraite complémentaire, la condamnation de la CIPAV à lui verser des dommages-intérêts en réparation de son préjudice. Cette dernière a demandé, à titre reconventionnel, la condamnation de l'assuré à lui payer une certaine somme correspondant aux cotisations non payées. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses trois dernières branches, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 4. La CIPAV fait grief à l'arrêt de la débouter de toutes ses demandes et de la condamner à créditer le compte de retraite de base et le compte de retraite complémentaire de l'assuré de certaines sommes et à liquider à compter du 1er avril 2014 la pension de retraite complémentaire de l'assuré avec versement des arrérages correspondants, outre intérêts au taux légal à compter de cette date et capitalisation des intérêts, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 250 euros par jour de retard, alors : « 1°/ que la remise d'un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le chèque de 2 645,50 euros que M. M... lui avait envoyé au mois d'avril 2010 pour procéder au paiement des sommes de 581,50 euros de cotisations de retraite de base et 2 064 euros de cotisations de retraite complémentaire n'avait pas été encaissé par la CIPAV ; qu'en condamnant néanmoins la CIPAV à créditer ces sommes sur le compte de retraite de base et le compte de retraite complémentaire de M. M..., la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil ; 2°/ que, selon l'article 3.16 des statuts du régime de retraite complémentaire, « la liquidation de la pension ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. En cas de paiement tardif, la date d'effet de la retraite est reportée au premier jour du mois suivant la régulation... » ; que, par ailleurs, la remise d'un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le chèque de 2 645,50 euros que M. M... lui avait envoyé au mois d'avril 2010 pour procéder au paiement des sommes de 581,50 euros de cotisations de retraite de base et 2 064 euros de cotisations de retraite complémentaire n'avait pas été encaissé par la CIPAV ; qu'en condamnant néanmoins la CIPAV à liquider à compter du 1er avril 2014 la pension de retraite complémentaire de M. D... M... sur la base de ces points de retraite complémentaire avec versement des arrérages correspondants et intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2014 et capitalisation des intérêts, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 250 euros par jour de retard, la cour d'appel a violé l'article 3.16 des statuts du régime de retraite complémentaire. » Réponse de la Cour Vu les articles 1353 du code civil, L. 131-67 du code monétaire et financier et 3.16 des statuts de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse : 5. Il résulte des deux premiers textes que la remise d'un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement. 6. Selon le dernier, la liquidation de la pension du régime de retraite complémentaire des personnes affiliées à la CIPAV ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. 7. Pour débouter la CIPAV de ses demandes et la condamner à créditer les comptes de retraite de l'assuré des cotisations manquantes et à liquider à effet du 1er avril 2014 la pension de retraite complémentaire de l'assuré, l'arrêt relève qu'il est établi que l'assuré a envoyé en avril 2010 à la CIPAV un chèque du montant des cotisations restant dues que cette dernière ne conteste pas avoir reçu, que le chèque a été détourné, avec de nombreux autres, dans un centre de tri postal, falsifié et encaissé par un tiers, que la CIPAV a demandé à plusieurs reprises à l'assuré paiement des cotisations manquantes, ce qu'il a refusé de faire en raison de l'encaissement du chèque. Il relève, encore, qu'un rapport de la Cour des comptes a mis en évidence que l'organisme social, par son incurie dans la gestion comptable et l'absence de fiabilité des circuits de paiement mis en place, a permis que des centaines de chèques aient été détournés pour un montant de 800 000 euros, faits pour lesquels le ministre chargé des affaires sociales a pris un arrêté de débet de ce montant à l'encontre de l'agent comptable de la CIPAV. Il constate, enfin, que cette dernière s'est constituée partie civile dans une instance pénale dans laquelle un prévenu a été déclaré coupable du recel de cent cinquante-huit chèques volés à son préjudice et les coauteurs ont été condamnés à indemniser les parties civiles à hauteur de 260 289 euros de dommages-intérêts, que la CIPAV ne peut sans contradiction se déclarer victime du vol du chèque de l'assuré et lui en demander à nouveau le règlement et qu'elle ne démontre pas que ce chèque n'était pas visé dans la procédure ni à tout le moins qu'elle n'aurait pas été indemnisée de ce fait et retient que les cotisations que l'assuré entendait régler avec ce chèque doivent être considérées comme payées. 8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le chèque par lequel l'assuré prétendait s'être libéré du paiement des cotisations restant dues n'avait pas été encaissé par la CIPAV, ce dont il résultait qu'il n'était pas, à la date d'effet de la pension qu'elle retenait, à jour du paiement des sommes dues à titre de cotisations, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré l'appel de la CIPAV et les demandes de M. M... recevables et confirmé le jugement déféré en ce qu'il a condamné la CIPAV à payer à M. M... la somme de 15 000 euros de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 30 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne M. M... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (CIPAV) Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement déféré en ce qu'il a considéré que le paiement des cotisations avait été intégralement effectué et en ce qu'il a condamné la CIPAV à payer à M. D... M... la somme de 15.000 euros de dommages et intérêts, d'AVOIR dit que la CIPAV devra créditer le compte de retraite de base et le compte de retraite complémentaire de M. D... M... des sommes respectives de 581,50 euros et de 2.064 euros, d'AVOIR condamné la CIPAV à liquider à compter du 1er avril 2014 la pension de retraite complémentaire de M. D... M... sur la base de ces points de retraite complémentaire avec versement des arrérages correspondants et intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2014 et capitalisation des intérêts, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 250 euros par jour de retard, d'AVOIR débouté la CIPAV de toutes ses demandes et de l'AVOIR condamnée à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'avoir fixé le droit d'appel prévu par l'article R 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant au dixième du montant mensuel du plafond prévu par l'article L 241-3 et le condamne au paiement de ce droit s'élevant à 331,10 euros ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la liquidation des pensions de retraite de M. M... : M. M... a été affilié à la CIPAV à compter du 1er juillet 2004 en qualité de formateur à titre libéral ; il a demandé le 27 mars 2013 la liquidation de ses pensions de retraite anticipée pour inaptitude ; la CIPAV a refusé de procéder à la liquidation de ces pensions au motif que l'intégralité des cotisations n'avait pas été réglée ; La pension de base de M. M... a été liquidée, avec effet au 1er avril 2014 environ deux ans après la demande de l'intéressé. Ce retard est fautif, les statuts de la CIPAV ne prévoyant pas que la liquidation de la pension de base ne puisse être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. Ce retard s'inscrit d'ailleurs dans un contexte, constaté par la Cour des comptes, d'incurie de cette caisse qui ne fournit en l'espèce aucune explication. Le retard de liquidation a entraîné un préjudice certain pour le cotisant inapte au travail résultant du défaut de moyens de subsistance. Ce préjudice sera en conséquence réparé à hauteur de 10.000 euros de dommages et intérêts. Le litige porte donc encore sur le refus de la CIPAV de liquider la pension de retraite complémentaire de M. M.... L'article 3.16 des statuts du régime de retraite complémentaire dispose en effet que "la liquidation de la pension ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. En cas de paiement tardif, la date d'effet de la retraite est reportée au premier jour du mois suivant la régulation..." Il résulte des faits que M. M... a envoyé en avril 2010 un chèque à la CIPAV d'un montant de 2.645,50 euros représentant le solde encore dû selon la caisse, soit 581,50 euros de cotisations de retraite de base et 2.064 euros de cotisations de retraite complémentaire; que ce chèque s'est révélé avoir été volé, falsifié et encaissé par un tiers ; que la CIPAV a demandé à plusieurs reprises à M. M... paiement des cotisations manquantes, ce que ce dernier a refusé de faire en raison de l'encaissement du chèque. Si le moment auquel le chèque a été dérobé est contesté, il apparaît néanmoins que la CIPAV a été jugée fautive par la Cour des comptes si, en raison de son incurie dans la gestion comptable et de l'absence de fiabilité du circuit de paiement, plusieurs centaines de chèques ont pu être détournés pour un montant de 800.000 euros. Par ailleurs, il apparaît que la CIPAV s'est constituée partie civile dans l'affaire correctionnelle au cours de laquelle un prévenu a été reconnu coupable de recel de 158 chèques volés à son préjudice notamment ; que les coauteurs ont été condamnés solidairement à indemniser les parties civiles à hauteur de 260.289 euros à titre de dommages et intérêts. Dès lors, la CIPAV ne peut sans contradiction se déclarer victime du vol du chèque de M. M... et en demander à nouveau le règlement au cotisant ; elle ne démontre pas que ce chèque n'était pas visé dans la procédure ni à tout le moins qu'elle n'aurait pas été indemnisée de ce fait. Enfin, il apparaît que le ministère chargé des affaires sociales a pris un arrêté de débet pour la somme de 800.000 euros à l'encontre de l'agent comptable de la CIPAV, dont la responsabilité a été établie pour n'avoir pas exercé toutes les diligences qui lui incombaient; la caisse ne fournit d'ailleurs aucun argumentaire sur cette situation. La faute et la mauvaise foi de la CIPAV justifient que soient allouée à M. M... la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts au titre du refus de liquidation de la pension de retraite complémentaire. Il y a donc lieu de confirmer la décision des premiers juges qui a reconnu que le paiement des cotisations devait être considéré comme ayant été intégralement effectué ; le jugement sera infirmé pour le surplus pour s'être trompé dans le montant des cotisations qui s'élève à 581,50 euros et 2.064 euros et dans la date de départ de la liquidation de la pension de retraite complémentaire qui doit être fixée au 1er avril 2014, date de la demande du bénéficiaire. Compte tenu de l'ancienneté des faits, une astreinte sera prononcée. Il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. M... l'intégralité des frais irrépétibles ; il lui sera alloué la somme de 2.500 au titre de l'article 700 du code de procédure civile. » ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « Sur la demande principale : La caisse se montre extrêmement elliptique sur le sujet mais elle ne conteste pas avoir reçu le chèque de monsieur M.... En effet, puisqu'elle indique qu'il a été détourné, avec de nombreux autres, dans un centre de tri postal, c'est bien qu'il était d'abord parvenu à la caisse avant d'être regroupé avec des centaines, voire des milliers d'autres, pour être adressé, via un centre de tri postal, à une personne tierce (un sous-traitant apparemment). Les cotisations que monsieur M... entendait régler avec ce chèque doivent donc être considérées comme payées. Et c'est à la caisse et non aux cotisants d'agir contre les organismes bancaires qui ont viré les sommes adressées par les cotisants à celui ou ceux qui ont volé et falsifié les chèques si ces organismes ont commis une faute. Il y a donc lieu de débouter la CIPAV de ses demandes de confirmation de la décision implicite de la CRA et de condamnation de monsieur M... à lui payer la somme de 2.645,50 euros. Il y a également lieu de faire droit aux demandes de monsieur M... relativement à sa retraite complémentaire. Sur les autres demandes : La caisse ne s'explique pas sur son retard relativement à la mise en route de la retraite de base, retard qu'elle ne conteste pas. Par ailleurs, la CIPAV a également fautivement géré le dossier de retraite complémentaire de monsieur M..., ce qui lui a causé un préjudice moral et économique. Ces chefs de préjudice seront indemnisés par l'allocation de la somme de 15.000 euros. Il serait inéquitable de laisser à monsieur M... la charge de la totalité de ses frais irrépétibles. Il lui sera accordé de ce chef la somme de 1.500 euros. » ALORS DE PREMIERE PART QUE la remise d'un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le chèque des 2.645,50 euros que Monsieur M... lui avait envoyé au mois d'avril 2010 pour procéder au paiement des sommes de 581,50 euros de cotisations de retraite de base et 2.064 euros de cotisations de retraite complémentaire n'avait pas été encaissé par la CIPAV ; qu'en condamnant néanmoins la CIPAV à créditer ces sommes sur le compte de retraite de base et le compte de retraite complémentaire de Monsieur M..., la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil ; ALORS DE DEUXIEME PART QUE selon l'article 3.16 des statuts du régime de retraite complémentaire « la liquidation de la pension ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. En cas de paiement tardif, la date d'effet de la retraite est reportée au premier jour du mois suivant la régulation... » ; que, par ailleurs, la remise d'un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le chèque de 2.645,50 euros que Monsieur M... lui avait envoyé au mois d'avril 2010 pour procéder au paiement des sommes de 581,50 euros de cotisations de retraite de base et 2.064 euros de cotisations de retraite complémentaire n'avait pas été encaissé par la CIPAV ; qu'en condamnant néanmoins la CIPAV à liquider à compter du 1er avril 2014 la pension de retraite complémentaire de M. D... M... sur la base de ces points de retraite complémentaire avec versement des arrérages correspondants et intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2014 et capitalisation des intérêts, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 250 euros par jour de retard, la cour d'appel a violé l'article 3.16 des statuts du régime de retraite complémentaire ; ALORS DE TROISIEME PART QUE selon l'article 3.16 des statuts du régime de retraite complémentaire « la liquidation de la pension ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. En cas de paiement tardif, la date d'effet de la retraite est reportée au premier jour du mois suivant la régulation... » ; que, par ailleurs, la remise d'un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le chèque de 2.645,50 euros que Monsieur M... lui avait envoyé au mois d'avril 2010 pour procéder au paiement des sommes de 581,50 euros de cotisations de retraite de base et 2.064 euros de cotisations de retraite complémentaire n'avait pas été encaissé par la CIPAV ; qu'après avoir ainsi mis à jour le fait que, faute de paiement des cotisations et majorations échues, la CIPAV n'avait pu procéder à la liquidation de la pension de retraite complémentaire, en retenant que la faute et la mauvaise foi de la CIPAV justifiaient que soient allouée à Monsieur M... la somme de 5.0000 de dommages et intérêts au titre du refus de liquidation de la pension de retraite complémentaire sans violer l'article 1240 du code civil ; ALORS DE QUATRIEME PART QUE le jugement du tribunal correctionnel de Paris rendu le 22 octobre 2014 qui avait été produit aux débats contenait en annexe la liste des personnes dont les chèques avaient été détournés ; que le nom de Monsieur M... ne figurant pas dans ce jugement, la cour d'appel n'a pu, pour faire droit au recours de l'assuré reproché à la CIPAV d' avoir démontré que le chèque de Monsieur M... n'était pas visé dans la procédure ni qu'elle n'aurait pas été indemnisée de ce fait dans le cadre de cette procédure sans dénaturer ce jugement en violation de l'article 1103 du code civil ; ALORS DE CINQUIEME ET DERNIERE PART QUE le jugement du tribunal correctionnel de Paris rendu le 22 octobre 2014 qui avait été produit aux débats concernait des faits commis entre août 2008 et juin 2009 ; que la cour d'appel qui constatait que le chèque par lequel Monsieur M... prétendait s'être libéré de ses obligations vis-à-vis de la CIPAV était avait été « envoyé en avril 2010 » aurait dû en déduire qu'il ne pouvait s'agir d'un des chèques détournés visés à cette procédure ; qu'en ne le faisant pas et en accueillant le recours de l'assuré, faute pour la CIPAV d'avoir démontré que le chèque de Monsieur M... n'était pas visé dans la procédure ni qu'elle n'aurait pas été indemnisée de ce fait dans le cadre de cette procédure, la cour d'appel a derechef dénaturé ce jugement en violation de l'article 1103 du code civil.
Il résulte des articles 1353 du code civil et L. 131-67 du code monétaire et financier que la remise d'un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement. Selon l'article 3.16 des statuts de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, la liquidation de la pension du régime de retraite complémentaire des personnes affiliées à cette caisse ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. Méconnaît ces dispositions la cour d'appel qui, constatant que le chèque par lequel l'assuré prétendait s'être libéré du paiement des cotisations restant dues avait été détourné, falsifié et encaissé par un tiers, retient que les cotisations que l'assuré entendait régler avec ce chèque doivent être considérées comme payées alors que le chèque n'ayant pas été encaissé par la caisse, l'assuré n'était pas, à la date d'effet de la pension, à jour du paiement des sommes dues à titre de cotisations
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1195 F-P+B+I Pourvoi n° Q 19-21.525 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 M. K... Q..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Q 19-21.525 contre le jugement n° RG : 18/00457 rendu le 18 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Montpellier (pôle social), dans le litige l'opposant : 1°/ à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Languedoc-Roussillon, dont le siège est 35 rue de La Haye, 34937 Montpellier cedex 9, 2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié 14 avenue Duquesne, 75350 Paris 07 SP, défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Colin-Stoclet, avocat de M. Q..., de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF Languedoc-Roussillon, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Désistement partiel 1. Il est donné acte à M. Q... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale. Faits et procédure 2. Selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Montpellier, 18 juin 2019), rendu en dernier ressort, l'URSSAF Languedoc-Roussillon (l'URSSAF) a notifié à M. Q... une mise en demeure, le 28 septembre 2017, de payer la somme de 1 950 euros au titre de cotisations et majorations de retard. 3. A la suite de la décision de la commission de recours amiable du 28 novembre 2017, M. Q... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. M. Q... fait grief au jugement attaqué de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de l'URSSAF, déclarer en conséquence recevable l'action de l'URSSAF, rejeter la demande de production des statuts de l'URSSAF qu'il a formée et déclarer bien fondée la mise en demeure et la décision de la commission de recours amiable contestées, alors « que si une union de recouvrement tient des dispositions de l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale la capacité juridique à agir dans l'exécution des missions qui lui sont confiées par la loi, c'est à la condition d'avoir été régulièrement constituée, et par suite, lorsque sa qualité à agir est contestée, d'en justifier par la production de ses statuts régulièrement approuvés par l'autorité compétente ; qu'en affirmant que l'URSSAF n'avait aucune justification à fournir et que la production de ses statuts approuvés par l'autorité compétente n'était pas nécessaire, le tribunal a violé les articles L. 213-1, L. 216-1, L. 281-4 et L. 281-5 du code de la sécurité sociale. » Réponse de la Cour 5. Les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, mentionnées à l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale, tiennent de ce texte de nature législative, dès leur création par l'arrêté prévu par l'article D. 213-1 du même code, leur capacité juridique pour agir dans l'exécution des missions qui leur ont été confiées par la loi. 6. Il en résulte que l'URSSAF, créée par arrêté des ministres chargés de l'économie et des finances et de la sécurité sociale du 7 août 2012, avait qualité pour agir devant la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale. 7. Le moyen est, dès lors, inopérant. Sur le moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 8. M. Q... fait le même grief au jugement attaqué, alors « que toute personne morale doit, lorsqu'il est contesté, rapporter la preuve du pouvoir de la personne figurant au procès comme son représentant ; que M. Q... soutenait que l'URSSAF ne justifiait pas de sa représentation en justice par personne habilitée ; que le jugement se borne à exposer que l'union Languedoc-Roussillon était représentée par Mme D... Y..., salariée, munie d'un pouvoir spécial ; qu'en s'abstenant de vérifier si le signataire dudit pouvoir spécial se voyait conférer par les statuts de cet organisme le pouvoir d'agir en justice et la faculté de déléguer ses pouvoirs à un salarié, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 117 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 9. Aux termes de l'article L. 142-9 du code de la sécurité sociale, la représentation des organismes est assurée par un administrateur ou un employé de ceux-ci, muni d'un pouvoir spécial. 10. M. Q... n'a pas contesté la qualité de l'agent de l'URSSAF, mais s'est borné, en suite de la réclamation de la production des statuts de cette dernière, à solliciter la justification de l'organe appelé à représenter l'organisme. 11. Le tribunal, qui a constaté que l'URSSAF était représentée par Mme D... Y..., salariée de l'organisme, munie d'un pouvoir spécial, et qui n'avait pas à procéder à des recherches inopérantes, a légalement justifié sa décision. 12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi. ; Condamne M. Q... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. Q... et le condamne à payer à l'URSSAF Languedoc-Roussillon la somme de 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Colin-Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. Q... IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de l'URSSAF Languedoc-Roussillon, déclaré, en conséquence, recevable l'action de l'URSSAF Languedoc-Roussillon, rejeté la demande de production des statuts de cette URSSAF formée par M. Q..., déclaré bien fondée la mise en demeure et la décision de la commission de recours amiable contestées et condamné M. Q... à verser à l'URSSAF la somme de 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE l'URSSAF n'exerce pas d'activité économique au sens des règles européennes dès lors qu'elle remplit une fonction de caractère exclusivement social, fondée sur le principe de la solidarité et dépourvue de tout but lucratif, n'est pas soumise aux dispositions communautaires relatives aux marchés publics, n'exerce pas une activité entrant dans le champ d'application des directives concernant la concurrence en matière d'assurance et ne constitue pas une entreprise au sens du droit communautaire pouvant entraîner l'application des règles du droit des abus de position dominante ni une entité relevant du code de la mutualité ; que partant, sans que l'URSSAF Languedoc-Roussillon, dotée de la personnalité juridique, n'ait à fournir aucun des documents réclamés par le demandeur puisque cet organisme a régulièrement reçu de la loi compétence et qualité à agir pour recouvrer les cotisations générées par l'activité indépendante de M. Q..., celui-ci ne peut, au regard des dispositions législatives nationales et européennes susmentionnées, lesquelles ne donnent lieu à aucune difficulté d'interprétation, refuser de s'affilier au régime obligatoire de sécurité sociale des indépendants ; que la production des statuts approuvés par l'autorité compétence n'est pas nécessaire ; ALORS d'une part QUE si une union de recouvrement tient des dispositions de l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale la capacité juridique à agir dans l'exécution des missions qui lui sont confiées par la loi, c'est à la condition d'avoir été régulièrement constituée, et par suite, lorsque sa qualité à agir est contestée, d'en justifier par la production de ses statuts régulièrement approuvés par l'autorité compétente ; qu'en affirmant que l'URSSAF Languedoc-Roussillon n'avait aucune justification à fournir et que la production de ses statuts approuvés par l'autorité compétente n'était pas nécessaire, le tribunal a violé les articles L. 213-1, L. 216-1, L. 281-4 et L. 281-5 du code de la sécurité sociale ; ALORS d'autre part QUE toute personne morale doit, lorsqu'il est contesté, rapporter la preuve du pouvoir de la personne figurant au procès comme son représentant ; que M. Q... soutenait que l'URSSAF ne justifiait pas de sa représentation en justice par personne habilitée ; que le jugement se borne à exposer que l'union Languedoc-Roussillon était représentée par Mme D... Y..., salariée, munie d'un pouvoir spécial (p. 1) ; qu'en s'abstenant de vérifier si le signataire dudit pouvoir spécial se voyait conférer par les statuts de cet organisme le pouvoir d'agir en justice et la faculté de déléguer ses pouvoirs à un salarié, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 117 du code de procédure civile.
Les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales mentionnées à l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale tiennent de ce texte de nature législative, dès leur création par l'arrêté prévu par l'article D. 213-1 du même code, leur capacité juridique pour agir dans l'exécution des missions qui leur ont été confiées par la loi. Il en résulte que l'URSSAF, créée par un arrêté des ministres chargés de l'économie et des finances et de la sécurité sociale du 7 août 2012, avait qualité pour agir devant la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation partielle M. PIREYRE, président Arrêt n° 1210 F-P+B+I Pourvoi n° M 19-22.649 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 La caisse de mutualité sociale agricole Ardèche-Drôme-Loire, dont le siège est 43 avenue Albert Raimond, BP 80051, 42275 Saint-Priest-en-Jarez cedex, a formé le pourvoi n° M 19-22.649 contre le jugement rendu le 13 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Valence (pôle social), dans le litige l'opposant à M. P... J..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Fischer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de la caisse de mutualité sociale agricole Ardèche-Drôme-Loire, de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de M. J..., et l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Le Fischer, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Valence, le 13 juin 2019), rendu en dernier ressort, la caisse de mutualité sociale agricole Ardèche-Drôme-Loire (la caisse) a réclamé, le 21 juillet 2016, à M. J... (l'assuré), le remboursement d'un indu correspondant au règlement de soins dentaires non pris en charge par l'assurance maladie. Soutenant que l'indu résultait d'une erreur commise par le praticien lors de l'élaboration du devis, l'assuré a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. La caisse ayant, le 7 décembre 2018, décerné une contrainte, l'assuré a formé opposition. Sur le moyen relevé d'office 2. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu les articles 1302 et 1302-1 du code civil, 12 du code de procédure civile, L. 553-2 du code de la sécurité sociale et L. 725-3-1 du code rural et de la pêche maritime, ce dernier dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016, applicable au litige : 3. Selon le dernier de ces textes, seul applicable au recouvrement des indus au titre des régimes de protection sociale des professions agricoles, les organismes de mutualité sociale agricole peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, engager une action en recouvrement dans les conditions prévues aux sixième à neuvième alinéas de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale ainsi qu'aux deux dernières phrases de l'avant-dernier alinéa de ce même article. 4. Pour annuler l'indu au titre des soins litigieux ainsi que la contrainte, le jugement se fonde sur les dispositions de l'article L. 553-2 du code de la sécurité sociale et les articles 1302 et 1302-1 du code civil. 5. En statuant ainsi, alors que le litige portait sur le remboursement de prestations indûment versées au titre de l'assurance maladie d'un régime de protection sociale des professions agricoles, le tribunal a violé les textes susvisés, les deux premiers et le quatrième par fausse application, le dernier par refus d'application. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il ordonne la jonction des affaires inscrites sous les numéros 17/00570 et 19/00109 qui seront appelées sous le seul numéro 17/00570 et en ce qu'il reçoit M. J... en ses recours, le jugement rendu le 13 juin 2019, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Valence ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Grenoble ; Condamne M. J... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Ohl et Vexliard, avocat aux Conseils, pour la mutualité sociale agricole Ardèche-Drôme-Loire Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir infirmé la décision de la commission de recours amiable du 2 décembre 2016 notifiée le 22 mai 2017, annulé l'indu au titre des soins dentaires du 29 septembre 2015, et annulé la contrainte du 7 décembre 2018 d'un montant de 1 673,62 euros, Aux motifs que M. P... J... conteste l'indu qui lui est réclamé au titre de soins dentaires aux motifs que la MSA Ardèche Drôme Loire se fonde sur un échange téléphonique qu'il aurait eu avec son dentiste selon lequel il se serait trompé dans le devis alors que le praticien a attendu que les soins aient commencé pour prétendre avoir commis une erreur ; qu'il précise qu'il a dû souscrire un prêt pour régler les soins et que s'il avait eu connaissance avant de cette erreur, il n'aurait jamais donné suite à ce devis ; que la MSA Ardèche Drôme Loire expose pour sa part que, à la suite d'un échange téléphonique avec le praticien qui lui aurait déclaré avoir avisé M. P... J... de l'erreur dans le devis avant que les soins n'aient commencé, aucun remboursement de soins n'aurait dû intervenir ; que sur ce, il ressort des pièces versées aux débats qu'un devis en date du 28 août 2015, correspondant à quatre implants dentaires (dents 15, 17, 24 et 26), à deux bridges (dents 15, 16 et 17 puis 24, 25 et 28) et à quatre piliers d'implants pour un montant total de 9 369 euros a été transmis à la MSA Ardèche Drôme Loire qui a adressé le 18 septembre 2015 le détail du remboursement auquel M. P... J... pouvait prétendre, à hauteur de 1 573,38 euros (tout étant pris en charge à 70 % sur la base de la sécurité sociale, à l'exclusion des piliers) ; que la MSA Ardèche Drôme Loire ne justifie nullement des termes de l'entretien téléphonique qu'elle aurait eu avec le praticien, pas plus que des éléments de nature à établir que le devis serait erroné, en quoi il serait erroné, et que M. P... J... en aurait été avisé avant de commencer les soins ; que la légèreté blâmable de la part de la MSA Ardèche Drôme Loire en procédant ainsi sur la base d'un échange téléphonique alors qu'aucun devis rectificatif n'a été émis par le dentiste, signé par le patient et validé par la caisse ne saurait fonder un indus de prestations alors qu'il lui incombe de rapporter la preuve de l'indu ; que par conséquent, il sera fait droit à la demande de M. P... J... ; qu'il y a lieu d'annuler l'indu, d'infirmer la décision de la commission de recours amiable et d'annuler la contrainte en date du 7 décembre 2018, dont il n'est pas établi qu'elle soit régulière faute de justifier de l'envoi de la mise en demeure en date du 22 décembre 2016 ; que la MSA Ardèche Drôme Loire sera déboutée de sa demande reconventionnelle (jugement, pp. 4 – 5), 1°/ Alors, d'une part, que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; que ce qui a été payé sans être dû, est sujet à répétition ; que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu ; qu'en mettant à la charge de la Mutualité sociale agricole Ardèche Drôme Loire la preuve de l'indu contesté par M. J..., quand ce dernier ne contestait pas le caractère indu du paiement, par la Caisse, de la somme en litige, mais se bornait à soutenir qu'il n'aurait pas fait pratiquer les soins en cause s'il avait eu connaissance de l'erreur de son praticien à l'origine de ce règlement indu de prestations, le tribunal a méconnu les articles 1235, devenu 1302, 1315, devenu 1353 et 1376, devenu 1302-1 du code civil ; 2°/ Alors, d'autre part, qu'est valable la contrainte qui fait référence à une mise en demeure dont la régularité n'est pas contestée et qui permet à l'assuré de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation ; qu'en annulant la contrainte du 7 décembre 2018, par la considération que sa régularité ne serait pas établie faute de justifier de l'envoi de la mise en demeure en date du 22 décembre 2016, quand la réception de ladite mise en demeure n'était pas contestée par M. J..., le tribunal a méconnu les articles L. 725-3 et R. 725-6 du code rural et de la pêche maritime.
Selon l'article L. 725-3-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016, seul applicable au recouvrement des indus au titre des régimes de protection sociale des professions agricoles, les organismes de mutualité sociale agricole peuvent, pour le recouvrement des sommes indûment versées, engager une action en recouvrement dans les conditions prévues aux sixième à neuvième alinéas de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale ainsi qu'aux deux dernières phrases de l'avant-dernier alinéa de ce même article
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1216 F-P+B+I Pourvoi n° E 19-11.971 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 Le centre hospitalier universitaire de Limoges, dont le siège est 2 avenue Martin Luther King, 87042 Limoges cedex, a formé le pourvoi n° E 19-11.971 contre l'arrêt rendu le 11 décembre 2018 par la cour d'appel de Limoges (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne, dont le siège est 22 avenue Jean Gagnant, 87000 Limoges, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vigneras, conseiller référendaire, les observations de la SARL Corlay, avocat du centre hospitalier universitaire de Limoges, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne, et l'avis de M. Gaillardot, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Vigneras, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 11 décembre 2018), la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Vienne a notifié au centre hospitalier universitaire de Limoges (le centre hospitalier), le 16 septembre 2014, un indu correspondant à la facturation de la part restant à la charge d'assurés ayant bénéficié d'interventions effectuées par le service médical d'urgence et de réanimation (SMUR) du centre hospitalier au cours de la période du 28 juillet 2011 au 16 avril 2014. 2. Le centre hospitalier a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. Le centre hospitalier fait grief à l'arrêt de déclarer l'indu justifié et de le condamner au paiement de celui-ci, alors « que la dotation à la mission d'intérêt général et aide à la contractualisation couvre l'ensemble des frais de fonctionnement des lignes de garde de la structure mobile d'urgence et de réanimation (Smur), en particulier les transports primaires, dans la mesure où ces dépenses de fonctionnement ne sont pas couvertes par les autres financements dont les activités hospitalières tarifées ; que sont tarifées les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie lors des interventions de la structure mobile d'urgence et de réanimation ; que la cour d'appel a constaté qu'en l'espèce « les facturations litigieuses correspondent à la partie laissée à la charge de patients transportés par le Smur et bénéficiaires de la Cmu ou étant étrangers bénéficiaires de la carte européenne d'assurance maladie » ; qu'en considérant cependant que « les transports primaires ( ) sont intégralement financés dans le cadre de la dotation Migac » en ce compris la prise en charge médicale tarifée, la cour d'appel a violé les articles L. 162-22-13 et D. 162-6 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 4 et 5 du décret n° 2009-213 du 23 février 2009. » Réponse de la Cour 4. Selon l'article D. 162-6, 2°, j, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-294 du 13 mars 2009, applicable au litige, peuvent être financées par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC) mentionnée à l'article L. 162-22-13, les dépenses correspondant à l'aide médicale urgente réalisée par les services d'aide médicale urgente et les services mobiles d'urgence et de réanimation respectivement mentionnés aux articles L. 6112-5 et R. 6123-10 du code de la santé publique. 5. Selon l'article D. 162-8 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2005-336 du 8 avril 2005, applicable au litige, un arrêté précise la liste des structures, des programmes et des actions ainsi que des actes et produits pris en charge par la dotation nationale mentionnée à l'article L. 162-22-13, les dotations participant au financement de la mission dans la limite des dépenses y afférentes, à l'exclusion de la part incombant à d'autres financeurs en application de dispositions législatives et réglementaires et de celles déjà supportées par l'assurance maladie en application des dispositions législatives et réglementaires relatives à la prise en charge des soins. 6. Il résulte de la combinaison de ces textes que, sauf disposition législative ou réglementaire contraire, la prise en charge par l'assurance maladie des interventions des services mobiles d'urgence et de réanimation relève exclusivement de la dotation aux missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation. 7. L'arrêt retient que les transports primaires, correspondant aux transports effectués depuis le lieu de prise en charge des patients jusqu'à l'établissement hospitalier, sont intégralement financés dans le cadre de la dotation MIGAC, au contraire des transports secondaires, correspondant aux transports entre établissements de patients nécessitant une surveillance médicale pendant le trajet hors contexte d'urgence, qui font l'objet d'une facturation pour la partie laissée à la charge des patients, en tout cas avant le décret n° 2017-390 du 23 mars 2017 qui prévoit le financement par la dotation MIGAC de l'aide médicale d'urgence quel que soit le lieu de prise en charge du patient. Il relève qu'il n'est pas contesté que les facturations litigieuses correspondent à la partie laissée à la charge de patients transportés par le SMUR et bénéficiaires de la CMU ou étant étrangers bénéficiaires de la carte européenne d'assurance maladie et qu'elles sont toutes relatives à une prise en charge à l'occasion de transports primaires. Il en déduit que la prise en charge par la caisse n'était donc pas fondée et les prestations qu'elle a servies sont donc indues en ce qu'elles relevaient du financement MIGAC. 8. De ces constatations, faisant ressortir que les facturations litigieuses se rapportaient à des interventions du SMUR, de sorte qu'elles étaient financées par la dotation nationale de financement des MIGAC, la cour d'appel a exactement déduit que le centre hospitalier ne pouvait pas prétendre à une prise en charge distincte par l'assurance maladie. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne le centre hospitalier universitaire de Limoges aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Corlay, avocat aux Conseils, pour le centre hospitalier universitaire (CHU) de Limoges Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré l'indu réclamé au Chu de Limoges par la Cpam 87 justifié et a condamné le Chu de Limoges au paiement de la somme de 246 853,73 €. AUX MOTIFS PROPRES QUE « Aux termes de l'article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à l'issue de la Loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011, il est créé, au sein de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie prévu au 4° du I de l'article LO 111-3, une dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements de santé mentionnés aux a, b, c et d de l'article L. 162-22-6. ; Cette dotation participe notamment au financement des engagements relatifs aux missions mentionnées à l'article L. 6112-1 du code de la santé publique à l'exception des formations prises en charge par la région en application des articles L. 4151-9, L. 4244-1 et L. 4383-5 du môme code, à ceux relatifs à la mise en oeuvre des orientations du schéma régional d'organisation des soins, à ceux visant à améliorer la qualité des soins ou à répondre aux priorités nationales ou locales en matière de politique sanitaire, notamment la création de communautés hospitalières de territoire, par dérogation aux dispositions de l'article L. 162-1-7, à ceux relatifs à la mise en oeuvre de la politique nationale en matière d'innovation médicale ou au rôle de recours dévolu à certains établissements. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 162-22-6, cette dotation participe également au financement des activités de soins dispensés à certaines populations spécifiques. Ces engagements sont mentionnés au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens mentionné à l'article L. 6114-2 du code de la santé publique ou, à défaut, dans un engagement contractuel spécifique. Lorsque des établissements de santé ont constitué un groupement de coopération sanitaire pour mettre en oeuvre tout ou partie de leurs missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, la dotation de financement relative aux missions transférées peut être versée directement au groupement de coopération sanitaire par la caisse d'assurance maladie désignée en application de l'article L. 174-2 ou de l'article L. 174-18, selon le cas. L'État détermine, en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, le montant de la dotation nationale et fixe, après avis des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé publics et privés, le montant des dotations régionales et la part des dotations régionales affectée à l'ensemble des missions d'intérêt général ou à une ou plusieurs de ces missions ainsi que les critères d'attribution aux établissements. Un décret, pris après avis des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé, fixe la liste des missions d'intérêt général et des activités de soins dispensés à certaines populations spécifiques susceptibles de donner lieu à l'attribution d'une dotation. Selon l'article D. 162-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à l'espèce issue du décret n° 2009-294 du 13 mars 2009, peuvent être financées par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation mentionnée à l'article L. 162-22-13 les dépenses correspondant aux missions d'intérêt général listées par ce texte dont celles visées au 2°, j), relative à l'aide médicale urgente réalisée par les services d'aide médicale urgente et les services mobiles d'urgence et de réanimation respectivement mentionnés aux articles L. 6112-5 et R. 6123-10 du code de la santé publique. Si les articles 4 et 5 du décret n° 2009-213 du 23 février 2009, relatifs aux objectifs des dépenses d'assurance maladie et portant diverses dispositions financières relatives aux établissements de santé, prévoient les modalités de fixation du tarif des prestations servant de base au calcul de la participation des patients pour les interventions de la structure mobile d'urgence et de réanimation (Smur) par l'agence régionale de santé, il ressort de la réponse ministérielle du 29 novembre 2011 à la question parlementaire n° 70494, que ces tarifs sont applicables pour la facturation inter-établissements et ne sont pas opposables aux patients, l'aide médicale d'urgence, dont le Smur, étant une mission d'intérêt général financée par des dotations allouées à l'établissement de santé de rattachement au titre des missions d'intérêt général et à l'aide à la contractualisation. La réponse ministérielle précise par ailleurs que pour les transports du lieu de prise en charge jusqu'à l'hospitalisation du patient la participation laissée à la charge de l'assuré est supprimée et qu'en ce qui concerne les transports entre deux structures hospitalières, cette participation est maintenue mais réclamée en même temps que le forfait d'hospitalisation de sorte qu'il ne peut y avoir de facturation directe à la personne transportée justifiant de sa qualité d'assuré social ; La circulaire N° DGOS/R5/2013/57 du 19 février 2013 relative au guide de contractualisation des dotations finançant les missions d'intérêt général précise dans la fiche Q relative à l'aide médicale d'urgence que la Mig couvre l'ensemble des frais de fonctionnement des lignes de garde Smur, transport primaire et transport inter hospitalier, que le financement Mig correspond aux dépenses de fonctionnement non couvertes par les autres financements notamment les collectivités territoriales ou les activités hospitalières tarifées et que le montant de la dotation correspond essentiellement aux moyens en ressources humaines mobilisées au titre des activités Smur (ETP médecin, infirmier anesthésiste, ambulancier) auquel s'additionnent le cas échéant certains frais de fonctionnement (amortissements et consommables), le calcul de ces frais pouvant se baser sur l'indication annuelle des dépenses spécifiques engagées par chaque centre. Il convient de déduire de ce qui précède, que les transports primaires, correspondant aux transports effectués depuis le lieu de prise en charge des patients jusqu'à l'établissement hospitalier, sont intégralement financés dans le cadre de la dotation Migac, au contraire des transports secondaires, correspondant aux transports entre établissements de patients nécessitant une surveillance médicale pendant le trajet hors contexte d'urgence, qui font l'objet d'une facturation pour la partie laissée à la charge des patients, en tout cas avant le décret n° 2017-390 du 23 mars 2017 qui prévoit le financement par la dotation Migac de l'aide médicale d'urgence quel que soit le lieu de prise en charge du patient. En l'espèce, il n'est pas contesté que les facturations litigieuses correspondent à la partie laissée à la charge de patients transportés par le Smur et bénéficiaires de la Cmu ou étant étrangers bénéficiaires de la carte européenne d'assurance maladie et qu'elles sont toutes relatives à une prise en charge à l'occasion de transports primaires. La prise en charge par la Cpam de la Haute Vienne n'était donc pas fondée et les prestations qu'elle a servies sont donc indues en ce qu'elles relevaient du financement Migac. Par ailleurs, sur le montant de l'indu, si l'annulation de quatre titres de recette n'est pas discutée, la preuve n'est pas rapportée du remboursement à la caisse par le Chu des sommes qui en découlent, de sorte qu'il n'y a pas lieu de la déduire du montant total de l'indu.. Le jugement doit donc être confirmé. » ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Les dispositions de l'article L. 162-22-13 du Code de la sécurité sociale, dans leur version applicable aux faits, édictent qu'au sein de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie prévu au 4e du I de l'article LO 111-3, une dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements de santé mentionnés aux a, b, c et d de l'article L. 162-22-6 est créée et renvoie compétence au pouvoir réglementaire pour fixer notamment la liste des missions d'intérêt général susceptibles de donner lieu à attribution d'une dotation. Ainsi l'article D. 162-6 du Code de la sécurité sociale permet, sans pour autant l'imposer, le financement par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) mentionnée à l'article L. 162-22-13, de dépenses correspondant aux missions d'intérêt général telle que l'aide médicale urgente, mission de santé publique, réalisée par les services d'aide médicale urgente et les services mobiles d'urgence et de réanimation respectivement mentionnés aux articles L. 6112-5 et R. 6123-10 du code de la santé publique ; quant au périmètre de financement de la Mig Smur, la circulaire n° DHOS/F4 n° 2009-319 du 15 décembre 2009 prévoit que « les transports primaires correspondent aux transports effectués du lieu de prise en charge des patients jusqu'à l'établissement de santé ; ils sont financés dans le cadre de la dotation missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) quel que soit le lieu de prise en charge médicale du patient (voie publique, domicile ) dès lors qu'il y a sortie du Smur » La circulaire N° DGOS/R5/2013/57 du 19 février 2013 précise que « la Mig couvre l'ensemble des frais de fonctionnement des lignes de garde Smur, transports primaires et transports inter-hospitaliers. Le financement Mig correspond aux dépenses de fonctionnement non couvertes par les autres financements notamment les collectivités territoriales ou les activités hospitalières tarifées. La mutualisation de moyens entre Smu et Samu et services d'urgences ne doit pas engendrer de double financement ». En l'espèce, il n'est pas contesté que le litige concerne la prise en charge de 345 transports primaires effectués par le Smur. En revanche le Chu soutient, par applications des articles 4 et 5 du décret du 23 février 2009 relatif aux objectifs des dépenses d'assurance maladie, que l'indu litigieux concerne uniquement la part complémentaire ou tickets modérateurs qui participent au coût du transport Smur et qui relèvent du champ des activités hospitalières tarifées. Toutefois, force est de constater que le Chu ne justifie pas de ce que les dépenses litigieuses se limiteraient à la prise en charge de patients bénéficiaires de la Cmu et aux tickets modérateurs des complémentaires santé, ce que la Cpam conteste formellement et alors que la notification d'indu du 16 septembre 2014 fait état de transports primaires et sans autre précision et qu'il ressort du tableau joint à la décision de la commission de recours amiable du 09 décembre 2014 versée aux débats que certains des transports contestés ont fait l'objet d'un remboursement intégral. Dans ces conditions, et dès lors que l'aide médicale d'urgence dont le Smur est une des modalités constitue une mission de service public, le financement des transports primaires litigieux dépend des dotations allouées à l'établissement de santé de rattachement au titre des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation. Par suite, l'indu réclamé par la Cpam est justifié et le Chu de Limoges sera condamné au paiement de la somme de 246.853,73 € » ALORS QUE la dotation à la mission d'intérêt général et aide à la contractualisation couvre l'ensemble des frais de fonctionnement des lignes de garde de la structure mobile d'urgence et de réanimation (Smur), en particulier les transports primaires, dans la mesure où ces dépenses de fonctionnement ne sont pas couvertes par les autres financements dont les activités hospitalières tarifées ; que sont tarifées les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie lors des interventions de la structure mobile d'urgence et de réanimation ; que la cour d'appel a constaté qu'en l'espèce « les facturations litigieuses correspondent à la partie laissée à la charge de patients transportés par le Smur et bénéficiaires de la Cmu ou étant étrangers bénéficiaires de la carte européenne d'assurance maladie » ; qu'en considérant cependant que « les transports primaires ( ) sont intégralement financés dans le cadre de la dotation Migac » en ce compris la prise en charge médicale tarifée, la Cour d'appel a violé les l'article L. 162-22-13 et D. 162-6 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 4 et 5 du décret n° 2009-213 du 23 février 2009.
Il résulte de la combinaison des articles D. 162-6, 2°, j, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-294 du 13 mars 2009, et D. 162-8 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2005-336 du 8 avril 2005, que, sauf disposition législative ou réglementaire contraire, la prise en charge par l'assurance maladie des interventions des services mobiles d'urgence et de réanimation (SMUR) relève exclusivement de la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC) mentionnée à l'article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1221 F-P+B+I Pourvoi n° H 19-15.239 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 La Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, dont le siège est 9 rue de Vienne, 75403 Paris cedex 08, a formé le pourvoi n° H 19-15.239 contre l'arrêt rendu le 19 février 2019 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. V... N..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, et l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 19 février 2019) et les productions, la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (la caisse) a adressé à M. N... (le cotisant) une mise en demeure datée du 10 septembre 2010 afférente aux cotisations sociales et majorations de retard dues au titre des années 2007 à 2009, puis lui a décerné, le 16 décembre 2010, une contrainte signifiée le 1er octobre 2015, à laquelle le cotisant a formé opposition. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 2. La caisse fait grief à l'arrêt d'annuler la contrainte, alors « que dans sa version applicable en l'espèce, l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale enfermait l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard dans un délai de cinq ans « à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus aux articles L. 244-2 et L. 244-3 » ; qu'en l'espèce, M. N... avait, par mise en demeure du 10 septembre 2010, été invité à régulariser sa situation dans un délai de trente jours, c'est-à-dire avant le 10 octobre 2010 ; que le délai de cinq années dont disposait la caisse pour faire signifier sa contrainte avait donc commencé à courir le 11 octobre 2010 et n'avait pas fini de courir le 1er octobre 2015, date à laquelle l'huissier de justice a signifié à l'assuré la contrainte émise le 16 décembre 2010 ; qu'en retenant, pour annuler cette contrainte qu'elle avait été signifiée plus de cinq ans après l'envoi de la mise en demeure la cour d'appel a derechef violé l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale, rendu applicable au recouvrement des cotisations dues au titre de l'organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales par l'article L. 623-1, dans sa rédaction applicable au litige : 3. La prescription quinquennale de l'action en recouvrement des cotisations prévue par ce texte ne commence à courir qu'à l'expiration du délai imparti par la mise en demeure au redevable des cotisations pour régulariser sa situation. 4. Pour annuler la contrainte en raison de la prescription de l'action en recouvrement de la caisse, l'arrêt retient que la contrainte a été signifiée le 1er octobre 2015, soit plus de cinq ans après la mise en demeure du 10 septembre 2010. 5. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que la contrainte avait été signifiée le 1er octobre 2015 dans le délai de cinq ans suivant l'expiration du délai d'un mois imparti par la mise en demeure du 10 septembre 2010, de sorte que l'action de la caisse n'était pas prescrite, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ; Condamne M. N... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. N... à payer à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (CIPAV) Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la contrainte délivrée à monsieur V... N... par la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse (CIPAV), signifiée le 1er octobre 2015, pour la somme de 4168,41 euros représentant les cotisations, majorations de retard dues pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 et condamné la CIPAV à payer à monsieur N... la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la prescription : Selon l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale applicable au moment des faits, l'action civile en recouvrement des cotisations se prescrit par cinq ans à compter du délai imparti pour les mises en demeure. En l'espèce, la mise en demeure est en date du 10 septembre 2010 et la contrainte a été signifiée le 1er octobre 2015 soit plus de cinq ans après la mise en demeure. L'action de la CIPAV est manifestement prescrite. Sur l'article 700 du code de procédure civile : L'équité commande d'allouer à M V... N... une somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. » ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« Il est constant que monsieur N... V... a formé opposition à une contrainte en date du 16 décembre 2010, délivrée par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (CIPAV), signifiée le 1er octobre 2015, pour la somme de 4168,41 euros. La contrainte porte sur des cotisations relatives aux années 2008 et 2009. La CIPAV produit le décompte des cotisations, mais ne verse aux débats aucun document démontrant le montant de l'assiette de calcul. La contrainte a été signifiée près de cinq ans après son émission. Dès lors, en l'absence de pièce, la vérification du montant de la créance est impossible et il convient d'annuler la contrainte. » ALORS DE PREMIERE PART QUE dans sa version applicable en l'espèce, l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale enfermait l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard dans un délai de cinq ans « à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus aux articles L. 244-2 et L. 244-3 » ; qu'en l'espèce, Monsieur N... avait, par mise en demeure du 10 septembre 2010, été invité à régulariser sa situation dans un délai de trente jours, c'est-à-dire avant le 10 octobre 2010 ; que le délai de cinq années dont disposait la CIPAV pour faire signifier sa contrainte avait donc commencé à courir le 11 octobre 2010 et n'avait donc pas fini de courir le 1er octobre 2015, date à laquelle l'huissier de justice a signifié à l'assuré la contrainte émise le 16 décembre 2010 ; qu'en retenant, pour annuler cette contrainte qu'elle avait été signifiée « cinq ans après son émission », la cour d'appel a violé l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale ; ALORS DE DEUXIEME PART QUE dans sa version applicable en l'espèce, l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale enfermait l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard dans un délai de cinq ans « à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus aux articles L. 244-2 et L. 244-3 » ; qu'en l'espèce, Monsieur N... avait, par mise en demeure du 10 septembre 2010, été invité à régulariser sa situation dans un délai de trente jours, c'est-à-dire avant le 10 octobre 2010 ; que le délai de cinq années dont disposait la CIPAV pour faire signifier sa contrainte avait donc commencé à courir le 11 octobre 2010 et n'avait pas fini de courir le 1er octobre 2015, date à laquelle l'huissier de justice a signifié à l'assuré la contrainte émise le 16 décembre 2010 ; qu'en retenant, pour annuler cette contrainte qu'elle avait été signifiée plus de cinq ans après l'envoi de la mise en demeure la cour d'appel a derechef violé l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale ; ALORS DE TROISIEME ET DERNIERE PART QUE la charge de la preuve du bien-fondé d'une opposition à contrainte pèse sur l'opposant à contrainte ; qu'en retenant, pour annuler la contrainte que la CIPAV avait fait délivrer à Monsieur N..., qu'« en l'absence de pièce, la vérification du montant de la créance est impossible », la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil.
La prescription quinquennale de l'action en recouvrement des cotisations prévue par l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale, rendu applicable au recouvrement des cotisations dues au titre de l'organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales par l'article L. 623-1, dans sa rédaction applicable au litige, ne commence à courir qu'à l'expiration du délai imparti pour la mise en demeure au redevable des cotisations pour régulariser sa situation
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 1224 F-P+B+I Pourvoi n° H 19-21.495 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. T.... Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 20 juin 2019. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 M. E... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° H 19-21.495 contre le jugement rendu le 21 novembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulouse, dans le litige l'opposant à la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Atlantiques, dont le siège est [...] , venant aux droits de la caisse d'allocations familiales du Pays Basques et du Seignanx, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. T..., de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Atlantiques, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulouse, 21 novembre 2018) rendu en dernier ressort, par courrier du 18 janvier 2016, la caisse d'allocations familiales du Pays Basque et du Seignanx, devenue la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Atlantique (la caisse), a notifié à M. T... (l'allocataire) une pénalité de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale. 2. A la suite d'un recours gracieux auprès du directeur de la caisse, l'allocataire a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. L'allocataire fait grief au jugement de le débouter de son recours, alors « que la décision infligeant une pénalité en raison de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations faites pour le service de prestations doit être précédée d'un courrier invitant l'intéressé à présenter ses observations sur la sanction envisagée et doit être motivée ; que M. T... faisait valoir qu'il n'avait jamais reçu la lettre du 23 septembre 2015 à laquelle se référait la décision du 18 janvier 2016, laquelle ne comportait aucun motif et demandait l'annulation de cette décision lui infligeant une pénalité de 1 500 euros pour fraude ; qu'en statuant comme il l'a fait pour passer outre aux irrégularités formelles de la décision du 18 janvier 2016, cependant qu'un débat contradictoire et la motivation de la décision constituaient des garanties essentielles dont la méconnaissance devait être sanctionnée par la nullité de la décision infligeant la pénalité, le tribunal a violé l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 114-17, I du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, applicable à la date de la notification de la pénalité financière en litige : 4. Il appartient à la juridiction du contentieux de la sécurité sociale de se prononcer sur le moyen, soulevé devant elle, tiré d'une irrégularité de la procédure suivie pour l'application des pénalités prévues par ce texte. 5. Pour débouter l'allocataire de son recours, ayant relevé qu'il appartient à la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale de se prononcer sur le litige dont elle est saisie, peu important les éventuelles irrégularités affectant les décisions de l'organisme, le jugement retient que l'argumentation de l'allocataire est inopérante dès lors qu'il a la possibilité de contester la pénalité dans son principe et son montant devant le tribunal. 6. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que l'allocataire contestait la régularité de la procédure, le tribunal a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 novembre 2018, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulouse ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Toulouse. ; Condamne la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Atlantiques aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. T... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté monsieur E... T... de son recours en annulation de la décision du directeur de la CAF du Pays-Basque et du Seignanx du 18 janvier 2016, d'avoir validé la pénalité litigieuse, d'avoir condamné monsieur T... à payer, en deniers ou quittances, à la CAF des Pyrénées-Atlantiques, la somme de 1.500 euros, d'avoir condamné monsieur T... au paiement des frais de justice exposés ou à engager par la Caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Atlantiques pour parvenir à l'exécution du présent jugement ; Aux motifs que, sur la motivation de la décision du 18 janvier 2016, il appartient à la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale de se prononcer sur le litige dont elle est saisie, peu important les éventuelles irrégularités affectant les décisions de l'organisme ; l'argumentation de M. T... est donc inopérante dès lors qu'il a la possibilité de contester la pénalité dans son principe et son montant devant le tribunal ; 1°) Alors que la décision infligeant une pénalité en raison de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations faites pour le service de prestations doit être précédée d'un courrier invitant l'intéressé à présenter ses observations sur la sanction envisagée et doit être motivée ; que monsieur T... faisait valoir qu'il n'avait jamais reçu la lettre du 23 septembre 2015 à laquelle se référait la décision du 18 janvier 2016, laquelle ne comportait aucun motif et demandait l'annulation de cette décision lui infligeant une pénalité de 1.500 euros pour fraude ; qu'en statuant comme il l'a fait pour passer outre aux irrégularités formelles de la décision du 18 janvier 2016'', cependant qu'un débat contradictoire et la motivation de la décision constituaient des garanties essentielles dont la méconnaissance devait être sanctionnée par la nullité de la décision infligeant la pénalité, le tribunal a violé l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale ; 2°) Alors qu'à supposer que le tribunal puisse substituer sa décision à celle de la Caisse d'allocations familiales, il devait alors appliquer les dispositions de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, applicable au 1er janvier 2018, qui donnent au directeur de l'organisme le pouvoir de prononcer soit une pénalité administrative soit un simple avertissement ; qu'en citant l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, dans sa réaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, qui visait uniquement la pénalité, sans se référer à l'avertissement, le tribunal n'a pas exercé l'option qui lui était offerte et a violé l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté monsieur E... T... de son recours en annulation de la décision du directeur de la CAF du Pays-Basque et du Seignanx du 18 janvier 2016, d'avoir validé la pénalité litigieuse, d'avoir condamné monsieur T... à payer, en deniers ou quittances, à la CAF des Pyrénées-Atlantiques, la somme de 1.500 euros, d'avoir condamné monsieur T... au paiement des frais de justice exposés ou à engager par la CAF des Pyrénées-Atlantiques pour parvenir à l'exécution du présent jugement ; Aux motifs que, sur la pénalité, l'article L.114-17 du code de la sécurité sociale prévoit que peuvent faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme chargé de la gestion des prestations familiales, au titre de toute prestation servie par l'organisme concerné : 1° l'inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations ; 2° L'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant le service des prestations ; 3° l'exercice d'un travail dissimulé, constaté dans les conditions prévues à l'article L. 114-15, par le bénéficiaire de prestations versées sous conditions de ressources ou de cessation d'activité ; 4° les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir le versement indu de prestations servies par un organisme mentionné au premier alinéa, même sans en être le bénéficiaire ; 5° les actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle exercées, en application de l'article L. 114-10 du présent code et de l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, par les agents mentionnés au présent article, visant à refuser l'accès à une information formellement sollicitée, à ne pas répondre ou à apporter une réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d'information, d'accès à une information, ou à une convocation, émanant des organismes chargés de la gestion des prestations familiales et des prestations d'assurance vieillesse, dès lors que la demande est nécessaire à l'exercice du contrôle ou de l'enquête ; ainsi, le caractère frauduleux d'une omission dans les déclarations de l'allocataire n'est pas exigé pour notifier une pénalité ; en l'espèce, M. T... a effectué une demande de RSA le 4 juin 2013 ; il déclarait à cette occasion être logé gratuitement chez une amie, n'avoir aucune activité professionnelle depuis 2005 et n'avoir perçu aucune ressource durant les mois de mars, avril et mai 2013 ; le formulaire de demande permettait de renseigner la rubrique « autre ressources : location de biens immobiliers, revenus de capitaux placés, etc... » ; il ne cochait pas non plus la case indiquant « vous êtes propriétaire d'un terrain, d'une maison ou d'un logement qui n'est pas loué, autre que votre résidence principale » ; le formulaire indiquait de joindre le derniers avis de taxe d'habitation ou de taxe foncière pour les propriétaires d'un terrain ou logement non loué autre que l'habitation principale ; le 3 septembre 2013, M. T... remplissait en ligne une déclaration de ressources pour les mois de juin, juillet et août 2013 ; il indiquait à nouveau n'avoir perçu aucune ressource, n'avoir aucun argent placé ni aucun local ou terrain non loué ; M. T... réitérait ces mêmes déclarations trimestriellement jusqu'au 5 mars 2015 ; or, il n'est pas contesté que M. T... est en réalité propriétaire de quatre biens immobiliers ; il importe peu que deux de ces biens soient en indivision avec son ex-épouse, laquelle bénéficie de leur entière gestion, dès lors que M. T... a bien omis de déclarer qu'il était propriétaire d'un local ou d'un logement non loué ; par ailleurs, il est également constant que M. T... est détenteur de trois contrats d'assurance-vie, dont deux depuis le 1er avril 1992, et dont le capital atteint la somme de 740.345 euros ; ainsi, la pénalité est justifiée donc son principe et dans son montant ; elle sera validée et M. T... sera condamné à payer à ce titre la somme de 1 500 euros à la CAF des Pyrénées-Atlantiques ; 1°) Alors que le juge du contentieux général de la sécurité sociale, lorsqu'il est saisi d'un recours contre une pénalité financière doit, tout d'abord vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à l'allocataire et ensuite apprécier l'adéquation du montant de la pénalité à l'importance de l'infraction commise ; que si les termes de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, ne prévoit pas l'élément intentionnel comme un élément constitutif de la fraude, il doit à tout le moins être pris en compte pour la fixation du quantum de la sanction ; que monsieur T... faisait valoir que les biens immobiliers étaient en propriété indivise avec son épouse qui en avait obtenu la jouissance exclusive dans le cadre de la procédure de divorce, de sorte qu'il n'en tirait aucun profit, que les contrats d'assurance-vie avaient tous été rachetés pour être affectés au paiement partiel de ses dettes qui étaient d'un montant supérieur, que sa situation de surendettement avait été reconnue et la procédure déclarée recevable et qu'un jugement du tribunal administratif de Pau avait annulé la décision du président du conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques mettant fin à ses droits de percevoir le RSA, décision fondée précisément sur les biens immobiliers non déclarés, en considérant que ceux-ci ne pouvaient pas être pris en compte comme générant des revenus pour l'intéressé ; que le tribunal s'est borné à énoncer, pour retenir que la pénalité de 1.500 euros était justifiée dans son principe et son montant, que monsieur T... avait omis de déclarer qu'il était propriétaire de certains biens immobiliers et détenteurs de contrats d'assurance-vie, sans tenir compte des circonstances de l'espèce établissant que monsieur T... était de bonne foi, sa déclaration n'ayant eu ni pour objet ni pour effet d'obtenir une prestation indue, dès lors qu'il ne tirait aucune ressource ni avantage en nature des éléments omis qui étaient indisponibles, ce qui justifiait à tout le moins une diminution du quantum de la sanction ; qu'en statuant ainsi, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 § 1er de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale ; 2°) Alors qu'à supposer que le tribunal puisse substituer sa décision à celle de la CAF, il devait alors appliquer l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018, applicable le 12 août 2018, qui exclut le prononcé d'une sanction pécuniaire lorsque les manquements ont été commis de bonne foi ; qu'en énonçant que le caractère frauduleux d'une omission dans les déclarations de l'allocataire n'était pas exigé pour notifier une pénalité, cependant que l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018, exclut le prononcé d'une pénalité financière à l'égard de manquements commis sans intention de frauder, par erreur ou oubli, le tribunal a violé ce texte.
Il appartient à la juridiction du contentieux de la sécurité sociale de se prononcer sur le moyen, soulevé devant elle, tiré d'une irrégularité de la procédure suivie pour l'application des pénalités prévues par l'article L. 114-17, I, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015
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CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 12 novembre 2020 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 1230 F-P+B+I Pourvoi n° K 19-17.749 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020 La caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° K 19-17.749 contre le jugement rendu le 4 avril 2019 par le tribunal de grande instance de Toulon (pôle social), dans le litige l'opposant à M. L... X..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme, et l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Toulon, 4 avril 2019), rendu en dernier ressort, à la suite d'un contrôle, M. X... (l'assuré), bénéficiaire de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c), s'est vu notifier par la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme (la caisse) un indu correspondant à des prestations versées pour la période du 1er décembre 2015 au 22 juin 2016, ainsi qu'une pénalité financière d'un montant de 3 500 euros. 2. L'assuré a contesté la pénalité devant une juridiction de sécurité sociale. Examen des moyens Sur le premier moyen, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le second moyen Enoncé du moyen 4. La caisse fait grief au jugement d'annuler l'indu et de la débouter de sa demande en paiement, alors : « 1°/ que la notion de faux est caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat de déclaration d'accident du travail ou de trajet, sous forme écrite ou électronique, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de permettre l'obtention de l'avantage ou de la prestation en cause ; d'où il suit qu'en affirmant que la seule omission de déclarer des ressources n'est pas constitutive d'une fraude, le tribunal de grande instance viole les articles L. 114-17-1 et R. 147-11 du code de la sécurité sociale ; 2°/ que la notion de faux est caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat de déclaration d'accident du travail ou de trajet, sous forme écrite ou électronique, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de permettre l'obtention de l'avantage ou de la prestation en cause ; que ne tire dès lors pas les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles L. 114-17-1 et R. 147-11 du code de la sécurité sociale, le tribunal de grande instance qui écarte la fraude de M. X... après avoir pourtant constaté que celui-ci ne contestait pas avoir commis une fausse déclaration de ressources par l'omission de ressources sur ladite déclaration que le contrôle de ses comptes bancaires avait fait apparaître. » Réponse de la Cour 5. Selon l'article L. 114-17-1, I, 1°, du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 applicable au litige, le directeur d'un organisme local d'assurance maladie peut infliger une pénalité financière aux bénéficiaires des régimes obligatoires des assurances maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles, de la protection complémentaire en matière de santé mentionnée à l'article L. 861-1, de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé mentionnée à l'article L. 863-1 ou de l'aide médicale de l'Etat mentionnée au premier alinéa de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles. Selon les V et VII du même texte, la pénalité doit, sauf cas de fraude établie dans des cas définis par voie réglementaire, être prononcée après l'avis de la commission composée et constituée au sein du conseil ou du conseil d'administration de l'organisme local d'assurance maladie (la commission des pénalités). 6. Selon l'article R. 147-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, peuvent faire l'objet de pénalités les personnes susmentionnées notamment lorsque, dans le but d'obtenir, de faire obtenir ou de majorer un droit aux prestations d'assurance maladie, d'invalidité, d'accident de travail, de maternité, de maladie professionnelle ou de décès ou un droit à la protection complémentaire en matière de santé, à l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé ou à l'aide médicale de l'Etat, elles fournissent de fausses déclarations relatives à l'état civil, la résidence, la qualité d'assuré ou d'ayant droit, les ressources. 7. Selon l'article R. 147-11, 1°, du même code, dans sa rédaction applicable au litige, sont qualifiés de fraude les faits commis, dans le but d'obtenir le bénéfice d'une prestation injustifiée au préjudice d'un organisme d'assurance maladie, ou au préjudice d'un organisme mentionné à l'article L. 861-4 s'agissant de la protection complémentaire en matière de santé, lorsqu'a été constaté l'établissement ou l'usage de faux, la notion de faux étant caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat, déclaration d'accident du travail ou de trajet, sous forme écrite ou électronique. 8. Il résulte de la combinaison de ces textes que, pour être constitutive d'une fraude au sens du troisième, la fausse déclaration mentionnée au deuxième doit être précédée, accompagnée ou suivie de la production d'un document faux ou falsifié aux fins d'établir la preuve de faits corroborant la fausse déclaration. 9. Ayant constaté que l'assuré ne conteste pas que le contrôle de ses comptes bancaires fait apparaître une fausse déclaration de ses ressources à l'origine de l'ouverture d'un droit à la CMU-c à compter du 1er décembre 2015, le jugement retient que la seule omission de déclarer des ressources n'est pas constitutive d'une fraude. Il en déduit que la procédure, hors cas de fraude, prévoyant l'avis préalable de la commission des pénalités de l'organisme n'a pas été respecté, de sorte que s'agissant d'une formalité substantielle, dont l'objet est d'apprécier les fautes et pondérer le montant, la pénalité financière doit être annulée. 10. De ces constatations, faisant ressortir que la fausse déclaration n'avait été précédée, accompagnée ou suivie de l'établissement ou de l'usage d'aucun document faux ou falsifié, le tribunal en a exactement déduit que les faits commis par l'assuré n'étaient pas constitutifs d'une fraude au sens de l'article R. 147-11 du code de la sécurité sociale, de sorte que l'avis de la commission des pénalités aurait dû être préalablement recueilli. 11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Drôme MOYEN D'ANNULATION Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR prononcé la nullité de la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme en date du 12 octobre 2016 et de l'AVOIR déboutée de sa demande en paiement au titre d'une pénalité financière ; EN MENTIONNANT QUE le Pôle social du tribunal de grande instance était réuni en audience publique au Palais de justice de Toulon le jeudi 14 février 2019 : COMPOSITION DU TRIBUNAL : « Monsieur M..., Président du Pôle Social, M. T..., Greffier Madame G..., membre assesseur représentant les travailleurs salariés du régime général », ET QUE « le Tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, a statué en ces termes ». ET QUE « le Tribunal, statuant seul en l'absence de l'un des Conseillers, après débats en audience publique, par jugement mis à la disposition des parties » ; ALORS QU' en l'état de telles mentions, d'où il résulte que, lors de l'audience, le tribunal était seulement composé de deux magistrats, mais qu'il a statué seul en l'absence de l'un des conseillers, ce dont il résultait que le tribunal aurait été composé d'un président et de plusieurs conseillers, ce qui ne permet pas en toute hypothèse de savoir qui a délibéré de l'affaire et si le principe de l'imparité a été respecté, si bien que le jugement ne satisfait pas aux exigences des articles 447 et 454 du code de procédure civile et encourt l'annulation en application de l'article 458, al. 1er du même code. MOYEN DE CASSATION Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR prononcé la nullité de la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme en date du 12 octobre 2016 et de l'AVOIR déboutée de sa demande en paiement au titre d'une pénalité financière. AUX MOTIFS QUE Monsieur L... X... ne conteste pas que le contrôle de ses comptes bancaires fait apparaître une fausse déclaration de ses ressources à l'origine de l'ouverture d'un droit à la Couverture Maladie Complémentaire à compter du 1er décembre 2015 ; que cette omission dans la déclaration de ressources est passible de sanctions financières par application des articles L. 114-17-1, R 147-6 et R 147-6-1 du code de la sécurité sociale par l'organisme d'assurance maladie ; qu'il appartient à la juridiction saisie d'un recours contre la pénalité de vérifier la régularité de la procédure suivie pour la prononcer ; que l'article R 147-11 du code de la sécurité sociale qualifie la fraude au sens de l'article L. 114-17-1 VII ; qu'en l'espèce la seule omission de déclarer des ressources n'est donc pas constitutive d'une fraude et la procédure prévue aux articles L. 147-17-1 et R 147-2 du code de la sécurité sociale prévoyant une décision du Directeur après l'avis de la commission des pénalités de l'organisme n'a pas été respecté ; que cette formalité substantielle consistant à prévoir préalablement à une sanction un avis consultatif pour apprécier les fautes et pondérer les pénalités financières fait grief ; que dès lors la décision de la Cpam de la Drôme en date du 12 octobre 2016 notifiant à Monsieur L... X... une pénalité financière doit être annulée ; qu'il convient dès lors de débouter la Cpam de la Drôme de sa demande en paiement au titre d'une pénalité financière qui relève d'une décision préalable de l'organisme de sécurité sociale ; ALORS DE PREMIERE PART QUE la notion de faux est caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat de déclaration d'accident du travail ou de trajet, sous forme écrite ou électronique, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de permettre l'obtention de l'avantage ou de la prestation en cause ; d'où il suit qu'en affirmant que la seule omission de déclarer des ressources n'est pas constitutive d'une fraude, le tribunal de grande instance viole les articles L. 114-17-1 et R 147-11 du code de la sécurité sociale ; ALORS DE SECONDE PART QUE la notion de faux est caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat de déclaration d'accident du travail ou de trajet, sous forme écrite ou électronique, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de permettre l'obtention de l'avantage ou de la prestation en cause ; que ne tire dès lors pas les conséquences légales de ses constatations en violation des articles L. 114-17-1 et R. 147-11 du code de la sécurité sociale, le tribunal de grande instance qui écarte la fraude de M. X... après avoir pourtant constaté que celui-ci ne contestait pas avoir commis une fausse déclaration de ressources par l'omission de ressources sur ladite déclaration que le contrôle de ses comptes bancaires avait fait apparaître.
Selon l'article L. 114-17-1, I, 1°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-727 du 10 août 2018, le directeur d'un organisme local d'assurance maladie peut infliger une pénalité financière aux bénéficiaires des régimes obligatoires des assurances maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles, de la protection complémentaire en matière de santé mentionnée à l'article L. 861-1, de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé mentionnée à l'article L. 863-1 ou de l'aide médicale de l'Etat mentionnée au premier alinéa de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles. Selon les V et VII du même texte, la pénalité doit, sauf cas de fraude établie dans les cas définis par voie réglementaire, être prononcée après l'avis de la commission composée et constituée au sein du conseil ou du conseil d'administration de l'organisme local d'assurance maladie. Selon l'article R. 147-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, peuvent faire l'objet de pénalités les personnes susmentionnées notamment lorsque, dans le but d'obtenir ou de majorer un droit aux prestations d'assurance maladie, d'invalidité, d'accident de travail, de maternité, de maladie professionnelle ou de décès ou un droit à la protection complémentaire en matière de santé, à l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé ou à l'aide médicale de l'Etat, elles fournissent de fausses déclarations relatives à l'état civil, la résidence, la qualité d'assuré ou d'ayant droit, les ressources. Selon l'article R. 147-11, 1°, du même code, dans sa rédaction applicable au litige, sont qualifiés de fraude les faits commis dans le but d'obtenir le bénéfice d'une prestation injustifiée au préjudice d'un organisme d'assurance maladie, ou au préjudice d'un organisme mentionné à l'article L. 861-4 s'agissant de la protection complémentaire en matière de santé, lorsqu'a été constaté l'établissement ou l'usage de faux, la notion de faux étant caractérisée par toute altération de la vérité sur toute pièce justificative, ordonnance, feuille de soins ou autre support de facturation, attestation ou certificat, déclaration d'accident du travail ou de trajet, sous forme écrite ou électronique. Il résulte de la combinaison de ces textes que, pour être constitutive d'une fraude au sens de l'article L. 114-17-1, I, 1°, la fausse déclaration mentionnée à l'article R. 147-6 doit être précédée, accompagnée ou suivie de la production d'un document faux ou falsifié aux fins d'établir la preuve de faits corroborant la fausse déclaration